JUST Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la justice et des droits de la personne
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 7 février 2017
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Mesdames et messieurs, nous reprenons les travaux du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Nous menons une étude de l'accès en matière de justice, en particulier l'aide juridique.
Nous avons l'immense plaisir aujourd'hui de recevoir deux témoins. J'ai le plaisir d'accueillir Ryan Fritsch, qui est avocat et chargé de cours à l'Université de Windsor.
Bienvenue, maître Fritsch.
Nous recevons de nouveau en tant que témoin Josh Paterson, directeur général de l'Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique.
Soyez encore une fois le bienvenu, monsieur Paterson.
Nous commencerons par Me Fritsch.
Merci beaucoup. J'aimerais commencer en vous parlant un peu de mes antécédents, puisque je comparais devant vous aujourd'hui à titre personnel.
Je défends les droits des personnes touchées par la maladie mentale depuis plus de 10 ans. J'ai été conseiller juridique pour le Bureau de l'intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques, qui offre aux patients des établissements psychiatres des conseils juridiques et des moyens de défense concernant leurs droits; le Bureau intervient plus de 35 000 fois par année. J'ai également dirigé l'élaboration de la stratégie en santé mentale d'Aide juridique Ontario, qui a été lancée en mars 2016.
Au fil des ans, j'ai également participé aux travaux de nombreux comités et conseils consultatifs, dont le comité consultatif sur la santé mentale du service de police de Toronto. J'ai coprésidé la Police Records Check Coalition, qui, avec l'Association des chefs de police de l'Ontario et d'autres intervenants, a élaboré la première politique provinciale en cette matière. Depuis plusieurs années, comme vous l'avez dit, je suis en outre chargé de cours à la faculté de droit de l'Université de Windsor.
Merci beaucoup de m'avoir invité ici aujourd'hui et de me donner l'occasion de me prononcer, et merci aussi d'entreprendre cette tâche importante consistant à examiner le rôle immense des régimes d'aide juridique à l'échelle du Canada.
En termes simples, l'aide juridique aide les gens à se prévaloir de leurs droits. Elle défend les droits qui font que la citoyenneté a une véritable signification, et c'est très concrètement de cela qu'il s'agit quand nous parlons de « l'accès à la justice ».
Aujourd'hui, j'aimerais m'attacher à un volet très précis de cette question, à savoir la criminalisation de la maladie mentale. Bien sûr, on a déjà beaucoup travaillé sur ce sujet et, au cours des 15 dernières années, une bonne partie de ces travaux ont été mis en pratique. Nous avons clairement choisi de ne plus criminaliser les personnes atteintes d'une maladie mentale. Nous reconnaissons que l'approche punitive, axée sur la loi et l'ordre, n'est pas efficace. Elle n'est efficace ni à protéger l'intérêt du public, ni à protéger la sécurité du public. Des concepts comme la dénonciation, les mesures dissuasives et l'emprisonnement sont en fait contreproductifs quand il s'agit d'un problème de santé mentale. Ces actes exacerbent les problèmes sous-jacents et les facteurs déclencheurs qui font que les personnes aux prises avec une maladie mentale ont des démêlés avec la justice. Mais quels aspects de ce progrès ont été officialisés et intégrés de façon systématique au travail de nos tribunaux actuels? C'est beaucoup plus limité. Voilà une des mesures que j'encourage votre comité à examiner, aujourd'hui.
Si vous consultez votre exemplaire du Code criminel canadien, vous y verrez des dispositions sur les troubles mentaux à la partie XX.1. Toute cette section parle principalement de la petite tranche de 2 à 3 % des gens qui souffrent de problèmes graves et persistants de santé mentale. C'est un système très bien défini, mais il n'existe que pour les personnes dont la maladie mentale est grave et persistante, les personnes qui, soit sont inaptes à subir leur procès, soit non criminellement responsables en raison d'une maladie mentale. C'est un seuil très élevé à atteindre.
Bien que le Code criminel prévoie une gamme complète de services et de systèmes, la plupart des accusés ne pourront pas y accéder. En fait, le ratio des personnes jugées non criminellement responsables sur le total des affaires criminelles est de 1,8 sur 1 000. Qu'en est-il de toutes les autres personnes qui comparaissent en tant qu'accusées devant un tribunal pénal? Qu'en est-il des personnes dont la maladie mentale est moins grave: celles que certains de mes collègues appellent des « malades tranquilles » ou celles qui sont profondément malades et sont victimes d'une crise passagère? Qu'en est-il des personnes qui ont à la fois une maladie mentale et une déficience intellectuelle ou un déficit cognitif?
Je suis heureux de pouvoir dire que, pendant cette période, ces personnes ont pu elles aussi bénéficier de quelques progrès. Ce n'est qu'en 1999 que le premier tribunal de la santé mentale a vu le jour, à l'ancien hôtel de ville de Toronto. Ce tribunal a été créé parce qu'on a reconnu que les poursuites traditionnelles n'étaient pas efficaces. Au cours des 15 dernières années, des approches différentes comme celles-là se sont multipliées, partout en Ontario. Ce tribunal de Toronto est devenu une source d'espoir et d'inspiration pour les juges, les avocats de la Couronne et ceux de la défense, et aussi pour les accusés. Cette idée et cette approche ont fait leur chemin.
Le ministère du Procureur général de l'Ontario a récemment entrepris une vérification. En 2015, il a constaté que 52 tribunaux pénaux sur 52, en Ontario, offrent désormais un type ou un autre de programme axé sur la santé mentale. On voit un peu de tout, des tribunaux de la santé mentale à proprement parler jusqu'à des tribunaux de traitement de la toxicomanie en passant par la déjudiciarisation après la mise en accusation, les programmes de cautionnement axés sur la santé mentale, et ainsi de suite. Ces mesures ont été conçues non pas pour la tranche de 2 à 3 % des accusés qui ont un problème de santé mentale grave et persistant, mais pour la majorité des accusés, c'est-à-dire pour une personne sur deux, voire davantage, qui a un problème de santé mentale ou de dépendance quelconque lorsqu'elle comparaît devant un tribunal pénal. C'est une proportion énorme; c'est presque la majorité des accusés.
Le gouvernement fédéral réaliserait un profit énorme s'il prenait les choses en main et aidait à officialiser ce genre de programmes de façon à répondre aux besoins de la majorité des accusés. Ces profits sont faciles à voir; il suffit d'observer ce qui se passe dans les salles de ces tribunaux. Cela dépend beaucoup du travail des agents de soutien, des avocats nommés d'office et des avocats de la défense. Ils ont reconnu il y a longtemps que la santé mentale n'est qu'une partie de l'équation, que le traitement à lui seul n'est pas une panacée et que la maladie n'est qu'un facteur parmi d'autres de la précarité dans laquelle l'accusé se retrouve et de la vie qu'il a vécue.
Au contraire, ces intervenants évaluent les besoins de leurs clients en se fondant sur ces autres facteurs, ce qui aidera les clients à rester stables, dans la collectivité. Les intervenants réclament des logements. Ils réclament pour leurs clients un revenu et des prestations sociales. Ils réclament un accès aux services de santé. Ils réclament l'accès à l'éducation et aussi la suspension des casiers judiciaires de façon que leurs clients puissent poursuivre leurs études, obtenir un emploi, faire du bénévolat, voire obtenir un logement. Mais, surtout, ces intervenants s'en prennent aux idées tenues pour acquises, aux préjugés et à la peur. Il s'agit là d'obstacles, et ces obstacles sont tous des déterminants sociaux de la santé qui empêchent les accusés de progresser et qui contribuent à la récidive et à la criminalisation. Autrement dit, un investissement dans l'aide juridique, qui viserait à aider les accusés, serait on ne peut plus rentable. Le rendement d'un investissement dans l'aide juridique est formidable sur le plan social. En 2014, un rapport du ministère de la Justice, intitulé Optimisation de l'investissement fédéral dans l'aide juridique en matière criminelle confirmait que de tels investissements dans l'aide juridique peut faire diminuer les dépenses publiques dans divers secteurs, notamment la santé et les services sociaux.
L'approche des tribunaux spécialisés dans la déjudiciarisation est donc très prometteuse, mais il reste que certains aspects sont préoccupants. D'abord et avant tout, ces programmes spéciaux axés sur la santé mentale sont souvent des programmes ponctuels. Au fil des ans, on les a vus éclore ici et là, souvent isolés les uns des autres. De manière générale, ils dépendent de la mise en commun des ressources locales.
Certains tribunaux spécialisés se réunissent une fois par jour, d'autres, une fois par mois. Leur définition est largement idiosyncratique. Certains ont clairement défini leurs critères d'admissibilité et de déjudiciarisation, d'autres vont plus ou moins les improviser. Autrement dit, il y a beaucoup d'arbitraire, beaucoup d'écarts et très peu d'uniformité. Honnêtement, il y a aussi souvent beaucoup de confusion quant à la procédure et aux options et quant à l'intersection entre le droit criminel et les soins de santé. Il y a souvent de l'incertitude quant aux pratiques ou aux cadres d'intervention qui s'imposent. Malgré tout, nous estimons que ces tribunaux sont très prometteurs.
Selon moi, tout le monde aujourd'hui abonde dans ce sens et voudrait que des investissements et une normalisation accrus permettent à ces programmes de réussir. Voici une liste partielle des entités qui soutiennent ce genre d'initiatives.
En 2013, dans le cadre de « Réinventer la justice pénale: le cinquième symposium national », on recommandait d'envisager de modifier le Code criminel s'il fallait le faire pour permettre une évaluation plus rapide des besoins en santé mentale d'un accusé, supprimant ainsi les obstacles législatifs empêchant la multiplication de ces programmes axés sur la déjudiciarisation et la santé mentale.
En 2014, le Comité consultatif du sous-ministre sur l'aide juridique en matière criminelle recommandait de resserrer la coordination du système et d'en améliorer l'efficience entre autres en accordant une attention particulière aux grands utilisateurs du système et en répondant mieux aux besoins particuliers de certains groupes, à savoir les accusés ayant des problèmes de santé mentale.
En 2014, la Commission de la santé mentale du Canada inscrivait dans sa stratégie nationale, au point 2.4 de ses priorités, le besoin d'augmenter la disponibilité des programmes de déjudiciarisation des personnes affectées d'un problème de santé mentale, y compris les tribunaux de la santé mentale.
En 2016, le ministère du Procureur général de l'Ontario a organisé une table ronde sur la criminalité et la santé mentale où, entre autres, on a appuyé une recommandation selon laquelle le ministre devrait examiner les modèles de déjudiciarisation prometteurs et envisager de normaliser les approches prises.
En 2016, et je suis fier de pouvoir le dire, Aide juridique Ontario a publié sa stratégie provinciale en matière de santé mentale. Elle comprend un programme complet de formation sur la santé mentale et un outil d'apprentissage continu qui a été élaboré par et pour les avocats criminalistes. Notre stratégie vise également à élargir l'admissibilité à l'aide financière et juridique des clients qui ont un problème de santé mentale, et elle prévoit des engagements pluriannuels à l'égard de l'innovation.
Je suis venu ici aujourd'hui pour encourager le gouvernement fédéral à s'associer à tous ces organismes et à faire sa part. Cela permettrait d'aller de l'avant et d'atteindre le but énoncé dans la lettre de mandat de la ministre de la Justice, à savoir combler les lacunes associées aux services offerts aux personnes souffrant de problèmes de santé mentale qui naviguent dans le système de justice pénale.
J'ajouterais que cette mesure aiderait également beaucoup à optimiser les investissements fédéraux dans l'aide juridique et à orienter les investissements futurs, qu'ils soient nouveaux ou accrus, de façon qu'ils aient le plus de répercussions possible. Elle favoriserait un règlement plus rapide. Elle simplifierait les processus. Elle réduirait la récidive et les infractions de nature administrative et, fait plus important encore, elle aiderait les accusés à définir eux-mêmes la voie de leur guérison.
Comment pouvons-nous y arriver? J'aimerais soumettre à votre attention, aujourd'hui, six recommandations.
Premièrement, l'on pourrait revoir la définition des « troubles mentaux » du Code criminel pour l'élargir ou pour créer une catégorie distincte de trouble mental, distincte de « la non-responsabilité criminelle » et de « l'inaptitude à subir son procès ». À parler franchement, cela refléterait mieux la réalité de ce qui se passe actuellement dans les cours de justice. Cela permettrait en outre d'inclure les personnes qui ont reçu un diagnostic double et souffrent de maladies concurrentes, d'une déficience intellectuelle, d'un déficit cognitif, d'une lésion cérébrale acquise, du syndrome de l'alcoolisation foetale, et ainsi de suite.
Deuxièmement, vous pourriez revoir le Code criminel pour officialiser des options comme les mesures de rechange ou les procédures de déjudiciarisation s'appliquant aux personnes qui ont un problème de santé mentale, mises à part la non-responsabilité criminelle ou l'inaptitude à subir son procès. Encore une fois, cela refléterait mieux ce qui se passe sur le terrain et proposerait une approche plus complète et davantage fondée sur les données probantes, laquelle dissiperait la confusion actuelle qui afflige la réforme du cautionnement, les tribunaux de traitement de la toxicomanie, la déjudiciarisation des personnes souffrant d'un problème de santé mentale ainsi que ce que l'on appelle les tribunaux communautaires ou du logement.
Troisièmement, il serait très utile que la normalisation des pratiques exemplaires soit prise en main et soit mise de l'avant. Par exemple, je proposerais que les investissements fédéraux dans l'aide juridique soient réservés ou versés aux tribunaux qui adoptent les modèles reconnus comme étant efficaces. Cela les encouragerait également à être eux-mêmes efficaces.
Quatrièmement, il faut investir dans la recherche. Honnêtement, les recherches dans ce domaine font cruellement défaut. Le gouvernement fédéral pourrait envisager toute une gamme de possibilités, par exemple faire de la recherche un objectif au moment du renouvellement du mandat de la Commission de la santé mentale du Canada, ou encore envisager de créer une chaire de recherche spécialisée pour le Canada, ou encore, même, investir dans des groupes qui ont déjà une envergure nationale, par exemple l'Association des régimes d'aide juridique du Canada. Ainsi, on pourrait s'assurer que les approches sont fondées sur des données probantes et aussi que l'accent sera mis sur les besoins en santé mentale particuliers des accusés autochtones et des accusées.
Cinquièmement, dans le cadre du programme de recherche, il faudrait examiner des modèles spécifiques de tribunaux de rechange ou de déjudiciarisation. Il existe aujourd'hui de nombreuses approches. Les choses se passent très différemment dans les cours de justice de l'Ontario et du pays. Ces cours sont nombreuses à être très prometteuses. En même temps, certaines cours cherchent à aller au-delà d'un modèle purement thérapeutique et envisagent des modèles comme celui fondé sur les principes du risque, des besoins et de la réceptivité, qui aide à cerner les facteurs sociaux exacerbant les problèmes de santé mentale.
Sixièmement, tout ce qui doit se faire dans tous les domaines dont je viens de parler doit se faire en partenariat avec les intervenants du milieu de la santé mentale et les personnes qui ont fait l'expérience de ce système. Comme on le dit souvent dans ce milieu, « rien ne se fait pour nous sans nous ». Les intervenants de cette collectivité sont les mieux renseignés sur leur handicap et leur expérience, et ils devraient être au coeur de quelque mouvement de réforme que ce soit.
Merci.
Merci beaucoup aux membres du Comité de m'avoir invité.
L'Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique est la plus ancienne et la plus importante organisation de défense des libertés civiles et des droits de la personne du pays. Nous oeuvrons sur la scène fédérale et la scène provinciale afin de soutenir, défendre, faire respecter et protéger les droits et libertés de la personne au Canada. Nous nous intéressons depuis très longtemps au dossier de l'aide juridique. En fait, le tout premier exposé de principe que notre conseil d'administration a adopté, en avril 1963, portait sur l'aide juridique dans le système pénal. Dans notre rapport, entre autres recommandations, nous faisions valoir quelque chose qui était nouveau, à l'époque, c'est-à-dire le fait que l'aide juridique était une responsabilité du gouvernement. Nous demandions un régime global d'aide juridique, qui serait garanti par la loi et ne dépendrait pas de la bonne volonté des avocats, comme c'était le cas jusqu'alors au Canada. Nous avons continué à défendre ce dossier pendant les 50 années qui se sont écoulées depuis.
J'aimerais revenir à une question que Mme Khalid a posée aux témoins représentant le ministère de la Justice, ici même, en décembre: pourquoi d'abord offrons-nous un service d'aide juridique?
La position de l'Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique, c'est qu'il faut respecter certains préceptes fondamentaux si l'on veut que la démocratie soit efficace pour tous; ces préceptes fondamentaux comprennent l'égalité devant et selon la loi ainsi que la protection égale de la loi. Ce principe entraîne implicitement un second précepte, c'est-à-dire qu'une même loi s'applique de la même façon aux riches et aux pauvres, aux faibles et aux puissants, ce qui veut dire, plus précisément, que les pauvres ne doivent pas se voir refuser un accès égal à la protection de la loi du fait qu'ils n'ont pas les moyens financiers d'y accéder.
Nous pensons — et nous ne sommes pas les seuls à le penser — que l'aide juridique est un des fondements de la règle de droit. Malheureusement, nous sommes très loin de ces idéaux, comme d'autres témoins vous l'ont déjà dit. Cinquante ans se sont écoulés depuis que nous avons présenté notre première déclaration de principe et, malgré de nombreux progrès et la mise sur pied de régimes d'aide juridique un peu partout au pays, nous sommes en pleine crise, en ce qui concerne l'accès à la justice, comme l'ont souligné nos collègues de l'Association du Barreau canadien, une crise provoquée par le sous-financement, un méli-mélo de différences entre les provinces, le fractionnement des affaires, lequel fait en sorte que les gens pauvres ou marginalisés qui font face à des problèmes juridiques très complexes ne peuvent obtenir de l'aide que pour un aspect, mais pas pour un autre. Tout cela a des répercussions disproportionnées sur les femmes, les personnes handicapées, les membres des communautés ethniques, les Autochtones et les nouveaux immigrants, tous des groupes surreprésentés au sein de la population à faible revenu.
Comme je l'ai déclaré l'an dernier devant le comité sénatorial qui étudiait le problème de la lenteur du système judiciaire, le montant en dollars constants consacré à l'aide juridique en Colombie-Britannique, ma province natale, avait diminué de 40 % depuis 1995. Je répète, 40 %. En 2002, la Colombie-Britannique a réduit de 38 % le financement de l'aide juridique et mis fin aux activités d'un grand nombre de bureaux et de cliniques d'aide juridique de la province. Pour s'en sortir avec le budget réduit qu'elle a reçu, la Société d'aide juridique de la Colombie-Britannique a dû resserrer ses critères d'admissibilité, ce qui a eu pour conséquence une augmentation du nombre des personnes qui se représentaient elles-mêmes. À l'heure où on se parle, le seuil d'admissibilité en Colombie-Britannique est un revenu de 18 000 $ pour une personne ou de 36 000 $ pour une famille de quatre personnes. Comme vous avez entendu d'autres témoins le dire, c'est extrêmement difficile, voire... Il est impossible qu'une personne qui gagne 18 000 $ par année puisse payer un avocat qui la défendrait comme il faut dans le cadre d'un procès criminel, sans parler des poursuites civiles. À la même époque, les services en matière de droits des pauvres ont été réduits. Tous les services touchant le logement locatif, les prestations d'invalidité ou les prestations d'aide sociale ont été coupés, et la plus grande partie des services en matière de droit de la famille ont en même temps été coupés. En ce qui concerne le droit de la famille, par exemple, les services d'aide juridique en droit de la famille approuvaient 15 000 dossiers, avant ces coupures; par comparaison, l'an dernier, 3 800 dossiers ont été approuvés en Colombie-Britannique.
Vous avez entendu parler du réseau des cliniques juridiques communautaires de l'Ontario, et vous avez reçu ici des témoins représentant ces cliniques, notamment Me Avvy Go. Il n'y a plus aucune clinique de ce genre en Colombie-Britannique. Elles ont complètement disparu. Nous comptions autrefois 14 bureaux d'aide juridique communautaires et 14 bureaux d'aide juridique pour les Premières Nations. À un moment donné, il a fallu regrouper les services dans sept bureaux, puis il a fallu se contenter d'un seul bureau pour toute la province de la Colombie-Britannique, bureau situé à l'extérieur de Vancouver.
Qui a tenté de prendre la relève? Les avocats, qui ont financé, par le truchement de la Fondation du droit, un petit réseau communautaire d'avocats en herbe qui fournissent des services de première ligne en donnant des renseignements de nature juridique, sans toutefois donner d'avis juridique.
Tout cela est admirable, et c'est important, mais ça n'a rien à voir avec le financement public des services d'aide juridique axés sur les droits des pauvres, le droit de la famille, et ainsi de suite. Les membres de ce réseau ont beau déployer tous les efforts possibles et avoir toutes les compétences voulues, ils ne sont pas à la hauteur de la tâche titanesque qui n'est plus assumée par personne depuis que les services ont été coupés.
Au total, chaque année, les services fournis de façon bénévole et par charité par les avocats de la Colombie-Britannique représentent plusieurs millions de dollars, mais ce n'est tout simplement pas suffisant. L'augmentation prévue cette année dans le budget fédéral a apporté un certain soulagement, mais, avec tout le respect que je dois au gouvernement, il faut admettre que 88 millions de dollars sur cinq ans, pour 13 administrations, ce n'est vraiment pas grand-chose.
En ce qui concerne les recommandations — je veux en arriver là, nous pourrons peut-être parler d'autres sujets pendant la période des questions —, nous croyons que votre comité devrait recommander au gouvernement fédéral de reprendre son rôle de leader et annoncer ses couleurs relativement à la fourniture de services d'aide juridique au Canada.
En 2011, la première recommandation de la Commission d'enquête publique sur l'aide juridique de la Colombie-Britannique que nous avons appuyée — elle avait été formulée par Leonard Doust, c.r. — visait à faire reconnaître les services juridiques comme étant des services essentiels. On ne doit pas penser que les services juridiques sont superflus dans le cas des personnes qui ne peuvent pas raisonnablement se payer les services juridiques dont elles ont absolument besoin pour combler leurs besoins de base. Il ne faut pas considérer que c'est pour ces personnes un luxe ou un service d'appoint. Il s'agit plutôt d'un volet essentiel, dans une société juste. Le juge en chef de la Cour suprême du Canada a dit la même chose; il a dit que les services d'aide juridique offerts aux Canadiens à faible revenu étaient des services publics essentiels. Il faut les voir ainsi.
Dans le même ordre d'idées, nous réitérons notre soutien aux recommandations formulées en Colombie-Britannique à ce moment-là, c'est-à-dire qu'il faudrait actualiser les seuils d'admissibilité à l'échelle du pays. Vous avez entendu de nombreux témoignages sur les écarts entre les seuils d'admissibilité. Nous sommes d'avis que les paramètres d'admissibilité devraient être fondés sur une mesure statistique et déterminée de la pauvreté, par exemple la mesure du panier de consommation. Quant aux gens qui se retrouvent pris entre deux chaises, en raison du fossé dont vous avez entendu parler, l'aide juridique devrait être fournie à un groupe de personnes que l'on appellerait « les travailleurs pauvres », en fonction d'un montant équivalant au maximum à 200 % de cette mesure du revenu ou d'un système de cotisations à échelle mobile. Cela pourrait être défini province par province.
Nous prions fortement le Comité de recommander que le gouvernement fédéral en revienne à sa première position et qu'il finance un service d'aide juridique en matière pénale ou en assure 50 % des coûts. Il faudrait aussi que l'aide juridique en matière civile ne fasse plus partie du transfert canadien en matière de programmes sociaux et qu'elle soit traitée de façon distincte, comme l'aide juridique en matière pénale, ce qui nous permettrait de nous assurer que le service est offert de façon uniforme dans toutes les provinces; cela veut dire évidemment que nous allons collaborer avec nos homologues provinciaux.
Nous pensons qu'il faut un engagement ferme à l'égard du financement du droit de la famille et des droits des pauvres. Me Govender, du Fonds d'action et d'éducation juridiques des femmes de la côte Ouest, a parlé de manière éloquente des problèmes qui s'accumulent lorsque les services de base en droit de la famille ne sont pas couverts lorsqu'une situation de violence l'exigerait, et elle a également expliqué que l'intérêt public et l'intérêt supérieur des enfants exigent que ces besoins soient mieux comblés qu'ils ne le sont maintenant.
Nous sommes en faveur de la recommandation de l'Association du Barreau canadien, qui voudrait définir des normes nationales pendant les discussions sur le financement qui auront lieu avec les autres administrations du Canada, et nous sommes aussi d'accord avec les réserves qu'elle a exprimées. Nous voulons être certains que les normes permettront de faire un pas en avant plutôt qu'un pas en arrière. Je sais que les représentants de l'Ontario — et je ne veux pas leur couper l'herbe sous le pied — vont se plaindre des défauts de l'aide juridique de leur province, mais cette aide est de loin meilleure que celle qui est offerte par exemple en Colombie-Britannique, où j'habite. Il est certain que nous ne voulons pas revenir en arrière. Nous aimerions que les normes nous permettent d'avancer.
Je vais rapidement conclure en formulant quelques recommandations de plus.
Je ne m'étendrai pas sur le sujet, mais les peines minimales obligatoires, entre autres, imposent un lourd fardeau aux intervenants du système d'aide juridique. Comme vous l'avez entendu dire, les gens ne peuvent plus plaider coupables ou préfèrent ne pas plaider coupables pour réduire la durée du procès ou éviter un procès, et tout cela, en raison des peines minimales obligatoires. Nous savons que le gouvernement étudie déjà la question, et le Parlement le fera lui aussi.
Nous sommes également en faveur du maintien de l'engagement, à ce moment-ci, en particulier, et d'une augmentation de l'engagement à assurer des services d'aide juridique aux immigrants, et en particulier aux réfugiés, étant donné que les droits de la personne sont ici très sérieusement menacés.
Pour terminer,nous pensons que, pour améliorer l'aide juridique à l'échelle du pays, il faut nécessairement se pencher sur l'ensemble des services qui peuvent être fournis.
En Ontario, un réseau de cliniques juridiques communautaires offre un certain type de service. Il y a des avocats de service dans les tribunaux pénaux, ce qui n'est pas très répandu dans les autres provinces. Bien sûr, il existe un autre modèle qui consiste à accorder un certificat, un renvoi ou un contrat à des avocats de pratique privée. Toutes ces mesures, ensemble, permettront de s'assurer qu'un nombre bien plus élevé de citoyens auront accès à l'avenir à des services d'aide juridique.
Merci beaucoup.
Merci beaucoup, Me Paterson.
Nous passons maintenant aux questions. Nous donnons la parole à M. Nicholson.
Merci beaucoup.
Merci, messieurs, d'avoir comparu ici aujourd'hui. C'était très intéressant.
C'est agréable de recevoir un représentant de l'Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique. Je me souviens très clairement du jour où j'ai invité des représentants de l'Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique alors que j'étais étudiant à l'Université de Windsor, au milieu des années 1970. L'Association était représentée à l'époque par une sorte de porte-parole — j'ai son nom sur le bout de la langue — qui était une véritable vedette. C'était, honnêtement, avant la Charte. Je me souviens que nous avions parlé de la Déclaration canadienne des droits.
Merci beaucoup de vos commentaires.
Je m'adresserai à vous d'abord, monsieur Paterson. C'est très inquiétant. Vous avez parlé de certains des témoignages que nous avons entendus touchant le droit de la famille. Vous avez donné des statistiques. À l'échelle de la province, vous avez dit, je crois, qu'en un court laps de temps on est passé de 10 000 dossiers à environ 3 600.
Quel est le problème du côté du droit de la famille? La plupart des avocats vous diront — et j'en ai moi-même fait l'expérience — qu'il n'y a rien de plus traumatisant que d'avoir à faire face aux problèmes qui se présentent dans le cadre du droit de la famille. J'ai rencontré bien des gens qui me semblaient bien plus profondément touchés, honnêtement, que des gens qui étaient passés par le système de justice pénale, même si cette expérience est aussi traumatisante. Pourtant, nous entendons toujours dire que, peu importe la raison, le droit de la famille n'arrive tout simplement pas à ses fins.
Quelle est l'excuse? Quels sont les problèmes? Que pensez-vous des raisons pour lesquelles ce secteur en particulier semble en si mauvaise posture.
Merci, monsieur Nicholson. Je suis heureux d'apprendre que les personnes qui m'ont précédé dans les rangs de l'Association ont pu jouer un rôle dès le début de vos études de droit. L'Association existe depuis un certain temps déjà.
Parlant de l'expérience de la Colombie-Britannique, je crois que ce qui s'est passé, c'est que, lorsque le budget de l'aide juridique a été coupé, comme vous l'avez entendu, la Société d'aide juridique a dû donner la priorité aux branches du droit qui s'appuyaient sur des droits constitutionnels, ou, du moins, les branches du droit pour lesquelles les droits constitutionnels avaient déjà été établis. Pour être en mesure de maintenir certains services, il a fallu en couper d'autres.
Les statistiques que j'ai vous ai présentées viennent des rapports annuels de la Société d'aide juridique. Je serais étonné d'entendre qu'aujourd'hui, il y a eu en Colombie-Britannique cinq fois moins de problèmes liés aux droits de la famille qu'en 1990. Je soupçonne qu'il y en a probablement toujours autant.
Est-ce qu'il vous semble que les provinces qui cherchent des façons de moins dépenser vont couper d'abord dans la réfection des routes ou dans d'autres secteurs ou est-ce que c'est le droit de la famille qui sera le premier touché?
Eh bien, il est certain que, en Colombie-Britannique, lorsque d'importantes compressions budgétaires ont ciblé l'aide juridique, dès 2002, environ — et je parle de compressions véritables, d'un saccage —, je crois que le gouvernement a imposé des compressions ailleurs, en même temps.
Il y a quelques mois, la Cour suprême a dû trancher une affaire touchant les compressions dans le secteur de l'éducation. Pendant les périodes d'austérité, les soins de santé de la Colombie-Britannique ont également subi des coupures.
Je ne crois pas que le droit de la famille est le seul secteur visé, mais dans le contexte de votre étude, dans le contexte de l'aide juridique, il semble arriver en première place.
Les services en matière de droits des pauvres ont eux aussi été coupés. On a déjà compté en Colombie-Britannique 40 000 personnes s'étant prévalues d'un service lié aux droits des pauvres. En un an, on est passé de 40 000 à zéro. Tous ceux qui avaient un problème, ceux qui risquaient de perdre leur logement, ceux qui subissaient les conséquences d'une mauvaise décision d'un bureau d'aide sociale, ceux qui s'étaient vu priver sans justification des prestations, ceux qui étaient touchés par une mauvaise décision du RPC concernant les prestations d'invalidité, tous ceux-là se retrouvent aujourd'hui sans possibilité d'accès à une aide juridique.
Merci beaucoup de cette réponse.
Me Fritsch, merci beaucoup de votre exposé. Vous avez parlé d'une étude menée par Aide juridique Ontario. Vous y avez participé, n'est-ce pas?
Oui, je dirige depuis environ quatre ans l'élaboration de la stratégie en matière de santé mentale d'Aide juridique Ontario.
Merci de votre témoignage.
Vous avez dit que tout ce que le gouvernement fédéral fait, il doit le faire avec les intervenants du milieu de la santé mentale, mais je crois que vous voulez également parler de collaboration avec les provinces, étant donné que les soins de santé relèvent des provinces.
En gros, ce que je crois, c'est qu'il semble y avoir une vague d'opinions et une reconnaissance générale selon lesquelles tous ces types de programmes de santé mentale, de déjudiciarisation et de places pour libérés sous caution sont autant de bonnes choses. Tout le monde veut les soutenir. Ce que je vois, cependant, c'est un manque de coordination. Je suis impatient de préciser ici aujourd'hui que, étant donné que vous envisagez d'augmenter l'investissement dans l'aide juridique, comme je l'espère, c'est une possibilité dont on doit profiter. Je crois qu'un peu de vision et de leadership à cet égard peut aider à faire en sorte que le tout soit supérieur à la somme des parties.
Tout le monde veut faire ce qui s'impose, essaie de bien faire les choses, innove et a hâte d'améliorer le système. Il y a beaucoup de soutien à cet égard. Je crois que ce qui nous manque maintenant, c'est de la coordination et de la cohérence de la part des gouvernements fédéral et provinciaux et dans le cadre des systèmes de soins de santé et d'autres systèmes de soutien social provinciaux.
Je vois qu'il est possible qu'un programme cohérent découle de nos travaux, alors qu'il s'agit maintenant d'interventions ponctuelles. Chaque tribunal et municipalité essaie de bricoler quelque chose, mais ce sont des efforts très localisés, et il revient souvent aux personnes d'agir. Je laisserais entendre que, à l'heure actuelle, les programmes manquent probablement de ressources. Un peu plus d'investissement à cet égard assorti davantage d'un cadre ou d'une structure aiderait les intervenants à atteindre leurs objectifs.
Une des choses que vous avez dites dans votre témoignage était qu'on doit souvent bricoler quelque chose avec les ressources locales. Plus tard dans votre témoignage, vous avez dit qu'il devrait y avoir davantage de coordinations de pratiques exemplaires partout au pays. Je comprends que, selon vous, c'est un des aspects du leadership que pourrait exercer le gouvernement fédéral.
Oui. Si vous regardez le cadre législatif prévu par le Code criminel, je crois qu'il y a une belle occasion de s'assurer qu'il représente mieux ce qui se passe réellement sur le terrain. Actuellement, c'est un genre de solution bancale. Tout le monde essaie de trouver la façon de détourner du système des personnes souffrant d'une maladie mentale, à moins qu'elle ne soit grave et chronique. Nous savons que criminaliser et punir leur invalidité ne produira pas de bons résultats. Elles font de leur mieux.
Ce que j'ai laissé entendre, c'est qu'il y a une possibilité de faire en sorte que les dispositions législatives qui correspondent aux pratiques réelles utilisées actuellement. Si vous faites cela, vous exploiterez davantage le potentiel du système. Vous augmenterez considérablement son efficacité, en éliminerez beaucoup d'incertitude et réduirez énormément son caractère aléatoire.
Si vous lui donnez ce type de structure, de certitude et de vision, alors vous pouvez le modifier et concevoir des plans à long terme au lieu d'essayer de bricoler un programme d'une année à l'autre. Ce qui arrive souvent, c'est qu'un juge, un procureur de la Couronne ou un avocat de la défense particulier joue un rôle de leadership local dans le système, et s'ils s'en vont, le programme peut les suivre.
Je crois qu'une occasion exceptionnelle s'offre ici. Du point de vue du gouvernement fédéral, vous pouvez vous occuper des dispositions du Code criminel. Vous pouvez élargir ce que nous voulons dire par un trouble mental accepté aux fins de déjudiciarisation et de soutien au cautionnement. Je crois qu'il faut financer d'autres recherches. J'aime l'idée de l'analyse comparative; c'est une excellente idée. En Ontario, je vois qu'il y a 52 tribunaux, et les 52 font quelque chose de différent. Ce serait bien d'établir une certaine normalisation entre eux.
Merci, Me Fritsch, d'être venu témoigner aujourd'hui. C'est très bon de vous voir.
Je crois que vous avez mentionné dans votre témoignage qu'une personne sur deux dans le système de justice pénale souffre d'une maladie mentale. Cette statistique est-elle plus élevée en ce qui concerne les personnes qui utilisent les services d'aide juridique?
C'est difficile à mesurer. Si vous examinez la littérature et les études qui ont été effectuées, vous trouverez toutes sortes de statistiques. Ce qu'elles montrent toutes, c'est qu'une portion très importante des personnes accusées au criminel ont en quelque sorte un problème de santé mentale, un problème de toxicomanie ou les deux. Au sein de l'aide juridique, et encore une fois il est difficile de le mesurer, les chercheurs ont trouvé que pas moins d'un client sur trois, sinon un sur deux, qui reçoit un certain type de service de représentation au criminel, a des problèmes de santé mentale ou de toxicomanie. Alors il s'agit d'une très très grande proportion.
Si vous envisagez de procéder à un investissement dans l'aide juridique, si vous cherchez à aider un groupe de personnes, un groupe prioritaire composé de personnes particulièrement vulnérables et pour qui nous pouvons faire un meilleur travail, il faut choisir un de ces groupes. Je crois qu'il y a un rendement énorme du capital investi dans le financement de la défense de ces clients parce qu'une grande partie de cette défense est maintenant liée à des déterminants sociaux de santé, au logement, au revenu, à l'éducation, et ainsi de suite. Un peu d'investissement dans l'aide juridique et dans ces clients, à mon avis, aide énormément.
Comme il s'agit d'une grande population, on aurait les ressources nécessaires pour régler de nombreux problèmes — le côté du droit civil et celui du droit de la famille — si nous cherchions à traiter davantage le problème comme un problème de santé plutôt que quelque chose que seul le système de justice pénale peut régler.
Nous avons affaire au gouvernement fédéral et devons proposer des recommandations. Pourriez-vous préciser vos réponses concernant des modifications officielles du Code criminel du Canada, et quelle serait la façon, selon vous, d'apporter ces modifications?
Certainement. À l'heure actuelle, en pratique, une personne accusée ayant un problème de santé mentale ou de toxicomanie se présente devant le tribunal, et il y a tout un éventail d'options de déjudiciarisation potentielle qui peuvent être offertes à la personne, au moyen d'un cautionnement, d'un tribunal de santé mentale, d'un tribunal de traitement de la toxicomanie ou d'un tribunal de déjudiciarisation. On parle de tribunaux du logement ou de tribunaux communautaires dans certaines circonstances, mais il y a un très large éventail d'options possibles.
Actuellement, ce que prévoit le Code criminel est très restreint. Il ne s'adresse pas à cette majorité de clients ayant un problème de santé mentale ou de toxicomanie. Il s'adresse au 2 % ou 3 % de la population qui éprouvent un grave problème chronique de santé mentale. La définition d'un trouble mental et la façon dont elle est rédigée à l'article 2 du Code criminel créent un système très complet où les personnes accusées peuvent recevoir des soins, du soutien et des services de santé, etc.
La majorité ne reçoit rien de cela actuellement. Différents tribunaux de santé mentale auront différentes définitions des personnes qui ne devraient pas se retrouver dans le système de justice pénale. Il se peut qu'ils admettent, aux fins de déjudiciarisation, les clients qui, à très peu de choses près, pourraient être reconnus non criminellement responsables ou inaptes à subir un procès. D'autres tribunaux peuvent accepter tout le monde. Il existe actuellement un très grand éventail d'options, mais très peu de normalisations.
Je vois dans le Code criminel des possibilités de faire en sorte que les dispositions législatives reflètent en réalité ce qui se passe sur le terrain; au moyen du leadership du gouvernement fédéral et du travail avec les provinces et d'autres groupes, on peut définir ce que serait la meilleure approche en ce qui concerne la déjudiciarisation, aider à établir certains seuils d'admissibilité, travailler avec les universitaires et d'autres intervenants pour trouver les modèles de déjudiciarisation qui fonctionnent le mieux parce qu'il existe de nombreux modèles de déjudiciarisation différents, et avoir une législation qui reflète tout cela.
À une heure d'automobile de ma propre pratique à Niagara et St. Catharines, endroit d'où je viens, se trouve un palais de justice assez occupé, mais vous pouvez aller dans le comté de Haldimand, où il y en a un autre, plus petit, qui tient peu d'audiences. Je sais que vous parlez des réussites du centre-ville de Toronto, où le besoin est persistant. Il semble que le besoin est constant partout dans la province, mais comment vous occuperiez-vous de ces petits centres si nous lançons un programme ou proposons des recommandations visant l'ensemble du pays?
Je crois qu'une pensée systémique serait en réalité encouragée. À l'heure actuelle, si un tribunal a moins de ressources qu'un autre, les deux peuvent se partager les affaires. Cela se produit déjà à Toronto, où le tribunal se trouvant dans l'ancien hôtel de ville accepte les clients très au-dessus du seuil d'admissibilité, et les autres tribunaux peuvent s'occuper de certains des cas moins graves.
De même, si vous êtes une femme accusée d'une infraction, vous allez à College Park à Toronto, et non pas au tribunal se trouvant dans l'ancien hôtel de ville. Ça va dans les deux sens.
Je crois que si vous voulez avoir un cadre législatif cohérent qui guide ces pratiques, il doit tenir compte des conditions et des ressources locales. En imposant la même norme à tous, je crois que vous encourageriez la normalisation d'arrangements en matière de partage des compétences, alors que, maintenant, il semble que ce soit fait de manière ponctuelle.
Vous avez mentionné que vous avez joué un rôle important dans l'étude de 2016.
Est-il trop tôt pour consulter les résultats de cette étude, afin d'en tirer des recommandations que nous pourrions appliquer ou que notre Comité pourrait émettre?
Je crois qu'une grande partie de la vision ou des objectifs de la stratégie en matière de santé mentale de l'aide juridique seraient aussi des objectifs que vous pourriez atteindre en suivant certaines des recommandations que je fais ici aujourd'hui. Par exemple, cette stratégie porte sur la valeur d'avoir une continuité de la représentation juridique d'un client. Si la personne qui vous représente change constamment, vous devez raconter votre histoire sans cesse. C'est traumatisant en soi. En outre, une personne qui est en mesure de vous suivre dans le système est davantage capable de vous aider lorsque vous en avez besoin. Elle connaît déjà votre histoire. Elle sait ce qui a fonctionné ou non par le passé. Elle connaît les obstacles auxquels vous faites face.
En ayant une sorte de système cohérent ou mieux défini, vous obtenez les types d'avantages qui en découlent. De même, je pense qu'en investissant dans ces types de programmes, vous leur assureriez beaucoup plus de permanence. Il est beaucoup plus facile de prévoir des ressources à cet égard et d'aider ces programmes à prendre de l'ampleur que de ne pas s'en occuper comme s'ils n'étaient que de petits efforts du passé.
Je pense que vous avez lu le rapport; beaucoup de choses qui y figurent en ce qui concerne la vision et les objectifs seraient le même genre de choses que ces réformes pourraient entraîner.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Me Fritsch, je vais commencer par vous. Je veux vous remercier d'avoir rappelé au Comité que ces problèmes ne se produisent pas en vase clos ni de façon compartimentée et particulièrement que quelque chose comme la santé mentale touche de nombreux secteurs de politiques. Vous avez mentionné qu'elle relève des soins de santé. Il y a les déterminants sociaux de la santé et les réformes dont notre système de justice pénale a besoin, et il semble s'agir d'une notion difficile à appréhender lorsqu'on s'attache à ces cas très particuliers.
Dans votre échange avec M. Bittle, celui-ci a mentionné le fait que le Comité veut faire certaines recommandations concrètes au gouvernement, et dans votre discussion avec M. Nicholson, vous avez parlé du cadre et de la structure.
J'aimerais vous demander particulièrement une chose: lorsque nous ferons notre recommandation au gouvernement fédéral en accordant une attention particulière aux personnes qui ont des problèmes de santé mentale, comment le gouvernement fédéral peut-il agir de manière concrète afin de s'assurer que l'aide juridique répond adéquatement aux besoins de ces personnes?
Je suppose que si vous adoptez l'approche qui consiste à envisager la situation sur le plan de la vision ou de ce que nous voulons accomplir avec la recommandation, vous pouvez penser à des choses comme peut-être l'affectation de fonds.
Je crois que nous pourrions faire beaucoup de choses avec un investissement minime dans ce groupe particulier de personnes accusées. Si vous liez ces fonds à des modèles qui sont déjà efficaces, vous aurez établi une norme que les tribunaux peuvent essayer de respecter. Pourquoi ne pas avoir des indicateurs de rendement? Pourquoi ne pas établir des cibles? Pourquoi ne pas élaborer des modèles idéaux, peut-être plusieurs, qui fonctionneraient dans différents contextes, différentes sphères de compétence et différents groupes de clients? Les accusées et les accusés autochtones, par exemple, ont des besoins en matière de santé mentale très différents des autres.
Je crois qu'en adoptant ce rôle de leadership, en établissant ces types de normes, que ce soit dans le cadre de politiques ou en les liant au financement, vous aideriez à encourager tout le monde à passer à la prochaine étape qui consiste à penser à ce qu'on fait de manière un peu plus systématique et un peu plus cohérente. Je crois que cela faciliterait la tâche aux provinces au moment où elles veulent aider à soutenir également ces programmes. S'il est presque certain qu'ils seront mis en oeuvre, je crois qu'il sera beaucoup plus facile de décrire un système qui lie les soins de santé aux palais de justice. Cela devient beaucoup plus simple d'imaginer différents types de travailleurs pouvant offrir des services directement dans le palais de justice où se trouvent ces clients. Ces types de choses, selon moi, peuvent se produire.
Je crois également que, avec un peu de leadership à l'égard des meilleurs modèles et si vous les liez à des mesures incitatives et à du financement, etc., vous augmenteriez beaucoup l'efficacité, honnêtement, et vous pourriez vous assurer qu'on dépense l'argent le mieux possible.
Merci beaucoup.
Monsieur Paterson, je suis un compatriote de la Colombie-Britannique. Bienvenue à Ottawa. J'apprécie le témoignage que vous venez d'offrir.
J'examinais le rapport de l'Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique intitulé Justice Denied, ce qu'on pourrait traduire par « Déni de justice ». Dans le rapport et dans certaines données probantes que nous avons entendues au Comité, il a été noté que des rapports de l'Australie, du Royaume-Uni et des États-Unis « ont estimé que chaque dollar dépensé en financement de l'aide juridique peut générer des économies pour le gouvernement de l'ordre de 1,60 $ à 30 $ ». Votre témoignage reflétait cette information concernant le rendement du capital investi.
Ma question va dans le même sens. Dans les importants transferts aux provinces, il y a des paiements de péréquation fiscale, le Transfert canadien en matière de santé et le Transfert canadien en matière de programmes sociaux. Lorsque nous envisageons de faire des recommandations au gouvernement concernant une affectation de fonds particulière, envisagez-vous un type de cadre législatif pour ce genre de financement afin qu'il soit similaire au Transfert canadien en matière de santé, lequel comporte des conditions qu'on doit respecter? Pouvez-vous seulement nous dire de quoi il devrait avoir l'air?
Une façon d'y arriver serait que le gouvernement fédéral adopte une disposition législative. Vous entendrez peut-être les provinces dire qu'elles ne préfèrent pas cette approche. Je crois que le gouvernement fédéral peut exercer du leadership à bien des égards dans le cadre de conversations, de discussions et de négociations avec les provinces — entre procureurs généraux et entre ministres de la Justice — afin d'essayer, par exemple, de définir des normes nationales et ces types de choses. Nous avons observé cela dans d'autres secteurs à compétences partagées dans lesquels on a utilisé d'autres voies que celles des dispositions législatives. Nous ne nous opposerons certainement pas si on utilisait la voie législative et si l'argent y était expressément lié, mais nous ne nous opposerions pas non plus à un système efficace dans lequel le gouvernement fédéral a utilisé sa force de persuasion et son pouvoir de dépenser dans le but de montrer un certain leadership dans ce domaine de compétences partagées.
Il y a évidemment des questions concernant le partage des compétences, mais essentiellement, tout Canadien qui doit se présenter devant les tribunaux devrait faire l'objet d'un traitement uniforme. Les gouvernements doivent travailler ensemble pour s'assurer que, dans les différentes régions du pays, on reçoit les services dont on a besoin, d'une manière adaptée, laquelle peut varier d'une région du pays à une autre, et qu'on porte une attention particulière aux besoins spéciaux de groupes précis comme ceux qu'a mentionnés M. Fritsch, de même qu'aux besoins des peuples autochtones et des autres.
La difficulté que pose une analyse comparative nationale, qu'elle soit faite de manière informelle ou dans le cadre de dispositions législatives, est qu'elle donne lieu à des types d'approches universelles. Nous reconnaissons pleinement qu'il peut s'agir d'un exercice difficile, mais nous croyons qu'il est possible de le faire d'une manière qui assure un certain leadership à l'échelle nationale. L'Australie a essayé cela, et nous verrons au fil du temps si elle connaît le succès ou non.
Monsieur Paterson, merci d'être venu.
Vous avez mentionné, dans vos recommandations, que vous aimeriez que l'aide juridique soit un service essentiel. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet? Quelle serait la nature de ce service? Qu'est-ce qu'il comprendrait, et comment serait-il financé?
Merci beaucoup de poser la question.
Je peux dire ce que l'Association du Barreau canadien disait, ce que nous soutenons également, soit que des besoins juridiques essentiels, ce sont les besoins ou problèmes juridiques qui compromettent la liberté, la sûreté, la sécurité, la santé et le logement d'une personne ou la capacité de celle-ci de subvenir à ses besoins fondamentaux. Il semble que ce soit un éventail assez large de choses, mais les systèmes d'aide juridique déjà en place comportent à l'heure actuelle des mécanismes pour servir le public. La question tient donc aux normes qu'ils utilisent, aux critères d'admissibilité et aux choses qui sont couvertes? Ce n'est pas comme si les mécanismes n'existaient pas déjà.
Lorsque nous nous occupons d'autres secteurs que nous considérons comme essentiels — l'éducation, la santé, les services d'urgence, etc. —, nous avons des structures en place également à cet égard. Ma réponse est qu'il est un peu difficile de donner... et que je crois que ce qui s'impose n'est pas nécessairement un changement que l'on apporte à la structure que vous mettriez en place dans une province; c'est une hiérarchisation du financement et un changement de compréhension. Comme je l'ai dit dans ma réponse à la question de M. Nicholson — c'est certainement le cas dans notre province — les gouvernements font d'abord des coupures dans l'aide juridique. Le fait de faire de quelque chose un service essentiel ou d'essayer de faire en sorte que cette reconnaissance soit partagée par des gouvernements, que ce soit de façon volontaire ou par d'autres moyens, soutiendrait la proposition selon laquelle l'aide juridique ne serait pas le premier endroit où les gouvernements feraient des coupures en raison des effets en cascade et des coûts qui se répercuteraient sur le Trésor public. Je pense qu'il s'agit davantage d'un changement de mentalité que d'une création de structures.
Merci.
Tout cela semble se résumer à un modèle de financement: qui va payer pour les services, et combien d'argent est disponible? Est-ce le problème le plus important de notre système d'aide juridique actuel?
C'est un problème critique. Je crois que beaucoup d'autres problèmes en découlent. Ce n'est pas uniquement une question de verser plus d'argent dans le système. Toutefois, nombre de problèmes que nous pourrions énumérer, comme le seuil qui est trop bas ou la manière dont le système est administré qui est problématique, pourraient remonter fondamentalement au gouvernement fédéral, particulièrement dans les années 1990. En 1996, le gouvernement fédéral a changé la façon dont il payait des choses, essentiellement en passant d'un partage de 50 % des coûts de l'aide juridique au pénal à une couverture de 20 % du coût. L'argent est un élément capital du système, mais cela ne signifie pas qu'il n'y a pas de questions importantes concernant la façon dont l'argent est acheminé et la meilleure façon de le faire.
Concernant les diverses administrations au Canada, avez-vous connaissance d'autres administrations... ou le modèle de la Colombie-Britannique est-il l'exemple à suivre?
Comme je l'ai dit dans mon témoignage, monsieur, certainement ici en Colombie-Britannique, nous regardons avec envie la situation en Ontario, mais les gens de cette province sont venus témoigner devant vous, et j'appuie sans réserve leur déclaration selon laquelle ils éprouvent eux aussi de grandes difficultés. Si j'avais à indiquer un endroit au Canada qui servirait de modèle aux autres provinces, ce serait l'Ontario. Le seuil d'admissibilité y est plus élevé. Les taux tarifaires sont plus élevés en Ontario, ce qui permet à plus d'avocats de participer à l'aide juridique. Les avocats veulent souvent faire le travail, mais ils n'en ont pas les moyens. Si vous obtenez un contrat de 10 heures en Colombie-Britannique, vous allez en travailler 30. Alors, si vous êtes habituellement rémunéré 80 $ l'heure, vous recevrez 30 $. On fait beaucoup de travail bénévole. Cela se produit aussi en Ontario, mais j'espère certainement que notre province trouvera une façon d'aller de l'avant et de se rapprocher du modèle de l'Ontario où il y a un réseau de cliniques juridiques communautaires. Bien que AJO procède à des coupures relativement à ces cliniques, il existe un réseau dans cette province. Je crois donc que l'Ontario serait le modèle à suivre au pays.
Je crois que vous avez parlé de la perspective d'élargir la nature des services, pour, disons, ajouter le droit de la famille par rapport au droit pénal. Cela n'exacerberait-il pas le problème de financement si vous ajoutiez plus de services d'autres secteurs ou diriez-vous que davantage de financement injecté dans le droit de la famille améliorerait les choses du côté du droit pénal?
Je ne suis pas certain que cela exacerberait le problème de financement. Je pense que le problème le plus important lié aux coûts — et il y a des études qui le montrent — est le coût qui passe du système aux soins de santé, au système pénal et ailleurs dans le système lorsqu'un problème de droit de la famille se transforme en une catastrophe relevant du droit de la famille ou lorsqu'un problème de droit des pauvres avec un propriétaire se transforme en une catastrophe: vous êtes maintenant sans domicile, peut-être que vous avez perdu votre emploi, peut-être que vous recevez de l'assistance sociale, et ainsi de suite.
Nous pensons, et je crois que nombre de vos autres témoins ont également pensé la même chose, que les investissements qui doivent être effectués ici, y compris dans le droit de la famille et le droit des pauvres, vont, dans l'avenir, faire économiser beaucoup plus de deniers publics aux échelons provincial et fédéral.
Merci beaucoup, monsieur McKinnon.
Nous n'avons pas le temps de passer à une série complète de questions. Je me demande si une personne a des questions courtes qu'elle voudrait poser à un de nos témoins avant que nous ne levions la séance.
Monsieur Boissonnault.
J'aimerais vous remercier tous les deux de votre témoignage aujourd'hui.
Me Fritsch, je m'intéresse à l'intersectionnalité entre les personnes qui souffrent de problèmes de santé mentale et de toxicomanie et le système de justice. Avez-vous des statistiques? Et qui est représenté dans ces statistiques? Nous savons, à partir d'autres travaux que nous avons effectués et d'autres données que nous avons, que les populations autochtones et la communauté LGBTQ2 sont surreprésentées.
Que vous indiquent les statistiques que vous avez à votre disposition concernant les personnes qui sont représentées dans cette intersectionnalité entre les problèmes de santé mentale et de toxicomanie et l'endroit où ces deux éléments sont confrontés au système de justice?
Merci beaucoup.
Spontanément, je peux parler de quelques-uns des groupes que vous avez mentionnés. Je vous dirais de consulter une vaste étude effectuée assez récemment par le projet trajectoire nationale, qui a examiné précisément les personnes reconnues non criminellement responsables ou inaptes à subir un procès. Pour autant que je sache, elles font partie des données les meilleures, les plus fiables et les plus complètes que nous ayons. J'ouvre une parenthèse en disant que l'étude s'attache seulement à la population de personnes non criminellement responsables et inaptes à subir un procès. Les chercheurs ont trouvé que de l'ensemble de cette population — encore une fois, seulement les personnes souffrant de problèmes de santé mentale graves et chroniques —, environ 15 % ou 16 % étaient des femmes. De mémoire, environ 3 % étaient des Autochtones.
Cela soulève des questions intéressantes. Une question que le projet trajectoire nationale a soulevée était la suivante: quels sont les différents besoins en matière de santé mentale propres aux femmes? Je crois qu'il y a une belle occasion de se concentrer sur cet aspect. Je crois que très peu de tribunaux, vu que les femmes représentent peut-être un septième ou un huitième de ces personnes non criminellement responsables, sont outillés pour s'assurer que ces personnes reçoivent ces services et la considération dont elles ont besoin.
Par ailleurs, vous avez des accusés autochtones qui sont reconnus non criminellement responsables. À 3 %, il semblerait que ce soit considérablement sous-représentatif des accusés autochtones dans le système de justice pénale. Spontanément, je crois que c'est environ 15 % ou 20 %. À mon avis, je suppose que cela soulève des questions intéressantes au sujet de la raison de cet état de choses. Je ne suis pas certain si on a vraiment effectué une recherche sur ce sujet. Pourquoi ces personnes ne sont-elles pas reconnues non criminellement responsables ou inaptes à subir un procès au même degré? Quelle voie de déjudiciarisation prennent-elles? Offre-t-on des services adaptés à la culture à ces accusés? Existe-t-il des mesures de rechange autres que de se retrouver dans le système psychiatrique?
Ce sont toutes d'excellentes questions. Je crois qu'une partie de ce que le gouvernement fédéral peut examiner dans le cadre de son examen de l'aide juridique serait d'investir dans la recherche qui peut nous aider à répondre à ces types de questions afin que nous puissions adapter et cibler des services en fonction de ces populations vulnérables.
Si un de vous deux peut nous fournir une indication de certaines des lacunes les plus pressantes en matière de recherche qui pourraient être comblées, nous les prendrions en considération au cours de nos délibérations concernant le rapport. Merci à vous deux.
Je crois que nous terminerons la séance sur cette note.
Laissez-moi remercier nos deux témoins d'aujourd'hui.
C'est avec grand plaisir que nous vous avons reçus ici. Vous nous avez fourni des informations très intéressantes qui, à mon avis, nous aideront à rédiger notre rapport. Merci beaucoup à vous deux.
La séance est levée.
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