[Français]
Bonjour. Je m'appelle Mark Eyking et je suis député de . Je suis aussi le président du Comité permanent du commerce international.
[Traduction]
Notre comité a été plutôt actif depuis le début de cette législature. Nous avons une ou deux choses sur la planche. Nous finissons l'étude de l'accord avec l'Europe, et nous avons la question du bois d'oeuvre de résineux, mais notre principal sujet d'étude, présentement, est le PTP.
Nous sillonnons le pays pour écouter les Canadiens, les intervenants et quiconque veut nous parler au sujet de cet accord commercial. Nous tenons aussi de façon continue des audiences à Ottawa pour les intervenants. Nous avons fait les provinces de l'Ouest, et nous faisons le Québec maintenant. À compter de demain, nous serons en Ontario, puis probablement les provinces atlantiques et les territoires à l'automne.
Présents aujourd'hui au comité sont Mme Ludwig, du Nouveau-Brunswick; M. Peterson, de l'Ontario; Mme Lapointe, du Québec; Mme Ramsey et M. Van Kesteren, du sud de l'Ontario et, de la merveilleuse province de la Saskatchewan, M. Hoback. C'est notre comité aujourd'hui. Nous avons d'autres membres, mais ils sont à Ottawa présentement. C'est à tour de rôle que nous voyageons dans le pays.
Les témoins, ou leurs représentants, ont cinq minutes chacun.
Le premier groupe de témoins se compose du Mouvement Desjardins, de la Chambre de commerce et d'Industrie de Québec, de Québec International et du Réseau québécois sur l'intégration continentale.
Nous allons commencer par le Mouvement Desjardins.
Allez-y, monsieur Brun.
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Merci, monsieur le président.
Mesdames et messieurs les membres du Comité, j'aimerais dire un bref mot d'introduction au nom du Mouvement Desjardins. Tout d'abord, je vous remercie de l'invitation. C'est grandement apprécié.
Je m'appelle Bernard Brun. Je suis responsable des relations gouvernementales pour le Mouvement Desjardins, qui est un groupe financier coopératif. C'est le premier groupe financier coopératif au Canada et le cinquième dans le monde. Il rassemble 7 millions de membres et de clients.
Nous offrons toute la gamme des services financiers, qu'il s'agisse des services financiers de base, des services d'assurance, des services d'accès aux capitaux ou évidemment des services de financement. C'est un acteur de premier plan.
C'est le premier groupe financier du secteur agricole et agroalimentaire. Nous aimerions discuter plus particulièrement de ce domaine et des impacts potentiels de l'accord de libre-échange sur le marché agricole et agroalimentaire.
M. Alain Gagnon, qui est vice-président, Marchés agricoles et agroalimentaire, m'accompagne. Il va vous parler plus précisément de ce sujet.
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Bonjour. Merci de l'invitation.
Les activités de notre institution dans ce secteur s'étendent d'un océan à l'autre, mais la majorité de celles-ci sont concentrées au Québec. Le Mouvement Desjardins a plus de 41 % des parts de marché dans le secteur du crédit agricole dans la province, soit plus que toutes les autres institutions financières réunies. En tout et pour tout, près de la moitié des agriculteurs du Québec font affaire avec Desjardins.
La mise en oeuvre du Partenariat transpacifique aura, dans son ensemble, des répercussions favorables pour l'agriculture canadienne, en particulier pour les filières exportatrices d'importance. On n'a qu'à penser à la production porcine, aux canneberges, aux bleuets et au sirop d'érable. La conclusion de l'entente permettra d'accroître la compétitivité générale du secteur agroalimentaire face à ses principaux concurrents dans les marchés internationaux.
Malgré les aspects généralement positifs du traité, certaines filières canadiennes pourraient être désavantagées par les nouveaux accès qu'il accorde. On pense surtout à celles sous gestion de l'offre, par exemple le lait et la volaille, qui subiront de nouvelles pressions dans le marché intérieur. En effet, l'entente de principe signée par le Canada prévoit notamment une ouverture partielle des marchés agricoles sous gestion de l'offre aux pays étrangers.
Cette ouverture touchera directement de nombreux secteurs, particulièrement le secteur laitier. Pour l'industrie laitière, cela s'ajoute par ailleurs à la brèche créée par l'accord entre le Canada et l'Union européenne. Les secteurs sous gestion de l'offre constituent une part importante du portefeuille des crédits agricoles du Mouvement Desjardins, qui est aussi un partenaire majeur de nombreuses entreprises dans le secteur de l'approvisionnement à la ferme et de la transformation des aliments. C'est pourquoi la mise en place de programmes de compensation et d'appuis financiers annoncée à l'automne 2015 est primordiale pour l'ensemble des acteurs du secteur agricole, y compris les institutions financières comme le Mouvement Desjardins.
Les compensations financières et les délais d'application que le gouvernement souhaite mettre en oeuvre pour compenser certaines dispositions de l'accord sur le PTP favoriseront une transition en douceur et permettront aux entreprises de développer des stratégies d'adaptation. Sans ces mesures, des pertes de marchés se traduiront par des baisses de revenus qui auront des conséquences sur la capacité des entreprises à faire face à leurs obligations financières et à continuer leur développement.
Par ailleurs, le choc pourrait être particulièrement considérable pour les régions dont l'activité économique dépend davantage des secteurs agricoles sous gestion de l'offre. Il faut savoir que 31 % des points de service du Mouvement Desjardins se trouvent dans des municipalités de moins de 2 000 habitants. Il y aura davantage d'impacts négatifs pour nous que pour les autres institutions financières.
Enfin, les entreprises de plus petite taille et celles récemment acquises par la relève agricole seront généralement les plus touchées. Le Mouvement Desjardins souhaite bénéficier d'une perspective claire de l'environnement d'affaires de ses membres et de ses partenaires qui lui permettrait de gérer ses risques de façon convenable. En effet, en tant qu'institution financière coopérative très présente dans les régions agricoles et active dans le secteur du crédit agricole, le Mouvement Desjardins juge important que soit réaffirmé et clarifié rapidement le volet des mesures compensatoires et transitoires. Tant que ces mesures ne seront pas officiellement confirmées et mises en place, l'ensemble des acteurs du secteur agricole devra prendre des décisions d'affaires importantes dans un contexte d'incertitude.
Dans le même ordre d'idées, nous encourageons le gouvernement à corriger les incohérences dans les lois fédérales qui permettent d'importer des produits en contournant les tarifs douaniers. C'était notamment le cas de certains produits de la volaille auparavant et le plus récent exemple est celui du lait diafiltré. C'est pourquoi nous estimons qu'en plus d'adopter des mesures compensatoires et de transition nécessaires pour les secteurs...
Je vous remercie beaucoup de votre invitation. Je remercie également les membres du Comité de venir nous rencontrer à Québec. C'est très apprécié.
La Chambre de commerce et d'industrie de Québec est la deuxième chambre de commerce au Canada en fait d'ancienneté, après Halifax. Elle a plus de 208 ans. Elle est très bien implantée dans la communauté. Elle compte plus de 5 000 membres, ce qui est très représentatif.
Dans la région de Québec, l'économie repose essentiellement sur les services. À cet égard, le secteur des assurances et des finances ainsi que le tourisme représentent près de 40 % du PIB de la région. D'autres secteurs comme les technologies, l'optique-photonique et d'autres créneaux d'excellence sont aussi présents, mais je vais laisser ma consoeur vous en parler davantage.
À l'heure actuelle, nos principaux enjeux concernent l'emploi et l'accessibilité à la région. La ville de Québec, tout comme le Québec, est un petit marché. Dans un contexte de mondialisation, nous n'avons pas le choix d'être présents sur un maximum de marchés mondiaux afin de favoriser la croissance de nos PME, ce qui implique évidemment l'innovation et l'internationalisation. En ce sens, l'ouverture des barrières tarifaires est très importante et très positive pour une grande partie des entreprises de la région de la capitale.
Le Canada est au coeur de plusieurs marchés: l'Atlantique, l'Est, l'Ouest, le Nord, le Sud avec l'ALENA, et l'Europe avec l'AECG. Même si les pays du PTP sont loin de nous physiquement, cet accord ne représente pas moins un enjeu très important. L'établissement des barrières tarifaires favorisera le développement de nos entreprises. Cela élargit évidemment les voies d'accès, dans une perspective de croissance de nos entreprises.
De façon globale, le soutien gouvernemental à l'innovation est un outil essentiel. L'innovation et la commercialisation deviennent des outils essentiels pour favoriser l'expansion des entreprises. Les barrières tarifaires nous aident, mais ce n'est qu'un élément parmi d'autres que le gouvernement doit prendre en compte.
Cet accord est un levier très important qui supprimera les obstacles au développement de nos entreprises. On parle uniquement du PTP, mais dans l'ensemble des cas, on parle de l'abolition ou de la réduction de 18 000 droits de douane, ce qui est très important. Nous venons d'entendre un représentant du secteur agroalimentaire en parler. Le PTP sera plus favorable à d'autres secteurs d'activité.
Actuellement, sur certains marchés, des entreprises sont taxées jusqu'à 30 % sur des produits innovants ou des produits de luxe, ce qui fait que nous sommes non concurrentiels sur ces marchés. L'abolition des barrières tarifaires nous permettra justement d'accéder à ces nouveaux marchés.
Cela représente une très belle occasion pour nos PME, mais nous aurons un défi à relever, comme je l'ai dit tout à l'heure, lequel défi est lié à l'information et à la commercialisation de nos produits dans ces marchés. Il faudra savoir comment accéder à ces marchés une fois que les barrières tarifaires seront réduites.
Le tissu entrepreneurial du Québec est composé à 98 % de PME, donc 98 % d'entreprises de moins de 500 employés. Ces entreprises n'ont pas toujours facilement accès à l'information et aux moyens de commercialisation pour atteindre ces marchés. Au Canada, il y a Exportation et développement Canada. Il y a aussi Développement économique Canada pour les régions du Québec, que M. Lebel avait appuyé au Québec. Il y a plusieurs outils, mais ils ne sont pas toujours accessibles, et les entreprises n'en sont pas toujours bien informées. Le rôle des chambres de commerce pourrait être de les informer. Pour que nous puissions informer nos entreprises, il faudra que le gouvernement du Canada nous facilite la vie en simplifiant l'information, les créneaux et les réseaux d'accès à l'information.
L'entreprise innovante est préparée à tirer profit des nouveaux marchés et à faire face à la concurrence. Nous sommes favorables au maintien du régime de gestion de l'offre dans des secteurs qui sont moins présents à Québec même, mais qui le sont ailleurs au Québec.
Bref, nous sommes convaincus que l'élimination ou la réduction des barrières tarifaires permettront à nos réseaux et à nos entreprises d'exporter davantage. Encore une fois, il ne faut pas oublier la communication afin d'informer les entreprises sur la façon de s'y prendre, et le soutien à la commercialisation, qui est un facteur très important, comme l'ont été par le passé tous les crédits d'impôt à la recherche-développement.
Maintenant, nous sommes dans une phase de commercialisation. Nous avons des produits exportables et de classe mondiale. Il est très important non seulement d'informer les entreprises des avantages, mais également de les appuyer dans leur commercialisation.
Merci beaucoup de nous avoir écoutés.
Bonjour. Je suppose que vous n'avez pas eu beaucoup de temps pour en profiter, mais je vous souhaite quand même la bienvenue dans notre belle grande ville de Québec.
Québec International est l'agence de développement économique de la grande région de Québec. Nous soutenons et animons les secteurs de force de la région. En février dernier, Québec International a eu la chance d'animer une séance d'information sur le PTP destinée aux entreprises de la région. À l'automne dernier, nous avons animé à Québec une table ronde avec, entre autres, le secrétaire parlementaire David Lametti afin de mieux comprendre les enjeux auxquels doivent faire face les entreprises de la région en ce qui a trait au PTP. C'est ce regard que je veux partager avec vous ce matin.
Il est indéniable que le PTP représente une bonne occasion pour les entreprises de développer leurs marchés. Le PTP amènerait le Canada à conclure des accords de libre-échange avec 51 pays, ce qui reviendrait à accéder à 60 % de l'économie mondiale. Pour les entreprises d'ici, cela représente une occasion à ne pas rater.
L'accord assure aussi aux fournisseurs de services canadiens une plus grande prévisibilité en leur garantissant les niveaux d'accès actuels aux marchés ainsi qu'une amélioration future des mesures actuelles des différentes parties du PTP. Cela fait en sorte que non seulement nos entreprises manufacturières peuvent y trouver leur compte, mais également les entreprises de services. Ces entreprises offrent des services dans les domaines de la construction, de l'informatique et de la recherche-développement. Elles sont assez présentes dans la région de capitale nationale. Pour ces entreprises, le PTP représente des possibilités d'affaires.
Malgré les possibilités que représente l'ouverture à ces nouveaux marchés, rien n'est acquis, pour le moment, pour nos entreprises. Dans un contexte concurrentiel et de perpétuel changement dans leur environnement, les entreprises doivent bien se préparer. C'est un discours que vous devez entendre un peu partout actuellement, mais c'est ce qui préoccupe davantage nos entreprises.
Au-delà des possibilités que présente l'accès à ces nouveaux marchés, nos entreprises feront face à davantage de concurrence. Elles doivent donc être en mesure d'étudier les nouveaux marchés et les réseaux de distribution. Ils faut les aider à bien comprendre les règles qui entourent la pénétration de ces nouveaux marchés.
À cette fin, le gouvernement devra établir une stratégie et une politique claires de soutien à l'exportation pour les entreprises, allant bien au-delà de la valorisation des possibilités que peut présenter le PTP. Je vais y revenir un peu plus tard.
Au-delà de la stratégie de soutien à l'exportation, il y a le soutien à l'innovation, dont on a parlé plus tôt. Cela devra aussi faire partie de la réflexion du gouvernement, parce que nos entreprises, face à cette nouvelle concurrence, devront adapter leurs produits, mais également être extrêmement innovantes dans leur manière de faire les choses et essayer d'être un peu plus compétitives. On sait qu'il y a un retard sur ce plan. Il faut que les entreprises améliorent la qualité de leurs produits et services et qu'elles développent des compétences clés.
Le PTP présente des possibilités dans le domaine du commerce électronique, où on a également un retard à rattraper. Si on veut permettre à nos entreprises d'accéder à tout cela, il faudra les soutenir dans l'intégration d'une stratégie numérique importante dans la région. Il doit y avoir une stratégie d'exportation et une stratégie de soutien à l'innovation.
Nous trouvons intéressant le fait que le PTP entraînera une ouverture ou une mobilité beaucoup plus grande des personnes et des capitaux. Dans le volet innovation, cette ouverture permettra aussi à nos entreprises de mieux comprendre comment adapter un produit à la culture et à la langue. Dans le cas des jeux vidéo, par exemple, il est extrêmement important de bien saisir l'impact de ces aspects. La mobilité des personnes permettra probablement de mieux comprendre ces éléments pour développer ou adapter les produits.
Le Réseau québécois sur l'intégration continentale est un large réseau au Québec qui existe et travaille aux accords de libre-échange depuis 30 ans. Il regroupe le mouvement syndical, le mouvement des femmes, le mouvement étudiant, le mouvement populaire communautaire et celui de la défense des droits. C'est d'ailleurs le plus ancien réseau de cette nature, c'est-à-dire de type multisectoriel, dans l'ensemble des Amériques. Plus de 1 million de personnes y sont représentées.
Je vais commencer par ma conclusion et poursuivre en amont, compte tenu du temps qui nous est alloué. Par contre, je dois faire deux observations au départ.
Tout d'abord, cela concerne la nature même de la consultation. Je n'en suis pas certain, mais j'ai l'impression que vous vous préoccupez, comme nous, du cadre de la consultation. Comme l'accord est déjà signé, la société civile se retrouve devant deux options: approuver ou rejeter l'accord. C'est donc une consultation dans le cadre de laquelle on peut difficilement faire des recommandations. C'est assez inusité.
Ma deuxième observation préliminaire est qu'il faut absolument aborder le PTP dans un cadre plus large. Nous le voyons carrément comme une architecture qu'on est en train de mettre sur pied. J'invite donc le Comité, les élus qui représentent la société, à aborder le PTP de façon large, en incluant l'accord avec l'Union européenne. Ce dernier n'a pas non plus fait l'objet de consultations et n'a pas été signé. Il est donc possible d'en transformer les enjeux problématiques. L'Accord sur le commerce des services de même que l'accord avec la Chine doivent faire partie d'un portrait global. J'encourage donc formellement le Comité, aujourd'hui, à étudier l'accord avec l'Union européenne en profondeur.
Avant d'en arriver à ma conclusion initiale, j'aimerais vous inviter à sortir de la logique imposée par les accords de libre-échange, soit le fait de définir qui sont les gagnants et qui sont les perdants. Après 30 ans de libre-échange avec l'ALENA, c'est le point de vue que nous avons adopté. Nous avons fait des études sur le sujet, et il s'avère que le modèle de libre-échange ne fonctionne pas. Il faut se sortir de ce carcan, de cette idée voulant que le libre-échange est bon en soi. Il faut repenser les principes. Nous sommes d'avis qu'il faut absolument baser la discussion sur des principes de coopération et de complémentarité, plutôt que sur la concurrence et la prise d'assaut des marchés.
J'ai été étonné d'entendre les représentants des chambres de commerce dire hier et aujourd'hui que le PTP menait à une ouverture des marchés asiatiques et à une réduction des tarifs. Le fait est que, dans les pays couverts par le PTP, 97 % des tarifs sont déjà éliminés. Je dis bien 97 %. Quand on entend dire que nous allons prendre d'assaut les marchés internationaux, il faut se demander pourquoi nos entreprises n'ont supposément pas déjà pris d'assaut ces marchés. On dit que nous ne sommes pas prêts et on parle d'information. Or les entreprises auraient pu s'internationaliser, mais ne l'ont pas fait. Cela renvoie fondamentalement au problème de la structure économique du pays et du Québec. Il faut soulever ce point.
Le PTP est un mauvais accord sur les plans économique, social, politique et environnemental. C'est un mauvais accord parce qu'il n'est pas un traité de commerce. C'est un bien mauvais départ, étant donné qu'il est supposément un traité commercial.
De quoi s'agit-il? Le PTP est essentiellement un accord qui permet de mettre sur pied un système de règles qui restreint la capacité des États de légiférer. Il est question de barrières non tarifaires, mais il s'agit là d'un euphémisme. En réalité, il s'agit de législation, de protection de la santé, d'éducation, de services publics, de mesures pour stimuler l'économie de façon active et d'environnement, en d'autres mots, de toutes les normes qui peuvent réglementer et orienter les investissements. C'est vraiment de cela qu'il est question.
Vous avez beaucoup entendu parler de l'investisseur-État, du mécanisme qui permet aux entreprises d'intenter des poursuites. Nous vous le disons d'emblée: ce mécanisme doit être retiré des accords commerciaux. Il n'a pas lieu d'être. Je ne vais pas m'étendre là-dessus. Vous avez en effet entendu suffisamment d'interventions à ce sujet.
Il faut en outre exclure les services publics des négociations. Pour la première fois, la culture est mise sur la table, et ce, dans un esprit de commercialisation.
Il faut inclure des obligations contraignantes pour les entreprises, de façon à ce qu'on redonne préséance aux droits économiques, sociaux et culturels, au-delà des droits privés qui sont déjà suffisamment protégés par...
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Il ne faut surtout pas s'isoler. Dans le dossier de l'accord avec l'Europe, chaque province était partie prenante des discussions et des négociations. Au Québec, c'est M. Pierre Marc Johnson qui a participé à toutes les discussions, qui a discuté de tous les enjeux, et Mme Marois a signé l'accord avant de le rendre public.
En ce qui concerne le PTP, lorsque 11 partenaires commerciaux, dont le plus important, notre partenaire principal, les États-Unis, veulent renégocier un accord qui a déjà été négocié auparavant, nous ne pouvons pas nous exclure des discussions. Rappelons que de 72 % à 75 % de nos produits sont exportés aux États-Unis. En ce sens, il est important d'entendre l'opinion des différents intervenants, mais il faut prendre les décisions nécessaires afin de ne pas être exclus de l'entente. Lorsque les 11 autres partenaires négociaient, il fallait y être, faute de quoi nous n'avions pas voix au chapitre. Nous y étions donc.
Je vais maintenant m'adresser aux représentants du Mouvement Desjardins.
J'ai aimé vous entendre. Vous vous intéressez à l'avenir de l'agriculture et à la relève agricole, tout comme moi. J'aimerais vous entendre parler des mesures compensatoires proposées et de la manière dont elles ont été accueillies par vos clients. Également, pouvez-vous nous dire comment ces mesures compensatoires pourraient permettre d'assurer un avenir aux agriculteurs?
:
Monsieur Aubut, j'aimerais formuler un commentaire.
Hier, nous avons entendu M. Stéphane Forget nous parler de la force du réseau des chambres de commerce au Québec. Bien sûr, nous nous entendons sur le besoin de stratégies, autant de commercialisation que d'innovation. Cela semble faire consensus. Je ne sais pas si le consensus s'étendra à tout le pays. Cependant, au Québec, nous constatons depuis deux jours, et vous l'avez répété ici même à Québec, qu'il n'y a pas de guerre Québec-Montréal de quelque nature que ce soit. Les chambres de commerce partout au Québec forment un réseau très consolidé qui peut préparer l'avenir en mettant en place des programmes de commercialisation et d'innovation.
Je m'adresse maintenant à Mme Lagacé.
La question de la mobilité de la main-d'oeuvre m'amène à parler de main-d'oeuvre à Québec. Notre gouvernement, le gouvernement conservateur précédent, a toujours considéré que chacun des hommes et des femmes canadiens aptes à travailler devait le faire et trouver une dignité dans le travail. Nous nous devions, bien sûr, durant les périodes où l'emploi était rare, d'être en mesure d'agir et de faire travailler les gens. À présent, le gouvernement veut permettre aux gens de vivre peut-être plus longtemps de l'assurance-emploi.
Quel est l'état de la situation quant à la main-d'oeuvre et au besoin de main-d'oeuvre dans la grande région de Québec?
:
Dans la région de Québec, nous faisons office d'éclaireurs. Notre région connaît depuis quelques années un taux de chômage oscillant autour de 5 %. L'année dernière, il se situait à 4,7 %, avec un taux d'activité avoisinant les 65 %, ce qui fait que le besoin de main-d'oeuvre est l'enjeu prioritaire pour l'ensemble des secteurs de la région.
Actuellement, nous nous mobilisons pour attirer la main-d'oeuvre. Nous effectuons même des missions de recrutement à l'étranger afin de pourvoir différents postes. À titre d'information, nous en sommes à notre 25e mission de recrutement à l'échelle internationale. C'est un enjeu dans différents secteurs en croissance, que ce soit celui des technologies appliquées, par exemple le jeu vidéo et les technologies de l'information, ou celui de l'industrie manufacturière. Nous avons besoin de soudeurs, de mécaniciens, d'opérateurs.
C'est un enjeu qui nous occupe depuis 2008. Peu importe de quelle manière les chiffres sont présentés, la situation n'ira pas en s'améliorant. Nous devons nous ouvrir davantage au recrutement à l'échelle internationale pour combler les besoins en main-d'oeuvre dans la région.
Cet accord lie les mains des gouvernements en matière de politique environnementale. On sait que le gouvernement libéral souhaite être très actif dans ce dossier. Or plusieurs mécanismes limitent la capacité des gouvernements de mettre en avant des mesures solides sur le plan environnemental.
Par exemple, le mécanisme d’arbitrage investisseur-État apporte des restrictions et permet aux entreprises de poursuivre un État si sa politique ne leur convient pas ou si elle réduit leurs profits.
Également, il y a la perspective du mécanisme de coopération réglementaire, qui amène déjà les États à consulter leurs opposants ou adversaires économiques afin de voir si certaines mesures seraient restrictives par rapport à leur désir de faire des affaires.
Plusieurs éléments restreignent donc vraiment la capacité de légiférer sur le plan environnemental.
Je vous remercie de vos exposés. Ils ont tous fait ressortir certaines inquiétudes et certains avantages concernant le PTP, ce que nous avons souvent entendu à ce comité.
J'aimerais dire à Mme Lagacé que nous avons entendu Jim Balsillie de Research in Motion la semaine dernière, qui nous a dit de réfléchir à deux fois avant de signer le PTP, car avec celui-ci, il n'y aurait plus d'innovation canadienne de cet ordre de grandeur à l'avenir. Il a aussi de sérieuses réserves dont vos membres conviennent probablement.
Je m'adresse à M. Serinet.
Le fait que dans les pays couverts par le PTP, 97 % des tarifs sont déjà éliminés pour les exportations canadiennes mérite d'être répété. Nous savons cela; nous l'avons entendu de nombreux autres témoins avant vous. L'aspect inquiétant est que des 30 chapitres de ce document de 6 000 pages, il n'y en a que six qui portent sur le commerce dans son sens traditionnel et que des témoins nous ont dit qu'ils verraient d'un bon oeil.
Il est clair qu'au titre des dispositions de RDIE, les sociétés étrangères ont plus de droits au Canada que les sociétés canadiennes. Pouvez-vous nous parler un peu de cela? Des 19 personnes qui ont comparu hier, je crois que 19 ont dit que le mécanisme de RDIE les inquiète. Pouvez-vous nous en dire davantage là-dessus?
Je vais répéter ce que j'ai dit. Les marchés sont déjà ouverts à 97 %. On nous dit que cet accord nous donne la possibilité d'accéder aux marchés, mais c'est faux. En réalité, on met en avant un système de règles qui favorise des acteurs commerciaux, transnationaux, les grandes multinationales. Certaines sont canadiennes; beaucoup sont américaines. On leur donne des droits et des privilèges qui sont absolument inacceptables. On leur donne un accès direct à un tribunal extranational qui se soustrait à notre propre système juridique pour poursuive un État lorsque celui-ci fait valoir une politique publique qui restreint la possibilité de faire des profits.
À l'heure actuelle, on dénombre plus de 700 poursuites. Le Canada est celui qui fait l'objet du plus grand nombre d'entre elles, soit 39. Cela touche diverses questions, notamment le salaire minimum, l'environnement, les mesures de santé et les décisions judiciaires. On donne donc aux entreprises transnationales des outils et des pouvoirs démesurés.
Or les citoyens, voire nos propres entreprises nationales, n'ont pas accès à ces outils pour poursuivre un autre État. Nous connaissons ce système depuis que l'ALENA existe, et il faut vraiment y mettre fin. C'est un coup manqué, à mon avis, pour ce qui est de la négociation et de la possibilité de retirer des accords de libre-échange ce mécanisme d'investisseur-État. Le PTP reproduit, répand et élargit ce mécanisme qui donne un pouvoir démesuré aux multinationales. C'est absolument inacceptable.
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Il est sûr que l'innovation demeure un enjeu pour nous, que ce soit par rapport au PTP ou aux outils que nous mettons en place pour appuyer nos entreprises. Actuellement, le positionnement d'une entreprise passe avant tout par sa capacité à bien positionner son service ou son produit et d'être innovante, que ce soit en matière de gestion pure ou de mise en marché.
Il est évident que, dans la courbe des services permettant d'appuyer une entreprise, l'innovation vient au premier plan. Nous avons du retard dans cette dynamique au Québec et dans l'ensemble du Canada. Toutes les actions prises en matière d'innovation sont au premier plan, qu'elles concernent la stratégie marketing ou l'intégration d'une stratégie du numérique pour que nos PME soient à jour.
Il faut comprendre aussi que notre tissu industriel est formé de petites entreprises. Je ne me rappelle pas le chiffre exact, mais c'est près de 80 % d'entre elles qui ont 20 employés et moins. C'est un pourcentage énorme. Une entreprise, pour être en mesure de se positionner, n'a d'autre choix que de passer par un processus d'innovation qui lui permet de bien cadrer cette dynamique. Pour que les entreprises puissent accélérer ce processus, il faut les accompagner au moyen de programmes et les soutenir tant sur le plan financier que sur celui de l'expertise.
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Ce que je trouve intéressant dans la discussion est le fait qu'on en appelle à une politique active, à une politique industrielle et d'innovation, mais cela n'a pas grand-chose à voir avec les accords de commerce, étant donné que les marchés sont déjà ouverts. Dans les 10 dernières années, sous les conservateurs, il y a eu un laisser-faire en matière de politique active envers l'innovation et l'industrie.
Les accords viennent restreindre la capacité à mettre en avant de telles politiques. Les accords du PTP et de libre-échange avec l'Union européenne, entre autres, empêchent de cibler des résultats, c'est-à-dire d'axer les investissements sur le maintien de l'expertise ici, sur la création d'emplois et sur certains secteurs de travailleurs et travailleuses.
Une politique active d'innovation doit avoir cette liberté de légiférer et de réglementer. Or les accords de libre-échange, tels qu'on les connaît, limitent cette capacité. Je conviens avec mes collègues qu'il faut une politique industrielle active en matière d'innovation, mais les accords restreignent cette capacité, d'où notre rejet de l'accord du PTP.
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Bonjour. Je vous remercie de vos excellents exposés. Ils étaient assez diversifiés, bien que suivant quelque peu un même thème.
En 1999, j'ai commencé à travailler dans le domaine du commerce à l'exportation, surtout au niveau de la formation aux échanges commerciaux; je sais donc que les points que vous avez mentionnés ici sont très importants.
Vous dites que 98 % des entreprises sont des PME. C'est une chose dont le Québec n'a pas le monopole. Nous l'avons entendu dire partout au pays. Quant aux thèmes mentionnés, nous commençons à voir se dégager des thèmes communs. Comment, d'après vous, pouvons-nous mieux appuyer ces petites entreprises, augmenter leur sensibilisation aux politiques commerciales, et les aider à travailler au développement de la responsabilité sociale de l'entreprise, ce que le Mouvement Desjardins a si bien fait et qui vous a mérité des prix? Comment réunissons-nous tout cela pour créer une collectivité plus forte et un pays plus fort?
:
Merci, monsieur le président, et merci à vous tous de votre présence ici. C'est merveilleux de pouvoir participer à ceci.
De toute évidence, nous aurions pu vous demander à tous de venir à Ottawa, mais une des choses que je trouve très importantes quand nous voyageons ainsi, c'est la découverte de l'endroit où nous sommes quand nous posons ces questions. Le trajet par autobus entre Montréal et Québec a été une véritable révélation. Je ne l'avais jamais fait auparavant. C'est ce que je faisais remarquer à quelqu'un.
J'ai été frappé par le nombre incroyable de groupes de PME qui se trouvaient le long du corridor. Je voyage en voiture de Chatham à Ottawa, et vous n'avez rien à nous envier. C'est tout simplement incroyable. Je vois la culture d'entrepreneuriat qui, je l'ai toujours su, existe au Québec, mais la voir de mes propres yeux est stupéfiant.
Étant moi-même un agriculteur en quelque sorte, je regardais les fermes et je vois que vous procédez même à l'assainissement de terres à ce stade. Cela me dit qu'il y a un marché pour votre... Je suppose que vous cultivez le maïs, le soya et le blé ici également. Vous avez les degrés-jours de croissance pour faire tout cela, et vos fermes deviennent de plus en plus grandes et recherchent des marchés. J'ai aussi vu quelques exploitations porcines, quelques exploitations avicoles et une énorme exploitation laitière sur mon chemin.
Je ne cherche pas... En cour, on me dirait que j'incite le témoin à répondre dans un sens donné; et dans un certain sens, j'imagine que c'est ce que je fais. Après avoir vu tout ce que j'ai vu, je suppose qu'il doit être important pour vos fermiers d'accéder à des marchés. Ai-je raison?
:
Il faut reconnaître que, au cours des deux dernières années, dans le secteur manufacturier, l'économie canadienne et québécoise, entre autres, a eu des difficultés. Les déficits commerciaux viennent le confirmer. Comme je disais tout à l'heure, durant quatre années sur six, nous avons affiché un déficit commercial.
Le PTP, en soi, favorise l'importation des produits manufacturiers à valeur ajoutée et favorise l'exportation des ressources naturelles. L'agriculture est une de ces ressources, mais il y a aussi le pétrole, le gaz, et ainsi de suite. L'accord ne stimule pas les secteurs d'innovation et ne favorise pas les politiques industrielles. En effet, nous pouvons être beaucoup plus actifs et proactifs dans le développement d'une stratégie industrielle. Je crois que c'est sur ce plan qu'il faut travailler à l'échelle nationale.
Cependant, ce sont aussi des choix de société. Il faut déterminer quels éléments font partie d'un système dans lequel ils vont s'imbriquer les uns dans les autres. C'est pour cela que je suggérais, au départ, de s'éloigner du concept de gagnant-perdant. Il faut mettre de côté cette idée selon laquelle le malheur des uns fait le bonheur des autres, qu'il y a des gagnants et des perdants, les producteurs porcins versus les producteurs laitiers. Il y a toute une stratégie à repenser. Je crois que les différents acteurs, non seulement les acteurs économiques, mais aussi les mouvements sociaux, doivent pouvoir participer aux discussions.
Dans le cas de l'optique-photonique, les gens vendent presque à 100 % à l'extérieur du pays, notamment en Asie. Ils vendent effectivement des morceaux de quelque chose, donc pour le secteur manufacturier, c'est très bon pour la région. Il s'agit bel et bien d'innovation.
Il y a d'autres secteurs également en recherche-développement, par exemple l'industrie de l'eau. À l'Université Laval et à l'Institut national de la recherche scientifique, ou l'INRS, il y a des projets extraordinaires dans ce domaine.
Quand on parle de mondialisation, il faut regarder l'ensemble des occasions en matière d'innovation. Il faut connaître les produits qu'on a développés, mais, encore une fois, il faut revenir à l'information. Il faut déterminer quels sont les canaux les plus faciles et les plus simples. L'INO a permis de développer, à Québec, des entreprises qui rayonnent partout dans le monde grâce à des produits très innovants à haute valeur ajoutée. Je pense qu'on peut faire la même chose dans d'autres créneaux.
Étant donné qu'on parle d'infrastructure, je vais me permettre de parler d'un autre projet. On a rencontré M. Desjardins-Siciliano au sujet d'un TGF dans le corridor Québec-Windsor. Je ne me souviens plus qui vient de Windsor, mais je l'ai rencontré un peu plus tôt. L'accessibilité et la mobilité des personnes devient aussi un enjeu très important. On parle de l'accord du Partenariat transpacifique, mais l'enjeu de la mobilité des personnes est également très important et le gouvernement doit poursuivre ses investissements en infrastructure.
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Bonjour tout le monde, et bienvenue à notre comité sur le commerce international.
Nous procédons à un dialogue sur le PTP et sur la façon dont il touche les Canadiens, et nous produirons un rapport sur le sujet. Nous voyageons dans tout le pays. Nous avons commencé par les provinces de l'Ouest, sommes maintenant au Québec et nous serons demain en Ontario. Nous visiterons les provinces atlantiques et les territoires à l'automne.
Nous entendrons aujourd'hui Fruit d'Or. Nous sommes passés devant votre installation hier, et nous espérons pouvoir la visiter.
Les éleveurs de porcs, les éleveurs de volaille et, je crois, les manufacturiers sont des nôtres également.
Chaque groupe a cinq minutes pour un exposé, puis suivra un dialogue avec les députés.
Nous commençons par Fruit d'Or. Allez-y, monsieur.
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Bonjour, monsieur le président.
Merci aux membres du Comité de m'accueillir ce matin.
Je suis heureux de témoigner devant vous, au nom de l'entreprise Fruit d'or, au sujet de l'accord du Partenariat transpacifique.
Fruit d'Or a été créée en 2000 à Villeroy, dans la région du Centre-du-Québec, là où s'est développée de façon massive la production de canneberges. Il y a 35 ans, la région était pratiquement constituée de terrains vagues. À présent, si vous la visitez, vous allez y trouver près de 70 producteurs de canneberges qui s'y sont installés au cours des 35 dernières années.
Fruit d'Or est une entreprise spécialisée dans la transformation de petits fruits, précisément des canneberges et des bleuets. Les produits de l'entreprise les plus en demande sont la canneberge séchée et le bleuet séché. Nous fabriquons également des jus et des concentrés de bleuets et de canneberges. Notre entreprise est déjà présente dans plus d'une cinquantaine de pays au monde. Nous dépendons donc fortement des exportations pour son développement. Plus de 85 % de notre chiffre d'affaires provient de l'exportation. Nous exportons en Asie, aux États-Unis et en Europe, un peu partout.
Fruit d'Or compte plus de 225 employés, des gens qui travaillent dans nos usines et dans nos bureaux. Si l'on ajoute à cela les producteurs et fournisseurs de l'entreprise, cela représente tout près de 500 emplois directement liés aux exportations et au développement des marchés.
Je vous confirme d'emblée que Fruit d'Or est en faveur du Partenariat transpacifique, parce que, dans notre secteur, celui de la culture des petits fruits, il y a beaucoup de mécanismes de protection, de taxes entre autres, qui s'appliquent aux produits d'exportation. En ce qui concerne le bleuet congelé, c'est le cas au Japon, au Vietnam, en Malaisie, en Australie et en Nouvelle-Zélande. Les taxes sur les produits transformés sont parfois très importantes, entre autres en Malaisie où nous exportons déjà.
Nos principaux concurrents sont les États-Unis et le Chili. Ce sont deux autres pays producteurs de canneberges séchées et de bleuets séchés. Dans les pays importateurs, il existe déjà des ententes de libre-change, entre autres avec le Chili. Je donnais un exemple tout à l'heure aux gens du Mouvement Desjardins. Nous avons perdu, l'an dernier, l'un de nos plus gros clients européens parce que le Chili a une entente de libre-échange avec l'Europe. Il nous faut payer une taxe de 17,6 % sur chaque livre de canneberges séchées que nous envoyons là-bas, alors que le Chili est exempt de taxes. Fruit d'Or a donc perdu un client qui produisait 1,7 million de dollars de ventes annuelles. C'est dommage, mais il n'y a pas grand-chose que nous puissions faire pour compenser une taxe de 17,6 %. Nous pouvons faire preuve d'efficacité, mais il y a quand même une limite à ce qui est réalisable.
Nous parlons beaucoup de l'agriculture au Québec dans son ensemble. Nous savons que le secteur laitier y est très important. Je fais moi-même partie d'une famille de producteurs laitiers. Mon frère en est un. Nous avons souvent des débats animés quant à la possibilité d'ouvrir les marchés, plutôt que de conserver les mécanismes de protection que nous possédons déjà. L'un des arguments que j'apporte toujours, c'est qu'il faut envisager ce que sera le visage de l'agriculture au Québec dans 10, 15 ou 20 ans. Est-ce que le secteur laitier sera toujours celui qui permettra à l'industrie agricole de se développer, ou d'autres secteurs prendront-ils le pas sur lui pour faire en sorte que l'industrie québécoise poursuive son développement?
Par exemple, l'industrie de la canneberge n'existait pas ici il y a 35 ans. Aujourd'hui, elle génère plus de 2 000 emplois, seulement dans la région du Centre-du-Québec. Donc, je crois qu'il y a possibilité pour plusieurs entreprises d'avoir du succès sur les marchés étrangers en étant soumis au moins de contraintes possible.
En ce qui nous concerne, lorsqu'il est question de perturbations ou d'entraves à l'accès aux marchés étrangers, chaque cas est différent. Dans certains pays, par exemple le Vietnam, nous avons de la difficulté à vendre des canneberges, parce que les acheteurs ne savent pas de quoi il s'agit. C'est la première fois qu'ils voient ce fruit. Si nous allons au Japon et parlons aux Japonais de bleuets séchés, c'est une tout autre chose. Les Japonais nous racontent des histoires qui remontent à la Seconde Guerre mondiale. Paraît-il que, lorsque des chasseurs américains étaient abattus par les Japonais, ces derniers trouvaient toujours un panier de bleuets dans la carcasse. Ils en ont conclu que le bleuet était excellent pour la vue et que c'était pour cela que les pilotes transportaient des paniers de bleuets dans les avions. J'ai appris cette histoire au Japon.
Je peux cependant vous dire, en tant que Canadien dirigeant une entreprise spécialisée dans la transformation de petits fruits, que l'image des produits canadiens et des grands espaces que nous habitons nous donne une longueur d'avance sur plusieurs de nos concurrents internationaux. Je vous parle du petit bleuet sauvage du Québec, mais il faut voir qu'à l'étranger, encore une fois, le fameux bleuet cultivé se retrouve dans presque tous les pays et il me fait concurrence sur les marchés.
Alors, le fait d'avoir des produits...
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Bonjour, monsieur le président et chers députés membres du Comité.
Je m'appelle David Boissonneault. Je suis président des Éleveurs de porcs du Québec. Je suis accompagné de Mme Leruste, qui est responsable des communications avec les éleveurs.
Les éleveurs de porcs du Québec représentent 3 300 producteurs partout en province. La filière porcine québécoise génère des retombées économiques de 2,5 milliards de dollars dont bénéficient toutes les régions. C'est 26 500 emplois qui sont répartis partout au Québec. Le Québec est la première province productrice de porcs au Canada. Nous représentons 40 % de la production totale canadienne. Nous représentons plusieurs entreprises d'abattage sur notre territoire. Notre système de mise en marché collective nous permet d'abattre 100 % des porcs élevés ici, ce qui génère de la valeur ajoutée et une chaîne de valeur forte pour l'économie de nos régions. Au total, le Québec exporte 70 % de sa production. Comme le disait mon confrère, nous sommes très dépendants des exportations. Les exportations québécoises représentent 45 % de la valeur des exportations canadiennes. Au cours des 5 dernières années, le porc canadien a été exporté dans plus de 125 pays, ce qui représente 9 % de tout le commerce mondial du porc.
La viande de porc est le produit bioalimentaire le plus exporté par le Québec, à raison de 1,45 milliard de dollars en 2015, loin devant des secteurs comme le chocolat, le soya et le sirop d'érable. Le secteur porcin génère une balance commerciale positive comparable à celle des secteurs du bois d'oeuvre et de l'hydroélectricité. À cet égard, les accords de libre-échange sont cruciaux pour la vitalité et le dynamisme de notre industrie. C'est pourquoi Les éleveurs de porcs du Québec accueillent favorablement cet accord commercial qui inclut 800 millions de personnes et de consommateurs et 40 % de l'économie mondiale.
Selon différentes analyses faites pour le Conseil canadien du porc, cette entente représente pour nous plus de 4 000 emplois et 300 millions de dollars en exportations. À l'inverse, si on ne conclut pas l'accord, cela peut mener à une diminution de nos exportations et de nos emplois. Une étude récente, publiée en avril 2016 par l'Institut C.D. Howe, démontre que le porc est en tête de liste dans le secteur bioalimentaire pour ce qui est de bénéficier d'un tel accord.
Grâce à cette entente, les éleveurs de porcs québécois pourront jouer à armes égales avec nos concurrents américains. C'est à mon avis un aspect important, comme mon collègue de Fruit d'Or le disait tout à l'heure. Il faut absolument avoir de tels outils pour être concurrentiel.
De plus, parmi les marchés très importants, il y a le Japon, qui constitue déjà notre deuxième marché en importance et qui reçoit 18 % de nos exportations de viande de porc. Cette entente devrait permettre à la filière porcine québécoise de conserver sa capacité à exporter de la viande de porc au Japon dans des conditions concurrentielles par rapport à celles des États-Unis, qui sont notre principal concurrent.
Cela nous permettrait également de nous positionner avantageusement par rapport aux pays qui ne participent pas à l'entente, tels que le Brésil et le Danemark, qui sont des joueurs assez féroces sur les marchés de l'exportation.
Je pense notamment à Olymel, qui a des bureaux dans plusieurs villes asiatiques; à F. Ménard, qui vient d'investir plusieurs millions de dollars dans une usine pour exporter davantage au Japon; à Lucyporc, qui exporte 90 % de sa production au Japon avec son fameux porc Nagano; à Aliments Asta et aux Viandes duBreton, qui sont également grandement présents sur les marchés d'exportation. Il est important de noter que le Japon reconnaît la grande qualité du porc québécois. Les coupes à plus forte valeur ajoutée y sont exportées, ce qui constitue le marché le plus rémunérateur pour les exportateurs de porc québécois.
Par ailleurs, le PTP permettrait d'établir des liens d'affaires avec d'autres pays membres, par exemple le Vietnam, un marché de 90 millions de consommateurs. Le Vietnam arrive au deuxième rang pour la consommation de porc par habitant, après la Chine. Selon les prévisions de la FAO et de l'OCDE, il est bien mentionné qu'il y aurait une croissance importante de l'économie dans les régions de l'Asie, ce qui fait en sorte que la croissance de consommation de porc qui est prévue jusqu'en 2020 est de 14 %. À cet égard, le Canada, à titre de membre fondateur, serait en mesure de négocier les conditions d'entrée d'autres pays asiatiques en forte croissance qui chercheraient à se joindre au PTP, comme les Philippines, la Thaïlande, l'Indonésie et peut-être même la Chine.
J'avais d'autres éléments à souligner, mais je vais conclure. En terminant, je veux mentionner à quel point les exportations sont importantes pour nous.
Un secteur comme le nôtre est vraiment dépendant des ententes commerciales et de l'accès aux marchés. Je pense vous l'avoir démontré. Le gouvernement doit comprendre qu'il s'agit d'une stratégie globale. L'accès aux marchés est important, mais pour saisir ces occasions et utiliser le plein potentiel de notre filière, il faut disposer de tous les outils nécessaires. Qu'il s'agisse de la gestion des risques, de la recherche, de la santé ou du bien-être animal, notamment, notre secteur a besoin d'investissements majeurs. Nous accusons des retards à cet égard.
Il est important que cela se fasse dans le cadre d'une stratégie globale et à l'intérieur des ententes, mais il est aussi important que le gouvernement applique des stratégies pour soutenir le développement des divers maillons de notre industrie.
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de nous donner l'occasion d'exprimer notre point de vue sur l'accord du Partenariat transpacifique.
Notre organisation, les Éleveurs de volailles du Québec, regroupe 814 éleveurs de poulets et de dindons au Québec. Notre secteur génère 25 000 emplois et des retombées économiques, relativement au PIB, de presque deux milliards de dollars, et ce, pour le Québec seulement.
Nous reconnaissons que la signature d'un accord commercial tel que le PTP représente des retombées économiques importantes pour le Canada. Les Éleveurs de volailles du Québec ont toujours appuyé cette démarche. Par contre, nous avons un système de gestion de l'offre, et nous avons toujours demandé au gouvernement canadien de limiter les dommages que le PTP pourrait causer à la gestion de l'offre.
Le Canada importe beaucoup plus de poulet que les pays signataires du PTP, incluant les États-Unis, ce qui a une incidence sur les ouvertures que peuvent offrir ces pays. Nous considérons que c'est une question d'équité. Or, pour nous, l'équité constitue un aspect très important de cet accord. En ce qui concerne l'accès prévu relativement au poulet dans l'accord signé, il va passer de 7,5 à 9,6 %. Pour le dindon, il passera de 3,5 à 5,5 %. Cet accès supplémentaire est très important, sur le plan économique, pour les éleveurs de volailles du Québec et du Canada. Cela peut générer la perte de 2 600 emplois et un PIB de 175 millions de dollars.
C'est donc un coup dur pour l'industrie de la volaille, mais également pour celle de toutes les régions canadiennes. Par contre, cette difficulté pourrait être atténuée par l'élimination du contournement des contrôles d'importation et par des mesures de compensation.
C'est ce qui a été annoncé le 5 octobre par Agriculture Canada. En effet, le gouvernement a annoncé des mesures de sauvegarde et des contrôles beaucoup plus rigoureux à la frontière. Or, si ces contrôles sont appliqués, l'impact financier sera beaucoup moins sérieux pour les Canadiens.
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De façon un peu plus spécifique, j'ajouterai que le communiqué qu'Agriculture Canada nous a envoyé, le 5 octobre, contenait différents engagements quant à trois mesures de contournement des contrôles de l'importation.
Le premier engagement concernait le Programme d'exonération des droits. Celui-ci permet aux transformateurs canadiens d'importer, de transformer et de réexporter des produits sur une période de quatre ans. Actuellement, 96 millions de kilos de poulet passent par ce programme. Cela représente 9 % de notre production, et c'est majeur pour nous. Nous soupçonnons qu'une partie de ces produits ne sont pas réexportés. Un programme conçu pour la réexportation existe déjà: le Programme d’importation pour réexportation, ou le PIR. Il est vraiment conçu pour les produits sous gestion de l'offre. Nous pensons qu'il s'agit là d'un dédoublement. Retirer de ce programme les produits sous gestion de l'offre serait vraiment un désengagement, et nous incitons le gouvernement à maintenir sa position.
Ensuite, le contournement lié aux importations frauduleuses de poules de réforme est également un problème très important pour notre industrie. Concrètement, du poulet entre au pays sous le vocable « poule de réforme ». Or ce sont des importations frauduleuses. Environ 10 % de notre production est importée sous le vocable « poule de réforme ». Une portion de cette importation est légitime, mais une autre ne l'est pas. Selon les statistiques dont nous disposons, en 2012-2013, le Canada aurait importé plus de viande de poitrine de volaille de réforme que tout ce qui a été produit aux États-Unis. Cela porte donc vraiment à croire qu'il y a de la fraude à cet égard. Nous demandons donc au gouvernement, comme ce qui a été annoncé dans le communiqué qui nous a été envoyé le 5 octobre, de vraiment mettre en place une certification obligatoire pour la volaille de réforme importée au Canada — cela doit être certifié — et d'utiliser les tests d'ADN développés pour identifier la poule de réforme.
Finalement, la dernière mesure de contrôle de l'importation devrait s'attarder aux mélanges définis de spécialité, à savoir l'utilisation de sauces ou de garnitures dans les produits qui contiennent 87 % et moins de poulet. Quelques entreprises utilisent actuellement un subterfuge: elles mettent plus de 13 % de sauce dans des boîtes d'ailes de poulet, si bien que le produit n'est plus assujetti au même tarif. Cela fait également partie des problèmes que devrait régler le gouvernement.
Je vais laisser M. Leblanc conclure.
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Merci, monsieur le président.
[Français]
Chers membres du comité, monsieur Lebel, l'organisation Manufacturiers et Exportateurs du Québec est heureuse aujourd'hui de parler au nom de ses 900 membres du Québec et des plus de 20 000 entreprises manufacturières québécoises.
Vous savez que le secteur manufacturier est le secteur le plus important de notre économie, au Québec et au Canada. Il représente 12 % du produit intérieur brut. Au Québec, il génère 550 000 emplois bien rémunérés et à valeur ajoutée. La contribution du secteur manufacturier est encore plus essentielle pour l'économie du Québec et du Canada, au moment où le secteur des ressources naturelles ne peut pas constituer le levier qu'il était encore il y a à peine deux ans.
Pour parler simplement, je signalerai, d'entrée de jeu, que le secteur manufacturier québécois ne peut pas prospérer dans une petite économie comme la nôtre. Nous devons exporter pour grandir. Nous le faisons déjà. Plus de la moitié de notre production s'en va ailleurs. Nous faisons partie de chaînes de fabrication américaines, entre autres; nous exportons directement des produits finis ou semi-finis dans le monde. Il faut savoir que les biens manufacturés représentent 75 % du total des exportations québécoises. Même si le marché américain demeure évidemment une priorité pour nous, de plus en plus de manufacturiers québécois regardent actuellement les possibilités ailleurs dans le monde.
Nous soutenons donc, bien évidemment, les accords qui vont permettre la libre circulation des biens et des marchandises, pour autant que ces accords permettent à nos manufacturiers un accès aux marchés étrangers égal aux occasions de nos compétiteurs de pénétrer le marché canadien. Lorsqu'on lit l'entente et qu'on la prend au pied de la lettre, on constate que c'est actuellement le cas. Nous soutenons aussi ces accords dans la mesure où ils ne viennent pas appuyer seulement le secteur des ressources et ajouter des obstacles aux accords actuels, comme celui que nous avons avec nos voisins américains et mexicains.
C'est donc sans surprise que nous, Manufacturiers et Exportateurs du Québec, ainsi que notre composante nationale, Manufacturiers et Exportateurs du Canada, avons demandé et soutenu la mise en vigueur du Partenariat transpacifique. Nous sommes les avocats principaux de ce genre d'accord au Québec, et vous pouvez compter sur nous pour continuer à l'être dans les années à venir. La présentation en PowerPoint que je joins fait état des nombreuses occasions pour le Québec que vous connaissez sans doute par coeur.
Nous exprimons toutefois certaines réserves dont je veux discuter aujourd'hui. Mentionnons d'abord deux réserves quant à l'entente elle-même. Nous sommes, évidemment et sans surprise, préoccupés par le protectionnisme américain qui s'exprime au moyen de la Buy American Act, notamment pour ce qui est des contrats publics des autorités américaines. C'est notre première réserve à l'égard de l'entente actuelle.
Pour ce qui est de notre deuxième réserve, nous aurions souhaité que la phase d'abaissement des tarifs dans le monde respecte le même échéancier que celui des manufacturiers américains et, finalement, qu'un mécanisme efficace soit mis en place pour contrer les exercices de manipulation des devises qui pourraient nous menacer à moyen et à long terme. Nous l'avons vu cet année dans le cas de la Chine et nous souhaitons que, dans l'espace dont nous allons nous doter, nous soyons à l'abri de telles manipulations par certaines juridictions et certains États. Ce sont nos réserves quant à l'entente elle-même.
Je voudrais également vous faire part de certaines réserves importantes que nous avons et qui ont trait aux choix que nous ferons ici, au Québec et au Canada. Nous aurons sans doute plus de facilité à passer par-dessus ces obstacles parce que cela dépendra des choix que nous ferons. Ce ne sont donc pas des réserves qui ont trait à l'entente elle-même, mais bien des réserves quant aux choix que nous ferons au Québec et au Canada.
Je souligne que ces traités, bien qu'ils soient positifs pour le Québec et le Canada, ne constituent encore qu'un cadre. Il faut savoir en tirer profit. Pour ce faire, il faut d'abord et avant tout avoir une base manufacturière locale forte. Or ce n'est pas le cas au Québec. Nos entreprises ne sont pas très concurrentielles quand on les compare à celles du reste du monde. Le Québec est au 10e rang sur 10 au Canada en matière de productivité, et c'est surtout parce que nos processus ne sont pas assez innovants, pas assez robotisés ni assez automatisés. Nous n'avons pas non plus toute la main-d'oeuvre qualifiée sur laquelle nous pourrions compter. Nous sommes donc inquiets de voir que le gouvernement actuel s'engage très fermement dans l'économie du savoir et des technologies vertes sans soutenir, d'abord et avant tout, son secteur manufacturier traditionnel.
[Traduction]
Je termine avec ceci, monsieur le président.
[Français]
C'est pourquoi ma première réserve est très importante. Si on veut que le Canada puisse tirer profit de ces ententes, il faut s'appuyer sur un base manufacturière beaucoup plus forte et s'engager résolument dans une culture d'innovation qui n'a jamais été réellement implantée, ni au Québec ni au Canada.
Ma deuxième réserve touche le fait qu'il faut faire beaucoup de pédagogie auprès de nos entrepreneurs; nous avons donc besoin de beaucoup plus de soutien de la part des autorités canadiennes que ce qui a été démontré jusqu'à maintenant. Il faut pouvoir aller les voir sur le terrain. Si on veut être compétitif, cela prendra plus d'entreprises, qui devront être plus grandes, plus innovantes et plus ambitieuses. C'est un rôle que nous sommes prêts à jouer en collaboration avec le gouvernement.
[Traduction]
Je pourrais continuer à parler pendant des heures à ce sujet, monsieur le président, mais puisque vous voulez que je termine, je m'arrête maintenant.
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Oui, dans l'ensemble, 70 % vont aux États-Unis. La moitié de nos membres sont des exportateurs.
Le Québec a la réputation d'avoir de grands exportateurs, des exportateurs de calibre mondial, mais il n'en est rien. Soixante-dix pour cent de nos exportations vont aux États-Unis. La majorité de ces exportations sont d'une valeur d'un million de dollars ou moins. Cela veut dire que nous ne sommes pas des exportateurs comme tels: nous faisons partie des chaînes de fabrication des États-Unis.
Le Mexique, qui prend de l'avance sur le Canada dans les percées technologiques, est le deuxième exportateur de produits aux États-Unis; les choses ne vont donc pas très bien pour nous. Il nous faut devenir des exportateurs. Je crois que le Québec et le Canada ont de bonnes possibilités de devenir, au cours des cinq ou dix prochaines années, des exportateurs de calibre mondial. Jamais dans notre histoire n'avons-nous eu une aussi bonne occasion.
Nous serons partie à 51 accords. Le Canada et le Québec auront des accords avec l'Asie-Pacifique, l'Union européenne et les États-Unis. Les États-Unis n'ont même pas un accord avec l'Europe. Nous avons une excellente occasion de devenir un exportateur de calibre mondial. Je ne peux pas imaginer que dans 10 ans nous n'aurons pas réussi à retirer certains avantages de cela.
D'abord et avant tout...
:
Ce n'est pas seulement les États-Unis, mais aussi l'Amérique.
[Français]
Je vais répéter ce que j'ai dit hier. Monsieur Tétrault, je m'adresserai à vous tout à l'heure, mais ceux qui nous nourrissent méritent tout notre respect. Ce sont ceux qui font en sorte que nos familles grandissent dans la sécurité alimentaire.
Je veux vous féliciter pour ce que vous faites dans la vie de tous les jours. Je sais que ce n'est pas facile et qu'il y a des grands défis. Bien sûr, je sais que les bleuets dont vous parliez, monsieur Dufour, sont les meilleurs. Je ne demanderai pas d'où ils viennent. Disons qu'ils viennent du Nouveau-Brunswick, peut-être. Mme Ludwig nous en parlait hier. C'est dire à quel point les défis sont grands.
Ma question s'adresse surtout aux producteurs de porcs et à M. Dufour. Comment réagissez-vous au fait qu'on offre des mesures compensatoires aux secteurs sous gestion de l'offre — ceux du lait, du poulet et des oeufs — et que d'autres secteurs ne sont pas considérés?
Je sais que les compensations sont importantes. Monsieur Leblanc, je viendrai à vous tantôt. Est-ce que cela a causé des guéguerres dans le monde de l'agriculture? Comment cela s'est-il passé?
:
Même les gens qui ne sont pas touchés par la gestion de l'offre sont donc d'accord sur les mesures compensatoires mises en place. Nous l'avons entendu à quelques reprises.
Je sais, monsieur Leblanc, que c'est important pour vous, les producteurs de lait et les producteurs d'oeufs, qu'on vous confirme le plus rapidement possible ce qui va se produire pour que vous sachiez où vous diriger. Nous, de l'ancien gouvernement, avions avancé des choses pour consolider le tout et montrer notre volonté d'assurer l'avenir. J'espère aussi que cela se passera assez rapidement.
On entend beaucoup parler du lait diafiltré et des trousses à pizza de l'époque. Nous avons beaucoup parlé des trousses à pizza, hier. Il faut savoir que les producteurs de pizza mettaient un peu de pepperoni, un peu de pâte et beaucoup de fromage et exportaient le tout sans que ce ne soit soumis aux règles de l'exportation. Ils vendaient donc du fromage au lieu de vendre ce qu'on appelait la trousse à pizza à l'époque. Nous avons réglé cela.
Monsieur Leblanc et madame Labonté, si je fais une comparaison, les conséquences pour vous de ce qui se passe aux frontières est-il aussi grave ou pire que dans le cas du lait diafiltré?
:
Bonjour, je souhaite la bienvenue à tous les témoins.
Je suis la seule députée du Québec. Non, il y a aussi M. Lebel qui est présent. Il me fait grand plaisir de vous voir parmi nous.
Ma circonscription est Rivière-des-Mille-Îles. On y trouve plusieurs manufacturiers. Dans l'agroalimentaire, il y a les aliments St-Hubert, le Commensal, Plaisirs Gastronomiques et O'Sole Mio. Nous ne sommes pas loin de Bombardier. En ce qui a trait au secteur manufacturier, c'est sûr qu'il faut étudier l'accord du PTP comme il le faut. Nous avons rencontré d'autres producteurs qui nous ont parlé de la réciprocité, mais vous n'en n'avez pas parlé. Vous n'avez pas mentionné ce qui se passe dans d'autres pays par rapport à nous, ce qu'on demandait dans notre pays au sujet de l'élevage des poulets et d'autres choses; il y a des normes différentes et des antibiotiques, notamment. Voyez-vous un problème à cela? Ma question concerne autant les petits fruits — que je trouve très intéressants, c'est fantastique — que les poulets. Je vous laisse, tous les deux, répondre à cette question.
:
Je vous remercie de votre question, puisqu'elle concerne le message principal que je veux livrer aujourd'hui. Nous devons être beaucoup plus innovants. Nous devons avoir de meilleures stratégies que celles de nos compétiteurs, à l'échelle internationale.
Par exemple, nous pourrions être des intermédiaires et aller sur le terrain rencontrer les entrepreneurs, afin de leur présenter les différents programmes gouvernementaux. Je suis président de Manufacturiers et Exportateurs du Québec depuis un an et demi, et je peux vous dire que la seule manière d'avoir un vrai dialogue avec les producteurs, c'est d'aller les rencontrer chez eux pour les mettre au courant de l'ensemble de l'offre gouvernementale fédérale. Elle n'est malheureusement pas assez connue, au Québec. M. Lebel, qui était le ministre responsable du Québec dans le gouvernement précédent, sait certainement de quoi je parle.
Il faut mieux faire connaître l'ensemble des services gouvernementaux, l'ensemble du soutien déjà très important offert par les autorités fédérales pour faciliter les exportations. Par exemple, au Québec, je suis certain que le programme CanExport, qui vient d'être renouvelé par le gouvernement actuel, est probablement méconnu de la plupart. Ce serait déjà une bonne chose que de le faire connaître davantage.
Par ailleurs, il faut aussi faire un effort de pédagogie auprès de nos entrepreneurs pour les aider à être plus ambitieux. Au Québec, pour des raisons historiques peut-être, l'aversion pour le risque est plus grande qu'en Ontario ou qu'ailleurs au pays. Il faut initier nos entrepreneurs à cette culture. Il faut les aider à être ambitieux. Il faut les aider à voir plus loin.
Je crois sincèrement que nous sommes sur le point d'y arriver. Une première génération d'entrepreneurs sont près de la retraite; ils vont céder leurs entreprises bientôt. Les jeunes voient déjà les choses à l'échelle de la planète, alors que les propriétaires actuels rêvent de retraite plutôt que d'innovations et de stratégies d'expansion, qui coûtent des millions de dollars.
Je pense que tout est en place pour que Manufacturiers et Exportateurs du Québec puisse servir d'intermédiaire et présenter, sur le terrain, des programmes gouvernementaux beaucoup plus ambitieux. Cela représente probablement un travail à temps plein pour les deux prochaines années, mais nous sommes prêts à l'accomplir. C'est notre rôle, notre mandat, d'aller à la rencontre des entrepreneurs, de les aider à voir plus loin et de leur offrir un meilleur encadrement.
J'aurais plusieurs suggestions à faire, mais...
Monsieur Tétrault, je partage votre passion pour la fabrication. J'ai aussi travaillé dans la construction automobile pendant 20 ans dans le sud-ouest de l'Ontario; je sais donc ce que nous avons à offrir aux Canadiens et à quel point il est triste que le gouvernement précédent n'ait pas institué de stratégie pour le secteur manufacturier. Aucune attention n'a été accordée aux ressources.
Nous parlons ici de toutes ces possibilités manquées en raison de lacunes. On nous a parlé de nombreux programmes, et il est fortement ironique qu'on demande du gouvernement la production de programmes d'éducation et de mentorat en exportation, une politique d'innovation, une politique agricole et une politique manufacturière, parce que si nous faisons n'importe laquelle de ces choses, en signant le PTP, nous pourrons être poursuivis au titre des dispositions de RDIE pour motif de protectionnisme.
Si nous tentons d'améliorer l'accès à ces marchés, nous pourrions de fait finir par ne pas avoir accès aux marchés et devoir payer d'énormes sommes de l'argent des contribuables, jusqu'à des milliards, maintenant, à des multinationales qui prétendent qu'elles perdent leur potentiel d'accès à nos marchés.
À mon avis, il y a un énorme déséquilibre dans le ciblage de notre attention. Nous devons étudier les moyens d'améliorer ce que nous avons déjà, et aller de l'avant.
Ma question s'adresse à Mme Labonté et à M. Leblanc. Si nous ne réglons pas les problèmes d'importation que nous avons actuellement dans l'industrie de la volaille — vous avez parlé de volaille de réforme et des poulets à griller —, si ces contrôles ne sont pas institués et si nous ouvrons nos marchés davantage, quelle pourrait être notre position éventuellement? Si nous ne réglons pas cela avant de signer un tel accord, dans quelle mesure votre industrie souffrira-t-elle davantage quand ces nouveaux pays auront accès à notre marché?
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Cette question est très importante. Selon nous, elle dépasse celle de l'économie et touche la survie du système. Nous avons mis en place un système et des règles. Nous négocions de bonne foi dans le cadre du PTP, mais nous acceptons que des pays participants ignorent ces règles. Cela mine notre crédibilité. Qu'est-ce qui adviendra par la suite?
Le cas du lait diafiltré américain est peut-être différent, mais en ce qui concerne la volaille, le gouvernement précédent avait fait le travail: les documents avaient été préparés aux fins de douane et les Américains acceptaient de régler la situation. Nous pourrions avoir des ententes avec eux car les formulaires nécessaires sont déjà prêts. L'impact économique est très important. Nous parlons de 6 %, mais c'est 6 % de ce que nous connaissons. En réalité, il s'agit peut-être de plus de 10 %. Les effets sont très néfastes actuellement. Nous savons combien l'emploi compte, même ici au Québec. Dans ce cas-ci, des emplois seraient générés tout de suite, et ce sont des emplois gratuits, sans subvention. Si on appliquait simplement les règles auxquelles nous avons adhéré, des emplois seraient immédiatement créés au Canada. C'est important pour le secteur, et les Américains sont d'accord. Honnêtement, nous ne savons pas pourquoi le dossier des importations illégales n'est pas encore réglé. La situation est complètement différente de celle du lait diafiltré. Les Américains sont prêts à mettre les mesures en place et les ententes sont déjà conclues. Il suffit d'agir, et des emplois bien rémunérés au Canada seront aussitôt créés.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie, mesdames et messieurs, de vos présentations et de vos exposés. J'ai quelques questions à vous poser.
Selon Affaires mondiales Canada, l'un des principaux avantages du PTP pour le Québec serait l’accès en franchise de droits de douane pour la plupart des produits agricoles, y compris le sirop d’érable et les produits de la canneberge, ainsi qu’un accès élargi aux marchés pour certains autres produits, dont le porc et le poulet.
[Traduction]
Vos secteurs ou industries sont-ils en position de tirer parti de l'accès accru au marché qui résultera du PTP?
:
Je vais tenter de répondre à votre question aussi.
Oui, le commerce s'est résumé à une chose nord-sud historiquement pour le Québec et le Canada, mais nous avons pu faire des échanges est-ouest également. Je pensais que le pays a été construit sur le chemin de fer est-ouest.
Je répondrai en une phrase. Oui, il est beaucoup plus difficile pour nos fabricants de faire affaire à Edmonton qu'à Washington.
Ce n'est pas normal. Je vois deux motifs à cela, et ce sont deux défis pour nous.
Tout d'abord — et vous en êtes tous conscients à la commission —, le protectionnisme intérieur nous nuit, et c'est une chose à laquelle nous devons travailler tout autant qu'à l'ouverture des frontières sur le monde.
Deuxièmement, je dirais que les possibilités d'affaires entre le Québec et les autres provinces sont très peu connues. Par exemple, prenons l'Alberta. La province a d'excellents producteurs d'aliments, mais ce ne sont pas des transformateurs. Au Québec, nous sommes des transformateurs d'aliments. Il devrait y avoir un grand volume d'affaires entre le Québec et l'Alberta.
Nous ratons un grand nombre d'occasions à l'intérieur du pays. Heureusement, je parle pour le Québec. Je ne parle pas pour le Canada ce matin. Nous considérons le Canada comme une destination d'exportation également, mais les chiffres ne sont pas très bons. Nous exportons bien plus aux États-Unis que dans le reste du pays. À mon avis, ce n'est pas normal.
:
Nous faisons beaucoup de travail sur le terrain avec eux. Au cours de la dernière année, ils sont parvenus à reconnaître que, dans la chaîne de l'innovation, du travail de recherche jusqu'à la commercialisation des procédés, il existe une faiblesse chez les manufacturiers québécois. Il y a aussi la mise en marché,
[Traduction]
tous les enjeux de commercialisation s'y rapportant.
[Français]
Historiquement, nous sommes des fabricants, nous ne sommes pas des vendeurs. Cela s'explique par le fait que la plupart des manufacturiers québécois, n'ayant pas été des exportateurs par le passé et se contentant par exemple du marché local, n'ont pas nécessairement eu à commercialiser leurs initiatives. Vous n'aimerez probablement pas cette partie de ma réponse: je crois qu'il faut laisser le temps faire son oeuvre.
Par ailleurs, si nous n'accélérons pas le rythme, si nous n'avons pas davantage de programmes d'encadrement et si des organismes comme le nôtre ne s'en occupent pas adéquatement, nous allons rater les occasions qui se présentent. Il y a quelques années, nous croyions avoir une dizaine d'années devant nous pour nous préparer. Soudainement, avec la signature de ces ententes, cela devient une urgence nationale.
Nous sommes prêts à le faire, nous sommes prêts à foncer, mais il faut reconnaître la faiblesse qui existe actuellement au Québec.
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Comme je le disais, la phase d'abaissement des tarifs doit être aussi profitable aux manufacturiers canadiens qu'aux manufacturiers américains. Actuellement, ces derniers sont légèrement avantagés à cet égard.
J'aimerais qu'il y ait un meilleur mécanisme de défense contre les exercices de manipulation des devises. Honnêtement, c'est vrai que le PTP renforce l'ALENA et c'est vrai qu'il offre une fenêtre sur l'Amérique du Sud, mais il y fait aussi entrer l'Asie, d'abord par le Japon, mais aussi par l'Australie. Il ne faut pas négliger l'Australie, qui a un traité de libre-échange avec la Chine.
D'abord, je pense qu'on ne pouvait pas ne pas participer à cet accord. Je pense que les États-Unis ont cherché à commencer à établir les règles du commerce dans la zone Asie-Pacifique avant que la Chine le fasse, mais il faut continuer à profiter de cela, de sorte que la Chine puisse nous rejoindre un jour en fonction des dispositions qui auront déjà été établies dans l'entente.
Toutefois, nous craignons que la Chine manipule sa devise encore une fois et continue à faire du dumping. On ne peut pas tirer profit d'un tel accord si on ne règle pas ces questions.
:
Merci, monsieur le président.
Je tiens à vous remercier de votre présence ici. Tout cela est très intéressant.
Quand j'étais enfant, nous étudions, à l'école, le livre Deux solitudes. Vous le connaissez sans doute. Ce matin, je pensais à ce livre et aux changements qu'a traversés le Québec. Je pensais à notre défaite aux dernières élections, et au côté positif de la chose, c'est-à-dire au fait qu'un groupe de Québécois a rejoint notre caucus sous sa houlette. Je ne dis pas cela simplement parce que l'homme en question est assis à côté de moi, mais je ressens, comme la plupart d'entre nous, un sentiment d'enthousiasme, car ce sont de véritables vedettes. Ils sont parfaitement au fait de ce qui se passe, et comprennent fort bien la situation. Ils représentent, d'après moi, le nouveau Québec, et ce nouveau Québec c'est vraiment quelque chose. Je tiens à vous dire cela, car je suis très impressionné par la manière dont vous avez fait face au marché, aux divers secteurs industriels. Vous faites un travail formidable.
Cela dit, nous semblons traverser aujourd'hui une autre plage de solitude, et c'est un phénomène que je perçois dans l'ensemble du pays et pas seulement au Québec. Les milieux d'affaires semblent favorables dans leur ensemble aux accords de commerce, estimant que tout cela va dans le bon sens. Il y a cependant un tout autre pan de la société, les milieux du travail pour l'essentiel, un secteur de la population qu'on assimile parfois à la société tout entière.
J'aimerais obtenir votre avis sur la question. Comment combler l'écart entre ces deux points de vue? Y a-t-il quelque chose que nous n'avons pas compris? Comment se fait-il que nous ne parvenions pas à convaincre le monde du travail, et diverses autres organisations, que cet accord est bien dans l'intérêt de notre pays, dans l'intérêt de notre société?
Quelqu'un souhaite-t-il répondre sur ce point?
Monsieur Tétrault?
Quand j'étais journaliste à la Presse canadienne, je m'occupais entre autres de la question des deux solitudes. Commençons par rappeler qu'en 1988 le Québec était le plus ardent défenseur de l'accord de commerce avec les États-Unis. C'est un fait qu'on ne saurait contester.
Le milieu des affaires a, pour reprendre votre expression, bien compris ce qui est en jeu. Quant au monde du travail, je dirais... Selon moi, cela s'explique par le fait qu'au Québec les syndicats de travailleurs se déterminent parfois en fonction des clivages politiques. Ça aussi, c'est un fait.
Je précise que je suis actuellement, au Québec, le plus farouche partisan du projet Énergie Est. Entre le Québec et le reste du Canada, quelle est la différence d'attitude à l'égard de ce projet? Le fait est que les milieux d'affaires, tant au Québec que dans le reste du pays, sont partisans de ce projet et que, dans les autres régions, les syndicats de travailleurs sont prêts à soutenir le Canada — je l'ai constaté hier encore lors d'une réunion qui a eu lieu à Ottawa —, mais nous savons qu'au Québec les syndicats de travailleurs ne sont pas favorables à ce projet, estimant que ce n'est pas une bonne chose. Il s'agit, à leurs yeux, d'un projet canadien, d'un projet conçu par le reste du pays.
Il y a en cela, dirais-je, une forme d'anti-capitalisme profondément ancré dans notre société, et je ne suis donc pas certain que nous puissions compter sur les syndicats de travailleurs pour soutenir le libre-échange.
Heureusement qu'ils sont tout de même partisans de nos projets d'automatisation et de revitalisation, et que nous avons fini par les convaincre qu'une économie plus forte permettrait de créer de nouveaux emplois, mais il nous a fallu des années pour les en convaincre. Il est extrêmement difficile d'obtenir qu'ils soutiennent certains projets et c'est encore plus difficile lorsqu'ils estiment qu'un projet est de conception purement canadienne, ou américaine.
Il n'y a pas à chercher ailleurs. La situation est à la fois simple et compliquée.
:
Bienvenue. Je vous souhaite à tous la bienvenue. Soyez les bienvenus devant le Comité parlementaire du commerce international, en déplacement d'Ottawa.
Je rappelle que nous poursuivons notre étude du PTP. Nous sollicitons l'avis des Canadiens, des parties prenantes, mais aussi de simples particuliers, quant aux incidences, avantages et inconvénients que le PTP pourrait avoir pour les Canadiens.
Nous avons déjà recueilli les témoignages des gens des provinces de l'Ouest, et ces deux derniers jours, nous en avons fait de même au Québec. Nous passerons ensuite à l'Ontario, puis aux provinces des Maritimes et à la région de l'Atlantique, et après cela, aux territoires.
Nous nous sommes en outre entretenus, à Ottawa, avec des représentants d'entreprises ainsi qu'avec des représentants de divers autres pays.
Nous tentons de nous faire une idée des incidences que le PTP aura sur les Canadiens, et nous ferons état de nos conclusions dans un rapport à la Chambre.
Je vais maintenant accueillir nos invités qui, ce matin, forment notre troisième groupe de témoins. Nous accueillons donc le Syndicat canadien de la fonction publique, la Centrale des syndicats démocratiques, la Confédération des syndicats nationaux et l'Administration portuaire de Québec.
Chaque groupe disposera d'un temps de parole de cinq minutes. Essayons de ne pas dépasser les cinq minutes. Vous aurez, après cela, l'occasion de dialoguer avec les députés.
Donnons en premier lieu la parole au Syndicat de la fonction publique. Qui veut commencer?
Monsieur Bolduc, vous avez cinq minutes.
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Je vous remercie, monsieur le président, ainsi que les membres du comité, de nous avoir invités pour parler de l'accord du Partenariat transpacifique.
Je m'appelle Denis Bolduc et je suis secrétaire général du SCFP, le Syndicat canadien de la fonction publique, au Québec. Je suis accompagné de M. Mathieu Vick, de notre service de la recherche. Nous représentons plus de 110 000 travailleuses et travailleurs au Québec qui prodiguent des services publics sur lesquels comptent tous les Québécois et Québécoises. Le SCFP est le plus important syndicat au pays. Il regroupe 635 000 membres.
Le SCFP a comme objectif de protéger et d'améliorer les services publics dans le but de créer une société plus égalitaire et plus juste où personne n'est laissé pour compte. C'est dans cette optique que nous devons recommander au gouvernement du Canada de ne pas ratifier le PTP. Évidemment, nous savons tous que le Canada est un pays commerçant et que le commerce international est vital à tous les niveaux de notre économie. Les bons accords commerciaux placent les intérêts de la population devant ceux des multinationales et favorisent le création d'emploi et le développement social.
Cependant, sachant que le commerce entre le Canada et les pays du PTP est déjà libre de tarifs à 97 %, il est clair que cet accord vise plutôt à renforcer les pouvoirs et les profits des plus grandes sociétés, et ce, au détriment des travailleurs et des travailleuses, des gouvernements, des contribuables et de tous les citoyens et les citoyennes.
Voici quelques-unes des principales raisons pour lesquelles le Canada doit rejeter le PTP.
Premièrement, le PTP a été négocié en secret par les conservateurs sans aucune contribution de la part de l'opposition ou de la population en général. Le PTP accorde aux multinationales étrangères le droit de contester, voire même de renverser des politiques d'intérêt public adoptées par des gouvernements élus démocratiquement. On peut prendre comme exemple la compagnie américaine Ethyl Corporation qui, dans le cadre de l'ALENA, a fait abroger une loi canadienne interdisant l'ajout de l'additif toxique MMT dans le carburant, tout en recevant un dédommagement de 13 millions de dollars.
Avec son mécanisme élargi de règlement des différends entre investisseurs et États, le RDIE, le PTP permet aux multinationales les plus riches de poursuivre le Canada pour des centaines de millions de dollars par l'entremise d'un tribunal truffé de conflits d'intérêts. Ce dernier, où siègent des arbitres qui ont un intérêt financier à interpréter les textes le plus largement possible, évolue complètement à l'extérieur de notre système judiciaire domestique. Ni les compagnies d'ici ni la population en général y ont accès. Le Canada est déjà le pays industrialisé le plus poursuivi dans le contexte du processus de règlement des différends. Dans le cadre du mécanisme de l'ALENA, qui fonctionne d'ailleurs comme celui du PTP, le Canada a déjà subi 35 poursuites et a versé plus de 200 millions de dollars en pénalités.
Deuxièmement, le PTP menace les services publics de plusieurs façons. D'abord, il y a l'effet de cliquet, le ratchet effect en anglais, et la clause de statu quo. L'effet de cliquet empêche le retour en arrière lorsqu'un service est privatisé ou qu'une norme a été éliminée, et ce, même si le résultat est catastrophique. La clause de statu quo fait en sorte que l'on ne peut réglementer davantage un secteur ou rapatrier en régie interne un service qui n'y est pas au moment où l'accord est adopté.
Ces deux dispositions favorisent la privatisation et lient les mains des gouvernements futurs. Un gouvernement ne devrait-il pas avoir la capacité de réglementer un secteur pour protéger la santé de ses citoyens et citoyennes ou pour atteindre ses objectifs de réduction de gaz à effet de serre? Un gouvernement ne devrait-il pas avoir l'option de rapatrier un service en régie interne, surtout si la sous-traitance coûte plus cher et ne donne pas les résultats escomptés? Ne devrait-on pas avoir la possibilité d'élargir la portée d'un service universel, comme l'assurance-maladie, pour le bien de la population?
Roy Romanow, premier ministre de la Saskatchewan entre 1991 et 2001, a dit que si l'ALENA avait été en vigueur durant les années 1960, le Canada n'aurait jamais eu de système de santé public. Par ailleurs, le PTP fera augmenter le prix des médicaments de 800 millions de dollars par année, et cette hausse mettra beaucoup de pression sur les budgets des provinces et des employeurs qui offrent l'assurance-médicaments, ce qui aura des conséquences sur les services.
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Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de cette invitation. Je suis accompagné de Normand Pépin, qui est responsable du Service de la recherche à la Centrale des syndicats démocratiques, la CSD.
Avant de faire des commentaires, je voudrais vous indiquer que la CSD est une organisation qui représente un peu plus de 70 000 personnes au Québec. Nous oeuvrons principalement dans le secteur privé, et une très forte concentration de nos membres se trouve dans les PME et dans les régions.
Pour ce qui est du PTP, je débuterai mon intervention en rapportant une déclaration de l'ancien premier ministre français Lionel Jospin. À la suite des négociations de l'Accord multilatéral sur l'investissement, l'AMI, Lionel Jospin avait affirmé, après avoir pris connaissance de documents confidentiels — l'accord avait été négocié en secret, comme cela se fait toujours —, que s'il est normal qu'un pays puisse transférer des éléments de sa souveraineté à un organisme international d'État, il est hors de question qu'il en cède à des intérêts privés. Je crois que c'est là un principe directeur à adopter dans l'analyse d'un accord de libre-échange.
Ce qui blesse dans les différents accords commerciaux, et le PTP n'y fait pas exception, c'est la clause de protection des investisseurs étrangers. Cette clause accorde aux multinationales des pouvoirs déraisonnables et disproportionnés qui enlèvent aux États une partie de leurs pouvoirs. À notre avis, c'est inacceptable. On nous dira qu'une nouvelle norme sur la protection des droits des investisseurs dans les accords commerciaux a émergé de l'accord négocié avec l'Europe. Cependant, des analyses de cette nouvelle version qui apparaît dans l'accord avec l'Europe nous montrent que toutes les poursuites intentées depuis contre le gouvernement du Canada se seraient reproduites avec cette nouvelle version. Vous comprendrez que, selon nous, c'est carrément inacceptable. On parle d'accords commerciaux; or ce ne sont pas des accords commerciaux, ce sont des traités de protection des investissements étrangers. C'est très mauvais et très malsain.
Je voudrais vous donner l'exemple du Nouveau-Brunswick, qui a déjà réfléchi à la possibilité de se doter d'un régime d'assurance-automobile public et qui, à la suite de pressions d'entreprises d'assurance américaines, a tout simplement décidé de faire marche arrière. Même si on dit qu'il n'y a pas eu énormément de plaintes adressées en vertu du chapitre 11 de l'ALENA, il faut retenir que les gouvernements sont de plus en plus frileux. Ils hésitent à prendre des mesures qui protégeraient le bien commun et créeraient une société où les droits du travail et les droits à l'environnement seraient reconnus comme des droits fondamentaux, auxquels on ne peut toucher.
Nous sommes donc très inquiets et, dans ce cadre, en fonction de ce que nous avons pu analyser et observer depuis l'accord de libre-échange avec les États-Unis, nous considérons que le Canada ne devrait pas ratifier l'accord du PTP, principalement en raison des dispositions concernant la protection des investissements étrangers.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je suis accompagnée de M. Jean Dalcé, qui est économiste à la CSN. Nous vous remercions de nous permettre aujourd'hui de prendre part aux consultations sur le PTP. Nous vous exposerons les principales raisons pour lesquelles nous considérons que le PTP est un mauvais accord pour le Canada et, conséquemment, pourquoi le Canada ne devrait pas le ratifier.
Premièrement, le processus de négociation s'est révélé opaque. Ce très grand manque de transparence bafoue nos valeurs démocratiques.
Deuxièmement, le PTP inclut le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États, le RDIE, qui permet aux entreprises de poursuivre des États lorsque les politiques publiques mises en place font obstacle à leurs investissements, qu'il s'agisse de politiques visant à protéger la santé publique, les services publics, l'environnement ou les conditions de travail. Le Canada est le pays développé le plus poursuivi au monde. En 2015, il faisait face à plus de 6 milliards de dollars de poursuites en vertu du RDIE, et la plupart de ces réclamations, qui risquent d'être payées au moyen de nos taxes et de nos impôts, concernent l'environnement. Le RDIE restreint la capacité de nos gouvernements à légiférer sur des questions d'intérêt public, mais il exerce aussi un effet dissuasif sur l'adoption de nouvelles politiques. Or le Canada est fier des modifications que nous avons réussi à apporter à l'Accord économique et commercial global avec l'Union européenne sur cette question, mais ces modifications ne se trouvent pas dans le PTP, qui ne peut plus être modifié.
Alors que le gouvernement canadien vient de signer l'Accord de Paris sur le climat, il laisserait libre cours aux multinationales d'influencer, voire de définir les normes environnementales du pays par l'entremise du PTP.
Troisièmement, le PTP n'inclut aucune mesure contraignante en matière d'environnement et de droits de la personne. Le Canada devrait se servir d'un PTP pour assurer la promotion du travail décent auprès de certains des pays signataires, dont le Vietnam, la Malaise et le Mexique, où les droits du travail sont systématiquement violés. De plus, hormis les droits fondamentaux du travail, il n'y a aucune référence à d'autres droits de la personne. Nous pensons qu'il est inacceptable en 2016 qu'on ne protège pas les droits des peuples autochtones et les droits des communautés relativement à l'exploitation des ressources naturelles.
Nous redoutons les répercussions du PTP sur notre secteur manufacturier. La balance commerciale du Canada a connu une détérioration constante ces dernières années. L'économie canadienne est caractérisée par une extension des exportations des produits primaires et un déclin de ses exportations de produits manufacturés. Nous pensons que le PTP risque d'accentuer la pression sur le secteur manufacturier, qui déjà se détériore, alors que les exportations des produits manufacturés des pays de l'Asie de l'Est sont en constante progression.
Avec l'élimination des tarifs, nos produits risquent davantage de devenir encore moins compétitifs par rapport aux biens produits par d'autres pays du PTP. L'exemple de l'accord commercial qui a été signé avec la Corée du Sud illustre très bien cela. Nos exportations ont chuté de 3,9 % un an après la signature de cet accord, alors que les importations des produits coréens, elles, ont augmenté de 10 %.
Avec l'arrivée de ces nouveaux acteurs, nous craignons également d'avoir de plus en plus de difficulté sur le marché états-unien. C'est certain que le PTP a le potentiel de favoriser l'exportation de nos produits agroalimentaires, comme le porc, le sirop d'érable, les jus de fruits, le boeuf et le reste, mais dans l'ensemble, nous pensons que cela aura un effet négatif sur notre balance commerciale.
Finalement, dans le domaine culturel et dans le domaine des services publics, là encore, cela a été illustré par des prédécesseurs. Nous pensons que, à ce chapitre aussi, tout nouveau service risque d'être menacé.
En conclusion, la CSN ne peut appuyer un accord commercial qui donne aux entreprises multinationales le droit de poursuivre des États, qui menace nos services publics et notre culture et qui serait signé avec des États où les droits de la personne et les droits syndicaux sont systématiquement violés. Or la façon dont ces accords ont été négociés en plus de leur caractère évolutif nous plonge vraiment dans une totale obscurité, alors que nous allons vivre avec les conséquences sur de nombreux aspects pendant les décennies à venir. Nous trouvons cette situation évidemment complètement inacceptable.
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Bonjour. Je m'appelle Patrick Robitaille et je suis vice-président aux Affaires & développement portuaires au Port de Québec. Je suis accompagné d'Alain Sans Cartier, directeur des Affaires publiques et des communications, également au Port de Québec.
C'est mon tour de vous souhaiter la bienvenue et de vous remercier d'être ici aujourd'hui, à Québec, pour nous permettre d'échanger sur cet enjeu important qu'est l'accord du Partenariat transpacifique.
Le port de Québec joue un rôle essentiel auprès des industries canadiennes et nord-américaines grâce à la combinaison unique de ses avantages comparatifs, c'est-à-dire une profondeur d'eau de 15 mètres à marée basse, des liaisons intermodales efficaces et complètes, ainsi qu'une localisation géographique qui permet de jouer un rôle unique le long du Saint-Laurent et dans l'Est du Canada.
Ces avantages donnent au port un caractère distinctif au Canada et en font un maillon fondamental reliant le coeur industriel et agricole de l'Amérique du Nord au reste du monde. Sur une base annuelle, de 50 à 60 pays font des échanges avec nous pour des marchandises qui passent par de 200 à 300 ports. Étant donné que Québec est le seul port en eau profonde dans l'Est du pays à pouvoir réaliser ces opérations, il est principalement en concurrence avec les ports situés sur la côte Est américaine ou dans le golfe du Mexique.
Nous comptons parmi les cinq principaux ports canadiens. Nous sommes un générateur de richesse, non seulement pour la communauté de Québec, mais aussi pour l'ensemble du pays. À l'échelle de la communauté, les activités du pôle maritime de Québec génèrent 8 000 emplois directs et indirects et 730 millions de dollars en retombées économiques sur une base annuelle.
À l'échelle du Canada, la firme KPMG estime que l'industrie maritime de Québec génère plus de 13 000 emplois et 1,3 milliard de dollars en retombées économiques. Nous sommes actifs dans les industries du transport, de la pétrochimie, de la sidérurgie, de l'énergie et de l'agroalimentaire. Bref, le port de Québec est principalement orienté vers le transbordement de vrac solide et liquide qui desservent ces industries.
Nous jouons un rôle unique dans la chaîne logistique de plusieurs exportations canadiennes. Je vais vous donner quelques exemples. Le nickel arrive de la mine Raglan qui est située dans le Nord canadien. Il transite par le port de Québec, par navire, avant d'être expédié par train jusqu'à Sudbury pour une première transformation; il revient à Québec par train avant de retourner en Norvège par navire.
Des granules de bois produites en Ontario sont acheminées par train jusqu'au port de Québec avant d'être acheminées par navire au Royaume-Uni, pour alimenter les centrales thermiques. Elles remplacent, entre autres, le charbon.
En ce qui a trait aux importations, le port de Québec est également un rouage essentiel pour le carburéacteur qui est importé de différents pays, notamment d'Europe, qui passe par Québec avant d'être transporté par train jusqu'à l'aéroport Pearson, à Toronto.
Avec un marché local relativement restreint, le port de Québec doit obligatoirement compter sur son rôle de transbordement, notamment au chapitre des importations et des exportations canadiennes et nord-américaines. À cet égard, les accords commerciaux que le Canada a conclus au fil des années ont certainement contribué au développement du Port de Québec et lui ont permis de remplir sa mission.
Le Port de Québec doit pouvoir compter sur un environnement commercial favorisant le commerce international, car la grande majorité de nos activités concernent les importations et les exportations avec de 50 à 60 pays, comme je l'ai mentionné un peu plus tôt.
Au chapitre de nos échanges actuels avec les pays signataires de l'accord du Partenariat transpacifique, nous constatons que les volumes sont déjà très significatifs. Ainsi, au cours des 10 dernières années, le tonnage qui a transité sur nos quais, qui était à destination ou en provenance de ces pays, ont totalisé 50 millions de tonnes de marchandises, pour une valeur de 22 milliards de dollars. Même sans notre partenaire américain, les chiffres demeurent imposants avec environ 3 millions de tonnes et une valeur de près de 300 millions de dollars annuellement. En excluant les États-Unis, Singapour, le Mexique et le Chili représentent 87 % du tonnage transité.
Enfin, nos échanges avec les pays signataires se font principalement dans les secteurs du transport, de la pétrochimie, de l'énergie et de la sidérurgie avec 62 % d'importations et 38 % d'exportations. Le nouveau canal de Panama qui est ouvert ou qui va ouvrir incessamment permet maintenant le passage de navires de 15 mètres de tirant d'eau, comme ce que nous offrons à Québec. Auparavant, il était limité à 12 mètres. Cela promet d'élargir le potentiel commercial en provenance du Pacifique pour les ports ayant un accès sur l'Atlantique, comme le port de Québec.
Dans cette perspective, l'Administration portuaire de Québec souhaite que le gouvernement canadien ratifie l'accord du Partenariat transpacifique afin de consolider et de diversifier les occasions d'échanges internationaux. De tout temps, les accords commerciaux internationaux entérinés par le Canada ont eu un impact positif sur le développement du port, car celui-ci est d'abord et avant tout un port international. La ratification de l'accord du Partenariat transpacifique permettra assurément de consolider et surtout de diversifier nos occasions de commerce international.
Au nom de l'Administration portuaire de Québec, nous vous remercions de nous avoir donné l'occasion de vous présenter le port de Québec et nos réflexions sur l'accord du Partenariat transpacifique. Par la même occasion, nous souhaitons réitérer toute la volonté de la communauté portuaire de Québec de jouer un rôle clé dans le développement du commerce international canadien.
Je vous remercie.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie, mesdames, messieurs, d'être présents aujourd'hui pour échanger sur le sujet qui nous occupe.
Je vais faire un commentaire avant de poser des questions.
Depuis hier, nous avons entendu différents témoins qui nous ont parlé de négociations « secrètes ». Je ne crois pas que les syndicats, lorsqu'ils préparent leurs stratégies d'intervention lors de campagnes électorales, le fassent sur la place publique. Quand on négocie des accords mondiaux de libre-échange avec 11 autres pays, on ne peut pas révéler des informations aux médias durant le processus de négociation et on ne peut pas refuser de participer. D'ailleurs, je vais bientôt vous demander quel aurait été l'impact de l'absence du Canada à ces négociations.
Hier, nous avons entendu les producteurs de lait, les producteurs de l'UPA et les gens de secteurs concernés nous dire qu'ils étaient présents à Hawaï, qu'ils étaient présents à Atlanta, qu'ils avaient entendu ce qui se disait et qu'ils avaient été tenus au courant de tout ce que prévoyait l'accord. Dans le cas de secteurs spécifiquement concernés, ces gens étaient assis à la table de négociation.
Quel serait l'impact, selon vous, si le Canada n'était pas signataire de l'accord? Nous avons parlé du fait que le commerce entre le Canada et les pays du PTP était déjà libre de tarifs à 97 %. Les États-Unis cherchent une autre façon de se débrouiller. Nous connaissons tous la situation actuelle: une campagne électorale est en cours et le protectionnisme revient à l'avant-scène. Les États-Unis essaient de renégocier en partie l'ALENA par l'entremise du PTP. Vous avez des chiffres illustrant les effets de participer à l'accord. Vous en avez sûrement aussi sur les effets de ne pas participer. Quel serait l'impact selon vous, mesdames et messieurs des regroupements syndicaux — je parlerai aux gens de l'administration portuaire tout à l'heure —, de ne pas faire partie du PTP?
:
En ce qui nous concerne, monsieur Lebel, ce n'est pas une question de gouvernement conservateur ou de gouvernement libéral. Nous ne sommes pas systématiquement opposés aux accords de libre-échange. Je veux que vous compreniez cela. Ce que nous disons, cependant, c'est qu'un accord commercial doit se conclure dans le respect des droits de la personne, des droits du travail et des droits environnementaux, et surtout, sans entraver le pouvoir des gouvernements de légiférer pour préserver ce qu'on appelle généralement le bien commun.
C'est notre conception. Nous considérons que ces accords procurent beaucoup trop de pouvoir aux multinationales. On leur permet de contourner toutes les règles que nous nous sommes données en tant que société. Je fais référence au chapitre 11 et aux suivants de l'Accord de libre-échange nord-américain. Ces dispositions dépassent l'entendement parce qu'elles risquent de fragiliser d'autres droits, comprenez-vous?
Nous disons oui au libre-échange, mais il doit être contrôlé. Il doit respecter les droits sociaux que j'ai énumérés. Je vous ai dit plus tôt que nos membres proviennent du secteur privé. Un traité de libre-échange, ce n'est pas une panacée. L'écosystème actuel est complètement différent de celui qui existait lors de la signature du premier accord de libre-échange avec les États-Unis. La compétitivité des entreprises est complètement différente Plusieurs phénomènes sont en émergence. C'est une combinaison de tous ces éléments qui font que nous nous retrouvons aujourd'hui face à une concurrence gigantesque, et il faut battre le marché tous les jours pour conserver nos emplois. En tant que syndicat, nous n'investissons pas uniquement dans le domaine des conditions de travail, mais aussi dans celui de l'emploi. Le nouvel environnement nous a obligés à agir sur un autre plan.
Les accords de libre-échange sont importants, bien entendu. Cependant, au-delà du marché du travail, il y a des droits sociaux qui nous apparaissent fondamentaux, et il faut préserver ces droits.
Voilà notre vision et les principes directeurs qui nous animent dans la construction d'une société plus cohésive et la plus juste possible.
:
M. Bolduc l'a très bien expliqué, tout à l'heure, dans sa réponse à M. Lebel.
Nous avons pris connaissance d'études et d'analyses au sujet de la balance commerciale canadienne. En conclusion, les échanges commerciaux dans les pays avec lesquels nous n'avons pas d'accord de libre-échange sont nettement plus avantageux que ceux dans les pays avec lesquels nous avons signé des traités de libre-échange.
Ce que je veux dire, c'est qu'il faut faire des nuances et évaluer différemment les dossiers. Un accord de libre-échange, ce n'est pas une panacée à tous les maux. Ce n'est pas cela qui va permettre de régler les problèmes de compétitivité du Québec. Ces problèmes sont d'un autre ordre.
Vous avez soulevé plus tôt, avec M. Tétrault, l'aspect de la relève dans les PME et des dirigeants de la nouvelle génération qui vont prendre les rênes. Ce sont des questions comme celles-là qui nous préoccupent grandement en ce qui a trait à l'emploi.
Si nous revenons à l'accord de libre-échange...
:
À Québec, je me sens chez moi. Nous accueillons, avec notre dernier groupe de témoins, des manufacturiers ainsi que des syndicats de travailleurs, et je souhaite la bienvenue aux membres de l'Administration portuaire.
Il me paraît important de rappeler qu'il s'agit en l'occurrence d'un accord quelque peu furtif, négocié à la dérobée. Je ne suis pas certaine que M. Lebel soit entièrement transparent quant à ceux qui ont aidé à négocier l'accord. M. Ritz, qui siège à notre comité, nous a, à maintes reprises, dit que des centaines de représentants des secteurs industriels concernés, ainsi que des lobbyistes ont participé aux discussions. Or, le monde du travail, les peuples autochtones, les défenseurs de l'environnement, les représentants de la société civile, les jeunes et les associations de défense des droits de la personne n'ont pas été invités à y prendre part. Bon nombre de groupes exclus des négociations auraient pu apporter au débat quelque chose qui aurait influé sur la tournure de nos délibérations d'aujourd'hui. Cela me paraît regrettable.
Je voudrais, maintenant, aborder certaines des questions que vous avez vous-mêmes évoquées. En ce qui concerne le règlement des différends entre les investisseurs et les États, non seulement l'accord prévoit-il une disposition en vertu de laquelle le Canada peut être attaqué en justice, mais il faut aussi tenir compte de l'effet que risque de produire un tel mécanisme. Madame Lévesque, vous avez très bien décrit le « gel réglementaire » que cela peut entraîner et vous nous avez cité le cas du Nouveau-Brunswick et de l'effet qu'un tel gel peut avoir sur les diverses communautés de notre pays, pas uniquement sur celles situées près de la frontière.
Je voudrais que M. Bolduc nous explique un peu les clauses suspensives et les clauses d'ajustement. Le comité ne s'est pas encore penché sur cet aspect de la question. Or, vous représentez les employés de la fonction publique et cet aspect-là de l'accord aura très certainement des incidences, notamment sur la possibilité de mettre sur pied, au Canada, un régime d'assurance-médicaments. Pourriez-vous nous dire quelque chose de ces deux clauses?
[Français]
Nos collègues parlaient un peu plus tôt de traités de libre-échange et de commerce international. Nous y sommes complètement favorables. Nous voulons qu'il y ait du commerce, car le Canada est un pays commerçant. Cependant, le fait d'inclure des dispositions comme le règlement des différends dans ces accords les dénature complètement.
L'effet de cliquet ainsi que ce que nous appelons l'effet de statu quo ne sont pas nécessaires dans un accord. En fait, il y a trois éléments qu'il faudrait vraiment retirer de l'accord pour mieux protéger les services publics.
D'une part, il y a l'effet de cliquet, qui fait en sorte qu'on ne peut pas ramener dans le giron public un service qui a été privatisé. Cela veut dire, par exemple, que si la privatisation d'un service de santé est un échec, on ne peut pas rendre ce service public à nouveau. Le gouvernement libéral a dit vouloir instaurer un système de médicaments d'ordonnance national et universel, mais on ne pourrait pas créer un programme d'assurance-médicaments si l'effet de cliquet était appliqué. Il y aurait alors expropriation d'une partie du marché, qui serait occupée tout de suite par des compagnies d'assurance étrangères.
D'autre part, l'effet de statu quo fait en sorte qu'on ne peut pas réglementer davantage dans un secteur qui est libéralisé, ce qui veut dire qu'on ne pourrait pas établir de nouvelles normes pour protéger l'environnement, par exemple.
En ce qui concerne la protection des services publics, ce serait le premier accord qui comprend une liste négative. Nous sommes quand même dans une économie en pleine évolution et il se peut que le gouvernement veuille offrir un nouveau service pour le bien des citoyens. Or, l'accord prévoit que tout nouveau service ne peut pas être public sans qu'il y ait possibilité d'être poursuivi en vertu du mécanisme de RDIE.
C'est pour cela que, si jamais on renégociait cet accord ou un accord de ce genre, il faudrait y ajouter certains dispositifs. Nous n'avons pas besoin de l'effet de cliquet et nous n'avons pas besoin de l'effet de statu quo non plus.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie tous de vos présentations.
Je m'adresse à Mme Lévesque et à M. Dalcé.
Selon la Confédération des syndicats nationaux, « bien que certaines améliorations légères aient été proposées pour combler les lacunes juridiques bien documentées des [tribunaux d’arbitrage établis dans le cadre de mécanismes de RDIE], aucune d’entre elles ne remédie à la multitude de lacunes de ce système d’arbitrage qui manque de transparence, d’imputabilité et d’indépendance ». Selon Affaires mondiales Canada toutefois, « le chapitre prévoit un accès à un [mécanisme de RDIE] rapide, juste, transparent et assujetti à des mesures de sauvegarde appropriées ».
Existe-t-il des amendements qui pourraient améliorer le texte de l’accord du PTP en matière de transparence, de reddition de comptes et d’indépendance?
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Nous ne nous sommes pas attardés à étudier quelles pourraient être ces mesures. Une organisation syndicale n'ira pas dire à son gouvernement qu'il n'y a pas tel ou tel élément.
Nous constatons que nous sommes mis devant un fait accompli. Actuellement, l'accord ne peut plus être modifié. Il est à prendre ou à laisser, on peut le ratifier ou le rejeter.
En ce qui a trait aux mécanismes d'arbitrage, nous constatons qu'il n'y a aucune forme de recours. Seul l'intérêt commercial est pris en compte. Tous les autres éléments qui nous sont chers, notamment les droits des travailleuses et des travailleurs, les droits de la personne et l'environnement, ne font pas le poids par rapport à l'intérêt strictement commercial des multinationales qui se considèrent mises en cause par des décisions politiques qui pourraient être prises.
C'est le principal problème, selon nous. C'est pourquoi, face à tout cela, nous pensons qu'il n'y a pas d'autre option: nous affirmons qu'on ne doit pas ratifier l'accord.
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Pour nous, un tel mécanisme dans un accord commercial n'a pas de sens.
Des pays comme le Canada, les États-Unis ou le Japon sont des pays développés qui ont des systèmes juridiques très matures. Dans ce cas, pourquoi avoir un mécanisme qui ne tient pas compte de ces systèmes juridiques? Pour nous, cela n'a pas de sens. En fait, nous demandons tout simplement qu'un tel mécanisme soit retiré des accords commerciaux.
Une chose est remarquable. Alors qu'on parle d'environnement — notre gouvernement s'est rendu à Paris pour signer un accord —, on accorde des droits importants aux entreprises qui leur permettent de poursuivre les gouvernements. Si on considère notre place dans le monde, avec toutes les questions environnementales qui se posent, on ne peut pas accorder tous ces droits aux multinationales par des accords commerciaux.
Par ailleurs, certains secteurs doivent être protégés dans ces accords. On peut parler du Québec et de la culture. Nous négocions sur des enjeux pour lesquels nous n'avons même pas encore de position sur le plan national. On parle, par exemple, des secteurs des télécommunications ou du commerce électronique. Nous négocions dans ces secteurs alors que, en réalité, les débats n'ont pas encore été tenus sur des enjeux qui ne toucheront pas que la démocratie, que ce soit au fédéral ou au provincial. On peut prendre pour exemple le secteur des médias ou celui de la culture. Pour le Québec, particulièrement, ce sont des enjeux importants. Nous pensons que ces éléments n'auraient pas dû faire partie du PTP.
Pour l'ensemble de ces raisons, nous pensons que le Canada ne doit pas ratifier cet accord.
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Nous ne nous sommes pas penchés sur tel ou tel accord de libre-échange, mais nous y sommes favorables de manière générale.
[Français]
En général, si des traités similaires, comme l'AECG et le PTP, sont si importants pour améliorer notre succès sur le plan du commerce international, comment se fait-il que plus nous signons d'accords, comme nous l'avons fait au cours des 10 dernières années, pires deviennent notre bilan économique et notre déficit commercial?
Au cours des 10 dernières années, le Canada a signé énormément d'accords, notamment en matière d'investissements. Toutefois, le déficit entre les exportations qui diminuent et les importations qui augmentent continue d'augmenter. On a une...
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Merci, monsieur le président.
Je suis membre remplaçant à ce comité. Mes confrères qui sont des membres permanents et mon voisin de droite, M. Hoback, qui est membre de ce comité depuis longtemps, me disaient que le gouvernement précédent avait fait une étude semblable. Je veux faire référence à ce qu'a dit Mme Lévesque. Les libéraux tiennent ces consultations alors que l'accord est signé, et il faut se demander pourquoi. Avant qu'il n'ait été signé, une consultation pancanadienne a été menée auprès des représentants syndicaux. Des gens ont été consultés par le gouvernement précédent partout au pays en guise d'étude préalable, avant la signature de l'accord. Vous n'y étiez peut-être pas, mais une consultation pancanadienne a été faite.
Il est facile de dire que les accords n'ont pas été payants. La joute qui se joue à l'échelle mondiale à l'heure actuelle est complètement différente. Il faut être honnête et voir quel est l'apport de la Chine et de l'Inde. Le Canada n'a pas d'entente avec ces pays, mais il traite quand même régulièrement avec eux. Quel aurait été l'impact sur le Canada de la non-signature de l'accord? Cela m'intéresse plus que le fait de savoir que les statistiques n'ont pas augmenté même si on avait des accords.
J'aimerais maintenant parler du port de Québec, où j'ai eu l'honneur d'aller faire une annonce de 60 millions de dollars au nom du gouvernement précédent. Je ne veux pas vous mettre dans l'embarras par rapport au gouvernement actuel. Je veux simplement vous dire que je souhaite que M. le respectera son engagement. Il a dit qu'il respecterait les choses sur lesquelles le Canada s'était déjà engagé, et j'espère que l'argent sera investi rapidement en ce sens.
Ce matin, M. Aubut, de la Chambre de commerce et d'industrie de Québec, a dit que 40 % de l'économie locale dépendait de l'assurance et du tourisme.
En ce qui concerne le tourisme, le gouvernement conservateur avait annoncé qu'il vous appuierait dans l'amélioration des quais de croisière. On sait qu'il y a de plus en plus de touristes asiatiques qui viennent dans la région de Québec, qui est réputée pour sa beauté européenne, mais qui est située en Amérique. À quel point est-ce important pour vous de réaliser ces projets?
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Merci, monsieur Sans Cartier.
Un élément qui m'importe beaucoup est la main-d'oeuvre. Comme vous, j'y suis très sensible. J'ai eu le plaisir de rencontrer beaucoup d'entreprises de Québec qui me disaient qu'elles ne pouvaient pas se développer, faute de main-d'oeuvre. Avec un taux de chômage de 5 % et des gens qui sont souvent non spécialisés, il faut qu'il y ait une adéquation entre les besoins et les compétences des gens. À l'assurance-emploi, c'était un cataclysme annoncé. Or, les chiffres qui sortent démontrent que la situation n'est finalement pas celle qu'on avait prévue.
Je m'adresse aux représentants syndicaux. Quel conseil donneriez-vous aux représentants gouvernementaux? Pour la région de Québec, comment doit-on voir ce problème de main-d'oeuvre? Quelle solution nous proposez-vous? Il faut qu'elle respecte les compétences provinciales, évidemment. Le développement des entreprises nous interpelle. Quelles sont vos commentaires là-dessus?
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Nous pensons qu'il est fort important de développer une vision du développement économique qui ne mise pas strictement sur l'extraction de matières premières, mais également sur la transformation.
Ce qui nous caractérise ici, au Canada, c'est qu'il y a une main-d'oeuvre qualifiée. Nous disposons de beaucoup de moyens pour assurer la formation en cours d'emploi et pour que la main-d'oeuvre puisse continuer à développer et à transformer des matières. Cela permettra d'avoir une valeur ajoutée plus importante encore et, de ce fait, de développer le commerce avec des produits manufacturés. Cela sera plus intéressant que de simplement envoyer ailleurs nos matières premières en vue de leur transformation, de les faire revenir, puis de les envoyer ailleurs par la suite.
C'est dans ces domaines que nous nous attendons à des politiques de nos gouvernements. Il faut développer une vision du développement économique basée sur la transformation et sur l'industrie manufacturière, et faire valoir nos secteurs de pointe, qui sont nombreux. Il faut aussi s'assurer que nos accords économiques n'entraîneront pas de pertes d'emplois.
Une étude américaine récente souligne que, avec des accords comme celui qui est sur la table, le Canada pourrait se retrouver avec un déficit en matière d'emploi pouvant aller jusqu'à 60 000 emplois. Nous n'avons pas les moyens de perdre ces emplois, parce que ce sont des emplois de qualité.
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Nous sommes en train de négocier, à l'échelle internationale, au sujet de secteurs dans lesquels il n'y a encore aucune réglementation. Je songe à des entreprises comme Google, Facebook, Netflix. Prenons l'exemple de Netflix, qui a de nombreux abonnés au Canada et au Québec. Nous savons que Netflix ne paie pas la taxe provinciale au Québec. Comment pouvons-nous intervenir?
Le problème se pose aussi en ce qui concerne le commerce électronique. Comment nos gouvernements locaux ou nationaux interviennent-ils sur ces questions au sujet desquelles ils sont en train de négocier, de se lier les mains, en fait? Je comprends l'intérêt des Américains de négocier dans ces secteurs, puisque ces grandes multinationales sont majoritairement américaines. Cependant, ici, au Canada, je crois que l'intérêt est différent. Les PME forment la structure de notre économie, donc notre approche doit être différente de celle des Américains. En tant qu'organisation syndicale, nous enjoignons à nos gouvernements d'intervenir.
M. Lebel demandait plus tôt quel serait l'impact si le Canada ne participait pas au PTP. Ce n'est pas à nous de répondre à cette question, c'est plutôt à nos gouvernements de nous dire quels sont les enjeux pour le Canada. À ce que nous sachions, dans le cadre du PTP, aucune recherche n'a été publiée par le gouvernement qui décrive très clairement les avantages et les inconvénients d'un tel accord. Je crois que le précédent gouvernement fédéral a manqué à son devoir en ce sens. C'est au gouvernement de rassurer la population, et non l'inverse. À mon avis, cet effort n'a pas été fait.
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Merci, monsieur le président.
Il nous faudrait, je pense, citer quelques chiffres en rapport avec le règlement des différends entre les investisseurs et l'État. Jusqu'ici, tout le monde n'a évoqué que le passif que cela représente pour le Canada. Or, depuis la signature de l'ALENA, nous avons enregistré 5,3 trillions de dollars d'investissements directs étrangers. Le Canada a eu à verser 171 millions de dollars au titre du règlement de différends entre les investisseurs et l'État, et, de cette somme, 123 millions de dollars sont allés à Abitibi Bowater. Il y a également eu un versement de 121 millions de dollars dû à la nationalisation d'une usine de pâte à papier.
L'écart entre ces deux chiffres traduit bien l'importance d'accords tels que l'ALENA.
Selon le rapport économique spécial sur l'ALENA rédigé par la Banque TD, nos échanges commerciaux se sont élevés, en 1993, à 290 milliards de dollars. Or, en 2012, ce chiffre était passé à 1,1 trillion de dollars. C'est dire les incidences de ce genre d'accord. Depuis 1993, le nombre d'emplois au Canada a augmenté de 4,7 millions. Il suffit d'examiner les chiffres pour voir les incidences que ce type d'accord a sur notre économie. Je souhaiterais pouvoir vous citer les chiffres qui concernent plus précisément le Québec. Il faut bien comprendre ce que donne la libéralisation des échanges et le fait de permettre au secteur privé de se développer et de créer des emplois.
Je suis originaire de la Saskatchewan. Lorsque le NPD était au pouvoir, les jeunes et les entreprises quittaient la province et, tout d'un coup, il ne restait plus personne pour assurer à la population les services dont elle avait besoin. Nous n'avions, de toute manière, plus les moyens de payer ces services. Notre système de soins de santé était, comme beaucoup d'autres choses, en péril, les politiques mises en place par le gouvernement de l'époque ayant cassé l'activité économique. Il est remarquable de voir à quel point la situation a pu changer en huit ans.
Les membres du comité ont évoqué le déplacement qu'ils ont fait à Saskatoon, il y a quelques semaines. Ils se sont étonnés du nombre de jeunes en Saskatchewan. S'il en est ainsi, c'est parce que nous avons, dans la province, laissé l'industrie se développer, et le secteur privé investir à nouveau.
Et voilà qu'il nous faut, tout d'un coup, recruter davantage d'infirmières, davantage de médecins. Nos communautés sont en pleine expansion. Nos petites villes ont repris vie. Selon une plaisanterie de l'époque, la dernière personne à quitter la Saskatchewan pour aller vivre en Alberta était chargée d'éteindre l'électricité. Or, on fait maintenant la plaisanterie inverse. Sera chargée d'éteindre l'électricité, la dernière personne à quitter l'Alberta pour aller s'installer en Saskatchewan.
C'est dire l'importance des politiques publiques.
Nous avons relevé, dans le cadre de notre étude sur l'AECG, que pour pouvoir profiter pleinement de ces accords commerciaux, il nous fallait développer notre infrastructure. Il allait, tout d'un coup, y avoir un flux de marchandises allant de l'Est à l'Ouest. La Saskatchewan va devoir envoyer à Québec une mission commerciale afin d'étudier vos installations portuaires, et les moyens qui peuvent être mis en oeuvre, car le volume de marchandises en provenance de la Saskatchewan et de l'Alberta transitant par le port de Québec et le port de Montréal est appelé à augmenter. C'est incontestable. Et, tout d'un coup, le transport de produits agricoles va cesser d'être uniquement dans l'axe nord-sud, et se développer davantage entre l'Est et l'Ouest.
Cela est d'une importance essentielle pour le développement de cette région. Dans 10 ans...
Mais il y a un autre argument que je souhaite contrer.
Certains affirment que nous avons, ces 10 dernières années, enregistré un déficit commercial. Mais penchons-nous un peu sur les chiffres. Le dollar canadien était fort. Pendant cette période de 10 ans, son cours a fluctué entre 1 $ et 1,10 $. Pas le moindre signe d'une récession mondiale. Il est clair que la valeur de notre monnaie a eu une incidence sur nos exportations aux États-Unis de produits manufacturés, mais l'on peut penser que, sans les accords commerciaux en vigueur à l'époque, la situation aurait été sensiblement plus mauvaise.
Or, qu'avons-nous appris? Les producteurs de boeuf, par exemple, se sont rendu compte qu'ils ne pouvaient plus se contenter d'exporter vers un seul marché. Ils se sont tournés vers l'Asie, ils se sont tournés vers l'Europe et divers autres pays, et c'est là qu'intervient un accord tel que le PTP. Ils disent pouvoir prendre pied sur le marché sud-coréen, mais les États-Unis les ont devancés dans la signature d'un accord de libre-échange qui les désavantage pour l'instant. Il va leur falloir un certain temps pour récupérer la part de marché qu'ils ont perdu aux Américains qui les ont devancés dans la signature d'un accord de libre-échange.
Eh bien oui, nous avons effectivement perdu une part de nos marchés en Corée du Sud, car nous avons tardé à conclure un accord, et c'est bien ce qui m'inquiète au sujet du PTP. La non-ratification de cet accord aurait de sérieuses incidences sur toutes les régions de notre pays, car les États-Unis et le Mexique prendraient alors notre place.
Quel pourrait être l'avenir de votre administration portuaire si l'on ne conclut pas d'accords commerciaux?
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Je me présente: je suis Martin Fournier, directeur général d'Armateurs du Saint-Laurent.
Nous représentons les armateurs, autrement dit les propriétaires de navires commerciaux canadiens, qui sont présents sur le Saint-Laurent. Nous représentons une flotte de plus de 130 navires canadiens et équipages canadiens qui font du transport entre les Grands Lacs, le Saint-Laurent, l'Atlantique, l'Arctique et la côte Est américaine. Ce sont nos principaux marchés.
Les activités de nos membres sont possibles grâce à la Loi sur le cabotage, qui protège le transport maritime entre deux ports canadiens.
Bien que nous souhaitions que le Canada négocie et conclue des ententes commerciales avec différents pays, dont le PTP, nous avons quand même quelques inquiétudes relativement à l'ouverture du cabotage aux navires étrangers, comme cela a été le cas avec l'accord économique avec l'Europe. En effet, en vertu de ce dernier, des navires européens avec équipages européens peuvent venir maintenant ou pourront venir faire du cabotage entre deux ports canadiens avec, à leur bord, des équipages dont les coûts représentent environ 33 % seulement des coûts d'équipages canadiens. Il nous est donc impossible de faire concurrence à ces gens.
Nous sommes inquiets que le PTP poursuive dans cette direction et qu'il le fasse pour l'industrie maritime intérieure. Nous souhaitons, en fait, que le cabotage ne soit pas ouvert dans le cadre du PTP.
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Bonjour. Je m'appelle Patrick Kerr. Je ne représente personne. Personne ne m'a payé pour prendre la parole. Je suis un simple citoyen préoccupé par la situation.
Je ne dispose pas de beaucoup de temps et je vais donc exprimer tout de suite mon opposition à cet accord. Il devrait, d'après moi, faire l'objet de nouveaux pourparlers, mais je crois comprendre que cela n'est pas possible, qu'un ultimatum a été donné au Canada et que nous ne pouvons pas renégocier les conditions de l'accord. Or, je m'y oppose dans son état actuel.
Pourquoi n'y suis-je pas favorable? Il y a pour cela plusieurs raisons et, dans les 6 000 pages de l'accord, on en trouverait sans doute beaucoup d'autres. Je vais donc simplement évoquer les choses qui me préoccupent le plus.
Je ne suis pas certain que vous ayez bien compris ce qu'impliquent les dispositions touchant le règlement des différends entre les investisseurs et l'État. Les conséquences qui pourraient en découler me préoccupent beaucoup. Je dis les craindre, car aucune de ces conséquences ne s'est encore produite et que, pour l'instant, il n'y a même pas d'accord. Mais voyons un peu ce qui s'est produit avec d'autres accords tels que l'ALENA. Je ne me souviens pas de ce que prévoit l'accord récemment conclu avec la Chine, mais, déjà, un différend est survenu.
Ce type de dispositions permet aux compagnies ou aux entreprises d'actionner notre gouvernement, c'est-à-dire d'attaquer les Canadiens en justice et de leur soutirer de l'argent à partir du moment où elles ne sont pas d'accord avec nos politiques sur l'environnement ou avec nos politiques en matière de sûreté et de sécurité, si tant est que celles-ci leur paraissent injustes, ou empiètent trop sur leurs profits. L'accord leur en offre la possibilité. Je crains donc que pour apaiser ces compagnies et ces entreprises, et pour protéger leurs bénéfices, nous nuisions à notre environnement et à notre santé. Je ne pense pas que ce soit, à terme, une sage politique.
Mais, il s'agit là d'une inconnue, d'un point d'interrogation. Nous ne savons pas quelles seront les actions en justice engagées contre nous, mais il suffit de voir le genre de mesures qui ont été prises à l'encontre de notre pays dans le cadre de l'ALENA. Faute de temps, je ne peux pas entrer dans le détail, mais le risque de voir notre pays actionné en justice me préoccupe beaucoup et c'est essentiellement pour cela que je m'oppose au PTP.
Je suis, en outre, préoccupé par la prolongation de la période de protection des brevets, et par les incidences que cela risque d'avoir sur notre industrie pharmaceutique. Le Canada est le seul pays à avoir un programme national d'assurance-santé sans pourtant avoir mis en place un régime d'assurance-médicaments. Si le prix des médicaments, qui est déjà élevé, augmente, il deviendra encore plus difficile d'instaurer un programme national d'assurance-médicaments. Ça aussi, ça me préoccupe.
Je pourrais vous en dire davantage, mais je suis à court de temps. Je vous remercie.
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Je m'appelle Pierre Yves Serinet et, à titre de citoyen, j'aimerais réagir à certains propos qui ont été tenus ce matin concernant l'accord du Partenariat transpacifique.
D'entrée de jeu, j'aimerais souligner que M. Lebel se bombe le torse en parlant de la grande transparence du gouvernement conservateur, mais c'est faux. Personne, sauf le milieu des affaires, n'a vraiment été consulté relativement au PTP.
Son collègue nous présente des chiffres, on parle de milliards de dollars et des poursuites qui se chiffrent en millions de dollars. Il faut quand même comparer des oranges avec des oranges, et non des oranges avec des patates. Je pense que le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États restreint la capacité de réglementer des gouvernements en matière environnementale, en matière de droit du travail et même en matière économique. Ce mécanisme empêche de prescrire des résultats, de s'assurer que l'on appuie la création d'emplois locaux, le développement régional, et que l'on favorise des politiques d'innovation et des politiques environnementales.
Il manque une étude — c'est un appel au gouvernement — sur les conséquences de l'ALENA depuis 20 ans. Je pense qu'il faut sortir de cette rhétorique qui affirme que le libre-échange est bon en soi. Faisons l'étude.
Nous avons fait une telle étude sur l'impact de l'ALENA. On promettait plus d'emplois, plus de prospérité, plus de répartition de la richesse, plus de protection de l'environnement et plus de protection des droits du travail. Le bulletin de notes indique un gros zéro pour tous ces domaines, que l'on parle de création d'emplois, de qualité des emplois ou de la concentration de la richesse.
Avec ce modèle économique, nous n'avons pas assisté, au cours des 25 dernières années, à une expansion des mesures de protection sociale en santé. On voit cela en regardant les chiffres. Nous déposerons notre mémoire là-dessus. Je pense que les citoyens peuvent déposer des mémoires au Comité pour que celui-ci prenne conscience de ce qui, dans le modèle économique, a un impact négatif et doit être repensé.
De tels dialogues internationaux doivent être l'occasion de repenser le modèle économique. Il faut remettre l'économie au service des citoyens, remettre l'économie au service de la création d'emplois et, surtout, promouvoir les principes assez fondamentaux de coopération et de complémentarité. L'idée de la concurrence à tout prix et de faire des profits à tout prix doit être repensée. Il y a des défis devant nous sur les plans de l'environnement, de la qualité de vie et de la répartition de la richesse. La discussion sur le modèle économique du libre-échange doit permettre cette réflexion. Je pense que nous avons beaucoup à gagner en élargissant ce débat et en le rendant public.
C'est assez consternant. Je ne sais pas jusqu'à quel point le Comité a fait les efforts nécessaires pour attirer plus de public, mais je n'ai pas vu de communiqué pour inviter les gens à participer. Je pense que le débat public doit être élargi, et qu'il doit se baser sur des chiffres rigoureux et sur des études. Le débat public doit aussi être élargi de façon à ce que les gens assument les décisions que nos décideurs élus prennent au bout du compte.
Je vous remercie.