CIIT Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent du commerce international
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 31 mai 2016
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour à tous. Je souhaite un bon retour à tous les députés qui ont passé la semaine dans leur circonscription.
Comme tout le monde le sait, nous sommes le Comité permanent du commerce international, un comité très actif s'il en est. Nous avons passablement de pain sur la planche et nous allons poursuivre le travail. Il faut mettre la touche finale à l'entente européenne. Il faut aussi traiter de la question du bois d'oeuvre, mais pour l'instant, notre attention est prise par le Partenariat transpacifique. Notre Comité a sillonné le pays. Nous sommes déjà allés dans les provinces de l'Ouest, en Ontario et au Québec. Cet automne, nous nous rendrons dans les provinces atlantiques et dans les territoires.
Nous avons entendu un grand nombre de témoins. Nous avons eu des présentations en tribune libre lors de nombreuses séances organisées un peu partout au pays, et nous accepterons jusqu'à la fin de juin tous les mémoires que quiconque voudra nous soumettre. Les députés qui tiendront des consultations publiques ont jusqu'à la fin de juillet pour nous remettre leurs documents. Nous avons également entendu de nombreux représentants d'entreprises, d'organismes et de parties concernées. Comme nombre d'entre vous le savent, il s'agit d'un accord de grande envergure, d'un accord qui va toucher chaque Canadien d'une façon ou d'une autre, qu'il soit un consommateur ou un fournisseur.
Le sujet principal de la séance d'aujourd'hui est le système de soins de santé. Nous avons avec nous de nombreux représentants de différents secteurs de ce système.
Aujourd'hui, nous allons procéder un peu différemment. Lorsqu'arrive le mois de juin à Ottawa, les choses ont tendance à s'activer. C'est-à-dire que le Parlement est toujours actif, mais on ne sait jamais ce que le mois de juin nous réserve. Ce que nous allons faire maintenant, c'est que nous allons d'abord laisser tous nos témoins faire leur exposé, et cela sera suivi d'une conversation aussi longue que possible avec les députés. Je crois que cette façon de faire sera plus efficace, car notre objectif premier est d'écouter ce qu'ont à dire les Canadiens et les personnes concernées de différents secteurs.
Si quelque chose devait arriver, la séance pourrait être ajournée. Comme nous sommes des députés, il se peut que nous ayons à nous rendre à la Chambre, mais il ne semble pas y avoir grand risque d'interruption ce matin.
Sans plus tarder, nous avons six témoins, dont un qui nous parvient de la Norvège.
Pouvez-vous m'entendre là-bas, monsieur Labonté? Nous allons commencer par vous.
Avant de commencer, nous allons demander aux témoins de garder leur exposé à environ cinq minutes. Nous vous en saurions gré. S'il est plus court ou un peu plus long, ce ne sera pas un problème. L'important est de faire connaître votre opinion. Vous pourrez ensuite discuter longuement avec les députés.
Monsieur Labonté, soyez le bienvenu. Nous vous écoutons.
Je vous remercie beaucoup de me donner la possibilité de m'adresser à vous depuis la très jolie ville de Trondheim, en Norvège.
Je dirige l'unité de recherche sur la mondialisation et l'équité en santé de l'Université d'Ottawa. Nous avons terminé récemment une évaluation d'impact sur la santé de l'Accord de partenariat transpacifique, étude qui a duré deux ans. Je vais vous parler de quelques-unes de nos conclusions.
Premièrement, l'incidence du PTP sur le coût des produits pharmaceutiques a suscité beaucoup d'attention. Je sais que le Comité a déjà entendu le témoignage du Dr Joel Lexchin, dont les travaux antérieurs sur la prolongation de la durée des brevets prévue par l'AECG ont permis d'évaluer que le coût des médicaments au Canada pourrait augmenter de 2 à 3 milliards de dollars d'ici 2023, sans garanties de gains thérapeutiques.
Le PTP maintient les dispositions à cet égard, tout en assouplissant les exigences relatives à la reconduction perpétuelle des brevets. Il est important de situer cela dans le contexte où, parallèlement, un groupe de haut niveau l'ONU réclame de nouveaux modèles de développement des technologies de la santé et des médicaments qui vont au-delà des régimes de brevets, afin d'établir un meilleur équilibre entre les intérêts commerciaux et industriels, d'une part, et les enjeux liés aux droits de la personne et à la santé publique, d'autre part. Par conséquent, le renforcement des dispositions relatives aux brevets pharmaceutiques semble quelque peu déphasé par rapport à ces autres discussions multilatérales visant à garantir l'accès à des médicaments d'importance vitale.
Deuxièmement, bien que le PTP n'entraîne pas de modification significative au modèle à payeur unique qui caractérise le système de soins de santé canadien, il fait surgir de nouveaux risques. Le Canada a déjà libéralisé l'assurance-maladie privée dans le cadre de l'AGCS et de l'ALENA, mais s'il étendait le monopole de l'assurance-maladie publique à des secteurs où des compagnies d'assurance privées à participation étrangère ont des intérêts, cette décision pourrait entraîner un litige. Le PTP accroît ce risque en appliquant les règles régissant les différends opposant un investisseur et un État à un nombre beaucoup plus élevé d'investisseurs étrangers et expose les réclamations en matière d'assurance-maladie privée aux dispositions passablement controversées du RDIE, qui ne font pas partie de l'ALENA, ou du moins du chapitre de l'ALENA qui porte sur les services financiers.
Des investisseurs ont déjà présenté des réclamations relatives à l'assurance-maladie contre d'autres pays et ont obtenu gain de cause en vertu de traités bilatéraux d'investissements comportant des dispositions semblables à celles prévues dans le PTP. Bien que l'Annexe II du Canada visant les services sociaux puisse certes offrir une protection contre des poursuites entreprises par un investisseur, cela dépendra grandement de la façon dont le tribunal interprétera cette réserve.
Troisièmement, le PTP autorise l'exclusion volontaire des plaintes formulées par un investisseur contre un État relativement à des mesures de lutte contre le tabagisme, ce qui est un gain appréciable du point de vue de la santé publique. Cette exclusion ne s'applique toutefois pas aux différends entre États qui pourraient découler de pressions exercées par l'industrie du tabac sur des pays membres du PTP, ni n'empêche les sociétés transnationales productrices de tabac d'avoir recours à d'autres traités d'investissements, comme l'ALENA, pour déposer une plainte contre le Canada relativement à de nouvelles mesures de lutte contre le tabagisme, comme l'engagement pris par le Canada au sujet des emballages neutres.
Néanmoins, cette exclusion illustre surtout la crainte des gouvernements prenant part au PTP à l'égard de l'incidence possible des dispositions du RDIE sur la réglementation en matière de santé publique, ce qui nous invite à nous poser une question plus générale. Pourquoi cette exclusion n'a-t-elle pas été accordée à toutes les mesures de santé publique non discriminatoires pouvant être adoptées par un pays, surtout compte tenu des effets d'autres produits nuisibles à la santé commercialisés mondialement comme les aliments ultratransformés et l'alcool?
Quatrièmement, le PTP dresse de nouveaux obstacles à la réglementation de ces denrées nuisibles pour la santé. Les nouvelles dispositions des chapitres du PTP portant sur les mesures sanitaires et phytosanitaires et sur les obstacles techniques au commerce pourraient affaiblir le recours au principe de précaution en matière de santé publique, qui s'applique lorsque les données probantes sont insuffisantes pour en arriver à un consensus scientifique sur les risques pour la santé, et exige parallèlement que les parties au PTP s'assurent que toute nouvelle norme réglementaire n'impose aucun obstacle inutile au commerce international. Grâce à ces dispositions, les intérêts commerciaux pourraient l'emporter sur les efforts de réglementation destinés la protéger la santé des consommateurs, du public et de l'environnement. Le PTP offre aussi aux sociétés ayant des intérêts en cause des avenues leur permettant d'influencer l'élaboration de ces normes.
Les gouvernements prenant part au PTP ont invoqué les exceptions relatives à la santé pour calmer certaines de ces craintes. Elles comprennent notamment le recours au paragraphe XX(b) du GATT de l'OMC, qui autorise les gouvernements à adopter les mesures nécessaires pour protéger, notamment, la vie humaine, lorsqu'elles ne sont pas considérées comme une discrimination injustifiable envers des pays. Cette exception est importante, mais, jusqu'à présent, elle n'a permis de remporter qu'un seul litige sur 43, la plupart ayant été déboutés sur la base du critère de nécessité, ce qui signifie que les membres du groupe de règlement des différends ont estimé que d'autres solutions ayant une moindre influence sur les échanges commerciaux auraient pu être envisagées.
De même, l'exception générale prévue au chapitre du RDIE autorise les parties à adopter des mesures visant à protéger l'environnement ou d'autres objectifs en matière de réglementation, mais il est très rapidement précisé que cette autorisation n'est valide que si les mesures sont conformes aux autres exigences du chapitre.
Bien sûr.
Dans l'ensemble, nous ne croyons pas que les dispositions du PTP offrent une protection suffisante à la réglementation en matière de santé publique, ni pour aujourd'hui ni pour l'avenir. Nous n'avons pas non plus la moindre preuve que la croissance économique et les emplois se traduiront par des occasions d'amélioration et de promotion de la santé. Aucune des études économiques que nous avons consultées n'indiquent que ces gains seront appréciables, si tant est qu'il y en ait.
Il est difficile d'imaginer que le PTP puisse représenter un quelconque avantage pour la santé. Nous estimons qu'il comporte aussi de grands risques en la matière.
Merci.
Merci, monsieur.
Nous passons maintenant aux représentants de Médicaments novateurs Canada. Nous accueillons Declan Hamill et Mark Fleming.
Vous pouvez y aller, vous avez cinq minutes.
Monsieur le président, je suis ravi de participer aujourd'hui à la consultation du Comité permanent du commerce international sur l'Accord de partenariat transpacifique.
Je suis accompagné de mon collègue Mark Fleming, qui représente Janssen, Compagnies pharmaceutiques de Johnson & Johnson.
[Français]
Médicaments novateurs Canada est l'association nationale qui représente les compagnies pharmaceutiques innovatrices du Canada. Nous sommes dévoués à améliorer le bien-être des Canadiennes et Canadiens par la découverte et le développement de nouveaux médicaments et vaccins. Ensemble, nous investissons chaque année plus de 1 milliard de dollars en recherche-développement pour alimenter l'économie du savoir au Canada.
[Traduction]
Nous voulons aborder brièvement quelques idées que nous estimons erronées à propos de l'incidence des dispositions du PTP sur l'innovation pharmaceutique, les patients et le coût des soins de santé au Canada.
La première chose, c'est qu'on prétend que le PTP assurera une bien meilleure protection de la propriété intellectuelle canadienne dans le domaine des sciences de la vie.
Monsieur le président, dans le résumé technique des résultats des négociations du PTP pour le Canada, pour ce qui est des produits pharmaceutiques, le gouvernement conclut que les résultats sont « [conformes] au résultat obtenu dans l’Accord économique et commercial global (AECG) avec l’Union européenne ». Autrement dit, concrètement, dans le domaine des sciences de la vie, le PTP n'améliore pas vraiment la protection de la propriété intellectuelle par rapport à ce qui a été négocié dans le cadre de l'AECG.
Deuxièmement, on entend souvent dire que le PTP prolongera la durée des brevets au Canada.
Monsieur le président, aux termes du PTP, la durée des brevets demeurera conforme aux normes internationales établies depuis 20 ans. Toutefois, les entreprises innovatrices auront la possibilité de récupérer une partie du temps perdu sur leurs brevets en raison des longs essais cliniques et des retards du processus d'approbation réglementaire.
La troisième chose, c'est que certains affirment que le PTP entraînera une augmentation du prix des médicaments canadiens.
Monsieur le président, la protection de la propriété intellectuelle n'a pas d'incidence sur le coût des nouveaux médicaments et des nouveaux vaccins. En outre, aucune disposition du PTP n'empêchera les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux du Canada de faire exactement ce qu'ils font maintenant, à savoir fixer le prix des produits pharmaceutiques par l'intermédiaire du CEPMB et d'autres mécanismes d'établissement des prix fédéral, provinciaux et territoriaux.
La quatrième chose qu'affirment les détracteurs du PTP, c'est que le système canadien protège déjà suffisamment la propriété intellectuelle dans le domaine des sciences de la vie pour soutenir la concurrence et l'innovation.
Monsieur le président, dans le secteur des sciences de la vie, la protection des brevets et des données encourage les sociétés biopharmaceutiques à investir dans la R-D les sommes colossales qui sont nécessaires pour mettre au point de nouveaux médicaments innovateurs. Il en coûte en moyenne 2 milliards de dollars pour mettre au point un nouveau médicament, sur une période de 10 à 15 ans nécessaire aux processus réglementaires de la R-D. Or, la protection de la propriété intellectuelle assurée par le Canada est moindre que celle offerte par ses homologues du G7 et par de nombreux autres pays industrialisés.
Les dispositions relatives à la propriété intellectuelle négociées dans le cadre de l'AECG entre le Canada et l'Europe contribuent très concrètement à uniformiser les règles du jeu entre le Canada et l'Europe, ainsi qu'avec d'autres pays développés. Par exemple, depuis l'annonce initiale de l'AECG en 2013, Janssen, la société où je travaille, s'est engagée à investir 1 milliard de dollars dans le domaine des sciences de la vie au Canada.
Les dispositions de l'AECG relatives à la propriété intellectuelle n'ont pas été les seules raisons qui ont motivé cet investissement, mais elles ont certainement été un catalyseur déterminant dans la décision prise par notre société d'inclure le Canada dans sa stratégie mondiale d'investissement. L'ouverture récente, le 11 mai dernier, de JLABS @ Toronto est un exemple concret de ces investissements. Cet établissement hébergera jusqu'à 50 innovateurs canadiens du secteur des sciences de la vie. Il éliminera les obstacles financiers qui empêchent les entreprises en démarrage de se concentrer sur la recherche et les aidera à faire ce qu'elles font le mieux, à savoir découvrir, inventer et créer des technologies pouvant sauver des vies.
Je rappelle toutefois que cela concerne l'AECG, et le Comité s'intéresse au PTP. Selon nous, le PTP aura peu ou pas d'incidence sur la propriété intellectuelle des produits pharmaceutiques au Canada. Il correspond essentiellement à ce qui existe déjà et à ce qui a été convenu dans le texte de l'AECG.
Nous souhaitons attirer l'attention du Comité sur un article publié récemment par mon collègue, M. Hamill, que M. Barry Sookman a déposé lors de sa comparution devant le Comité il y a quelques semaines. L'article analyse en profondeur les dispositions fondamentales de l'AECG et du PTP, ainsi que les différentes mesures de protection de la propriété intellectuelle en place au Canada et chez nos principaux partenaires commerciaux.
En résumé, monsieur le président, notre association appuie en principe les accords commerciaux internationaux qui contribuent à renforcer l'économie canadienne. À mesure que l'économie progressera, nous continuerons d'investir et d'innover pour garantir aux patients l'accès à des médicaments vitaux susceptibles d'améliorer leur qualité de vie.
Merci beaucoup. Thank you.
Merci, messieurs.
Nous allons passer à l'Association des infirmières et infirmiers du Canada, l'AIIC, qui est représentée par Mme Carolyn Pullen.
Vous avez la parole.
Merci de me donner la possibilité de faire cette présentation.
Je suis infirmière autorisée et je compte parmi les 139 000 membres de l'Association des infirmières et infirmiers du Canada.
À l'heure actuelle, le Comité connaît très bien les arguments favorables et défavorables à la ratification du PTP par le Canada. J'exposerai aujourd'hui les raisons pour lesquelles l'AIIC se prononce contre la ratification, j'insisterai sur des craintes qui ont déjà été soulevées par d'autres témoins, et je soulignerai des considérations propres à la profession infirmière au Canada. L'AIIC est un ardent défenseur du système de santé public canadien. Nous soutenons que notre modèle est le meilleur en ce qui a trait à la promotion de la santé de tous les Canadiens et à l'accès universel à des soins de grande qualité, indépendamment de la capacité de payer des patients.
Selon les estimations, les retombées économiques du PTP au Canada seraient relativement faibles et pourraient ne pas excéder 0,1 % du PIB d'ici 2035. Bien que l'accord puisse être bénéfique pour certains secteurs, il pourrait avoir de graves répercussions sur la gestion des systèmes de soins de santé, menaçant ainsi l'évolution du régime de santé de notre pays et touchant tous les Canadiens.
Les quatre préoccupations de l'AIIC sont les suivantes.
Premièrement, le prix des médicaments augmenterait après l'adoption du PTP, et il serait plus difficile de mettre en place un programme national de médicaments d'ordonnance, initiative qu'approuvent la plupart des Canadiens. En raison du prolongement des brevets de médicaments, ce qui retarderait la mise en marché de médicaments génériques moins coûteux, le coût des médicaments pourrait augmenter de 636 millions de dollars au Canada d'ici 2023, ce qui représente 5 % du coût annuel des médicaments brevetés au pays. Simultanément, le fait que des médicaments vitaux ne soient plus abordables aurait un effet néfaste sur la santé de la population en général.
Deuxièmement, les protections offertes par le PTP aux investisseurs grâce au mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États, le RDIE, bloqueraient les services de santé privés et empêcheraient tout élargissement futur du régime public d'assurance-maladie du Canada. Le risque que le RDIE nuise à l'expansion du régime public d'assurance-maladie dans des secteurs actuellement assurés par le secteur privé nous inquiète tout particulièrement. L'assurance-médicaments en est un exemple.
Troisièmement, à cause du PTP, il serait plus difficile pour le Canada de réglementer les services de santé. La section de l'accord portant sur le commerce transfrontalier prévoit des réserves sur les services de santé, mais pas sur les services complémentaires comme la nourriture, l'entretien, la maintenance, l'informatique et la gestion des données, l'administration hospitalière et d'autres services de soutien essentiels. Une fois privatisés, toute tentative de réglementer de nouveau ces services ou de les nationaliser pourrait mener à des contestations judiciaires aux termes du PTP.
Pour ce qui est de la profession infirmière, depuis 2015, le nouvel examen d'entrée dans la profession infirmière est l'examen NCLEX-RN américain, produit par le National Council of State Boards of Nursing, ou NCSBN, un organisme privé des États-Unis. Les mesures régissant les services d'évaluation et de formation offerts par ce fournisseur américain échapperaient donc au champ d'application de la réserve prévue à l'annexe II.
Cet examen suscite de sérieuses préoccupations, notamment en ce qui concerne la mauvaise traduction du texte en français, le manque de documents de préparation pour les étudiants francophones, la divergence entre l'examen et les compétences nécessaires pour pratiquer les soins infirmiers dans le système de soins de santé canadien, et le fait que moins de diplômés admissibles entrent sur le marché du travail.
Si les gouvernements provinciaux ou les organismes de réglementation prennent des mesures pour régler ces problèmes, le NCSBN pourrait formuler des plaintes qui donneraient lieu à un différend opposant les deux gouvernements ou un investisseur et un État. Pour éviter cette situation coûteuse, il est possible qu'on passe sous silence les problèmes liés au NCLEX, ce qui maintiendrait dans un état de blocage politique et de paralysie réglementaire le développement de l'effectif le plus nombreux du secteur canadien de la santé, à savoir les infirmières et les infirmiers. Cette question a déjà été soulevée devant le Comité.
Enfin, le PTP entraverait l'expansion du système de santé public canadien pour y inclure des programmes comme l'assurance-médicaments. L'annexe sur la transparence donne aux sociétés productrices de médicaments de marque de nouveaux droits pour contester les décisions prises par les organismes publics de réglementation des médicaments, ce qui favoriserait la fixation des prix en fonction du marché et entraînerait une augmentation des coûts assumés par les gouvernements.
L'annexe indique explicitement que le Canada « n'administre actuellement aucun régime national de soins de santé relevant du champ d'application de la présente annexe ». Donc, si le Canada décidait plus tard de mettre en place un programme national de soins de santé visant l'établissement du prix des médicaments et le remboursement de ceux-ci, des pressions seraient exercées sur le pays pour qu'il respecte l'annexe sur la transparence. Ce chapitre empêcherait le gouvernement fédéral, qui est le cinquième fournisseur de services de santé en importance au Canada, d'offrir aux contribuables le meilleur rapport qualité-prix possible pour les produits thérapeutiques. L'annexe sur la transparence gênerait aussi la capacité future du Canada à établir une coopération efficace avec les gouvernements provinciaux et territoriaux pour mettre en place des mesures conjointes, comme un formulaire national, visant à rendre les médicaments plus abordables.
Voilà les raisons pour lesquelles l'AIIC demande au gouvernement fédéral de ne pas ratifier le PTP.
Je vous remercie de votre attention.
Merci.
Nous allons maintenant passer à l'Association canadienne du médicament générique, représentée aujourd'hui par Jim Keon et Jody Cox.
Nous vous écoutons.
Monsieur le président, au nom de l'Association canadienne du médicament générique et des entreprises qu'elle regroupe, je tiens à vous remercier, vous et les autres députés, de nous donner l'occasion de participer à l'étude sur le Partenariat transpacifique, ou PTP.
Comme vous l'avez dit, je suis accompagné aujourd'hui de Jody Cox. Elle est notre vice-présidente des affaires fédérales et internationales. Jody a participé très activement aux séries de négociations sur le PTP et elle a représenté le point de vue de notre industrie au Canada et à l'échelle internationale.
Les fabricants de médicaments génériques procurent directement de l'emploi à plus de 10 000 Canadiens dans des postes de recherche, de développement et de fabrication hautement spécialisés. Nous exploitons les plus grandes sociétés des sciences de la vie en Ontario et au Québec. Nous sommes les principaux fabricants et exportateurs de produits pharmaceutiques au Canada, et nos dépenses dans la recherche et le développement sont parmi les plus élevées de tous les secteurs industriels.
L'industrie du médicament générique appuie fermement la libéralisation et l’ouverture du commerce. Nous exportons des médicaments génériques de qualité, fabriqués au Canada, à plus de 115 pays. Nous importons aussi, de partout dans le monde, des matières premières et d'autres composants.
Notre industrie apporte une valeur inestimable au système canadien de soins de santé. En effet, les médicaments génériques représentent 69 % des médicaments délivrés sur ordonnance au Canada — en gros, 7 médicaments de prescription sur 10 —, mais ils comptent pour seulement 22 % des 25 milliards de dollars que les Canadiens consacrent chaque année aux médicaments sur ordonnance.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, j'aimerais dire quelques mots sur la propriété intellectuelle et le commerce dans le domaine pharmaceutique. Nous savons que votre Comité étudie le PTP. Toutefois, les dispositions relatives à la propriété intellectuelle des produits pharmaceutiques méritent d'être examinées dans un contexte plus large.
Premièrement, il est important de reconnaître que la propriété intellectuelle des médicaments était déjà bien protégée au Canada, avant les négociations sur l'AECG ou le PTP. Lorsque les négociations sur l'AECG battaient leur plein, le monopole réservé aux médicaments de marque au Canada était protégé, en moyenne, pendant six mois de plus qu'aux États-Unis.
Le deuxième point que je voudrais faire valoir en guise de contexte, c'est que les résultats prévus aux termes de l'AECG pour l'industrie des produits pharmaceutiques étaient des concessions faites par le gouvernement du Canada afin de sceller l'accord. C'étaient des demandes faites par les Européens pour le compte de fabricants de médicaments de marque ayant leur siège social en Europe. Ces concessions n'ont pas été faites pour stimuler l'innovation au Canada, mais pour conclure l'AECG. Ainsi, la recherche sur de nouveaux médicaments est menée dans le cadre de programmes mondiaux de développement. Les décisions sur le choix de l'endroit où effectuer des activités de recherche et de développement n'ont pas grand-chose à voir, et même rien à voir, avec la propriété intellectuelle, comme en témoignent de nombreux investissements dans la recherche et le développement de médicaments d'origine en Inde et en Chine. Ces décisions reposent sur des facteurs comme la présence d'une main-d'oeuvre instruite ou des coûts d'entreprise peu élevés.
Troisièmement, il faudra apporter d'importants changements au régime canadien de propriété intellectuelle des produits pharmaceutiques afin de ratifier les accords commerciaux. Ces changements entraîneront d'importants coûts pour le système canadien de soins de santé. Je ne parlerai pas de chiffres aujourd'hui, mais sachez que les coûts précis dépendront de la façon dont le tout sera mis en oeuvre.
Je rappelle en passant qu'une sous-ministre adjointe de Santé Canada est venue parler de l'accroissement des coûts. En fait, ce n'était pas devant votre Comité, mais celui de la santé. Elle a parlé de l'incidence de l'AECG sur les coûts de soins de santé. Le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, ou CEPMB, contrôle le prix des médicaments brevetés, mais si on ne peut pas acheter un médicament générique au cinquième du prix, il est clair que les coûts vont augmenter. Plus nous prolongerons la durée des brevets, plus les coûts augmenteront.
Les nouvelles mesures en matière de propriété intellectuelle auront également une incidence sur les fabricants canadiens de médicaments génériques. Nos entreprises font partie des chaînes d'approvisionnement mondiales et elles jouent un rôle actif pour ce qui est de soutenir la concurrence et d'attirer des investissements et des emplois au Canada. Pour fonctionner dans un tel contexte, les entreprises doivent être en mesure d'accéder aux marchés d'exportation pour se procurer de nouveaux médicaments génériques dès qu'ils s'ouvrent à la concurrence. Tout retard à agir signifie généralement la perte d'une part de marché potentielle, qui ne pourra jamais être récupérée.
Les fabricants de médicaments génériques doivent s'y retrouver dans les dédales du régime national de propriété intellectuelle relative aux produits pharmaceutiques afin de fabriquer des produits pour leurs marchés intérieur et extérieur. Nous perdrons des investissements au Canada si les lois ne demeurent pas propices à la compétitivité et au commerce.
J'aimerais maintenant faire quelques observations sur les résultats concrets du PTP. Dans l'ensemble, les dispositions du PTP relatives aux produits pharmaceutiques visent à accroître la propriété intellectuelle au-delà des niveaux actuels prévus dans l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle, ou ADPIC, lequel est administré par l'Organisation mondiale du commerce. En dépit de cela, le résultat final du PTP dans le domaine de la propriété intellectuelle relative aux produits pharmaceutiques, selon ce qui a été négocié par les représentants canadiens, se veut conforme aux engagements supplémentaires que le Canada a déjà pris en vertu de l'AECG.
Aux termes de l'AECG et du PTP, le Canada a convenu pour la première fois de prolonger la durée des brevets pharmaceutiques, manifestement pour tenir compte du délai associé au processus d'approbation réglementaire des médicaments de marque. Il est important de noter que la prolongation sera limitée à deux ans.
Oui.
Un autre aspect important, c'est que le PTP comporte une disposition qui autorisera les exportations durant la période de prolongation.
Un des points que nous ferions valoir, c'est que tout se jouera dans la manière dont le PTP sera mis en oeuvre, et, à ce titre, le ministère du ministre Bains, à savoir le ministère de l'Innovation, des Sciences et du Développement économique, jouera un rôle d'une importance capitale.
Enfin, je signale que le PTP et l'AECG prolongent la durée des brevets pour les produits pharmaceutiques et qu'ils entraîneront des répercussions, notamment sur le plan des coûts, pour l'industrie du médicament générique.
Merci.
Nous allons maintenant entendre Dennis Prouse, qui représente CropLife Canada. Allez-y, monsieur. Vous êtes loin d'être inconnu pour notre comité. Nous sommes heureux de vous revoir.
Merci, monsieur le président.
Je remercie le Comité de me recevoir aujourd'hui. Je sais que je suis un peu un cas particulier par rapport à votre thème, car je représente le secteur de l'agriculture, ce qui rejoint quelque peu la question de la biotechnologie, mais je vous suis reconnaissant d'avoir eu la générosité de m'inviter ici aujourd'hui.
CropLife Canada est l’association commerciale qui représente les fabricants, les concepteurs et les distributeurs d’innovation phytologique, y compris dans le domaine des produits antiparasitaires et de la biotechnologie végétale, utilisés en agriculture, en milieu urbain et dans le secteur de la santé publique. Nous nous engageons à protéger la santé humaine et l’environnement et nous croyons qu'il faut offrir aux Canadiens un approvisionnement abondant en aliments salubres. Nous sommes convaincus de l’importance de stimuler l’innovation par la recherche continue.
CropLife Canada est membre de CropLife International, une fédération internationale qui représente l’industrie des sciences végétales et un réseau d’associations régionales et nationales dans 91 pays. Notre mission consiste à permettre à l’industrie des sciences végétales de faire profiter les agriculteurs et le public des avantages de ses technologies. Ces avantages se manifestent sous diverses formes, y compris par l’augmentation des exportations de produits agricoles, la création d’emplois, le renforcement de l’économie rurale et l’accroissement des recettes fiscales pour les gouvernements.
Le Canada est un pays commerçant, ce qui est particulièrement vrai dans le domaine de l'agriculture. En 2015, le Canada a enregistré un excédent de près de 12 milliards de dollars dans le commerce agroalimentaire. Voilà qui est très positif non seulement pour l'économie canadienne, évidemment, mais aussi pour le Canada quant au rôle de premier plan qu'il peut jouer afin de nourrir une population mondiale croissante.
Cet excédent est attribuable à deux grands piliers en matière de politiques. Premièrement, il repose sur un système de réglementation fondé sur des données scientifiques, qui permet aux agriculteurs de rester modernes et concurrentiels. Il s'ensuit un cadre de réglementation stable et prévisible, qui mise sur des données scientifiques fiables plutôt que sur des politiques, du moins au niveau fédéral, et c'est une façon de veiller à ce que nos agriculteurs aient accès aux outils novateurs de l'agriculture moderne dont ils ont besoin pour être viables et productifs.
Le second pilier de la réussite du secteur agricole canadien réside dans les accords commerciaux internationaux qui garantissent l'accès aux marchés pour les produits canadiens. CropLife Canada et les entreprises qui en font partie appuient vigoureusement l'AECG, soit l'accord avec l'Union européenne, et le Partenariat transpacifique, dont nous discutons aujourd'hui. Ces deux initiatives promettent d'ouvrir des marchés solides, prospères et en plein essor pour les produits agricoles canadiens.
Les pays membres du PTP représentent plus de 65 % des exportations de produits agroalimentaires du Canada. Il est primordial de garantir l'accès à ces marchés, puisque l'Asie représentera les deux tiers de la classe moyenne mondiale d'ici 2030 et la moitié du PIB mondial d'ici 2050. Autrement dit, la compétitivité future du Canada dépend d'accords comme le PTP.
L'élimination des droits de douane est évidemment un résultat très recherché. Un point que je tiens toutefois à signaler au Comité aujourd'hui est celui des barrières non tarifaires au commerce. Il s'agit d'un sujet qui inquiète profondément nos membres et leurs clients, les agriculteurs canadiens. De nombreuses exportations agricoles font face à un nombre déconcertant de barrières non tarifaires. Songeons notamment aux règles commerciales sur les produits biotechnologiques, sanitaires et phytosanitaires. Entrent dans la première catégorie les règles sur la présence de faibles quantités de cultures issues de la biotechnologie et les expéditions de produits non liés à la biotechnologie et, dans la troisième catégorie, les règles sur les limites maximales de résidus de pesticides présents sur les fruits et légumes et sur tous les produits exportés.
Dans les deux cas, il s'agit de règles arbitraires et non scientifiques, qui ont été imposées par d'autres pays et qui servent de substituts aux droits de douane pour empêcher les importations. Comme d'autres témoins l'ont indiqué au Comité, l'élimination des droits de douane partout dans le monde s'accompagne souvent, sans tarder, d'une augmentation des barrières non tarifaires au commerce. De plus, dans certains cas, ces barrières ne sont pas délibérées. De nombreux pays n'ont pas de mécanisme défini pour établir une limite maximale de résidus à l’importation ou encore, leur processus scientifique ou opérationnel n'est pas harmonisé avec celui du Canada.
D'où la nécessité que tout accord commercial assure une transparence et un mécanisme rigoureux de règlement des différends, le tout fondé sur des données scientifiques fiables et évaluées par les pairs. Heureusement, le PTP permet d'obtenir quelques gains évidents au chapitre de la réglementation fondée sur des données scientifiques, parallèlement aux réductions tarifaires. En effet, l'accord prévoit un processus décisionnel transparent, ainsi qu'un mécanisme de règlement des différends, assorti d'une réglementation fondée sur des données scientifiques, cet aspect étant un élément essentiel. Le PTP traitera aussi d'une question bien précise, à savoir la présence en faibles concentrations de certaines matières dans les cargaisons. C'est pourquoi les dispositions du PTP concernant la réglementation fondée sur des données scientifiques sont nettement supérieures à celles de l'AECG.
Si nous allons de l'avant avec le PTP, il incombera au Canada et à tous les autres pays dotés d'un système de réglementation fondée sur des données scientifiques de faire preuve de vigilance en la matière et de demander de plus amples précisions au cours des négociations.
Comme vous pouvez le voir, monsieur le président, nos membres sont d'ardents libre-échangistes. Nous savons que le commerce et l'innovation sont les deux principaux piliers de la croissance et de la prospérité au Canada et que le PTP vient appuyer ces deux piliers. Le partenariat Cultiver le Canada, qui représente les principaux groupes de cultivateurs de tout le Canada et dont nous sommes fiers de faire partie, considère la croissance des exportations comme le gage de la prospérité pour les agriculteurs canadiens. Voilà pourquoi le PTP jouit de l'appui sans réserve des principaux groupes de producteurs au Canada.
D'un bout à l'autre du Canada, 9 exploitations agricoles sur 10 sont tributaires des exportations, ce qui représente 210 000 exploitations agricoles et la majorité des fermes de chaque province. Le secteur de la transformation alimentaire emploie, quant à lui, 290 000 Canadiens.
Pour conclure, monsieur le président, nous estimons que le PTP marque une énorme avancée et qu'il redonne confiance en l'avenir de l'agriculture canadienne. Nous exhortons donc le gouvernement du Canada à ratifier le PTP et à faire preuve de leadership en encourageant d'autres pays à emboîter le pas.
Je vous remercie.
Merci, monsieur.
Passons maintenant au Réseau juridique canadien VIH/sida. Nous accueillons M. Richard Elliott. Vous avez la parole, monsieur.
Merci, monsieur le président.
Je remercie le Comité de m'avoir invité à témoigner.
Je suis à la tête d'une organisation qui fait valoir les droits fondamentaux des personnes vivant avec le VIH et des communautés particulièrement touchées par le VIH, au Canada et dans le monde.
Nous faisons également partie d'une plus grande coalition d'organisations qui ont à coeur l'accès aux médicaments. Dans notre mémoire, dont une copie devrait vous avoir été distribuée, vous trouverez le nom de plusieurs organisations qui vous ont déjà fait part de leurs inquiétudes à ce sujet.
Enfin, sachez que je suis membre du groupe consultatif d'experts au sein du Groupe de haut niveau sur l'accès aux médicaments du secrétaire général des Nations unies, dont M. Labonté a parlé tout à l'heure, mais il va de soi que je ne témoigne pas aujourd'hui au nom de ce groupe.
Nous avons un certain nombre de réserves sérieuses à l'égard du Partenariat transpacifique, mais j'aimerais m'attarder plus précisément sur deux aspects de l'accord: le chapitre sur la propriété intellectuelle et le chapitre sur les investissements, les deux ayant déjà été mentionnés. Nous avons également des réserves quant aux répercussions de cet accord à l'échelle nationale et internationale, qu'on surnomme à juste titre « ADPIC plus » puisque les mesures prévues dépassent les dispositions de l'accord de l'Organisation mondiale du commerce sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce.
Parlons d'abord des répercussions à l'échelle nationale. Les dispositions prévues dans les chapitres sur la propriété intellectuelle et les investissements auront pour effet de figer les règles en matière de propriété intellectuelle déjà en vigueur au Canada et, dans certains cas, de les rendre plus restrictives, ce qui retardera davantage l'accès à des médicaments à moindre coût. Fait très important, comme l'ont indiqué la représentante de l'AIIC et M. Labonté, ces dispositions paralyseront l'innovation en matière de réglementation dans le domaine de la santé publique; en particulier, elles empêcheront la possibilité d'élargir la portée de notre régime public d'assurance-maladie pour y inclure un programme national d'assurance-médicaments, assorti d'une certaine forme de réglementation des prix. C'est là une modification qui est recommandée depuis des décennies au Canada par de nombreuses parties, commissions et études et, pourtant, rien n'a encore bougé dans ce dossier.
En fait, le PTP rendra cela plus difficile, et plus nous tarderons à instaurer un programme national d'assurance-médicaments et à profiter de notre capacité de réglementer dans l'intérêt public, plus l'accès aux médicaments continuera d'être inéquitable au Canada.
Si les conséquences pour le Canada et les Canadiens sont importantes, elles le sont encore plus pour les pays en développement qui n'ont pas la chance d'avoir les mêmes ressources qu'un pays à revenu élevé comme le Canada. Dans le cas des pays de l'hémisphère Sud, les États membres du PTP qui sont des pays à faible ou à moyen revenu devront adopter de nouvelles mesures restrictives liées à la propriété intellectuelle qui nuiront à l'accès à des médicaments abordables.
Le PTP ayant été présenté comme un modèle pour les accords commerciaux futurs, on ne peut faire abstraction de ce point. Ce n'est pas simplement une poignée de pays à faible et à moyen revenu qui seront les plus directement touchés par le PTP, car d'autres pays qui se trouvent dans une situation similaire subiront également des pressions à l'avenir dans le cadre d'autres négociations commerciales. Tout le monde sait que telle est la visée du PTP.
Je tiens à rappeler, en guise de contexte, qu'il y a 15 ans, tous les États membres de l'OMC, dont le Canada, ont adopté une déclaration visant à préserver la latitude des pays de concevoir leurs politiques d'intérêt public afin d'améliorer l'accès à des médicaments abordables pour tous, et cela comprend un certain nombre de mesures qui, dans certains cas, seront plus difficiles à appliquer aux termes du PTP.
C'est tout de même étrange: d'une part, le Canada et les autres États membres de l'OMC ont adopté une déclaration, dans le contexte de la crise mondiale du sida et compte tenu du fait que des millions de personnes meurent du sida et d'autres maladies dans les pays en développement, déclaration dans laquelle nous disons que nous allons préserver l'espace politique et la marge de manoeuvre des pays, et, d'autre part, nous négocions en parallèle d'autres accords commerciaux qui réduiront cet espace politique et cette capacité de réglementer dans l'intérêt public. Ce n'est pas agir de bonne foi, me semble-t-il.
Je signale également que le Canada est, bien entendu, un important bailleur de fonds d'initiatives mondiales en matière de santé, notamment par l'entremise du Fonds mondial de la lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. D'ailleurs, plus tard cette année, le Canada sera l'hôte de la prochaine conférence de reconstitution du Fonds mondial. Réfléchissons un instant à l'argent des contribuables canadiens qui est consacré à un mécanisme de financement de la santé d'une grande importance, qui a permis de sauver des millions de vies partout dans le monde. Or, cette capacité sera entravée lorsque les prix des médicaments continueront d'être inabordables. Si nous allons accorder des fonds pour essayer de sauver des vies en rendant les médicaments abordables, alors évitons de freiner en même temps la capacité des pays de contrôler les prix de ces médicaments. En agissant de la sorte, nous limitons l'efficacité de notre aide à l'étranger.
Parlons maintenant plus précisément des deux grandes préoccupations touchant l'accès aux médicaments dans le cadre du PTP. La première concerne les dispositions sur la propriété intellectuelle, dans le chapitre pertinent du PTP, et en particulier...
Monsieur, essayez de tirer des conclusions. Je vais vous donner encore 30 secondes pour que vous puissiez le faire.
Allez-y, monsieur.
... la prolongation de la durée des brevets au-delà de ce qui existe déjà, qui s'appliquera tant au Canada qu'aux autres États membres du PTP; le blocage de notre réglementation établissant des liens entre l'approbation de la commercialisation des médicaments génériques et les allégations de contrefaçon de brevets par des fabricants de médicaments d'origine; et la disposition que la Cour suprême du Canada a déjà jugé être draconienne serait bloquée par le PTP et bloquerait les dispositions relatives aux données et à l'exclusivité du marché, etc. Ces mesures feront en sorte qu'il soit plus difficile pour les Canadiens et les gens des pays en développement de se procurer des médicaments.
Vous avez déjà entendu parler du gel réglementaire que créera le chapitre sur l'investissement, dont les dispositions s'appliquent maintenant, pour la première fois, explicitement aux dispositions relatives à la propriété intellectuelle. Le Canada devrait tenir bien compte du fait qu'il fait l'objet de la première disposition relative au règlement des différends entre un investisseur et un État par une société pharmaceutique au titre de l'ALENA. Nous prenons maintenant ces dispositions et les mondialisons encore plus par le truchement du PTP.
Au lieu de suivre cette voie, nous pourrions prendre un certain nombre d'approches positives. Je vais terminer en vous donnant deux ou trois suggestions.
Le Groupe de haut niveau sur l'accès aux médicaments que le Secrétaire général de l'ONU a créé examine des façons de trouver de meilleures approches stratégiques tant pour stimuler l'innovation que pour améliorer l'accès, plutôt que l'innovation asymétrique et l'accès limité que nous avons maintenant. Nous pourrions, à la place, participer activement à la négociation d'un traité mondial sur la recherche et le développement dans le domaine de la santé qui répondrait aux besoins du monde en matière de santé publique, et nous pourrions négocier des traités qui garantissent un espace politique aux pays pour protéger la santé publique, comme nous avons dit espérer le faire il y a 15 ans.
Merci.
Merci.
Avant d'entamer le dialogue avec les députés, j'aimerais souligner la présence de M. Ruckert. Vous êtes un collègue de l'Université d'Ottawa qui accompagnez M. Labonté. C'est bon de vous voir ici. Vous êtes aussi disposé à répondre à toutes nos questions.
C'est aussi bon de voir mon vieil ami, M. Shipley.
Il m'a tout appris. C'est mon ancien président, alors toutes mes mauvaises habitudes viennent de lui.
Des voix: Oh, oh!
Pas toutes, mais certaines.
C'est bon de vous voir ici, monsieur Shipley.
Compte tenu du nombre de témoins que nous accueillons, j'aimerais simplement rappeler aux députés d'essayer de poser des questions brèves, car vous voudrez peut-être que différents intervenants y répondent. Il est très possible que nous puissions avoir une seconde série de toute façon.
Sans plus attendre, nous allons débuter.
Les conservateurs commenceront et disposeront de cinq minutes.
Monsieur Ritz, la parole est à vous.
Merci, monsieur le président, et merci, mesdames et messieurs, de vos présentations d'aujourd'hui.
Je suis plus confus que jamais. J'écoute les sociétés pharmaceutiques dire qu'elles ne se préoccupent pas du PTP, alors que bien d'autres personnes affirment qu'elles devraient. J'en déduis que l'un de vous se fait berner.
Je veux commencer par M. Labonté. Si je me souviens bien, dans vos remarques liminaires, vous avez prédit une hausse de 2 à 3 milliards de dollars du coût des médicaments d'ici à 2030. Ai-je bien compris?
Vous avez en partie raison. Les dispositions de l'AECG prévoyaient que cette mesure soit pleinement en vigueur d'ici à 2023. Ce ne sont pas mes chiffres à moi, mais bien ceux que M. Joel Lexchin et ses collègues ont produits lorsqu'ils ont fait une analyse des coûts futurs au titre des dispositions de l'AECG.
Bien sûr. D'ici sept ou huit ans, nous pouvons nous attendre à une augmentation de 2 à 3 milliards de dollars. Quelle a été l'augmentation au cours des sept ou huit dernières années? Je pense que si vous faisiez cette analyse, vous constateriez que le coût des médicaments a augmenté d'environ 2 à 3 milliards de dollars. Il augmente naturellement d'année en année. Il y a cette petite chose appelée inflation, sans compter les coûts de production et autres.
Dans une de nos présentations, nous avions des données que je n'ai pas devant moi, qui montraient que, sur une certaine période, le prix des médicaments brevetés ou d'origine avait augmenté, tandis que celui des médicaments génériques avait baissé. Ce fut une constante au Canada au cours des dernières années.
Cela changera si l'AECG est ratifié, et le PTP confirmera ces dispositions et en ajoutera probablement une ou deux de plus, ce qui pourrait compliquer les choses.
Oui. Les commentaires qui ont été formulés plus tôt selon lesquels le PTP ne change pas beaucoup les engagements du Canada sont généralement exacts, car les engagements relatifs aux brevets sont assez conformes à ceux que le Canada a déjà pris au titre de l'AECG.
D'accord. Merci.
Ma prochaine question s'adresse à tous les témoins. Comme la santé est de compétence provinciale, les provinces reçoivent des transferts du gouvernement fédéral et les administrent elles-mêmes. Cependant, elles sont toutes favorables à l'AECG et au PTP, et elles mettent les choses en balance. Quel conseil leur donneriez-vous concernant le PTP?
Oui, Jim.
Merci. J'ai deux commentaires à formuler.
En fait, les dépenses de médicaments au Canada n'ont pas augmenté au cours des dernières années. C'est principalement attribuable à ce qu'on appelait la chute des brevets. Un certain nombre d'importants médicaments d'origine ont perdu des brevets il y a quelques années, et quand les médicaments génériques sont arrivés sur le marché à 18 ou 25 %, cela a réduit les coûts.
L'autre point concernant l'AECG est que je pense que le gouvernement a reconnu que les coûts pour les provinces augmenteraient et qu'il a accepté de les couvrir par le truchement d'arrangements de transfert supplémentaires.
Oui. Je pense que c'est important que... Encore une fois, pour en revenir à mon commentaire concernant la mise en oeuvre, ces coûts ne se manifesteront que si l'accord est bien mis en oeuvre. C'est donc dire que la prolongation de la durée des brevets ne devrait pas s'appliquer aux médicaments déjà sur le marché; seulement aux nouveaux médicaments qui sont commercialisés après l'entrée en vigueur de l'accord. Je pense que c'est primordial.
Oui, absolument.
Je m'adresse maintenant à votre collègue, Mme Cox. Jim a mentionné que vous aviez assisté à un certain nombre de groupes de négociations et autres, mais qui se tenaient tous en secret. Vous êtes donc restée enfermée dans un placard quelque part sans pouvoir participer?
Non, je n'étais pas du tout assise dans un placard. Pendant de nombreuses rondes de négociations, nous avons cherché à rencontrer divers négociateurs de différents pays ainsi, bien sûr, que les négociateurs canadiens, y compris le ministre Fast lui-même. Nous avons réussi à rencontrer les représentants de divers pays et à échanger nos points de vue concernant le PTP, le libellé potentiel, et les résultats positifs en ce qui concerne...
En fait, il y a eu un certain nombre de personnes qui ont profité des clauses de non-divulgation et qui, comme vous, ont été très actives dans le cadre des négociations. Elles se sont mises à jour concernant la situation et ont formulé des conseils.
Nous allons maintenant donner la parole aux députés libéraux, qui auront cinq minutes chacun.
Allez-y, monsieur Dhaliwal.
Merci, monsieur le président.
Premièrement, je tiens à remercier chacun d'entre vous de nous faire connaître des points de vue très diversifiés.
Madame Pullen, vous avez fait remarquer que la ratification du PTP ferait en sorte qu'il soit moins possible de mettre en oeuvre un programme national des médicaments. Pourriez-vous expliquer pourquoi?
Comme vous l'avez entendu autour de ces tables, la majorité des Canadiens sont favorables à un régime d'assurance-médicaments ou à un programme de médicaments sur ordonnance.
Nous avons aussi participé activement à d'autres comités qui étudiaient la possibilité de lancer un régime national d'assurance-médicaments. Notre analyse du PTP, ainsi que les analyses des autres, nous ont permis de conclure que l'incidence du PTP sur la hausse des prix des médicaments, ainsi que le gel réglementaire susceptible d'être imposé par le PTP qui pourrait prévenir la négociation, au Canada, de choses comme un formulaire national des médicaments, sont des facteurs qui pourraient nous empêcher d'instaurer un régime national d'assurance-médicaments.
Merci.
Pour tous les témoins qui veulent répondre à la prochaine question, nous avons accueilli au Comité M. Michael Geist, qui a vertement critiqué le PTP. Il a dit que les prix des médicaments peuvent monter et que le financement destiné à la recherche et au développement diminuera. Il a ajouté que le fait d'accroître cette façon de faire dans le PTP ne fera qu'amplifier ces problèmes. Êtes-vous d'accord avec lui? Est-ce que l'un d'entre vous veut répondre?
Oui, s'il vous plaît, monsieur Fleming.
Oui. Merci d'avoir posé la question.
Premièrement, je pense qu'il est important de reconnaître que tout changement à la propriété intellectuelle est intégré à l'AECG, l'accord entre le Canada et l'Europe. Le PTP reflète l'AECG. Si l'AECG est ratifié, il réunira les conditions de l'accord sur le Partenariat transpacifique.
Je mentionne l'AECG, car il est important d'examiner les systèmes de santé européens et de les comparer aux systèmes canadiens. À l'heure actuelle, l'Europe dispose d'un régime de propriété intellectuelle plus robuste que le Canada, même si elle ne connaît pas une hausse appréciable du prix des médicaments dans ce contexte. En fait, leurs coûts globaux dans le domaine de la santé et le pourcentage du coût de leurs médicaments dans le cadre de ces coûts globaux sont moins élevés que les nôtres au Canada en ce moment. Il est faux de penser que les modifications à la propriété intellectuelle occasionneront une hausse du prix des médicaments.
Notre entreprise est en mesure de faire fond sur les modifications imminentes à l'AECG pour attirer des investissements dans la recherche et le développement au Canada. Je préside le comité des investissements étrangers de mon entreprise et je sais que nous avons été en mesure d'en tirer parti à notre siège social pour attirer, comme je l'ai mentionné plus tôt, plus d'un milliard de dollars d'investissements dans les sciences de la vie au cours des deux dernières années. Cela permet de garder les emplois canadiens au Canada.
Brièvement, j'aimerais faire la distinction entre les prix et les coûts des médicaments. Les prix des médicaments n'augmenteront pas nécessairement, contrairement aux coûts. Lorsque vous devez acheter un produit à 100 % du coût d'un produit d'origine au lieu de payer 18 ou 25 ¢ pour un médicament générique, pendant deux années supplémentaires, cela hausse les coûts. Je crois que nous devrions expliquer clairement la terminologie. Il est évident que les coûts augmentent. Les activités de recherche et de développement menées par les entreprises de recherche sont à leur plus bas niveau au Canada malgré de nombreuses hausses de la propriété intellectuelle au cours des deux dernières décennies.
La troisième chose que je suis ravi d'entendre est que l'AECG et le PTP ont les mêmes dispositions que celles qu'a indiquées Médicaments novateurs Canada. Cependant, nous avons vu que des pressions étaient exercées sur d'autres pays qui essaient de faire ce que le Canada tente de faire. À titre d'exemple, la Nouvelle-Zélande a dit qu'elle veut prolonger de deux ans la durée des brevets. À l'échelle internationale, l'industrie des médicaments d'origine dit que ce n'est pas suffisant dans le contexte du PTP et qu'elle s'attendait à beaucoup mieux.
Je pense que nous devrions tous nous rappeler qu'au Canada, la prolongation de deux ans de la durée des brevets prévue dans l'AECG respecte aussi nos engagements au titre du PTP.
Oui, j'ai deux points brefs à soulever.
Il est important de se rappeler qu'un des engagements pris par l'industrie des médicaments d'origine au moment de la signature de l'ALENA avec des dispositions plus strictes en matière de propriété intellectuelle et moins d'espace politique pour le Canada a été qu'elle s'engagerait à consacrer chaque année 10 % des recettes de vente à la recherche et au développement.
Fait intéressant, selon les chiffres rapportés par le Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés pour la première période et jusqu'à ce que l'examen de l'ALENA prévu par la loi soit terminé, ces engagements ont été respectés. Une fois que l'examen a été mené à bien, et chaque année depuis, ils ont systématiquement baissé. Alors la notion selon laquelle le fait d'adopter des dispositions de plus en plus strictes en matière de propriété intellectuelle se traduira nécessairement par une hausse des activités de recherche et de développement n'est certainement pas ressortie de l'expérience du Canada dans le contexte de l'ALENA.
Le second point que j'aimerais soulever est que si, comme nous l'avons entendu, les dispositions relatives à la propriété intellectuelle dans le PTP ne sont pas particulièrement novatrices ou différentes, pourquoi ont-elles été négociées avec autant de vigueur? Si tel est le cas, on ne devrait pas s'opposer aussi vivement à ce qu'elles soient retranchées si elles n'ajoutent pas vraiment grand chose. Selon moi, c'est parce que l'industrie des médicaments d'origine estime qu'elles lui donnent un avantage considérable. Voilà pourquoi elles sont là.
Merci, monsieur Elliot.
Nous allons maintenant céder la parole aux députés du NPD.
Madame Ramsey, la parole est à vous.
Merci beaucoup.
Vos présentations ont été tout simplement fantastiques et, contrairement à mon collègue, je ne dirai pas que vous essayez de nous berner. Je pense que vous avez différents points de vue, et nous sommes au courant des préoccupations que suscitent les coûts des médicaments partout au pays.
J'aimerais adresser ma première question à Mme Pullen.
Vous représentez les infirmiers, des professionnels de la santé de première ligne. Je sais que dans ma collectivité, les gens n'ont pas les moyens de payer leurs médicaments actuels. Les gens ne prennent pas toutes les doses prescrites. Qu'ils aient ou non une couverture de soins de santé complémentaire, ils n'arrivent pas à payer leurs médicaments, alors quand les coûts augmentent...
Je remercie M. Keon d'avoir souligné qu'il s'agit d'une hausse des coûts et non d'une hausse du prix des médicaments individuels. Il s'agit du coût sur la période.
Si nous parlons des coûts et du fait que les patients n'ont pas les moyens de payer leurs médicaments, pouvez-vous nous parler des résultats sur la santé des Canadiens qui sont incapables d'acheter leurs médicaments?
Merci d'avoir posé cette question. C'est un élément important de la présente discussion.
Mon point fort n'est pas l'analyse économique. Nous avons été en mesure de vous faire part des analyses impartiales et non liées aux entreprises réalisées par d'autres groupes. Nous avons foi en ces analyses. Lorsque nous citons les coûts croissants ou les prix de nos médicaments, nous nous fondons sur ces analyses et nous percevons que les conséquences du PTP — et peut-être d'autres accords — sont graves.
Chaque jour, sur la ligne de front, les infirmiers voient des personnes qui ne font pas exécuter leurs ordonnances ou qui ne prennent pas toutes les doses prescrites. On a parlé de plus d'un Canadien sur cinq ou d'aussi peu qu'un sur 10, mais il s'agit quand même d'un nombre important. Cela se traduit par des coûts plus élevés pour gérer les maladies chroniques au Canada, un nombre accru d'admissions dans les hôpitaux, un prolongement des séjours en milieu hospitalier et, essentiellement, des résultats sur la santé moins positifs pour nombre de Canadiens d'un océan à l'autre.
Je suis sûre que vous connaissez bien les difficultés auxquelles font face les collectivités qui vivent dans des conditions qui les rendent vulnérables, comme les communautés des Premières Nations et les populations à faible revenu. Dans ces communautés, les conséquences seraient encore plus graves. Il n'est pas rare pour les infirmiers de voir les mêmes patients être hospitalisés à répétition pour les mêmes ennuis de santé mineurs qui pourraient être facilement gérés grâce aux doses adéquates de simples médicaments génériques sur ordonnance.
Merci de ces explications.
Ma deuxième question est pour M. Elliott.
Vous avez parlé d'une marge de manoeuvre sur le plan politique. En tant que parlementaires, c'est extrêmement important pour nous en vue d'améliorer la santé publique et de promouvoir la sécurité publique. J'aimerais beaucoup voir un jour la mise en place d'un programme d'assurance-médicaments. L'espace public sera limité dans le cadre de ces accords commerciaux, notamment dans le cadre du PTP.
À la fin de votre exposé, vous avez commencé à parler de la façon dont cela nous limitera à certains égards. Vous avez entre autres parlé de règlements de liaison. Pouvez-vous en dire plus sur certaines de ces choses dans lesquelles nous serons limités?
Certainement. Merci de poser la question. Je pense qu'il y a ici d'autres membres de l'industrie qui peuvent puiser dans leur expérience pour parler de la façon dont se fait ce genre de choses dans la pratique, de ces règlements de liaison.
À l'heure actuelle, le règlement concernant l'avis de conformité qui a été adopté en vertu de la Loi sur les aliments et drogues autorise une société pharmaceutique ayant mis au point un médicament à déposer ce qui est appelé un avis d'allégation, qui indique qu'un fabricant de médicaments génériques cherche à obtenir une approbation de mise en marché de la version équivalente générique d'un médicament princeps, ce qui contreviendrait au brevet. L'effet automatique du dépôt de cet avis d'allégation est l'envoi d'une injonction interdisant le ministre fédéral de la Santé d'approuver la mise en marché d'un produit générique pour une période maximale de 24 mois. Donc, en envoyant tout simplement un avis d'allégation, un fabricant de médicaments princeps peut obtenir jusqu'à deux années supplémentaires de monopole.
Les allégations peuvent être rejetées au bout du compte, mais le fabricant aura évidemment gagné un montant supplémentaire considérable, et il a donc intérêt à déjouer le système. C'est le système utilisé au Canada et aux États-Unis, mais, à ma connaissance, aucun autre pays industrialisé ne procède ainsi. C'est le système que la Cour suprême du Canada a qualifié de draconien; c'est le choix de terme de la Cour suprême, pas le mien.
C'est un bon exemple de la façon dont l'organisme de réglementation en matière de santé, Santé Canada, qui est censé examiner la qualité, la salubrité et l'efficacité des médicaments, devient une police des brevets. C'est ainsi que nous essayons de donner suite aux allégations liées à la validité des brevets, qui finissent parfois par se révéler excessives. Notre législation actuelle comporte déjà un exemple de pratique inhibitrice. C'est le genre de choses qu'un certain nombre de pays devront maintenant adopter dans le cadre du PTP, ce qui n'est pas particulièrement utile. Le PTP contribuerait à maintenir ce genre de mécanisme.
Merci. Votre temps est écoulé, madame Ramsey.
Nous allons passer aux libéraux. M. Peterson a la parole, pour cinq minutes.
Allez-y, monsieur.
Merci à tous de vos exposés très instructifs, et merci d'avoir pris le temps de vous joindre à nous aujourd'hui.
J'ai deux ou trois questions. Je vais commencer par les représentants de Médicaments novateurs Canada.
À votre avis, quelle serait l'incidence sur la capacité du secteur pharmaceutique canadien de soutenir la concurrence sur ce marché si le PTP était ratifié sans la participation du Canada?
Eh bien, c'est une question intéressante. Merci de la poser.
Pour ce qui est de la capacité de livrer concurrence à l'échelle internationale, je pense que vous seriez liés non seulement aux dispositions sur la propriété intellectuelle, mais aussi au symbole que cela pourrait représenter à l'échelle internationale. À ce stade-ci, à moins que le PTP ne soit pas ratifié pour des raisons qui échappent au Canada, j'ai de la difficulté à m'imaginer l'accord sans sa participation. Dans l'ensemble, je pense qu'il serait difficile d'établir que ce serait dans l'intérêt national du Canada.
À propos des dispositions sur la propriété intellectuelle, comme nous en avons déjà discuté, il n'y a pas vraiment beaucoup de différences. À vrai dire, elles sont un peu plus laxistes et moins contraignantes que celles qui ont déjà été négociées avec l'Union européenne dans le contexte de l'AECG. C'est une sorte de question à variables multiples. Si l'AECG était ratifié, mais que le PTP ne l'était pas, ou le contraire... Cela dit, c'est vraiment le traité négocié avec l'Union européenne, pas par le PTP, qui dicte le renforcement des dispositions.
Le PTP a un ou deux aspects intéressants qui ne figurent pas dans l'AECG. Il comporte, par exemple, une disposition portant sur les retards dans les bureaux de brevet, à savoir des retards déraisonnables dans le traitement d'une demande de brevet par l'Office de la propriété intellectuelle du Canada. Le seuil normal est établi à cinq ans, alors qu'il faut actuellement environ 19 mois. C'est donc davantage une question de principe qu'une question pratique.
Dans l'ensemble, les changements dans le domaine de la propriété intellectuelle, qui devront faire l'objet, comme l'a mentionné M. Keon, de négociations très compliquées — et tout est vraiment dans les détails — seront dictés au Canada par l'AECG et non pas par le PTP.
Merci.
J'ai une question pour M. Keon.
Je vous remercie de ces explications, mais vous avez mis en évidence la différence entre le coût et le prix. Je veux juste m'assurer de bien comprendre en quoi consiste cette différence. Le coût est le coût de production du produit, tandis que le prix est le montant payé par le consommateur, n'est-ce pas? Est-ce la distinction que vous tentez d'établir?
Je parlais du coût payé, par exemple, par les gouvernements provinciaux. À titre d'exemple, le coût du Lipitor, un produit de marque, est d'environ 2,20 $ par comprimé, tandis que son équivalent générique coûte environ 38 ¢. Vous pouvez maintenant en obtenir cinq fois plus qu'avant pour le même prix. Les coûts ont donc diminué. Le prix du Lipitor est peut-être encore de 2,20 $, mais les coûts assumés par le régime diminuent grâce aux médicaments génériques ou augmentent lorsque ces médicaments ne sont pas offerts.
Merci de ces précisions. Je ne comprenais pas très bien la différence, et je vous en suis donc reconnaissant.
Vous avez dit que votre organisation et ses membres investissent massivement dans la recherche et le développement. Savez-vous quel pourcentage de leurs ventes ces investissements représentent?
Oui. Cela fait l'objet d'un rapport.
Contrairement aux sociétés qui fabriquent des médicaments brevetés, nos entreprises ne font pas rapport au CEPMB, le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, mais cela représente environ de 12 à 14 % de leurs recettes. Ce chiffre, qui est plus élevé que celui des sociétés détentrices de brevets, s'explique par le fait qu'une grande partie du développement se fait au Canada. Il est attribuable à de grands fabricants, comme Apotex et Pharmascience, qui sont des sociétés établies au Canada. Apotex a été le principal investisseur dans la recherche et le développement liés aux produits pharmaceutiques pendant de nombreuses années.
Cela m'amène à ma prochaine question.
À votre avis, quelle sera l'incidence de notre participation au PTP sur l'investissement dans la recherche et le développement au Canada?
Je pense que je vais revenir encore une fois aux observations formulées par d'autres personnes. C'est la combinaison de l'AECG et du PTP.
Nous étions très préoccupés par la prolongation des brevets, car les deux années supplémentaires signifieraient que le développement et la fabrication au Canada prendraient du retard, qu'on ne pourrait pas développer de produits le plus rapidement possible. Pour nous, un élément important de la prolongation des brevets est la conclusion d'une entente concernant l'exportation, ce qui veut dire que les entreprises... Même si les médicaments ne pourront pas être vendus au Canada pendant deux années supplémentaires et que leur coût demeurera élevé, on pourrait en fabriquer dans le but de les exporter dans des pays où le brevet a expiré.
C'est pour nous un aspect important de l'AECG et du PTP.
Cela fait pas mal le tour de la question. Merci.
Voilà qui met fin au premier tour. Avant de commencer le deuxième, je vais juste rappeler à tout le monde, si vous n'êtes pas parfaitement bilingues, de mettre vos écouteurs, car les questions et les réponses pourraient aussi bien être dans l'une ou l'autre des deux langues officielles.
Nous allons passer au deuxième tour.
Les libéraux commenceront. Nous allons d'abord entendre Mme Lapointe, pour cinq minutes.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Je souhaite la bienvenue aux témoins qui comparaissent devant nous aujourd'hui. J'ose espérer que vous allez comprendre mes propos puisque je vais m'exprimer en français.
Monsieur Labonté, je voudrais continuer à parler du sujet que mon collègue a abordé un peu plus tôt.
Si le Canada ne ratifie pas le PTP et que le Mexique et les États-Unis le font, qu'arrivera-t-il selon vous en ce qui a trait aux prix des médicaments ici, au Canada?
[Traduction]
Je vais devoir laisser d'autres personnes essayer de répondre.
Les travaux de recherche que j'entreprends ne portent pas principalement sur les activités de l'industrie pharmaceutique. Je vais toutefois faire quelques remarques concernant les questions liées aux droits de propriété intellectuelle et aux produits pharmaceutiques dont on a discuté. Je fais entre autres remarquer que l'accord original sur les ADPIC, d'une durée de 20 ans, a été conçu de manière à tenir compte des retards administratifs. La prolongation des brevets est une sorte de nouvelle disposition qui fait en sorte que l'on va bien au-delà de ce qui avait déjà été considéré comme une période suffisamment longue de protection des brevets.
La façon dont cette prolongation aura une incidence sur nous si le Canada ne ratifie pas l'entente n'est pas ma principale préoccupation. Ce qui me préoccupe surtout, c'est que si le Canada ratifie l'entente, il faudra se pencher davantage sur des questions comme la façon dont nous élargirons la portée de nos programmes publics d'assurance-maladie. Nous avons parlé de la nécessité d'essayer de créer une sorte de programme d'assurance-médicaments. Pour ce qui est de l'assurance-médicaments, ce n'est pas tant ce que prévoit la Loi sur les brevets pharmaceutiques ou le chapitre concerné du PTP qui me préoccupe, mais davantage ce que prévoit le chapitre sur le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États. La création d'un programme public monopolistique pour couvrir le coût des produits pharmaceutiques, ou des soins dentaires, des soins de la vue ou des soins à domicile, nous laisserait vulnérables. En effet, la négociation d'un tel programme avec les différentes provinces pourrait nous rendre vulnérables dans le cadre du règlement d'un différend entre investisseurs et États compte tenu de la façon dont nous écartons la possibilité d'une assurance-maladie privée à participation étrangère dans ce marché.
[Français]
Merci beaucoup.
Je vais maintenant m'adresser à M. Fleming ou à M. Hamill et j'aimerais revenir sur la question que j'ai posée plus tôt.
Si le Canada ne ratifie pas l'entente et que le Mexique et les États-Unis le font, quel sera l'impact sur les prix et les investissements des compagnies en recherche-développement en ce qui a trait aux médicaments?
[Traduction]
Merci beaucoup de poser la question.
Tout d'abord, le Canada mène ses activités dans un milieu où le prix des produits pharmaceutiques est hautement contrôlé. De multiples couches de bureaucratie s'interposent entre une innovation et le moment où le médicament est remis à un patient par l'entremise du payeur. Parmi ces couches se trouve le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, qui établit le prix non excessif des médicaments. Un organisme d'évaluation des technologies de la santé, par exemple le Programme commun d'évaluation des médicaments ici à Ottawa, est ensuite saisi de la demande de brevet et examine le prix et la valeur. De là, c'est ensuite au tour de l'Alliance pancanadienne pharmaceutique, ou de l'alliance pancanadienne d'achat de médicaments, qui négocie un prix remboursable et abordable. Ce sont les payeurs à l'échelle provinciale qui sont les derniers à être saisis du dossier avant qu'une entente soit signée. Avant qu'un de nos médicaments soit offert aux Canadiens, sa valeur et son prix... Il a été prouvé qu'ils sont utiles et efficaces pour les Canadiens et qu'ils sont abordables.
Ensuite, ce que je dirais sur la recherche et le développement... J'aimerais juste faire une mise en garde par rapport aux décisions stratégiques prises en s'appuyant sur le rapport annuel du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés. C'est un outil plutôt rudimentaire qui repose sur la recherche scientifique et le développement expérimental, ce qui était très valable au moment de sa création dans les années 1990. Ce n'est plus le cas aujourd'hui pour mesurer l'ensemble des investissements dans la recherche et le développement. Dans le cas précis de mon entreprise, au cours des deux dernières années, le rapport du CEPMB indique qu'elle a investi 120 millions de dollars au Canada, mais la réalité, c'est qu'il s'agit plutôt de 1 milliard de dollars. Il y a une omission de 880 millions de dollars d'investissements dans les sciences de la vie. Je pense qu'il est très important d'examiner tous les faits avant de prendre des décisions stratégiques liées à l'accès aux médicaments au Canada.
[Français]
Je vous remercie.
Cela pourrait-il faire en sorte que la recherche-développement serait faite dans d'autres pays du PTP qui sont en Asie? Croyez-vous que cela pourrait se produire?
[Traduction]
Je pense que les décisions concernant les investissements dans les sciences de la vie et dans la recherche et le développement sont multifactorielles. Elles ne portent pas seulement sur la propriété intellectuelle; de nombreux autres éléments sont concernés. Le plus grand et plus important élément est peut-être la qualité des travaux scientifiques. Le Canada est un chef de file à cet égard. Une grande partie des investissements étrangers au Canada s'explique par la présence d'excellents scientifiques qui mènent leurs travaux au pays, par des pionniers dont les découvertes changent la vie des gens, contrairement aux critiques qui cherchent les meilleures occasions de critiquer.
Merci, monsieur Fleming.
Il reste seulement 15 secondes, et M. Prouse voulait intervenir. Vous pouvez faire une brève observation avant que nous poursuivions.
Je serai très bref, monsieur le président.
Nos grandes sociétés membres ont une présence à l'échelle mondiale. Elles vous diront que les débats internes sur l'endroit où il faut investir, que ce soit au Canada, aux États-Unis, en Europe ou en Asie du Sud-Est, représentent l'aspect le plus concurrentiel de leurs activités. C'est hautement concurrentiel. Je ne peux pas m'imaginer à quel point leur travail serait difficile si le Canada était exclu du PTP, mais que les États-Unis en faisaient partie. Je pense que c'est là que se retrouveraient les investissements.
Merci, monsieur.
Nous allons maintenant passer aux conservateurs, pour cinq minutes.
Monsieur Van Kesteren, vous avez la parole.
Merci, monsieur le président.
Bonjour à tous. Merci d'être ici.
J'aimerais obtenir certains points de vue. Je vais adresser mes questions, qui seront très courtes, aux représentants des deux organisations pharmaceutiques.
Tout d'abord, reprenez-moi si je me trompe. Essentiellement, les sociétés pharmaceutiques mettent au point de nouveaux médicaments qui soulagent les symptômes d'une maladie ou parfois guérissent des maladies qui affligent l'humanité. C'est le principal objectif de votre recherche. Les fabricants de médicaments génériques sont essentiellement... Une fois le brevet expiré, on peut déterminer quels sont les éléments constitutifs du médicament et en créer un qui est semblable — cela ne peut pas être la même chose — pour ensuite le vendre. Est-ce que je me trompe? Est-ce essentiellement ce que font les deux industries? Est-ce exact, monsieur Keon?
Les fabricants de médicaments génériques mettent au point des produits concurrentiels que Santé Canada déclare être bioéquivalents, c'est-à-dire qu'ils correspondent aux produits de marque. Nous donnons une sorte de marge de manoeuvre, car on peut maintenant acheter des médicaments à un prix beaucoup moins élevé et dépenser l'argent ailleurs dans le système de santé.
Vous avez essentiellement le droit de copier — pas de copier, mais de prendre — leurs travaux de recherche...
Oui.
Je souffre de migraine. Il y a quelques années, peu de choses me procuraient un soulagement. J'étais reconnaissant lorsque Tylenol et des sociétés semblables ont commencé à vendre des médicaments contre la migraine. Je suis également reconnaissant de pouvoir acheter aujourd'hui des équivalents génériques à la pharmacie.
Ce que nous observons dans l'industrie pharmaceutique, c'est essentiellement que de nouveaux médicaments sont créés à mesure que nous progressons. Les sociétés récupéreront leurs investissements, mais, après un certain temps, on peut pénétrer le marché et offrir un autre produit. Je tenais seulement à ce que ce soit clair.
Vous arrive-t-il d'être poursuivi, monsieur Keon? Je sais que les sociétés pharmaceutiques ont connu des cas où des médicaments ne fonctionnaient pas très bien. Est-ce une grande préoccupation pour ces sociétés?
Oui. Quand on regarde la télévision aux États-Unis, on propose toujours aux gens de s'embarquer dans un recours collectif à cause d'un médicament qui a posé des problèmes.
Habituellement, les produits génériques arrivent sur le marché 10 ou 15 ans, et parfois plus longtemps, après le médicament princeps. S'il y a des problèmes avec le médicament, ils ont généralement déjà été signalés.
Je ne suis pas au courant d'un cas où quelqu'un a intenté une poursuite parce qu'il a pris un médicament générique plutôt qu'un médicament de marque, ou quelque chose dans le genre.
Et, pour ce qui est des sociétés pharmaceutiques, avez-vous déjà été poursuivis parce qu'un médicament n'a pas fonctionné aussi bien que ce que les gens espéraient?
Cela fait certainement partie de ma vie. Cela fait partie du dialogue entre l'industrie des médicaments génériques et l'industrie innovatrice. En général, nous parvenons à des résolutions au fil du temps.
Il est évident que l'industrie des médicaments génériques apporte une contribution inestimable au système de santé. Elle aide à rendre les produits abordables à long terme. De notre côté, c'est surtout sur l'innovation que nous mettons l'accent. À titre d'exemple, une proportion de 40 % de la hausse de l'espérance de vie observée au cours des 20 dernières années est attribuable aux nouveaux médicaments. En...
Je suis désolé, mais je n'ai pas beaucoup de temps.
Pourrait-on affirmer que des accords comme le PTP et d'autres accords de libre-échange vous permettront de faire plus de recherche et de réaliser plus de découvertes pour prolonger notre espérance de vie et guérir des maladies qui sont actuellement incurables? Est-ce une hypothèse plutôt prudente?
Sans aucun doute, car les accords qui ont aidé à uniformiser les règles du jeu en matière de propriété intellectuelle à l'échelle mondiale permettent au Canada de soutenir la concurrence en vue d'obtenir du financement pour la recherche et le développement. Notre société, J&J, investit 8 milliards de dollars dans le monde. Dans la foulée de l'AECG, nous avons réussi à attirer au pays des investissements considérables.
J'ai une très brève question, madame Pullen.
Quelle est la principale hausse des coûts dans le milieu de la santé? S'agit-il du coût se rapportant aux médicaments, aux médecins, aux soins infirmiers ou peut-être aux briques et au mortier? Quel est le principal coût?
Selon le dernier rapport de l'ICIS publié en 2015, les trois principaux coûts qui augmentent sans cesse année après année se rapportent aux hôpitaux, aux médecins et aux médicaments.
Vous pourriez peut-être aussi nous fournir cette information. Je comprends vos préoccupations concernant les produits pharmaceutiques, mais je pense que nous devrions nous concentrer autant sur les autres coûts.
Vous pourriez peut-être nous faire parvenir ces renseignements.
Oui.
J'ajouterais que, mis ensemble, les trois représentent plus de 60 % des dépenses annuelles de santé au Canada, mais je crains de ne pas pouvoir vous donner une ventilation exacte de ces dépenses.
Je vais donner suite à cela. Chers témoins, je vous invite à nous faire part de ce que vous n'avez pas eu l'occasion de dire aujourd'hui. Nous réserverons un bon accueil à tout ce que vous pouvez ajouter, et nous en tiendrons compte dans notre rapport.
Nous passons maintenant aux libéraux. Madame Ludwig, vous avez la parole, pour cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
Merci de vos excellents exposés.
Ma première question, qui est pour Mme Pullen, concerne l'examen NCLEX. Vous avez mentionné que c'est un système d'examen américain qui ne mesure pas équitablement ou adéquatement les compétences nécessaires dans l'environnement canadien de soins de santé.
Que le PTP soit ratifié ou non, l'examen NCLEX en tant qu'outil de mesure devrait-il être revu?
L'adoption de l'examen NCLEX au Canada et la fiabilité ou la validité de cet examen pour évaluer les compétences pertinentes du personnel infirmier au Canada sont discutables.
Pour l'instant, il n'est pas évident de savoir si les organismes de réglementation canadiens établiront que c'est assez problématique pour décider de revenir à un système canadien d'accès à la profession. Je ne peux pas affirmer avec certitude que cette décision sera prise à l'avenir, mais nous sommes préoccupés parce qu'il y a assez d'éléments qui prouvent que c'est une avenue à explorer et que le PTP pourrait empêcher d'infirmer une décision prise par les organismes de réglementation canadiens en vue d'adopter une solution canadienne.
Merci.
Ma deuxième question est également pour vous.
Auriez-vous l'obligeance de dire quels sont les déterminants sociaux de la santé ainsi que leur incidence sur la qualité de vie et les résultats en matière de santé, notamment la façon dont ils pourraient influencer la consommation et l'administration de médicaments?
Les déterminants de la santé sont multidimensionnels. Ils se rapportent à la santé physique, à la génétique, à l'environnement et à d'autres facteurs sociaux comme le logement, le revenu, le travail, l'éducation, et ainsi de suite. Pour donner un exemple qui se rapporte à la discussion, affirmer que le coût des produits pharmaceutiques est le seul déterminant de la santé ou que c'est le plus important reviendrait à accorder une importance indue à cet aspect particulier de la santé.
C'est toutefois le Partenariat transpacifique, ou PTP, qui nous pose le plus grand défi, et c'est dans ce contexte qu'il faut envisager l'ensemble des déterminants de la santé et des produits pharmaceutiques. Tous les autres déterminants de la santé étant par ailleurs égaux, ces éléments jouent un rôle très important dans le maintien de la santé des gens. Le fait d'ajouter des barrières supplémentaires à ce mécanisme, qui permet de maintenir la santé ou de prendre en charge les maladies chroniques, rend beaucoup plus difficile ce volet fort important de la santé des Canadiens. Je suppose que c’est le défi que votre Comité doit soupeser.
Je ne doute pas que l'accord commercial confère des avantages commerciaux pour les secteurs de l’agriculture, des produits pharmaceutiques et de l'automobile, mais vous aurez vraiment pour défi de soupeser les conséquences voulues ou non voulues que subiront d’autres secteurs ainsi que d'autres Canadiens en plus de ceux qui évoluent dans ces secteurs. Est-ce que les avantages qu'en tirent quelques personnes l’emportent sur le bien du plus grand nombre? L’Association des infirmières et infirmiers du Canada est fermement d'avis que cet accord va à l'encontre de l'intérêt de l'ensemble des Canadiens.
Merci.
Si vous étiez devant le Comité de la santé, recommanderiez-vous aux membres de s'attarder aux effets des déterminants sociaux de la santé sur le plan politique? Ma fille termine sa quatrième année d'études en soins infirmiers, de sorte que j’ai lu beaucoup de travaux, et que j'ai révisé la plupart d'entre eux. Mais en ce qui a trait aux déterminants sociaux, que diriez-vous au Comité de la santé pour améliorer et modifier les politiques dans le but de favoriser la santé et de peut-être éviter la prise de médicaments à l’avenir?
Vous n'avez peut-être pas remarqué, mais M. Ruckert souhaite lui aussi intervenir. Pourriez-vous répondre rapidement pour lui laisser la chance de parler ensuite?
En fait, je voudrais réfléchir à votre question, de sorte que je vais le laisser répondre en premier.
Je tiens simplement à souligner que nous avons bel et bien examiné certaines voies relatives aux déterminants sociaux de la santé qui établissent un lien entre le PTP et la santé de la population canadienne. Nous avons notamment considéré que le revenu et le travail sont deux déterminants sociaux de la santé essentiels. Bien sûr, vous n'êtes pas sans savoir que la plupart des études économétriques n’ont trouvé aucune incidence économique significative. L'effet se chiffrait à zéro, ou à plus ou moins 0,2 %, ce qui est évidemment négligeable.
En revanche, l'incidence du travail s'est avérée négative. Voilà un aspect fort important des effets sur la santé, étant donné que l’emploi est un déterminant essentiel. Selon l’étude de l’Université Tufts, le PTP entraînera la perte d'environ 60 000 emplois au pays, et diverses autres études ont également prévu des répercussions négatives sur l’emploi.
Dans le cadre de ces voies relatives aux déterminants sociaux de la santé, on s'inquiète également de la mesure dans laquelle le PTP pourrait porter atteinte à la population aussi.
Je vous remercie. Votre temps est écoulé, madame Ludwig.
Nous allons maintenant passer aux conservateurs. Monsieur Shipley, vous avez cinq minutes.
Allez-y, monsieur.
Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier les témoins.
Monsieur Fleming, vous avez évoqué le régime visant à établir et à approuver le prix des médicaments. En fait, la plupart des Canadiens ignorent probablement l'existence d'un tel régime. Lorsque la recherche et le développement dépassent le montant alloué à la mise au point du produit, comment...? Pouvez-vous m’aider à comprendre?
J'aimerais ensuite m'adresser à M. Keon pour savoir comment les choses se passent du côté des médicaments génériques. Veuillez simplement résumer encore la procédure à titre de précision. Est-ce vous qui établissez le prix des médicaments, ou s'agit-il d'un régime qui permet de le faire? Quelle incidence le fabricant a-t-il sur la décision définitive?
Merci.
La fixation du prix des médicaments résulte de la décision de l'ensemble de nos organisations. Nous mettons des médicaments novateurs à la disposition de 160 pays dans le monde, de sorte que nous devons tenir compte des enjeux mondiaux lorsque nous établissons le prix des médicaments.
Au Canada, la fixation du prix des médicaments fait l'objet d'un important contrôle depuis le début des années 1990. Le Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés, situé ici à Ottawa, est un organisme fédéral légiféré qui utilise des règles très précises et strictes pour fixer les prix. Il compare les prix canadiens à ceux de sept autres pays du monde, de pays européens et des États-Unis.
Par la suite, le médicament est renvoyé à un organisme d’évaluation des technologies de la santé, principalement dans le cadre du Programme commun d’évaluation des médicaments. Il y a au Québec un organisme différent du nom d’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux, ou INESSS. À cette étape, on s'attarde au rapport qualité-prix. L'organisme détermine si le médicament sera un atout pour le système de soins de santé par rapport aux médicaments qui sont déjà sur le marché pour traiter la maladie en question. En dernier lieu, ou presque, le médicament est soumis à un processus provincial auquel les 10 provinces participent, qu'on appelle l’Alliance pancanadienne pharmaceutique, et qui permet de négocier des réductions de prix substantielles. En effet, l'Alliance a permis au système de soins de santé canadien d'économiser 500 millions de dollars au cours des 24 derniers mois.
Non, les sociétés pharmaceutiques qui fabriquent des médicaments génériques ne sont pas régies directement par le Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés. Cependant, nous avons négocié avec l’Alliance pancanadienne pharmaceutique ces dernières années, et elle est désormais une organisation très puissante qui représente toutes les provinces.
Nos prix sont fixés en fonction du prix de la marque équivalente à raison d'un pourcentage. Dans le cas des 18 médicaments génériques qui se vendent le mieux, par exemple, le prix est établi à un plafond de 18 %. Si le fabricant veut que le médicament se retrouve sur les formulaires, il ne peut pas le vendre plus cher. Ce sont donc les provinces qui contrôlent nos prix.
Merci.
Monsieur Prouse, nous entendons sans cesse dire que l'ensemble des négociations est secret, ce qui est absolument faux. Dans le cas non seulement des organisations que vous représentez, mais aussi des organisations de produit qui dépendent de votre organisme pour produire efficacement, diriez-vous qu’elles participent ou non, en ce qui a trait à l'accès aux discussions par l'intermédiaire des organisations de produit?
Les organisations sont toutes très engagées. Vous parlez de groupes comme l’Alliance canadienne du commerce agroalimentaire, ou ACCAA, le Conseil canadien du canola, la Canadian Canola Growers Association, les Producteurs de grains du Canada, le Conseil canadien de l’horticulture, le Conseil des grains du Canada; il m'en manque sans doute quelques-uns, mais tous ces groupes participent directement. Beaucoup d'entre eux ont fait les mêmes déplacements et ont probablement bu le même café que Jody puisqu'ils assistaient aux mêmes réunions.
Très bien, merci.
Essentiellement, nous parlons de soins de santé. Beaucoup ne font pas le lien entre l'agriculture et l'importance des soins de santé et la capacité de miser sur les activités de science et d'innovation du secteur de l'agriculture pour produire les aliments parmi les plus sûrs, sinon les meilleurs et les plus sûrs du monde. Si nous ne participons pas et que nous ne ratifions pas le PTP, cela nuira-t-il à l'efficacité et à l'efficience de nos activités de recherche visant à aider le secteur de l'agriculture...? Honnêtement, je pense que nous comprenons tous que l'agriculture est l'une des grandes industries les plus importantes, sinon la plus importante, car elle est au centre de tous ces accords commerciaux; tout le monde veut un approvisionnement alimentaire sain et sûr. Voilà de quoi il s'agit.
Dennis, je me demande...
Cela devra attendre. Contrairement au comité de l'agriculture, nous avons des règles strictes.
Des voix: Oh, oh!
Vous pourriez demander à un de vos collègues de poser la question au prochain tour, mais pour le moment, nous passons au NPD.
Madame Ramsey, vous avez trois minutes.
Merci beaucoup.
Il y a en effet un lien à faire avec les agriculteurs. Dans ma circonscription, certains agriculteurs n'ont pas les moyens de payer leurs médicaments. Il s'agit donc d'un enjeu très important dans les collectivités agricoles. Quant aux coûts des médicaments, on parle de plus de 24 000 $ par année pour un produit comme Enbrel, qui est prescrit aux gens — dont des agriculteurs — qui sont atteints de polyarthrite rhumatoïde.
Ma question s'adresse à M. Labonté.
Dans votre exposé, vous avez fait allusion à une exception liée à l'étiquetage des produits du tabac. Je me demande si vous pourriez nous parler de cette exception et de son incidence sur la santé publique. Selon vous, en quoi est-ce un aspect important de ce qui a été négocié?
Je vous remercie de la question.
Eh bien, il ne s'agit pas d'une exception au sens juridique du terme. C'est une exclusion, une exclusion volontaire. Si le PTP est ratifié et qu'il entre en vigueur, les pays pourront exclure volontairement l'ensemble de leurs mesures de contrôle du tabac du mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et État. Cela fait partie intégrante du mécanisme de RDIE; les États peuvent donc le faire, volontairement. Toutefois, cela n'empêche pas la création d'un mécanisme ou d'une entité de règlement des différends entre États. Si un investisseur transnational du secteur du tabac exerce des pressions quelconques auprès de pays du PTP et indique qu'il s'opposera à une mesure de contrôle du tabac dans un pays donné — comme l'emballage neutre au Canada, par exemple —, cela pourrait entraîner le lancement d'un processus de règlement des différends en vertu des dispositions du PTP sur le règlement des différends entre États. Donc, ce n'est pas une exception complète.
De plus, les investisseurs transnationaux du secteur du tabac peuvent aussi se tourner vers un autre accord d'investissement auquel le Canada pourrait être signataire et lancer un processus de règlement des différends en vertu de cet accord d'investissement. Le PTP n'exclut pas les poursuites potentielles. Je pense que c'est un aspect important, car on a reconnu, pendant les négociations sur le PTP, que les chapitres sur le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et État avaient, en réalité, un effet inhibiteur sur les contestations ou sur l'adoption de règlements concernant les mesures de contrôle du tabac.
Notre préoccupation ne se limite pas à cet aspect, car il y a également les produits alimentaires obésogènes, l'alcool, le sucre et d'autres produits commercialisés à l'échelle mondiale qui, comme nous le savons, représentent de plus en plus un risque à long terme pour la santé. Pour nous, la question était la suivante: si cet enjeu était assez important pour justifier l'adoption ou la création d'une exclusion pour les mesures de contrôle du tabac dans le mécanisme de RDIE — et l'envoi d'un signal —, pourquoi n'a-t-on pas élargi cette exclusion à l'ensemble des mesures de santé publique non discriminatoires qui visent essentiellement à régler les problèmes auxquels nous sommes confrontés actuellement et les problèmes éventuels?
Merci, monsieur Labonté.
Votre temps est écoulé, madame Ramsey.
Nous passons maintenant au Parti libéral.
Monsieur Fonseca, vous avez cinq minutes. Allez-y, monsieur.
Merci, monsieur le président.
J'aimerais que M. Prouse et Mme Cox nous parlent de ces réunions — où l'on consommait beaucoup de café —, des voyages auxquels ils ont participé dans le cadre des négociations sur le PTP, et d'autres personnes qui pourraient y avoir participé.
Nous avons entendu les critiques selon lesquelles le Canada a mis du temps à participer aux négociations. Les États-Unis ont commencé à y participer en 2008, et pour certains autres pays, les négociations du PTP ont commencé en 2006. Le Canada a été l'un des derniers à se joindre aux négociations en 2012. Quelles sont certaines des préoccupations à cet égard? Les négociations étaient-elles terminées pour certains chapitres? Y a-t-il des parties du PTP pour lesquelles les négociations n'ont pu être reprises, pour lesquelles vous n'avez pu faire valoir votre point de vue?
Je ne suis pas au fait de ces préoccupations. Nos membres s'intéressent à tous les accords commerciaux. Celui-ci en est un parmi d'autres. On a manifestement accordé une grande attention à l'AECG pendant les négociations de cet accord, donc...
Je parle du PTP. Les États-Unis ont commencé à participer aux négociations 2008, et nous, en 2012, soit quatre ans plus tard.
À mon avis, l'une des principales préoccupations de nos membres portait sur un aspect plutôt précis, soit veiller à l'adoption d'un cadre réglementaire fondé sur des données scientifiques. Je crois que l'élimination des droits en faisait partie. Nous étions axés sur un aspect particulier et nous considérons qu'on a répondu à notre préoccupation. Le moment où nous avons commencé à participer n'a pas d'importance.
Je dirais, de notre point de vue, que lorsque le Canada a entrepris les négociations, certaines dispositions avaient peut-être été proposées par diverses parties, mais n'avaient toutefois pas fait l'objet de négociations de fond, ou encore d'une entente entre les pays participants.
En ce qui concerne les aspects prioritaires de notre industrie, je pense que les négociateurs canadiens et ceux des autres pays qui se sont lancés dans les discussions en même temps que nous, dont le Mexique, pouvaient discuter de n'importe quel aspect.
En ce qui concerne les marques, vous souvenez-vous des médicaments de marque dont il était question? Entendiez-vous déjà parler du PTP dans les divers sièges sociaux à l'échelle mondiale? Aviez-vous des échos à ce sujet? À l'époque, qu'entendiez-vous avant que le gouvernement du Canada ne communique avec vous pour avoir votre point de vue?
Notre organisation surveille évidemment la situation et examine en profondeur tous les accords commerciaux internationaux, car ils peuvent avoir une incidence sur nos activités, notamment sur la circulation des biens, les activités de recherche et développement ou les questions liées à la propriété intellectuelle. Notre entreprise, comme beaucoup d'entreprises concurrentes, était à la table des négociations et surveillait étroitement la situation pendant que le PTP prenait forme.
En ce qui concerne le chapitre sur la propriété intellectuelle, je dirais, du point de vue d'une entreprise canadienne, que nous avions l'impression qu'il était fondé sur le modèle de l'AECG. Donc, les dispositions du PTP ne représentaient pas un changement important ou radical par rapport aux dispositions de l'AECG. Cela nous a permis de maintenir notre appui à l'égard de l'AECG.
La plupart de mes électeurs à Mississauga, dans ma circonscription, et le citoyen quelconque de Winnipeg, à qui nous venons de parler... Ils veulent savoir — ou ils le savent déjà — si le Partenariat transpacifique nous sera bénéfique, s'il apporte des emplois rémunérateurs au Canada, s'il nous rendra plus concurrentiels. Quel en sera l'effet sur nos échanges? La plupart des témoins que nous avons entendus parlent purement d'échanges, les importations et les exportations. Aujourd'hui, la séance est très différente, puisqu'elle porte surtout sur la propriété intellectuelle et sur l'éventuelle compétitivité qu'elle procure.
Voyons les emplois rattachés à votre marque. Combien d'emplois directs avez-vous, ici, au Canada?
Le nombre d'emplois directs est de 15 000 et celui d'emplois indirects atteint 31 000, au Canada. Je pourrais en ajouter, parce que je crois vous voir venir.
En plus de notre recherche-développement, nous avons une grosse usine à Guelph, qui fabrique annuellement 2,1 milliards de comprimés, que nous exportons vers le Moyen-Orient, l'Afrique et les États-Unis. Il y a une possibilité d'augmentation des exportations, du nombre d'emplois, etc., depuis cette usine vers les pays signataires du Partenariat.
Je serai bref. L'un des problèmes consécutifs à notre adhésion tardive est peut-être que l'insistance sur les produits pharmaceutiques concerne la propriété intellectuelle: augmentons la propriété intellectuelle autour du monde. La présence d'une industrie des produits pharmaceutiques génériques au Canada et dans le reste du monde rend très problématique le moment où nous pourrons prendre pied sur le marché.
La priorité que nous privilégierions, dorénavant, est l'harmonisation des règlements, qui permettrait, dès la mise au point d'un médicament au Canada, de le vendre ailleurs sans obligation de refaire les tests et d'augmenter les coûts.
C'est ce que je voudrais déposer devant le Comité à partir de maintenant.
Merci.
Voilà qui conclut l'intervention libérale et la série de questions. Nous entamons une demi-série, et les conservateurs ont la parole pendant cinq minutes.
Monsieur Ritz.
Merci, monsieur le président.
Je voulais seulement saisir la perche que vous avez tendue, Jim. Nous avons entrepris ce processus avec notre principal partenaire commercial, les États-Unis — l'initiative Par-delà la frontière et la coopération réglementaire —, et beaucoup de discussions sur le sujet ont aussi eu lieu avec l'AECG et pouvaient alors déborder dans le Partenariat transpacifique. Rien n'empêche les entreprises du versant PTP ou du versant AECG de parler de cette coopération réglementaire, en profitant de l'acquis de connaissances dans chaque cas. Plutôt que de réinventer la roue, il suffit de gonfler les pneus et de reprendre la route. C'est une excellente observation, que nous devrions mettre en relief dans notre rapport à venir.
L'une des questions soulevées, à laquelle certains groupes, mais pas tous, semblent sensibles est la mobilité de la main-d'oeuvre. Je pense que M. Fleming a mentionné avoir 15 000 employés, 31 000 en tout.
Est-il possible, ou en voyez-vous la possibilité, de faire appel à des compétences de partout dans le monde pendant une certaine période, un, deux ou trois mois, pour certaines réalisations, puis de les réexporter dans les pays signataires des accords commerciaux?
Je dois d'abord préciser que je ne suis pas un spécialiste de la mobilité de la main-d'oeuvre. Cela étant dit, un certain nombre de nos entreprises membres ont dit du bien des dispositions sur la mobilité de la main-d'oeuvre, notamment dans l'AECG, parce qu'un certain nombre d'entre elles sont installées dans l'Union européenne. Il est donc utile aux Canadiens de pouvoir aller plus facilement en Europe et vice-versa. Effectivement et indéniablement.
Oh, absolument! Pas aussi directement pour nous, mais, pour les groupes de producteurs du partenariat GrowCanada, c'est certainement un problème omniprésent.
Le besoin de mentorat est énorme. Dans beaucoup de marchés producteurs, au Vietnam, en Malaisie et ainsi de suite, on s'attend à l'apport d'une certaine expertise canadienne sur les méthodes d'utilisation des terres et différents sujets de ce genre, et il s'agit donc de pouvoir le faire, et, bien sûr, conformément au Partenariat transpacifique, nous le pouvons.
L'une de nos entreprises est toujours en train d'envoyer quelqu'un vers l'un de ces marchés émergents. Ça ne s'arrête jamais.
Oui.
Sur le plan scientifique, ça ne se limite pas aux tarifs. Il est bon de voir s'écrouler les barrières tarifaires. Ça permet d'ouvrir des portes. Puis on en vient à des accords sur les limites maximales de résidus et la présence de faibles concentrations. Tout ça se fait conformément au Codex, à l'échelle internationale, mais le Codex est dans une passe tellement mauvaise. Voyez-vous la possibilité, pour des pays qui ont la même opinion, à l'intérieur d'un bloc commercial, d'effectuer des changements, de s'entendre sur l'aspect scientifique des limites maximales de résidus et de la présence de faibles concentrations?
C'est certainement ce que nous espérons. Nous parlons d'une coalition de pays déterminés à le faire, chez les principaux pays exportateurs dotés d'un système de réglementation fondé sur la science. Pour revenir à ce que vous disiez plus tôt, nous ne voyons aucun empêchement à une entente entre les pays qui possèdent un tel système sur ces questions très élémentaires. Ça facilite beaucoup les échanges. Il n'y a pas de plus grands obstacles aux échanges que les barrières non tarifaires.
La prévisibilité et la stabilité favorisent les échanges. Ça répond à ce que Jim disait sur l'harmonisation scientifique.
Je cède le temps qui peut me rester à mon collègue M. Van Kesteren.
Madame Pullen, je n'ai pas pu terminer ce que je voulais vous dire. Nous savons tous que les coûts de la santé augmentent sensiblement. Je suis d'accord, ce n'est pas uniquement dû aux produits pharmaceutiques; il faut payer les infirmières, les médecins, le personnel hospitalier, les bâtiments. Tout ceci explique cela. Je pense que nous devons tous le reconnaître, aussi.
Je ne demande qu'un éclaircissement. Vous avez dit plus tôt que vous étiez préoccupée par le coût pour les Premières Nations. Est-ce exact? Ai-je bien entendu? C'est simplement ce que j'ai compris. Je voulais m'assurer...
Le rapport, ici, est que l'État fédéral est le fournisseur de services de santé, y compris de médicaments, pour la santé des Premières Nations et des Inuits au Canada. Il est à la fois celui qui finance et prodigue les services. Toute évolution du coût des médicaments au Canada le touche doublement.
L'État fédéral. Nous savons que les coûts, pour les Premières Nations, sont couverts entièrement par l'État fédéral.
Merci, monsieur le président.
Mesdames et messieurs les témoins, j'aime vos réflexions sur un scénario équitable qui concilie la capacité d'une société pharmaceutique de mettre au point un médicament sans précipitation, mais les médicaments génériques ont besoin de percer le marché et de tirer leur épingle du jeu.
Monsieur Elliot.
Merci.
Je pense que nous pouvons débattre un peu de ce qu'est un scénario équitable. Je pense qu'il est juste de dire que tous les membres de l'Organisation mondiale du commerce étaient d'accord avec l'accord sur les ADPIC, l'accord sur les droits de propriété intellectuelle, en 1994.
Toute la discussion, en général, sauf dans le contexte de ces accords commerciaux particuliers, porte maintenant sur la nécessité de préserver l'équilibre établi dans l'accord sur les ADPIC, que cet équilibre, à l'époque, ait été le bon ou que nous ayons besoin de plus de souplesse pour les pays, parce que nous n'obtenons ni l'innovation nécessaire dans le secteur pharmaceutique pour répondre aux besoins mondiaux en matière de santé ni l'accès à ces produits.
Plutôt que de conclure des accords qui limitent la souplesse, cherchons, dans la discussion, à la maintenir là où elle existe. L'équilibre à l'OMC s'améliorera probablement. Le Partenariat transpacifique semble aller exactement dans la mauvaise direction. Inutile, pour nous, de nous écarter de ce qui a déjà été convenu dans les accords sur les ADPIC, à l'OMC. Certains pourraient qualifier l'équilibre de non équitable, mais il est certainement meilleur que celui qu'établirait le Partenariat transpacifique.
Lorsque nos entreprises membres se font concurrence dans la recherche-développement et qu'elles essaient de promouvoir le Canada comme lieu de destination, elles ne concurrencent pas le plus petit commun dénominateur. Elles concurrencent d'autres pays développés, qui, pour la plupart, ont signé l'accord sur les ADPIC ainsi que sur la propriété intellectuelle et qui en respectent les règles depuis de nombreuses décennies.
Les règles du jeu équitables ne sont pas avec la Chine ou l'Inde. Elles sont avec l'Union européenne, le Japon, les États-Unis et les autres pays développés, parce que c'est ces pays qu'on concurrence pour les investissements dans la recherche-développement.
L'équilibre entre la protection des brevets sur les produits pharmaceutiques et l'entrée des produits génériques ne se borne pas à la protection des brevets; il intervient aussi un élément de complexité. Au Canada, notre système de règlement des litiges est complexe. M. Elliott en a parlé au sujet des liens entre les brevets. On nous ferme le marché simplement parce que quelqu'un prétend que nous portons atteinte à un brevet, ce qui oblige à la résolution d'une masse énorme de litiges si on veut que les produits génériques arrivent sur le marché. C'est coûteux et complexe, et, à cause du régime d'établissement des prix dont j'ai parlé, les prix diminuent. L'un des problèmes actuels, qui passe presque inaperçu, est de déterminer quels sont les facteurs d'incitation pour amener les produits génériques sur le marché.
Si on prend pied sur le marché et qu'on vend le produit 18 ¢, mais que, en contrepartie, on est susceptible de devoir verser 1 $ pour infraction du brevet et qu'on commence à vendre un certain nombre de ces prescriptions, les responsabilités deviennent énormes. Il faut simplifier le système.
L'un des problèmes du Partenariat transpacifique est d'imposer ce système à beaucoup d'autres pays, particulièrement les pays en développement, qui n'ont peut-être pas les infrastructures pour l'accueillir.
Quand on parle d'accès aux médicaments, ce n'est pas seulement en fonction d'un brevet; je pense que c'est en fonction de la complexité du système. Dans le Partenariat transpacifique, nous importons davantage de complexité dans le système de règlement des litiges sur les brevets des produits pharmaceutiques.
Monsieur Hamill, vous avez mentionné l'Inde et la Chine. À ce que je sache, la plupart des médicaments génériques sont produits en Inde, et, pour les pays avec lesquels nous nous associons dans le Partenariat transpacifique, les pays comme l'Inde ne causeront pas de problème. Êtes-vous d'accord?
Eh bien, je pense que M. Keon et Mme Cox ne seraient peut-être pas d'accord avec la production en Inde de la plupart des médicaments génériques, puisque eux-mêmes en produisent au Canada. Il est vrai que les pays en développement doivent réaliser des économies d'échelle. Si la plupart des ingrédients des produits pharmaceutiques sont déjà fabriqués en Inde et en Chine et que les coûts de main-d'oeuvre y sont bas, la fabrication des produits génériques se déplacera vers ces marchés, ce que vous avez déjà vu une fois. De plus, il faut ajouter la croissance du marché, indéniable elle aussi, la croissance de la classe moyenne en Inde, par exemple.
Cela dit, nous ne faisons pas concurrence... nous ne pouvons pas faire concurrence avec ces pays sur ces éléments. Nous concurrençons l'Union européenne, les États-Unis, le Japon et d'autres pays développés en matière d'innovation.
Messieurs, c'est terminé.
Nous allons entendre une dernière députée, Mme Ramsey, qui dispose de trois minutes.
Allez-y. Votre intervention conclura la séance.
Merci beaucoup. Vous nous avez donné tellement de matière à réflexion. Je pense que nous pourrions en avoir pour des heures à la digérer.
Monsieur Elliott, c'est intéressant, ce que vous dites, que nous limiterons notre souplesse, et la raison pour laquelle ça fait partie de l'AECG et du Partenariat transpacifique, c'est, je pense, que si le premier n'est pas ratifié, ça entre alors en vigueur dans le partenariat. On suppose que l'accord sera ratifié, mais nous ne le savons pas. Notre regard est tourné vers l'Union européenne.
Ma question est vraiment simple. Est-il nécessaire, pour le Canada, de renforcer les mécanismes de la protection accordée à la propriété intellectuelle des produits pharmaceutiques?
Je pose d'abord la question à Mme Cox, puis nous ferons le tour de la table.
Non. Nous avons de bons mécanismes de protection de la propriété intellectuelle. Je pense que, dans les accords commerciaux, comme je l'ai dit, nous voudrions qu'on privilégie la convergence des règlements. Ça permettrait de comprimer les coûts, d'améliorer la qualité et, je pense, de rendre les médicaments beaucoup plus accessibles au Canada et dans les pays en développement.
La réponse est non.
Je pense qu'il faut noter que, dans les négociations sur l'AECG, l'un des principaux sujets de préoccupation a été le chapitre sur l'investissement, qui a été l'une des principales pierres d'achoppement, en Europe particulièrement, à cause de ces conséquences éventuellement négatives. Je ne suis pas sûr de la raison pour laquelle nous voudrions répéter ça dans le Partenariat transpacifique, particulièrement quand nous savons déjà, d'après notre propre expérience découlant d'un chapitre semblable dans l'ALENA, que ça crée l'occasion, pour les sociétés pharmaceutiques, d'essayer d'éprouver notre souplesse, en l'occurrence, les critères de brevetabilité.
Dans le Partenariat transpacifique, aucune modification n'a visé la propriété intellectuelle sur les semences, et nos membres ne cherchaient pas à en obtenir une.
Nous serions aussi d'accord avec M. Elliott: notre réponse serait certainement négative et nous croyons que l'accord sur l'OMC protégeait bien les droits de propriété intellectuelle.
Nous n'avons entendu aucun argument en faveur, mais je m'en remets à ceux qui font partie du secteur.
L'AECG a déjà permis d'importantes améliorations pour la propriété intellectuelle, que nous avons démultipliées avec beaucoup de succès. Nos actions pour attirer l'investissement dans la recherche-développement au Canada et affronter la concurrence internationale pour l'obtention de ces investissements sont conformes à nos paroles.
Je ne vous étonnerai pas en disant qu'il existe aussi une colonne pour cocher oui. Je reviens seulement à ce qu'a dit l'Association canadienne du médicament générique sur la convergence et l'harmonisation des règlements. Nous sommes d'accord avec ces objectifs. C'est une condition nécessaire mais non suffisante. Il faut aussi être concurrentiel pour la propriété intellectuelle, mais il est sûr que nous appuyons aussi la coopération sur le plan réglementaire, dans le cadre d'accords commerciaux internationaux.
Dans beaucoup de secteurs industriels, nous entendons dire que l'harmonisation est vraiment un gros enjeu. Notre capacité de percer ces marchés ne dépend pas vraiment de ces modifications. En fait, nous ne parvenons pas à harmoniser nos règlements de manière à accéder à ces marchés. C'est certainement le message qu'on nous répète sans cesse dans beaucoup de secteurs.
Oui, monsieur Elliott.
Oui.
J'allais dire que l'harmonisation peut être un plus, mais pas automatiquement. Si elle nivelle par le bas et sacrifie l'intérêt public, elle est mauvaise. Ne faisons pas les moutons de Panurge, n'est-ce pas?
D'accord. C'est ici que notre matinée se termine.
Je remercie tous les témoins de s'être présentés avec des opinions très différentes pour chaque secteur. La discussion a été très fructueuse. S'il vous reste des observations à exprimer ou des opinions à communiquer, veuillez les faire parvenir au Comité. Elles figureront dans notre rapport.
Avant de poursuivre à huis clos, nous allons suspendre la séance pour permettre à tout le monde, sauf les députés, de quitter la salle le plus rapidement possible. La séance est suspendue trois minutes.
Merci.
[La séance se poursuit à huis clos.]
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