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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 018 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 17 mai 2022

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

     La séance est ouverte. Bienvenue à la 18e séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes.
    Conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 31 mars, le Comité se réunit pour étudier le projet de loi C-5, Loi modifiant le Code criminel et la Loi réglementant certaines drogues et autres substances.
     La réunion d'aujourd'hui se déroule de façon hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 25 novembre 2021. Les membres sont présents en présentiel dans la salle ou participent à distance à l'aide de l'application Zoom. Les délibérations seront affichées au site Web de la Chambre des communes.
     J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos deux témoins d'aujourd'hui. Nous accueillons Me Matthew Taylor, avocat général et directeur, Section de la politique en matière de droit pénal, et Me Andrew Di Manno, avocat, Section de la politique en matière de droit pénal. Ils sont tous deux ici pour répondre aux questions des membres du Comité pendant cette étude article par article.
    Je vais commencer par l'étude article par article du projet de loi C-5. Je vais donner aux membres du Comité quelques instructions et quelques commentaires sur la façon dont nous allons procéder.
    Comme son nom l'indique, il s'agit d'un examen de tous les articles dans l'ordre où ils apparaissent dans le projet de loi. Je vais mettre chaque article aux voix l'un après l'autre, et chaque article fera l'objet d'un débat et d'un vote. S'il y a un amendement à l'article en question, je donnerai la parole au député qui le propose afin qu'il l'explique. L'amendement pourra ensuite faire l'objet d'un débat. Lorsqu'aucun député ne voudra intervenir, l'amendement sera mis aux voix. Les amendements seront examinés dans l'ordre où ils figurent dans le projet de loi ou dans la liasse que chaque député a reçue du greffier. Je tiens à souligner que les députés doivent soumettre les amendements par écrit au greffier du Comité.
     Je vais procéder lentement pour permettre à tous les députés de suivre les délibérations comme il se doit.
     Les amendements portent un numéro alphanumérique dans le coin supérieur droit pour indiquer le parti qui les a soumis. Il n'est pas nécessaire qu'un comotionnaire appuie les amendements. Une fois la motion proposée, il faudra un consentement unanime pour la retirer.
     Pendant le débat sur un amendement, les députés peuvent proposer des sous-amendements. Ces sous-amendements doivent être soumis par écrit. Ils ne nécessitent pas l'approbation de l'auteur de l'amendement. Nous n'étudierons qu'un sous-amendement à la fois, et ce sous-amendement ne pourra pas être amendé. Lorsqu'on propose un sous-amendement à un amendement, il est mis aux voix en premier. Ensuite, un autre sous-amendement peut être proposé ou le Comité peut considérer l'amendement principal et le mettre aux voix.
     Une fois que chaque article aura été mis aux voix, le Comité se prononcera sur le titre et sur le projet de loi même. Un ordre de réimpression du projet de loi pourrait être nécessaire si des amendements sont adoptés afin que la Chambre en ait une copie en bonne et due forme pour l'étape du rapport.
    Enfin, le Comité devra ordonner au président de faire rapport du projet de loi à la Chambre. Ce rapport contient seulement le texte des amendements adoptés ainsi qu'une indication des articles supprimés.
    Avez-vous des questions? Sommes-nous prêts à commencer?
    Excellent. Alors je commence.
    (Article 1)
     Le président: Allez-y, monsieur Moore.
    Certains de ces articles sont semblables, mais je me demande si le Ministère peut nous donner une brève description de l'effet qu'aurait l'adoption de l'article 1 par le Comité.
     Le paragraphe 84(5) du Code criminel stipule qu'une déclaration de culpabilité pour certaines infractions antérieures dans le but d'entraîner l'imposition de peines minimales obligatoires plus sévères pour une deuxième infraction et pour les infractions subséquentes... Cela s'applique à des infractions prévues à l'article 85, Usage d’une arme à feu lors de la perpétration d’une infraction, à l'article 95, Possession d'une arme à feu prohibée ou à autorisation restreinte avec des munitions, à l'article 99, Trafic d'armes, à l'article 100, Possession en vue de faire le trafic d'armes et à l'article 103, Importation ou exportation non autorisées — infraction délibérée.
    L'article 1 supprimerait les renvois aux paragraphes 85(3) et 95(2) du paragraphe 84(5), car ces paragraphes n'auraient plus de peines minimales obligatoires progressives. L'article 1 est un amendement corrélatif aux articles 2 et 4 du projet de loi.
     J'ajouterai simplement pour votre gouverne, monsieur le président, que comme il s'agit d'un amendement corrélatif à d'autres articles du projet de loi, la décision concernant ces autres articles aurait également une incidence sur cet article. Par exemple, si vous décidez d'adopter certains des articles qui proposent d'abroger les peines minimales obligatoires, vous devrez alors apporter cet amendement corrélatif. Si vous choisissez de conserver ces peines minimales obligatoires, vous devrez déterminer si cet amendement est également nécessaire.
    Allez-y, monsieur Moore.
    Monsieur le président, j'aimerais approfondir un peu la question parce que, franchement, dans le contexte des réunions que le Comité a tenues... Nous n'en avons pas tenu une tonne. Je crois que nous avons tenu sept séances pendant lesquelles nous avons entendu des témoins, et la séance d'aujourd'hui est notre huitième. À titre de précision, lorsque nous parlons des peines minimales obligatoires dans ces articles, il s'agit d'une personne qui a déjà été reconnue coupable de la même infraction, de sorte qu'elle a été condamnée deux fois, par exemple, pour trafic d'armes ou possession en vue de faire le trafic d'armes.
    En fait, une bonne partie de la discussion du Comité et des témoignages entendus semblaient viser des personnes impliquées involontairement dans un incident néfaste ou d'une personne un peu saoule qui aurait tiré dans une grange. Pour les articles 85, 95, 99, 100 et 103, s'agit-il d'une personne qui a commis cette infraction une deuxième fois? Y a-t-il une peine minimale pour la première infraction? Est-ce que l'une de ces...? Le libellé indique « en état de récidive ».
     Je crois que je connais un peu cela. Sous un gouvernement précédent, lorsqu'il y avait une peine minimale obligatoire, ou PMO, de quatre ans pour certains crimes commis avec une arme à feu et à cause de la récidive, essentiellement une même personne commettant fréquemment les mêmes types de crimes, nous avons apporté une modification à la loi. Dans le cas d'une récidive, nous avons fixé la peine minimale à cinq ans, puis à sept ans pour les infractions subséquentes. Je crois que nous en étions restés là. Avant cela, je crois que c'était quatre, sept et dix ans, ou quelque chose du genre, mais en fin de compte, je crois que nous avions fixé la peine à quatre, cinq et sept ans.
    Je tenais à préciser cela pour le Comité, parce que je ne pense pas que les témoins ne l'aient mentionné. Cet article parle-t-il seulement d'une personne qui a déjà été condamnée pour une infraction visée dans le même article du Code criminel?
(1540)
    Cette disposition indique aux juges quelle PMO plus élevée ils pourraient imposer pour une deuxième condamnation ou une condamnation subséquente. Les infractions énumérées aux alinéas 84(5)a), b) et c) constituent la première infraction à partir de laquelle ils peuvent déterminer quelle PMO plus sévère conviendra.
    À l'heure actuelle, l'article 85 porte sur l'usage d'une arme à feu lors de la perpétration d'une infraction, et l'article 95 porte sur la possession d'une arme à feu prohibée ou à autorisation restreinte. Les articles 99, 100 et 103 visent le trafic et la contrebande. Si une personne est reconnue coupable d'une de ces infractions, le juge examinera cette disposition. Si la personne a déjà été condamnée, le juge aura une liste plus longue, soit les articles 85, 95, 96 et 98. Si la personne a déjà été condamnée pour ces infractions, la PMO sera plus élevée en vertu de cette disposition.
     Je devrais poser ces questions par votre entremise, monsieur le président, mais j'ai besoin de quelques précisions.
    La liste des infractions subséquentes est plus longue que celle des infractions qui entraînent l'imposition d'une PMO. Y a-t-il une PMO rattachée à chacune de ces premières infractions? Je pense qu'il y en a pour quelques-unes d'entre elles, mais y a-t-il une PMO pour la première infraction de trafic d'armes et de possession en vue de faire le trafic d'armes?
    L'article 85 prévoit une PMO.
    Pouvez-vous nous l'expliquer, si vous l'avez devant vous?
    Bien sûr. L'article 85 prévoit des peines minimales obligatoires. L'article 95...
    ... La peine minimale obligatoire prévue dans l'article 85 pour une première infraction est-elle une peine d'un an?
    C'est une peine d'un an, et la suivante est de trois ans.
    L'article 95 prévoyait des peines minimales obligatoires, mais elles ont été jugées inconstitutionnelles...
    ... Elles ont été invalidées.
    ... par la Cour suprême dans l'arrêt Nur. L'article 99 prévoit des peines minimales obligatoires de trois et cinq ans, je crois, pour la première et la deuxième infraction et pour les infractions subséquentes commises avec des armes à feu, et une PMO d'un an pour d'autres infractions comme les armes prohibées ou à autorisation restreinte.
    L'article 100 prévoit les mêmes peines, mais pour la possession en vue d'en faire le trafic d'armes. La structure de détermination de la peine est donc la même que celle de l'article 99, soit trois et cinq ans pour les armes à feu et un an pour les armes prohibées ou à autorisation restreinte.
    L'article 103 vise la contrebande d'armes à feu qui entraîne aussi des PMO de trois et cinq ans ainsi que d'un an pour les infractions autres que l'usage d'armes à feu.
    Ce projet de loi porte sur un grand nombre d'infractions. Il y a différentes infractions, différentes répercussions et, à mon avis, différents niveaux de sévérité. De toute évidence, ce sont toutes des infractions au Code criminel, mais il ne fait aucun doute que notre comité estime que certaines d'entre elles sont plus graves que d'autres. Les cinq articles dont vous avez parlé — 85, 95, 99, 100 et 103 — visent-ils la possession d'une arme à feu prohibée ou à autorisation restreinte avec des munitions? Je me souviens de cette affaire... Est-ce la seule des cinq qui ait été contestée et dont la peine minimale obligatoire a été jugée inconstitutionnelle?
    Dans la même veine, pourriez-vous nous expliquer pourquoi il est pertinent de discuter de cette cause? Bien que la peine minimale obligatoire dans ce cas précis ait été annulée, elle demeure un élément déclencheur de l'escalade des PMO subséquentes. Est-ce la raison pour laquelle cette discussion est pertinente, puisque le tribunal, dans cette cause, l'a invalidée? Bien que nous sachions... Dans son document d'information, le gouvernement a laissé entendre, je crois, que les peines minimales obligatoires ont été invalidées dans 48 % des cas, ce qui signifie que dans 52 % des cas elles ont été maintenues. Nous reconnaissons qu'il y a des cas où elles ont été invalidées et d'autres où elles ont été examinées et maintenues.
    Pourriez-vous nous expliquer l'effet de l'annulation de cette infraction et nous dire pourquoi elle est encore importante dans le contexte de cet article?
(1545)
    Dans l'arrêt Nur, la Cour suprême a invalidé les deux PMO prévues à l'article 95, de sorte que maintenant, cet article n'en prévoit aucune.
    Pour revenir à une question posée plus tôt, il existe une jurisprudence constitutionnelle sur les autres infractions énumérées, et les résultats varient. Dans certains cas, des dispositions ont été maintenues par les tribunaux. Dans d'autres cas, elles ont été jugées inconstitutionnelles. Quant à l'article 85, les peines minimales obligatoires ont été maintenues dans certaines décisions d'appel. Je dois cependant vous signaler que ces décisions ont été rendues avant l'arrêt Nur de la Cour suprême et avant la décision subséquente dans l'affaire Lloyd, qui a modifié l'interprétation de l'article 12 et de la jurisprudence constitutionnelle.
    Quant à l'article 99 sur le trafic d'armes, il a été déclaré inconstitutionnel dans certains cas, comme l'article 100 par la Cour d'appel du Québec en 2019 et l'article 103 par la Cour d'appel du Québec en 2019. Aucune de ces causes n'a été portée devant la Cour suprême du Canada, mais il y a de la jurisprudence, comme nous l'avons fait remarquer.
     Merci d'avoir répondu à toutes ces questions de façon si approfondie.
    Monsieur le président, à ce sujet, et je vais demander au Comité... Nous tous, membres du Comité avons la possibilité de voter sur cet article. Je regarde ces infractions, et l'on parle de récidive. Tout le monde convient que nous devrions tout faire de notre mieux, au niveau fédéral, avec nos homologues provinciaux et municipaux. Tout le monde convient que nous devrions faire tout notre possible pour aider les gens à réintégrer la collectivité.
     Nous devons reconnaître qu'à un moment donné, les gens retourneront dans la collectivité. Nous devrions faire de notre mieux pour les réintégrer, mais lorsque je regarde les infractions de cette liste, elles se retrouvent dans les manchettes de l'actualité de notre pays. Les chefs de police... Des témoins qui ont comparu devant le Comité ont parlé de ce qui se passe dans leurs territoires de compétence. Certains sont responsables de grandes municipalités, d'autres des endroits les plus ruraux imaginables, et d'autres encore de services de police urbains, suburbains ou de Premières Nations.
     Nous avons entendu divers témoins du milieu policier. Ils nous ont assuré que les types d'armes à feu qu'ils voient, tant en milieu urbain que rural, ne sont pas ceux de Trucmuche Chasseur de Canards, d'agriculteurs ou de tireurs sportifs. Ce sont des armes offensives et des armes à feu importées en grande partie des États-Unis. Je considère le trafic d'armes comme l'une de ces infractions. Il s'agit en grande partie d'armes prohibées ou d'armes à autorisation restreinte. Les gens qui les utilisent n'ont pas de permis.
    Ces infractions — et je parle des infractions prévues dans cet article —, indiquent que nous avons affaire à des gens qui n'ont jamais essayé de se conformer aux lois canadiennes. Nous avons tous dans nos circonscriptions des gens qui s'y conforment. Ce sont des propriétaires d'armes à feu respectueux de la loi. D'abord, ils ont un permis. Ce sont des propriétaires autorisés. Ensuite, ils ont suivi la filière établie. Ils n'ont pas acheté une arme de poing derrière le coffre de la voiture du vendeur. Ils se sont rendus chez un concessionnaire et ont acheté une arme à feu légalement.
    D'après les témoignages que nous avons entendus à maintes reprises au Comité, ce ne sont pas eux qui causent le problème. Même pendant que notre comité entendait ces témoins, les manchettes dénonçaient les gens qui utilisaient des drones pour transporter des sacs d'armes de poing des États-Unis au Canada, probablement pour les remettre à des organisations criminelles qui les distribuent à leurs vendeurs. À un moment donné, ces armes servent à commettre un crime contre un Canadien innocent.
    Nous pouvons débattre du rôle des peines d'emprisonnement obligatoires, et nous l'avons fait. Nous avons fait le tour de la question et nous avons entendu beaucoup de témoins différents ainsi que des membres du Comité. Cependant, je veux que nous examinions très attentivement cet article, parce qu'à mon avis, il traite de situations pour lesquelles les Canadiens réclament des mesures concrètes. On le voit au Nouveau-Brunswick, en Ontario et au Québec. Nous le constatons dans toutes les provinces. Les gens nous supplient de les aider. La criminalité cause autant de problèmes dans les régions rurales qu'en milieu urbain.
    Imaginez donc, même Mitch Marner, des Maple Leafs, a été victime d'un vol à main armée. Je ne connais pas tous les détails, mais d'après ce que j'ai lu au sujet de ses assaillants, je peux vous garantir qu'ils ne portaient pas une veste fluorescente orange et qu'ils ne sont pas repartis dans la camionnette d'un chasseur de canard. Ils faisaient partie d'une organisation criminelle.
     Je vous garantis également que ce n'était probablement pas leur première infraction. Ces gens savaient exactement ce qu'ils faisaient, et ils ont volé l'auto de Mitch Marner comme ils l'avaient probablement déjà fait à bien d'autres victimes et, oui, ils finiront bien par tuer quelqu'un un de ces jours.
    Voilà la récidive dont nous parlons. C'est un mépris total pour les autres Canadiens, pour les innocents. Voilà pourquoi nous avons des lois.
(1550)
     Partons de la prémisse selon laquelle nous avons un Code criminel dans lequel nous, parlementaires, avons constaté des failles. Nous ne voulons pas que ces failles nuisent à la société. Il y a une raison pour laquelle certaines infractions sont traitées par procédure sommaire. Elles sont considérées comme étant moins graves. Au Canada, certaines infractions entraînent une sanction pécuniaire, une amende. Un excès de vitesse au Nouveau-Brunswick peut entraîner une amende de 168 $.
    Mais les Canadiens veulent que nous abordions les infractions comme la possession en vue de faire le trafic d'armes, l'importation et l'exportation non autorisée faite de façon délibérée, l'usage d'une arme à feu pour commettre un crime.
    Je vais m'arrêter ici, monsieur le président. Je désire simplement que nous examinions sérieusement ces infractions avant de voter.
    Je vous remercie encore une fois, monsieur Taylor, pour vos réponses très détaillées à toutes ces questions.
    Merci, monsieur Moore.
    Comme il n'y a pas d'autres interventions, je suppose que nous allons voter par appel nominal.
    Oui. Je demande un vote par appel nominal.
    (L'article 1 est adopté par 7 voix contre 5.)
    (Article 2)
(1555)
    Pour l'article 2, nous avons l'amendement CPC-1. Y a-t-il des commentaires ou pouvons-nous passer au vote?
    Oui, je vais parler rapidement de l'amendement CPC-1, monsieur le président.
    Bien sûr, monsieur Moore.
    Reconnaissant ce qui semble être la volonté du Comité, je ne veux pas être présomptueux, mais d'après le dernier vote, nous risquons d'invalider les peines minimales obligatoires actuellement en vigueur. À mon avis, cela mettrait nos collectivités en danger, surtout face à un élément récidiviste, à des contrevenants qui commettent continuellement les mêmes crimes, les mêmes types de crimes.
    Afin de faire un compromis, notre amendement CPC-1 réduirait la peine minimale obligatoire d'un an à six mois. Pour la quasi-totalité des peines minimales dont il est question dans le projet de loi C-5 et dans le C-22 qui l'a précédé, je pense que le minimum le plus bas est d'un an. Je ne crois pas qu'il y en ait de moins d'un an. Dans certains cas, ces peines s'étendaient sur plus d'un an, mais dans la majorité des cas, elles duraient un an.
    Nous aborderions ainsi les peines minimales obligatoires, ce qui semble certainement être le désir du Comité, tout en répondant à la demande actuelle du public d'imposer de sérieuses sanctions pour les crimes graves. Cet amendement tendrait une branche d'olivier en disant que si un an est trop long, une peine de six mois exclurait les contrevenants de la société pendant le temps requis pour, nous l'espérons, leur trouver une partie de l'aide dont ils ont besoin. Cela redonnerait aussi une certaine confiance en notre système judiciaire en démontrant que les membres du Parlement ont décidé que les infractions graves liées aux armes à feu et les autres infractions contenues dans le projet de loi C-5 entraîneront une période d'incarcération.
    Cet amendement ferait passer la peine minimale obligatoire d'un an à six mois pour l'utilisation d'une arme à feu lors de la perpétration d'une infraction.
     Merci, monsieur Moore.
    Monsieur Garrison.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je dois dire, monsieur Moore, que votre logique donne l'impression que les conservateurs sont tolérants face à la criminalité. Vous avez toujours soutenu que les peines minimales obligatoires réduisent la criminalité.
    Les témoins nous ont dit à maintes reprises — et toute la littérature évaluée par les pairs en criminologie le confirme — que les peines minimales obligatoires ne font qu'augmenter les peines d'emprisonnement. Elles n'ont pas d'effet dissuasif. En augmentant les peines d'emprisonnement, on ne rend pas les gens moins susceptibles de commettre des infractions. En fait, les études montrent qu'elles rendent les détenus plus susceptibles de récidiver.
    Je pense que vous avez raison de dire que toutes les personnes présentes autour de la table désirent assurer la sécurité de la collectivité et réduire la criminalité dans notre société. Nous ne nous entendons cependant pas sur le fait que les peines minimales obligatoires [Difficultés techniques].
    Dans le cas qui nous occupe, je vais évidemment voter contre votre amendement, parce qu'il rétablirait une peine minimale obligatoire que le projet de loi C-5 [Difficultés techniques].
    Merci, monsieur Garrison.
    J'ai Mme Brière, puis M. Morrison et M. Brock.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    J'abonde dans le sens de M. Garrison. Ce n'est pas parce qu'on enlève les peines minimales obligatoires que les gestes reprochés seront moins pris au sérieux et que les peines seront moins importantes. En fait, on donne une plus grande discrétion judiciaire aux juges.
    Nous allons donc voter contre l'amendement.
(1600)

[Traduction]

    Merci, madame Brière.
    Nous passons maintenant à M. Brock.
    En fait, c'est le tour de M. Morrison.
    Je ne voyais pas qui venait en premier.
    Monsieur Morrison, à vous la parole.
    Merci, monsieur le président.
    En ce qui concerne les témoins que nous avons entendus, je crois qu'ils se subdivisaient en deux groupes. Nous avions ceux qui défendaient les contrevenants. Il est important que nous nous penchions sur ces enjeux. J'ai récemment prononcé un discours à ce sujet, car je pense que c'est très important. Cependant, quand les victimes sont venues témoigner, le tableau s'est précisé. Les victimes étaient très en colère contre ce projet de loi.
    Je regarde cela du point de vue des victimes. Oublions pendant quelques instants les contrevenants, parce qu'à mon avis, nous devrions nous occuper d'abord des victimes, puis des contrevenants. Une peine de six mois est raisonnable, et elle montre quand même aux Canadiens qui réclament la sécurité publique que leur gouvernement s'efforce toujours d'assurer la sécurité dans les rues et de soutenir les victimes.
    Ces infractions sont très graves. Je crois que dans bien des cas, nos juges imposent des peines de plus de six mois. Ce projet de loi leur donne le pouvoir discrétionnaire d'imposer de plus longues peines lorsque les infractions le justifient, mais il leur donne aussi le pouvoir discrétionnaire de n'imposer que six mois.
    D'après ce que nous ont dit les témoins, surtout les victimes, j'ai l'impression que nous négligerions complètement le point de vue des Canadiens en éliminant complètement les peines minimales obligatoires pour ces infractions violentes.
    Merci, monsieur Morrison.
    Monsieur Brock.
     Je vais commencer par souligner les raisonnements que le gouvernement a répétés à maintes reprises lorsque ce projet de loi a été présenté aux étapes de la première lecture et de la deuxième lecture, ce que les membres du gouvernement ont dit en interrogeant les témoins de ce comité et, en particulier, ce qu'a dit le procureur général, le plus haut conseiller juridique du pays. Ils ont dit que l'objectif du projet de loi C‑5 était de régler une fois pour toutes le problème de la surreprésentation des délinquants autochtones et d'autres personnes marginalisées dans nos prisons.
     Mon collègue et patron, M. Naqvi, dans ses fonctions antérieures de procureur général de l'Ontario, nous rappelait de temps à autre de tenir compte de cette surreprésentation et de trouver, dans notre rôle de procureurs de l'Ontario — je ne peux parler que de l'Ontario — des outils supplémentaires qui nous permettent d'exercer adéquatement notre pouvoir discrétionnaire. Les procureurs de la Couronne détiennent un énorme pouvoir lorsqu'ils reçoivent une cause. Avec le dossier, ils reçoivent un mémoire de la Couronne qui indique le nom de l'accusé et son infraction et qui donne parfois un résumé des faits saillants. Cependant, les procureurs qui ne connaissent pas, comme moi, un nom de famille similaire à celui d'un délinquant autochtone de la collectivité ou s'ils n'ont pas assez d'années d'expérience pour connaître les récidivistes, ils ne savent pas si cet accusé fait partie de la catégorie de personnes que ce projet de loi vise à aider.
    Nous prenons position. Nous effectuons une présélection en fonction de la valeur de l'infraction, mais dans le cadre du processus de poursuite pour une infraction comme celle que prévoit l'article 85... pour les membres du Comité qui ne sont pas avocats, les infractions à l'article 85 sont le plus souvent commises dans le cadre d'un vol à main armée. Ce sont des infractions extrêmement violentes qui menacent la sécurité de la collectivité. Elles sont très souvent commises par des délinquants toxicomanes qui cherchent à se procurer rapidement de l'argent pour nourrir leur dépendance. Ils ciblent très souvent les dépanneurs et les membres vulnérables de la collectivité. Nous adoptons une approche très sévère en exigeant une peine exemplaire. Cependant, ce processus s'étend souvent sur plusieurs années. Les contrevenants engagent un avocat de la défense, qui porte à mon attention ou à celle d'autres procureurs de la Couronne certains des facteurs dont nous devrions tenir compte lorsque nous exerçons notre pouvoir discrétionnaire.
    Par ce long discours compliqué et redondant, je voulais souligner une chose dont personne n'a parlé à la Chambre et que j'ai essayé de soulever sans succès à maintes reprises. Ce projet de loi ne tient absolument pas compte du pouvoir discrétionnaire que les procureurs de la Couronne de l'Ontario — et, je l'espère, de partout au pays — exercent pour s'attaquer au problème de la surreprésentation. Dans le cas d'une infraction comme celle prévue au paragraphe 85(3), dont j'ai souligné la gravité — je réponds ici à ce que disait M. Garrison —, avec tout le respect que je dois à M. Garrison, je ne suis pas du tout d'accord avec lui, parce que nous devons envoyer un message aux délinquants qui commettent le même genre d'infraction. Les dispositions du Code criminel sur la détermination de la peine énoncent les principes dont un juge doit tenir compte.
(1605)
    En examinant les incidences du fait d'être un Canadien de couleur qui vit dans un centre urbain et la possibilité d'inciter le juge à en tenir compte, nous n'examinons pas uniquement les antécédents autochtones du contrevenant ou la décision de la Cour d'appel dans l'affaire Morris.
    Le fait est qu'il y a beaucoup de jurisprudence, et je suis sûr que mes collègues du ministère de la Justice conviendront que les principes prédominants de détermination de la peine pour ce type d'infraction sont la réprobation, la dissuasion générale et spécifique et, surtout, l'exclusion de la société. Ces contrevenants n'obtiendront pas d'ordonnance de sursis. Qu'ils soient Autochtones ou Noirs, ils se retrouveront en prison. À mon avis, cela établit des normes adéquates qui annoncent que les délinquants qui s'engagent dans ce type d'activité ne vont pas « passer Go », pour reprendre la métaphore du Monopoly, ils se retrouveront obligatoirement en prison. Cependant, grâce à leur pouvoir discrétionnaire, les procureurs de la Couronne peuvent adapter la sentence pour atténuer le problème de la surreprésentation dans les prisons.
    La dernière chose que je veux souligner — et mes collègues du ministère de la Justice pourront le confirmer — est le fait que cette infraction en particulier a été confirmée par la Cour d'appel de l'Ontario dans l'affaire Meszaros après l'arrêt Nur et par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans l'affaire Al-Isawi, en 2017. Dans ces deux cas, les avocats ont soutenu que cet article et les peines minimales obligatoires ne contrevenaient pas à l'article 12 de la Charte.
    Merci, monsieur le président.
    Merci.
    C'est au tour de M. Cooper.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'appuie cet amendement. Je dois dire que si je devais choisir entre maintenir le statu quo et, comme les libéraux et les néo-démocrates le veulent, éliminer les peines d'emprisonnement obligatoires pour certaines infractions plutôt graves, notamment le crime très grave consistant à utiliser une arme à feu pour commettre une infraction, je préférerais le statu quo.
     J'espère que nous voterons pour cela, mais compte tenu des mémoires présentés par certaines personnes qui ont comparu devant le Comité ainsi que par les libéraux et les néo-démocrates et compte tenu de certains commentaires formulés par mes collègues au cours du nombre plutôt limité de réunions que nous avons eues, je ne suis pas convaincu que nous y parviendrons.
    Au lieu de cela, il semble que les libéraux et les néo-démocrates, aveuglés par leur idéologie, veulent procéder à toute vapeur en éliminant tout simplement ces peines d'emprisonnement obligatoires. Ils le feront malgré les témoignages très convaincants de témoins qui ont été victimes d'infractions commises avec des armes à feu et malgré les témoignages de représentants des forces de l'ordre.
    Les membres du Comité ont entendu tellement de témoignages leur demandant d'attendre un peu avant de suspendre les peines d'emprisonnement obligatoires pour les infractions mettant en jeu des armes à feu qu'il serait utile de leur rappeler certains d'entre eux. Nous en avons entendu beaucoup. Franchement, je ne sais pas par où commencer.
     Par exemple, André Gélinas est un détective à la retraite de la division du renseignement du Service de police de la Ville de Montréal. Il a dit de façon générale au sujet du projet de loi C-5: « il n'y aura aucune dissuasion ». Il a ajouté: « le message que cela envoie aux policiers qui affrontent ces criminels » — les criminels dont il parle sont ceux qui commettent des infractions avec des armes à feu — « ne fera que nourrir le découragement et le désengagement de ces policiers ».
    M. Gélinas a également dit:
Cela n'augure rien de bon pour notre sécurité collective. Comme société, nous sommes devant une abdication et un recul qui ne sont certainement pas une solution à la surreprésentation des communautés [supposément] ciblées par ce projet de loi.
    Il a dit: « les gens qui vivent dans des quartiers où les gangs et les groupes organisés sont très actifs se sentent totalement abandonnés par le projet de loi C-5 ». Il a également déclaré:
Imaginez-vous un peu comment vous vous sentiriez si vous étiez victime d'une agression commise avec une arme à feu. [...] je ne pense pas que vous vous sentiriez plus en sécurité dans votre communauté de savoir que cette personne ne sera pas assujettie à un minimum de sanctions.
    Ce sont les observations de M. Gélinas, qui a une très vaste expérience sur le terrain de l'application de la loi. Il a affaire à des criminels qui commettent des crimes graves avec des armes à feu, qui compromettent la sécurité publique, qui terrorisent les collectivités et qui laissent des victimes dans leur sillage. Il a commencé par nous recommander de ne pas faire ce que nous envisagions de faire, ce que les libéraux et les néo-démocrates veulent faire. Je suis d'accord avec lui.
    Mme Anie Samson est une élue municipale. Elle représente un quartier montréalais où vivent des gens aux origines ethniques et culturelles diverses qui a été durement touché par des crimes commis avec des armes à feu illégales. Elle a dit devant notre comité que « ces armes ont détruit des familles, des amitiés et des vies ». Elle a aussi dit: « le message qui est envoyé actuellement, c'est que, en raison de l'abolition de certaines peines minimales obligatoires, le criminel peut commettre un crime et se voir infliger une peine réduite, alors que la victime, elle, sera peut-être traumatisée pour le reste de ses jours ».
(1610)
     Stéphane Wall, un autre policier à la retraite, toujours de la ville de Montréal, a dit — encore une fois, de façon générale, au sujet du projet de loi C-5 et des infractions liées aux armes à feu — que le projet de loi C-5 « banaliserait » la possession d'armes à feu pour la perpétration d'activités criminelles. Cela enverrait un message erroné à ces criminels. Elle a ajouté qu'elle ne pensait pas que cela coïnciderait avec la réalité quotidienne actuelle dans les rues.
    Les membres des gangs de rue se sentent déjà parfaitement à l'abri avant l'adoption de ce projet de loi, qui les appuiera s'ils commettent certains crimes. Ils se rient déjà du système de justice. Ils s'en moquent.
    Il y a aussi le sergent Michael Rowe, qui a comparu devant le Comité au nom de l'Association canadienne des chefs de police. J'ai entendu le ministre de la Sécurité publique plus tôt aujourd'hui, ou peut-être hier, citer l'Association canadienne des chefs de police en réponse à une question posée pendant la période des questions. Le sergent Rowe a dit:
Pour les policiers, pour les victimes d'actes criminels, pour les membres du public et pour les délinquants eux-mêmes, les circonstances qui entraînent une accusation criminelle pour la plupart des infractions commises à l'aide d'une arme à feu constituent souvent une menace réelle pour la sécurité publique. Elles causent un stress et des traumatismes qui ont une incidence durable sur la santé mentale et elles érodent la sécurité publique.
    Il a ainsi soulevé de graves préoccupations sur la réduction des peines d'emprisonnement obligatoires prévue dans le projet de loi C-5.
    Comme M. Brock l'a fait remarquer, les contrevenants accusés en vertu de cet article ne s'en tireront pas avec une ordonnance de sursis. Dans la plupart des cas, ils passeront du temps derrière les barreaux.
    Compte tenu des témoignages que notre comité a entendus au sujet de la prévalence des armes à feu illégales et du fait que les crimes sont commis par des gens qui sont souvent impliqués dans des gangs et dans le crime organisé... Compte tenu du fait que ces témoins nous ont dit que, dans l'état actuel des choses, il faut prévoir la réprobation et tenir compte de l'impact que causent ces types d'infractions sur les victimes et sur le sentiment collectif de sécurité dans les collectivités, notamment celles qui font face à un vaste éventail de problèmes sociaux... ce n'est pas ma solution préférée, mais nous devrions donner au moins une certaine garantie que quiconque commet un crime en utilisant une arme à feu devrait au moins faire face à une peine d'emprisonnement obligatoire. Nous devrions au moins préserver cela, et c'est ce que fait cet amendement.
(1615)
     Sur cette base, vu l'orientation probable du Comité, je pense que... Je n'aime pas utiliser le mot « compromis », mais essentiellement, nous devrions exiger au moins un certain niveau de responsabilisation.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Cooper.
    Allez-y, monsieur Moore.
    Merci, monsieur le président.
     Très rapidement, dans le contexte du débat sur le projet de loi C-5 et sur le projet de loi C-22 qui l'a précédé, nous ne devrions pas agir avec partisanerie, nous devrions démontrer que le Parlement envoie un message clair aux Canadiens, aux victimes, aux criminels et... oui, aux juges qui déterminent les peines, que cette idée n'est pas une notion exclusivement conservatrice.
    Avant de prendre ce que je considère comme une mesure draconienne et d'éliminer une peine d'emprisonnement obligatoire pour certaines des infractions prévues à l'article 85 commises à l'aide d'une arme à feu, je tiens à souligner que la peine minimale a été instaurée en 1976. Depuis 1976, certaines de ces mesures ont été appliquées. Cela ne veut pas dire que nous ne pourrons jamais apporter de changements — je comprends cela —, mais certains de ces articles ont survécu des gouvernements libéraux, conservateurs, et autres. Tous ces gouvernements ont jugé sage de maintenir ces dispositions en vigueur. Pendant tout ce temps, ces dispositions, même contestées, ont été appliquées dans de nombreuses causes.
    Je pense qu'il est important de mettre cela en contexte, parce que si vous écoutez le débat, vous penserez que ces peines minimales obligatoires — je les mets toutes dans le même panier ici — ont été imposées par le gouvernement conservateur qui a précédé celui-ci. Cependant, j'ai soigneusement examiné toutes les peines minimales obligatoires que nous éliminerions, et presque toutes datent d'avant le gouvernement conservateur qui a précédé celui-ci.
    En fait, le gouvernement actuel a choisi de maintenir en vigueur, de ne pas éliminer les peines minimales obligatoires instaurées en vertu de la Loi sur la sécurité des rues et des communautés ou d'une loi antérieure.
    Avant d'apporter un changement comme celui-ci, soulignons que certaines de ces mesures existent depuis près de 50 ans. Elles ne sont pas récentes. Nous devrions vraiment y penser très sérieusement lorsque nous délibérerons sur chacun de ces articles et sur la suppression de ce qui pourrait constituer la seule barrière entre une personne qui a commis une infraction grave et son retour immédiat dans la société.
    Merci, monsieur le président.
(1620)
    Merci, monsieur Moore.
    L'amendement numéro un des conservateurs est-il adopté?
    Une voix: Je demande un vote par appel nominal.
    (L'amendement est rejeté par 7 voix contre 4. [Voir le Procès-verbal])
    (L'article 2 est adopté par 7 voix contre 4.)
    (Article 3)
     Pour l'article 3, nous avons l'amendement CPC-2.
(1625)
     Je vais l'expliquer très rapidement.
    Pour cet article du code, notre amendement vise à remplacer la peine minimale obligatoire d'un an par une peine minimale obligatoire de six mois.
    M. Cooper m'a rappelé une chose que, selon moi, il est important de souligner. Je ne voudrais d'aucune façon que l'on pense que la peine minimale obligatoire devrait être réduite dans ces cas graves d'infractions commises avec des armes à feu. Nous cherchons ici à élaborer une déclaration du Parlement dénonçant les infractions très graves dont nous parlons ici.
    Dans le cas d'une première infraction, voici ce que le paragraphe 92(3) prévoit:
Quiconque commet l’infraction prévue au paragraphe (1) ou (2) est coupable d’un acte criminel passible des peines suivantes:
a) pour une première infraction, un emprisonnement maximal de dix ans;
b) pour la deuxième infraction, un emprisonnement maximal de dix ans, la peine minimale étant de un an;
c) pour chaque récidive subséquente, un emprisonnement maximal de dix ans, la peine minimale étant de deux ans moins un jour.
    Je pense qu'il s'agit de certaines des infractions graves commises avec une arme à feu qui font les manchettes à l'heure actuelle. Pour que ce soit bien clair, nous parlons de la perpétration d'une infraction avec une arme à feu, et dans la plupart des cas, ce sont les infractions les plus graves. Elles ne sont pas toutes identiques. Le projet de loi C-5 ne se contente pas d'éliminer une série de peines minimales obligatoires. Nous devons mettre chacune d'elles en contexte.
    Deux articles ont été adoptés. J'espère que, dans le cas de certains des articles, nous en examinerons les répercussions, nous y réfléchirons et nous déciderons, dans certains cas, de conserver des dispositions qui figurent dans le Code criminel depuis un demi-siècle.
    Je vais poser une question à nos témoins pour qu'ils nous expliquent le processus de cet article, car je veux attirer l'attention du Comité sur le fait que la peine minimale prévue dans cet article ne s'applique qu'en cas de récidive. La peine minimale accrue, soit une peine d'emprisonnement de deux ans moins un jour, n'est déclenchée que par une troisième infraction.
    Nous avons entendu le témoignage de policiers, de membres de la collectivité et de groupes de victimes qui nous ont dit que les délinquants qui n'ont commis qu'une seule infraction ne les inquiètent pas vraiment. Ils n'ont pas vraiment peur d'une personne qui, en toute innocence, s'est laissée entraîner par un groupe de gens peu recommandables pour commettre une infraction. Nous parlons ici de contrevenants profondément impliqués dans des crimes graves qui, par définition, causent des torts à leurs concitoyens.
    Il est déjà assez grave d'être accusé et reconnu coupable d'une infraction, mais même là, ce n'est qu'à la deuxième infraction... Vous avez commis un crime en vertu de cet article, et vous vous en êtes sorti. Vous avez de nouveau commis le même crime, vous avez victimisé un autre Canadien, alors maintenant, vous allez purger un an de prison. C'est un an d'emprisonnement non pas après la première infraction, mais après la deuxième.
(1630)
    Maintenant, imaginez le même individu. Il a été reconnu coupable à deux reprises d'une infraction grave liée aux armes à feu qui a fait des victimes parmi nos concitoyens, que ce soit à la ville ou en zone rurale. Il a été remis en liberté, après avoir eu la possibilité de se réadapter et de changer de cap. Voici qu'il en est à une troisième infraction, dont il a été reconnu coupable aux termes du Code criminel, bénéficiant de la pleine protection de la Charte des droits et d'une défense pleine et entière en vertu de la Charte. Il a été reconnu coupable une troisième fois, et tout ce que le Parlement trouve à dire, c'est qu'une infraction grave liée aux armes à feu qui a transformé des Canadiens en victimes est passible d'une peine minimum de deux ans. Et le projet de loi C-5 fait encore mieux en retirant cette peine du Code criminel.
    Pourquoi parler de cela, monsieur le président? Parce qu'il est vraiment important que les membres du Comité y réfléchissent. Nous n'avons pas tous à nous intéresser à ces dispositions au quotidien. Nous sommes tous très pris. Nous avons des électeurs. Certains nous appellent parce que le passeport dont ils ont demandé le renouvellement en février n'est toujours pas arrivé. Nous sommes tous occupés et nous avons divers défis à relever, mais c'est maintenant le moment, à cette table, de nous intéresser à l'impact vraiment profond que le Code criminel peut avoir sur la vie des Canadiens.
    Des victimes sont venues témoigner. Il est arrivé, et c'est ennuyeux, que des témoins fassent leur exposé sans dire le moindre mot des victimes. Dans à peu près tous les cas, une victime est en cause. Lorsque nous écoutons les victimes, bien sûr... Je ne nierai pas que les avocats de la défense au pénal soutiennent qu'il faut éliminer les peines minimales obligatoires qui ennuient tellement leurs clients. Ces avocats n'en veulent pas. Mais que disent les victimes? Qu'on leur fait carrément injure en réduisant la peine obligatoire que leur agresseur doit recevoir.
    La question que, par l'entremise de la présidence, j'adresse aux témoins porte sur la distinction entre le paragraphe 92(3) et d'autres dispositions. Les peines minimales dont il est question ne s'appliquent pas aux délinquants qui en sont à une première infraction, mais aux récidivistes qui, dans certains cas, en sont à leur troisième infraction.
    Je dirai aussi... Je lance l'idée aux membres du Comité. J'ai évoqué l'incident dont nous venons d'entendre parler et qui est arrivé à une vedette de la LNH, Mitch Marner, victime de braquage de voiture. Savez-vous quoi? Il n'est pas plus important que n'importe quel autre Canadien. Si nous en parlons, c'est parce que tout le monde le connaît. Il est célèbre. Qu'advient-il de ceux qui ne sont pas Mitch Marner et qui se sont fait voler leur voiture sur le même terrain de stationnement la semaine précédente? Ils comptent aussi. Ce sont aussi des Canadiens.
    Ce que je veux dire, et c'est sans doute parfaitement vrai... Si un individu est reconnu coupable une première fois, il a commis une infraction. La police l'a appréhendé, il a subi son procès, il a été jugé coupable et il a reçu sa peine. Et cela arrive une deuxième fois, puis une troisième. Si je demandais à tous les membres du Comité s'ils pensent vraiment que ces incidents sont les trois seules infractions graves au Code criminel dont il s'est rendu coupable, je pense que personne ne le croirait.
    Ce sont les infractions pour lesquelles l'individu s'est fait prendre. C'est une chose de se faire prendre. C'est une autre paire de manches que d'être reconnu coupable dans notre système. Les récidivistes ont été pris et condamnés non pas une, ni deux, mais trois fois. Ce sont eux qui sont visés par les minimums proposés.
    Par votre entremise, monsieur le président, je demande au témoin de nous expliquer un peu cet article et son application. Quels sont les éléments déclencheurs à chaque étape et leurs conséquences?
(1635)
M. Gary Anandasangaree M. Gary Anandasangaree (Scarborough—Rouge Park, Lib.):
    Monsieur le président, je voudrais rapidement tirer une chose au clair.
     Je m'y perds un peu. Pourrions-nous séparer les questions des participations au débat. S'il y a une question, peut-être pourrions-nous la poser en premier, puis en débattre, ou vice versa. Le fait de se lancer dans une discussion puis de poser une question sème la confusion. Franchement, ce n'est peut-être pas la meilleure façon de s'y prendre.
     Merci, monsieur Anandasangaree.
    Merci, monsieur Moore.
    Vous pouvez poser des questions comme bon vous semble. Cependant, je pense que lorsque vous faites des déclarations, puis posez une question et faite une autre déclaration, ce peut être déroutant pour les témoins si la déclaration est simplement...
    La prochaine fois, je vais poser une question, faire une déclaration, puis revenir à une question, puis faire une déclaration.
    Donnons la parole au témoin.
    Je serai très bref. M. Moore a décrit avec exactitude les répercussions sur la détermination de la peine. Pour une première infraction, aucune peine minimale obligatoire n'est prévue. Pour une deuxième, il y a une peine minimale obligatoire d'un an. Pour la troisième, elle est de deux ans moins un jour.
    Cette infraction vise, en bref, la possession illégale de certaines choses. Si quelqu'un possède une arme en sachant pertinemment qu'il n'a pas tous les papiers nécessaires pour être en règle, il s'agit d'une infraction qui est visée. La disposition cible également la possession d'armes prohibées ou à autorisation restreinte, par exemple. Tout cela est énuméré dans le règlement d'application du Code criminel. Il pourrait s'agir de couteaux à papillon ou d'étoiles ninja, par exemple. Voilà la raison d'être de l'article 92.
     Merci, monsieur le président.
    Ma question est terminée. Vous avez bien répondu et je vous en remercie. Je vais maintenant revenir à ce que je disais.
    Chaque jour, aux Communes, depuis quelques semaines, la question des crimes liés aux armes à feu revient. Peu importe le journal qu'on lit, la station de radio qu'on écoute ou les médias sociaux qu'on fréquente, il est question de crimes commis avec des armes à feu au Canada. Nous avons affaire à des individus qui sont illégalement en possession d'armes à feu, non pas par erreur, mais parce qu'ils se livrent à des activités criminelles.
    Je rappelle au Comité qu'il s'agit ici précisément du problème que les Canadiens nous demandent de régler: la présence d'armes à feu illégales au Canada et le fait qu'elles sont entre les mains d'éléments criminels. Ceux qui sont en cause, ce ne sont pas les chasseurs de canards, les tireurs sportifs ni le pauvre type qui a peut-être hérité d'une arme à feu de son grand-père. Ils ont fait tout le nécessaire pour obtenir un permis, entreposer les armes de façon sécuritaire et obtenir un permis s'ils doivent acheter des munitions, et ils sont assujettis à la loi dans toute sa rigueur. Le problème, ce sont ceux qui inondent nos rues d'armes à feu illégales.
    Les armes franchissent la frontière à bord de véhicules, mais il y aussi d'autres moyens de les faire entrer en contrebande. Je n'y avais pas pensé, mais les forces de l'ordre ont toujours un temps de retard sur les criminels. Nous savons qu'il est arrivé qu'on fasse passer des États-Unis au Canada un sac d'armes de poing au moyen d'un drone.
    C'est ainsi que certains de ceux qui seront condamnés en vertu de cet article auront pris possession de ces armes à feu illégales. Par définition, ils possèdent illégalement une arme à feu. Ces armes ne sont visées par aucun permis alors qu'elles sont assujetties à des restrictions au Canada.
    M. Anandasangaree, la question se discute, mais il fut un temps où on devait enregistrer les armes à feu qui n'étaient soumises à aucune restriction. Vous aviez ce qu'on appelait le registre des armes d'épaule. Il était censé coûter 2 millions de dollars. Il a fini par coûter 2 milliards, je crois. La question a son importance, car un gouvernement conservateur précédent a éliminé ce registre parce qu'il ciblait exactement ceux qu'il ne fallait pas cibler.
    Selon mes principes, qui doivent être partagés par les députés de ce côté-ci, quand on a un problème de criminalité, on s'en prend aux criminels. Lorsque j'ai vu des personnes âgées de ma circonscription faire la queue pour obtenir leur permis d'arme à feu, je me suis demandé en quoi cela rendait le Canada plus sûr. Si quelqu'un fait la queue pendant une heure pour obtenir un permis afin de pouvoir posséder une arme à feu — un fusil de chasse ou une carabine dont il a hérité —, comment diable cela rend-il le Canada plus sûr?
    C'était donc la loi sur le registre des armes à feu. Nous nous sommes engagés à éliminer ce registre. Nous l'avons fait, et les Canadiens ne s'en portent que mieux. Nous nous en portons tous mieux. Même si nous consacrons dans le monde entier des sommes folles à la lutte contre la pandémie et d'autres fins, les ressources sont limitées. Les ressources fédérales gâchées pour s'en prendre aux honnêtes citoyens ne sont plus là pour pourchasser les bandits. Nous avons entendu toutes sortes de témoignages à ce sujet de la part de policiers: ils manquent de ressources. Il arrive qu'ils n'aient pas les moyens nécessaires pour s'attaquer aux criminels.
    Je voudrais mettre en opposition ce que je viens de dire d'une loi qui s'en prenait aux honnêtes citoyens et la proposition à l'étude. Le paragraphe 92(3) du Code criminel vise les mauvais éléments, ceux qui n'ont pas bien compris la première fois et sont retombés dans le crime une deuxième puis une troisième fois.
    Étant donné cette vue d'ensemble, je préconise une grande prudence. Réfléchissez à ce que nous disons: nous, parlementaires, pensons qu'une personne peut être trouvée en possession illégale d'une arme de poing au Canada — une arme à autorisation restreinte, une arme sans permis —, et être reconnue coupable sans pour autant aller en prison. Un mois plus tard, la même chose se produit et ce même délinquant comparaît devant les tribunaux, il est reconnu coupable et évite encore la prison. Ensuite, un mois plus tard, théoriquement, exactement la même chose pourrait se produire.
(1640)
    Un certain message commence à se propager. Des témoins nous ont dit qu'il ne fallait pas envoyer ce message: si on commet un crime au Canada, on peut s'en tirer. Des crimes liés aux armes à feu sont tolérés. Or, les armes à feu illégales font partie du problème, et la disposition à l'étude porte là-dessus.
    Je vous exhorte à faire preuve d'une extrême prudence avant que nous ne votions sur l'article 3. Pensez au message que nous envoyons non seulement aux criminels — ils comprennent très clairement que, une fois le projet de loi adopté, ils pourront faire tout et n'importe quoi sans subir la moindre conséquence —, mais aussi aux victimes des crimes commis avec une arme à feu. Inutile de vous l'expliquer. On le lit dans tous les journaux. Il y a des victimes de crimes commis avec des armes à feu tous les jours au Canada.
    J'exhorte vivement les députés à rejeter l'article 3.
    Vous avez la parole, monsieur Brock. M. Morrison et de M. Cooper interviendront ensuite.
    Je ne saurais trop insister sur l'importance des observations de mon collègue, M. Moore, sur la nature de cette infraction. En fait, je ne suis pas tout à fait d'accord avec mon collègue sur un point... Il a dit — je ne sais pas si c'était au sujet de cet article ou des armes à feu en général — que la question des armes à feu comportait généralement une dimension qui concerne les victimes. Selon moi, cela relève plutôt de la réglementation, par opposition à un type d'infraction visant une victime.
    C'est le début de mon intervention, monsieur le président.
    J'ai une question. Je devrais peut-être la poser d'abord aux témoins du ministère de la Justice.
    En me préparant à la séance d'aujourd'hui, je n'ai pas eu l'occasion de vérifier si cette disposition est conforme à la Charte. L'un d'entre vous est-il au courant d'une jurisprudence au niveau des cours d'appel qui attesterait la conformité de cet article à la Charte?
(1645)
    Je n'ai que peu d'information. J'ai une décision d'un tribunal inférieur — elle est assez ancienne — déclarant la disposition inconstitutionnelle, mais je ne sais pas au juste si cela concerne la deuxième ou la troisième infraction. Il faudrait creuser davantage la question.
    S'agit-il d'une décision d'un tribunal inférieur dans une province donnée?
    C'est une décision d'un tribunal inférieur de l'Ontario.
     L'autre aspect — et je vais passer au débat —, c'est que, à moins d'être dans une situation impossible, les Canadiens savent que les armes sont étroitement réglementées. En réalité, c'est le Canada qui, de tous les pays, a les plus lourdes exigences en matière de permis: cours à suivre, dont les coûts sont élevés, réglementation sur l'achat des armes à feu, enregistrement des armes, transport des armes entre le lieu d'achat et le domicile de l'acheteur, entreposage, composition de l'armoire où les armes sont gardées, entreposage des armes et des munitions à des endroits différents. Tout cela est bien connu dans l'ensemble du Canada. S'il est important que le Comité entende ces propos, c'est qu'en tant que nouveau parlementaire, j'ai entendu dire, lorsque ce projet de loi a été présenté, qu'il ciblait les délinquants à faible risque qui en sont à leur première infraction. Ce n'est pas ce dont il est question à l'article 92.
    En fait, pas plus tard qu'aujourd'hui, pendant la période des questions, mon collègue, M. Anandasangaree, a dit qu'il ne fallait pas punir les délinquants primaires à faible risque. Un mécanisme de sécurité est déjà prévu dans le Code criminel. Un délinquant primaire, pour en revenir à ce que disait M. Anandasangaree, à ce que disent le procureur général, le ministre de la Sécurité publique, les autres ministres que j'ai entendus, les députés d'arrière-ban que j'ai entendus... Il y a un mécanisme de sécurité intégré, parce qu'un délinquant primaire qui se trouve mystérieusement en possession d'une arme, chargée ou non, sans être titulaire d'un permis, ce qui pourrait attirer l'attention de la police et donc entraîner une accusation, ne va pas en prison pour une première infraction.
    L'article parle d'un maximum de 10 ans. Dans le cas d'une première infraction passible d'une peine d'emprisonnement maximale de 10 ans, le libellé ne devrait jamais être synonyme — je le dis pour les membres du Comité qui ne sont pas juristes —— d'une peine d'emprisonnement applicable au point de départ. Il n'en est pas question, et dans ma version du Code criminel... J'utilise toujours celle de Tremeear parce que je la trouve extrêmement utile. Elle présente des annotations, la jurisprudence, une analyse sous l'angle de la Charte...
    Je préfère la version de Martin.
     Il y a une section dans mon code— et je ne pense pas que cela se trouve dans celle de Martin, alors vous voudrez peut-être y réfléchir, monsieur Anandasangaree — qui est un tableau des infractions. M. Naqvi peut comprendre. Chaque fois qu'on examine une infraction obscure... et je suis le premier à admettre qu'il y a beaucoup d'infractions liées aux armes à feu et qu'il y a des nuances. Il faut faire très attention au libellé et à la façon dont on étudie un dossier pour voir les options possibles.
    Dans le tableau des infractions qui nous intéresse ici, on dit que le délinquant qui en est à une premi.ère infraction à cet article, est admissible à une absolution conditionnelle ou inconditionnelle, ce qui constitue la peine la plus clémente dont disposent les juges dans tout le Canada. Si quelqu'un demande: « Avez-vous un casier judiciaire? », il est donc possible de répondre en toute légalité par la négative. Une seule exception: si un employeur ou toute autre personne demandait: « Avez-vous été reconnu coupable d'une infraction criminelle? », il faudrait répondre, dans le respect de loi, qu'on a reçu une absolution.
    La possibilité est là. Un peu plus haut dans l'échelle, pour celui qui en est à une première infraction, se trouve la condamnation avec sursis, communément appelée probation. Il faut alors se conformer scrupuleusement à toutes les règles et s'abstenir de toute activité criminelle et, au terme de la peine avec sursis, on estime que la peine est purgée. Il y a une amende, pour laquelle il n'y a ni minimum ni maximum. Il y a l'amende et la probation ou la peine avec sursis, dont il est question dans le projet de loi C-5.
    Encore une fois, pour revenir à mon propos et pour souligner le fait et appuyer mon collègue, M. Moore, l'article atteint déjà l'objectif du projet de loi C-5. Notamment, au sujet de l'insistance et du discours sur la réduction de la surincarcération, il existe déjà un mécanisme de sécurité intégré.
    Merci, monsieur le président.
(1650)
    Merci, monsieur Brock.
    Nous passons maintenant à M. Morrison.
    Merci, monsieur le président.
    Deux ou trois choses. Premièrement, je ne suis pas en désaccord avec M. Brock, mais je sais, d'après mon expérience dans les services de police, que certains ne savent pas ce qu'est une arme à feu prohibée et que d'autres, qui ont une arme de poing, ignorent que cette arme est prohibée. Lors d'une première infraction, ce n'est pas à exclure. Quant à l'article à l'étude, je peux comprendre qu'il n'y ait pas de peine minimale obligatoire pour une première infraction. Je le comprends tout à fait.
    S'il s'agit d'une deuxième ou même d'une troisième infraction, une infraction grave, je ne me vois pas me présenter dans une localité rurale et expliquer à des victimes et à des gens qui ont peur: « En passant, nous, parlementaires, nous venons de supprimer une disposition parce que nous ne pensons pas qu'il soit nécessaire d'imposer une peine minimale obligatoire à quelqu'un qui a été condamné trois fois pour possession d'une arme à feu prohibée. » Je ne peux pas imaginer que quiconque ici présent rentre dans sa circonscription et raconte: « Nous avons passé une excellente journée au Parlement aujourd'hui. Nous avons simplement décidé qu'il n'y aurait pas de peines minimales obligatoires pour une troisième infraction. »
    Je ne vois même pas pourquoi il faudrait en discuter. Nous devrions pouvoir voter sur cette question sans même y penser. Bien sûr, il devrait y avoir une peine minimale obligatoire pour la troisième infraction.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Morrison.
    Monsieur Cooper.
     Merci, monsieur le président.
    Comme M. Moore, M. Brock et M. Morrison l'ont souligné, le fait que les libéraux abrogent les peines d'emprisonnement obligatoires prévues par cet article du Code criminel pour les contrevenants qui n'en sont pas à leur première infraction, qui ont été condamnées deux fois ou plus pour une infraction grave commise avec une arme à feu, montre bien que le projet de loi C-5 n'est pas ce qu'on prétend.
    Les libéraux ont dit que le projet de loi visait les délinquants primaires, ceux qui commettent une erreur et ont peut-être été victimes des circonstances. Dans ces cas, la réadaptation et l'exclusion de la mise en détention seraient peut-être une meilleure solution, mais, monsieur le président, ce n'est pas ce dont il est question dans cet article-ci, qui prévoit des peines d'emprisonnement obligatoires pour une infraction grave commise par des personnes qui ont été reconnues coupables plus d'une fois. Ce n'est pas un cas isolé. Il ne s'agit pas d'une simple erreur. Il ne s'agit pas de quelqu'un qui s'est trouvé au mauvais endroit au mauvais moment. Les peines d'emprisonnement obligatoires sont prévues pour les récidivistes.
    Fait intéressant, à propos du projet de loi C-5 qui n'est pas ce qu'on dit, les libéraux disant une chose et en faisant une autre, nous sommes en présence d'un gouvernement qui aime beaucoup parler des armes à feu. Il est obsédé. Il y a de bonnes raisons de s'inquiéter du fait que des membres de gangs et du crime organisé se servent d'armes à feu dans les rues, ce qui sape la sûreté et la sécurité dans les collectivités.
    On serait porté à penser que quiconque se préoccupe de la sécurité publique voudra s'en prendre à ceux qui commettent des infractions graves liées à des armes à feu, qui commettent des crimes avec des armes à feu. Or, les libéraux font exactement le contraire. Leur approche consiste à s'en prendre aux propriétaires d'armes à feu respectueux des lois tout en laissant le champ libre à ceux qui commettent des crimes avec des armes à feu. Voilà ce qu'ils font avec ce retour en arrière que constitue l'abrogation de cet article du Code criminel qui prévoit des peines d'emprisonnement obligatoires. Les criminels auraient le champ libre.
    Les libéraux ne manquent pas de cohérence. Lors de la dernière législature, mon ancien collègue Bob Saroya a présenté le projet de loi C-238. Cette mesure aurait alourdi les peines d'emprisonnement obligatoires pour les criminels reconnus coupables de possession, en pleine connaissance de cause, d'armes à feu de contrebande. Il semble que la plupart des armes utilisées pour commettre des infractions sont des armes de contrebande, des armes illégales en provenance des États-Unis — dans une proportion d'environ 80 %. Le projet de loi C-238 de Bob Saroya aurait été plus sévère, mais les libéraux l'ont rejeté.
(1655)
     Il y a de nouveaux députés parmi nous, mais d'autres ne sont pas des néophytes. Bob Saroya a toujours défendu sans relâche les intérêts de ses électeurs. Il représentait un secteur de Toronto qui avait été aux prises avec de graves problèmes de criminalité liée aux armes à feu. Il a présenté un projet de loi sensé pour obliger les criminels à répondre de leurs actes — des criminels qui sont sciemment en possession d'armes à feu de contrebande — parce que la contrebande est vraiment la source du problème des crimes liés aux armes à feu.
    Qu'ont fait les libéraux? Fidèles à leur laxisme, ils ont voté contre. Maintenant, toujours conciliants face à la criminalité, ils veulent éliminer les peines d'emprisonnement obligatoires pour ceux qui sont en possession d'une arme à feu non autorisée, pour les criminels qui sont reconnus coupables non pas d'une première infraction, mais d'une deuxième ou d'une énième infraction.
    Voilà qui montre, monsieur le président, à quel point les priorités du gouvernement libéral sont tordues et à quel point ce qu'ils disent correspond mal à ce qu'ils font. Ils font de belles propositions, et beaucoup de Canadiens y adhèrent. Mais voyons ce qu'ils ont présenté comme projet de loi, voyons comment ils ont réagi au projet de loi du député conservateur de l'époque, Bob Saroya. Il y a tout un contraste avec ce qu'on aurait pu croire à la lumière de ce qu'ils présentent en public, de ce qu'ils disent en campagne, de leurs notes d'allocution.
    Monsieur le président, encore une fois, le projet de loi n'est pas ce que les libéraux prétendent. C'est un autre exemple qui montre à quel point les priorités des libéraux sont mal placées.
    Nous, conservateurs, croyons que le problème, ce ne sont pas les armes à feu, mais ceux qui commettent des crimes avec ces armes. Les forces de l'ordre l'ont souligné à maintes reprises au Comité. On a posé la question à plusieurs témoins et tous ont répondu que c'était bien là le problème, mais les libéraux veulent s'en prendre à ceux qui respectent la loi. Ils ne tiennent pas vraiment à sévir contre les récidivistes, contre ceux qui commettent des infractions et qui possèdent intentionnellement et sciemment des armes à feu de contrebande ou non autorisées.
    Monsieur le président, j'espère que les députés d'en face prendront le temps de réfléchir sérieusement à ce qui se passe. Je les invite à le faire, car je ne pense pas que nous allons pouvoir étudier tous les articles dans les 25 minutes qu'il nous reste aujourd'hui. J'encourage vraiment les députés d'en face à prendre le temps de lire les propos de certains des témoins qui ont comparu devant le Comité — des représentants des forces de l'ordre et des victimes — au sujet de l'incidence des infractions liées aux armes à feu. Ils pourraient alors se demander en quoi l'élimination des peines d'emprisonnement obligatoires pour les criminels qui commettent deux, trois ou quatre infractions est utile et logique.
(1700)
     J'aimerais bien que les libéraux m'expliquent la logique de cette disposition, qu'ils me disent en quoi elle est fidèle à la description qu'ils ont faite du projet de loi, qui est censé aider ceux qui ont été victimes des circonstances ou ont commis une erreur isolée. L'élimination des peines d'emprisonnement obligatoires prévues au paragraphe 92(3) ne cadre pas avec cette description. C'est même tout le contraire.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Cooper.
     M. Brock a maintenant la parole.
    Monsieur le président, je serai bref. J'ai demandé aux témoins du ministère de la Justice s'ils étaient au courant d'une jurisprudence des cours d'appel concernant la conformité de l'article à la Charte. Ils ont parlé d'une décision rendue par un tribunal inférieur de l'Ontario.
    Je propose que nous reportions la suite du débat et le vote sur cet article jusqu'à ce qu'on dépose les documents de cette affaire pour que nous puissions l'étudier, car l'un des problèmes, c'est que le témoin a dit qu'il ne savait pas si cet arrêt avait traité de la conformité à la Charte de cette disposition en ce qui concerne la deuxième infraction ou toute autre récidive. Il est important que le Comité ait cette information.
(1705)
    On me dit qu'il faut obtenir le consentement unanime pour reporter le débat à plus tard.
    Y a-t-il consentement unanime pour reporter le débat?
    Un député: Non.
    Une précision, monsieur le président. Avons-nous besoin du consentement unanime pour sauter un article? Devons-nous procéder de façon séquentielle? Nous ne pourrions pas passer à l'article 4 s'il n'y a pas de lien...?
    Monsieur Brock, on me dit que, pour sauter un article, l'appui de la majorité suffit. Il faudrait que le Comité vote pour sauter cette motion, passer à la suivante et revenir plus tard à l'étude de cet article et de cet amendement.
    Si vous le voulez, nous pouvons passer au vote.
    Monsieur le président, il ne faudrait pas beaucoup de temps pour obtenir cette information pour notre prochaine séance. Nous devrions sauter l'article 3, passer à l'article 4 et revenir à l'article 3 à la prochaine séance.
    Nous pouvons passer au vote.
    Je demanderais un vote par appel nominal.
    Je voudrais savoir au préalable sur quels textes les greffiers s'appuient au sujet de cet article.
    C'est au chapitre 16, « Le processus législatif ». Je crois que c'est à la page 767, sous la rubrique « Articles réservés »:
Le comité peut décider, par voie de motion, de reporter l’examen d’un article ou d’un groupe d’articles consécutifs. Le débat sur une motion qui propose de reporter l’examen d’un article doit se limiter à la seule question du report et non porter sur les dispositions du projet de loi ou de l’article visé. À moins que la motion de report en dispose autrement, un article dont l’examen aura été différé sera étudié après que tous les autres articles du projet de loi auront été examinés.
    Merci.
     Nous aurons un vote par appel nominal. Tous ceux qui sont en faveur du report de l'étude de l'article 3 et de son amendement?
    (La motion est rejetée par 7 voix contre 4.)
    Le président: Nous allons maintenant mettre aux voix le deuxième amendement des conservateurs.
    (L'amendement est rejeté par 7 voix contre 4. [Voir le Procès-verbal])
    (L'article 3 est adopté par 7 voix contre 4.)
    (L'article 4 est adopté par 11 voix contre 0.)
    (Article 5)
(1710)
    Le troisième amendement des conservateurs porte sur l'article 5.
    À vous la parole, monsieur Moore.
     L'article 5 interdit à quiconque de posséder une arme à feu, une arme prohibée ou à autorisation restreinte, un dispositif prohibé ou des munitions prohibées « qu'il sait avoir été obtenus par suite de la perpétration » d'une infraction. Voilà qui est très différent de certains autres articles que nous avons étudiés ou étudierons dans le cadre du projet de loi C-5. Il ne s'agit pas seulement de la possession d'une arme prohibée. Il s'agit de la possession d'une arme prohibée que la personne sait avoir été obtenue par la perpétration d'une infraction.
    C'est une distinction importante à faire. À l'heure actuelle, la peine minimale obligatoire est d'un an pour les délinquants reconnus coupables de cette infraction lorsqu'ils sont poursuivis par mise en accusation. La même peine minimale obligatoire ne s'applique pas si une personne n'est pas poursuivie par mise en accusation, mais par procédure sommaire.
    Il faut faire une distinction entre cet article et d'autres, en ce sens que le fait que la personne sait que l'arme « a été obtenue par la perpétration » d'une infraction a pour effet de fixer un seuil plus élevé que celui de la simple possession — employons cette expression galvaudée — d'une arme prohibée ou d'une arme à autorisation restreinte. Dans ce cas, la personne sait qu'elle a été obtenue par la perpétration d'une infraction.
    Vous vous demandez peut-être, puisque je suis en faveur d'une peine minimale obligatoire dans ce cas... Il semble tout à fait clair qu'il devrait y en avoir une. Notre amendement ferait passer la peine minimale obligatoire de « un an » à « six mois ». Si je fais cette proposition, c'est que, comme nous l'avons vu au cours de l'étude article par article, toutes les peines minimales obligatoires qui figuraient dans le Code criminel et qui portaient sur les infractions liées à des armes à feu dont il est question dans le projet de loi C-5 ont été éliminées. L'amendement des conservateurs maintiendrait une peine minimale de six mois pour la possession d'une arme à feu dont le délinquant sait qu'elle n'est pas autorisée. C'est une distinction vraiment importante.
    Voilà ce que j'avais à dire à M. Anandasangaree, par votre entremise, monsieur le président. Voilà mon observation, mais j'ai une question, et je marque la distinction entre les deux.
    Par votre entremise, monsieur le président, je m'adresse aux témoins. Sont-ils au courant de ce seuil supplémentaire, savent-ils comment la poursuite et la police s'y prennent pour atteindre ce seuil, car la question concerne aussi d'autres articles? En effet, il faut d'abord prouver que la personne était en possession de l'arme prohibée, aux termes de la loi et, deuxièmement, pour une condamnation en vertu de cet article, que la personne savait que l'arme avait été obtenue par la perpétration d'une infraction.
    L'un des témoins pourrait-il nous expliquer la démarche? Là encore, j'essaie de faire la distinction entre cet article et l'autre, le cas d'une personne qui n'a peut-être aucune idée que l'arme était en sa possession à la suite d'une infraction. Le seuil de la preuve est différent.
    Je leur demande simplement de nous en parler.
(1715)
    Je vous remercie de la question.
    M. Moore a raison en ce sens que l'article 96 comporte cet élément supplémentaire. Le ministère public doit établir que l'accusé sait que ce qu'il possède est illégal et a été obtenu au moyen d'un crime. La connaissance englobe l'aveuglement volontaire. On peut avoir recours à des preuves circonstancielles. Le ministère doit également établir certains faits pour démontrer que l'accusé savait que ce qu'il possédait était, par exemple, une arme prohibée ou une arme à autorisation restreinte.
    Une dernière question à poser par votre entremise, monsieur le président.
    Vous avez parlé de la notion juridique d'« aveuglement volontaire ». Chacun comprend le cas où le délinquant est tout à fait au courant du fait que l'arme a été obtenue par « la perpétration » d'une infraction. Vous pourriez établir que la personne le savait ou aurait dû le savoir.
    Pourriez-vous parler de l'aveuglement volontaire ou, si possible, évoquer un scénario où la personne aurait fait preuve d'aveuglement volontaire? Je pense à certaines situations, mais pourriez-vous nous parler du cas où la personne refuse de savoir que ce qu'il a en sa possession est le résultat de la perpétration d'une infraction?
     Pour établir l'aveuglement volontaire, il faut produire des éléments de preuve attestant que l'accusé a délibérément refusé d'approfondir ses vérifications. Quelqu'un a essayé de lui vendre quelque chose et l'accusé, malgré ses soupçons, a choisi délibérément de ne pas s'informer davantage pour évaluer la légalité de ce qui lui était proposé.
    Merci.
    Merci, monsieur Moore.
    Le troisième amendement des conservateurs est-il adopté?
    Non, nous avons encore...
    Je n'ai vu personne lever la main.
    Allez-y, monsieur Brock. Je suis désolé.
    Encore une fois, je m'adresse aux représentants du ministère de la Justice. A-t-on vérifié la conformité à la Charte?
    Les peines minimales obligatoires qui seraient supprimées par l'amendement ont déjà été jugées inconstitutionnelles, notamment dans l'affaire R. c. Robertson, dont le numéro de référence est 2020 BCCA 65.
(1720)
    Vous avez dit que c'était inconstitutionnel.
    Effectivement.
    Quel article?
    C'est l'article 96.
    Non, quel est l'article de la Charte qui est enfreint?
    Ce serait l'article 12.
    Y a-t-il eu un seul arrêt de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique?
    C'est l'information que nous avons pour l'instant. Il y en a peut-être d'autres, mais nous n'avons pas cette information.
    Quand la peine minimale obligatoire a-t-elle été instaurée?
    Celle-ci l'a été en 1995, dans le cadre de modifications apportées à la Loi sur les armes à feu.
    C'était en 1995, sous un gouvernement libéral. Y a-t-il eu des arrêts de cours d'appel, à l'exception de celle de la Colombie-Britannique, où la constitutionnalité de la disposition aurait été contestée, mais maintenue?
    L'information dont je dispose n'indique aucun autre arrêt d'une cour d'appel qui aurait confirmé sa constitutionnalité. J'ai d'autres arrêts de tribunaux inférieurs antérieurs à Nur et Lloyd où il y a eu confirmation en Ontario et en Colombie-Britannique en 2004, 2010 et 2016. J'ai aussi une affaire en Colombie-Britannique en 2018, qui aurait précédé l'arrêt dont mon collègue vous a parlé. Un tribunal inférieur de l'Ontario a également invalidé la peine minimale obligatoire en 2017.
    À propos des réponses que vous avez données à mon collègue, M. Moore, au sujet de l'aveuglement volontaire, il y a aussi la notion d'insouciance par rapport à l'origine de l'arme. Placez-vous cette notion dans le même continuum que l'aveuglement volontaire dans le contexte de l'élément mental dont la poursuite doit faire la preuve?
    Il s'agit d'un élément mental légèrement différent, mais il se rapproche de l'aveuglement volontaire. Comme la disposition ne parle pas d'insouciance, ce n'est pas un élément essentiel de l'infraction. Pour qu'il y ait insouciance, il faut que la personne comprenne le risque. Dans ce cas-ci, elle a la forte impression que ce qu'elle possède a été obtenu par un crime et elle s'en moque. C'est la différence entre l'insouciance et l'aveuglement volontaire. C'est une question de subjectivité.
    Seriez-vous en désaccord sur ce que je lis dans l'ouvrage 2021 Annotated Tremeear's Criminal Code? Voici le texte:
La connaissance est la caractéristique essentielle de l'élément mental [dans cette infraction]. [L'accusé] doit connaître les caractéristiques de l'arme qui en font une arme à feu ou un autre article réglementé ou ne pas s'en être soucié. [L'accusé] doit connaître les origines irrégulières du bien ou ne pas s'en être soucié, mais sans nécessairement être au courant de la dimension juridique de l'infraction en cause. Aucun autre élément mental n'est requis.
    À la lumière de vos connaissances en droit, êtes-vous d'accord sur l'expression employée et sur cette description?
    Si les tribunaux ont ajouté la notion d'insouciance à ces éléments distincts, alors oui. Néanmoins, de façon générale, en droit pénal, si des éléments essentiels sont expressément prévus — dans ce cas-ci, il s'agit de la connaissance et de l'aveuglement volontaire comme substitut à la connaissance —, les tribunaux optent habituellement pour une interprétation étroite des dispositions pénales parce que le droit pénal a des conséquences lourdes pour les citoyens. Cela dit, si vous avez des citations d'affaires où on a opté pour une interprétation large...
     C'est pourquoi je vous ai posé la question. Si j'avais des arrêts à citer, j'en parlerais au Comité. Dans cet ouvrage, il y en a parfois et parfois non.
     Ce sont là les questions, monsieur le président.
    Je passe maintenant au débat.
    Outre ce que j'ai dit au sujet de l'article 3, j'ajouterai que l'article 96 laisse une certaine latitude à la poursuite. Tout au long de mon intervention, j'insisterai sur cette latitude, car il est important de faire passer ce message, d'autant plus que le gouvernement dit constamment que le projet de loi vise à lutter contre la surincarcération des Autochtones et d'autres personnes marginalisées et à donner une chance aux délinquants primaires ou à faible risque.
     Les libéraux ne parlent jamais de récidive. Nous, conservateurs, le faisons, de même que les bloquistes, dans une certaine mesure. C'est la récidive qui préoccupe l'équipe conservatrice. Nous mettons l'accent sur la protection des collectivités d'un bout à l'autre du Canada. Il n'est pas étonnant que, lorsque j'affiche divers messages sur les médias sociaux — soit après avoir interrogé des témoins devant le Comité, soit après avoir dénoncé des faiblesses du projet de loi à l'étude —, je reçoive une foule de messages de partout au Canada, et de nombreuses régions des États-Unis. Mes correspondants me disent qu'il est grand temps qu'un politique conservateur ou canadien fasse passer les besoins de la collectivité avant ceux du délinquant. Je ne pensais pas qu'il serait si difficile, pour mes collègues d'en face et ceux qui siègent à côté des conservateurs, de comprendre que nous, législateurs, avons un double rôle: améliorer les lois pour aider les Canadiens, d'une part, et aider aussi, d'autre part, ceux qui ont des démêlés avec la justice, particulièrement les « délinquants primaires », pour reprendre les mots du gouvernement libéral.
     L'article à l'étude porte là-dessus. Il tient compte du scénario que le procureur général a évoqué lorsque le projet de loi a été présenté à l'étape de la première lecture. Je paraphrase au lieu de citer textuellement, mais le ministre a évoqué une situation où quelqu'un décide de boire quelques sodas un beau samedi soir. Je précise pour la gouverne de mes collègues qui ont peut-être les oreilles sensibles, qu'il ne s'agit pas de Pepsi, mais de boissons alcoolisées. Cette personne a une arme chargée et décide de tirer un peu au hasard sur une grange. Le ministre a demandé comment un parent se sentirait si c'était son enfant qui commettait l'erreur de trop boire et décidait, après avoir trouvé une arme à feu — sans qu'il soit le moindrement question que cette arme ait pu être acquise par la perpétration d'une infraction —, de faire feu sur une grange, sans savoir s'il n'y a pas à l'intérieur des agriculteurs, des aides agricoles ou encore des animaux.
    Le procureur général a utilisé cet exemple pour souligner l'importance du projet de loi, pour dire qu'il était important de faire la distinction entre un délinquant primaire et un criminel endurci et dangereux qui se trouve en possession d'une arme et tire au hasard, au mépris de tous les dangers. L'article 96 tient compte de cette situation.
(1725)
     L'article 96 prévoit une infraction mixte. Le ministère public peut prendre en considération toutes les circonstances de l'infraction et l'état de la personne en cause, qui a pu trop boire, se retrouver pour la première fois en possession d'une arme chargée et tirer n'importe comment. Et si cette personne était un Autochtone des Six Nations de la rivière Grand, dans ma circonscription, la plus grande Première Nation du Canada, une nation dont je suis très proche et que j'aime? Comme homme politique, je me bats tous les jours pour faire en sorte que les injustices dans cette réserve soient corrigées à l'échelon fédéral, et comme procureur de la Couronne, j'ai travaillé d'arrache-pied tous les jours pour prendre les mesures qui s'imposent afin de régler le problème de la surincarcération. L'article 96 me donne déjà les outils pour exercer mon pouvoir discrétionnaire, pour soustraire ce délinquant particulier à la sévérité de la peine minimale obligatoire, fort probablement parce qu'il s'agit de quelqu'un qui a droit au « tribunal Gladue » ou, comme nous disons, au tribunal autochtone.
     J'ai la possibilité de vérifier pourquoi il a trop bu, pourquoi il s'est trouvé en possession d'une arme à feu illégale et pourquoi il a jugé nécessaire de tirer comme il l'a fait. Je peux explorer tous les problèmes racistes et systémiques dans lesquels ce délinquant a grandi. Il est peut-être passé par les pensionnats. Peut-être que ses parents ou ses grands-parents sont allés dans ces pensionnats. Il souffre peut-être de la pauvreté, d'injustices en matière de logement. Peut-être qu'il n'a pas pu étudier assez longtemps. Ou peut-être a-t-il — ou a-t-elle, car je ne veux pas faire de distinction entre les hommes et les femmes — des problèmes de toxicomanie. Tous ces problèmes sont très présents dans les Six Nations de la rivière Grand.
(1730)
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Je suis désolé d'interrompre mon savant collègue, M. Brock, mais je vois que nous avons dépassé de plus de cinq minutes l'heure de la fin de la séance.
    J'ai perdu la notion du temps. Je suis désolé, monsieur le président.
    Si le Comité souhaite continuer... On dirait que le Comité est disposé à le faire. Nous pouvons poursuivre.

[Français]

    Monsieur le président, en ce qui me concerne, je dois assister à une autre réunion de comité à 18 h 30 et je voudrais bien me restaurer un peu entretemps.
    Si nous continuons pendant cinq minutes et que l'amendement est mis aux voix, je peux bien rester, mais, si c'est pour faire de l'obstruction systématique, je ne peux pas rester.

[Traduction]

    À vous, monsieur Anandasangaree.
    Nous serions d'accord pour poursuivre la séance, monsieur le président.
    Je ne peux pas accepter. M. Fortin et moi participons tous les deux à une séance de trois heures au Comité sur la déclaration de situation de crise. Elle commencera à 18 h 30. Je dois m'y préparer. Je ne peux donc pas accepter.
    On me dit que quelqu'un devra proposer de lever la séance. Nous pourrions ensuite passer au vote.
    Je vais proposer la motion.

[Français]

    Monsieur le président, ne faut-il pas le consentement unanime des membres du Comité pour prolonger la séance?

[Traduction]

    On me dit que non, monsieur Fortin.
    Allez-y, monsieur Cooper.
    Par respect pour M. Brock et M. Fortin, je vais proposer une motion pour lever la séance.
    Je suppose que vous voulez un vote par appel nominal.

[Français]

    Attendez un instant, monsieur le président. Pouvez-vous préciser sur quoi porte le vote, s'il vous plaît?

[Traduction]

    le vote porte sur la motion.
    (La motion est rejetée par 6 voix contre 5.)
    Le président: Nous allons continuer.
    Monsieur Cooper, je crois que vous étiez...
     Je n'ai pas terminé, monsieur le président.
     Vous pouvez poursuivre, monsieur Brock.
    Par souci du bien-être de tous les membres du Comité, pourrions-nous faire une pause de cinq à dix minutes, s'il vous plaît? Mes collègues libéraux ne me refuseront certainement pas cette possibilité.
(1735)
    Nous allons faire une pause de cinq minutes et nous reprendrons à 17 h 40.
    Merci.
(1735)

(1740)
     Nous reprenons nos travaux.
    Je crois que, lorsque la séance a été suspendue, M. Brock avait la parole. Ai-je raison?
    Je n'ai rien d'autre à ajouter, monsieur le président.
(1745)
    Monsieur Cooper, à vous.
    Je voulais poser une question aux fonctionnaires du ministère de la Justice.
    Ces témoins ont cité un arrêt de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique. Une précision: c'était après l'arrêt Nur? Pourriez-vous me rappeler l'affaire, ainsi que les autres, en Ontario et au Manitoba, que vous avez évoquées sans les nommer?
    Je vais devoir chercher le titre de ces affaires des tribunaux inférieurs. Je ne les ai pas sous la main. L'affaire Robertson de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique remonte à 2020.
    D'accord. Vous n'avez pas le titre des autres affaires?
    Je ne les ai pas sous la main.
    Si vous pouviez nous les fournir, ce serait utile.
    Le troisième amendement des conservateurs est-il adopté?
    Un député: Avec dissidence.

[Français]

    Monsieur le président, qu'est-ce qui vient d'être adopté avec dissidence? Je n'ai pas compris.

[Traduction]

    C'était l'amendement CPC-3.

[Français]

    Il n'a pas encore été adopté; nous votons maintenant.

[Traduction]

    Nous ne recevons pas l'interprétation.
    Pouvons-nous suspendre la séance pendant une minute ou deux?
(1745)

(1745)
    Reprenons les travaux.
    Je crois comprendre qu'il n'y avait pas de service d'interprétation. Nous allons tout simplement reprendre le vote, car M. Fortin n'a pas pu entendre la question.
    Le troisième amendement des conservateurs est-il adopté?
    Avec dissidence.

[Français]

    Non, je demande un vote par appel nominal.

[Traduction]

    Nous aurons un vote par appel nominal.
    (L'amendement est rejeté par 7 voix contre 4. [Voir le Procès-verbal])
    (L'article 5 est adopté par 7 voix contre 4.)
    (Article 6)
    Le président: Le premier amendement est le PV-1 du Parti vert.
    Il est réputé avoir été proposé, conformément à l'ordre de la Chambre adopté il y a quelque temps.
    Cela dit, je vais permettre à Mme May de dire quelques mots.
(1750)
     Merci, monsieur le président.
    Avec tout le respect et l'affection que je vous dois, je vais d'abord rectifier un point. Ce n'était pas un ordre de la Chambre. Il s'agit d'une motion de comité qui est en fait un subterfuge auquel le Parti vert s'oppose et auquel il s'est opposé dès la première fois qu'on y a eu recours pour nous priver des droits que nous devions normalement avoir à l'étape du rapport. À cause de cette motion, au libellé identique, qui a été adoptée par tous les comités chaque fois qu'il y a une élection, nous avons maintenant une mauvaise habitude — sans qu'on s'y soit pris correctement pour modifier les modalités de l'étude des projets de loi aux Communes — qui, j'en suis sûre, sera bientôt considérée comme une sorte de loi: les députés indépendants ou les députés de partis non reconnus sont tenus de présenter leurs amendements aux comités dans un délai très court, sans avoir le droit de les soumettre aux voix, d'en parler longuement ni même de les proposer. C'est pourquoi ces amendements sont réputés avoir été proposés, ce qui me met dans une situation délicate.
     Je peux voir ce qui se passe au Comité. J'appuie le projet de loi C-5, mais il ne va pas assez loin. Nous avons examiné les arrêts de la Cour suprême et de nombreux arrêts des cours d'appel partout au Canada. Nous savons un certain nombre de choses. Revenons à l'époque du projet de loi C-10, le projet de loi omnibus sur la criminalité que Stephen Harper a fait adopter par le Parlement. J'étais alors députée. Je me suis battue très fort contre cette mesure parce qu'absolument rien ne prouvait que les peines minimales obligatoires entraînaient une réduction des taux de criminalité. Il y avait même des preuves du contraire. L'État du Texas supprimait déjà ses peines minimales obligatoires, tandis que notre Parlement les imposait.
    Par conséquent, je suis en faveur de l'élimination des peines minimales obligatoires. Tous mes amendements, et quelques autres qui portent sur un aspect légèrement différent, visent à éliminer les peines minimales obligatoires. Ces peines sont coûteuses et inefficaces. Elles refilent les coûts de l'incarcération aux provinces. De nombreux arguments montrent qu'elles n'ont aucun sens. Bien sûr, on nous a rappelé à quelques reprises aujourd'hui le problème de la surincarcération des personnes de couleur et des Autochtones. Les taux sont connus. Je ne reviendrai donc pas sur ces faits.
    Je dirai simplement que mon premier amendement... Je peux en parler, mais je veux aussi soulever un point plus important, monsieur le président. Compte tenu de la pénible obstruction systématique à laquelle nous assistons depuis deux heures et demie, je voudrais qu'on retire tous mes amendements jugés irrecevables...
    J'invoque le Règlement.
    Ma collègue parle de « pénible obstruction systématique ». Je ne suis vraiment pas d'accord. C'est même tout à fait insultant. Nous avons l'obligation de commenter les amendements. C'est le point de vue d'un novice, mais si je voulais faire de l'obstruction systématique, j'ouvrirais mon Code criminel à la page 1 et je commencerais à en lire les 1 400 pages. Voilà ce qu'est l'obstruction systématique. Je n'ai entendu aucun rappel au Règlement de la part d'un membre du Comité au sujet du manque de pertinence des propos tenus. À mon avis, mes arguments et ceux de mes collègues se rapportaient tous aux points que nous faisions valoir.
    Je tenais à le signaler, car ce que la députée a dit est plutôt insultant.
    Merci, monsieur Brock.
    Madame May, vous pouvez continuer.
     Mes plus sincères excuses, monsieur Brock.
    Vous avez tout à fait raison. Cela ne correspond pas à la définition de l'obstruction systématique, mais il s'agit nettement d'un effort visant à ralentir l'examen du projet de loi. J'avais pensé que mon premier amendement, puisqu'il porte sur l'article 6, serait examiné assez tôt au cours d'une séance de deux heures. Et je ne suis pas sans expérience parlementaire.
    Vous avez tout à fait raison, monsieur Brock. Ce n'est pas de l'obstruction systématique, mais comme j'ai présenté la plupart des amendements au Comité ce soir, cela me place dans une sorte de dilemme, parce que je n'ai pas le droit de les retirer. Ils sont réputés avoir été présentés par le Comité. C'est à cause d'une motion de comité que vous avez adoptée vous-mêmes, malheureusement, et que tous les comités ont adoptée, dans tout le système parlementaire canadien. Elle m'oblige à présenter chacune de mes motions à moins que nous ne puissions trouver une solution.
    Je voulais commencer par dire qu'un certain nombre de mes amendements seront jugés irrecevables, nous le savons, et je voudrais demander au Comité... Il me semble inutile de parler de motions irrecevables. Je n'ai donc pas l'intention de le faire. Je tiens à ce que ce soit clair. Nous pouvons sauter tous les amendements irrecevables.
    Le premier amendement dont nous sommes saisis est certainement recevable. Il s'agit du choix que nous devrions faire. Comme la juge en chef McLachlin l'a dit dans l'affaire Nur, il serait préférable que le Parlement élimine toutes les peines minimales obligatoires et revoie l'utilisation de ces peines. Elle n'est pas allée jusqu'à dire qu'il fallait s'en débarrasser, mais elle a dit qu'il fallait les revoir efficacement... Le projet de loi C-5 supprime certaines de ces peines, mais pas leur totalité, ni même toutes celles que les tribunaux ont invalidées.
    Il serait certainement préférable de trouver un moyen... Comme l'a fait remarquer la cour, il est préférable que le Parlement se penche sur cette question plutôt que d'attendre passivement que les tribunaux se prononcent sur chacune de ces peines. Je vis citer la conclusion de la Cour suprême parce qu'elle porte sur l'essentiel de la question. Dans l'arrêt Nur, la Cour suprême du Canada a conclu, après avoir revu au moins 50 ans de recherche sur les peines minimales obligatoires: « La preuve empirique indique que, dans les faits, les peines minimales obligatoires ne sont pas dissuasives... »
    Que nous apprend Statistique Canada? Entre 2003 — année où tous les taux de criminalité au Canada ont atteint leur sommet — et 2020, la criminalité a reculé de 30 % et le taux des crimes violents, de 23 %. À entendre les échanges qui ont eu lieu aujourd'hui au Comité, n'importe qui croirait qu'une terrible vague de criminalité a déferlé.
     Tout crime est inacceptable, tout crime violent est inacceptable, et je voudrais que nous en fassions plus pour les victimes. Nous n'avons pas les lois qu'il faudrait. Nous n'avons pas un bon système en place. Nous n'avons pas de bonnes mesures de soutien pour les victimes d'actes criminels alors que nous le devrions. Mais les peines minimales obligatoires ne font que priver les juges de la latitude dont ils pourraient profiter dans chaque cas, quitte à ce qu'ils infligent des peines encore plus sévères, si c'est ce que vous voulez.
     Si nous voulons un système de justice pénale qui soit abordable, qui soit juste et efficace et qui réduise les taux de criminalité, ce n'est pas la solution. Voilà pourquoi mon premier amendement demande de supprimer les dispositions qui imposent des peines minimales obligatoires dans les cas où nous avons... Essentiellement, il s'agit des dispositions sur le trafic d'armes à feu. Le projet de loi C-5 ne porte que sur le paragraphe 99(3), et mon amendement ajouterait les paragraphes 99(2) et 99(3) afin d'améliorer plus efficacement le système de justice pénale en supprimant davantage de peines minimales obligatoires.
    Voilà l'intervention la plus longue que je vais faire. Je sais qu'en vertu des règles que vous avez adoptées, nous devons nous contenter de brèves observations, mais je voulais adopter une approche globale cette fois-ci, parce que nous appuyons le projet de loi C-5. Nous pensons simplement qu'il ne va pas assez loin.
(1755)
    Merci, madame May.
    Avant de vous donner la parole, monsieur Moore, je vais suspendre la séance pendant une ou deux minutes. Il y a des changements de quart dans les équipes des services dans les salles. Nous allons suspendre la séance pendant une ou deux minutes.
    Merci.
(1800)
     Nous reprenons nos travaux. M. Moore a la parole.
    Nous discutons du premier amendement du Parti vert. Il est présenté par Mme May.
    Merci, monsieur le président et madame May.
     Il est paradoxal de se scandaliser du rythme auquel nous avançons. Les conservateurs ont présenté 15 amendements au projet de loi, le Bloc, six, les libéraux, trois et le NPD, trois. C'est un nombre raisonnable d'amendements pour un projet de loi auquel nous avons tous beaucoup travaillé ces derniers mois. Le Parti vert en a présenté 45. Il est étrange que des gens qui ont présenté 45 amendements se permettent des réflexions sur la vitesse à laquelle nous avançons.
    J'aimerais entendre parler de certains de ces amendements du Parti vert. Je trouve absolument choquant de lire, noir sur blanc, que même... Les libéraux et les néo-démocrates ont clairement dit: « Vous savez quoi? Nous n'aimons pas les peines minimales obligatoires, quelles que soient les infractions. » J'aimerais bien qu'on m'explique pourquoi l'exploitation sexuelle, l'inceste, la bestialité, la production de pornographie juvénile, le fait pour un parent ou un tuteur d'amener un jeune à se livrer à des activités sexuelles, la mise à la disposition d'un enfant de matériel sexuellement explicite, le leurre d'enfant... Ce sont autant d'infractions absolument dégoûtantes pour lesquelles le Parti vert dit que nous ne devrions pas avoir de peine minimale obligatoire. Il est scandaleux de proposer tous ces amendements et de vider ainsi le Code criminel de sa substance.
    J'ignore combien de membres du Comité ont pris le temps de lire tous les amendements du Parti vert. Je ne blâme pas ceux qui ne l'ont pas fait. Il y en a 44 autres. Ils portent sur la traite d'une personne de moins de 18 ans, l'obtention de services sexuels moyennant rétribution d'une personne de moins de 18 ans, le fait d'amener une personne de moins de 18 ans à donner des services sexuels. Y a-t-il un thème commun? Dans presque tous les cas, des enfants canadiens sont victimisés de la façon la plus horrible qui soit. Le Parti vert veut supprimer les peines minimales obligatoires.
    Franchement, je trouve ces amendements dégoûtants. Vraiment. Les Canadiens seraient consternés. J'ai été consterné de les voir sur papier. J'ai eu la nausée quand j'ai vu le genre d'infractions pour lesquelles le Parti vert nous dit: « Non. Si le juge veut décider que l'accusé s'en tire indemne, il peut le faire. » C'est épouvantable.
     Voilà ce que j'ai à dire de l'ensemble des amendements du Parti vert.
    Dans ce cas précis, vous savez quoi? Ce n'est pas sans raison qu'il y a une peine minimale obligatoire pour le trafic d'armes avec une arme à feu. Il y a un trafic d'armes qui pourrait impliquer d'autres armes illégales, comme des couteaux à cran d'arrêt ou d'autres couteaux. Il s'agit de trafic avec une arme à feu. C'est le genre de crime qui est en cause et que nous nous efforçons de réprimer. Il est irresponsable de demander au Comité de vider le Code criminel de toute sa substance.
    Voilà ce que j'avais à dire à ce sujet.
    J'invoque le Règlement.
    Je suis désolée, monsieur le président, mais je refuse qu'on m'accuse de « vider le Code criminel de sa substance ».
    Si des enfants sont en cause, je n'hésiterai pas.
    Ces infractions demeureront dans le Code criminel. Nous nous opposons à l'utilisation de mesures inefficaces, coûteuses et contre-productives appelées peines minimales obligatoires. Toutes les infractions que mon collègue trouve épouvantables me rendent malade aussi. Ce sont des infractions dégoûtantes, et toute personne reconnue coupable devrait être soumise à toutes les rigueurs de la loi.
    Ce n'est pas ce que dit votre amendement.
    Je préfère laisser à un juge ou à la magistrature le soin d'examiner les circonstances dans chaque cas plutôt que d'appliquer des principes généraux qui se sont révélés inefficaces.
    Je n'accepte pas qu'on me fasse dire de quelque façon que ce soit qu'il faut « vider le Code criminel de sa substance ». Ces infractions resteront dans le Code criminel. Espérons que les coupables seront poursuivis en justice et que la peine sera proportionnelle au crime. Quand on applique un principe général et qu'on se contente d'invoquer une « peine minimale obligatoire », la peine n'est pas proportionnelle au crime. On réduit le pouvoir discrétionnaire du procureur et sa capacité à obtenir la peine qui convient. On se retrouve alors avec des gens qui vont en prison alors qu'ils ne sont pas coupables, parce qu'ils ont tellement peur d'une peine minimale obligatoire qu'ils vont plaider coupables même s'ils n'ont pas commis le crime.
    Je suis désolée, monsieur le président, mais je tiens également à ce qu'il soit noté au compte rendu que, en raison d'engagements antérieurs et du fait que je ne m'étais pas rendu compte que le Comité allait être en retard, je vais me faire remplacer par mon collègue député de Kitchener-Centre Mike Morrice. Je me retire donc maintenant, mais je voulais que le Comité reconnaisse, avant mon départ, que le député de Kitchener-Centre peut effectivement me remplacer ici.
(1805)
     Cela ne devrait pas poser de problème.
     Excusez-moi également, mais je vais devoir suspendre la séance. Il y a une certaine confusion au sujet du greffier. Je suspends la séance pour 30 minutes en raison du changement de personnel.
(1805)

(1835)
     La séance est ouverte. Reprenons nos travaux.
    Avant la pause, nous en étions à l'amendement du Parti vert proposé par Elizabeth May à l'article 6. Nous avions terminé nos débats. Il n'y avait pas d'autres intervenants sur la liste.
    Je rappelle que, si l'amendement PV-1 est adopté, l'amendement 4 des conservateurs, qui est le suivant, ne pourra pas être proposé, puisqu'il modifie la même ligne. C'est la même chose pour les autres amendements lorsque plusieurs portent sur le même article.
    S'il n'y a pas de questions, je vais mettre l'amendement PV-1 aux voix.
    (L'amendement est rejeté par 10 voix contre 1. [Voir le Procès-verbal])
    Monsieur Moore, voulez-vous dire quelque chose au sujet de l'amendement CPC-4?
    Je crois que tout le monde connaît notre perspective à ce sujet. Je rappelle, puisque nous venons d'avoir une pause, que je ne veux absolument pas qu'on puisse croire qu'une peine minimale obligatoire d'un an me semble suffisante dans ce cas. Cependant, dans un esprit de compromis — au dernier vote, nous avons presque obtenu l'unanimité —, j'espère que nous conserverons une peine minimale obligatoire de six mois pour l'infraction de trafic d'armes.
    (L'amendement est rejeté par 7 voix contre 4. [Voir le Procès-verbal])
    Le président:L'article 6 est-il adopté?
    Nous aurons un vote par appel nominal.
(1840)

[Français]

    Monsieur le président, je me suis trompé: j'ai voté contre, mais je voulais voter en faveur. Je m'en excuse.

[Traduction]

     Je pense que oui.
    (L'article 6 est adopté par 7 voix contre 4.)
    (Article 7)
    Le président: Au sujet de l'article 7, nous avons l'amendement 2 du Parti vert. Je rappelle que, si l'amendement du Parti vert est adopté, l'amendement 5 des conservateurs ne pourra pas être proposé, puisqu'il modifie la même ligne.
    L'amendement 2 du Parti vert est-il adopté?
    Allez-y, monsieur Moore.
    Aucun membre du Parti vert n'en a parlé.
    Le projet de loi C-5 modifie un certain nombre de dispositions relatives aux armes à feu, puis des dispositions relatives aux armes en général. On utilise parfois de manière interchangeable « arme » et « arme à feu », mais, dans certains cas, la possession d'une arme n'inclut pas une arme à feu. Dans ce cas-ci, je crois que la peine minimale obligatoire proposée par le Parti vert suppose que le retrait élargirait le champ pour inclure les armes à feu lorsqu'il s'agit de trafic d'armes. Le projet de loi C-5 dont nous sommes actuellement saisis comprend un certain nombre de mesures très importantes qui suppriment les peines minimales obligatoires concernant les armes à feu, mais peut-être que nos témoins pourraient nous parler de la distinction entre le trafic d'armes et le trafic d'armes à feu, car cela me semble important pour cet amendement des Verts.
    Je vous remercie de la question.
    Très brièvement, les peines minimales obligatoires de trois et cinq ans prévues à l'article 100 — possession en vue de faire le trafic d'armes — s'appliquent aux armes à feu, aux dispositifs prohibés et aux munitions prohibées, tandis que la PMO d'un an s'applique aux armes prohibées et à autorisation restreinte. Sauf erreur de ma part, l'amendement du Parti vert abrogerait toutes ces PMO dans tous les cas, non seulement pour les armes en général, mais aussi pour les armes à feu.
    L'amendement 2 du Parti vert est-il adopté?
    (L'amendement est rejeté par 10 voix contre 1. [Voir le Procès-verbal])
    Le président:L'amendement 5 des conservateurs est-il adopté?
    (L'amendement est rejeté par 7 voix contre 4. [Voir le Procès-verbal])
    Le président:L'article 7 est-il adopté?
    Allez-y, monsieur Brock.
(1845)
     Conformément à l'esprit des amendements conservateurs dont M. Moore a parlé, nous cherchons un compromis.
    Nous n'appuyons pas l'élimination de la peine minimale obligatoire envisagée dans le projet de loi C-5, mais nous prenons acte de l'intention du projet de loi C-5 de laisser une certaine marge aux tribunaux et aux procureurs de la Couronne pour qu'ils puissent exercer leur pouvoir discrétionnaire au besoin, mais nous voulons aussi faire savoir à la collectivité que, si on se livre à des activités comme celles qu'énonce l'article sur le comportement criminel, on doit s'attendre à ne pas être traité avec clémence. On doit s'attendre à une période d'incarcération.
    Compte tenu de l'objectif global, nous estimons qu'une peine de six mois, plutôt que d'un an, est un compromis valable.
    Mettons-nous l'article 7 aux voix?
    (L'article 7 est adopté par 7 voix contre 4.)
    Nous passons maintenant au nouvel article 7.1 proposé par le Parti vert. C'est l'amendement 3 du Parti vert.
    J'estime qu'il est irrecevable. Je vais faire une lecture complète pour cet exemple-ci, mais, pour la suite, je ne formulerai que la décision.
    L'amendement vise à modifier l'alinéa 102(2)a) du Code criminel, qui porte sur l'infraction liée à la modification d'une arme à feu. Dans sa troisième édition, La Procédure et les usages de la Chambre des communes stipule qu'« un amendement est irrecevable s’il vise à modifier un texte législatif dont le comité n’est pas saisi ou s’il vise à modifier un article de la loi existante, sauf si celle-ci est explicitement modifiée par un article du projet de loi ».
    Puisque le projet de loi C-5 ne modifie pas l'alinéa 102(2)a) du Code criminel, la présidence est d'avis que l'amendement est irrecevable.
    (Article 8)
    Le président:Nous avons l'amendement 4 du Parti vert. Je rappelle que, s'il est adopté, l'amendement 6 du Parti conservateur ne pourra pas être proposé, puisqu'il modifie la même ligne.
    L'amendement 4 du Parti vert est-il adopté?
    (L'amendement est rejeté par 10 voix contre 1. [Voir le Procès-verbal])
    Le président:Nous avons maintenant l'amendement 6 des conservateurs.
    Allez-y, monsieur Moore.
(1850)
     Cet article porte sur l'importation et l'exportation d'armes à feu prohibées, à autorisation restreinte et sans restriction et de munitions prohibées. La première infraction est sanctionnée par une peine minimale obligatoire de trois ans, tandis que la deuxième et les suivantes entraînent une peine de cinq ans.
    Les autres cas sont les armes prohibées et à autorisation restreinte et les composants et pièces liés à la fabrication d'une arme à feu automatique. Il faut savoir que, contrairement à ce que les gens pourraient croire, les armes à feu entièrement automatiques ne sont pas légales au Canada, même dans la catégorie « à autorisation restreinte ». Nous avons les catégories « sans restriction », « à autorisation restreinte » et « prohibées », mais les armes à feu entièrement automatiques ne sont pas légales au Canada.
    Ceux qui fabriquent des armes automatiques sont passibles d'une peine minimale obligatoire d'un an. L'article 8 supprimerait cette PMO.
    C'est pour cette raison que nous nous opposons à l'article 8. J'ai déjà dit que l'amendement 6 du PCC est un compromis aux termes duquel toute personne qui fabrique au Canada des armes à feu entièrement automatiques susceptibles d'être utilisées illégalement et qui est reconnue coupable de cette activité illégale devra purger une peine minimale de six mois. C'est un effort de compromis. C'est pourquoi nous avons proposé l'amendement CPC-6.
    Allez-y, monsieur Morrison.
    Nos témoins ont-ils soulevé des questions en vertu de la Charte?
    Nous n'avons pas connaissance d'une cause précise où la peine minimale obligatoire d'un an aurait été jugée inconstitutionnelle. Nous savons qu'un tribunal de première instance du Québec a jugé inconstitutionnelle la PMO de trois ans, mais pas d'un an.
    Pour les besoins du débat, nous parlons de quelqu'un qui pourrait transformer une arme à feu en arme entièrement automatique, et c'est au cœur de l'activité des gangs du crime organisé.
    Nous le savons tous. Nous siégeons à la Chambre des communes tous les jours, et quand nous rentrons chez nous, nous en entendons parler tous les jours. C'est probablement la peine la plus grave pour une infraction commise avec une arme à feu.
    À mon avis, il y aura lieu d'y songer au moment de voter.
    Allez-y, monsieur Brock.
    Il ne s'agit que d'un débat, sans questions. J'invite mes collègues libéraux à vraiment réfléchir à l'objet de cet article et au type de criminel qu'il vise. Il ne vise pas les Autochtones qui en sont à leur première infraction ou les Canadiens noirs racialisés. Il ne vise pas les délinquants à faible risque. Il vise des délinquants qui participent sciemment à une entreprise commerciale d'importation et d'exportation d'armes à l'intérieur de nos frontières et à l'étranger.
     Je vous invite à réfléchir aux innombrables témoignages dont nous avons eu connaissance dans le cadre de nos activités politiques au cours des derniers mois, à ce que nous lisons dans les journaux, à ce que nous voyons à la télévision au sujet de l'ouverture des vannes et de l'importation et de la contrebande d'armes à feu illégales à travers nos frontières poreuses.
    Pour revenir à ce que disait mon collègue Rob Moore, il y a aujourd'hui des drones qui contournent nos frontières légales pour veiller à ce que l'échange commercial d'armes continue.
    Comme parlementaires, nous devons adopter une ligne dure et tenir compte du type de criminels que nous essayons de viser ici. Nous devons adresser un message de dissuasion à ces criminels aguerris: s'ils continuent, ils doivent s'attendre à aller en prison — pas de si, pas de mais, pas de doute. Ce ne sont pas des gens qui ont besoin d'indulgence. Ils ont choisi de s'adonner à une activité illégale et d'adopter un mode de vie qui va complètement à l'encontre de ce que votre gouvernement prêche aux Canadiens avec le projet de loi C-5.
     Je vous prie d'en tenir compte.
(1855)
     J'invoque le Règlement, monsieur le président. Je pense que les commentaires devraient s'adresser à vous et non aux députés.
    Je m'adresse à vous, monsieur le président. Merci.
    L'amendement CPC-6 est-il adopté?
    (L'amendement est rejeté par 7 voix contre 4. [Voir le Procès-verbal])
    (L'article 8 est adopté par 7 voix contre 4.)
    (Article 9)
    J'invoque le Règlement.
    Oui, monsieur Moore.
    Avez-vous rendu une décision sur l'article 9.1?
    Nous n'en sommes pas encore là.
    Vous n'en êtes pas encore là.
    Il y a l'article 9, puis l'article 9.1 immédiatement après.
    Non, l'article 9 n'est pas adopté.
     Nous allons procéder à un vote par appel nominal sur l'article 9.
    (L'article 9 est adopté par 7 voix contre 4.)
    Le président:Nous avons ensuite l'article 9.1.
    Je déclare l'amendement PV-5 irrecevable en raison de la loi en vigueur.
    Je vais y aller amendement par amendement.
    Je vais déclarer l'amendement PV-6 irrecevable pour la même raison. Aucune partie de la loi qu'il propose de modifier n'est débattue.
    Concernant l'amendement PV-7, puisque le projet de loi C-5 ne modifie pas l'article 153 du Code criminel, la présidence est d'avis que l'amendement est irrecevable.
    Concernant l'amendement PV-8, puisque le projet de loi C-5 ne modifie pas l'article 155 du Code criminel, la présidence est d'avis que l'amendement est irrecevable.
    Concernant l'amendement PV-9, puisque le projet de loi C-5 ne modifie pas les alinéas 160(3)a) et 160(3)b) du Code criminel, la présidence est d'avis que l'amendement est irrecevable.
    Concernant l'amendement PV-10, puisque le projet de loi C-5 ne modifie pas les paragraphes 163.1(2) à 163.1(4.1) du Code criminel, la présidence est d'avis que l'amendement est irrecevable.
    Concernant l'amendement PV-11, puisque le projet de loi C-5 ne modifie pas les articles 170 et 171 du Code criminel, la présidence est d'avis que l'amendement est irrecevable.
    Concernant l'amendement PV-12, puisque le projet de loi C-5 ne modifie pas les alinéas 171.1(2)a) et 171.1(2)b) du Code criminel, la présidence est d'avis que l'amendement est irrecevable.
    Concernant l'amendement PV-13, puisque le projet de loi C-5 ne modifie pas les alinéas 172.1(2)a) et 172.1b) du Code criminel, la présidence est d'avis que l'amendement est irrecevable.
    Concernant l'amendement PV-14, puisque le projet de loi C-5 ne modifie pas les alinéas 172.2a) et 172.2b) du Code criminel, la présidence est d'avis que l'amendement est irrecevable.
    Concernant l'amendement PV-15, puisque le projet de loi C-5 ne modifie pas les alinéas 173(2)a) et 173(2)b) du Code criminel, la présidence est d'avis que l'amendement est irrecevable.
    Concernant l'amendement PV-16, puisque le projet de loi C-5 ne modifie pas le paragraphe 202(2) du Code criminel, la présidence est d'avis que l'amendement est irrecevable.
    (Article 10)
(1900)
    Le président:Nous passons maintenant à l'amendement 17 du Parti vert. Je rappelle que, si cet amendement est adopté, l'amendement 1 du Bloc et l'amendement 7 du Parti conservateur ne pourront pas être proposés, puisqu'ils modifient la même ligne.
    Excusez-moi, monsieur le président. Pouvez-vous répéter, s'il vous plaît? Je suis un peu perdu.
    Bien sûr. Nous en sommes maintenant à l'article 10.
    Avons-nous adopté l'article 9?
    Nous avons déjà voté sur l'article 9. Nous en sommes à l'article 10 et à l'amendement 17 du Parti vert. Je rappelle que, si cet amendement est adopté, l'amendement 1 du Bloc et l'amendement 7 du Parti conservateur ne pourront pas être proposés, puisqu'ils modifient la même ligne.
    L'amendement 17 du Parti vert est-il adopté?
    Voulez-vous intervenir, monsieur Morrice?
     La justification est la même que celle que Mme May a exposée au sujet de l'amendement 1 du Parti vert. Il s'agit de rétablir le principe du pouvoir judiciaire discrétionnaire et de comprendre que les peines minimales obligatoires ne dissuadent pas vraiment les criminels et visent de façon disproportionnée les populations marginalisées.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Moore, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Au sujet de cet amendement du Parti vert — je sais que vous avez déclaré les autres irrecevables, et je ne vais donc pas en parler —, il aurait été intéressant d'entendre les députés du Parti vert défendre l'élimination des peines obligatoires que les Canadiens ont jugé bon d'appliquer à la production de pornographie juvénile...
    M. Mike Morrice: J'invoque le Règlement.
    L'hon. Rob Moore: ...à la production de matériel explicite, au leurre d'enfant...
(1905)
    Le député invoque le Règlement.
    J'invoque le Règlement. Il me semble que nous parlons de l'amendement 17 du Parti vert.
     Le député pourrait-il s'en tenir à l'amendement 17 du Parti vert?
    Monsieur Moore, je vous demanderais de vous en tenir à...
    Tout à fait d'accord. Si j'étais à la place de M. Morrice, je ne voudrais pas parler de toutes ces choses non plus, mais ils ont mis sur le dos de notre comité la décision d'éliminer des peines obligatoires pour des infractions graves contre les enfants, et maintenant ils ne veulent pas en parler; c'est un peu déroutant. Si vous proposez un amendement qui traite de ce genre d'infractions sexuelles contre les enfants, vous devriez être prêt à en parler et à le défendre.
    Merci, monsieur Moore. Nous allons passer à M. Brock.
     Est-ce M. Brock ou M. Morrison? J'ai vu un tourbillon de mains levées...
    Oui, je vais parler de l'amendement 17 du Parti vert.
    Le président: Ah, d'accord.
    L'hon. Rob Moore: L'amendement 17 du Parti vert, qui a été jugé recevable, supprime la peine minimale obligatoire même si l'infraction a un lien avec une organisation criminelle. Je pense donc que nous commençons à effectivement examiner le bien-fondé de ce projet de loi.
    Nous avons déjà dit très clairement au sujet d'autres infractions que les armes à feu au Canada suscitent beaucoup d'inquiétude et que les crimes commis ne le sont pas par des agriculteurs, des chasseurs de canards et des tireurs sportifs respectueux des lois, mais par des criminels.
    Cet amendement va un peu plus loin et porte précisément sur les organisations criminelles et les récidivistes. La plupart des infractions dont nous parlons concernent des organisations criminelles, et certains des amendements dont nous avons discuté concernent précisément la récidive et les récidivistes. En fait, nous avons discuté d'une certaine disposition du Code criminel qui prévoit des peines croissantes, comme il se doit, pour les deuxième et troisième infractions. L'amendement 17 du Parti vert porte sur le cas d'une organisation criminelle ou d'un accusé récidiviste. C'est pour ces raisons que je voterai contre cet amendement.
    La sonnerie se fait entendre. J'ai besoin du consentement unanime pour continuer pendant la sonnerie.
    Des députés: Non.
    Le président:Très bien. Nous allons donc suspendre la séance jusqu'à ce que les votes soient terminés.
    La séance est suspendue.
(1905)

(2000)
     Reprenons.
    Je vais vous laisser le temps de vous installer.
    Je crois que nous en étions à l'amendement 17 du Parti vert pour l'article 10.
    Oui.
    Nous venions de terminer avec M. Brock, je crois.
    Non.
    Dans ce cas, poursuivez, monsieur Brock.
    Est-ce que vous commencez par moi?
    Oui.
    L'amendement du Parti vert vise à supprimer du projet de loi C-5 proposé par le gouvernement toutes les peines minimales obligatoires prévues à l'article 244.
     L'article 244, intitulé « Décharger une arme à feu avec une intention particulière », se lit comme suit:
Commet une infraction quiconque, dans l’intention de blesser, mutiler ou défigurer une personne, de mettre sa vie en danger ou d’empêcher son arrestation ou sa détention, décharge une arme à feu contre qui que ce soit.
    La section « Peine », que les Verts veulent supprimer, se lit comme suit:
Quiconque commet l’infraction prévue au paragraphe (1) est coupable d’un acte criminel passible:?
a) s’il y a usage d’une arme à feu à autorisation restreinte ou d’une arme à feu prohibée lors de la perpétration de l’infraction, ou si celle-ci est perpétrée au profit ou sous la direction d’une organisation criminelle ou en association avec elle, d’un emprisonnement maximal de quatorze ans, la peine minimale étant:?
(i) de cinq ans, dans le cas d’une première infraction,
(ii) de sept ans, en cas de récidive;
b) dans tous les autres cas, d’un emprisonnement maximal de quatorze ans, la peine minimale étant de quatre ans.
    Le paragraphe 244(3) énumère les dispositions en cas de récidive. Je ne vais pas me lancer dans cette discussion.
    Dans le Tremeear's Criminal Code, il y a un article sur les considérations relatives à la Charte. D'après l'annotation qu'on y trouve, la Cour d'appel du Nouveau-Brunswick a rendu une décision à cet égard dans l'affaire Regina c. Roberts, en 1998. La peine minimale prévue dans cet article ne contrevient pas à l'article 12 de la Charte.
     Je vais reporter mon débat à plus tard, monsieur le président, et je vais m'adresser aux témoins du ministère de la Justice.
    Messieurs, en dehors de cette décision, savez-vous s'il y en a eu d'autres, rendues par un tribunal inférieur ou par un tribunal d'appel du pays, qui porterait notamment sur cette infraction?
    Il y en a un certain nombre. Je vais les passer en revue rapidement.
     Une décision de la Cour d'appel du Nouveau-Brunswick rendue en 1998 a confirmé la PMO de quatre ans...
    N'est-ce pas la décision Roberts que je viens de citer?
    J'ai les initiales « M.D.R. ».
    Avez-vous la référence?
    Il s'agit de 1998 N.B.J. no 160.
    J'ai 125 CCC, troisième édition, 471. Il pourrait s'agir de la même cause.
    Il y a aussi une décision rendue à Terre-Neuve en 2011, où la cour provinciale a confirmé la peine de quatre ans.
     Ainsi que la décision Reis, rendue en 2017 par la Cour supérieure de l'Ontario.
     Nous savons également qu'une décision a été rendue en 2018 par la Colombie-Britannique, qui a confirmé la PMO de cinq ans en vertu de cette disposition.
(2005)
    La majorité de la jurisprudence dont vous venez de parler confirme les peines minimales obligatoires dans les domaines non couverts par le projet de loi C-5 dans sa forme actuelle. N'est-ce pas?
     En effet. Trois des quatre cas que je viens de mentionner concernent précisément la PMO qui serait abrogée par le projet de loi C-5. Comme je l'ai dit tout à l'heure, deux de ces décisions ont été rendues avant les décisions Nur et Lloyd de la Cour suprême. L'autre, rendue en 2015, est postérieure à Nur.
    Je vois.
    Ai-je raison de dire — puisque je ne l'ai pas sous les yeux — que le projet de loi C-5 porte sur l'alinéa 244(2)b), qui se lit comme suit: « dans tous les autres cas, d’un emprisonnement maximal de quatorze ans, la peine minimale étant de quatre ans »? C'est ce que le projet de loi C-5 essaie d'éliminer, n'est-ce pas?
    C'est exact.
    Pour ma gouverne et celle des membres du Comité, pourriez-vous nous donner des exemples du type d'arme envisagé à l'article 244 et qui ne serait pas par ailleurs défini à l'alinéa 244(2)a)?
    La PMO de quatre ans porte surtout sur les infractions avec armes d'épaule sans lien avec le crime organisé. Les peines minimales de cinq ans et de sept ans s'appliquent spécifiquement aux armes à feu prohibées ou à autorisation restreinte ou si l'infraction a été commise « au profit ou sous la direction d’une organisation criminelle ou en association avec elle », auquel cas il pourrait s'agir d'une infraction avec arme d'épaule en lien avec le crime organisé.
    L'alinéa 244(2)b) engloberait les situations où il y a eu infraction avec arme d'épaule, mais sans lien avec le crime organisé.
    En effet.
    L'un ou l'autre d'entre vous pourrait-il nous donner son opinion, compte tenu de votre expérience juridique, sur des cas où ce type d'infraction criminelle impliquait une arme d'épaule — un fusil ou une carabine, par exemple — utilisée dans le contexte de ce que nous, les avocats, savons des personnes accusées de cette infraction, qui ont effectivement déchargé leur arme dans l'intention de blesser, de mutiler ou de défigurer? Compte tenu de la constellation de délinquants visés par l'article 244, quel serait, d'après vous, le pourcentage de cas impliquant effectivement l'utilisation d'une arme d'épaule?
    Je ne pense pas pouvoir vous répondre immédiatement. Le mieux que nous puissions vous fournir, ce sont des renseignements sur les accusations en vertu de l'alinéa 244.2(1)b), mais il ne nous serait pas possible de vous donner une ventilation en pourcentage des armes de poing ou des armes à feu à autorisation restreinte.
    Je vois.
    Je vais vous poser une question ridicule, mais c'est le narratif du gouvernement, du moins d'après ce qu'a déclaré leprocureur général lui-même le jour où ce projet de loi a été présenté à la Chambre.
    Vous m'avez probablement déjà entendu donner au Comité l'exemple de ce jeune Autochtone qui avait décidé de boire un peu trop d'alcool, s'était emparé d'une arme et l'avait déchargée frénétiquement dans une grange. Cela n'entre pas dans les scénarios envisagés à l'article 244, n'est-ce pas?
    Non. Ce scénario serait plutôt visé par l'article 244.2, qui porte sur le fait de décharger intentionnellement une arme à feu avec insouciance. Je crois que c'est à l'article 11 du projet de loi.
(2010)
    C'est exact, parce que la poursuite doit prouver qu'il y a eu intention de blesser, de mutiler ou de défigurer, ou encore de mettre en danger la vie d'une personne ou d'empêcher son arrestation ou sa détention. Le procureur général, qui est la principale autorité juridique du pays, a fourni aux Canadiens une description tout à fait inadéquate de ce que le projet de loi C-5 tente vraiment de couvrir.
    Êtes-vous d'accord?
     Pour être juste — et il faudrait relire la transcription —, je crois que le scénario auquel il faisait allusion était l'infraction prévue à l'article 244.2 du Code et non au paragraphe 244.2(2) du projet de loi. C'est une autre infraction qui vise un comportement semblable, mais différent.
    L'infraction prévue à l'article 244 est celle que vous avez décrite, monsieur, qui est accompagnée de l'intention précise de blesser, de mutiler ou de défigurer. L'article 244.2 renvoie à des situations où il peut être difficile de prouver une intention précise de blesser, mais où le sujet comprenait que la décharge de l'arme à feu pouvait mettre quelqu'un en danger. C'est l'élément d'insouciance de l'article 244.2: l'accusé s'en tient à l'idée qu'il ne sait pas avec certitude que le bâtiment où il est sur le point de tirer est occupé, mais il soupçonne fortement que c'est le cas et décide de le faire quand même, sans égard aux conséquences. C'est le scénario dont il était question à l'article 242.2, je crois.
    Comme je l'ai souvent dit ce soir, compte tenu de vos fonctions actuelles au ministère de la Justice et de votre formation juridique, j'espère que vous conviendrez avec moi que le Comité ne peut vraiment pas négliger l'importance du pouvoir discrétionnaire des procureurs. Êtes-vous d'accord avec ce principe?
    Oui, absolument. Comme vous et les membres du Comité le savez, le pouvoir discrétionnaire est un élément crucial du système de justice pénale sur le plan constitutionnel. Nous savons que l'exercice du pouvoir discrétionnaire de la Couronne ne peut pas empêcher la Cour suprême de conclure à l'inconstitutionnalité dans l'affaire Nur.
    La façon dont la Couronne choisit de procéder, que ce soit par mise en accusation ou par procédure sommaire... Bien qu'il soit important de pouvoir tenir compte des circonstances telles que le procureur de la Couronne les envisage et telles qu'elles sont présentées, cela n'a pas d'incidence sur l'issue de l'examen constitutionnel d'une peine obligatoire.
     C'étaient mes questions, monsieur le président. Je reviens maintenant au débat.
    Je veux simplement dire au Comité que mes 18 années d'expérience comme procureur de la Couronne m'ont laissé en mémoire avec une certaine précision au moins une douzaine d'affaires, quand je travaillais à Brantford, en Ontario, et dans une petite collectivité située à environ 40 minutes au sud-est de Brantford, du nom de Cayuga, tout près des Six Nations de la rivière Grand et des Mississaugas de Credit. J'ai également eu l'occasion d'exercer dans une petite ville appelée Simcoe, en Ontario, et pendant un certain temps à Hamilton.
    J'ai travaillé dans un échantillon représentatif de petites collectivités rurales ayant des liens avec des populations autochtones, dans une ville de taille moyenne et dans de grandes villes. Cette expérience m'a appris que les infractions criminelles liées aux armes à feu n'ont vraiment aucune limite. C'est aussi courant et dangereux dans un village que dans une grande ville ou une ville de taille moyenne.
     Je dois rendre à César ce qui appartient à César, c'est-à-dire à mon collègue M. Naqvi. Je ne sais pas s'il est encore avec nous — oui, il est là. À mon avis, il a un bilan exemplaire comme procureur général de notre province. M. Naqvi estimait important que la politique se fasse l'écho d'un juste équilibre entre la responsabilisation des délinquants et la possibilité, pour nous, de prendre décisions sans trop de restrictions, sans être entravés par lui, sans être entravés par le procureur général, sans être entravés par un gestionnaire de l'État. Ce ne serait qu'une situation où une décision que j'ai prise serait remise en question. Si j'avais la capacité de justifier ma décision et les tenants et aboutissants dont j'aurai tenu compte au préalable, du moment que la décision était fondée sur la loi, sur la politique de la Couronne et sur la situation du délinquant, j'aurais l'appui de mon ancien patron. Je savais, grâce à l'appui de mon ancien procureur de la Couronne, que les décisions que je rendais là où je travaillais seraient respectées et seraient soutenues par mes supérieurs.
    Je dis cela parce que j'ai fait partie d'une équipe de près d'un millier de procureurs de la Couronne en Ontario. Nous disions souvent que l'Association des procureurs de la Couronne de l'Ontario était le plus grand cabinet d'avocats au pays qui ne pratique que le droit pénal. Nous avons des procureurs de la Couronne d'un océan à l'autre. Je ne peux parler qu'au nom de l'Ontario, mais je suis certain que les procureurs de la Couronne des autres provinces se seraient comportés de la même façon que M. Naqvi en donnant aux procureurs adjoints de la Couronne le pouvoir discrétionnaire et les outils nécessaires pour prendre de bonnes décisions.
    La raison pour laquelle je prends tout ce temps pour faire valoir mon point de vue est que je veux vraiment souligner que nous, les procureurs, ne sommes pas de simples robots ambulants. Nous sommes des êtres humains. En plus de nos responsabilités légales, nous sommes des citoyens de nos communautés. Nous traduisons les points de vue et les valeurs de notre société.
(2015)
    Je l'ai dit et redit et je le répéterai jusqu'à la fin de ma carrière: nous parlementaires devons prendre des mesures pour régler le problème de la surincarcération des délinquants autochtones. Comme les statistiques... Plusieurs collègues nous ont dit que le pourcentage de délinquants hommes et femmes dans nos prisons atteint ou dépasse le seuil de 50 % dans les établissements provinciaux et fédéraux du pays. Quand on factorise le nombre d'Autochtones par rapport à leur population au Canada, le résultat statistique est affreux, mais je pense qu'il est dangereux de dire que, chaque fois qu'un délinquant autochtone commet une infraction criminelle comme l'une des infractions graves prévues à l'article 244, la position par défaut devrait être d'envisager des solutions de rechange à l'incarcération.
    La triste réalité, monsieur le président et distingués membres du Comité, c'est qu'il y a effectivement des primodélinquants parmi les délinquants appartenant à des communautés autochtones ou marginalisées, mais que ces derniers sont en grande majorité des récidivistes. En fait, c'est une triste constatation sur le plan social, parce que cela veut dire que nous les avons laissé tomber.
    Pendant la campagne électorale de 2015, le premier ministre a déclaré que c'est avec ses voisins autochtones qu'un gouvernement devrait entretenir les relations les plus étroites. J'en suis convaincu. C'est ce que je vis. J'ai de nombreux amis autochtones et je les ai eus toute ma vie. Je suis né et j'ai grandi à Brantford et je suis fier de continuer à y vivre, mais nous devons examiner ce qui se passe dans les réserves du pays. Le rapport de la Commission de vérité et réconciliation a été publié il y a des années, et pourtant le gouvernement actuel a encore du mal à en faire une priorité. Nous devons répondre aux appels à l'action.
    Il y a des enjeux liés aux les séquelles et aux traumatismes découlant du système des pensionnats. Il y a des enjeux liés au manque de logements convenables. La communauté des Six Nations de la rivière Grand a réussi, sous le gouvernement Harper, à obtenir un financement de près de 40 millions de dollars pour obtenir le droit et la capacité de construire une installation de traitement de l'eau. La triste réalité, monsieur le président, c'est que l'établissement en question a la capacité de desservir la totalité des 25 000 résidents et entreprises de ce territoire, mais que, à ce jour — je crois qu'il a été construit en 2013 ou 2014, donc nous en sommes à huit ou neuf ans plus tard —, il n'en dessert que 20 % parce qu'il n'y a pas de financement. Le gouvernement a épuisé tous les fonds nécessaires à l'enfouissement de l'infrastructure et toutes les canalisations. Et nous voilà donc avec de nombreux problèmes de manque d'eau potable. Il est répugnant que, à notre époque, au XXIe siècle, dans le grand État démocratique qu'est le Canada, il y ait encore des Canadiens autochtones qui doivent faire bouillir leur eau. C'est inexcusable.
(2020)
    J'invoque le Règlement. C'est ridicule.
    Je suis désolé, mais c'est moi qui ai la parole, monsieur le président.
    J'invoque le Règlement. Je pense qu'il est important de rappeler le principe de pertinence ici, monsieur le président.
    J'aurai plaisir à discuter avec le député d'en face de la réconciliation et des efforts déployés par notre gouvernement, mais je ne crois pas que ce soit ici l'occasion de le faire. Nous parlons précisément des peines minimales obligatoires. C'est la nature du projet de loi, et je tiens à souligner qu'il est vraiment fallacieux de s'en écarter en ce moment. Je demanderais au député de concentrer ses observations sur l'amendement dont nous sommes saisis et notamment sur la question des peines minimales obligatoires.
     Merci, monsieur Anandasangaree.
    Monsieur Brock, je vous rappelle que nous en sommes à l'article 10, et en particulier à l'amendement 17 du Parti vert. Je vous demanderais de vous y tenir.
    Je sais exactement où j'en suis, monsieur, mais je suis très méthodique quand je fais une analyse approfondie d'un projet de loi. Cela pourrait offenser mes collègues libéraux. Excusez-moi d'avoir tendance à être rigoureux. C'était souvent une critique que les juges m'adressaient. Ils disaient: « Monsieur Brock, combien de temps prendrez-vous pour conclure ou présenter vos observations finales? » Je leur disais: « Oh, je ne sais pas — peut-être une heure ou deux », et ils riaient. Dans une certaine cause, j'ai pris neuf heures pour présenter mes conclusions.
    Cela dit, je n'ai pas l'intention de garder mes amis ici jusqu'à 3 heures du matin, mais j'y serais prêt au besoin, parce que je pense que c'est une question importante. Ils peuvent être en colère. Ils peuvent être contrariés. Ils ont eu leur chance à 17 h 30 quand on a proposé de lever la séance. L'idée d'examiner 70 amendements en deux heures est tout simplement... C'est absurde, très franchement, et le fait de limiter ma capacité de donner des réponses approfondies...
    Nous parlons de la surincarcération des délinquants autochtones. C'est leur projet de loi, leurs sujets de discussion, pas ceux du gouvernement conservateur. Ce sont les sujets de discussion du gouvernement libéral. Il est très fallacieux de la part de Mme Diab, puis de M. Anandasangaree, de conclure à un manque de pertinence quand je parle des enjeux autochtones.
    C'est une question qui me passionne, monsieur le président, et j'aimerais poursuivre ma réflexion.
(2025)
    Vous pouvez continuer, monsieur Brock.
     Merci.
    Avant qu'on m'interrompe, je parlais, me semble-t-il, de la triste réalité du fait que de nombreuses communautés autochtones doivent faire bouillir leur eau. Il est répugnant de voir le gouvernement libéral prétendre être un allié de nos voisins autochtones et de voir ces gens — des centaines, des milliers, des dizaines de milliers — souffrir.
     Ne serait-ce pas différent si, dans la Cité parlementaire, nous avions tout à coup un problème de chlore dans l'eau potable, comme cela s'est passé au Nunavut à quelques reprises quand du diésel s'est infiltré dans le système d'approvisionnement en eau? Vous avez vu la rapidité avec laquelle le gouvernement a réagi. Ne serait-ce pas différent si, dans cette enceinte, nous avions un problème semblable? Des mesures immédiates, quel qu'en soit le coût, ne seraient-elles pas prises et déployées pour corriger la situation? Cela se ferait en moins d'une semaine. Nous n'aurions pas à attendre des années.
    C'est l'héritage de ce gouvernement, et c'est le message qu'il adresse à mes amis autochtones et à mes voisins autochtones partout au pays.
    J'ai parlé de l'eau. Il y a aussi les enjeux du logement. Il y a le manque d'éducation, parce que le système traumatisant des pensionnats l'a empêchée et a privé les parents et les grands-parents de leurs compétences sociales et des codes sociaux qui leur auraient permis d'élever leurs enfants, de guider leurs enfants pour en faire des citoyens respectueux des lois. Il n'est pas étonnant, monsieur le président, que, dans ces circonstances — et je reviens à ce que je disais tout à l'heure —, il y ait tant de délinquants autochtones se livrant à des activités criminelles très graves. Nous avons entendu non seulement le chef de la police de la ville de Brantford, mais aussi le chef du service de police des Six Nations. Les deux sont autochtones, monsieur le président, et ils ont tous les deux décrit une situation hors de contrôle et anarchique sur le territoire des Six Nations de la rivière Grand.
     À vrai dire, il y a quelques années — j'étais procureur de la Couronne à l'époque —, le chef de police nous avait fortement recommandé de ne pas voyager sur le territoire des Six Nations de la rivière Grand pendant la journée, parce que les poursuites à grande vitesse y étaient fréquentes. À l'époque, le territoire des Six Nations de la rivière Grand avait la réputation d'être la capitale du vol de voitures au Canada. C'était un commerce très lucratif pour beaucoup de jeunes Autochtones. On en est arrivé au point où on nous recommandait de ne pas s'y déplacer pendant la journée.
    Compte tenu de tous ces facteurs, monsieur le président, il n'est pas étonnant que nous nous retrouvions dans une situation où il y a beaucoup trop de délinquants autochtones dans notre système carcéral, et beaucoup de Noirs — qui sont des Canadiens. J'ai lu de nombreux articles de journaux, regardé des émissions de télévision et lu des articles en ligne sur l'importance grandissante des activités des gangs dans les grands centres. La majorité de ces gangs sont malheureusement composés de Canadiens noirs, et ils recrutent activement des jeunes Noirs, parce que ces jeunes ont peu de chances de s'en sortir dans les grands centres.
(2030)
    Je sais qu'à la dernière élection, le gouvernement et même le Parti conservateur ont parlé de mesures d'atténuation de la criminalité. Nous avons parlé des moyens de dissuader les délinquants d'entrer dans l'engrenage de la justice pénale. Il en était question dans le programme conservateur. Je sais que le gouvernement en a parlé dans sa plateforme électorale et qu'il en parle à la Chambre, mais que fait-il à part parler, tenir des réunions et, pour reprendre les mots de la ministre des Affaires étrangères, convoquer des assemblées?
    Il est temps de passer de la parole aux actes. Les bottines doivent suivre les babines. S'ils prennent vraiment au sérieux les répercussions globales de la réforme du système de justice pénale, nous devons examiner non seulement la loi actuelle, mais aussi les causes sous-jacentes. Cet aspect n'est pas abordé. Je sais que ce n'est pas un élément du projet de loi C-5, mais nous ne voulons pas que ce projet de loi ne soit qu'une solution de fortune à cet important problème global. C'est ce problème global que nous, parlementaires, devons garder à l'esprit.
    Le Comité sera probablement très heureux de savoir que je vais passer à un autre sujet. Je pense avoir exprimé mon point de vue sur les enjeux autochtones dans ma circonscription. J'aimerais approfondir l'article 244.
    Comme procureur — j'en ai parlé tout à l'heure —, j'ai eu à traiter au moins une douzaine de causes relevant de l'article 244. Il s'agissait surtout de fusillades au volant d'une voiture ou de fusillades entre gangs. Un cas en particulier s'est produit à l'extérieur d'un dépanneur, où je m'arrêtais tous les jours pour acheter le journal en rentrant dîner chez moi. Je me suis trouvé là trois jours avant que ce crime y soit commis. Mon véhicule est connu de la police municipale de Brantford. Selon l'entente, nous devons communiquer nos numéros d'immatriculation à la police locale pour qu'elle puisse nous protéger.
    Monsieur le président, j'ai eu à traiter de nombreuses causes à l'occasion desquelles ma vie et celle des membres de ma famille ont été menacées. J'ai dû renforcer la sécurité de ma maison, changer les serrures, installer des vitres pare-balles et des caméras de surveillance. J'ai dû affronter toute une kyrielle de problèmes. Quand quelqu'un me demande : « Monsieur Brock, parlez-moi d'une journée dans votre vie de procureur », je peux lui répondre: « Je ne sais pas si, quand je me présente au bureau, j'aurai affaire à un vol à l'étalage ou à un homicide. » Je m'occupais de toutes sortes d'affaires. Compte tenu de mon expérience, monsieur le président, on me confiait le plus souvent les affaires d'homicide, les activités liées aux gangs, les fusillades et les cas d'exploitation d'enfants.
    Pour revenir à l'histoire du dépanneur, un agent m'a vu et m'a dit: « Qu'est-ce que vous faites ici, Brock? Que faites-vous dans ce magasin? » Le dépanneur avait une réputation notoire en matière criminelle.
    Je lui ai dit: « Je viens juste chercher le journal. Pas de souci. »
    Trois jours plus tard, à peu près à la même heure, deux personnes qui s'étaient déjà querellées se trouvaient là. Il était 14 heures. Celui qui était à l'intérieur du magasin pour acheter une boisson gazeuse ou je ne sais quoi est sorti, et le délinquant s'est aussitôt placé devant lui, à six pieds, avec une arme de poing. Il l'a visé, la victime a sorti, elle aussi, une arme de poing. Ils ont tiré tous les deux. C'était en plein jour, à 10 pieds de la porte d'entrée du dépanneur où j'allais chercher mon journal.
(2035)
    Heureusement, les deux étaient d'assez bons tireurs, c'est-à-dire qu'ils se sont tiré l'un sur l'autre et n'ont touché aucun passant, mais vous pouvez imaginer la panique. Vous pouvez imaginer la peur et la confusion.
    C'est de cela qu'il est question à l'article 244. Ce n'était pas un primodélinquant. Ce n'était pas une première infraction mineure. Ces deux-là voulaient se blesser l'un l'autre. Ils voulaient se mutiler l'un l'autre. Ils voulaient se défigurer l'un l'autre et mettre en danger la vie l'un de l'autre.
    Monsieur le président, le Parti vert estime que l'élimination des peines minimales obligatoires réglera le problème de la surincarcération et suscitera un certain sentiment de responsabilité chez les délinquants. Je ne sais pas où les verts prennent leurs sujets de discussion, mais, croyez-moi, ils devraient passer une journée dans la vie d'un procureur qui est sur le terrain tous les jours à s'occuper de ces crimes graves. Ils sont complètement à côté de la plaque. On parle ici d'activités dangereuses.
    Il n'y a pas si longtemps, les membres du Comité ont peut-être entendu parler de la fusillade de Just Desserts à Toronto — ou était-ce à Scarborough? M. Anadasangaree s'en souviendra probablement.
    Permettez-moi de raconter au Comité des circonstances de la fusillade de Just Desserts, car il s'agissait d'une infraction relevant de l'article 244:
La fusillade de Just Desserts est un crime notoire qui s'est produit à Toronto dans la soirée du mardi 5 avril 1994. Peu après 23 h, trois hommes ont fait irruption dans le café Just Desserts, établissement populaire situé sur le chemin Davenport, dans le quartier Yorkville de Toronto.
    Ce n'était donc pas à Scarborough, monsieur Anadasangaree.
Un des hommes était armé d'un fusil de chasse. Les voleurs armés ont ordonné aux trente employés et clients de se rendre à l'arrière de l'établissement et se sont emparés de leurs objets de valeur.
Parmi les clients de ce soir-là, il y avait Georgina Leimonis, une jeune coiffeuse de 23 ans, qui était accompagnée de son petit ami. Une querelle a éclaté lorsque deux hommes parmi les clients ont refusé de remettre leur portefeuille; ils ont été frappés à coups de poing par l'un des voleurs. Peu après, l'homme au fusil de chasse a tiré et atteint [la victime] à la poitrine. Les voleurs ont fui le restaurant. [Elle] a été transportée d'urgence à l'hôpital pour une intervention chirurgicale et elle est décédée par la suite, à 2 h 45 le mercredi matin.
Une caméra de sécurité du restaurant a filmé toute la scène, mais, en raison de sa faible qualité et de l'absence de son, il a été difficile de se faire une idée précise des événements et d'identifier les meurtriers. La police s'est mise à la recherche de quatre hommes, les trois qui avaient participé au vol à main armée et celui qui les avait aidés à préparer le coup. La police a été critiquée quand elle a diffusé une description des délinquants indiquant qu'il s'agissait d'hommes noirs faisant 6 pieds. Beaucoup de gens ont estimé qu'une description aussi vague ne ferait rien pour aider à capturer les coupables et ne ferait que renforcer les stéréotypes selon lesquels les hommes noirs sont des criminels.
Une semaine après la fusillade, Lawrence Augustus Brown a été identifié comme suspect et s'est rendu à la police. Un autre des trois délinquants, O'Neil Rohan Grant, a été arrêté peu après. L'automne suivant, Gary George Francis et Emile Mark Jones ont été arrêtés. Grant, Francis et Jones ont été accusés d'homicide involontaire coupable et de vol qualifié. Brown, qui avait tiré avec son fusil de chasse, a été accusé de meurtre au premier degré. Les accusations portées contre Jones, qui n'avait pas participé directement au vol, ont par la suite été abandonnées.
Le crime, déjà connu, est également devenu notoire parce qu'il a été très mal géré. L'ouverture du procès a pris beaucoup de temps, et les hommes sont restés en prison pendant des années, se voyant refuser une libération sous caution sans avoir été traduits en justice. L'affaire a été entachée d'erreurs de la part de la police et des procureurs, mais elle a surtout été prolongée par des avocats de la défense qui ont par la suite été accusés de conduite non professionnelle. La nouvelle équipe de la défense a fait valoir que les accusations devaient être abandonnées en raison du long délai, mais la requête a été rejetée. Au moment du procès, 40 000 pages de dossiers liés à l'affaire s'étaient accumulées.
(2040)
Le procès a commencé en mai 1999, Brown ayant alors décidé de se défendre lui-même. Ce procès est devenu l'un des plus longs au Canada, Brown contre-interrogeant abondamment chaque témoin, souvent pendant deux jours.
Des allégations de racisme et de discrimination...
    Où donc avons-nous déjà entendu cela?
...ont été soulevées dès le début. L'un des avocats — des dizaines ont été embauchés, congédiés et renvoyés — a désigné l'acte d'accusation comme « l'équivalent moderne d'un lynchage ». De plus, dans une lettre adressée en 1995 à Ian Scott, alors avocat-conseil principal pour les enquêtes spéciales au Bureau des avocats de la Couronne, les avocats de l'accusé ont allégué que « cette affaire a fait l'objet d'une énorme publicité [...] non pas en raison de la nature du crime proprement dit, mais parce que les défendeurs sont tous noirs, que Mme Leimonis...
    — la victime —
...est blanche et que l'incident s'est produit dans un restaurant de la classe moyenne supérieure fréquentée principalement par des Blancs ».
    Ce que je n'ai pas dit, c'est qu'elle n'a pas été la seule victime, monsieur le président. Une douzaine d'autres victimes, sinon deux douzaines, ont été sous le feu de ces tirs aléatoires destinés à blesser, à mutiler, à défigurer et, dans le cas particulier de cette victime, à mettre fin à une vie.
Un résumé cinglant de 60 pages de la décision du juge Brian Trafford jette une lumière crue sur la police et sur le système de justice. L'utilisation sélective de fers aux jambes, d'entraves ventrales et de menottes sur les trois suspects témoigne d'une « insensibilité culturelle à l'égard des Noirs », a déclaré le juge Trafford. Il a également conclu que, jusqu'à ce jour, la police de Toronto « n'avait jamais mené d'enquête approfondie sur les allégations de mauvais traitements ». Des militants, en colère contre l'utilisation d'entraves, ont évoqué le spectre de la traite des esclaves. Ils ont fait remarquer que Paul Bernardo n'avait jamais été enchaîné dans la salle du tribunal.
     Voici le verdict:
L'affaire a continué de susciter énormément d'intérêt dans la population. Le lendemain de la clôture du procès, le 6 décembre 1999, le Globe and Mail a consacré six pages au meurtre et au procès. C'était sans précédent. Le verdict a été rendu le 11 décembre: Brown et Francis ont été reconnus coupables, et Grant a été acquitté. Brown a été condamné à une peine d'emprisonnement à perpétuité, sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans. Francis a été condamné à quinze ans de prison, dont ont été soustraites les sept années passées en prison pendant le procès. Il était donc admissible à la libération conditionnelle trois ans plus tard, mais la demande qu'il a présentée en 2002 a été rejetée. Il a été libéré sous condition en 2005. Le 24 février 2008, Francis a été trouvé en possession de 33 grammes de crack et, en mai 2008, il a été condamné à 7 mois et demi de prison pour plusieurs infractions liées aux drogues...
    Je parlerai plus tard du volet drogues du projet de loi C-5, mais certainement pas en lien avec cet article.
...Grant a été expulsé du Canada vers sa Jamaïque natale, où il a été tué par balle le 29 octobre 2007.
    C'est un exemple, monsieur le président.
    J'en ai un autre. Quelqu'un se souvient-il de la fusillade du lendemain de Noël au centre-ville de Toronto, au coin de Yonge et Dundas? C'est l'une des zones commerciales les plus achalandées de tout le Canada. Je parle de l'affaire Jane Creba. Cette fusillade:
qui était liée à un gang canadien...
    Cette affaire relevait également de l'article 244.
...a eu lieu le 26 décembre 2005, sur la rue Yonge, à Toronto, entraînant la mort de Jane Creba, une étudiante de 15 ans.
    Elle avait eu le malheur de prendre l'argent que ses parents et sa famille lui avaient offert pour Noël et de descendre la rue pour aller au magasin de disques. Toronto avait des magasins de disques sur la rue Yonge en 2005.
(2045)
     Elle n'est jamais arrivée au magasin de disques. Elle n'a jamais dépensé son argent de Noël.
    Elle n'a pas été la seule victime, monsieur le président. Six autres passants — quatre hommes et deux femmes — ont été blessés.
    Je ne veux pas manquer de respect à M. Morrice. Je pense que c'est un homme bien et un bon parlementaire. J'ai beaucoup de respect pour lui. C'est la position de son parti que je critique, monsieur, pas lui.
    Entre cet incident et l'amendement, il y a vraiment un décalage par rapport à ce que nous essayons de faire ici. Notre objectif n'est pas de faciliter la vie de ceux qui se lèvent le lendemain de Noël pour aller tirer au hasard dans l'une des zones les plus achalandées du pays.
     Dois-je préciser que Jane Creba n'était pas la victime visée? Il y avait à proximité une autre personne apparentée à un gang. Soyons honnêtes: mis à part l'exemple des deux jeunes gens qui se trouvaient à l'extérieur du dépanneur de Brantford et qui étaient de bons tireurs, ce sont des armes illégales qui sont employées dans les activités liées aux gangs et les fusillades. Ce ne sont pas des armes d'épaule. On ne se pointe pas avec une arme d'épaule chez un dépanneur en disant: « Hé, je vais te braquer. » On veut dissimuler cette arme. Et on ne peut pas dissimuler une arme d'épaule.
    En l'occurrence, ce que je veux dire, c'est que ces criminels ne sont pas pourvus. Ils n'ont pas de formation. Ce ne sont pas des tireurs experts. Ils se contentent de tirer dans tous les sens en espérant qu'une balle puisse atteindre leur cible. Et, en l'occurrence, ce n'est pas la cible qui a été atteinte. Le tireur a tué Jane Creba, 15 ans. Six autres passants — quatre hommes et deux femmes — ont été blessés.
    L'histoire a suscité une couverture médiatique nationale au Canada et a orienté la campagne électorale fédérale de 2006, alors en cours, vers les enjeux liés aux crimes commis avec arme à feu et à la violence dans les rues.
    La police a arrêté deux hommes accusés de plusieurs infractions liées à des armes à feu à la station de métro de Castle Frank dans l'heure qui a suivi la fusillade: Andre Thompson, 20 ans, qui était en probation à l'époque, et Jorrell Simpson-Rowe, 17 ans. Thompson avait été libéré juste avant Noël de la prison de Maplehurst, près de Milton, où il avait purgé 30 jours pour avoir participé à un vol chez un dépanneur. Il a refusé une audience de cautionnement pour les nouvelles accusations. La police estime que 10 à 15 personnes ont participé à la fusillade et que plusieurs armes ont été utilisées.
    Vingt détectives de la police de Toronto ont été affectés au dossier dans le cadre du projet Green Apple. Le projet a été nommé Green Apple parce que Jane adorait les pommes vertes. Au petit matin du 13 juin 2006, la police de Toronto a effectué de multiples descentes dans 14 endroits de Toronto, arrêtant six hommes et deux adolescents. Ils ont été accusée, selon le cas, d'homicide involontaire coupable, de meurtre au deuxième degré et de tentative de meurtre contre les six autres passants. Toutes les personnes arrêtées faisaient partie de deux gangs de rue différents.
    En octobre 2007, Eric Boateng, un jeune homme qui avait été raflé dans le cadre de l'arrestation initiale, a été abattu au cours d'un incident apparemment sans rapport. Boateng n'avait pas été accusé de fusillade, mais avait été accusé plus tard de trafic de cocaïne.
(2050)
     C'est dommage, je suppose, que cela ne se soit pas produit en 2022, parce qu'il aurait pu être condamné à une peine avec sursis. Mais je parlerai de cet aspect du projet de loi C-5 en temps et lieu.
    En décembre 2007, 10 personnes ont été accusées de meurtre ou d'homicide involontaire coupable, dont trois étaient des adolescents. Tyshaun Barnett et Louis Woodcock, tous deux âgés de 19 ans, Jeremiah Valentine, 24 ans, et Jorrell Simpson-Rowe, 17 ans au moment de la fusillade, ont été accusés de meurtre au deuxième degré.
    L'un des adolescents arrêtés en juin et accusés d'homicide involontaire coupable a été disculpé le 25 octobre 2007, après l'audience préliminaire. L'adolescent accusé de meurtre a été traduit devant les tribunaux. Le 7 décembre 2008, Jorrell Simpson-Rowe — auparavant connu sous le nom de JSR parce que la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents interdit la divulgation de l'identité des mineurs — a été déclaré coupable de meurtre au deuxième degré par un jury. En avril 2009, il a été condamné comme adulte à l'emprisonnement à perpétuité, sans possibilité de libération conditionnelle avant sept ans.
    En novembre 2009, les accusations d'homicide involontaire coupable portées contre quatre personnes impliquées dans l'incident ont été abandonnées, parce que les procureurs estimaient qu'il ne serait vraisemblablement pas possible de les faire condamner.
    À ce sujet, j'insiste vraiment sur le principe du pouvoir discrétionnaire d'intenter des poursuites, monsieur le président, mais, en plus de ce principe de base, nous sommes également liés par deux règles. Tout procureur doit se poser deux questions.
    Premièrement: est-il dans l'intérêt public de donner suite à l'affaire? Il s'agit généralement d'une analyse à très faible seuil, monsieur le président. Il suffit de regarder la taille du Code criminel, qui représente toutes les lois du pays. Compte tenu des multiples façons de commettre des infractions criminelles, il est facile de comprendre que les accusations vont des vraiment moins graves aux vraiment plus graves, dont le meurtre. J'ai eu souvent l'occasion d'exercer mon pouvoir discrétionnaire en me demandant si la poursuite servait l'intérêt public et de conclure, monsieur le président, qu'il y a peut-être — pour reprendre le langage du gouvernement libéral — des situations où de bonnes personnes prennent de très mauvaises décisions lors d'une mauvaise journée. Il m'est arrivé, en lisant le dossier de la Couronne, de me dire qu'il était inutile de consacrer toutes ces ressources publiques en temps et en argent — mon temps, celui des juges, celui des policiers chargés de la surveillance et de la sécurité, et celui des greffiers de la cour et des autres employés qui traitent les documents — à telle ou telle poursuite.
    Cela ne s'est pas produit souvent, monsieur le président. Je peux probablement compter sur les doigts des deux mains le nombre de fois où, en 18 ans, je n'ai pas répondu à la question par l'affirmative, et j'ai toujours eu l'appui de M. Naqvi, mon patron ultime à l'époque, pour justifier la décision de retirer l'affaire du volet des poursuites criminelles. C'est la première question qu'on se pose comme procureur.
    La deuxième question est vraiment importante, parce qu'il faut se la poser très souvent tout au long du processus d'accusation criminelle.
(2055)
     Comme je l'ai indiqué au Comité, certaines affaires peuvent être réglées très rapidement, peut-être en deux ou trois mois. D'autres, avec l'avènement des litiges fondés sur la Charte — comme vous l'avez entendu quand j'ai lu le cas du congédiement, de la réembauche, du congédiement et de la réembauche de l'avocat de la défense — peuvent traîner pendant des mois, voire des années, mais tout au long de ce processus, à chaque point déterminant de cette poursuite en particulier, comme procureurs, nous devons nous demander s'il existe une perspective raisonnable d'obtenir une condamnation.
     J'ai posé cette question le premier jour où j'ai reçu un mémoire de la Couronne de gens comme mon collègue, M. Morrison, à l'époque où il œuvrait dans le domaine de l'application de la loi, jusqu'au jour où j'ai reçu d'autres documents de sa part ainsi que d'autres agents d'application de la loi aux vues similaires. C'en est au point où j'entamerais des discussions avec l'avocat de la défense, ou peut-être des discussions réfléchies et productives avec mes collègues, parce que, même si nous avons tous des diplômes en droit et que nous avons tous la même formation en droit pénal — surtout dans le cas du Bureau du procureur général où nous avons de nombreuses occasions de formation continue dans le domaine juridique —, certains retiennent davantage de choses que d'autres. Dans les affaires importantes, il m'arrivait souvent d'être jumelé à un autre collègue et nous échangions tout simplement des idées. On peut toujours dire: « Je considère qu'il s'agit d'une affaire où il y a une chance raisonnable d'obtenir une condamnation », mais un confrère ne verra peut-être pas les choses de la même façon.
     Encore une fois, le service des poursuites de la Couronne évalue, réévalue, accueille avec satisfaction et reçoit constamment d'autres renseignements de la part des organismes d'application de la loi et de l'avocat de la défense, à qui il incombe souvent de présenter le meilleur dossier possible pour son client ou sa cliente. Dans le cas particulier d'un délinquant autochtone ou d'un délinquant marginalisé, il me faut parler de son éducation si l'on espère que j'abandonne complétement la poursuite, ce qui est une pilule très amère pour moi à avaler et, bien franchement, qui est contraire à la politique de l'Ontario concernant les procureurs de la Couronne, parce que notre politique était très claire: s'il existe une possibilité raisonnable d'obtenir une condamnation, chaque infraction liée aux armes à feu doit faire l'objet de poursuites, et l'on ne peut déroger à cette politique qu'avec la permission de son gestionnaire du service des poursuites.
    Monsieur le président, cela s'est produit, et cela m'est arrivé à quelques reprises avec des délinquants autochtones. Comme je vous l'ai dit, Brantford a un tribunal Gladue, le tribunal autochtone, et je me souviens très bien de cette affaire. Il s'agissait d'une personne qui avait un lourd casier judiciaire, non seulement au Canada, mais aussi aux États-Unis, et qui répondait à tous les critères Gladue auxquels on peut penser: famille instable, absence d'emploi, manque d'éducation, insécurité alimentaire et liens avec le système des pensionnats. Chaque marqueur était coché.
    Monsieur le président, il s'est retrouvé en possession d'une arme à feu chargée. Il ne l'a pas utilisée, mais selon le libellé du projet de loi C-5, il était passible d'une peine minimale obligatoire. Cependant, dans ce cas particulier, nous avons entamé une discussion poussée non seulement au sujet de l'infraction, mais aussi au sujet du délinquant et de la façon dont, selon moi, les tribunaux autochtones, les tribunaux Gladue, fonctionnent. Il est évident que nous n'avons pas assez de tribunaux Gladue au Canada. En toute honnêteté, je pense que le gouvernement devrait envisager de les rendre obligatoires. Je sais qu'il devra travailler avec divers ministères provinciaux pour mettre cela en œuvre. Il y a des avantages pour ces délinquants, monsieur le président, et le projet de loi C-5 ne fait qu'effleurer la surface.
(2100)
    Dans ce cas particulier, j'ai entendu son histoire. C'est une occasion que n'avait pas les procureurs de la Couronne avant. En fait, j'avais déjà poursuivi cette même personne pour une infraction différente deux ou trois ans plus tôt. Je ne me souvenais pas de lui, mais lui se souvenait certainement de moi.
    À la façon dont le tribunal autochtone fonctionne, le délinquant n'est pas tenu d'admettre sa culpabilité. Normalement, l'acte d'accusation est lu à haute voix au justiciable qui décide alors de plaider coupable ou non coupable. Devant un tribunal autochtone, on part du principe que la personne accusée agit de son plein gré et accepte ses responsabilités et qu'elle doit normalement plaider coupable, mais nous examinions attentivement les circonstances de l'infraction et la situation du délinquant pour déterminer la meilleure peine à lui infliger. En l'occurrence, il n'a pas été mis en accusation. Nous étions tous dans un cercle, parce que le concept du tribunal autochtone est d'éliminer les obstacles.
    Des témoins qui ont comparu devant le Comité ont dit que les Autochtones ne font pas confiance au système de justice pénale. Ils ont leur Grande loi. Nous avons notre Code criminel. Les deux systèmes ne pourraient être plus diamétralement opposés, et parce qu'ils le sont, il y a une méfiance inhérente.
    Les deux pionniers du tribunal autochtone dans la région de Brantford étaient la juge Colette Good, une ancienne procureure de la Couronne à Brantford, et un autre juge dont le nom m'échappe pour l'instant. Il me reviendra. Ce sont aussi des Autochtones. Tout le concept est né de l'idée de rendre la justice différemment pour nos délinquants autochtones.
    Monsieur le président, la Brantford Indigenous People's Court existe depuis plus de 10 ans dans la région de Brantford. Il y a une dizaine d'années, voire plus, nous savions que la surreprésentation dans les prisons était un problème. La magistrature de Brantford a immédiatement pris des mesures pour remédier à la situation.
    Une partie de la composition du tribunal autochtone est que les juges ne se présenteraient pas dans cette salle avec leur toge. Ils enlèveraient la toge noire. Ils enlèveraient leur ceinture rouge. Ils enlèveraient leur rabat et se présenteraient en tenue de ville.
    Nous savons tous à quoi ressemble un tribunal pénal. quand on entre, on voit des rangées de sièges, on voit ce qu'on appelle la balustrade qui sépare les avocats et le personnel du public. Il y a la barre, une ouverture, des chaises pour les avocats de la défense et de la Couronne, des tables, le greffier du tribunal et le sténographe judiciaire. Et puis, il y a ce qu'on appelle la tribune. C'est là que les juges siègent.
    M. Anandasangaree le sait parce qu'il est avocat.
    M. Gary Anandasangaree: Je ne le savais pas.
    M. Larry Brock: D'accord, je suis heureux que vous appréciiez. C'est instructif, n'est-ce pas?
    Monsieur le président, cette tribune est probablement — je ne sais pas — surélevée de 10 pieds. Cela crée une barrière psychologique, un obstacle que les juges de ce tribunal voulaient éliminer. Ils ont insisté pour que, lorsqu'ils se présentent au tribunal, ils entrent directement dans un cercle.
(2105)
     Le cercle a été conçu autour de la notion de respect mutuel et pour tenir compte des traditions autochtones. Quand des décisions importantes sont prises en compagnie d'aînés, de membres de la famille et de personnes de l'extérieur, il faut un cercle afin qu'il y ait une compréhension et une chaîne de communication qui ne sera pas brisée par la circulation des gens dans la salle d'audience.
    Nous avions aussi l'avantage de détenir une plume d'aigle. La plume d'aigle est très importante pour les hommes, les femmes et les enfants autochtones parce qu'elle représente leur lien avec notre mère la Terre. Elle est un lien des consciences qui leur permet de s'exprimer librement sur une question sans préjugé, sans crainte, sans critique. La seule façon pour ces cercles autochtones de fonctionner, c'est de briser les normes traditionnelles d'un cadre criminel traditionnel.
    Ces cercles sont ouverts par un gardien du savoir autochtone. Dans la bande des Six Nations de Grand River, on comptait probablement une demi-douzaine de gardiens du savoir autochtone qui assistaient régulièrement au tribunal autochtone. Nous tenions ces tribunaux deux ou peut-être trois fois par mois. Les gardiens du savoir autochtone étaient présents et ouvraient la cérémonie en s'exprimant dans leur langue autochtone. Ils traduisaient ensuite pour les membres non autochtones du cercle. Très souvent, ils parlaient d'ouvrir son âme, son esprit et ses oreilles pour accepter l'information qui allait être communiquée, pour abandonner le rôle juridique traditionnel, pour faire partie du cercle et pour avoir une compréhension claire.
    Après l'ouverture, la plume d'aigle est transmise de l'un à l'autre dans le sens contraire des aiguilles d'une montre — je ne sais pas ce que cela signifie, mais il y a une signification — et chacun peut parler, mais quand vient son tour seulement et après avoir reçu la plume d'aigle. La plume circule plusieurs fois et le premier tour consiste simplement à se présenter au délinquant. Très souvent, des membres de la famille du délinquant sont présents mais il arrive qu'il n'y ait personne. Il y a aussi des représentants des organismes sociaux qui s'occupent des délinquants autochtones dans le système de justice pénale de Brantford.
    Quand j'avais la plume au premier tour, je m'identifiais, je précisais mon rôle professionnel et j'informais le délinquant que c'était une présentation où on ne portait pas de jugement et que je n'étais pas là pour critiquer. J'étais là pour écouter et apprendre, et je voulais être dans une position où j'étais muni de tous les outils nécessaires pour m'acquitter de ma responsabilité et exercer mon pouvoir discrétionnaire si c'était justifié. Je l'expliquerais au délinquant.
     Je viens de vous donner un aperçu du tribunal autochtone. Au cours de cette première série de questions, je parlerai plus précisément de l'affaire à laquelle je fais allusion. En l'occurrence, le délinquant que j'ai...
(2110)
    Je crois qu'il y a un rappel au Règlement.
    Non. Je suis désolé.
     Ce délinquant, qui avait un casier judiciaire ici et aux États-Unis, faisait face à une grave accusation. Il m'a demandé si je me souvenais de lui. J'ai répondu que non et lui ai demandé si je devais.
     Il a dit que je l'avais poursuivi au criminel. Il m'a dit que je m'étais fiché de lui il y a deux ans. Il a dit exactement que je me fichais de lui il y a deux ans, alors pourquoi devrait-il m'écouter maintenant?
    C'est une remarque juste. Neuf fois sur dix, si ce n'est 99 % du temps, l'accusé a un avocat qui le représente. Il y a des règles de déontologie, monsieur le président, que vous connaissez en tant qu'avocat vous-même, comme l'exige le Barreau de votre province. En ma qualité d'avocat de la Couronne, je ne pouvais pas simplement aller voir un délinquant et le forcer à me parler. Il s'en souvenait. Ce qu'il voulait dire, c'est que je m'en fichais, alors que je n'avais pas la capacité de lui poser des questions ou de lui parler. Peut-être ne savait-il pas que j'avais l'obligation éthique de ne pas le faire.
    En toute franchise, tous les avocats du Comité qui ont eu affaire à un tribunal pénal chargé de nombreux dossiers savent que l'on n'a pas cette possibilité. Bon an mal an, monsieur le président, je traitais 30 à 40 affaires par jour. Il n'est pas possible d'apprendre à connaître un délinquant. Je lui ai dit que sa remarque était juste, mais que le modèle que nous avions était très différent et je lui ai expliqué en quoi il était différent.
    Au deuxième tour, pour la première fois de ma vie, j'ai directement parlé au délinquant, je l'ai pointé du doigt et je lui ai demandé à quoi il avait bien pu penser. Qu'est-ce qui l'avait poussé à saisir cette arme chargée ce jour-là? Quelles étaient les circonstances?
    Encore une fois, je n'avais jamais eu l'occasion de le faire comme procureur de la Couronne, sauf dans le cadre d'un procès. Il avait la possibilité de témoigner, mais il n'y était pas tenu selon la Constitution. En tout temps, le fardeau de la preuve, hors de tout doute raisonnable, incombe au procureur de la Couronne. Jusqu'à ce qu'un juge rende une décision, les accusés ont le luxe de la présomption d'innocence. Ils ne sont pas obligés de fournir une défense. Ils n'ont pas à réfuter quoi que ce soit. Ils peuvent attendre patiemment dans l'ombre et déterminer si M. Brock, la Couronne ou tout autre procureur de la Couronne a établi tous les éléments essentiels de l'infraction.
    C'était différent, et il a reconnu la différence. Tout se déroulait lentement, comme quand on pèle les couches d'un oignon. Il y avait mes questions. Le juge et l'avocat du délinquant posaient des questions semblables. Le gardien du savoir essayait de comprendre pourquoi il s'engageait, comme fier membre d'un clan autochtone, dans ce genre de comportement criminel. Les membres de la famille étaient là.
    Ces événements étaient très émouvants, monsieur le président. Bien des fois, je n'en croyais pas mes oreilles parce que nous allions vraiment au cœur du problème, ce que l'on ne peut pas faire dans un procès normal. On n'obtiendrait jamais cela simplement en lisant un rapport Gladue. On n'obtiendrait jamais cela simplement en écoutant l'avocat de la défense parler de la situation de son client, de ses antécédents.
    Une fois que vous avez vécu ce genre... d'éveil de conscience, si je peux m'exprimer ainsi, et que vous cherchez à savoir pourquoi l'accusé a eu des démêlés avec la justice, vous passez au tour suivant et vous cherchez des façons qui permettraient au délinquant de tirer des leçons de cet exercice particulier.
(2115)
     Encore une fois, c'est un concept qui n'a rien à voir avec le modèle traditionnel de justice pénale. Si, comme poursuivant, vous réussissez à obtenir une condamnation ou un plaidoyer de culpabilité, après le procès, vous ne vous demandez pas pourquoi. Vous ne mettez pas en doute les mesures que l'accusé va prendre pour sa propre réadaptation.
    Je sais que la réadaptation est un élément important de la détermination de la peine dans tous les cas, mais dans un système pénal traditionnel, elle n'est pas toujours aussi importante que les autres principes de détermination de la peine, en particulier dans les domaines que j'ai mentionnés par ailleurs — il y a plusieurs heures de cela —, quand j'ai parlé du fait que des juges ont réclamé à maintes reprises des principes de détermination de la peine qui appliquent des peines exemplaires pour les infractions liées à des armes à feu et qui envoient un message dissuasif très senti au délinquant et à la communauté: si vous vous adonnez à de telles activités, vous devez vous attendre à recevoir une peine d'emprisonnement, et ce n'est pas seulement au Canada. J'ai fait des recherches dans la jurisprudence sur d'autres affaires plus importantes au pays.
    Pour revenir au cercle autochtone, j'ai pu entendre ce que le délinquant avait pensé faire dans sa vie. Il a été très franc. Je pense qu'il a été grand-père à de nombreuses reprises. Je crois qu'il était dans la soixantaine à ce moment-là. Il a subi des sévices horribles, physiques et sexuels, tant en dehors du système de justice pénale que comme délinquant. Sa situation était beaucoup plus grave aux États-Unis. Il a été mêlé à une affaire de détournement de voiture à Buffalo quand il n'était qu'un jeune contrevenant — je crois qu'il a dit qu'il avait 14 ou 15 ans à l'époque— avec deux amis adultes qui avaient 18 ans. Il a été jugé comme adulte et condamné comme adulte. Il a eu des difficultés. J'oublie dans quel établissement il était, mais vous pouvez imaginer les horreurs qu'il a vécues comme jeune garçon dans une population adulte de sexe masculin. Il n'a eu aucun problème à raconter cela et à faire part de ce terrible chapitre de sa vie, mais il en avait eu assez. Il en avait eu assez.
    Monsieur le président, si j'avais reçu un dollar pour chaque délinquant ayant dit: « Cette fois, ce sera différent, monsieur le juge; j'ai appris ma leçon, vous ne me reverrez plus jamais, monsieur le juge », je serais probablement à la retraite depuis longtemps. Ce sont des paroles creuses.
    C'est à peu près le même genre de discours hypocrite que j'entendais tous les jours dans les séances de libération sous caution, où l'on promettait au juge de paix: « Oh, mettez autant de conditions que vous le voulez, je vais tout respecter. Je respecterai la détention à domicile. Je vais m'abstenir de prendre de l'alcool. Je vais m'abstenir de prendre de la drogue. Je ne harcèlerai pas ma petite amie, même si je l'ai fait 10 fois. » On promet mer et monde juste pour obtenir sa libération, mais c'est du vent. C'est une promesse creuse. J'ai vécu cela en justice pénale également.
    C'était différent au tribunal autochtone. Je l'ai écouté. Par respect, je ne vais pas mentionner le nom du délinquant. Je lui ai dit: « Vous allez devoir me pardonner de ne pas vous croire. Vous devrez me pardonner si j'ai un doute. » J'ai expliqué pourquoi j'avais des doutes, mais j'ai dit: « Vous semblez sincère, alors je vais vous lancer un défi. Vous avez parlé de poursuivre vos études. Vous avez parlé d'obtenir du counselling pour vos problèmes de toxicomanie. » Je pense qu'il avait une dépendance à la méthamphétamine en cristaux ou à quelque chose du genre — une drogue dure. J'ai ajouté: « Vous avez parlé de trouver du travail. Vous avez parlé d'être un modèle pour vos petits-enfants. Vous reconnaissez que pour être un modèle, vous devrez avoir un logement stable. »
    Il s'est engagé à le faire.
(2120)
     Cette affaire a probablement duré deux bonnes années. Normalement, une personne qui accepte une responsabilité de ce genre de chose aurait fait des va-et-vient dans le système de justice pénale pendant deux ou trois mois et aurait purgé une peine dans un établissement bien avant la fin de cette affaire.
    Il a fait tout ce qu'il avait l'intention de faire. Il m'a non seulement montré des attestations de présence, mais il m'a aussi montré des certificats indiquant qu'il s'était donné à fond dans tout ce qu'il avait dit qu'il ferait. Il est venu muni de lettres de référence morale de l'établissement et des organismes auxquels où il était passé. Il s'était trouvé un emploi. Il recevait une paie régulière. Il avait tourné une page importante.
    Monsieur le président, j'en suis venu à me demander: « J'ai toute cette latitude. J'ai maintenant vu un délinquant qui était sincère dans tout ce qu'il disait vouloir faire pour changer sa vie. Est-ce que je crois qu'il y a plus qu'une perspective raisonnable que je ne le reverrai plus jamais dans le système de justice pénale? » J'ai conclu que c'était le cas. Grâce à la discussion que j'ai eue avec mon gestionnaire du service de la Couronne et d'autres collègues, nous avons pu formuler une peine qui responsabilisait toujours le délinquant, mais qui lui évitait d'aller dans un établissement traditionnel.
    À tous les membres du Comité qui estiment que le projet de loi C-5, dont nous débattons actuellement, est la réponse à toutes ces questions, je vous ai donné un exemple de mesures que les procureurs de la Couronne prennent quotidiennement, et ils prennent leur travail très au sérieux. Il y a d'autres façons de régler le problème de la surreprésentation des Autochtones dans les prisons sans compromettre la sécurité de la collectivité. C'est l'exemple que je voulais vous donner.
    Je me suis souvent demandé quand et où je devrais soulever cette question, et maintenant que j'ai cela en tête, je ne veux pas perdre le fil de ma pensée.
    Nous avons entendu à maintes reprises au Comité, non seulement des témoins, mais aussi des membres du Comité, le procureur général, tous les autres ministres de premier plan, les députés d'arrière-ban, les membres du Parti vert, Mme May et M. Morrice aujourd'hui, nous dire que nous devrions faire confiance à nos juges, que les juges savent mieux que quiconque et qu'ils doivent avoir ce pouvoir discrétionnaire pour faire leur travail. Je suis membre du Barreau de l'Ontario depuis plus de 30 ans, et quand je dis ce que je suis sur le point de dire, je ne veux absolument pas manquer de respect à la magistrature.
     J'ai comparu devant de nombreux juges au cours de ma vie, monsieur le président. Ils ne sont, pas plus que les procureurs de la Couronne, des robots ambulants. Ils ne pensent pas tous la même chose. Ils ne prononcent pas tous les jugements de la même façon. Pour cette raison, nous avons des cours d'appel, selon l'accusation et le choix de la Couronne de procéder par procédure sommaire. Parfois, la voie d'appel est la Cour supérieure de justice — la Cour du Banc de la Reine pour mes collègues de l'Ouest —, les diverses cours d'appel provinciales ou, en fin de compte, la Cour suprême du Canada.
    Les juges ne pensent pas la même chose. Ils n'appliquent pas la loi de la même façon. Il y a des juges qui ont acquis des réputations — cléments, sévères ou entre les deux.
(2125)
     Je vais vous donner un autre exemple.
    Il y avait une juge au tribunal de première instance de Brantford — encore une fois, je ne vais pas répéter son nom, par respect. Je sais que vous aimeriez que je le fasse, monsieur Anandasangaree, mais je ne le peux tout simplement pas, par respect.
    C'était extrêmement frustrant pour les procureurs de la Couronne, très frustrant pour nous, parce qu'il semblait — c'était une juge — qu'elle avait une perception différente de la justice pénale et qu'elle accordait toujours la priorité aux principes de la réadaptation. Elle disait: « Il s'agit d'une infraction qui entraîne »...
    Mme Lena Metlege Diab: Seule une femme le ferait.
    M. Larry Brock: Pas nécessairement. J'ai d'excellents exemples de femmes juges dont je peux vous faire parler, madame Diab, et je le ferai par la suite. Ce sont de très bons exemples, mais je pense que vous allez aimer cet exemple. Cela nous ramène au récit et au commentaire de M. Morrice selon qui nous devrions faire confiance à nos juges.
    Y a-t-il un rappel au Règlement?

[Français]

    Monsieur le président, si cela fonctionne comme à la Chambre, je vous prierais de regarder l'horloge. Vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour dire qu'il est 21 h 30 et qu'il est assez tard pour arrêter la réunion.

[Traduction]

    Je n'ai pas entendu l'interprétation de ce que M. Fortin a dit. Cependant, comme...
    Je parie que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour dire qu'il est 21 h 30 et que nous devrions arrêter.
    Bonne remarque. Je me fie à mon horloge. Je crois qui avance de deux ou trois minutes, mais si c'est un moment opportun, nous allons...
    J'invoque le Règlement.
    J'aimerais vous faire part de trois faits concernant l'amendement PV-17.
    Je peux vous accorder deux minutes, si cela vous suffit, puis nous devrons suspendre la séance, puisqu'il est 21 h 28.
    Je comprends.
    En ce qui concerne l'amendement PV-17 de Mme May, M. Brock a parlé de l'arrêt Nur. Je tiens simplement à dire au Comité que, dans l'arrêt Nur, dans le résumé de la Cour suprême du Canada sur les peines minimales obligatoires, la citation est la suivante: « La preuve empirique indique que, dans les faits, les peines minimales obligatoires ne sont pas dissuasives. »
    Deuxièmement, M. Brock s'est dit préoccupé par le fait que le gouvernement ne donne pas suite aux appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation du Canada. Permettez-moi de vous lire l'appel à l'action no 32 de la Commission de vérité et réconciliation:
Nous demandons au gouvernement fédéral de modifier le Code criminel afin de permettre aux juges de première instance, avec motifs à l'appui, de déroger à l'imposition des peines minimales obligatoires de même qu'aux restrictions concernant le recours aux peines d'emprisonnement avec sursis.
    Je crois que M. Brock a encouragé plus tôt le Comité à donner suite aux appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation.
    Enfin, il y a eu une question au sujet des autres amendements du Parti vert, comme l'amendement PV-17.
    Je signale que le Black Legal Action Centre, l'Association canadienne des sociétés Elizabeth Fry et le Fonds d'action et d'éducation juridiques pour les femmes ont tous demandé l'élimination des peines minimales obligatoires.
    Merci, monsieur le président, de m'avoir donné l'occasion d'intervenir.
    Monsieur le président, puis-je mettre la motion aux voix pour que nous puissions en disposer?
    Il nous reste une trentaine de secondes.
    S'il n'y a pas d'objection, nous pouvons en disposer ce soir. Nous sommes prêts à [Inaudible]
(2130)
    À procéder à un vote sur la...
    J'allais aussi prendre la parole au sujet de cette motion.
    Comme il y a d'autres intervenants au sujet de cet amendement, monsieur Anandasangaree, nous allons mettre fin à la réunion.
    La séance est levée.
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