:
Madame la présidente, je tiens à préciser que c'est vraiment un problème d'interprétation, je pense, car je n'ai pas dit qu'ils jouaient les victimes.
Madame la présidente, si nous voulions la preuve que ce projet de loi n'est plus ce qu'il était au départ, c'est-à-dire un projet de loi émanant d'un député, nous l'avons eue hier soir. Nous avons en effet eu la confirmation qu'il s'agit maintenant d'un projet de loi émanant du gouvernement. La prolongation de 30 jours du délai prescrit afin de pouvoir assurer l'élargissement du projet de loi nous démontre la même chose.
Faisons savoir à ceux qui nous écoutent que le ministre de la Citoyenneté, de l’Immigration et du Multiculturalisme peut déposer lui-même un projet de loi émanant du gouvernement. Il aura alors toute la latitude nécessaire pour y faire figurer ses propres amendements qu'il souhaite voir apporter au projet de loi et, en l'occurrence, souhaite imposer à ce comité.
Avant de reprendre les propos que j'ai laissés en suspens la nuit dernière ou, devrais-je plutôt dire, très tôt ce matin, je voudrais insister de nouveau sur l'importance du décorum et du respect mutuel auxquels nous sommes tenus en tant que parlementaires.
Il a été question également, à la suite de cette demande concernant le prolongement et les amendements souscrits dans le cadre du projet de loi , d'une question de privilège. Je voudrais faire part au comité de cette demande de privilège et de la décision prise par le Président de la Chambre en réponse à cette demande:
Monsieur le Président, je me lève pour intervenir sur la question de privilège, qui n'en est en fait pas une, faite par mon collègue de Toronto-Centre. La question à l'étude porte sur le huitième rapport du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration, qui demande à la Chambre:
[...] d’être habilité dans le cadre de son étude du projet de loi C-425, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté (valorisation des Forces armées canadiennes) à élargir la portée dudit projet de loi de manière à ce qu’il ne s’applique pas uniquement aux Forces armées canadiennes.
Évidemment, il a fallu mettre en avant une question de privilège afin de voir si ce huitième rapport pouvait prétendre à un élargissement du projet de loi .
Dès le départ, le comité a été saisi du projet de loi , qui émanait d'un député — il ne sera jamais superflu de vous le rappeler. Voilà qu'avec cette demande concernant l'élargissement du projet de loi, nous nous retrouvons à discuter de cette procédure.
Je désire vous présenter les raisons pour lesquelles cette demande devrait être jugée irrecevable. Cependant, avant de vous faire part de mes arguments, j'aimerais rectifier le tir au sujet de ce qui a été dit jusqu'à présent par mes collègues.
Lorsque l'honorable leader du gouvernement à la Chambre des communes, le député de York—Simcoe, a pris la parole le 25 avril dernier, il a induit la Chambre en erreur en insinuant que le huitième rapport du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration demandait ce qui suit à la Chambre:
[...] de discuter de la question pendant un certain nombre d’heures pour décider si l’amendement s’inscrit ou non dans la portée du projet de loi [...]
Comme vous le savez, madame la présidente, ce n'est pas du tout le cas. Ce rapport ne nous demande pas de juger si les amendements suggérés s'inscrivent dans la portée du projet de loi. Au contraire, comme je l'expliquerai plus tard, le comité a démontré clairement qu'il savait que les amendements proposés dépassaient la portée du projet de loi. Effectivement, le projet de loi, qui était vraiment limité à la reconnaissance et à la valorisation des Forces canadiennes, se voit doter, d'un seul coup, d'amendements qui outrepassent carrément sa portée et qui font en sorte de le modifier complètement et d'en faire un autre projet de loi. Le rapport demande à la Chambre d'habiliter ou non le comité à élargir la portée du projet de loi, et non pas de juger des amendements qui pourront par la suite être apportés en comité.
Je me dois aussi d'ajouter que le député de Toronto-Centre n'avait clairement pas fait ses devoirs avant d'intervenir à la hâte sur l'adoption de ce rapport avant même qu'une motion d'adoption ne soit inscrite au Feuilleton. Les procédures s'enchaînent et ça va vite, mais évidemment, elles ne sont pas véritablement conformes aux procédures légales de la Chambre. Cela a posé problème et nous a portés à nous adresser au Président de la Chambre à cet effet.
Un comité est en droit de solliciter ainsi des instructions de la Chambre pour élargir la portée d'un projet de loi. O'Brien et Bosc, dans la deuxième édition de La procédure et les usages de la Chambre des communes, sont clairs sur cette question:
Une fois qu’un projet de loi a été renvoyé à un comité, la Chambre peut adopter une motion d’instruction autorisant ce dernier à faire une chose qu’il n’aurait autrement pas le pouvoir de faire, par exemple : [...] regrouper plusieurs projets de loi en une seule mesure ou encore élargir ou resserrer la portée ou l’application d’un projet de loi. Un comité peut aussi solliciter des instructions de la Chambre.
C'est précisément ce que le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration cherche à faire au moyen de son huitième rapport. Cependant, et j'en arrive ici à la raison de mon intervention, il existe une limite aux instructions que la Chambre peut donner à un comité. Je cite encore une fois O'Brien et Bosc:
Une motion d'instruction est irrecevable si elle ne se rapporte pas au contenu du projet de loi, si elle déborde la portée du projet de loi (par exemple si elle renferme un principe qui lui est étranger [...]
Madame la présidente, ce passage est essentiel et primordial, car il reflète effectivement que la nature principale du projet de loi initial sera transformée. Je continue à citer mon intervention sur la question de privilège:
C'est donc ici que je crois fermement, monsieur le Président, que vous devez intervenir en déterminant irrecevable cette sollicitation d'instruction faite par le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration. En effet, cette sollicitation est beaucoup trop large et ne permet pas à la Chambre de déterminer si le comité ne risque pas d'inclure au projet de loi un principe qui lui est étranger.
Nous avons quelques précédents où de telles motions d'instruction ont été jugées recevables et ont été débattues à la Chambre. Cependant, chaque fois, les instructions étaient beaucoup plus claires que celles demandées par le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration aujourd'hui.
Lorsqu'on parle d'instructions beaucoup plus claires, cela signifie simplement qu'il faut, dans les amendements qui seront proposés, faire attention à la nature du projet de loi initial et circonscrire ces amendements afin qu'ils ne puissent pas dénaturer le projet de loi initial. Un exemple nous vient du 27 avril 2010, lorsque ma collègue de a proposé la motion d'instruction suivante:
Qu’une instruction soit donnée au Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord portant qu’il ait le pouvoir, durant son examen du projet de loi C-3, Loi favorisant l'équité entre les sexes relativement à l'inscription au registre des Indiens en donnant suite à la décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans l'affaire McIvor v. Canada (Registrar of Indian and Northern Affairs), d’élargir la portée de ce projet de loi afin qu’un enfant né avant 1985 dont la grand-mère est Indienne ait droit au même statut qu’un enfant né au cours de la même période mais dont le grand-père est Indien.
Cette motion, madame la présidente, était très claire et a été jugée recevable, avec raison. Elle donnait donc la permission au Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord d'élargir la portée du projet de loi mentionné, tout en limitant très précisément de quelle façon le comité pouvait le faire. Il y avait donc des instructions claires et précises afin que la portée du projet de loi initial ne soit pas transformée et dévoyée de son objectif initial. En s'exprimant sur cette motion, la Chambre était assurée que le comité n'inclurait pas au projet de loi un principe qui lui était étranger.
À l'opposé, la motion d'instruction que nous avons devant nous demande tout bonnement à la Chambre le pouvoir d'élargir le projet de loi afin qu'il ne s'applique pas seulement aux Forces canadiennes. Qu'est-ce que cela veut dire exactement? Comment le comité veut-il amender le projet de loi pour qu'il ne puisse plus s'appliquer seulement aux Forces canadiennes?
Tel qu'il est actuellement, le projet de loi permet, entre autres, aux résidents permanents des Forces canadiennes d'obtenir leur citoyenneté plus rapidement. Bien évidemment, nous étions favorable à cet état de fait. En demandant que le projet de loi ne s'applique pas qu'aux Forces canadiennes, le comité insinue-t-il qu'il aimerait amender le projet de loi afin qu'il permette aux résidents permanents oeuvrant dans des professions qui ne sont pas en lien avec les Forces canadiennes d'obtenir aussi leur citoyenneté plus rapidement?
Lors de nos échanges en comité et en présence des témoins que nous avions convoqués, nous avons abordé cette possibilité d'élargir, de fait, le projet de loi à d'autres personnes que celles qui souhaitaient s'enrôler dans les Forces canadiennes. Bien évidemment, le projet de loi d'initiative parlementaire était circonscrit aux Forces canadiennes, et notre suggestion n'a pas été jugée recevable.
Madame la présidente, ce n'est pas clair du tout. Comment la Chambre peut-elle se décider sur une telle motion d'instruction alors qu'il n'est pas possible de savoir comment le comité va procéder et s'il va tenter d'inclure au projet de loi un principe qui ne lui est pas étranger?
J'ajoute également que si cette motion d'instruction du comité devait être jugée recevable, cela créerait un dangereux précédent. En permettant à un comité permanent d'élargir la portée d'un projet de loi sans instructions précises, nous ouvrons une porte extrêmement sensible dans le contexte actuel. Ne perdons pas de vue la tendance bien évidente de ce gouvernement majoritaire d'utiliser les affaires émanant des députés pour promouvoir son propre programme. Ce faisant, les projets de loi d'initiative parlementaire pourront être utilisés comme une façon pour le gouvernement de contourner les règles.
Mme Catherine Dauvergne, professeure à la Faculté de droit de l'Université de la Colombie-Britannique, a comparu à titre personnel lors de l'étude du projet de loi par le comité. Elle n'aurait pu mieux exprimer le danger d'une telle sollicitation d'instructions:
[...] un changement à notre Loi sur la citoyenneté aussi profond que celui proposé par le ministre ne doit pas se faire dans le cadre d'un processus comme celui-ci, c'est-à-dire un projet de loi émanant d'un député. Ce processus réduit le temps alloué aux débats et au travail de ce comité et il protège les changements que le ministre a proposés. On parle ici d'un contrôle démocratique.
Effectivement, on se retrouve dans une situation où, dans le cadre d'un processus qui allait mettre en avant un projet de loi émanant d'un député, des débats sont prévus dans ce cas de figure. Ces débats n'auront pas la même latitude et la même étendue que s'il s'agissait d'un projet de loi gouvernemental ou d'un projet de loi ministériel auquel on allouerait des heures de débat supplémentaires, ce qui n'aurait pas eu lieu dans le cas d'un projet de loi émanant d'un député.
La question de la citoyenneté est essentielle et tellement profonde qu'elle touche tous les Canadiens. On ne peut pas décider en un tour de main qu'il s'agira de changer la Loi sur la citoyenneté de façon aussi rapide et aussi inconstitutionnelle, que cela aurait pu se faire avec l'élargissement qu'a demandé le ministre pour pouvoir faire passer ses amendements.
Pour notre démocratie et notre travail de parlementaires, il est nécessaire d'avoir un contrôle démocratique sur nos procédures et sur l'utilisation de celles-ci. L'article 3 du Règlement d'examen de compatibilité avec la Charte canadienne des droits et libertés stipule ceci:
3. Dans le cas de tout projet ou proposition de loi soumis ou présenté à la Chambre des communes par un ministre fédéral, le ministre, dès réception de deux exemplaires du projet ou de la proposition de loi envoyés par le greffier de la Chambre des communes :
a) examine le projet ou la proposition de loi en vue de déterminer si l’une quelconque de ses dispositions est incompatible avec les fins et dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés;
Ces vérifications nous permettent d'instaurer et de garder nos projets de loi dans un cadre légal, afin de s'assurer qu'on ne prend pas des dispositions au-delà des limites prescrites par la Charte canadienne des droits et libertés. Ces vérifications sont nécessaires et primordiales.
En demandant à des comités permanents d'élargir la portée des projets de loi pour y inclure des suggestions venant des ministres, le gouvernement échappe à sa responsabilité d'examen selon le Règlement d'examen de compatibilité avec la Charte canadienne des droits et libertés. Avec les amendements suggérés par le ministre, nous sommes dans une situation où un projet de loi émanant d'un député sera élargi. Ce projet de loi perd sa nature première et devient alors un projet de loi ministériel.
Dans ce cadre de procédure légal qui concerne un projet de loi gouvernemental, nous avons des assises légales pour pouvoir baliser les contenus qui seront proposés dans un projet de loi gouvernemental quelconque. C'est un principe parlementaire et un principe de nos assises démocratiques à la Chambre des communes.
La constitutionnalité des affaires émanant des députés n'est étudiée qu'au Sous-comité des affaires émanant...
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Merci, monsieur le président.
Je vais donc poursuivre. Dans un premier temps, j'aimerais peut-être rappeler le fil des propos que je tiens depuis ce matin, puisque j'ai été interrompue.
Si vous me le permettez, monsieur le président, je vais donc revenir au projet de loi . C'est un projet de loi émanant d'un député. Je vais d'abord rappeler son objet et le mettre en contexte. Dans ce cadre précis, je ferai mention également du contenu de ce projet de loi et rappellerai son titre, qui est tout de même révélateur de sa portée. Si l'on procédait à un quelconque élargissement de ce projet de loi pour y inclure les amendements présentés par le , même le titre ne serait plus en adéquation avec le contenu proposé. Je rappelle le titre de ce projet de loi: il s'agit de la .
Il est certain que le projet de loi de notre collègue M. Shory parlait d'actes de guerre, et non de terrorisme. En fait, les amendements du ministre sont beaucoup plus larges et, de fait, ont un effet considérable sur le projet de loi , une influence telle qu'ils créent deux classes de citoyens, et je pense que c'est là un point important qu'on doit garder à l'esprit. Par contre, cela aura peu ou pas du tout d'effet sur le terrorisme. En fait, si on y inclut les amendements supplémentaires, le projet de loi de M. Shory ne valorisera plus la citoyenneté, mais il aura pour conséquence de dévaloriser le fait de détenir deux citoyennetés. Bien évidemment, cela va à l'encontre des principes d'équité devant la loi et cela suscite une notion d'arbitraire et, comme je l'ai évoqué auparavant, de discrimination.
En ce qui concerne le contexte de ce projet de loi, je rappelle que M. Shory fait passer de trois ans à deux ans la durée de résidence requise au Canada pour un membre des Forces armées canadiennes souhaitant obtenir la citoyenneté. Par le fait même, il prévoit qu'un citoyen ou un résident autorisé d'un pays étranger ayant une autre nationalité que la citoyenneté canadienne qui commet un acte de guerre contre les Forces armées canadiennes est réputé avoir demandé à répudier sa citoyenneté canadienne, et qu'un résident permanent qui aurait commis un tel acte serait réputé avoir retiré sa demande de citoyenneté canadienne.
Je vais donc faire la lecture du contenu de ce projet de loi:
1. (1) Le paragraphe 5(1) de la Loi sur la citoyenneté est modifié par adjonction, après l'alinéa e), de ce qui suit :
e.1) n'est pas visée au paragraphe 9(1.2);
(2) Le paragraphe 5(4) de la même loi est remplacé par ce qui suit :
(4) Afin de remédier à une situation particulière et inhabituelle de détresse ou de récompenser des services exceptionnels rendus au Canada, et malgré les autres dispositions de la présente loi :
a) le gouverneur en conseil a le pouvoir discrétionnaire d'ordonner au ministre d'attribuer la citoyenneté à toute personne qu'il désigne; le ministre procède alors sans délai à l'attribution;
b) dans le cas du résident permanent qui est membre des Forces armées canadiennes qui a signé un contrat d'au moins trois ans et qui a terminé son entraînement de base, le ministre, sur demande, réduit de un an la durée de résidence au Canada requise pour l'application de l'alinéa (1)c) et du paragraphe 11(1).
2. L’article 9 de la même loi est modifié par adjonction, après le paragraphe (1), de ce qui suit :
(1.1) Le citoyen canadien qui possède une nationalité étrangère ou qui est un résident autorisé d'un pays étranger est réputé avoir demandé à répudier sa citoyenneté canadienne s’il commet un acte de guerre contre les Forces armées canadiennes.
(1.2) Le résident permanent qui a demandé la citoyenneté canadienne est réputé avoir retiré sa demande s’il commet un acte de guerre contre les Forces armées canadiennes.
3. Le paragraphe 11(1) de la même loi est modifié par adjonction, après l’alinéa c), de ce qui suit :
c.1) n’a pas cessé d’être citoyen au titre du paragraphe 9(1.1);
Monsieur le président, si on regarde le projet de loi , on voit qu'il est composé d'une première page, soit la page de garde, où on mentionne le titre du projet de loi. À la deuxième page, il y a un petit sommaire. À la troisième page sont inscrits les paragraphes de la Loi sur la citoyenneté et les modifications qu'on souhaite apporter par adjonction.
Monsieur le président, lorsque le comité a été saisi de ce projet de loi émanant d'un député, nous avons vite fait un constat unanime en ce qui concerne sa portée et ses limites ainsi que la nécessité de pouvoir y apporter des clarifications et des amendements qui allaient le bonifier. C'est d'ailleurs pour cela qu'il a été renvoyé en comité avant l'étape de la deuxième lecture. Bien évidemment, nous ne pensions aucunement, à ce moment, que les amendements que le comité et les différents partis étaient disposés à apporter à ce projet de loi déborderaient de sa portée et de son objectif, qui est de valoriser les Forces canadiennes.
Nous avons échangé, discuté et écouté des témoins pour arriver à la conclusion unanime d'accorder toute l'importance à nos forces armées. Une des façons d'accorder de l'importance aux forces armées et de les valoriser passe, en effet, par l'octroi facile de la citoyenneté à des résidents permanents afin qu'ils viennent renforcer le nombre de militaires au service de notre nation.
Cela dit, monsieur le président, lorsque par la suite le ministre lui-même est venu témoigner et nous a informés de la possibilité qu'il propose des amendements supplémentaires au projet de loi , bien évidemment, nous nous sommes questionnés quant à la nouvelle portée de ce projet de loi. Monsieur le président, j'insiste pour répéter que nous nous sommes tout de suite inquiétés de cette possibilité d'ajouter des amendements à ce projet de loi pour y inclure des mesures qui ne correspondent plus du tout au projet de loi initial. C'est dans cette perspective que nous, de l'opposition officielle, avons mentionné toute notre inquiétude et, bien évidemment, toute l'ampleur des changements apportés au projet de loi initial par ces nouveaux amendements. Bien évidemment, on s'aperçoit tout simplement que si on poursuit dans cette voie, la possibilité d'apporter des amendements supplémentaires va dénaturer ce projet de loi à un point tel qu'il n'aura plus une portée d'initiative parlementaire, mais une portée purement gouvernementale.
Je voudrais rappeler que comme ce projet de loi n'est plus une initiative parlementaire, mais une initiative du gouvernement, en l'occurrence d'un ministre, ce dernier pourrait expressément constituer lui-même un projet de loi du gouvernement en y incluant les amendements qu'il souhaite voir apporter au projet de loi .
Il y a donc en effet des inquiétudes et des questions à se poser. La motion dont nous sommes saisis et dont nous débattons aujourd'hui, concernant le prolongement de 30 jours et l'élargissement du projet de loi, n'est pas recevable. Dans ces conditions, je vais continuer à parler de certains de nos échanges en comité au sujet du projet de loi .
C'est avec bonne volonté que nous souhaitions ce projet de loi, à l'origine. Nous avions en effet voté pour qu'il soit renvoyé au comité, de sorte qu'il soit amendé et qu'il progresse selon la perspective qui était la sienne dès le départ, soit la valorisation des Forces canadiennes. Ce projet de loi avait pour but de créer un autre moyen d'intégrer les résidents permanents, de souligner la valeur exceptionnelle de la citoyenneté canadienne et de valoriser la contribution de nos courageux militaires. Évidemment, on ne pouvait pas être contre la perspective dans laquelle s'inscrivait ce projet de loi, au contraire.
Cette diversité est tout de même l'une des particularités de notre pays. Au Canada, il y a une diversité absolument incomparable, ce qui est une chance, selon moi. Ce projet de loi, à l'origine, devait permettre à des résidents permanents, donc à la diversité, de s'inscrire de manière particulière dans les Forces canadiennes. Dans ces conditions, nous abondions dans ce sens. Nous étions favorables à l'idée que notre armée puisse accueillir cette diversité. Nous avons en effet appuyé le principe voulant qu'on accélère le processus d'obtention de la citoyenneté canadienne pour récompenser le dévouement des résidents permanents au sein des Forces canadiennes. Nous étions également favorables au fait que les Forces canadiennes reflètent la diversité du Canada.
Or voilà que certains aspects du projet de loi, qui touchent les demandes de répudiation et le retrait des demandes de citoyenneté canadienne, posent problème. Tel qu'énoncé, le projet de loi prévoit qu'un citoyen ou un résident autorisé d'un pays étranger qui commet un acte de guerre contre les Forces canadiennes est réputé avoir demandé la répudiation de sa citoyenneté canadienne. De la même manière, un résident permanent qui aurait commis un tel acte serait réputé avoir retiré sa demande de citoyenneté canadienne. Cependant, le projet de loi n'indique pas clairement qu'une procédure judiciaire est nécessaire pour déterminer si quelqu'un a commis un acte de guerre et ne précise pas qui prendrait la décision à cet égard. C'est l'une des limites de ce projet de loi. Nous avons discuté de cette question au sein de notre comité. Nous devions l'approfondir et établir les amendements permettant de dépasser cette limite.
De plus, certains termes clés n'étaient pas définis. Par exemple, l'expression « acte de guerre » n'est pas définie dans le droit canadien. Il n'y a pas non plus de définition pour le terme « résident autorisé d'un pays étranger ».
Nous étions tout de même face à un projet de loi qui, comme je viens de le décrire, présentait d'énormes limites et d'énormes manques. D'une certaine manière, il fallait les reconsidérer dans une perspective tenant compte de l'objet même de ce projet de loi, soit la valorisation des Forces canadiennes, et non pas extrapoler sous prétexte que le ministre souhaitait voir apporter des amendements à ce projet de loi. Or, on allait vers une extrapolation à un point tel où ce n'était plus le projet de loi initial, mais, bien évidement, un projet de loi ministériel. Je rappelle que le ministre aura toute la latitude de déposer un tel projet de loi lorsqu'il le voudra.
Je voudrais aussi insister sur le fait que les vastes changements apportés par les conservateurs au système d'immigration canadien n'ont malheureusement pas permis de le rendre plus efficace ni plus juste.
Les néo-démocrates sont favorables à l'idée que les Forces armées canadiennes soient davantage le reflet de la diversité du Canada. Toutefois, les circonstances dans lesquelles la citoyenneté canadienne pourrait effectivement être révoquée ou une demande de citoyenneté retirée doivent respecter pleinement les lois et suivre le processus judiciaire normal. Oui, il est vrai que certains témoins ont évoqué la notion de justice naturelle, soit que tout individu quel qu'il soit a la possibilité de défendre sa situation ou son cas, puisque c'est permis par la loi. Comme beaucoup d'aspects du projet de loi étaient limités, on ne permettait aucunement à la justice de prendre sa place au sein d'une mesure prévoyant précisément le retrait possible de la citoyenneté.
Des témoins nous ont dit clairement que cela relevait de l'arbitraire. On est véritablement dans une situation où la primauté du droit est exclue, et ce n'est pas normal. N'oublions pas qu'en matière de constitutionnalité, la Charte est là pour nous donner les balises nécessaires pour garantir à tout individu quel qu'il soit un droit de défense et un droit d'interjeter appel dans une quelconque situation.
Par ailleurs, il ne faut pas perdre de vue que ce projet de loi fera en sorte de créer deux classes de citoyens, c'est-à-dire les personnes n'ayant qu'une seule citoyenneté et les personnes en ayant plus d'une. Celles qui auraient plus d'une citoyenneté risqueraient tout simplement de perdre leur citoyenneté canadienne, même si elles sont nées au Canada et qu'elles ne sont jamais allées dans ces autres pays dont elles auraient la citoyenneté.
Si on prend en compte ces considérations, il est clair qu'on évoque la possibilité d'apatridie. Lorsqu'on a relevé les situations inhérentes à cet état de fait, les témoins nous ont dit qu'il fallait véritablement être rigoureux et prêter attention aux situations d'apatridie qu'un tel projet de loi pouvait effectivement générer puisqu'il prévoyait le retrait de la citoyenneté à des personnes qui, pour une raison quelconque, n'auraient pas la possibilité de faire valoir une deuxième citoyenneté.
On a aussi mentionné qu'il existait des mesures similaires dans d'autres pays qui pourraient également mener à l'apatridie. Un des témoins nous mentionnait clairement que cela risquait d'engendrer une course à la révocation de la citoyenneté entre les pays. Tout simplement, il s'agirait de savoir quel pays arriverait en premier pour enlever la citoyenneté à la personne qui aurait commis tel ou tel acte. De fait, on nous mentionnait qu'une surenchère liée à ce retrait de citoyenneté pouvait effectivement être enclenchée entre différents pays.
Une autre dimension vraiment très importante est le risque que des enfants soient enrôlés de force par des adultes qui leur donnent des armes et leur permettent de jouer au soldat de la même façon qu'un adulte enrôlé dans l'armée peut le faire. Ces enfants soldats peuvent donc aussi être tributaires d'un tel projet de loi. En effet, ils pourraient se voir retirer leur citoyenneté pour avoir participé auparavant à des actes de guerre, alors qu'ils ne sont pas responsables de cet enrôlement forcé dans des forces armées.
L'apatridie était donc au coeur de nos débats entourant le projet de loi .
Je veux également revenir sur la question de la citoyenneté. En créant deux classes de citoyens, c'est-à-dire ceux qui n'ont que la citoyenneté canadienne et ceux qui ont une double ou une multiple citoyenneté, ce projet de loi impose une peine supplémentaire qui n'est pas liée au crime, mais au fait de posséder une double citoyenneté. Cela crée une notion empreinte d'arbitraire et de discrimination. Ainsi, des individus pourraient être accusés de crimes qu'ils n'auraient pas commis, seulement parce qu'ils possèdent une double ou une triple citoyenneté.
J'ai trouvé très judicieux les propos d'un de nos témoins qui dressait un parallèle. Il disait que la citoyenneté n'était pas un permis de conduire que l'on pouvait retirer à tout contrevenant ayant dépassé la vitesse permise ou ayant été impliqué dans un accident. Il faut vraiment garder cela à l'esprit. La citoyenneté représente bien plus qu'un permis de conduire, et notre rôle n'est pas de la retirer à tout contrevenant de quelque façon que ce soit.
De plus, ce projet de loi est discriminatoire dans la mesure où certaines personnes ne sont même pas au courant qu'elles ont deux citoyennetés. Que ferons-nous de tous ces gens? En l'occurrence, des témoins nous ont précisé que certaines personnes ne sont pas au courant de leur double citoyenneté.
Ce projet de loi est arbitraire, puisqu'il impose une peine qui ne peut être appliquée à tous, soit le retrait de la citoyenneté. Ce projet de loi dépend également de l'action des autres pays qui sont dans une même situation et de multiples autres facteurs tels que le nombre de citoyennetés que possèdent des individus.
Comme je viens de le dire, on voit se profiler des distinctions entre les individus. Certes, le contenu du projet de loi n'est pas complet. La portée limitée du projet de loi fait en sorte qu'il reste beaucoup de choses à compléter. Toutefois, en formulant des demandes supplémentaires et en proposant des amendements en vue de complètement transformer le projet de loi, le dépasse, à mon avis, les limites de ce qui pouvait être entrepris par ce comité.
Le projet de loi prévoit également des pouvoirs discrétionnaires. De nouveau, on retrouve dans un projet de loi une disposition qui rend possibles des pouvoirs discrétionnaires supplémentaires. En fait, les procédures d'appel ne seront pas encadrées par des règles précises et dépendront d'une volonté politique.
S'octroyer des pouvoirs discrétionnaires au moyen d'un projet de loi, c'est faire fi de toutes nos balises légales et de nos tribunaux, et c'est là que réside le danger, à mon avis. On va s'octroyer le pouvoir de s'ingérer dans les décisions, de prendre la position d'un juge ou d'un tribunal et de décider de retirer ou non sa citoyenneté à tel ou tel individu. De plus, le droit d'appel, qui est une procédure légale, n'est même pas mis en avant dans ce cas. Il est clair, dans ce contexte, que la démarcation entre le judiciaire et le politique vient d'être effacée complètement. On en est au point où le ministre peut se donner la possibilité de juger des cas, alors que ça devrait être du ressort judiciaire.
Je voudrais également revenir sur ce que nous ont dit des témoins au sujet de la portée du projet de loi . Évidemment, nous avons salué la possibilité d'accélérer les demandes de citoyenneté des résidents permanents. Cependant, les propos de certains témoins nous ont permis de comprendre que le nombre de résidents permanents touchés par ce projet de loi serait minime.
Il va de soi que nous nous posons des questions. Étant donné qu'environ 15 résidents permanents sont recrutés annuellement par les Forces canadiennes, pourquoi prévoit-on un projet de loi dont l'effet, par le fait même, devient non considérable? Il a pour but de valoriser les Forces canadiennes et de leur donner la possibilité d'accueillir plus de diversité, mais face à ces chiffres, nous nous demandons si l'objectif, dans les faits, correspond à la volonté qui est exprimée dans ce projet de loi.
Il était important de se questionner ensemble sur cet état de fait, au sein du comité. Comme l'application de ce projet de loi est limitée, la valorisation des Forces canadiennes devenait purement symbolique. Alors, est-ce qu'on continue de parler de symbole, est-ce qu'on fait des aménagements ou est-ce qu'on continue de débattre des fondements de ce projet de loi? Nos témoins nous ont tout de même dit que, la portée étant limitée, le résultat serait une valorisation symbolique des Forces canadiennes plutôt qu'une valorisation réelle, en l'occurrence l'effet escompté.
On parle à tort et à travers — et le gouvernement ne cesse de le faire — de la possibilité de rendre le Canada plus sécuritaire et de l'effet dissuasif de ce projet de loi. Monsieur le président, on sait pertinemment que le projet de loi n'aurait pas d'effet dissuasif réel sur les actes terroristes ou autres crimes prévus. Des témoins nous ont mentionné ce fait. On sait également qu'au Royaume-Uni, par exemple, 13 procédures de révocation ont été mises en avant depuis 2002. C'est vous dire toute la notion liée à ces actes que l'on veut assujettir à ce projet de loi et qui n'ont véritablement pas lieu d'être.
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Merci, monsieur le président.
Je vais donc poursuivre. J'étais en train de parler des limites du projet de loi et des conséquences rattachées à ses dispositions.
Je voudrais tout d'abord revenir sur la mention que j'ai faite des deux classes de citoyens. Évidemment, selon ce projet de loi, la citoyenneté canadienne peut être considérée comme un privilège et peut être retirée au même titre qu'un permis de conduire. Or, on ne parle pas ici d'une infraction au code de la route pour laquelle, lorsqu'on le déciderait, on procéderait au retrait du permis de conduire. Cela concerne tout de même la citoyenneté des individus.
Parlons de l'aspect judiciaire. Le projet de loi impose une double peine aux personnes touchées par l'initiative, puisqu'une peine judiciaire pourrait être jumelée avec une révocation ou une répudiation de la citoyenneté canadienne. Il s'agirait de ce qu'on appelle communément une double peine. Bien évidemment, cela aurait pour conséquence que les personnes détenant une double citoyenneté seraient jugées plus sévèrement que les personnes n'ayant que la citoyenneté canadienne.
Je voudrais, pour étayer mes propos, vous mentionner certains témoignages qui ont été faits lors de nos réunions de comité. Ils éclairent d'une façon très importante et très pertinente toutes les discussions que nous avons eues lors de nos échanges en comité sur le projet de loi . Ils donnent également des informations supplémentaires quant à la pertinence de ce projet de loi et de son élargissement.
Je commencerai par lire des commentaires émis par l'Association du Barreau canadien et ayant comme objet le projet de loi :
Je vous écris au nom de la Section nationale du droit de l’immigration de l’Association du Barreau canadien (la Section de l’ABC) au sujet du projet de loi C-425, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté (valorisation des Forces armées canadiennes). L’ABC est une association nationale regroupant plus de 37 000 avocats, notaires, étudiants en droit et professeurs de droit. Elle a pour mandat d’aider à améliorer le droit et l’administration de la justice. Font partie de la Section de l’ABC des avocats et avocates dont le travail porte sur tous les aspects du droit de l’immigration et du droit des réfugiés.
La citoyenneté ainsi que les droits et les obligations qui en découlent constituent la pierre angulaire d’une société démocratique.
Je pense que ces propos sont fondamentaux, car ils situent véritablement la notion de citoyenneté dans un contexte important et primordial de ce qui touche à nos sociétés démocratiques.
Le projet de loi C-425 aurait pour effet de modifier la Loi sur la citoyenneté afin de prévoir qu’une personne ayant la double citoyenneté est réputée avoir demandé la répudiation de sa citoyenneté canadienne si elle « commet un acte de guerre contre les Forces armées canadiennes ». La Section de l’ABC s’oppose à cette importante modification de la nature même de la citoyenneté canadienne en l’absence davantage de possibilités d’en discuter et de participer au processus de rédaction.
Comme vous le constatez, la section souligne qu'on a affaire à une modification importante de la nature même de la citoyenneté canadienne. Ce n'est pas du même ordre que ce que j'évoquais plus tôt, c'est-à-dire le fait de se faire retirer son permis de conduire parce qu'on a commis une infraction. Il s'agit d'un précepte fondamental, qui est au coeur même de notre société.
Le projet de loi veut créer deux catégories de citoyens. La personne qui a la double citoyenneté risquerait de perdre sa citoyenneté canadienne dans certaines circonstances mal définies, et ce, même dans les cas où cette dernière est née au Canada et y a vécu toute sa vie.
Que tente de faire le projet de loi? Comme le fait remarquer le Barreau, une personne née au Canada qui commettrait un acte répréhensible se ferait de facto retirer sa citoyenneté. Une telle désignation aurait pour conséquence de créer, pour ainsi dire, une catégorie de citoyens de première zone, d'une part, et une catégorie de citoyens de seconde zone, d'autre part. Ce principe est complètement et fondamentalement en désaccord avec la notion même de la citoyenneté selon laquelle, par principe, un individu qui fait partie d'une nation en fait partie à part entière.
Bien qu’il soit implicite dans certains des débats publics relatifs au projet de loi que celui-ci cible les citoyens naturalisés, le projet de loi en soi ne fait pas cette distinction. Le citoyen naturalisé canadien qui n’a pas d'autre nationalité ou qui a renoncé à une autre nationalité serait protégé contre la perte de sa citoyenneté canadienne. Par contre, le citoyen né au Canada, qui a acquis une deuxième nationalité, par l’entremise de ses parents ou par d’autres moyens, risquerait de perdre sa citoyenneté canadienne même s’il est demeuré au Canada depuis sa naissance.
J'ai mentionné plus tôt que certaines personnes n'étaient même pas au courant qu'elles avaient une double nationalité. C'est donc dire qu'elles seraient prises au dépourvu si cette disposition de la loi faisait en sorte, malencontreusement, qu'elles perdent leur citoyenneté canadienne.
La Section de l’ABC est préoccupée par les commentaires du gouvernement voulant que des ajouts importants soient peut-être apportés au projet de loi par le Comité lors de son examen. Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration a laissé sous-entendre que la portée du projet de loi pourrait être élargie afin d’inclure la perte de la citoyenneté pour les individus liés à certains actes de terrorisme. Sans projet d’amendement, il est difficile pour la Section de l’ABC de formuler des commentaires; néanmoins, notre expérience relative aux dispositions de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés qui traitent de « terrorisme » et la portée de celles-ci soulève chez nous certaines préoccupations.
Dans l’article de journal en question, le ministre affirme que [TRADUCTION] « des critères juridiques exigeants doivent être satisfaits afin de déclencher une répudiation réputée de la citoyenneté, assortis de garanties juridiques appropriées ». Nous sommes d’accord avec cet énoncé. Toutefois, le projet de loi ne prévoit aucune telle mesure de protection ni aucun éclaircissement sur ce point. La notion d’« acte de guerre » n’est pas définie dans le projet de loi et on n’y inclut aucun renvoi précis à une définition qui se trouverait ailleurs. Vu la nature de la guerre contemporaine, le fait de définir quelles sont les limites d’un « acte de guerre » serait, certes, un défi de taille. Étant donné que même le fait de commettre une infraction criminelle parmi les plus graves n’entraînerait pas pour les Canadiens et les Canadiennes le risque de perdre leur citoyenneté, la nature précise des activités qui comporteraient un tel risque doit être très bien définie.
Si le gouvernement souhaite apporter une modification si déterminante à la nature de la citoyenneté canadienne, il serait plus approprié pour lui de le faire au moyen du dépôt d’un nouveau projet de loi auprès du Parlement [...]
Ici, monsieur le président, on rejoint cette question centrale, soit le fait de partir d'un projet de loi émanant d'un député et de l'élargir pour en arriver à un projet de loi émanant du gouvernement. Nos questionnements et nos préoccupations ont été relayés également par nos témoins. Comme l'a illustré la lecture que je viens de faire, l'Association du Barreau canadien fait référence également à cette dimension. De plus, elle est de l'avis suivant:
[...] il serait plus approprié pour lui de le faire au moyen du dépôt d'un nouveau projet de loi auprès du Parlement, tout en fournissant assez de temps pour qu'il soit examiné et débattu publiquement de façon adéquate.
Monsieur le président, dans un tel cadre, il va falloir suivre les procédures législatives qui ont cours normalement. Autrement dit, il faudra qu'un débat puisse avoir lieu et qu'on alloue à cette question les heures de débat normalement allouées à un débat sur un projet de loi émanant du gouvernement. Cela permettrait, dans toutes les facettes de notre enceinte parlementaire, de donner à tous les députés de la Chambre la possibilité d'argumenter et de débattre d'une notion et d'une dimension extrêmement sensibles et importantes de notre société. Ainsi, le débat, en l'occurence un débat public, peut être fait de façon adéquate, comme le souhaite l'Association du Barreau canadien:
Le processus démocratique de l’adoption de mesures législatives repose sur l’occasion de pouvoir discuter et débattre de ces mesures de façon éclairée.
Rappelons, monsieur le président, que le processus démocratique est un processus essentiel au sein de notre Chambre des communes sans lequel nous n'aurions pas lieu d'être ou nous ne pourrions représenter nos concitoyens. Sans ce processus, nous ne pourrions pas rendre publics certains changements importants qui restent dans un cadre tellement vaste qu'il est nécessaire, d'un point de vue démocratique, de pouvoir en discuter librement.
Veuillez agréer, Monsieur, l'expression de mes sentiments distingués.
Je poursuis en lisant des commentaires fort éclairants qui nous ont été transmis par la Coalition pour la surveillance internationale des libertés civiles. Ils ont été soumis aux membres du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration le 17 avril 2013.
La CSILC est une coalition pancanadienne d'organisations de la société civile qui a été créée dans la foulée des attentats terroristes survenus aux États-Unis le 11 septembre 2001. La coalition est composée de 39 ONG, syndicats, associations professionnelles, groupes religieux, organismes voués à la protection de l'environnement, associations de défense des droits de la personne et des libertés civiles, et groupes qui représentent les communautés d'immigrants et de réfugiés au Canada. Ces organisations, qui militent pour la promotion et la défense des droits fondamentaux dans leurs domaines respectifs au sein de la société canadienne, ont décidé de s'unir pour partager leurs préoccupations communes. Elles sont préoccupées par les conséquences des nouvelles lois antiterroristes et des autres mesures de lutte contre le terrorisme sur les libertés civiles, les droits de la personne, la protection des réfugiés, le racisme, la dissidence, le fonctionnement des oeuvres de charité, la coopération internationale et l'aide humanitaire.
Monsieur le président, on voit là toute l'ampleur de la question et toutes les conséquences de ces nouvelles dispositions légales qui pourraient voir le jour. Celles-ci pourraient avoir des incidences majeures quant à l'octroi ou au maintien de la citoyenneté canadienne.
En introduction, la coalition nous fait part de ceci:
Le projet de loi C-425, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté (valorisation des Forces armées canadiennes), est un projet de loi déposé par le député conservateur Devinder Shory. Le projet de loi permettrait aux résidents permanents qui ont servi dans les Forces armées canadiennes d'obtenir la citoyenneté canadienne plus rapidement, et permettrait de retirer la citoyenneté à des Canadiens impliqués dans un acte de guerre contre les Forces armées canadiennes.
Le projet de loi C-425 est présentement étudié en comité. Le 21 mars dernier, le Ministre de la citoyenneté, de l'immigration et du multiculturalisme, Jason Kenney, a annoncé au comité qu'il proposerait quelques amendements au projet de loi. Parmi ceux-ci figur[e] un amendement donnant le pouvoir de retirer la citoyenneté aux individus ayant été reconnus coupables de certaines infractions terroristes.
Bien évidemment, monsieur le président, la coalition indique en annotation ce qui suit:
Les amendements n'ont pas encore été déposés mais le Ministre a proposé de “retirer la citoyenneté des individus ayant servi au sein des forces armées d'un pays ou au sein d'un groupe armé engagé dans un conflit armé avec le Canada; ou ayant été condamnés pour haute trahison en vertu de la section 47 du Code criminel; ou ayant été condamnés à cinq ans ou plus d'emprisonnement pour des infractions en lien avec le terrorisme, telles que définies à la section 2 du Code criminel, ou des infractions en lien avec le terrorisme équivalentes à l'étranger; ou ayant été reconnus coupables d'infractions en vertu des sections 73 à 76 de la Loi sur la défense nationale et condamnés à l'emprisonnement à perpétuité pour s'être conduit en traître; ou ayant été reconnus coupables d'une infraction en vertu de la section 78 de la Loi sur la défense nationale et condamnés à l'emprisonnement à perpétuité; ou ayant été reconnus coupables d'une infraction en vertu de la section 130 de la Loi sur la défense nationale pour haute trahison punissable en vertu de la section 47 du Code criminel ou pour avoir commis une infraction de terrorisme au sens de la section 2 du Code criminel et condamnés à cinq ans de prison ou plus.
Les commentaires que je viens de lire mentionnent que le ministre a également proposé que la citoyenneté ne soit retirée qu'aux individus détenant une double citoyenneté, afin qu'aucun ne se retrouve apatride.
Voici quelques préoccupations de la Coalition pour la surveillance internationale des libertés civiles. Tout d'abord, selon la CSILC, tous les citoyens doivent être traités également. Je faisais justement mention de cette question fondamentale et de la nécessité de ne pas entrer dans un registre de discrimination entre un citoyen résident permanent et un citoyen canadien. Or, un tel registre est mis en avant, ce qui préoccupe la coalition:
1. Tous les citoyens doivent être traités également
Il est injuste et discriminatoire que certains citoyens subissent des conséquences différentes pour avoir commis les mêmes crimes. Créer des règles distinctes pour les citoyens à double nationalité crée une citoyenneté à deux vitesses, comportant moins de droits pour certains citoyens.
Nous en sommes là, monsieur le président. Nous sommes face à une décision importante qui découlerait d'amendements que le ministre de la Citoyenneté, de l'Immigration et du Multiculturalisme présenterait en vue d'élargir la portée de ce projet de loi émanant d'un député. Ce faisant, on ne conserverait pas l'objectif premier de ce projet de loi, mais on le dénaturerait en amenant des considérations qui, fondamentalement, vont à l'encontre de la préservation des droits fondamentaux de la personne.
La deuxième préoccupation de la CSILC est la suivante:
2. L'imprécision de la définition du terrorisme
Le terme “terrorisme” est problématique car il est vague, large et politisé. De fait, il n'y a pas de consensus sur sa définition aux Nations-Unies et le concept n'est pas non plus défini dans les principaux instruments internationaux tels que le Statut de Rome de la Cour pénale internationale.
C'est dire que des balises existent, et l'on ne peut en aucun cas légiférer à partir d'une notion qui nous amène à oublier les balises ou à faire comme si elles n'existaient plus, nous immiscer dans cette question et proposer des changements à la Loi sur la citoyenneté qui permettront de passer carrément outre à ces balises internationales et nationales.
Un peu plus tôt, je faisais référence à la Charte qui, de fait, ne circonscrit plus de façon importante et nécessaire nos lois. La définition introduite...
:
Merci, monsieur le président.
Je vais récapituler mes propos. Bien évidemment, les argumentaires de nos témoins sont tout de même éloquents. Ils nous apportent un éclairage et des précisions en nous mentionnant certaines préoccupations ainsi que certaines dérives possibles.
De fait, nous croyons véritablement qu'il est indispensable de prêter une attention importante à ces commentaires. Bien évidemment, à l'aune de ce que je viens de présenter, on s'aperçoit qu'il importe de considérer toutes ces balises dont je parlais, que ce soit les balises nationales prescrites par la Charte canadienne des droits et libertés ou encore les balises internationales instaurées par l'ONU ou par d'autres conventions internationales que nous avons signées et ratifiées. Il est essentiel de mettre en avant des projets de loi qui prennent en considération ces avertissements, si je puis m'exprimer ainsi, qui doivent nécessairement encadrer de façon démocratique et pleinement responsable les mesures avancées dans certains projets de loi.
On a pu constater que les amendements proposés par le ministre allaient au-delà de ce projet de loi initial et nous amenaient sur un terrain où l'on crée, comme je l'ai énoncé, des différences entre les citoyens, et ce, dans un pays qui, rappelons-le, est une terre d'immigration. On sait que beaucoup de personnes ont fui leur pays et ont choisi de venir au Canada et de devenir des Canadiens pour pouvoir jouir de la démocratie et de la liberté qu'offre notre grand pays. Or, ce projet de loi va faire en sorte de créer deux classes de citoyens et, en l'occurence, faire la distinction entre les personnes qui ont une seule citoyenneté et celles qui en ont plusieurs. Ces dernières seront visées par un risque de perdre leur citoyenneté canadienne même si elles sont nées au Canada et qu'elles ne sont jamais allées dans l'autre pays dont elles ont la citoyenneté. La citoyenneté canadienne ne doit pas être considérée comme un permis de conduire que l'on pourrait retirer à tout instant.
Je voudrais aussi revenir sur ce que j'évoquais — je ne sais plus si c'était hier ou très tôt ce matin, mais peu importe — au sujet de la décision rendue par le Président de la Chambre, en réponse à la question de privilège soulevée concernant le dépôt du huitième rapport du comité, lequel vise l'élargissement de la portée du projet de loi .
Le Président de la Chambre a statué que le huitième rapport du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration était recevable, à proprement parler. Toutefois, il a émis d'importantes réserves quant à l'élargissement de la portée du projet de loi. Il rappelait l'absence de jurisprudence explicite en la matière ainsi que les dangers rattachés à cet état de fait.
En conséquence, le projet de loi ne pouvait pas nécessairement être modifié de la sorte et il fallait faire preuve d'une grande prudence. Par contre, le gouvernement ne semble pas prêt à faire preuve de prudence, puisqu'il revient à la charge avec cette nouvelle motion demandant une prolongation de 30 jours du délai prescrit pour l'étude du projet de loi C-425, dans le but d'en élargir la portée.
Clairement, le fait de transformer un projet de loi émanant d'un député en un projet de loi gouvernemental ne respecte pas la tradition qui a cours en ces instances parlementaires. Si le ministre veut mettre en place un programme législatif, qu'il le fasse de façon directe, par un projet de loi gouvernemental, et non par l'entremise d'un projet de loi émanant d'un député.
Après avoir essuyé un premier revers du président à la fin de mai, voilà que le gouvernement revient à la charge en passant maintenant par une nouvelle motion présentée au comité. Cette nouvelle manoeuvre nous inquiète grandement, monsieur le président, puisqu'elle laisse place à des dérapages importants et surtout qu'elle constituerait un précédent qui pourrait être dommageable pour la jurisprudence relative aux processus de traitement de projets de loi qui ont cours au Parlement canadien.
Monsieur le président, ces pratiques cherchant à outrepasser les procédures et processus usuels deviennent particulièrement inquiétantes et nécessitent une vigilance constante.
Rappelons quelques faits qui méritent une attention particulière.
Le 21 mars, le est venu témoigner. À cette occasion, il a littéralement dicté de nombreux amendements qui venaient élargir considérablement la portée du projet de loi et changer radicalement le sens de la version initiale.
Il est à noter que ces amendements tenaient sur deux pages par langue officielle, alors que le document déposé par le député de tenait en une seule page, incluant les versions dans l'une et l'autre des langues officielles. Déjà, sans même prendre le temps de lire les amendements proposés, on se rend compte, par le nombre de pages, que ces amendements vont véritablement dénaturer le projet de loi en question qui, lui, ne tenait que sur une page.
Ces amendements, qui furent les seuls proposés par les conservateurs, ont ensuite été déposés par le à la toute fin du processus d'étude du projet de loi. Par conséquent, les membres du comité n'ont pas pu interroger les témoins sur ce qui aurait pu devenir l'essence même du projet de loi.
Rappelons que le texte législatif déposé par le député de , en plus d'être élargi de manière importante, était complètement modifié. Au final, moins de 10 % du document définitif aurait découlé du projet de loi initial. Même le titre du projet de loi n'aurait plus eu sa raison d'être, puisque le volet de la valorisation des forces armées devenait purement secondaire et était véritablement balayé. En effet, les amendements n'étaient plus en droite ligne de cette valorisation des Forces canadiennes.
C'est vous dire à quel point les modifications étaient imposantes — si imposantes que les amendements proposés par le ministre ont été rejetés par la présidence. Effectivement, le président n'a eu comme seul recours que de rejeter ces amendements. Il n'y avait pas d'autre solution. Le président a dû faire ce choix et dire purement et simplement que ces amendements proposés par le ministre ne pouvaient être reçus. Allant à l'encontre du principe initial du projet de loi, ceux-ci ont été jugés irrecevables par le président du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration.
En conséquence, le a dû déposer un rapport à la Chambre. Monsieur le président, le rapport déposé par le gouvernement était très inquiétant. Celui-ci demandait un élargissement de la portée du projet de loi afin d'y inclure des éléments aucunement liés aux Forces armées canadiennes, alors que cela devait constituer l'assise du projet de loi de M. Shory.
Deux problèmes connexes découlent de cet état de fait.
Tout d'abord, le ministre vient court-circuiter le travail effectué par les membres du comité en imposant ses amendements à son secrétaire parlementaire et, par la force des choses, au comité. Ensuite — et c'est là le coeur de la question —, le projet de loi...
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Très bien, monsieur le président.
Je disais donc que deux problèmes connexes découlent de cet état de fait.
Tout d'abord, le ministre vient court-circuiter le travail effectué par les membres du comité en imposant ses amendements à son secrétaire parlementaire ainsi qu'au comité. Ensuite — et c'est là le vif de la question —, le projet de loi émanant du député de disparaît pratiquement au profit des amendements gouvernementaux.
Conséquemment, on peut difficilement parler d'un projet de loi émanant d'un député. On l'interprète plutôt comme un projet de loi gouvernemental. Cette pratique constitue une atteinte supplémentaire des conservateurs aux institutions parlementaires. Ce qui est inquiétant dans tout cela, c'est que du coup, nos travaux se sont concentrés sur un faux contenu. Je m'explique.
Ces séances, qui se sont déroulées sur une période de deux mois, n'ont pas vraiment porté sur le contenu réel du projet de loi. Le vrai projet de loi, ce sont les imposants amendements au projet de loi du député de qui ont été déposés par le ministre.
Le fait que le ait tant tardé à faire part des amendements écrits imposés par le ministre ne nous a pas permis de questionner les témoins sur les amendements du ministre. Nous n'avons pas réellement été en mesure de faire notre travail. Et surtout, la version amendée du projet de loi n'aurait pas constitué un projet de loi émanant d'un député, mais bien un projet de loi émanant du gouvernement. Cela vient détourner le processus et, surtout, vient limiter la portée de notre travail comme membres du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration.
D'ailleurs, le 21 mai dernier, le Président de la Chambre a statué sur un rappel au Règlement du député de au sujet de ce rapport, comme je l'ai dit précédemment. Bien que le Président l'ait trouvé recevable, son contenu a soulevé plusieurs interrogations et, surtout, plusieurs réserves. Par le fait même, nous sommes en mesure d'insister sur le fait que la permission d'élargir la portée du projet de loi est difficile à octroyer et requiert que nous puissions examiner ces éléments de façon beaucoup plus complète et profonde. Ici, on change la donne, et nous ne pouvons aller de l'avant avec un projet de loi dont la portée est à ce point élargie qu'il ne ressemble plus à sa version première, dont l'objectif était la valorisation des Forces canadiennes.
Nous notons également que, comme je l'ai précisé plus tôt, il y a des considérations que viennent mettre en avant les modifications qu'on envisage concernant l'élargissement du projet de loi. Le projet de loi initial envisageait de réduire d'un an le temps d'attente requis pour l'attribution de la citoyenneté à tout résident permanent membre des Forces canadiennes qui a signé un contrat d'au moins trois ans et qui a terminé son entraînement de base. S'il n'en tenait qu'à cela, ce projet de loi pourrait être adopté par consentement unanime. Nous n'aurions nullement besoin d'en débattre, car c'est une proposition tout à fait louable. Cependant, les complications commencent après les déclarations du ministre de la Citoyenneté, de l’Immigration et du Multiculturalisme, qui, en proposant ces amendements, cherche à modifier le projet de loi afin de révoquer la citoyenneté.
Il y a une différence essentielle et importante entre un projet de loi d'initiative parlementaire, comme celui dont nous avons été saisis, et un projet de loi d'initiative ministérielle. Il faut faire une distinction entre ces deux sortes de projets de loi, qui sont aux antipodes. Les projets de loi d'initiative ministérielle doivent obtenir l'approbation constitutionnelle du , conformément à la Loi sur le ministère de la Justice.
Autrement dit, lorsqu'on présente de telles mesures au moyen d'un projet de loi d'initiative parlementaire, on vient contourner le processus qui existe depuis longtemps et qui permet de vérifier si les propositions législatives sont conformes à la Constitution du Canada. Si nous sommes en mesure de faire ces évaluations, nous pouvons vérifier s'il y a des risques de litige lorsqu'un projet de loi est proposé et mis en oeuvre. Ces risques doivent être évalués et pris en compte par le ministère de la Justice. Cela nous amène à nous demander si ce projet de loi, comme l'ont mentionné certains témoins, est constitutionnel ou s'il comporte des risques de litige. C'était là des questions que nous nous sommes posées au préalable.
En termes simples, l'article 10 de la Loi sur la citoyenneté prévoit déjà un processus pour révoquer la citoyenneté. Ce processus mentionne que c'est dans le cas où une personne obtiendrait la citoyenneté notamment par fraude, par fausse déclaration...
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Madame la présidente, je suis heureuse de pouvoir présenter des arguments concernant cette motion. Elle vise à obtenir une prolongation de 30 jours pour étudier le projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi . Bien que le titre fasse référence à la « valorisation des Forces armées canadiennes », nous avons appris, au cours des 60 jours d'étude que nous avons déjà consacrés au projet de loi, que ce n'est pas le but véritable de cette mesure législative. Une petite partie vise à valoriser quelques personnes ayant servi dans les forces armées, mais le reste du projet de loi va beaucoup plus loin que cela.
Je ne pense pas qu'il soit nécessaire à ce moment-ci pour le comité d'accorder cette prolongation, étant donné que nous y avons déjà consacré les 60 jours alloués pour l'étude d'un projet de loi d'initiative parlementaire en comité. Comme nous le savons, deux heures de débat à la Chambre sont prévues à la deuxième lecture d'un projet de loi d'initiative parlementaire. Par la suite, le projet de loi est renvoyé au comité pour qu'il poursuive son étude avant d'en faire rapport à la Chambre.
Au cours de cette étude, nous avons été mis au courant des nombreuses failles du projet de loi à bien des égards, et je ne suis pas certaine si c'était la nature que l'auteur du projet de loi original voulait lui donner.
Nous savons que plusieurs membres du gouvernement, et le ministre lui-même, ont pris la parole et qu'ils ont proposé différents amendements au projet de loi. Les amendements proposés par le gouvernement ont grandement transformé le projet de loi d'initiative parlementaire, en faisant une loi tout à fait nouvelle. Sa portée n'est plus la même. Les amendements proposés par les membres du gouvernement l'ont complètement dénaturé. Ils savaient qu'il présentait des lacunes, car c'est ce qu'on a entendu de tous les témoins qui ont comparu devant le comité.
Permettez-moi de passer en revue certaines des lacunes relevées par les témoins, et que les membres du gouvernement eux-mêmes ont reconnues, ou les aspects du projet de loi qu'ils souhaitaient changer ou ne jugeaient pas appropriés, des éléments qui auraient pu contrevenir à la Charte des droits et libertés ou à la Constitution. Quoi qu'il en soit, je vous propose de revenir sur ce que les experts invités par le comité avaient à dire à ce sujet, et de discuter de certains de ces points.
Je vais seulement en énumérer quelques-uns pour l'instant, et je tâcherai d'en aborder le plus possible.
Premièrement, dans le projet de loi, l'auteur fait référence à un « acte de guerre ». Plusieurs témoins nous ont dit que ce n'était pas un terme reconnu par le droit canadien. L'auteur a parlé de « nouveaux vecteurs d'intégration » pour les résidents permanents et les nouveaux arrivants au Canada. Bien des gens ont signalé au comité les problèmes que cela posait en matière d'apatridie.
La notion de révocation de la citoyenneté, qui fait clairement partie du projet de loi, a été dénoncée par bon nombre des témoins que nous avons entendus.
Ce qui pose également problème avec ce projet de loi, c'est qu'il ratisse beaucoup trop large. Trop de gens vont se prendre dans les mailles du filet. L'auteur du projet de loi a lui-même reconnu que certaines personnes pourraient en subir les conséquences, comme les enfants soldats ou les personnes ayant eu des condamnations à l'étranger.
De plus, si le projet de loi devait être adopté, il créerait différentes classes de citoyens canadiens. Je veux m'assurer d'aborder ce point le plus en détail possible pour que tout le monde comprenne bien ce que nous ont dit les experts à ce sujet.
Des témoins nous ont aussi fait part de leurs inquiétudes concernant les pouvoirs discrétionnaires du ministre et les responsabilités qui les accompagnent. Avec le gouvernement en place, nous avons vu que de plus en plus de pouvoirs sont conférés à un nombre de personnes de plus en plus restreint, surtout dans les projets de loi et les mesures visant l'immigration, ce qui fait que les décisions à cet égard ne sont plus prises par un tribunal ou un groupe d'experts, mais plutôt par un ministre qui dispose de pouvoirs discrétionnaires accrus dans une multitude de dossiers.
Un autre problème qui a été signalé concernait les délais de traitement des demandes de citoyenneté et le fait que le gouvernement permettait le resquillage dans les demandes d'asile et du statut de réfugié. Le gouvernement a très clairement fait savoir que ce n'était pas acceptable, mais quand les délais d'attente se comptent en année, il essaie lui-même de faire passer certaines personnes devant les autres.
Je veux également parler des moyens qu'on pourrait prendre pour effectivement valoriser les personnes qui ont servi dans nos forces armées.
Ce sont là, madame la présidente, certains des points que je vais aborder dans mon laïus.
Pardon, madame la présidente, je crois que « laïus » n'était peut-être pas le terme approprié.
Une voix: Cela arrive.
Mme Rathika Sitsabaiesan: J'aurais plutôt dû dire « discours ». Mes excuses, madame la présidente.
Je vais donc revenir sur un des points que j'ai énumérés, soit celui du terme « acte de guerre ». Le premier problème ici, madame la présidente, c'est que le terme n'est pas défini par le droit canadien. Pourtant, dans le projet de loi, son auteur affirme qu'une personne qui commet un acte de guerre doit être punie. Les experts entendus par le comité ont dit clairement et à plusieurs reprises que ce serait très problématique à cause des termes « guerre » ou « déclaration de guerre ».
Le colonel Michael R. Gibson nous a dit que le droit international, pas seulement le droit canadien, n'employait plus les termes « guerre » ou « déclaration de guerre » depuis la Deuxième Guerre mondiale, mais le gouvernement veut les remettre sur la mappe. Désolée, ce n'est pas le gouvernement. Je devrais rectifier les choses. Même si le gouvernement appuie fortement cette mesure, elle nous a été présentée sous la forme d'un projet de loi d'initiative parlementaire plutôt que d'un projet de loi émanant du gouvernement, alors je ne devrais pas dire « le gouvernement ». Cependant, il semble très évident que le gouvernement est derrière ce projet de loi d'initiative parlementaire et qu'il essaie de faire adopter des mesures législatives par la bande, dans le but d'échapper à un examen minutieux de la question, et de régler le tout avec moins de supervision, de responsabilité et de transparence. On dirait qu'il ne veut pas agir avec toute la diligence voulue dans un dossier aussi important que celui de la modification de notre loi sur l'immigration.
Ce projet de loi viendrait modifier notre loi sur l'immigration et permettrait de révoquer la citoyenneté de citoyens canadiens. Dans sa forme actuelle, il pourrait entraîner l'apatridie. Le Canada est signataire de la Convention des Nations Unies sur la réduction des cas d'apatridie, mais ce projet de loi, selon la forme dans laquelle son auteur l'a présenté et que le gouvernement continue de vouloir nous imposer, contribuerait justement à créer des cas d'apatridie.
Au début des discussions, les membres du gouvernement nous ont dit vouloir faire preuve de toute la diligence voulue dans l'étude du projet de loi, et que c'est pour cette raison qu'ils souhaitaient faire adopter cette motion visant à prolonger l'étude de 30 jours. C'est une nouvelle pratique, apparemment. Ils viennent de se réveiller et veulent faire preuve de diligence raisonnable, quand on les a vus maintes et maintes fois proposer la clôture des travaux. Encore aujourd'hui, nous avons été appelés à voter sur une motion de clôture. Pour tous ceux qui nous regardent de la maison et qui ne savent pas ce qu'est une motion de clôture, c'est une forme d'attribution de temps. C'est une façon de clore les débats à la Chambre des communes. Le gouvernement a proposé la clôture des débats sur des projets de loi à la Chambre des communes plus de 45 fois. Au moment d'écrire mes notes, nous en étions à 45.
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Merci, madame la présidente, de bien vouloir me donner la parole encore une fois.
À la lumière de notre expérience des 60 derniers jours, j'estime que l'étude du projet de loi par notre Comité de la citoyenneté et de l'immigration a été exhaustive et qu'un examen plus approfondi n'a pas sa raison d'être. J'aimerais vous exposer quelques-unes des raisons pour lesquelles je considère que l'étude menée est suffisante.
Je m'apprêtais à vous parler de l'élargissement des voies vers l'intégration pour les nouveaux immigrants et les résidents permanents, car c'est en ces termes que s'est exprimé devant notre comité le parrain du projet de loi, M. Shory, lorsqu'il nous exposait les objectifs visés. Plusieurs problèmes ont toutefois été relevés quant à l'atteinte d'un tel objectif, et voici les raisons pour lesquelles je pense que nous avons déjà suffisamment débattu de ces questions.
Permettez-moi un rappel sur la teneur de nos délibérations, madame la présidente.
J'ai déjà mentionné que seuls les citoyens peuvent être recrutés. Je ne reviendrai pas là-dessus, madame la présidente, mais j'aimerais que l'on traite maintenant de la manière dont un résident permanent peut lui aussi être recruté. Les membres des forces armées qui ont témoigné devant nous ont précisé que les cas semblables étaient extrêmement rares.
Voici d'ailleurs ce que nous disait à ce sujet Mme Grazia Scoppio:
Pour être admissible à l'enrôlement dans les Forces canadiennes à titre d'officier ou de militaire du rang, une personne doit satisfaire aux conditions suivantes:
a) être citoyen canadien...
...Je ne vais pas vous lire tout l'extrait, mais elle ajoutait par la suite...
... toutefois le Chef d'état-major de la Défense ou l'officier désigné par lui peut autoriser l'enrôlement d'un citoyen d'un autre pays, s'il est persuadé qu'un besoin particulier existe et que l'intérêt national n'en souffrira pas.
À l'occasion de ce témoignage, Mme Scoppio nous a expliqué comment des ressortissants étrangers, des citoyens d'un autre pays, peuvent servir au sein des Forces armées canadiennes en arborant la feuille d'érable rouge sur leur uniforme, même s'ils ne sont pas citoyens de notre pays. J'estime que c'est une considération importante dans notre examen de ce projet de loi d'initiative parlementaire, car le parrain lui-même a fait valoir que l'accroissement du recrutement de résidents permanents était l'un des principaux objectifs visés. Mais comme on nous l'a dit très clairement, il n'y a que très peu de résidents permanents qui sont effectivement recrutés, et cela peut se faire uniquement par l'entremise du Chef d'état-major de la Défense.
Il m'apparaît bien évident, madame la présidente, que nous avons déjà discuté assez longtemps de cette question et qu'une poursuite de nos délibérations à ce sujet n'est pas justifiée. Cela démontre une fois de plus qu'il serait inutile de prolonger la période prévue pour l'étude de ce projet de loi en comité, ce qui m'amène encore une fois à vous dire que je n'appuierai pas la motion présentée.
Par ailleurs, madame la présidente, des membres du comité se demandaient si cette mesure prévue dans le projet de loi , dans la forme où il nous a été présenté, aurait un impact véritable sur les gens qui sont effectivement ciblés, compte tenu de l'arriéré actuel quant aux demandes de citoyenneté canadienne. Nous savons que les délais à ce chapitre sont excessivement longs.
Bien des gens de ma circonscription de Scarborough—Rouge River sont entrés en contact avec moi de toutes sortes de manières — Twitter, Facebook, courriel, visites à mon bureau, téléphones, réponses aux envois postaux ou même à l'épicerie locale — pour se plaindre de la complexité du questionnaire sur la résidence à remplir et du très long délai d'attente pour obtenir la citoyenneté une fois le questionnaire rempli. Le processus de demande de citoyenneté est en effet excessivement long. Il ne suffit pas d'arriver au Canada, d'y vivre pendant trois ans comme résident permanent puis de remplir une demande simple avant de réussir le test, bien évidemment. Les choses ne sont plus aussi simples.
C'est un test que je n'ai pas eu à subir lorsque je suis devenue citoyenne canadienne, car j'étais encore une enfant. C'est ma mère qui l'a fait pour moi et mes jeunes soeurs. C'est une expérience que je ne partage donc pas avec les Canadiens qui accèdent maintenant à la citoyenneté. Reste quand même qu'une chose est bien certaine: l'accession à la citoyenneté canadienne revêt une valeur tout à fait particulière aux yeux de bien des gens.
Compte tenu de ces délais d'attente extrêmement longs pour devenir citoyen canadien, nous avons demandé à des experts si le projet de loi allait permettre d'obtenir les résultats visés par son parrain et d'atteindre effectivement les groupes ciblés.
Ce même témoin nous a également dit que les résultats visés n'étaient pas vraiment très clairs. Si l'on souhaite simplement accélérer le processus d'accession à la citoyenneté pour quelques immigrants choisis en fonction de leurs compétences particulières répondant à un besoin bien précis des Forces canadiennes, alors l'adoption du projet de loi permettrait d'atteindre cet objectif et aurait un impact plutôt limité. Si toutefois l'objectif est d'ouvrir les portes des Forces canadiennes à un plus grand nombre de résidents permanents ayant les compétences voulues de manière à élargir les voies vers l'intégration des nouveaux Canadiens — et le témoin cite ici M. Shory, parrain du projet de loi — on n'obtiendrait pas les résultats escomptés.
Compte tenu des amendements déjà proposés par le gouvernement et en m'appuyant sur ce témoignage, je peux vous affirmer encore une fois, madame la présidente, que je ne vois pas pourquoi j'appuierais la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui.
J'aimerais revenir également au témoignage de l'un des colonels qui ont comparu devant nous. Nous avons discuté avec lui des forces aériennes et de tous ces gens qui souhaitent devenir pilote. C'est un peu notre rêve à tous. Vous-mêmes, madame la présidente, avez mentionné précédemment dans nos délibérations au sujet de cette motion votre désir de joindre les rangs des forces armées en nous relatant votre expérience en la matière. J'ai moi aussi déjà voulu être pilote. Le colonel avait raison de nous dire que c'est un rêve pour bien des gens. Il a indiqué avoir l'impression que tous les Canadiens voulaient voler. Il pensait alors aux aéronefs, mais je crois que beaucoup de gens aimeraient simplement pouvoir planer dans les airs.
Cela étant dit, il existe des critères de sélection extrêmement stricts qui peuvent empêcher de nombreux candidats d'entrer dans les forces mêmes s'ils sont résidents permanents. Il a aussi mentionné la formation qui est très longue et exigeante.
Si ce projet de loi a pour objectif de réduire de trois ans à un an le temps d'attente pour obtenir la citoyenneté, le colonel a mentionné que la formation dure si longtemps pour tous les candidats qu'il leur faudra tout de même patienter deux années supplémentaires avant de pouvoir entrer en service. Ils deviendraient admissibles à la citoyenneté comme n'importe quel autre résident permanent et il ne servirait à rien d'accélérer le processus de demande dans leur cas, car ils auraient de toute manière déjà purgé le délai d'attente de trois ans.
Voilà donc une autre raison pour laquelle je n'appuierai pas cette motion visant à prolonger notre étude du projet de loi , madame la présidente.
Le colonel nous a ensuite donné l'exemple de pilotes du Royaume-Uni en notant que certains d'entre eux travaillaient pour nous. J'ai moi-même un ami qui est major dans nos forces aériennes...
:
Merci, madame la présidente. Je vais essayer de me rappeler que je n'ai pas à m'excuser de vouloir participer au débat et expliquer les raisons pour lesquelles je n'appuie pas cette motion demandant une prolongation pour notre étude du projet de loi en comité.
J'aimerais maintenant faire valoir, madame la présidente, que le projet de loi dans sa forme actuelle — avant toute modification — ferait en sorte que certaines personnes pourraient devenir apatrides. Nous avons entendu de nombreux témoins. J'aimerais d'abord vous parler de ce que nous ont dit les représentants de l'UNHCR. J'ai le plus grand respect pour les gens des Nations Unies et je les remercie pour la contribution qu'ils ont apportée à notre étude de ce projet de loi. Permettez-moi maintenant de vous lire un extrait du projet de loi. On y indique qu'une personne est réputée avoir demandé à répudier sa citoyenneté canadienne si elle commet un acte de guerre contre les Forces armées canadiennes et que cette même personne doit posséder une nationalité étrangère ou être un résident autorisé d'un pays étranger.
C'est l'article 2 du projet de loi qui créerait le nouveau paragraphe 9(1.1) de la Loi sur la citoyenneté. J'ai déjà mentionné le fait, sans toutefois approfondir la question, que la notion d'« acte de guerre » n'est pas définie dans nos lois. Nous ne savons donc pas exactement ce qu'on entend par là. Les experts juridiques qui ont comparu devant le comité n'en savent pas plus que nous. Je vais en rester là pour l'instant sur cette question de la définition d'acte de guerre, madame la présidente, mais il est possible que j'y revienne ultérieurement.
Nous avons appris qu'il y avait deux façons de perdre sa citoyenneté. Il y a d'abord la répudiation volontaire, soit lorsqu'une personne renonce de son plein gré à sa citoyenneté. Il y a aussi des cas où la citoyenneté est révoquée par l'État qui l'avait accordée au départ. Lorsqu'on indique dans ce projet de loi qu'une personne est réputée avoir demandé à répudier sa citoyenneté canadienne, il n'est pas question d'une répudiation volontaire.
Je veux m'assurer de bien peser mes mots, madame la présidente, pour éviter que l'on m'interrompe à nouveau.
À ce sujet, le représentant du haut-commissaire des Nations Unies pour les réfugiés nous a appris que la répudiation est l'acte volontaire de renoncer à sa citoyenneté ou à sa nationalité alors que la révocation est le fait d'une décision des autorités de l'État. Je vais donc m'en tenir à ces termes-là aux fins du présent débat: la répudiation et la révocation de la citoyenneté.
J'aimerais voir comment les choses se passent du côté des pays qui nous servent généralement de base de comparaison. Dans le cadre de bon nombre de nos études, nous aimons comparer nos lois à celles du Royaume-Uni, de la Nouvelle-Zélande et de l'Australie, et parfois même à celles des États-Unis, nos voisins du Sud, qui sont comme nous membres de l'OCDE et au coeur de l'hémisphère Nord et du monde occidental.
Les représentants de l'UNHCR ont indiqué que la répudiation de la nationalité ou de la citoyenneté au Royaume-Uni, en Nouvelle-Zélande et en Australie s'effectue dans le cadre d'une procédure officielle qui est enclenchée par la personne souhaitant renoncer à sa citoyenneté. Aux États-Unis, six des sept façons possibles de renoncer à sa citoyenneté nécessitent une procédure officielle très semblable exigeant également une requête devant le tribunal.
Ils nous ont également indiqué qu'un citoyen américain qui sert dans les forces armées d'un pays étranger engagé dans un conflit contre les États-Unis est réputé avoir renoncé à sa citoyenneté.
Ils nous ont aussi aidés à mieux comprendre en quoi consiste la révocation de la citoyenneté, une mesure possible dans les trois pays avec lesquels nous nous comparons, à savoir le Royaume-Uni, la Nouvelle-Zélande et l'Australie.
Aux États-Unis, la Constitution n'autorise pas le Congrès à révoquer la citoyenneté de qui que ce soit, à moins bien sûr que la personne y ait volontairement renoncé. Mais si l'on s'en tient à la révocation forcée de la citoyenneté ou de la nationalité d'un individu, le Congrès américain n'est pas autorisé à le faire en vertu de la Constitution des États-Unis.
Nous en avons été témoins au Canada, alors nous savons que le ministre... Je noterais brièvement le pouvoir discrétionnaire accru conféré au ministre par ce projet de loi et toutes les discussions que nous avons eues à ce sujet. C'est un autre élément, madame la présidente, qui m'incitera à ne pas appuyer cette motion dont nous sommes saisis pour que l'étude du projet de loi soit prolongée. Je pense que nous avons déjà traité abondamment de ces questions dans le cadre de nos délibérations. J'apporterai de plus amples précisions à ce sujet plus tard dans mon intervention. Je crois que le pouvoir discrétionnaire du ministre figure au septième ou au huitième rang dans la liste des questions que je souhaite aborder. Je n'en suis qu'au deuxième point pour l'instant, madame la présidente.
Revenons donc au statut d'apatride. Les lois des trois pays auxquels nous nous intéressons, le Royaume-Uni, la Nouvelle-Zélande et l'Australie, renferment toutes des dispositions visant à offrir les meilleures protections possibles quant au risque de devenir apatride.
Bien évidemment, ces trois pays sont signataires ou parties à la Convention de 1961 sur la réduction des cas d'apatridie. Je dois en outre signaler, madame la présidente, que le Canada a bien sûr lui aussi ratifié cette convention.
Cette convention offre un cadre international pour garantir le droit de tout être humain à posséder une nationalité en établissant des protections pour prévenir l'apatridie, que ce soit à la naissance ou dans le courant de la vie. D'après ce que nous avons pu apprendre et discuter en comité dans les 60 jours prévus pour cette étude, ce projet de loi aurait pour effet que certains citoyens canadiens pourraient devenir apatrides. Si quelqu'un est citoyen d'un autre pays, rien n'empêche que sa citoyenneté canadienne puisse être révoquée. Si par contre sa citoyenneté dans l'autre pays n'est pas reconnue par les autorités en raison d'un conflit ou pour quelque autre motif...
J'en ai un excellent exemple dans ma propre circonscription de Scarborough—Rouge River. Bien des gens ont fui des situations de conflit, sont venus demander l'asile ou revendiquer le statut de réfugié au Canada et y ont vécu comme réfugiés ou comme résidents permanents avant de devenir citoyens canadiens. Ils viennent du pays où je suis née, le Sri Lanka. Après avoir quitté le pays, ces gens n'ont pas hésité à agir et à s'exprimer haut et fort pour dénoncer les violations à l'encontre des droits de la personne qui y sont sanctionnés par l'État. Dans certains cas, leur passeport sri-lankais leur a été retiré sous prétexte qu'ils n'étaient pas de véritables citoyens. Comme leur conduite ou leurs propos vont à l'encontre de la volonté de l'État, on les empêche de voyager ou d'être reconnus comme des ressortissants de ce pays.
Du point de vue du Canada, on pourrait fort bien penser que la personne est toujours citoyenne de l'autre pays, ce qui fait qu'en cas de révocation de la citoyenneté canadienne pour une raison ou pour une autre, elle se retrouverait dans une sorte de vide en perdant son passeport canadien...
M. Dany Morin: Elle serait apatride.
Mme Rathika Sitsabaiesan: Tout à fait. Elle n'aurait plus le passeport de son pays d'origine.
J'ai donné l'exemple du Sri Lanka, mais nous savons qu'il y a une pléthore de pays qui sont en situation de conflit, qu'il soit armé ou non, malgré que ce soit généralement les conflits armés qui incitent les gens à quitter en masse un pays pour aller demander l'asile dans un autre. Le Canada mettrait donc ces personnes en situation d'apatridie, ce qui contrevient bien sûr à la Convention sur la réduction des cas d'apatridie dont nous sommes signataires. Nous ne pouvons pas permettre des choses semblables, madame la présidente.
Nous en avons amplement discuté en comité. Plusieurs des témoins que nous avons reçus pendant la durée prévue de l'étude de ce projet de loi en ont traité.
Je vais vous parler encore un peu de ce sujet de l'apatridie, madame la présidente, afin de vous prouver hors de tout doute que nous avons déjà discuté en profondeur de ces questions en comité et entendu des témoignages à ce propos. Nous n'avons donc pas besoin de cette prolongation de 30 jours pour l'étude du projet de loi, car les nouveaux témoins qui pourraient comparaître reviendraient sans cesse sur ces mêmes sujets. Si nous accordons ces 30 jours supplémentaires, les mêmes questions vont refaire surface. Vous comprenez donc bien, madame la présidente, que ces 30 jours additionnels ne sont pas nécessaires pour l'examen de ce projet de loi.
Examinons la situation en Nouvelle-Zélande. Nous aimons toujours nous comparer à ces pays-là, et c'est ce que je vais faire aujourd'hui.
La Nouvelle-Zélande a intégré une déclaration à sa loi en la matière. En vertu de l'article 8.3 de la Convention, le pays a procédé au moment de l'adhésion à une déclaration lui permettant de conserver la faculté de priver un individu de sa citoyenneté néo-zélandaise lorsqu'il acquiert la nationalité ou la citoyenneté d'un autre pays, ou s'il s'acquitte de fonctions au bénéfice d'un autre État d'une manière susceptible de porter préjudice aux intérêts de la Nouvelle-Zélande.
Toujours en application de ce même article 8.3, le gouvernement du Royaume-Uni a lui aussi procédé à une déclaration afin de se garder le droit de priver une personne naturalisée de sa citoyenneté si elle agit d'une manière qui ne respecte pas son serment d'allégeance à Sa Majesté britannique. Je pourrais vous lire tout l'article, mais je vais m'en abstenir.
Ce qu'il faut retenir, c'est qu'au moment de la signature de la Convention sur la réduction des cas d'apatridie en 1961, la Nouvelle-Zélande et le Royaume-Uni se sont conservé le droit de priver un individu naturalisé de sa citoyenneté. Je trouve par contre un peu étrange que l'on ne mentionne rien au sujet des citoyens nés dans ces pays... J'en conclus donc qu'il existe deux catégories de citoyens dans ces deux pays.
La citoyenneté canadienne revêt une grande valeur aux yeux des gens. Je peux vous assurer en tout cas que c'est le cas pour ma propre famille et que c'est la même chose pour bien des résidents de ma circonscription avec lesquels j'ai eu l'occasion de m'entretenir. Madame la présidente, je rencontre régulièrement de nouveaux citoyens canadiens avec lesquels je discute de l'essence même de l'identité canadienne et des raisons pour lesquelles ils ont choisi de devenir citoyens de notre pays. Je peux toujours lire une grande fierté sur le visage de ces gens qui s'illumine lorsqu'on leur demande de parler de leur citoyenneté canadienne. Ils sont tellement fiers d'avoir pu s'affranchir de la situation qui prévalait dans leur pays d'origine pour devenir Canadiens, car le Canada est un pays qui traite tout le monde sur le même pied dans un souci permanent d'équité. Les gens nous disent qu'en devenant citoyens canadiens, ils savent que...
Je me souviens très bien de ce que m'a dit une fillette à ce sujet. Elle avait peut-être neuf ans. Elle m'a dit: « En devenant citoyenne canadienne, cela signifie que je peux aller à l'école. Cela veut dire que je suis traitée sur le même pied que les garçons. Cela signifie que je pourrai un jour devenir médecin. » C'est donc tout un monde de possibilités qui s'ouvrait devant cette fillette qui se réjouissait d'avoir droit au même traitement que tous les autres Canadiens, que toutes les autres personnes accédant à la citoyenneté canadienne.
Madame la présidente, nous ne voulons pas en arriver à un point où il y aura deux, trois, voire quatre catégories de citoyens dans notre pays. Pour l'instant, il n'y a qu'une seule forme de citoyenneté canadienne; on est citoyen canadien ou on ne l'est pas.
Madame la présidente, c'est vous même qui nous faites valoir sans cesse ce principe fondamental. On est citoyen ou on ne l'est pas, de la même manière qu'une femme est enceinte ou ne l'est pas. Elle ne peut pas être à moitié enceinte. Si vous avez un foetus dans le ventre, vous êtes enceinte. On ne peut pas dire que si le foetus n'a que deux mois, vous êtes à moitié enceinte. Et même s'il avait quatre mois et demi, soit la moitié de la période de gestation normale de 9 mois, on ne pourrait pas plus prétendre que vous êtes à moitié enceinte. C'est une réalité qui n'existe pas.
Comme vous l'avez si bien dit, soit qu'on est citoyen, soit qu'on ne l'est pas, et à partir du moment où on le devient, on l'est à part entière. Il n'y a pas de niveaux de citoyenneté. C'est ce qu'il y a de bien avec la citoyenneté canadienne.
Les représentants du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés nous ont indiqué que d'autres pays ont pris les moyens de conserver ces paliers multiples de citoyenneté, mais ce n'est pas le cas du Canada. Nous ne voulons pas emprunter cette avenue, et nous en avons déjà d'ailleurs discuté en comité. Nous avons entendu des témoignages à ce sujet. Voilà qui m'incite à vous dire encore une fois, madame la présidente, que nous avons déjà suffisamment discuté de toutes ces questions. Je vais continuer de vous présenter des éléments établissant que l'étude du projet de loi par notre comité est déjà tout à fait satisfaisante et que nous n'avons pas besoin de 30 jours supplémentaires pour revenir sur ces mêmes questions dont nous avons déjà beaucoup débattu. Je vais donc continuer de vous fournir des exemples des échanges que nous avons eus au sein du comité afin de vous démontrer très clairement, à vous comme à tous les membres du comité, que nous n'avons pas besoin de ces 30 journées additionnelles pour étudier ce projet de loi. C'est tout simplement inutile.
Permettez-moi de poursuivre. J'ai presque envie de vous parler encore d'apatridie. Je pourrais vous donner des exemples des différents pays, mais je ne le ferai pas pour l'instant.
M. Jack Harris: Mais pourquoi pas?
Mme Rathika Sitsabaiesan: Si c'est ce que vous désirez, j'acquiesce avec plaisir. Il y a déjà eu tellement d'exemples cités devant notre comité, et je pourrais tous les mentionner, madame la présidente.
Si nous voulons examiner la situation dans les différents pays, peut-être devrais-je... Commençons par le Royaume-Uni.
Voyons ce que prévoit la Loi sur la nationalité britannique de 1981 et la Loi sur l'immigration, l'asile et la nationalité de 2006 d'où sont tirés certains des extraits que je vais vous citer pour votre gouverne. Concernant la répudiation de la citoyenneté, c'est-à-dire le fait d'y renoncer volontairement, citons le paragraphe 12(1):
Si un citoyen britannique majeur et capable procède de la manière prescrite à une déclaration de répudiation de sa citoyenneté britannique, le secrétaire d'État peut, sous réserve des paragraphes (3) et (4), faire enregistrer cette déclaration.
On parle donc de quelqu'un qui renonce volontairement à sa citoyenneté.
Il y a un autre exemple au paragraphe 12(2):
Au moment où une déclaration est enregistrée en application du présent article, l'individu qui l'a faite cesse d'être citoyen britannique.
Le secrétaire d'État fait enregistrer la déclaration et accepte ainsi la répudiation. Pour demander la répudiation, il faut remplir un formulaire de déclaration et le soumettre pour enregistrement au secrétaire de l'Intérieur.
C'est donc le processus officiel à suivre pour présenter une demande au Royaume-Uni. Lorsqu'une personne renonce volontairement à sa citoyenneté et présente une demande en ce sens, le Secrétaire d'État l'accepte et l'enregistre. La personne perd alors sa citoyenneté britannique du fait d'un choix personnel de sa part. C'est de sa propre initiative qu'elle perd sa citoyenneté.
C'est toutefois au paragraphe 12(3) de la loi britannique qu'on retrouve la mesure de protection permettant d'éviter l'apatridie:
Une déclaration formulée par une personne en application du présent article ne sera pas enregistrée par le Secrétaire d'État s'il n'est pas convaincu qu'à l'issue de l'enregistrement, la personne en question possédera ou acquerra la citoyenneté ou la nationalité d'un autre pays. Si la personne ne possède pas la citoyenneté ou la nationalité d'un autre pays au moment de l'enregistrement et si elle ne l'acquiert pas dans les six mois suivants, il sera réputé qu'elle est demeurée citoyenne britannique sans égard à l'enregistrement.
On s'est donc assuré de prévoir dans la loi britannique des mesures de protection pour faire en sorte que les gens ne deviennent pas apatrides, alors que c'est tout le contraire avec le projet de loi . Des témoins l'on déjà fait valoir devant le comité, et il n'est pas nécessaire d'en discuter davantage. Nous n'avons pas besoin de ces 30 journées supplémentaires de débat et d'étude de ce projet de loi, car tout cela a déjà été démontré clairement aux membres du comité.
Comme mon honorable collègue souhaitait en apprendre davantage sur les lois britanniques en matière d'immigration, je vais poursuivre. Voici ce que prévoit le paragraphe 12(4) concernant les mesures de guerre:
Le Secrétaire d'État peut reporter l'enregistrement de toute déclaration faite en vertu du présent article si elle est faite pendant un conflit auquel Sa Majesté peut prendre part pour la défense des droits de son gouvernement pour le Royaume-Uni.
C'est une disposition tout à fait logique, car on ne veut pas que les citoyens britanniques indiquent qu'ils renoncent à la citoyenneté simplement parce qu'ils ne veulent pas participer à une guerre. Il s'agit donc d'une mesure de protection tout à fait sensée pour le Royaume-Uni qui veut compliquer la tâche aux gens qui voudraient cesser d'être citoyens uniquement pour éviter de prendre part à une guerre.
Jusqu'à maintenant, je vous ai parlé seulement d'apatridie dans le contexte de l'exposé que nous ont présenté les gens du UNHCR ainsi que de la situation au Royaume-Uni et des cas de révocation de la citoyenneté. Nous venons tout juste de parler de répudiation et de la possibilité d'arrêter le processus grâce aux mesures de protection prévues pour empêcher l'apatridie, ou dans le contexte des mesures de guerre, mais le projet de loi concerne plutôt la révocation de la citoyenneté. Examinons quelques parallèles avec le régime britannique.
Au paragraphe 40(2) de la Loi sur la nationalité britannique, on peut lire notamment ce qui suit concernant la révocation de la citoyenneté:
Le Secrétaire d'État peut révoquer par décret la citoyenneté d'une personne s'il est convaincu que cela va dans le sens du bien public.
On retrouve la mesure de protection contre l'apatridie à cet effet au paragraphe 40(4):
Le Secrétaire d'État ne peut prendre un décret prévu au paragraphe (2) s'il est persuadé que la personne visée deviendra apatride.
Même lorsqu'il s'agit de révoquer la citoyenneté d'une personne parce que cela servira l'intérêt public au Royaume-Uni, on s'assure que cette personne ne deviendra pas apatride. C'est une autre chose que l'on a déjà expliquée à notre comité.
Le Canada est signataire de la Convention de 1961 sur la réduction des cas d'apatridie. Nos lois actuelles ne peuvent pas créer de situation d'apatridie. Si, en notre qualité de parlementaires qui devons faire montre d'une diligence raisonnable, nous créions une situation qui nous amènerait à déroger à cette convention dont nous sommes signataires, nous ne respecterions pas notre devoir fiduciaire envers nos commettants et les Canadiens dans leur ensemble.
Nos témoins nous l'ont exposé très clairement au fil des 60 jours consacrés à l'étude du projet de loi . Nul besoin donc d'ajouter 30 jours à notre examen en comité. Nous avons procédé à une étude exhaustive de ce projet de loi et je pourrais vous citer une multitude d'exemples montrant que nous en avons déjà fait amplement et qu'il n'est pas nécessaire de poursuivre nos échanges et notre examen de ce projet de loi en comité.
Je vais continuer, car je sais que mon collègue voulait en apprendre davantage au sujet de la situation dans ces autres pays auxquels nous voulons généralement nous comparer. Comme je n'ai traité que d'un seul d'entre eux jusqu'à maintenant, il me reste la Nouvelle-Zélande, l'Australie et les États-Unis. Je vais vous indiquer de quelle manière ces pays procèdent pour veiller à ce que personne ne devienne apatride et faire valoir les moyens que nous devrions prendre au Canada pour faire de même.
Examinons la situation en Nouvelle-Zélande. Je vais vous citer des extraits de la Loi de 1977 sur la citoyenneté. Je vais procéder un peu de la même manière en vous parlant de répudiation de la citoyenneté et des mesures de protection prises à cet égard pour éviter l'apatridie. Je traiterai ensuite de révocation de la citoyenneté et des mesures de protection prévues.
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Merci. Je vous apprécie beaucoup, madame la présidente. Vous suivez les règles de droit, les règles de procédure, et vous manifestez beaucoup de respect pour les personnes qui prennent la parole. Je vous apprécie beaucoup. Merci, madame la présidente, pour votre façon de présider cette séance.
Ce que je m'apprêtais à dire, pour terminer... Vous venez de faire la preuve qu'une personne qui est interrompue perd le fil de ses idées.
Je pense que je disais que nous parlons régulièrement avec des fonctionnaires de Nouvelle-Zélande, d'Australie, du Royaume-Uni et des États-Unis concernant leurs expériences de la politique d'immigration et la façon dont ils gèrent l'immigration. Nous le faisons pour veiller à ce que nos lois correspondent aux leurs, ou les dépassent, et pour veiller à ce que nous adoptions les meilleures lois possible.
En ce qui concerne la renonciation volontaire de la citoyenneté, je pense qu'on a déjà démontré très clairement le bien-fondé de cela, et je ne pense pas qu'il faut se pencher plus avant là-dessus, madame la présidente. C'est la raison pour laquelle je pense que nous n'avons pas besoin de consacrer plus de temps à l'étude du projet de loi . C'est une autre raison pour laquelle nous n'avons pas besoin de prolonger l'étude de 30 jours, et pour laquelle je ne vais pas appuyer cette motion qui nous est présentée aujourd'hui, madame la présidente.
Mon collègue voulait entendre parler d'autres pays, alors je vais parler de la perte de la citoyenneté en Nouvelle-Zélande — je parle encore de la Nouvelle-Zélande —, surtout pour vous montrer que les témoins qui ont comparu devant le comité ont déjà très bien éclairci cela et qu'il n'est pas nécessaire de prolonger l'étude.
En Nouvelle-Zélande, encore une fois, l'article 16 de la Loi sur la citoyenneté se lit comme suit:
... le ministre peut, par ordonnance, priver un individu de sa citoyenneté néo-zélandaise s'il est convaincu que l'individu, alors qu'il était un citoyen néo-zélandais âgé d'au moins 18 ans et possédant toute sa capacité...
(a) a acquis, par un acte volontaire et formel, la nationalité ou la citoyenneté d'un autre pays, et a agi d'une façon contraire aux intérêts de la Nouvelle-Zélande;
(b) a exercé les privilèges ou rempli les obligations découlant d'une autre nationalité ou citoyenneté acquise par lui d'une façon contraire aux intérêts de la Nouvelle-Zélande.
Donc, nous le savons; c'est clair. Des témoins sont venus nous le dire, que la Loi sur la citoyenneté de la Nouvelle-Zélande prévoit des moyens de priver un citoyen néo-zélandais de sa citoyenneté s'il possède la citoyenneté d'un autre pays et s'il a enfreint la loi. Nous savons que ça existe déjà.
Un des pays a fait une déclaration, au moment de signer la convention. En vertu de l'article 8 de la convention — c'est bien sûr de la Convention sur la réduction des cas d'apatridie que je parle —, la Nouvelle-Zélande a fait la déclaration suivante:
... conformément au paragraphe 3 de l'article 8 de la Convention, la Nouvelle-Zélande conserve le droit de priver un individu de sa citoyenneté néo-zélandaise pour les motifs suivants, prévus aux lois néo-zélandaises en ce moment:
l'individu, alors qu'il était un citoyen néo-zélandais et...
Je ne veux pas la relire, car c'est identique à ce qui se trouve dans la Loi sur la citoyenneté de 1977 de la Nouvelle-Zélande. Cela n'a pas de sens, car la version de 1977 est la plus récente. Je vais vous dire ce qu'ils ont écrit, en fait, dans la déclaration:
... que l'individu, alors qu'il était un citoyen néo-zélandais âgé d'au moins 18 ans et possédant toute sa capacité...
(a) a acquis, par un acte volontaire et formel, la nationalité ou la citoyenneté d'un autre pays, et a agi d'une façon contraire aux intérêts de la Nouvelle-Zélande; ou
(b) a exercé les privilèges ou rempli les obligations découlant d'une autre nationalité ou citoyenneté acquise par lui d'une façon contraire aux intérêts de la Nouvelle-Zélande.
Honnêtement, en ce qui concerne la loi néo-zélandaise, cet article est identique à la déclaration rédigée en vertu de l'article 8 de la convention. C'est ce que j'ai mentionné plus tôt. En signant la déclaration, ils se sont assurés qu'aucun citoyen néo-zélandais ne risque de devenir apatride. Quand ils ont signé la convention, ils ont veillé à cela. Cela ressort très clairement des témoignages. Je peux vous faire part d'autres témoignages, madame la présidente.
Nous en avons assez entendu de la part des témoins. Nous n'avons pas besoin de prolonger l'étude de 30 jours, pour entendre encore les mêmes témoignages de la part de personnes qui disent: « Au Canada, nous allons causer de l'apatridie. Mais regardez: la Nouvelle-Zélande a veillé à établir des mécanismes de protection, et nous devrions faire de même. »
Nous le savons déjà, madame la présidente. Nous n'avons pas besoin d'étudier le projet de loi encore 30 jours. Ce n'est pas nécessaire. Le cas de la Nouvelle-Zélande nous l'a prouvé.
Je vais poursuivre, madame la présidente. Parlons de l'Australie et de la façon dont l'information vient appuyer ce que nous savons déjà de l'Australie — un autre pays auquel nous aimons nous comparer. Les passages que je vais citer sont tirés de la Loi sur la citoyenneté de 2007 de l'Australie. Encore une fois, madame la présidente, je vais aborder la renonciation volontaire, puis la perte de la citoyenneté.
Regardons la renonciation volontaire en Australie. Selon le paragraphe 33(1), « Un individu peut demander au ministre de renoncer à sa citoyenneté australienne. » Bien entendu, cette renonciation ne peut se faire qu'à la suite d'une demande — c'est la procédure officielle que l'Australie a adoptée. La personne peut faire une demande à l'aide d'un formulaire particulier. Je ne veux pas exposer les détails. Ni vous, ni les membres du comité n'avez besoin de m'entendre énumérer les détails de cette loi.
J'aimerais présenter une motion, madame la présidente.
Je propose que le comité s'ajourne maintenant.
:
Merci, madame la présidente.
Trois genres de projets de loi peuvent être présentés à la Chambre. D'abord ceux des députés, ensuite ceux du gouvernement et, enfin, ceux du Sénat.
Il importe de ne pas changer la nature des projets de loi d'initiative parlementaire. Vous savez, au comité, nous étudions constamment des projets de loi du gouvernement, et nous proposons des amendements raisonnables pour essayer de les améliorer. Ceux-ci sont sans cesse jugés irrecevables parce que, selon les greffiers et les analystes autour de la table, les amendements proposés en dépassent la portée parce qu'ils visent quelque chose qui n'est pas déjà mentionné dans le projet de loi. Dans le cas présent, on ne propose pas d'amender le projet de loi, on propose de le changer complètement en y ajoutant des éléments nouveaux.
Ce projet de loi a été proposé par un député et ensuite soumis à l'examen du comité. En cours de route, le ministre a décidé qu'il voulait le modifier parce qu'il avait ses propres idées quant à la manière dont les choses devraient être faites. Eh bien, le ministre a tout le loisir de présenter à la Chambre un projet de loi ministériel visant à modifier la Loi sur la citoyenneté et d'en assumer l'entière responsabilité.
Au lieu de cela, le ministre est en train de greffer ses idées sur un projet de loi d'initiative parlementaire, afin de le politiser davantage. Vous savez, nous en arrivons au point où les députés n'ont plus la chance de faire valoir leurs idées.
Ce projet de loi a été présenté par M. Shory et a fait l'objet d'un débat. Nous avons fait venir des témoins. Toutes ces étapes ont été franchies. Il est possible de proposer des amendements pour modifier les projets de loi jusqu'à un certain point, mais le gouvernement essaie de faire deux choses ici, et cela a pour effet de tourner en dérision la procédure de la Chambre relative aux projets de loi d'initiative parlementaire. Selon moi, nous ne devrions pas appuyer une demande de ce genre, qu'elle soit présentée le 21 juin ou le 10 juin. À mon avis, elle ne devrait pas être présentée du tout.
Je suppose que les députés de l'autre côté s'y opposeront parce que, si la demande est présentée le 21 juin, ils n'auront pas assez de temps pour faire tout ce qu'ils veulent accomplir. Eh bien, je serai à la Chambre le 21 juin. Je serai alors ravi de prendre part au débat si la Chambre est saisie de cette demande. Je suis certain que d'autres députés seront aussi présents à la Chambre ce jour-là. Beaucoup de collègues semblent s'y intéresser. Je vois que Ie leader du gouvernement à la Chambre était ici il y a quelques minutes, et le whip du gouvernement est parmi nous. Il semble s'agir d'une idée très populaire, alors peut-être que la Chambre siégera le 21 juin pour en débattre ou l'étudier.
Comme je l'ai dit, je serai à la Chambre, mais le fait est que je ne veux pas vraiment qu'on présente la demande ce jour-là, ni n'importe quel autre jour, pour faire l'objet d'un débat, parce que je considère qu'elle cause un gave préjudice à toute la notion de citoyenneté, en se servant de celle-ci comme outil politique pour dénigrer certaines personnes. Le projet de loi va déjà dans deux ou trois directions, en accordant des droits spéciaux aux membres des forces armées et en permettant de dépouiller des personnes de leur citoyenneté dans certaines circonstances. Cette mesure législative cherche trop à politiser la citoyenneté canadienne.
Ma collègue, Mme Sitsabaiesan, a parlé d'éléments dont il est question dans le projet de loi, de la notion de citoyenneté et de la manière dont on porte préjudice à celle-ci dans une mesure de ce genre. Pourtant, la démarche actuelle du gouvernement constitue une tentative pour élargir encore davantage la portée de celle-ci et, parce qu'il n'a pas réussi à faire cela dans le respect du Règlement de la Chambre, il veut en prolonger l'étude. Il veut obtenir la permission de la Chambre pour prolonger cette étude, alors que la Chambre ne s'est pas penchée sur cette question. Peut-être que, si l'on attendait à la fin de la session pour en faire la demande, la Chambre aurait plus de chances de trancher.
On penserait que les députés d'en face aimeraient cette motion parce que cela donnerait plus de temps à la Chambre pour étudier la demande visant à élargir la portée du projet de loi.
J'ignore si cela va se produire. Cependant, si le comité attend que la Chambre tranche, il aura peut-être avantage à viser le 21 juin au lieu de demain ou après-demain. Sans vouloir offenser ma collègue, je ne suis pas en faveur de présenter cette demande le 21 juin ni à aucune autre date en raison des problèmes qui ont été soulevés à propos de l'élargissement de la portée du projet de loi. Je ne crois pas que cela soit très habituel. Je ne suis au courant d'aucun précédent en vertu duquel la portée d'un projet de loi d'initiative parlementaire serait élargie à la demande du ministre afin que celui-ci puisse intervenir dans son examen. C'est très inhabituel.
Je suppose que nous sommes dans une situation inhabituelle. Le gouvernement témoigne très peu de respect envers le Parlement, et nous avons été témoins de tout ce qui s'est passé. Par exemple, nous avons examiné 46, ou 47 ou 48 motions d'attribution de temps à propos de ce projet de loi au cours des derniers jours. Certaines ont nécessité énormément de temps et voilà que le gouvernement décide soudainement qu'il y a urgence. Avant le mois de juin, il y a eu peu ou point de débat sur certaines de ces mesures législatives, et soudainement, tout devient si urgent qu'elles doivent être présentées à la Chambre afin que le gouvernement puisse promouvoir son programme politique ou faire semblant d'intervenir alors qu'il essaie simplement d'étouffer les nombreux scandales qui l'éclaboussent.
Nous ne pouvons appuyer une telle ingérence dans les travaux de la Chambre. On propose une mesure inhabituelle et extraordinaire en demandant à la Chambre de donner au comité le pouvoir d'élargir la portée d'une mesure législative parlementaire. Aucune justification n'est apportée. On ne fait que recommander d'accorder au comité le pouvoir d'envisager la possibilité d'élargir la portée du projet de loi. Le comité n'examine plus alors un projet de loi d'initiative parlementaire. Tout est alors possible. Rien n'est précisé. En accordant un tel pouvoir au comité, on se retrouve avec une série d'amendements divers pour modifier différents aspects de la Loi sur la citoyenneté, de la Loi sur les forces canadiennes, de la Loi sur la défense nationale. Agit-on ainsi afin de créer un précédent?
Le comité a pris initialement une orientation pour ensuite en adopter une autre en fonction de ce qui est dicté par un ministre, particulièrement à cette étape de l'examen du projet de loi, qui a déjà fait l'objet de la deuxième lecture et qui est rendu à l'étape de l'étude en comité, c'est-à-dire l'examen article par article. C'est pourquoi nous avons une règle régissant la portée des mesures législatives.
La première lecture a lieu à la Chambre. C'est le cas également pour la deuxième lecture, au cours de laquelle les députés peuvent débattre du projet de loi, en fonction de sa portée pour déterminer s'ils sont en faveur de son principe. On peut aimer certains aspects de la mesure législative, tout en voulant en modifier certains autres qui nécessitent un examen plus exhaustif et la présentation éventuelle d'un amendement. Habituellement, la deuxième lecture est suivie d'une troisième lecture puis de l'étude en comité au cours de laquelle on procède à l'examen article par article. Si l'on commence à modifier la portée du projet de loi, on évite ainsi sa deuxième lecture. On évite ainsi une étape complète, car le projet de loi se retrouve à l'étape de l'étude en comité. On passe outre donc à la seconde lecture au cours de laquelle on doit approuver le principe de la mesure législative. Le projet de loi sera modifié par le comité qui le renverra par la suite à la Chambre où l'on procédera à l'étape du rapport et du débat en troisième lecture. Par la suite, le projet de loi sera éventuellement adopté. Néanmoins, on évite l'étape complète de l'examen du projet de loi.
Si vous agissez ainsi à la demande du gouvernement et du ministre, qui a ses motifs de présenter les projets de loi qui obtiennent l'aval du Cabinet et qui franchissent les étapes du processus législatif... Nous nous retrouvons avec des mesures qui font l'objet d'une première et d'une deuxième lectures, et qui cadrent avec le programme politique du gouvernement. Il s'agit là d'une façon de faire conforme aux habitudes du Parlement et aux règles adoptées en la matière. Le gouvernement cherche à contourner ces règles, à faire fi du processus parlementaire. C'est un manque de respect envers le Parlement.
Ce n'est pas arrivé qu'une seule fois. On cherche en fait à éviter l'étape de la deuxième lecture et de l'approbation du principe de la mesure législative afin de concrétiser les souhaits du gouvernement. Vous ne pouvez pas vous servir d'un moyen détourné pour présenter une motion afin de demander à la Chambre de contourner ces deux règles — c'est bel et bien ce qu'on cherche à obtenir à l'heure actuelle — en vue de tirer les ficelles et manipuler les travaux d'un comité et de la Chambre pour se soustraire au processus parlementaire.
Je défie quiconque de me citer des précédents en m'en précisant la fréquence et les modalités. En obtenant le consentement unanime, il est possible de parvenir à cette fin en disant que le comité a été mis au courant et est d'accord... et il existe des précédents à cet égard. Lorsque les ministériels ou des experts témoignant pour le compte du gouvernement ou du ministère qui peut être touché par la mesure législative disent aux membres du comité qu'il faudrait amender telle disposition dont les conséquences ont été abordées par un témoin, cet amendement peut être recevable si on obtient le consentement unanime même s'il n'est pas conforme à la portée du projet de loi. C'est un aspect de la question. Vous seriez ainsi en mesure d'améliorer le projet de loi et de donner suite à l'intention du projet de loi.
Si l'intention du parrain du projet de loi d'initiative parlementaire a fait l'objet d'un débat à la Chambre des communes à l'étape de la deuxième lecture, et si la mesure législative a été adoptée à cette étape-là, si l'intention a été approuvée, si les travaux du comité permettent de déceler une lacune ne correspondant pas à l'intention visée, si les rédacteurs législatifs ou les experts témoignant pour le compte du ministère signalent qu'un certain amendement pourrait s'imposer afin de donner suite à l'intention visée, il serait alors possible d'envisager les choses autrement à condition d'obtenir le consentement unanime.
Le délai permettant d'amender le projet de loi est presque expiré ou est expiré. On a manifesté l'intention d'accroître sa portée dans une mesure qui ne correspond absolument pas avec le principe du projet de loi qui a été présenté à l'étape de la deuxième lecture. Celui-ci a été approuvé en fonction de son principe même. Le tout a fait l'objet d'un débat.
La règle régissant la portée d'une mesure législative vise à protéger le processus législatif et parlementaire, de sorte que seuls les projets de loi dont le principe a été approuvé par le Parlement peuvent être soumis aux étapes ultérieures. Si vous ne respectez pas cette règle, vous ne donnez pas aux députés de la Chambre des communes l'occasion d'examiner un projet de loi à l'étape de la deuxième lecture.
Il faut présenter un autre projet de loi si l'on veut modifier la Loi sur la citoyenneté pour ajouter la perte de la citoyenneté comme pénalité pour d'autres activités ou infractions, que le tout émane du ministre lui-même ou de quelqu'un agissant en son nom.
La citoyenneté est une notion des plus sacrées aux yeux de beaucoup. Je présume que c'est la première fois qu'on envisage de dépouiller des Canadiens de leur citoyenneté, particulièrement des Canadiens qui ont également une autre citoyenneté pour d'autres raisons. Vous pouvez être citoyen d'un autre pays sans avoir un droit de résidence dans celui-ci ou sans y être né ou encore sans que vos parents ou grands-parents y soient nés.
Les règles régissant la citoyenneté de certains pays sont rédigés de telle façon que quelqu'un qui n'a jamais mis les pieds dans un pays peut tout de même en avoir la citoyenneté si ses parents ou ses grands-parents la possèdent. Nous avons donc une catégorie de gens qui ont une double citoyenneté et peuvent être dépouillés de la citoyenneté canadienne dans certaines circonstances, n'est-ce pas? C'est une toute nouvelle notion. En agissant ainsi et en cherchant à élargir la portée d'un projet de loi qui n'a jamais fait l'objet de la deuxième lecture, vous vous engagez dans un chemin parsemé d'embûches ou dans une pente très glissante: vous faites preuve d'un manque de respect à l'égard de la notion de citoyenneté en permettant que la citoyenneté puisse être retirée à quelqu'un comme bon vous semble.
Des crimes peuvent être commis ici ou à l'étranger par des citoyens canadiens. Ils peuvent alors subir leur procès au Canada en vertu du droit criminel qui s'applique à tous. Les citoyens canadiens doivent être traités d'une façon égale en vertu d'une application régulière de la loi. Cela ne me pose aucun problème. Malgré les commentaires qui ont été formulés ad nauseam par les ministériels tant à la Chambre qu'en comité, commentaires selon lesquels le NPD est laxiste en matière de criminalité et est indulgent envers les criminels, je signale que je préconise toujours que la loi soit appliquée. La loi vise à protéger les citoyens, à protéger les Canadiens ainsi que les touristes parce que notre Constitution précise que nous voulons vivre en adhérant aux principes de paix, d'ordre et de bon gouvernement.
Nous ne pouvons pas parler de bon gouvernement lorsqu'on cherche à contourner les règles pour présenter des amendements inhabituels afin de se soustraire bon gré mal gré aux processus parlementaire et législatif habituel de la Chambre. Il fut une époque où les projets de loi d'initiative parlementaire étaient relégués aux oubliettes. J'ai appris récemment le nombre de projets de loi d'initiative parlementaire qui ont été adoptés par la Chambre jusqu'au début des années 1990. Dans la plupart des cas, il s'agissait de modifier le nom d'une circonscription ou de quelque chose d'autre. Ce sont là les seules mesures législatives qui ont été adoptées.
L'examen des projets de loi d'initiative parlementaire a fait l'objet de plusieurs modifications au cours des dernières décennies. Il y a d'abord eu celles proposées par ce qui est connu communément sous le nom de comité McGrath. Il s'agissait en fait du Comité spécial sur la réforme de la Chambre des communes. Lorsque j'ai été élu député fédéral en 1987, j'ai remplacé James McGrath comme représentant de ma circonscription. Celui-ci est devenu par la suite lieutenant-gouverneur de Terre-Neuve-et-Labrador. C'est lui qui représentait ma circonscription lorsque j'ai été élu en 1987. Il nous a laissé un héritage durable, lorsqu'il présidait le comité qui s'est penché sur le rôle du député.
Bill Blaikie, un de mes anciens collègues, était un membre très important de ce comité qui s'est penché sur le rôle du député. Il a examiné dans quelle mesure le député pouvait jouer un rôle important au sein du Parlement. Je sais que des ministériels ne veulent pas se contenter d'être des « animaux de cirque », comme quelqu'un l'a évoqué l'autre jour. Ils veulent plutôt avoir un rôle pertinent à jouer. Ils souhaitent être en mesure de présenter des projets de loi d'initiative parlementaire. Ils veulent avoir un apport constructif.
Ces ministériels peuvent remercier James McGrath et Bill Blaikie, mon ancien collègue, si le rôle du simple député a été accru à la Chambre des communes.
Je crois que c'est pour le mieux. Je vois mon collègue du district doté du nom le plus long au pays, qui se termine par « Sea to Sky Country », la meilleure partie. Il aime cette partie. Je crois qu'elle plaît à tous, monsieur Weston. Il y a aussi tous ces autres noms, comme Sunshine Coast, Sea to Sky Country, West Vancouver.
Une voix: Copenhague.
M. Jack Harris: Copenhague? Il doit l'avoir mentionné. J'ai oublié cette partie-là aussi.
Mais c'est probablement une bénédiction que de vivre sur la Sunshine Coast, à proximité de Sea to Sky Country. Je sais qu'il adore assumer le rôle de simple député au sein de la Chambre. Nous sommes heureux que ce rôle ait été élargi par suite de la commission McGrath, dont l'un des principaux avantages a été la création des affaires émanant des députés. Ce qui me tracasse, et je vois que la présidente s'interroge sur la pertinence de tout ceci, mais ce qui me tracasse...
La vice-présidente (Mme Jinny Jogindera Sims): Je sais que vous allez y arriver.
M. Jack Harris: Je veux m'assurer que la présidente sait que vais revenir au vif du sujet. Mais ce qui me tracasse au sujet de cette motion — qu'on s'en occupe le 21 ou le 29 juin, en septembre prochain ou au début de la semaine prochaine —, c'est qu'elle constitue une injustice par rapport au fait que les affaires émanant des députés devraient être des affaires émanant des députés. On présente la mesure à la Chambre des communes, passe l'étape de la deuxième lecture, obtient l'approbation de principe, passe par l'étape du comité, pour réaliser qu'on n'est pas totalement libre d'agir. On ne se dit pas alors « Nous nous sommes rendus jusqu'au comité; nous y ferons alors jouer notre majorité pour modifier la portée du projet de loi, nous aborderons d'autres sujets, nous ajouterons quelque chose, et si nous avons besoin de l'aide de la Chambre, nous y retournerons pour obtenir sa permission avant de terminer nos travaux » sans même que la mesure ait fait l'objet d'une deuxième lecture sur les principes de la portée élargie. Voilà ce qui, fondamentalement, ne va pas avec cette approche.
Je m'y oppose donc. Nous avons entendu, grâce à Mme Sitsabaiesan, les préoccupations soulevées concernant le projet de loi comme tel et la raison pour laquelle...
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Absolument. C'est une des raisons pour lesquelles j'étais heureux qu'il y ait un amendement à proposer.
Ce qui vient de se passer apporte de l'eau à mon moulin. Une fois encore, jamais je refuserais aux membres l'occasion de se lever ou de rester assis et de lever la main pour invoquer le Règlement. Je ne découragerai pas ces interventions, car elles s'inscrivent dans le processus, et je respecte le processus. La pertinence revêt également une importance capitale; voilà pourquoi j'ai souligné, au cours des quelques instants au cours desquels j'ai déjà parlé, que si un membre juge que je m'éloigne un peu trop du sujet, il ne m'offensera pas en invoquant le Règlement et en expliquant pourquoi il considère que je ne suis pas pertinent. Je serai plus qu'heureux d'établir un lien direct avec le sujet, car je ne veux en aucun cas, madame la présidente, m'éloigner d'une discussion que je considère très importante.
C'était intéressant, madame la présidente. Quand vous avez interrompu les échanges initialement, vous avez fait référence à la motion comme telle et à l'amendement, qui figure justement devant moi. J'avais pensé le lire à un moment donné, mais pas maintenant, car je ne crois pas que ce soit nécessaire. Mais nous en arriverons au point où je voudrai le faire, particulièrement si l'on juge nécessaire que je fasse un lien quelconque.
Mais c'est du processus dont nous discutons vraiment. Nous sommes saisis d'un amendement visant à accélérer le processus ou à établir un échéancier permettant de faire rapport sur le projet de loi. Je crois que bien trop souvent, les législateurs, ou les parlementaires, tiennent les choses pour acquises. C'est, selon moi, une grave erreur, car quand on tient quelque chose pour acquis, il arrive souvent que certaines personnes puissent tenter de circonvenir ou de contourner le système, voire les règles, ou de se servir de ces dernières de manière à limiter la capacité des gens à participer au débat.
Je veux donner quelques exemples de ce genre de procédés, madame la présidente. Il y a quelques heures, j'ai demandé à mon adjoint d'effectuer une brève recherche concernant les projets de loi et le temps qui leur est accordé. Les membres du comité sauront fort bien dans quelle mesure j'ai eu l'occasion de parler de l'attribution du temps à la Chambre des communes. Ces attributions dépendent entièrement du processus, et c'est de cela dont nous discutons ici.
Nous tentons d'inscrire quelque chose au calendrier, et il est très important que nous prenions acte du rôle très profond que joue ce calendrier dans la vie de tous. Il existe une différence considérable, par exemple, entre les périodes où le Parlement siège et où il ne siège pas. Quand la Chambre siège environ neuf mois par année, on s'attend à ce que les députés soient présents ici, à Ottawa, trois semaines par mois. L'autre semaine n'est pas une semaine de congé, comme on me le rappelle souvent.
Je sais que les membres du comité des deux côtés de la salle en profitent pour la plupart pour tisser des liens avec leurs électeurs. Je sais que c'est ce que je fais. Dès que j'en ai la possibilité, je veux pouvoir échanger avec les résidents de Winnipeg—Nord. Je leur sais gré de m'accorder leur confiance et j'espère être capable d'accomplir mon mandat pour qu'ils soient satisfaits des efforts que je déploie et, au final, m'aident à me faire réélire.
En cours de session, il est supposé y avoir un programme législatif, et c'est exactement ce sur quoi porte le présent projet de loi, de manière très particulière, je dois dire. Si on regarde le temps qui lui est attribué, particulièrement à l'étape de l'étude en comité, je me doute qu'il y a très peu de projets de loi d'initiative parlementaire qui se voient accorder autant d'attention que celui-ci, et M. Shory en est peut-être plus conscient, puisqu'il s'agit de son propre projet de loi.
Il y a donc lieu de se demander pourquoi, et j'aimerais avancer une hypothèse à ce sujet. Mais avant de le faire, je veux poursuivre sur la question du processus. Nous parlons des périodes où nous siégeons et où nous ne siégeons pas, de l'importance de ce que nous faisons pendant que nous sommes en session et de la manière dont le calendrier fonctionne. Ce dont il est vraiment question ici, c'est de la collaboration entre le leader du gouvernement à la Chambre et des partis de l'opposition pour tenter d'établir un calendrier bien ficelé permettant de respecter les programmes du gouvernement et de l'opposition. Il faut équilibrer...
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Merci, madame la présidente.
Comme je j'ai dit, certaines de ces négociations sont un peu comme du grand art. Je peux imaginer les leaders parlementaires ou peut-être même les directions des caucus se réunir et dresser la liste de tous les projets de loi dont nous sommes saisis. Le gouvernement a la responsabilité de rencontrer les ministres, et l'opposition doit rencontrer les différents porte-parole pour déterminer les critères qui font qu'un projet de loi est important, et décider pour chaque type de projet de loi quel genre de débat devrait avoir lieu à la Chambre des communes, par rapport au temps qu'il faut consacrer à l'étude en comité. C'est variable.
Cela s'applique également au projet de loi de M. Shory. Si on négociait vraiment de bonne foi, je suppose que nous ne serions probablement pas ici en ce moment, qu'il y aurait eu une entente au sujet du projet de loi d'initiative parlementaire de M. Shory.
Une voix: Bravo!
M. Kevin Lamoureux: Je ne dis pas ça à la légère, car, comme un certain nombre de députés le savent peut-être, j'exerce les fonctions de parlementaire depuis un peu plus de 20 ans. J'ai eu l'occasion d'assumer le rôle de leader parlementaire et de leader parlementaire adjoint. J'ai exercé mon rôle de leader parlementaire au sein de l'assemblée législative du Manitoba. J'ai fait partie de gouvernements majoritaires, au sein desquels j'ai joué le rôle de leader parlementaire, et de gouvernements minoritaires, et c'est pourquoi je sais à quel point il est essentiel que l'équipe du leader parlementaire négocie de bonne foi. Si elle est prête à faire cela, madame la présidente, les choses se dérouleront de manière plus ordonnée, que ce soit à la Chambre des communes ou en comité.
Prenons maintenant le projet de loi de M. Shory comme exemple, car je sais que les gens veulent que nous examinions comme il se doit le projet de loi de M. Shory ce soir. Si j'étais à la place de M. Shory, j'aurais été disposé à discuter avec le leader parlementaire adjoint ou le leader parlementaire ou des membres de son équipe de la voie à suivre en ce qui concerne ce projet de loi. Après tout, c'est un projet de loi unique. C'est différent d'un projet de loi du gouvernement. Les projets de loi d'initiative parlementaire sont très particuliers. Ce type de projet de loi n'existe même pas à l'assemblée législative du Manitoba.
Je suis très impressionné par le nombre de projets de loi d'initiative parlementaire qui sont présentés. C'est un chiffre incroyable. Certains députés en ont présenté toute une série — une douzaine environ. Par contre, certains députés n'en n'ont présenté aucun.
J'en ai présenté un moi-même, qui est très bon. Si je peux en faire un peu la promotion ce soir, je vais probablement le faire. Essentiellement, et je crois que tout le monde voudra l'appuyer... j'ai voté pour que le projet de loi de M. Shory soit étudié en comité. J'espère qu'on me rendra la pareille, car c'est une bonne mesure législative. Mais vous savez ce que j'ai déjà fait? J'ai déjà discuté de mon projet de loi avec mon caucus. Notre leader parlementaire a une bonne idée de ce que j'envisage en ce qui concerne ce projet de loi; je le lui ai expliqué.
Je me souviens de l'exposé de M. Shory. Il a raconté qu'il s'était rendu dans sa circonscription et qu'il était fier de pouvoir parrainer ce projet de loi. Il a parlé de sa famille et de l'importance qu'avait ce projet de loi non seulement pour lui, mais aussi pour la collectivité. Son message, si vous lisez son allocution... je sais que j'en ai une copie ici, madame la présidente, et je pense qu'un peu plus tard, je vais en lire certains passages. Si vous lisez l'allocution de M. Shory, je suis certain que vous comprendrez pourquoi il a si vivement souhaité être présent ici pendant l'étude son projet de loi. De toute évidence, il est préoccupé par le sort de son projet de loi, et je ne le blâme pas, madame la présidente. Je lui souhaite la meilleure des chances, mais je dois dire que certains amendements s'imposent.
Je vous mets en garde, car la question de la portée pourrait au bout du compte faire en sorte que le projet de loi ne soit pas adopté. En tant que députés, nous devons être conscients du processus dans lequel nous nous embarquons quand nous choisissons d'accorder la priorité à un projet de loi. La possibilité est là. La Chambre est saisie du projet de loi, elle doit en débattre pendant deux heures et ensuite la mesure législative sera envoyée au comité.
Je crains, madame la présidente, que le ministre de l'Immigration n'utilise le député comme un pion. Je ne fais que spéculer. Je veux simplement m'assurer que M. Shory comprenne qu'il peut être manipulé.
Il est question du ministre de l'Immigration, et je présume que le Bureau du premier ministre était au courant. Je serais étonné d'apprendre que l'équipe du leader parlementaire n'avait pas été informée, madame la présidente. Je serais prêt à parier, et je n'ai pas l'habitude de faire des paris, que l'équipe du leader parlementaire était au courant. Cela veut dire que le leader parlementaire, le leader parlementaire adjoint, le whip, le Bureau du premier ministre et M. Shory avaient été informés au sujet des discussions, et bien entendu le ministre de l'Immigration.
Le programme est loin de ressembler au type de programme que M. Shory aurait établi. Pourquoi est-ce que je dis cela, madame la présidente? Si vous avez écouté un grand nombre des commentaires qu'a formulés le ministre de l'Immigration, et même écouté certains des témoins qui ont comparu devant le comité, vous constaterez qu'il y a beaucoup de contradictions. Le ministre semble tellement heureux de dire aux Canadiens ce qu'il souhaite faire avec le projet de loi de M. Shory.
Le ministre aurait dû savoir qu'en suggérant de faire ce qu'il proposait de faire avec le projet de loi de M. Shory, cela aurait eu deux conséquences. Premièrement, cela aurait changé la portée de la loi. C'est pourquoi nous sommes ici en ce moment, madame la présidente, c'est-à-dire à cause de ce problème. Le ministre aurait dû le savoir, madame la présidente.
On ne sait pas si le ministre va réussir; c'est difficile à dire, car il faut d'abord voir quel type d'amendements seront éventuellement proposés. Nous devons attendre de voir à quoi ressemblera au bout du compte le projet de loi. Si le ministre réussit, je ne vois pas cela comme une chose positive. Je vois cela comme une chose négative, et je vais vous expliquer pourquoi, madame la présidente. En ce qui concerne ce projet de loi, le ministre affirme qu'il n'a pas besoin d'attribution de temps.
Nous connaissons tous les règles et la procédure. Quand un ministre présente un projet de loi, quelle est la procédure? Il y a d'abord la première lecture. Ensuite, il y a la deuxième lecture. Si des amendements substantiels s'imposent avant la deuxième lecture, il existe des moyens d'apporter ces modifications. Mais là où il commence à y avoir des changements, madame la présidente, c'est au sujet de l'attribution de temps à l'étape de la deuxième lecture à la Chambre.
Comme nous le savons tous, il y a une limite fixée pour les projets de loi d'initiative parlementaire. À l'étape de la deuxième lecture, deux heures de débat au plus sont autorisées quand il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire. Que se passe-t-il durant ces deux heures? Le député qui propose le projet de loi prend la parole pour présenter sa mesure législative à l'étape de la deuxième lecture. Il dispose de 10 minutes pour expliquer pourquoi le projet de loi est important pour lui personnellement et pourquoi il estime que l'adoption de cette mesure va dans l'intérêt du Canada. Très souvent, lors d'une allocution de la sorte, des députés des différents caucus poseront directement des questions au député.
J'étais à la Chambre des communes quand M. Shory a présenté son projet de loi. Comme je suis membre des Forces canadiennes, ses propos m'intéressaient particulièrement. Je n'ai bien sûr pas vraiment fait de commentaires au sujet de l'objectif du projet de loi. Il vise à accomplir deux choses, mais j'ai mis l'accent sur un élément — vous comprendrez si vous examinez tous les commentaires au sujet du projet de loi à l'étape de la deuxième lecture — c'est-à-dire la question des deux ans. Il me semble que la plupart des commentaires portaient sur cette question et sur les Forces canadiennes. C'est là-dessus qu'on semblait se concentrer.
Je vais vous donner une idée de ce que j'ai dit en deuxième lecture, mais permettez-moi d'abord de continuer mes observations au sujet de ce discours de 10 minutes. À l'étape de la deuxième lecture, M. Shory devait s'exprimer pendant 10 minutes et ensuite, les députés qui souhaitaient lui poser des questions pouvaient le faire. J'ai été plus que ravi de lui poser une question. J'ai bien écouté son discours.
Pendant qu'il parlait, puisque j'avais avec moi mon ordinateur portable, j'ai pensé consulter le site des Forces canadiennes pour voir ce qu'il en était de cette question de la citoyenneté canadienne. À ma grande surprise, madame la présidente, dans le site Web des Forces canadiennes, on pose la question suivante: souhaitez-vous devenir membre des Forces canadiennes? La question n'était pas formulée exactement ainsi bien entendu, mais il demeure que dans le site Web, on pose effectivement cette question. On énonce les critères d'admissibilité, ou de préadmissibilité, pour les Forces canadiennes.
Un des critères est que vous devez être citoyen canadien. Ce n'est pas logique du tout. Si je suis un immigrant admis, ou un résident permanent au Canada, et que je lis la première ou la deuxième page, je vais penser que je ne respecte pas ce critère. Je ne suis donc pas admissible. Cela me préoccupe, car c'est ce qui s'affiche immédiatement. Souvenez-vous, le projet de loi précise que si vous êtes un membre des Forces canadiennes, vous devrez attendre deux ans, au lieu de trois ans, pour obtenir votre citoyenneté. Après cette période de deux ans, vous obtenez votre citoyenneté. De temps à autre, je crois qu'il est important, madame la présidente, que j'explique la raison pour laquelle cela est lié à la motion dont nous sommes saisis. Nous devons rappeler qu'il est question du processus, du délai et de la façon dont nous essayons d'expédier l'étude de ce projet de loi et de sa portée. C'est entièrement lié à ce dont je parle.
Quand j'ai consulté le site Web — je reviens maintenant au site Web — je me suis posé des questions. En ce moment, je ne me souviens pas exactement ce que j'ai demandé à M. Shory. Toutefois, je sais qu'après lui avoir posé mes questions, je lui ai aussi parlé. Le sujet a donc été abordé quand il a répondu à mes questions ou plus tard quand nous avons discuté tous les deux. Je lui ai montré le site Web, et je lui ai dit que j'étais très préoccupé. Peu après — je ne me souviens plus si c'était une heure ou deux par après, je ne m'en souviens vraiment pas — il m'a remis un document. Il paraît que si on clique ici et qu'on clique là et qu'on fait une bonne recherche, on trouve quelque part dans le site Web un document qui donne une meilleure définition de la citoyenneté canadienne. Il semblerait, en fait, qu'il ne soit pas nécessaire d'être un citoyen canadien. S'il n'y avait pas eu cette deuxième lecture, madame la présidente, je n'aurais pas eu l'occasion de prendre connaissance de cette information.
Donc, un député présente un projet de loi d'initiative parlementaire. Ensuite, des représentants des autres partis politiques, des députés, disposent de cinq minutes pour poser des questions. On compte donc 15 minutes pour le discours et les questions de députés. Si on dispose d'une heure, il reste 40 minutes durant lesquelles quatre autres députés pourront à leur tour présenter leur projet de loi, mais cela dépend de la durée du discours de chacun.
Si vous suivez le débat qui a lieu au sujet d'un projet de loi d'initiative parlementaire, vous constaterez que la première heure est très intéressante. C'est probablement la meilleure partie à écouter, surtout sur la chaîne CPAC. Vous pouvez obtenir une bonne idée des différents enjeux. Ce qui est très intéressant, c'est que plus souvent qu'autrement, on procède à des votes libres. Certains partis acceptent davantage les votes libres que d'autres, mais je ne nommerai pas quel parti a tendance à ne pas tenir de vote libre — c'est une question que j'aborderai un autre jour.
M. Dykstra a montré du doigt les néo-démocrates. C'est lui qui a fait ce geste, pas moi. Cela dit, madame la présidente, je crois que c'est important.
Après cette première heure de débat, que se passe-t-il? Le projet de loi revient au Feuilleton dans un délai raisonnable, mais je ne sais pas précisément quel est ce délai. C'est ce qui s'est produit dans le cas du projet de loi de M. Shory.
Encore une fois, il doit y avoir un deuxième débat. Souvenez-vous que le premier débat dure au maximum une heure. Au cours du deuxième débat, six intervenants au plus peuvent prendre la parole, à moins, bien entendu, que chaque personne soit très brève, ce qui signifie qu'il serait possible qu'un septième intervenant puisse prendre la parole. Très souvent, durant cette deuxième heure, trois personnes prennent la parole et ensuite c'est fini. On passe au vote, et les deux heures ne sont même pas toutes écoulées. On déclare ensuite qu'il est une demi-heure plus tard et on passe à des affaires du gouvernement ou quoi que ce soit d'autre.
C'est un processus intéressant, madame la présidente, mais cela signifie qu'au terme de ces deux heures, le député sait que son projet de loi fera l'objet d'un vote.
C'est ce qui s'est produit. Très souvent, quand on parle d'un vote, il est véritablement question d'un grand nombre de députés... je ne sais pas si d'autres députés ont eu l'occasion de voir des situations — comme je l'ai dit, j'aime beaucoup l'heure qui est consacrée aux projets de loi d'initiative parlementaire — où un projet de loi reçoit l'appui de tout le monde. Cela m'est arrivé souvent.
Personnellement, madame la présidente, je crois qu'il faudrait changer la règle.
Il y a une petite astuce. Quelqu'un doit dire « non ». Si personne ne dit « non », alors on continue. Très souvent, le député dit: « Je demande un vote », et on voit un de ses collègues se cacher la bouche et dire « non » d'une voix forte. Le Président dit alors: « Quelqu'un a dit non », et il demandera le vote. Alors, cinq députés se lèveront, et il y aura un vote. Il ne faut pas les blâmer.
Personnellement, je souhaite aussi qu'il y ait un vote à propos de mon projet de loi. Je veux voir si quelqu'un va voter contre l'idée qu'un chef assume la responsabilité des publicités politiques qu'il autorise au bout du compte. J'ose croire que nos chefs veulent être tenus responsables et faire preuve de transparence, mais ce sujet concerne un autre projet de loi.
Revenons au projet de loi de M. Shory, pour lequel il y a eu un vote par appel nominal. Je sais qu'il y avait certaines inquiétudes au sein de mon caucus, et un grand nombre de mes collègues m'ont demandé mon avis parce que nous sommes en faveur des votes libres au sujet des projets de loi d'initiative parlementaire. Souvent, des membres du caucus libéral s'adressent à un porte-parole ou à quelqu'un d'autre au sein du parti, ou même au parrain du projet de loi, afin de mieux comprendre la nature du projet de loi, et j'ose croire que c'est une bonne chose.
Je me disais que pour le moment, c'était correct, et que je devais attendre de voir ce qui se passerait lorsque le projet de loi serait renvoyé en comité. C'est ce que j'ai suggéré aux membres de mon caucus et c'est ce que je leur aurais recommandé. J'étais très content des membres de mon caucus, après qu'on m'ait demandé mon avis et mes idées, car la décision — je crois qu'elle venait de tous les membres de mon caucus — était de me donner l'occasion, en tant que porte-parole du projet de loi, de le voir être renvoyé au comité.
Je crois qu'aucun député libéral n'a voté contre son renvoi au comité, ce qui démontre un grand appui pour que le projet de loi de M. Shory soit renvoyé au comité. Je crois que nous étions très ouverts à l'idée. Je dois admettre que j'ai été un peu embarrassé lorsque nous avons découvert que le ministre de l'Immigration avait d'autres plans pour le projet de loi de M. Shory. Je crois que cela a préoccupé plusieurs membres de mon caucus, car maintenant, le projet de loi a déjà franchi l'étape de la seconde lecture et il semblerait que quelque chose de contraire à l'éthique — « non officiel » est probablement une meilleure expression — s'est produit.
Cela dit, je suis un optimiste, je vois toujours mon verre à moitié plein et au bout du compte, je voulais voir si nous serions en mesure de faire quelque chose, d'apporter quelques amendements au projet de loi, le rendre un peu plus sain, un peu plus acceptable pour les Canadiens. J'avais certaines questions et préoccupations à partager avec le comité.
Le projet de loi est donc renvoyé au comité, et que se passe-t-il pendant la réunion? Étant donné que j'ai un parti pris, j'ai des problèmes à faire confiance au ministre de l'Immigration actuel, pour être honnête, et il faut donc tenir compte de cela. Pendant la réunion du comité — et j'y assistais avec l'idée de trouver des moyens d'améliorer le projet de loi —, j'ai écouté les témoins, et plusieurs exposés étaient très intéressants.
Plusieurs députés présents ce soir ont aussi assisté à cette réunion du comité pendant laquelle nous avons entendu des membres des Forces canadiennes. Vous vous souviendrez qu'un colonel, ou peut-être un lieutenant-colonel, a dit quelque chose concernant les Forces canadiennes... Nous voulions savoir combien de membres des Forces canadiennes étaient des immigrants reçus. Autrement dit, combien de personnes seraient visées? Bonne question.
Je ne veux pas nécessairement m'attribuer le mérite de la question, mais c'était une bonne question et j'ai été assez surpris par la réponse. N'oubliez pas que nous avons des dizaines de milliers de membres dans les forces régulières et des dizaines de milliers d'autres dans la réserve. M. Opitz et moi-même sommes très fiers de nos antécédents militaires. Son expérience au sein des forces a été plus longue que la mienne, et j'ai aimé chaque jour que j'ai fait partie des forces.
Mais cela dit, je crois qu'il a dit que 14 résidents permanents seraient acceptés, chaque année. Ce qui m'a stupéfait, c'est que ce n'est pas comme si 14 personnes s'enrôlaient dans les forces. C'est plutôt comme si les forces cherchaient à trouver 14 types de spécialistes et à les convaincre de s'enrôler dans les forces. Cette constatation m'a immédiatement fait réfléchir à un grand nombre de problèmes qui pourraient se poser, car j'encourage énormément le multiculturalisme. Je crois que notre plus grande force, en tant que nation, c'est notre diversité, et que si nous pouvons en tirer profit, nous serons le meilleur pays du monde pendant longtemps. Nous devons en tirer profit.
J'ai été très surpris par ce nombre et je me suis dit qu'il y avait peut-être un problème plus grave dont il fallait s'occuper. J'étais donc content d'une certaine façon. Imaginez, nous sommes passés de la deuxième lecture au renvoi au comité et pendant cette étape, nous avons découvert des renseignements qu'ignoraient, je pense, tous ceux qui étaient à cette table, madame la présidente.
Il y a donc des personnes, comme moi, qui ont examiné certains des faits qui ont été présentés, et je crois que nous pourrions voir un changement au bout du compte, qu'il s'agisse d'un parti politique ou d'une politique partisane qui pourrait être influencée ou du renforcement d'une politique.
Je présume que cela dépend d'où, sur l'échiquier politique, une personne se trouve. Mais il s'agit d'une question dont on doit parler. J'ai appris cela pendant cette réunion du comité. Je n'aurais pas appris cela sans le projet de loi d'initiative parlementaire de M. Shory, et les limites, c'est-à-dire le temps imparti dans le processus, n'est-ce pas? Cela a été très utile.
J'avais plusieurs autres idées, mais soudainement, nous commençons à entendre parler... oh, oh — le parle de ses propres amendements, et ils sont assez substantiels. Ensuite le type de témoins, je pense, a commencé à changer un peu. De plus en plus de témoins commencent à parler des amendements potentiels plutôt que de parler du projet de loi de M. Shory. Cela m'a un peu étonné, car je souhaitais qu'on continue à discuter surtout du projet de loi de M. Shory.
L'un des problèmes, et je vais vous donner un exemple — et c'est pourquoi c'est dangereux lorsqu'on commence à envisager de modifier la portée du projet de loi, et c'est le but de cette motion. Il s'agit de choisir une date et qu'au bout du compte le projet de loi soit retardé... quelle qu'en soit la portée. À mon avis, il y avait de nombreuses questions sur lesquelles nous aurions dû nous pencher pendant que nous discutions du projet de loi de M. Shory, sans avoir à changer la portée.
Mais nous nous souvenons tous qu'il n'y a eu aucun échange. Quel serait le processus habituel? Eh bien, au cours du processus habituel, une fois qu'un député présente un projet de loi d'initiative parlementaire à un comité — car j'ai eu l'occasion d'assister à ces occasions aussi, vous savez —, on fait venir les témoins, et souvent, ils viennent de différentes régions du pays et ils donnent leurs avis, leurs idées, etc., sur un projet de loi d'initiative parlementaire. Je crois que c'est formidable. Nous devons continuer à faire, à encourager et à appuyer cela.
Après avoir entendu les témoins, que se passe-t-il? À la fin de la journée ou à la fin de ces exposés, des personnes commenceront à parler de l'étude article par article. On entend souvent des présentations. Cela ne s'est pas produit dans ce cas-ci avec le projet de loi de M. Shory. Ce qui est arrivé avec le projet de loi de M. Shory ressemblait plutôt à une confession. Je me souviens de la confession. Je ne dirais pas que j'étais surpris, mais j'étais déçu que le soit d'avis qu'il était nécessaire d'apporter des changements profonds au projet de loi de M. Shory. À mon avis, il exploitait un projet de loi d'initiative parlementaire. Cela m'a donc déçu.
J'ai été agréablement surpris lorsque M. Dykstra a admis, au début de la réunion, que cela allait changer la portée du projet de loi. Donc au lieu d'essayer de se cacher ou de nous forcer à étudier des amendements qui, nous le savons, modifieront la portée du projet de loi, le gouvernement a, en quelque sorte, agit honorablement en admettant que cela allait changer la portée du projet de loi.
Madame la présidente, c'est à ce moment que mes 20 années d'expérience en tant que parlementaire m'ont fait réaliser que nous ne pouvions pas faire cela et que c'était inacceptable pour un grand nombre de raisons. Nous ne pouvons pas accepter de modifier la portée du projet de loi.
Formulons quelques hypothèses et présumons que nous n'aurions pas changé la portée du projet de loi et que M. Dykstra n'avait pas présenté cette motion. Que serait-il arrivé, selon toute probabilité, madame la présidente?
Je crois qu'il y aurait eu plus de dialogues entre les députés et que nous nous préparerions à examiner le projet de loi, et...
La présidente (Mme Jinny Jogindera Sims): D'accord, je voulais seulement m'assurer que vous saviez que je vous écoute.
Continuez.
M. Kevin Lamoureux: Si nous continuons d'émettre des hypothèses, que serait-il arrivé si M. Dykstra n'avait pas présenté cette motion?
Eh bien, j'ai une bonne idée de ce qui serait arrivé et je vais brièvement en parler. Ce qui serait arrivé, c'est que les députés auraient discuté du contenu du projet de loi de M. Shory. Nous n'aurions pas eu ces discussions sur les intentions du , et je crois que cela aurait été une bonne chose, madame la présidente.
Je vais vous expliquer. Lorsque je pense à la portée du projet de loi — ou à ne pas en modifier la portée —, et aux questions importantes auxquelles on doit répondre... Je ne sais pas si je l'ai mentionné dans mes commentaires au sujet de la deuxième lecture, mais je sais que je l'ai mentionné dans de nombreux autres commentaires. Il faudrait que je relise mes commentaires au sujet de la deuxième lecture... mais je l'ai probablement mentionné. J'en ai un exemplaire ici et je peux peut-être le consulter, mais l'une des premières choses qui m'est venue à l'esprit, c'est oui. Comme je l'ai dit, je suis fier d'être un ancien membre des Forces canadiennes. J'ai aimé servir. Ma dernière affectation était à Edmonton, Namao ou Lancaster Park, qui hébergeait à l'époque l'escadron 435, qui menait des activités de recherche et sauvetage. J'ai été posté dans la tour pendant quelques années. Au bout du compte, je voulais travailler avec le radar.
Mais au bout du compte, j'étais ouvert à l'idée que deux ans, trois ans... nous voulons encourager les gens. Vous savez, j'avais plusieurs questions. Allons-nous ouvrir un bureau à l'aéroport pour recruter les gens dès leur arrivée...? Mais c'était plutôt des commentaires ironiques. Il y avait aussi des questions sérieuses, par exemple, qu'en est-il des officiers de la GRC? Ne devrait-on pas aussi envisager d'inclure les agents de la GRC?
Je crois que des représentants de la GRC ont comparu devant le comité, madame la présidente, et nous avons aussi d'anciens agents de la GRC. Plus tôt, à la Chambre, j'ai entendu — j'ai eu l'occasion de parler un peu à la Chambre, car je n'avais pas pu le faire ici — que parmi les députés conservateurs d’arrière-ban, il y a environ 14 agents de police. Treize? Dans ce cas, la personne qui a dit cela s'est trompée, car je suis sûr d'avoir entendu 14.
Je ne sais donc pas combien d'entre eux sont des agents de la GRC, mais je peux vous dire — trois? — qu'il y a une relation spéciale entre les Forces canadiennes et les agents de la GRC. J'ai voyagé en avion Hercules à de nombreuses reprises. Les C-130 sont de beaux avions. Je dois dire, madame la présidente, que jusqu'à maintenant, aucun d'entre eux n'a été peint en bleu.
Mais cela dit, il y avait une relation spéciale entre les agents de la GRC et les militaires. En fait, lorsque je faisais partie des forces, il y avait souvent des agents de la GRC dans les avions militaires, car c'était un avantage supplémentaire que l'on offrait aux agents de notre Gendarmerie royale du Canada. Je crois qu'il y avait un respect mutuel lié au service envers notre pays et à nos fonctions.
Je me disais donc que si nous envisagions de faire cela pour les membres des Forces canadiennes, pourquoi ne le ferions-nous pas pour les agents de la GRC? En fait, si je me souviens bien — et il se peut que je me trompe, madame la présidente —, je crois que j'ai demandé combien d'agents de la GRC étaient, en fait, des immigrants reçus, ou peut-être que quelqu'un a posé la question avant moi. Je n'arrive pas à m'en souvenir. Mais je sais qu'on a répondu à la question et que la réponse n'était pas très encourageante. Elle était même décourageante dans une certaine mesure.
Au bout du compte, je crois que cela soulève d'autres questions qui devraient être étudiées davantage par les parlementaires, ou peut-être même par les entités politiques. Par exemple, la question des membres des Forces canadiennes et des agents de la GRC, et la mesure dans laquelle nous voulons que les immigrants reçus ou les résidents permanents soient membres de ces forces. Dans quelle mesure voulez-vous initier ce type de citoyenneté accélérée?
Je crois que c'est un argument valable. Au bout du compte, on pourrait se demander pourquoi cela s'applique seulement aux Forces canadiennes plutôt qu'aux deux entités? Eh bien, je viens d'ouvrir la boîte de Pandore. Si vous décidez d'inclure aussi les agents de la GRC, et que cela vise déjà les Forces canadiennes, qu'en est-il des premiers intervenants? Parmi ceux-ci, on retrouve les ambulanciers et les sapeurs-pompiers. On respecte énormément les sapeurs-pompiers.
M. Costas Menegakis: Vous pouvez simplement dire « pompiers ».
M. Kevin Lamoureux: Oui, c'est ce que je veux dire. Merci, monsieur Menegakis.
Nos pompiers risquent leur vie. Un pompier est décédé — en fait, je pense que c'était deux pompiers — et on a organisé de grandes funérailles dans la ville de Winnipeg. Les pertes de vie liées aux incendies sont toujours attristantes, surtout lorsqu'il s'agit de pompiers. Je ne sais pas combien de fois j'ai entendu, que ce soit à la Chambre des communes ou à l'Assemblée législative du Manitoba, des références au 11 septembre 2001. Il y a aussi les premiers intervenants... Lorsque tout le monde s'éloigne pendant une situation d'urgence, les premiers intervenants y foncent tête baissée. Ces gens sont aussi des héros.
Devriez-vous envisager de réduire ces trois années à deux années pour les membres de cette catégorie? Mais encore une fois, cela fait grossir la liste.
J'ai fait valoir que dans la province du Manitoba, les travailleurs de la santé étaient les piliers de nos services de soins de santé. Si vous demandez aux Canadiens ce qui les rend le plus fier d'être Canadiens ou de vivre au Canada, le plus souvent, ils diront que ce sont les soins de santé. Ils croient en nos services de soins de santé et ils souhaitent les conserver.
Et ils ont raison: nous avons le meilleur système de santé au monde. Oui, il a quelques lacunes, par exemple sur le plan du leadership. Nous voulons que l'accord sur la santé négocié par Paul Martin, qui expire en 2014, soit renouvelé, afin qu'il y ait une plus grande sécurité à long terme et que le gouvernement fédéral continue d'investir dans les soins de santé. Je suis très préoccupé par la gestion et la prestation des soins de santé. Je crois qu'Ottawa peut jouer un plus grand rôle en aidant les provinces par l'entremise de normes nationales et beaucoup d'autres choses. Mais vous constaterez que les soins de santé représentent le domaine avec lequel les Canadiens s'identifient le plus.
Eh bien, si vous revenez à la question des piliers, et je l'ai dit à plusieurs reprises, madame la présidente — certaines personnes croient que je parle un peu trop à Ottawa, mais je peux vous assurer que je parlais encore plus lorsque j'étais au Manitoba —, les travailleurs de la santé sont très importants. Je me demande si nous devrions ajouter les chirurgiens cardiaques ou les infirmiers ou les infirmières auxiliaires autorisées à cette liste. Ce sont également des travailleurs très importants. Les membres de cette catégorie devraient-ils aussi être admissibles à la réduction de trois années à deux années?
Madame la présidente, vous avez peut-être déjà compris ce que j'essaie de faire valoir. Quelqu'un m'a suggéré — et j'en ai peut-être parlé dans mes commentaires au sujet de la deuxième lecture, je n'en suis pas certain... De nombreuses personnes feraient valoir que vous prenez cette mesure pour faciliter l'établissement au Canada. Si vous ramenez le critère à seulement deux ans pour les membres des Forces canadiennes, cela profitera à l'ensemble du Canada, car cela permettra à ces personnes d'être mieux en mesure de s'établir dans notre Canada bien aimé.
Eh bien, madame la présidente, au bout du compte, on pourrait aussi demander que les membres d'organismes bénévoles ou d'organismes caritatifs soient également visés par cette mesure. Je pense à plusieurs organismes caritatifs, par exemple les fondations pour le cancer...
Dans la Chambre, en ce moment, il y a un débat... Je ne sais pas; peut-être qu'on a suspendu les travaux. Mais je ne crois pas qu'on ait suspendu les travaux. Les députés sont censés être...
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Merci, madame la présidente.
J'irai un peu plus loin en suggérant que si nous abordions cette question ouvertement, et étant donné l'intérêt de M. Weston pour la question, je serais vraiment heureux... Nous pourrions peut-être organiser une réunion à Winnipeg-Nord, une circonscription dans laquelle je suis très à l'aise. Ce ne serait pas un piège. Faites-moi confiance. Ce serait une façon honnête de... Nous pourrions inviter certaines personnes. Nous pourrions même aller dans la circonscription de Winnipeg-Sud ou une autre. Je demanderais à ce que cela soit organisé à Winnipeg. Je veux veiller à travailler autant que possible à Winnipeg. Cela ne signifie pas que je n'irai pas ailleurs. Je dois souvent me rendre dans d'autres provinces, par exemple en Colombie-Britannique, etc.
J'aimerais donc lancer l'invitation à M. Weston. Si nous allions dans une école publique et que nous posions des questions à des élèves de 12e année et leur demandions leur avis sur cette question et si nous pouvions collaborer avec le directeur... Je vais vous donner un exemple: George Heshka, un directeur exemplaire. Sisler High School se classe parmi les meilleures écoles secondaires du pays. Je crois qu'elle a déjà occupé la première place. Elle a plus de 1 400 élèves. Peut-être même 1 700. Nous pourrions approcher quelqu'un comme M. Heshka, le directeur, et lui demander s'il pouvait choisir une classe de 12e année et si nous pouvions rencontrer 30 élèves, car nous voulons parler de citoyenneté.
Nous pourrions utiliser le projet de loi de M. Shory et demander aux élèves leur avis sur la question de savoir qui devrait être admissible. Nous voulons obtenir la participation d'un plus grand nombre de jeunes. Nous disons toujours cela. Je suis prêt à faire ce qu'il faut pour passer à l'action à cet égard et pour organiser cette discussion. Nous leur présenterons le projet de loi de M. Shory et nous leur préciserons les points dont nous aimerions parler. Nous pourrions même expliquer que le ministre de l'Immigration souhaite modifier la portée du projet de loi et les raisons qui le motivent. Nous tenterions ensuite d'atteindre un consensus.
Je ne veux pas juger trop vite, mais je suis raisonnablement confiant que le projet de loi serait amendé, et qu'on serait d'accord qu'il faut l'amender. Comment? Je ne sais pas. Je soupçonne qu'on pourrait inclure d'autres groupes en plus des Forces canadiennes. On pourrait même laisser entendre que cette mesure devrait être universelle, comme l'a suggéré M. Trudeau dans les années 1970, je crois, lorsqu'il a réduit cette période de cinq à trois ans. Ensuite, on trouve d'autres façons de reconnaître les contributions valables des membres de nos Forces canadiennes, et nous faisons la promotion de cette contribution auprès de nos immigrants reçus.
Mais je soupçonne que si nous faisions cela, les membres du comité seraient surpris s'ils n'ont pas écouté ce que j'ai dit, car au bout du compte, ils se rendront compte qu'il est nécessaire d'amender le projet de loi. Lorsque je dis amender le projet de loi, je parle de ne pas modifier sa portée.
M. Shory a présenté un projet de loi avec lequel nous serions censés pouvoir travailler en apportant des amendements qui permettraient d'obtenir un appui plus général, que vous soyez un agent de la GRC, une infirmière autorisée, un infirmier auxiliaire, une chirurgienne cardiaque ou un membre d'un grand nombre d'autres professions. Nous devrions tous être en mesure de présumer que la qualité du projet de loi qui est présenté et qui sera au bout du compte adopté obtiendra cet appui général. Je pense, madame la présidente, que si nous l'approchions avec un esprit ouvert, c'est ce qui arriverait.
La portée du projet de loi nous met devant un dilemme, car le ministre souhaite apporter des changements tellement importants au projet de loi qu'il pourrait essentiellement saboter ce qui pourrait être une loi positive, si M. Shory reconnaissait l'importance d'apporter certains amendements.
C'est pourquoi j'ai pensé qu'il était important que M. Shory parle avec certains membres du comité de direction de la Chambre, afin de voir s'ils pouvaient modifier leur attitude sur la question de savoir pourquoi ils veulent faire ce qu'ils ont dit qu'ils voulaient faire.
Madame la présidente, je dois commenter un autre point.
Au bout du compte, que se passe-t-il habituellement? Eh bien, le projet de loi est à l'étape du comité. Présumons seulement que nous avons la merveilleuse occasion — comme tous les projets de loi d'initiative parlementaire qui passent l'étape de la deuxième lecture — de mener une étude article par article. Pendant l'étude article par article, on vote sur les projets de loi et ils sont adoptés, rejetés, amendés, etc.
On termine ce processus, et que se passe-t-il ensuite? Eh bien, le projet de loi est renvoyé à la Chambre pour l'étape du rapport. À cette étape, les députés parrains de ces projets de loi commencent à se réjouir d'avoir franchi les plus gros obstacles. En effet, après l'étape de l'étude en comité, la probabilité que le projet de loi devienne une loi est beaucoup plus grande. Cela dépendra toutefois en grande partie du gouvernement et de l'approche qu'il adoptera, mais la bonne nouvelle, c'est qu'il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire, et qu'on le traitera donc différemment d'un projet de loi émanant du gouvernement.
C'est un point extrêmement important, madame la présidente, car c'est ce dont je parlerai maintenant.
Il faut connaître la différence entre un projet de loi d'initiative parlementaire et un projet de loi émanant du gouvernement. C'est la raison pour laquelle j'essaie d'expliquer, du mieux possible, le processus par lequel passe un projet de loi d'initiative parlementaire. Dans la motion, madame la présidente, on propose de faire rapport du projet de loi à la Chambre des communes le 21 juin. C'est une date très importante à se rappeler, et vous comprendrez pourquoi dans quelques minutes.
Que se passe-t-il habituellement? Le projet de loi passe l'étape de l'étude en comité. Vous êtes donc en présence d'un député très heureux qui s'attend à ce que le projet de loi soit envoyé à l'étape du rapport, la troisième lecture, et qu'il soit finalement adopté. Nous avons tous eu l'occasion de voter sur un projet de loi d'initiative parlementaire. Comme pendant la deuxième lecture, les débats sont limités. Vous ne pouvez pas en parler indéfiniment. Nous nous sommes imposé cette règle. Imaginez, par exemple, que le Parlement du Canada décide que les projets de loi d'initiative parlementaire sont tellement importants que nous ne voulons pas qu'ils soient assujettis, comme ils le sont habituellement, à l'obstructionnisme.
Ce que nous faisons maintenant n'est pas habituel.
Monsieur Shory, comprenez-moi bien. Le projet de loi de M. Shory n'est pas un projet de loi habituel, en raison de la tentative de détournement du ministre.
En général, lorsqu'on arrive à l'étape de la troisième lecture, au lieu de lui impartir un certain temps, on lui donne plutôt la priorité, car il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire. Cela signifie qu'on dispose de deux heures supplémentaires pour les débats, et souvent, cela ne se rend même pas à deux heures. Une des choses qui me rend un peu nerveux, c'est que je me rends compte qu'il y a des greffiers et des personnes qui sont à la Chambre des communes depuis beaucoup plus longtemps que moi, et qu'il est donc possible que je me trompe un peu. Je crois qu'à la troisième lecture, c'est deux heures.
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Exactement. Dans la vie, il est important de ne pas perdre de vue l'essentiel.
Souvent, après la troisième lecture, le député se lève pour voter. La première chose qui se produit, c'est que les députés qui sont autour de lui applaudissent. Pratiquement tout le monde le félicite, surtout son caucus, et on passe au vote. Le député est le premier à se lever. On ne commence pas à partir du député qui est dans le coin à l'arrière, jusqu'au premier qui est assis dans la rangée en avant. Le député qui a présenté le projet de loi se lève. Ce n'est qu'après qu'on se rend à la rangée du fond.
Madame la présidente, on est saisi du merveilleux projet de loi — on vote pour, si on le trouve merveilleux, ou contre, si on le trouve mauvais. De l'avis de son parrain, c'est un merveilleux projet de loi. On applaudit le député, il est content. On passe au vote, et s'il s'agit d'un simple député du gouvernement, d'un député d'arrière-ban, il est fort probable que son projet de loi se rende à l'autre étape. S'il se rend à l'étape de la troisième lecture, il y a fort à parier qu'il sera adopté.
Madame la présidente, je n'ai pas parlé entre autres de ce que fait un simple député. Ce n'est pas comme si l'idée venait de lui. Habituellement, il y a un plan. Le député veut s'assurer qu'il aura l'appui nécessaire, et il consulte des gens. Je ne veux pas juger de la façon de procéder de M. Shory. Ce serait très mal avisé de le faire. Cela dit, j'aimerais vous donner un exemple, et je vais me servir de mon propre projet de loi d'initiative parlementaire à cette fin, madame la présidente.
Je pense que vous constaterez que la plupart des députés le font. C'est pourquoi je leur rappelle que pour ce qui est de l'idée, je ne crois pas que les députés la prennent, l'amènent à la deuxième lecture et lui font franchir cette étape pour qu'elle se rende à l'étape de l'étude en comité et qu'un ministre veuille s'approprier le projet de loi et en modifier la portée.
Madame la présidente, je ne voudrais pas qu'une telle chose se produise pour mon projet de loi, car j'y ai travaillé beaucoup, et je vous donne un exemple. J'ai parlé d'un projet de loi d'initiative parlementaire, mon seul jusqu'à présent, dont je suis fier. Je voudrais bien m'attribuer tout le mérite, mais l'idée est apparue lors d'une discussion dans un McDonald.
Nous en avons discuté. Entre autres sujets de préoccupation, il y avait les répercussions des publicités négatives. Que pouvons-nous faire à cet égard? Cela a mené à une autre discussion, et nous nous sommes dit pourquoi pas..., car on ne veut pas faire de la censure. On ne peut pas dire à un parti politique ou à un chef politique qu'il ne peut pas faire de publicité négative. Ce serait inadmissible. Si un parti veut en faire, laissons-le devenir dingue et dépenser à sa guise. La dernière publicité négative a probablement permis à notre parti de recueillir un peu d'argent, mais nous ne pouvons pas compter tout le temps là-dessus.
Le fait est que l'idée ne vient habituellement pas uniquement du député. Si vous vérifiez auprès de M. Shory, et si vous le souhaitez, madame la présidente, j'ai un extrait de ce qu'il a dit lors de la deuxième lecture, et il y a fait probablement référence au début, car c'est la même idée.
Je cite le député:
Je tiens tout d'abord à remercier ma famille qui doit endurer les heures de fou et les déplacements qui sont le lot d'un député qui est aussi un époux et un père. Merci à mon épouse...
Je remercie en outre le personnel et les bénévoles qui m'ont aidé à élaborer cette mesure législative...
Voilà, madame la présidente. Voici ce que M. Shory a dit, et je l'en félicite:
Je remercie en outre le personnel et les bénévoles qui m'ont aidé à élaborer cette mesure législative...
Il ne s'agit pas simplement d'une idée qui lui est apparue et qui s'est retrouvée tout à coup au Feuilleton. De toute évidence, il a consulté des gens. Il en parle. Comme nous pouvons le constater, il souligne le travail de son personnel et des bénévoles. « Je remercie en outre le personnel et les bénévoles qui m'ont aidé à élaborer cette mesure législative. Ce sont la créativité, la perspicacité et le travail acharné de ces hommes et de ces femmes qui ont rendu possible la deuxième lecture de ce projet de loi. »
Eh bien, je peux le comprendre, et je l'envie un peu. Votre projet de loi s'est rendu loin. J'espère que le mien fera l'objet d'un vote; il figure au 150e rang sur la liste. Ce que je veux dire, c'est que vous avez eu une idée, et vous y avez travaillé — comme je l'ai fait avec mes électeurs — et vous l'avez ensuite présentée au conseiller législatif.
J'admire le travail phénoménal de nos avocats sur la Colline, ou ici à Ottawa. Je ne sais pas exactement dans quel édifice ils travaillent, mais ils font de l'excellent boulot, qu'il s'agisse de la préparation d'amendements ou dans ce cas-ci, de projets de loi d'initiative parlementaire.
Nous présentons les mesures législatives, les idées, en croyant que, parce qu'il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire, elles ne changeront pas beaucoup par rapport à leur forme initiale. Par exemple, si M. Shory travaillait avec des gens qui l'ont peut-être aidé dans la préparation du projet de loi, ou s'il parlait à d'autres personnes et disait que « le gouvernement veut retirer la citoyenneté à une personne dans telle situation, ou créer une démarche à deux vitesses pour les citoyens, ou peu importe de quoi il s'agit, ce qui modifie radicalement la portée... ».
Nous le savons. Je n'exagère pas. Même le gouvernement dit que la mesure change la portée. À vrai dire, et par respect pour M. Shory et son travail, et le travail des gens qui ont participé à la présentation de la mesure législative, je pense qu'il est important que nous le reconnaissions.
Je crois que c'est important notamment parce que lorsque nous examinons la motion dont nous sommes saisis et que nous voyons qu'il y est question de la portée, nous devons y penser deux fois avant d'approuver une telle chose. Madame la présidente, même si M. Shory accueille favorablement les changements quant à la portée de la mesure maintenant, le projet de loi ne lui appartient plus exclusivement. Au bout du compte, madame la présidente, c'est un projet de loi qui n'appartient plus au seul simple député. Même si le parrain du projet de loi approuve les changements qu'on lui a imposés, nous ne connaissons pas les raisons, la façon de procéder et nous ne savons pas si la mesure fera l'objet d'un rejet si, en fait, il ne les accepte pas. Nous l'ignorons. Nous ne savons pas ce qui a été dit au sujet du projet de loi dans les coulisses.
Même si M. Shory agit complètement seul et qu'il dit accepter entièrement que le gouvernement modifie la portée de son projet de loi, nous ne devrions pas la modifier, car ce n'est plus du tout le même projet de loi. C'est pourquoi je dis que dans le cadre d'une modification aussi importante, madame la présidente, il faut tenir compte d'autres situations, d'autres préoccupations. C'est pourquoi je pense qu'il est important d'en discuter.
Le projet de loi fait l'objet d'une étude, et on revient à ce qu'il en était — on passe à l'étape de la troisième lecture, il est adopté... Il y a fort à parier que le simple député voudra en informer les parties intéressées, les participants. Très souvent, un projet de loi d'initiative parlementaire suscite même l'intérêt des médias, et ce, pour de bonnes raisons, ce qui est bien.
Qu'il s'agisse de M. Shory ou de quelqu'un d'autre, c'est toujours encourageant lorsqu'une mesure législative déposée par un simple député attire l'attention des médias. Nous devons reconnaître que lorsqu'il y a de bonnes nouvelles sur la Chambre de communes, nous en bénéficions tous de façon indirecte. Il n'y en a pas assez, et lorsque cela se produit, nous en ressentons tous les effets positifs.
J'ai participé à un certain nombre d'entrevues lorsque je faisais la promotion de mon projet de loi d'initiative parlementaire —, et il est passé à la première lecture l'autre semaine, madame la présidente. On m'a demandé mon opinion sur d'autres partis, et on m'a demandé si je croyais que le Nouveau Parti démocratique allait appuyer mon projet de loi. On m'a demandé ce qu'il en était pour mon chef, etc.
Une voix: Il n'y a pas limites...
M. Kevin Lamoureux: Il n'y a pas de limites pour lui, c'est vrai, mais c'est un autre sujet. Je n'en parlerai pas aujourd'hui. Je le ferai un autre jour, dans un autre discours, et j'y prendrai plaisir.
En fin de compte, madame la présidente, lorsque les médias couvrent une bonne nouvelle, nous en profitons tous.
Lorsqu'on m'a demandé ce qu'il en était pour les autres députés, j'ai répondu que c'est l'un des aspects que j'aime au sujet des initiatives parlementaires: pour les députés libéraux, c'est un vote libre. J'ai vu bon nombre de députés conservateurs voter pour ou contre une question précise d'un projet de loi d'initiative parlementaire. Nous ne voyons pas nécessairement cela...
Oh, je m'en souviens. Dans le cas du registre des armes à feu, un néo-démocrate s'est rangé de l'autre côté.
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Merci, madame la présidente. Je vous remercie de l'occasion qui m'est offerte. J'aimerais féliciter mon collègue, M. Lamoureux, de son intervention remarquable. Effectivement, il mérite bien une gorgée d'eau.
J'ai la même préoccupation que lui, à savoir que le projet de loi risque de ne pas obtenir l'appui de tous les partis, ce qui est désolant. Le processus s'est avéré difficile jusqu'à maintenant et, à bien des égards, inouï. Nous sommes saisis d'un projet de loi d'initiative parlementaire, et non d'un projet de loi émanant du gouvernement, et un ministre propose un certain nombre d'amendements — une mesure très inhabituelle qui nous amène à nous interroger sur la pertinence d'appeler la mesure législative un projet de loi d'initiative parlementaire.
J'aimerais souligner que tous les députés de la Chambre des communes, à quelques exceptions près, peuvent présenter des projets de loi d'initiative parlementaire en Chambre. Les exceptions sont très révélatrices: les ministres et les secrétaires parlementaires. Oui, cela me fait réagir également. Il n'est pas permis aux secrétaires parlementaires et aux ministres de déposer des projets de loi d'initiative parlementaire, et des raisons le justifient. Ce sont des députés de la Chambre des communes qui occupent une fonction gouvernementale. On appelle souvent les simples députés des députés d'arrière-ban. Ils ont besoin de faire leur place au soleil. Il faut qu'ils puissent s'exprimer librement à la Chambre des communes sans être indûment influencés. Le projet de loi a peut-être été plus soumis à l'influence que n'importe quel autre.
Je rappelle le processus aux députés. Le projet de loi d'initiative parlementaire est une démarche de longue date; elle est utilisée depuis environ 30 ans maintenant en politique canadienne. Il s'agit d'un système de tirage au sort pour les simples députés où l'on établit un ordre de priorité dans lequel ils peuvent présenter leurs projets de loi ou leurs motions à la Chambre des communes — et je parlerai de la différence entre un projet de loi et une motion dans un moment — et en fait, on les incite à le faire. Un nombre illimité de projets de loi ou de motions peuvent être présentés, mais le député doit choisir celui, dans l'ordre de priorité, dont il veut débattre à la Chambre des communes.
M. Shory faisait partie de la première moitié des députés choisis au sort, et a pu présenter son projet de loi un peu plus tôt. Nous sommes presque à mi-chemin de la 41e législature si, effectivement, elle dure quatre ou cinq ans. Il a eu l'occasion de présenter son projet de loi selon l'ordre de priorité. Je veux préciser que pour ma part, mon nom figure plus ou moins au bas de la liste. J'ignore si je pourrai présenter mes projets de loi, mais j'espère pouvoir débattre de n'importe quel projet de loi qui sera présenté en Chambre. Cet ordre de priorité existe pour une raison. Tout le monde a son tour, en fonction de la durée de la législature. Chaque législature est définie d'une élection à l'autre. Nous en sommes actuellement à la 41e législature, et l'ordre de priorité a été établi.
Encore une fois, j'aimerais revenir à l'idée que seuls les simples députés peuvent présenter ce type de projet de loi — les ministres et les secrétaires parlementaires ne peuvent pas le faire. Lorsqu'un ministre essaie de présenter des amendements pour un projet de loi d'initiative parlementaire, il nous amène à nous demander s'il s'agit vraiment d'un projet de loi d'initiative parlementaire. S'agit-il vraiment de ce type de projet de loi lorsqu'un ministre, qui n'a pas le droit de présenter des projets de loi inscrits à l'ordre de priorité, propose une série d'amendements? Nous nous demandons alors vraiment s'il est même question d'un projet de loi d'initiative parlementaire. Est-il question, en fait, d'un projet de loi émanant du gouvernement? Si c'est le cas, il ne s'agit pas des mêmes critères. Je pense que mon collègue, M. Lamoureux, en a mentionné quelques-uns qu'il vaut la peine de répéter.
On ne dispose que d'un certain temps pour débattre d'un projet de loi d'initiative parlementaire en Chambre. C'est essentiellement une occasion de présenter des motions ou des projets de loi rapidement, sans presque aucune discussion.
Je vais parler du processus dans un moment. Je veux seulement souligner que si un ministre présente des amendements sur un projet de loi d'initiative parlementaire, il empêche les députés de débattre pleinement des motions. À mon avis, cela va clairement à l'encontre de la nature même d'un projet de loi d'initiative parlementaire et ne correspond pas à son rôle dans notre régime parlementaire.
Lorsqu'on présente des projets de loi d'initiative parlementaire, de l'information à leur sujet peut être fournie, ils peuvent faire partie d'un processus par lequel les spécialistes de la Chambre des communes aident à l'examen du projet de loi, à sa rédaction, pour déterminer s'il répond à certains critères.
Le projet de loi dont nous parlons a... C'était avant la présentation des amendements proposés par le ministre. Nous avons eu l'occasion d'entendre des spécialistes, des greffiers, des avocats, des spécialistes de la Chambre des communes, pour déterminer si le projet de loi répondait aux critères de base d'un projet de loi d'initiative parlementaire. On se demande encore s'il s'agit d'un projet de loi qui doit répondre à ces critères.
La seule façon de rejeter un projet de loi, c'est par son étude au Sous-comité des affaires émanant des députés — dont je fais partie, pour tout vous dire. Il s'agit d'un sous-comité du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, qu'on appelle aussi PROC. Ce sous-comité a la tâche d'examiner les projets de loi et les motions des simples députés en fonction d'une série de critères.
Il convient de mentionner ces critères, et c'est ce que je vais faire maintenant. Conformément à l'article 91.1 du Règlement, les projets de loi et les motions ne doivent pas porter sur des questions qui ne relèvent pas des compétences fédérales. Ils ne doivent pas manifestement enfreindre les dispositions des Lois constitutionnelles de 1867 à 1982 ni de la Charte canadienne des droits et libertés qui, comme nous le savons, fait partie de la Loi constitutionnelle de 1982. Les projets de loi et les motions ne doivent pas porter sur des affaires qui sont essentiellement les mêmes que celles qui ont déjà été soumises à la Chambre des communes au cours de la même session de la législature, ou que celles qui les précèdent dans l'ordre de priorité. Enfin, ils ne doivent pas porter sur des questions actuellement inscrites au Feuilleton ou au Feuilleton des Avis sous la rubrique des affaires émanant du gouvernement.
Ce sont les quatre critères selon lesquels le Sous-comité des affaires émanant des députés décide d'approuver ou de rejeter un projet de loi.
J'aimerais préciser qu'un projet de loi est réputé votable dès le départ. Il est réputé non votable seulement si le sous-comité juge que c'est le cas, en fonction des quatre critères.
Je pense qu'il vaut la peine de parler du quatrième critère selon lequel les projets de loi et les motions ne doivent pas porter sur des questions actuellement inscrites au Feuilleton ou au Feuilleton des Avis sous la rubrique des affaires émanant du gouvernement.
Le projet de loi n'enfreint pas le critère comme tel, mais je dirais qu'il rompt avec son esprit. Encore une fois, parce que le ministre a présenté autant d'amendements, il y a lieu de se demander s'il ne s'agit pas d'affaires émanant du gouvernement. Comme nous le savons... et je pense que M. Lamoureux l'a bien expliqué tout à l'heure lorsqu'il a dit que dans le cas des projets de loi émanant du gouvernement, de longs débats ont lieu en Chambre — ou du moins en temps normal.
Nous sommes confrontés à un grave problème: on semble accélérer incroyablement le processus pour les affaires du gouvernement. Il y a également des projets de loi omnibus qui nous empêchent de débattre en profondeur de questions de grande importance pour les Canadiens.
Le gouvernement semble avoir trouvé une autre façon, une troisième, d'accélérer l'adoption de leurs mesures législatives, et il s'agit de les greffer à des projets de loi d'initiative parlementaire. Du moins, c'est ce qui semble se passer.
Si le ministre n'avait pas présenté autant d'amendements, en essayant de changer le sens du projet de loi, mon impression ne serait peut-être pas exacte.
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Quatorze? Merci, madame la présidente.
Il y aurait donc 14 personnes qui profiteraient de cette mesure, un chiffre sans comparable avec le nombre total de Canadiens qui veulent obtenir la citoyenneté canadienne. Le temps de traitement des demandes est horriblement long, un problème qu'il faut corriger, non seulement au comité, mais au ministère et au cabinet du ministre lui-même.
C'est malheureux; si le gouvernement nous avait présenté un plan pour toutes les personnes qui sont en attente de la citoyenneté, ce projet de loi n'aurait peut-être jamais été nécessaire au départ. L'idée d'accélérer le traitement de la demande de citoyenneté canadienne pour certains, parce que l'arriéré continue d'augmenter chaque année, nous porte vraiment à nous demander si le député n'aurait pas eu intérêt à en discuter avec le ministre pour trouver d'autres moyens d'accélérer le traitement des demandes, puisque cette mesure pourrait même ralentir le processus pour tous les autres. Par exemple, il serait peut-être possible de veiller à ce qu'il y ait suffisamment d'employés à Immigration Canada pour traiter les demandes dans une période raisonnable et ne pas laisser l'arriéré s'alourdir.
Le fait même qu'on parle de citoyenneté, de l'accélération du traitement des demandes de citoyenneté, et la nécessité de renvoyer ce projet de loi à la Chambre en toute hâte nous indique que c'est une question importante. Elle me semble importante à bien des égards. Nous voulons des gens qui travaillent au Canada, des gens qui contribuent à notre société, par le paiement d'impôt, par la production de richesse, par la famille et les amitiés, des personnes qui ajoutent au dynamisme qui fait de notre pays un endroit si attirant. Nous devons vraiment essayer de ne pas créer deux catégories, selon lesquelles certaines personnes pourraient obtenir leur citoyenneté plus vite que d'autres.
J'aimerais vous rappeler les règles qui s'appliquent actuellement au sein des Forces canadiennes:
(1) Pour être admissible à l'enrôlement dans les Forces canadiennes à titre d'officier ou de militaire du rang, une personne doit satisfaire aux conditions suivantes :
a. être citoyen canadien; toutefois, le chef d'état-major de la défense ou l'officier désigné par lui peut autoriser l'enrôlement d'un citoyen d'un autre pays, s'il est persuadé qu'un besoin particulier existe et que l'intérêt national n'en souffrira pas;
Il y a donc un problème ici, un véritable dilemme, puisque pour être admissible à l'enrôlement dans les Forces canadiennes, il faut être citoyen canadien. Faute de système clair pour obtenir ce statut, un candidat doit être citoyen canadien, à moins que le chef d'état-major de la défense ou un officier du genre n'estime que cette personne mérite d'être membre des Forces canadiennes.
Il n'y a pas de façon de faire claire, même pour une personne qui voudrait contribuer à la société en s'enrôlant dans les Forces canadiennes. Je pense que ce projet de loi pourrait faire encore l'objet de débat, même à la Chambre des communes, sur la façon dont cela pourrait se faire.
Dans la situation actuelle, le projet de loi permettrait d'écourter d'un an le temps qu'il faudrait pour obtenir la résidence canadienne afin d'être admissible à la citoyenneté canadienne, un objectif louable en soit. La difficulté est la suivante: comment peut-on s'enrôler dans les Forces canadiennes au départ? Il y a comme une impasse dans ce projet de loi. Il ne semble pas régler le problème.
Encore une fois, il ne s'agit que de 14 personnes par année, selon les Forces canadiennes elles-mêmes. On ne parle pas là d'un moyen efficace pour rattraper tout le retard accumulé dans le traitement des demandes de citoyenneté canadienne.
Je pense que c'est vraiment horrible, dans un pays essentiellement construit grâce à l'immigration, qu'il n'y ait pas de meilleure façon d'accueillir de nouveaux Canadiens plus rapidement et plus directement que par la porte d'en arrière pour réussir à obtenir la citoyenneté.
Par ce projet de loi, nous donnons de faux espoirs aux nouveaux arrivants au Canada qui souhaitent également devenir citoyens canadiens puisque nous leur laissons croire qu'ils peuvent accélérer le processus en s'enrôlant dans l'armée canadienne, alors que l'armée canadienne, de prime abord, ne peut pas les accepter sauf dans des circonstances exceptionnelles.
Nous créons des exceptions à des exceptions. Ce n'est pas une solution à un problème d'immigration. C'est peut-être une façon de féliciter des gens et de les remercier de leur service, mais le problème est qu'il est très difficile pour eux d'offrir ce service au départ.
Ce projet de loi présente tellement de difficultés! Le processus lui-même porte à se demander si l'on peut appuyer ce projet de loi.
Encore une fois, ce projet de loi risque de ne pas recevoir l'appui de tous les partis, et ce serait très malheureux, parce que tous les partis croient que le pays bénéficie de l'arrivée de nouveaux Canadiens. Comme nous le savons tous, le Canada a été bâti par des nouveaux Canadiens. Nous devons une fière chandelle aux nouveaux Canadiens, pour tout le travail investi dans la création du merveilleux pays dans lequel nous vivons aujourd'hui. Nous devrions les honorer de bien d'autres façons.
Par exemple, le gouvernement pourrait produire des projets de loi normalement, c'est-à-dire en déposant des projets de loi gouvernementaux, afin de permettre d'en débattre en profondeur. Pour en débattre en profondeur, il faut que le gouvernement dépose des projets de loi afin d'inviter des témoins, de favoriser un débat en profondeur à la Chambre des communes, à la seconde lecture ou à l'étape du rapport, ainsi qu'un débat en profondeur en comité. Ainsi, on peut avoir l'assurance, à la troisième et dernière lecture à la Chambre des communes, qu'il y a eu place à un débat en profondeur sur le projet de loi avec l'éclairage de témoins experts.
Lorsqu'un député soumet un projet de loi d'initiative parlementaire, une grande partie de ces mécanismes ne s'appliquent tout simplement pas. Les projets de loi d'initiative parlementaire ne font l'objet que de quelques heures de débat à la Chambre des communes, et le terme « débat » n'est probablement pas très juste pour exprimer ce qui se passe à la Chambre des communes puisque seul le parrain du projet de loi, c'est-à-dire le député qui a déposé le projet de loi à la Chambre des communes, le présente et peut se prévaloir d'une période de questions et de réponses. Aucune autre personne qui présente de l'information ou intervient sur le projet de loi ne peut se faire se questionner par un autre député.
La procédure est brève, rapide, et ne se prête pas au débat en profondeur qui aurait lieu sur un projet de loi gouvernemental. Même en cette période d'attribution limitée du temps, les règles sont telles que les projets de loi gouvernementaux font l'objet d'un débat plus approfondi que les projets de loi d'initiative parlementaire.
Voilà le coeur de la question. Compte tenu des manoeuvres effectuées pour essayer de faire de ce projet de loi un projet de loi gouvernemental ou d'en donner l'apparence, à tout le moins, ce projet de loi et tous ses amendements n'auraient-ils pas mérité un débat plus en profondeur à la Chambre des communes? Si c'était l'intention, pourquoi le ministre n'a-t-il pas été plus proactif lorsque nous en avons débattu au Sous-comité des affaires émanant des députés, afin de montrer clairement que le gouvernement accordait beaucoup d'importance à ce projet de loi et qu'il allait déposer toute une série d'amendements?
Il est très possible qu'à ce moment-là, le Sous-comité des affaires émanant des députés aurait jugé ce projet de loi non votable. Je rappelle aux députés que s'il avait été jugé non votable, la situation aurait été très semblable à celle du projet de loi sur les avortements sélectifs proposé récemment par le député de et que le Sous-comité des affaires émanant des députés a jugé non votable.
Ç'aurait pu être la même chose ici. Le cas échéant, il y aurait eu un processus d'appel, de toute évidence, qui aurait peut-être porté la question à un autre niveau de débat, mais pour le contenu du projet de loi lui-même, l'occasion aurait été ratée.
Dans ce cas-ci, le ministre aurait pu déposer un projet de loi intégrant ses amendements. Malheureusement, nous n'avons pas eu la chance de profiter de cette procédure. On nous a présenté l'occasion de débattre de ce projet de loi-ci, qui pose toutes sortes de difficultés, je le répète.
Il y a une chose que je dois dire absolument, madame la présidente. Nous évoquons la possibilité de retirer à quelqu'un sa citoyenneté. Je trouve cette question très grave et très préoccupante. Selon les termes du projet de loi, nous ne pourrions retirer sa citoyenneté à une personne « que si elle possède une nationalité étrangère ou est un résident autorisé d'un pays étranger ». Cette disposition semble contrevenir à la convention de l'ONU de 1961 sur les Droits de l'homme. Elle contrevient à la règle selon laquelle on ne doit pas créer de situation qui rendrait une personne apatride. Ce projet de loi, qui n'a même pas été examiné en bonne et due forme, semble créer la possibilité qu'une personne devienne apatride, parce que le projet de loi dicte que la personne doit posséder « la nationalité » ou être « un résident autorisé » d'un autre pays, ni plus ni moins. La barre est assez basse.
De même, il serait difficile de définir en quoi consiste un résident autorisé d'un pays étranger. J'avance, madame la présidente, qu'il n'est même pas toujours évident de déterminer qu'est-ce qu'un résident au Canada. Les règles changent d'une province à l'autre, et les règles du droit international sont parfois mal comprises.
À mon avis, il n'est tout simplement pas approprié qu'au Canada, on puisse retirer sa citoyenneté à une personne sans lui donner l'occasion d'être entendue dans un processus juste et équitable. L'un des principes fondamentaux de la justice au Canada, c'est le droit d'être entendu. Ce projet de loi ne semble pas le reconnaître. Il dicte simplement que si une personne commet un acte de guerre, nous allons lui retirer sa citoyenneté, si elle a la nationalité d'un autre pays ou qu'elle en est un résident autorisé.
C'est extrêmement dangereux, madame la présidente. Nous avons même discuté de la possibilité de définir « acte de guerre » au comité. Je mets tout le monde au défi de me fournir une définition attestée d'acte de guerre. Cette partie du projet de loi demeure très discutable et contreviendrait elle aussi à une convention internationale dont le Canada est signataire. Il y a toutes sortes de difficultés.
Mais pour revenir au fait que ce projet de loi semble découler du programme du gouvernement plutôt que d'émaner d'un député, je dois poser une question. Si ce projet de loi n'est pas assujetti à la discipline de parti du gouvernement... On dirait bien, à tout le moins, qu'il s'agit d'un vote de deuxième catégorie, sinon de troisième catégorie. Pour être bien clair, un vote est considéré de deuxième catégorie quand les ministres doivent voter en sa faveur et que les autres députés peuvent voter selon leur conscience. Je ne suis pas sûr qu'il ne s'agisse pas d'un vote de troisième catégorie, compte tenu de toute l'attention que le ministre a accordée à ce projet de loi et de sa présence au comité...
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On pourrait même accuser certains députés de ne pas dormir parfois, mais...
Je prends bonne note de l'observation du secrétaire parlementaire. Je rappelle du même coup que le secrétaire parlementaire ne peut pas présenter de projet de loi d'initiative parlementaire. L'argument est le même, mais je vous remercie de cette observation.
Je n'ai pas participé à toutes les séances de ce comité, à quelques-unes seulement, donc je n'ai pas eu la chance d'entendre toutes vos délibérations, mais l'essentiel ne change pas: il faut protéger le caractère sacré des projets de loi d'initiative parlementaire. Il vaut la peine de mentionner que dans l'histoire, les projets de loi d'initiative parlementaire à la Chambre des communes et au Parlement n'ont pas toujours eu le caractère sacro-saint qu'ils ont aujourd'hui. Ce n'est qu'assez récemment que la procédure actuelle a été établie pour que tous les députés puissent présenter des enjeux importants pour eux et leurs électeurs. Avant les années 1960, il n'y avait pas vraiment de mécanisme pour déposer un projet de loi d'initiative parlementaire, et ce n'est qu'après beaucoup de pressions des députés d'arrière-ban qu'un nouveau mécanisme a été conçu et mis en place. Il est encore en vigueur aujourd'hui.
Il est extrêmement important que le gouvernement n'ait pas la mainmise complète sur le programme de la Chambre des communes, parce que le gouvernement a une perspective globale, en règle générale, alors que les députés, pris individuellement, sont beaucoup mieux en mesure de comprendre les besoins de leurs électeurs. Les ministres et les secrétaires parlementaires jouent un rôle important dans la gestion des affaires du pays, j'en conviens. C'est un travail très important. Mais les autres députés doivent eux aussi pouvoir exprimer les besoins de leurs électeurs, d'où l'utilité d'un projet de loi d'initiative parlementaire et d'une motion, sinon on ne pourrait pas discuter de ces enjeux. Avant, il n'y avait tout simplement rien de tel. Les députés devaient donc convaincre les membres du Cabinet de déposer des motions ou des projets de loi, qui étaient débattus en profondeur à la Chambre des communes. C'était un mécanisme très lourd et très subjectif.
La procédure actuelle est très objective et permet à tous les députés de déposer des motions. En fait, comme je l'ai déjà mentionné, ils peuvent déposer un nombre illimité de motions ou de projets de loi à la Chambre des communes, mais ils ne peuvent débattre que d'une chose au cours d'un même cycle de priorité, qui consiste en général en une législature de quatre ans, si l'on veut. En règle générale, comme il y a un peu plus de 300 députés, il faut à peu près quatre ans pour que les 300 députés aient eu l'occasion de déposer au moins une motion, si seulement nous arrivons à compléter le cycle. Les ministres et les secrétaires parlementaires en sont exclus. Une fois que tout le monde a eu son tour, il y a un nouveau tirage au sort pour déterminer l'ordre de priorité, et tous les députés peuvent encore une fois déposer une motion pendant le nouveau cycle, mais c'est assez rare qu'on se rende là. Je ne suis même pas certain que ce soit déjà arrivé, mais cela pourrait très bien arriver si le Parlement demeurait au pouvoir un peu plus longtemps que d'habitude. Si je ne me trompe pas, une législature ne peut durer que cinq ans, à moins que son mandat ne soit prolongé par un acte de guerre, peut-être, ce qui nous ramène au projet de loi à l'étude ici, dans certaines circonstances.
Il est très important que les députés aient le pouvoir de déposer des projets de loi d'initiative parlementaire. Ils peuvent déposer des projets de loi ou des motions. La distinction entre les deux est très importante pour la plupart des gens, mais il importe probablement de dire qu'une motion vise à influencer la volonté des députés à la Chambre des communes, alors qu'un projet de loi vise à modifier ou à créer une loi, selon le cas.
Dans ce cas-ci, nous examinons un projet de loi qui vise à modifier la Loi sur la citoyenneté.
Nous avons vu beaucoup de projets de loi modifiant le Code criminel pendant cette législature, un phénomène dangereux, parce que le Code criminel est habituellement du ressort du gouvernement. Le plus souvent, pas nécessairement toujours, mais la majorité du temps, à tout le moins, les députés devraient demander au gouvernement de modifier lui-même le Code criminel plutôt que de déposer des projets de loi d'initiative parlementaire. Mais c'est leur droit, et nous le respectons. Encore une fois, toutes les motions sont jugées votables, dès le début.
Nous devons nous interroger sur ce projet de loi, qui a été beaucoup critiqué à ce comité, par divers intervenants, par divers témoins ayant beaucoup d'expérience dans le domaine. Je trouve que les avocats spécialisés dans la défense des réfugiés avaient des choses particulièrement intéressantes à dire.
L'un des arguments les plus intéressants était le suivant: l'un des témoins a soulevé le fait qu'à partir du moment où l'on rend une personne apatride, on ne peut plus la poursuivre pour la raison même que nous l'avons rendue apatride.
Si une personne commet un geste si grave que nous estimons nécessaire de lui retirer sa citoyenneté, nous ferions certainement mieux, à titre d'administrateurs de l'État, d'assumer la responsabilité de la juger dans un procès juste et équitable plutôt que de lui retirer sa citoyenneté, comme semble le proposer ce projet de loi, sans processus juste et équitable.
Encore une fois, j'estime très important que nous puissions débattre en profondeur de ce projet de loi, non seulement au comité, mais aussi à la Chambre elle-même. Les amendements proposés nous procurent l'occasion d'en débattre en plus grand groupe. Je pense que les Canadiens dans leur ensemble auraient probablement avantage à entendre parler de ce projet de loi à la Chambre des communes elle-même, qu'il y ait là un débat en profondeur. Il ne suffit pas d'en débattre au comité.
Nous parlons ici d'un élément fondamental de la société canadienne, de la citoyenneté dans notre société. Elle mériterait qu'on en débatte en détail à la Chambre des communes. Je répète qu'on ne débat pas aussi en profondeur des projets de loi d'initiative parlementaire que des projets de loi gouvernementaux.
Avant, si l'on avait soumis un projet de loi accordant ou refusant la citoyenneté à quelqu'un, on nous aurait enjoint fortement à rappeler tout précédent important selon lequel quelques heures de débat pourraient suffire à la Chambre des communes pour déterminer qu'on peut retirer sa citoyenneté à quelqu'un sans processus juste et équitable. Je trouve très dérangeant et très difficile d'accepter que le processus soit presque automatique aujourd'hui.
Encore une fois, il n'y a aucune démarche officielle décrite dans ce projet de loi. Il dicte tout simplement que si une personne a commis un acte de guerre, on va lui retirer sa citoyenneté. C'est un libellé très, très problématique. Il est très difficile d'en saisir toute l'incidence et de détecter en quoi le processus serait juste et équitable pour la personne.
Nous vivons dans une société de droit. Nous ne vivons pas dans une société où les gens, sur la base de preuves possibles, peut-être même de manque de preuves et d'un processus non transparent pourraient se faire retirer l'un de leurs droits les plus fondamentaux au Canada, c'est-à-dire celui d'avoir la nationalité canadienne.
Nous accueillons chaleureusement la possibilité d'accélérer le processus d'obtention de la citoyenneté canadienne. Nous voyons un peu trop de cas où une personne peut travailler au pays, mais se fait refuser la possibilité d'en devenir citoyenne. Nous en avons vu un exemple récent dans le scandale de la Banque Royale, qui faisait venir ici des travailleurs étrangers temporaires. Ces personnes travaillaient ici, au pays, à contribuer à sa richesse, à son développement, et nous leur refusons la possibilité de profiter des mêmes droits et des mêmes privilèges que ceux accordés à tant d'autres personnes qui ont réussi à venir s'établir ici.
Il y en a d'autres qui se sont vu accorder ce droit: vous venez au Canada, vous contribuez au Canada, vous vous enracinez au Canada et nous allons vous permettre d'en devenir citoyen.
Il est louable qu'avec ce projet de loi, nous donnions cette possibilité à 14 personnes. Je suis très heureux que certaines personnes puissent se prévaloir de cette possibilité.
Mais que faisons-nous des dizaines de milliers de personnes qui voudraient avoir la même chance et qui doivent simplement faire la queue? Elles essaient de contribuer pleinement à notre pays elles aussi. Je trouve difficile de limiter cette possibilité aux personnes qui s'enrôlent dans les Forces canadiennes. Pourquoi ne pas aller plus loin? Pourquoi ne pas offrir la même possibilité à tant d'autres personnes qui travaillent ici? Pourquoi ne pas en parler avec les personnes qui travaillent pour la Banque Royale du Canada, des personnes qui offrent certainement de bons conseils financiers aux Canadiens? Pourquoi n'envisage-t-on pas d'accélérer le traitement de leur demande de citoyenneté à elles?
Encore une fois, nous en aurions probablement discuté s'il s'agissait d'un projet de loi gouvernemental depuis le début. Mais ce n'en est pas un, c'est un projet de loi d'initiative parlementaire sur une interprétation très tranchée et restrictive des personnes dont il y a lieu d'accélérer la demande et de celles qui seront laissées pour compte.
Ce projet de loi n'est tout simplement pas assez vaste. Sa portée est trop étroite. Il faut nous pencher sur le reste de l'arriéré, pour que des personnes qui contribuent tout autant à notre société, de façons différentes, puissent bénéficier de ces mesures pour devenir des citoyens à part entière du Canada.
La résidence ne suffit pas. Je pense que les Américains visent tout à fait juste quand ils disent qu'il ne doit pas y avoir d'imposition sans représentation. Il est difficile d'accepter que tant de personnes vont devoir payer de l'impôt, des cotisations à l'AE et à divers fonds canadiens, sans pour autant avoir le droit d'en profiter.
Chez nos voisins du Sud, l'État se fonde sur l'idée qu'on ne peut pas créer diverses catégories de citoyenneté. Ils veulent être des citoyens à part entière, être pleinement maîtres de leur vie et participer pleinement à leur démocratie.
Les Canadiens sont fiers de leurs traditions démocratiques, qui s'inspirent de deux régimes bien connus dans l'histoire de la démocratie, celui du Commonwealth britannique et celui du droit civil français. Notre pays est unique à bien des égards, nous sommes fiers de notre contribution à l'avancement de la démocratie dans le monde. Pourtant, nous sommes en train de dire qu'il va y avoir différentes catégories pour accéder à la citoyenneté. C'est troublant, très troublant, en fait.
J'espère que la Chambre des communes va améliorer ce projet de loi en profondeur. À tout le moins, j'espère qu'elle va donner aux Canadiens la chance d'entendre parler davantage des aspects du projet de loi qui mériteraient de faire l'objet d'un débat et de ce qu'il faudrait peut-être améliorer.
Les améliorations que nous avons apportées à ce projet de loi jusqu'à maintenant, ou dont nous débattons à tout le moins, ne sont tout simplement pas suffisantes à bien des égards. Il est troublant que le gouvernement passe par son secrétaire parlementaire pour déposer toute une série d'amendements. Cela montre que le gouvernement ne veut tout simplement pas profiter des débats qu'il mériterait, des occasions d'en débattre qu'il pourrait saisir.
Ce n'est pas seulement le contenu de ce projet de loi qui me perturbe, mais le fait que le gouvernement ne cesse...
Des voix: [Note de la rédaction: inaudible]
:
... de saisir toutes les occasions possibles pour éviter le débat, apparemment.
Ce projet de loi semble subir le même sort. Nous ne soumettrons pas ces idées aux Canadiens. La raison d'être du Parlement, c'est de nous permettre à tous de nous rassembler pour débattre des projets de loi de façon ouverte et transparente; le gouvernement n'a pas à monopoliser le processus, comme il semble essayer de le faire ici. Il s'agit là d'une façon de faire rare, inhabituelle et discutable, qui trahit le fait que le gouvernement ne veut pas de débat en profondeur.
Les membres du comité et les députés en général doivent avoir véritablement l'occasion de proposer des amendements. Il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire, après tout. C'est un projet de loi qui doit faire l'objet d'un débat entre collègues, entre députés de tous les partis.
Au Parlement, lorsque des projets de loi d'initiative parlementaire sont déposés, ils doivent être traités le plus possible comme des projets de loi non partisans. Nous en avons eu un bel exemple pas plus tard qu'hier dans l'étude d'un projet de loi d'initiative parlementaire sur la désignation d'une date pour célébrer le Pape Jean-Paul II. Il a reçu un appui important de tous les partis à la Chambre des communes. Je pense qu'il était clair que c'est la nature même des projets de loi d'initiative parlementaire: ils visent à recueillir un appui élargi et à susciter le débat parmi tous les députés de la Chambre des communes.
Dans ce cas-ci, nous sommes saisis d'un projet de loi d'initiative parlementaire qui a été presque totalement transformé par les membres du parti au pouvoir à la Chambre des communes. Je répète que cela va à l'encontre de la nature même d'un projet de loi d'initiative parlementaire.
Le but de cette procédure est de permettre aux députés des autres partis de soumettre des questions à la Chambre des communes. Dans ce cas-ci, les règles ont été court-circuitées, et c'est très préoccupant.
Je me demande s'il s'agit là d'un précédent. Le cas échéant, tous les députés de la Chambre des communes auraient raison d'être très inquiets. Leurs projets de loi pourraient désormais être adoptés et modifiés par les représentants du gouvernement alors que cette procédure vise justement à faire en sorte qu'ils n'en aient pas la prérogative.
Cela traduit une mauvaise compréhension, peut-être, de la procédure de longue date sur l'examen des projets de loi d'initiative parlementaire à la Chambre des communes. Cela traduit un certain sentiment d'urgence, chez les députés du parti ministériel, qui ont décidé de procéder de cette façon pour présenter leurs projets de loi, alors qu'ils pourraient le faire de tant d'autres façons.
Les règles régissant les projets de loi d'initiative parlementaire doivent être considérées sacro-saintes. Il faut reconnaître le droit inaliénable des députés, pour ainsi dire, de présenter les propositions de leurs électeurs à la Chambre des communes. Le simple fait qu'il y ait eu controverse récemment à la Chambre des communes sur la motion M-408 montre à quel point les députés veulent défendre leurs droits de déposer des projets de loi et des motions sans souffrir de l'ingérence des représentants du gouvernement. La controverse perdure.
Nous sommes l'un des rares pays à permettre aux députés de déposer leurs propres projets de loi. Nous recevons fréquemment des délégations d'autres pays qui viennent nous demander comment ce système fonctionne. Les étrangers s'y intéressent, puisqu'ils n'ont rien de tel chez eux. Ils se demandent s'ils peuvent intégrer notre modèle à leur régime.
Je trouverais excessivement malheureux de devoir leur expliquer que les initiatives parlementaires ne fonctionnent que si les députés occupant une fonction gouvernementale ne bouleversent pas complètement le processus en transformant un projet de loi d'initiative parlementaire en projet de loi semblant émaner du gouvernement. Je ne pense pas que ce soit l'information qu'ils espéraient obtenir ici. J'imagine qu'ils viennent au Canada pour comprendre comment nous arrivons à travailler en collégialité et à appuyer les députés qui veulent faire valoir les enjeux de leurs électeurs en déposant des projets de loi d'initiative parlementaire.
J'imagine que les autres pays qui se penchent sur notre processus d'examen sont complètement découragés. En fait, les représentants que j'ai rencontrés ne seraient certainement pas ravis de connaître le traitement que les députés de la Chambre des communes ont réservé au projet de loi à l'étude.
Nous devons respecter les initiatives parlementaires. Elles ont une histoire, une signification, et nos prédécesseurs se sont battus avec acharnement pour avoir le droit de déposer ce genre de projets de loi et d'en débattre.
En fait, les initiatives parlementaires sont limitées. On ne peut en débattre que quelques heures, contrairement aux projets de loi émanant du gouvernement, dont on peut pratiquement parler indéfiniment; du moins, on peut effectivement débattre très longtemps des projets de loi d'initiative ministérielle en dépit des motions d'attribution de temps actuelles, et c'est normal. Les projets de loi émanant du gouvernement portent à conséquence pour l'ensemble des citoyens canadiens, ou devraient avoir des conséquences de prime abord. C'est peut-être parce que les projets de loi d'initiative parlementaire visent parfois des citoyens particuliers qu'on leur accorde moins de temps.
Quoi qu'il en soit, c'est tout de même un compromis puisque nous ne pouvions tout simplement pas en débattre auparavant. Nous devons donc respecter le temps de débat qui nous est accordé, quel qu'il soit. Nous devons être conscients que d'autres se sont battus à la Chambre des communes pour obtenir ce droit, qui mérite notre respect.
J'ai pourtant du mal à sentir du respect à l'égard de ce droit, ici. Il s'agit d'un dangereux précédent, qui pourrait même pousser à la révolte les simples députés, communément appelés les députés d'arrière-ban. Lorsqu'on va trop loin, les gens ripostent. Nous en avons été témoins récemment à la Chambre des communes, et je suis persuadé que nous le verrons encore.
Le gouvernement ne doit pas pouvoir déposer ses projets de loi comme il l'entend, et voilà une des limites. Les projets de loi d'initiative parlementaire doivent justement venir du Parlement. Ils ne sont pas des initiatives publiques à la disposition des députés qui occupent une fonction gouvernementale.
Nous devons vraiment prendre conscience de notre histoire et comprendre pourquoi les choses se sont passées ainsi afin de respecter nos acquis et d'aller encore plus loin. Mais pour l'instant, nous ne sommes tout simplement pas à la hauteur, ce qui est malheureux puisque nous pourrions ainsi emprunter la mauvaise voie.
Je pense que l'amendement proposé nous aidera à revenir sur le bon chemin. Il contribuera à rééquilibrer un peu le débat, qui n'a pas été facile et qui est chargé d'émotion. Nous sommes en fin de session parlementaire, avant l'ajournement estival de la Chambre, et le débat s'accompagne d'une certaine urgence, ce qui explique dans une certaine mesure pourquoi nous siégeons aussi tard. Nous ne sommes pas le seul comité à être resté à une heure aussi tardive. En fait, certains ont siégé pendant des heures, et même pendant des jours au bout du compte. Mais ces débats valent la peine. Nous parlons d'aider les résidents à devenir des citoyens.
Quant à ceux qui souhaitent se joindre aux Forces canadiennes et devenir citoyens, nous leur offrons l'occasion d'obtenir rapidement ce qu'ils désirent — c'est louable, certes, mais c'est nettement insuffisant.
Jumeler cette mesure au retrait de la citoyenneté revient à appliquer un étrange principe de carotte et de bâton au projet de loi, ce qui a vertement été critiqué. Les membres permanents du comité sont certainement au courant, et je suis persuadé que le s'en souvient très bien.
Nous devons vraiment nous demander quel est l'objectif. Qui sont les électeurs que nous aidons, et à quelle fin le faisons-nous?
Je ne doute pas qu'un certain nombre d'électeurs de M. Shory trouvent que le projet de loi est un pas dans la bonne direction. Je le félicite d'ailleurs de tenir compte de la volonté de ses électeurs. Or, il en a certainement bien d'autres qui voudraient eux aussi pouvoir obtenir leur citoyenneté et qui souhaiteraient que le projet de loi ne se limite pas à ceux qui se joignent aux Forces armées canadiennes.
Nous devons examiner la situation tant dans son ensemble que dans ses détails. Dans ce cas-ci, nombreux sont ceux qui en ont justement critiqué les détails, et pour cause. Le projet de loi semble faire abstraction des obstacles législatifs que rencontrent ceux-là mêmes que le député tente d'aider. Seules des circonstances exceptionnelles et subjectives leur permettront de profiter des avantages du projet de loi.
Je ne crois pas que ceux qui se joignent aux Forces armées canadiennes — ceux à qui j'ai parlé, du moins — sont convaincus de pouvoir obtenir leur citoyenneté canadienne grâce à une circonstance exceptionnelle subjective prévue au projet de loi. Ce n'est pas assez. Voilà pourquoi ce genre de projet de loi doit faire l'objet d'un débat; on peut alors en corriger les lacunes et profiter de témoignages d'experts et de l'expérience des collègues.
Je pense que le comité est particulièrement bien placé pour les témoignages de spécialistes et que la Chambre des communes permet d'écouter l'avis des collègues quant aux améliorations possibles du projet de loi.
Le processus d'examen des projets de loi d'initiative parlementaire ne permet pas de tenir de grands débats à la Chambre. Présenter le projet de loi à la Chambre constitue déjà un pas dans la bonne direction, en quelque sorte. Mais nous devons parallèlement comprendre les limites des initiatives parlementaires, à savoir que le débat en Chambre est terriblement balisé et encadré par certaines règles qui en restreignent la profondeur.
Le secrétaire parlementaire avait peut-être raison, dans une certaine mesure, de proposer des amendements qui lui permettent probablement de tenir un débat plus poussé, à l'instar d'un projet de loi d'initiative ministérielle. Or, il ne s'agit pas d'un projet de loi émanant du gouvernement, mais bien d'un projet de loi d'initiative parlementaire.
J'invite bien sûr le secrétaire parlementaire à discuter avec son ministre pour voir si le gouvernement pourrait contribuer autrement à résorber le retard accumulé du côté des demandes de citoyenneté canadienne. Mais dans le cas du projet de loi dont nous sommes saisis, je pense que nous avons raison de nous arrêter un instant et d'être préoccupés. Même s'il s'agissait d'abord de l'initiative personnelle d'un simple député, le projet de loi commence à prendre des airs de responsabilité gouvernementale.
Voilà ce qui inquiète le plus tout le monde. Nous devons vraiment examiner le processus qu'a suivi le projet de loi et les problèmes qui ont été soulevés au sein du comité pour savoir comment améliorer les choses.
Malheureusement, je ne crois pas que les amendements proposés par le secrétaire parlementaire répondent complètement aux préoccupations des témoins. En fait, ils retournent le projet de loi sens dessus dessous, ce qui est terriblement malheureux. Nous ne devrions pas faire cela.
Un simple député doit défendre son projet de loi avec toute son énergie. Dans ce cas-ci, je suis persuadé que le député a présenté son projet de loi pour de bonnes raisons, mais il devrait prendre avec une certaine réserve les critiques et les propositions des députés qui occupent une fonction gouvernementale.
Le but n'est pas de dire au député quoi faire de son projet de loi d'initiative parlementaire, mais je crois que nous aurions eu avantage à discuter avec le ministre du fait qu'il ne faut pas mêler les initiatives ministérielles et les initiatives parlementaires.
Il sera probablement très difficile d'obtenir l'appui de tous les partis à l'égard du projet de loi, qui est encore vivement contesté à la Chambre, au sein du comité et du côté des réfugiés et des Néo-Canadiens.
C'est un projet de loi inquiétant qu'il faudra améliorer.
Vous pouvez reprendre la parole, madame la présidente.
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Merci, madame la présidente.
Je suis ravi et bien heureux d'avoir l'occasion de me prononcer sur l'amendement. Je vais essayer d'être assez bref, mais je veux aborder certains éléments essentiels qui, je pense, s'appliquent à ce dont le comité discute depuis quelques jours.
Je tiens à dire que j'ai été très attentif, comme vous et d'autres membres du comité le savez bien. J'ai également été assez touché et parfois même ému par les expériences personnelles que certains membres nous ont racontées. Je sais que la citoyenneté canadienne est un sujet chargé d'émotion qui soulève les passions en raison du grand respect et de la valeur que nous lui accordons.
Lorsque M. Shory, le député de Calgary-Nord-Est, a présenté le projet de loi d'initiative parlementaire , il a d'emblée expliqué très clairement les raisons de son geste. Il s'est fondé sur trois croyances fondamentales, à savoir que nos troupes méritent le plus grand respect, qu'il convient de créer de nouveaux vecteurs d'intégration et que la citoyenneté canadienne est un privilège dont la valeur doit être protégée.
Je sais d'expérience ce que la citoyenneté représente aux yeux d'une famille, puisque je viens d'une famille d'immigrants, comme il y en a tant d'autres au Canada. Mes parents sont arrivés au pays au milieu des années 1950. En fait, c'est en 1956 que ma très regrettée mère est montée dans le bateau qui l'a transportée de son pays d'origine jusqu'à Halifax, au Canada, et mon père l'a suivie en 1957. Ils rêvaient d'une vie meilleure. Je sais à quel point la citoyenneté canadienne était précieuse à leurs yeux lorsque mes frères et moi sommes nés, et à quel point ils tenaient à devenir des citoyens canadiens.
Sans vouloir en faire une histoire personnelle, puisque ce n'est pas le but de la séance d'aujourd'hui, je vais vous dire à quel point ma famille et moi avons été émus et fiers lorsque j'ai été assermenté, moi qui suis le premier-né au Canada, et lorsque je suis devenu député canadien, si loin de la Grèce, le pays d'origine de mes parents.
Le jour de mon assermentation a été très spécial, comme pour chacun d'entre nous. J'avais invité 34 proches et amis. Malheureusement, et c'est plutôt tragique, j'ai perdu ma mère six mois jour pour jour avant d'être élu. Elle n'a pas été témoin de ce moment très spécial pour moi, même si je dois dire que j'ai abondamment senti sa présence ce jour-là. Pendant les 30 secondes de l'assermentation, lorsque nous posons la main sur la Bible, j'ai levé les yeux vers les 34 personnes qui étaient là, madame la présidente. Les caméras captaient l'instant et les gens souriaient, heureux. Mon père était dans la première rangée. Il portait une cravate rouge et blanche décorée d'une feuille d'érable et du mot « Canada ». Pendant que tout le monde souriait et prenait des photos, des larmes coulaient sur ses joues, car l'instant ne lui a pas échappé. Lorsque j'ai vu son visage, j'ai compris la vie d'un immigrant et les épreuves que mes parents ont dû surmonter en arrivant au pays, et la vie que j'ai vécue en naissant ici et en ayant toutes les chances possibles grâce à mes parents travaillants. Cet instant est gravé dans ma mémoire à moi aussi.
La citoyenneté canadienne est une valeur que nous chérissons tous. Lorsque les députés de l'autre côté ont raconté leur expérience, j'ai ressenti leur émotion, comme cela m'est souvent arrivé, tout en sachant à quel point je suis privilégié d'être membre permanent de notre comité de la Chambre des communes.
Lorsque j'ai entendu M. Shory parler de son projet de loi à la toute première lecture — j'en ai discuté maintes fois avec lui depuis —, j'ai été frappé par sa grande ouverture aux commentaires, aux renseignements et aux amendements de la part de tous les députés de la Chambre. Il souhaitait véritablement améliorer ce projet qui lui tient tant à coeur.
Je l'ai remarqué compte tenu de mon intérêt personnel à l'égard du projet de loi. Je sais très bien ce que M. Shory pense des amendements et des modifications apportées à son projet de loi depuis ce jour de première lecture. Chaque fois, il a exprimé sa fierté de parrainer le projet de loi tout en acceptant les recommandations et les amendements qui l'améliorent davantage, selon lui.
J'ai également été touché du fait que M. Shory, qui n'est pas un membre permanent du Comité de la citoyenneté et de l'immigration, n'a pas manqué la moindre séance sur son projet de loi. Il a entendu tous les témoignages, a écouté les commentaires de tous les députés qui sont intervenus et a même quelques fois remplacé des membres absents.
De plus, sa présence à ce véritable marathon d'heures de séance où nous discutons de l'amendement témoigne de sa fierté de parrainer le projet de loi. Il n'a jamais laissé entendre qu'on portait atteinte d'une façon ou d'une autre à ses privilèges en tant que député. C'est donc sans la moindre réserve que j'affirme qu'il s'agit bel et bien d'un projet de loi d'initiative parlementaire présenté par un député qui a accueilli favorablement tous les commentaires au fil du processus.
M. Devinder Shory: De tous les partis.
M. Costas Menegakis: En effet, de tous les partis.
J'aimerais vous donner quelques renseignements au sujet d'une enquête. Je serai le plus concis possible.
On a demandé aux Canadiens s'ils sont d'accord pour qu'on retire la citoyenneté aux citoyens canadiens reconnus coupables d'actes de trahison contre du Canada, comme un acte de guerre visant les troupes canadiennes. Si nous prenons la moyenne globale de tous les répondants, madame la présidente, 83 p. 100 sont d'accord, tandis que 14 p. 100 sont contre et que 2 p. 100 ne le savent pas.
Ce qui est particulièrement intéressant pour notre société multiculturelle, pour cette merveilleuse mosaïque que nous retrouvons ici, dans le pays le plus accueillant au monde, c'est qu'à la même question, alors que 83 p. 100 des répondants nés au Canada sont d'accord, 83 p. 100 de ceux qui ne sont pas nés ici le sont eux aussi; c'est peut-être encore plus frappant. Je pense que ce résultat témoigne encore plus de l'importance que tous les Canadiens accordent à la citoyenneté canadienne et de leur opinion à ce sujet, peu importe leur origine.
Voilà ce que je constate à la lumière de ces chiffres.
Les résultats de l'enquête ont aussi été compilés par parti politique. Je dois dire que dans tous les cas — chez les conservateurs, les libéraux, le NPD et même le Parti vert —, le résultat le plus bas est de 82 p. 100. Il s'agit de citoyens qui ont dit avoir voté pour un parti en particulier lors de l'élection de mai 2011. Tandis que le résultat le plus bas est de 82 p. 100, le plus élevé est de 94 p. 100; ces gens conviennent donc qu'on devrait retirer la citoyenneté aux citoyens qui commettent un acte de guerre ou de trahison contre notre pays ou nos troupes.
Voici ce que nous ont dit certains témoins — et j'ai écouté très attentivement ce vaste groupe venu nous présenter l'avis de différentes organisations et associations représentant le plus grand nombre de citoyens canadiens.
Par exemple, voici ce qu'avait à dire Frank Dimant, le vice-président à la direction de B'nai Brith Canada:
Nous saluons le message envoyé par le projet de loi, qui est un engagement à recommander la révocation de la citoyenneté pour des motifs autres que la fraude, une chose que nous demandons depuis fort longtemps. Nous chérissons tous les droits et libertés qui viennent avec la citoyenneté canadienne, mais B'nai Brith Canada fait aussi valoir depuis longtemps que celle-ci s'accompagne de responsabilités sérieuses.
Le passage est tiré de sa lettre du 28 janvier 2013.
Madame la présidente, voici ce qu'a dit Bashir Ahmed, le directeur général de la Somali-Canadian Education and Rural Development Organization:
Le projet de loi contribuera largement à renforcer la valeur de la citoyenneté canadienne. Il est donc logique d'accélérer la procédure pour ceux qui sont prêts à défendre le pays, ainsi que de retirer la citoyenneté à ceux qui se battent contre le Canada et contre les valeurs canadiennes telles que la liberté. Le projet de loi empêchera les organisations terroristes d'entrer au Canada et de prendre part à des activités terroristes.
Il y a bien des groupes, madame la présidente.
Salma Siddiqui, présidente du Congrès musulman canadien, a dit ce qui suit:
Nous ne devrions pas permettre aux Canadiens qui sont contre les valeurs de notre société d'abuser des privilèges que leur procure la citoyenneté canadienne. Nous devons agir pour déchoir de leur citoyenneté les Canadiens qui profitent de leur statut pour commettre des actes violents et illégaux.
J'ai entendu dire que certains craignent que le projet de loi C-425 n'embrasse trop large, ou qu'il serve un « intérêt politique ». Je ne suis pas d'accord. Le projet de loi C-425 témoigne de la fierté que nous éprouvons à vivre dans une démocratie ouverte et libérale où la liberté est un bien commun.
Ça continue, madame la présidente. Je ne vais pas citer tous les témoins, mais j'aimerais terminer avec le témoignage d'Asif Khan, le secrétaire national des relations publiques de Ahmadiyya Muslim Jama'at:
La citoyenneté canadienne est une grande bénédiction et un cadeau dont l'importance et la pureté doivent être protégées et préservées. C'est pourquoi il est essentiel que le gouvernement du Canada possède le pouvoir de retirer la citoyenneté canadienne aux personnes à citoyenneté double qui sont reconnues coupables d'avoir commis des actes de guerre contre les Forces canadiennes.
Madame la présidente, voici ce que je tiens à vous dire ainsi qu'à tous mes collègues présents. Le projet de loi vise les terroristes, des individus qui commettent des crimes contre le Canada, des crimes contre les femmes et les hommes courageux qui servent au sein des Forces canadiennes. Il garantit une meilleure protection des victimes. Voilà de quoi il s'agit.
Personne ne va pas s'attaquer à une pauvre famille ayant la double citoyenneté en l'expulsant. C'est simple: si vous ne commettez aucun crime contre le Canada et que vous ne posez aucun acte de guerre contre les Forces canadiennes, vous ne risquez aucunement de perdre votre citoyenneté canadienne. C'est impossible. Le projet de loi ne vise que les criminels, les terroristes et ceux qui commettent un crime contre le pays. Voilà ce que fait le projet de loi. Il récompense également ceux qui sont prêts à servir sur la ligne de front au pays et à l'étranger dès qu'ils sont appelés à le faire au sein des forces armées. Voilà ce que fait le projet de loi.
Madame la présidente, je peux continuer et parler du débat à la Chambre...
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Il faut faire preuve d'un peu d'indulgence ici, car les interruptions trop fréquentes peuvent faire perdre le fil des idées. Au point où nous en sommes, je ne crois pas qu'il soit utile de procéder ainsi.
Au final, M. Dykstra savait très bien, au moment de proposer cette motion, que celle-ci était mauvaise. Il le savait. Il savait qu'il ne pourrait pas empêcher que la motion soit débattue. Sachant cela, il a essayé d'y mettre fin.
En tant que président, vous êtes tenu de respecter les règles. Et ce qu'elles disent est très clair. Les représentants du gouvernement vous ont mis en porte-à-faux, monsieur le président, en disant qu'ils allaient vous forcer à aller dans leur direction plutôt que de suivre ce que dit le Règlement. Ils ont cru qu'ils pourraient vous forcer, en tant que président, à appuyer la position du parti majoritaire, et c'est exactement ce qu'ils ont fait. Mais cela n'a pas d'importance. Il vous incombe, en tant que président, d'examiner les règles, et vous avez pris la bonne décision. Vous étiez prêt à permettre au comité d'aller de l'avant. Mais, ils ont utilisé leur majorité pour contester votre décision, en sachant très bien que cela allait mettre fin au débat aussi longtemps qu'ils voteraient tous dans le même sens, même si cela devait demander une entorse au Règlement.
Même le leader parlementaire du gouvernement n'a pas été aussi téméraire que les membres de ce comité l'ont été pour infirmer une décision du président. Par exemple, le leader parlementaire du gouvernement demandera une attribution du temps. L'attribution du temps fait partie des règles. Pouvez-vous vous imaginer ce qui arriverait si le gouvernement faisait en Chambre ce que ses représentants ont fait ici aujourd'hui, c'est-à-dire de contester une décision du président sous prétexte que cela ne facilite pas leur programme? Car cela n'a effectivement rien à voir avec les règles, mais tout à voir avec leur programme, n'est-ce pas?
Qu'arriverait-il si nous appliquions le même principe à la Chambre des communes? Je crois, monsieur le président, que ce serait le chaos. Cela se produit ici, dans une pièce réservée aux comités, loin du regard des Canadiens. Je ne vois pas les médias se bousculer pour observer ce qui se passe ici. Si cette façon de faire devait se produire à la Chambre des communes, elle ne serait pas tolérée. En fait, le gouvernement devrait se retirer ou, à tout le moins, suivre ma suggestion et faire ses excuses au comité.
Soyons tout de même un peu indulgents à leur endroit en présumant qu'ils n'ont peut-être pas saisi toutes les conséquences de ce que M. Dykstra proposait. Je crois qu'ils doivent comprendre qu'en vous contestant, monsieur le président, ce qu'ils ont fait est... Je n'ai jamais rien vu de tel depuis que je suis au Parlement, et je crois que c'est une orientation risquée.
Le fait que nous voulions voir cette réunion se terminer dans cinq minutes, une heure ou deux heures est secondaire. Je crois tout simplement qu'un tel comportement n'est pas sain pour une démocratie, nommément, qu'une majorité décide, en essence, de se soustraire aux règles existantes et de manipuler le président dans une telle mesure que celui-ci se voit compromis.
Je crois, monsieur le président, que vous avez été compromis. J'ai l'intention, une fois que j'aurai bien intégré ce qui s'est passé ici ce matin, de soulever la question en Chambre, si, dans les faits, le conflit n'est pas réglé avec plus de bonne volonté. Il s'agit en effet d'une question de privilège qui a des ramifications très profondes.
Pouvez-vous vous imaginer si tous les comités adoptaient le même genre d'attitude? Cela pourrait pratiquement mettre fin à toutes nos activités. Ce n'est pas sain. Ce n'est pas ainsi que nous devrions établir des lois et nous comporter au sein du comité.
J'étais ici la semaine dernière et certaines choses n'auraient peut-être pas dû se produire, mais ce n'était rien d'aussi extrême que ce que nous venons tout juste de voir.
Je ne dis pas cela pour tenter d'une quelconque façon de faire de l'obstruction. Je vais m'arrêter ici. Je me contenterai de dire qu'il y a beaucoup de choses que j'aimerais pouvoir dire à ce sujet. J'espère avoir l'occasion de le faire, mais s'il n'y a pas de changement d'attitude, je suppose que ce ne sera pas possible, monsieur le président. Je pense que ce serait absolument regrettable et que personne ici ne devrait en être fier.
Merci, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président.
Je continue d'entendre des discussions qui ne portent pas sur la motion en elle-même concernant la prolongation, et c'est ce dont je vais parler.
Pour apporter des précisions et aux fins du compte rendu, nous avons commencé à étudier cette question le 11 juin à 8 h 45 et depuis un seul conservateur a eu l'occasion de parler en comité. Donc, s'il est question de qui a la possibilité de prendre la parole et de qui est empêché de présenter son point de vue et celui de ses électeurs, nous pouvons faire valoir tout cela ici même. Et tous mes collègues du parti ministériel qui sont membres du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration sont tout à fait d'accord avec moi, un seul d'entre nous a eu la parole.
Monsieur le président, je sais que vous réoccupez le fauteuil de la présidence ce matin, mais le parti ministériel a tout fait pour offrir aux néo-démocrates et au libéraux la possibilité de parler de la prolongation. Quand Mme Sims était présidente, elle a permis, par exemple, à Mme Groguhé de parler pendant plus de neuf heures et demie.
J'ignore combien de temps les néo-démocrates vont utiliser pour parler de la prolongation, alors qu'ils ont de loin la plus grande partie du temps de parole, en fait pas seulement la plus grande partie mais pratiquement tout le temps de parole. Mais, alors qu'ils ont pratiquement utilisé tout le temps de parole, voilà qu'ils décident de présenter un amendement, ce qui permettra bien évidemment de retourner à la case départ du processus.
Monsieur le président, nous, le parti ministériel, avons finalement la possibilité de parler de la motion que nous avons présentée. En elle-même, cette motion ne porte pas sur tout le débat qui a eu lieu ici en comité. Nous en avions convenu. Vous vous souviendrez, monsieur le président, que le sous-comité s'est réuni. Nous avons tracé des grandes lignes. Nous avons élaboré un processus et décidé de la façon de l'appliquer et de la date à laquelle se fera l'étude article par article. Tout cela a été avalisé par l'ensemble des membres du comité.
Nous reconnaissons que la présentation de nos amendements est la seule chose qui nous a obligés à retourner à la Chambre. Des amendements que M. Lamoureux, Mme Sims et tous les membres de l'opposition qui font partie du comité réclamaient pratiquement à toutes nos réunions. En fait, ils demandaient chaque jour: Pouvons-nous voir ces amendements? Pouvons-nous voir vos amendements? À ce moment, il leur fallait absolument ces amendements pour pouvoir aller de l'avant.
Donc, par principe, je n'accepte pas l'argument selon lequel la présentation des amendements est la raison d'être de la demande pour une prolongation. Ce n'est pas une question que je pose. En fait, lorsque nous avons fixé une date précise de présentation des amendements, tout le monde a accepté cette date. Tous les membres de l'opposition au sein du comité et moi-même avons fait valoir que ce serait moi qui les présenterais, par l'entremise de la greffière, avant que nous en ayons l'obligation.
Ce faisant, nous avons donné à l'opposition la possibilité d'examiner de manière approfondie les amendements que nous avons présentés. Nous avons aussi eu l'occasion d'entendre ce que notre greffière légiste avait à dire au sujet des amendements, à savoir s'ils s'inscrivent dans la portée du projet de loi. Il a été conclu à ce moment — et nous acceptons cette conclusion monsieur le président — que les amendements ne s'inscrivaient pas dans la portée du projet de loi. Nous l'avons acceptée. Nous ne l'avons pas contestée. Il a fallu nous assurer que la décision prise était en conformité avec le Règlement approprié, celui que nous avons devant nous. Nous avons conclu qu'elle l'était.
Nous sommes ensuite passés à l'étape suivante du processus, soit présenter la motion ici au comité pour que nous obtenions des éclaircissements à la Chambre et l'autorisation de la Chambre des communes d'élargir la portée du projet de loi afin de considérer les amendements que nous avons présentés au comité avant d'y avoir été obligés.
Je suis ensuite allé à la Chambre des communes, tout comme M. Shory, pour assister aux délibérations, et ce, chaque jour pendant plus de deux semaines afin de pouvoir présenter une motion d'acceptation qui nous permettrait de tenir un débat approfondi à la Chambre des communes.
J'ai reçu de la part de notre leader parlementaire et de notre whip des assurances que la motion sera traitée en priorité à la Chambre des communes et que nous étudierons une motion d'acceptation qui permettrait de tenir le débat sur la prolongation du projet de loi de M. Shory. Une prolongation, soit dit en passant, associée au soutien qu'il a accordé à tous les amendements que j'ai proposés.
Durant tout le processus, pas une seule fois M. Shory s'est dit préoccupé par quoi que ce soit au niveau des consultations, des discussions ou de la présentation des amendements. Son soutien est total. En fait, il a assisté à pratiquement toutes les réunions du comité. Il lui est arrivé de temps à autre d'avoir un remplaçant, mais la plupart du temps il écoutait et observait ce qui se passait au comité, notamment l'obstruction systématique orchestrée par le Nouveau Parti démocratique.
Monsieur le président, j'ai tenté de prendre la parole pendant près de deux semaines durant les affaires courantes, après la période des questions ou à 10 heures du matin, en fonction de l'heure à laquelle les affaires courantes étaient discutées, et chaque fois, les députés néo-démocrates prenaient la parole pour m'empêcher de présenter la motion d'acceptation portant sur l'élargissement de la portée du projet de loi.
Lorsque j'entends des députés de l'opposition dire qu'on les empêche de s'exprimer sur cette question ou de la faire avancer, je les regarde droit dans les yeux, surtout ceux du NPD. S'ils croient réellement que la Chambre des communes est le lieu où la démocratie prévaut, où ils représentent leurs électeurs, où ils transmettent des messages au nom de leur parti et où on doit écouter ce qu'ils ont à dire parce qu'ils méritent d'être entendus, alors voici la question que je poserais à chacun d'entre eux: Pourquoi diable ne me laissent-ils pas prendre la parole à la Chambre des communes afin de proposer que, le comité ayant décidé démocratiquement suite à des discussions, un examen et un vote, nous demandions à la Chambre de nous autoriser à élargir la portée du projet de loi?
La seule raison pour laquelle on nous a empêchés de faire cela, c'est-à-dire que l'on m'a empêché de présenter cette motion à la Chambre des communes, est que les néo-démocrates savent qu'un projet de loi d'initiative parlementaire qui n'est pas présenté avant la date limite de 60 jours doit être non amendé quand il passe à la Chambre. Ce n'était pas pour une raison démocratique quelconque, ni pour des raisons qui assureraient la poursuite du débat à la Chambre des communes, mais c'était simplement pour torpiller un projet de loi d'initiative parlementaire, et donc de ne pas donner à l'auteur du projet de loi la possibilité de le présenter.
Monsieur le président, à la Chambre des communes, les députés d'arrière-ban n'ont pas souvent l'occasion de présenter un projet de loi en espérant qu'il ira jusqu'au bout du processus et qu'il recevra la sanction royale.
Puis, au regard de la réticence de l'opposition à nous permettre d'exercer notre droit démocratique d'être entendus, nous avons compris qu'il fallait revenir au comité pour obtenir une prolongation.
J'ai dûment présenté la motion. Je me souviens de la première fois où nous avons demandé la prolongation. M. Lamoureux a effectivement accepté, et c'est son droit en sa qualité de membre du comité, que nous siégerions jusqu'à 10 h 45 et il a parlé ad nauseam. Donc, nous n'avons pas pu à ce moment débattre de la prolongation. Il nous fallait attendre de le faire à la prochaine réunion.
Eh bien, monsieur le président, vous n'étiez pas à cette réunion. Mme Sims, qui est notre vice-présidente, a assuré la présidence et nous avons dû contester sa décision. Nous avons réussi à obtenir gain de cause et poursuivre la discussion sur la prolongation. Je suppose que c'était sa prérogative en tant que présidente et qu'elle était en droit de le faire.
J'ai observé son travail de présidente la semaine dernière. Elle n'était peut-être pas loin d'enfreindre les règles, mais elle a fait son possible pour tenter de tout faire, peut-être en les contournant, mais elle les a certainement suivies.
Ce qui a résulté à ne donner la possibilité de parler qu'à un seul membre du comité de ce côté de la Chambre... En fait, nous avons pu nous exprimer qu'à un seul moment de la discussion sur un amendement. Cette discussion ne portait pas sur la motion principale. C'était la première fois durant pratiquement une semaine que le parti ministériel — de ce côté-ci du comité et évidemment de notre côté à la Chambre — a eu l'occasion de s'exprimer sur la prolongation.
Tout ce que nous voulons en ce qui a trait à cette prolongation est le rejet du projet de loi d'initiative parlementaire en troisième lecture et son renvoi au Sénat, non pas pour que cette mesure législative prenne le pas sur les autres priorités actuelles de la Chambre des communes, qu'il s'agisse de priorités du gouvernement ou de priorités de l'opposition, mais pour qu'elle soit traitée simplement et très rapidement à la Chambre afin que le projet de loi d'initiative parlementaire de M. Shory ait une prolongation de 30 jours.
Dans le domaine de l'immigration, il y a beaucoup de dossiers pour lesquels l'opposition est prête à se battre bec et ongles et je comprends cela. Mais il est inacceptable de refuser à un député la possibilité que son projet de loi d'initiative parlementaire fasse l'objet d'une discussion convenable, d'un examen approfondi et d'un vote démocratique.
C'est inacceptable parce que la demande... Quand on se rend compte de la simplicité de la demande pour une prolongation... Cette motion n'est pas accompagnée d'un essai de 2 000 mots. Elle n'est pas accompagnée d'une stratégie sous-jacente visant à contourner le processus que nous suivons à la Chambre des communes dans le cadre du Parlement fondé sur le modèle de Westminster. Cette prolongation est très simple, très directe, très efficiente et très efficace pour aboutir à la conclusion que M. Shory, un député dûment élu, ait la possibilité et le droit que l'on parle de son projet de loi d'initiative parlementaire. Il a le droit que l'on débatte de son projet de loi d'initiative parlementaire. Il a le droit que l'on se prononce sur son projet de loi d'initiative parlementaire.
Il ne doit pas et ne devrait pas être acculé dans un coin et voir, impuissant, les membres d'un parti d'opposition se conduire ainsi parce qu'ils n'aiment pas le projet de loi. L'opposition a trouvé une procédure lui permettant de contourner le système.
J'ai écouté Mme Sims. Je la cite. Aujourd'hui elle a dit à 12 h 21 qu'ils n'aiment pas parler pour parler. Puis, pas plus de deux minutes plus tard, elle a dit qu'ils utiliseront les outils qui sont à leur disposition.
Il y a une grande différence entre avoir la conviction de ne pas aimer ni accepter l'orientation d'une mesure législative particulière que votre parti n'appuie pas, pour laquelle vous ne pouvez pas voter pour... je suis d'accord. Je peux ne pas être d'accord avec vous sur mes choix de vote, mais j'accepte que vous ayez le droit de vous opposer à une mesure législative en laquelle vous ne croyez pas.
Mais lorsque vous dites que vous utiliserez les outils mis à votre disposition, il s'agit d'un argument, en fait, je pense que c'est une conviction, que ce que vous faites est imposer une restriction au droit d'une personne de faire avancer son projet de loi alors qu'elle est parfaitement consciente et qu'elle comprend entièrement l'entente...
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Je veux insister là-dessus encore une fois. Afin d'expliquer ce point, je dois revenir sur mes pas et parler de la motion dont nous sommes saisis, car la motion ne contient pas une seule phrase; elle contient deux paragraphes. Nous ne sommes pas saisis d'un sous-amendement ou d'un amendement proposé après coup. Lorsque M. Dykstra a présenté la motion, il a parlé des deux paragraphes; nous avons donc affaire à deux paragraphes. Me faire dire, en tant que députée, que je n'ai pas le droit ou que je n'aurai pas la permission de parler de la motion intégrale ainsi qu'elle a été déposée, voilà qui limite gravement, selon moi, mon privilège parlementaire.
C'est un de ces principes qui nous tiennent à coeur, monsieur le président. Comme vous le savez, tant à la Chambre qu'au comité, les députés de l'opposition jouissent de très peu de droits. L’un d’entre eux, c'est le droit de s'exprimer sur les motions qui sont proposées. Quand une motion est présentée, nous — les élus — avons le droit de nous prononcer là-dessus, à tour de rôle, de manière ordonnée et conformément aux règles du comité. Voilà pourquoi j'estime que mes droits sont bafoués dans le cadre du débat sur cette motion — et je pense que vous conviendrez que nous sommes saisis de la motion dans son ensemble, et non pas d'une partie qu'on peut sélectionner à sa guise. Dans la motion, on demande une prolongation de 30 jours de séance afin d'étudier le projet de loi C-425. Ensuite, on y explique en quoi consiste le projet de loi. Enfin, on recommande que le comité soit habilité à élargir la portée du projet de loi.
Si nous demandons une prolongation, ce n’est pas parce que nous voulons tenir des réunions ad nauseam. La prolongation que le gouvernement cherche à obtenir vise à contribuer à cet élargissement. Alors, si je n’ai pas la possibilité d’en parler — et c'est là que le privilège parlementaire entre en jeu, parce que si je ne peux pas parler de la motion dont le comité est saisi, alors on limite mes droits d'une façon ou d'une autre.
Je crois qu'en tant qu'élue, ayant très peu de droits sous le gouvernement majoritaire actuel, un des rares privilèges parlementaires dont je jouis, c'est celui de pouvoir m’exprimer conformément aux règles. Et selon les règles en vigueur ici, quand c'est à mon tour d’intervenir, je peux parler. Vous savez, la pertinence est certes un facteur. Je peux parler de motions. Or, voici que je me fais dire que je dois m'en tenir à une petite phrase dans une motion qui en contient plusieurs. C'est justement pourquoi j’estime qu'il y a atteinte à mon privilège en tant que parlementaire.
Je prends mes fonctions d'élue très au sérieux, aussi bien quand je suis dans ma circonscription que quand je suis ici, à la Chambre. Vous savez sans doute que je ne suis pas gênée de parler de différentes questions; je ne me limite pas nécessairement à mon domaine d'intérêt. J'exerce ce droit régulièrement pour le compte de mes électeurs, et j’ai bien l’intention de continuer à le faire.
Je m'acharne à soulever cette question de privilège, parce que j'estime qu’on est en train de restreindre non seulement mes droits en tant que députée, mais aussi les droits des personnes qui m'ont élue pour les représenter ici.
Quand je regarde les règles liées au privilège... une fois que la question de privilège est soulevée, je sais que j’ai le droit d'exposer mes arguments, puis le comité a l'occasion d’en délibérer et, enfin, de la mettre aux voix. Je sais également qu’au fur et à mesure que je soulève ces questions de privilège, je dois obtenir une majorité de voix, et j'ai entendu beaucoup d’autres députés défendre le privilège parlementaire, notamment celui des députés d'arrière-ban et de tous ceux qui sont élus... J'espère qu'ils m'appuieront et qu'ils me donneront l'occasion de faire valoir pleinement mes arguments devant le Président de la Chambre.
Personne ici ne doit prendre à la légère une atteinte au privilège parlementaire. Il s'agit d'une question que nous devons tous prendre très au sérieux. Afin de faire toute la lumière sur les faits, j'aimerais que cette question soit renvoyée à la Chambre et, une fois là, je serai heureuse de présenter mon argument et d’expliquer pourquoi il est nécessaire de procéder ainsi.
Comme je l'ai dit tout à l'heure — et je n'essaie pas de soulever de nouveaux points —, les élections se suivent et ne se ressemblent pas, mais notre démocratie parlementaire et les règles auxquelles nous nous conformons sont là pour rester. Une des responsabilités qui nous incombent en tant que membres du comité... oui, nous pouvons essayer d'assouplir les règles, chose que nous faisons bel et bien, mais en même temps, un des principes que nous devons considérer comme étant sacro-saint, c'est la capacité d'exprimer notre opinion; alors, lorsqu'un député estime qu'on restreint ce privilège au point de... Je me demande si nous ne devrions pas avoir un débat, parce que ce genre d'interprétation porte atteinte à mon privilège. On pourrait proposer un amendement, puis décider par un oui ou un non.
J'ai trouvé très pénible d'endurer le débat sur le sous-amendement, puis l'amendement, pour ensuite me faire dire que j'aurai l'occasion de prendre la parole lorsque nous en serons à la motion principale. Or, maintenant que j'ai l'occasion de me prononcer sur la motion principale, on me répète à plusieurs reprises que je dois m'en tenir à la dernière phrase de la motion. Ce n'est pas, me semble-t-il, la bonne façon d'exercer nos fonctions et nos pratiques de parlementaires.
C'est dans cette optique que...
Monsieur le président, est-ce que je...
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Merci, monsieur le président.
Cela fait depuis quelques heures que j'essaie de présenter ma position. J'ignore où j'en étais rendu. Je n'ai pas nécessairement de notes à consulter, mais je vais entrer dans le vif du sujet en essayant d'être aussi bref et aussi concis que possible.
Comme vous l'avez précisé à maintes reprises dans vos observations, monsieur le président, je peux, en tant que membre du comité, expliquer pourquoi je suis contre la demande d'une prolongation de 30 jours. Vous avez clairement indiqué que je suis en droit d'exposer mes motifs.
C'est justement ce que j'aimerais faire — suivre votre directive, c'est-à-dire donner les raisons pour lesquelles je m'oppose à l'idée d'accorder une prolongation de 30 jours au projet de loi. C'est au coeur même de la question. Nous sommes saisis d'un projet de loi d'initiative parlementaire et, dans pareil cas, il faut suivre un certain processus. Le Règlement prévoit un processus très différent et très unique à cet égard. Conformément aux règles, on peut bel et bien faire une demande de prolongation de 30 jours ou encore, le comité peut demander à la Chambre une prolongation dans le cadre de l'étude d'un projet de loi d'initiative parlementaire. Dans cette optique, la motion dont nous débattons aujourd'hui a été effectivement jugée recevable.
Ce qui m'inquiète, c'est qu'à un moment donné, je vais devoir voter sur la motion. Avant d'en arriver là, je veux être en mesure de donner des raisons valables pour expliquer très clairement pourquoi je ne peux pas appuyer la motion. Cela tient au fait que les simples députés n'ont que quelques occasions très limitées pour présenter des projets de loi. En effet, un faible pourcentage de projets de loi d'initiative parlementaire avancent aussi loin que le projet de loi dont nous sommes saisis, c'est-à-dire à l'étape de l'étude en comité. Le projet de loi, dans sa forme actuelle, porte sur des questions importantes. Je dois avouer que je suis quelque peu frustré, car j'espérais qu'à ce stade-ci, nous serions rendus à l'étape de l'étude article par article. Toutefois, il est important de bien comprendre que la décision de ne pas appuyer cette motion ne condamne pas le projet de loi à mourir au Feuilleton. Si la plupart des membres du comité votent contre la motion, cela ne signifie pas que nous rejetons le projet de loi de M. Shory. Le projet de loi sera renvoyé à la Chambre, sans aucun amendement. Du moins, c'est ce qu'on m'a expliqué.
C'est l'une des raisons pour lesquelles je crois, en toute conscience, qu'il est important que nous votions contre la motion. C'est même, selon moi, une très bonne raison. Si on tient compte du projet de loi initial à la deuxième lecture et qu'on le compare aux observations que nous avons entendues, surtout à la dernière séance du comité, on constate que d'importants changements ont été proposés.
Si nous acceptons cette demande de prolongation — autrement dit, si la majorité des membres du comité votent en faveur de la motion —, le projet de loi de M. Shory se verra accorder une prolongation et subira sans doute des changements. Il importe de bien comprendre ce point, car après tout, à cette étape-ci du processus, un projet de loi d'initiative parlementaire est bien plus qu'une simple mesure législative élaborée par une personne.
Nous avons eu droit à un débat de fond à la deuxième lecture. Certains députés ont exprimé des préoccupations, d'autres ont manifesté leur appui, et d'autres encore veulent voir le projet de loi avancer de façon quelque peu semblable. Si nous ne respectons pas cela, des changements importants risquent de ne pas être adoptés, chose que nous pourrons éviter, j'en suis convaincu, si nous permettons au projet de loi de passer à la troisième étape ou à l'étape du rapport — c'est-à-dire, si nous n'accordons pas de prolongation.
Si nous n'appuyons pas la motion de façon collective, ou idéalement à l'unanimité, le projet de loi sera renvoyé à la Chambre, où il sera ensuite mis aux voix. Je suppose que le projet de loi de M. Shory sera adopté. Qui sait si on finira par l'adopter à l'étape du rapport?
Par contre, si nous votons en faveur de la motion, cela signifie qu'il faudra attendre jusqu'à l'automne et, à ce moment-là, nous n'aurons aucune idée du sort du projet de loi. Nous savons que certains députés ministériels ont l'intention de le changer considérablement. À cause de l'impact de ces changements, certains députés seront forcés de voter contre cette mesure législative, qui était pourtant censée être un projet de loi d'initiative parlementaire.
Je dis cela parce que, selon moi, nous devrions tous nous préoccuper des conséquences au moment de voter pour ou contre la prolongation de 30 jours.
Je recommande aux membres du comité de reconnaître qu'il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire et de faire en sorte qu'on suive le processus normal à cet égard. Je serais d'ailleurs curieux de connaître l'avis du gouvernement, ou de certains des députés qui vont voter en faveur de la motion, sur la question de savoir si on a déjà acquiescé à une telle demande de prolongation dans le passé et, le cas échéant, pour quelle raison.
Par exemple, comme il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire, on serait porté à croire qu'il y aurait plus de consensus, ou même l'unanimité, entre les membres du comité quant à la nécessité d'accorder une prolongation. C'est pourquoi je trouve qu'il serait intéressant de voir plus de membres de l'opposition nous faire part de leur intention réelle d'appuyer cette motion.
Tout compte fait, ce serait merveilleux si tous les membres du comité avaient le sentiment de travailler dans un esprit de collaboration, parce que le contexte est différent. Il ne s'agit pas d'un projet de loi émanant du gouvernement, mais d'un projet de loi d'initiative parlementaire. Nous reconnaissons la différence à la Chambre. Ainsi, dans le cas des projets de loi d'initiative parlementaire, il arrive souvent que des députés d'un même parti politique votent différemment. Nous en sommes conscients. Je pense qu'en général, c'est positif.
J'aimerais donc qu'on réserve le même traitement à cette motion qui vise une prolongation de 30 jours. Il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire, et les députés devraient se sentir libres de voter comme ils le souhaitent, sans être enclavés par la ligne de leur parti respectif.
Quant à savoir pourquoi nous devrions voter oui, je ne suis pas convaincu que nous avons entendu les arguments, la justification, la motivation ou les raisons sous-jacentes.
Par ailleurs, la seule justification que j'ai entendue, c'est qu'en votant oui, nous pourrons obtenir une prolongation, ce qui nous permettra d'apporter plus d'amendements au projet de loi.
Le fait d'empêcher cette mesure législative de suivre le processus normal que tout autre projet de loi d'initiative parlementaire a dû suivre, selon ce que je comprends, depuis l'instauration de ces règles.... Pour autant que je sache, aucun autre projet de loi d'initiative parlementaire n'a fait l'objet d'une demande de prolongation de 30 jours et de toute autre durée au sein d'un comité — et c'est pourquoi je mets au défi les députés d'en face de nous fournir des renseignements qui prouveraient le contraire.
Y a-t-il déjà eu de tels cas? Dans la négative, j'aimerais alors que les députés réfléchissent aux tenants et aux aboutissants d'une telle décision, avant de se mettre à voter en faveur d'une prolongation de 30 jours.
À mon avis, ce serait une façon malavisée de voter, car nous changeons le traitement réservé à un projet de loi d'initiative parlementaire. Je crois que le processus en souffrirait.
Tel est donc le défi que je lance aux députés, monsieur le président: avant de passer au vote proprement dit, il faut prendre le temps de réfléchir sur ce qui est en cause.
Je me demande même s'il ne vaudrait pas mieux que nous suspendions nos travaux quelques instants, le temps de permettre aux membres du comité, s'ils ne sont pas prêts à nous faire part de leurs réflexions, de parler des ramifications d'une telle demande.
Soyons bien clairs: si cette prolongation de 30 jours est accordée, ce sera signe que nous rejetons le projet de loi, et il ne s'agit pas nécessairement.... Je ne veux pas toujours faire référence à M. Shory, parce que ce projet de loi d'initiative parlementaire n'appartient pas à une seule personne. Il est la propriété de la Chambre. Nombreux sont les députés, les membres des forces et les personnes qui suivent le débat sur ce dossier.
Monsieur le président, avant qu'on s'empresse d'accorder à ce projet de loi d'initiative parlementaire un traitement que nul autre projet de loi d'initiative parlementaire n'a reçu dans le passé, à savoir l'octroi d'une prolongation, j'aimerais que les gens comprennent pourquoi il en est ainsi. Quel est le facteur de motivation?
Aujourd'hui, le facteur de motivation à l'origine de cette demande de prolongation est, d'après moi, mal fondé. C'est pourquoi je recommande fortement, selon ce raisonnement, que les membres du comité n'appuient pas la motion. C'est aussi pourquoi j'estime qu'il n'est pas dans notre intérêt de voter en sa faveur.
Je vais m'en tenir à cela, monsieur le président, car je prévois que d'autres députés voudront faire des observations sur ce point. Je me réserve le droit d'ajouter quelques mots avant la fin de la séance.
Merci, monsieur le président.
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On trouve cela aux pages 60 et 96.
Dès le départ, si on parle de philosophie du droit, à la page 3, il est clairement indiqué que le Canada est une démocratie parlementaire. Il y a une histoire de la vie parlementaire dans notre pays. Elle est soutenue par une longue jurisprudence. À cet égard, je vais parfois y apporter des arguments et des éléments pour soutenir mon point de vue.
Fondamentalement, c'est là l'essence même des raisons pour lesquelles je m'oppose à cette motion de renvoi dans les 30 jours. Je la trouve abusive. Je trouve que cela crée définitivement une rupture par rapport à nos choix et à nos options. Je vais mentionner en quoi consiste cette rupture sur le plan de la philosophie du droit.
Dans le passé, je pense que personne au sein de ce comité n'a présenté d'arguments de philosophie du droit relativement à ce débat. Si jamais quelqu'un ose dire que je me répète, qu'on me le dise tout de suite. Selon les renseignements que j'ai obtenus, je ne pense pas que cette approche ait été utilisée.
Évidemment, cela pourrait être laborieux. Ce que je vais défendre est en grande partie soutenu par O'Brien et Bosc. Je parle de ce qui devait être la thèse de doctorat de ma cousine. Je vais essayer de limiter cela à moins de 10 ou 15 heures. C'est le débat philosophique d'une thèse de doctorat qui devait faire 800 pages. Ce n'est pas toujours facile.
Vous comprendrez que la philosophie du droit est un démon qui se cache dans les détails. Et des détails, il y en a beaucoup. À cette image, je vous ferai remarquer que le livre d'O'Brien et Bosc ressemble plus à une bible qu'à un texte réglementaire. C'est pourquoi, évidemment, ce débat risque d'être long. Cependant, dans la mesure où il aborde l'atteinte à la vie parlementaire, c'est-à-dire la philosophie du droit, ce débat mérite d'être tenu.
Je n'ai peut-être pas convaincu l'ensemble de mes confrères de la pertinence de ce débat, mais au moins, j'espère les avoir convaincus du caractère nouveau de cette approche pour l'ensemble de ce comité.
Oui il y a une opposition. On dit « Vox populi, vox Dei ». La voix du peuple est la voix de Dieu. Au Moyen-Âge, on voulait dire essentiellement qu'il fallait écouter le peuple, car c'était le pouvoir ultime. On utilisait la voix de Dieu. Essentiellement, cette expression voulait dire que lorsque le peuple parle, vous devez lui accorder le respect essentiel, long et laborieux. Cela a évolué au fil du temps. On a parlé de « pro Dei », ou pour Dieu. On le fait pour Dieu.
Par conséquent, mon engagement envers la communauté est un acte de Dieu, un acte de foi. La plus belle version, celle que je préfère, est celle d'Abraham Lincoln à propos du champ de bataille de Gettysburg quand il a indiqué ce qu'était la démocratie. Il a fait cela en moins de 100 mots, mais les plus essentiels étaient « [...] le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple [...] ».
En tout respect, la motion présentée par M. Dykstra ne représente absolument pas ces éléments. Je considère que c'est une négation même de ceux-ci. C'est pourquoi je vous dis qu'il y a une rupture. Il y a même une agression à ce principe fondamental.
Nous faisons cela pour le peuple, dont nous représentons la voix. Nous voulons que le peuple ait une loi claire. À la page 3, c'est d'ailleurs l'un des éléments fondamentaux soulignés par O'Brien et Bosc. On dit que nous sommes le peuple, les représentants du peuple. Les mots « par le peuple » impliquent que les gens doivent se retrouver dans ces textes de loi et se sentir à l'aise. Manifestement, je considère qu'il y a là aussi une rupture importante.
Je n'affirme pas que c'est intentionnel de la part de M. Dykstra — en effet, la philosophie de notre droit veut que nous présumions de la bonne foi des gens, et c'est ce que je fais à l'égard de tout le monde —, mais je crois que cette motion est une rupture. Peut-elle être corrigée? Oui. Il est clairement indiqué dans les textes présentés dans La procédure et les usages de la Chambre des communes qu'il est possible de le faire.
« Medice, cura te ipsum » est une expression qui signifie « docteur, soigne-toi toi-même ». Il peut arriver, comme on le dit dans le langage populaire, qu'on soit dans le champ, autrement dit qu'on se trompe lourdement. Or nous pouvons nous tromper. C'est prévu dans les procédures de notre droit. Cependant, si on tient compte de la perspective philosophique et de la recherche de l'équilibre parfait, qui est difficile à atteindre, on dit que les procédures ne doivent pas être un vice. L'application de la justice ne doit pas donner lieu à la fin de la justice.
C'est le défunt juge Steinberg qui m'avait indiqué cela dans le cadre d'un cours de droit. L'application et la procédure de la justice ne doivent pas conduire à la fin de la justice. Malheureusement, j'ai l'impression que la motion concernant les 30 jours supplémentaires n'a rien pour respecter les règles philosophiques de notre droit parlementaire. Elle est non viable. Elle va à l'encontre de l'ensemble de nos procédures.
Voulez-vous intervenir, monsieur le président?
C'est pour moi un plaisir de parler de cet amendement... Pas de l'amendement. Pardon, monsieur le président, cela fait si longtemps que nous sommes ici qu'il est parfois difficile de se rappeler. Mais nous étudions la motion principale, qui consiste à demander une prolongation de 30 jours de séance pour que le gouvernement ait le temps d'obtenir une motion d'adoption à la Chambre, qui lui accorderait une portée élargie.
Je suis contre la prolongation pour un certain nombre de raisons, premièrement, parce qu'il y a une raison pour laquelle on limite le nombre de jours consacrés à l'initiative d'un simple député, et cette limite — seulement pour rafraîchir la mémoire à tout le monde — est de 60 jours. Les 60 jours du comité se terminent le 21 juin. Ainsi, la demande de prolongation à l'heure actuelle revient à offrir un traitement extraordinaire au projet de loi d'initiative parlementaire et représenterait une injustice pour tous les autres simples députés. Comme je l'ai déjà dit, ceci n'est pas un commentaire sur le projet de loi en soi, car il y a des éléments du projet de loi... Je n'entrerai pas trop dans les détails ici, mais pour en venir au point de savoir pourquoi les 30 jours... Nous sommes en faveur de certains éléments du projet de loi.
Nous avons en fait hâte d'avoir l'occasion de voter sur le projet de loi à la Chambre, car le comité — à cause d'une décision prise par la majorité gouvernementale — n'a pas procédé à l'étude article par article. Ainsi, il sera en fait temps de voter sur le projet de loi si la prolongation n'est pas accordée telle quelle, sans modification. Nous sommes tout à fait prêts à aller à la Chambre.
La prolongation représenterait en fait un privilège extraordinaire en faveur d'un projet de loi d'initiative parlementaire particulier. Je crois que nous, en notre qualité d'opposition — je ne peux pas parler au nom de l'autre parti d'opposition ou des représentants indépendants —, sommes assurément prêts et disposés à aller à la Chambre, car le projet de loi a fait l'objet d'un rapport qui y a été déposé, à tenir un débat sur le projet de loi et à nous soumettre à la séance de trois heures... Est-ce un débat de deux heures ou un débat de trois heures à la Chambre?
Une voix: Trois heures.
Mme Jinny Jogindera Sims: Je ne veux pas me tromper, monsieur le président. Je crois qu'il s'agit d'un débat de deux heures lorsque le texte retourne à la Chambre.
Nous allons participer au débat et, selon ce que nous entendrons, nous serons prêts à mettre aux voix le texte de loi qu'a proposé M. Shory. Dans le cadre de ce processus, nous n'essaierions jamais de prolonger les choses ni d'introduire des obstacles, parce que, vous avez tout à fait raison, chaque simple député a le droit de proposer un texte de loi, de le soumettre au processus et de le mettre aux voix à la Chambre.
Vous savez, nous avons hâte de faire cela et nous participerons entièrement, au débat et à la troisième lecture, ainsi qu'à la procédure de vote qui aura lieu.
Je peux vous dire que nous n'avons pas l'intention de rester passifs durant ce débat, car nous croyons que l'initiative d'un simple député doit faire l'objet d'un débat aussi sérieux que n'importe quel projet de loi émanant du gouvernement, car c'est le seul instrument législatif à la disposition des députés qui ne font pas partie du Cabinet et qui ne sont pas secrétaires parlementaires.
Parce que nous estimons que le gouvernement, la majorité, a eu l'occasion de se pencher sur les amendements et d'examiner toutes ces choses ici, devant le comité, et n'en a pas profité; je ne crois pas qu'il soit juste de récompenser un mauvais comportement en prolongeant les délais. C'est l'une des choses que j'essaie de travailler chez mes jeunes — pas seulement mes propres enfants, mais aussi les élèves à qui j'enseigne depuis plus de 30 ans.
L'un des principes fondamentaux à mes yeux, c'est que, si vous n'avez pas profité du temps à votre disposition, alors il est un peu étrange de venir demander une prolongation, à tout le moins. C'est comme si un élève venait me dire qu'il n'avait pas fait ses devoirs la veille parce qu'il était sorti jouer, alors il aimerait avoir plus de temps. Il faudrait que j'aie une sérieuse conversation.