JUST Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la justice et des droits de la personne
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 21 mars 2017
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
J'ai le plaisir de déclarer ouverte la présente séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Conformément à l'ordre de renvoi du mercredi 8 mars 2017, nous allons commencer notre étude du projet de loi S-217, Loi modifiant le Code criminel, détention sous garde, appelé également la loi de Wynn.
C'est avec grand plaisir que je souhaite la bienvenue au parrain du projet de loi à la Chambre, M. Michael Cooper, qui est un membre de notre Comité.
Nous sommes très fiers de vous recevoir, monsieur Cooper. La parole est à vous.
Je vous remercie, monsieur le président.
Merci, chers collègues. C'est un privilège pour moi de comparaître devant vous au sujet du projet de loi S-217, qu'on appelle la loi de Wynn, en l'honneur de l'agent David Wynn.
Le projet de loi S-217 est une mesure législative simple. Il vise à apporter des modifications au Code criminel, qui, bien que mineures, auraient pu sauver la vie de l'agent Wynn si elles avaient été en vigueur lorsqu'il a été tué par balle.
Avant d'entrer dans les détails du projet de loi S-217, permettez-moi de vous expliquer ce qui a donné lieu à l'élaboration de cette mesure législative, la loi de Wynn. Aux petites heures du matin du 17 janvier 2015, l'agent David Wynn et l'agent auxiliaire Derek Bond procédaient à une inspection des plaques d'immatriculation à l'extérieur du casino de St. Albert, où j'habite, dans le cadre de leurs activités policières courantes. Pendant cette inspection, ils sont tombés sur la plaque de Shawn Rehn, qui faisait l'objet d'un mandat d'arrestation. L'agent Wynn et l'agent auxiliaire Bond sont donc entrés dans le casino pour arrêter M. Rehn. Lorsqu'ils se sont adressés à Shawn Rehn, celui-ci a commencé à tirer des coups de feu, qui ont atteint l'agent Wynn et l'agent auxiliaire Bond. Malheureusement, l'agent David Wynn est décédé quatre jours plus tard, le 21 janvier 2015.
L'agent Bond a survécu, mais, pour lui avoir parlé, je peux vous dire que sa vie ne sera plus jamais la même. En effet, sa vie à bien des égards est un enfer, car il doit composer avec les répercussions d'avoir été tiré à bout portant, tant sur les plans physique que psychologique.
Le meurtrier de l'agent Wynn était en liberté sous caution à l'époque, malgré le fait qu'il avait déjà été condamné pour plus de 60 actes criminels, qu'il faisait l'objet de 29 accusations en instance — j'ai dit 38 auparavant, mais il s'agit en fait de 29 — et que pesaient contre lui plusieurs défauts de comparution. Cette situation a amené le commissaire Paulson de la GRC à demander pourquoi un tel individu était en liberté. Cet individu était en liberté parce que ses antécédents criminels n'avaient pas été présentés lors de l'enquête sur le cautionnement, en partie à cause d'une lacune dans le Code criminel, qui se trouve à l'alinéa 518(1)c). Cette lacune fatale est liée au fait que cette disposition prévoit que les antécédents criminels de la personne demandant à être mise en liberté sous caution peuvent être présentés — et je dis bien peuvent — malgré le fait que ces antécédents criminels sont toujours pertinents pour rendre une décision éclairée au sujet de la demande de libération sous caution. L'essence même, la pierre angulaire, l'objectif sous-jacent du projet de loi S-217 est de modifier l'alinéa 518(1)c) afin de remplacer le mot « peut » par une exigence pour que, dans toutes les circonstances, les antécédents criminels d'une personne qui demande une libération sous caution soient présentés lors de l'enquête sur le cautionnement.
L'objectif de la loi de Wynn est de faire en sorte que tous les renseignements pertinents soient présentés. Ce n'est pas ce qui s'est produit lors de l'enquête sur le cautionnement de Shawn Rehn, et les conséquences ont été fatales.
La loi de Wynn permettra de s'assurer que les renseignements pertinents soient présentés, mais cela ne nuira pas au pouvoir discrétionnaire du juge de déterminer si le prévenu peut être libéré sous caution. En effet, le projet de loi S-217 fera en sorte que le juge obtienne tous les renseignements pertinents afin qu'il puisse exercer correctement son pouvoir discrétionnaire et déterminer si la personne devrait être maintenue en détention ou remise en liberté. En outre, la loi de Wynn n'imposerait pas un fardeau indu aux procureurs de la Couronne. Ce type de renseignements est presque toujours présenté lors d'une enquête sur le cautionnement. Le projet de loi S-217 officialise dans la loi une pratique courante, qui devrait toujours être mise en application lors d'une enquête sur le cautionnement afin que ce qu'ont vécu l'agent Wynn et l'agent auxiliaire Bond ne se reproduise plus jamais.
En plus de modifier l'alinéa 518(1)c) du Code criminel, le projet de loi S-217 modifie également l'alinéa 515(10)c). Le paragraphe 515(10) du Code criminel porte sur les motifs pouvant justifier le refus de la libération sous caution. Le paragraphe 515(10) énonce trois motifs. Le premier, à l'alinéa 515(10)a), vise les personnes qui risquent de prendre la fuite. Le deuxième, à l'alinéa 515(10)b), concerne la sécurité publique et le troisième, que le projet de loi vise à modifier, à l'alinéa 515(10)c), concerne le refus d'accorder la libération sous caution afin de ne pas miner la confiance du public envers l'administration de la justice.
Cette disposition énonce quatre circonstances dont il faut tenir compte pour déterminer s'il y a un risque de miner la confiance du public envers l'administration de la justice. Le projet de loi vise à apporter des modifications mineures en ajoutant trois autres circonstances, à savoir des convictions antérieures, des accusations en instance et des défauts de comparution. Je le répète, l'objectif prépondérant est de modifier l'alinéa 518(1)c), afin de remplacer le mot « peut » par une exigence, pour que les antécédents criminels d'une personne qui demande d'être libérée sous caution soient toujours présentés lors de l'enquête sur le cautionnement.
Je terminerai, monsieur le président et chers collègues, en disant que ce qui est arrivé à l'agent Wynn et à l'agent auxiliaire Bond ne devrait jamais se reproduire. Malheureusement, nous ne pouvons pas revenir en arrière, mais en tant que parlementaires, j'estime que nous avons l'obligation de combler cette lacune qui s'est révélée fatale afin d'éviter qu'une telle situation ne se reproduise. C'est ce que nous devons faire pour l'agent Bond, l'agent Wynn et la population canadienne.
Je vous remercie.
Je vous remercie beaucoup pour votre témoignage convaincant, monsieur Cooper.
Nous allons maintenant passer à la première série de questions.
La parole est d'abord à M. Nicholson.
Je vous remercie beaucoup.
Je vous félicite, monsieur Cooper, de parrainer ce projet de loi. Je crois qu'il s'agit d'une mesure législative très importante parce qu'elle comble une lacune qui existe dans le système de justice pénale.
Je suis certain que vous avez lu les commentaires au sujet du projet de loi. Certains prétendent qu'on ne devrait pas l'appuyer parce que les modifications qu'il propose risquent de causer des retards dans le système. Nous souhaitons tous que le système de justice pénale fonctionne efficacement à toutes les étapes.
Que répondez-vous à ceux qui craignent que ces modifications causent des retards dans le système de justice?
C'est effectivement l'une des critiques que nous avons entendues au sujet du projet de loi, c'est-à-dire qu'il y aura des retards. En tout respect pour ceux qui ont formulé cette critique, je réponds que cet argument ne tient tout simplement pas la route parce que les renseignements en question sont presque toujours présentés. Ils sont presque toujours présentés parce qu'ils sont toujours pertinents.
Puisque ces renseignements sont presque toujours présentés, comment pourrait-on croire raisonnablement que cela occasionnera des retards interminables? Ce ne sera pas du tout le cas, monsieur Nicholson et monsieur le président, alors je rejette...
Monsieur Cooper, les temps ont changé. Je me souviens que, lorsque j'ai commencé à pratiquer le droit, rien n'était informatisé. Je devais littéralement trouver les dossiers papier de ces personnes. Parfois, il était très difficile d'obtenir les renseignements voulus.
N'êtes-vous pas d'accord pour dire qu'à notre époque, où tout est informatisé, il devrait être très facile d'obtenir ces renseignements très rapidement?
Oui, en effet.
Ces renseignements sont littéralement accessibles en quelques clics. Les renseignements peuvent être obtenus auprès du CIPC en l'espace de quelques minutes. Si on n'y a pas accès par ordinateur, alors on peut très bien appeler une personne qui peut avoir accès au système.
Il est vrai qu'il y a longtemps, plusieurs décennies, il était parfois carrément impossible d'obtenir ces renseignements. Ce n'est pas le cas en 2017.
Vous avez mentionné durant votre exposé que vous avez entendu certaines critiques à propos du projet de loi. Avez-vous entendu les commentaires de personnes ou de groupes qui appuient ce projet de loi que vous nous présentez?
Ce projet de loi a recueilli de solides appuis. De nombreux organismes d'application de la loi se sont prononcés en faveur de cette mesure législative, notamment l'Association canadienne des policiers. Le projet de loi a également reçu le soutien de groupes de défense des droits des victimes et de l'ancien ministre de la Justice de l'Alberta, qui a supervisé les actions entreprises par le gouvernement provincial à la suite du meurtre de l'agent Wynn. Il a obtenu également l'appui unanime des sénateurs libéraux et conservateurs lorsqu'il a été adopté au Sénat. À l'étape de la deuxième lecture, il a obtenu un soutien massif, notamment l'appui unanime du Parti conservateur, du Nouveau Parti démocratique, du Bloc québécois, du Parti vert et de 27 députés libéraux.
Il ne s'agit pas d'un enjeu partisan. C'est une question sur laquelle tous les partis s'entendent, car c'est la bonne chose à faire. Il s'agit d'une mesure qui tombe sous le sens et qui est nécessaire.
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Monsieur Cooper, je vous remercie beaucoup pour votre présence ici aujourd'hui et pour le travail que vous avez accompli pour présenter cette mesure à la Chambre et au Comité.
Vous parlez avec passion de l'agent Wynn qui a perdu la vie et de l'agent Bond et cela ne m'échappe pas personnellement, et il en est de même pour les autres membres du Comité. Je vous remercie de présenter ce projet de loi.
Je crois qu'il est important que nous gardions tous en tête, bien entendu, l'objectif des dispositions concernant la libération sous caution, à savoir que la sécurité publique soit une priorité lorsqu'on détermine si une personne peut être mise en liberté provisoire par voie judiciaire et que le système de justice fonctionne de façon harmonieuse. Bien sûr, tout cela repose sur le principe selon lequel les personnes accusées d'actes criminels sont présumées innocentes jusqu'à preuve du contraire. Par conséquent, il appartient habituellement à la Couronne de prouver que la personne devrait être mise en détention. Il est important de garder cela en tête lorsqu'on examine ces dispositions.
J'aimerais tout d'abord commencer par l'article 515, qui, comme vous le dites, est lié au principal objectif du projet de loi, à savoir remplacer le mot « peut » par une exigence à l'article 518.
À l'alinéa 515(10)a), on énonce le premier motif qui justifie qu'une personne puisse être maintenue en détention, à savoir le risque qu'elle prenne la fuite ou qu'elle ne se présente pas en cour. L'alinéa 515(10)b) énonce le motif que la Couronne peut invoquer pour montrer que la personne devrait être détenue, c'est-à-dire qu'elle pose un risque pour le public. Il y a un risque qu'elle récidive ou qu'elle nuise à l'administration de la justice.
Le troisième motif, qu'on appelle parfois le « motif tertiaire », est énoncé à l'alinéa 515(10)c), que le projet de loi vise à modifier en ajoutant d'autres motifs. Les motifs qu'on souhaite ajouter recouperaient largement le motif énoncé à l'alinéa 515(10)a), le risque de fuite, ou à l'alinéa 515(10)b), qui concerne la sécurité publique, puisqu'ils viennent ajouter des éléments qui sont déjà couverts par les deux premiers alinéas, notamment les antécédents criminels ou le défaut de comparution.
À mon avis, la Couronne a déjà la possibilité de prouver que la personne doit être gardée en détention en invoquant l'alinéa 515(10)a), qui concerne le risque de fuite, ou l'alinéa 515(10)b), qui concerne les antécédents judiciaires ou la possibilité de récidive.
Je me demande alors pourquoi vous pensez qu'il soit nécessaire d'ajouter ces motifs qui sont déjà couverts par ces deux dispositions utilisées pour déterminer si la personne peut être libérée sous caution.
C'est une question légitime, monsieur Fraser. Je vous remercie.
Il y a quelques raisons. Premièrement, le troisième motif a été qualifié de motif tertiaire ou de motif résiduel. Dans la décision St. Cloud rendue par la Cour suprême, au paragraphe 34, le tribunal précise qu'il n'est pas un motif résiduel, « mais plutôt un motif séparé et distinct ». Le tribunal a mentionné qu'il ne s'agit pas d'un motif qui ne s'appliquerait qu'en dernier recours, comme on l'a souvent interprété dans certaines décisions de tribunaux d'instance inférieure.
Dans la décision St. Cloud, la Cour suprême a mentionné clairement, comme elle l'a fait dans la décision Hall, que les quatre facteurs expressément énumérés dans le Code criminel sont des facteurs dont il faut tenir compte. Ce sont les principaux facteurs qu'il faut prendre en considération lorsqu'il est question de la confiance envers l'administration de la justice, mais ce ne sont pas les seuls facteurs.
Ainsi, au paragraphe 71 de la décision St. Cloud, la Cour suprême mentionne que, parmi les facteurs qui devraient être pris en considération, ou qui devraient être souvent pris en considération, il y a les « antécédents criminels ». Par conséquent, le projet de loi ne ferait à certains égards que codifier ce que la Cour suprême a déjà qualifié de renseignements pertinents pour déterminer si la confiance du public envers l'administration de la justice est minée.
J'ajouterai que la Cour suprême, dans la décision St. Cloud et d'autres, a souligné que l'objectif de ce motif, bien entendu, est de préserver la confiance du public envers l'administration de la justice, de prime abord. À mon avis, rien ne pourrait miner davantage la confiance du public envers l'administration de la justice qu'une situation où une personne est mise en liberté sous caution alors qu'elle a de lourds antécédents criminels et que pèsent sur elle des accusations en instance et des défauts de comparution, exactement comme c'était le cas de Rehn.
J'estime que cette deuxième partie du projet de loi S-217 concorde avec la décision St. Cloud rendue par la Cour suprême et avec l'objectif de ce motif tel qu'il a été énoncé par la Cour suprême.
D'accord, je vous remercie.
À l'alinéa proposé 518(1)c), qui est le troisième motif, il est écrit « soit d'établir le fait que le prévenu a antérieurement commis une infraction aux termes de l'article 145 ». C'est déjà dans le libellé.
Ensuite, vous ajoutez la disposition suivante:
(v) soit d'établir le fait que le prévenu n'a pas répondu à une convocation du tribunal à une ou plusieurs occasions;
Il me semble que ces deux dispositions se chevauchent considérablement étant donné que l'article 145 concerne le défaut de comparaître en cour. Je me demande si vous pourriez me dire à quoi fait référence le sous-alinéa (v). Je me demande s'il fait référence à une preuve que la Couronne pourrait ajouter pour démontrer que la personne ne s'est pas présentée en cour alors qu'elle était assignée comme témoin, ou est-ce quelque chose d'autre?
Non, ce n'était certes pas l'objectif visé. Cet alinéa vise simplement à préciser que le défaut de comparution serait l'un des motifs.
Puisque c'est déjà couvert par l'article 145, qui concerne les personnes reconnues coupables de défaut de comparution ou qui ne se sont pas présentées en cour comme elles devaient le faire, pourquoi le sous-alinéa proposé (v) est-il nécessaire?
Il y a deux dispositions qui paraissent semblables. On parle déjà de prouver qu'un prévenu a commis antérieurement une infraction aux termes de l'article 145, et vous voulez ajouter le fait que le prévenu n'a pas répondu à une convocation du tribunal, ce qui est déjà couvert par l'article 145. Je me demande simplement pourquoi vous voulez l'ajouter alors que c'est déjà couvert.
Êtes-vous d'accord pour que je revienne à vous au deuxième tour et que nous passions maintenant à M. MacGregor?
Je vous remercie, monsieur le président.
Monsieur Cooper, je vous remercie beaucoup de comparaître devant le Comité aujourd'hui et de prendre le temps de parrainer ce projet de loi.
Puisque vous avez décidé de parrainer cette mesure législative, cela signifie que vous avez évidemment discuté en profondeur de la portée du projet de loi avec le sénateur Runciman.
Voici ma première question. À l'alinéa 518(1)c), vous avez employé les mots « le fait ». Je me demande pour quelle raison. Quel est l'objectif d'utiliser ces mots?
Ce sont les rédacteurs du projet de loi qui ont recommandé d'ajouter ces mots pour préciser expressément qu'il est nécessaire de présenter une preuve pour prouver les faits énoncés dans les sous-alinéas. Voilà la raison.
Vous modifiez la formulation relativement au poursuivant qui présente une preuve. Sans tenir compte de ce libellé et de son incidence sur cette disposition en particulier, pouvez-vous me dire quelle est votre compréhension de la façon dont le CIPC fonctionne au Canada? Vous avez bien sûr écouté certains des témoignages livrés au Sénat.
Est-ce que le CIPC fonctionne bien? Y a-t-il des retards, des lacunes, etc.? Quelle en est votre compréhension?
Le CIPC fonctionne bien, en ce sens qu'un policier peut s'y adresser pour obtenir très rapidement des renseignements au sujet des antécédents criminels d'une personne.
Je soulignerais que John Muise, qui compte plus de 30 années d'expérience au sein du service de police de Toronto, a affirmé, lorsqu'il a témoigné devant le Comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles, que les renseignements sont accessibles en quelques clics, ou qu'un simple appel téléphonique permet de les obtenir. Il est possible d'obtenir les renseignements en quelques minutes.
J'ajouterais également que, durant le débat à la Chambre des communes, Glen Motz, le député de Medicine Hat—Cardston—Warner, qui a 35 ans d'expérience dans le domaine des services policiers, a affirmé que, d'après son expérience personnelle, il est possible d'avoir accès rapidement aux renseignements grâce au CIPC et aux bases de données locales et provinciales.
D'accord.
J'aimerais donner suite à la question que vient de vous poser M. Nicholson. Certaines personnes ont soulevé la question des retards. Permettez-moi de citer David Truax, surintendant de la Police provinciale de l'Ontario, qui a témoigné devant le comité sénatorial:
Si ces modifications envisagent pour la Couronne le rôle de présenter des preuves et de prouver les faits par un processus qui tient davantage d'un procès, plutôt que d'obtenir la documentation utile de la police et de la présenter au tribunal — par exemple, par lecture de ces renseignements —, on peut concevoir que cette norme de preuve puisse sensiblement étirer les audiences sur le cautionnement, en augmentant la pression sur les ressources policières, et provoquer plus d'ajournements, ce qui pourrait contrarier les résultats visés dans un système déjà tendu et fonctionnant à pleine capacité.
Vous et moi, bien sûr, avons exigé des comptes du gouvernement libéral, car nous connaissons très bien le problème des retards dans notre système judiciaire. En fait, des reportages récents ont indiqué que de graves accusations se font retirer ou suspendre. Pouvez-vous réagir à ce témoignage en nous expliquant à quel point notre système judiciaire est surchargé actuellement, ce que nous savons très bien.
Je dirais que ce n'est pas vrai que le projet de loi créerait de véritables retards puisque, je le répète, ce genre de preuve est presque toujours présenté au tribunal. Le texte vient essentiellement codifier ce qui se passe presque toujours dans les faits.
J'ajouterais que le projet de loi ne change aucunement les règles qui portent sur les éléments de preuve déposés lors d'une enquête sur le cautionnement. Ces règles sont établies, par exemple, à l'alinéa 518(1)a) qui indique, entre autres, que le juge de paix peut faire, auprès du prévenu ou à son sujet, sous serment ou autrement, les enquêtes qu'il estime opportunes.
D'accord.
Nous savons que les gens pauvres et marginalisés, les gens de couleur et les personnes souffrant de troubles psychologiques ont davantage de chances d'enfreindre les lois. Cette statistique est bien connue. Pensez-vous que le projet de loi S-217 apportera des changements en ce qui concerne la composition de la population détenue dans les établissements correctionnels provinciaux du pays? Pensez-vous que certaines minorités seront touchées de façon disproportionnée par le projet de loi?
Merci, monsieur MacGregor. C'est une bonne question et la réponse est « non ».
Je vous dis non, parce que ce projet de loi ne modifie pas les règles visant la libération sous caution. Elle ne touche aucunement la discrétion d'un juge ou d'un juge de paix. Le texte fait uniquement en sorte que les renseignements qui devraient être présentés le sont. Il revient au juge, ou au juge de la paix, faisant une application sérieuse de la loi, de prendre une décision quant à la libération ou non d'une personne.
Merci beaucoup.
Monsieur Cooper, merci. J'aimerais me faire l'écho de mes collègues et vous féliciter de vos efforts dans le sillon de cet incident tragique.
J'aimerais approfondir certains points techniques du projet de loi, et donner suite à ce dont a parlé M. MacGregor, c'est-à-dire le terme « fait » qui est utilisé. Ce terme n'apparaît nulle part ailleurs dans le Code criminel. Vous avez indiqué que ce sont les rédacteurs qui l'ont proposé, mais pouvez-vous nous en dire plus? Je me demande si ce terme donnera lieu à des problèmes techniques et à des contestations judiciaires s'il est utilisé dans cet article particulier et nulle part ailleurs dans le code.
Je vous dirais tout d'abord que l'unique raison pour laquelle ce terme a été utilisé dans le projet de loi, conformément à la recommandation des rédacteurs, c'était pour reconnaître de façon expresse que les éléments de la preuve doivent seulement être déposés à l'appui des faits déclarés dans ces quatre paragraphes, qui sont désormais six.
Voilà la raison. On n'a pas voulu, par exemple, modifier le fardeau de la preuve qui doit être respecté lors d'une enquête sur le cautionnement. Si jamais on trouvait que le libellé avait de façon quelconque cet effet... C'est contraire aux conseils que nous avons reçus, mais si telle était la conclusion, il faudrait supprimer ce terme, car ce n'est pas l'objectif.
Je suis d'accord avec vous. Vous avez indiqué que bon nombre des changements que vous proposez au Code criminel correspondent à ce qui se produit presque toujours, notamment en ce qui concerne la présentation du casier judiciaire de l'accusé. J'ai parlé à des procureurs, à des avocats de la défense et à des organismes d'aide juridique. J'ai eu de nombreuses conversations.
Mais qu'en est-il des questions comme celle du consentement? Est-ce l'objectif du projet de loi de continuer à suivre ce processus, selon lequel la Couronne et l'accusé parviennent à un accord compte tenu de tous ces facteurs, ce qui occasionnerait peut-être du retard? Ce n'est pas forcément grand chose, mais cela créerait éventuellement un certain retard dans le système judiciaire.
Monsieur Bittle, c'est bien sûr le juge ou le juge de paix qui prend au final la décision de libérer quelqu'un ou non sous caution, et cela comprend la question du consentement.
Qu'en est-il de la discrétion du procureur? Encore une fois, vous avez raison de dire que dans la plupart des cas, ce phénomène se produit de toute façon, mais nous engageons-nous sur une pente savonneuse selon laquelle le Parlement dit aux procureurs quoi faire et ainsi brime leur pouvoir discrétionnaire, ce pouvoir étant un principe constitutionnel que la Cour suprême a désigné dans l'affaire Krieger comme étant une « expression technique »?
Nous engageons-nous sur une pente savonneuse si le Parlement dit aux procureurs comment faire leur travail?
Bon. Monsieur Bittle, je vous dirais que le devoir du procureur dans le contexte d'une enquête sur le cautionnement est clair, c'est-à-dire présenter les meilleurs éléments de preuve qu'il a pu trouver sur le casier judiciaire de l'accusé cherchant à être libéré sous caution. C'est ce que prévoit précisément le projet de loi S-217.
Je sais que l'objectif est la sécurité du public. Le policier qui dirigeait l'enquête sur le cautionnement a commis une erreur fatale qui a eu des conséquences tragiques. Le projet de loi ne prévoit aucune sanction, et je ne dis pas qu'il devrait le faire, mais sommes-nous en train d'exagérer le message de sécurité du public dans ce cas particulier, car ces types d'erreurs peuvent toujours avoir lieu?
Je sais que vous voulez réduire ces erreurs, mais sommes-nous en train d'exagérer la valeur de ce projet de loi pour ce qui est de la sécurité du public?
Je vous répond tout simplement que l'objectif du projet de loi est de faire ce que nous devrions toujours faire, c'est-à-dire nous assurer que ce type de renseignements est présenté. Le projet de loi élimine toute ambiguïté qui existe en changeant le « peut présenter » par « présente ».
Je vous propose de poser des questions plus courtes, afin que tout le monde puisse poser les questions qui les intéressent.
Qui a des questions?
Monsieur Fraser, vous n'avez pas pu terminer lors de votre dernière intervention. Allez-y.
D'accord, merci beaucoup.
Monsieur Cooper, en vertu de l'alinéa 518(1)c), la disposition qui sera modifiée si le projet de loi est adopté, il sera désormais nécessaire de présenter la preuve des déclarations de culpabilité de l'accusé au juge. Comment pensez-vous que cette preuve sera interprétée à la lumière des réhabilitations ou des absolutions inconditionnelles qui ont été accordées? Avez-vous un avis là-dessus? J'imagine que ce genre de renseignement ne sera pas présenté au tribunal.
C'est exact, monsieur Fraser.
En cas de réhabilitation ou d'absolution inconditionnelle ou conditionnelle, les éléments de la preuve ne seront pas présentés. En cas de réhabilitation, les renseignements sur les déclarations de culpabilité antérieures visant une personne qui a ensuite été réhabilitée sont exclus conformément à l'alinéa 2.3b) de la Loi sur le casier judiciaire. Un traitement semblable est accordé dans les cas d'absolution, conformément à l'article 6.1 de la même loi. Je vous réponds donc que non, ce type de renseignement ne serait pas présenté dans les cas de réhabilitation et d'absolution inconditionnelle et conditionnelle.
Merci. J'ai quelques petites questions, mais je ne sais pas si M. Falk souhaite en poser. Voulez-vous que j'arrête?
Je serai bref.
Si le projet de loi est adopté, la Couronne sera tenue de présenter cette preuve, plutôt que de tout simplement avoir la liberté de le faire. Ma question est peut-être bizarre, mais lorsque les procureurs doivent étayer un fait ou soumettre les éléments de preuve, le fait que l'accusé ait déjà été trouvé coupable d'une infraction criminelle pourrait-il ne jamais être révélé puisque le libellé actuel prévoit le mot « peut »? Puisque le projet de loi veut que ce soit obligatoire, serait-il logique de préciser qu'il s'agit d'une infraction commise au Canada, ou peut-il s'agir de toute infraction criminelle commise dont la Couronne doit maintenant fournir la preuve?
On s'appuierait sur la preuve d'un acte criminel, sur toute preuve dont on dispose, donc la réponse est oui.
Qu'arriverait-il si la preuve d'une déclaration de culpabilité aux États-Unis, par exemple, n'était pas présentée parce que l'on n'arrivait pas à mettre la main dessus? Quelle en serait l'incidence sur la décision prise par le juge lors de l'enquête sur le cautionnement? Cette décision pourrait-elle alors être invalidée lors d'une procédure subséquente?
Le projet de loi a comme objectif de conserver les d'éléments de preuve qui sont presque toujours présentés et de codifier le processus en le rendant obligatoire. C'est l'objectif du projet de loi. On va donc s'assurer que les types d'éléments de preuve qui sont normalement, voire presque toujours, présentés aux tribunaux peuvent être trouvés facilement en ce qui concerne le casier judiciaire de l'accusé.
Pensez-vous que la disposition prévoit alors qu'il faudrait trouver les renseignements à l'étranger qui seraient pertinents?
Bien évidemment, si ce type de renseignement était facilement trouvable, il faudrait à ce moment-là le présenter. Cependant, je présume que dans la plupart des cas, il serait difficile de mettre la main dessus.
Monsieur le président, merci. Monsieur Cooper, je vous remercie de votre exposé. Ce n'est pas souvent que nous avons l'occasion de vous voir à l'autre bout de la table. C'est probablement un réel plaisir pour la plupart des gens.
Chez moi au Manitoba, je parlais avec la personne responsable d'enquêter sur les accidents dans la province. Nous en avons parlé, et je lui ai demandé: « Quels types de facteurs recherchez-vous? » Elle m'a répondu: « Je cherche à savoir si la personne a été formée correctement, s'il y avait une procédure de travail bien établie pour le processus, si l'employé à suivi la procédure et s'il y avait un élément manquant. » Elle a ajouté: « Au final, nous cherchons les mailles de la chaîne qui manquent. »
En lisant l'alinéa 518(1)c) proposé, je constate que vous avez changé « peut présenter » à « présente ». Lorsque je pense à ce qui est arrivé à l'agent Wynn et à l'agent auxiliaire Bond, il me semble que les outils étaient accessibles et à portée de main, mais qu'il n'était pas forcément prescrit que l'agent de police devait s'en servir dans le cadre de l'enquête sur le cautionnement. De toute évidence, il ne s'est pas servi de toutes les ressources à sa disposition.
J'ai l'impression que le projet de loi a comme objectif de veiller à ce que la maille manquante de la chaîne soit créée afin de rétablir l'intégralité de la chaîne. Est-ce ce que vous comprenez?
Vous avez raison, monsieur Falk. Il s'agit de s'assurer que tous les renseignements disponibles et accessibles sont, en fait, présentés comme il se doit.
Savez-vous également, puisque vous avez étudié le projet de loi et vous l'appuyez, s'il y a eu d'autres situations semblables pour lesquelles la présentation de renseignements lors d'une enquête sur le cautionnement ou un engagement de ne pas troubler l'ordre public aurait changé quelque chose, que ce soit pour un agent des forces de l'ordre ou un membre du public?
Nous ne saurons jamais combien de cas qu'il y a pour lesquels ces renseignements ne sont pas présentés. Nous connaissons cependant ce cas-ci. Le résultat a été la pire des conséquences possibles, soit la mort d'un agent de police courageux, et le bouleversement de la vie d'un agent auxiliaire.
Oui, je crois que vous avez raison. Il y aurait certainement eu une différence dans ce cas-ci.
Merci, monsieur le président.
Monsieur Cooper, j'aimerais rapidement revoir l'état de la tenue des dossiers au Canada. J'ai parcouru la transcription de la séance du comité sénatorial. Le sénateur Runciman, pendant la série de questions, a fait remarquer qu'en Ontario, on tente d'abandonner le système sur support papier depuis de nombreuses années. Il a dit que ces efforts perdurent depuis 15 ou 16 ans, et que des millions de dollars ont été dépensés, sans grand résultat.
Mettons de côté l'objectif du projet de loi. Si nous avons un système décousu au Canada, un système caduc, pensez-vous qu'il serait plus logique pour le gouvernement de cibler ses ressources? Nous aurions alors un système informatisé moderne national qui permettrait à un juge de paix d'obtenir des renseignements facilement. Il n'incomberait plus au procureur de le faire, puisque ces renseignements pourraient être obtenus par le juge de paix.
J'aimerais savoir si vous pensez que ce serait une façon de résoudre ce problème, et également de s'assurer qu'une telle tragédie, comme la mort de l'agent Wynn, ne se reproduit pas.
Merci, monsieur MacGregor.
Je dirais qu'il y a en fait deux problèmes distincts. Tout d'abord, le CIPC, qui peut être consulté partout au Canada. Cependant, j'ai compris qu'il y a des problèmes quant à la rapidité avec laquelle les données sont saisies, ainsi que des arriérés et des retards.
Cette situation est inacceptable, bien franchement. C'est tout à fait inacceptable que tous les dossiers du CIPC ne soient pas complètement à jour. Le fait qu'il y ait quelques dossiers en souffrance dans le CIPC ne change pas le fait que le casier judiciaire d'une personne devrait être présenté lors d'une enquête sur le cautionnement. Après tout, comme je l'ai indiqué auparavant, de tels renseignements sont toujours pertinents et importants. Bien souvent, ce sont les seuls éléments de preuve qui sont pertinents et importants lors des enquêtes sur le cautionnement.
Je propose que nous modifiions le Code criminel afin d'éliminer cette échappatoire et de continuer à exercer des pressions, comme on l'a fait dans le passé, pour que le CIPC soit complètement mis à jour.
Là où je veux en venir, c'est que ce n'est peut-être même pas une échappatoire si nous arrivons à améliorer la qualité des renseignements disponibles. C'est peut-être une façon d'aborder le problème.
C'est une échappatoire si les renseignements ne sont pas présentés. On pourrait avoir un système CIPC parfait et les renseignements ne seraient pas présentés. Dans le cas qui nous concerne, l'état du CIPC n'aurait pas changé le fait que les renseignements n'ont pas été présentés, en l'occurrence des renseignements qui étaient facilement disponibles, qui étaient déjà dans le CIPC et qui, s'ils avaient été présentés à un juge ou à un juge de paix, auraient certainement gardé Shawn Rehn derrière les barreaux et l'agent Wynn en vie.
[Français]
[Traduction]
Merci, monsieur le président.
Monsieur Cooper, je vous remercie d'avoir travaillé sur ce projet de loi important qui porte sur notre Code criminel, et d'avoir pris le temps de venir nous parler aujourd'hui du projet de loi S-217.
J'ai quelques questions et préoccupations par rapport au projet de loi proposé, et j'espère que vous pourrez m'éclairer. Il n'y a pas un seul parlementaire qui ne reconnaît pas les circonstances tragiques qui nous ont poussés à trouver le moyen d'éliminer les échappatoires que vise le projet de loi S-217.
J'ai trois préoccupations, et j'ai donc trois questions. La première porte sur les retards qui auront sans doute lieu si le projet de loi est adopté, notamment lors des enquêtes où il n'y a aucune contestation. Si le projet de loi est adopté, il faudrait présenter la preuve lorsqu'il n'y a aucune contestation, et même si cela ne fait qu'ajouter cinq minutes, vu qu'il y a de 30 à 50 enquêtes sur le cautionnement par jour, l'appareil judiciaire serait alourdi. Vous avez dit que nous devons améliorer notre façon de faire afin d'accélérer la justice. Notre gouvernement a fait sa part, en partie, en nommant 12 juges en Alberta. Je vois un écart entre, d'une part, la volonté d'accélérer la justice, et d'autre part, le fait que le projet de loi S-217, s'il est adopté, aura des conséquences graves possibles. Voilà une préoccupation.
Ma deuxième préoccupation, c'est que ce projet de loi tente de légiférer dans le domaine de l'erreur humaine. Bien que nous voulions modifier le Code criminel afin d'éliminer l'erreur humaine, je ne vois pas comment c'est possible ni comment cela se passerait dans le système.
L'ancienne procureure fédérale, Nancy Irving, a exprimé de graves préoccupations et objections lors de son examen de la libération sous caution en Alberta par rapport à la pratique qui permet à quelque 3 000 agents de police de représenter la Couronne aux enquêtes sur le cautionnement. Je sais que l'on se penche sur cette question en Alberta actuellement. Si les procureurs de la Couronne, qui sont mieux formés et comprennent mieux les nuances, étaient présents aux enquêtes sur le cautionnement plutôt que les agents de police, aurions-nous à ce moment-là besoin du projet de loi S-217?
Il est important de souligner que c'était le gouvernement conservateur en 2015 qui a réduit le budget du CIPC de 10 % dans son budget. Ajoutons que dans son dernier rapport, le vérificateur général a clairement indiqué que le retard observé pour ce qui est de la saisie des déclarations de culpabilité dans le CIPC est de 14 mois au Canada anglophone et de 36 mois au Canada francophone. Cela vient aggraver le problème que nous avons déjà, d'où mes préoccupations graves.
Monsieur Boissonnault, je dois dire pour commencer que c'est le juge ou le juge de paix qui détermine si la personne peut être libérée sous caution. Par conséquent, l'information sur les antécédents criminels de l'accusé cherchant à obtenir une libération sous caution reste pertinente même si l'agent de la paix consent à sa demande.
Deuxièmement, concernant l'examen du régime de libération sous caution de l'Alberta, je souligne que l'Alberta semble tenir pour acquis que ce genre de renseignement devrait toujours être présenté lors des audiences sur une demande de libération sous caution. J'attire votre attention sur la page 3 du rapport, où l'auteur affirme qu'il y avait pratiquement unanimité entre toutes les personnes consultées sur quatre questions, notamment sur le processus de demande de libération sous caution. L'auteur affirme également qu'un juge ou juge de paix devrait avoir accès à l'information à jour complète et que l'intégrité du processus ne devrait pas être compromise par des questions pratiques ou d'efficacité.
J'attire également votre attention sur la recommandation 25 du rapport d'examen de la libération sous caution en Alberta, selon laquelle les policiers devraient fournir au procureur au moins l'information suivante avant toute audience en vue d'une libération sous caution: le casier judiciaire à jour comprenant à la fois la copie imprimée du CIPC et la fiche du réseau d'information en ligne en matière de justice de Alberta, ainsi que l'information concernant toute accusation en instance, de même que des copies des formulaires de libération relatifs à ces accusations.
Par ailleurs, il y a des policiers qui mènent des enquêtes sur le cautionnement en Alberta, en Colombie-Britannique et en Saskatchewan. Il y a donc une décision du juge en chef Wittmann qui s'appuie sur un cas de jurisprudence soumis à la Cour du Banc de la Reine de l'Alberta, qui a fait certains constats sur le pouvoir des policiers de mener des enquêtes sur le cautionnement en Alberta.
Je le comprends bien, mais je crois qu'il est très important de souligner, dans cette discussion, que ceux qui sont dans le système judiciaire au Canada s'opposent vivement à cette pratique. Je sais qu'il nous en coûterait plus cher si cette enquête relevait de procureurs plutôt que de policiers. Il pourrait être plus juste de suivre les recommandations de la procureure de la Couronne Irving. Cependant, j'aimerais que vous répondiez à ma question de savoir si cela ralentit l'appareil judiciaire.
Il n'y a qu'un certain nombre d'heures dans une journée, monsieur Cooper, et je ne comprends toujours pas en quoi l'adoption du projet de loi S-217 accélérera le processus judiciaire et le rendra plus efficace pour rendre justice.
Encore une fois, je ne vois pas comment cela pourrait ralentir le processus d'une façon ou d'une autre, mais si un quelconque ralentissement faisait en sorte qu'un Shawn Rehn ne soit pas libéré sous caution et qu'il ne se retrouve pas dans la rue, ce serait tant mieux.
J'aimerais poursuivre dans la foulée des observations de M. Boissonnault. Il a dit que l'adoption de ce projet de loi pourrait ajouter cinq minutes à toutes les audiences sur la libération sous caution, et je suppose qu'il peut y avoir 30 audiences de ce type chaque matin à Toronto. Cela dit, selon votre examen, il s'agit là de renseignements qui sont toujours présentés de toute façon. Ainsi, ces cinq minutes seraient l'exception à la règle et ne s'ajouteraient que quand la Couronne, les policiers ou quiconque a mené l'enquête sur le cautionnement ne les a pas fournis. Je crois que vous avez exposé très clairement qu'il est très rare qu'ils ne présentent pas cette information.
Je ne comprends absolument pas pourquoi vous dites que toutes les audiences sur la libération sous caution pourraient durer cinq minutes de plus, parce qu'il s'agit de lire des renseignements généralement soumis dans tous les cas, de toute façon.
Ce n'est tout simplement pas logique, monsieur Nicholson. Ce n'est pas ce dont attestent les témoignages présentés devant le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, et ce n'est pas ce qui se dégage de la position exprimée par les responsables de l'application de la loi, qui appuient en majorité ce projet de loi. Quand cela pourrait représenter cinq minutes de plus, je dirais que la vie du constable Wynn valait bien cinq minutes.
Sa vie valait bien plus que les cinq minutes qu'il aurait fallu pour mettre les barres sur les t et les points sur les i pour être certains qu'une personne comme Shawn Rehn ne soit pas libérée.
J'ai quelques questions à poser moi-même. J'interviendrai le dernier.
Monsieur McKinnon, la parole est à vous.
Il semble que l'essence de ce projet de loi soit d'assurer la sécurité publique, bien que selon notre note d'information, son objectif soit de « ne pas miner la confiance du public envers l'administration de la justice ». Vos observations concernent pratiquement toutes la sécurité, mais rien ne nous dit que cette personne n'aurait pas été libérée sous caution de toute façon si l'information en question avait été présentée. C'est toujours plus facile à dire après coup, mais il est difficile de dire s'il n'aurait pas été libéré sous caution de toute façon.
J'ai du mal à accepter l'idée que cela renforce vraiment la sécurité publique. Certaines de ces dispositions... Par exemple, la propension de la personne à ne pas se présenter au tribunal est certainement indicatrice de la probabilité qu'elle ne se présente pas dans ce cas non plus, mais cela ne nous renseigne pas nécessairement sur le risque qu'elle présente pour la sécurité publique. De même, le fait que cet homme avait déjà été trouvé coupable d'infractions criminelles ou qu'il avait un casier judiciaire... Il faut examiner la nature des infractions criminelles en question pour déterminer s'il représentait ou non un risque pour la sécurité publique.
Je conviens que cela nous permettrait de mieux prévoir si une personne va se présenter en personne quand elle est censée le faire, mais je trouve que cela ne nous renseigne pas nécessairement sur la sécurité publique.
Merci, monsieur McKinnon.
Je vous répondrai, à l'égard de ce qui est arrivé au constable Wynn et de ce qui s'est passé lors de l'audience sur la mise en liberté sous caution, que nous ne le saurons jamais vraiment. Ce que nous savons, c'est que l'information n'a pas été présentée. Nous savons qu'il y a là une échappatoire dans le Code criminel et que ce projet de loi vise à y remédier, parce que je répète que ces renseignements sont toujours pertinents. En fait, quand on regarde les trois motifs justifiant la détention selon le paragraphe 515(10) du Code criminel, les antécédents criminels d'une personne sont pertinents dans les trois cas. Je pense que cela contribue certainement à la sécurité publique, puisqu'il faut qu'un juge ou un juge de paix ait accès à l'information pour savoir si la personne a beaucoup d'antécédents criminels, si elle risque de fuir ou si une liste infinie d'accusations en instance pèse contre elle.
Bien sûr, il revient toujours au juge ou au juge de paix de prendre la décision finale concernant la mise en liberté sous caution de la personne et de déterminer selon quelles conditions elle peut être accordée, s'il y a lieu.
Pour poursuivre sur la distinction entre « présente » et « peut présenter » dans cette modification, le libellé est modifié de sorte que le poursuivant « présente » ces renseignements. Comme M. Boissonnault l'a souligné, on semble être en train d'essayer de légiférer contre une erreur humaine. Comme vous l'avez dit vous-même, ces renseignements sont presque toujours présentés.
Est-il si important d'écrire « présente » plutôt que « peut présenter »? Cela n'empêchera pas les erreurs. Si quelqu'un omet de le faire — c'est écrit qu'on « peut » faire enquête — et que la personne est libérée de toute façon, quelles en seront les conséquences?
Cela lève toute ambiguïté. C'est ce que cela fait.
Il n'y aurait absolument aucune excuse, parce que ces renseignements devraient être présentés pour que l'audience sur la libération sous caution soit menée en bonne et due forme. Pourquoi laisserions-nous dans la loi une formule aussi ambiguë que « peut présenter » et ne la remplacerions-nous pas par « présente » pour éliminer l'échappatoire, afin de clarifier les choses?
Je le reconnais, d'un strict point de vue juridique, mais concrètement, si quelqu'un omet de le faire et que la personne est libérée, qu'arrivera-t-il? Le fait que nous ayons remplacé les mots « peut présenter » par « présente » n'aura aucun effet en cas d'erreur humaine, n'est-ce pas?
En cas d’erreur humaine, oui. Il pourrait y avoir erreur humaine. C’est une chose que l’on ne peut jamais prévenir. Je conviens qu’il est impossible de légiférer contre l’erreur humaine, mais il est possible de réduire la probabilité qu’une chose semblable se produise. Une façon d’y arriver est d’éliminer toute ambiguïté en corrigeant la lacune.
Merci.
J’ai pensé à une chose en vous écoutant répondre aux autres questions.
Concernant le délai, vous dites que la présentation des dossiers criminels devrait être une procédure normale. Vous proposez d’ajouter le motif suivant: « soit d’exposer les circonstances de l’infraction présumée, particulièrement en ce qu’elles ont trait à la probabilité de la condamnation du prévenu », donc que la preuve doit être présentée au tribunal. Ce n’est plus optionnel.
À mon avis, ce motif pourrait entraîner plus de délais, puisque, selon le cas, il n’est peut-être pas nécessaire de fournir la preuve en question. Selon les circonstances, il faudrait peut-être présenter une preuve très détaillée pour satisfaire le tribunal concernant la probabilité de la condamnation du prévenu. Si un agent de police n’est pas disponible pour une audience sur la libération sous caution, l’audience peut être reportée. Selon moi, ce motif-ci pourrait causer des délais, beaucoup plus que celui de fournir le dossier criminel du prévenu ou le fait de ne pas répondre à une convocation du tribunal.
Pourrais-je avoir votre opinion sur la question?
Vous soulevez un point pertinent.
Dans la plupart des cas, je ne crois pas que ce motif entraînerait un délai. Évidemment, selon les circonstances particulières entourant une demande de libération sous caution, celle-ci peut être reportée. Je ne crois pas que dans le cours normal des choses, cela aurait une grande incidence sur le délai d’attente avant qu’une demande de libération sous caution soit entendue et qu’une décision soit rendue.
Il est toujours possible qu’un ajournement soit demandé en raison de certains faits ou de certaines circonstances. C’est déjà le cas lors d’audiences sur la libération sur caution.
D’accord.
Concernant l’étendue de la preuve, actuellement, il est assez facile de déterminer que les circonstances d’une affaire n’ont pas à être très détaillées, puisqu’il ne s’agit pas d’une infraction grave. Toutefois, cette disposition exige que toute la preuve soit présentée lors d’une audience sur la libération sous caution, peu importe l’infraction.
Dans les cas plus simples, cette exigence pourrait retarder la décision relative à une audience de libération sous caution. Habituellement, un prévenu ne serait pas détenu en raison du troisième motif, mais il faudrait tout de même que toute la preuve soit présentée.
Monsieur Fraser, je comprends ce que vous dites, mais je ne crois pas, dans le cours normal des choses, que cela causerait un délai considérable ou ajouterait au processus.
Merci beaucoup.
Quelqu’un d’autre voudrait intervenir? Non? Dans ce cas, j’aurais quelques questions brèves à vous poser.
D’abord, je tiens à vous remercier non seulement de nous avoir présenté ce projet de loi, mais aussi pour la passion dont vous faites preuve pour défendre la cause de vos électeurs, les familles des agents de police Wynn et Bond. Nous vous sommes reconnaissants, à vous et au sénateur Runciman, pour ces efforts.
À mon avis, il y a deux volets à ce projet de loi. Il y a, d’abord, le changement proposé à l’article 518, soit remplacer « peut […] présenter » par « présente ». Si je ne m’abuse, c’est vous qui avez dit qu’il s’agissait du volet le plus important de ce projet de loi. L’idée n’est pas d’éliminer l’erreur humaine. Nous savons que des erreurs peuvent se produire. Si la loi dit « présente » et que le poursuivant ne présente pas la preuve, cela pourrait être une erreur, mais au moins, ce changement élimine la possibilité d’omettre intentionnellement de présenter la preuve. À mon avis, c’est la différence.
Il en a été question à plusieurs reprises, mais que se passerait-il si la disposition disait « présente » et que le procureur, par inadvertance, omet de présenter la preuve? Quel serait l’impact sur l’audience sur la libération sous caution? Faudrait-il fixer une nouvelle audience?
Dans ce cas, si l’information n’est pas disponible, il faudrait peut-être fixer une nouvelle audience. Quelles seraient les conséquences pour le procureur? Évidemment, il n’y aurait aucune conséquence criminelle; rien n’est prévu au Code criminel à ce chapitre. Si le procureur omet de présenter la preuve qu’il doit présenter, il y aurait certainement des conséquences pour lui, mais pas des conséquences criminelles.
D’accord. Je comprends.
Je m’inquiète plutôt des conséquences pour un prévenu qui, par exemple, aurait été libéré sous caution. Si le procureur ne présente pas la preuve, la libération sous caution du prévenu serait-elle réexaminée? Verrait-on des prévenus se présenter plusieurs fois devant le tribunal en raison d’erreurs ou si, selon vous, en cas d’erreur, rien ne change, la décision…
Très bien.
Ma deuxième question concerne l’alinéa 515(10)(c) proposé. Encore une fois, il y a deux volets à cette mesure législative: remplacer « peut […] présenter » par « présente » et l’ajout de dispositions, dont certaines inutiles, à mon avis.
Regardons le changement proposé au sous-alinéa 515(10)(c)(vi). Je sais que, selon la cour, le dossier criminel d’un prévenu est déjà couvert à l’alinéa (c) et qu’il s’agit d’un élément d’ordre général qui serait examiné. Le dossier criminel ne dit pas si un prévenu a déjà été accusé d’une autre infraction criminelle pour laquelle il n’a jamais été reconnu coupable. Je comprends l’idée selon laquelle un prévenu qui ne répond pas à une convocation du tribunal est reconnu coupable de l’infraction dont il est accusé. Mais, pourquoi introduire le fait qu’un prévenu a simplement été accusé d’une autre infraction? Les prévenus sont innocents jusqu’à preuve du contraire, non?
Encore une fois, cette information est déjà fournie. Dans le rapport sur la libération sous caution publié par l’Alberta, il est stipulé que ces informations sont toujours fournies et accessibles. Ce n’est pas un facteur déterminant.
Dans le cas de l’alinéa 515(10)(c), il faut examiner tous les facteurs énumérés et les autres facteurs applicables. La Cour suprême a clairement dit dans sa décision dans l’affaire Hall et l’affaire St-Cloud qu’aucun facteur n’est plus important qu’un autre. Une décision ne peut pas s’appuyer sur un seul facteur. Il faut regarder toutes les circonstances d’une affaire.
J’aurais une dernière question à vous poser, monsieur Cooper.
À l’alinéa 515(10)(b), l’élément du paragraphe 515(10) portant sur la sécurité publique, il est question des raisons qui justifient la détention d’un prévenu. Êtes-vous d’accord avec moi que si le procureur ne présente pas une preuve, en vertu de l’alinéa 518(1)(c), il serait très difficile pour le magistrat de tirer les bonnes conclusions, en vertu de l’alinéa 515(10)(b)?
Je suis d’accord.
Quelqu’un d’autre voudrait intervenir? Non? D’abord, merci beaucoup, monsieur Cooper, pour ce témoignage très convaincant. Nous vous en sommes reconnaissants.
J’aimerais demander à tous les membres de rester dans la pièce, car nous passerons à huis clos afin de parler des témoins à venir dans le cadre de l’étude du projet de loi et du nombre de séances que nous aimerions prévoir.
Des députés: D'accord.
Le président: Excellent. Donc, pour le moment, la séance est suspendue.
[La séance se poursuit à huis clos.]
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