Bienvenue à la 70e séance du Comité permanent des anciens combattants de la Chambre des communes.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le lundi 3 octobre 2022, le Comité reprend son étude sur l'expérience des vétéranes.
[Français]
En ce qui concerne l'interprétation, vous avez le choix, au bas de l'écran, entre le français, l'anglais et le parquet.
Bien que cette salle soit munie d'un système audio performant, il est possible que des retours de son se produisent. Ceux-ci peuvent être extrêmement nocifs pour les interprètes et leur causer de graves blessures. La cause la plus fréquente d'un retour de son est une oreillette portée trop proche d'un microphone. J'invite donc tous les participants à faire preuve d'une grande prudence lors de la manipulation des oreillettes, à éviter autant que possible de les manipuler et à s'assurer de bien parler dans leur microphone assigné.
Je vous rappelle aussi que toutes les observations doivent être adressées à la présidence.
Conformément à notre motion de régie interne, puisque nous avons des témoins et des députés qui participent en ligne à la réunion, je vous informe que les tests de connexion ont été effectués avec succès avant la réunion.
Avant d'accueillir les témoins, j'aimerais faire un traumavertissement. Nous allons discuter d'expériences liées à la santé mentale. Cela peut être un élément déclencheur pour les gens ici avec nous, les téléspectateurs, les députés ou des membres de leur personnel qui ont vécu des expériences similaires. Si vous vous sentez bouleversés ou si vous avez besoin d'aide, veuillez en informer le greffier.
Je tiens également à vous informer que les témoins seront avec nous pendant deux heures. Je vous signale donc que nous ferons une courte pause de cinq minutes.
Je vais vous présenter nos témoins d'aujourd'hui.
À titre personnel, nous accueillons Marie-Ève Doucet, technicienne en essais non-destructifs, par vidéoconférence. Nous accueillons Mme Jennifer Smith, vétérane, et Stéfanie von Hlatky, professeure titulaire, Queen's University et titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur le Genre, la sécurité et les forces armées. De la Quinism Foundation, nous accueillons le Dr Remington Nevin, directeur exécutif.
Soyez les bienvenus. Vous aurez chacun cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire.
Je vais commencer par la vidéoconférence. J'invite Mme Marie-Eve Doucet à commencer.
Vous avez cinq minutes pour votre déclaration préliminaire. Veuillez mettre votre micro en marche et commencer.
Je m'appelle Marie-Ève Doucet. J'ai 42 ans. Je vis actuellement à Chicoutimi, au Québec, avec mon fils de 10 ans qui a des besoins particuliers et mon mari, qui est encore en service.
J'ai accumulé plus de 20 ans de service à bord du CF‑18 Hornet en tant que technicienne en aviation et en essais non destructifs. J'ai été libéré pour raisons médicales en 2021 de la base de Bagotville, au Québec.
J'aimerais axer notre discussion d'aujourd'hui sur mon exposition aux produits chimiques dangereux dans le cadre du service. Je crois que les produits chimiques auxquels j'ai été exposée au cours de ma carrière ont non seulement causé ma libération pour raisons médicales et ma mauvaise santé aujourd'hui, mais ont aussi été la cause des problèmes persistants avec mon fils.
En 2018, j'ai reçu un diagnostic de pinéalocytome de grade 2, une tumeur de la glande pinéale. En 2020, cette tumeur s'est propagée de mon cerveau à ma moelle épinière. J'ai déjà subi de longues interventions chirurgicales et des traitements de radiothérapie maximale. En raison de la progression continue de mon cancer, j'ai récemment commencé à recevoir des traitements de chimiothérapie.
Je remercie le Comité de me donner l'occasion de prendre la parole. Je ne sais pas pendant combien de temps encore je pourrai continuer à défendre mes intérêts sur ces questions importantes qui, je le sais, ont également touché d'autres femmes dans l'armée, surtout dans mon métier.
Vous n'avez probablement jamais entendu parler de mon type de cancer du cerveau. C'est une maladie très rare et inhabituelle, qui représente moins de 1 % de tous les cancers du cerveau. Ce que l'on sait à son sujet suggère que ce type de cancer peut être lié à deux facteurs, soit la génétique, soit l'exposition professionnelle et environnementale. Aucune forme de cancer n'est présente dans ma famille. Je n'ai donc aucune preuve de prédisposition génétique à ce cancer ou à d'autres cancers.
Cela nous laisse l'autre hypothèse logique, à savoir qu'après 20 ans d'exposition importante à de multiples produits chimiques cancérogènes et à des particules ultrafines dont on sait qu'elles nuisent au système nerveux central, c'est mon milieu de travail dans l'armée qui a aggravé, sinon directement causé, mon cancer actuel, et qui a aussi eu un effet négatif sur mon fils à naître pendant ma grossesse au travail.
À l'heure actuelle, les Forces armées canadiennes ne tiennent pas de registre de l'exposition à des produits chimiques en milieu de travail dans nos dossiers médicaux. Je pense qu'ils devraient le faire. Peut-être qu'alors, lorsque j'ai présenté une demande à Anciens Combattants Canada pour un cancer du cerveau le 3 mars 2021, je n'aurais pas reçu une décision de refus le 24 mars, à peine trois semaines plus tard, en raison de l'absence de preuves que mon état de santé était lié à l'exposition à des produits chimiques dans mon milieu de travail.
Pour mon appel, on m'a dit que je devais fournir au ministère des renseignements qu'il m'était impossible d'obtenir; par conséquent, je ne pouvais pas aller de l'avant. Comme tant d'autres anciens combattants avant moi et après moi, je me suis retrouvée dans une impasse. Je n'avais aucun moyen de gagner. J'ai dû abandonner mon appel.
Exiger que l'ancien combattant concerné fournisse une preuve documentée pour déterminer la cause initiale du cancer, comme l'a demandé ACC, est une attente ou une demande injuste. Je crois aussi que les femmes sont accablées de façon disproportionnée par cette injustice systémique, car tout le système d'arbitrage a été mis en place pour les hommes, et pour soutenir les hommes. Il est tout à fait compréhensible que la recherche fondamentale sur la sécurité chimique et les préjudices liés à l'armée ait été effectuée sur des hommes. Il n'y a pratiquement pas de recherche parrainée par le gouvernement sur la façon dont les femmes peuvent, le cas échéant, réagir différemment des hommes sur le plan médical après avoir été exposées à des produits chimiques au travail.
Même si on m'a retirée pour des raisons médicales du travail continu directement à bord d'un aéronef pendant que j'étais enceinte, j'ai continué de travailler à l'intérieur du même hangar d'aviation en étant constamment exposée à de nombreux risques professionnels connus, y compris les émanations de carburéacteur, les particules ultrafines, le bruit et les vibrations. Encore une fois, il n'y a dans ma famille absolument aucune prédisposition génétique aux troubles du développement neurologique ou à toute autre maladie.
Mon enfant est le seul de ma famille né avec des problèmes. Le pédiatre a diagnostiqué chez lui une socialisation de type autistique, des problèmes de communication et une dyspraxie, une pathologie qui a une incidence sur sa motricité, sa coordination et son développement général. Nous avons payé de notre poche la majeure partie du coût de sa thérapie continue.
Je me demanderai toujours si les problèmes de mon fils découlent de l'exposition à des produits chimiques et à des particules ultrafines qu'il m'a été ordonné de poursuivre tandis que je travaillais pendant ma grossesse.
À l'avenir, je demande au Comité de recommander que tous les problèmes de santé causés, ne serait‑ce que de façon plausible, par des expositions raisonnablement soutenues des femmes militaires à des produits chimiques, soient présumément approuvés comme étant liés au service.
Je demande au Comité de recommander cette approche proactive jusqu'à ce que le gouvernement ait mis en place un plan stratégique de recherche militaire, particulièrement pour les femmes qui ont servi dans l'armée. On peut espérer qu'un tel plan de recherche permettrait, une fois pour toutes, de prouver la sécurité au travail de ces postes et de ces environnements propres à l'armée, plutôt que de s'attendre à ce que les anciens combattants touchés prouvent individuellement leur préjudice.
Je demande également au Comité de recommander que le MDN, les FAC et ACC se réunissent pour étudier la possibilité que l'exposition des femmes militaires au risque en milieu de travail cause un préjudice direct à leurs descendants.
Merci.
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Bonjour, monsieur le président, et bonjour aux membres du Comité. C'est un privilège d'être ici aujourd'hui, et je vous remercie de m'en donner l'occasion.
Je m'appelle Jennifer Smith et j'ai 52 ans. Je suis ici aujourd'hui à titre personnel, sans grade, sans titre de retraitée, et sans mention spéciale. Je m'identifie uniquement comme une vétérane et une femme, une distinction qui semble simple et qui est pourtant complexe. Depuis que j'ai été forcée de fuir les FAC parce que c'était une question de survie, le terme « ancien combattant » est un titre auquel j'ai du mal à m'identifier, et il ne m'évoque ni fierté ni honneurs.
En 1990, je n'avais que 18 ans. J'étais en bonne santé, j'étais pleine de vie et j'avais une carrière sportive prometteuse devant moi, mais j'ai choisi de servir mon pays.
J'ai commencé l'instruction de base de la Force régulière avec les FAC, et j'étais à la BFC Cornwallis. J'étais l'une des sept femmes d'un peloton comptant près de cent hommes. Le harcèlement sexuel par les recrues et les enseignants hommes était quotidien, en particulier les blagues déshumanisantes, les gestes sexuels et les commentaires sexuels obscènes. Mes sous-vêtements étaient exposés devant le peloton, accrochés au mât ou pendus par les fenêtres de la caserne.
Cette tendance au harcèlement sexuel s'est perpétuée tout au long de l'instruction de base et s'est poursuivie pendant ma formation professionnelle navale NQ3, au cours de laquelle j'ai de nouveau été la seule femme du groupe.
Pendant mon service militaire, j'ai été agressée à maintes reprises physiquement et sexuellement, j'ai notamment été violée par un instructeur de drill, violée en groupe dans des casernes par d'autres recrues masculines et agressée sexuellement lors d'une intervention dentaire par le dentiste militaire.
J'étais une recrue de la marine de combat. C'était à une époque où ces métiers venaient de s'ouvrir aux femmes, et j'étais terrorisée dans ce poste. Je n'ai jamais été en sécurité, et j'ai reçu une série de menaces de mort parce que j'étais une femme.
Avant mon affectation dans la flotte de l'Atlantique, j'ai été agressée par de multiples assaillants — tous des militaires — on m'a attachée, bandé les yeux et séquestrée de force pendant, je crois, trois jours. J'ai été dénudée, privée de sommeil, violée à répétition, sodomisée, embarquée et submergée dans l'eau glacée. Au cours de cette épreuve, on m'a répété à maintes reprises que les femmes n'étaient pas bienvenues à bord d'un navire de guerre et que je ferais mieux trouver un moyen de quitter l'armée si je voulais vivre. Ils m'ont mis une baïonnette sous le menton et m'ont dit comment ils allaient me tuer, en me disant: « Un marin peut facilement glisser et tomber du navire pendant le quart, la nuit, sans faire de bruit. »
J'ai quitté l'armée au bout de 13 mois par crainte pour ma vie. On m'a donné un billet aller simple à destination de ma ville d'origine et rien d'autre, pas de contacts, pas de soutien, rien. On m'a larguée à un aéroport et abandonnée à une vie irrémédiablement bouleversée par la violence dévastatrice que j'avais vécue dans les FAC.
Même si c'était il y a plus de 30 ans, les attaques brutales, le manque de sécurité et les mauvais traitements psychologiques ont eu de graves répercussions sur tous les aspects de ma vie. Je souffre d'un TSPT et d'une dépression graves et chroniques, de douleurs chroniques et sévères causées par des blessures physiques, des infections chroniques, des problèmes sexuels, urinaires et reproductifs, et des problèmes d'estomac et d'intestin.
Je suis incapable de fonctionner au jour le jour et je passe une grande partie de mon temps dans ma chambre à coucher dans l'obscurité, gravement isolée et incapable de subvenir à mes besoins les plus élémentaires. J'ai eu des problèmes d'itinérance pendant de longues périodes; de multiples hospitalisations ont eu une incidence sur le fait d'être avec mes enfants, et je suis seule, car je ne suis pas en mesure de me sentir en sécurité dans une relation.
Depuis que j'ai pris contact avec ACC il y a cinq ans, je ne me suis pas sentie soutenue, comprise ou entendue par le système du ministère. Comme j'ai quitté les FAC en 1991, ma pension est au plus bas niveau possible, ce qui signifie que j'ai des difficultés financières continues qui s'aggraveront à mesure que je vieillirai. Parce que je vis seule et que je n'ai pas d'aide familiale ou conjugale, je ne suis pas admissible à des prestations comme l'allocation d'aidant naturel ou la prestation pour soins auxiliaires. Lorsque j'étais sans-abri, il y a beaucoup de prestations que je n'étais pas en mesure de percevoir parce que je n'avais pas d'adresse stable.
La réponse d'ACC a consisté à demander de façon répétée une évaluation à jour à une infirmière ou à un ergothérapeute, à obtenir des recommandations, puis à ne pas faire de suivi. Des mois plus tard, lorsque je demande les services dont j'ai besoin, on me dit que j'ai besoin d'une autre évaluation.
Les évaluations sont très difficiles en raison de mes antécédents traumatisants, car chaque évaluateur entre dans mon logement dont la disposition est en constante évolution et pose des questions sur mes antécédents, même s'ils sont connus et que de nombreuses évaluations ont déjà été effectuées. ACC a cette information.
Je n'ai pas encore reçu d'aide pour payer une personne préposée aux soins personnels qui m'aiderait à accomplir les tâches de base de la vie, par exemple sortir de ma chambre à coucher, manger et prendre une douche. J'ai été jugée difficile et récalcitrante parce que je ne corresponds pas aux catégories prévues par le système d'ACC.
Les détails de mon expérience et l'ampleur du manque de soutien sont difficiles à décrire dans un court exposé. J'espère que ce que j'ai dit aura un effet.
D'après mon expérience, j'ai quelques recommandations pour ACC qui pourront être abordées plus tard pendant la période de questions.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
Ce sera bref et, encore une fois, n'hésitez pas à me demander de vous en dire davantage. J'ai de nombreux exemples de situations vécues.
Premièrement, j'augmenterais les prestations pour les femmes qui vivent seules et qui n'ont souvent ni soignant, ni membre de leur famille.
Je recommande de mettre à jour le processus de traitement des demandes afin de mieux tenir compte des problèmes de santé physique des femmes, y compris les formes propres aux femmes des problèmes sexuels, urinaires et reproductifs. J'ai joint à titre de preuve un des questionnaires médicaux, et je pourrai en parler plus longuement pendant la période des questions.
Je recommande de former spécialement un groupe de gestionnaires de cas dans les régions du Canada, qui connaissent bien les problèmes des femmes, y compris l'insécurité en matière de logement et l'itinérance, ainsi que les traumatismes sexuels subis par les militaires.
Des changements systémiques sont nécessaires pour veiller à ce que les recommandations médicales et psychosociales formulées pour aider les vétéranes soient reconnues et suivies.
Enfin, il faut investir dans la recherche sur les vétéranes, de préférence menée par des vétéranes elles-mêmes.
Merci, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président.
Je tiens également à remercier Mme Doucet et Mme Smith de leurs témoignages.
Mes recherches à l'Université Queen's sur le sujet de cette étude ont porté sur les répercussions différenciées du service militaire sur les femmes, ainsi que sur la transition professionnelle de la vie militaire à la vie civile.
Chaque année, des milliers de militaires quittent l'armée, habituellement vers la fin de la trentaine, pour se joindre à la population des anciens combattants canadiens. Près de 75 000 anciens combattants sont des femmes, soit plus de 16 %, ce qui correspond à leur représentation dans les Forces armées canadiennes.
Compte tenu de cela, tous les programmes de soutien aux anciens combattants devraient tenir compte de l'évolution démographique de la population des anciens combattants canadiens. Cela signifie qu'il faut mettre l'accent sur la participation croissante des femmes dans les Forces armées canadiennes. Non seulement il y a de plus en plus de femmes dans l'armée, mais depuis la fin des années 1980, elles n'ont plus à faire face à des restrictions formelles d'emploi dans l'armée et peuvent prétendre à tous les postes, y compris les rôles de combat. Leur représentation parmi les officiers de la Force régulière a même dépassé la barre des 20 %.
Nous avons plus de femmes, mais les forces armées sont encore aux prises avec des problèmes d'intégration des genres. Comme ma collègue Maya Eichler l'a fait remarquer, il est important de suivre la proportion de vétéranes, mais cela nous en dit peu sur les défis particuliers auxquels elles font face sur le chemin de la vie civile, car cela ne tient pas compte des normes et des inégalités fondées sur le sexe. Il est important d'établir ce parallèle entre les femmes dans les forces armées et les vétéranes, car l'expérience des femmes dans l'armée influe sur leur transition à la vie civile.
Alors que nous nous concentrons sur l'amélioration des services et des programmes pour les anciens combattants, je nous invite à considérer la transition de la vie militaire à la vie civile comme une étape distincte, mais connexe, du cycle que constitue la carrière militaire. Par exemple, lorsque le gouvernement fédéral offre des programmes de santé mentale et physique, il est important de cerner les besoins différenciés des femmes et la façon dont ces besoins peuvent avoir été façonnés par leurs expériences dans l'armée. Par exemple, les femmes sont plus souvent exposées à des facteurs de stress cumulatifs au cours de leur carrière, ce qui peut comprendre des expériences opérationnelles intenses, le harcèlement sexuel et les traumatismes sexuels en milieu militaire, ainsi que la séparation de la famille qui les empêche de jouer leur rôle de principale pourvoyeuse de soins pour les enfants.
Certains organismes sans but lucratif ont mis sur pied des programmes pour aider les vétéranes et d'autres groupes marginalisés qui souffrent de TSPT lié à des traumatismes sexuels, à des déploiements et à d'autres causes. Le gouvernement a reconnu l'importance d'utiliser une analyse comparative entre les sexes, ACS+ et un point de vue intersectionnel pour déterminer les secteurs pour lesquels il faut une réforme des politiques tandis que les forces armées répondent aux recommandations du rapport Arbour, qu'elles visent à répondre à l'attrition malsaine dans le cadre la stratégie de maintien en poste des Forces armées canadiennes et, de plus en plus, lorsqu'elles conçoivent des programmes de soutien aux anciens combattants.
Ces approches ont même mené à une meilleure coordination entre le ministère de la Défense nationale et le ministère des Anciens Combattants, ce qui a permis aux militaires de se préparer à la transition vers la vie civile sur un plus long terme. Cependant, il faut faire beaucoup plus, bien sûr. Le travail doit se poursuivre pour améliorer la continuité entre la vie de service et la vie après le service, ainsi que les efforts déployés auprès du public pour tenir compte de l'évolution démographique des anciens combattants.
Ce type de recherche continue de poser un défi, à savoir la disponibilité des données, vu le manque de recherches différenciées selon le sexe sur les transitions professionnelles des militaires au civil. Les quelques études canadiennes qui ont été publiées sont fondées sur des entrevues et des sondages de départ menés auprès de femmes militaires, et correspondent aux tendances à l'échelle nationale. Ils cernent des défis professionnels propres aux femmes, qui ont déclaré ne jamais s'être senties pleinement intégrées dans l'armée et que le manque d'expérience associé à des milieux de travail excluants pendant le service avait nui à leur capacité d'être promues dans l'armée ou de trouver un bon emploi après leur départ.
De façon encore plus générale, en s'appuyant sur les données fournies dans les sondages de départ à mesure que les militaires quittent l'armée, la stratégie de maintien en poste des FAC souligne que « certains des facteurs de mécontentement associés à une libération volontaire sont plus fréquents chez les femmes que chez les hommes ». Le rapport mentionne le manque d'adéquation avec la vie militaire, l'insatisfaction à l'égard du système d'avancement et de promotion, les exigences en matière d'instruction et de perfectionnement, ainsi que les exigences liées à la charge de travail. Le document reconnaît que les préjugés fondés sur le sexe « peuvent affecter l’accès aux possibilités d’exercer un rôle de leader, l’avancement professionnel et la présence de femmes comme modèles ou mentors auprès de futures dirigeantes au sein des FAC. » Cela a une incidence sur le bien-être des membres actifs et des membres nouvellement libérés, ainsi que sur les possibilités professionnelles qui découlent d'une carrière militaire.
Dans un article rédigé en collaboration avec Meaghan Shoemaker, on peut lire:
Ces expériences vécues par les femmes en service, qu'il s'agisse de l'isolement social, de la stigmatisation par leurs pairs ou du harcèlement pur et simple, sont importantes à prendre en charge pour assurer une transition réussie de la vie militaire à la vie civile, car elles ont une incidence sur la santé mentale.
Je poursuis la lecture:
De plus, une partie des réseaux sociaux des militaires en service les accompagne lorsqu'ils deviennent des anciens combattants, ce qui offre un soutien supplémentaire par les pairs pendant la transition. Les expériences vécues par les femmes, dans lesquelles l'exclusion professionnelle et le harcèlement en milieu de travail étaient la norme, ont mis en lumière la difficulté d'obtenir du soutien par les pairs pendant et après le service.
Mes recherches antérieures à l'Université Queen's sur ce sujet, dans le cadre d'une initiative appelée Gender Lab, visaient à faire le lien entre les expériences professionnelles des femmes et des hommes dans l'armée et leurs expériences professionnelles après l'armée.
C'est la chose à faire. Nous devons nous concentrer sur l'amélioration du bien-être et la transition des anciens combattants et l'amélioration de la prestation des services. Sachant que l'épanouissement professionnel contribue à la santé mentale, il est également possible d'améliorer les perspectives d'emploi des anciens combattants dans divers secteurs, étant donné que les anciens militaires représentent une main-d'œuvre qualifiée, formée et expérimentée.
Notre recherche était axée sur une analyse de l'environnement des services et des programmes offerts aux anciens combattants, ainsi que sur la tenue d'entrevues et de groupes de discussion avec des militaires qui envisageaient de quitter les forces armées ou qui avaient récemment été libérés. En plus des programmes offerts par le ministère des Anciens Combattants, il y a des services provinciaux en matière de soins de santé et d'emploi, à la fois dans le secteur public et le secteur privé, qui sont conçus pour les anciens combattants, ainsi que des programmes qui émergent des organismes de bienfaisance et du secteur sans but lucratif.
Quelques constatations de notre recherche indiquent qu'étant donné la diversité des fournisseurs de services aux anciens combattants, il est essentiel de coordonner ce qui est offert aux anciens combattants et de cerner les lacunes potentielles. Dans l'une de nos publications, nous suggérons qu'un modèle d'analyse d'impact sur la collectivité serait utile pour encourager la collaboration entre les différents secteurs et partenaires qui participent à la prestation des services aux anciens combattants.
Bien que les études aient reconnu l'importance de la formation à l'emploi pour améliorer la participation des anciens combattants au marché du travail, nous ne pouvons pas nous contenter de faire porter le fardeau...
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je m'appelle Remington Nevin. Je suis un ancien médecin et officier de médecine préventive de l'armée américaine, j'ai reçu une formation en épidémiologie et en sécurité des médicaments à l'Université Johns Hopkins. Au cours de mes 10 ans de carrière militaire en service actif, j'ai mené des recherches et publié de nombreux articles sur divers sujets liés à la médecine militaire, y compris la santé mentale et le paludisme.
Je suis maintenant directeur exécutif et médical de la Quinism Foundation, un organisme de bienfaisance qui appuie la recherche et l'éducation sur les effets indésirables de la catégorie des médicaments antipaludiques appelés quinoléines, qui comprend la méfloquine ou le Lariam. Pendant de nombreuses décennies, dans les armées occidentales, il a été largement utilisé pour prévenir le paludisme.
Le paludisme est bien sûr une maladie transmise par les moustiques qui peut infecter les militaires déployés dans certaines régions tropicales, notamment en Afrique et au Moyen-Orient, où de nombreux anciens combattants canadiens ont servi au cours des dernières décennies.
C'est de cette question que je veux parler aujourd'hui, de la prévention du paludisme et de l'utilisation de médicaments antipaludiques chez les femmes militaires, en particulier celles en âge de procréer. Cela pose des défis uniques qui, à mon avis, n'ont pas encore été abordés adéquatement par les décideurs.
La plus grande partie de mon témoignage d'aujourd'hui est tirée de mon chapitre du livre Women at War, qui traite de ces questions plus en détail et contient des références pour bon nombre de mes déclarations.
Le principal point que je veux faire valoir dans ce chapitre, et que je veux faire valoir au Comité aujourd'hui, c'est que le déploiement généralisé de femmes en âge de procréer remet en question les politiques traditionnelles universelles des militaires occidentaux en matière de prévention du paludisme.
Pour des raisons historiques, la plupart des médicaments antipaludiques préventifs ont été testés principalement chez les hommes et, par conséquent, dans de nombreux cas, les données directes sur la sécurité humaine et les risques pour la reproduction ne sont pas disponibles pour éclairer leur utilisation rationnelle chez les femmes.
Par exemple, la monographie canadienne de l'atovaquone-proguanil, un médicament antipaludique populaire commercialisé sous le nom de Malarone, indique « qu'aucune étude n'a été menée sur les femmes enceintes » et que l'innocuité du médicament pendant la grossesse « n'a pas été établie ». De même, la monographie canadienne de la doxycycline, un autre médicament antipaludique populaire, prévient qu'il « ne devrait pas être administré aux femmes enceintes ».
Ces mises en garde sont particulièrement pertinentes dans la mesure où l'expérience militaire américaine a montré que les femmes en âge de procréer courent un risque élevé de grossesse pendant les déploiements, où la consommation de ces médicaments ou d'autres médicaments est habituellement obligatoire.
Par exemple, en Afghanistan, ma collègue Jen Caci et moi-même avons découvert qu'en 8 mois, en 2007, 49 grossesses avaient été recensées parmi 3 298 femmes militaires américaines. C'est l'équivalent d'un taux de grossesse de 22,3 pour 1 000 années-femmes, soit plus de 2 % des femmes déployées par année. Pour diverses raisons opérationnelles et personnelles, bon nombre de ces grossesses n'ont été diagnostiquées que tardivement au cours du premier trimestre et parfois bien après.
Si l'expérience canadienne est semblable, cela signifie que chez les femmes militaires canadiennes, il y aura eu un certain degré d'exposition non intentionnelle et potentiellement prolongée du fœtus à des médicaments antipaludiques et à d'autres mesures de prévention, comme des insectifuges, dont la toxicité pour la reproduction est inconnue. Dans bien des cas, une telle exposition potentiellement toxique est le résultat direct des politiques universelles traditionnelles qui exigent l'utilisation de ces mesures sous la direction du commandement.
Le déploiement d'un grand nombre de femmes en âge de procréer et le risque de grossesse qui accompagne ces déploiements donnent aux militaires occidentaux l'occasion de réexaminer les politiques antérieures de prévention universelle du paludisme et d'envisager l'adoption de stratégies de prévention du paludisme adaptées à la personne.
Comme je l'explique dans le chapitre du livre que j'ai rédigé, dans bien des cas, il peut s'agir d'une transition de l'utilisation obligatoire ou dirigée des médicaments antipaludiques vers des mesures d'évitement des moustiques. De telles mesures personnalisées peuvent réduire les risques potentiels pour le fœtus en développement tout en réduisant le risque que ces mesures peuvent poser pour les femmes militaires elles-mêmes, comme nous l'avons vu, par exemple, avec l'utilisation obligatoire ou dirigée de la méfloquine.
Monsieur le président, merci beaucoup de me donner l'occasion de m'adresser au Comité sur ces questions. Je serai heureux de répondre à vos questions.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie tous de votre présence et de la bravoure dont vous avez fait preuve pour présenter votre situation. Notre comité a beaucoup de travail à abattre, et vous y aurez fait une précieuse contribution. Merci beaucoup.
Je veux surtout parler de maintenant, docteur Nevin. En 2015, vous avez rédigé un document de recherche intitulé « Issues in the Prevention of Malaria Among Women at War », et mes collègues et moi-même avons hâte d'entendre vos conclusions au sujet des répercussions importantes qu'on nous rapporte sur les soins de santé des militaires canadiennes d'aujourd'hui.
Cependant, je pense qu'il est vraiment important que les membres actuels de notre comité connaissent aussi les préoccupations de nos forces armées concernant le médicament antipaludique méfloquine, qui a été le médicament de premier recours requis pour les membres des Forces armées canadiennes — hommes et femmes — ces trois dernières décennies.
En 1992, lors d'un déploiement en Somalie, les parachutistes d'élite du Canada ont reçu le médicament alors non homologué dans le cadre d'une étude sur le médicament. On a obligé les militaires à prendre le médicament sous peine de mesures disciplinaires. Des protocoles très clairs ont été établis, mais aucun — ou si peu d'entre eux — n'a été suivi par le ministère de la Défense nationale ou Santé Canada. Bien que le médicament ait été administré, aucun test approprié n'a été effectué et aucun résultat n'a été documenté.
En janvier 1993, avant la fin de ses propres recherches, Santé Canada a approuvé le médicament pour usage civil au Canada. Trois mois plus tard, un jeune Somalien a été assassiné sur une base canadienne en Somalie. L'événement allait devenir l'affaire somalienne.
Après les élections fédérales de 1993, le Parti libéral de Jean Chrétien a lancé une enquête très visible. Mais, un an plus tard, en 1994, au moment même de la collecte de données sur le rôle joué par la méfloquine dans l'événement, le gouvernement Chrétien a brusquement mis fin à l'enquête juste avant les élections de 1997.
Les membres du Comité devraient tous lire le rapport de la commission d'enquête sur la Somalie de 1997. La brusque fermeture a retenu l'attention du Comité permanent des comptes publics en 1999 lorsque l'ancien député John Cummins a déclaré avoir en sa possession une note ministérielle d'octobre 1997 destinée au ministre de la Défense nationale et conseillant au ministère d'induire en erreur la commission d'enquête sur la Somalie au sujet de la méfloquine et conseillant au ministre d'induire le public en erreur quant à l'endroit où le ministère se l'était procurée.
Pendant que le gouvernement libéral continuait son opération de camouflage, ignorant ses anciens combattants tout en obligeant les militaires à continuer de prendre de la méfloquine, l'armée américaine a réagi aux meurtres de quatre épouses de militaires, puis au suicide de deux de leurs partenaires. Il y a eu des recherches sur l'impact potentiel de la méfloquine sur les partenaires forcés de consommer de la méfloquine en Afghanistan.
Docteur Nevin, j'ai deux questions à vous poser. Quelle décision l'armée américaine a‑t-elle prise en 2009 à la suite de ses recherches? Nous savons que bon nombre de nos alliés utilisaient également de la méfloquine à ce moment‑là et, qu'en réponse à la décision des États-Unis, je crois, ils ont mené leurs propres enquêtes pour répondre aux préoccupations de leurs anciens combattants. Je me demande si vous savez quels autres pays ont apporté des changements à l'utilisation de ce médicament au sein de leurs forces armées et ce qu'ils ont fait exactement.
Pourriez-vous répondre brièvement à cette question?
Merci.
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Monsieur le président, je remercie la députée de sa question.
La députée fait référence, je crois, à la décision stratégique de l'armée américaine en 2009. Je crois que c'était en réponse à une recherche que j'avais publiée pour démontrer que le médicament avait été mal utilisé à grande échelle, particulièrement en Afghanistan. Le médicament avait été prescrit à un nombre croissant de militaires ayant des contre-indications en matière de santé mentale. Je pense que l'armée américaine ne demandait pas mieux que de mettre fin à l'utilisation de ce médicament. À ce stade, elle avait acquis beaucoup d'expérience des effets indésirables très désagréables et dangereux du médicament. Par la suite, le reste de l'armée américaine a emboîté le pas.
En 2013, lorsque la Food and Drug Administration des États-Unis a obligé à imprimer une mise en garde en encadré sur la notice du produit méfloquine, l'armée américaine avait adopté une politique selon laquelle la méfloquine était essentiellement un médicament de dernier recours seulement et les deux médicaments dont j'ai parlé précédemment — l'atovaquone-proguanil et la doxycycline — devaient servir principalement dans presque toutes les circonstances.
Je crois qu'à ce moment‑là, les militaires canadiens avaient également délaissé la méfloquine comme médicament de première intention, tout comme leurs homologues du monde entier. Je me rappelle avoir parlé à des officiers français. C'était au milieu des années 2000. Ils avaient depuis longtemps abandonné l'utilisation de la méfloquine en raison de leur expérience opérationnelle des effets secondaires très désagréables d'une certaine importance opérationnelle associés au médicament. L'Allemagne, je crois, a complètement interdit l'utilisation du médicament dans ses forces armées à l'époque de la mise en garde que nous avions fait imprimer sur la notice du produit. Aujourd'hui, très peu de pays, voire aucun, utilisent un tant soit peu la méfloquine de façon significative. Le médicament demeure sur de nombreux formulaires. Il peut être utilisé par des personnes âgées qui ont eu une expérience positive du médicament, mais il serait très inhabituel que de nouvelles troupes reçoivent de la méfloquine lors de déploiements aujourd'hui.
Docteur Nevin, c'est votre recherche qui a donné un nouvel espoir aux anciens combattants canadiens et aux militaires en activité de service qui souffraient d'une lésion physique du tronc cérébral causée par la toxicité de la méfloquine pendant qu'on leur disait que leurs problèmes et les traitements prescrits étaient imputables au trouble de stress post-traumatique.
Vous avez témoigné devant le Comité le 1er mai 2019, en compagnie de plusieurs anciens combattants canadiens blessés par la méfloquine, et contribué ainsi à notre étude et à notre rapport sur les effets de l'utilisation de la méfloquine chez les anciens combattants canadiens. Bien sûr, ce rapport de la 42e législature est disponible. C'est le rapport 14. Le Parti conservateur du Canada a aussi présenté un rapport complémentaire.
Pouvez-vous nous faire part des changements éventuels et de votre perspective sur les changements que Santé Canada et le médecin général et commandant des services de santé des Forces armées canadiennes ont apportés en 2016 pour l'utilisation de la méfloquine au Canada après beaucoup de contestation à notre comité de même que de la part des anciens combattants?
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Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier tous les témoins, et plus particulièrement Mme Doucet et Mme Smith, qui ont dû nous faire part de leurs expériences personnelles, qui, nous le comprenons tous, sont très pénibles.
Ma première question s'adresse à Mme Smith. Il semble que nous ayons ouvert les Forces armées canadiennes aux femmes et qu'elles aient été mises à l'effectif sans mécanismes de soutien, sans systèmes, sans vérifications de la façon dont la biologie entrerait en ligne de compte et sans méthodes de plainte — une vraie « grappe F », si vous voulez. Excusez mon langage, mais je compatis vraiment avec vous. Ce qu'on vous a fait vivre en très peu de temps était inacceptable.
Vous avez formulé cinq excellentes recommandations concrètes. Pouvez-vous nous aider davantage? Selon votre expérience, en quoi des gestionnaires de cas spécialement formés qui traiteraient spécifiquement des traumatismes sexuels seraient-ils utiles?
De plus, en ce qui concerne les dossiers médicaux et l'obligation de répéter sans cesse la description du traumatisme lorsqu'entre en scène un nouveau gestionnaire de cas ou lorsqu'un dossier passe des Forces armées canadiennes à Anciens Combattants Canada, si vous pouviez faire des recommandations ou des suggestions solides, ce serait fort utile pour nous permettre d'apporter ces changements plus tard.
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Mon Dieu, cela fait beaucoup de choses à décortiquer.
En ce qui concerne la formation des gestionnaires de cas en traumatismes sexuels chez les militaires et l'insécurité du logement ou l'itinérance, je pense qu'il y a simplement ce préjugé bien ancré mais inconscient qui présuppose que les femmes ont un conjoint ou qu'elles ont des systèmes de soutien en place. Lorsque ce n'est pas le cas, le fait d'avoir des gestionnaires de cas qui rencontrent la vétérane sans ces préjugés et sans les suppositions préexistantes aiderait à établir des liens de confiance entre le gestionnaire de cas et l'ancienne combattante.
Beaucoup d'anciennes combattantes, dont moi, ne sont tout simplement pas entendues. Pour ce qui est des sans-abri, j'ai eu un gestionnaire de cas à qui j'ai dit maintes fois que j'étais sans-abri. Élargissons la définition pour qu'elle soit plus inclusive — l'insécurité du logement — parce que les vétéranes, comme nous le savons, cela existe. Elles ne sont pas invisibles. Elles sont là. Elles se présentent de façon très différente de ce qu'on nous fait habituellement supposer. Elles couchent chez des connaissances ou séjournent peut-être dans différents refuges.
Un gestionnaire de cas m'a dit qu'ACC n'avait pas de mandat en matière de logement et qu'on n'avait qu'à regarder Kijiji. Je me suis arrêtée là. J'ai passé la nuit à bien des endroits, dans des Airbnb à court terme, dans ma voiture, et me suis fait claquer la porte au nez parce que je n'avais pas d'adresse fixe. Je sais que cela ne répond peut-être pas directement à la question, mais il faut davantage de sensibilisation et de formation spéciale. Ce sont‑là des sujets précis.
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Non. En fait, on ne m'a pas vraiment donné d'options. Normalement, pour des raisons médicales, une femme va être retirée du travail sur le plancher. Cependant, le système de ventilation fait circuler l'air à travers tout le hangar, alors qu'on soit en train de travailler sur les avions ou dans les bureaux en haut, on sent quand même le carburant pour les avions.
Normalement, quand on reçoit du monde de l'extérieur, on va ventiler le hangar. On va ouvrir toutes les portes pour que les vapeurs nocives sortent et qu'on ne les sente pas. Il y a même des murs au complet qui peuvent s'ouvrir. On referme le tout juste avant la parade ou l'accueil de dignitaires.
Les avions sont faits pour permettre une certaine fuite en cas d'expansion du carburant. On met donc des espèces de contenants en dessous de l'avion pour recueillir le carburant et éviter qu'il contamine le sol. Quand on arrivait le matin, les contenants étaient pleins. Toutes ces vapeurs montent. Alors, même si on travaille dans les bureaux en haut, on y est exposé.
Finalement, il n'y a pas tellement d'options. On pourrait sûrement nous envoyer à l'approvisionnement ou dans d'autres unités où il n'y aurait pas d'exposition directe à plein de produits chimiques. Il y aurait sûrement moyen de nous utiliser autrement sur la base que de nous faire travailler dans le hangar.
L’équipement de protection personnel qui nous avait été fourni... On ne se cachera pas qu'il s'agit d'un métier d’homme, et c’était un équipement conçu pour les hommes. Il n'était pas à ma taille. Par exemple, pour ce qui est de la protection auditive, je ne peux toujours pas insérer un de ces bouchons d’oreilles dans mon oreille. Mes conduits auditifs sont trop petits.
[Français]
On n'avait pas accès à des bouchons faits sur mesure.
[Traduction]
L'armée ne couvrait pas les frais, nous devions les payer de notre poche si nous avions les moyens. En théorie, nous sommes censés utiliser la double protection. Il s’agit des bouchons d’oreilles et des coquilles.
Pour les produits chimiques, nous utilisions les petits gants de caoutchouc qu'on trouve en commerce. Quand on travaille sur un avion, il arrive souvent que du carburant vous coule sur la tête, si bien que gants ou pas, on se retrouve couvert de carburant. Le carburant vous dégouline le long des bras. Il nous est arrivé d'utiliser des chiffons pour empêcher le carburant de couler sous nos aisselles et sur notre poitrine. Aucune protection n’est prévue à cet égard. Les gants n’empêchent pas le carburant de vous couler dessus, mais c’est comme ça. Vous êtes en fonction et le carburant vous dégoutte sur votre tête. Hormis une paire de lunettes, il n’existe pas vraiment de protection.
Quand nous tombions sur un superviseur au fait de la situation, il nous contraignait à porter nos lunettes, il nous demandait où nous les avions mises si nous ne les portions pas. Il n’existe pas beaucoup de protection contre les particules de carburant, les gaz d’échappement des réacteurs et les métaux lourds qu’ils contiennent.
Nous n’avions pas de masques et on ne nous en avait pas fournis. Quand nous devions aller d’un hangar à l'autre, nous devions traverser la zone à pied et passer derrière six avions à réaction qui crachaient des métaux lourds.
Durant la formation, on nous disait de porter des lunettes de sécurité et des gants, mais on ne fournissait pas d'équipement de protection adapté pour les femmes, surtout de petite taille.
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Merci pour la question, monsieur le président.
Le suivi des soins est vraiment important pour qu'il n'y ait pas d'interruptions dans les soins prodigués et pour que le vétéran se sente soutenu tout au long de sa vie.
Si on doit, par exemple, déménager pour des raisons financières ou personnelles... Quand j'ai déménagé d'Ottawa à Winnipeg, on m'a donné une réserve de médicaments pour trois mois, et j'ai croisé les doigts pour qu'on prenne mon dossier en charge avant que cette réserve ne soit épuisée. Six mois avant mon déménagement, j'avais pris soin d'aviser le bureau d'Anciens combattants à Winnipeg — j'ai fait savoir à ACC que j'arrivais, qu'on devait préparer mes dossiers, etc.
À vrai dire, le suivi des soins signifie qu'on se soucie du bien-être du vétéran et que, lorsque des vétérans quittent le bureau d'un professionnel de la santé pour se rendre dans un bureau d'une autre localité, on s'assure que cette transition se passe bien. C'est important. S'il s'agit de construire une relation basée sur la confiance et le respect envers les vétérans combattants, un suivi des soins est essentiel.
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Je ne sais pas quel était le point de vue du MDN.
Il y avait eu la décision du tribunal de la Commission des droits de la personne qui avait déterminé que... à peine quelques mois avant qu'on m'eût dirigé manu militari vers ce métier... à vrai dire je voulais intégrer la marine.
Le Tribunal a statué que la voie était ouverte à toutes les femmes dans tous les métiers, pour tous les métiers de combat. J'ai choisi la marine, j'ai choisi un métier de combat dans la marine. Comme je l'ai précisé dans mon témoignage, j'étais la seule femme, la seule femme de ce groupe à suivre la formation. Mon navire a été le premier bâtiment de guerre à équipage mixte à être déployé dans le cadre d'exercices de l'OTAN — l'acronyme de la mission m'échappe.
Il est important de comprendre que la marine en particulier est très... Surtout à l’époque, il n’était pas question qu’ils... Ils ont accepté des femmes qui allaient en mer à bord de navires de ravitaillement dans des rôles de soutien, mais certainement pas dans des rôles de combattantes.
Il y a beaucoup de superstitions, des centaines d'années de superstitions dans la marine, et quand on est en mer on est dans des eaux internationales. En fait, nous savons que récemment, malheureusement, une personne est tombée d'un navire et personne n'a su... il était trop tard. Cela arrive, mais oui à 100 %, être une femme c'était...
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Monsieur le président, je remercie la députée de sa question.
Comme je l'ai dit dans mon introduction, le déploiement d'un grand nombre de femmes en âge de procréer fournit une belle opportunité, parce que cela nous oblige à reconsidérer la question. L'armée est contrainte de reconsidérer — ou du moins devrait l'être si ce n'est déjà fait — ses politiques antérieures qui souscrivaient à une approche uniformisée, y compris en ce qui concerne les consignes émanant du commandement, pour l'administration obligatoire de médicaments antipaludiques.
Pour vous mettre un peu en contexte: en Somalie, on a ordonné l'utilisation de la méfloquine et il y a eu, par exemple, des cas où l'on a observé que tous les militaires devaient prendre le médicament à toutes les semaines. Bien entendu, ce type de politique consistant à administrer obligatoirement, sur instruction du commandement, un médicament susceptible d'avoir des effets toxiques sur la reproduction à des militaires de sexe féminin n'ayant pas fait l'objet d'un diagnostic de grossesse est tout simplement inacceptable.
Le fait qu’un grand nombre de femmes sont actuellement déployées dans des régions où nous utilisons des mesures antipaludiques, oblige les forces armées — ou devrait les obliger, pour le moins — à reconsidérer ces stratégies dépassées de prévention du paludisme.
Il se peut que les antipaludéens ne soient pas du tout nécessaires dans certains déploiements. Il se peut que des mesures alternatives de prévention du paludisme conviennent mieux.
Ce qui importe par-dessus tout, c'est que les traitements soient adaptés à chaque militaire, que la prévention du paludisme soit considérée comme un traitement médical, au même titre que tout autre traitement médical, et non comme une mesure imposée par le commandement.
Merci de votre témoignage. Je remercie tout particulièrement les anciennes combattantes. C'est très important pour nous. Je pense que nous voulons nous assurer que lorsque vous partirez d'ici, vous aurez pu dire tout ce que vous aviez à dire. Après votre départ, si vous voulez faire un suivi sur certaines choses, nous serons ravis d'avoir de vos nouvelles.
Pour ce qui est de la prévention, il semble que même lorsque vous étiez déployées, vous n'aviez pas d'information sur ce qu'on attendait de vous, sur la tolérance zéro, ou sur les personnes à qui s'adresser en cas d'incident. La même chose vous est arrivée en tant qu'ancienne combattante. Vous ne saviez pas vraiment quelle était la structure en place pour assurer la sécurité de tout le monde.
J'espère que, lorsque nous formulerons les recommandations, vous pourrez nous aider à déterminer ce qui vous aurait été utile lors de votre déploiement. Je pense que nous nous inquiétons, comme vous l'avez dit, que ce soit dans les eaux internationales ou dans d'autres pays, de l'endroit où a lieu l'application de la loi. Comme la GRC nous l'a dit, C'est parfois le plus haut responsable qui est l'auteur de l'infraction. Comment savoir où porter plainte? Dans d'autres pays, nous voyons qu'il peut y avoir un soutien par les pairs, en plus du gestionnaire de cas, ou un compagnon ou une personne formée pour être en mesure d'assister les nouvelles recrues ou les personnes qui viennent de quitter les forces, avec une formation adéquate et tout cela.
Pensez-vous qu'il vous aurait été utile d'avoir un soutien par les pairs pour vous guider, surtout au moment où vous avez déménagé et où vous n'aviez pas de gestionnaire de cas? Il me semble qu'il pourrait encore y avoir des personnes qui sont passées par là elles-mêmes, et qui pourraient donner des conseils. Je me demande ce que vous pensez de cette idée.
Je trouve consternant que les médicaments cessent lorsqu'on change de province. En tant que médecin, je ne peux pas croire que cela puisse se produire. Je pense que ce que nous avons entendu dire ici, c'est que le principe doit être qu'il faut assurer une certaine dignité à l'ancien combattant, et que bien sûr, les médicaments devraient continuer, que les prestations devraient continuer jusqu'à ce qu'une évaluation différente soit faite. Mais l'évaluation ne devrait pas vous obliger à raconter constamment votre histoire. Vous voulez que les gens la lisent.
Pour ce qui est des tables rondes, je crois que d'autres personnes nous ont dit que la ministre a mis sur pied un comité consultatif formé de vétéranes. Nous aimerions aussi en savoir plus à ce sujet. Votre cas semble être un condensé de tout ce qui a mal tourné dans le système. Quelqu'un comme vous, qui a vraiment raconté l'histoire d'un système qui vous a laissé tomber, serait très utile, je pense, à tout ministre qui voudrait faire mieux.
En fait, j'ai parlé à plusieurs personnes qui occupent des postes administratifs à ACC, et elles m'ont dit que la présomption est que l'ancien combattant bénéficie d'un soutien informel. Tout financement, comme les services offerts dans le cadre du PAAC, par exemple, n'est qu'un complément. Il ne s'agit pas vraiment de payer les services dont l'ancien combattant a besoin. C'est comme si on disait: « Eh bien, si vous avez besoin d'un petit complément à ce que votre conjoint vous apporte », ou « Si vos enfants peuvent déneiger l'allée cet hiver, nous pouvons vous donner un peu plus pour compléter cela. »
Si vous ne bénéficiez pas de ces soutiens informels, comme je l'ai fait valoir à maintes reprises à Anciens Combattants Canada, de façon claire et nette, en disant que je dépendais à 100 % de services externes payants... malgré cela, je n'obtiens toujours pas les services dont j'ai besoin.
Je ne fais que marquer le pas en attendant la mort, essentiellement. Cela peut sembler dramatique, mais c'est vrai. C'est la vérité.
Comme je l'ai mentionné plus tôt, j'ai vécu pendant près de 30 ans sans être une cliente d'ACC, sans même connaître son existence. Une fois que je suis devenue cliente d'ACC, j'ai été confrontée à l'insécurité du logement sous toutes ses formes. Encore une fois, divers organismes sans but lucratif, ou ACC, m'ont dit qu'ils n'avaient pas de mandat en matière de logement, et que je devrais chercher sur Kijiji. La préposée au logement social de la Ville d'Ottawa m'a dit qu'environ 5 000 personnes étaient inscrites sur la liste, mais qu'il y avait des logements. Elle a regardé sur son ordinateur portable et m'a dit qu'il y avait une multitude de possibilités. Encore une fois, cela ne tenait pas compte de choses comme les obstacles qu'une ancienne combattante ayant vécu des traumatismes pouvait rencontrer dans ce type de logement.
Il y a aussi l'initiative de la Maison du vétéran. Bien que j'applaudisse à ce qu'on essaie de faire, lorsque j'ai parlé à la personne responsable, alors que la collecte de fonds était encore en cours, j'ai demandé si la sensibilisation aux traumatismes était intégrée dans le plan ou comment cela fonctionnait. Je lui ai dit: « Je vois que vous avez 40 unités, et oui, vous me dites que c'est ouvert à la fois aux hommes et aux femmes, mais en tant qu'ancienne combattante, je ne voudrais même pas entrer dans ce bâtiment ». C'est un mode de vie communautaire. Si vous regardez les photos en ligne, vous pouvez voir à quoi ressemble ce système de logement. Il reproduit presque fidèlement l'environnement dans lequel de nombreuses femmes militaires ont été agressées sexuellement. Juste du point de vue de la sécurité, pensez à la buanderie du sous-sol et à tous les endroits où le danger existe et se cache.
Je ne pense pas que les responsables aient bien compris. Il faut se croiser les doigts et espérer que, maintenant que nous sommes tous adultes et que nous avons tous appris, cela signifie que ces logements sont sûrs pour les femmes. Nous savons que des femmes anciens combattants préfèrent vivre dans leur voiture plutôt que de faire une demande pour loger dans un endroit comme la Maison du vétéran. Je trouve cela regrettable. Il faut absolument y remédier. Je recommanderais des logements pour vétérans spécifiquement réservés aux femmes.
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Merci, monsieur le président.
Je voudrais me faire l'écho des commentaires au sujet de votre présence ici aujourd'hui et de vos récits. Ce sont des histoires horribles. C'est triste.
Essentiellement, nous travaillons sur cette étude depuis un certain temps. Elle s'est fait attendre longtemps. À mon avis, cette étude comporte deux volets. L'un concerne Anciens Combattants Canada et la façon dont nous vous traitons aujourd'hui, et l'autre, semble-t-il, les FAC elles-mêmes et la façon dont vous avez été traitées auparavant. Je pense que nous devrions pratiquement faire une étude sur ces deux points.
Pensez-vous que le ministère devrait faire quelque chose chaque année pour donner suite à certaines des histoires que nous entendons? Ce que nous faisons ici, c'est en quelque sorte traiter le problème après coup. Il aurait été bien, si vous vous trouviez dans cette situation avant votre 13e mois, que vous receviez une aide quelconque au bout de six mois. Comprenez-vous ce que je veux dire?
C'est une question pour vous, madame Smith.
La façon dont les FAC s'y prennent actuellement est certainement une amélioration par rapport au moment où j'ai été libérée. J'ai reçu un billet aller simple et, boum, je me suis retrouvée à l'aéroport: Et qu'allais-je faire? À dix-neuf ans et complètement brisée...
Maintenant, avec la mise en place des services de transition, les FAC ont reconnu que cela est utile pour prévenir et peut-être éviter certains de ces...
M. Terry Dowdall: Un peu plus tôt...?
Mme Jennifer Smith: Oui, un peu plus tôt. Il est naïf de dire: « Vous avez terminé vos services de transition et tout devrait bien aller. » Oui, il devrait certainement y avoir un suivi, mais un suivi significatif. En ce qui me concerne, si je peux me reprendre en exemple, mon gestionnaire de cas d'ACC m'appelle toutes les trois semaines, uniquement pour s'assurer que je respire encore.
Je n'obtiens toujours pas de services. Je ne reçois toujours pas de soutien. Je vis encore dans ma chambre et j'ai de la difficulté à manger ou à me doucher — à faire quoi que ce soit —, et ma qualité de vie est nulle. J'ai pensé qu'il était important d'être ici aujourd'hui, mais cela va vraiment me mettre hors de moi.
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Merci, monsieur le président.
Je vais continuer avec Mme von Hlatky pour commencer.
Nous avons entendu ici aujourd'hui des témoignages très convaincants d'expériences vécues. Étant donné où vous siégez en tant que titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur le genre, la sécurité et les forces armées, je ne puis m'empêcher de penser que vous avez dû entendre ici, aujourd'hui, quelque chose qui pourrait vous amener à dire: « C'est là que mes recherches peuvent être utiles. »
J'aimerais commencer par le témoignage de Mme Doucet. Elle a très clairement indiqué qu'il y avait un problème lié à la nécessité, ou à la difficulté d'établir un lien avec le service militaire, ainsi qu'au manque de recherches qui lui permettrait d'établir ce lien, surtout en ce qui a trait aux répercussions sur son enfant. Pouvez-vous nous parler de la façon dont vos recherches peuvent aider les personnes dans ce genre de situation?
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Il est basé à l'Université Queen's. Il offre des possibilités de recherche au niveau national grâce à un vaste partenariat. En ce qui concerne l'argument de la compétence culturelle dont j'ai parlé plus tôt, je dirais qu'il s'applique également aux fournisseurs de soins de santé.
Lorsqu'un patient ancien combattant vient voir des fournisseurs de soins de santé dans le système civil, son expérience ne leur est peut-être pas familière. L'Université Queen's et le laboratoire d'analyse comparative entre les sexes dont j'ai parlé plus tôt — par exemple, le travail effectué par la Dre Linna Tam-Setto — ont mis au point des outils pour que les fournisseurs de soins de santé puissent développer cette compétence culturelle afin d'être en mesure d'interagir avec les patients anciens combattants en tenant compte des différences entre les hommes et les femmes.
Ce genre d'approche, dans le cadre de laquelle on crée des outils pour habiliter les praticiens, est conforme aux recommandations que j'ai formulées en vue de créer un milieu de soutien pour les anciens combattants, surtout les femmes, lorsqu'ils demandent des services de soutien.
Je dirais également que, dans le cadre de nos recherches, nous avons effectué une analyse environnementale des types de services fournis à l'extérieur d'ACC, parce qu'à mon avis, il y a des lacunes évidentes. Je ne pense pas que nous puissions nécessairement attendre d'ACC qu'il les comble toutes. Ce n'est pas une attente réaliste, et c'est pourquoi beaucoup d'organismes sans but lucratif se sont mobilisés pour combler ces lacunes. Ce serait formidable si Anciens Combattants Canada, par exemple, disposait d'un répertoire vraiment à jour, par ville ou par région, dans lequel les fournisseurs de services qui ont émergé — par exemple, par l'entremise d'organismes de bienfaisance ou d'organismes sans but lucratif — seraient répertoriés afin que des renseignements à jour soient à portée de main.
C'est le genre de petits ajustements qui peuvent peut-être combler certaines des lacunes flagrantes que les histoires que nous avons entendues aujourd'hui ont mises en évidence.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être venus aujourd'hui et de nous avoir fait part de leurs points de vue. Certains des témoignages que nous avons entendus sont très troublants, et ne sont pas faciles à entendre, en tout cas certainement pour moi. J'y reviendrai peut-être un peu plus tard.
Le Comité entend sans cesse des témoins. Nous entendons constamment parler de la machine, du ministère des Anciens Combattants et des forces armées, et du fait qu'ils ne soutiennent pas les anciens combattants qui ont besoin de soins.
Madame Smith, vous avez parlé de ces soins.
Les soins, pour moi, impliquent de la sollicitude. Ils impliquent du confort, du soutien et de la compréhension.
Quand je vais voir un médecin avec des symptômes, je collabore avec lui pour lui dire ce que je ressens, et trouver un plan d'action qui me permettra de guérir. Lorsque j'entends les témoignages de vétérans comme Mme Doucet, j'ai l'impression qu'on met la charrue avant les boeufs. Vous faites des pieds et des mains pour expliquer, réexpliquer et essayer de prouver pourquoi vous n'allez pas bien et pourquoi vous êtes tombé malade, au lieu qu'on s'intéresse à ce qui afflige les anciens combattants. À mon avis, ce n'est pas ainsi qu'on prend soin des gens.
Madame Doucet, vous avez recommandé que pour quiconque ayant travaillé dans l'armée avec une forme quelconque de produits chimiques, ACC reconnaisse l'exposition à ces produits chimiques comme étant la cause de ses symptômes.
Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet? Je crois que c'est une chose qui mérite notre appui.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie également toutes les personnes qui ont témoigné ici aujourd'hui, surtout celles qui ont vraiment eu le courage de venir nous faire part de leurs expériences de vie les plus émouvantes. C'est très difficile. Il s'agit de la toute première étude du Comité sur les femmes anciens combattants. Il est particulièrement difficile d'entendre autant d'histoires. Je crois qu'il y en a d'autres dont nous n'avons pas entendu parler. C'est très important, surtout en cette semaine précédant le jour du Souvenir.
Dans le cadre de nos études précédentes, nous avons entendu parler de femmes qui se sentaient invisibles. Maintenant, nous voulons entendre plus d'histoires, surtout pour savoir comment nous pouvons améliorer le système actuel d'ACC et les forces armées. Comment sommes-nous censés recruter davantage de militaires pour servir notre pays alors que nous entendons tant d'histoires indicibles de traumatismes et de conséquences? C'est vraiment difficile, non seulement pour tous les membres du Comité, mais aussi pour ceux qui nous regardent de partout au Canada.
Je remercie tous les invités de leur présence. Cela montre à quel point cette étude est importante.
Par votre entremise, monsieur le président, j'ai quelques questions pour Mme Smith.
Merci encore de nous avoir fait part de ce que vous avez vécu. Je sais que c'est très difficile. Il faut beaucoup de courage pour en parler, pas seulement une fois, mais à maintes reprises.
C'est ce qui a retenu mon attention, c'est comment se fait‑il que ceux qui vous ont fait du mal soient encore en liberté et ne purgent pas leur peine? Avez-vous déjà songé à porter plainte et à poursuivre en justice ceux qui vous ont causé du tort?
J'ai été torturée pendant trois jours, avec une baïonnette sous le menton. Absolument, oui. Il ne faisait aucun doute dans mon esprit qu'ils m'auraient tuée pendant le déploiement dans le Golfe si j'avais été en mer ce jour‑là. J'ai donc demandé à l'aumônier une libération pour des raisons de compassion, elle m'a été accordée, et j'ai été libérée honorablement.
Depuis, je ne fais que survivre. C'est la survie maintenant.
Lorsque j'ai fait part à ACC de mes demandes et de ce que j'avais vécu, je pensais que cela pourrait inciter quelqu'un à dire: « C'est inacceptable. Savez-vous qui a fait cela? Si vous le savez, voici ce que vous pouvez faire; ou voulez-vous aller plus loin? » Cela n'a jamais été le cas. Je ne comprends toujours pas, car j'ai parlé de ces incidents, de ces expériences, à plusieurs endroits, et on ne m'a jamais rien proposé.
Je ne sais toujours pas où aller. Honnêtement, je ne saurais pas à qui m'adresser.
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Merci. Comme vous le savez, il est très difficile de mettre fin à cette conversation. C'est vraiment important.
Madame Smith, j'ai moi-même demandé à notre analyste ce qu'on pouvait faire dans cette situation. Nous devons y réfléchir pour pouvoir vous aider.
[Français]
C'est là-dessus que prend fin notre séance. En mon nom et en celui de tous les membres du Comité, je voudrais vous remercier de vos témoignages.
Nous avons entendu aujourd'hui Mme Marie‑Ève Doucet, qui est technicienne en essais non destructifs et qui comparaissait à titre personnel par vidéoconférence. De plus, nous avions parmi nous Mme Jennifer Smith, qui est vétérane, Mme Stéfanie von Hlatky, qui est professeure titulaire à l'Université Queen's et détentrice de la Chaire de recherche du Canada sur le genre, la sécurité et les forces armées, et le Dr Remington Nevin, qui est directeur général de la Quinism Foundation.
[Traduction]
Chers collègues, je suis à peu près certain que nous participerons au jour du Souvenir pour rendre hommage aux anciens combattants. J'y serai moi aussi.
J'aimerais savoir si le Comité souhaite lever la séance.
Des députés: Oui.
Le président: Je remercie nos interprètes, notre personnel, notre greffier et notre analyste.
[Français]
La séance est levée.