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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 076 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 5 octobre 2023

[Enregistrement électronique]

(1630)

[Traduction]

    Je remercie tout le monde. Merci pour votre patience. Je sais que la réunion aurait dû commencer il y a une heure, mais j'ai fait des rajustements en conséquence.
    Il est inutile de présenter le premier groupe puisque ce sont les mêmes personnes qu'à la dernière réunion. Je vous remercie d'être revenus.
    Je vais dire vos noms. Matthew Taylor et Joanna Wells, vous étiez présents lors de la dernière réunion.
    Pour répondre à M. Fortin, oui, il y a un témoin qui va comparaître virtuellement. Un test technique a été effectué, tout fonctionne bien.
    Merci, madame la présidente.
    J'espère que je ne suis pas le seul à en tirer parti.
    Non, c'est un bon point.
    Voici comment nous allons procéder, nous ferons un seul tour de table de quatre minutes chacun avec les témoins. Nous vous présentons nos excuses pour ce retard.
    Bienvenue à la réunion numéro 76 du Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes.
    Conformément à l'ordre de renvoi adopté par la Chambre le 5 octobre 2023, le Comité se réunit en public pour poursuivre son étude sur la teneur du projet de loi S‑12.
    Après le témoignage du premier groupe, je vais demander une motion sur le projet de loi S‑12, mais, vu notre retard, nous commencerons par interroger les témoins pendant quatre minutes chacun.
    J'invite M. Van Popta à prendre la parole.
    Merci, madame la présidente, et merci aux témoins d'être avec nous aujourd'hui.
    En notre nom à tous, je vous présente mes excuses pour le retard. Nous avions du travail très important aujourd'hui à la Chambre des communes, car le projet de loi S‑12 qui nous occupe aujourd'hui a été mis aux voix. Je vous remercie de participer à cette importante discussion et de nous faire bénéficier de votre expertise.
    Le projet de loi S‑12 vise à modifier des articles du Code criminel se rapportant au Registre national des délinquants sexuels. La discussion a été initiée dans la foulée de la décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire R. c. Ndhlovu.
    Permettez-moi de lire un extrait de la décision minoritaire. Il s'agit d'une décision partagée à cinq contre quatre. Les juges minoritaires citent des éléments de preuve qui, apparemment, ont été présentés au juge du procès. Selon eux, les délinquants déclarés coupables d’une infraction sexuelle sont de cinq à huit fois plus susceptibles de récidiver que ceux qui ont été déclarés coupables d’une infraction de nature non sexuelle ». Ils ajoutent « qu’on ne peut prédire de manière fiable, au moment de la détermination de la peine, quels délinquants récidiveront ». Ils arrivent ensuite à la conclusion suivante: « Compte tenu de ce risque incertain, le Parlement était en droit de ratisser large ».
    L'autre jour, le ministre de la Justice a témoigné devant le comité. Il a mentionné des données issues des sciences humaines qui, selon lui, appuient le projet de loi S‑12. Selon moi, cette mesure législative renferme des normes moins strictes en ce qui concerne l'inscription obligatoire des personnes au Registre des délinquants sexuels.
    Connaissez-vous les données auxquelles le ministre faisait référence? Sont-elles en contradiction avec les preuves qui ont apparemment été présentées au juge du procès et auxquelles les juges minoritaires se réfèrent?
    Je répondrai à cette question en réitérant les propos du ministre lorsqu'il a comparu devant le comité. Advenant que le projet de loi S‑12 soit adopté, l'inscription sera obligatoire pour toute personne reconnue coupable d'une infraction sexuelle, à moins de pouvoir démontrer que cette inscription aura un effet nettement démesuré ou exagéré. Il s'agit d'une très forte présomption d'inscription pour ces délinquants.
    Les données que vous citez, que font valoir les juges minoritaires, sont les arguments que le procureur général du Canada a invoqués devant la Cour suprême quand il est intervenu pour défendre la loi lors de l'audience à ce sujet devant la Cour suprême. Ces données étaient insuffisantes pour faire respecter la loi. On se fie désormais à des données liées aux deux catégories entraînant une inscription automatique. Il y a les récidivistes sexuels, qui présentent un risque de récidive plus grand que les personnes qui en sont à leur première infraction et qui étaient visées par la loi initiale.
    La deuxième catégorie se rapporte aux enfants — aux victimes de moins de 18 ans, car l'intérêt sexuel envers les enfants est un facteur de risque bien corroboré de récidive sexuelle. On s'attend à ce que tous ces facteurs, jumelés à la peine de prison de deux ans ou plus par mise en accusation, donnent au gouvernement les éléments de preuve nécessaires pour justifier les deux catégories d'inscription automatique.
    Cependant, toute personne sera présumée inscrite.
    Je veux parler des infractions sexuelles commises contre des enfants.
    Le projet de loi S-12 exige l'inscription du nom de toute personne reconnue coupable d'une infraction sexuelle contre un enfant, mais seulement si cette personne a été poursuivie par mise en accusation et a été condamnée à une peine d'emprisonnement d'au moins deux ans.
    Pourquoi n'est-ce pas le cas pour les délinquants — les agresseurs d'enfants — qui ont fait l'objet de poursuites par procédure sommaire? Ne sont-ils pas tout aussi dangereux?
    Veuillez répondre rapidement, s'il vous plaît.
    Ils seront présumés inscrits conformément aux propositions contenues dans le S-12. Voilà la réponse. On les présume tous inscrits.
    Le projet de loi énumère également les facteurs de risque que les juges peuvent utiliser pour exercer leur pouvoir discrétionnaire. Ces facteurs se veulent une réponse aux critiques et aux préoccupations soulevées dans le jugement minoritaire, afin d'atténuer le risque que les juges dissidents voient dans l'exercice du pouvoir judiciaire discrétionnaire.
(1635)
    Merci beaucoup.
    Je donne maintenant la parole à M. Mendicino.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie les fonctionnaires de leur présence.
    J'ai cru comprendre, M. Taylor, que votre anniversaire était hier?
    Joyeux anniversaire.
    Je prends un instant pour remercier les survivants et les victimes qui sont ici pour témoigner. Au nom des membres du Comité et de tous les parlementaires, je vous remercie de vos efforts pour défendre cette cause. Selon mon expérience — non seulement dans le cadre de mes fonctions actuelles sur la Colline, mais aussi de ma carrière antérieure au sein du système de justice pénale —, je peux vous dire que votre travail est incroyablement important pour ce projet de loi. Nous vous remercions très sincèrement des idées que vous présenterez plus tard aujourd'hui.
    Chers collègues, nous savons que le projet de loi S‑12 a trois objectifs: renforcer la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels, apporter certaines modifications à la Loi sur le transfèrement international des délinquants et, enfin, renforcer certains des droits qui devraient être accordés aux victimes dans le cadre de procédures judiciaires. Je pense que nous nous entendons tous pour dire qu'il reste encore beaucoup de travail à faire dans ce dossier.
    Je vais me concentrer sur les préoccupations qui ont été soulevées par les défenseurs des droits des victimes et les survivants eux-mêmes à propos de l'obtention de renseignements précis et opportuns sur les demandes touchant des interdictions de publication. Il y a quelques jours, le ministre nous a fait part de préoccupations au sujet d'un des amendements proposés par le Sénat, qui exigerait que les procureurs de la Couronne communiquent directement avec les victimes pour leur donner de l'information sur ces interdictions de publication.
    Avant d'entrer dans les détails de ces préoccupations, je vais donner l'occasion aux représentants du gouvernement de nous en dire plus à ce sujet, madame la présidente. Je pense que nous nous entendons tous pour dire qu'il est important que les victimes soient traitées avec professionnalisme, courtoisie et, surtout, sensibilité — je parle plus précisément d'adopter une approche qui tient compte des traumatismes. Ce doit être le cas de tous les acteurs du système qui communiquent avec les victimes, que ce soit un procureur de la Couronne, un représentant des forces de l'ordre, un professionnel ou tout autre fournisseur de services sociaux. Je pense que nous nous entendons tous pour dire que nous devons faire mieux à cet égard.
    Cela dit, le ministre a dit qu'il craignait que le libellé de l'amendement du Sénat porte atteinte à l'indépendance du procureur. J'aimerais que vous expliquiez — très brièvement, en quelques secondes — ce qu'est le travail d'un procureur de la Couronne. Je vous poserai ensuite une question complémentaire.
    En quelques mots, le procureur de la Couronne présente ses arguments à la cour en ce qui concerne la détermination de la culpabilité ou de l'innocence d'une personne qui a été accusée d'un crime. Il représente l'intérêt public. Bien sûr, il faut tenir compte des préoccupations de la victime, mais ce n'est pas le seul facteur à considérer.
    Soyons clairs: les procureurs de la Couronne ne servent pas d'avocats pour une partie en particulier. Ils représentent principalement l'intérêt public, comme vous l'avez dit. C'est notamment pour cette raison que le ministre a exprimé des préoccupations à cet égard.
    Passons à la solution. Comment pouvons-nous faire en sorte que les victimes reçoivent en temps opportun des renseignements précis sur les interdictions de publication dans le but d'assurer le respect de leurs droits?
    C'est une excellente question.
    Le projet de loi initial a tenté de le faire. Il soulignait l'obligation accrue pour tous les acteurs du système de justice pénale d'en faire plus pour soutenir les intérêts et les droits des victimes. Le Sénat a amendé le projet de loi parce qu'il était d'avis qu'il pouvait être renforcé à cet égard. Il l'a fait. De plus lourdes obligations sont maintenant prévues pour la cour et les procureurs en ce qui concerne les victimes et les interdictions de publication.
    Le ministre n'est pas le seul à avoir soulevé ces préoccupations. Des procureurs généraux provinciaux, notamment de l'Ontario et de la Nouvelle‑Écosse, l'ont aussi fait. On craint que la disposition puisse être interprétée de façon à sous-entendre que le procureur donne des conseils juridiques à une victime à propos de ce qu'elle peut faire.
    Je suis conscient des délais serrés, mais, si le projet de loi ne prévoit pas la remise de copies des interdictions de publication aux victimes, y a-t-il une autre façon de leur offrir du soutien?
    Merci beaucoup.
    Oui, bien sûr. Les agents d'aide aux victimes sont en mesure de leur fournir de l'information, dont des copies des interdictions de publication.
(1640)
    Merci.
    La parole est maintenant à M. Fortin.

[Français]

     Je vous remercie, madame la présidente.
    Joyeux anniversaire, monsieur Taylor.
    Mon ami du Parti conservateur n'avait pas cette information. Autrement, je suis certain qu'il vous aurait souhaité un bon anniversaire lui aussi.
    Monsieur Taylor, madame Wells, je suis moi aussi préoccupé par cet aspect de l'information à communiquer aux victimes, qui m'apparaît essentielle. Évidemment, le projet de loi S‑12ne couvre pas uniquement ce volet. Il porte aussi sur l'inscription au Registre national des délinquants sexuels, sur laquelle presque tout le monde s'entend, à mon avis. Je ne veux donc pas perdre de temps à revenir sur cette question.
    Cependant, en ce qui concerne l'information à communiquer aux victimes, j'ai entendu hier le ministre soulever certaines questions quant au conflit d'intérêts. Vous en avez d'ailleurs parlé plus tôt avec mon collègue du Parti libéral.
    J'ai écouté la réponse que vous avez donnée à M. Mendicino quant au rôle du procureur de la Couronne. On comprend que ce dernier représente l'intérêt public, mais j'ai toujours compris aussi qu'il n'avait pas de cause à gagner. Vous me le direz si je me trompe, mais son rôle consiste à s'assurer que les faits sont établis clairement et de façon exhaustive devant le tribunal pour qu'une décision juste puisse être rendue. Dans ce contexte, la notion de conflit d'intérêts m'apparaît un peu lointaine.
    Je comprends qu'il y a peut-être un conflit de rôles et que le procureur de la Couronne se demande comment il va faire pour s'assurer que la victime comprend bien la situation et que, s'il la poursuit dans six mois, un an ou deux ans parce qu'elle a contrevenu à une ordonnance de non-publication, elle ne lui dira pas que c'est lui ou son collègue qui l'a mal informée à l'époque.
    Il s'agit d'une préoccupation que je considère comme légitime, mais il me semble, bien humblement, qu'il y aurait moyen de se prémunir contre ce genre de situation. À mon avis, les informations que le procureur de la Couronne donne à une victime sont sensiblement les mêmes dans tous les dossiers. Il y a de l'adaptation à faire selon les cas, mais il y aurait probablement moyen de schématiser l'information à fournir aux victimes.
    Pourriez-vous faire quelques commentaires à ce sujet? Qu'en pensez-vous? Y a-t-il moyen de s'assurer que les victimes sont bien informées sans que le procureur de la Couronne se place en situation de conflit d'intérêts?
    Je vous remercie de votre question.
    Vous avez effectivement expliqué le rôle du procureur de la Couronne. En ce qui concerne la façon d'informer les victimes sur le système de justice pénale, il existe plusieurs façons de le faire. Selon moi, le gouvernement a reconnu qu'il est important de trouver un équilibre entre bien informer la victime et respecter le rôle du procureur de la Couronne.
    Quand le projet de loi S‑12 était à l'étude au Sénat, le débat a porté sur le lien qui existe entre la communication de l'information et le rôle du procureur de la Couronne.
    Je crois que la question concerne plus particulièrement un texte qui figure à trois endroits différents dans le projet de loi.

[Traduction]

    Le texte se lit comme suit: « [...] dans lesquelles ils peuvent communiquer des renseignements visés par l’ordonnance sans omettre de s’y conformer [...] »

[Français]

    Selon moi, la question est de savoir si, pour le procureur de la Couronne, ce texte est compatible avec le genre d'information pouvant être communiquée à la victime.
    Merci beaucoup, monsieur Taylor et monsieur Fortin.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à M. Garrison.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je précise, pour le compte rendu, que je suis d'avis que la tenue hâtive de la réunion a porté atteinte à mes privilèges à titre de membre du Comité. Le Comité a toujours respecté l'entente selon laquelle une réunion ne commencera que 10 minutes après un vote par appel nominal à la Chambre. J'étais à la Chambre pour voter. Je suis donc désolé si je soulève des points qui ont déjà été couverts.
    Je suis disposé à en rester là.
    Je vous remercie d'être ici encore une fois. Il est toujours agréable de vous voir.
    À la réunion l'autre jour, lorsque le ministre était présent, j'ai demandé le nombre de fois où des interdictions de publication ont été imposées, et je pense que je n'ai pas été assez clair. Je vais maintenant poser deux questions. Quel est le nombre de fois où des interdictions de publication ont été utilisées? Parmi ces cas, combien de fois les interdictions ont-elles été appliquées automatiquement? En fait, je voulais savoir deux choses. J'ai une idée de votre réponse, mais j'aimerais vous entendre sur le sujet.
(1645)
    Je vous remercie de la question.
    Comme le ministre l'a expliqué mardi dernier, je crois, nous n'avons pas de données nationales sur le sujet.
    À la suite de notre témoignage devant le Comité mardi, nous avons demandé à Statistique Canada de nous indiquer quelles données sont recueillies. On nous a dit que cette information n'était pas recueillie parce qu'il s'agit d'une ordonnance de procédure rendue au cours d'un procès. Statistique Canada n'a pas ces données. Je ne suis pas en train de dire que c'est impossible. Elles ne sont tout simplement pas recueillies en ce moment. Il nous faudrait travailler avec les provinces et les tribunaux pour y arriver.
    Je suppose que les interdictions de publication sont imposées couramment, tous les jours, partout au Canada, mais je ne connais pas les chiffres exacts. Les employés de Statistique Canada recueillent des données sur les violations des interdictions de publication. C'est assez limité. Si vous voulez cette information, je peux l'obtenir, mais je sais que les délais sont serrés.
    Les employés de Statistique Canada recueillent des données sur le nombre d'affaires d'agression sexuelle qui sont portées devant les tribunaux. Si les interdictions de publication sont couramment appliquées, comme nous l'avons entendu à plusieurs reprises, nous devrions avoir une idée de leur nombre. Après tout, nous savons le nombre d'affaires d'agression sexuelle.
    C'est exact. Ils recueillent effectivement de l'information sur le nombre d'accusations qui sont portées par les policiers et le nombre d'affaires rapportées par les tribunaux. Je pense que votre question concerne leur capacité à recueillir de telles données, mais ils ne le font pas en ce moment.
    Ils recueillent des données sur le nombre d'affaires d'agression sexuelle qui sont portées devant les tribunaux...
    Ils le font. Ils ont...
    ... nous devrions donc avoir ce chiffre.
    Ils ne recueillent pas ces données en ce moment. C'est tout ce que je peux dire à ce sujet.
    D'accord. Passons à autre chose.
    Je suppose que nous sommes en train d'établir que ces interdictions semblent être appliquées couramment. Les victimes d'agression sexuelle sont donc régulièrement visées par une interdiction sans en être informées aux termes de la réglementation actuelle.
    Y a-t-il des situations où une interdiction de publication peut être utilisée aux termes de la loi actuelle dans l'intérêt de l'accusé? Est-ce une possibilité?
    Je répondrai ainsi: les interdictions de publication sont imposées, d'abord et avant tout, dans l'intérêt de la victime ou du témoin. Les intérêts de l'accusé ne sont pas pris en compte dans la décision d'imposer de telles interdictions.
    Par ailleurs, une interdiction de publication visant à protéger une victime peut également protéger l'identité de l'accusé, dans le cas où l'identité de l'accusé pourrait dévoiler celle de la victime.
    Par conséquent, il ne devrait pas y avoir d'affaires où un avocat de la défense est autorisé à faire valoir des arguments sur une interdiction de publication.
    C'est exact. L'accusé n'a pas qualité pour agir dans ces cas. Comme je l'ai dit, l'interdiction de publication n'est pas imposée dans son intérêt.
    Il y a une jurisprudence à cet égard. Il suffirait que je la trouve pour vous.
    La seule chose, c'est que nous avons entendu parler de cas où des avocats de la défense ont fait des présentations à la cour sur la levée ou la modification d'interdictions de publication.
    De telles présentations ne devraient pas avoir lieu. Ai-je bien compris?
    C'est exact. La loi prévoit clairement qu'une interdiction de publication est imposée pour protéger l'identité d'une victime ou d'un témoin, et non dans l'intérêt de l'accusé.
    Est-ce que le libellé du projet de loi S‑12 ferait quoi que ce soit pour clarifier cet aspect?
    Le Sénat a adopté des modifications prévues dans le projet de loi S‑12 qui portent sur la question de l'accusé.
    Lorsque ces modifications ont été débattues au Sénat, des inquiétudes ont été exprimées sur le fait qu'elles pourraient laisser entendre aux tribunaux ou au système de justice pénale qu'un accusé a actuellement un intérêt dans ces procédures et qu'on présume que le Parlement agit pour une raison particulière. D'autres ont soutenu au contraire que ces modifications ne visent en fait qu'à refléter le statu quo de la loi.
    En ce qui concerne l'obligation d'informer les victimes en cas d'interdiction de publication, le libellé actuel du projet de loi S‑12 exige-t-il que les victimes soient informées de leur droit de demander une interdiction de publication, si elles le souhaitent, ou s'agit-il simplement d'une notification a posteriori?
    Le projet de loi mentionne à plusieurs endroits l'obligation pour le tribunal et le procureur de dialoguer avec la victime. Certains passages évoquent l'obligation d'informer une victime ou un témoin de son droit de demander la révocation ou la modification d'une interdiction de publication.
(1650)
    Je sais que j'approche dangereusement de la fin de mon temps de parole. Je n'ai plus qu'une brève question à poser.
    La loi actuelle prévoit-elle des restrictions concernant la modification ou la levée des interdictions de publication?
     Le projet de loi vise à codifier une procédure de révocation ou de modification. À l'heure actuelle, c'est un processus fondé sur la common law, qui s'applique lorsqu'il peut être démontré qu'il y a un changement important dans les circonstances.
     Les tribunaux ont reconnu que si le bénéficiaire de l'interdiction de publication ne souhaite plus en profiter, cela constitue un changement important dans les circonstances. Le projet de loi codifierait une pratique qui exigerait que l'interdiction de publication soit révoquée ou modifiée à la demande de la victime ou du témoin, à condition que cela n'ait pas d'incidence sur les intérêts de la vie privée d'une autre personne protégée par une interdiction de publication.
    Merci, monsieur Taylor.
    Merci beaucoup à vous deux d'être venus. Nous vous en sommes très reconnaissants.
    Vous êtes libres de partir, à moins que quelqu'un réclame votre présence en dehors du comité.
    Je ne dispose probablement que de 60 secondes, compte tenu de ce qui vient de se passer à la Chambre et du projet de loi qui nous est renvoyé.
    Il faudrait que quelqu'un présente une motion voulant que tous les témoignages reçus dans le cadre du projet de loi S‑12 soient réputés avoir été entendus dans le cadre de notre étude de ce projet de loi.
    Je présente cette motion.
    Merci beaucoup, monsieur Maloney.
    Je vous invite à y jeter un coup d'œil si vous ne l'avez pas encore fait. Je pense qu'on vous l'a déjà envoyée. Vous trouverez également un calendrier sur votre bureau. Nous avons travaillé d'arrache-pied pour ne pas perdre de temps, car nous avions prévu que nous pourrions commencer en retard.
    En y jetant un coup d'œil, vous constaterez qu'il y a une semaine de relâche. En passant, joyeuse Action de grâces à tous. Lors de notre retour la semaine suivante, c'est-à-dire le 17, vous aurez jusqu'à midi pour soumettre des amendements au projet de loi S‑12. Ensuite, le 19 octobre, nous procéderons à l'étude article par article du projet de loi S‑12. Le 17, il y aura une réunion comme d'habitude avec des témoins sur le projet de loi S‑12. Cela convient-il à tout le monde?
    Des voix: D'accord.
    La présidente: Merci beaucoup.
    Nous entendrons maintenant trois témoins.
    Oui, monsieur Garrison.
    Madame la présidente, à propos du calendrier qui a été distribué, il est indiqué qu'il y a une réunion le 19. Ce que vous dites, pour que ce soit clair, c'est que les témoignages se termineront le 17.
    Oui.
    Autrement dit, les témoignages se termineront après l'échéance de dépôt des amendements, ce qui est problématique.
    Oui. Que proposez-vous?
    Je ne souhaite pas causer un retard excessif, mais je pense qu'à tout le moins, à la fin de cette journée, si quelque chose se présente au cours de cette réunion, nous pourrions permettre que les gens fassent part de leur intention de proposer des amendements. Je pense qu'il n'est pas juste que les témoins qui se présentent ce jour-là n'aient pas la possibilité d'influencer par leur témoignage les amendements que nous pourrions proposer.
    Je suis d'accord.
    Le greffier me dit qu'il faut un préavis de 48 heures, mais qu'il est toujours possible de proposer des amendements le jour même.
    Merci. C'est cette assurance que je recherchais.
    Merci. C'est parfait. De toute évidence, vous les enverrez probablement à l'avance.
    Allez-y, monsieur Brock.
    Merci, madame la présidente.
    Juste pour que tout soit bien clair, pour les 24 et 26 octobre sur ce calendrier, sommes-nous en train de suggérer que nous allons passer à une autre étude, c'est-à-dire à l'étude suivante?
(1655)
    Nous allons probablement commencer par organiser une réunion du comité directeur — ce que nous déciderons le 17, puisque nous ne sommes pas allés au-delà du projet de loi S‑12 pour le moment — afin que nous puissions décider de ce qu'il convient de faire.
    Cela vous convient-il?
    Oui. Merci.
     Nous souhaitons la bienvenue aux témoins.
    Je vous prie de m'excuser, parce que nous n'avons pas respecté le calendrier habituel aujourd'hui. Nous vous sommes reconnaissants de votre présence à toutes les trois. Je vais vous présenter toutes les trois. Vous avez déjà témoigné à ce comité, et nous vous en sommes très reconnaissants. Je suis tout à fait d'accord avec les observations faites par M. Mendicino tout à l'heure. Nous vous sommes très reconnaissants de tout le travail que vous avez accompli dans le cadre de cette étude.
    Nous recevons Megan Stephens, avocate en droit criminel et constitutionnel au cabinet Megan Stephens Law; Morrell Andrews, membre de My Voice, My Choice; et Suzanne Zaccour, directrice des affaires juridiques à l'Association nationale Femmes et Droit.
    Je vais m'en remettre à vous. Je sais que vous comprenez les contraintes de temps auxquelles nous sommes soumis.
    Monsieur Garrison, je vous prie de m'excuser, mais cinq personnes sont venues me voir avant que nous ne commencions pour me dire que nous devions terminer à 17 h 30 aujourd'hui. Nous avons réduit la durée autant que possible.
    Je vais m'en remettre à vous. Je sais que vous avez toutes préparé une déclaration. Prenez le temps qu'il vous faut, jusqu'à concurrence de cinq minutes, et si vous prenez moins de temps, ce n'est pas grave. Nous passerons ensuite aux questions. Merci beaucoup.
    Je demande à madame Stephens de bien vouloir commencer.
    Bonjour. Je vous remercie de m'accueillir.
    Dans le temps limité qui m'est imparti, je voudrais me concentrer sur le traitement des interdictions de publication dans ce projet de loi.
    En ce qui concerne les interdictions de publication, mon point de vue s'appuie sur le travail que j'ai effectué au cours des deux dernières décennies dans le domaine du droit pénal et du droit constitutionnel. J'ai été procureure de la Couronne pendant plus de 10 ans. J'ai ensuite été directrice générale et avocate générale du Fonds d'éducation et d'action juridiques et, en janvier 2021, j'ai lancé mon propre cabinet afin d'aider les femmes et les personnes de diverses identités de genre dans leurs relations avec le système de justice pénale.
    Aujourd'hui, je représente régulièrement des plaignants dans des procédures relatives à des agressions sexuelles, notamment en ce qui concerne la levée des interdictions de publication — souvent à titre gracieux —, et j'agis également pour des accusés au criminel, principalement dans le cadre de procédures d'appel.
    Dans le cadre de ce travail, j'ai pu constater de première main que notre système judiciaire a vraiment du mal à répondre aux poursuites pour délits sexuels d'une manière qui tienne compte des traumatismes. Il n'est donc pas étonnant que les agressions sexuelles restent parmi les crimes les plus sexospécifiques et les moins signalés.
    Lorsque les interdictions de publication ont été introduites il y a quelques décennies, elles visaient à encourager la dénonciation des délits sexuels. Le fait de savoir qu'une interdiction de publication est possible aide certains plaignants à se manifester.
    Cependant, les plaignants ne souhaitent pas tous obtenir une interdiction de publication. Nombreux sont ceux qui trouvent du réconfort dans le fait de pouvoir partager leurs expériences publiquement avec d'autres. Pour ces plaignants, une interdiction de publication qui les empêche de le faire peut être traumatisante, d'autant plus lorsqu'une telle interdiction est imposée à leur insu ou sans leur accord, ou lorsqu'ils se rendent compte que l'interdiction pourrait en fait conduire à leur criminalisation.
    Dans cette optique, je salue l'esprit qui sous-tend les changements proposés dans ce projet de loi.
    Il faut davantage de pouvoir aux plaignants lorsqu'il s'agit d'imposer des interdictions de publication et il leur faut plus d'information pour exercer ce pouvoir. Si une interdiction de publication a été imposée, mais que le plaignant n'en veut pas, il doit être facile de la modifier ou de la révoquer. Par-dessus tout, un plaignant ne devrait jamais être criminalisé pour ne pas avoir respecté une interdiction de publication sur sa propre identité.
    Je pense que le projet de loi S‑12, tel qu'il a été adopté par le Sénat en juin, répond de manière appropriée à la plupart de ces préoccupations. Il a beaucoup été amélioré, mais je voudrais parler d'un problème clé qui, à mon avis, subsiste aujourd'hui et dont j'ai entendu parler dans les questions adressées aux fonctionnaires du ministère de la Justice.
     Le projet de loi S‑12 modifierait le Code pour imposer aux procureurs l'obligation d'informer le juge, après qu'une interdiction de publication a été ordonnée, qu'ils ont pris des mesures pour informer le plaignant ou le témoin d'un certain nombre d'éléments clés, c'est-à-dire l'existence de l'ordonnance, ses effets et les circonstances dans lesquelles il est possible de divulguer de l'information sans enfreindre l'ordonnance; déterminer si la personne souhaite faire l'objet de l'ordonnance; et informer la personne de son droit de demander la révocation ou la modification de l'ordonnance.
    Je suis tout à fait d'accord pour dire qu'un procureur est bien placé pour informer un plaignant de deux éléments essentiels : que l'interdiction de publication a été imposée et qu'il a le droit de demander la révocation ou la modification de cette ordonnance. À l'heure actuelle, cette information n'est pas toujours communiquée aux plaignants, alors qu'une interdiction de publication est systématiquement imposée dans presque toutes les affaires d'agression sexuelle qui se produisent au pays. Or, les plaignants ont besoin de cette information.
    Je crains que la formulation actuelle n'aille au-delà d'un devoir d'information en brouillant les frontières entre une discussion portant sur des faits et une mise au point qui oblige à donner un avis juridique. Le procureur n'est pas l'avocat du plaignant et il n'est pas en mesure de lui donner un avis juridique indépendant. J'ai joué les deux rôles, et l'un n'est pas le même que l'autre.
    Demander à un procureur d'expliquer les effets de l'interdiction ou les circonstances dans lesquelles le plaignant peut s'exprimer sans risquer d'engager sa responsabilité, c'est franchir la frontière du conseil juridique. Un plaignant peut se poser des questions avant de décider s'il veut que l'interdiction soit maintenue. Il a vraiment besoin d'un avis juridique indépendant pour peser ces considérations contradictoires. Or, il ne peut pas l'obtenir d'un procureur. Une telle discussion serait risquée, non seulement pour le procureur, mais aussi pour le plaignant. Elle pourrait déclencher des obligations de divulgation de la part du procureur et placer le plaignant et le procureur dans une situation potentielle de conflit d'intérêts, puisque les choix que pourrait faire le plaignant risqueraient d'affecter la solidité du dossier de la poursuite.
    Le projet de loi doit vraiment être amendé pour imposer un devoir d'information plus limité, qui exigerait des procureurs qu'ils informent les plaignants que l'interdiction existe, qu'elle peut être modifiée ou révoquée et que les plaignants ont le droit d'obtenir un avis juridique indépendant afin de prendre une décision éclairée sur la question de savoir s'ils veulent que l'interdiction soit maintenue.
(1700)
    Voilà qui m'amène à mon dernier argument : Ce projet de loi doit être accompagné d'un financement considérable afin d'améliorer l'accès des plaignants à des conseils juridiques indépendants et gratuits et de mieux doter en ressources les organisations qui les soutiennent. Les plaignants qui peuvent bénéficier de conseils juridiques indépendants de la part d'avocats respectueux des traumatismes ainsi que de mesures de soutien communautaires sont bien mieux armés pour gérer le stress lié aux procédures criminelles.
    Je vous remercie et j'ai hâte de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup. Vous avez respecté exactement votre temps de parole de cinq minutes.
    La parole est maintenant à madame Andrews.
    Je voudrais remercier le peuple algonquin anishinabe, dont les terres nous accueillent aujourd'hui. J'encourage à nouveau ce comité à intégrer dans son rapport les appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation.
    Je serai brève. Je vais passer sur certains éléments, mais je tiens à préciser que je ne parle pas au nom de toutes les victimes et que je suis loin d'englober les perspectives vécues par les personnes qui se heurtent à un certain nombre d'obstacles dans leur accès au système et à la responsabilité des crimes commis à leur encontre.
    Je pense que le Sénat a fait du bon travail avec le projet de loi S‑12, mais nous sommes ici pour vous demander d'être encore plus ambitieux. De notre point de vue, le projet de loi comporterait des amendements qui apporteraient certains autres éléments, comme de garantir que les procureurs soient tenus d'informer immédiatement la victime de son droit à demander une interdiction de publication avant que celle-ci ne soit ordonnée. À l'heure actuelle, le projet de loi prévoit que ce sont les juges qui s'en chargent. Or, ce n'est pas réaliste. Les choses ne se passent pas de la sorte dans la vraie vie. Quelqu'un doit dire aux victimes qu'elles ont ce droit avant que l'interdiction ne soit prononcée sur leur identité.
    Il faudrait préciser, à l'article 486.4, que les témoins âgés de moins de 18 ans et les victimes d'infractions sexuelles peuvent faire l'objet d'une interdiction de publication, car il existe encore une certaine confusion à cet égard dans le système.
    Le projet de loi devrait également exiger des procureurs qu'ils agissent conformément aux souhaits de la victime. On aime utiliser le mot « consentement », mais, pour certaines personnes, cela n'a pas de sens dans le contexte du Code criminel. Les souhaits de la victime doivent être pris en compte. Il faut veiller à ce que cela figure dans le projet de loi pour qu'il n'y ait pas d'intervenants du système de justice, comme les juges ou les procureurs de la Couronne, qui agissent sans que le consentement ou les souhaits de la victime soient pris en compte.
    Il faut s'assurer qu'une interdiction de publication n'est pas imposée sur l'identité des victimes qui ont clairement indiqué qu'elles ne souhaitaient pas faire l'objet d'une telle ordonnance.
    Il faut s'assurer que les victimes reçoivent une copie de leur interdiction de publication. Les services aux victimes ne donnent tout simplement pas cette information. Ils ne sont pas au courant des interdictions de publication. Ils ne sont pas équipés pour le faire. Les choses ne se passent pas de la sorte dans la vraie vie.
    Je veux également m'assurer que la façon dont les demandes sont traitées pour les victimes d'infractions sexuelles est indépendante de l'article 486.5 du Code criminel. À l'heure actuelle, le projet de loi S‑12 regroupe les interdictions discrétionnaires pour toute personne associée au système judiciaire avec ce type d'interdiction de publication pour les victimes d'infractions sexuelles. Or, il n'est pas logique de les combiner. Il faut les séparer en précisant que les juges ne peuvent prendre en compte que des facteurs limités lorsqu'une personne leur demande de lever l'interdiction de publication si l'affaire doit faire l'objet d'une audience. Idéalement, les victimes devraient être autorisées à faire lever leur interdiction de publication sans passer par une audience.
    Enfin, nous voulons nous assurer de l'élargissement de la section relative aux restrictions afin de garantir que les personnes de confiance, y compris les professionnels qui apportent un soutien aux victimes, ne soient pas criminalisées pour avoir communiqué de l'information. À l'heure actuelle, le projet de loi prévoit une restriction pour les victimes qui partagent leur propre information, mais les personnes qui doivent converser avec les victimes lorsqu'elles ont besoin d'aide ne devraient pas être criminalisées.
    Nous voulons nous assurer qu'il n'y a plus de retards excessifs dans la levée des interdictions pour les victimes, comme ce qui est arrivé à Patty ou à Maarika. Nous ne voulons plus que les victimes aient à se rendre au tribunal pour tenter de trouver leur ordonnance d'interdiction de publication, comme cela s'est produit pour « Deborah Lyn » cette semaine. Nous voulons nous assurer qu'il n'y a plus d'avocats de la défense qui réintroduisent des interdictions de publication sur les noms de victimes dont l'interdiction de publication a déjà été levée, comme c'est arrivé à « Cassandra » le mois dernier, et nous voulons nous assurer que les procureurs de la Couronne n'agissent plus sur la base de suppositions sans impliquer les victimes, comme c'est le cas pour toutes les personnes avec lesquelles nous avons été mis en contact.
    Ces suggestions sont le fruit d'un travail collectif. Elles sont basées sur l'expérience vécue par les victimes. Nous avons fait de notre mieux pour consulter très largement sur ces recommandations, mais il est littéralement impossible de saisir toute la nuance des problèmes, des perspectives et des interactions de chaque individu avec le système judiciaire.
    Nous avons fait tout ce qui était humainement possible pour vous fournir des amendements sur papier et pour vous aider dans ce processus, quoique cela ne devrait pas relever de notre responsabilité en tant que victimes. Nous ne sommes pas des avocats, mais nous essayons de faire de notre mieux pour vous aider. Inévitablement, certains diront que ce n'est pas suffisant, mais nous nous impliquons et nous faisons ce que nous pouvons.
     Honnêtement, la dernière année et ce processus ont laissé un grand nombre d'entre nous avec un sentiment de retour de traumatisme, d'épuisement et de fatigue extrême. Nous nous sommes retrouvés dans la position très peu enviable de nous demander si des retouches en marge du Code criminel actuel seraient suffisantes.
    C'est pourquoi ces recommandations ne sont pas une panacée. Le Parlement sera toujours confronté à la réalité que les plaignants se heurtent à un nombre honteux d'obstacles tout au long du processus de recherche d'aide et de responsabilisation, voire longtemps après.
(1705)
    La police ne nous croit toujours pas. Les procureurs de la Couronne ne tiennent pas compte des traumatismes. Les juges ne comprennent pas comment appliquer correctement la loi, à nos dépens. On n'a pas suffisamment investi dans les ressources extérieures au système qui peuvent apporter un soutien important et culturellement adapté aux victimes de tous les milieux. Une fois le projet de loi S‑12 achevé, il restera du travail à accomplir, notamment pour former les procureurs de la Couronne et les juges, pour mettre en place des guides destinés aux provinces et aux territoires, pour réviser la loi afin de s'assurer que les choses sont faites correctement et pour produire de l'information accessible aux victimes, qui méritent de savoir ce qui leur arrive au sein du système.
    Les personnes à l'origine de My Voice, My Choice ont fait tout ce que l'on attendait d'elles et bien plus encore, pour être honnête. Je sais que vous êtes confrontés à des échéances difficiles et que ce n'est pas la façon idéale de rédiger un projet de loi, mais nous en sommes là. Je vous demande de continuer à examiner nos amendements, comme beaucoup d'entre vous l'ont fait, pour avoir le sentiment qu'ils sont importants. Je veux avoir le sentiment que les histoires que nous vous avons racontées sont importantes. Je vous invite donc à faire le travail honorable, à collaborer avec tous les partis et à prendre les choses au sérieux. Si vous le faites et que vous modifiez la loi pour la rendre un peu meilleure, nous pourrons enfin nous reposer et prendre le temps de guérir, ce que beaucoup d'entre nous doivent encore faire.
    Merci.
    Merci, madame Andrews.
    Le greffier m'indique que vous venez de déposer un document. Nous allons le faire traduire et le distribuer à tous les membres du comité.
    La parole est maintenant à madame Zaccour.

[Français]

     Je serai brève, parce que je pense que tout a été dit.
    Je m'appelle Suzanne Zaccour, et je suis la directrice des affaires juridiques de l'Association nationale Femmes et Droit.
    Il s'agit d'un organisme à but non lucratif, qui lutte pour faire avancer les droits des femmes au Canada, y compris dans le processus législatif.
     C'est toujours avec plaisir que je viens ici pour discuter avec vous des enjeux juridiques qui sont genrés et qui affectent les femmes au Canada.
    Nous avons déjà soumis, en collaboration avec d'autres organisations et avocates féministes, un mémoire lorsque le projet de loi S‑12 a été étudié par le Sénat. Nous avons collaboré pour mettre en lumière trois objectifs importants.

[Traduction]

    Nous avons souligné la nécessité de veiller à ce que les victimes ne soient pas criminalisées pour ne pas avoir respecté une interdiction de publication. Nous avons souligné la nécessité de préciser et de simplifier la procédure de révocation ou de modification d'une interdiction de publication. Bien franchement, cette procédure doit être beaucoup plus limpide. Ce ne sont pas nécessairement des avocats qui s'engagent dans cette procédure. Nous avons également souligné la nécessité de veiller à ce que les victimes soient correctement informées tout au long de la procédure.
    Nous estimons que les amendements du Sénat sont positifs et qu'ils ont permis d'améliorer considérablement le projet de loi en vue d'atteindre ces trois objectifs.
    J'attirerai votre attention sur un petit détail. Il s'agit de la formulation « subject to the order » plutôt que « subject of the order » dans la partie anglaise de la section « Restriction » du projet de loi. Je ne suis pas trop inquiète, puisque la version française est correcte, mais nous savons à quel point ce processus est difficile. On pourrait donc éviter les litiges ou les interprétations complexes en précisant simplement dans la version anglaise que la restriction s'applique aux personnes « subject of the order », c'est-à-dire dont l'identité est protégée par l'ordonnance, plutôt qu'aux personnes « subject to the order », c'est-à-dire tout le monde, puisque tout un chacun doit respecter une interdiction de publication.
    J'aurais encore beaucoup à dire, mais je sais que nous sommes pressés par le temps, alors je vais m'arrêter là. Je serai heureuse de répondre aux questions.
    Merci.
(1710)
    Merci beaucoup.
    Si cela convient à tout le monde, chaque intervenant disposera de quatre minutes pour le premier tour, qui sera peut-être le seul. Cela convient-il à tout le monde?
    Des voix: Oui.
    La présidente: D'accord.
    Monsieur Brock, vous avez la parole.
    Mesdames, je vous remercie beaucoup de vos sages conseils et renseignements ainsi que de la fougue avec laquelle vous les fournissez à cette étude.
    En tant que parlementaire, je suis extrêmement déçu que nous essayions d'adopter à toute vapeur ce projet de loi à la dernière minute, alors que le gouvernement a eu toute une année pour bien faire les choses. Il nous reste 13 jours pour adopter le projet de loi. Nous avons encore un jour de témoignages. Il est regrettable que nous coupions court de cette façon à une étude très importante.
    Madame Andrews, vous avez fait preuve de courage chaque fois que vous avez comparu devant un comité et que j'ai eu le privilège de vous entendre prendre la parole et de vous poser des questions. Vous communiquez la vérité. Vous démontrer votre force. Je n'ai que des éloges pour la résilience dont vous avez fait preuve, non seulement en tant que survivante, mais aussi en tant que personne qui prône maintenant le changement. Tous les parlementaires devraient écouter vos paroles, car c'est l'occasion pour nous de bien faire les choses.
    Je dispose de très peu de temps. Vous avez parlé d'un certain nombre d'amendements. Vous avez parlé d'amendements dont vous avez discuté au Sénat. Quel est, selon vous, l'amendement le plus important dont nous devrions sérieusement tenir compte afin d'améliorer le projet de loi?
    Merci.
    En toute honnêteté, il est difficile d'en choisir un seul. Je vais aller très vite. Vous avez tous reçu la trousse d'information que j'ai envoyée et je pense qu'il y a vraiment quatre choses auxquelles vous devez penser.
    Premièrement, il faut que les procureurs informent les victimes et agissent selon leur volonté.
    Deuxièmement, le processus de demande doit être éclairci. Il est vraiment important que vous fassiez bien cela et que vous limitiez le plus possible la capacité des juges à refuser à une victime sa liberté d'expression. Toute personne souhaitant s'exprimer devrait pouvoir le faire et les juges ne devraient plus avoir la capacité de refuser aux victimes la possibilité de parler de leur expérience.
    D'emblée, ce sont les deux modifications les plus importantes, car si vous faites bien les choses sur le plan du consentement, les gens peuvent prendre une décision avant qu'une ordonnance de non-publication soit imposée sur leur nom. S'ils font l'objet d'une ordonnance de non-publication et vous parvenez à établir un processus de demande approprié pour lever l'ordonnance de non-publication, vous n'aurez pas réglé tous les problèmes, mais vous aurez fait du bon travail.
    Dans votre déclaration préliminaire, vous avez soulevé un point qu'il convient d'étoffer quelque peu. C'était en réponse à la question de mon collègue M. Garrison, qui a demandé aux fonctionnaires combien de fois ces ordonnances de non-publication sont accordées.
    En tant qu'ancien procureur de la Couronne, je peux vous dire — et je ne peux parler qu'au nom de la province de l'Ontario — qu'à chaque fois que je participais pour la première fois à une séance de libération sous caution ou de détention provisoire concernant un délinquant sexuel au nom d'une victime adulte ou mineure, la politique consistait à demander des ordonnances de non-publication.
    Je vois Mme Stephens hocher la tête, car elle est une de mes anciennes collègues.
    C'est une question sur laquelle le gouvernement fédéral ne peut pas travailler, mais sur laquelle les gouvernements provinciaux peuvent. Nous devons établir une relation entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux pour veiller à ce que des pratiques exemplaires soient adoptées dans l'ensemble du Canada afin d'assurer l'uniformité, dès le début, dans l'utilisation de tous les outils dont nous disposons en tant que procureurs. Il est essentiel d'obtenir très tôt l'avis du plaignant.
    Je vous remercie d'avoir soulevé cette question.
    Mon temps de parole est probablement écoulé. Merci.
(1715)
    Merci beaucoup, monsieur Brock.

[Français]

     Je donne maintenant la parole à Mme Brière.

[Traduction]

    Merci, madame la présidente.
    Bonjour, tout le monde.
    Je tiens à dire que je vous admire Mme Andrews — nous nous sommes rencontrés lors d'une audience précédente —, ainsi que toutes ces femmes, pour être sorties de l'ombre.

[Français]

    On sait que les ordonnances de non-publication sont liées à beaucoup d'autres éléments, qui sont essentiels à un processus centré davantage sur les survivantes, sur les victimes. Par exemple, ces éléments peuvent inclure des services juridiques indépendants et gratuits. Vous avez mentionné l'éducation pour les avocats de la Couronne et pour les juges.
    Comment pourrait-on mieux incorporer ce genre d'aide au processus?

[Traduction]

     Je pense que Mme Stephens est très bien placée pour répondre. Je sais qu'elle a beaucoup travaillé avec les juges sur la question de l'éducation. Je lui passe la parole et je m'en remets à elle en tant qu'experte.
    Je pense qu'il faut réfléchir davantage au rôle de l'avocat indépendant. Le rôle de l'avocat du plaignant est relativement nouveau et inhabituel dans le système de justice pénale. En règle générale, nous pensons au procureur et à l'avocat de la défense. Au tout début de cette étape de la procédure, il y a un besoin énorme de fournir des conseils juridiques indépendants aux personnes qui ont survécu à la violence sexuelle. Je rencontre de nombreux clients qui n'auraient peut-être pas choisi de porter plainte s'ils avaient su ce que la procédure leur réservait.
    Je sais que les ordonnances de non-publication ont pour but d'encourager le signalement des crimes, mais je pense que la faculté d'agir est l'élément le plus important. Les victimes ont vécu une expérience où elles n'avaient aucun contrôle. Elles portent plainte parce qu'on leur dit que c'est ce qu'elles doivent faire et elles se retrouvent dans un processus où elles perdent à nouveau tout contrôle. Elles n'ont pas de voix; elles n'ont pas leur mot à dire. Elles ne sont pas informées de ce qui se passe, même par les procureurs et les services d'aide aux victimes bien intentionnés; tout le monde est tellement occupé.
    Je pense que les victimes doivent pouvoir accéder dès le début à des conseils juridiques indépendants. Je suis en Ontario, je ne connais donc que le programme qui existe dans cette province. Il s'agit d'un programme qui était initialement un projet pilote mis en œuvre par le gouvernement provincial dans toute la province. Chaque victime de violence sexuelle en Ontario a théoriquement droit à quatre heures de conseils juridiques indépendants. Si vous demandez un bon, vous pouvez l'obtenir. Dans toute la province, il y a actuellement 26 avocats, peut-être 27, qui figurent sur la liste. Je ne fais pas partie de ce groupe; je ne peux pas figurer sur la liste parce qu'elle a été établie en 2016, lorsque j'étais procureure de la Couronne. On dit aux gens qu'ils ont accès à quelque chose, mais ils ne peuvent même pas y accéder. On parle seulement de l'Ontario.
    Je pense qu'il faut vraiment avoir des personnes qui vous guident dans le système pour expliquer le processus — que ce soit ou non en relation aux ordonnances de non-publication — et communiquer des renseignements à la Couronne, car les procureurs de la Couronne ne veulent pas vous parler et se transformer en témoins ou déclenchent possiblement des obligations de divulgation. Ce n'est qu'une façon de voir les choses.
    Je pense qu'il est important de poursuivre la formation de tous les acteurs du système, y compris les procureurs et les juges, sur ce que signifie réellement le fait de tenir compte des traumatismes.
    Une formation a été mise en place pour les juges fédéraux et les candidats doivent accepter de suivre cette formation. Cependant, la majorité des affaires sont traitées par les tribunaux provinciaux. Cela ne relève pas de votre compétence, mais c'est un problème lorsqu'il s'agit de s'assurer que la formation couvre tous les points appropriés du système.
(1720)
    Merci beaucoup.
    Monsieur Fortin, vous avez la parole.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Je remercie les trois témoins de leur présence. Leur témoignage est extrêmement important.
    Comme nous avons très peu de temps, je n'en perdrai pas plus qu'il est nécessaire, mais je suis d'accord sur ce que mon collègue M. Brock disait. Je n'arrive pas moi-même à expliquer comment on a pu attendre six mois entre la décision de la Cour suprême et le dépôt du projet de loi S‑12 au Sénat. Nous avons littéralement perdu six mois. On se retrouve donc aujourd'hui à devoir vous bousculer pour témoigner, ce qui, à mon avis, manque de classe. Je m'en excuse au nom de tous mes collègues du Parlement qui, j'en suis certain, ne sont pas plus heureux de cela que je ne le suis.
    Cela dit, nous n'avons pas beaucoup de temps, alors je ne m'attarderai pas sur tous les aspects du projet de loi. Tout a pas mal été couvert. Toutefois, il y a un aspect qu'on n'a pas vraiment couvert, et j'aimerais entendre ce que vous avez à dire à ce sujet, madame Stephens.
    En passant, madame Andrews, j'ai vos suggestions d'amendements en français et en anglais. C'est bien fait, et je vais en tenir compte, soyez-en assurée.
    Madame Stephens, il y a la question des ordonnances de non-publication lorsqu'il y a de multiples victimes. On peut avoir, par exemple, une jeune fille de 14 ans, une dame de 20 ans et une autre de 30 ans. Certaines demandent une ordonnance de non-publication pour leur paix d'esprit et celle de leur famille, alors que d'autres veulent en parler, parce que c'est thérapeutique. Il existe toutes sortes de points de vue, tous aussi valables les uns que les autres.
    Comment devrait-on organiser l'ordonnance de non-publication lorsque plusieurs victimes ont des points de vue différents ou des besoins différents?
    Encore une fois, si on parle d'une jeune fille de 14 ans, je comprends qu'on doit la protéger, au-delà de savoir si elle le veut ou non.
    J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet, madame Stephens.
     Je pourrais essayer de vous répondre en français, mais cela prendrait beaucoup de temps, alors je vais répondre en anglais.

[Traduction]

     Je pense qu'il peut être difficile et compliqué de les organiser et personne ne s'est vraiment penché sur cette option. Je pense également qu'il est important de reconnaître que les gens ont l'impression que ces ordonnances de non-publication sont empreintes d'un caractère formel, ce qui ne reflète pas la réalité; elles sont très informelles.
     Comme l'a souligné M. Brock, les gens se présentent à une séance de libération sous caution et, si j'ai bien compris la politique de la Couronne en Ontario, vous êtes censé demander une ordonnance de non-publication à la première comparution possible. Je ne pense pas que ce soit une erreur. Je pense qu'on favorise la protection, mais il faut qu'il y ait de l'information et de la communication pour savoir s'il est nécessaire de maintenir l'ordonnance. Lorsqu'elles sont imposées, elles ont tendance à être... Il n'y a pas d'ordonnance formelle. Aucun formulaire n'est émis, même lorsque nous parlons d'une personne à qui il faut envoyer l'ordonnance par la poste. Si un greffier du tribunal est une personne organisée, il est écrit sur la dénonciation ou l'acte d'accusation qu'une ordonnance de non-publication est en place.
    Dans le cas contraire, il faudra peut-être aller chercher la transcription de la procédure judiciaire du jour pour savoir si une ordonnance a été imposée, ce qui illustre également les problèmes liés au suivi du nombre d'ordonnances en vigueur. Il n'existe pas vraiment d'approche coordonnée en la matière. Si nous avons cinq victimes et elles font toutes l'objet d'une ordonnance, la situation est compliquée si l'une d'entre elles veut demander la levée de l'ordonnance plus tard et les autres ne veulent pas qu'elle soit levée...

[Français]

    Excusez-moi de vous interrompre, je ne veux pas être impoli, mais je veux comprendre votre point de vue.
    Évidemment, lorsqu'il y a plusieurs victimes et que l'une d'entre elles parle de sa situation, il y a une possibilité que cela contrevienne à la protection de l'identité d'une autre.
    Comment peut-on articuler une ordonnance de non-publication qui soit efficace et qui respecte les droits de chacune des victimes?

[Traduction]

    Si on tient pour acquis que l'ordonnance de non-publication s'applique à tout le monde dès le départ et que tout le monde fait l'objet d'une ordonnance de non-publication, je pense qu'il est certainement possible de le faire. Cependant, si deux personnes décident qu'elles veulent pouvoir parler de leur expérience à l'avenir, je pense que c'est la seule situation où un juge doit hésiter à lever immédiatement toutes les ordonnances de non-publication. Le juge devrait dire: « je veux réfléchir à la situation et déterminer s'il y a un moyen de lever l'ordonnance de non-publication pour vous deux et non pour les trois autres. » Si, par exemple, il s'agit de deux sœurs qui partagent le même nom de famille et l'une d'entre elles souhaite s'exprimer publiquement, il est toujours possible qu'elle puisse obtenir la levée de l'ordonnance de non-publication qui la concerne, à condition qu'elle accepte de protéger les intérêts de sa sœur....
    Est-ce possible?
    Dans certains cas, ce sera plus difficile et c'est pourquoi il faudra un juge qui puisse évaluer ces préoccupations compensatoires et décider si l'ordonnance de non-publication peut être levée ou non.
(1725)
    Merci beaucoup, madame Stephens.
    Monsieur Garrison, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je tiens d'abord à remercier tous les survivants, non seulement Mme Andrews, mais aussi les autres personnes présentes dans la salle aujourd'hui, ainsi que tous ceux qui se sont manifestés. Il s'agit d'une expérience dont il est très difficile de parler. Certains d'entre vous savent peut-être que je suis également un survivant adulte.
    Je remercie également Laurel Collins, la députée de Victoria, car lorsque nous avons commencé notre étude sur les victimes, Mme Collins est venue me voir et m'a dit: « je ne pense pas qu'ils aient pensé à ce point lorsqu'ils ont étudié les victimes, je veux donc vraiment que le comité de la justice l'inclue dans son étude et je peux vous dire à qui vous devez vous adresser. » Laurel Collins, la députée de Victoria, a donc eu beaucoup d'influence. Elle avait un projet de loi d'initiative parlementaire qui progresse plus rapidement et je suppose que je suis frustré par l'échéance.
     Les deux parties du projet de loi S‑12 sont urgentes et je pense, madame Andrews, que vos commentaires d'aujourd'hui l'ont vraiment souligné pour moi lorsque vous avez dit combien de fois... J'ai essayé de faire admettre à quelqu'un la fréquence à laquelle ce phénomène se produit dans notre société, car il s'agit du crime le moins signalé. Pourtant, des dizaines et des dizaines d'affaires sont constamment portées devant les tribunaux. Je me demande si vous pouvez nous en dire un peu plus sur la fréquence des ordonnances et le nombre de personnes qui font l'objet non seulement d'agressions sexuelles — je ne veux pas passer outre ces crimes —, mais aussi des ordonnances.
     En tant que groupe, nous recevons presque chaque semaine des messages directs, des messages sur Facebook et divers types de correspondance de la part de victimes partout au Canada qui se posent les questions suivantes: « Est-ce que je fais l'objet d'une ordonnance de non-publication? Comment puis-je le savoir? » ou « Je fais l'objet d'une ordonnance de non-publication, mais mon procès s'est terminé il y a quatre ans. Comment puis-je la lever? » Personne ne sait comment les lever, comment déterminer si on fait l'objet d'une telle ordonnance ou comment trouver de l'aide.
    Je ne suis pas avocate, mais j'ai eu la grande chance d'être en contact avec des avocats comme Mme Stephens, M. Parker et autres à qui nous renvoyons les victimes parce que nous ne pouvons tout simplement pas faire ce travail. Les ordonnances sont tellement répandues, mais il est tellement difficile de savoir comment elles sont mises en place. La capacité d'une personne à obtenir de l'aide et à comprendre ce qui se passe avec sa propre identité... En toute honnêteté, c'est absurde.
    Comme Mme Stephens l'a dit, c'est très informel. Si vous êtes une victime, il n'y a rien d'informel à vous faire dire que vous ne pouvez pas parler de votre propre expérience. C'est le cas pour tout le monde, sauf pour nous. C'est extrêmement répandu. Le fonctionnement du régime actuel n'a aucun sens. Nous ne pouvons pas continuer à aider les victimes nous-mêmes. La loi doit simplement être modifiée et clarifiée afin que vous nous retiriez cette tâche, car la situation n'est pas viable. Il ne faut pas non plus que ce travail se fasse dans l'ombre parce que les gens craignent d'être judiciarisés ou d'avoir de la difficulté à accéder à la justice.
    Je vous remercie du travail que vous faites. J'espère que le message que vous avez tous livré aujourd'hui, à savoir que nous avons besoin de plus de ressources et pas seulement d'une loi appliquée à ce problème, est entendu par tous les membres du comité.
    Je veux revenir sur la question de l'aide juridique que vous avez soulevée, madame Stephens. Dans les ententes d'aide juridique qui existent, cela figure-t-il même dans les catégories de choses? Si les gens consultent les programmes d'aide juridique... Je ne me souviens pas avoir déjà vu cela comme catégorie d'aide juridique ou comme quelque chose que les gens découvriraient en consultant des brochures et autres et pour lequel il serait possible d'obtenir de l'aide juridique.
    Vous ne pourriez certainement pas obtenir un certificat d'aide juridique pour cela. Ce serait tout à fait impossible. En fait, les certificats d'aide juridique sont délivrés pour représenter les plaignants dans les cas d'agression sexuelle lorsqu'il y a des demandes de communication de dossiers de tiers ou des demandes d'admission de dossiers personnels ou d'antécédents sexuels au procès. En Ontario, ces demandes sont administrées par l'aide juridique, ce qui signifie que vous obtenez un certificat d'aide juridique. Cependant, il n'est pas payé par le financement de l'aide juridique, mais par la province de l'Ontario.
    Je ne peux parler que de l'Ontario. La situation est différente, mais il ne s'agit pas d'une catégorie d'aide juridique. La plupart de ce travail est effectué gratuitement par des avocats comme moi et Robin Parker.
    Je sais que mon temps de parole est écoulé, mais je suppose que la situation est la même, voire pire, dans toutes les autres provinces.
    Mme Megan Stephens: C'est ce que je pense aussi.
    M. Randall Garrison: Je vous remercie encore une fois.
    Merci beaucoup aux trois témoins.
    Je sais que vous nous avez distribué des documents. Nous les avons, mais si vous souhaitez nous faire part de quelque chose d'autre après aujourd'hui, n'hésitez pas à le faire. Nous tenons vraiment à vous remercier. Je sais que vous êtes venu nous voir il y a plusieurs mois, et nous vous en sommes très reconnaissants. Nous avons appris de vous. C'est un sujet qui, comme vous l'avez dit, touche tant de personnes. Vous avez raison: il ne devrait pas vous incomber d'apporter votre aide. Merci beaucoup d'être venus.
    Je remercie tous les membres du comité. Passez une très bonne fin de semaine de l'Action de grâces avec vos proches.
    Nous nous retrouverons après la relâche.
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