:
Merci, monsieur le président.
C'est pour moi un plaisir de vous parler ce matin du Programme d'appui aux droits linguistiques, le PADL.
[Traduction]
Comme vous le savez, le PADL découle d'un règlement à l'amiable suivant l'abolition du Programme de contestation judiciaire. L'accord de contribution dont relève le PADL est en réalité fondé sur ce qui était proposé dans l'entente à l'amiable, à quoi viennent s'ajouter de nombreux détails. Il s'agit d'un accord de contribution entre Patrimoine canadien et l'Université d'Ottawa, dont le financement s'élève à 1,5 million de dollars par année. Le mandat du PADL est la clarification et l'avancement des droits linguistiques constitutionnels.
Le rôle de l'Université d'Ottawa — en tant que gestionnaire institutionnel — est essentiellement d'offrir ses services au PADL pour ce qui est des ressources humaines, des finances, des TI, des approvisionnements, de la gestion des risques et de la gestion de crise.
Les membres du comité d'expert du PADL sont nommés par le ministre du Patrimoine canadien. Les nominations sont faites à partir d'une liste fournie par la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, du Quebec Community Groups Network et d'autres organisations canadiennes. Il y a neuf membres à l'échelle du Canada. Cinq d'entre eux sont des avocats, dont l'un est un expert du mode alternatif de résolution de conflits. Les quatre autres membres sont des intervenants communautaires reconnus au sein de leur collectivité. C'est la raison pour laquelle leur nom figurait sur la liste de la FCFA et du QCGN en premier lieu.
Comparativement au rôle de l'Université d'Ottawa, le rôle du groupe d'experts concerne exclusivement le financement. C'est lui qui prend la décision finale quant à savoir qui obtient du financement et qui présente une demande dans le cadre du programme. Le rôle du groupe est très important puisqu'il est complètement indépendant de l'Université d'Ottawa et du gouvernement. Il s'agit d'une entité impartiale et indépendante. Je travaille là depuis six ans, et les délibérations du groupe se sont toujours faites en toute impartialité.
La composante d'information et de promotion du PADL a évolué au cours des six dernières années. Au début, durant les deux ou trois dernières années, nous avons présenté beaucoup d'exposés partout au Canada. Encore aujourd'hui, nous présentons des exposés durant des conférences, l'AGA de notre organisation, etc. Au début, nous avons réalisé beaucoup de consultations. Nous avons fait le tour du Canada, sommes allés dans toutes les régions et avons consulté les organisations qui travaillent auprès des communautés francophones ou anglophones du Québec. Nous avons analysé leurs besoins, pas seulement en ce qui a trait à l'information dont ces communautés avaient besoin en ce qui concerne les droits linguistiques constitutionnels, mais pour savoir ce qu'elles voulaient faire pour promouvoir leurs droits linguistiques constitutionnels.
Au fur et à mesure de nos travaux, la composante liée à l'information et à la promotion a évolué. Aujourd'hui, je dirais que nous misons davantage sur des projets réalisés en collaboration avec des organisations communautaires. Par exemple, l'association provinciale acadienne du Nouveau-Brunswick est venue nous parler d'une campagne qu'elle réalisait à l'échelle de la province pour sensibiliser les Acadiens à leurs droits linguistiques. Elle nous a demandé si cela pouvait nous intéresser. Nous étions bien sûr intéressés. Nous avons fourni notre expertise, parce que, très souvent, ces organisations ne possèdent pas d'expertise juridique au chapitre des droits linguistiques. Nous avons vérifié ce qu'elle produisait avant toute diffusion à la télévision ou à la radio, et nous lui avons aussi fourni des fonds.
La Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants est un autre exemple. Elle veut vérifier l'ensemble des programmes partout au Canada pour connaître le contenu des programmes d'enseignement provinciaux en matière de droits linguistiques, la vitalité des minorités linguistiques, etc. dans les salles de classe. Essentiellement, nous avons accepté de participer à ce projet aussi, bien sûr. Nous réalisons l'étude en collaboration avec la Fédération, nous vérifions la validité du projet et du document final fourni. La Fédération utilise ce document — qui est essentiellement une étude de ce qui manque et de ce qui est positif à l'échelle des provinces en ce qui a trait aux programmes sur les droits linguistiques — et elle va d'une province à l'autre et d'un gouvernement à l'autre pour souligner ce qui va bien et formuler des suggestions d'amélioration. Nous avons aidé la Fédération à réaliser ce projet.
Comme je l'ai déjà dit, la composante liée à l'information et à la promotion a évolué au fil des ans. Nous possédons un site Web qui est très complet. Libre à vous de le consulter. Il regorge de renseignements au sujet de notre financement et tente de définir de façon simple et claire quels sont nos droits linguistiques tout en fournissant différentes façons d'apprendre des choses sur les droits linguistiques à l'intention de différents styles d'apprenants, des apprenants adultes. Dans le cadre de cette composante, nous fournissons 5 000 $ pour faciliter la réalisation d'études d'impact. Le tout passe par le groupe d'experts, qui étudie les nouvelles lois, les nouvelles décisions et l'impact de ces nouvelles lois ou de ces nouvelles décisions sur les collectivités et nos droits linguistiques.
Essentiellement, nous offrons deux autres types de financement: le MARC et les recours judiciaires. Le MARC, soit le mode alternatif de résolution de conflit, concerne la médiation, la négociation, etc. Ce volet est obligatoire et faisait partie de l'entente hors cour. Il faut passer par là avant de pouvoir obtenir des fonds pour aller devant les tribunaux. La résolution de différends dans le cadre d'un litige est une autre composante, mais elle fait partie des procédures judiciaires en tant que telles. Si le juge du procès ou la loi provinciale exige de passer par le MARC, là aussi, nous offrons un financement de 25 920 $ dans chaque cas.
Pour ce qui est des études exploratoires, elles ont lieu vraiment au début lorsqu'une personne ou une organisation n'est pas sûre de ses droits et qu'elle veut un avis juridique. Nous fournissons 5 000 $ pour une telle étude. Pour ce qui est des recours judiciaires, comme vous pouvez le voir, ils sont tous là; ce sont les différents types de financement que nous fournissons.
En ce qui concerne les critères d'admissibilité, quel que soit le financement que nous offrons, il faut être une personne ou un groupe de personnes dont les droits constitutionnels en matière de langue ont pu être violés ou un organisme sans but lucratif dont les membres sont des personnes dont les droits linguistiques constitutionnels ont pu être violés.
Toutes les demandes doivent concerner un droit linguistique constitutionnel, évidemment, parce que notre mandat concerne la clarification ou l'avancement des droits linguistiques constitutionnels.
Pour ce qui est des demandes liées aux recours judiciaires, il doit aussi y avoir une cause type. Une cause type est un dossier qui n'a jamais été tranché devant un tribunal ou qui a été tranché de façon contradictoire par des tribunaux de différentes administrations. Il peut aussi s'agir d'un dossier qui ne s'est jamais rendu devant la Cour suprême du Canada alors qu'il serait utile qu'il le soit. Dans ces situations, le personnel et l'analyste formulent une recommandation relativement à la demande quant à savoir s'il s'agit d'une cause type et si le dossier respecte tous les critères d'admissibilité. Mais, au bout du compte, c'est le groupe d'experts qui examine ces critères d'admissibilité et détermine si le demandeur recevra du financement ou non.
Les prochaines diapositives contiennent des graphiques qui sont assez explicites. La ligne verte représente les demandes reçues, et la ligne rouge, les demandes financées. Comme vous pouvez le voir, nous recevons plus de demandes d'année en année, mais notre financement est resté le même. C'est la raison pour laquelle la ligne rouge tente de tenir le rythme. Au fil des ans — et notre création remonte à décembre 2009 —, nous avons refusé 14 demandes admissibles, qui étaient appropriées, qui respectaient nos critères d'admissibilité. Cependant, faute de financement, le groupe d'experts a dû prendre la dure décision de ne pas offrir de financement dans ces cas.
Dans cette diapositive, la colonne bleue représente les montants demandés par les demandeurs lorsqu'ils se tournent vers nous. La ligne rouge représente les montants que nous avons approuvés. La ligne verte représente le montant réellement dépensé par le demandeur. Je peux seulement vous fournir les données de 51 dossiers clos, parce que, lorsque les demandeurs ferment leurs dossiers, lorsque leur cas est traité, nous leur demandons de nous fournir un rapport financier. Dans ce rapport financier, ils nous précisent quels étaient leurs coûts réels. Je peux seulement vous fournir les données des dossiers complets, parce que je n'ai pas ces données pour les autres dossiers.
J'ai pensé que vous pourriez être intéressés par la prochaine diapositive. Elle contient le nombre de demandes que nous avons financées par domaine du droit linguistique constitutionnel. Le domaine des droits scolaires est celui pour lequel nous avons toujours reçu le plus de demandes, et c'est là où nous consacrons le plus de financement. Par la suite, tout dépend de l'année, mais les dossiers concernent principalement l'égalité linguistique et les droits en matière de communications et de services du gouvernement fédéral et du gouvernement du Nouveau-Brunswick.
La ligne verte représente les droits judiciaires et législatifs.
La diapositive suivante présente les données par type de financement. Chaque couleur représente une année. Vous pouvez voir le nombre de demandes financées par type de financement que nous avons fourni chaque année. Si vous regardez notre dernière année, qui vient de se terminer au mois de mars, vous constaterez que beaucoup de fonds ont été consacrés aux études d'impact et au MARC.
La dernière diapositive concerne les dossiers de MARC. Cette étape est obligatoire en vertu de notre accord de contribution. Cette exigence découle des ententes hors cour avant tout litige. Il y a des exceptions, mais, dans la plupart des cas, les demandeurs doivent passer par là avant que nous puissions leur fournir un financement pour des litiges. La première colonne représente le nombre de demandes que nous avons reçues depuis que nous existons. Nous avons reçu environ 53 demandes et en avons financé environ 39. De ces 39 demandes financées, 18 dossiers sont clos. De ces 18 dossiers clos, 10 se sont retrouvés devant les tribunaux. Les demandeurs se sont tournés vers nous et ont présenté une demande de financement pour un procès. Environ quatre de ces 18 dossiers se sont soldés par un règlement partiel ou complet du problème. Cette diapositive vous montre l'état de la situation relativement aux dossiers de MARC.
Merci de votre attention.
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Bonjour et merci, monsieur le président.
Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant le comité aujourd'hui.
Je suis présentement le vice-recteur adjoint à l'équité, à la diversité et aux droits de la personne à l'Université Laurentienne. Entre mai 2001 et juin 2008, j'ai aussi été le directeur-général du Programme de contestation judiciaire.
J'ai lu que vous avez déjà reçu beaucoup d'informations au sujet de l'ancien programme. Je vais donc vous parler de ma perspective personnelle au sujet de ce programme.
Le Programme de contestation judiciaire était un outil exemplaire et uniquement canadien qui visait à rendre le système judiciaire plus accessible aux citoyens canadiens les plus vulnérables et les plus désavantagés. Selon moi et selon plusieurs autres personnes, le Programme permettait en outre de renforcer la démocratie canadienne en faisant participer les membres de la communauté canadienne les plus désavantagés à la clarification de la Charte canadienne des droits et libertés et de la Constitution.
De plus, c'était un outil peu dispendieux pour le gouvernement et très efficace. Entre 1994 et 2006, plusieurs cas importants et influents ont été subventionnés par le Programme et ont eu un impact profond et positif sur la société canadienne. Je suis très heureux que le gouvernement ait décidé de rétablir le Programme, comme cela a été annoncé publiquement dans l'exposé budgétaire.
Le Programme a été reconnu comme excellent par plusieurs comités de l'ONU ainsi que par Mme Robinson, l'ancienne Haut-commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, lors de sa visite au Canada. Quand elle est allée à Winnipeg — je crois que c'était en 2003 —, elle a noté que l'appui d'un tel programme par le gouvernement canadien était la preuve de son engagement à fournir aux plus désavantagés un meilleur accès à la justice.
C'était là mes commentaires. Je voulais simplement vous faire savoir que ce programme uniquement canadien est un outil nécessaire pour notre société et qu'il est d'une grande valeur.
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D'accord. Merci. En tant qu'avocats, nous nous habituons à nous faire interrompre par les juges lorsque nous sommes devant les tribunaux; j'imagine que l'environnement ici est un petit peu plus amical.
Des voix: Oh, oh!
M. Faisal Bhabha: Du début jusqu'au milieu des années 2000, j'étais avocat et je pratiquais dans un petit cabinet qui se spécialisait dans les droits de la personne et où environ 20 % de mon travail étaient financés par le Programme de contestation judiciaire.
J'aborde le dossier aujourd'hui de deux points de vue; c'est-à-dire en tant qu'avocat qui a déjà travaillé auprès de clients qui ont bénéficié du programme et qui, sinon, n'auraient peut-être pas pu se faire entendre, et en tant qu'avocat qui se consacre principalement à l'enseignement universitaire. En fait, je suis un professeur à temps plein. Je m'intéresse encore à la pratique. J'enseigne. J'effectue des recherches sur l'égalité constitutionnelle, le cadre législatif contre la discrimination et les enjeux liés à l'accès à la justice dans la profession juridique.
Le Programme de contestation judiciaire fournit un financement qui permet à des avocats de faire un travail important qui, sinon, ne serait pas fait. Je parle précisément de la portion du programme liée à l'article 15, soit les droits à l'égalité. De façon très appropriée, le programme fait l'objet d'une évaluation exhaustive et indépendante de ses activités tous les cinq ans. La dernière évaluation a été réalisée en 2004, et il a été déterminé qu'il atteignait ses objectifs de façon économique. Par conséquent, à ce moment-là, l'accord de financement a été prolongé pour cinq autres années, ce qui aurait dû nous mener à 2009.
En fait, en mai 2006, lorsque le Canada a comparu devant le Conseil des droits économiques, sociaux et culturels des Nations unies, tout juste quelques mois avant la fatidique annulation du programme, les observations écrites du Canada au conseil décrivaient le programme comme étant l'une des mesures adoptées par le gouvernement pour promouvoir « les droits à l'égalité des groupes historiquement défavorisés ». C'est donc dire que le gouvernement présentait le programme à l'échelle internationale comme étant quelque chose que nous faisions de façon proactive pour promouvoir l'égalité.
Il ne fait aucun doute que le Programme de contestation judiciaire était essentiel à la promotion des droits à l'égalité au pays. Il a aidé à signer des victoires importantes. Il a aidé à bâtir la jurisprudence liée à l'article 15. En fait, il a rayonné et a aidé à définir le fond et le caractère du pays. Nous bénéficions d'une reconnaissance internationale pour de nombreux principes qui ont découlé de l'interprétation et de l'application par les tribunaux de l'article 15. Le programme était bénéfique pour l'égalité de bien d'autres façons que simplement le fait de permettre de remettre en question des lois et de remporter des victoires devant les tribunaux. Il a fait la promotion de l'engagement juridique de groupes historiquement marginalisés, a accru les occasions liées à l'éducation pour de jeunes avocats comme moi et beaucoup d'autres que j'ai vus et connus dans le cadre de mes activités personnelles et a participé au développement des collectivités. J'aimerais vous parler d'un exemple précis où cela est très évident.
En février 2005, l'African Canadian Legal Clinic de Toronto a mené une consultation nationale pour discuter de la question des certificats de sécurité, qui, à ce moment-là, étaient un enjeu chaud pour bon nombre des membres de communautés marginalisées. La séance a permis de réunir des avocats spécialisés en droit de l'immigration, des avocats de droit constitutionnel, des professeurs de droit, des représentants des communautés arabe et musulmane du Canada, diverses organisations et d'autres groupes s'intéressant aux droits à l'égalité ainsi que des activistes politiques de tout acabit. L'événement a permis de tous nous réunir. J'étais là en tant qu'avocat qui avait relativement peu d'expérience à ce moment-là.
Les intervenants présents ont mis en commun de l'information et des connaissances et ont cerné des stratégies, y compris en ce qui a trait à la meilleure façon de soutenir ce qu'on a appelé The Secret Trial 5 à l'aide d'une activité de remue-méninges. Il s'agit d'une trilogie liée à la question des certificats de sécurité qui, au bout du compte, s'est retrouvée devant la Cour suprême en juin 2006. Le dossier a été tranché en 2007.
En août 2005, une année avant que le dossier se retrouve devant les tribunaux, le travail sur le terrain avait déjà été réalisé par les collectivités qui s'intéressaient au dossier. Plusieurs intervenants ont demandé et reçu du financement de contestation judiciaire pour comparaître, et formuler des arguments sur l'égalité dans le dossier. L'avocat de ces intervenants a joué un rôle central en mobilisant les collectivités, en faisant participer les membres de ces collectivités, en organisant des événements publics, en sensibilisant le public à ce qui se passait devant ce tribunal et en jetant des ponts entre les tribunaux et le public.
Mon cabinet a représenté deux ou trois de ces organisations. J'ai eu l'occasion — en tant que jeune avocat — de travailler sur un dossier lié à l'article 15, un dossier lié à l'égalité, domaine qui, au bout du compte, est devenu une de mes expertises. On était alors à un moment crucial de l'histoire, quelques années à peine après le 11 septembre, lorsque les membres de la communauté arabe et musulmane canadienne avaient beaucoup d'interactions avec le milieu juridique et beaucoup de préoccupations en ce qui a trait à l'application de la loi.
Ce dossier a donné l'occasion aux membres de cette communauté de participer et de s'engager et d'avoir l'impression qu'ils allaient être entendus par le plus haut tribunal. Je n'insisterai jamais trop sur l'importance que cela a eue du point de vue du développement communautaire.
Ce n'est qu'un exemple d'une collectivité précise avec laquelle j'ai interagi, mais je sais que c'était la même chose partout. J'ai consacré une bonne partie de ma vie professionnelle à oeuvrer dans le domaine de l'activisme lié aux droits des personnes handicapées, et j'ai pu constater de quelle façon le Programme de contestation judiciaire a mobilisé les personnes handicapées partout au pays. Peu importe votre position précise relativement à un dossier en particulier, lorsque vous regardez l'impact général du programme pour les différentes communautés et les membres de ces communautés qui travaillent avec les avocats, le processus était constructif. Il a permis de définir la loi, d'habiliter les membres des communautés désavantagées et de créer des ponts entre les détenteurs de l'expertise juridique et ceux qui ont besoin de faire valoir leurs droits juridiques.
J'aimerais souligner deux ou trois choses qu'on pourrait améliorer dans le cadre du programme.
Selon moi, le programme était limité de deux façons importantes. Premièrement, il s'appliquait uniquement à une administration fédérale. Il s'agissait d'une contrainte majeure, et pas toujours une contrainte au niveau de la logistique. En fait, les enjeux qui concernent les préoccupations en matière d'égalité liées aux prestations d'invalidité, aux régimes de bien-être social, à l'éducation et à la santé relèvent tous d'une compétence provinciale. Il était extrêmement frustrant, en tant qu'avocat, de travailler avec des clients et d'avoir à faire une distinction entre les intérêts d'une personne ou d'une communauté qui relevaient de la compétence fédérale ou de la compétence provinciale. C'était totalement illogique. L'interaction entre le fédéral et le provincial — comme vous le savez tous — n'est pas toujours aussi simple que notre Constitution le voudrait bien, surtout vu les expériences vécues par ceux qui ont des démêlés avec la justice.
La deuxième contrainte est la limite découlant du fait que l'égalité était seulement abordée du point de vue de l'article 15. Au cours des 10 dernières années, si vous regardez la jurisprudence de la Cour suprême du Canada, vous constaterez que la question de l'égalité est abordée dans bon nombre d'autres domaines de la Charte, et plus précisément les articles 7 et 2. Ce sont des domaines où on invoque les droits fondamentaux et où l'on interprète ces autres droits sous l'angle de l'égalité.
Je demande instamment que tout programme futur ne s'appuie pas sur des règles ou un mandat trop restrictifs quant à la définition des arguments. Cela pourrait limiter indûment la possibilité qu'ont les avocats de vraiment travailler avec leurs clients pour promouvoir ce que devrait être le vrai mandat du programme. Je vous prie donc de réfléchir de façon plus générale et souple à la teneur, à l'avenir, des arguments liés à l'égalité et de faire preuve de souplesse à ce sujet.
Merci de m'avoir accordé votre temps.
Je suis justement Acadienne. Je suis née au Nouveau-Brunswick et j'ai vécu en Nouvelle-Écosse comme Acadienne pendant cinq ans. J'ai même vécu en Alberta, en Colombie-Britannique et au Manitoba. Je vis maintenant en Ontario. J'ai moi-même vécu les différences entre les communautés. Non seulement il y a des différences entre les francophones à l'extérieur du Québec, mais il y en a aussi, comme vous l'avez mentionné, entre les anglophones au Québec et les francophones à l'extérieur du Québec.
Je ne connaissais pas beaucoup la réalité des anglophones au Québec avant de commencer à travailler au PADL. Au cours des six dernières années, en les rencontrant et en les consultant, j'ai pu connaître les défis auxquels ils font face. Je vais vous donner un exemple de défis différents pour les francophones.
En Ontario, il y a la Loi sur les services en français, qui est mise en oeuvre adéquatement par le gouvernement. Au Nouveau-Brunswick, il y a des droits constitutionnels que d'autres provinces n'ont pas en matière linguistique. On peut comparer ces deux provinces avec la Colombie-Britannique ou l'Alberta, où il y a une plus petite minorité de francophones. La loi y a moins de force et le gouvernement a moins la volonté de mettre en oeuvre des lois afin que les communautés puissent davantage vivre en français.
Il y a donc beaucoup de différences entre les provinces anglophones. C'est pour cela que les projets en collaboration avec les partenaires sont tellement importants. Ce sont eux qui connaissent bien leur réalité. Les projets que nous mettons sur pied pour eux tiennent compte de leurs besoins.
La réalité des anglophones au Québec est tout à fait différente. La langue anglaise n'y est pas en danger. Ce n'est pas le même défi qui se pose, mais cette communauté en tant que telle est en danger parce que les anglophones quittent le Québec. Il y a une tout autre approche vis-à-vis du problème, de sorte que l'appui du PADL est également très différent. L'approche des francophones et celle des anglophones par rapport à la revendication de leurs droits linguistiques constitutionnels sont complètement différentes.
Pour répondre à votre question, je dirais qu'il y a effectivement des différences partout.
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Merci à tous des exposés très utiles que vous avez présentés.
S'il vous plaît, je voudrais commencer par M. Bhabha. Je vous invite à nous donner plus de détails sur les deux excellentes recommandations que vous avez adressées à notre Comité.
Si je puis les résumer, il semble que la première concernait votre préoccupation à l'égard du fait que le programme — le PCJ — était seulement appliqué aux secteurs de compétence fédérale. Je songe par exemple aux tribunaux des droits de la personne d'une province en particulier qui, à l'ère d'Internet, se sont rapidement fait connaître partout au pays, alors on s'attendrait à ce que cela accélère l'adoption de votre recommandation. Par contre, les politiques fédérales-provinciales brutes pourraient expliquer pourquoi les contestations par le gouvernement fédéral du financement des lois d'une province en particulier pourraient ne pas être très attrayantes. Je voudrais que vous nous donniez plus de détails à ce sujet.
La deuxième observation concernait la limite relative à l'article 15. À ce sujet, j'ai trouvé que vous aviez tapé en plein dans le mille. Il y a tellement de cas où nous commençons par l'article 15 parce qu'il le faut, mais, ensuite, c'est l'article 7 qui l'emporte. Cela a été le cas dans l'affaire Carter, celle de l'aide médicale à mourir, où, comme vous le savez, l'argument relatif à l'article 15 a été abandonné en faveur de l'article 7. Il y a aussi l'affaire Gosselin sur l'itinérance, problème critique dans ma collectivité et ailleurs au Canada. Ça sera l'article 7; ça sera l'article 15. Ça sera les deux. Peut-être que le Programme de contestation judiciaire pourrait intervenir, mais son cadre n'est pas adapté à l'article 15 et il ne peut obtenir de financement.
Je vous inviterais à bien vouloir nous donner des détails sur ces deux éléments, s'il vous plaît.
:
Merci, et je vous remercie de vos commentaires qui semblent appuyer ces recommandations.
Je comprends, d'un point de vue politique, la raison de la séparation des compétences, mais je pense que si nous adoptons une approche fondée sur le but du mandat du programme, cela n'a tout simplement pas de sens. Considérez la charte comme un texte de loi qui n'est ni fédéral ni provincial, qui constitue plutôt un instrument constitutionnel situé au-dessus de toutes les autres lois du pays, qu'elles soient adoptées par le gouvernement fédéral, par un gouvernement provincial ou par des organismes législatifs municipaux. Du point de vue de la personne qui compose avec la loi, peu importe quel ordre de gouvernement est compétent pour créer cette loi ou pour la modifier.
Si la préoccupation des responsables du programme tient à la promotion de l'élaboration de lois sur l'égalité en général et au renforcement de l'autonomie des collectivités qui présentent des vulnérabilités ou vivent des inégalités, cette distinction au chapitre de la compétence n'a aucun sens. Il semble que, pour les raisons que j'ai mentionnées, si on regarde les domaines de droit qui relèvent de la compétence provinciale, leur séparation est encore plus insensée, car les domaines dans lesquels les groupes défavorisés de la société canadienne ont toujours été les plus durement touchés sont ceux qui relèvent du régime législatif provincial.
J'exhorterais les membres du Comité — et le gouvernement, en particulier — à mettre de côté la question politique et à se concentrer sur le but. Si vous devez rétablir le programme, donnez-lui le mordant qu'il mérite et faites-en quelque chose qui sera un réel instrument de changement de qualité au pays. Il s'agira d'un programme dont nous pourrons être fiers en tant que pays, si le gouvernement souhaite bel et bien appuyer un tel programme.
Je pense que vous avez validé mon argument. Carter est l'affaire qui nous vient immédiatement à l'esprit. J'ai assisté à la conférence annuelle des causes constitutionnelles tenue à la faculté de droit Osgoode Hall pas plus tard que vendredi dernier, et il s'agit d'un événement incontournable pour les érudits et les praticiens qui veulent analyser ce qui s'est passé durant l'année. Encore une fois, cette année, comme nous l'entendons dire depuis plusieurs années, d'une certaine manière, l'article 7 est en train de devenir le nouvel article 15. Certaines personnes disent que c'est épouvantable, et d'autres, qu'il s'agit simplement d'une réalité.
:
Je demanderais à mes collègues de bien vouloir s'asseoir.
[Français]
C'est avec grand plaisir que j'accueille les témoins qui comparaissent devant nous aujourd'hui.
Nous entendrons les représentants de la fédération qui représente les communautés francophones et acadienne à l'extérieur du Québec.
[Traduction]
Nous accueillons également le groupe cadre qui représente les collectivités anglophones du Québec.
Je suis ravi d'accueillir Sylvia Martin-Laforge, qui est directrice générale du Quebec Community Groups Network. Je souhaite la bienvenue à notre ancienne collègue, Marlene Jennings, ancienne députée de Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, qui va également témoigner au nom du QCGN.
[Français]
J'ai aussi le grand plaisir d'accueillir Mme Sylviane Lanthier, présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, ainsi que Mme Audrey LaBrie, qui en est la vice-présidente.
Madame Jennings, je vous cède maintenant la parole.
Bonjour, monsieur Housefather, monsieur Falk, monsieur Rankin, et mesdames et messieurs les membres du comité de la justice. Merci de me donner la possibilité de comparaître devant vous aujourd'hui afin de discuter de l'intention du gouvernement du Canada de rétablir le Programme de contestation judiciaire.
Comme l'a mentionné M. Housefather, je m'appelle Marlene Jennings. Je suis là aujourd'hui pour représenter le Quebec Community Groups Network et les communautés linguistiques anglophones en situation minoritaire au Canada, que nous désignons collectivement par le terme « communauté anglophone du Québec ». Je suis accompagnée par la directrice générale, ou directrice exécutive, du QCGN, Sylvia Martin-Laforge.
Le Quebec Community Groups Network — ou QCGN — est un organisme de représentation sans but lucratif qui agit à titre de centre d'expertise fondé sur des données probantes et d'action collective à l'égard des enjeux stratégiques touchant nos communautés de partout au Québec. Les 48 membres du QCGN sont également des groupes communautaires sans but lucratif, dont la plupart fournissent des services directs aux membres de nos communautés de partout au Québec. Certains membres du QCGN travaillent à l'échelon régional et fournissent des services régionaux. D'autres travaillent partout au Québec dans des secteurs particuliers, comme la santé, les arts et la culture.
Le Québec anglophone est la première communauté de langue officielle en situation minoritaire en importance au Canada, et elle compte un peu plus de un million de citoyens au Québec dont la première langue officielle parlée est l'anglais. Nous voudrions souligner le leadership dont a fait preuve la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada — la FCFA — au cours de la dernière décennie. Elle l'a d'abord fait en luttant pour s'assurer que des mesures de soutien étaient offertes pour aider les Canadiens et protéger et promouvoir leurs droits linguistiques par l'intermédiaire du Programme d'appui aux droits linguistiques quand les vivres ont été coupés au Programme de contestation judiciaire, en 2006, et, ensuite, par la création récente — plus tôt cette année — du comité d'étude, dont j'ai été membre — chargé d'adresser des recommandations à la FCFA et au QCGN relativement à l'engagement du gouvernement du Canada de rétablir le Programme de contestation judiciaire. Le QCGN est sur la même longueur d'onde que la FCFA sur cette question. Nous avons adopté une résolution appuyant les recommandations du comité d'étude, dont la plupart seront décrites par Mmes Lanthier et LaBrie lorsqu'elles présenteront leur exposé.
Les tribunaux jouent un rôle central pour ce qui est de protéger et de promouvoir les droits linguistiques, processus qui dresse invariablement les gouvernements contre les minorités de langue officielle du Canada. Dans notre système démocratique, même les gouvernements qui aspirent à gouverner au nom de tous les citoyens expriment inévitablement la volonté de la majorité. Par définition, les droits de la personne, dont les droits linguistiques forment un sous-ensemble, limitent le champ d'action du gouvernement et constituent un ensemble de limites qui protègent les personnes et les minorités contre les effets préjudiciables du pouvoir de l'État. Il est possible de prévenir la « tyrannie de la majorité » évoquée par John Adams, et elle l'a été dans une certaine mesure, dans le passé, dans notre tradition démocratique consistant à s'assurer que les personnes et les minorités bénéficient d'un accès à la justice absolument égal afin de protéger et de promouvoir leurs droits.
Toutefois, sans initiatives comme le Programme de contestation judiciaire, la balance de la justice penche en faveur du gouvernement, puisque les ressources auxquelles le gouvernement a accès — l'argent, les avocats, le temps et le pouvoir — sont de son côté. Notre communauté, c'est-à-dire la communauté minoritaire anglophone du Québec, est associée depuis longtemps au Programme de contestation judiciaire, qui était la clé du maintien et de la promotion des droits linguistiques des Québécois anglophones, en particulier dans les années 1980, quand nous avons lutté pour la liberté d'expression dans l'affaire Ford et avons entrepris un cheminement continu pour protéger nos droits à l'éducation dans une langue minoritaire en vertu de l'article 23 de la Charte.
Je dois dire que nous sommes très heureux qu'Eric Maldoff, juriste canadien de premier plan et défenseur infatigable des droits linguistiques de notre communauté, comparaîtra devant vous le 21 avril afin de vous donner des exemples tirés de son expérience et de discuter avec vous des problèmes graves concernant les droits linguistiques auxquels notre communauté fait maintenant face au Québec.
Notre comité d'étude a formulé ses recommandations en se fondant sur les deux principes suivants: l'indépendance et la durabilité. Il comprenait que les droits à l'égalité ont une importance réelle pour la société canadienne, mais il croyait également que les droits linguistiques sont fondamentalement différents des droits à l'égalité et que les deux volets du Programme de contestation judiciaire, une fois le programme rétabli, devraient être indépendants l'un de l'autre.
Le comité d'étude croyait également que le nouveau programme devrait être indépendant du gouvernement. Il devrait exister en vertu d'une loi du Parlement, à qui il rendrait des comptes, et il devrait être gouverné de façon indépendante par un consortium de partenaires du milieu des langues officielles, y compris les communautés linguistiques en situation minoritaire anglophones et francophones du Canada, les principales écoles de droit et des juristes experts en matière de droits linguistiques. Cette indépendance devrait protéger le programme, en quelque sorte, contre les humeurs du gouvernement en place. Quoi qu'il en soit, il est irrationnel de s'attendre à ce qu'un gouvernement joue un rôle de gouvernance dans un programme dont l'existence vise à appuyer des poursuites intentées contre ce même gouvernement.
La durabilité est également un élément clé, tout comme le fait de disposer de ressources suffisantes pour répondre aux besoins. En plus de l'investissement public qui sera mentionné par la FCFA, le nouveau programme doit avoir la possibilité de recueillir des fonds auprès de sources privées. Nous devrions envisager l'établissement d'une fondation proclamée par une loi du Parlement au lieu d'un programme gouvernemental.
Cela ne faisait pas partie de ma déclaration officielle, mais, comme une question a été posée au groupe précédent et qu'une déclaration a été faite selon laquelle la langue anglaise n'est pas en danger au Québec, que seul l'avenir de la communauté anglophone l'est, je voudrais prendre un instant pour aborder cette question, car il s'agit de la position que nous entendons tout le temps. La langue anglaise au Québec n'est pas en danger, seulement les communautés le sont. De fait, la langue anglaise au Québec est assurément en danger. Un élément essentiel pour qu'une communauté de langue minoritaire puisse continuer de prospérer est la capacité des membres de cette communauté de travailler dans leur langue, de recevoir l'éventail complet de services publics et non publics dans leur langue officielle en situation minoritaire.
Laissez-moi seulement vous donner un exemple: le fait de pouvoir travailler dans sa langue. Le premier employeur en importance au Québec est le gouvernement provincial, puis ce sont les administrations municipales. Un pour cent de la fonction publique du Québec est constitué de Québécois anglophones, selon les statistiques de 2015-2016. Nous savons également, d'après le Recensement du Canada, que les Québécois anglophones comptent pour plus de 13 % de la population du Québec. Cela signifie que, une fois que nous formons nos enfants en anglais, ils n'ont pratiquement nulle part où aller, pour travailler, alors ils partent. L'utilisation de l'anglais dans la sphère publique a été gravement limitée sous le régime de lois linguistiques au Québec. Lorsqu'on fait la promotion de la théorie selon laquelle « la langue anglaise au Québec n'est pas en danger » et qu'on l'accepte, cela met encore plus en danger la vitalité et l'avenir de notre communauté.
Je voulais le souligner, afin que vous ne repartiez pas avec le point de vue qui a été exprimé plus tôt par les représentants du programme des droits linguistiques, selon lequel l'anglais au Québec n'est pas en danger. Il est en danger. Le gouvernement fédéral a une responsabilité et un rôle à jouer pour ce qui est de s'assurer que ces dangers sont réduits au minimum.
Je vous donne un exemple.
La fonction publique du Québec de même que les entreprises et les organisations qui sont réglementées à l'échelon fédéral sont tenues de permettre l'usage de l'anglais au travail. Quand j'étais députée, j'ai vu personnellement des projets de loi d'initiative parlementaire être présentés dans le but de faire appliquer la loi 101 à toutes les entreprises et les associations réglementées à l'échelon fédéral. Ces projets de loi auraient éliminé toute possibilité pour les membres de la communauté anglophobe de vivre et de travailler en anglais.
Je vais mettre fin à ma déclaration là-dessus. Merci.
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Monsieur le président, membres du comité, je tiens à vous remercier de nous avoir invitées à comparaître devant vous aujourd'hui.
Je m'appelle Sylviane Lanthier et je suis la présidente de la FCFA du Canada. Je suis accompagnée aujourd'hui de notre vice-présidente, Mme Audrey LaBrie.
Tout d'abord, je vais dire un mot sur qui nous sommes et qui nous représentons.
Dans neuf provinces et trois territoires, 2,6 millions de citoyens et de citoyennes ont choisi le français. Si on peut réellement parler de dualité linguistique canadienne, c'est parce qu'on retrouve des collectivités francophones dynamiques et diversifiées dans toutes les régions du pays. La FCFA est la principale porte-parole de ces collectivités et des gens qui en font partie, des gens déterminés à vivre en français.
Pour faire valoir les droits linguistiques qui leur sont garantis, notamment par les articles 16, 20 et 23 de la Charte canadienne des droits et libertés, au cours des dernières décennies, les francophones vivant en situation minoritaire ont dû se tourner à plusieurs reprises vers les tribunaux. C'est en grande partie pour les appuyer que le Programme de contestation judiciaire — le PCJ — a été mis sur pied au cours des années 1980. Comme vous le savez, ce programme comportait deux volets consacrés respectivement à la défense des droits linguistiques et à celle des droits à l'égalité.
Le parcours du PCJ a été mouvementé: il a vu son financement éliminé en 1992, puis rétabli en 1993, puis éliminé à nouveau en 2006. Après que la FCFA ait initié un recours judiciaire à la Cour fédérale, le gouvernement de l'époque a créé, en 2008, le Programme d'appui aux droits linguistiques, qu'on appelle communément le PADL. En clair, cela signifie qu'il y a maintenant près de 10 ans que nos communautés n'ont pas fait affaire avec le PCJ pour obtenir du soutien dans de nouvelles causes en matière de droits linguistiques et qu'on ne peut faire abstraction des sept années où c'est le PADL qui a rempli ce rôle d'appui.
C'est pour cette raison que, dans la foulée de l'engagement du gouvernement actuel à rétablir le financement du PCJ, le conseil d'administration de la FCFA a décidé, en novembre dernier, de créer un comité externe chargé d'étudier cette question et de formuler des recommandations. Pour nous, il ne s'agissait pas d'un simple choix entre deux programmes. Pour la première fois en près d'une décennie, nous avons une occasion de revoir en profondeur la manière dont on appuie au Canada les citoyens et les citoyennes qui veulent qu'on respecte leurs droits linguistiques.
Le comité était composé de personnes de l'extérieur qui connaissaient les deux programmes, sans être directement liées à des causes ou à des enjeux actuellement en cours. Il incluait aussi des représentants du Quebec Community Groups Network, afin d'assurer que les travaux et les recommandations reflètent une perspective commune des communautés de langue officielle en situation minoritaire au pays. Enfin, le comité était accompagné par Me Michel Bastarache, ex-juge de la Cour suprême du Canada. Tant le PCJ que le PADL ont été informés de la mise en place de ce comité.
Le mandat du comité était donc de répondre à la question suivante: quelle serait la meilleure manière d'assurer la défense et l'avancement des droits linguistiques des Canadiens et des Canadiennes? Le rapport final a été présenté en février au conseil d'administration de la FCFA, qui a largement adopté les recommandations du comité. Vous avez donc devant vous le texte de la résolution à ce sujet.
Sans entrer dans les détails, je tiens quand même à mettre l'accent sur quelques principes retenus par le comité et entérinés par la FCFA.
Tout d'abord, il y a la pérennité et l'indépendance du programme. Comme je l'ai dit plus tôt, le financement du PCJ a été éliminé à deux reprises. La dernière fois qu'il l'a été, on constate que près de trois ans se sont écoulés avant que les citoyens et les citoyennes souhaitant faire valoir leurs droits linguistiques aient pu à nouveau bénéficier d'un appui.
C'est pour cette raison que la création du programme amélioré que nous recommandons doit reposer sur une loi fédérale et, par conséquent, sur des assises juridiques. C'est aussi pour cette raison que le gouvernement devrait assortir ce programme amélioré d'un fonds de dotation initial substantiel, afin de lui permettre de fonctionner par la suite de manière indépendante.
Le deuxième principe est que ce programme amélioré puisse porter spécifiquement sur les droits linguistiques. Je veux être très claire: la FCFA reconnaît l'importance des droits à l'égalité et souscrit pleinement au principe d'un programme dédié à la défense de ces droits. Pour dire les choses simplement, les assises juridiques des droits linguistiques étant différentes de celles des droits à l'égalité, il convient, selon nous, de créer deux programmes distincts.
Troisièmement, ce programme amélioré devrait être élargi pour permettre des recours, notamment en vertu de la Loi sur les langues officielles ou de toute autre loi fédérale où il est question de droits linguistiques. En ce moment, le PADL permet seulement les recours en vertu des droits linguistiques constitutionnels.
Enfin, étant donné l’augmentation importante de la demande en matière de défense des droits linguistiques depuis la mise en place du PADL, il sera important que le fonds de dotation initial du gouvernement reflète une bonification significative des sommes prévues à cet égard.
La FCFA n’est pas sans savoir que le gouvernement fédéral a annoncé, dans le budget du 22 mars, un réinvestissement dans le Programme de contestation judiciaire. Nous apprécions le geste d’appui du gouvernement, mais nous croyons que la résolution que nous vous présentons aujourd’hui, qui est issue d’une réflexion sérieuse et approfondie, répond le mieux aux besoins et aux aspirations des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Avant de terminer, je tiens à prendre une minute pour vous parler du projet de loi , qui a été déposé par le député François Choquette. Ce projet de loi modifierait la Loi sur la Cour suprême pour faire en sorte que la compréhension des deux langues officielles sans l’aide d’un interprète fasse partie des compétences essentielles pour être nommé au plus haut tribunal du pays.
Comme vous le savez sans doute, le projet de loi fait suite aux deux projets de loi présentés au cours des deux dernières législatures par l’ex-député d’Acadie-Bathurst, M. Yvon Godin. En fait, on parle de cette question depuis près de 10 ans. Ce dont il s’agit essentiellement, c’est du droit du citoyen ou de la citoyenne d’être entendu et compris dans la langue officielle de son choix lorsqu’il se présente devant le plus haut tribunal du pays. La FCFA espère que cette fois-ci sera la bonne et que le Parlement adoptera ce projet de loi.
Je vous remercie.
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Le Québec a adopté la loi 101. Il dispose de sa propre charte des droits, et cette charte contient un article qui reconnaît l'existence des communautés minoritaires anglophones et leur droit de continuer à prospérer.
Je dois ramener la discussion à ce qui a été déclaré par le groupe précédent; nous avons des droits que les gouvernements adoptent sur papier, mais le vécu ne concorde pas toujours.
En ce qui concerne les questions liées à l'affichage, il ne s'agit vraiment pas d'un problème majeur ces temps-ci, sauf principalement dans un domaine, c'est-à-dire celui des services de santé. La question de l'accès égal aux services de santé et aux services sociaux en anglais refait surface encore et encore. Au Québec, il existe un processus permettant de s'assurer que chaque établissement de santé a établi une politique et un programme pour veiller à ce que les clients qu'il sert puissent recevoir leurs services en anglais.
Récemment, le Québec a procédé à une réforme majeure de la santé qui a établi de nouveaux centres intégrés de santé et de services sociaux appelés « centres intégrés universitaires de santé et de services sociaux ». Les établissements existants, les centres de réadaptation, les établissements de soin de longue durée, les hôpitaux, et ainsi de suite ont été regroupés par territoire géographique. En conséquence, nous sommes maintenant en train — si je prends pour exemple l'île de Montréal — d'élaborer de nouveau le processus d'établissement du comité régional de Montréal du programme d'accès aux services de santé et de services sociaux en langue anglaise.
Il s'agit d'un processus complet, et j'en fais partie, puisque je suis la vice-présidente du conseil d'administration de l'un des plus grands CIUSSS. C'est ainsi que nous les appelons sur l'île de Montréal, et ce CIUSSS va être responsable, au titre de la loi, de nommer les membres du comité régional du programme d'accès, qui superviseront tout cela.
Oui, il y a des problèmes, et, à cet échelon, on s'en occupe, et nous espérons que les mesures prises porteront fruit.
Là où nous avons un problème, c'est avec le projet de loi 86, nouveau projet de loi relatif à l'éducation qui réforme complètement nos structures et abolit les commissions scolaires, les élections aux commissions scolaires et qui réforme tout. Les experts en matière de constitution sont nombreux à croire qu'il contrevient à l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés, c'est-à-dire la garantie constitutionnelle qu'ont les communautés anglophones de pouvoir contrôler et gérer l'éducation. Comme nos écoles et nos commissions scolaires sont les seules institutions publiques que notre communauté minoritaire continue de contrôler et de gérer, ce projet de loi sonnerait le glas de notre communauté. Un Programme de contestation juridique rétabli et amélioré contribuerait grandement à fournir aux communautés les outils nécessaires pour contester cette loi, si le gouvernement décide de l'adopter à l'Assemblée nationale, puis qu'il commence à la mettre en oeuvre.
Pour le moment, il ne se passe rien parce que le projet de loi n'a pas encore été adopté. Il est encore devant l'Assemblée nationale.
Ai-je répondu à votre question?
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Ces questions étaient excellentes, de même que les réponses.
Mes collègues ont eu la gentillesse de me laisser être l'intervenant pour les libéraux dans le cadre de cette série de questions parce que je proviens d'une minorité de langue officielle. Je voulais simplement ajouter, en réaction à la réponse du QCGN, qu'en tant qu'ancien maire d'une collectivité du Québec, je pense qu'il y a une distinction majeure entre les problèmes que connaissent les communautés anglophones du Québec et ceux des communautés francophones hors Québec.
Le statut bilingue serait un exemple. Au Québec, si votre municipalité n'en est pas une où la communauté anglophone est majoritaire, la loi lui interdit d'adopter des règlements administratifs dans les deux langues. Vous ne pouvez pas travailler en anglais dans la municipalité. Vous ne pouvez pas envoyer de communications bilingues. Vous n'avez pas le droit d'ériger des panneaux bilingues. Alors, même si les anglophones comptent pour 45 % de votre collectivité, la loi du Québec vous interdit d'afficher des panneaux dans les deux langues. L'Ontario possède une très bonne loi qui établit certains nombres.
[Français]
Je ne suis pas certain, mais je crois que c'est 5 ou 10 % de la population en Ontario, avec un seuil de 5 000 personnes. À ce point-là, il faut que ce soit bilingue au Québec. Le bilinguisme est interdit si les anglophones ne sont pas majoritaires dans la communauté. Cela est très problématique.
[Traduction]
Concernant la question de l'affichage, comme l'ont dit les témoins, il s'agit surtout des panneaux gouvernementaux. Un hôpital dont les usagers ne sont pas majoritairement anglophones ne peut pas afficher de panneaux bilingues, ce qui a causé des problèmes dans de nombreuses petites communautés anglophones de la péninsule gaspésienne et dans d'autres parties du Québec.
[Français]
Personnellement, je suis ravi de voir que la FCFA et le QCGN ont travaillé ensemble pour rédiger ces recommandations. Je crois qu'il est très important que toutes les communautés minoritaires de langue officielle au Canada travaillent ensemble. J'ai d'ailleurs des questions à vous poser à ce sujet.
Je comprends que vous souhaitez qu'on élargisse la portée du PCJ et qu'il précise qu'il ne s'applique pas seulement aux droits linguistiques relatifs à la Charte, mais qu'il touche toutes les lois fédérales relatives à la langue. Croyez-vous aussi que nous devrions permettre que des lois provinciales puissent être contestées en vertu de ce programme? Un témoin a-t-il recommandé cela? Croyez-vous que nous devrions élargir sa portée et dire que le programme devrait couvrir non seulement les lois fédérales, mais aussi les lois provinciales qui briment les droits linguistiques?
Je pose cette question d'abord aux représentantes de la FCFA et ensuite à celles du QCGN.
:
Il y a deux parties à votre question.
Vous demandez d'abord quels types de lois nous voudrions que le programme puisse chapeauter? En ce moment, selon moi, les programmes concernent uniquement les droits constitutionnels. On parle donc de la Charte.
On voudrait aussi que la Loi sur les langues officielles, qui a un statut quasi constitutionnel, puisse aussi être examinée par le prochain programme, notamment parce que c'est une loi qui est extrêmement importante pour les communautés francophones et acadienne et pour toutes les communautés minoritaires. En effet, c'est elle qui encadre ce que le gouvernement fédéral fait concrètement en matière de droits linguistiques, de services au public, de droits linguistiques consentis aux fonctionnaires de la fonction publique et d'appui aux communautés de langue officielle.
Par exemple, en vertu de la Partie VII de la loi, le gouvernement a l'obligation de mettre en place des mesures positives pour favoriser l'épanouissement des communautés de langue officielle. Qu'entend-on par « mesures positives »? Le gouvernement le fait-il systématiquement tout le temps? Comment le fait-il? Ce sont pour nous des choses importantes étant donné que cet outil législatif nous permet de mordre dans quelque chose pour amener le gouvernement à agir de façon positive pour le développement de nos communautés. Par conséquent, on aimerait, on souhaite ardemment et on recommande absolument que cette loi fasse partie du nouveau programme.
D'autres lois fédérales ont aussi des impacts sur le plan des droits linguistiques. On parle, par exemple, du droit criminel. Il y a l'exemple de la Loi sur l'Agence du revenu du Canada et il y a en tout une vingtaine de lois qui ont des impacts sur les droits linguistiques ou qui abordent des questions touchant les droits linguistiques. Si toutes ces lois font partie du prochain programme, cela signifie que ledit programme sera en mesure d'examiner l'ensemble du cadre législatif que se donne le gouvernement fédéral en matière de droits linguistiques pour s'assurer que ces droits sont mis en oeuvre et sont respectés.
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L'argument que je tentais de faire valoir — et peut-être que je n'y suis pas bien arrivée, alors je vais faire une nouvelle tentative — est que la langue anglaise, en tant que langue, est en danger au Québec. C'est en partie en raison du fait que, pour s'épanouir, une langue a besoin que la communauté, que les membres qui parlent cette langue, puissent mener un grand nombre de leurs activités humaines quotidiennes dans leur langue. Au Québec, en raison de certains textes législatifs provinciaux, les membres de la communauté anglophone sont incapables de mener un grand nombre de leurs activités quotidiennes en anglais.
J'ai donné l'exemple de la population active. Le premier employeur en importance au Québec est le gouvernement provincial. Un peu plus de 13 % de la population du Québec est composée de membres de la communauté minoritaire anglophone. Seulement 1 % des fonctionnaires provinciaux québécois sont membres de la communauté minoritaire anglophone.
Si vous, en tant que députés, appuyez et adoptez une loi gouvernementale — je ne crois que cela puisse jamais arriver — ou un projet de loi d'initiative parlementaire qui prévoit que les entreprises et les organisations réglementées à l'échelon fédéral qui sont situées au Québec sont assujetties non pas à la Loi sur langues officielles, mais plutôt à la loi linguistique provinciale du Québec, vous venez tout juste de faire en sorte que tout un pan de la population active ne pourra plus travailler dans sa langue.
Actuellement, si vous travaillez pour le gouvernement fédéral au sein d'un ministère, d'un organisme ou d'une entreprise qui est réglementé à l'échelon fédéral au titre de la Loi sur les langues officielles, vous avez le droit de travailler en anglais. Cela ne serait plus le cas. Alors, quel est le but? Nous éduquons nos enfants. Nous chérissons nos écoles, qui sont les seules institutions publiques que nous contrôlons à présent. Nous ne contrôlons plus nos hôpitaux, pour lesquels nos communautés avaient recueilli des sommes d'argent, qu'elles avaient établis, construits et exploités, et nous l'avons fait parce que nos médecins et nos infirmières, qui sortaient des universités, ne pouvaient pas trouver d'emploi dans les établissements de santé qui, à l'époque, étaient en grande partie dirigés par des ordres religieux. Nous avons créé nos propres établissements. Nous avons créé nos propres centres de réadaptation. Graduellement, dans le cadre de la modernisation de l'infrastructure du Québec — et il s'agit d'une bonne chose, ces établissements ont été déclarés publics, et bon nombre d'entre eux sont devenus des établissements francophones. Un très petit nombre des établissements ont été désignés comme étant bilingues; par conséquent, on peut continuer d'y travailler en anglais. On peut fournir les services à la clientèle en anglais.
Au Québec, la communauté majoritaire est dans un état d'esprit psychologique collectif — qui était justifié en grande partie — depuis des décennies et des décennies, selon lequel la langue du Québec était en péril, de même que la culture francophone du Québec. De fait, il s'agissait d'une crainte bien fondée à l'époque précédant la modernisation de l'État québécois, où pratiquement tous les leviers du pouvoir étaient entre les mains de membres des communautés minoritaires anglophones. Ce n'est plus le cas. Tous les leviers sont entre les mains de la majorité francophone. Un démographe appelé Richard Bourhis, qui se spécialise dans les études scientifiques, a mené des études démographiques des communautés minoritaires anglophones du Québec.
Richard Bourhis affirme que le Québec compte en fait une majorité francophone dominante bien établie et qui, par conséquent, devrait agir à ce titre, ce qui signifie que la relation qu'elle entretient avec la communauté minoritaire anglophone devrait changer de façon inhérente.
C'est une longue discussion. Nous ne pouvons pas la tenir entièrement ici, mais j'exhorterais le comité de la justice à demander au comité des langues officielles de se pencher sur cette question. Ce comité devrait inviter Richard Bourhis à venir discuter de ses études.
Je voulais clarifier un élément pour le Comité, parce que je pense qu'il est important. Dans sa première réponse, Mme Jennings a évoqué la sous-représentation des Québécois anglophones au sein de la fonction publique québécoise, laquelle s'applique également, en passant, à la fonction publique municipale et à la fonction publique fédérale au Québec, quoique pas dans la même mesure.
Il s'agit peut-être d'un lien de cause à effet, mais la question est distincte du fait que la Charte de la langue française du Québec prévoit que le gouvernement et toutes les institutions de cette province ne sont pas officiellement bilingues et que, là où la minorité est la majorité, ils doivent fonctionner en français seulement. Mme Jennings affirme que, si la Charte de la langue française était appliquée aux institutions fédérales situées au Québec, les employés de ces institutions, même s'ils se trouvaient dans une région où l'anglais est la langue majoritaire, devraient travailler en français seulement. Ils n'auraient pas la possibilité de travailler en anglais.
Au Québec, les entreprises de plus de 50 personnes sont également assujetties aux dispositions de la Charte de la langue française. Ainsi, à l'exception des petites entreprises, il y a peu d'endroits où les Québécois anglophones peuvent travailler en anglais. Voilà ce que je pense qu'elle disait, au cas où vous n'auriez pas compris.
Monsieur Fraser.
La situation varie d'une province à l'autre. Notre réalité est vraiment très différente de celle de nos concitoyens anglo-québécois qui vivent dans une seule province. En ce qui nous concerne, les communautés sont réparties dans l'ensemble du pays à l'extérieur du Québec. Cela fait en sorte que d'une province à l'autre et d'un territoire à l'autre, la situation peut être vraiment très, très différente.
Je me contenterai de vous dire que certaines provinces vont plus loin que d'autres dans l'offre de services en français. En fait, il y a une seule province officiellement bilingue, soit le Nouveau-Brunswick. Les autres provinces ont des lois sur les services en français, comme c'est le cas en Ontario. D'autres ont des politiques touchant les services en français, comme c'est le cas au Manitoba et dans d'autres provinces. Selon les cas, la disponibilité des services en français et la façon dont une province ou un territoire offre des services en français va varier. C'est la même chose pour les municipalités. À ma connaissance, il y a présentement dans trois provinces des associations de municipalités bilingues ou des regroupements de municipalités qui offrent des services en français, mais elles ne le font pas nécessairement parce qu'une loi les y oblige. Ces provinces le font parce qu'elles ont des communautés de langue française et qu'elles veulent leur offrir des services. Ce sont l'Ontario, le Manitoba et le Nouveau-Brunswick. Je n'ai pas de données suffisamment poussées pour en dire davantage à ce sujet.
Je reviens à ce que j'ai dit plus tôt. À la Fédération des communautés francophones et acadienne, notre préoccupation principale en ce moment est de savoir ce que le gouvernement fédéral peut faire et comment il peut, étant donné qu'il a déjà les outils en place pour assurer l'épanouissement des communautés de langue officielle, les utiliser et les mettre en oeuvre. On parle de la Loi sur les langues officielles. Celle-ci n'est pas pleinement mise en oeuvre et devrait l'être bien davantage pour d'abord s'assurer que le gouvernement fédéral s'acquitte de ses propres obligations sur l'ensemble des provinces et territoires. Cela nous apparaît très important. Il nous semble aussi que, ce faisant, le gouvernement fédéral donnerait le ton et pourrait ainsi être un champion des langues officielles et inciter les autres provinces à en faire davantage.
Du côté francophone, il y a la Conférence ministérielle sur la francophonie canadienne. Cette réunion a lieu une fois par année pour aborder toutes sortes d'enjeux qui touchent la vie en français partout au pays, y compris au Québec. Les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux examinent ensemble les lois sur les services en français de différentes provinces et discutent des moyens de les améliorer. Les provinces se comparent entre elles et avancent à petit pas, mais elles avancent. Des actions sont possibles. À cet égard, le gouvernement fédéral a un rôle de leader absolument important à jouer pour faire en sorte que les provinces et les territoires continuent de vouloir joindre ce mouvement qui valorise la dualité linguistique partout au pays.
Cette valorisation pourrait permettre aux 2,6 millions de personnes qui veulent parler et vivre en français au Canada d'être en mesure de le faire, d'avoir un espace pour le faire, et ce, dans le plus de secteurs possible. Il est donc aussi question d'éducation, de services de santé, de développement économique, de vie culturelle et ainsi de suite.