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Monsieur le président et mesdames et messieurs, les membres du Comité, je vous remercie de l'occasion qui nous est offerte d'être ici aujourd'hui. Je m'appelle Nick Schultz et je suis vice-président du Règlement sur le pipeline de l'Association canadienne des producteurs pétroliers.
L'Association canadienne des producteurs pétroliers est le porte-parole de l’industrie pétrolière et gazière canadienne d’amont, soit des entreprises qui explorent et mettent en valeur le pétrole et le gaz naturel du Canada. Nos membres produisent environ 80 % du pétrole et du gaz naturel canadiens dans un secteur qui injecte chaque année plusieurs milliards de dollars dans l'économie du pays.
L'accès aux marchés d'exportation pour nos produits est essentiel à notre industrie et à l'économie canadienne, qui tire profit de l'activité générée par notre secteur. Le fonctionnement du libre marché est un principe fondamental de notre association et les principes qui le régissent sont le fondement même du libre-échange. Essentiellement, nous sommes tout à fait en prise sur le fonctionnement du libre marché et les accords de libre-échange.
En ce qui a trait à l'énergie, le chapitre de l'ALENA à ce sujet remonte à la version initiale de l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis de 1987. Il y a un fait qui est parfois sous-estimé, mais qui est tout de même important, c'est que les deux pays, le Canada et les États-Unis, avaient tous deux adopté des politiques axées sur le libre marché pour encadrer le secteur énergétique dans le milieu des années 1980, et l'accord de libre-échange a fait fond sur ce constat en ce qui concerne l'énergie.
Les deux pays possèdent toujours des politiques énergétiques qui sont axées sur le marché, et le Mexique, qui s'est joint à la zone de libre-échange en 1994, a dernièrement libéralisé grandement ses marchés énergétiques sous l'effet stimulant de l'ALENA. À notre avis, l'ALENA s'est avéré profitable aux trois pays que sont le Canada, les États-Unis et le Mexique. L'espoir de bénéfices mutuels qui motive les pays à conclure des accords de libre-échange est devenu une réalité dans le domaine de l'énergie, et même de façon générale.
Depuis 1987, et depuis 1994, les économies des trois pays sont devenues encore plus interreliées et intégrées; l'argument en faveur d'une zone de libre-échange nord-américaine est donc encore plus convaincant aujourd'hui qu'il l'était il y a 30 ou 35 ans. Le libre-échange a eu exactement les conséquences attendues dans le cas de l'énergie. Le marché de l'énergie a connu une croissance et les trois pays partenaires de l'ALENA en ont profité. Nous avons remis à la greffière une copie de mes observations dans lesquelles il y a des données. Faute de temps, je vais devoir passer par-dessus ces renseignements.
Je dirais toutefois que la production américaine de pétrole a bondi au cours des dernières années et qu'elle est revenue au niveau de 1970, et que celle de gaz naturel a aussi connu une augmentation énorme au cours des dix dernières années chez nos voisins. Les marchés que les producteurs canadiens de pétrole et de gaz naturel desservaient aux États-Unis sont maintenant approvisionnés par la production intérieure. En fait, en Ontario et au Québec, des volumes importants de gaz naturel sont importés pour approvisionner les consommateurs canadiens; ainsi, les producteurs américains de gaz naturel ont tiré profit de l'accès aux marchés généré par le libre-échange. De plus, ce sont surtout les producteurs américains de pétrole qui approvisionnent les raffineries de l'Est du Canada qui dépendent du pétrole brut importé, un autre avantage pour eux.
Si nous devions parler des améliorations à apporter, nous abonderions dans le sens des propos des autres témoins, soit qu'il faut éviter de causer du tort. L'accord de libre-échange a été profitable et même s'il y a toujours place à amélioration, il s'agirait avant tout d'éviter de nuire aux relations; puis nous devons nous assurer de préserver les pierres d'assise des accords de libre-échange, comme le traitement national et les recours pour les investisseurs individuels.
Je signale que ce ne sont pas les gens d'affaires de l'un ou l'autre des trois pays qui réclament des changements au chapitre sur l'énergie.
Dans l'optique du Canada, toute amélioration serait en lien avec les règles d'origine. Au cours des 30 dernières années, un marché du gaz naturel très fluide a vu le jour en Amérique du Nord. Il est toutefois difficile d'associer cette fluidité aux règles d'origine complexes; ainsi, si nous devons renégocier l'ALENA, nous devons régler cette question.
Je vous remercie de m'avoir invitée au nom du Congrès du travail du Canada. Nous représentons 3,3 millions de membres d'un océan à l'autre. Le Congrès réunit les syndicats nationaux et internationaux du Canada, les fédérations provinciales et territoriales du travail et 130 conseils du travail régionaux dont les membres oeuvrent dans pratiquement tous les secteurs de l'économie canadienne, toutes les professions et toutes les régions du Canada.
Comme toujours, je dois d'abord souligner que le mouvement syndical sait très bien que le commerce est, et a toujours été, un volet important de l'économie canadienne. Nos emplois dépendent du commerce. Nous comprenons que tous les gouvernements auront intérêt à favoriser l'ouverture des échanges commerciaux.
Nous estimons que la répartition des répercussions des accords sur le commerce et les investissements est une question depuis longtemps ignorée. On nous dit que les accords commerciaux feront des gagnants et des perdants, mais qu'il ne faut pas s'en faire, car il y aura compensation pour les perdants.
À mon avis, le fait de ne pas avoir dédommagé ceux qui ont été les plus durement touchés par les perturbations commerciales a mené à une inégalité croissante, spécialement entre les régions, et a suscité un sentiment nationaliste chez ceux qui s'en sont mieux sortis. C'est ce qui s'est produit dans bien des pays développés. Le Canada n'est pas un cas unique. En fait, notre pays a été épargné d'une certaine façon grâce à notre solide filet de sécurité sociale.
Plus de 20 ans se sont écoulés depuis la signature de l'Accord de libre-échange nord-américain et les exemples prouvant qu'il a laissé tomber les travailleurs canadiens sont très clairs. On avait dit aux Canadiens que l'ALENA allait permettre de créer de bons emplois, une prospérité commune et un avenir plus reluisant pour les travailleurs. Il a plutôt compromis des emplois sûrs et bien rémunérés et a détruit des industries de fabrication et de transformation et les localités qui en dépendent.
Même si la croissance du commerce et de l'économie s'est intensifiée, ce sont les grandes entreprises et les investisseurs qui en profitent, et non les travailleurs. L'ALENA régit les échanges commerciaux, certes, mais il donne aussi aux investisseurs étrangers le pouvoir de poursuivre les gouvernements canadiens, menaçant les services publics et limitant la capacité des gouvernements de réglementer dans l'intérêt public. Ce soi-disant accord de libre-échange n'a pas favorisé des échanges commerciaux équitables et équilibrés, selon nous, et l'une des raisons, c'est que les accords commerciaux ont laissé un déficit; le peu de place accordé à la gouvernance dans la loi n'est plus approprié.
Le manque de transparence et les relations asymétriques dans les chaînes d'approvisionnement mondiales, associés à la concurrence que se livrent les pays à faible revenu pour s'approprier les investissements étrangers dans les emplois, font en sorte que le libre-échange est moins équitable.
Par exemple, 1 % seulement des travailleurs mexicains font partie d'un syndicat démocratique. Au Mexique, la plupart des travailleurs sont couverts par ce qu'on appelle des contrats de protection, c'est-à-dire des ententes entre la compagnie et un syndicat approuvé par la compagnie. Si un travailleur veut sortir de ce syndicat et adhérer à un autre, au mieux, on l'ignore, et au pire, sa vie est en danger.
Nous estimons que la solution consiste à adopter une approche parallèle et, de pair avec les accords commerciaux, à tout faire pour renforcer les conventions de l'OIT. Le Canada vient tout juste d'annoncer qu'il ratifiera la convention fondamentale 98, Convention sur le droit d'organisation et de négociation collective. Ni le Canada, ni les États-Unis, ni le Mexique n'ont encore adhéré à cette convention.
Nous avons aussi incité le gouvernement canadien à ratifier la convention de gouvernance 81, la Convention sur l'inspection du travail. Aucun des trois pays n'a encore ratifié cette convention, laquelle aiderait à garantir que les normes du travail dont nous avons convenu dans les conventions fondamentales prévoient des inspecteurs du travail chargés de mettre la loi en application et de veiller à ce que les travailleurs de tous les pays puissent bénéficier des droits qui sont prévus pour eux dans ces conventions fondamentales.
Nous encourageons également le gouvernement à envisager l'idée d'une diligence raisonnable pour les entreprises et les organismes de financement canadiens qui se rapprocherait de la loi récemment adoptée en France, à songer à un cadre de négociation transnationale pour permettre aux syndicats de représenter les travailleurs dans bien des pays, et à respecter les lignes directrices de l'Organisation internationale du travail et de l'OCDE visant les multinationales. Nous invitons aussi le gouvernement à tout faire pour renforcer les points de contact nationaux du Canada.
Nous sommes heureux de savoir que le gouvernement canadien a publiquement déclaré être disposé à se retirer d'un accord qui va à l'encontre du meilleur intérêt du Canada. Nous pensons que le temps est venu d'adopter, face au commerce, une nouvelle approche qui défend d'abord les intérêts des travailleurs et de l'environnement.
Je remercie le Comité de me donner l'occasion de prendre la parole aujourd'hui à propos de cette importante étude. Je l'apprécie beaucoup.
L'Association canadienne des producteurs d'acier est le porte-parole de l'industrie primaire de production de l'acier au Canada qui représente 14 milliards de dollars. Les producteurs d'acier canadiens font partie intégrante des chaînes d'approvisionnement des secteurs de l'automobile, de l'énergie, de la construction et d'autres secteurs industriels, ici au Canada. Nous voulons travailler avec le gouvernement et nos partenaires industriels pour promouvoir des politiques publiques favorisant la compétitivité du milieu canadien des affaires dans le monde.
Avant de passer à la question essentielle du Comité concernant les priorités de l'industrie, j'aimerais d'abord expliquer un peu la nature mutuellement bénéfique des relations que nous avons dans le cadre de l'ALENA au chapitre de l'acier, surtout entre le Canada et les États-Unis.
Le Canada et les États-Unis entretiennent une relation équilibrée et complémentaire dans le domaine de l'acier qui repose sur les principes du marché équitable. En 2016, les deux pays ont échangé plus de 10 millions de tonnes d'acier d'une valeur marchande supérieure à 8,8 milliards de dollars américains. Les expéditions du Canada aux États-Unis ont totalisé 4,4 milliards de dollars américains, et celles des États-Unis au Canada, 4,45 milliards de dollars américains.
L'acier figure toujours au titre des principaux produits d'exportation des États-Unis vers le Canada. En 2016, 50 % des exportations américaines d’acier étaient destinées au Canada, ce qui représente environ 30 % de notre marché intérieur. Les producteurs canadiens d'acier achètent aussi beaucoup de matières premières chez nos voisins. Plus précisément, l'an dernier, les entreprises canadiennes ont acheté, pour les transformer, des quantités de minerai de fer, de charbon bitumineux, de débris d'acier, de zinc et d'autres métaux représentant une valeur totale de 1,5 milliard de dollars américains. Outre la valeur de ces marchandises, l'extraction, la récupération et le transport de ces matières premières génèrent une activité économique appréciable. Plusieurs de nos producteurs ont des installations et des employés dans bien des localités visées par l'ALENA et la rentabilité commune de ces installations favorise l'investissement entre les diverses entreprises.
Depuis l'entrée en vigueur de l'ALENA, les échanges de produits d'acier entre les pays partenaires ont augmenté de 117,2 %. Les exportations se font en grande partie en Amérique du Nord; ainsi, 97 % des exportations canadiennes d’acier vont aux États-Unis et au Mexique, 90 % des exportations américaines d’acier vont au Canada et au Mexique et 76 % des exportations mexicaines d’acier vont au Canada et aux États-Unis.
Compte tenu de la valeur stratégique de la production d'acier pour la zone de l'ALENA, les gouvernements signataires de l'accord ont mis sur pied, en 2003, le Comité nord-américain du commerce de l'acier chargé de coordonner les efforts des gouvernements et de l'industrie pour appliquer conjointement la loi et assurer la croissance et la prospérité soutenues du secteur de l'acier dans la région. Ainsi, des représentants des gouvernements et de l'industrie des trois pays se réunissent pour discuter des priorités stratégiques et de la compétitivité.
Comme le Comité l'a récemment entendu dans le cadre de son étude sur la capacité de l'industrie canadienne de l'acier à soutenir la concurrence, la croissance et la surcapacité provenant de régions où la propriété et le contrôle sont largement publics sont à la fois insoutenables et irresponsables. Les gouvernements et les industries qui participent à l'ALENA croient fermement qu'il faut, sans tarder, prendre des mesures multilatérales pour tenir compte des causes et des conséquences de la surcapacité mondiale; voilà pourquoi nous continuons d'appuyer les efforts déployés par les gouvernements signataires de l'ALENA, au terme du forum mondial sur la surcapacité d'acier sous l'égide du G20 et de l'OCDE, dans l'espérance commune que la surcapacité sera éventuellement réduite en permanence.
Pour le moment, en matière de défense contre les importations déloyales, nous faisons face aux mêmes défis que nos homologues américains et mexicains. Ces effets négatifs étouffent artificiellement nos prix et nuisent aux travailleurs nord-américains. Nous collaborons pour veiller à ce que les politiques et les interventions des trois pays de l'ALENA concordent parfaitement et servent à défendre les régions contre le commerce déloyal, et cela de façon responsable.
Dans l'ensemble, nous estimons que l'ALENA a été un accord fructueux même si, après 23 ans, il pourrait être actualisé, à notre avis. À cette fin, nous pensons qu'il faudrait renforcer les règles d'origine, favoriser la coopération et la coordination dans l'application des lois relatives au commerce, instaurer des règles relatives aux taux de change assorties de mécanismes d'application s'adressant aux sociétés d'État, éliminer les lourdes procédures douanières et améliorer les infrastructures frontalières.
Pour clore, je dirais qu'avant de renégocier officiellement l'ALENA, il est essentiel que le Canada obtienne son classement dans la catégorie de producteur national à l'issue de l'enquête en cours sur la sécurité nationale relativement aux importations d'acier, enquête que mène le département du Commerce en vertu de l'article 232, de son processus concernant la construction de pipelines au moyen de l'acier et du fer nationaux et de son processus en cours à l'égard de la mise en application des politiques actuelles d'achat aux États-Unis.
Dans tous les cas, le gouvernement doit continuer à défendre avec vigueur les intérêts des producteurs canadiens d'acier et des métallurgistes pour veiller à ce que les mesures prises directement par les États-Unis n'aient aucune conséquence néfaste ou inattendue.
Sans résultats positifs générés par...
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Merci, monsieur le vice-président. C'est un honneur de rencontrer votre comité.
Comme vous le savez, le commerce international est certainement aujourd'hui au centre des préoccupations des décideurs et des gens d'affaires.
Histoire de vous situer en contexte, sachez que l'industrie de la chimie est un volet essentiel de l'économie canadienne. Elle se classe au quatrième rang des plus importantes industries manufacturières, avec des expéditions annuelles de près de 53 milliards de dollars. Nous sommes nombreux à ne pas beaucoup réfléchir au rôle des produits chimiques dans l'économie, mais la chimie intervient dans plus de 96 % des produits fabriqués et on pense, bien entendu, aux secteurs clés de l'économie canadienne, notamment l'énergie, les transports, l'agroalimentaire, les minéraux et l'exploitation minière.
Dans le peu de temps qui m'est accordé aujourd'hui, j'ai trois messages à vous transmettre.
Premièrement, le secteur mondial de la pétrochimie est important, il prend rapidement de l'expansion et les modèles d'échanges commerciaux sont profondément interdépendants. Année après année, le commerce mondial des produits chimiques représente plus ou moins 5 000 milliards de dollars et augmente à un taux nettement supérieur au PIB mondial. Ce chiffre devrait atteindre 6 000 millards de dollars en 2020. Question de situer ce chiffre, le Canada occupe actuellement environ 2 % de la production mondiale.
Trois grandes tendances expliquent cette augmentation de la demande de produits chimiques; la croissance démographique à l'échelle internationale, bien entendu, la poursuite de la qualité de vie et du mode de vie de la classe moyenne par les populations grandissantes de l'Asie, et la poursuite dynamique de résultats plus durables par tous les citoyens de la planète sur le plan de la qualité de l'air, de l'eau et de l'énergie. Tout est là. Ensemble, ces tendances veulent dire que l'industrie de la chimie devrait, selon nous, pratiquement tripler d'ici 2050, ce qui n'est pas si lointain.
Déjà aujourd'hui, les produits chimiques sont parmi les marchandises qui circulent le plus partout au monde. Environ 40 % de la production mondiale de produits chimiques sont expédiés à l'échelle internationale. Il est évident que le commerce libre et équitable des produits chimiques sera toujours d'une importance capitale pour l'industrie afin qu'elle puisse contribuer à la hauteur des attentes dans les décennies à venir.
Deuxièmement — et je suppose que cela fait un peu écho aux propos du représentant de l'ACPP —, la position du Canada face à ce secteur mondial hautement intégré a atteint un point d'inflexion. Notre secteur est grandement intégré à l'industrie mondiale. Chaque année, les exportations de nos produits totalisent environ 40 milliards de dollars, tout juste derrière le transport des équipements dans le secteur manufacturier.
Par ailleurs, nos importations se chiffrent à environ 50 milliards de dollars. Si on se tourne vers les États-Unis, nos échanges sont presque totalement équilibrés, avec des exportations de 30 milliards et des importations de 33 milliards de dollars. Il ne faut toutefois pas tenir cet équilibre pour acquis. En fait, ces dernières années, le gaz naturel à faible coût est disponible en abondance et ainsi plus de 300 investissements de calibre mondial ont été réalisés dans l'industrie chimique aux États-Unis, représentant une valeur totale de près de 250 milliards de dollars dans de nouvelles usines et du nouvel équipement. Cela exercera, il va sans dire, une pression sur la part historique des exportations canadiennes vers ce pays.
Nous savons aussi que la nouvelle administration en poste à Washington a entrepris diverses réformes ambitieuses touchant non seulement à la politique commerciale, mais aussi à la politique fiscale et à la réglementation. Nous ne connaissons pas — et personne ici ne le sait — les résultats de l'une ou l'autre de ces initiatives, mais nous savons par contre que les États-Unis sont déterminés à relancer la compétitivité de leur secteur manufacturier et de leurs entreprises privées au cours des prochaines années.
À la lumière de tous ces faits et faute d'une intervention coordonnée et adéquate de la part des décideurs canadiens, le Canada continuera à peiner pour attirer sa part historique des investissements dans le secteur pétrochimique.
Troisièmement, sur une note un peu plus optimiste, il est possible de rectifier le parcours actuel et de permettre au secteur de la chimie de se développer et de contribuer de façon importante à l'économie nationale et à l'environnement mondial. Il y a au Canada une abondance gênante de réserves de produits chimiques fins qui émettent le moins de carbone, plus que n'importe où ailleurs sur la planète. Pour aider notre pays à saisir l'occasion qui est offerte et à attirer une juste part des investissements appréciables faits dans ce secteur, nous devons nous concentrer sur trois priorités.
Dans un premier temps, nous devons nous préparer à négocier une version actualisée de l'ALENA. Vous avez reçu copie d'une déclaration tripartie publiée par notre association de concert avec celles des États-Unis et du Mexique au début de mars. À notre connaissance, nous sommes le seul secteur où les trois pays se sont entendus sur une position concernant les négociations en vertu de l'ALENA. Nous continuons à préciser nos attentes.
En résumé, l'ALENA a permis de faire le commerce en franchise de droits des produits chimiques, ce qui a stimulé la croissance de chaînes d'approvisionnement complexes, aidé à abaisser les coûts de la production chimique et renforcé l'ensemble du secteur dans le marché mondial.
Nous appuyons l'approche pangouvernementale adoptée par le gouvernement fédéral face aux négociations en vertu de l'ALENA et continuons à offrir notre soutien par l'entremise des dispositifs établis. Nous pensons que c'est possible. L'ALENA a été rédigé au début des années 1990. Il y a des aspects qui peuvent être négociés et renforcés.
En premier lieu, il faudrait maintenir l'exemption de tarifs douaniers pour le commerce des produits admissibles, parfaire les exigences en ce qui a trait aux règles d'origine, faciliter le contrôle douanier et améliorer la coopération réglementaire et l'harmonisation entre les territoires.
Je pense qu'on me fait signe que c'est terminé.
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Merci, monsieur le vice-président Hoback et madame la vice-présidente Ramsey, et merci aux députés. Merci de l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui.
Comme l'a fait remarquer le vice-président Hoback, je suis chef de la direction du Council of the Great Lakes Region. Cet organisme sans but lucratif binational a été fondé en 2013, et depuis lors, il travaille de concert avec le gouvernement, les entreprises, le secteur privé et d'autres associations à but non lucratif afin de resserrer les liens entre les États-Unis et le Canada et de trouver de nouvelles façons d'exploiter les forces économiques de la région. Aujourd'hui, mon témoignage portera essentiellement sur trois points: l'importance d'une économie nord-américaine forte, la portée du partenariat économique entre le Canada et les États-Unis et le rôle essentiel que les économies transfrontalières comme celles de la région des Grands Lacs jouent dans le renforcement de leur compétitivité et de leur prospérité à long terme. J'espère qu'il sera utile à vos délibérations sur les partenariats de commerce et d'investissement avec les États-Unis et le Mexique.
Je commencerai par dire que le commerce et l'investissement nord-américains, que l'ALENA a consolidés, constituent un projet en constante évolution politique et économique. D'un point de vue macroéconomique, l'ALENA s'est avéré positif pour les trois pays. En réalité, comme vous l'avez probablement entendu au cours des deux dernières semaines, les échanges globaux de marchandises entre le Canada, les États-Unis et le Mexique ont plus que triplé depuis 1993.
Si l'on y regarde de plus près, les échanges commerciaux entre les États-Unis et le Mexique ont augmenté de façon sensible selon le service de recherche du Congrès des États-Unis. Les exportations américaines de marchandises, par exemple, sont passées de 40,6 milliards de dollars en 1993 à plus de 230 milliards de dollars en 2016, une augmentation de 455 %, alors que les importations de biens du Mexique sont passées de 40 milliards de dollars en 1993 à 290 milliards de dollars en 2016, une augmentation de 637 %. Il en résulte un modeste déficit commercial entre les États-Unis et le Mexique d'environ 63 milliards de dollars. Inversement, le service de recherche du Congrès des États-Unis, dans une récente étude sur l'ALENA, a démontré que les États-Unis bénéficiaient d'un excédent commercial d'environ 10 milliards de dollars avec le Mexique dans le domaine des services.
La progression des échanges de biens entre le Canada et les États-Unis, cependant, a été plus modeste. Les exportations américaines vers le Canada ont augmenté de 165 % par rapport au niveau de 1993, puisqu'elles sont passées de 100 milliards de dollars en 1993 à 270 milliards de dollars en 2016, tandis que les importations aux États-Unis en provenance du Canada ont augmenté de 150 % par rapport au niveau de 1993, pour une croissance de 110 milliards de dollars en 1993 à 278 milliards de dollars en 2016. Vous l'aurez remarqué, il y a un modeste déficit commercial entre les États-Unis et le Canada, principalement en raison de la fluctuation des prix de l'énergie. Tout comme le Mexique, selon des chiffres du Bureau du représentant américain au Commerce, les États-Unis bénéficient d'un excédent commercial avec le Canada dans le domaine des services qui, en 2016, était d'environ 25 milliards de dollars.
Enfin, en ce qui a trait au Canada et au Mexique, même si les échanges bilatéraux sont en croissance, la circulation des biens connaît un fort déséquilibre. En 2016, le Canada a importé pour environ 33 milliards de dollars de biens du Mexique, alors que le Mexique n'en a importés que pour 8 milliards de dollars du Canada. Vu dans son ensemble, cet aperçu du commerce bilatéral montre bien pourquoi l'ALENA est complexe. D'une part, l'ALENA a accéléré la libéralisation des marchés, la modernisation du secteur privé et la réforme du secteur public au Mexique. D'autre part, l'ALENA a étendu le commerce et les chaînes d'approvisionnement du nord vers le sud, ce qui a eu pour effet de rediriger les emplois manufacturiers et les investissements.
De bien des façons, depuis la mise en oeuvre de l'ALENA, le continent opère à deux vitesses, généralement à l'avantage du Mexique. Cela ne devrait surprendre personne et le succès du Mexique comporte des avantages économiques à court et à long terme: des milieux de travail améliorés, des salaires plus élevés, une meilleure éducation, un meilleur gouvernement et une sécurité accrue.
Cependant, parlez-en aux ouvriers de l'Ontario, du Québec, du Wisconsin ou de l'Ohio, et ils vous diront que s'adapter à l'ALENA et à la montée en force du Mexique n'a pas été chose facile. Bien des gens se sentent lésés dans l'actuel système sans frontières d'échanges commerciaux, d'investissement et de mobilité, et un nombre croissant de gens se sentent abandonnés au fur et à mesure que s'installe l'économie numérique ou l'économie du savoir. C'est ce que j'entends et ce que je vois dans la région binationale des Grands Lacs, qui s'étend sur deux provinces et huit États, et où vivent 107 millions de Canadiens et d'Américains. La région, dont la production économique était évaluée à 6 000 milliards de dollars en 2016, représente 30 % de l'activité économique combinée du Canada et des États-Unis. S'il s'agissait d'un pays, cette région représenterait la troisième économie en importance dans le monde, derrière les États-Unis et la Chine.
La perspective de la modernisation de l'ALENA peut sembler insécurisante, mais elle représente une opportunité importante pour la région des Grands Lacs. Si dans le cours de ces négociations, nous n'arrivons pas à optimiser nos chaînes d'approvisionnement transfrontalières et nos réseaux de transport, nous aurons raté une excellente occasion d'améliorer notre compétitivité conjointe. Si nous n'arrivons pas à partager tant des ressources traditionnelles que des ressources à faibles émissions de carbone, nous aurons raté l'occasion d'offrir des options énergétiques abordables pour alimenter nos maisons, nos commerces et nos industries.
Le président Trump a remporté l'élection en bonne partie grâce au soutien inattendu des gens de trois États limitrophes des Grands Lacs — le Wisconsin, la Pennsylvanie et le Michigan — où de nombreux électeurs se sont tournés vers lui parce qu'ils étaient déçus par les pertes d'emploi dans le secteur manufacturier. Mais ces États, et les cinq autres qui constituent notre région économique, comptent également sur le Canada pour préserver environ 2,2 millions d'emplois bien rémunérés.
Le président Trump est un fin négociateur. Lui et son entourage comprennent l'importance politique et économique des Grands Lacs et d'autres régions transfrontalières similaires. Utilisons ces connaissances et ces relations pour reconstruire l'ALENA depuis la base.
Merci.
C'est tellement important que nous ne soyons pas à la traîne par rapport aux États-Unis et au Mexique en ce qui a trait aux règles, à la lourdeur bureaucratique, à l'imposition, etc. Comment arriver à faire passer ce message?
Sur le plan géopolitique, on ne peut pas avoir un système fort et intégré de libre-échange nord-américain qui puisse affronter la Chine, l'Inde et les économies émergentes si on n'a pas simplifié la réglementation, la bureaucratie et le système d'imposition. Si Trump impose une taxe à la frontière et que nous avons en plus une taxe sur le carbone que personne d'autre n'a, cela désavantagera tout le monde.
Comment aplanir certaines de ces difficultés en utilisant l'ALENA pour le faire?
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Il y a des exemples de choses que nous avons déjà faites. Le Conseil de coopération Canada-États-Unis en matière de réglementation, par exemple, a très bien fonctionné. C'est un excellent exemple.
Cela ne veut pas dire que le Canada doive suivre les États-Unis. Avec le travail qui a été accompli grâce au CCR dans le secteur de la chimie, au fur et à mesure que ce travail s'intensifiait... Les États-Unis ont voté leur seul projet de loi bipartite d'importance l'an dernier, en l'occurrence la réforme du Toxic Substances Control Act. Et cela ressemble énormément à ce que le Canada avait mis en place il y a plus de 20 ans.
Nous leur avons montré le chemin. Grâce à cette coopération en matière de réglementation, ils nous ont suivis. Nous sommes à examiner les détails afin de découvrir des failles, de partager nos connaissances scientifiques et d'arriver à des conclusions sur la toxicité des substances, etc. Cette coopération est très positive. Nous pouvons pousser plus loin. Cela ne veut pas dire que nous devons édulcorer notre travail et suivre les Américains. Nous pouvons être des leaders.
Une seule chose, par contre, c'est que la compétitivité nous inquiète beaucoup. J'ai mentionné que l'industrie pétrochimique américaine a reçu, elle seule, plus de 250 milliards de dollars en nouveaux investissements. Le Canada en a traditionnellement reçu 10 %. Nous devrions avoir vu 30 nouveaux projets évalués à 25 milliards de dollars. Nous en avons eu environ trois ou quatre évalués à 2 milliards de dollars. Nous n'avons obtenu qu'un pour cent, alors déjà, nous ne sommes pas concurrentiels quand il s'agit d'attirer des investissements.
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Merci, monsieur le président.
Bienvenue à tous les témoins.
Monsieur Shultz, le Canada se range parmi les 10 pays les plus importants au monde pour ses produits énergétiques. La demande mondiale augmente en même temps que le niveau de vie des gens partout sur la planète, au fur et à mesure que les économies se développent. La Colombie-Britannique se classe deuxième au chapitre de la production de gaz naturel parmi les provinces canadiennes.
En ce moment, nous comptons surtout sur les États-Unis. Si nous devions renégocier l'ALENA, comment cela affecterait-il la Colombie-Britannique et le Canada?
Également, quelles priorités changeraient en ce qui a trait à notre dépendance envers les États-Unis?
Si vous parlez à un économiste, la raison pour laquelle le libre-échange fonctionne, et le concept derrière l'ALENA, est qu'il était censé faire augmenter les salaires au Mexique. En retour, cela devait faire augmenter la demande interne au Mexique, et ferait en sorte que les Mexicains aient un niveau de vie semblable au nôtre. Ça ne s'est pas produit, car les droits des travailleurs n'ont pas été respectés. Les salaires ont stagné au Mexique.
Je pense que cela serait la voie vers une prospérité partagée. Nous nous en tirerions mieux économiquement, car nous ne verrions pas les inégalités augmenter, pas plus que l'environnement et les travailleurs ne seraient exploités.
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Premièrement, je pense que nous devons améliorer le chapitre sur le travail. L'ALENA nous a fourni, pour la première fois, un accord sur le travail parallèlement à un accord commercial, et les syndicats des États-Unis avaient fait pression pour l'obtenir. Depuis lors, ils ont continué à faire pression pour améliorer les accords, et le meilleur chapitre sur le travail à ce jour serait, à mon avis, une combinaison de celui de l'AECG et de celui du PTP, qui font référence spécifiquement aux demandes de l'OIT quant à la qualité des conditions de travail, où l'on se fonde sur les conventions fondamentales, et où on a inclus un mécanisme d'application.
Ceci supposerait le renforcement du point de contact national. En ce moment, le point de contact peut offrir de bons services en cas de plainte contre une entreprise particulière, mais on ne peut forcer personne à venir discuter. Il ne peut pas agir comme médiateur dans une situation, alors les problèmes ne sont pas réglés immédiatement. Il faut se soumettre à un processus de huit ans. La seule fois qu'on a pu constater l'efficacité d'un chapitre sur le travail — en réalité, ça ne s'est pas avéré efficace. Il y a eu une affaire au Guatemala qui s'est réglée en huit ans, et l'issue n'a pas été réellement concluante. Le chapitre sur le travail en soi ne suffit pas, mais ce serait fantastique de l'intégrer à l'accord pour lui donner du mordant et de s'en remettre aux mécanismes de l'OIT qui sont disponibles.
Ensuite, je crois que nous devons avoir des lois sur la diligence raisonnable pour les sociétés et les entreprises multinationales. Cela va plus loin qu'un simple énoncé sur la responsabilité sociale des entreprises. Les chaînes d'approvisionnement mondiales sont difficiles à suivre, et surviennent des crises comme celle du Rana Plaza au Bangladesh, où les gens ne savent pas nécessairement de qui ils sont les sous-traitants. Les gens qui sont ici ne sont pas au courant de l'exploitation qui se fait à l'autre bout. Ils doivent pouvoir suivre les chaînes d'approvisionnement mondiales, il faut que cela devienne normal d'être responsable d'une chaîne d'approvisionnement complète, et ils ne peuvent pas ignorer les conséquences négatives des chaînes d'approvisionnement mondiales.
Ma prochaine question s'adresse à M. Fisher. C'était merveilleux de participer au forum économique des Grands Lacs à Détroit, il y a quelques semaines. Celui-ci a, selon moi, vraiment mis en valeur ce dont vous nous avez fait part. L'impact économique de cette région est de 6 000 milliards de dollars. Il y a la côte ouest et la côte est, mais au coeur du pays il y a une véritable puissance économique.
J'aimerais vous parler d'un aspect sur lequel cette conférence a mis l'accent. Il s'agit de la santé des Grands Lacs. Nous avons discuté de l'espace que nous partageons, plus précisément en ce qui concerne l'atmosphère et l'eau entre les États-Unis et le Canada, et nous avons également parlé des préoccupations des entreprises oeuvrant sur ces lacs, ainsi que de leur responsabilité. En ce moment, je pense à Sterling Fuels, à Windsor qui a commis de nombreuses infractions en rapport avec la sécurité des travailleurs et qui est responsable d'un quasi-déversement de carburant dans les Grands Lacs; je pense aussi au stockage en couches géologiques profondes. C'est une chose à laquelle nos deux pays sont confrontés.
Ma question porte sur les améliorations qui pourraient être apportées à l'ALENA, en ce qui concerne la région des Grands Lacs, tant sur le plan environnemental que sur le plan économique.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
J'ai une question pour vous, monsieur Schultz. J'ai écouté avec attention ce que vous disiez plus tôt.
Vous dites que les produits pétroliers sont très intégrés. Selon un rapport que vous avez fait, 99 % des produits pétroliers du Canada vont aux États-Unis.
Un peu plus tôt, vous avez aussi dit que le pétrole va vers les États-Unis, pour toutes les raffineries de l'est. Les États-Unis envoient leur pétrole vers l'est.
Est-ce l'est des États-Unis ou l'est du Canada?
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C'est une bonne question.
Je pense que la première chose que nous devons faire, en qualité de décideurs canadiens, est de voir dans le Mexique une économie importante et en pleine croissance. Dans les années à venir, ce pays sera encore mieux placé pour devenir un chef de file dans les échanges commerciaux à l'échelle planétaire. Je pense que nous devons être très présents au Mexique, sur le plan du commerce et des investissements, peut-être davantage que nous l'avons été au moment de l'ALENA. Je ne pense pas que nous sommes aussi présents que nous pourrions l'être.
Il va sans dire que le programme de réformes que vous avez vues sous le président Peña Nieto a donné au Canada la possibilité de prendre part à la réforme, non seulement pour le secteur énergétique, mais également pour les services financiers. D'incroyables possibilités s'offrent à nous pour, je ne voudrais pas dire « canadianiser » les réformes que nous avons vues au Mexique, mais il y a une fantastique possibilité d'accomplir cela tout en étant plus présent au Mexique.
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Merci, monsieur le président.
Merci à tous pour vos présentations.
Mes questions seront d'abord pour vous, monsieur Fisher. Le week-end dernier, j'ai tenu ma 17e assemblée publique. Il y a maintenant des Américains qui assistent à mes assemblées publiques pour en apprendre davantage, particulièrement, sur ce qui se passe concernant le commerce. Certaines des personnes ayant assisté à mes assemblées étaient très surprises d'entendre à quel point nos chaînes d'approvisionnement sont intégrées, et à quel point toute perturbation pourrait occasionner des pertes d'emploi des deux côtés de la frontière.
Je veux débuter avec cette citation:
Certains de ses détracteurs les plus virulents concèdent que l'ALENA ne devrait pas être tenu entièrement responsable des récentes pertes d'emplois aux États-Unis dans le secteur industriel. Selon Scott du Economic Policy Institute, « Au cours des 20 dernières années, la manipulation des devises exercées par environ 20 pays, à commencer par la Chine, a fait augmenter les déficits commerciaux des États-Unis, ce qui [combiné aux effets à long terme de la grande récession] est grandement responsable de la perte de plus de cinq millions d'emplois américains. »
Comment l'incidence globale de l'ALENA est-elle mesurée, depuis que les tendances sur le plan du commerce et des investissements sont influencées par de nombreuses autres variables économiques, comme la croissance économique, l'inflation, ainsi que la fluctuation et la manipulation des devises?
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Oui, et en une réponse très simple, je pense que le Congrès américain vous appuierait sans réserve. Dans son rapport de février 2017, il disait d'emblée qu'il était très difficile de déterminer exactement l'effet que l'ALENA a eu sur la création d'emplois, à cause de toutes ces variables.
Je pense que c'est une très bonne observation. Il nous faut juste savoir combien d'emplois ont été créés dans le cadre de l'ALENA. Je pense qu'il est juste de dire, par contre, qu'il y a un effet positif net, mais est-ce 1,5 million ou 9 millions d'emplois? Si vous parlez aux gens du Département du Commerce américain, ils vous diront que les échanges commerciaux avec le Canada soutiennent directement environ 1,5 million d'emplois. Si vous parlez aux gens du ministère du Commerce international, ils vous diront que les exportations canadiennes aux États-Unis soutiennent 9 millions d’emplois.
Il existe une différence fondamentale entre la façon dont nous voyons le commerce et la création d'emplois, non seulement avec l'ALENA, mais aussi de façon plus générale avec les accords commerciaux à travers le monde.
Je comprends certainement de ces témoins, et d'eux principalement, mais aussi de ceux qui les ont précédés que toute perturbation de notre chaîne d'approvisionnement intégrée pourrait mettre en danger des emplois des deux côtés de la frontière et même au Mexique.
Quelles sont les possibilités d'une intégration plus importante de notre chaîne d'approvisionnement entre nos trois pays — plutôt que de politiques d'isolement et de protectionnisme plus importantes — afin que nos activités commerciales soient plus fortes et non plus faibles? Aussi, advenant la dissolution de l'actuel ALENA, quelles pourraient être les répercussions sur les échanges et les débouchés commerciaux en regard de l'influence des autres pays, comme la Chine?
Quelqu'un voudrait commencer?
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Je vais tenter de répondre à la question.
Du point de vue de l'industrie sidérurgique, je vais débuter avec votre deuxième question. Un des plus grands moyens de défense que nous avons contre les pratiques commerciales déloyales de la Chine, ou de tout autre pays en développement, est la possibilité de servir nos clients de façon appropriée et rapide avec un produit « juste à temps » qui traverse la frontière de nombreuses fois et qui a ne valeur ajoutée. Notre chaîne d'approvisionnement est très rigoureuse. Nul besoin de maintenir des réserves. Nous pouvons personnaliser l'offre. Ceci est un des plus grands moyens de défense que nous avons.
J'ai parlé très brièvement, en introduction, du renforcement des règles d'origine. Plus exactement, du point de vue de l'industrie sidérurgique, cela s'appliquerait aux produits manufacturés qui contiennent de l'acier. Il y aurait là une possibilité, si on ajustait les règles d'origine afin de passer à une norme du type « fondu et coulé », où l'acier serait en fait produit au Canada, aux États-Unis, ou au Mexique. On stimulerait ainsi la création d'emplois.
Il est maintenant possible d'importer de l'acier depuis la Corée, par exemple, et d'y appliquer une classification tarifaire tel qu'il respecte en quelque sorte les règles de l'ALENA. Quand on s'éloigne de cela, quand on renforce les règles d'origine, on favorise la création d'emplois et l'activité économique.
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Il est absolument essentiel. Encore une fois, 75 % de tout ce que nous produisons au Canada est exporté aux États-Unis, soit plus de 30 milliards de dollars d'exportations contre 33 milliards de dollars d'importations.
Dave vous a parlé de noria à la frontière. C'est un peu comme dans le secteur de l'automobile: la matière première est importée, nous la transformons, l'améliorons en partie, puis nous envoyons le produit résultant à une autre industrie qui la transforme en un autre produit et, au final, vous obtenez un tableau de bord d'automobile ou un pneu. Nous avons une usine de fabrication de caoutchouc artificiel, à Sarnia. Notre chaîne d'approvisionnement est complexe et elle est hautement intégrée. Il serait difficile de la démanteler.
J'ajouterais un simple commentaire à ce que vous venez de dire au sujet du bloc de l'ALENA. Je pense que le secteur de la pétrochimie ne voit pas les choses ainsi. Nous appréhendons plutôt la réalité à l'échelle mondiale et nous souhaitons vivement que le Canada pratique un commerce axé sur des échanges équitables fondés sur des règles qui sauront bénéficier au Canada et aux autres pays qui nous préoccupent peut-être à l'heure actuelle. Nous pensons que le Canada est en position pour profiter d'échanges commerciaux mutuels avec la Chine et avec d'autres pays asiatiques, surtout compte tenu des dangers que nous percevons au sud de la frontière.
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En fait, le Département du commerce mène trois enquêtes de front à la suite de différents décrets présidentiels. Il y en a une que nous connaissons et qui concerne les oléoducs; elle va essentiellement s'inscrire en prolongement des politiques d'achat aux États-Unis appliquées au secteur privé, pour les oléoducs en particulier. Cela est particulièrement préoccupant, par exemple, pour l'un de nos membres, la société Evraz, à Regina, qui fabrique des tuyaux pour pipeline de grand diamètre. Il serait vraiment problématique que le Canada ne bénéficie pas d'une exemption nationale.
L'enquête sur l'application du Buy American Act, soit le processus appliqué par le Département du commerce, vise à recenser les échappatoires des politiques d'achat aux États-Unis, et à les combler afin qu'il ne puisse pas y avoir d'exemptions inappropriées. Nous devrons voir comment tout cela se déroule. Tout élargissement de la portée des politiques d'achat aux États-Unis sera automatiquement négatif pour le secteur de l'acier canadien. Nous ne savons pas exactement dans quelle mesure nous serons touchés, selon les exemptions qui pourraient être accordées par notre voisin.
La troisième enquête du Département du commerce porte sur l'article 232, relativement à la sécurité nationale. À cet égard, il est essentiel que le Canada soit mis à l'abri des éventuelles politiques que les États-Unis envisagent d'adopter. Cette enquête vise les produits subventionnés qui sont illégalement importés ou les produits sous-évalués qui portent atteinte à la sécurité nationale des États-Unis. Nous devrions faire valoir qu'étant donné nos relations commerciales équilibrées et mutuellement avantageuses, il serait tout à fait fondé que le Canada bénéficie d'une classification nationale.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je tiens, moi aussi, à remercier les membres du Comité de m'avoir permis d'apporter ma contribution aujourd'hui, puisque je ne suis ici qu'en qualité de visiteur.
Vous avez déjà pas mal parlé de la question que je veux poser, mais je vais tout de même demander aux témoins de nous en dire davantage. Comme nous le savons, le 24 janvier 2017, le nouveau président des États-Unis a signé un décret intitulé « Buy American, Hire American », soit: acheter américain, embaucher américain. Nous comprenons tout à fait l'intention de ce décret qui est de stimuler la production aux États-Unis. Vous avez un peu parlé des répercussions possibles sur le secteur de l'acier. Les autres témoins pourraient-ils nous dire en quoi leur industrie risque d'être touchée également? Plus important encore, que devrions-nous faire à cet égard? Quelles mesures éventuelles le gouvernement du Canada devrait-il adopter pour réagir à ce décret présidentiel?
Commençons par M. Masterson.
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Bien sûr. Tout d'abord, j'ai parlé des investissements importants réalisés aux États-Unis et j'ai répondu à la question de Mme Ramsey qui était de savoir ce que cela signifie. Les gens vont-ils éventuellement vouloir investir davantage aux États-Unis?
Nous pouvons faire un double constat. Les entreprises américaines veulent donner l'impression qu'elles agissent correctement. Quant aux entreprises étrangères qui investissent aux États-Unis, elles voient d'un mauvais oeil les mesures anticommerciales de l'administration actuelle parce que les installations qu'elles ont bâties aux États-Unis doivent servir à l'exportation.
Cela nous ramène donc à la question de ce que nous devrions faire et de ce que nous devons nous garder de faire au Canada. Tout d'abord, nous ne devons pas envisager de combattre une mauvaise politique par une autre mauvaise politique. Nous sommes tous d'accord sur le fait que le « Buy American » n'est pas une bonne politique. Gardons-nous d'adopter une politique visant à favoriser l'achat de produits canadiens. Cela ne fonctionnera pas pour nous. Ne commettons pas la même erreur que les Américains. En revanche, nous devrions chercher à diversifier davantage nos marchés, ce dont nous parlons depuis de nombreuses années, et nous devrions poursuivre les accords commerciaux, surtout avec la Chine.
Quitte à en décevoir certains, le secteur de l'énergie demeure l'épine dorsale du pays. Nous comptons de très nombreux clients pour nos produits. Les seules choses qui nous empêchent de les expédier là-bas avec tous les produits dérivés, c'est notre politique environnementale. Nous devons nous ranger à l'idée qu'il faut faire transiter nos produits, surtout nos produits d'énergie et les produits connexes, par la côte Ouest afin de les expédier vers les marchés asiatiques très importants et en pleine croissance dont j'ai parlé.
Si c'est ce que nous faisons, M. Trump pourra toujours adopter toutes les politiques qu'il veut. Nous aurons diversifié nos marchés et nous demeurerons concurrentiels
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Je voudrais dire très brièvement que la diversification des marchés est évidemment très importante dans n'importe quelle politique de commerce international. Ce n'est pas quelque chose qui se fait du jour au lendemain, mais, comme nous sommes un pays exportateur, cela ne peut qu'aider à long terme.
Pour en revenir à la politique américaine du « Buy American, Hire American », à l'ajustement aux frontières ou à d'autres éléments, je dirais que nous avons fait ce qu'il faut en nous adressant directement aux deux chambres du Congrès. Nous devrions intervenir davantage de législateurs à législateurs, de premier ministre à président, de gouverneurs à gouverneurs et de gouverneurs à premiers ministres provinciaux, mais nous devons aussi faire en sorte que les entreprises elles aussi se mobilisent.
Beaucoup de nos homologues, parmi les témoins d'aujourd'hui, ont des filiales ou des sociétés mères aux États-Unis. Si ces gens-là sont effectivement convaincus de la valeur des chaînes d'approvisionnement et des grappes qui existent de part et d'autre de la frontière, il n'y a aucune raison pour laquelle Dow, Dupont, Walmart et toutes les entreprises actives au Canada et aux États-Unis ne soient pas présentes dans les corridors du Congrès pour parler des avantages que présente le partenariat économique conjoint que nous avons instauré entre le Canada et les États-Unis.
Pour ce qui est du dialogue de gouvernement à gouvernement et de législateurs à législateurs, tout va bien. Nous pourrions, selon moi, renforcer cette action en misant sur plus d'interaction entre entreprises et sur une plus grande participation des entreprises au dialogue.
Chers collègues, voilà qui met un terme à notre deuxième série de questions, mais il nous reste encore beaucoup de temps.
Monsieur Peterson, vous aviez demandé à ce que nous passions à huis clos pour quelques minutes à la fin de la séance et nous allons effectivement pouvoir le faire.
Je me disais que nous pourrions entamer une troisième série de questions de deux minutes, plutôt que de cinq minutes, pour vous permettre de poser les questions qu'il vous reste — je sais que tout le monde en a —, puis nous conclurons avant de passer à huis clos.
Nous allons commencer par M. Van Kesteren et nous donnerons ensuite la parole aux libéraux, puis à Mme Ramsey qui fermera la marche.