Passer au contenu
;

JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 018 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 7 février 2012

[Enregistrement électronique]

(1135)

[Traduction]

    La séance est ouverte. Nous sommes un peu en retard parce qu’il y avait un vote à la Chambre.
    Il s’agit de la 18e séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne, et nous accueillons aujourd’hui l’honorable Rob Nicholson, ministre de la Justice. Il est accompagné de quelques personnes de son bureau, notamment Mmes Kane et Klineberg. Nous aimerions vous souhaiter la bienvenue.
    Je crois comprendre, monsieur le ministre, qu’en raison de vos autres engagements, vous devez partir au plus tard à 12 h 30.
    C’est exact, monsieur le président.
    Nous comprenons cela. Si vous souhaitez faire une déclaration préliminaire au comité, allez-y, monsieur le ministre.
    Bien sûr, monsieur le président.
    Je suis heureux de comparaître devant le comité afin de présenter la Loi sur l'arrestation par des citoyens et la légitime défense. Cette mesure législative a trois objectifs. Premièrement, elle vise à prolonger la période pendant laquelle un citoyen peut en arrêter un autre pour une infraction criminelle sur le bien ou relativement à celui-ci. Deuxièmement, elle vise à remplacer les lois actuelles portant sur la légitime défense par une nouvelle défense simplifiée. Et, troisièmement, elle vise à faire de même avec les lois actuelles portant sur la défense des biens.

[Français]

    Les membres de ce comité sont sans doute au courant des récentes affaires très publiques mettant en jeu des citoyens qui ont eu recours à la force contre des personnes qu'ils soupçonnaient d'avoir volé ou endommagé leurs biens.

[Traduction]

    En plus de soulever des préoccupations par rapport aux limites du pouvoir d’arrestation par des citoyens, ces affaires ont embrouillé la relation qui existe entre l’arrestation par des citoyens et la défense des biens, qui est elle-même étroitement liée à la légitime défense.
    Ces trois mécanismes ont des éléments en commun et sont déclenchés dans des situations semblables. C’est pourquoi notre gouvernement les présente tous les trois dans le projet de loi C-26. Habituellement, ces défenses sont invoquées devant les tribunaux lorsqu’une personne a commis un acte dans le but d’appréhender un suspect ou de défendre des biens ou une personne, un acte qui, autrement, serait considéré comme une infraction. Chaque disposition correspond à une différente raison d’agir en cas d’urgence.
    La manière dont le projet de loi propose de changer la loi sur l’arrestation par des citoyens est sans nuance. À l’heure actuelle, le paragraphe 494(2) permet au propriétaire d’un bien ou à la personne en ayant la possession légitime d’arrêter toute personne qu’il trouve en train de commettre une infraction criminelle sur le bien ou relativement à celui-ci. Toutefois, la disposition n’autorise pas l’arrestation du suspect même brièvement après qu’il a été pris en flagrant délit.
    Le projet de loi autorisera plus de souplesse quant au moment de l’arrestation. Plus précisément, il modifiera le paragraphe 494(2) afin de permettre à une personne d’arrêter dans un délai raisonnable la personne qu’il trouve en train de commettre une infraction criminelle.
    Certains intervenants peuvent s’inquiéter des risques qu’on court en autorisant un plus grand nombre d’arrestations par des citoyens et en encourageant peut-être le phénomène du justicier. J’admets que, dans la mesure du possible, les arrestations devraient être effectuées par des agents de la paix formés, mais nous savons que cela n’est pas toujours possible. Je suis convaincu que l’élargissement des pouvoirs d’arrestation par des citoyens n’aboutira pas au phénomène du justicier. En effet, l’approche adoptée dans le cadre du projet de loi C-26 représente un compromis raisonnable. Elle prolonge la période pendant laquelle un citoyen peut procéder à une arrestation, mais ce délai doit être raisonnable. Le pouvoir lui-même se limite à un ensemble très circonscrit de cas où une infraction criminelle sur le bien ou relativement à celui-ci a été commise.
    De plus, avant de se prévaloir du délai prolongé, la personne qui procède à l’arrestation doit avoir des motifs raisonnables de penser que l'arrestation par un agent de la paix n'est pas possible dans les circonstances. Dans sa forme actuelle, la loi exige également que la personne qui arrête le suspect livre celui-ci à la police aussitôt que possible. Ces dispositions de sauvegarde contribueront à garantir que les citoyens qui arrêtent des suspects participent à l’application de la loi uniquement dans la mesure nécessaire et que les agents de police assurent toujours leur principale fonction d’exécution de la loi. Les arrestations sont dangereuses et imprévisibles, et notre gouvernement continuera d’encourager vivement les Canadiens à confier autant que possible ce travail aux professionnels et à être extrêmement prudents dans tous les cas.
    En ce qui concerne la défense des biens et la légitime défense, le projet de loi remplace une multitude de dispositions qui n’ont pratiquement pas changé depuis qu’elles ont été adoptées en 1892 et, en fait, même à cette époque, elles étaient en application depuis assez longtemps. En effet, ce sont essentiellement les dispositions que l’on retrouvait dans les lois du Haut-Canada en 1840 ou aux alentours de cette date.
    Nous avons remplacé ces dispositions par une règle facile à appliquer pour chaque défense. Depuis des dizaines d’années, les intervenants du système de justice pénale, l’Association du Barreau canadien, la Cour suprême du Canada, les universitaires et bon nombre d’autres personnes se plaignent que surtout le texte de loi portant sur la légitime défense, mais aussi celui portant sur la défense des biens sont rédigés d’une manière inutilement complexe et difficile à interpréter.
    La complexité de la loi a de graves conséquences. Elle peut amener les intervenants à prendre des décisions sur l’inculpation qui, dans certaines situations, ne tiennent pas compte du bien-fondé des moyens de défense. Elle peut induire en erreur les jurys et fournir inutilement des motifs d’appel, ce qui impose au système judiciaire des coûts en matière de temps et de ressources. La loi devrait être claire et le public, la police, les procureurs et les tribunaux devraient être en mesure de bien la comprendre.
(1140)

[Français]

    Le projet de loi C-26 satisfait à ces objectifs. Il précise et simplifie la loi sans sacrifier les protections juridiques existantes.

[Traduction]

    Les éléments fondamentaux des deux moyens de défense sont les mêmes et peuvent être énoncés facilement. Qu'il s'agisse de la légitime défense, de la défense d'autrui ou de la défense des biens en possession légitime, la règle générale sera que les personnes peuvent prendre toute mesure nécessaire pour protéger et défendre un bien ou une personne tant et aussi longtemps qu'elles perçoivent raisonnablement une menace et que leurs actions, y compris le recours à la force, sont raisonnables dans les circonstances.
    J'aimerais souligner brièvement certaines caractéristiques particulières pour chaque moyen de défense. En ce qui concerne la légitime défense, une caractéristique additionnelle proposée dans ce projet de loi est une liste non exhaustive de facteurs que la cour peut prendre en considération pour déterminer si les actions prises à des fins de défense sont raisonnables. Il est clair que ce qui est raisonnable dépend des particularités de chaque cas; toutefois, un certain nombre de facteurs que les cours connaissent très bien reviennent couramment dans les cas de légitime défense.
    Par exemple, parmi les facteurs à considérer figurent la possession d'une arme par une des parties, ou les deux, et l'existence d'une relation entre les parties, en particulier une relation caractérisée par la violence. La proportionnalité entre la menace et la réaction est également d'une grande pertinence. Plus la menace est sérieuse, plus les actions prises pour se défendre contre cette menace peuvent être sérieuses.
    La liste peut être utilisée pour faciliter et améliorer les décisions en matière de mise en accusation et de poursuite. À la cour, il ne fait aucun doute que la liste constituera un outil de référence utile pour le juge lorsqu'il instruit le jury. Une telle liste indique également aux tribunaux que la jurisprudence existante devrait continuer de s'appliquer. Nous n'avons pas à revenir à la case départ.
    La légitime défense face à une menace est un droit fondamental. Par conséquent, il est extrêmement important de bien faire les choses et d'offrir des orientations alors que nous passons d'un ensemble de lois très détaillées à une défense fondée sur des éléments plus généraux.
     Maintenant, la défense des biens comporte essentiellement les mêmes éléments fondamentaux que la légitime défense, à savoir la perception raisonnable d'une menace, un motif de défense et des actions qui sont raisonnables dans les circonstances. Toutefois, la défense des biens est nécessairement plus complexe que la légitime défense.
    Il y a de très nombreux types différents de revendications et d'intérêts sur la propriété, dont la plupart relèvent des lois provinciales. Des notions de droit de propriété font partie de ce moyen de défense. L'idée de la possession paisible de biens est une condition additionnelle pour l'application du moyen de défense relativement aux biens.
    Cette expression est utilisée dans la loi actuelle et a été interprétée par les tribunaux comme signifiant le fait pour un possesseur de ne pas être sérieusement importuné par autrui ou qui n'est pas susceptible de mener à la violence: un voleur qui a volé un bien et qui n'est pas en possession paisible de ce bien et qui ne peut légalement recourir à la force pour défendre ce bien. Cela est censé.
    Le droit criminel favorise la préservation de la paix publique et du statu quo. La loi protège les biens, non la propriété. Les différends sur la propriété doivent être résolus par les tribunaux civils, et non par des poursuites criminelles. La loi autorise ce qui serait autrement une infraction pour se défendre contre des menaces imminentes qui risquent d'entraîner la perte ou la destruction permanente du bien.
    Comme dernier point, j'attire votre attention sur le fait que les deux moyens de défense contiennent une règle spéciale relative à leur utilisation par quelqu'un qui prétend se défendre contre des actions d'application de la loi, comme une arrestation ou la saisie d'un bien en vertu d'un mandat. La règle est la suivante: à moins que la personne croie sincèrement que l'agent de la paix agit de manière illégale dans l'exercice de ses fonctions, la force défensive ne peut être utilisée dans ce contexte.
    Le projet de loi C-26 est cohérent avec la loi actuelle dans ces situations, et espérons qu'elle exprime la loi plus clairement — et je crois que c'est effectivement le cas. J'invite les députés à appuyer ce texte législatif qui vise à donner plus de latitude aux citoyens dans l'arrestation de personnes qu'ils ont vu commettre une infraction sur un bien ou relativement à celui-ci et à faire passer nos lois sur la légitime défense et la défense des biens du XIXe au XXIe siècle.
    Merci.
(1145)
    Merci, monsieur le ministre.
    Nous allons maintenant commencer les questions. Il s'agit de cinq minutes pour les questions et les réponses.
    Allez-y, monsieur Harris.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le ministre, de vous joindre à nous aujourd'hui. Nous sommes heureux de la tentative de clarifier le droit en matière de légitime défense. Je l'appelle ainsi parce que, je suppose, notre travail est de l'examiner à fond et d'essayer de nous assurer qu'elle donne lieu à une clarification et non pas à d'autres décennies d'interprétation par les tribunaux.
    À cet égard, en précisant les exemples, comme, par exemple, les facteurs énumérés dans le paragraphe 34(2) — il s'agit d'une liste non exhaustive de facteurs, comme vous l'avez souligné —, à prendre en considération, êtes-vous certain que la jurisprudence actuelle telle qu'elle existe depuis 100 ans demeurera utile et valide pour aider à déterminer ce qui est raisonnable en matière de légitime défense et qu'en fait, tout ce que cela fait, c'est de clarifier son application?
    Je pense que c'est exactement ce que fait ce projet de loi. Vous avez soulevé un excellent point. Vous savez, ce qui est raisonnable a défilé devant nos tribunaux pendant assez longtemps, et cette jurisprudence continuera d'être utile. Mais comme vous l'avez souligné, même avec la liste non exhaustive présentée dans ce projet de loi, c'est quelque chose que l'on attendait depuis très longtemps, à mon avis.
    J'ai entendu des représentants d'organismes d'application de la loi qui m'ont dit que lorsqu'ils ont affaire à ces articles… et peu importe s'il s'agit d'un avocat, d'un citoyen ou d'un tribunal; j'ai entendu des organismes d'application de la loi dire que ces articles, ces moyens de défense, sont très complexes.
    Je me souviens du commentaire de quelqu'un qui a dit qu'il était tout simplement préférable de laisser les tribunaux essayer de démêler tout cela. J'ai répondu que non, ce n'est pas ce que nous voulons faire; s'il n'est pas nécessaire ou s'il n'est pas approprié de porter des accusations, nous ne voulons pas que cela se fasse. Ce n'est pas une question de laisser les tribunaux se débrouiller pour essayer de comprendre ces articles qui sont demeurés en grande partie inchangés au cours des 172 dernières années.
    Comme c'est le cas d'un si grand nombre d'articles du Code criminel, je pense qu'il est approprié que nous les examinions pour essayer de les clarifier, mais avec, comme vous dites, l'avantage de plusieurs décennies de jurisprudence pour établir ce qui est raisonnable et ce qui ne l'est pas.
    Une des choses que les modifications proposées font, c'est de ne pas faire ce que le code actuel fait: faire une distinction entre les degrés de force qu'il est permis d'utiliser pour protéger une maison d'habitation, un foyer, un bien immeuble, et préciser qu'une force plus grande est autorisée dans ce cas que dans celui des biens meubles. Cette distinction est éliminée.
    L'hon. Rob Nicholson: Oui.
    M. Jack Harris: Croyez-vous qu'il y aura encore une distinction dans le degré d'interprétation concernant ce que vous pouvez faire et ne pas faire lorsque vous essayez d'empêcher quelqu'un de voler votre sac à main par opposition à une entrée par effraction dans votre domicile?
    Je crois que le projet de loi clarifie la loi dans la mesure où certaines de ces distinctions sur la propriété légitime, et le type exact de bien, qu'on retrouve partout dans la loi existante que nous avons ici… Essentiellement, cela précise la loi de sorte que si vous…
    Ce n'est pas uniquement une question de définir si une maison mobile est une habitation, par exemple, ou si c'est la même chose qu'une propriété immeuble et tout cela. Comme je l'ai dit, je pense qu'un grand nombre de ces distinctions n'étaient pas utiles pour ce qui est d'essayer de déterminer si ces articles s'appliquent et si une personne a agi raisonnablement dans les circonstances.
    Alors, je pense qu'une application plus générale est appropriée plutôt que d'essayer de préciser toutes les distinctions possibles en matière de droit de propriété en vertu de notre loi.
(1150)
    Enfin, peut-être devrons-nous explorer cela plus tard, mais a-t-on pris en considération, en examinant les modifications aux dispositions sur la légitime défense en particulier, une série de causes assez célèbres où des conjoints, des victimes de violence conjugale, ont en fait tué leur conjoint et ont plaidé la légitime défense? Comme vous savez, ce sont des cas compliqués et parfois controversés. A-t-on accordé une considération spéciale pour nous assurer que les modifications à la loi permettraient toujours de plaider la légitime défense, telle qu'elle a été déterminée par les tribunaux jusqu'à maintenant?
    Je pense que vous soulevez un très bon point.
    Il s'agit certainement d'une des considérations valables justifiant la préparation de ce projet de loi. Vous allez noter que dans la liste non exhaustive, l'historique des rapports entre les parties…
    Alors, dans les cas dont vous parlez, où, par exemple, une personne a été antérieurement victime de violence de la part de la personne qui s'approche d'elle, il s'agirait là d'un autre élément à prendre en considération par les tribunaux pour établir le caractère raisonnable.
    Encore une fois, ce n'est pas une coïncidence si cette disposition particulière figure dans le projet de loi. Il s'agit d'une liste non exhaustive, mais nous voulons qu'il soit clair que l'historique des rapports, qui, comme vous le soulignez, dans certaines circonstances, font intervenir la violence… et les menaces font partie de cela également, est un facteur à prendre en considération.
    Alors, c'est un bon point.
    Merci.
    Monsieur Goguen.

[Français]

    Je voudrais remercier le ministre Nicholson et les deux témoins, Mme Klineberg et Mme Kane, pour être venus témoigner devant nous aujourd'hui. Je suis certain que vos précisions sauront apporter plus de clarifications au projet de loi.

[Traduction]

    Monsieur le ministre, nous reconnaissons certainement que les forces policières constituent la principale source de protection contre les crimes touchant le public, et il est clair que le projet de loi C-26 ne change rien à cela.
    Je me demande si vous ne pourriez pas nous faire part de vos réflexions sur cette question. Certaines personnes ont prétendu que les modifications apportées par le projet de loi C-26 pourraient avoir pour effet d'encourager le phénomène du justicier.
    Je ne le crois pas. Encore une fois, si vous regardez attentivement l'article sur l'arrestation par des citoyens, comme je suis certain que vous le faites et que vous continuerez de le faire, nous indiquons que la personne qui a effectivement été témoin de l'infraction — elle n'a pas entendu dire par une deuxième ou une troisième personne qu'un crime a été commis et ensuite, elle se mêle de procéder à une arrestation — doit être présente pour voir l'infraction, mais elle doit procéder à l'arrestation de la personne dans un délai raisonnable.
    Je pense que l'article a été rédigé assez soigneusement à cet égard. Je serais inquiet si une personne croyait que quelqu'un a commis une infraction à n'importe quel moment ou n'importe où sans avoir été elle-même témoin de l'infraction, que cela mène à la situation que vous décrivez.
    Encore une fois, l'article a été bien conçu. Je ne m'attends pas à une augmentation du phénomène du justicier à la suite de ce projet de loi. Comme je l'ai dit, l'article est bien rédigé, mais il augmente la capacité d'une personne qui a été victime ou qui a été témoin d'une infraction de ce genre de faire quelque chose à cet égard.
    Mais encore une fois, comme vous le savez, et cela fait partie de la disposition également, vous devez remettre la personne à un organisme d'application de la loi le plus tôt possible. Je pense que c'est approprié. C'est ce que nous voulons.
    Et, de toute évidence, ceux qui auraient l'intention de jouer les justiciers seraient eux-mêmes soumis à toute la rigueur des lois.
    Encore une fois, dans notre pays, nous n'avons jamais encouragé le phénomène du justicier et il ne fait aucun doute que le présent projet de loi ne le fait pas non plus.
    Je voudrais m'arrêter brièvement sur la question de la force raisonnable. Dans le cas du moyen de défense relativement aux biens, on ne précise pas explicitement quelle limite devrait être imposée à la force raisonnable. De toute évidence, cela peut aller jusqu'à l'emploi de la force mortelle. Comment peut-on déterminer exactement ce qui est raisonnable dans ces circonstances?
    Comme vous le savez — vous avez pratiqué le droit au Canada — le mot raisonnable est omniprésent dans nos lois. Il s'agit certainement d'un élément majeur de la common law dans notre pays: qu'est-ce qui est raisonnable dans les circonstances.
    Encore une fois, les critères qui ont été appliqués dans nos tribunaux pendant des siècles maintenant continueront de s'appliquer. Ils examineront chaque cas pour voir ce qui est raisonnable dans les circonstances. Je suis simplement heureux que nous ayons finalement mis les lois à jour pour les rendre un peu plus compréhensibles. Encore une fois, nous ne faisons pas ces choses uniquement pour les avocats ou les tribunaux; nous les faisons pour les gens qui doivent administrer ces lois.
    Comme je l'ai dit, lorsque je rencontre des gens qui oeuvrent dans le milieu de l'application de la loi, et souvent, ce n'est pas le premier sujet dont ils me parlent — il est possible que j'aie été là pour autre chose —, ils soulèvent cette question et disent que c'est exagérément compliqué et difficile. Même à titre d'avocat, vous pouvez regarder tous les articles différents et dire que ce n'est pas facile. Comme je l'ai dit, je pense que c'est en partie lié à l'époque où la loi a été rédigée initialement.
(1155)
    Je m'interroge au sujet de la question de la force mortelle. Quelqu'un peut certainement envisager que l'on puisse utiliser la force mortelle dans une situation de légitime défense ou de défense d'autrui, mais est-ce que vous tracez une ligne entre l'utilisation de la force mortelle dans une situation de légitime défense par opposition à une situation de défense des biens? Est-ce qu'il y a une différence entre les deux dans votre esprit?
    Eh bien, oui, nous faisons une distinction. C'est pourquoi nous ne combinons pas tout cela dans un seul article. Comme vous voyez, il y a un article sur la légitime défense, ce qui est quelque chose de différent de la défense des biens.
    Encore une fois, ce qui est raisonnable dans chaque circonstance peut varier, et vous m'avez donné l'occasion de le dire. Lorsque nous avons rédigé ce projet de loi, nous n'avons pas envisagé de mettre ces deux questions ensemble et de dire simplement ce qui est raisonnable. Il doit y avoir une distinction entre le fait de vous protéger vous-même ou vos êtres chers d'une blessure ou d'un préjudice et le fait de défendre vos biens. Et cela ne change pas dans ce projet de loi.
    Merci, monsieur Goguen.
    Madame Sgro.
    Merci beaucoup, monsieur Nicholson.
    Il y a quelques années, un de mes électeurs m'a appelée. Quelqu'un est entré chez lui par effraction et il a attaqué l'intrus en situation de légitime défense — pour défendre son foyer et sa famille. Son épouse a composé le 911, mais par la suite, il a été accusé de même que l'intrus.
    En vertu du projet de loi C-26, comment cela se passera-t-il…
    Je suis désolé, dans votre situation factuelle, il n'était pas…
    Il défendait son propre foyer et ses biens, ce dont il est beaucoup question dans le projet de loi C-26.
    L'hon. Rob Nicholson: Oui, évidemment.
    L'hon. Judy Sgro: En fin de compte, il a dû retenir les services d'un avocat et aller devant les tribunaux alors qu'il défendait son foyer et sa famille.
    Comment cela sera-t-il différent en vertu du projet de loi C-26?
    Je ne commente jamais directement un cas particulier qui est devant les tribunaux, ou n'importe quelle situation factuelle. Je suis convaincu que ce projet de loi précisera les circonstances dans lesquelles une personne a le droit de défendre ses biens.
    Des distinctions en ce qui a trait à la propriété ou au degré de possession que vous aviez viennent compliquer inutilement la défense en matière de légitime défense et la défense en matière des biens. Alors, il n'a pas fallu beaucoup de temps pour me convaincre lorsqu'on m'a montré cela et combien c'était difficile. Je vous ai cité l'organisme d'application de la loi qui a dit qu'il fallait laisser les tribunaux démêler tout cela. En ce qui concerne la personne qui ne devrait pas être accusée, et la personne qui a agi de manière raisonnable pour se protéger elle-même, son foyer ou sa famille, nous ne voulons pas qu'elle se retrouve devant les tribunaux en partant. Cela ne fait que congestionner les tribunaux. C'est une dépense additionnelle que d'essayer de trancher ces questions. Nous ne voulons pas nous rendre jusque-là si la personne a agi de manière raisonnable.
    Je suis convaincu que les clarifications présentées dans ce projet de loi s'appliqueront aux situations factuelles semblables à celle dont vous avez parlé, sans faire de commentaires sur un cas particulier.
    Merci.
    En vertu de l'article 34 proposé, les distinctions portant sur la provocation et l'intention de causer la mort ne seront plus aussi explicites. Quelle sera l'incidence sur la défense fondée sur le syndrome de la femme battue? Les personnes accusées pourront-elles toujours y recourir?
    Je ferais remarquer que s'il y a provocation, par exemple, c'est complètement différent.
    Je demanderais à Joanne Klineberg, qui est une spécialiste du droit relatif à ces questions, de répondre.
    Je crois que l'article dont vous parlez établit ce qui pourrait être considéré comme de la provocation aux fins de la légitime défense. Cela ne ferait pas partie de la nouvelle loi sur la légitime défense. En réalité, il s'agit d'une disposition qui n'est invoquée que très rarement. Je n'ai pas eu connaissance de cas où cela aurait vraiment posé problème dans une situation mettant en cause une femme battue. Donc, son élimination n'aurait certainement aucune incidence sur sa situation.
    La présence de cette disposition n'a en réalité qu'une seule fonction, celle de déterminer si la légitime défense pourrait être invoquée en vertu de l'article 34 ou de l'article 35. En regroupant toutes les diverses dispositions sur la légitime défense en une seule disposition d'application plus générale, il n'est vraiment pas nécessaire d'avoir quelque chose qui définirait ce qui serait considéré comme de la provocation. Cela deviendrait simplement un facteur à prendre en compte dans l'établissement de la défense en général, mais cela ne serait pas un facteur déterminant pour quoi que ce soit.
(1200)
    Pourquoi est-il question du sexe dans la mesure législative alors qu'on ne le mentionne nulle part ailleurs dans le Code criminel?
    Encore une fois, la taille, le sexe et l'âge sont tous des facteurs qui sont pris en compte lorsqu'il s'agit de déterminer si une personne a agi de façon raisonnable. Vous pourriez avoir une personne qui mesure six pieds, six pouces et pèse 250 livres, et une autre qui fait cinq pieds, un pouce et pèse 110 livres. Voilà le genre de choses que nous désirons voir prises en compte lorsqu'on cherche à savoir qui a agi de façon raisonnable et qui a utilisé une force raisonnable. Il s'agit simplement d'un nombre de facteurs qui doivent être pris en compte.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Madame Boivin.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    C'est certainement toujours intéressant à regarder. Je me souviens de mes cours de droit criminel où c'était l'une des sections les plus intéressantes à étudier pour des étudiants en droit parce qu'il y a une bonne part de subjectivité et d'objectivité à cet égard. Donc, le fait de trouver le bon équilibre à l'intérieur de tout cela n'est pas toujours évident.
    Mes collègues ont déjà touché un peu aux points que je voulais mentionner, mais je veux seulement être rassurée. Lorsque vous avez établi les nouveaux critères au sein de la nouvelle section 34.1, était-ce suite à une nomenclature de tous les critères qui avaient déjà été établis en matière de jurisprudence?
    Mon inquiétude est la suivante. Lorsque les procureurs de la défense vont regarder les changements à la législation, ils vont certainement regarder dans la jurisprudence ce qui existaient comme exemples de motifs de légitime défense et les critères qui étaient utilisés. En fait, c'est évidemment un peu basé sur la jurisprudence existante. Pouvons-nous être raisonnablement rassurés qu'on a pas mal fait le tour pour ne pas se retrouver à avoir des dépenses, dire que cela a déjà été plaidé avec succès et que cela n'a pas été repris par le législateur?
    Serait-ce une indication qu'il ne s'agit pas d'un motif? Je ne sais pas si vous comprenez ce que j'essaie de vous expliquer? Avons-nous fait le tour des critères? Cela ne signifie pas que ce soit exhaustif parce qu'il pourrait y en avoir d'autres au cours des prochaines années, mais je parle par rapport à ce qui existait antérieurement et à la jurisprudence actuelle.

[Traduction]

    Je pense que vous avez soulevé un très bon point. L'intention n'est pas de remplacer ce qui est déjà en vigueur, et je pense que vous avez tout à fait raison. Ce qui est raisonnable dans les circonstances continuera d'être débattu, et les cas antérieurs devraient être une bonne indication de ce qui est raisonnable ou de ce qui ne l'est pas, dans les circonstances.
    Vous faites aussi remarquer autre chose. Nous avons délibérément décidé que la liste serait non exhaustive parce que, comme vous le dites, nous voulons que la loi évolue. Il pourrait y avoir d'autres critères ou d'autres situations que nous ne connaissons pas ou qui pourraient se présenter à l'avenir. Nous ne voulons pas la restreindre pour ensuite dire que puisque votre situation ne correspond pas aux articles 2 à 8, c'est malheureux, mais vous ne pourrez pas utiliser cette disposition relative à la légitime défense.
    La liste est une liste non exhaustive, mais encore une fois, l'intention n'est pas de remplacer ce qui existe déjà. Vous avez tout à fait raison. Nous ne voulons pas engorger les tribunaux et consacrer du temps à réexaminer ce qui a déjà été décidé, une question qui a déjà été tranchée. Une bonne partie de ce que nous faisons dans le projet de loi n'est qu'une précision, pour qu'une personne, un organisme ou un tribunal ne trouve pas trop compliqué de savoir de quoi il est question quand on parle de la défense d'une personne ou d'un bien.

[Français]

    C'est très bien.
    Une section, en particulier, me préoccupe. Le fait de voir des groupes d'autojustice m'inquiète toujours un peu. Nous sommes toujours préoccupés quand on voit des gens prendre la justice entre leurs mains, avec les conséquences dramatiques que cela peut provoquer.
    Mon inquiétude est aussi liée à autre chose. Le paragraphe 3(1) proposé contient les mots suivants: « ainsi que toute personne qu'il autorise ». J'essaie de voir à qui on fait référence quand on mentionne cela.
    Selon moi, l'expression « toute personne qu'il autorise » et le fait que ça peut se faire dans un délai raisonnable posent problème. La mention de délai raisonnable relatif à l'infraction n'est-elle pas une expression un peu floue? J'ai de la difficulté à comprendre cela. Encore une fois, plus c'est flou, plus cela donne l'occasion à la défense d'utiliser toutes sortes d'arguments.
    J'aimerais qu'on me rassure à cet égard.
(1205)

[Traduction]

    Vous remarquerez que par rapport à l’arrestation par des citoyens, nous avons fourni plus de précisions et élargi la catégorie de personnes qui peuvent procéder à une arrestation par des citoyens. Manifestement, la première personne qui nous vient à l'esprit est le propriétaire, ou la personne en possession légitime, mais, par exemple, une entreprise pourrait avoir retenu les services d'un agent de sécurité privé, qui serait alors en possession légitime. Ils sont là, et nous ne voulons pas exclure une telle personne, qui serait témoin de l'acte criminel et qui procéderait à l'arrestation. Il ne s'agit pas seulement de la personne qui possède le bien, mais de la personne qui est autorisée par le propriétaire ou la personne en possession du bien.
    Donc, pourrait-il s'agir d'un employé d'un dépanneur ou quelque chose du genre?
    Exactement, mais pour ce qui est de votre commentaire sur le phénomène du justicier, vous verrez que nous n'allons pas plus loin et que nous ne disons pas que quiconque croit qu'une personne a commis une infraction, n'importe où, peut ensuite procéder à une arrestation. Ce n'est pas ce que nous disons. Nous disons que si vous entrez dans la catégorie telle que nous l'avons décrite, si vous voyez quelqu'un, si vous savez que quelqu'un commet un acte criminel, vous pouvez alors le faire, dans un délai raisonnable... Cela inclut le cas où vous avez vu une personne commettre un acte criminel et que vous la croisez une ou deux heures plus tard. Il me semble que c'est un délai raisonnable.
    Vous remarquerez que nous pouvons inclure des dispositions pour les cas où il serait déraisonnable de demander à un agent de la paix de procéder à une arrestation. Il faut que cela en fasse partie, et nous ne voulons pas que vous puissiez séquestrer cette personne. Nous voulons que vous livriez la personne aux organismes d'application de la loi dans un délai raisonnable.
    Merci, monsieur le ministre.
    Madame Findlay.
    Merci. Monsieur le ministre Nicholson, madame Klineberg, madame Kane, merci d'être venus nous aider aujourd'hui.
    Monsieur le ministre, comme vous l'avez souligné plus tôt dans votre exposé, le projet de loi C-26 comporte une exigence selon laquelle la personne qui procède à l'arrestation doit prendre quelqu'un sur le fait, l'arrestation doit être faite à ce moment-là et aussi, l'arrestation doit avoir lieu dans un délai raisonnable.
    Je suis curieuse de savoir ce que vous avez à dire par rapport aux raisons pour lesquelles le gouvernement a décidé de ne pas adopter le projet de loi d'initiative parlementaire proposé par les partis de l'opposition sur le critère des motifs raisonnables de croire qu'une infraction a été commise.
    Pendant la législature précédente, il y a eu deux ou trois projets de loi sur l'arrestation par des citoyens, et nous les avons tous étudiés attentivement pendant la préparation de la mesure législative du gouvernement.
    Il me semble qu'il est préférable de limiter cela aux personnes qui sont témoins de l'infraction. Seulement depuis que je suis arrivé ici ce matin, deux intervenants ont soulevé — au moins à deux occasions — la question du phénomène du justicier. Personne ne veut voir le Canada se diriger dans cette voie. Nous faisons confiance aux organismes d'application de la loi du pays. Nous voulons travailler avec eux, mais nous savons qu'il n'est pas toujours possible que l'arrestation soit faite par un policier et dans un délai raisonnable; donc, nous voulons ces dispositions.
    À mon avis, se retrouver avec une situation où n'importe qui, à n'importe quel moment, pourrait procéder à l'arrestation d'un individu parce qu'il y a des motifs raisonnables de croire qu'une infraction a été commise quelque part serait un élargissement considérable des dispositions relatives à l'arrestation par des citoyens. Je ne pense pas que ce soit justifié. L'idée que ce soit plus axé sur les situations où des gens voient quelqu'un commettre un acte criminel est le meilleur compromis, selon moi.
    Nous avons examiné toutes ces situations, mais il était temps de se pencher sur l'arrestation par des citoyens et de modifier les dispositions de façon à ce que si on arrête quelqu'un dans une allée trois heures plus tard, il n'y ait aucun doute possible. Encore une fois, si vous agissez de façon raisonnable, si vous avez été témoin du crime et que le délai est raisonnable — il y a cela, ainsi que d'autres critères —, comme je le dis souvent, je pense que c'est convenable.
    Nous ne tentions pas de transformer cela en une chose qui, à mon avis, serait une notion plutôt étrangère aux gens de ce pays.
(1210)
    Je me demandais aussi si vous croyez que cette mesure législative permettrait d'éviter des incidents comme le cas de M. David Chen, qui a été arrêté pour enlèvement en 2009 après avoir détenu une personne soupçonnée de vol à l'étalage. Je sais qu'en fin de compte, il a été acquitté, mais j'ai cru comprendre qu'une des questions soulevées dans le cas de M. Chen était le délai entre le moment où l'infraction a été commise et l'arrestation, et c'est ce qui a entraîné l'accusation d'enlèvement.
    Je ne commente jamais directement un cas particulier. Cependant, les responsables d'organismes d'application de la loi m'ont indiqué qu'ils trouvent cette question très complexe et, pour être honnête, pas aussi utile qu'elle devrait l'être.
    Notez toutefois que dans la mesure législative, premièrement, nous avons corrigé le problème lié au moment de l'arrestation par l'ajout du délai raisonnable. cependant, vous remarquerez aussi que le projet de loi comporte des dispositions selon lesquelles vous ne pouvez exercer ce droit qu'en cas de délai déraisonnable ou qu'une personne chargée de l'application de la loi est dans l'impossibilité de le faire. Il en est ainsi pour éviter que les gens aient à s'en occuper à moins que ce soit nécessaire, parce qu'on parle de situations fondamentalement dangereuses et que nous ne voulons pas que les gens se blessent inutilement et qu'ils se retrouvent mêlés à une situation beaucoup plus grave que celle qu'ils essaient de corriger.
    Je pense qu'il est raisonnable d'ajouter une telle disposition au Code criminel, tout comme celle qui prévoit qu'il faut remettre l'individu aux organismes d'application de la loi dans un délai raisonnable. Nous ne voulons pas d'une situation où les gens ont un droit quelconque de détenir ou d'emprisonner quelqu'un. Ce n'est pas le rôle d'un citoyen. Après avoir procédé à l'arrestation, le rôle du citoyen est de remettre l'individu aux organismes d'application de la loi le plus tôt possible, et c'est ce qui est prévu et explicitement inclus dans la mesure législative.
    Merci.
    Monsieur Jacob.

[Français]

    Bonjour, monsieur le ministre.
    J'aimerais vous poser quelques questions au sujet de l'implication que va avoir le projet de loi C-26 sur le travail des agences de sécurité privées.
    D'abord, est-ce que les changements proposés dans le cadre de ce projet de loi vont modifier le travail des agents de sécurité? De plus, en élargissant les dispositions relatives à l'arrestation par un citoyen, ouvre-t-on la porte à des abus possibles de la part des agents de sécurité? Enfin, devrait-on soumettre les agents de sécurité à des règles plus restrictives pour limiter leurs pouvoirs afin d'établir une différence entre les simples citoyens et les commerçants?

[Traduction]

    Merci de la question, monsieur Jacob.
    Dans la définition des personnes qui peuvent exercer ces responsabilités ou qui peuvent agir dans de telles occasions, vous remarquerez que nous avons précisé les règles applicables à cette personne: il ne s'agit pas seulement du propriétaire d'un bien ou des personnes qui ont un certain droit ou un titre. Nous avons clairement établi que la personne pourrait être autorisée par le propriétaire ou les personnes en possession de l'entreprise ou du bien, ce qui inclurait certainement les agents de sécurité. Si vous leur posez la question, je crois que vous constaterez qu'ils en sont plutôt satisfaits. J'irais même jusqu'à dire qu'ils seraient heureux de savoir qu'ils sont inclus dans la définition de cette mesure législative, pour que la personne à qui on a confié la responsabilité légale de protéger un bien ait les mêmes droits que son propriétaire.
    Je pense que vous trouverez ces dispositions dans le projet de loi, comme vous le verrez dans le paragraphe 494(2) proposé: « Le propriétaire d'un bien ou la personne en ayant la possession légitime, ainsi que toute personne qu'il autorise, peut arrêter », etc. Encore une fois, je pense que vous constaterez que les personnes qui sont dans ce secteur verront cela d'un oeil favorable et diront: « Voyez, ceci précise ce qui peut ou ne peut pas être fait et, de toute évidence, nous sommes inclus. »
    Je ne voudrais pas être plus précis ou commencer à déterminer tous ceux qui seront compris dans la définition — une agence de sécurité privée, par exemple —, parce que lorsqu'on commence à inclure des cas particuliers dans ces définitions, on finit par trouver quelqu'un d'autre qui n'est pas inclus, même s'il s'agit d'une personne qu'on pourrait vraisemblablement s'attendre à voir jouer ce rôle dans les circonstances. Voilà pourquoi, dans mes réponses aux questions de Mme Boivin, j'ai dit que dans la première partie du projet de loi, il y a une liste non approfondie, et il y a une raison à cela; si d'autres situations surviennent à l'avenir, nous ne voulons pas être tenus de dire: « Oh, il y a une lacune dans le Code criminel et la situation n'y figure pas. » Lorsque nous les rédigeons, nous le faisons non seulement en fonction des situations et des problèmes actuels, mais aussi de façon à englober les incidents qui surviendront à l'avenir et qui seront semblables à ceux avec lesquels nous devons composer aujourd'hui.
(1215)

[Français]

    Merci, monsieur le ministre.
    Combien ai-je de temps, monsieur le président? Il reste une minute, c'est bien.
    Le paragraphe 494(3) du Code criminel exige d'une personne qui vient d'arrêter un individu qu'elle le livre aussitôt à un agent de la paix. J'aimerais savoir de combien de temps il s'agit au juste. À l'extérieur des grands centres, où la présence policière est moindre, accorderait-on plus de temps pour remettre un individu à un agent de la paix? Ne risque-t-on pas, en ne fixant pas une limite de temps pour remettre l'individu à un agent de la paix, d'encourager des gens à se faire justice eux-mêmes?

[Traduction]

    Je pense qu'il y a un danger si nous sommes trop précis.
    Si nous parlons du centre-ville de Toronto, la plupart d'entre nous conviendraient probablement qu'il serait déraisonnable de ne pas livrer un individu dans les 24 heures. On pourrait être dans des régions du pays où il est impossible d'avoir un policier sur les lieux, où un délai de 24 heures ne serait pas suffisant pour faire venir quelqu'un — un agent de la GRC ou une personne chargée de l'application de la loi. Nous omettons cette précision volontairement. Nous ne créons pas des règles qui seraient applicables à Toronto, mais qui ne le seraient pas ailleurs au pays, ou nous ne menons pas des tests qui se passent très bien, par exemple, dans le Nord du Canada — où il est possible qu'on n'ait pas sur place une personne chargée de l'application de la loi —, pour ensuite dire: « Oh, ce serait raisonnable au centre-ville de Toronto. » Non, ce n'est pas ce que nous faisons. Je pense qu'il est préférable de laisser cela ainsi et de voir ce qui est raisonnable dans les circonstances.
    Voici un autre exemple: si vous arrêtez quelqu'un ici à Ottawa, il vous serait très difficile de faire valoir que vous n'avez pas livré l'individu à la police avant trois jours. J'ai l'impression que les tribunaux diraient que ce n'est pas raisonnable; cela ne correspond pas à la définition. Cependant, vous pourriez être dans une collectivité éloignée du Nunavut et vous pourriez expliquer qu'il était impossible de faire venir une personne chargée de l'application de la loi dans les 24 ou 48 heures. Je pense qu'un tribunal pourrait juger que dans les circonstances, c'est raisonnable.
    Nous voulons souligner et faire valoir que peu importe le critère utilisé pour le caractère raisonnable, nous voulons que l'individu soit livré à un organisme d'application de la loi. Nous ne voulons pas que les gens emprisonnent et détiennent les Canadiens de leur propre chef. Si vous avez été témoin d'un acte criminel et que vous avez arrêté un individu, il faut maintenant livrer la personne à la police, et faites-le au plus tôt.
    Merci, monsieur le ministre.
    Monsieur Jean.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le ministre, de comparaître aujourd'hui.
    Je m'intéresse aussi à la question du caractère raisonnable et de l'utilisation de la force raisonnable dans les circonstances. Je sais que l'emploi de la force pour protéger un bien qu'on a en sa possession est la formulation actuelle, mais pourrait-on utiliser une arme à feu aux fins de la légitime défense? Je sais que dans le passé — en Alberta, dans certains cas — des personnes allaient régulièrement dans les propriétés pour y voler des biens personnels. Les propriétaires ont utilisé des armes à feu et tiré des coups de feu dans les airs ou autour des voleurs.
    Serait-ce un moyen de défense raisonnable dans les circonstances?
    Je pense que oui.
    Chaque cas est évalué individuellement, mais celui qui voit des gens, par exemple, pénétrer dans sa propriété, voler, détruire… qui brandit une arme à feu — ce qui, dans ce cas encore, est raisonnable dans les circonstances. Mais celui qui tente de vous voler un carnet, vous n'avez pas le droit de tirer sur lui, car ce n'est manifestement pas raisonnable.
    On me pose régulièrement la question suivante: qu'est-ce qui est raisonnable? Quel est le critère qui s'applique? Pour prendre l'exemple de l'homme qui se trouvait dans l'autobus de Clatenham, tout ce qu'il pouvait penser était-il raisonnable? Il faut appliquer ces critères. Pour répondre à M. Jacob, j'ai souligné que la plupart d'entre nous peuvent établir ce qui est raisonnable. Le délai raisonnable pour remettre quelqu'un à un agent de la paix dans une collectivité éloignée du Nunavut n'est pas le même qu'au centre-ville d'Ottawa.
    Là encore, c'est le libellé qui nous est le plus utile, puisqu'il permet d'établir les faits dans chaque cas.
(1220)
    En fait, ne serait-il pas juste de dire que la majeure partie du Code criminel et des critères utilisés n'ont pas changé depuis 1892? En fait, les critères de ce qui est raisonnable et d'une personne raisonnable changent selon la société dans laquelle on se trouve.
    Votre remarque est très pertinente.
    Si vous prépariez un mémoire sur la question générale des critères de ce qui est raisonnable, la jurisprudence a permis de les définir. Ce qui était raisonnable dans le Haut Canada en 1840, au moment où ces dispositions ont été élaborées, serait très différent par rapport à nos critères actuels. Néanmoins, le critère de ce qui est raisonnable fonctionne.
    Vous avez entièrement raison. En ce qui concerne le Code criminel, il nous incombe de le revoir continuellement pour s'assurer qu'il reflète les besoins de la société.
    J'ai fait valoir cela lorsque j'ai témoigné devant votre comité sur les vols d'autos. Le procureur général du Manitoba m'avait fait remarquer que s'il y avait des dispositions particulières s'appliquant aux vols de vaches, il n'y en avait pas pour les vols d'autos. Je me rappelle lui avoir promis alors de changer cela — non pas le vol de vaches, qui reste une infraction — en ajoutant, ce qui est raisonnable, des chapitres sur le vol d'autos, car, dans ce cas encore, cela reflète ce qui se passe dans la société. Ce n'est pas parce qu'il n'y avait pas d'autos lorsque le Code criminel a été promulgué dans les années 1890, que le vol d'autos n'est pas une affaire grave aujourd'hui. Voilà pourquoi nous nous efforçons continuellement d'examiner ces situations, en mettant notamment à jour les lois qui s'appliquent à la défense de la propriété et à l'autodéfense.
    Si je ne m'abuse, dans certains États, le vol d'un cheval était passible de la pendaison, mais je n'élaborerai pas à ce sujet.
    Je suis sûr que ça ne l'est plus au Canada.
    Je pense à une autre situation qui survient de temps à autre et qui doit manifestement faire l'objet d'un débat juridique. Certaines maisons étant constamment cambriolées, des gens ont placé près des fenêtres ou des portes des pièges qui ont quelquefois causé la mort ou des blessures graves.
    Considérerait-on que ces mesures sont raisonnables?
    Cela me rappelle un cas dont on avait débattu à la faculté de droit. Pour se protéger des intrus, un propriétaire avait creusé une fosse dans laquelle quelqu'un avait fait une chute de 25 pieds.
    On ne pensait pas que cette mesure était raisonnable il y a 30 ans, lorsque j'étais à la faculté de droit, et on ne pense pas qu'elle soit raisonnable aujourd'hui.
    Le critère de ce qui est raisonnable dans une circonstance donnée, comme vous l'avez fait remarquer à juste titre, a changé au cours des ans, mais c'est ce que la plupart des gens jugent approprié.
    La plupart des gens ont des systèmes d'alarme dans leur maison et essaient de prendre des précautions, mais placer des pièges qui pourraient blesser… La majorité des gens penserait que ce n'est pas raisonnable dans la circonstance. Des livreurs de brochures publicitaires que vous ne voulez pas voir chez vous pourraient en être victimes. Ce genre de situation n'est pas tolérable.
    Vouliez-vous ajouter quelque chose, madame Klineberg?
    J'ajouterais que le Code criminel considère en fait comme une infraction la pose de pièges susceptibles de causer des blessures. Il s'agit habituellement de pièges que l'on pose en prévision d'une menace particulière. On ne pourrait pas les associer d'assez près à une menace qui pourrait justifier l'utilisation de la force en cas d'autodéfense.
    Merci.
    Madame Borg.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    La nouvelle législation permet au tribunal de consulter une liste de facteurs. Pourriez-vous me dire quel raisonnement sous-tend la décision de donner ou non le choix de consulter la liste? Pourquoi cela deviendrait-il obligatoire?
(1225)

[Traduction]

    Ces dispositions sont plus ou moins souples, comme je l'ai dit dans ma réponse à certaines des questions. On ne voulait pas se limiter à une liste définitive. En effet, un accusé pourrait faire valoir que son acte ne correspond pas à la définition de l'alinéa 34(1)h) et que par conséquent cette défense ne lui est pas possible. Il peut y avoir des cas qui n'ont pas encore été envisagés par la jurisprudence ou de nouvelles situations qui les placent dans un contexte légèrement différent.
    Cela arrive constamment. Ainsi, le cas des téléphones qui est cité dans le Code criminel. Comme vous le savez, ce n'est plus aujourd'hui le seul moyen de communication. Ça l'était il y a 45 ans, ainsi que les télégrammes. On sait que les gens ne s'envoient plus de télégrammes aujourd'hui et qu'il y a des centaines de moyens de communiquer, autres que le téléphone.
    Je pense qu'il vaut mieux élaborer un Code criminel qui ne se limite pas à ce qui est raisonnable ou à ce qui pourrait avoir lieu dans l'avenir. Vous seriez probablement d'accord avec moi d'indiquer dans la liste d'autres raisons légitimes d'un recours à la force en vue de se protéger. Vous diriez que c'est raisonnable, mais vous ne voudriez pas être limité par le fait qu'on n'a proposé qu'une liste fermée en 2012 lorsque l'on a rédigé ce chapitre particulier du Code criminel.

[Français]

    Étant donné qu'on va permettre à des citoyens de procéder à des arrestations s'ils ont des motifs raisonnables de croire que des personnes ont commis un crime, courons-nous le risque d'amener quelqu'un à soumettre des gens à du profilage? Par exemple, dans le cas d'une personne qui aurait l'air d'un criminel et qui porterait des jeans d'une certaine façon, pourrions-nous ouvrir la porte à du profilage?

[Traduction]

    Non, et c'est pourquoi il faut être très prudent. Il ne faut pas créer de stéréotypes et soumettre l'opinion des gens à des préjugés. Je ne pense donc pas que ce serait convenable. L'une des dispositions concernant l'autodéfense est liée, comme vous le remarquerez, à une relation précédente. Si l'on sait qu'une personne est violente ou que l'on a été soi-même victime de cette violence, cela rend plus raisonnable de prendre des mesures de protection contre cette personne.
    La liste n'est donc pas exhaustive, mais je dis non, nous ne pouvons — et ne devrions — jamais faire de profilage à partir d'un simple préjugé. Nous ne voulons pas aller jusque-là et c'est pourquoi le projet de loi est soigneusement rédigé. Il pourrait vous sembler raisonnable de prendre des mesures si vous avez été victime de violence, mais là encore, en l'absence d'un tel motif, il faut être très prudent. Nous ne pouvons pas légiférer la capacité des gens de revendiquer une protection en raison de stéréotypes ou de préjugés que l'on pourrait avoir contre une personne donnée ou un groupe donné.
    Nous arrivons à la fin.
    Merci, monsieur le ministre. Je pense que nous avons utilisé tout le temps disponible. J'ai cru comprendre que deux fonctionnaires pourront rester avec nous un peu plus longtemps. Ils pourront ainsi, même si vous partez, répondre aux questions que nous pourrions avoir.
    Monsieur Rathgeber, deux fonctionnaires vont rester avec nous et répondront à vos questions dès qu'ils seront prêts. Vous avez cinq minutes.
(1230)
    Merci, monsieur le président, et merci aux représentants du ministère de la Justice d'offrir leur expertise dans ce dossier important.
    À propos des questions que M. Jean a posées sur la portée des défenses que prévoit le projet de loi C-26, j'aimerais avoir votre opinion. Dans le droit actuel, tel que je le comprends, la légitime défense est limitée à un recours à la force justifié. Mais si l'on veut sortir des sentiers battus, on pourrait imaginer une situation où l'on pourrait avoir à prendre des mesures pour éviter une attaque; une telle mesure pouvant être le vol d'une voiture. Cet acte est normalement illégal, mais on pourrait avoir à le commettre pour se défendre. Je serais curieux de connaître votre opinion sur la possibilité d'appliquer le projet de loi C-26 à ce genre de situation.
    C'est justement l'un des exemples pour lesquels le libellé sera modifié par le projet de loi C-26. La multitude des dispositions actuellement en vigueur limite les mesures que peut prendre un accusé par rapport à l'usage nécessaire de la force, à savoir un recours à la force strictement nécessaire. Mais toutes les dispositions sont fondées sur le recours à la force. L'un des éléments qui est reconnu dans le projet de loi C-26 est que l'on pourrait prendre d'autres mesures d'évitement en cas de menace. Ces mesures pourraient être criminelles dans des situations ne comportant pas le recours à la force contre une autre personne. Selon le libellé du projet de loi C-26, on se demande si l'acte commis est raisonnable dans les circonstances.
    L'expression du recours à la force serait remplacée par des termes plus généraux. Le libellé permettrait, par exemple, l'introduction par effraction pour échapper à quelqu'un. Il est probable que de telles mesures pourraient être invoquées comme défense aux termes de la loi actuelle, en vertu de la « défense de nécessité » prévue par la common law. La légitime défense découle de la « défense de nécessité ». Si l'objectif est de se protéger d'une menace que quelqu'un fait peser sur vous, il convient mieux de conceptualiser cette conduite comme de la légitime défense par opposition à la « défense de nécessité », ce qui explique la portée plus générale du libellé.
    Merci.
    M. Jean et moi-même venons de l'Alberta où il y a eu ces dernières années des affaires très médiatisées dans des régions rurales où le poste de police était à une certaine distance. Des incidents sont survenus dans des propriétés privées et ont donné lieu à des chasses à l'extérieur de ces propriétés privées. Des personnes ont commis des actes criminels.
    Je ne vous demande pas de commenter ces affaires. Ce qui m'inquiète — même si, et je le dis très clairement, j'appuie le projet de loi —, c'est que le titre abrégé « Arrestation par des citoyens et moyens de défense relativement aux biens et aux personnes » pourrait faussement rassurer des gens qui, même s'ils ne tiennent pas à se faire justice eux-mêmes, pourraient vouloir défendre leur bien d'une manière qui n'est pas prévue par la loi.
    Quel type de campagne le ministère de la Justice envisage-t-il de mener pour sensibiliser les Canadiens à la protection quelque peu étroite que ce projet de loi leur apporte par rapport à la défense des biens?
    Votre argument est valable. Nous voulons que les Canadiens comprennent très bien la loi et ses limites. Lorsque la loi sera promulguée, elle sera assortie de documents ou de fiches d'information qui leur expliqueront clairement les changements apportés et les limites de ces changements. Qu'ils aient recours à la légitime défense, à la défense d'autrui ou à celle des biens, ou qu'ils veuillent s'informer davantage sur la loi relative à l'arrestation par des citoyens, nous voulons qu'ils sachent que nous ne les encourageons pas à se faire justice eux-mêmes. Ils doivent savoir que le premier recours est toujours les forces d'application de la loi et que s'ils défendent leur bien, ils ne peuvent le faire qu'en prenant des mesures raisonnables.
    La common law indique clairement que la seule défense des biens ne justifie pas le recours à la force mortelle. Nous voulons que cela soit clair. Dans tous les autres cas, nous examinerons le caractère raisonnable des mesures prises dans une circonstance donnée. Dans la mesure du possible, ces explications seront fournies aux interlocuteurs concernés dans un langage facile à comprendre.
(1235)
    Merci, monsieur le président. Je n’ai plus de questions.
    Monsieur Harris.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vais revenir sur le dernier point. Je crois que les lois précédentes — j’ai parlé de l’aspect politique avec le ministre — faisaient bel et bien une distinction entre les biens meubles et les biens réels ou les maisons d’habitation, particulière en ce qui a trait au fait qu’on n’avait pas le droit de causer de lésions corporelles pour défendre des biens meubles. Il y avait aussi une autre règle visant la légitime défense lors d’un braquage à domicile. En vertu de l’article 40, une personne est fondée à employer la force nécessaire pour empêcher quelqu’un de braquer son domicile.
    Selon vous, ce n’est pas raisonnable d’utiliser une force létale pour défendre des biens, et vous avez dit « de manière générale ». Je suis d’accord avec vous. En fait, on nous rapporte qu’une règle australienne dit qu’on ne peut pas employer une force létale pour défendre des biens; or, le Canada a déjà eu une règle qui disait qu’on n’avait pas le droit de causer de lésions corporelles pour défendre des biens meubles. Si quelqu’un essaye de voler votre sac à main, vous n’avez pas le droit de le poignarder.
    On ne retrouve plus ces aspects. C’est une chose de dire que nous savons ce qui est raisonnable, mais nous ne le savons pas tous et nous pouvons avoir des attitudes très différentes. Les attitudes peuvent différer d’une région du pays à l’autre, ou même d’une personne à l’autre. En fin de compte, c’est le juge ou le jury qui dira ce qui est raisonnable selon les circonstances.
    Je suis un peu inquiet du manque de direction de cette disposition. Pourriez-vous nous dire pourquoi vous avez retiré certains aspects et pourquoi vous ne faites pas de distinctions entre une personne qui se fait braquer à domicile, par exemple, et une personne qui se fait arracher son sac à main?
    Je vais répondre en premier, et ma collègue vous donnera sûrement d’autres éléments de réponse.
    Si jamais j’ai rapporté incorrectement un élément, je tiens à dire qu’en ce qui concerne uniquement la défense des biens, c’est la common law qui prévaut actuellement, à savoir qu’une personne n’est pas fondée à employer une force létale simplement pour défendre ses biens. Ce n’est pas modifié par ce qui est proposé.
    Toutefois, dans bien des cas, la défense des biens devient rapidement la défense de la personne. Comme vous l’avez souligné, ce sera un juge qui examinera dans tous les cas les éléments circonstanciels exacts propres au dossier. Un braquage de domicile sous-entend, par définition, des lésions corporelles et des menaces à l’endroit des occupants. Dans un tel cas, il ne s’agit pas d’une simple introduction par infraction en mon absence, à savoir un cambriolage; il y a de la violence envers des personnes. La défense de la personne s’ajoute rapidement à la défense des biens. On évalue le caractère raisonnable en fonction des circonstances, notamment si j’ai été victime de violence ou si mes enfants l’ont été.
    Joanne Klineberg est mieux placée pour vous expliquer pourquoi nous ne faisons pas de distinctions entre des biens meubles et une maison d’habitation et pourquoi nous avons choisi une disposition simplifiée qui s’adaptera aux circonstances.
    D’accord.
    Je peux vous donner quelques détails additionnels. Vous avez tout à fait raison de dire que l’article 38, l’une des défenses pour la protection de biens meubles, ne nous permet pas vraiment d’employer de force dans la défense de nos biens. Cependant, l’article 39 traite d’une autre défense qu’une personne peut utiliser pour justifier la défense de la possession d’un bien meuble. La différence dans l’article 39 est que la personne défendant ses biens a un droit invoqué sur ceux-ci, ce qui est absent de l’article 38.
    Examinons l’article 39. Il n’est pas limité de la même façon que l’est l’article 38. Il dit qu’une personne « est à l’abri de toute responsabilité pénale en défendant cette possession, même contre une personne qui légalement a droit à la possession du bien en question, s’il n’emploie que la force nécessaire. »
    Cela fait partie de la confusion qui règne dans la présente loi. Je le reconnais.
    C'est exact.
    Selon moi, l’important est que même actuellement dans le Code criminel en ce qui concerne la défense des biens meubles, la loi ne nous limite pas à employer qu’une force très minime. Donc, si nous adoptions une règle, nous nous retrouverions très rapidement dans le même type de situations que la simplification vise, soit d’avoir une gamme de règles différentes en fonction des circonstances. Donc, l’objectif est vraiment de simplifier le tout.
    À mon avis, le Parlement avait en 1982 un but louable, lorsqu’il a promulgué les nombreuses dispositions. Les députés essayaient d’aborder les distinctions très nuancées des différents types de circonstances. Par contre, en pratique, le problème est que cela fait en sorte que les directives aux jurys sont très complexes et les policiers, comme nous le savons, ont plus de difficultés à appliquer la loi. Malheureusement, pour simplifier, il faut généraliser.
(1240)
    J’ai une question technique sur un terme que vous avez utilisé. Nous n’aurons pas l’occasion de parler avec les gens qui rédigent les textes de loi.
    Une voix: Vous ne pouvez pas le faire maintenant.
    M. Jack Harris: Eh bien, je n’allais pas le faire, mais je n’ai aucun contrôle sur le temps que les témoins prennent pour répondre.
    Lui accordez-vous...?
    Votre collègue d’en face vous accorde un moment.
    Merci beaucoup.
    J’ai une question sur la formulation choisie à l’alinéa 34(1)b) proposé. La même formulation se retrouve aussi à l’alinéa 35(1)c) proposé. Il est écrit :
b) commet l’acte constituant l’infraction dans le but de
     Eh bien, l’alinéa traite d’une personne qui n’est pas coupable d’une infraction; comment pouvez-vous dire « commet l’acte constituant l’infraction dans le but de »? Je ne suis pas un spécialiste en rédaction de textes législatifs, mais je me demande si nous ne pourrions pas envisager de remplacer cette formulation par « commet l’acte qui constituerait autrement l’infraction » ou « commet l’acte qui donne lieu à l’infraction » ou toute autre formulation semblable, parce que « commet l’acte constituant l’infraction » est un peu tautologique. En le formulant ainsi, on présume que c’est une infraction, alors qu’on parle ici d’une défense; dans un tel cas, il ne s’agirait pas d’une infraction.
    C’était l’avocat en moi qui parlait. Je suis persuadé que d’autres avocats présents auraient peut-être la même question, s’ils examinaient attentivement la formulation en cause.
    C’est un point très valide. C’est un joli casse-tête à résoudre du point de vue de la rédaction législative. Il semble que nous utilisions parfois la formulation « commet l’acte constituant l’infraction » même dans des circonstances où en fin de compte il ne s’agit pas d’une infraction pour laquelle une personne sera criminellement responsable. Il existe peut-être d’autres formulations qui ne mènent pas à une apparence de conflit dans la loi en raison de leur nature. Par contre, nous avons pleinement confiance que les tribunaux ne seront pas décontenancés par le sens de la formulation et que cela ne nuira pas en pratique à l’objectif de la défense.
    Merci.
    Monsieur Wilks.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais faire parler le policier en moi. En ce qui concerne le projet de loi, j’aimerais savoir si cela s’applique aussi dans le cas d’un policier qui ordonne à un civil d’appréhender un individu, particulièrement en ce qui concerne la force qui peut être employée dans de telles circonstances.
    Pourriez-vous préciser le scénario que vous avez en tête au sujet d’un policier qui demande à un civil d’appréhender un individu en son nom?
    Certainement. Prenons l’article 68 du Code criminel. Une proclamation a été faite en lien avec une émeute. Des policiers arrivent sur les lieux, ils sont débordés et ils ordonnent à la personne A d’appréhender une autre personne en lui disant de faire ce qu’il faut pour la garder en détention.
    Si la personne A voit une autre personne commettre une infraction qui n’est pas en lien avec ses biens, je ne crois pas que ce scénario concerne ce qui nous intéresse dans le cadre du projet de loi sur l’arrestation par des citoyens. Nous modifions seulement la loi en ce qui a trait aux biens d’une personne, parce qu’elle procède à l’arrestation d’un individu qui lui a fait perdre ou qui a endommagé des biens.
    Par contre, nous parlons également de l’arrestation et non seulement des biens, n’est-ce pas? J’essaye de dire que de nombreux policiers, comme je l’ai moi-même déjà fait dans mon ancienne carrière, se prévalent de temps en temps de la possibilité de demander à un citoyen, s’il le faut, de procéder à une arrestation en son nom, parce qu’ils sont occupés à autre chose et qu’ils ont vu une infraction être commise. J’ai vu l’infraction; je vais demander à cette personne de procéder à l’arrestation.
    À mon avis, cette pratique est encore couverte au paragraphe 494(1) du Code criminel qui ne sera pas modifié par le projet de loi C-26. Nous modifions seulement le paragraphe 494(2) qui traite de l’arrestation par des citoyens d’une personne qui commet une infraction en lien avec des biens.
(1245)
    Merci.
    Monsieur le président, si vous me le permettez, j’aimerais poser une dernière petite question. De mon point de vue de policier, j’ai toujours cru qu’on pouvait employer la force nécessaire. Le paragraphe 494(2) sera-t-il ainsi formulé?
    Le paragraphe 494(2) renvoie à l’article 25 du Code criminel; c’est donc la même force qui peut être employée. Permettez-moi de consulter l’article 25 pour avoir la formulation exacte. L’article 25 traite de quiconque fait :
quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier;
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public;
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public;
d) soit en raison de ses fonctions,
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.
    Voilà qui nous mène à la fin de l’ordre du jour. Comme les députés peuvent le voir, nous devons traiter de certains travaux du comité.
    Je tiens à remercier nos témoins de leur présence aujourd’hui. Je crois que vous avez clarifié un certain nombre d’enjeux, et je crois que nous pouvons évidemment aller de l’avant forts de ces renseignements.
    Merci encore de votre présence.
    J’ai un rappel au Règlement. Je comprends que nous avions un temps limité et que nous abordions l’aspect politique de manière générale avec le ministre. Après avoir entendu les prochains témoins, notamment des universitaires, serait-ce possible d’inviter de nouveau à témoigner des représentants du ministère pour avoir, le cas échéant, de plus amples précisions ou renseignements? Pourrions-nous le faire?
    Ce ne sera peut-être pas nécessaire, mais nous n’avons pas eu beaucoup de temps pour entrer dans les détails techniques et nous serons peut-être plus au fait des diverses permutations ou combinaisons après avoir entendu les autres témoins. Je voulais seulement poser la question.
    Monsieur Harris, vous savez que les représentants du ministère sont toujours plus que ravis de venir clarifier certains éléments pour nous. Le comité devra décider s’il souhaite convoquer de nouveau des témoins, mais je crois que les témoins seront à votre disposition.
    Merci encore.
    Nous allons suspendre la séance une minute.
(1245)

(1250)
    Nous sommes en séance publique.
    Le sous-comité a un rapport à présenter au comité concernant les travaux futurs. Nous l’avons fait circuler. Nous avons besoin d’une motion pour que le Comité permanent de la justice et des droits de la personne accepte le troisième rapport du Sous-comité du programme et de la procédure. Quelqu’un aimerait-il la proposer?
    Madame Boivin.

[Français]

    Notre greffier nous a fait parvenir un avis selon lequel nous aurions à nous pencher sur une nomination. Je sais que cela a été fait après que le sous-comité s'est rencontré, mais j'aimerais savoir comment on procède pour ajouter un élément manquant à un rapport.

[Traduction]

    Nous pouvons le faire, mais nous devrions tout de même nous occuper du rapport. Quelqu’un aimerait-il proposer une motion pour adopter le rapport?
    Madame Boivin propose la motion. Avons-nous besoin d’un second proposeur?
    Ce n’est pas nécessaire.
    (La motion est acceptée.)
    Il reste deux ou trois points en suspens que nous devons régler pour aider le greffier et les autres. La liste des témoins a été remise. Le greffier a reçu les noms des témoins du gouvernement et de l’opposition. Il a prévu les séances du 9 et du 14 février; il y aura quatre témoins par séance. La séance du 16 février n’a pas encore été organisée, mais je crois que le greffier a reçu la confirmation de la GRC et du Service canadien de renseignements criminels que des représentants seraient en mesure de venir témoigner, ce qui nous permettrait de finaliser l’autre rapport sur le crime organisé.
    C’est le comité qui tranchera sur ce que nous ferons le 16 février. Soit nous entendrons ces deux organismes, ou soit nous entendrons d’autres témoins sur le projet de loi à l’étude.
    Je crois que ce serait raisonnable d’essayer de finaliser le rapport sur le crime organisé. Aurons-nous l’ébauche du rapport d’ici là? Je me demande seulement si c’est plus efficace.
    Robert, croyez-vous que nous devrions poursuivre sur notre lancée?
    Je crois que c’est ce que nous devrions faire. Le rapport sur le crime organisé ne prendra pas beaucoup de temps. Je crois qu’on perd notre élan. On pourrait éviter une autre séance. Vous avez parlé de les convoquer de nouveau pour répondre à certaines questions techniques. Vous seriez peut-être mieux de réserver une séance à cet effet. Nous n’en aurons peut-être pas besoin.
    Cependant, c’est certain que plus on attend, plus on risque d’avoir à y revenir. Il reste le projet de loi de M. Comartin que vous voulez adopter. Je crois qu’on vous a dit 24 heures et un témoin. Nous n’en avons pas; donc... Le rapport sur le crime organisé attend déjà depuis un bon moment, et ce n’est certainement pas une demi-séance... Voilà ce que j’en pense.
(1255)
    Je sais qu'on tient beaucoup à terminer le rapport sur le crime organisé. Je me disais que, s'il n'y avait aucun témoin pour ladite réunion, nous pourrions alors étudier le rapport, mais si vous...
    ... si rien d'autre n'est prévu, c'est certes une possibilité, mais le greffier est aux prises avec un problème, ne sachant qui convoquer, oui ou non?
    C'est ce que nous devons savoir pour que le greffier puisse...
    Nous menions les choses rondement sur le rapport sur le crime organisé, que nous avons mis de côté cependant pour entendre aujourd'hui le témoignage du ministre, parce qu'il avait pu se libérer, et maintenant, nous revenons au rapport.
    Je sais fort bien que nous accordons une certaine priorité aux projets de loi du gouvernement. S'il nous faut seulement une réunion ou une demi-réunion pour entendre les témoins à propos du rapport sur le crime organisé, les rédacteurs et les analystes pourraient alors au moins terminer la version provisoire que nous pourrions examiner. Sinon, il faudrait reporter cette étape après la comparution de ces témoins.
    Il me semble qu'il vaudrait mieux entendre les...
    Je vois où vous voulez en venir, mais je pense que nous en sommes déjà rendus là...
    Si nous tenons une réunion le 16 pour examiner le rapport sur le crime organisé, le rapport provisoire qui est en voie de rédaction et de révision à la lumière de nos délibérations... Après tout, le comité doit également se pencher sur cette autre question. Nous pourrons au moins y consacrer trois réunions. Une réunion, ou une demi-réunion au besoin, pourra suffire en ce qui concerne le rapport sur le crime organisé. Les analystes pourront ainsi poursuivre leur travail pendant que nous nous penchons sur cette autre question. C'est une façon efficace de procéder. On tenait mordicus, me semble-t-il, à terminer le rapport sur le crime organisé, jusqu'à aujourd'hui...
    Le président: Dites-nous...
    Je n'ai pas changé d'avis. Je ne suis pas en désaccord avec vous, mais nous devrions poursuivre l'étude par souci d'efficacité, parce qu'il n'y a aucun besoin impérieux de terminer le rapport sur le crime organisé... Ça remonte à quelle année? 2006?
    Je voudrais savoir si le comité souhaite poursuivre cette étude et s'il veut par conséquent que le greffier convoque d'autres témoins pour la réunion du 16 février?
    Une voix: Oui...
    Le président: C'est ce que souhaite le comité?
    C'est ce que nous voulons de ce côté-ci de la table.
    Je pense que c'est ce que veut la majorité, monsieur Harris.
    [Note de la rédaction: inaudible]
    Très bien. Par conséquent, le greffier continuera de convoquer les témoins.
    Je tiens simplement à indiquer que je suis conscient qu'il a fallu faire preuve de souplesse à l'égard de la liste des témoins établie hier soir. Il a été impossible de contacter les universitaires que nous souhaitons entendre pour connaître leur disponibilité. Nous voulions entendre l'avis d'un représentant de ceux à l'origine de ce projet de loi à Toronto — il ne s'agit pas de David Chen. Nous aimerions entendre l'opinion des personnes qui se sont intéressées de près à cette question. Nous sommes en contact avec deux témoins éventuels.
    Leurs noms ne figurent pas sur la liste des six témoins que vous nous avez présentée?
    Pas sur la liste que nous avons soumise hier.
    Liste sur laquelle six noms figuraient?
    Non, mais nous avons précisé que nous essayons de contacter d'autres témoins éventuels.
    D'après moi, l'un des problèmes, c'est que vous n'avez pas fixé de date. C'est ce qui me pose problème à titre de président. Aucune date n'a été établie, et j'ignore toujours le nombre total de témoins que vous voulez convoquer... Mais nous allons poursuivre. Nous examinerons les listes que le greffier a en main pour faire le point sur la situation.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU