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Mesdames et messieurs, je déclare la séance ouverte. Nous en sommes à la 68
e réunion du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Conformément à l'ordre de renvoi du mercredi 28 novembre 2012, nous étudions le projet de loi , Loi modifiant le code criminel (combats concertés).
Nous entendrons des témoins au sujet de ce projet de loi jusqu'à 17 heures, au plus tard, comme l'indique l'ordre du jour. Aujourd'hui, nous accueillons seulement deux témoins. Je tiens à remercier le greffier pour tous les efforts qu'il a déployés au cours des deux dernières semaines. Certaines personnes souhaitaient comparaître, mais n'étaient pas libres les jours prévus pour les réunions ou alors ils ont annulé pour une raison ou une autre. Dans l'ordre du jour qui se trouve sur votre table, vous verrez le nom de représentants du gouvernement de la Colombie-Britannique, mais ceux-ci ont dû annuler parce qu'ils n'étaient pas libres aujourd'hui.
Deux témoins comparaîtront aujourd'hui, après quoi, plus tard cet après-midi, nous passerons à l'étude article par article du projet de loi.
Je souhaite la bienvenue à nos témoins. Pour commencer, nous accueillons des représentants de l'Association médicale canadienne, soit Anna Reid, qui en est la présidente, et Mme Ricketts. Par la suite, par vidéoconférence, nous entendrons M. Gutman, qui est le président de Rockdoc Consulting. Les deux organisations disposeront d'environ 10 minutes chacune pour faire une déclaration préliminaire, après quoi nous passerons aux questions.
Nous allons commencer par entendre l'Association médicale canadienne. Madame Reid, vous avez la parole.
Bonjour. Je suis très heureuse de pouvoir témoigner devant le comité aujourd'hui.
Avant d'aller plus loin, je rappelle aux membres du Comité que je ne suis ni avocate, ni experte en matière de combats d'arts martiaux mixtes. Mon expertise ne porte ni sur le Code criminel ni sur les détails des combats sanctionnés ou non sanctionnés. Mes domaines d'expertise sont la médecine d'urgence et la médecine familiale.
En tant qu'urgentiste à Yellowknife, je traite souvent des patients qui ont subi de graves blessures à la tête à la suite d'un comportement risqué ou parce qu'ils ne portaient pas de casque. Je ressens de la frustration dans de tels cas parce que ces blessures sont tout à fait évitables. Comme médecin de famille, je suis témoin des répercussions à long terme de ces traumatismes, à savoir des vies à jamais changées et plus difficiles.
Je vois aussi des patients victimes de traumatismes beaucoup plus subtils, mais dont les effets sont presque tout aussi dévastateurs. Les lésions des tissus mous du cerveau ne sont pas toujours détectables lors d'une première visite, mais elles peuvent entraîner une perte de mémoire, la dépression, des déficiences cognitives, la perte d'un emploi et des problèmes familiaux. Dans tous ces cas, l'avenir de mes patients me préoccupe.
Je représente ici aussi plus de 78 000 médecins du Canada, qui sont membres de l'AMC. Permettez-moi de signaler que les politiques de l'AMC reposent sur les décisions prises par les médecins délégués à notre Conseil général annuel qui, cette année, aura lieu à Calgary. Au Conseil général de 2010, 84 % des délégués se sont prononcés en faveur d'une motion demandant à l'AMC de préconiser l'interdiction des arts martiaux mixtes ou de ce qu'on appelle aussi les combats en cage. Cette décision concorde avec la politique établie par l'AMC en 1986, qui préconise l'interdiction de la boxe.
Les raisons ne sont pas difficiles à comprendre. Une des principales responsabilités du médecin consiste à promouvoir une bonne santé. À cette fin, nous favorisons vivement l'activité physique, y compris les arts martiaux comme le judo et le karaté. Les combats en cage diffèrent toutefois de beaucoup d'autres sports, car, tout comme dans le cas de la boxe, les combattants visent essentiellement à causer du tort à leur adversaire afin de le mettre hors de combat. De plus, une activité qui vise avant tout à marteler l'adversaire jusqu'à la soumission n'est pas propice à la santé.
Tels qu'ils sont pratiqués actuellement, les combats d'arts martiaux mixtes (AMM) consistent surtout en des coups portés à la tête. Comme nous le savons, ces coups entraînent des traumatismes qui peuvent causer des dommages au cerveau. Une étude réalisée en 1998 à l'hôpital général de Kingston a révélé que, dans presque 30 % des cas de traumatisme crânien contondant découlant de toutes sortes de causes, les patients montraient des signes de traumatisme cérébral.
Les traumatismes cérébraux ont des conséquences à long terme. Jusqu'à 40 % des patients ayant subi des traumatismes cérébraux légers mettent au moins un an à retrouver leurs capacités et toutes les personnes qui survivent à ces traumatismes ont besoin de subir une évaluation clinique et de faire l'objet d'un suivi.
Je reconnais que l'on manque d'éléments de preuve sur la nature et le taux des traumatismes cérébraux graves causés par les combats d'AMM, et qu'il n'y a pas eu non plus d'études longitudinales sur les répercussions à long terme de ces combats sur la santé. Une étude détaillée publiée en 2010 dans le Journal médical allemand Deutsches Ärzteblatt au sujet des répercussions de la boxe sur la santé a toutefois révélé qu'elle pose un risque élevé de graves traumatismes au coeur, aux os et au crâne.
La recherche a aussi révélé que de 10 à 20 % des boxeurs professionnels souffrent de complications neuropsychiatriques persistantes. Chez les boxeurs qui ont mené une plus longue carrière, les conséquences des traumatismes cérébraux répétés peuvent inclure les suivantes: maladie de Parkinson, tremblements, troubles de mémoire, dépression, agressivité, toxicomanie et démence du boxeur, ce qui ressemble à la maladie d'Alzheimer sur le plan neurobiologique.
Les études sur les arts martiaux mixtes indiquent que, pour chaque tranche de 100 participations à des combats, de 23 à 28 blessures sont infligées, notamment de nombreux types de traumatismes crâniens. Ces traumatismes comprennent des traumatismes oculaires comme la fracture de l'os orbital ou la rupture de l' oeil même, des lésions au visage, y compris des fractures, des tympans perforés, des commotions cérébrales et des lésions à la colonne. Nous savons aussi que des décès ont été liés aux AMM. Un combattant qui faisait ses débuts professionnels en AMM en Caroline du Sud l'été dernier est mort d'une hémorragie cérébrale après avoir reçu de multiples coups à la tête durant son combat.
À la suite d'un événement qui a eu lieu à Vancouver en juin 2010, de nombreux combattants professionnels ont dû être transportés à l'hôpital général de Vancouver pour recevoir des soins d'urgence à cause de coupures, de fractures aux membres et de graves blessures au visage. Il y a deux semaines à peine, un homme de l'Ontario est mort après avoir perdu un combat en cage non sanctionné au Michigan.
On soutient que les combats non sanctionnés sont différents. La clé de la victoire diffère-t-elle? Les blessures infligées sont-elles différentes? Je vous laisse le soin de répondre à ces questions.
Bien entendu, les combats en cage ne sont pas seulement une activité physique à laquelle on se livre comme passe-temps et comme moyen de se mettre en forme. Il s'agit aussi d'une activité commerciale. Pour les parlementaires et la population en général, la question de savoir s'il faut légaliser les AMM en vertu du Code criminel se résume donc à un choix entre l'argent et la santé.
Je le répète, je ne suis pas avocate. Je suis tenue de protéger la santé des patients et de promouvoir les activités non préjudiciables, et l'AMC a pour mandat de préconiser les normes les plus élevées de santé et de soins de santé pour la population. En tant que médecin, j'accorde la priorité à la santé. Je ne peux approuver les coups à la tête. Malheureusement, j'ai trop souvent été témoin des effets débilitants des traumatismes crâniens et des restrictions dont souffrent les personnes atteintes ainsi que les membres de leur famille — et dans beaucoup de cas, ces restrictions seront permanentes.
Nous exhortons donc les membres du comité et tous les députés à prendre le temps de bien réfléchir avant de décider s'il serait prudent de voter en faveur de la légalisation des combats concertés en vertu du Code criminel du Canada.
Merci beaucoup.
Moi aussi, je suis urgentiste et membre de l'Association médicale canadienne. Je souscris à bien des points et des observations faites par la Dre Reid, qui vient de parler. Toutefois, je diffère sur la question de la santé des Canadiens, notamment de mes patients.
Je reconnais l'importance du concept de la réduction des préjudices. Beaucoup de Canadiens participent à des activités de toutes sortes dans le domaine des arts martiaux mixtes. Ils font de la boxe. Ils vont continuer de se livrer à ces activités quoi que le comité décide de faire. Par conséquent, à mon avis, si nous souhaitons protéger les Canadiens, je préconise que nous devrions consacrer nos efforts à sanctionner ces activités et à améliorer la qualité des mécanismes de surveillance qui y sont associés.
Il faut faire la distinction entre les combats sanctionnés et les combats non sanctionnés de même qu'entre les combats professionnels et les combats amateurs. Il est vrai que des coups sont assénés dans les arts martiaux mixtes, mais contrairement à la boxe, il existe d'autres manières de gagner un match. En fait, dans les matchs de boxe amateurs, où il n'est pas nécessairement question de mettre l'adversaire hors de combat ou de lui infliger des traumatismes crâniens, il y a d'autres manières de gagner. Dans les arts martiaux mixtes en particulier, on peut avoir recours à des prises de soumission et à des manoeuvres de lutte qui n'occasionnent pas de blessures à la tête.
La Dre Reid a fait référence au combat qui a eu lieu à Vancouver en 2010. Il s'agissait là d'un combat d'arts martiaux mixtes dans le cadre d'un championnat de combats ultimes professionnel. J'étais le médecin en chef de l'équipe médicale de service lors de cet événement. Elle a dit vrai: certains combattants ont été blessés et ont dû être transportés à l'hôpital.
Je tiens également à dresser un parallèle avec tous les autres sports professionnels, surtout le hockey, le football et le soccer, où l'on enregistre régulièrement des blessures à la tête et d'autres graves blessures. Songerions-nous à interdire la pratique du hockey? Bien sûr que non. Toutefois, nous continuons de nous efforcer de trouver des façons de réduire le risque de commotions cérébrales et d'autres blessures à la tête ainsi que les conséquences à long terme de celles-ci en améliorant l'équipement, les surfaces de jeu, les règlements et, surtout, en évaluant les joueurs avant et après les matchs, de même qu'après qu'ils ont été blessés pour déterminer s'ils sont en état de retourner au jeu.
En ce qui concerne les arts martiaux mixtes, à mon avis, la meilleure manière d'assurer la protection des Canadiens, c'est de former adéquatement les arbitres — car ce sont eux qui contrôlent vraiment le déroulement de l'action et qui peuvent éviter que des coups répétés soient portés après qu'un combattant n'est plus en mesure de se défendre — et de veiller à ce que des évaluations médicales soient effectuées avant, pendant et après les matchs.
Pour revenir sur les 83 %, je crois, des médecins canadiens qui ont voté en faveur d'interdire les arts martiaux mixtes, je ne serais pas étonné que la grande majorité d'entre eux n'aient jamais assisté à de tels événements sportifs. Peut-être qu'ils en ont vu de petits bouts à la télévision, mais ils ne sont probablement pas au courant des évaluations qui sont exigées avant, pendant et après les matchs dans le but de protéger les compétiteurs. Par conséquent, une meilleure formation des médecins et de tous ceux qui oeuvrent dans le domaine de ce sport réduirait les risques encourus par les participants et les protégerait davantage.
J'ai beaucoup d'expérience en tant que médecin de service pendant des matchs d'arts martiaux mixtes et de boxe, tant amateurs que professionnels, et je prône toujours la protection des participants. Je vous remercie de m'avoir donné la chance de faire cet exposé et de discuter plus longuement de ce sujet avec vous.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie d'avoir pris la peine de venir comparaître devant nous aujourd'hui. Il est important, je pense, d'entendre tous les points de vue sur un sujet de ce genre, qui met en cause la santé.
On parle des combats qui sont sanctionnés et de ceux qui ne le sont pas, mais même si on s'oppose à cette pratique, ça va quand même se faire. On dit que si l'interdiction est totale, il se peut que les gens s'adonnent à cela de façon clandestine, et que dans ces conditions, mieux vaut pouvoir appliquer un encadrement adéquat.
Que répondez-vous à cela? Y a-t-il eu des discussions là-dessus au sein de votre association?
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Merci, monsieur le président.
Il est certainement intéressant et utile d'entendre des médecins des deux camps. Merci pour votre témoignage.
Docteure Reid, il est clair que l'AMC s'oppose aux arts martiaux mixtes. Je remarque que vous vous attardez particulièrement aux traumatismes crâniens fermés et que vous considérez que l'objectif du sport, c'est de blesser les gens.
Nous savons que votre association n'est pas en faveur de ce sport parce qu'elle n'aime pas les techniques de combat que sont les coups de poing et les coups de pieds. Or, comme vous nous l'avez dit, l'AMC encourage les arts martiaux traditionnels, qui ne sont certainement pas pour ceux qui ont froid aux yeux. Le karaté est un sport plutôt violent. Quelle est votre principale préoccupation? Pourquoi êtes-vous en faveur des arts martiaux traditionnels, mais pas de ce sport-ci?
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Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Premièrement, je voudrais remercier nos témoins d'avoir accepté de monter dans notre arène pour se livrer à notre sport extrême, la politique canadienne.
[Français]
Je crois comprendre. À mon avis, tout le monde autour de la table comprend également. De toute façon, j'aurais été tout à fait surprise de voir l'Association médicale canadienne nous accorder la sanction royale concernant
[Traduction]
les arts martiaux mixtes. J'aurais été grandement étonnée du contraire.
Il y a cependant un point sur lequel je ne suis pas d'accord avec vous.
[Français]
Vous avez bien précisé dans votre présentation, docteure Reid, que vous n'étiez pas avocate. Or le Comité permanent de la justice et des droits de la personne veut déterminer s'il est encore justifié qu'une disposition du Code criminel rende criminelle la pratique d'un certain sport qui, dans les faits, n'est pas criminalisée. C'est complètement court-circuité depuis un bon moment déjà. En effet, le UFC Special existe depuis plusieurs années. Je le reçois sur plusieurs canaux de télévision pratiquement tous les jours. Sur Spike TV, je peux voir un ou deux matchs sans problème.
Il y a peut-être là une forme d'hypocrisie. Ici, je ne parle pas de votre position, mais du fait que c'est inclus dans le Code criminel. Voici des propos que vous avez tenus et qui se trouvent dans les notes que vous nous avez remises:
Pour les parlementaires et pour la société, la question de savoir s'il faut légaliser les AMM en vertu du Code criminel se résume donc à un choix :
Un choix entre l'argent et la santé.
Ces propos m'ont un peu dérangée, pour la simple et bonne raison qu'il n'est pas du tout question de cela, à mon avis. Il n'est pas non plus question de légalisation. Or vous parlez de légaliser quelque chose. En fait, on parle ici de le décriminaliser, et non de le légaliser. Les provinces et les territoires peuvent mettre en vigueur certains règlements, mais ça ne veut pas dire que l'adoption du projet de loi donnerait lieu à une légalisation. Il s'agit purement et simplement de décriminaliser une pratique qui, dans les faits, n'a pas été criminalisée depuis belle lurette.
C'est la réalité du projet de loi . Comme l'a noté mon collègue M. Seeback, vous nous dites aujourd'hui que c'est basé sur l'intention, autrement dit que les coups de pied et de coude assenés directement à la tête lors des combats d'arts martiaux mixtes, ou AMM, font que cette pratique est différente des autres sports. Qu'il s'agisse de la boxe ou des AMM, vous vous y opposez par principe, ce que je comprends, étant donné que vous êtes médecins.
Par contre, quand deux joueurs de hockey décident de se battre lors d'un match, retirent leur casque et leurs gants et se donnent allégrement des coups au visage, je suis convaincue qu'il y a là aussi une forme d'intention. Par conséquent, j'imagine que vous voudriez aller aussi loin que de bannir les batailles durant les matchs de hockey et qu'on pourrait ajouter cela, comme vous l'avez fait dans le cas de la boxe et des AMM, notamment.
Sauf erreur, vous parlez de tous les cas où quelqu'un utilise une partie de son corps pour viser la tête d'une autre personne. C'est la tête qui est le point central, pour vous?
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Merci, monsieur le président.
Je remercie nos témoins de leur présence parmi nous.
Monsieur le président, je voudrais faire valoir d'emblée que certains éléments du projet de loi pourraient obtenir l'assentiment de nous tous, y compris nos témoins.
Le projet de loi propose assouplir l'exemption établie aux termes du paragraphe 83(2) pour les combats de boxe amateur afin d'englober les matchs de sport de combat, y compris le judo, le karaté, le tae kwon do, le kick-boxing et les arts martiaux mixtes. Le paragraphe 83(2) engloberait également les matchs de boxe professionnelle et d'arts martiaux professionnels.
Je m'adresse à nos deux témoins: estimez-vous que les modifications proposées modernisent une disposition du Code criminel à laquelle on a relativement peu recours et autorisent la pratique de sports comme le judo, le karaté et les arts martiaux mixtes?
J'aimerais que la représentante de l'AMC réponde en premier.
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Je suis ravi d'entendre ce témoignage.
Je veux revenir un peu à l'AMC, monsieur le président.
J'ai enseigné des arts martiaux pendant 15 ans et je suis inquiet lorsqu'on compare les arts martiaux ou d'autres disciplines à des bagarres de bar. Cela m'indique que les gens de mon ancien domaine doivent parler beaucoup plus des nombreux bienfaits qu'ils ont pour la santé. Docteure Reid, quand vous dites qu'une personne est juste là, peu importe la discipline...
Soit dit en passant, M. Goguen a raison. Il y a le kickboxing. On enseigne cette discipline dans certains systèmes et il arrive parfois que des gens aient des commotions. Toutefois, en disant qu'un joueur ou un athlète ne pratique ces sports que pour blesser un autre être humain, on oublie tous les principes à la base des arts martiaux traditionnels: le respect, discipline et concentration. Encore une fois, ce sont des athlètes, et il est irrespectueux de faire ce genre de comparaison compte tenu de tout ce qui est fait dans ce sport encadré.
Il est vrai qu'il y a des choses à améliorer au hockey, au football et dans les arts martiaux mixtes. Je souligne simplement qu'en interdisant la pratique d'une activité, on peut créer une économie clandestine où peu de combats sont sanctionnés et surveillés, et à laquelle des enfants et des jeunes peuvent participer et se blesser. Ce serait décevant.
Je trouve aussi décevant que nous ne précisions pas qu'il est possible d'améliorer les arts martiaux mixtes, en tant que disciplines et exercices athlétiques, que ce soit par un meilleur processus de sanction ou, comme l'a dit M. Wright, par l'adoption de normes internationales grâce auxquelles ils deviendraient vraiment des sports olympiques ou amateurs, ou par un enseignement axé sur la santé et la sécurité de nos jeunes.
Dans la plupart des écoles d'arts martiaux, surtout pour la lutte de soumission ou le judo, on vous apprend tout d'abord à saluer, notamment. Ensuite, on vous apprend à taper, monsieur le président, pour que l'entraînement se fasse de façon sécuritaire. On insiste là-dessus. Je respecte tout à fait le point de vue de l'Association médicale canadienne, mais prôner l'interdiction sans s'appuyer sur des données et exposer davantage les gens à des risques, plutôt que de faire des recommandations pouvant être mises en oeuvre...
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Je n'avancerai rien au sujet des avocats. Ce serait déplacé de la part d'un invité du Comité de la justice comme moi de le faire, monsieur le président.
Tout comme mon amie, Mme Boivin, le point de vue de l'AMC ne me surprend pas. Le sport, surtout un sport de contact — et j'utiliserai ce terme de façon générale... Les arts martiaux mixtes sont des sports de contact. En fait, il en est de même pour le basketball. Wilt Chamberlain a dit que c'en était un, mais que le football est un sport de collision. Il s'agit donc de gens bien bâtis qui s'affrontent sous une forme ou une autre, mais la différence, c'est qu'il y a des règles à respecter.
Évidemment, il y a des règles à respecter dans les arts martiaux mixtes, et je comprends ce que mon ami, M. Albas, a dit plus tôt, car je n'ai évidemment pas pratiqué ce genre de sport, bien que j'ai longtemps frappé un ballon de soccer et c'est peut-être ce qui m'a attiré ici. Je ne le sais pas. Puis, je suis un Écossais. C'est peut-être cela.
Je ne suis pas surpris de ce que vous dites. En fait, il est difficile de ne pas convenir qu'on peut blesser quelqu'un en le frappant. Je crois que nous le savons tous. Si M. Albas venait me donner un coup à la tête — ce qu'il ne ferait jamais, bien entendu —, cela serait nocif et Dieu sait quel genre de dommage il pourrait me causer. Je pense que nous le comprenons tous. Il faut déterminer ce que nous faisons dans un processus juridique. Je pense que vous avez dit tout à l'heure qu'en tant que médecin — et j'ajouterais, en tant que médecin éminemment compétente —, vous n'êtes pas vraiment prête à essayer.
Permettez-moi de m'adresser à votre collègue de Vancouver, qui a parlé du besoin de réduire les préjudices, car je m'y connais assez bien. Je viens d'une famille qui a fait carrière dans le domaine de la santé mentale et qui parle de la réduction des préjudices, surtout pour ce qui est des gens schizophrènes ou bipolaires qui sont également toxicomanes.
Monsieur, à la lumière de ce que vous constatez, je compte sur vous pour nous faire des recommandations, puisque vous examinez la question sous un angle supérieur, si l'on veut. Il s'agit de combats concertés et très souvent, vous êtes médecin de ring.
Quand je regarde ces combats à la télévision, ce qui me frappe, notamment — sans vouloir faire de jeu de mots —, c'est la différence entre la boxe et les combats en cage... Je ne veux pas faire référence aux arts martiaux mixtes ici, car il peut y avoir une connotation négative parfois, même si on utilise cela. M. Albas a raison. Les arts martiaux mixtes que lui et ses collègues ont enseignés peuvent sembler très différents. La différence, c'est que si un boxeur jette son opposant à terre, il ne peut pas continuer à le frapper. Toutefois, dans cette cage, si on jette son opposant à terre, on peut continuer à le frapper. L'arbitre est censé intervenir et faire toutes sortes de choses, mais combien de fois a-t-on vu une personne par terre, dont les yeux commencent à rouler, recevoir deux ou trois coups? Je ne parle pas du moment où elle est en train de tomber, car un boxeur peut frapper son opposant pendant qu'il tombe.
Quels éléments de la stratégie de réduction des préjudices que vous proposez le comité devrait-il connaître? Aucun d'entre vous ne nous donnera une opinion juridique sur l'article. J'aimerais savoir ce que vous avez à dire à ce sujet.
En ce qui concerne les « combats en cage », je pense que c'est un terme lourd de sens. Les arts martiaux mixtes se pratiquent également dans un ring. Le terme « combats en cage » suppose peut-être quelque chose de désagréable, et je préfère donc parler d'arts martiaux mixtes.
En ce qui concerne la réduction des préjudices, je divise le tout en trois parties, soit avant, pendant et après le combat, qui correspondent respectivement aux évaluations médicales, à l'arbitrage et aux sanctions.
Tout d'abord, avant que le combat ait lieu, il est important d'évaluer la catégorie de poids pour s'assurer que les opposants sont au même niveau et que la compétition est juste. Chez les professionnels, l'appariement constitue une partie essentielle de la protection des athlètes. Si un compétiteur de très haut niveau affronte un amateur, les risques sont grands pour ce dernier. L'appariement est donc un élément important.
Dans le cadre des évaluations médicales, on vérifie si l'athlète est capable de compétitionner à ce niveau: évaluation de la santé cardiovasculaire, examen visuel, tomographie par ordinateur, électroencéphalogramme, test cognitif avec des outils servant à évaluer les commotions. En fait, certains de ces tests sont présentement menés et d'autres devraient l'être. Je dirais qu'ouvrir le débat davantage au monde médical et faire participer ces gens, plutôt qu'interdire des choses, favoriserait le recours à ces mesures avant la compétition.
Durant la compétition, la sécurité de l'athlète dépend entièrement des compétences, de l'expérience et de la formation de l'arbitre. C'est lui qui empêchera justement ce deuxième, troisième ou quatrième coup de survenir. Oui, selon les règles, on peut continuer à frapper son adversaire jusqu'à ce qu'il soit incapable de se protéger, et la décision appartient à l'arbitre. Ainsi, si les arbitres sont très compétents et mieux formés, les athlètes seront mieux protégés.
Après le combat, une évaluation est faite par un médecin expérimenté qui a la capacité de faire une évaluation en utilisant une échelle normalisée et d'interdire un athlète de combattre pour 30, 60, 90 jours ou plus, qu'il soumet à d'autres conditions comme l'évaluation d'un neurologue, etc. Cela se fait dans les rangs professionnels où il y a des sanctions appropriées contrairement à ce qui se passe dans les combats clandestins.
J'ai un exemple, cela s'est passé dans la vallée du bas Fraser. Un compétiteur a pris part à un combat professionnel. La nuit suivante, il a participé à un autre combat ailleurs. C'est tout à fait inacceptable à n'importe quel niveau. Toutefois, il n'y a pas d'organisme dirigeant. Dans bon nombre de ces compétitions, on n'est pas en mesure d'interdire cette pratique.
C'est dans ce contexte que des gens se blessent. C'est là que le syndrome de deuxième impact, comme on l'appelle, cause d'importants dommages après une blessure au cerveau. C'est ce que nous tentons d'éviter. En exposant le problème au grand jour, nous pourrons mieux protéger nos combattants.
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Je remercie les témoins de leur présence aujourd'hui.
Durant les 20 années où j'ai été policier, j'ai vu beaucoup de bagarres de bar dans lesquelles, généralement, des chaises, des tables et des bouteilles en verre sont utilisées. Tout débute habituellement par un coup venant de nulle part. Ce n'est pas un combat un contre un. Normalement, la bagarre est provoquée par les effets de la consommation d'une grande quantité d'alcool et de drogues.
Cela dit, la question que je veux poser aux deux témoins est très brève. Je me ferai l'avocat du diable. Supposons que le projet de loi est adopté par le comité, par la Chambre des communes et par le Sénat. Ma question s'adresse à vous deux. Du côté de l'AMC, on semble préoccupé par les combats. Si le projet de loi est adopté, quelles mesures de protection pourraient être mises en oeuvre pour augmenter la sécurité dans le sport, à votre avis?
Il y a sept ou huit ans, je crois, les règles coordonnées des arts martiaux mixtes ont été adoptées par la plupart. On a restreint le type de coups permis, ce qui a permis de réduire le nombre de blessures graves. Je le regrette, il n'y a pas de statistiques là-dessus, mais les coups de coude portés à la tête à la verticale, par exemple, ont été retirés, ainsi que d'autres gestes dangereux. Les règles sont importantes.
Vous avez raison de dire que dans les rangs professionnels, les combattants n'ont pas le droit de compétitionner. La situation est différente dans chaque province. Le problème, en partie, c'est qu'il y a malheureusement tout un amalgame d'organismes de sanction. Le gouvernement de la Colombie-Britannique tente d'uniformiser le tout dans une commission provinciale, ce qui serait utile, et d'avoir un centre qui interdit aux athlètes de prendre part à une compétition pendant une certaine période, qui peut varier, mais vous avez raison.
De plus, il incombe vraiment au médecin qui est présent près du ring et qui impose une suspension de décider de sa durée. D'après mon expérience, il n'existe aucune ligne directrice et aucun renseignement sur la façon de procéder, et j'ai donc des données globales. Lorsque d'autres médecins travaillent avec moi, nous leur donnons des renseignements sur les recommandations que nous proposons. À mon avis, ces sanctions et interdictions devraient être fondées sur un plus haut niveau, une commission, que ce soit au niveau provincial ou à un niveau plus élevé.
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Merci, monsieur Armstrong.
Nous n'avons pas d'autre intervenant, alors nous allons conclure là-dessus. Merci à nos deux témoins de s'être déplacés aujourd'hui.
Même si les questions étaient difficiles et qu'on vous a mis un peu de pression, vous vous en êtes très bien sortis. Je serais heureux d'être... Enfin, je ne veux pas me retrouver dans votre salle d'urgence, mais je sais que je serais entre bonnes mains si vous deviez me soigner. Nous tenons à remercier tous les médecins du pays pour le travail qu'ils font. Tous les membres de l'Association médicale canadienne rendent un grand service à la population canadienne, et nous vous en sommes reconnaissants.
Des voix: Bravo!
Le président: Nous allons donc faire une courte pause avant de passer à l'étude article par article du projet de loi.
Merci encore de nous avoir donnés de votre temps et fait part de vos commentaires.
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Mesdames et messieurs, la séance reprend. Je crois bien que les cinq minutes sont terminées. Je n'en suis pas certain, mais on doit en être très près: trois minutes à Terre-Neuve et cinq minutes en Ontario, alors voilà.
Quoi qu'il en soit, nous poursuivons la séance avec l'étude article par article. L'avocat du ministère de la Justice, M. Pruden, s'est joint à nous. Y a-t-il des questions? Il n'y a en fait qu'un seul article à étudier.
Avant de commencer, avez-vous des questions à poser au personnel du ministère de la Justice?
Pas de question, alors commençons.
Mme Françoise Boivin: Ce devrait être facile.
Le président: J'imagine.
L'article 1 est-il adopté?
Des voix: Oui.
(L'article 1 est adopté.)
Le président: Le titre est-il adopté?
Des voix: Oui.
Le président: Le projet de loi est-il adopté?
Des voix: Oui.
Le président: La présidence doit-elle faire rapport du projet de loi à la Chambre?
Des voix: Oui.
Le président: Mesdames et messieurs, c'est ce qui conclut la séance d'aujourd'hui. Je vous rappelle que la réunion de mercredi est consacrée au Sous-comité du programme et de la procédure. Veuillez examiner le calendrier jusqu'à la fin des travaux, quelque part en juin. Il reste environ neuf semaines, dont une semaine de relâche. Pensez aux questions que vous aimeriez étudier.
Nous allons recevoir le projet de loi à un moment donné. Je ne sais pas quand exactement, mais je vais faire de mon mieux pour le savoir à l'avance. Soyez prêts à discuter de nos travaux futurs. J'aimerais que le programme soit établi pour les deux prochains mois. Ce serait merveilleux.
Autre chose?
Puis-je avoir une motion d'ajournement?
Une voix: J'en fais la proposition.