Bienvenue à la 117e réunion du Comité permanent des anciens combattants de la Chambre des communes.
[Français]
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 29 janvier 2024, le Comité reprend son étude sur l'expérience vécue par les vétérans autochtones et par les vétérans noirs.
La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride. Je vous rappelle que toutes les observations doivent être adressées à la présidence.
[Traduction]
J'aimerais informer le Comité que la rencontre qui sera tenue conjointement avec le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre et la délégation de parlementaires ukrainiens aura lieu pendant la deuxième partie de la réunion régulière de jeudi, soit de midi à 13 h 30. Un dîner sera servi et la réunion se tiendra dans une salle différente dans l'édifice. Nous vous informerons de l'endroit exact.
[Français]
En prévision de cette rencontre, un député doit proposer la motion suivante, qui doit être adoptée:
Que la greffière du Comité prenne les dispositions nécessaires pour la tenue d'une réunion informelle conjointe avec le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre et la délégation de parlementaires ukrainiennes le jeudi 28 novembre 2024; et que le Comité prenne en charge les frais d'accueil liés à cette réunion.
[Traduction]
Est‑ce que quelqu'un peut proposer la motion?
M. Bryan May la propose.
[Français]
Quelqu'un s'oppose-t-il à l'adoption de la motion?
(La motion est adoptée.)
:
La motion est adoptée à l'unanimité.
[Traduction]
Je vais maintenant présenter nos témoins.
Pour la première partie de la réunion, nous accueillons, par vidéoconférence, M. Bouchard Dulyx Dorval, vétéran, qui comparaît à titre personnel. Nous essayons de le contacter. Nous ne savons pas ce qu'il en sera. Nous allons essayer de le faire témoigner pendant la deuxième partie de la réunion.
Ici même, dans la salle, nous accueillons des représentants du Conseil des anciens combattants de l'Assemblée des Premières Nations: Mme Debbie Eisan, gestionnaire des événements communautaires du Mi'kmaw Native Friendship Centre; et M. Alan Knockwood, membre du Conseil.
De plus, lors de la dernière réunion, nous recevions Mme Lynne Gouliquer, sociologue. La vidéoconférence fonctionne à présent et Mme Gouliquer est parmi nous cet après-midi.
Vous disposerez respectivement de cinq minutes pour vos déclarations préliminaires. Ensuite, nous vous poserons des questions. Nous écouterons d'abord la déclaration de Mme Lynne Gouliquer, qui témoigne par vidéoconférence.
Veuillez ouvrir votre micro et commencer.
Taanishi. Bonjour.
Je vous parle aujourd'hui depuis le territoire visé par le traité Robinson-Huron, où vivent les Anishinabe et les Métis.
Je suis une vétérane qui compte 16 années d'expérience. J'ai servi dans les Forces armées canadiennes entre 1976 et 1995. Mon grand-père maternel a servi pendant la Seconde Guerre mondiale et le frère de mon grand-père paternel est mort pendant la Première Guerre mondiale.
Je suis une survivante de la purge LGBT. J'ai servi pendant les années les plus pénibles pour quiconque s'identifiait comme une personne LGBT ou comme une femme.
Je suis une Métisse et mon territoire d'origine est celui visé par le Traité no 3, qui est situé principalement dans le Nord-Ouest de l'Ontario. C'est le seul traité au Canada que les Métis ou les « Sang-Mêlés », comme on les appelait à l'époque, ont été invités à signer. Je suis citoyenne de la Nation métisse de l'Ontario et membre de son conseil des vétérans.
Je m'identifie comme lesbienne, femme, personne aux deux esprits, Métisse et, depuis plus récemment, comme vétérane.
Après avoir quitté l'armée en 1995, j'ai obtenu une maîtrise et un doctorat en sociologie. Pour mon baccalauréat, j'ai étudié les centres de ressources pour les familles des militaires ainsi que les femmes. À la maîtrise, j'ai étudié les militaires lesbiennes. Au doctorat, j'ai étudié les femmes militaires. Après mon doctorat, j'ai obtenu une bourse Banting et, en 2015, j'ai obtenu un poste permanent dans le milieu universitaire à l'Université Laurentienne. Je suis également boursière O'Brien.
Mon programme de recherche porte sur la marginalisation, plus précisément sur ce que vivent des groupes marginalisés lorsqu'ils sont membres d'une institution ou qu'ils y sont associés — par exemple, les militaires LGBTQIA+ et leurs partenaires, et les militaires.
Ma collègue Carmen Poulin et moi avons collaboré à deux grandes études financées par les trois organismes subventionnaires qui portent sur les militaires canadiens et la marginalisation.
La première étude a été menée à la fin des années 1990 et au début des années 2000. Nous avons examiné les expériences des militaires LGBT et de leurs partenaires quant aux répercussions de la politique militaire relative à l'homosexualité — l'infâme Ordonnance administrative 19‑20 des Forces canadiennes, ou OAFC 19‑20. Nous avons interrogé 126 personnes réparties en trois groupes: les personnes qui avaient été libérées, les personnes LGBT qui servaient encore et les partenaires civils des gens de ces deux groupes.
La deuxième étude est en cours. Nous nous penchons sur les expériences des militaires 2ELGBTQIA+ actuellement en service et de leurs partenaires.
Nous menons également une autre étude sur l'identité métisse qui est financée par les trois organismes subventionnaires.
Personnellement, mon service militaire a laissé des cicatrices. Je souffre du syndrome de stress post-traumatique, ou SSPT, associé à un traumatisme sexuel en milieu militaire et à des années d'exposition à une culture et à une institution militaires profondément homophobes et discriminatoires pour les personnes LGBT, les femmes et les Autochtones. J'ai passé la plus grande partie de ma carrière à ne pas pouvoir m'identifier ouvertement comme lesbienne, à ne pas vouloir m'identifier comme Autochtone et, si j'avais pu le faire, je n'aurais pas révélé que j'étais une femme.
Je suis très heureuse et reconnaissante des progrès qui ont été réalisés au sein de l'armée et du ministère des Anciens Combattants. Cependant, je pense qu'il reste encore du travail à faire. Si les politiques et les pratiques ont changé, des préjugés invisibles et profondément ancrés subsistent et la culture doit changer.
Je crois qu'il existe une certaine vision étroite de l'histoire et des récits de ces personnes marginalisées. Par exemple, en ce qui concerne la purge LGBT, je sais, d'après nos recherches, que de nombreux militaires LGBT ont servi en passant inaperçus pendant des années et sont aujourd'hui à la retraite. Ils portent cependant le traumatisme d'avoir subi cette purge dans une culture et une institution de longue date qui avaient intégré l'homophobie et étaient dominées par un hétérosexisme toxique et masculinisé.
L'étude que nous avons menée dans les années 1990 est la seule à avoir été réalisée avant le règlement du recours collectif de la purge LGBT. À l'exception de notre étude, l'histoire des partenaires ou des conjoints des survivants de la purge LGBT reste inconnue, invisible et non reconnue.
Je suis une vétérane et, de l'extérieur, mon histoire est une réussite, mais je traîne les blessures psychologiques d'avoir enduré la marginalisation en tant que membre de la communauté LGBT pendant les années de purge et en tant que femme qui a servi pendant ces années — une époque peu accueillante. Je me demande souvent si quelqu'un pense aux conséquences durables de cette situation.
Quelqu'un se demande‑t‑il où sont les responsables? J'y pense souvent à l'approche du jour du Souvenir, lorsque je demande de l'aide à Anciens Combattants Canada, ou ACC, lorsque je me rends à une filiale de la Légion ou lorsque je participe à un rassemblement de vétérans.
Je me demande également ce qu'ACC et les forces armées savent des Métis, des vétérans métis et des expériences et de l'histoire des Métis. Ont-ils pensé à Louis Riel et à sa mort aux mains de militaires canadiens? Il est mort pour son peuple, en le défendant, en défendant les maisons et les moyens de subsistance de son peuple, mais on l'a accusé de trahison et pendu.
C'est difficile pour moi, d'une part, d'être une fière vétérane qui a servi son pays et, d'autre part, de savoir comment les Métis ont été traités dans l'histoire. Je n'ai pas encore réussi à régler cette contradiction. Je me demande dans quelle mesure ACC et les forces armées connaissent ce chapitre de l'histoire des Métis ou en tiennent compte.
Merci. Maarsii de m'avoir accordé du temps et de m'avoir écoutée.
:
Je vous remercie. Avant de commencer, j'aimerais souligner que nous sommes réunis ici aujourd'hui sur le territoire algonquin anishinabe.
[La témoin s'exprime en ojibwé.]
[Traduction]
Je m'appelle Debbie Eisan. Je suis une ancienne combattante, ou vétérane, qui a servi pendant 36 ans dans les Forces armées canadiennes. Je suis originaire de la Première Nation de Batchewana, en Ontario. Je réside maintenant en Nouvelle-Écosse, là où ma carrière dans la marine m'a amenée. Ma carrière de 36 ans a duré de 1975 à 2011. J'ai pris ma retraite un vendredi, en 2011, j'ai enlevé mes bottes de mer et j'ai enfilé des mocassins le lundi. Depuis, je travaille au Centre d'amitié autochtone Mi'kmaw, soit le Mi'kmaw Native Friendship Centre.
Aujourd'hui, je témoigne en tant qu'ancienne combattante des Premières Nations et représentante du Conseil des anciens combattants des Premières Nations de l'Assemblée des Premières Nations. Le Conseil défend les intérêts des anciens combattants des Premières Nations, de leurs familles et de leurs collectivités et il exprime les préoccupations des anciens combattants des Premières Nations qui ont souffert des traumatismes liés au service ou à la guerre et de leurs répercussions sur les familles au fil des générations.
Les Premières Nations servent depuis longtemps dans les Forces armées canadiennes et de nombreux anciens combattants retournent dans leur collectivité après leur service. Le Conseil des anciens combattants des Premières Nations est conscient des difficultés particulières auxquelles sont confrontés ces anciens combattants et a fait de leur soutien une priorité. Nous venons parler des histoires inédites, de l'héroïsme méconnu et des difficultés auxquelles les anciens combattants autochtones font constamment face, en particulier les anciens combattants des Premières Nations qui ont servi cette nation avec un dévouement inébranlable et un grand sens du sacrifice.
Les principales priorités du Conseil sont, entre autres, de réclamer, pour les anciens combattants autochtones, un meilleur accès aux prestations et aux services destinés aux anciens combattants; de prôner l'intégration de la sensibilisation aux réalités culturelles dans les programmes de soutien aux anciens combattants; de répondre aux besoins de santé particuliers des anciens combattants autochtones, y compris en santé mentale; et de préserver et d'honorer l'héritage du service militaire autochtone.
Je vais parler des principaux sujets de préoccupation soulevés par le Conseil des anciens combattants des Premières Nations.
Tout d'abord, il y a la discrimination, car de nombreux anciens combattants des Premières Nations se sont vu refuser des prestations, ont perdu leur statut d'Indien et ont été exclus lorsqu'il s'agit des monuments commémoratifs et des cérémonies du jour du Souvenir. Ce traitement honteux constitue une tache dans l'histoire de notre nation. Il nous faut en prendre conscience et corriger la situation.
Aider les anciens combattants autochtones dans les diverses collectivités des Premières Nations présente des défis uniques, car l'éloignement de certaines collectivités complique l'accès aux services. De plus, des obstacles culturels et linguistiques nuisent à l'accès aux services généraux destinés aux anciens combattants; il existe une méfiance de longue date chez certains peuples autochtones à l'égard des institutions gouvernementales; et dans de nombreuses collectivités des Premières Nations, les ressources consacrées au soutien des anciens combattants sont limitées.
Parmi les difficultés rencontrées par les anciennes combattantes autochtones, il y a les disparités dans les soins de santé. Les anciennes combattantes ont souvent du mal à recevoir des soins adaptés au sexe dans le système d'administration de la santé des vétérans, qui a toujours été axé sur les hommes: accès limité à des services de gynécologie et de santé reproductive, dépistage et traitement inadéquats pour les affections plus courantes chez les femmes et manque d'intimité dans certaines installations d'Anciens Combattants Canada qui n'ont pas été conçues pour les femmes.
Le taux de traumatisme sexuel en milieu militaire est plus élevé chez les femmes que chez les hommes. Cela entraîne des effets psychologiques à long terme et une prévalence plus élevée de SSPT lié aux agressions sexuelles ou au harcèlement subis pendant leur service. De plus, elles ont du mal à dénoncer ce qui s'est passé et à demander de l'aide par crainte de représailles ou de stigmatisation. En ce qui a trait aux responsabilités familiales, de nombreuses anciennes combattantes sont confrontées à des difficultés particulières pour concilier leur vie après le service et leurs obligations familiales. En outre, elles se retrouvent bien souvent seules et il est difficile de faire garder leurs enfants pour aller à des rendez-vous médicaux ou suivre une formation professionnelle.
Les anciennes combattantes autochtones sont souvent confrontées à un clivage culturel lorsqu'elles cherchent des services de soutien; au manque de services adaptés à leur culture dans les systèmes généraux de soutien aux anciens combattants; et à des difficultés d'accès aux pratiques de guérison traditionnelles dans le cadre du programme de soins de santé d'Anciens Combattants Canada. De nombreuses collectivités autochtones se trouvent dans des régions éloignées, ce qui crée d'autres obstacles à l'accès aux services destinés aux anciens combattants. L'accès aux installations et aux soins spécialisés d'Anciens Combattants Canada est limité et il leur est difficile de participer à des programmes de formation professionnelle ou à des occasions d'apprentissage.
Les séquelles laissées par les traumatismes peuvent faire en sorte que les anciennes combattantes autochtones ne veulent pas demander de l'aide aux institutions gouvernementales. Elles hésitent à communiquer avec les services d'Anciens Combattants Canada en raison des mauvaises expériences qu'elles ont eues dans le passé avec les organismes gouvernementaux. Il est nécessaire de mettre en place des initiatives visant à instaurer un climat de confiance et des systèmes de soutien communautaire.
Pour répondre aux besoins particuliers des anciennes combattantes, et notamment des anciennes combattantes autochtones, il est nécessaire d'adopter des approches et des politiques ciblées.
Compte tenu des difficultés, la collaboration entre l'APN et Anciens Combattants Canada a abouti à la signature d'une lettre d'entente qui vise à élargir les activités de sensibilisation, à accroître la représentation des Premières Nations dans les activités de commémoration et à établir un registre historique des anciens combattants des Premières Nations.
La lettre d'entente met l'accent sur quatre piliers principaux: premièrement, évaluer et élargir les activités de sensibilisation à l'intention des anciens combattants des Premières Nations et de leurs familles; deuxièmement, établir des points de contact clairs pour les questions relatives aux anciens combattants des Premières Nations à ACC; troisièmement, accroître la représentation autochtone dans les activités de commémoration; quatrièmement, soutenir l'établissement d'un registre historique des anciens combattants et soldats des Premières Nations qui ont servi en temps de guerre ou de conflit militaire et en temps de paix, y compris ceux non documentés par le Canada.
Pour répondre aux besoins particuliers des anciennes combattantes, notamment des anciennes combattantes autochtones, il faut adopter des approches et des politiques ciblées. En tenant compte de ces difficultés particulières et en prenant des mesures à leur égard, nous pourrons mieux soutenir tous les anciens combattants dans leur vie après le service.
Merci. Meegwetch.
:
Comme je le disais, des observations empiriques indiquent qu'il y a actuellement un manque de soutien adapté à la culture des anciens combattants des Premières Nations, ce qui augmente le risque qu'ils se retrouvent en situation d'itinérance et contribue à la surreprésentation des Premières Nations dans la population des anciens combattants sans abri.
L'Assemblée des Premières Nations préconise la mise en place d'un réseau de soutien et de services adaptés à la culture et accessibles aux anciens combattants des Premières Nations. Il s'agit notamment de veiller à ce que les Premières Nations disposent des ressources et de la compétence nécessaires pour fournir elles-mêmes les services.
Le Conseil des anciens combattants des Premières Nations de l'Assemblée des Premières Nations est en train de préparer la deuxième phase de la lettre d'entente qu'Anciens Combattants Canada et lui ont signée. Cette phase s'appuiera sur l'engagement commun qui a été énoncé dans la lettre d'entente signée en avril 2023. Elle vise à répondre de façon concertée aux besoins particuliers des anciens combattants des Premières Nations, des militaires des Premières Nations en service et de leurs familles. L'objectif est d'améliorer leur bien-être en général en établissant un cadre sur la façon dont Anciens Combattants Canada peut créer et soutenir des modèles de guérison adaptés à la culture dans la prestation des services.
La lettre d'entente met l'accent sur quatre piliers: premièrement, assurer une inclusion véritable de la culture des Premières Nations dans les cérémonies et les activités commémoratives organisées par l'Assemblée des Premières Nations et Anciens Combattants Canada; deuxièmement, documenter et faire connaître l'histoire de ceux qui ont servi; troisièmement, offrir aux anciens combattants un soutien adapté à leur culture; quatrièmement, éliminer les obstacles à l'accès aux programmes et aux services d'Anciens Combattants Canada.
Enfin, j'aimerais vous remercier encore une fois de nous avoir invités à participer à la réunion sur le territoire algonquin anishinabe. Je vous remercie de l'attention que vous portez à cette question de très grande importance. Nous sommes impatients de répondre à vos questions et d'entamer un dialogue productif qui permettra d'améliorer concrètement la vie des anciens combattants partout au Canada.
:
Merci, monsieur le président.
C'est très gentil de la part de mes collègues de m'accorder ce droit de parole.
Je tiens à intervenir, aujourd'hui, pour vous parler d'une situation que je juge urgente et sur laquelle je cogite depuis trois jours. L'un des objectifs de notre comité est de travailler aux services offerts aux vétérans et de les bonifier, si possible, dans le but de ne pas laisser à eux-mêmes ces militaires qui ont défendu le Québec et le Canada.
Or, vendredi dernier, j'ai été mis au courant d'une situation profondément grave que je ne peux passer sous silence et dont vous entendrez probablement parler au cours des prochains jours.
Nous savons tous que le temps d'attente pour recevoir des services ou des indemnités n'est pas acceptable. On dépasse toujours les délais depuis des décennies. Ce comité travaille à régler ce problème depuis déjà très longtemps, peut-être trop longtemps. Nous avons entendu, ici, au Comité, des atrocités qui nous ont ébranlés en tant qu'humains. Nous avons tous la responsabilité, en tant que parlementaires, d'intervenir du mieux que nous le pouvons.
La vérificatrice générale a clairement dit, l'année dernière, que le ministère des Anciens Combattants faisait bien peu de choses pour remédier aux différents problèmes qu'on a vus ici, au Comité, et qui sont ciblés depuis très longtemps.
Monsieur Paul Tellier, un ancien sous-ministre, a dit très récemment que la fonction publique ne fonctionnait plus et que l'appareil fédéral ne fournissait plus les services pour lesquels il existe.
À l'heure où je vous parle, un homme, à Québec, le vétéran et ancien caporal‑chef Michel Marceau, en est à sa sixième journée de grève de la faim pour nous alerter et nous forcer à agir. Cet homme, qui a servi avec honneur, se bat aujourd'hui contre la bureaucratie folle du ministère des Anciens Combattants. Il est incapable d'obtenir un médecin de famille et il est en lutte constante pour obtenir des indemnités qui n'arrivent pas ou qui arrivent des années plus tard. Il m'a dit qu'il désespérait de trouver un soutien psychologique pour lui, et particulièrement pour son fils. Il est pris dans ce qui ressemble à une version moderne du film Les 12 travaux d’Astérix.
Chaque jour d'inaction, vous en conviendrez, est une forme de trahison envers ceux qui ont tant donné pour nous. M. Michel Marceau n'est qu'un exemple, mais il pousse la limite, actuellement, en faisant une grève de la faim qui pourrait être dommageable pour sa santé, et carrément pour sa vie.
Tout d'abord, permettez-moi de remercier tous les anciens combattants qui sont avec nous aujourd'hui de leur service.
J'aimerais également me faire l'écho des propos de M. Desilets. Nous entendons souvent les anciens combattants parler d'une politique des trois « D », car les nombreux délais et dénis créent des situations où les anciens combattants estiment que les grèves de la faim deviennent nécessaires, où ils se sentent obligés de communiquer leurs détails personnels aux médias et où, malheureusement, de nombreux anciens combattants en arrivent à se suicider. D'autres se sont même vu proposer une aide au suicide par le ministère lui-même. C'est un déshonneur et une honte et je suis heureux que vous ayez soulevé la question. Je tiens donc à me joindre à ceux et celles qui affirment que c'est inacceptable et qu'il faut faire quelque chose.
Permettez-moi de vous donner la parole... Et je vous laisse le soin, madame Eisan et monsieur Knockwood, de décider qui répondra au nom du Conseil des anciens combattants de l'Assemblée des Premières Nations. Je suis sûr que vous connaissez le programme qui a été mis sur pied par les Forces armées canadiennes, soit le programme Black Bear.
Selon vous, des programmes comme celui‑ci, qui contribuent à intégrer un plus grand nombre d'Autochtones dans l'armée, aideront-ils les membres autochtones de nos forces armées à vivre une meilleure expérience dans l'armée?
:
Je peux répondre à la question.
Je connais très bien le programme Black Bear, le programme Raven, le Programme d'initiation au leadership à l'intention des Autochtones, ou PILA, et le programme CFAE, car lorsque j'étais dans l'armée, je faisais partie de l'équipe qui a introduit ces programmes dans les Forces armées canadiennes. Ce sont d'excellents programmes pour les populations autochtones.
Toutefois, le problème qui se pose dans le cas de ces programmes, c'est le manque de suivi. En effet, dans le cadre de ces programmes, des membres autochtones décident de s'engager dans les Forces canadiennes. Toutefois, il y a un problème de discrimination et de racisme dans les rangs. Je sais que les Forces armées canadiennes déploient tous les efforts pour tenter de remédier à ce problème.
Les problèmes auxquels les Autochtones font face aujourd'hui se posent lorsqu'ils quittent l'armée et qu'ils tentent d'obtenir des soins dans un cadre spirituel. Notre culture et notre mode de vie passent par la spiritualité, surtout lorsque nous devons traverser des périodes très difficiles.
L'autre aspect est la fierté que nous ressentons à titre d'ancien combattant. Souvent, nos anciens combattants ne demandent pas d'aide. Il ne s'agit pas seulement des anciens combattants autochtones, mais de tous les anciens combattants. J'ai moi-même vécu l'expérience de chercher de l'aide, mais je ne voulais pas…
Je ne pensais pas que je ferais cela.
En raison de cette fierté, les gens ne veulent pas demander de l'aide, surtout lorsqu'il s'agit de personnes autochtones, car nous nous aidons nous-mêmes par l'entremise de notre spiritualité. Si la spiritualité n'est pas offerte, il est très difficile de s'engager dans cette voie.
Dans notre culture, la famille est un élément essentiel de notre identité. Lorsque les fonctionnaires du ministère des Anciens Combattants travaillent avec un ancien combattant autochtone, ils doivent également travailler avec nos familles par l'entremise de notre culture, de notre spiritualité et de notre mode de vie. Si nous ne parvenons pas à établir ce lien, nos anciens combattants autochtones passeront souvent entre les mailles du filet.
Oui, je suis d'accord. J'ai ouvert le programme Black Bear lorsqu'il a été mis en place à Borden. J'éprouve un peu de culpabilité à cet égard à cause de ce qui se passe une fois que les enfants ont suivi ce programme. Que leur arrive‑t‑il s'ils décident de s'enrôler? Je leur dis qu'une carrière dans les Forces armées canadiennes est un excellent choix. Cependant, lorsqu'ils s'enrôlent et qu'il leur arrive quelque chose, ils ne reçoivent pas les soins dont ils ont besoin par l'entremise du ministère des Anciens Combattants.
Je n'éprouve pas de frustration, mais je consacre mon énergie à m'assurer que le ministère des Anciens Combattants comprend les aspects spirituels et culturels de la prise en charge de nos anciens combattants autochtones.
Meegwetch. Je vous remercie.
On dirait que vous avez anticipé ma deuxième question, ou plutôt la deuxième partie de ma question, qui porte sur le suivi qui doit être assuré lorsque ces gens deviennent des anciens combattants et sur la question de savoir si, à votre avis, le ministère des Anciens Combattants est prêt à les prendre en charge. Je pense que vous avez exprimé clairement qu'à l'heure actuelle, vous ne pensez pas que le ministère est prêt à le faire. Vous avez abordé certaines questions précises, mais il y a une question dont vous n'avez pas parlé en détail, et c'est la question de la famille. Je vais donc vous donner l'occasion de le faire.
Je dirais même qu'il s'agit d'une question qui, à mon avis, n'est pas propre aux anciens combattants autochtones. Je pense qu'il faut faire davantage pour s'assurer que les familles de tous les anciens combattants participent au processus. Elles font partie du service, et elles devraient donc pouvoir participer aux soutiens et aux soins qui sont offerts par la suite, et elles devraient aussi pouvoir participer aux possibilités qui sont offertes aux anciens combattants. Pourriez-vous nous parler un peu plus des soutiens supplémentaires qui pourraient être offerts aux familles?
J'ai parlé à plusieurs reprises de certains programmes qui sont offerts, par exemple des programmes éducatifs et d'autres programmes semblables. Ces programmes ne devraient-ils pas être également accessibles aux conjoints et aux membres de la famille, car dans certains cas, par exemple, le conjoint doit maintenant subvenir aux besoins de la famille?
:
Oui, certainement, et je vous remercie.
Je pense qu'il est important que les familles autochtones participent au processus. À l'époque de la signature des traités, les Autochtones ont accepté de signer pour se battre pour l'Île de la Tortue. Ils n'étaient pas obligés de s'enrôler dans les Forces canadiennes. Ils ont choisi de le faire parce qu'ils voulaient respecter leur part des traités. Ils ont ainsi quitté leur famille, leur collectivité et leur culture. De nos jours, dans le cas de l'Afghanistan, du Rwanda et d'autres situations semblables, lorsqu'un ancien combattant profite d'un programme pour l'aider à surmonter un trouble de stress post-traumatique ou un traumatisme, les membres de sa famille doivent pouvoir participer à ce processus, car ils vivent cette expérience avec l'ancien combattant.
Mon mari est un ancien combattant et lorsqu'il est revenu de l'étranger, son commandant m'a envoyé une lettre pour me dire que mon mari rentrait à la maison et que s'il se cachait soudainement sous une table… Je le savais parce que j'ai déjà été militaire, mais un grand nombre de conjoints n'auraient pas su de quoi il parlait. Pourquoi se réfugie‑t‑il sous une table s'il entend un bruit fort? Comment se fait‑il qu'il ne puisse pas dormir dans un lit moelleux? C'est le genre de choses qui se produisent. Lorsqu'un ancien combattant vit ce genre de situation et qu'il reçoit un traitement, les membres de sa famille doivent pouvoir y participer, afin de comprendre le traumatisme subi par cet ancien combattant.
:
Tournons-nous vers les foyers pour anciens combattants au Canada. Lorsqu'on s'y attarde vraiment, qu'on les visite et qu'on se promène dans les couloirs, combien d'anciens combattants autochtones y voit‑on? Aucun. Pourquoi? Parce que, la plupart du temps, on ne les accepte pas. On leur refuse l'entrée. Ils ne sont pas assez bons. Ils n'ont pas assez d'argent. Ils n'ont pas ceci ou cela. Une foule de raisons sont évoquées pour ne pas remplir une obligation que les anciens combattants sont en droit d'exiger.
Je suis allé en Normandie pour le 80e anniversaire. Nous étions trois Autochtones: moi, un Autochtone de l'Ontario et un Métis. Nous avons dû retarder la tenue d'une cérémonie pour bon nombre de gens, car elle n'était pas adaptée à la culture, en grande partie. Nous avons donc ajouté une composante autochtone, une nuit de spiritualité, au programme. Le brigadier-général Robar est venu me voir, après un événement à l'abbaye, lors duquel j'ai chanté le chant d'honneur. Il m'a dit: « Merci. Grâce à vous, mon voyage en a valu la peine. »
C'est la partie que les gens ne voient pas: nous faisons véritablement partie des anciens combattants, mais nous sommes exclus. Si nous étions inclus, tous s'en porteraient mieux. C'est tout ce que nous demandons: nous voulons être inclus. L'appropriation culturelle... Pour notre culture, la seule chose qu'elle puisse faire est de prendre soin de ce qui existe déjà. Donnez-nous la chance de faire ce cadeau; c'est un cadeau que nous sommes prêts à faire.
Merci.
Depuis longtemps, j'utilise ma tribune, chaque fois que j'en ai l'occasion, pour rejoindre les anciens combattants autochtones, en particulier en milieu urbain, et j'installe des bureaux — à temps partiel, une fois par mois, par exemple — dans les centres d'amitié au Canada. Il existe 126 centres d'amitié au Canada. Les anciens combattants se rendent dans les centres urbains et ils vont dans les centres d'amitié pour obtenir de l'aide. C'est un élément de la question.
Ensuite, les anciens combattants autochtones qui vivent dans des régions éloignées peinent à accéder à ces services, surtout s'ils sont sans abri.
Enfin, le ministère des Anciens Combattants doit envisager les traitements qui nous sont destinés — les anciens combattants — sous l'angle de la spiritualité. Il faut, par exemple, avoir accès aux sueries et pouvoir parler aux aînés pour surmonter les traumatismes et les périodes difficiles. Il est nécessaire de revenir dans la communauté et travailler sur ces éléments spirituels.
:
En tant qu'anciennes combattantes autochtones, nous organisons nos cérémonies et nous faisons les choses, sur le plan culturel, un peu différemment. Les anciennes combattantes — les femmes, tout court — n'entrent pas dans la suerie lors des cérémonies. Pendant notre période lunaire, nous sommes considérées comme très puissantes. C'est pour cette raison que nous ne participons pas aux cérémonies et que nous ne prenons pas part aux cérémonies de purification. Il s'agit là des enseignements que les anciennes combattantes autochtones doivent recevoir de leurs aînées. Ces enseignements sont très différents de ceux que les aînés masculins leur donneraient. Pour que les anciennes combattantes autochtones aient accès à une spiritualité adaptée à leur culture... pour aller de l'avant, elles doivent avoir la possibilité de s'entretenir en tête-à-tête avec une aînée de leur communauté.
J'habite maintenant à Halifax, mais je viens du territoire anishinabe qui est près de Sault Ste. Marie, en Ontario. Si j'éprouvais des difficultés et que je devais parler à un aîné, j'aurais besoin de parler à une aînée anishinabe. Je ne peux pas le faire en territoire micmac, même si je respecte ce territoire. Je dois retourner sur mon propre territoire pour parler aux aînées anishinabes.
Nos enseignements se font de façon très différente. La voie dont nous vous parlons n'est pas facile à suivre. Cela prendra du temps, une grande compréhension et Anciens Combattants Canada devra réfléchir longuement à la façon dont il fait normalement les choses. Il s'agit d'adopter une approche où il y a deux perspectives. Il y a la perspective occidentale, la façon dont on travaille normalement avec les anciens combattants, et il y a la perspective autochtone, la façon dont les peuples autochtones surmontent les problèmes. C'est l'aîné Albert Marshall, de la nation micmaque Eskasoni, qui a parlé de l'approche à deux perspectives. J'ai employé cette approche pendant toute ma carrière. Elle permet d'avancer.
Voilà les enseignements qu'il faut suivre, selon le point de vue de la femme. Ils sont très différents.
Meegwetch. Merci.
:
Nous reprenons nos travaux.
Pour la deuxième heure, nous accueillons M. William Shead, président du Conseil d'administration du Neeginan Centre. Il comparaît par vidéoconférence. Nous recevons Mme Caitlin Bailey, directrice exécutive de la Fondation Vimy, par vidéoconférence.
Je vous souhaite la bienvenue. Vous disposerez de cinq minutes pour vos déclarations liminaires.
Nous offrons nos félicitations à la Fondation Vimy.
[Français]
Je sais qu'elle a récemment emménagé dans la Maison Louis‑Joseph‑Forget. Je vous en félicite donc.
[Traduction]
Madame Caitlin Bailey, je vais commencer par vous. Vous avez cinq minutes pour votre déclaration liminaire. Nous vous poserons ensuite des questions.
Veuillez allumer votre micro et commencer.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
[Traduction]
Nous avons en effet inauguré nos nouveaux bureaux la semaine dernière. Nous avons été très heureux de recevoir la visite de quelques membres du Comité avant l'ouverture.
[Français]
Je vous remercie de ce commentaire. C'est vraiment gentil.
[Traduction]
Bonjour. Je vous remercie de m'avoir invitée à m'adresser au Comité permanent. Je m'appelle Caitlin Bailey. Je représente aujourd'hui la Fondation Vimy, un organisme d'éducation qui se consacre à la commémoration de la Première Guerre mondiale et qui collabore avec le ministère des Anciens Combattants depuis 2010.
[Français]
Notre mission en matière d'éducation des jeunes et du public inclut l'organisation d'importants programmes nationaux qui racontent l'histoire des Canadiens et des Canadiennes qui ont vécu la Première Guerre mondiale, de 1914 à 1918.
[Traduction]
Ces programmes rejoignent des centaines de milliers de Canadiens chaque année.
Dans le cadre de notre travail, nous nous engageons auprès de nombreuses communautés en quête d'équité. Nous nous sommes engagés à intégrer les expériences des anciens combattants autochtones et noirs de la Première Guerre mondiale dans l'ensemble de notre programmation, en mettant l'accent sur leur service pendant le conflit et en soulignant les difficultés qu'ils ont rencontrées pour que ce service soit reconnu.
Dans une récente enquête nationale auprès des éducateurs, réalisée à l'automne 2024, 50 % des éducateurs interrogés ont indiqué qu'ils enseignaient déjà les expériences des Noirs et des Autochtones pendant la Première Guerre mondiale, mais qu'ils ne disposaient pas de suffisamment de ressources pédagogiques numériques.
[Français]
En outre, nos enquêtes internes auprès des jeunes participants et nos programmes révèlent un désir accru d'en savoir plus sur ces communautés et leurs expériences vécues pendant la Première Guerre mondiale.
[Traduction]
Des organisations comme la nôtre, et les nombreuses autres qui ont témoigné dans le cadre de l'étude de ce comité, contribuent à combler ces lacunes. Notre série de projets numériques menant au 110e anniversaire de Vimy en 2027 touchera des centaines de milliers de Canadiens et mettra en lumière les récits de nombreux anciens combattants de la Première Guerre mondiale, y compris les anciens combattants noirs et autochtones. Cependant, si nous voulons répondre aux besoins des éducateurs et du public que nous servons, des investissements sont nécessaires.
Je vous remercie une fois de plus de votre attention. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
[Français]
Je vous remercie encore.
Merci de me donner l'occasion de participer à cette réunion du Comité.
Comme l'a dit le président, je m'appelle Bill Shead. J'ai 85 ans, je suis un Cri de la Peguis First Nation, un ancien combattant de la marine et le président du Neeginan Centre, où nous aidons les Autochtones à effectuer leur transition vers la vie dans les régions urbaines.
Je vais parler d'une approche assez unique. Elle ne concerne pas directement les services aux anciens combattants, mais je pense qu'il s'agit d'un modèle dont pourraient s'inspirer ceux qui fournissent des services aux anciens combattants, qu'ils soient autochtones ou non.
À mesure que la migration des peuples autochtones vers les centres urbains augmentait, les gouvernements ont mis en place des programmes et du financement destinés aux ONG — c'est‑à‑dire des organisations non gouvernementales ou de bienfaisance, à but non lucratif —, afin d'aider les peuples autochtones à s'adapter à la vie en milieu urbain. La plupart des programmes traitaient des enjeux liés à la transition de façon ponctuelle et en vase clos. Les ONG fonctionnaient indépendamment les unes des autres, et différents organismes gouvernementaux finançaient différentes ONG pour qu'elles puissent mettre en œuvre des programmes pour chaque dossier lié à la transition, comme l'alphabétisation, la formation, etc.
Qui plus est, le financement destiné à la location de locaux où les programmes seraient administrés était souvent inadéquat. Les ONG devaient se contenter de louer des locaux tels quels, là où ils se trouvaient, et ces locaux n'étaient pas rénovés, ne convenaient pas à la prestation de services et étaient situés dans des endroits difficiles d'accès.
Plusieurs ONG de Winnipeg ont travaillé ensemble et ont décidé d'améliorer leur milieu de travail et de combler les lacunes en matière de prestation de services. Elles se sont constituées en société sous le nom du Aboriginal Centre of Winnipeg en 1990. Puis, en 1992, elles ont acheté la gare patrimoniale du CP à Winnipeg.
Je suis associé au Neeginan Centre depuis le début de l'année 1993. J'ai d'abord été directeur général responsable de la remise en état et de la rénovation de la gare pour en faire un centre de services à guichet unique. Une fois les travaux terminés, le bâtiment vieux de 120 ans est devenu un centre de services opérationnel tel que l'avaient imaginé les personnes qui s'étaient constituées en société pour former le Aboriginal Centre of Winnipeg.
Au Neeginan Centre, les peuples autochtones bénéficient d'un éventail de services d'éducation, de formation et de soutien qui les aident à améliorer leurs chances. Deux grandes ONG mènent leurs activités à partir du centre. Je vais parler de chacune d'entre elles.
La Neeginan Education, Training and Employment Services offre des services d'éducation, de formation et de soutien aux étudiants ainsi que des occasions d'emploi. Elle exploite le Aboriginal Community Campus, le Neeginan College of Applied Technology; la garderie Kookum's Place; le Neeginan Village, un complexe de logements pour étudiants; l'initiative aérospatiale autochtone et le centre de formation technique.
Le Aboriginal Health and Wellness Centre est un organisme communautaire qui offre des ressources en matière de santé et de bien-être. Il propose, grâce aux services de médecins, d'infirmières, d'agents de santé communautaire et de guérisseurs traditionnels, une clinique de soins primaires, des programmes d'éducation et de sensibilisation communautaire, ainsi que des programmes de promotion de la santé et de prévention. Abinotci Mino-Ayawin est un programme Bon départ pour la santé des enfants. Il comprend également un programme de prévention du syndrome d'alcoolisme fœtal et de ses effets.
À la fin des années 1990, les anciens combattants autochtones ont réclamé une plus grande reconnaissance publique. C'est ainsi que le maire de la ville de Winnipeg a établi la Journée des vétérans autochtones pour la ville en 1993. En 1994, le personnel et les étudiants du Neeginan Centre ont organisé la première cérémonie qui soulignait la Journée des vétérans autochtones, dans la rotonde du Neeginan Centre. Cette cérémonie a eu lieu chaque année depuis, sauf pendant la pandémie de COVID‑19.
J'aimerais parler d'un autre programme très brièvement. Je suis membre du conseil d'administration d'Indspire. Indspire est un organisme de bienfaisance qui amasse des fonds pour l'éducation postsecondaire des étudiants autochtones.
Ce programme a été lancé lorsqu'Indspire s'appelait la Canadian Native Arts Foundation. La fondation a pris la responsabilité de gérer le fonds national de bourses d'études pour les vétérans autochtones, que le gouvernement du Canada a mis sur pied en réponse à une recommandation du comité sénatorial sur les vétérans autochtones, qui était présidé par feu sénateur Len Marchand.
Le fonds de 1,1 million de dollars a stimulé une croissance formidable dans le travail d'Indspire. Grâce à des bourses, il finance des étudiants qui suivent une formation ou qui font des études postsecondaires. Depuis 1996, Indspire a distribué 270 millions de dollars en bourses à quelque 74 000 étudiants. Cette année seulement, nous avons distribué 32 millions de dollars à 8 400 étudiants. Ces deux organisations, Indspire et Neeginan, proviennent vraiment de l'initiative de dirigeants autochtones qui ont couru un très grand risque.
Le Neeginan Centre a acheté un immeuble de 120 000 pieds carrés dans le but de le transformer en un meilleur endroit pour offrir des services de manière coordonnée. Il a réussi.
L'organisme Indspire, en étant stimulé par son rôle de responsable d'un fonds devant servir à offrir des bourses d'études au‑delà de son travail initial dans le domaine artistique, a maintenant réussi quelque chose qui va selon moi au‑delà de ses rêves les plus fous, à savoir offrir des bourses à un très grand nombre d'étudiants au cours des 20 dernières années.
Mon association avec ces deux organismes témoigne de tous les efforts déployés par des vétérans pour améliorer la vie d'Autochtones qui retournent généralement en ville. Le fait que le Neeginan Centre a réussi à lui seul à offrir des services coordonnés à un guichet unique est peut-être une chose sur laquelle les gens du ministère des Anciens Combattants pourraient se pencher, ainsi que d'autres personnes qui veulent aider les vétérans qui retournent vivre dans leurs communautés.
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Merci, monsieur le président.
Merci à nos témoins d'être ici.
Madame Bailey, on vous a déjà posé toutes les questions que je voulais vous poser. Je vous ai rencontrée à quelques reprises. Je vous suis vraiment reconnaissante du travail que vous faites pour renseigner un aussi grand nombre de personnes sur les sacrifices du Canada et sur les particularités de l'expérience vécue par les communautés.
Monsieur Shead, votre exposé m'a vraiment touchée, et j'ai lu un peu sur vous. Vous avez fait beaucoup de choses vraiment extraordinaires, et je vous en suis reconnaissante.
Les derniers témoins ont parlé des soutiens adaptés à la culture et des soutiens spirituels qui sont souvent nécessaires pour les Autochtones après leur période de service.
Pouvez-vous parler de ce que vous savez à ce sujet? Pouvez-vous également parler de votre organisation, et dire si vous offrez certains de ces services?
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Dans un contexte local comme celui du Neeginan Centre, il est relativement facile d'offrir des services culturels puisque notre objectif est moins vaste. Cependant, dans une organisation comme les Forces canadiennes, ou certains groupes qui offrent des services à l'échelle nationale, il devient très difficile de s'adapter aux réalités culturelles d'un bout à l'autre du pays. Il y a énormément de langues, de traditions et de cultures différentes. C'est un défi.
Tout ce que je peux dire, c'est que lorsqu'on essaie sincèrement de faire quelque chose, même si c'est aussi simple qu'une cérémonie de purification ou que de demander à quelqu'un de faire une prière au début d'une réunion, peu importe ce que c'est, je pense que ce sera bien accueilli par tout le monde, car c'est perçu comme un effort sincère.
Je sais qu'il y a 70 ans — bon sang, cela fait longtemps —, il était très difficile pour nous de nous rassembler en ayant une idée précise de la façon d'expliquer à un groupe d'anglophones comment on nous identifiait individuellement comme étant des Indiens, par exemple. Nous venions de différents groupes d'un bout à l'autre du pays. La seule chose sur laquelle nous pouvions nous entendre, c'est peut-être que tout ce que nous pouvions faire, c'est être comme les Indiens des films de John Wayne et se joindre aux autres pour rire un peu, mais ce n'est plus approprié. On ne peut plus le faire.
Il faut s'efforcer d'être sensible à la spiritualité et aux cultures, de manière générale. C'est toujours une question de respect. Il faut tout simplement être respectueux en tant que personne, traiter la personne comme une personne à part entière et essayer de lui offrir une véritable amitié. À partir de là, je pense qu'on peut commencer à comprendre comment la personne a été touchée par ce qui s'est produit, et on peut peut-être ensuite lui payer une bière, si c'est le cas. Je ne sais pas.