[Français]
Je vous souhaite la bienvenue à la 73e réunion du Comité permanent des anciens combattants.
[Traduction]
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le lundi 3 octobre 2022, le Comité reprend son étude des expériences vécues par les vétéranes.
[Français]
La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride, et les témoins comparaissent par vidéoconférence.
En ce qui concerne l'interprétation, ceux qui utilisent Zoom ont le choix, au bas de leur écran, entre le parquet, l'anglais et le français. Quant à ceux qui sont dans la salle, ils devraient utiliser leur oreillette.
Il est vrai que la salle est munie d'un système de son assez sophistiqué. Toutefois, il faut faire attention de ne pas placer l'oreillette trop près du micro, parce que cela cause de l'interférence et nuit à nos interprètes.
Je vous avise que les tests de connexion ont été faits.
Avant d'accueillir les témoins, j'aimerais vous donner un avertissement. Nous allons discuter d'expériences liées à la santé mentale. Cela peut être un élément déclencheur pour les gens qui sont ici, les téléspectateurs, les députés et leur personnel qui ont vécu des expériences similaires. Si vous vous sentez bouleversés ou si vous avez besoin d'aide, n'hésitez pas à en informer le greffier.
[Traduction]
Avant d'accueillir nos témoins, j'aimerais formuler un avertissement. Il se peut que nous discutions d'expériences liées à la santé générale et à la santé mentale. Cela pourrait troubler des spectateurs, des députés ou des membres du personnel ayant vécu des expériences semblables. Si vous êtes bouleversé ou avez besoin d'aide, veuillez vous adresser au greffier.
[Français]
Cet après-midi, nous avons le plaisir d'accueillir
[Traduction]
Le député Hoback, qui remplace Mme Wagantall.
Bienvenue à vous.
Le député Hanley, qui participe par Zoom, remplace M. Miao.
[Français]
Chers collègues,
[Traduction]
Nous sommes cet après-midi en compagnie de Nina Charlene Usherwood, par vidéoconférence, qui s'exprimera à titre personnel, et de Vivienne Stewart, du Conseil des vétéranes de la GRC, également par vidéoconférence.
Nous allons commencer par vous, madame Charlene Usherwood. Vous avez cinq minutes. Allez‑y, je vous en prie.
:
Merci, monsieur le président.
Bonjour.
Je m'appelle Nina Usherwood. Je suis une ancienne combattante ayant servi pendant 42 ans dans les Forces armées canadiennes. J'ai servi de 1979 à 2022. J'ai été libérée pour raisons médicales.
Anciens Combattants Canada ne reconnaît pas que mon expérience militaire est différente de celle des hommes en raison de la discrimination dont j'ai été victime tout au long de ma carrière parce que je suis une femme.
Le ministère des Anciens Combattants ne reconnaît pas que la discrimination dont j'ai été victime au cours de ma carrière militaire a eu des répercussions physiques. Les évaluations effectuées par le psychologue des Services de santé des Forces canadiennes et par un psychologue clinicien spécialiste du stress opérationnel, recruté par Anciens Combattants Canada, attestent les conséquences physiques d'une discrimination qui a duré des décennies, ainsi que les blessures psychologiques que j'ai subies.
Le ministère des Anciens Combattants continue de nier que le diabète de type 2 dont je souffre est attribuable à mon service militaire. Il ne reconnaît pas l'incidence de la discrimination et de la culture hypersexualisée des militaires sur la santé physique des anciennes combattantes.
Les études attestent que la discrimination, qu'elle soit flagrante ou dissimulée, peut avoir des répercussions sur la santé mentale et physique. Harris et ses collaborateurs ont constaté, dans le cadre de leur étude portant sur 12 000 femmes australiennes pendant 12 ans, que le stress ressenti est un facteur de risque important pour le diabète, indépendamment de la présence d'autres facteurs de risque comme l'hypertension, les activités physiques, le tabagisme, le régime alimentaire ou le poids.
Power et ses collaborateurs montrent, dans leur méta-analyse sur le stress et le diabète, que le stress émotionnel accélère l'évolution du diabète. Dans leur article intitulé « Stress-Induced Diabetes: A Review », Sharma et ses collaborateurs décrivent le mécanisme biologique par lequel le stress chronique influe sur le diabète.
Anciens Combattants Canada ne reconnaît pas que la discrimination subie par des anciennes combattantes a un coût physique et un coût mental. La discrimination que les minorités sexuelles et de genre continuent de subir dans les Forces armées canadiennes a une incidence sur la santé physique des anciens combattants d'aujourd'hui et de demain.
Merci de m'avoir écoutée. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Merci.
:
Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier le Comité de m'avoir invitée à contribuer à cette importante étude sur l'expérience des anciennes combattantes dans la GRC et dans les FAC.
Le 6 juin 1977, munie d'un baccalauréat de l'Université de Victoria, j'ai rejoint les rangs de la GRC à l'âge de 24 ans. J'ai rejoint 31 autres femmes, dont la plupart avaient également un diplôme d'études postsecondaires.
Ce n'était pas le cas de la plupart des recrues masculines à l'époque. Je pense que la barre était plus haute pour nous, mais nos attentes, elles aussi, étaient plus élevées. Pour moi, l'histoire et la réputation de la GRC étaient une promesse d'aventure, et mon engagement était l'occasion de participer à toutes sortes d'activités passionnantes et une façon d'apporter ma pierre à l'édifice et m'offrait la possibilité de progresser dans l'organisation et, en fin de compte, de faire une carrière à long terme enrichissante.
Je voulais devenir agente de liaison à l'étranger ou entrer au service de sécurité de l'époque. J'ai servi au Québec après ma formation à Regina, puis j'ai été transférée au Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse, où je vivais lorsque j'ai démissionné en décembre 1984.
Au cours de mon mandat à la GRC, j'ai occupé divers postes, de l'application des lois fédérales à des fonctions provinciales de maintien de l'ordre en milieu rural. Je pense que j'ai été une bonne policière et je ne regrette pas le temps que j'ai passé dans la GRC. Cela a effectivement été une expérience instructive.
J'ai décidé de partir lorsqu'il est devenu évident que les responsables de la dotation au quartier général de Halifax prenaient des décisions touchant ma carrière avec lesquelles je n'étais pas d'accord. J'ai découvert par la suite que ces décisions étaient probablement liées au fait qu'ils soupçonnaient que j'étais lesbienne.
Après les démarches administratives, une de mes collègues — une de mes amies, elle aussi policière — est venue me voir à la maison pour me demander si je voulais vraiment quitter la GRC et elle m'a dit que des rumeurs circulaient selon lesquelles j'étais lesbienne. Si je l'avais su avant de donner ma démission, je serais peut-être restée et j'aurais peut-être fait valoir mon cas. Je n'en sais rien, probablement que non.
À ce stade, j'étais prête pour quelque chose de nouveau, car je pense que j'avais déjà accepté que ma carrière ne serait jamais celle que j'avais espérée. Quoi qu'il en soit, à l'époque, compte tenu de l'homophobie manifeste qui régnait dans l'ensemble de la GRC — et dans la société en général —, je ne l'aurais pas admis et je n'en aurais parlé à personne, même pas à quelqu'un que je considérais comme une amie. Cela m'a confortée dans l'idée que j'avais pris la bonne décision.
Je ne me souviens pas d'avoir été en colère ou frustrée à l'époque, seulement déçue. J'avais cru que j'avais quelque chose de valable à offrir à la GRC et que j'irais beaucoup plus loin, même jusqu'au grade d'officier. J'ai dû abandonner ce rêve et passer à autre chose.
De toute façon, il n'y a pas eu d'entrevue de départ pour moi. Mon sergent de l'époque m'a simplement demandé s'il avait fait quelque chose qui m'avait poussée à démissionner. Je lui ai simplement répondu que non. Je n'avais pas grand-chose à ajouter, du moins rien qu'il aurait pu comprendre selon moi. Comme seule femme dans la plupart des affectations que j'ai eues, j'ai constaté que mes homologues masculins étaient, pour la plupart, dévoués à leur tâche, serviables et coopératifs.
J'ai fini par retourner en Colombie-Britannique pour étudier le droit à l'Université de la Colombie-Britannique. J'ai été admise au Barreau en 1991 et j'ai pratiqué jusqu'à ma retraite à la fin d'août 2022.
Je ne savais pas que, après avoir quitté la GRC avec moins de 10 ans de service, je serais une ancienne combattante. Quand Jane Hall, qui vous a parlé mardi, m'a demandé de faire du bénévolat auprès du nouveau conseil en cours de formation au sein de l'Association des vétérans de la GRC en 2013, j'ai dû lui confirmer que j'étais effectivement une vétérane pour pouvoir siéger au conseil.
Mon père, qui a servi dans la Marine pendant la Deuxième Guerre mondiale, était lui-même un ancien combattant. C'était cela un ancien combattant pour moi.
Au Conseil des vétéranes de la GRC, je me suis surtout concentrée sur le nombre d'interprétations juridiques douteuses qui ont nui à des anciennes combattantes, en particulier à celles qui ont participé au recours collectif Merlo Davidson. Je n'ai pas personnellement eu l'occasion de communiquer avec ACC ou d'utiliser ses services. Ce que je comprends du fonctionnement d'ACC et de ses relations avec les ex‑agentes de la GRC découle donc du travail de notre conseil depuis environ 10 ans.
Il est évident, d'après les enquêtes de notre conseil, que ni la loi ni les processus décisionnels d'ACC ne sont suffisamment clairs pour que nos anciennes combattantes puissent se débrouiller seules dans le système ou sans se heurter à des obstacles procéduraux et à des contrôleurs hostiles. Je signale en passant que nos données révèlent que les anciennes combattantes continuent de se méfier d'AAC et de craindre le pouvoir qu'il exerce, apparemment de façon arbitraire, sur leurs intérêts fondamentaux.
Les réponses écrites fournies le 20 mars 2023 aux questions concernant la clause de récupération sont pour la plupart insatisfaisantes. À la réunion du 20 mars de ce comité, le représentant de la ministre a déclaré que des messages seraient communiqués aux intéressés pour veiller à ce que cette pratique cesse. On ne sait pas très bien si cette réponse concernait uniquement les demandeurs de niveaux 1 et 2 ou les demandeurs de tous les niveaux, et cela souligne une fois de plus les problèmes de transparence et de communication au ministère des Anciens Combattants.
À défaut de transparence, il ne peut y avoir de reddition de comptes, et, sans reddition de comptes, il n'y a pas de confiance.
Nous demandons au Comité de recommander des modifications immédiates à la Loi sur les pensions afin d'exclure les dommages et intérêts des clauses de récupération pour les types de requêtes énoncées dans le recours collectif.
Le Comité devrait également faire tout en son pouvoir pour s'assurer qu'ACC simplifie ses processus et améliore sa transparence, ses communications et la formation du personnel de première ligne afin que celui‑ci comprenne mieux les expériences vécues par les anciennes combattantes et qu'il agisse selon l'esprit et la lettre du projet de loi et non pas comme la plus mesquine société d'assurances du Canada.
Le mémoire que j'ai remis au greffier au début de la journée comporte un certain nombre d'autres recommandations.
Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Merci.
Je vais vous expliquer un peu ce qui s'est passé.
Jusqu'en 1980, il n'y avait pas de femmes dans le Carrousel, et on n'y songeait même pas. En 1980, un haut gradé a décidé que, si on devait avoir des femmes dans la Gendarmerie, on ferait mieux de les rendre visibles dans d'autres activités également. Comme vous l'avez dit, le Carrousel est emblématique pour la GRC et pour le Canada.
Au début des années 1980, quelqu'un de la GRC a téléphoné à toutes les agentes pour leur demander si elles aimeraient entrer dans le Carrousel. Comme j'étais passionnée d'équitation depuis très longtemps, j'ai sauté sur l'occasion.
La formation commence par deux stages d'apprentissage équestre, et, à l'époque du moins — je ne sais pas comment cela fonctionne aujourd'hui —, il y avait deux stages de deux mois. Au cours des deux premiers mois, le groupe comptait 16 membres, dont deux femmes et 14 hommes. Dans le groupe du deuxième stage, il y avait quatre femmes et 12 hommes. En général, la troupe du Carrousel se compose de 32 cavaliers. La moitié d'entre eux étaient remplacés tous les ans, et l'affectation était donc de deux ans.
Je suis allée à Ottawa en avril 1980, à Rockcliffe, et les écuries ont été toute une expérience. Nous y avons passé deux mois et, comme je l'ai dit, il y avait quatre femmes et 12 hommes. C'est probablement la première fois, durant mon engagement dans la GRC — depuis presque trois ans à ce moment‑là — que j'ai eu le sentiment d'être plongée dans ce qu'on appelle aujourd'hui un « milieu de travail toxique ».
Il y avait des rituels d'initiation, des blagues misogynes, le genre de choses auxquelles la plupart des agentes se sont probablement heurtées à l'époque sans y accorder beaucoup d'importance. En dehors du rituel d'initiation, qui ne m'a pas touchée personnellement parce que je ne l'ai pas subi, les blagues misogynes m'ont donné une idée de ce à quoi ressemblerait la vie du Carrousel en tournée, et cela ne m'a pas plu. Par ailleurs, l'un des instructeurs qui nous accompagnerait en tournée me mettait très mal à l'aise et me faisait peur.
À l'époque — c'était en 1980, il y a donc près de 44 ans —, on ne parlait pas d'inconduite, mais je suis certaine que mes trois collègues féminines ont eu le même sentiment.
Ce genre de comportement pendant la formation était une chose, mais j'avais l'impression que ce serait pire une fois que nous serions en tournée et qu'il n'y aurait que nous et les gens avec qui nous travaillerions. À la fin du stage, les 16 stagiaires acceptés ont été invités à se joindre à la troupe. J'ai décliné l'invitation et suis retournée en Nouvelle-Écosse.
:
Merci de la question, monsieur Sarai.
Je n'étais pas présente à la conférence de 2019. J'ai assisté à celle de cette année, très intéressante, qui s'est déroulée en février à Ottawa et qui portait sur les femmes et les questions liées à la communauté LGBTQ2S+.
Je crois que nous aimerions obtenir d'abord et avant tout une meilleure formation des gens d'ACC qui s'occupent des vétéranes pour qu'ils soient plus aptes à comprendre les problèmes des femmes dans le contexte général des différents types de difficultés auxquelles elles se heurtent au cours de leur carrière, selon le type de travail qu'elles font.
Je parle surtout ici de la GRC. Je ne suis pas au courant de tout ce qui se passe dans les FAC.
Je crois qu'il serait utile de former des professionnels... ou des experts sur les diverses communautés de l'organisation. Je crois aussi qu'il faudrait absolument, et c'est ce qui manque en ce moment d'après ce que je comprends, envisager une sensibilisation aux traumatismes. Je crois savoir qu'il y a de la formation et de l'éducation à cet égard, et c'est très important.
Il est probablement plus facile de s'occuper des problèmes physiques des vétéranes que de leurs problèmes psychologiques. Quand les représentants de la GRC vous ont parlé en octobre, j'ai été personnellement surprise de constater qu'ils parlaient surtout des changements à apporter aux équipements et au matériel. C'est bien beau. C'est probablement ce qu'il y a de plus facile. Ce qui est difficile, c'est de s'attaquer aux effets des milieux de travail toxiques et du leadership toxique sur les gens qui se trouvent dans ces situations.
:
L'armée essaie en fait de changer sa culture, comme l'a indiqué Mme Deschamps dans son rapport et dans les rapports subséquents. Elle essaie de changer les choses.
Cependant, comme pour tout ce qui concerne le gouvernement, il y a un manque de ressources. On manque de temps et d'argent. Cela fait partie du problème. Il y a tellement de choses dans l'armée sur lesquelles nous sommes censés recevoir une formation qui, en réalité, ne nous est pas donnée.
Par exemple, vous êtes censé recevoir, chaque année, une formation sur le comportement éthique. Même si j'étais formatrice, je ne la recevais pas nécessairement chaque année.
Dans les forces armées, il n'y a pas assez de personnel, pas assez de temps, pas assez d'argent, pas assez de ressources, et il y a trop de missions.
Je crois vraiment que l'armée pourrait éliminer une partie de la discrimination systémique qui y est associée. Par exemple, les Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes, qui sont les règlements des Forces armées canadiennes, dans le volume 1, le pronom « il » est utilisé 167 fois. Le pronom « elle » ne figure nulle part dans ce volume. Il y a juste une phrase disant que chaque fois qu'il est fait mention du genre masculin, cela inclut également le genre féminin.
Cependant, si je consulte le livre au sujet des commandants — c'est le livre qui énonce les responsabilités du commandant, du vice-chef d'état-major de la Défense jusqu'à l'officier le plus bas gradé —, il est toujours question de « il ». On parle de ses responsabilités en disant que « il » fera ceci et « il » fera cela.
C'est un PDF. Je pourrais changer la nature sexospécifique du livre. Je pourrais probablement le faire moi-même en quelques heures. Si je remplaçais simplement « il » par « il/elle », ce serait encore plus rapide. Je pourrais le faire en quelques minutes. Voilà où nous en sommes, sept ans après que les forces ont accepté d'utiliser l'analyse comparative entre les sexes plus. Pourquoi n'a‑t‑on pas modifié ces références?
Au cours de ma dernière année, voici ce que j'ai réussi à changer dans ma base: quand le commandant de la base part, on ne donne plus de fleurs à son épouse. C'est ce que prévoyait le processus et c'est ainsi que cela fonctionnait. Pourquoi n'a‑t‑on pas simplement...
:
Je dirais que c'était le cas par le passé, mais à l'heure actuelle... Lorsque j'étais encore dans les forces, comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, un psychologue des Services de santé des Forces canadiennes a documenté le fait que le traumatisme mental que j'avais subi avait eu un grave impact physique sur ma santé.
ACC ne veut pas reconnaître que c'est relié, qu'il y a un lien avec le traumatisme physique, et je vois cela davantage comme un problème du côté d'ACC. Lorsque j'ai été libérée, j'ai eu l'impression que l'armée acceptait davantage les traumatismes mentaux qu'ACC.
Mon diabète a joué un rôle dans ma libération pour raisons médicales — c'est certain —, mais à l'époque, je n'ai aucunement été pénalisée par les forces parce que j'étais diabétique, à part le fait que j'ai été libérée. Je ne conteste pas que cela ait été un facteur, car je ne pouvais plus satisfaire à l'universalité du service, un principe auquel je crois: chaque personne dans l'armée doit pouvoir servir comme l'exige le gouvernement canadien. Je l'accepte.
Cela a mené à ma libération pour raisons médicales, du moins en partie. Il y avait d'autres problèmes physiques liés à ma carrière qui n'avaient rien à voir avec un traumatisme mental, mais c'est en partie la raison pour laquelle j'ai été libérée.
Je pense que c'est vraiment à ACC d'être plus conscient du lien. Lorsque je lui ai présenté ma demande, il l'a essentiellement rejetée. Il a dit qu'il n'y avait pas de lien.
Je dirais que c'est en fonction de ma compréhension du fonctionnement d'ACC et, comme je l'ai déjà dit, je n'ai aucun contact personnel direct avec ACC. Cependant, il me semble, d'après ce que notre conseil a entendu de la part des femmes vétérans qui ont participé au règlement de Merlo Davidson et qui ont également eu l'occasion de demander de l'aide à ACC, d'utiliser ses services et d'obtenir des prestations, que souvent, les employés en première ligne, constituent davantage un obstacle qu'une source d'aide.
Ils sont censés être là pour ouvrir la porte à ces personnes, pour leur dire: « Oui, nous avons des programmes et des services pour vous aider », au lieu de refuser d'emblée leur demande parce qu'elle ne répond pas — je suppose — à toutes les exigences figurant sur leur liste de vérification.
Il me semble que les services de première ligne d'ACC — surtout pour les personnes qui ont subi un traumatisme, particulièrement dans le contexte du TSPT qui semble être plus courant maintenant qu'il ne l'a jamais été — sont maintenant là pour filtrer, plutôt que pour aider à fournir aux anciens combattants les ressources qu'ACC est censée leur fournir aux termes de la Loi sur les pensions.
Mme Usherwood pourra peut-être vous en parler également.
Je connais une personne, membre de la GRC, qui vient d'être libérée officiellement hier, après 33 ans de service, et je peux comparer sa situation à la mienne. Étant donné que j'étais libérée pour des raisons médicales, une infirmière de l'hôpital militaire local m'a expliqué, étape par étape, comment faire ma demande, et tout ce que je devais savoir au sujet d'ACC. Quand je me suis présentée à ACC, on m'a dit que cela n'avait pas été mentionné, parce que nous n'avions pas pensé à le faire, ni l'une ni l'autre, pour une raison quelconque. J'ai donc dû passer par les mêmes étapes.
Une entrevue d'admission serait extrêmement utile, mais je crois comprendre que lorsque vous quittez la GRC — comme je l'ai dit, j'ai une amie qui vient d'être libérée officiellement hier, selon sa page Facebook —, il n'y a rien. C'est la différence par rapport au programme de libération dans l'armée, par exemple au programme Départ dans la dignité et d'autres événements. D'après ce que disent les membres de la GRC, ce n'est pas du tout la même chose.
:
Merci beaucoup à vous deux.
Je pense que tout au long de cette étude, nous avons beaucoup entendu parler de personnes qui se sentent invisibles ou qui sont jugées au lieu d'être crues. Dans tout ce qui a été dit au sujet de la santé mentale et du sentiment d'être pris en charge physiquement, mentalement, spirituellement, ou autrement, le fait d'être en contact avec un pair, et un pair choisi de façon appropriée, peut rendre les choses beaucoup plus faciles. Je pense qu'une bonne partie de ce que nous entendons, c'est que les gens ne savaient même pas à quoi ils avaient droit dans le cadre de cette transition. Pourriez-vous toutes les deux nous dire ce que vous en pensez?
On a dit mardi qu'il devrait y avoir une entrevue de départ. Cependant, je pense que ce que vous dites, c'est qu'il devrait aussi y avoir une entrevue d'admission, un pont entre ce que la personne a vécu et les raisons de son départ, dans certains cas. Il s'agit également de la confier à la personne responsable des admissions, qui pourrait faire en sorte que tout le monde obtienne tout ce dont il a besoin. Comme Mme Stewart l'a dit, je pense qu'il ne s'agit pas seulement de savoir si on va vous tondre votre pelouse ou quelle est la perception des gens à l'égard de ce à quoi ils ont droit; j'aimerais savoir si vous pensez qu'il pourrait y avoir, dans les recommandations, quelque chose de ce genre pour ce qui est de la sensibilisation.
J'aimerais ensuite entendre Mme Stewart. Vous avez mentionné dans votre déclaration préliminaire qu'il y a des situations où l'interprétation juridique d'ACC a eu des répercussions négatives sur les vétéranes. Qu'avez-vous à dire à ce sujet?
:
Je vais répondre en premier. Merci.
Notre conseil a soulevé la question des entrevues de départ en 2014 dans le rapport que nous avons produit sur la crise du leadership à la GRC. À ma connaissance, et compte tenu du témoignage de Mme Usherwood tout à l'heure, cela n'existe pas encore. Cela semble être une chose très importante pour la GRC, surtout en raison des changements qu'elle dit apporter, selon le dirigeant principal des ressources humaines, qui sont censés être mis en œuvre à la suite du rapport du juge Bastarache.
Je pense que les entrevues de départ et d'admission, ou le transfert, comme vous le suggérez, seraient probablement une bonne chose. De mon point de vue, l'entrevue de départ devrait comprendre des renseignements sur ACC, ses services et les prestations offertes. Si ces renseignements n'ont pas déjà été donnés, ce serait le moment de les fournir à nos membres qui prennent leur retraite ou qui partent.
Je vais passer rapidement à la deuxième partie de votre question sur les problèmes que nous avons examinés dans les interprétations juridiques d'ACC. Cela se rapporte principalement au recours collectif Merlo Davidson.
La première chose que nous avons examinée, c'est le cas de Krista Carle, une membre de la GRC qui avait pris part au recours collectif Merlo Davidson, mais qui s'est malheureusement suicidée avant que sa demande ne soit traitée.
À l'époque, l'évaluateur a adopté la position selon laquelle, parce qu'elle n'était plus en vie au moment où sa demande devait être traitée, il devait fermer son dossier. Cela faisait en partie l'objet du règlement.
Notre conseil a envoyé à , alors ministre de la Sécurité publique, une lettre disant que c'était inadmissible. Mme Carle a obtenu gain de cause. Comment se fait‑il qu'ACC refuse maintenant à sa famille les prestations auxquelles elle a droit et qu'elle recevrait en vertu d'autres lois du pays?
Au bout du compte, cette décision a été officiellement renversée par une ordonnance de la Cour fédérale.
Lorsque le règlement de Merlo Davidson a été approuvé par le tribunal, celui‑ci a conservé sa compétence sur le règlement pour sa mise en œuvre, son interprétation et son application, de sorte que, de mon point de vue, c'est toujours une possibilité. À ce que je sache, il appartient toujours aux tribunaux de régler les questions découlant de l'accord de règlement.
Le deuxième point concerne les réductions des pensions d'invalidité, ce que nous appelons les récupérations, que ACC a effectuées en vertu de l'article 25 de la Loi sur les pensions. À ce sujet, nous avons également fait valoir notre point de vue et déclaré qu'il était clair qu'une erreur avait été commise dans la rédaction de l'accord de règlement. La disposition qui porte sur la capacité du gouvernement de réduire les indemnités accordées est ambiguë.
Je pourrais vous en parler en détail d'un point de vue juridique. Je dirai simplement qu'il s'agit d'une question qui n'a pas encore été réglée, malgré les instances du sous-ministre, qui a comparu devant vous en mars dernier également.
[Traduction]
La deuxième phrase de cet article dit essentiellement que rien dans l'accord de règlement n'empêche le ministre d'effectuer les réductions qu'il est autorisé à faire en vertu de la loi. De mon point de vue, il s'agit d'une clause ou d'un article très important de l'accord de règlement qui n'est pas cohérent. D'abord, il dit: « Non, nous ne le ferons pas. » Ensuite, il dit: « Oui, nous pourrions le faire. »
Nous avons soulevé ce point. Le conseil a soulevé cette question en ce qui concerne l'article 25 et les réductions qui ont été imposées à certains anciens combattants qui ont demandé des pensions d'invalidité pour le TSPT, mais on nous a répondu que c'est l'interprétation qui a été donnée de l'article 25, et qu'il n'y a donc rien dans l'accord de règlement qui empêche le gouvernement de faire cela.
C'est possible, mais si c'est le cas, notre conseil espère que l'une des choses que fera le Comité sera de demander un amendement à la Loi sur les pensions afin de prévoir des exclusions spécifiques, et je vais vous suggérer un libellé précis à ce sujet. En gros, il s'agirait de préciser que les indemnités accordées pour tout type de préjudice ou de blessure résultant d'une conduite sexuelle inappropriée de quelque nature que ce soit — agression sexuelle, intimidation, harcèlement et agression — sont expressément exclues des dispositions de récupération de la Loi sur les pensions. Si cela semble trop large, cela peut être limité au règlement Merlo Davidson.
Une autre option, si vous me permettez d'intervenir rapidement, qui vient d'être soulevée, à ma connaissance, au cours des derniers jours, concerne l'affaire Krista Carle, que j'ai mentionnée plus tôt dans mon témoignage. Le changement en ce qui concerne la compréhension et l'approche de l'évaluateur quant à la date de la demande et sa recevabilité pour déterminer l'admissibilité de l'ancien combattant a été apporté avec le consentement de toutes les parties, par ordonnance du tribunal. L'accord lui-même a été modifié pour préciser la date limite, et il a été publié également. Si quelqu'un était en vie avant la date de retrait, sa demande sera évaluée et sa succession recevra l'argent.
Madame Stewart, j'aimerais revenir à vous. Merci beaucoup de nous avoir fourni cette information. Je sais que le recours collectif Merlo Davidson a été intenté par tant de femmes courageuses qui essayaient d'obtenir justice. Malheureusement, ce que nous avons vu, bien sûr, c'est que les mesures de récupération d'ACC ont non seulement nui à l'objectif de ce recours et des règlements, mais elles ont aussi victimisé de nouveau les femmes.
À mon avis, non seulement cela les a victimisées de nouveau, mais cela a aussi réduit au silence d'autres femmes qui autrement auraient pu se manifester. Le but d'un recours collectif est, à mon avis, de mettre fin à ce genre de comportement. J'aimerais donc savoir si, selon vous, cela a aussi empêché des femmes de se manifester.
Deuxièmement, vous avez dit que le Comité avait une recommandation énergique à formuler à cet égard. Pensez-vous qu'une recommandation disant que la loi devrait être modifiée pour reconnaître...?
En fait, je ne pense pas que votre définition soit trop large. Je pense que chaque fois qu'une personne est attaquée violemment en milieu de travail, surtout dans ce contexte, nous avons des obligations envers elle.
Cela a‑t‑il empêché d'autres femmes de se manifester? Sommes-nous en train de passer à côté d'un groupe de femmes qui auraient pu se manifester? La recommandation de légiférer est-elle la façon la plus intelligente pour notre comité d'aller de l'avant?
:
Pour ce qui est de savoir si cela a bloqué les femmes, oui. C'est vrai. Les gens parlent, donc si quelqu'un a une mauvaise expérience, d'autres femmes, d'autres membres, vont en entendre parler, et cela assez rapidement.
D'après nos renseignements, un tiers des demanderesses n'ont pas été acceptées dans le cadre du règlement Merlo Davidson, et même celles dont les demandes ont été acceptées n'ont pas été évaluées au niveau auquel elles s'attendaient. On peut supposer qu'elles s'attendaient à ce que leurs demandes soient acceptées à un niveau plus élevé. Cela n'a pas été le cas.
Ensuite, il y a d'autres femmes que nous connaissons qui ont été touchées et qui n'ont même pas pu présenter de demande. Donc oui, selon notre conseil, quels que soient les chiffres de la GRC ou d'ACC quant au nombre de participantes au recours collectif, ils sont probablement bien en deçà du nombre de personnes qui ont été touchées ou qui ont été victimes d'abus pendant leur service.
Nous avons aussi des preuves anecdotiques concernant des personnes qui ont suivi le long processus de présentation d'une demande. Cela les a de nouveau démolies et, dans certains cas, leur a causé un TSPT dont elles n'avaient même pas souffert auparavant. Comme vous l'avez dit, il y a eu une nouvelle traumatisation généralisée.
Le recours collectif n'aurait même pas dû être nécessaire. La GRC était au courant de ces problèmes depuis des années, mais elle n'a rien fait. Je suis certaine que les femmes qui ont eu le courage de se manifester s'attendaient, comme nous, à ce que cela change les choses, à ce qu'on corrige ce comportement. L'argent n'allait pas les réparer.
Brièvement...
J'ai quelques questions pour chacune de vous. Bon nombre d'entre elles portent sur des sujets que vous avez abordés dans votre déclaration préliminaire ou peut-être dans vos réponses à d'autres questions, mais je pense qu'il vous reste des choses à dire sur ces sujets.
Je vais commencer par vous, madame Stewart. Vous avez probablement entendu parler — c'est assez courant chez les anciens combattants — de la politique consistant à « refuser, retarder et rejeter ». Vous en avez parlé un peu dans votre déclaration préliminaire, dirais‑je, car vous avez dit que les processus d'ACC n'étaient pas suffisamment clairs et qu'il y avait trop de contrôleurs en première ligne. Je sais que vous avez eu l'occasion de répondre à une question à ce sujet un peu plus tôt, ce qui, à mon avis, en dit long pour ce qui est de « retarder ».
J'aimerais vous donner l'occasion d'en dire un peu plus sur le « refus », car dans votre déclaration préliminaire, vous avez également dit qu'Anciens Combattants Canada était l'agence d'assurance la plus mesquine du pays. Je n'avais jamais entendu cela auparavant, mais j'ai certainement entendu le sentiment de nombreux anciens combattants au fil des ans. J'aimerais vous donner l'occasion de nous en dire plus à ce sujet. Lorsque vous dites qu'ACC est l'agence d'assurance la plus mesquine du Canada, expliquez-nous de quoi vous parlez.
:
Merci, monsieur le président.
Madame Stewart, je voudrais en revenir à l'échange que vous avez eu avec M. Desilets et Mme Blaney au sujet de la Loi sur les pensions et des dispositions de récupération.
Pendant que vous parliez, j'ai consulté la Loi sur les pensions. Vous parliez sans doute du paragraphe 25a).
Si je saisis bien le sentiment du Comité, il souhaite recommander une modification de la loi. Si vous pouviez nous faire parvenir le libellé que vous avez proposé, ce serait utile. Si vous avez un mémoire qui le présente, ce serait formidable.
Si je vous ai bien comprise, la modification comprendrait le libellé que vous avez proposé au sujet des préjudices ou blessures, mais vous avez ajouté que si c'était trop général, on pourrait peut-être écarter les demandeurs participant au recours collectif. Je proposerais les deux. On retiendrait le libellé général et on ajouterait: « y compris, mais sans s'y limiter, les parties à l'affaire Merlo Davidson ». S'il y a d'autres parties à un recours collectif qui, selon vous, devraient être visées, le Comité et moi voudrions que vous le disiez, soit dans votre réponse à ma question, soit dans un mémoire complémentaire. Ce serait très utile.
N'hésitez pas à réagir.
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Je vous remercie de la question.
Notre conseil a songé à une solution, et en a discuté. Il s'agit de s'en remettre à la GRC, au fond. Sauf erreur, elle confie l'administration de ce genre de service à ACC, qui la facture chaque année en conséquence.
Il me semble que c'est peut-être une chose, parmi d'autres, qui s'est perdue entre les deux entités, chacune pensant que l'autre s'en charge, l'une à cause de ses membres et l'autre à cause de ses programmes et services.
Ce que nous souhaitons et recommandons, c'est que la GRC mette en place un programme de sensibilisation et d'information des membres dès le premier jour. À la Division Dépôt de Regina, on suit des cours et il y a des séances d'information portant sur une foule de choses. Cette information pourrait être donnée dès le premier jour et rappelée à divers stades de la carrière des membres. Chose certaine, il doit certainement y avoir quelque chose à la fin pour que la transition vers la vie civile se fasse de façon éclairée et que chacun soit au courant des prestations, programmes et services offerts sans devoir attendre 20 ou 25 ans avant de l'apprendre.
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Merci beaucoup à toutes les deux d'avoir accepté de comparaître et de nous laisser passer beaucoup de temps avec vous.
Je veux parler de la sensibilisation. J'ai raté la première partie de la séance. Si je reviens sur du déjà‑vu, dites-le‑moi.
La GRC a préféré ne pas adopter la Nouvelle Charte des anciens combattants, si bien que c'est l'ancienne Loi sur les pensions qui s'applique à vous. Il y a des différences dans les services à cause de cela.
Dans le rapport Merlo, la GRC a expliqué qu'elle prenait déjà des mesures sur quatre points précis et qu'il s'agissait d'une priorité: la prévention et la résolution des problèmes de harcèlement, l'élimination des obstacles systémiques, le recrutement et l'intégration. Vous avez parlé aujourd'hui de vos préoccupations. Je m'intéresse également à la formation des cadets et au développement du leadership.
Une grande partie des problèmes abordés ici est attribuable à de mauvais comportements, très honnêtement, pendant la période où vous étiez en service, et c'est maintenant au ministère des Anciens Combattants qu'il incombe de s'en occuper. Je voudrais connaître votre point de vue, peut-être d'abord au sujet des Forces armées canadiennes. À quel point est‑il important, si on veut apporter un véritable changement de culture, de commencer par la génération la plus jeune et par un effort très délibéré pour inculquer ces valeurs dans les relations interpersonnelles. Auriez-vous une ou deux réflexions à ce sujet?
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Merci. Nous allons nous arrêter là.
Au nom de tous les membres du Comité, je tiens à remercier les témoins.
Aujourd'hui, nous avons accueilli, à titre personnel, Mme Nina Charlene Usherwood et Mme Vivienne Stewart, du Conseil des vétéranes de la GRC. Merci beaucoup de votre participation.
N'hésitez pas à faire parvenir d'autres éléments d'information au greffier.
La semaine prochaine, nous allons poursuivre notre étude, mais pour l'instant, je voudrais savoir si les membres du Comité souhaitent lever la séance.
Des députés: D'accord.
Le président: La séance est levée.