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Bienvenue à la 68
e réunion du Comité permanent des anciens combattants de la Chambre des communes.
Pour la première heure, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le 3 octobre¦2022, le Comité reprend son étude sur l'expérience des vétéranes.
Au cours de la deuxième heure, nous discuterons du Monument commémoratif national de la mission du Canada en Afghanistan.
[Français]
Permettez-moi de saluer quelques personnes qui sont ici, aujourd'hui, en tant que remplaçantes. En effet, Mme Carine Grand‑Jean va agir en tant que greffière, et Mme Diana Ambrozas, à titre d'analyste.
Selon la procédure habituelle, il faut attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Les tests de son ont été faits, et tout est conforme. Bien que la salle soit munie d'un système audio performant, il est possible que des retours de son se produisent. Ceux-ci peuvent être extrêmement dommageables pour les interprètes et leur causer de graves blessures. La cause la plus fréquente d'un retour de son est une oreillette portée trop près d'un microphone. Nous demandons donc à tous les participants de faire preuve d'une grande prudence lors de la manipulation des oreillettes. Afin de prévenir les incidents et de protéger la santé auditive des interprètes, j'invite les participants à s'assurer qu'ils parlent bien dans leur micro et à éviter de manipuler les oreillettes.
Conformément à notre motion, nous continuons notre étude sur les expériences vécues par les vétéranes. Cela dit, avant d'accueillir les témoins, je dois vous faire part d'un avertissement lié au traumatisme. En effet, nous allons discuter d'expériences liées à la santé mentale. Cela peut être un élément déclencheur pour les gens qui sont ici, pour les téléspectateurs, pour les députés et leur personnel qui ont vécu des expériences similaires. Si vous vous sentez bouleversés ou si vous avez besoin d'aide, n'hésitez pas à en informer la greffière.
J'aimerais maintenant souhaiter la plus cordiale des bienvenues à nos invités.
[Traduction]
Pendant la première heure, nous entendrons Mme Chris Edwards, chercheuse, à titre personnel, Mme Mélanie Morin-Pelletier, historienne, Musée canadien de la guerre, et Mme Debbie Lowther, présidente-directrice générale et cofondatrice, Veterans Emergency Transition Services, par vidéoconférence.
Nous allons commencer par les déclarations préliminaires.
J'invite Mme Mélanie Morin-Pelletier à faire sa déclaration préliminaire.
Allez‑y, madame. Vous avez cinq minutes.
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Je vous remercie, monsieur le président et membres du Comité, de m'avoir invitée à contribuer à cette importante étude,
Vous avez eu le privilège d'écouter de nombreux témoignages de vétéranes qui vous ont courageusement fait part de morceaux de leur expérience. En tant qu'historienne militaire, mon humble contribution se veut une synthèse fondée sur plus de 20 années de recherche sur le vécu et l'expérience des vétéranes des deux guerres mondiales.
Examiner le contexte historique dans lequel s'inscrit le service militaire de ces pionnières nous aide à mieux saisir la suite de l'histoire. On se rend compte rapidement que les difficultés auxquelles ces femmes ont été confrontées dans les structures sociomilitaires de l'époque perdurent, tout comme les barrières, les idées reçues, la discrimination et les préjugés à leur égard.
Jusqu'en 1941, le seul titre que pouvait porter une femme dans les Forces armées canadiennes était celui de « nursing sister », soit « infirmière militaire ». Elles ont été 2 845 infirmières militaires à servir en France, en Belgique, en Angleterre, en Grèce et en Russie pendant la Première Guerre mondiale. Au moins 60 d'entre elles sont décédées des suites de blessures ou de maladies. Elles portaient un grade militaire relatif de lieutenant. Cela donnait aux infirmières militaires une certaine autorité sur leurs patients dans l'hôpital, mais pas sur les soldats à l'extérieur de l'hôpital. Comme vous pouvez l'imaginer, cela causait de la confusion par moments. Comme officières, en revanche, il leur était interdit de fraterniser avec les soldats à l'extérieur de l'hôpital. C'était un des moyens de protéger leur moralité publique. Elles devaient aussi porter un uniforme composé d'une longue robe bleue et un voile blanc, ce qui rappelait beaucoup la tenue des religieuses à l'époque. Elles étaient présentées, dans les médias de l'époque, comme étant des anges blancs ou des mères universelles. Leur comportement devait donc refléter ces images stéréotypées.
Les règlements exigeaient que les infirmières militaires soient célibataires au moment de leur enrôlement. Il y a eu quelques exceptions, des femmes mariées ou veuves, mais elles ne devaient pas avoirpersonnennes à charge. Jusqu'en 1943, celles qui se mariaient étaient libérées de leurs fonctions. Jusqu'aux années 1970, le mariage et la maternité étaient perçus comme des inconvénients majeurs par les Forces armées canadiennes et des raisons valables de relever les femmes de leurs fonctions.
Ces pionnières ont voulu servir dans les deux conflits mondiaux. J'aimerais dire qu'il y a toujours eu plus de femmes volontaires qu'il y a eu de postes disponibles. Les principales raisons qu'elles donnent pour s'enrôler sont qu'elles veulent servir leur pays et qu'elles veulent aider à gagner la guerre. Ces femmes ont dû cheminer tant bien que mal dans un système sociopoliticomilitaire qui considérait leur présence comme étant tolérable pour la durée de la guerre, , ais sinon, largement indésirable.
Même pendant la Seconde Guerre mondiale, alors que plus de 50 000 Canadiennes portaient l'uniforme et effectuaient leur service principalement au pays, les forces armées ont continué de présenter leur contribution comme une mesure d'urgence. Elles servaient à libérer les hommes afin qu'ils puissent combattre. Comme vous le savez, les postes de combat ont été interdits aux femmes jusqu'à la fin des années 1980. L'expression populaire du temps indiquait qu'elles étaient « les filles derrière les gars derrière les fusils ». Elles n'étaient pas employées au nom d'un droit ou d'un besoin de travailler, ce qui était souvent le cas après la crise économique des années 1930, elles l'étaient vraiment au nom d'une situation d'urgence exceptionnelle et temporaire. Cette insistance sur le fait qu'elles étaient des invitées de passage aura un effet marquant sur la façon dont elles seront traitées à titre de vétéranes après la guerre.
Par exemple, il était attendu des infirmières vétéranes qu'elles retournent le plus rapidement possible dans le système de soins de santé civil, alors que certaines d'entre elles ne faisaient plus le même type de travail depuis près de quatre ans. On attendait des vétéranes qui ont servi dans d'autres domaines pendant la Seconde Guerre mondiale qu'elles privilégient le mariage comme choix de carrière. Des mesures étaient d'ailleurs mises en place pour s'assurer qu'elles ne rivalisent pas avec les anciens combattants, qui, eux, devaient avoir la priorité dans les emplois.
En conclusion, cette synthèse très succincte avance que le contexte sociomilitaire dans lequel le service militaire des Canadiennes s'est développé, qui inclut aussi la culture hypermasculine du guerrier, a marginalisé les femmes et a malheureusement aussi minimisé plus de 100 ans de contribution des femmes à l'effort de guerre du pays et à l'histoire militaire canadienne.
Merci beaucoup.
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Je vous remercie de m'avoir invitée à m'adresser à vous aujourd'hui. Ce sujet est très important pour moi, alors je vous en suis très reconnaissante.
Je vais m'adresser à vous aujourd'hui à titre de chercheuse civile qui appuie les membres des Forces armées canadiennes, nos premiers intervenants et nos anciens combattants.
À l'heure actuelle, mes recherches portent sur les facteurs qui relient le sexe biologique, la santé génésique et la profession aux lésions musculo-squelettiques. En vous parlant des lésions musculo-squelettiques, je les nommerai par leur abréviation, les « LMS », parce que c'est beaucoup plus facile à prononcer.
Depuis plus de 100 ans, les Canadiennes servent dans les forces armées et dans la GRC. La recherche, la formation, l'infrastructure, l'équipement et les ressources pour les femmes en service et à la retraite ne reflètent pas cela. En fait, lorsque j'ai effectué ma première analyse documentaire en 2018 pour élaborer des programmes de réadaptation et d'entraînement physique fondés sur des données probantes pour les membres des Forces canadiennes que j'appuyais, j'ai découvert qu'aucune étude n'a été publiée sur les lésions que subissent fréquemment les femmes. Le Canada est chef de file mondial de l'intégration des femmes dans des carrières traditionnellement réservées aux hommes. Nous devrions vraiment faire mieux.
Qu'est‑ce que j'entends par « faire mieux »? Ayant obtenu la permission de mes sources, je vais maintenant vous donner des exemples et des citations de quelques-unes de ces femmes.
L'une m'a dit: « Le sexisme est intégré dans tout notre système de soins médicaux. Par conséquent, les problèmes médicaux propres aux femmes ne sont pas pris au sérieux. On nous dit aussi qu'il s'agit des soins de santé en général, alors je suppose qu'il n'est pas important de les documenter, que ce ne serait pas vraiment utile .»
Un autre m'a dit: « Je me suis presque fait enlever les seins pour que mon équipement s'ajuste bien. J'ai subi une modification chirurgicale de la poitrine pour qu'elle soit plus plate et que mon équipement s'ajuste bien. C'est écœurant. Les femmes ne devraient pas se faire couper les seins pour pouvoir effectuer des tâches militaires de base sans se faire de mal en portant l'équipement qu'on les oblige à porter. »
Voici une autre citation: « Je suis allée à la clinique parce que j'avais des crampes terribles et j'ai demandé qu'on retire mon dispositif intra-utérin ou DIU. La clinique a refusé de m'examiner, parce que j'étais sur le point de partir en affectation. On m'a recommandé de le demander en arrivant sur les lieux de ma prochaine affectation. Quand j'y suis arrivée, il a fallu huit mois avant que quelqu'un retire mon dispositif intra-utérin. Entretemps, on s'est contenté de me prescrire du naproxène. On m'a offert plus de médicaments, mais je voulais tout simplement qu'on retire le dispositif intra-utérin, parce que je suis à peu près sûre qu'il avait été mal posé au départ. Après avoir vécu cette expérience, je ne suis plus jamais retournée à la salle d'examen médical. Je préfère payer de ma poche pour que les professionnels de la santé me prennent au sérieux. »
Une autre m'a dit: « J'évite de présenter mes demandes à ACC, parce qu'il est notoirement horrible de traiter avec ces fonctionnaires, et en plus, je n'ai pas une large bande suffisante pour le faire. »
Enfin, une autre m'a dit: « Je ne connais aucune femme qui porte la plaque avant. Je me contente de porter deux plaques arrière sur mon gilet pare-éclats, parce qu'au moins ce n'est pas trop inconfortable. »
Je vais maintenant parler de la recherche à laquelle j'ai participé au laboratoire Adamo de l'Université d'Ottawa.
Les femmes qui servent dans les Forces canadiennes présentent des taux plus élevés de dysfonctionnement du plancher pelvien que celles de la population civile. Les taux de lésions dues au surmenage sont plus élevés chez les femmes des forces armées que chez les hommes. Les taux de lésions sont plus élevés chez les femmes que chez leurs collègues masculins au cours de leur test annuel de force physique. Les femmes qui ont donné naissance à un enfant sont plus susceptibles de subir des lésions dues au surmenage que leurs pairs nullipares et que les hommes. Seulement 6,7 % des membres des Forces canadiennes qui ont été enceintes pendant qu'elles étaient en service ont reçu une formation physique spécialisée. J'ai bien dit 6,7 %.
En conclusion, le Canada a adopté une approche non sexiste et inclusive pour les femmes. Malheureusement, « non sexiste » d'après les données probantes signifie « masculine » à cause du manque de représentation des femmes dans la recherche. Tant que l'on n'inclura pas la physiologie, la biomécanique et l'anatomie des femmes dans les cours de formation des services de santé des Forces canadiennes, tant qu'on ne leur accordera pas la priorité en recherche et que l'équipe de la Défense ne les appuiera pas, on ne comprendra pas les besoins des femmes membres des Forces armées canadiennes et des vétéranes, et ces besoins continueront d'être invisibles.
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Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invitée à m'adresser à vous aujourd'hui dans le cadre de cette étude très importante sur l'expérience des anciennes combattantes. Honnêtement, je trouve décourageant qu'en 2023, nous soyons encore obligés de parler de ces problèmes.
À titre d'organisme de bienfaisance national enregistré dont l'objectif est de fournir un soutien immédiat sur le terrain aux anciens combattants des Forces armées canadiennes et de la GRC qui sont sans abri, qui risquent de le devenir ou qui sont en situation de crise, VETS Canada a eu le privilège d'interagir avec des milliers d'anciens combattants depuis sa création en 2010. Selon les chiffres du recensement de Statistique Canada de 2021, les femmes représentaient 16,2 % des anciens combattants, mais elles constituent actuellement un peu plus de 19¦% de notre charge de travail. On nous confie donc de nombreuses expériences vécues.
Chaque expérience que l'on nous décrit est unique, mais il en ressort plusieurs thèmes communs. Tout d'abord, presque toutes les anciennes combattantes avec lesquelles nous avons travaillé nous ont révélé qu'elles ont subi des traumatismes sexuels et du harcèlement sexuel dans l'armée. Ensuite, nous apprenons que les anciennes combattantes se sentent invisibles, profondément trahies et plus jugées par ACC que leurs collègues masculins.
De nombreuses anciennes combattantes nous disent qu'au moment de leur libération des Forces canadiennes, elles étaient extrêmement épuisées physiquement et mentalement, parce qu'elles avaient dû faire deux fois plus d'efforts pour gagner la moitié seulement du respect que leurs homologues masculins recevaient. Elles étaient tellement épuisées qu'elles étaient incapables de gérer efficacement leur propre vie et elles s'effondraient complètement. De nombreuses anciennes combattantes nous ont dit que le temps qu'elles avaient passé dans les Forces canadiennes les avait blessées, mais que quand elles s'en plaignaient à ACC, on ne faisait que jeter du sel sur leurs plaies.
De nombreux anciens combattants nous disent que leur dysfonction érectile est une affection admissible à la pension par l'ACC. D'un autre côté, de nombreuses anciennes combattantes nous disent qu'elles souffrent de dysfonction sexuelle, mais que le Ministère refuse de reconnaître leur état. Certaines d'entre elles nous ont dit que lorsqu'elles décrivaient leur situation ou leurs symptômes aux fournisseurs de soins ou aux gestionnaires de cas d'ACC, on leur répondait « c'est tout dans votre imagination » ou « vous en faites, des histoires! » Les hommes vétérans ne nous ont jamais dit qu'on les avait accusés de faire des histoires.
Voici quelques recommandations que nous voudrions vous présenter pour améliorer l'expérience des femmes vétérans.
Notre première recommandation s'adresse aux Forces canadiennes et non à ACC. On dit que prévenir vaut mieux que guérir, alors si l'on ajoutait à la formation de base une définition de l'inconduite sexuelle et du harcèlement sexuel, on préviendrait peut-être certains traumatismes sexuels chez les militaires. Je sais bien qu'il est bête de penser que l'on peut enseigner aux gens à se comporter avec bienséance, mais malheureusement, je pense bien que dans ce cas, il faut le faire.
Ensuite, le ministère a créé six groupes consultatifs, mais aucun d'entre eux ne cible particulièrement les anciennes combattantes. Il faudrait en créer un. Il est important qu'ACC écoute les femmes vétérans, mais en choisissant une bonne représentation de ces femmes. L'an dernier, ACC a tenu un forum des femmes et des vétérans 2ELGBTQI+, qui consistait en une série de discussions en groupes. Il y avait 11 anciens combattants et membres actifs des Forces canadiennes dans les divers groupes d'experts. L'un était un sergent à la retraite, et l'autre un caporal-chef à la retraite, les autres étaient tous des officiers. Je ne pense pas que ce soit une représentation réaliste de l'expérience des anciennes combattantes.
Enfin, une chose m'a frappée la semaine dernière pendant que je préparais un rapport pour ACC dans le cadre de notre demande de financement du Fonds pour le bien-être des vétérans et de leur famille. Ce rapport comprend une question, qui se trouve déjà dans la demande de financement initiale, au sujet de l'analyse comparative entre les sexes Plus. En relisant cette question, je me suis dit que, pour corriger toutes les incohérences et toutes les lacunes de sa connaissance des expériences qu'ont vécues les anciennes combattantes, ACC devrait peut-être appliquer l'ACS+ à ses propres politiques et programmes.
Merci à tous pour votre attention. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à tous d'être venus aujourd'hui. Je suis convaincue que les commentaires que nous entendons aujourd'hui enrichiront profondément cette étude.
Je vais commencer par notre amie Mme Deb Lowther, de VETS Canada.
Merci pour tout le travail que vous accomplissez depuis 2010. Je remarque que vous avez commencé par offrir des services aux sans-abri et qu'ensuite, vous avez élargi vos services pour aider les personnes qui ont des besoins financiers ou des problèmes de santé mentale. Vous aidez surtout les femmes, mais aussi les autres gens.
Avez-vous observé si ces deux besoins jouent un rôle dans l'itinérance? S'agit‑il du fameux problème de l'œuf et de la poule? Qu'avez-vous appris depuis que vous fournissez ces services?
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Tout d'abord, les lésions dues au surmenage sont évitables. Elles se produisent au fil du temps. Nous aurions de nombreuses occasions d'intervenir pour éviter qu'elles ne causent de graves problèmes.
Elles affectent plus les femmes que les hommes. Dans les Forces armées canadiennes, nous comptons 76 % des femmes, mais à peine plus de 70 % des hommes. Cet écart ne semble pas très important, mais il est très marqué dans certaines catégories de rôles professionnels.
Toutes les tâches que les femmes doivent effectuer ne sont pas conçues pour elles. On retrouve ce même problème dans d'autres contextes, comme chez les femmes qui utilisent un clavier. Les claviers ont été conçus pour les mains d'un homme. Les femmes doivent étirer leurs doigts. Elles sont plus susceptibles de développer le syndrome du canal carpien, même dans un contexte non militaire.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins qui se sont joints à nous aujourd'hui, en ligne et en présentiel. Je remercie aussi tous les invités.
Par l'entremise du président, j'aimerais adresser ma première question à Mme Edwards.
Merci d'être venue.
Vous avez concentré vos travaux de recherche sur les risques que courent les femmes militaires en service après avoir accouché et en assumant certaines tâches professionnelles. Des témoins nous ont souligné le besoin de mener plus d'études de recherche sur les femmes en service et sur les anciennes combattantes des Forces canadiennes. Pourriez-vous nous en dire davantage sur les études que vous avez effectuées à ce sujet?
Que pouvons-nous faire pour améliorer la façon de traiter les anciennes combattantes?
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Tout d'abord, nos systèmes n'ont pas été conçus pour soutenir les femmes qui font carrière dans les Forces canadiennes pendant toute leur vie professionnelle. Quand le système médical a été mis sur pied, on n'a pas pensé à la reproduction féminine. Les mesures de soutien actuelles n'en tiennent donc pas compte.
Une proportion de 6,7 % des membres des Forces canadiennes ont reçu du soutien à l'entraînement physique pendant ou après une grossesse, ce qui comprend toute la grossesse et la période postnatale. Elles peuvent prendre un congé d'un an ou de 18 mois après l'accouchement si elles le désirent. C'est à elles de décider quand elles retourneront au travail. Elles doivent réussir leur test d'évaluation physique FORCE — notre norme de condition physique — pour être déclarées aptes au déploiement.
Nous remarquons qu'après leur grossesse, comme à la suite d'une blessure, d'ailleurs, leur condition physique s'est amoindrie. Elles doivent donc laisser à leur corps le temps qu'il lui faut pour se remettre et regagner la capacité d'effectuer leurs tâches comme avant la grossesse.
En se préparant à passer le test FORCE, ces femmes doivent aussi s'adapter aux nouvelles tâches de leur vie. En fait, la plupart du temps, elles assument les tâches du parent principal. Autrement dit, elles s'occupent presque entièrement de leurs enfants. Si leur partenaire est aussi dans les forces armées, il est probablement déployé ailleurs. Ces femmes sont donc obligées de se préparer physiquement pour un examen qui peut ou non correspondre aux fonctions de leur emploi. Elles doivent ensuite se préparer aux tâches de leur travail. Elles font tout cela sans soutien spécialisé.
La plupart de ces femmes n'ont jamais suivi de programme de kinésithérapie ou de physiothérapie — on ne s'attendrait d'ailleurs pas à cela. Leurs fournisseurs de soins n'ont pas suivi de formation en santé des femmes, alors quand elles leur expliquent qu'elles pissent dans leurs culottes quand elles font du jogging, ils leur répondent que c'est tout à fait normal. Pendant leur formation, on ne leur a jamais expliqué qu'au bout de six semaines, si la femme reprend lentement son programme de jogging tout en suivant une physiothérapie du plancher pelvien, cette incontinence ne sera pas normale du tout. Les femmes font parfois de l'incontinence urinaire après un accouchement, mais ce n'est pas normal.
Nous n'avons pas de soutien médical auquel poser nos questions importantes. Je m'éloigne un peu du sujet, mais je parle aussi des exigences physiques des différentes professions.
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Quels effets cela aurait‑il sur les vétéranes?
Imaginez que vous vous présentez chez votre médecin pour lui décrire des symptômes qui vous font penser que vous avez un problème. L'incontinence urinaire est un excellent exemple. On nous dit que cela arrive à tout le monde, alors nous décidons tout simplement de porter une couche pour travailler, parce qu'au travail, il faut courir et sauter dans des tranchées tout en portant un sac à dos, ce qui exacerbe le dysfonctionnement pelvien. Nous nous plaignons ensuite d'un mal de dos que nous n'avions jamais eu avant la grossesse. De nouveau, le médecin nous répond qu'il arrive à tout le monde d'avoir parfois mal au dos.
En fin de compte, à quoi bon? Vous allez retourner voir les médecins pour qu'ils vous répètent que ce n'est pas grave, qu'ils ne peuvent rien faire pour vous parce qu'il arrive à tout le monde d'avoir mal au dos, alors cessez de vous plaindre? Vous allez continuer à essuyer des rejets et à vous faire dire que votre douleur n'a rien de grave?
Si je pissais dans mes culottes tous les jours au travail, je ne voudrais plus y retourner, n'est‑ce pas? Je ne sais pas si je suis la seule à ressentir cela, mais… si l'on offre d'autres solutions et du soutien aux civils, pourquoi ne m'en offre‑t‑on pas à moi?
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En fait, il y a très peu d'études axées sur les Canadiennes. À l'heure actuelle, on prend certaines mesures, mais très peu. Le ministère des Anciens Combattants utilise un système de classification différent pour le diagnostic que la classification internationale des maladies, qui est utilisée par notre système de soins de santé au Canada et aussi par les Forces armées canadiennes. Cela complique l'examen des problèmes, qu'ils soient liés ou non à la santé des femmes.
Pour ce qui est des définitions de la santé des femmes, nous travaillons avec un système médical qui n'offre pas de formation précise sur la santé des femmes. Ensuite, il est interprété par des fonctionnaires d'ACC qui n'ont pas de formation médicale, alors ils utilisent des définitions différentes. Alors même avant de lancer nos études de recherche, nous devons harmoniser toutes les définitions. Ensuite, nous devons comprendre la situation de nos femmes à l'armée, et aussi de celles de la GRC. En fait, leur situation n'est pas la même. Elles doivent répondre à des exigences très différentes. Les mesures de soutien auxquelles elles ont accès sont très différentes.
Nous devons comprendre les lésions et les problèmes de santé physique des militaires et des membres de la GRC. Nous pourrons ensuite mettre en place des systèmes de soutien à la recherche.
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Je ne peux pas vous donner de chiffres, parce que nous n'avons pas posé ces questions et nous n'avons pas fait de suivi. Cependant, je connais un certain nombre de personnes — ce sont seulement les personnes à qui j'ai parlé, mais j'en suis une aussi — qui ont subi cette intervention chirurgicale afin de pouvoir faire leur travail.
Nous ne posons pas de questions sur les lésions aux seins en formation de base. Nous ne posons pas de questions sur les lésions aux seins quand nous consultons un médecin. Dans le domaine du sport, nous le faisons ou nous avons commencé à le faire. Les contusions et l'ischémie, ou l'absence de circulation sanguine dans cette région qui cause la mort des tissus sont beaucoup plus courantes qu'on ne le penserait. Peut-être que si vous enfiliez un de ces gilets, vous comprendriez.
Je ne peux pas vous donner de chiffres, mais c'est une situation alarmante chez les femmes auxquelles je fournis du soutien. Encore une fois, je ne suis qu'une personne parmi tant d'autres. Je n'ai vécu qu'en Ontario et au Nouveau‑Brunswick. Je n'ai fourni du soutien que dans des bases de ces provinces.
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Nous avons une équipe chargée de cette tâche. Elle suit une approche d'inclusion des femmes. Je ne sais pas vraiment ce que cela signifie, mais elle n'examine pas les gilets conçus pour des femmes. Nous n'avons pas non plus de sacs à dos conçus pour des femmes.
Les épaules des femmes sont plus étroites que celles des hommes, alors les courroies devraient être plus étroites. Les sacs à dos que nous avons sont conçus pour le corps d'un homme, alors ils sont plus larges. Imaginez devoir porter 80 livres sur le dos dans une position qui n'est pas idéale pour vous. Le sac pousse notre tête vers l'avant, ce qui provoque un stress supplémentaire sur notre colonne cervicale.
Nous avons aussi le gilet pare-balles qui n'est pas conçu pour une poitrine de femme. La plupart du temps, il s'ajuste très mal. L'armée n'a que la taille moyenne, alors les femmes qui sont très petites sont « de petites cibles ». Voilà ce qu'on a répondu à l'une de mes amies. Elle était en déploiement dans une zone de combat actif, et aucun gilet pare-balles ne lui allait. On lui a dit: « C'est une bonne chose que tu sois une petite cible ».
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Permettez-moi de vous décrire un cas. En 2016, une militaire a commencé à ressentir une douleur du côté gauche de sa cage thoracique. Au début, elle ne s'est pas trop inquiétée, jusqu'à ce qu'elle commence à se sentir à bout de souffle. Elle s'est donc rendue à la salle d'inspection médicale pour un suivi. Elle ressentait une douleur aiguë à la poitrine. Au moment de son admission, le personnel médical a examiné... Je vous passe un lot de détails.
Quelques jours plus tard, son état s'est aggravé. Elle avait mal au bras gauche et sa douleur à la poitrine s'était intensifiée. Trois jours plus tard, elle était vraiment mal en point. Elle s'est rendue au dispensaire en larmes en disant qu'elle n'arrivait plus à respirer. Le personnel l'a enfin prise au sérieux et l'a envoyée faire des prises de sang, des radiographies et une échographie.
Les résultats des analyses sanguines ont sûrement sonné l'alarme parce que le personnel l'a envoyée dans un hôpital de Fredericton où on lui a fait un examen de tomodensitométrie et un test d'imagerie par résonnance magnétique. Durant la nuit, son état s'est détérioré. On lui a dit de se présenter à l'urgence s'il s'aggravait. Elle a fini par se présenter à l'urgence et a été immédiatement admise aux soins intensifs où on lui a diagnostiqué une embolie pulmonaire.
C'était sa première véritable expérience avec le système de santé de l'armée, à part les examens médicaux de routine. Aujourd'hui, elle a très peu confiance dans les soins qui lui ont été prodigués par le personnel militaire.
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Merci, monsieur le président.
Merci à tous les témoins d'être parmi nous.
C'est bouleversant de constater, encore et encore, à quel point les vétéranes qui ont servi notre pays sont invisibles. C'est encore plus évident aujourd'hui.
Madame Edwards, je vais commencer par vous. Dans votre allocution préliminaire, vous avez dit que 6,7 % des membres des FAC qui étaient enceintes durant leur service ont suivi un entraînement physique spécialisé, ce qui veut dire que de nombreuses autres n'ont pas eu cette chance. Vous avez dit avoir été bouleversée d'apprendre cela. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi cela vous a bouleversée? J'espère que vous pourrez relier votre réponse à ce que vous avez dit précédemment au sujet des fuites urinaires.
Pouvez-vous nous donner plus de précisions? Y a‑t‑il des interventions médicales particulières susceptibles de soulager les femmes en service qui ont ce problème? Ce problème est‑il suffisamment documenté afin qu'il soit mieux compris quand les femmes quittent le service?
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Vous allez probablement devoir répéter cette deuxième partie de la question, mais je vais commencer par répondre à la première. Pourquoi j'ai été bouleversée d'apprendre que seulement 6,7 % des femmes suivaient un entraînement spécialisé?
La publication des lignes directrices canadiennes en matière d'activité physique pendant la grossesse a été une première mondiale et ces lignes directrices ont été adoptées par de nombreux pays. Comme nous sommes des chefs de file en la matière, il serait normal de penser que nos propres forces armées adoptent ces lignes directrices, cela va de soi.
Nous recommandons aux femmes enceintes de faire 150 minutes d'exercice par semaine. Le programme d'entraînement physique de la moitié des militaires enceintes n'a pas été modifié — elles ont simplement continué comme avant — et 27,6 % des femmes ont carrément interrompu leur entraînement physique . Il ne faut donc pas s'étonner qu'elles aient des problèmes à leur retour en service et qu'elles aient du mal à satisfaire aux normes de condition physique si elles ne reçoivent pas de soutien durant leur grossesse.
Selon une étude menée à l'Université de l'Alberta, un certain nombre de femmes font jusqu'à 80 % des répétitions de lever de poids durant leur entraînement. De toute évidence, elles s'étaient entraînées avant leur grossesse, mais elles peuvent continuer à soulever des poids. Il est très décevant de voir que seulement 6,7 % des femmes ont reçu un soutien; ce l'est autant plus parce que nous savons qu'il existe des normes physiques relatives à l'emploi et qu'un adjoint aux services de santé est censé les soutenir tout au long de cette période.
Dans le cadre de cette recherche, j'ai appris que plus de 90 % des femmes souhaitaient avoir un soutien et l'auraient accepté s'il leur avait été offert. Pour être juste, je dois dire que des projets ont été lancés pour régler ce problème, mais en ce qui a trait aux vétéranes, nous ne pouvons examiner ce qui se passe actuellement pour elles. Nous devons examiner les systèmes qui étaient en place durant leur service et les répercussions que ces systèmes ont sur leur santé aujourd'hui.
Concernant l'incontinence urinaire et les troubles du plancher pelvien, divers traitements sont possibles, notamment la rééducation pelvienne, un traitement assez courant. Il n'est pas nécessaire d'avoir donné naissance à un enfant pour bénéficier de traitements de rééducation pelvienne. Ces traitements soignent et atténuent les symptômes de la dysfonction du plancher pelvien, qu'ils soient dus à un prolapsus des organes pelviens ou à une incontinence fécale ou urinaire. Il est également bénéfique de suivre ces traitements durant la grossesse et après l'accouchement.
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Prenons seulement l'exemple des troubles du plancher pelvien qui sont répertoriés dans la liste de contrôle d'ACC. C'est un document volumineux. Le ministère a des tableaux de critères et les vétéranes peuvent cocher ceux qui s'appliquent à elles. À ma connaissance, toutefois, personne n'a jamais déposé de réclamation pour ce problème pour la simple raison que nous... La recherche menée au laboratoire Adamo sur la dysfonction du plancher pelvien chez des membres des Forces armées canadiennes n'a été publiée que l'an dernier.
Prenons le cas d'une militaire du rang — par exemple une technicienne aux véhicules qui passe beaucoup de temps à monter dans un véhicule et à en descendre. Cette personne sera donc plus à risque d'éprouver des troubles du plancher pelvien, qu'elle ait enfanté ou non. Si elle a déjà eu un bébé, la probabilité de souffrir d'une incontinence urinaire est pas mal élevée.
Il n'existe malheureusement pas aucune donnée ou étude pour étayer une demande d'indemnité dans ces cas. Si nous regardons la situation qui prévaut dans d'autres pays, on pourrait avancer que les règles et les exigences professionnelles sont différentes. Soit aucune étude n'a été menée, et c'est l'excuse qui a été avancée, soit aucune étude n'a été menée sur des Canadiennes, mais que d'autres chercheurs en ont mené. C'est donc peut-être la même chose.
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Nous avons appris beaucoup de choses très troublantes aujourd'hui. Je remercie particulièrement Mme Edwards pour son témoignage.
Vous nous avez fourni beaucoup de renseignements très précieux, y compris le fait que les femmes finissent par altérer leur corps parce que les FAC négligent de modifier l'équipement dont elles se servent. Certaines de ces révélations sont incroyablement choquantes. Je ne sais pas si j'ai d'autres questions, parce que je trouve que vous avez très bien répondu aux questions que je voulais poser. Je tiens vraiment à vous remercier pour vos très précieux et très exhaustifs témoignages.
J'aimerais revenir sur un autre sujet que vous avez soulevé aujourd'hui, madame Lowther.
Vous avez dit qu'en raison de la hausse généralisée des prix, des membres en service dans nos forces armées viennent chercher de l'aide chez vous. Je veux être certain d'avoir bien compris, car je trouve tout à fait aberrant de vous entendre dire que l'inflation est si forte au Canada que des membres actifs des Forces armées canadiennes n'ont pas les moyens de payer leurs factures et doivent s'adresser à vous pour obtenir de l'aide.
Nous avons aidé des militaires en service qui vivaient dans leur auto à se trouver un logement temporaire — à l'hôtel — et ensuite à se trouver un logement abordable. Un de nos bénévoles est chargé de les aider dans leur recherche diligente d'un logement. Les logements ne manquent pas, à condition d'avoir le temps d'en chercher. C'est difficile, mais...
Nous offrons ce genre de soutien. Nous leur offrons des bons pour la nourriture et aussi pour l'essence pour leur transport. C'est le genre de soutien que nous offrons aux membres en service qui vivent dans leur auto.
Nous aidons également d'autres vétérans à payer leur loyer pour leur éviter une éviction. Nous les aidons également avec la nourriture, les vêtements, les services publics, ce genre de choses. Nous faisons notre possible pour leur éviter de perdre leur logement.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je profite de cette courte minute pour remercier les témoins d'être ici aujourd'hui.
J'ai un bref message pour vous, madame Edwards. J'ai appris que vous avez reçu le prix Sir Frederick Banting, qui est natif de ma circonscription. Il y a deux semaines, j'étais là pour le célébrer 100e anniversaire du prix Nobel. Je vous félicite de cet honneur.
J'ai une question pour vous. Nous entendons beaucoup parler de ces blessures dues à des gestes répétitifs chez des femmes qui ont servi au sein des FAC. Rapidement, ne pensez-vous pas qu'il serait avantageux de dresser une liste présomptive de blessures — je sais que cela pose des problèmes aux compagnies d'assurances et je fais affaire avec l'une d'elles en ce moment —, pour faire en sorte que certaines demandes de prestations d'invalidité présentées par des vétéranes soient automatiquement approuvées? Qu'en pensez-vous?
Merci à tous les témoins.
Madame Lowther, c'est vous qui avez dit, je pense, que ce serait une bonne chose que la ministre mette sur pied un comité consultatif pour les vétéranes. Nous sommes tous bouleversés par ce que nous avons entendu aujourd'hui. Vous avez aussi beaucoup parlé de l'importance de la prévention. Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire, en ce qui concerne les traitements prodigués au sein des FAC, qu'après leur départ de l'armée, il est difficile de comprendre ce qui a fait défaut dans le traitement que les vétéranes ont reçu.
J'aime bien l'idée lancée par M. Dowdall de recourir à un diagnostic présomptif, parce que, comme vous avez dit, le sexisme est incrusté dans les services de soins de santé de l'armée et aucun membre du personnel médical n'a suivi de formation sur la santé des femmes. C'est pour cette raison que personne ne sait comment retirer un dispositif intra-utérin. Si personne ne pose de questions quand une militaire consulte, cela veut dire que le problème n'est pas documenté. Et s'il n'est pas documenté, ACC rejettera la demande. Est‑ce bien ce que vous avez dit?
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Je suis physiologue, mon domaine est donc le corps humain. Je ne suis pas psychologue.
Une partie de ma recherche porte sur la corrélation entre la dépression post-partum et le risque de blessure. Il existe une corrélation entre la dépression post-partum et une sensibilité accrue aux blessures causées par des gestes répétitifs. Nous constatons également un lien entre une fausse couche et une vulnérabilité accrue aux blessures musculo-squelettiques.
Je pense que c'est vraiment une bonne idée d'offrir aux femmes un soutien en santé mentale parallèlement à un soutien en santé physique durant la grossesse et la période postnatale afin que nous puissions vraiment détecter si elles ont vécu un traumatisme sexuel dans le cadre de leur service militaire, ce qui est tout aussi important, et si elles souffrent de dépression post-partum. Si les praticiens n'ont pas suivi de formation spécialisée en santé des femmes, ils ne poseront aucune question ou penseront que c'est normal. Bien que courante, la dépression post-partum n'est pas normale. Il existe beaucoup de programmes de soutien et de pratiques fondées sur des données probantes qui peuvent aider les femmes à traverser cette période.
Je le répète, si personne ne pose de questions...
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Je n'ai pas entendu votre question au complet, mais je pense avoir saisi ce que vous dites.
Vous vous demandez qui devrait être responsable de la recherche sur la santé physique des vétéranes. Si c'est bien cela, nous devons d'abord mettre en place un système de surveillance des blessures au sein des FAC afin que, lorsque ces femmes quittent le service, nous puissions comprendre ce qui leur arrive. Si leurs problèmes de santé n'ont pas été documentés dans leur dossier médical...
Soixante-quinze pour cent des blessures dues à des gestes répétitifs ont été signalés par des femmes. Cela veut dire que le quart des blessures ne sont pas signalées. C'est beaucoup. Si nous connaissons les tendances en matière de blessures pour chaque métier militaire, nous pouvons alors supposer que la probabilité qu'une blessure donnée soit due au travail accompli dans un métier donné est assez élevée. Je pense que nous devons répertorier les blessures qui surviennent au sein des FAC.
Il y a aussi ACC. Dès le premier jour de son instruction de base, un membre des FAC est quelqu'un qui, un jour, pourrait avoir besoin d'ACC. Pourquoi ne pas créer un lien avec le ministère dès le départ, au lieu d'attendre que le militaire soit blessé ou libéré pour l'établir? Il serait tout à fait logique qu'ACC participe à la surveillance des blessures qui se produisent pendant le service; le ministère pourrait aussi documenter les blessures qui lui sont signalées au fur et à mesure. Le personnel pourrait ainsi commencer à intervenir dès que les tendances apparaissent.
Je le répète, nous devons commencer à faire le suivi de ce que vivent nos militaires et nos vétérans avant de pouvoir commencer à élaborer des solutions.
Je parle de la formation du personnel médical. Les techniciens médicaux devraient recevoir une formation sur la santé des femmes. Ce sont eux qui soutiennent les femmes en service. Ils sont leurs intervenants de première ligne. Nos médecins aussi devraient suivre cette formation... Si nous ne voulons pas affecter des ressources pour cela, il faut alors embaucher un spécialiste de la santé des femmes. Dans certaines bases, il y avait une infirmière praticienne sur place. Beaucoup de bases n'en ont plus. Cela pourrait être une solution de rechange. Si un médecin n'est pas à l'aise pour poser ce genre de questions, il faut alors désigner quelqu'un d'autre pour le faire.
Les dirigeants non plus ne sont pas formés pour soutenir les femmes en service. Ils ne savent pas quel soutien offrir à une femme qui souffre d'une dépression post-partum à son retour en service. Les dirigeants devraient le remarquer quand leurs militaires ne vont pas bien. Mais s'ils ne savent pas quelles questions poser, ils n'en poseront pas. Que devons-nous faire pour soutenir une femme qui...?
Un autre problème est le déficit énergétique relatif, appelé RED‑S. Les femmes courent un plus grand risque d'en souffrir. Toutes les femmes qui ont une fille ou qui ont pratiqué des sports savent bien qu'il s'agit là d'un problème fréquent chez les athlètes féminines.
Les femmes qui servent dans l'armée se classent dans la même catégorie. Elles courent un risque accru d'en souffrir, ce qui accroît leur risque de blessures dues à des gestes répétitifs, notamment de fractures de stress. Les femmes sont plus exposées au risque d'avoir une fracture de stress pelvienne ou une fracture de stress de la hanche durant leur entraînement de base et tout au long de leur carrière. Si personne ne leur demande si leur cycle menstruel est régulier... En fait, il est déjà trop tard pour poser cette question. Nous constatons que la physiologie change avant l'apparition d'un symptôme indiquant la possibilité d'un déficit énergétique relatif. Les cycles menstruels irréguliers posent également un risque accru de blessure. Cela se répercute également sur la santé génésique.
:
Merci beaucoup, madame Edwards.
[Français]
Cela conclut l'heure qui nous était impartie pour discuter des expériences vécues par les vétéranes.
Je voudrais, au nom des membres du Comité, remercier les témoins d'être venues.
Nous recevions Mme Chris Edwards, qui témoignait à titre personnel, ainsi que Mme Mélanie Morin‑Pelletier, du Musée canadien de la guerre, et Mme Debbie Lowther, présidente‑directrice générale et cofondatrice de Veterans Emergency Transition Services.
Nous allons suspendre la séance pendant deux minutes, le temps de saluer les témoins et de passer à la deuxième heure.
:
Nous reprenons la séance.
[Traduction]
Mesdames et messieurs, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le jeudi 9 mars 2023, le Comité va consacrer sa deuxième heure à son étude sur le monument commémoratif national de la mission du Canada en Afghanistan.
[Français]
Avant de souhaiter la bienvenue à mes collègues, je voudrais tout simplement faire un petit rappel au sujet des règlements.
Lors de la première réunion du Comité cette session, les motions de régie interne suivantes, parmi d'autres, ont été adoptées:
Que seulement le greffier du Comité soit autorisé à distribuer aux membres du Comité des documents et seulement lorsque ces documents existent dans les deux langues officielles, et que les témoins en soient avisés.
Que tous les documents présentés dans le cadre des travaux du Comité qui ne proviennent pas d'un ministère fédéral, du bureau des députés, du bureau du greffier du comité et du bureau de l'analyste ou qui n'ont pas été traduits par le Bureau de la traduction soient préalablement soumis à une révision linguistique par le Bureau de la traduction avant d'être distribués aux membres.
C'est ce qu'on a vu récemment. On ne peut pas empêcher des personnes d'envoyer directement des courriels aux autres membres, mais il est important que ces courriels soient traduits pour être officiels. Si le rapport en fait mention, on pourra donc citer ces rapports par la suite.
Cela dit, je veux saluer notre collègue M. Paul‑Hus, qui remplace M. Dowdall. De plus, j'aimerais saluer les témoins qui sont ici parmi nous pour cette deuxième heure.
Mesdames, messieurs, nous recevons l'honorable Ginette Petitpas Taylor, ministre des Anciens Combattants, et l'honorable Pascale St‑Onge, ministre du Patrimoine canadien.
Du ministère du Patrimoine canadien, nous recevons également la sous-ministre Mme Isabelle Mondou. Elle est accompagnée de Mme Emmanuelle Sajous, sous-ministre adjointe, Sport, événements majeurs et commémorations.
Nous recevons, du ministère des Anciens Combattants, le sous-ministre, M. Paul Ledwell, qui est un habitué de notre comité, ainsi que Mme Amy Meunier, sous-ministre adjointe, Secteur de la commémoration et des affaires publiques.
Il y aura une période de questions, mais, tout d'abord, les ministres prononceront leur discours d'ouverture.
Je voudrais inviter l'honorable Pascale St-Onge à faire sa présentation.
Vous disposez de cinq minutes.
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Merci, monsieur le président.
Membres du Comité, chers collègues, bonjour.
Je voudrais commencer par souligner que nous sommes réunis sur le territoire traditionnel de la nation algonquine anishinabe.
Je me présente devant vous aujourd'hui à votre demande pour discuter de la sélection du concept pour le Monument commémoratif national de la mission du Canada en Afghanistan.
Ma présentation sera beaucoup plus courte que les cinq minutes que vous m'avez allouées.
Je dois dire que, dans ce projet, le ministère du Patrimoine canadien a joué un rôle d'appui essentiellement administratif.
Le ministère a offert son expertise à Anciens Combattants Canada pour l'organisation du concours de design. C'est donc pourquoi je vais céder la parole à ma collègue la ministre des Anciens Combattants, qui pourra vous expliquer ce qui a amené le gouvernement à prendre cette décision.
Merci beaucoup.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur le président, chers membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître encore une fois devant vous aujourd'hui pour discuter du Monument commémoratif national de la mission du Canada en Afghanistan.
D'octobre 2001 à mars 2014, le Canada a participé à sa mission la plus complexe depuis la guerre de Corée. Plus de 40 000 Canadiens et Canadiennes en uniforme et des centaines de civils et de représentants du gouvernement ont servi en Afghanistan et dans la région environnante, depuis l'envoi des premiers navires jusqu'au retour des dernières troupes.
[Traduction]
Au cours de cette mission, 158 membres des Forces armées canadiennes sont morts tragiquement en service, ainsi que sept civils canadiens. Des milliers d'autres sont revenus blessés physiquement et psychologiquement et bon nombre d'entre eux vivent avec des cicatrices permanentes depuis leur retour.
En 2019, le gouvernement a annoncé qu'un monument national dédié à la mission du Canada en Afghanistan serait conçu et érigé aux Plaines LeBreton, ici même à Ottawa. Le but du projet est d'offrir aux Canadiens un lieu permanent où réfléchir au service, au dévouement et au sacrifice de ceux qui ont servi en Afghanistan et au soutien qui leur est offert au pays.
[Français]
Anciens Combattants Canada et le ministère du Patrimoine canadien ont lancé conjointement un concours de design au mois d'août de la même année. Des équipes d'artistes professionnels, d'architectes et d'architectes paysagistes ainsi que d'autres professionnels du design urbain ont été invités à soumettre leurs références et des exemples d'anciens projets afin que ceux-ci soient pris en considération pour ce monument.
Dès le début, il était entendu que les vétérans et les vétéranes, les familles des militaires tombés au combat, les militaires en service et le grand public seraient invités à examiner les propositions des finalistes avant qu'un concept de design soit choisi par un jury d'experts.
À la fin, cinq équipes finalistes ont été retenues. Après le dévoilement de leurs concepts de design, en mai 2021, les Canadiens ont eu l'occasion de donner leur avis sur leur concept de design préféré parmi les cinq finalistes choisis par le jury.
[Traduction]
Après l'analyse de 12 048 réponses à un sondage en ligne valide, c'est la proposition de l'équipe Stimson qui a été retenue; c'est celle qui a suscité le plus d'écho chez les répondants, avec un pourcentage d'appuis oscillant entre 52 et 64,8 % pour l'ensemble des questions. Autrement dit, le sondage en ligne a fait émerger un concept privilégié, du moins parmi les vétérans, les militaires qui ont participé à la mission du Canada en Afghanistan, ainsi qu'auprès des membres de leur famille, des membres actifs des FAC et du grand public. Ces résultats irréfutables ont incité le gouvernement du Canada à écouter les vétérans et toutes les personnes qui ont un lien avec la mission en Afghanistan et à choisir leur concept préféré.
[Français]
C'est sur la base de ces informations que, après un examen attentif, le gouvernement du Canada a décidé de choisir le concept de design de l'équipe Stimson pour le Monument commémoratif national de la mission du Canada en Afghanistan et que ce choix a été annoncé au Musée canadien de la guerre au mois de juin de cette année.
Nous sommes reconnaissants envers les cinq équipes pour le temps et les efforts qu'elles ont consacrés à cet important projet. Nous apprécions et respectons profondément le travail effectué par les membres du jury qui a examiné les nombreuses candidatures avant de sélectionner les cinq designs finalistes, puis de les évaluer.
Le professionnalisme et l'expérience personnelle du jury ont été grandement appréciés et ont fait partie intégrante du processus. Toutefois, à mesure que le processus avançait, il est devenu clair que la contribution des vétérans et des vétéranes ainsi que des personnes ayant un lien avec la mission devait être le facteur décisif dans le choix du concept de design.
[Traduction]
Monsieur le président et distingués membres du Comité, à l'approche de la Semaine des anciens combattants et du jour du Souvenir, dans peu de jours, les Canadiens seront bientôt invités à réfléchir aux sacrifices que tant de militaires ont faits au nom de la paix, de la liberté, des droits de la personne et de la démocratie dans le monde.
En Afghanistan, nos troupes ont subi des pertes de vie dévastatrices et des blessures physiques et psychologiques débilitantes.
[Français]
Nous avons, envers ces vétérans et ces vétéranes, une dette que nous ne pourrons jamais entièrement rembourser. C'est donc la moindre des choses de choisir le design qui correspond le mieux au monument que souhaitent voir ériger les vétérans et les vétéranes ainsi que les personnes liées à la mission en Afghanistan. C'est une excellente façon de leur exprimer notre gratitude pour leur service.
Je vous remercie encore une fois de m'avoir invitée à être des vôtres aujourd'hui.
Nous avons hâte de répondre à vos questions.
:
Je vous remercie beaucoup de vos interventions. Dans les deux cas, vous n'avez pas utilisé la totalité des cinq minutes. Un plus grand nombre de questions pourront donc être posées.
J'aimerais inviter les membres du Comité à consulter leur chronomètre de façon à savoir combien de temps il leur reste. En effet, ils ne me regardent pas souvent quand je leur fais signe à cette fin.
Madame Petitpas Taylor, comme vous parlez extrêmement vite, je vous demanderais de ralentir votre débit pour permettre aux interprètes de vous suivre.
Sur ce, nous allons procéder comme lors de la séance précédente, où il y a eu de beaux échanges, sans interruption.
Pour cette première série de questions, j'invite donc sans plus tarder M. Paul‑Hus à prendre la parole pour six minutes.
:
Merci, monsieur le président.
Bonjour, mesdames les ministres et membres du Comité.
Nous sommes ici aujourd'hui pour parler principalement du processus de sélection du Monument commémoratif national de la mission du Canada en Afghanistan.
Je ne dirais pas que ce processus a été bâclé. Au contraire, ce processus a été très bien fait par les membres du jury et de l'équipe de professionnels qui ont fait leur travail et qui ont sélectionné l'équipe Daoust, du Québec, avec Luca Fortin, un artiste de la région de Québec d'où je viens.
La grande surprise, le choc, a été de voir que la décision a été changée. Selon nous, la décision de changer d'équipe et de choisir l'équipe Stimson était une décision arbitraire de la part du gouvernement. On essaie de comprendre cela, mais personne ne le comprend. La communauté ne le comprend pas non plus. Des entreprises qui travaillent dans le monde du design aux niveaux national et international ne le comprennent pas. Personne ne comprend comment ce travail, fait par un jury professionnel, a pu être repoussé du revers de la main.
Vous avez parlé des vétérans. Je suis un ancien combattant. Vous n'avez pas besoin de me faire de dessin sur le monde des anciens combattants; je le connais. Nous sommes ici, aujourd'hui, pour comprendre la façon dont la décision a été prise.
Vous avez parlé du sondage. La firme Léger a fait une étude détaillée qui a complètement démoli ce sondage. J'ai vu le tableau des chiffres et des données qui ont été collectées. C'est n'importe quoi en matière de statistiques professionnelles. On ne peut pas se fier à cela pour prendre une telle décision et mettre complètement de côté un jury professionnel qui a fait son travail pour choisir le projet d'une autre équipe.
Madame St‑Onge, à ce propos, j'aimerais revenir sur ce que vous avez dit plus tôt. Vous avez dit que le ministère du Patrimoine canadien s'en lavait les mains, car le ministère jouait un rôle plutôt administratif. Je rappellerai que votre prédécesseur, le ministre Rodriguez, au début de l'année 2023, a reçu un mémo de la sous-ministre adjointe lui mentionnant qu'il fallait avoir sa permission pour autoriser un changement. Bien sûr, je ne vois pas toutes les parties les plus intéressantes du mémo, car elles sont évidemment caviardées. Quoi qu'il en soit, il fallait la permission du ministre du Patrimoine canadien.
On parle d'artistes et de designers. Vous êtes responsable de tout ce qui est monument au Canada. On ne peut pas repousser un tel projet du revers de la main. N'avez-vous pas un avis quant à cette façon de faire?
:
Je pense que ce doit être très clair. Nous avons parlé de sondage, de questionnaire, de consultation. Nous n'avons jamais dit que c'était un sondage scientifique.
Nous voulions entendre l'avis des vétérans, parce que c'est quand même un monument commémorant la mission canadienne en Afghanistan. Le ministère des Anciens Combattants est le chef de projet dans le cas de ce monument.
D'abord, nous avons envoyé des messages aux vétérans qui ont accès à Mon dossier ACC. Nous voulions nous assurer que les vétérans étaient au courant de l'existence de la consultation.
Ensuite, nous avons envoyé un message aux familles qui ont perdu des proches lors de la mission en Afghanistan. Nous avons aussi envoyé des messages à tous les intervenants qui travaillent auprès des vétérans, comme les légions canadiennes, pour nous assurer que le message serait transmis.
À notre grande surprise, plus de 12 000 Canadiens ont répondu à ce sondage.
:
Merci, monsieur le président.
Je souhaite la bienvenue à Mmes les ministres, ainsi qu'à leurs équipes.
Je vais poser toutes mes questions à la ministre Petitpas Taylor. Je veux commencer par le processus, pour mieux comprendre pourquoi nous sommes ici. Vous avez dit qu'un jury avait choisi un gagnant parmi les cinq candidats, mais qu'à la suite d'une consultation lancée par le ministère, les vétérans avaient choisi un autre concept.
Je comprends les critiques de M. Paul‑Hus et de M. Desilets concernant cette consultation, mais je crois que nous sommes ici, au Comité permanent des anciens combattants, pour faire avancer les dossiers qui sont importants pour les anciens combattants, et il ne fait aucun doute que c'est précisément votre rôle aussi, madame la ministre.
Les critiques les plus importantes, de l'autre côté, viennent du Québec. Je veux comprendre pourquoi on ne considérerait que le point de vue du jury, et non celui des vétérans. Pouvez-vous m'aider à comprendre cela?
Plus précisément, madame la ministre, pouvez-vous parler des résultats de la consultation que votre ministère a menée, seulement pour ce qui est de la province du Québec? Qu'est-ce qu'on en pensait, au Québec?
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Je vous remercie, monsieur Casey, de cette question.
Je pense qu'il faut reconnaître qu'il est normal que le ministère des Anciens Combattants, lorsqu'il se prépare à créer un nouveau monument, mette sur pied un jury. Par ailleurs, comme chef de projet, le ministère veut aussi toujours prévoir une période de consultation. On peut appeler cela un sondage, un questionnaire ou une consultation, mais nous voulions entendre des vétérans donner leur avis. Le jury a été sélectionné, et nous remercions ses membres pour le travail qu'ils ont fait. Ils ont travaillé d'arrache-pied. Il faut savoir que 25 groupes ont présenté différents concepts. Le jury a beaucoup travaillé pour faire une sélection et réduire ce nombre de candidatures pour en arriver enfin à la liste des cinq finalistes que nous désirions obtenir.
Nous avons ensuite commencé le processus de consultation. Nous voulions entendre l'avis des vétérans, mais aussi celui des Canadiens d'un bout à l'autre du pays. De plus, nous voulions aussi nous assurer d'avoir une bonne représentation des vétérans et des vétéranes, ainsi que de ceux dont des membres de la famille avaient servi au cours de cette mission. Pour ce faire, le ministère des Anciens Combattants a envoyé des messages au moyen de Mon dossier ACC. En tant que membres du Comité, vous êtes certainement très au courant de cela. C'était pour nous assurer que les gens étaient au courant qu'il y avait un sondage.
Nous avons aussi contacté les familles qui ont perdu un ou une proche au cours de la mission en Afghanistan. Nous avons envoyé un message au groupe des intervenants qui travaillent auprès des vétérans pour nous assurer que le message allait être envoyé. À notre grande surprise, comme je l'ai dit, les réponses ont été deux fois plus nombreuses qu'à l'ordinaire pour ce genre de questionnaire. Plus de 10 000 personnes y ont répondu. Un jury et un sondage constituent une pratique habituelle. Ce qui était inhabituel, dans ce cas précis, c'est que le sondage et le jury n'allaient pas dans la même direction. En examinant les résultats du sondage, on constate qu'entre 52 et 62 % des répondants soutenaient le concept Stimson, alors que le concept choisi par le jury, soit celui de l'équipe Daoust, ne recevait que de 23 à 40 % d'appui.
Pour répondre à votre question à propos du Québec, il faut souligner que la grande majorité des Québécois qui ont répondu au sondage ont aussi appuyé le concept Stimson. Les vétérans nous ont dit que ce concept représentait mieux la bravoure, le sacrifice, la perte ainsi que le rôle de la famille.
À titre de ministre des Anciens Combattants, je trouvais très important de m'assurer que nous allions écouter les vétérans. Nous désirions vraiment tenir compte des besoins et de l'avis des vétérans dans la création du Monument commémoratif national de la mission du Canada en Afghanistan. C'est pourquoi nous avons appuyé cette décision.
En tant que ministre des Anciens Combattants du Canada, j'assume pleinement ma décision d'écouter nos vétérans. C'est ma priorité. Voilà donc exactement ce que nous avons fait et les raisons de ce choix.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie nos invités de leur présence.
Madame St‑Onge, vous minimisez beaucoup votre rôle dans tout cela. D'abord, vous êtes aussi responsable. Vous avez mis sur pied le jury. Vous avez sélectionné des experts. Vous avez eu la mainmise sur le sondage. Commençons donc par ça.
Reconnaissez-vous, madame St‑Onge, que votre ministère a demandé un avis juridique au ministère de la Justice du Canada pour justifier le rejet du concept de la firme Daoust?
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Comme toujours, je vais adresser mes questions à la présidence.
Ma première question est la suivante. J'ai lu l'appel de propositions. Ayant dirigé un organisme sans but lucratif pendant de nombreuses années, je connais très bien ce genre de document. Dans celui‑ci, je n'ai rien lu qui expliquait le déroulement du concours, notamment qu'il y aurait une consultation en ligne. On peut lire ceci: « Le jury aura la responsabilité globale de sélectionner le design gagnant, sur la base des notes combinées du jury et des évaluations du comité technique. »
J'aimerais simplement avoir des précisions. Est‑ce qu'un détail m'a échappé? S'il n'y a aucune information dans la demande de propositions à l'intention des soumissionnaires, comment a été prise la décision de lancer un sondage en ligne?
:
Je répète que je n'étais pas là durant ce processus. Ma collègue et moi sommes en poste depuis tout juste trois mois... Bien entendu, nous avons la responsabilité de répondre du mieux possible à vos questions. Je vais quand même céder le micro à ma sous-ministre, parce que je tiens à ce que le processus soit bien expliqué.
Je n'ai qu'un seul commentaire à faire. Pour moi, la priorité absolue était d'écouter les opinions exprimées par la majorité des vétérans qui ont répondu à ce sondage.
C'est le ministre MacAulay qui était en poste à l'époque, et je tiens à répéter que je suis d'accord avec la décision qu'il a prise. Nous ne pouvons pas nous tromper si nous écoutons les points de vue des vétérans. Lorsque les gens me disent que le concept retenu représente pour eux le sacrifice, les pertes subies durant la mission, cela veut beaucoup dire. C'est vraiment pour cette raison que nous avons choisi ce concept plutôt que celui proposé par l'équipe Daoust.
Monsieur Ledwell, vous voulez peut-être...
:
Merci, monsieur le président.
Merci à vous, monsieur Sarai.
Madame Petitpas Taylor, au cours de cette réunion, vous avez été très claire quant au fait que votre préoccupation première était d'entendre l'opinion des anciens combattants. Cependant, la plupart des questions qui vous ont été posées portaient sur le processus.
La dernière fois que vous êtes venue témoigner ici, soit le 19 octobre, il y a seulement 12 jours, mon honorable collègue M. Desilets, du Bloc québécois, pour qui j'ai beaucoup de respect, a dit: « [...] dans ce dossier, il n'est pas question des anciens combattants, selon moi. »
Pouvez-vous réagir à ce commentaire?
Merci, madame la ministre.
J'ai beaucoup entendu parler de cette consultation et de ce sondage, et la commémoration est un rôle important du ministère des Anciens Combattants. La commémoration du sacrifice consenti par les anciens combattants est l'un des piliers d'Anciens Combattants Canada.
Dans le cadre de cette consultation, M. Ledwell a aussi dit que vous aviez consulté des groupes et des personnes-ressources auxquels vous aviez déjà accès, c'est‑à‑dire les anciens combattants, leurs proches et les personnesqui avaient reçu des services destinés aux anciens combattants. a firme Léger aurait-elle facilement accès à ces renseignements? Elle n'y aurait pas accès, car des témoins nous ont déjà expliqué qu'il n'est pas facile de rejoindre les anciens combattants pour obtenir des listes d'anciens combattants. Nous en avons à Anciens Combattants Canada et dans d'autres points de contact.
En quoi une consultation auprès des anciens combattants comme celle qu'a menée le ministère des Anciens Combattants diffère‑t‑elle d'un sondage aléatoire ou d'un sondage effectué par quelqu'un comme Léger, qui n'aurait pas de données spécifiques sur les anciens combattants au Canada?
:
Je vais vous donner une partie de la réponse, avant de céder la parole à mon sous-ministre.
Encore une fois, nous voulions nous assurer que l'information était communiquée aux anciens combattants, et c'est pourquoi nous avons utilisé Mon dossier ACC. On y trouve un lien d'accès pour les anciens combattants concernés qui reçoivent le message et qu'ils soient informés du questionnaire, de ce sondage et des consultations qui allaient avoir lieu. C'est parce que nous voulions les entendre.
Nous avons également veillé à informer les proches qui ont perdu un être cher pendant la mission et à mettre au courant du sondage les intervenants qui travaillent avec les anciens combattants jour après jour. C'est la meilleure façon de nous assurer de pouvoir transmettre l'information aux gens. Plus de 12 000 personnes ont répondu au sondage. Nous avons trouvé que c'était un bon moyen de rejoindre les anciens combattants.
Monsieur Ledwell, avez-vous quelque chose à ajouter?
:
C'est exact. Je dirais deux choses à cet égard, si vous me le permettez, monsieur le président.
D'abord, de nombreuses familles de soldats tombés au champ d'honneur étaient présentes pour l'annonce du monument en 2014. Nous avons été extrêmement touchés. Je n'étais pas là, mais je sais, pour avoir reçu des messages et avoir eu des conversations avec des anciens combattants d'Afghanistan qui étaient là ce soir‑là, que l'annonce a été très émouvante sur eux, en raison des proches qui étaient là.
En juin, lorsque nous avons annoncé le concept de design, il y avait aussi des proches qui avaient perdu des frères, des fils et des filles en Afghanistan.
:
Merci, monsieur le président.
Madame Petitpas Taylor, en lien avec votre dernière intervention qui portait un petit peu sur moi, je vous dirais qu'on ne peut jamais se tromper quand on écoute les vétérans. On ne peut jamais se tromper. Par contre, on peut se tromper quand on utilise les vétérans — c'est ce que vous avez fait — pour un sondage comme celui-là. On peut se tromper. C'est tout.
Maintenant, j'ai une autre question pour vous, madame Petitpas Taylor.
Lors de votre dernière comparution ici, vous avez dit qu'on avait eu à décider, au bout du compte, ou quelque chose du genre. À qui faisiez-vous allusion? Qui était autour de la table?
Ce que je trouve un peu troublant dans tout cela, c'est que vous n'honorez pas les vétérans. Encore une fois, vous ne tenez pas compte d'eux et vous les utilisez pour un sondage complètement bidon.
Pour répondre à une question posée plus tôt, je précise que 12 % des répondants de ce sondage étaient des Québécois, alors que nous représentons 23 % de la population. De plus, une immense proportion des répondants, soit 40 % ou 50 %, était concentrée dans la région de la capitale nationale, ce qui ne représente absolument pas la population des vétérans.
Merci.
Ma dernière question s'articule vraiment sur l'idée que nous sommes toujours là lorsqu'il est question de nous, et c'est quelque chose que j'essaie vraiment de mettre en pratique dans le cadre de mon travail. Je crois savoir qu'il y a eu un sondage public ouvert dans le cadre duquel chacun a pu s'auto-identifier, mais ce n'était pas quelque chose de particulier pour les anciens combattants de l'Afghanistan et leurs proches. C'est ce qui me préoccupe, parce que nous espérons que cette représentation existe, mais nous n'en sommes pas certains.
Essentiellement, ma question est la suivante: pourquoi n'a‑t‑on pas investi dans un sondage visant précisément à sensibiliser les gens? Nous avons entendu aujourd'hui des témoins dire que vous aviez de l'information et que cette information a été versée dans Mon dossier ACC. Je connais beaucoup d'anciens combattants qui ne consultent jamais Mon dossier ACC à cause d'autres problèmes. Je me pose la question. Était‑ce trop coûteux, dans la perspective du ministère, de retenir les services d'un organisme qui appellerait ces gens, communiquerait avec eux, trouverait des façons de les identifier, de communiquer avec eux et de leur demander leur avis? Nous saurions alors que ces anciens combattants étaient représentés et que leur voix a été entendue.
Dans ce système, j'aime beaucoup l'auto-identification, mais elle ne répond pas vraiment à mon besoin — et cela n'a rien de personnel. Je n'ai pas d'opinion. Je ne suis pas un ancien combattant de l'Afghanistan ni une personne qui a perdu un être cher, mais je crains que la consultation... Cela semble être un problème avec ACC. Trop souvent, la façon dont les anciens combattants sont consultés est un processus en ligne général, qui ne permet pas de communiquer directement avec les anciens combattants pour savoir comment mieux faire les choses.
Je me pose la question. Était‑ce une question d'argent? Pourquoi ne pas avoir cherché quelque chose de plus spécifique?
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci, mesdames les ministres, d'être des nôtres aujourd'hui.
Je vais devoir ouvrir une parenthèse un instant. En préparant la séance d'aujourd'hui et à la lecture de certains renseignements de contexte, je réfléchissais au temps que j'ai passé dans cette merveilleuse chaise là‑bas, aux études qu'on a faites sur la commémoration et à certains des travaux réalisés. Je m'en voudrais de ne pas profiter de l'occasion pour rappeler au Comité et aux Canadiens le travail extraordinaire qui est déjà accompli par des dizaines, voire des centaines, d'artistes de tout le Canada pour rendre hommage aux Canadiens qui ont combattu en Afghanistan.
L'un de ces artistes extraordinaires était un homme du nom de David Sopha, qui est malheureusement décédé il n'y a pas si longtemps. M. Sopha était un électeur de ma circonscription. Il a pris l'initiative de créer un organisme appelé Portraits of Honour. Si vous n'en avez pas entendu parler, vérifiez. C'est un organisme sans but lucratif extraordinaire qui commémore les soldats tombés au champ d'honneur. Plus précisément, la pierre angulaire de cet organisme était une œuvre de sa création, qui mesure 40 pieds de long et 10 pieds de haut, commémorant les 158 soldats tombés au combat en Afghanistan.
M. Sopha m'a beaucoup appris sur la commémoration et l'importance de communiquer avec ces soldats et, dans ce cas‑ci, avec les proches des soldats. Il a longuement parlé aux anciens combattants de l'Afghanistan pour se faire une idée de ce qu'ils voulaient voir et de la meilleure façon de les commémorer.
Je pense qu'il est extrêmement important d'en tirer des leçons et de célébrer le courage, le sacrifice et la perte de ceux qui ont combattu vaillamment pendant la mission en Afghanistan. Bien honnêtement, il est important de les aider également.
Je me demande, madame la ministre, si vous pouvez nous dire ce qu'on a fait pour les aider à faire la transition à la vie civile et quels programmes nous avons pour eux aujourd'hui.
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Merci beaucoup, monsieur May.
D'abord et avant tout, je pense qu'il est très important et très révélateur que nous remerciions tous les membres actifs et nos anciens combattants à l'approche du jour du Souvenir. Le travail qu'ils ont fait dans cette mission et dans d'autres missions est vraiment exemplaire et nous les en remercions.
En ce qui concerne les anciens combattants de l'Afghanistan, dont certains sont encore en service et d'autres en voie de quitter, il est vraiment important que le gouvernement fédéral continue de les soutenir lorsqu'ils en ont besoin. Nous reconnaissons certainement que de nombreux anciens combattants sont revenus d'Afghanistan avec des traumatismes physiques et psychologiques avec lesquels ils sont condamnés à vivre.
Pour le gouvernement, il est vraiment important de veiller à ce que ces services soient en place et qu'ils soient offerts en temps opportun lorsqu'ils en ont besoin. Au ministère des Anciens Combattants, nous continuons de travailler main dans la main avec ces anciens combattants pour bien répondre à leurs besoins.
J'ai plusieurs neveux qui ont servi dans la mission en Afghanistan, et j'ai pu constater les répercussions que la mission a eues sur eux personnellement et sur leurs proches. Il est donc vraiment important d'être là pour eux lorsqu'ils en ont besoin.
Les Anciens Combattants sont un portefeuille que je prends très à cœur en tant que ministre, et je veux certainement faire tout ce que nous pouvons pour soutenir nos anciens combattants, aujourd'hui et demain.
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Pour avoir travaillé avec les anciens combattants et les avoir côtoyés au cours des trois derniers mois, lorsque le monument de l'Afghanistan entre dans la conversation, j'entends souvent dire qu'on a très hâte et qu'on souhaite qu'il se fasse dans les meilleurs délais. On craint les retards.
J'ai le plaisir d'annoncer que la Commission de la capitale nationale a signé le contrat. Cet obstacle est donc franchi. Nous devons maintenant voir à ce que la construction puisse commencer très bientôt.
Comme je l'ai dit, l'emplacement du monument a causé un peu de retard dans le passé. Lorsque nous avons formé le gouvernement, nous nous sommes employés à trouver un emplacement approprié pour le monument, et nous avons suivi le processus à partir de là. La prochaine étape consistera à trouver les personnes qui construiront le monument.
La société Stimson, bien sûr, a élaboré le concept, mais ce n'est pas elle qui va construire le monument en tant que tel. Ce sera la prochaine étape des travaux à effectuer.
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Merci, madame la ministre. C'est tout le temps que nous avons.
Merci à vous tous pour vos témoignages. C'était super.
Je dois informer les membres du Comité que, cette semaine, nous aurons notre formation sur les traumatismes. La semaine prochaine, nous prévoyons revenir au monument pour une heure, et nous allons consacrer une heure aux vétéranes. Pour cette séance, le greffier a dit que nous n'allions pas inviter de vétéranes. Nous allons inviter des chercheurs et des universitaires en même temps. Nous savons à quel point c'est spécial lorsque des vétéranes témoignent ici; or, c'est ce que nous prévoyons.
[Français]
Je remercie tous les témoins qui sont avec nous aujourd'hui.
[Traduction]
Nous avons reçu, de la Chambre des communes, l'honorable Ginette Petitpas Taylor, ministre des Anciens Combattants, et l'honorable Pascale St‑Onge, ministre du Patrimoine canadien. Du ministère du Patrimoine canadien, nous avons accueilli Mme Isabelle Mondou, sous-ministre, et Mme Emmanuelle Sajous, sous-ministre adjointe, Sport, événements majeurs et commémorations. Du ministère des Anciens Combattants, nous avions M. Paul Ledwell, sous-ministre, et Mme Amy Meunier, sous-ministre adjointe, Secteur de la commémoration et des affaires publiques.
[Français]
Je veux remercier toute l'équipe technique.
Plaît-il aux membres du Comité de lever la séance?
On me fait signe que oui.
La séance est levée.