:
J'ouvre maintenant la séance.
Bienvenue à la 51e réunion du Comité permanent des anciens combattants.
[Traduction]
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le lundi 3 octobre 2022, le Comité reprend son étude sur l'expérience des femmes vétérans.
[Français]
La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride. Il y a des députés qui participent à la réunion par l'intermédiaire de l'application Zoom.
Pour garantir le bon déroulement de la réunion, j'aimerais transmettre certaines consignes. D'abord, je rappelle aux témoins et aux membres du Comité d'adresser toutes leurs observations à la présidence. De plus, conformément à notre motion de régie interne concernant les tests de son et de connexion, tout a été fait.
Étant donné l'étude que nous menons sur les expériences vécues par les vétéranes, j'ai un avertissement à vous faire avant d'accueillir nos témoins. Nous allons discuter d'expériences liées à la santé mentale. Cela pourrait déclencher un traumatisme chez certaines personnes, qu'il s'agisse de gens ici avec nous, de téléspectateurs, de membres du Comité ou de leur personnel ayant vécu des expériences similaires. Si vous vous sentez bouleversés ou si vous avez besoin d'aide, veuillez en informer la greffière.
[Traduction]
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins. À titre individuel, nous avons Dawn McIlmoyle, matelot de 3e classe et infirmière autorisée. De l'organisme Le Pepper Pod, nous avons la lieutenante-colonelle Sandra Perron, présidente-directrice générale. De La Légion royale canadienne, nous accueillons Carolyn Hughes, directrice des Services aux vétérans, au siège national. Enfin, Elaine Waddington Lamont, directrice de la santé mentale, représente le Jardin de ressourcement des femmes combattantes.
[Français]
Avant de donner la parole aux témoins, j'aimerais rappeler aux membres du Comité que, dans le cadre de notre étude, nous avions décidé que nous nous déplacerions à l'extérieur de la Colline du Parlement pour rencontrer des vétéranes ailleurs. Pour ce faire, nous avons besoin de préparer un budget détaillé. Ce budget devrait être adopté pour le 19 mai.
Les membres du Comité sont-ils d'accord pour autoriser une équipe composée de l'analyste, de la greffière et du président du Comité à préparer le budget de ce voyage et à vous le soumettre, avec plusieurs options, le lundi 15 mai? Y a-t-il objection?
Monsieur Richards, vous avez la parole.
Je tiens à dire, avant de lire ce texte, qu'il n'a pour but de dénigrer personne. Il s'agit simplement de ma propre expérience. Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de le faire.
J'ai déposé ma première demande de pension en 1996, qui m'a été refusée. Mon premier appel a également été rejeté. Peu avant de figurer sur la couverture de Maclean's, il y a 25 ans ce mois‑ci, on m'a accordé une petite pension partielle et on m'a dit que c'était parce que mon agression sexuelle n'était pas liée au service et que je n'étais pas en service. Apparemment, elle était suffisamment liée au service pour que l'armée m'inculpe. Le problème a été rectifié après le recours collectif, et j'ai finalement reçu une pension complète. Toutefois, c'est à moi qu'il incombait d'écrire une lettre demandant la réouverture de mon dossier en raison des nouvelles lignes directrices.
J'ai lutté pour élever seule mes deux enfants tout en travaillant à plein temps, et j'ai obtenu ma licence en sciences infirmières à l'Université Trent avant même que le ministère des Anciens Combattants ne dispose d'un programme de réadaptation. Pendant six ans, j'ai été maintenue dans le programme de réadaptation en dépit de dépressions nerveuses successives et de tentatives de suicide. Le traitement était difficile, car même si je voulais aller mieux, en tant que mère, mes enfants étaient ma priorité, pas moi. Mes deux fils ont été témoins de l'instabilité constante de leur mère. Ils s'inquiétaient toujours de savoir si ma journée serait bonne ou mauvaise.
Je m'efforce de guérir pour ma petite-fille et être un exemple. Cependant, j'arrive à un âge où elle et moi aimons plaisanter sur le fait que je ne plie plus; je brise. Récemment, je me suis brisé le poignet en faisant du patin à roulettes avec elle et j'ai pris conscience du fait que j'avais besoin de plus d'aide que d'habitude.
Mon cadet vit dans une autre province et mon aîné est toxicomane. J'ai travaillé sur ma propre culpabilité et sur le blâme entourant la situation, et je me sens impuissante. Même s'il voulait de l'aide, je n'aurais pas les moyens de l'envoyer dans un centre de traitement. Je ne suis pas sûre qu'il y en a beaucoup qui sont équipés pour traiter les traumatismes intergénérationnels transmis aux enfants des vétérans.
Tout au long de mes relations avec le ministère des Anciens Combattants, j'ai eu de bons et de mauvais gestionnaires de cas. Pendant 20 ans, j'ai vécu dans une ville où il y avait un bureau d'ACC, mais je n'ai jamais eu connaissance d'un autre vétéran, à l'exception des personnes âgées que j'ai rencontrées au cours de ma carrière d'infirmière. Lorsque j'ai enfin rencontré un autre vétéran de mon âge et des vétérans partageant les mêmes idées, j'ai commencé à sortir de la coquille dans laquelle je m'étais enfermée après le traumatisme de l'armée, les réactions négatives et l'absence de mesures après les articles de Maclean's de 1998.
Un gestionnaire de cas m'a dit que j'étais mentalement instable et que je devais être placée en établissement, alors que j'étais en train de quitter mon ex‑mari violent. On m'a dit que j'en demandais trop alors que j'avais besoin d'aide pour ma subvention en nutrition. Des médecins ont refusé de remplir des formulaires de demande de pension parce qu'ACC leur avait envoyé mon dossier complet de 492 pages. J'ai utilisé mon unique option de financement d'urgence afin que mon fils aîné puisse bénéficier d'une aide pour faire face aux difficultés qu'il avait eues enfant. Alors que je cherchais la sécurité et que je fuyais mon ex‑mari pour sauver ma vie, j'ai été frappée par la politique d'aide unique de la Légion et une dame de la direction provinciale m'a dit que j'avais fait mes propres choix et que je devais apprendre à vivre avec eux.
À la Légion où je vivais en 2018, le barman m'a dit qu'ils n'aidaient que les vétérans, alors à quoi m'attendais‑je? Je demandais l'officier de service. Celui‑ci m'a recommandé de chercher et de trouver une autre Légion; j'étais trop difficile.
J'ai été témoin de nombreux cas de deux poids deux mesures, de dénégations absurdes et de blâme pour d'autres situations, de sorte qu'il n'y a pas de responsabilité. J'ai vu de bonnes personnes baisser les bras et abandonner parce qu'elles ne pouvaient pas s'engager une fois de plus avec ACC, une institution responsable des vétérans et dont les vétérans ont peur ou avec laquelle ils ne peuvent tout simplement plus traiter.
Si je devais, par exemple, perdre la vue ou un membre, je ne pourrais plus me rendre à des rendez-vous ou à des réunions pour obtenir la stimulation sociale dont une personne a besoin et à laquelle elle se heurte souvent à de nombreux obstacles. Je crois qu'il y a beaucoup d'idées et de solutions aux obstacles que rencontrent les vétéranes que je ne pourrais pas formuler dans ces cinq minutes. Si l'armée veut vraiment recruter plus de femmes, le ministère des Anciens Combattants doit commencer à comprendre que les besoins des femmes sont différents, surtout si une femme a été maltraitée et s'est isolée pendant un certain temps.
En conclusion, la guérison prend de nombreuses formes différentes, et pas toutes conventionnelles. Le ministère des Anciens Combattants doit comprendre qu'il s'agit d'un processus individuel et que certaines personnes n'entrent pas dans les cases qu'il a créées pour elles. Parfois, la rigidité d'ACC et les attitudes analogues à celles des assurances ne sont pas ce qu'il faut. L'acceptation et l'écoute font beaucoup.
Je vous remercie de votre attention.
:
Monsieur le président, membres du Comité, bonjour.
Je suis la lieutenante-colonelle honoraire Sandra Perron, fondatrice et PDG du Pepper Pod, un centre de ressourcement pour vétéranes qui se trouve sur le territoire du peuple algonquin anishinabe, à Chelsea, au Québec. Je suis aussi vétérane, ayant servi mon pays pendant 19 ans dans les Forces armées canadiennes, d'abord comme officière de la logistique, puis dans l'infanterie au sein du Royal 22e Régiment.
[Traduction]
Je suis également l'auteure à succès de l'ouvrage Out Standing in the Field, un mémoire sur mon service militaire.
L'expression « pepper potting » désigne la manœuvre militaire de couvrir son camarade lorsque l'équipe de tir avance sur l'ennemi. C'est ce que nous faisons au Pepper Pod, un centre de retraite pour les vétéranes. Nous nous couvrons les unes les autres dans les avancées de nos vies. Plus de 260 vétéranes et futures vétéranes de tout le pays — de Comox à Halifax et partout entre les deux — ont déjà participé à une retraite dans notre organisation. Tout cela est rendu possible grâce à l'incroyable soutien que nous avons reçu d'ACC. Nous avons un taux de satisfaction de 99,8 %, et nous avons actuellement une liste d'attente de 189 femmes pour nos retraites.
J'aimerais parler de quatre thèmes récurrents que nous entendons lors de nos retraites sans toutefois compromettre la confidentialité de nos participantes.
Tout d'abord, il y a exponentiellement plus d'abus sexuels qu'on ne le pense. En moyenne, plus de 50 % de nos diplômées ont été violées à un moment donné de leur vie, que ce soit par leur père, leur grand-père, leur frère, leur oncle ou leur partenaire. Souvent, lorsqu'elles sont jeunes, elles veulent échapper à la violence familiale, et l'armée est pour elles une excellente possibilité de quitter une famille abusive. Elles subissent alors le même sort, et moins de 5 % des femmes que nous voyons dans nos ateliers le signalent; les conséquences éventuelles sont trop graves.
Il est peut-être trop tôt pour le dire, mais à mon avis, le fait de confier les enquêtes et les poursuites pénales en cas d'inconduite sexuelle à des autorités civiles ajoute une nouvelle couche de méfiance. Il s'agit d'une question très complexe, je m'en tiendrai donc là pour l'instant.
J'entends également que de plus en plus de femmes disent qu'elles ont eu des champions, que des hommes sont venus les voir au cours de leur carrière pour leur dire: « Je suis un espace sûr pour vous. Si vous avez besoin d'aide, frappez à ma porte. »
Le deuxième thème est le corps des femmes. Comment se fait‑il que 33 de mes camarades assises autour d'une table ont été, l'une après l'autre, surprises de constater que certains des changements dans leur corps, principalement causés par la ménopause, sont normaux? Outre les bouffées de chaleur et le manque de sommeil, les femmes connaissent mal leur propre corps. Ces vétéranes se voient diagnostiquer de troubles complexes d'anxiété et de panique ainsi que de troubles de stress post-traumatique, alors que certaines d'entre elles — pas toutes, mais certaines — vivent simplement une réaction tout à fait normale au changement hormonal. En tant qu'organisation conçue par des hommes pour des hommes, nous devons en apprendre davantage sur le corps des femmes afin que nos commandants de pelotons de 25 ans puissent être de meilleurs dirigeants pour la jeune mère qui a besoin d'un réfrigérateur pour conserver son lait maternel ou pour l'adjudante périménopausée qui ne dort pas assez.
Le troisième thème est que certaines femmes sont victimes de violence physique et mentale de la part d'époux souffrant de trouble de stress post-traumatique, et qu'on leur dit que leur responsabilité en tant qu'épouses est de tenir le coup parce que leurs époux ont servi leur pays.
Enfin, les femmes dans les FAC essaient encore de tout faire — être mères, employées, soldates, membres de la marine, aviatrices et soignantes. Chaque père doit prendre plus de deux semaines de congé parental. Il faudrait envisager une nouvelle loi afin que ce congé parental soit plus flexible et que ce temps puisse être fractionné de sorte qu'ils puissent s'adapter aux opérations, aux déploiements et aux exercices.
Le 27 mars, Le Pepper Pod a invité le chef et le vice-chef d'état-major de la défense et les 20 principaux dirigeants des FAC à parler de ce que nous avons appris des quelque 260 femmes qui ont suivi nos programmes. Ils sont tous venus. Les commandants de l'armée de terre, de l'armée de l'air et de la marine, le chef du personnel militaire, le commandant du renseignement des Forces canadiennes et tous leurs chefs se sont engagés à prendre des mesures en amont pour que la prochaine génération de femmes n'ait pas à relever certains des défis auxquels notre génération a été confrontée.
[Français]
Je vous laisse avec un dernier commentaire. Nous sommes des vétéranes, et non des femmes vétérans ou des femmes vétéranes. Nous sommes des anciennes combattantes, et non des femmes anciens combattants ou des femmes anciennes combattantes. C'est comme pour les infirmières, les policières et les pompières. Le fait qu'on ne sache toujours pas en 2023 comment se référer à nous en dit long sur le cheminement qu'il reste à faire.
Je vous remercie beaucoup du travail important que vous faites.
[Traduction]
Je vous remercie de l'important travail que vous accomplissez.
:
Monsieur le président et membres du Comité permanent des anciens combattants, c'est un plaisir de comparaître devant vous en personne au nom de nos 250 000 membres et de leur famille. Je vous remercie de cette occasion de m'adresser à vous une fois de plus.
La Légion est la plus grande organisation de vétérans. Je suis directrice des Services aux vétérans, au siège national. J'ai aidé de nombreux vétérans — y compris des membres en service et des retraités — et leur famille pendant environ 16 ans dans le cadre de mes fonctions à la Légion et avant de quitter le service.
Depuis 1926, nos officiers d'entraide professionnels titulaires d'une habilitation de sécurité du gouvernement fournissent chaque année à des milliers de vétérans, à leur famille et à leurs survivants une aide gratuite en matière de demandes d'invalidité à ACC et d'appels devant le Tribunal des anciens combattants (révision et appel).
J'ai commencé à travailler à la Légion en janvier 2011. Depuis, j'ai constaté une augmentation du nombre de vétéranes des FAC et de la GRC qui demandent des prestations d'invalidité. Ces dernières années, le nombre de demandes et d'appels a considérablement augmenté pour les personnes ayant subi un traumatisme sexuel, mais nous constatons également qu'un plus grand nombre de vétéranes se présentent pour d'autres affections, comme des lésions musculosquelettiques et des troubles de santé mentale, la dysfonction sexuelle et bien d'autres encore.
Depuis 1989, les femmes servent dans toutes les fonctions militaires, à l'exception des sous-marins. Elles voulaient être traitées sur un pied d'égalité et démontrer qu'elles pouvaient accomplir toutes les tâches professionnelles requises dans leur métier et démontrer la même condition physique que leurs compagnons d'armes. Elles l'ont fait avec fierté et honneur. Toutefois, dans une institution largement dominée par les hommes, les effets physiques, mentaux ou autres sur les femmes et leurs soins de santé généraux à court et à long terme ont été très peu pris en compte. Les soins de santé militaires fondés sur le soldat masculin moyen ont permis et produit des lacunes en matière de recherche et des préjugés systémiques pendant de nombreuses années. Aujourd'hui encore, des équipements conçus pour les hommes causent des lésions physiques et mentales, causant une baisse de la qualité de vie des femmes.
Une témoin précédente a demandé: « Où se trouve la boucle de rétroaction sur les décisions du ministère qui ont été infirmées par le Tribunal des anciens combattants? » Nos officiers d'entraide participent chaque année à de nombreux examens des droits et appels devant le Tribunal, et réussissent à faire annuler des décisions d'ACC, tant pour les hommes que pour les femmes. Pourquoi ACC refuse-t-il des prestations d'invalidité qui approuvées plus tard par le Tribunal? Pourquoi ne sont-ils pas sur la même longueur d'onde, surtout en ce qui concerne les politiques et les procédures en place? L'arriéré des décisions en matière d'invalidité est une injustice flagrante. L'autre aspect est le temps d'attente supplémentaire, car les personnes concernées doivent maintenant se battre pour obtenir des prestations au niveau suivant.
Nous constatons que de nombreuses demandes favorables à l'homme moyen sont refusées aux femmes simplement parce qu'elles n'ont pas servi au sein des armes de combat, par exemple. ACC ne tient pas compte de l'équipement qui ne convient pas, ni du fait que les femmes pèsent moins, sont plus petites et ont peut-être servi toute leur carrière dans des bases et des unités physiquement actives, quelle que soit leur profession. L'approche universelle est peut-être égale, mais est-elle équitable? Nous demandons à ACC de rendre des décisions plus équitables en tenant compte de ce qui s'est passé pendant leur service, de l'équipement qu'elles ont utilisé, de l'endroit où elles ont servi et de la façon dont les FAC et la GRC s'occupent ou se sont occupées de la santé et du bien-être de leurs membres féminins au travail.
ACC doit également mieux collaborer avec les FAC en ce qui concerne les avantages et les services dont les vétéranes auront besoin lorsqu'elles quitteront le service et qu'elles prendront de l'âge. Il faut revoir et actualiser sans délai les politiques et les recherches, comme les lignes directrices sur l'admissibilité aux prestations et la table des invalidités, afin de mieux cerner les dommages causés à la santé physique et mentale des femmes. Les prestations et les programmes doivent être financés de manière appropriée afin de produire les résultats équitables souhaités.
Enfin, bien que des recherches supplémentaires s'imposent, il ne faut plus attendre. Le gouvernement canadien, les FAC et ACC ont l'occasion de faire preuve de leadership en planifiant stratégiquement le meilleur moyen de favoriser et d'optimiser le bien-être des vétéranes. C'est le moins que nous puissions faire pour celles qui servent et qui ont servi avec honneur et fierté.
Monsieur le président, je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de présenter cet exposé. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions ultérieurement.
Merci.
:
Merci, monsieur le président et merci aux membres du comité. C'est un plaisir de m'adresser à vous aujourd'hui.
Le thème de cette réunion est celui des différences dans l'expérience des soldates et des vétéranes. Je crois que je vais commencer par une histoire qui peut illustrer l'une des différences, de façon peut-être plus banale que profonde, car nous avons déjà entendu certaines de ces différences aujourd'hui.
Je suis directrice de la santé mentale au Jardin de ressourcement des femmes combattantes. Nous avons été fondés vers 2017 par moi et ma partenaire. Je suis une civile, je ne peux donc pas parler d'expérience de première main. Je ne peux que relayer l'expérience qui m'a été relatée et que j'ai eu le privilège d'écouter. Je me sens à l'aise pour vous parler de l'expérience de ma cofondatrice, Erin Kinsey.
Vers 2017, il devenait évident qu'Erin n'allait plus bien. Elle avait servi dans l'armée de l'air américaine à la fin des années 1980 et au début des années 1990, et avait été blessée dans le cadre de son service. Cependant, elle ne s'en est pas rendu compte tout de suite. Lorsqu'elle a quitté l'armée, elle avait encore une vingtaine d'années et se sentait bien. Ils ont vérifié ses dents et son état de santé général et lui ont dit: « Vous allez bien. » Elle est ensuite venue au Canada, a fait des études universitaires, a obtenu un doctorat, s'est mariée et a divorcé. Elle a fait toutes ces choses.
Cependant, lorsqu'elle est arrivée à Ottawa vers 2012, il y avait des signes que quelque chose n'allait pas. Vers 2015, il est devenu évident que rien n'allait bien. On a fini par diagnostiquer chez elle un trouble de stress post-traumatique et nous avons commencé à tenter de faire reconnaître cet état par le ministère des Anciens Combattants aux États-Unis. Comme elle se trouvait au Canada, je crois qu'il est juste de dire qu'elle est passée entre toutes les mailles du filet. Heureusement, elle a fini par obtenir une pension et a été déclarée invalide à 100 % par le ministère américain des Anciens Combattants.
Pendant qu'elle cherchait à se faire soigner, elle s'est renseignée sur les services qui pouvaient lui être proposés. Elle a notamment découvert, par l'intermédiaire d'un ami, une organisation extraordinaire dont je vais chanter les louanges dans un instant — pas la mienne — qui s'appelle Project Healing Waters. Son mandat est d'amener les vétérans dans des endroits où ils peuvent pratiquer la pêche à la mouche. C'est une organisation étonnante où, quel que soit le degré de capacité ou d'incapacité d'une personne, celle-ci peut être transportée dans un endroit où elle peut pratiquer cette activité. Cela a profondément guéri l'ami d'Erin. Il a qualifié le ruisseau d'église.
Cependant, Erin ne voulait pas être plongée jusqu'à la taille dans l'eau glacée à regarder de petites mouches circuler tout en priant pour qu'un jour un poisson vienne toucher sa ligne. Ce n'était pas sa passion, alors nous avons décidé ensemble de créer un jardin parce qu'un jardin était un endroit où elle se sentait guérie. Elle se sentait guérie par la présence d'animaux. Il y avait, même en 2017, très peu de services disponibles pour les vétéranes.
Nous avons commencé avec quelques outils et un tout petit jardin, et au cours des cinq dernières années, nous avons ajouté plusieurs hectares à notre jardin. Nous avons des chevaux une thérapie équine, nous avons une thérapie horticole, nous avons l'apiculture et nous avons une thérapie par l'art, à la fois en personne et virtuellement. Bien sûr, nous avons dû nous adapter à la pandémie, comme tout le monde. Cependant, je crois que la différence dans l'offre, qui était vraiment axée sur des sujets d'intérêt masculin, tenait en partie au simple fait d'une sous-représentation, alors nous aimons dire que nous servons les personnes sous-représentées — les femmes et les membres de la communauté 2SLGBTQ.
Ce n'est qu'une petite différence. Vous avez entendu parler d'autres écarts plus importants, comme les statistiques sur les traumatismes sexuels. Statistique Canada estime qu'environ 25 % des femmes ont été agressées sexuellement dans le cadre de leur service militaire. Comme l'a déclaré la lieutenante-colonelle Perron, ce chiffre est probablement largement sous-estimé. Nous avons entendu parler de certaines différences physiques dues à des choses comme des uniformes, des sacs à dos et des bottes mal ajustés.
Ce dont nous n'avons peut-être pas encore entendu parler, c'est de la différence entre les taux de trouble de stress post-traumatique. Les femmes sont beaucoup plus susceptibles de souffrir de TSPT par suite de leur service. La documentation spécialisée ne s'accorde pas sur les raisons exactes de ce phénomène. La question est complexe, mais on peut dire qu'elle est probablement liée à des différences physiologiques, des différences dans le cerveau et des différences hormonales, mais aussi à des différences dans les expériences, y compris les traumatismes sexuels liés au combat, à des différences sociologiques, au harcèlement et à des différences structurelles.
Nous savons que les femmes sont plus susceptibles de souffrir de TSPT. Malheureusement, nous ne les aidons pas encore à guérir aussi bien que nous le devrions. Dans une étude réalisée il y a quelques années, en 1998, le taux de guérison du TSPT chez les hommes après deux ans était d'environ 50 %. Au bout de cinq ans, presque tous les hommes ayant participé à cette étude s'étaient rétablis. En revanche, après cinq ans, seulement 50 % des femmes avaient récupéré, et après dix ans, lorsque l'étude a pris fin, seulement 55 % des femmes s'étaient rétablies.
Je crois que nous n'en connaissons pas encore la raison exacte, mais il est clair que les femmes sont différentes et qu'elles sont mal servies par les services et les traitements dont nous disposons actuellement. C'est pourquoi nous essayons d'offrir un environnement où les personnes peuvent se soutenir mutuellement et participer à des activités thérapeutiques, dans l'espoir que cela puisse les aider d'une manière quelque peu différente de ce qui se fait ailleurs.
Nous espérons sincèrement pouvoir avoir une incidence positive dans la vie des femmes. Je vous remercie.
:
Merci beaucoup de vos témoignages, mesdames.
Je remercie également les trois d'entre vous qui ont servi leur pays.
[Traduction]
Vers cinq heures moins le quart, si vous avez besoin de vous arrêter cinq minutes, n'hésitez pas à me le faire savoir.
[Français]
Tout à l'heure, dans son allocution, la lieutenante-colonelle Perron a fait allusion au titre français de l'étude que nous menons, « Expériences vécues par les femmes vétérans ». Je dois vous aviser que nous avons eu des discussions au sein du Comité pour trouver le titre le plus précis possible pour cette étude. Nous ne voulions pas que l’on confonde les femmes avec les hommes. Souvent, quand on parle de vétérans, on parle d'hommes. Puisque nous nous sommes dit qu'il fallait marquer la distinction en français, le problème ne se présentant pas en anglais, nous avons décidé d'employer l'expression « femmes vétérans » pour préciser ce qui nous préoccupait. C'est aussi une des premières fois que nous faisons une telle étude pour nous intéresser au vécu des femmes. C'est pour cette raison que le Comité a choisi le titre « Expériences vécues par les femmes vétérans ».
Madame Perron, vous semblez vouloir réagir. Je vous cède donc la parole avant que nous passions aux questions.
:
Quel programme m'a été utile en tant qu'officière d'infanterie? C'était probablement l'entraînement à l'infanterie, mais à part cela, je n'ai pas eu de formation distincte pour les femmes dans les armes de combat. Il n'y avait pas de programme.
Maintenant, je peux vous dire ceci, et j'en parle dans mon livre: il y avait des partisans. Des hommes ont défendu ce que je représentais et souvent au détriment de leur carrière. Ils ont été ostracisés. Je les ai appelés « les amateurs de pepperoni ». Parce que mon nom est « Perron », on les appelait « les amateurs de pepperoni ».
Des voix: Oh, oh!
Lcol Sandra Perron: Il y a des hommes comme ça aujourd'hui. Les femmes me disent que lorsqu'elles s'assoient autour de la table, les hommes sont de plus en plus présents et soutiennent ou défendent les femmes. La preuve en est que nous avons reçu les 20 principaux dirigeants au Pepper Pod pour une discussion au coin du feu. Cela en dit long, mais à mon époque, il n'y avait pas de programme.
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Je suis tout à fait d'accord avec Mme Hughes pour dire qu'il faut examiner tous nos programmes dans une optique sexospécifique pour voir ce que nous faisons aujourd'hui et dont nous aurons honte dans 5 ou 10 ans.
Cela fait maintenant quatre fois que j'interviens devant ces comités. Chaque fois, je mentionne la Mère de la Croix d'argent à titre d'exemple. Chaque année, nous avons une Mère de la Croix d'argent qui représente les mères qui ont perdu leurs enfants au service de ce pays, mais pourquoi, en 2023, n'avons-nous pas de famille ou de parent de la Croix d'argent?
Nous avons aujourd'hui des soldats qui ont deux pères ou deux mères, ou qui ont été élevés par des tuteurs ou des grands-parents. Il est temps de changer des mots comme ceux‑là qui ne nous servent pas, parce qu'ils répondent: « Oh, mais les femmes ont un lien spécial avec leurs enfants. » Oui, cela vous arrange de croire cela, parce qu'alors c'est à nous qu'il incombe de nous occuper des enfants. Nous devons changer ce genre de préjugés.
:
Les femmes viennent. Notre programme phare s'appelle le Lifeshop. Elles viennent pour une fin de semaine. Elles arrivent le vendredi. Elles ne se connaissent pas, pour la plupart. Elles sont nerveuses, effrayées et anxieuses parce qu'elles ne savent pas ce que sera la fin de semaine.
Lorsqu'elles partent le dimanche, elles ont une nouvelle tribu. Elles ont noué des amitiés profondes au cours de la fin de semaine grâce à leurs points communs, en partageant leurs histoires, comme nous venons de l'entendre, et en nouant des liens avec des femmes. Beaucoup d'entre elles n'ont pas d'amies femmes en raison du service militaire, du déracinement tous les deux ou trois ans et du changement de province. De plus, certaines d'entre elles travaillent dans des domaines où il n'y a pas beaucoup de femmes. Elles peuvent partager certains de leurs problèmes de santé et leur expérience.
C'est ce que nous leur offrons, en plus de toute une série d'autres activités, afin qu'elles poursuivent leur voyage ensemble.
:
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie toutes d'être venues témoigner et je remercie celles d'entre vous qui ont servi de leurs services. Nous vous en sommes profondément reconnaissants.
Je vais d'abord m'adresser à vous, Dawn.
Puis‑je vous appeler Dawn?
Mme Dawn McIlmoyle: Oui.
Mme Rachel Blaney: Tout d'abord, j'aimerais dire qu'en écoutant les vétéranes et les personnes qui les soutiennent dans le cadre de cette étude, j'ai entendu à maintes reprises qu'elles se sentent souvent invisibles. Leur réalité ne leur est pas reflétée, que ce soit dans les FAC ou à ACC.
Je voudrais vous remercier d'avoir travaillé si dur pour vous faire voir. C'est une chose difficile à faire, et je vous suis reconnaissante de l'avoir fait.
L'un des problèmes dont les femmes nous ont fait part à maintes reprises est le manque de communication entre les FAC et ACC. Dans votre témoignage, vous avez parlé d'une chose qui m'a beaucoup touchée, à savoir le fait de devoir faire ouvrir vos dossiers à maintes reprises pour pouvoir répondre aux changements apportés aux lignes directrices et obtenir les prestations auxquelles vous avez droit. Pourriez-vous nous parler un peu de ce à quoi cela ressemblait, si vous êtes d'accord? Avez-vous des recommandations sur la façon dont cela pourrait se faire plus efficacement à l'avenir?
:
Le fait que les forces armées cherchent à faire abandonner les poursuites dans mon affaire me pose un problème. Je dois payer le ministère de la Justice pour expliquer le préjudice que j'ai subi. Il se passe exactement la même chose avec Anciens Combattants Canada.
Il y a beaucoup de choses que le ministère pouvait faire. J'ai eu je ne sais combien de gestionnaires de cas. J'ai dû raconter mon histoire tellement de fois depuis 1996 — et je ne suis pas la seule.
Il faut des méthodes simplifiées pour éviter de rouvrir les plaies. La responsabilité devrait leur incomber parfois. Un procès a été intenté. Peut-être qu'ils devraient ouvrir certains dossiers et ne pas obliger la personne à revivre tout ça.
Quelqu'un aurait pu m'aider, mais on m'a dit que personne ne pouvait m'aider — même le Bureau de services juridiques des pensions —, jusqu'à ce que j'écrive une lettre. Je l'ai écrite en tremblant parce que j'avais déjà essuyé tellement de refus que je ne voulais pas avoir à en subir un autre et être encore déçue. Il est très difficile d'avoir à rouvrir des plaies rien que pour obtenir quelque chose que j'aurais dû obtenir en 1997, quand la décision a été rendue.
:
Je vous remercie de votre réponse.
C'est dur à entendre, mais je suis soulagée aussi d'une certaine façon de voir que des tendances commencent à se dégager des témoignages, parce que ce sont les tendances que nous voyons dont nous devons parler dans ce rapport afin qu'il s'opère ensuite, espérons‑le, un véritable changement.
C'est la dernière question que j'ai pour vous, madame McIlmoyle. Vous avez expliqué comment, avec les services, on a souvent l'impression que l'on va obtenir son assurance, mais que l'on se bat avec eux pour obtenir des services. Je sais que Mme Wagantall vous a parlé du traumatisme du sanctuaire, mais ce que je vous entends dire, entre autres — et beaucoup de vétérans le disent aussi —, c'est que l'on n'informe pas bien des choses qui changent. Les vétérans ne sont pas avisés du changement et de la prochaine démarche qu'ils doivent faire. C'est à eux de deviner, mais au moins, le changement s'est fait.
Pouvez-vous expliquer ce que vous voulez dire quand vous dites qu'en leur parlant, vous avez l'impression de parler à quelqu'un qui vous donne une assurance?
:
Je vous remercie, monsieur le président.
Je remercie les témoins de leur présence aujourd'hui. Il arrive que certains témoignages soient difficiles à entendre pour nous, mais pour que les choses changent, nous devons les entendre. Je vous remercie de vos années de service.
Madame McIlmoyle, je tiens à ce que vous sachiez que nous avons entendu les témoignages principalement d'officiers supérieurs et que nous vous sommes donc très reconnaissants de votre participation aux témoignages aujourd'hui.
Ma première question sera pour Mme Hughes, de la Légion.
Depuis quelque temps, que ce soit en mettant l'accent sur des études sur les femmes dans les forces armées ou sur Anciens Combattants Canada, ou simplement en écoutant des hommes et des femmes, nous entendons des témoignages sur la tenue des dossiers à Anciens Combattants Canada. Souvent, les dossiers médicaux sont difficiles à trouver ou il est difficile de les transférer à des fournisseurs de soins de santé qui peuvent en avoir besoin pour soigner des vétérans. Nous avons entendu le témoignage d'organisations qui ont fait des vérifications indépendantes, comme l'ombudsman, le directeur parlementaire du budget, le vérificateur général et notre propre comité, et qui disent parfois que les dossiers se perdent même à ACC. Il est très, très difficile d'en garder la trace, ce qui est très décevant, car le dossier médical est tellement important pour se faire soigner.
Que pensez-vous de l'idée de créer un système qui donnerait aux vétérans plus de contrôle sur leurs dossiers médicaux, notamment quand ils sont libérés des forces armées et qu'ils changent de collectivité? Qu'en pensez-vous?
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Il y a un processus, lorsqu'on est libéré des forces armées, pour obtenir ses dossiers, mais il est extrêmement lent à l'heure actuelle. Si c'est pour une demande de prestations d'invalidité ou pour un appel, nous obtenons généralement les dossiers plus rapidement qu'un vétéran parce que nous avons un protocole d'entente avec Anciens Combattants Canada. Nous ne pouvons pas remettre ces dossiers au vétéran parce que nous sommes la tierce partie en l'espèce, mais nous pouvons écrire des lettres au médecin. Si, par exemple, un avis médical est nécessaire, nous pouvons écrire une lettre disant que, pendant le service militaire, ceci et cela s'est produit, que tel dossier manque et demandant au médecin s'il peut, étant donné son avis, formuler quelque chose. Nous pouvons informer de ce que nous avons trouvé, mais nous ne pouvons pas remettre de copies.
C'est souvent bénéfique pour les vétérans qui font appel à nous. Nous obtenons les dossiers uniquement avec leur consentement écrit, ce que tous ne sont pas prêts à donner. Nous faisons volontiers tout notre possible pour accélérer un peu le processus de cette façon.
Je pense que maintenant, avec les dossiers électroniques... Je crois qu'il deviendra beaucoup plus facile pour un vétéran d'obtenir une copie de ses propres dossiers. Il suffira de les télécharger sur une clé USB, sur un CD ou un DVD, par exemple, et ils pourront les obtenir plus rapidement. À l'heure actuelle, malheureusement, les dossiers sont encore en partie sur papier.
Je ne l'ai pas mentionné, mais j'étais administratrice de soins de santé dans les forces armées. J'ai travaillé sur certains de ces dossiers. Je les connais donc très bien.
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Je limiterai mes commentaires à ce qui arrive pendant la retraite parce que ces informations relèvent de la vie privée et que nous ne racontons pas ce qui s'y passe.
Je peux vous dire que la philosophie essentielle du week-end est que nous créons un environnement tellement sûr que les femmes se sentent libres de faire part de leurs histoires. Quand elles le font, elles s'exposent au jugement. Elles se sentent très vulnérables. Elles tombent le masque. Elles partagent des secrets qu'elles ont confiés à très peu de personnes. Lorsqu'elles le font, il est très facile de les aimer parce qu'elles sont sans défense. Voilà ce qui arrive pendant le week-end. Elles font une série d'exercices. Nous finissons le dimanche à midi. Ce jour‑là, nous faisons une cartographie mentale qui leur sert simplement à planifier leurs prochaines étapes lorsqu'elles sortent de la transition. Elles ont ce nouvel outil qu'elles peuvent utiliser pour planifier leur prochaine aventure, un voyage, la transition, un défi ou un problème. Voilà ce qu'elles font.
Elles reviennent entre quatre et six semaines après le lifeshop. Elles reviennent pour une réunion avec leur tribu. Souvent, elles n'attendent même pas aussi longtemps. Elles font déjà des activités avec leur nouvelle tribu. Elles sortent prendre un café, elles vont ramasser des bleuets, etc. Elles se raccrochent les unes aux autres à différents niveaux.
J'ai moi-même participé à un lifeshop il y a 30 ans. Les femmes avec qui j'y ai participé font toujours partie de ma vie — l'une d'elles est membre de mon conseil d'administration — et ce sont mes meilleures amies. Voilà ce qui ressort du Pepper Pod. Nous faisons tout un tas d'autres activités aussi. Nous avons une équipe de bateau-dragon et nous participons à des courses. Nous faisons de la planche à pagaie, des sorties à raquettes, tout ce dont les femmes ont envie.
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Au cours des dernières années, je dirai que probablement la moitié sont venues nous trouver au sujet de demandes de prestations.
Mme Rachel Blaney: Tant que cela! D'accord.
Mme Carolyn Hughes: Avec l'affaire judiciaire des traumatismes sexuels subis au sein des forces armées, beaucoup ont décidé de recourir à tous les appels possibles. Deux d'entre nous à la Légion s'occupent des demandes de réexamen. Nous avons vu augmenter considérablement le nombre de demandes de prestations refusées faute d'éléments de preuve suffisants ou parce que la police a conclu que la plainte était sans fondement ou que la chaîne de commandement a imposé le silence, de sorte qu'il n'y a aucune documentation sur ce qui s'est passé.
Les politiques se sont améliorées dernièrement pour ce qui est des traumatismes sexuels subis au sein des forces armées, et les demandes de prestations sont plus favorables, mais on n'a pas réexaminé toutes les demandes de prestations qui ont été rejetées dans le passé. Les femmes ont dû se présenter à nous pour que nous sachions. À notre commandement national, nous avons examiné proactivement tous nos dossiers. Nous avons cherché les demandes de prestations qui ont peut-être été refusées faute de données médicales sur ce qui est arrivé ou parce que la plainte pour harcèlement n'a pas abouti. Nous avons réussi à faire annuler ces rejets en plus haute instance.
Il y a deux ou trois choses dont j'aimerais parler, mais je me tourne d'abord vers Mme Hughes.
Je suis heureux de vous revoir au Comité. C'est un plaisir. Nous entendons très souvent parler d'une chose — qui vaut pour tous les vétérans, mais assurément tout autant, si ce n'est plus, pour les femmes vétérans —, les délais d'attente. J'entends souvent parler de l'attente interminable qu'endurent les vétérans avant qu'on se prononce sur leurs demandes de prestations. On entend parler d'une année ou deux, ce qui est horrible, et même de beaucoup plus longtemps que cela parfois. Ce ne sont pas des exceptions. Ces cas sont très courants.
En entendez-vous parler dans le cadre de votre travail à la Légion, avez-vous affaire à de tels cas et vous en occupez-vous? Avez-vous des mesures à proposer pour mieux servir les vétérans?
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C'est une plainte que j'entends plusieurs fois par jour, que ce soit par courriel ou au téléphone.
Notre plus gros problème en ce moment concerne l'outil en ligne qui indique le temps d'attente moyen. Les vétérans le consultent et il indique un délai de 23 semaines pour une affection courante. Il se passe une quarantaine de semaines et ils se demandent pourquoi c'est le double du délai annoncé et pourquoi ils n'ont toujours pas de réponse. Il peut s'agir d'une simple demande de prestations, par exemple, pour de l'arthrose aux genoux.
Nous avons demandé à multiples reprises à ACC de supprimer cet outil en ligne ou, au moins, de faire en sorte qu'il soit plus précis, parce qu'il ne l'est pas. Il cause beaucoup de ressentiment, de frustration et de nervosité. Les vétérans se demandent pourquoi leur demande de prestations prend tellement de temps. Ils s'imaginent qu'elle va être refusée. Ils ont ce genre d'attitude. C'est une chose qu'Anciens Combattants Canada pourrait faire, soit faire en sorte que l'outil en ligne soit précis, soit le supprimer entièrement.
ACC s'améliorait en ce qui concerne le délai de traitement des demandes de prestations d'invalidité. Avec la grève, je sais que le traitement prendra sans doute un peu plus de temps, deux ou trois semaines de plus. Nous surveillons cela de très près et nous ne lâcherons pas prise tant qu'ACC ne respectera pas son mandat de 80 % des demandes traitées en moins de 16 semaines.
J'aimerais revenir vers vous, s'il reste du temps, mais je vais d'abord passer à Mme McIlmoyle — Dawn, si je peux vous appeler par votre prénom. Si j'ai du temps ensuite, je vous poserai encore quelques questions sur les délais d'attente. J'ai remarqué quelques hochements de tête. Les témoins semblent d'accord pour dire, de manière générale, que les délais d'attente sont un problème. Peut-être, alors, que d'autres témoins auront des solutions à proposer.
Avant d'y venir, je me tourne vers vous, Mme McIlmoyle. J'espère que cela ne vous embête pas que j'en parle. J'ai remarqué que vous avez un chien d'assistance. Est‑ce que nous pouvons en parler? J'espère que cela ne vous ennuie pas.
Comment s'appelle votre chien d'assistance?
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Merci de ce témoignage. C'est formidable et c'est certainement quelque chose que le Comité pourra examiner quand il formulera ses recommandations.
Je vais reprendre au point où j'en étais au sujet des temps d'attente.
Je vais commencer avec vous, madame Hughes, mais je vois que d'autres personnes hochent la tête et voudront sans doute ajouter quelque chose. Je vais donc adresser ma question à toutes celles qui veulent y répondre.
Pour réduire les temps d'attente, quelle est la première… J'ai souvent entendu parler du recours à une liste de blessures présumées pour éliminer par inférence certaines demandes du système et accélérer le traitement pour les vétérans concernés et, par conséquent, pour l'ensemble des vétérans. Si vous avez d'autres suggestions, je suis à l'écoute.
Selon vous, quelle serait la première mesure à prendre pour réduire les temps d'attente? Si on vous nommait ministre des Anciens Combattants demain, que feriez-vous? Que feriez-vous en premier pour réduire les temps d'attente?
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Une de mes suggestions serait d'utiliser des scénarios conçus par l'armée pour permettre à tous les militaires de jouer le rôle de champions de la diversité et de discuter de tous les comportements qu'ils associent à l'inconduite sexuelle. Les scénarios utilisés actuellement ne sont pas fondés sur la réalité. Les militaires sont dans une classe et doivent faire des exercices dans lesquels on leur demande de dire ce qu'ils feraient dans telle ou telle situation.
J'ai eu cette discussion avec beaucoup de monde, du chef d'état-major de la défense en descendant. Je leur ai demandé pourquoi, durant les formations, on n'utilise pas de scénarios fondés sur la réalité qui permettraient aux militaires de prendre la défense de leurs collègues qui joueraient un rôle… Les scénarios donnent la possibilité d'avoir ces discussions dans un environnement sûr.
J'ai utilisé ces scénarios pour avoir des discussions avec les membres de mon propre régiment, le Régiment de Hull, dont je suis la colonelle honoraire. Les réponses n'étaient pas tout le temps justes, mais les discussions étaient respectueuses et adultes. Ils ont grandi et ils ont appris. Il faut donner la possibilité aux militaires de faire des erreurs dans les scénarios pour leur permettre de grandir et d'apprendre.
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Nous siégeons au comité des anciens combattants et nous cherchons des moyens d'améliorer l'organisme. Les gens auxquels nous nous intéressons sont principalement des anciens militaires. Essentiellement, on les rencontre rapidement et on passe à un autre dossier. En fait, nous nous occupons de la stratégie de sortie, de ce qui s'est passé ou de ce qui s'est produit avant ce moment.
Je m'interroge à ce sujet. Quand on considère certaines situations et le nombre de femmes qui ont été agressées ou qui ont subi de la violence dans l'armée, les chiffres sont ahurissants. Pour que les choses s'améliorent au ministère des Anciens Combattants, il faut examiner ce qui se passe durant les années de service et les problèmes qui se produisent à ce moment. N'y a‑t‑il rien qui est dit durant la période où ces problèmes se produisent?
Il semble que près de la moitié des personnes ont des problèmes, ou des difficultés. Est‑ce que l'autre moitié prend leur défense? Comment se fait‑il que tant de personnes ont des problèmes et que personne ne parle? Pourquoi ne fait‑on rien pour améliorer cela?
Les chiffres sont astronomiques, comme vous l'avez souligné, et je crois que d'autres femmes militaires pourraient parler, mais n'ont pas l'occasion… Je me demande pourquoi.
Mme McIlmoyle a peut-être une explication. Je ne peux pas croire que je suis le seul à ressentir cette frustration!
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Nous avons effectivement reçu une subvention de 50 000 $ par année sur 5 ans. L'argent servira à rémunérer un employé à temps partiel, ce qui équivaut à la moitié de la subvention environ, et le reste sera affecté à la programmation.
Nous avons notamment un programme d'apiculture. C'est peut-être méconnu, mais l'apiculture est utilisée en ergothérapie depuis la Première Guerre mondiale. Des vétérans canadiens de cette guerre ont eu une seconde carrière en apiculture après l'armée. C'est vastement utilisé dans les programmes d'ergothérapie aux États-Unis. C'est un de nos programmes, et nous avons constaté que les participants se sentent très valorisés.
Parmi nos autres programmes… J'ai mentionné que nous avons des équidés. Nous offrons maintenant un programme d'équithérapie. Je crois qu'il a été question tout à l'heure de chiens d'assistance et du pouvoir de guérison des animaux. Je crois qu'on n'apprécie pas suffisamment l'utilité des programmes de zoothérapie parce que c'est difficile d'en prouver l'efficacité. Les commentaires se limitent souvent à dire que le programme a été aidant ou qu'un questionnaire a permis à la personne de réaliser qu'elle se sentait moins isolée.
Malheureusement, beaucoup de recherches appliquent le modèle appliqué dans le domaine pharmaceutique et font appel à des essais à double insu ou à des essais comparatifs avec placebo. Pour une étude pharmaceutique, il peut être efficace de séparer les sujets en deux groupes sans leur dire s'ils prennent le vrai médicament ou un placebo. C'est beaucoup plus difficile de trouver un placebo approprié pour des sujets qui font une équithérapie parce qu'ils savent qu'ils participent à ce programme.
Pour revenir à certaines des questions posées sur la recherche, je pense qu'il serait très utile de mener des recherches et de recourir à des outils statistiques pour comprendre ce qui se passe. Ce serait utile même s'il peut y avoir du cafouillage, même si les femmes vétérans et les vétérans qui sont des membres de la communauté 2SLGBTQ font partie d'une minorité et, par définition, sont moins nombreux, et même s'il peut être difficile de mesurer ce que les personnes trouvent valorisant et thérapeutique, et notamment par rapport à un groupe témoin.
Nous menons ce type de recherches dans la mesure de nos moyens, mais c'est clair que nous aimerions beaucoup qu'il y ait plus de recherches de ce genre. Nous aimerions beaucoup faire la démonstration que nos programmes de jardinage et de zoothérapie sont aussi efficaces que nous le pensons.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Madame Perron, vous avez fait allusion à la différence observée entre les femmes et les hommes quant au délai qui s'écoule avant d'obtenir une réponse. En effet, au 31 décembre dernier, une femme devait attendre deux semaines de plus qu'un homme pour obtenir une réponse. Chez les francophones, il faut compter trois semaines de plus que chez les anglophones. On conviendra donc que la situation n'est donc pas très bonne pour une femme francophone.
En ce moment, la situation n'est quand même pas si mauvaise, car les délais ont déjà été de 20 ou 30 semaines. Cependant, auriez-vous par hasard des hypothèses qui pourraient expliquer pourquoi les délais sont plus longs pour les francophones?
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Le ministère de la Défense nationale et ACC ont créé des groupes de transition pour soutenir toutes les personnes qui quittent la vie militaire. On n'aide plus seulement les personnes malades ou blessées. Je n'ai pas encore eu l'occasion de voir ce que font ces groupes au juste. Je viens de commencer à travailler à une collaboration entre eux et notre organisme.
C'est clair qu'ils devront prendre en compte les besoins particuliers de tous les vétérans, qu'il s'agisse de femmes, d'hommes ou de membres de la communauté LGBTQ2. Chaque personne a son propre cheminement durant la transition. Le mien a été relativement sans heurts. J'ai pu compter sur le soutien de mon conjoint et mes enfants étaient assez grands, mais tout le monde n'a pas cette chance.
Certaines femmes célibataires n'ont aucun réseau de soutien quand elles quittent l'armée. C'est aussi le cas pour certains hommes célibataires. La transition se passe différemment pour les personnes qui ont des problèmes de dépendance. C'est important de s'en occuper avant qu'elles fassent la transition vers une vie plus normale.
C'est le plus important. Il faut que le processus soit personnalisé. On ne peut pas offrir une solution unique.
Nous allons nous arrêter ici.
[Traduction]
Je vous remercie toutes pour vos éclairages et pour votre contribution à notre étude.
Je vais terminer avec nos témoins avant de revenir au Comité.
[Français]
Je rappelle au Comité que, dans le cadre de notre étude sur les expériences vécues par les vétéranes, nous avions avec nous plusieurs témoins cet après-midi: à titre personnel, Mme Dawn McIlmoyle, matelot de 3e classe, infirmière autorisée; du Pepper Pod, la lieutenante-colonelle honoraire Sandra Perron, présidente-directrice générale; de la Légion royale canadienne, Mme Carolyn Hugues, directrice, Services aux vétérans, siège national; et enfin, du Jardin de ressourcement des femmes combattantes, la Dre Elaine Waddington Lamont, directrice de la santé mentale.
Je vous remercie encore une fois. Vous pouvez rester, mais je vais prendre quelques minutes pour m'adresser aux membres du Comité.
Notre collègue M. Richards doit partir. Au début de la réunion, nous avions prévu réserver quelques minutes pour discuter du voyage que nous souhaitons faire. Nous pensons qu'il est important de rencontrer les vétéranes dans leur environnement afin d'en savoir davantage aux fins de cette étude.
Monsieur Richards, vous avez la parole.