:
Je déclare ouverte cette séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. C'est un plaisir d'accueillir nos témoins d'aujourd'hui, alors que nous poursuivons notre étude sur la traite des personnes au Canada.
[Français]
Aujourd'hui, nous accueillons des représentants de Statistique Canada: Mme Kathy AuCoin, chef du Centre canadien de la statistique juridique, et M. Yvan Clermont, directeur de ce même centre.
Bienvenue à vous deux.
[Traduction]
Nous recevons aujourd'hui Mme Natasha Kim, directrice générale de l'Immigration du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration.
Madame Kim, soyez la bienvenue.
Nous avons également avec nous M. Bruce Scoffield, directeur général de l'Orientation du programme d'immigration.
Je vous souhaite la bienvenue, monsieur Scoffield.
[Français]
Nous accueillons également des représentants du ministère de l'Emploi et du Développement social. Il y a tout d'abord M. Philippe Massé, directeur général de la Direction des travailleurs étrangers temporaires, à la Direction générale des compétences et de l'emploi.
Bienvenue, monsieur Massé.
[Traduction]
Nous accueillons également Mme Kathleen Walford, directrice générale des Opérations d'intégrité, au sein de la Direction générale des services d'intégrité.
Madame Walford, soyez la bienvenue.
Chacun des témoins disposera de 8 à 10 minutes pour faire sa déclaration. Nous allons commencer par les représentants de Statistique Canada.
[Français]
Monsieur Clermont, la parole est à vous.
Laissez-nous d'abord remercier les membres du Comité de l'invitation à présenter aujourd'hui les plus récentes statistiques concernant la traite des personnes au Canada.
Essentiellement, Statistique Canada a deux principales sources de données sur la traite des personnes: les données fournies par les services policiers et celles transmises par les tribunaux. Je vais vous présenter aujourd'hui un aperçu des principaux indicateurs provenant de ces différentes sources.
Passons maintenant à la prochaine diapositive.
Permettez-moi de souligner que, même si nous pouvons fournir les statistiques les plus récentes sur la traite des personnes, nous reconnaissons que la collecte de données sur ce type d'infraction présente des défis, et ce, pour plusieurs raisons.
Jusqu'à présent, les recherches ont montré que de nombreuses victimes de la traite des personnes hésitent à signaler l'infraction aux autorités. De plus, il a été reconnu au fil du temps que certaines autorités ont éprouvé des difficultés à définir les infractions de traite des personnes. En raison de ces limites, nous croyons qu'il y a, dans une certaine mesure, une sous-déclaration des incidents de traite des personnes au Canada.
Cela étant dit, comme vous le verrez plus loin dans cette présentation, on a connu une augmentation importante du nombre d'affaires de traite des personnes signalées à la police. Ce qui n'est pas clair, c'est s'il s'agit d'une augmentation réelle ou d'une simple indication du fait que les services policiers et les autorités sont mieux outillés pour détecter et rapporter ce type d'incidents.
Passons maintenant à la troisième diapositive.
Expliquons d'abord ce que nous récoltons à partir de nos sources.
Les infractions qui entrent dans la catégorie de la traite des personnes selon le Programme de déclaration uniforme de la criminalité comprennent quatre éléments: la traite des personnes, dont il est question à l'article 279.01 du Code criminel du Canada; la traite de personnes âgées de moins de 18 ans; le fait de bénéficier d'un avantage matériel provenant de la traite des personnes; et la rétention ou la destruction de documents en vue de faciliter la traite des personnes.
Je débuterai en résumant les principales constatations qui ressortent de la présentation que nous faisons ce matin.
Le nombre d'incidents de traite des personnes rapportés à la police est à la hausse. Cette récente hausse est le produit, entre autres choses, de la hausse de la traite des personnes provenant d'au-delà des frontières, de la hausse de la traite des personnes à des fins d'exploitation sexuelle et, finalement, de la traite reliée au travail forcé.
Cette hausse peut être attribuée en partie aux méthodes améliorées de déclaration des données, de détection et d'enquête de ces crimes.
En gros, ce type de crime est souvent relié à certaines formes d'exploitation sexuelle, par exemple la prostitution, qui est plus souvent rapportée en milieu urbain, précisons-le.
[Traduction]
Maintenant, sur la prochaine diapositive, soit la quatrième, on constate une augmentation des infractions de traite de personnes. Comme vous pouvez le voir, en 2010, le taux de traite des personnes pour 100 000 personnes n'était que de 0,08, alors qu'en 2016, il est passé à 0,94.
Les taux de traite des personnes sont 11 fois plus élevés en 2016 qu'en 2010, et les plus fortes hausses ont eu lieu entre 2013 et 2015.
En comparaison, au cours de la même période, le taux global de criminalité a diminué de 19 %. Il convient également de noter que, à près d'un incident pour 100 000 personnes, cette infraction représente des taux de prévalence similaires à certaines autres infractions relatives à la prostitution.
Comme je l'ai mentionné au départ, on ne peut établir avec certitude si l'augmentation observée ici est le résultat de meilleures méthodes de signalement, de détection et d'enquête sur les cas de traite de personnes ou une augmentation réelle du nombre d'incidents. Il n'en demeure pas moins que, grâce à nos interactions avec les services de police de partout au pays, nous savons que les autorités comprennent désormais mieux ce type d'infractions.
Chaque année, au cours des quatre dernières années, environ 30 % des incidents étaient liés au trafic transfrontalier de personnes, et 70 % étaient liés à l'exploitation sexuelle ou au travail forcé. La façon dont nous recueillons les données ne nous permet pas de faire la différence entre le travail forcé ou l'exploitation sexuelle. En revanche, lorsqu'on se penche sur les caractéristiques de ces incidents, on constate qu'il s'agit principalement d'exploitation sexuelle.
Sur la prochaine diapositive, le graphique illustre la même tendance, mais ici, on parle plutôt du nombre d'incidents déclarés par la police. On voit notamment que la traite des personnes est passée de 41 infractions en 2009 à 340 en 2016. Ce que vous ne voyez pas sur ce graphique cependant, c'est que c'est à Toronto, Ottawa, Montréal et Halifax que nous avons observé les plus fortes augmentations au cours des dernières années.
Si vous passez maintenant à la sixième diapositive, si on regarde les données les plus récentes que nous avons reçues des services de police, nous savons qu'en 2016, il y a eu 340 incidents de nature criminelle où l'infraction de traite de personnes constituait l'infraction la plus grave, ce qui représentait 0,02 % de tous les incidents déclarés par la police. Il est important de noter que tout incident criminel porté à l'attention de la police peut impliquer un certain nombre d'autres infractions liées au même incident. Autrement dit, d'autres infractions peuvent être commises en parallèle à la traite de personnes.
De 2009 à 2016, il y a eu 1 099 affaires mettant en cause une infraction de traite de personnes; plus de la moitié, ou 555, si vous préférez, de ces affaires impliquaient une autre infraction. Si on examine les données de plus près, parmi les incidents où il y a eu plus d'une infraction, nous avons vu que dans les cas où la traite de personnes constituait l'infraction la plus grave, près de 6 incidents sur 10 étaient également associés à une infraction de prostitution. De plus, nous avons aussi observé que, parmi les affaires dans lesquelles la traite des personnes était en cause sans toutefois être l’infraction la plus grave, le quart des incidents étaient des affaires d'enlèvement, 1 sur 5 impliquait une agression physique, et 1 sur 10, une agression sexuelle.
Sur la septième diapositive, lorsqu'on examine les données d'un point de vue provincial, on constate que les deux tiers des infractions de traite de personnes ont eu lieu en Ontario, alors qu'un peu plus d'une sur 10 a été perpétrée au Québec. En outre, il est clair que la traite des personnes est un problème qui touche principalement les grandes villes: près de 9 cas sur 10 de traite de personnes se sont produits dans les grandes villes. Cela n'est pas une surprise, puisque les études révèlent que les victimes sont amenées dans les villes où se trouvent les clients. En examinant à nouveau les données de la police, on peut voir que près de la moitié des infractions de traite de personnes commises au pays ont eu lieu à Toronto, à Ottawa et à Montréal.
Sur la diapositive suivante, on trouve un graphique qui répartit les victimes de la traite des personnes selon leur groupe d'âge. Tout d'abord, notons que sur les huit années de données que nous avons analysées, il s'est avéré que 95 % des victimes étaient des femmes, et le plus souvent, il s'agissait de très jeunes femmes. Près de la moitié des victimes de la traite étaient âgées de 18 à 24 ans. De plus, un peu plus du quart des victimes avaient moins de 18 ans. La majorité des victimes connaissaient la personne accusée du crime. Les relations les plus courantes entre la victime et l'accusé variaient de simples connaissances, à des relations intimes, mais pas conjugales, des relations d'affaires ou des relations criminelles.
Sur la neuvième diapositive, on retrouve un graphique qui montre la répartition selon l'âge des personnes accusées. Je voudrais maintenant attirer votre attention sur le fait que la grande majorité des auteurs présumés de la traite de personnes sont des hommes, et que plus de 4 infractions sur 10 impliquent des jeunes âgés de 18 à 24 ans, alors que plus d'un tiers des infractions sont commises par des hommes âgés de 15 à 24 ans.
Sur la dernière diapositive, la dixième, il est question de l'enquête dont j'ai parlé au début, soit l'Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle, grâce à laquelle Statistique Canada recueille de l'information sur les affaires judiciaires liées à la traite de personnes. Les données de cette enquête ont révélé que, de 2005-2006 à 2015-2016, 84 causes dans lesquelles une infraction de traite de personnes constituait l'infraction la plus grave ont été réglées par les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes.
Parmi ces causes de traite de personnes portées devant les tribunaux, la majorité, c'est-à-dire 60 %, se sont soldées par un arrêt ou un retrait, alors que près du tiers ont donné lieu à un verdict de culpabilité. Au cours de la même période, 222 causes portées devant les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes comportaient une infraction de traite de personnes qui n'était pas l'infraction la plus grave; il s'agissait le plus souvent de causes liées à des infractions de prostitution et à des infractions de privation de liberté. Parmi les 306 causes instruites par les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes qui comportaient au moins une accusation de traite de personnes, les deux tiers comprenaient plus d'une accusation de traite de personnes.
En conclusion, nous avons mentionné au cours de notre exposé que de nombreuses victimes de la traite de personnes sont réticentes à collaborer avec les autorités et que, par conséquent, il est difficile d'évaluer l'ampleur du phénomène. Il pourrait donc y avoir un certain niveau de sous-déclaration des incidents de traite de personnes au Canada.
En sachant que nos partenaires prennent très au sérieux le problème de la traite de personnes, nous nous efforçons de trouver des façons de mieux comprendre cette infraction. Nous trouvons des moyens de recueillir des données supplémentaires pour aider à orienter la politique. Un des exemples serait celui des questions améliorées qui ont été récemment ajoutées à l'une de nos enquêtes sur les établissements d'hébergement destinés aux victimes d'abus. L'enquête sera utilisée sur le terrain au printemps 2018 et permettra de recueillir des informations auprès des refuges. On demandera aux gestionnaires des refuges de faire rapport sur le nombre de résidents qui ont utilisé les services de ce type d’établissement pour des motifs liés à la traite de personnes, qu'il s'agisse de travail forcé ou d'exploitation sexuelle. Les résultats de cette activité de collecte de données seront publiés au printemps 2019.
Voilà qui conclut notre exposé. Merci.
:
Monsieur le président, je vous remercie de nous offrir l'occasion de discuter ici aujourd'hui de l'importante question de la traite des personnes.
Comme l'ont dit mes collègues du ministère de la Sécurité publique devant ce comité, le gouvernement du Canada est déterminé à accroître ses efforts pour combattre la traite des personnes et protéger ses victimes.
En tant que membre du groupe de travail fédéral sur la traite des personnes, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, ou IRCC, appuie les efforts nationaux visant à combattre la traite des personnes, que ce soit par ses propres moyens ou en collaboration avec d'autres ministères et agences du gouvernement fédéral.
[Traduction]
Mes collègues d'EDSC vous donneront davantage de détails sur le Programme des travailleurs étrangers temporaires. Pour ma part, j'aimerais concentrer mes observations sur trois volets: premièrement, le rôle de l'immigration dans le contexte de la traite de personnes; deuxièmement, ce que fait IRCC pour prévenir la traite de personnes; et troisièmement, les mesures que nous prenons pour protéger les victimes de la traite de personnes.
Tout d'abord, en ce qui concerne le rôle que joue l'immigration dans la traite de personnes, sachez que les politiques d'immigration du Canada visent à contribuer à la prospérité économique du pays, à notre tissu social et culturel et à nos obligations et traditions humanitaires. Chaque année, IRCC interagit avec des millions de clients et de demandeurs du Canada et de partout dans le monde, pour le traitement des demandes de visa, de permis de travail et d'études et de résidence permanente.
Comme vous le savez, la traite de personnes constitue une infraction en vertu du Code criminel du Canada, une infraction fédérale en matière d'immigration en vertu de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. En vertu de cette loi, il est interdit d’organiser l’entrée au Canada de personnes par enlèvement, fraude, tromperie, utilisation ou menace d’utilisation de la force ou de toute autre forme de coercition. Le recrutement, le transport, l’accueil et l’hébergement de telles personnes constituent également une infraction.
Comme nos collègues de Statistique Canada et de la GRC l'ont souligné, il est difficile d'évaluer avec précision l'ampleur de la traite de personnes au Canada. Jusqu'à présent, les éléments de preuve montrent que la grande majorité des accusations criminelles de traite de personnes ont été portées au Canada plutôt qu'à l'étranger et qu'elles étaient davantage liées à l'exploitation sexuelle qu'à d'autres types de travail forcé.
En revanche, lorsqu'on parle de travail forcé, les chercheurs ont soulevé des préoccupations à l'égard des personnes qui arrivent au Canada en tant que travailleurs migrants. Les travailleurs migrants représentaient moins de 1,5 % de la main-d'oeuvre du Canada en 2016. Ils présentent toutefois des vulnérabilités particulières qui contribuent à leur incapacité ou à leur réticence à rapporter des situations de traite de travailleurs, ou à s'en sortir. En plus de craindre pour leur sécurité ou pour celle de leur famille, ce qui se voit dans d'autres cas de traite de personnes, ils peuvent aussi être vulnérables pour les raisons suivantes: les barrières linguistiques et l'isolement; l'ignorance de leurs droits au Canada; la confiscation de pièces d'identité comme le passeport; les menaces de déportation ou les fausses promesses de statut de résident permanent.
Même si certains cas parviennent aux autorités, aux ONG ou aux médias, ces facteurs contribuent probablement à ce que les victimes hésitent à dénoncer leur situation, et à ce que tous les cas ne soient pas déclarés. C'est pourquoi la prévention et la protection sont les piliers clés de l'approche du gouvernement du Canada en matière de traite de personnes.
Laissez-moi maintenant vous décrire le rôle d'IRCC dans chacun de ces domaines.
Tout d'abord, avant de vous parler des outils visant à prévenir et à détecter les cas de traite des travailleurs, il est important de mentionner que nous travaillons en étroite collaboration avec une panoplie de partenaires, y compris EDSC, l'Agence des services frontaliers du Canada et, évidemment, les provinces et les territoires.
EDSC et IRCC partagent la responsabilité de gérer les programmes permettant l'entrée temporaire de travailleurs migrants au Canada. Il est important de souligner que l'immigration temporaire soutient la croissance économique du Canada. Par conséquent, ces programmes ont pour but de favoriser notre croissance économique en comblant les besoins en main-d'oeuvre. Cela améliore également le commerce et les liens entre les pays.
EDSC est responsable du Programme des travailleurs étrangers temporaires et de l'émission des études d'impact sur le marché du travail, qui permettent à des entreprises canadiennes d'embaucher des travailleurs étrangers temporaires lorsqu'elles ne trouvent pas de Canadiens disponibles. Une fois que l'employeur a son étude d'impact sur le marché du travail en main, il en informe le travailleur qui lui présente une demande pour un permis de travail et, au besoin, un visa auprès d'IRCC. De plus IRCC gère le Programme de mobilité internationale, dont l'objectif est de permettre aux employeurs d'embaucher des travailleurs étrangers afin de faire avancer les intérêts économiques et culturels du Canada, en plus d'autres avantages concurrentiels.
Ces deux programmes débouchent sur la délivrance d'un permis de travail à employeur déterminé, en vertu duquel le détenteur ne peut travailler que pour l'employeur qui y est inscrit.
Certains craignent que cette situation n'accentue la vulnérabilité du travailleur migrant en liant directement son statut d'immigrant à l'employeur. Il faut cependant savoir que ce permis est le fondement des régimes de conformité des employeurs associés au programme, lesquels figurent parmi les principaux outils de protection des travailleurs.
D'abord, en début de processus, les régimes de conformité établissent les exigences auxquelles l'employeur doit se conformer. Dans le cadre des deux programmes, l'employeur doit satisfaire à certaines conditions: participer activement à l'entreprise; respecter toutes les lois fédérales et provinciales applicables; fournir aux travailleurs migrants un salaire et un emploi équivalents à ce qui a été énoncé dans l'offre d'emploi; fournir un milieu de travail exempt de mauvais traitements; et conserver la documentation pendant six ans.
Puis, une fois le processus entamé, le régime de conformité permet de procéder à l'inspection de l'employeur pour s'assurer qu'il s'acquitte de ses obligations. Le régime de conformité n'a pas pour objectif de punir, mais plutôt d'encourager la conformité. Parmi les sanctions possibles, mentionnons les lettres d'avertissement, l'interdiction de participer au programme, les sanctions pécuniaires et la publication du nom des employeurs non conformes. Les cas pour lesquels on soupçonne des activités criminelles sont transmis à nos partenaires d'application de la loi.
En ce qui concerne le Programme de mobilité internationale, IRCC inspecte chaque année environ 25 % des employeurs qui embauchent des travailleurs migrants. En ce moment, près de 15 % des travailleurs sont trouvés non conformes, alors que la vaste majorité peuvent expliquer cela par des erreurs administratives ou des erreurs non intentionnelles.
Comme mes collègues d'EDSC vous l'expliqueront, nous travaillons à un certain nombre de mesures pour mieux renseigner et protéger les travailleurs migrants.
Pour terminer, j'aimerais vous décrire les mesures que prend IRCC pour protéger les ressortissants étrangers qui sont victimes de la traite de personnes et qui décident de dénoncer leur situation.
IRCC intervient habituellement lorsqu'un organisme d'application de la loi ou un organisme non gouvernemental aiguille une victime, potentielle ou confirmée, vers notre ministère. La victime potentielle peut aussi s'adresser elle-même à IRCC. Notre principal objectif dans une telle situation est de mettre la victime à l'abri du danger et de faire en sorte que son statut lui permette de rester au Canada et d'obtenir du soutien. Nous remplissons cette mission en permettant aux agents d'immigration de délivrer un permis de séjour temporaire aux ressortissants étrangers victimes de la traite de personnes. Ces derniers se voient offrir le Programme fédéral de santé intérimaire et des services de consultation. Les victimes qui ne possèdent pas de permis de travail peuvent en faire la demande au même moment. Tant le permis de séjour temporaire que le permis de travail peuvent être obtenus gratuitement. En 2016, IRCC a délivré 66 permis de séjour temporaire, dont 26 nouveaux permis et 40 permis renouvelés.
Les victimes de la traite de personnes qui se voient accorder un permis de séjour temporaire ont ainsi le temps d'évaluer leurs options, de se soustraire à l'influence des trafiquants, de se remettre des traumatismes physiques et psychologiques, de recevoir de l'aide et peut-être, si elles le souhaitent, d'aider les autorités dans le cadre d'une enquête ou d'une poursuite pour infraction présumée commise au Canada.
Les ressortissants étrangers victimes de la traite de personnes disposent de diverses options pour demander à rester au Canada de façon permanente. Ils peuvent par exemple invoquer des motifs d'ordre humanitaire, ou encore faire une demande au titre de la catégorie des titulaires de permis s'ils résident au Canada en vertu d'un permis de séjour temporaire depuis trois à cinq ans.
[Français]
Pour conclure, j'aimerais souligner que, grâce à nos partenariats et aux activités que j'ai évoquées aujourd'hui, IRCC appuie les efforts du gouvernement pour combattre la traite des personnes.
J'espère que l'information qui vous a été transmise vous sera utile.
Nous serons heureux de répondre à toutes vos questions.
Merci.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie également tous les membres du Comité permanent de la justice et des droits de la personne de nous donner l'occasion de leur faire part des efforts déployés par Emploi et Développement social Canada pour protéger les travailleurs migrants et pour assurer la conformité des employeurs au sein du Programme des travailleurs étrangers temporaires.
J'aimerais commencer par donner un aperçu du Programme, pour ensuite discuter de certains des enjeux auxquels font face les travailleurs étrangers vulnérables. Enfin, j'aimerais énumérer les mesures que prend le ministère afin de mieux protéger les travailleurs étrangers de tout type d'exploitation.
Comme mentionné par ma collègue d'IRCC, le Programme permet aux employeurs d'embaucher des travailleurs étrangers pour combler leurs besoins de main-d'oeuvre lorsque des citoyens canadiens ou des résidents permanents ne sont pas disponibles.
Le Programme est administré conjointement par EDSC et IRCC, avec le soutien de l'Agence des services frontaliers du Canada.
[Traduction]
EDSC est responsable de traiter et de délivrer les Évaluations de l’impact sur le marché du travail, les EIMT, à la demande des employeurs qui souhaitent embaucher des TET. Dans le cadre de ce processus de demande, les employeurs consentent à se conformer aux exigences du programme qui visent la protection des travailleurs migrants et du marché du travail canadien. Il incombe également à EDSC d’administrer le régime de conformité des employeurs pour le programme des TET.
Nous savons que les travailleurs qui arrivent au Canada en vertu du volet des postes à faible salaire, y compris les aides familiaux et les travailleurs du secteur agricole primaire, sont les plus vulnérables à l’exploitation. Comme ma collègue l’a dit, ces groupes sont plus vulnérables en raison des obstacles linguistiques, de l’isolement et du manque d’accès à de l’information juste sur les droits et les mesures de protection. Certains peuvent aussi craindre de subir des représailles et d’être renvoyés dans leur pays d’origine s’ils parlent.
EDSC prend très au sérieux la protection des TET et s’engage à leur assurer, quand ils viennent travailler au Canada, les mêmes droits et la même protection dont bénéficient les Canadiens. Nous avons mis en place un système de contrôle visant à détecter et à prévenir l’exploitation des travailleurs étrangers et nous travaillons sans cesse à l’améliorer.
EDSC dispose de l’autorité nécessaire pour effectuer des inspections administratives afin de veiller à ce que les employeurs respectent certaines exigences lorsqu’ils soumettent une demande au programme et qu’ils continuent de les respecter lorsque les TET sont au Canada. EDSC n’a cependant aucune compétence en matière pénale, notamment en ce qui concerne la traite de personnes, et transmet ces cas à l’ASFC et à la GRC.
[Français]
Avant de demander une étude d'impact sur le marché du travail, l'employeur doit afficher les postes à pourvoir à l'intention des Canadiens et des résidents permanents et doit s'inscrire aux services du Guichet-Emplois du gouvernement du Canada.
Le Guichet-Emplois a mis en place des mesures de sécurité et de validation pour évaluer l'authenticité des employeurs qui utilisent sa plateforme et des débouchés d'emploi qui y sont affichés.
[Traduction]
Pour ce qui est du processus des EIMT, il comprend l’évaluation du statut véritable et de la conformité antérieure des employeurs. Plus précisément, les agents de Service Canada doivent prendre en considération quatre critères pour confirmer qu’une offre d’emploi est légitime: l’employeur doit être véritablement actif dans l’entreprise; le poste offert doit correspondre à un besoin raisonnable de l’employeur; l’employeur doit pouvoir démontrer qu’il est en mesure de respecter les conditions de l’offre; et l’employeur doit s’être antérieurement conformé aux lois fédérales, provinciales et territoriales qui régissent l’emploi et le recrutement.
Fournir de l’information par divers canaux aux TET au sujet de leurs droits est une autre façon de veiller à leur protection, notamment contre la traite de personnes. Le gouvernement publie une brochure intitulée « Travailleurs étrangers temporaires — Vos droits sont protégés », dans les sept langues les plus parlées par les TET. Ce document leur donne de l’information sur leurs droits quand ils sont au Canada. Dans un avenir rapproché, Service Canada va se mettre à fournir de l’information directement aux TET lorsqu’ils présenteront leur demande de numéro d’assurance sociale, et nous créons en ce moment une page Web dédiée aux droits et aux mesures de protection des travailleurs étrangers temporaires.
Nous prenons aussi des mesures pour faciliter la communication d’information aux TET au sujet de leurs droits en travaillant plus étroitement avec les organismes de soutien des travailleurs migrants. Par exemple, en décembre 2017, la a annoncé que le gouvernement du Canada versait une subvention de 93 000 $ à la Migrant Workers' Dignity Association, en Colombie-Britannique, pour qu’elle conçoive 17 ateliers différents, des outils d’information et du matériel pour renseigner les travailleurs étrangers temporaires sur des sujets comme la traite de personnes, l’accès à des prestations, les contrats de travail et d’autres droits.
EDSC dispose d’un cadre global de conformité qui lui permet de veiller à ce que les employeurs suivent les règles du programme, ce qui contribue à la protection des TET. Les employeurs sont soumis à des inspections couvrant divers aspects, comme les salaires et les conditions de travail, et servant à veiller à ce que le lieu de travail soit exempt de tout type de mauvais traitements.
À la suite des recommandations du Comité HUMA et du vérificateur général, nous avons pris une série d’initiatives visant à améliorer le régime de conformité. Afin de mieux cibler nos ressources et nos efforts, nous avons lancé un nouveau modèle de prédiction fondé sur le risque qui aide à identifier les employeurs devant faire l’objet d’une inspection, la priorité étant accordée aux cas à haut risque.
Le ministère a nettement augmenté ses inspections sur le terrain, en ciblant de façon stratégique les employeurs des travailleurs vulnérables. Depuis avril 2017, le ministère a fait environ huit fois plus d’inspections sur le terrain qu’au cours de l’exercice précédent.
Et depuis avril 2017, environ 50 % des inspections réalisées ont révélé des employeurs qui avaient besoin de prendre des mesures correctives, sous une forme ou sous une autre, pour se conformer aux critères du programme. La plupart des employeurs règlent rapidement les problèmes cernés lors d’une inspection. Cependant lorsqu’ils ne peuvent pas se conformer, les employeurs peuvent faire l’objet d’une sanction administrative pécuniaire variant de 500 $ à 100 000 $ par infraction et être exclus du programme pendant des périodes possibles de 1, 2, 5 et 10 ans, ou en permanence dans les cas extrêmes.
Les renseignements sur les employeurs, les infractions commises et les pénalités reçues sont affichés sur un site Web public géré par IRCC. C’est un outil de protection des travailleurs très important pour les personnes qui sont à la recherche d’employeurs et d’occasions d’emploi.
EDSC exploite aussi un outil en ligne de signalement des fraudes et une ligne de dénonciation 1-800. Les TET et le grand public peuvent utiliser ces outils pour signaler des cas potentiels de mauvaise utilisation du programme. Toutes les allégations sont passées en revue et les mesures appropriées sont prises, et les allégations d’activités possiblement criminelles sont communiquées aux forces de l’ordre.
Nous continuons de chercher d’autres façons de rendre le régime d’intégrité plus fort notamment en réagissant aux recommandations du Comité HUMA et du vérificateur général, par exemple en accélérant nos efforts pour compléter une étude de la faisabilité de réaliser des inspections non annoncées sur place.
[Français]
EDSC continue de travailler avec des partenaires et des intervenants pour rehausser les mesures de protection des travailleurs et ainsi mieux prévenir les mauvais traitements et l'exploitation.
Le Programme collabore étroitement avec d'autres ministères fédéraux, comme IRCC, l'ASFC et la GRC, pour veiller à ce que tout cas possible de mauvais traitements ou d'acte criminel soit repéré et porté à l'attention des forces de l'ordre.
De plus, en tant que membre du groupe de travail fédéral sur la traite des personnes, nous agissons comme point central et centre d'expertise pour les efforts antitraite du gouvernement.
[Traduction]
Les responsables du programme travaillent aussi en étroite collaboration avec les partenaires provinciaux et territoriaux afin d’améliorer les ententes d’échange de renseignements et de promouvoir l’officialisation des services de soutien pour résoudre les différends entre employeurs et employés, mieux prévenir les mauvais traitements et aider les TET qui ont besoin d’aide. Comme on l’a mentionné précédemment, nous travaillons davantage avec les employeurs, les syndicats et les organismes communautaires voués à la protection des travailleurs étrangers vulnérables afin de mieux informer les TET de leurs droits pendant qu’ils sont au Canada. Nous continuons de travailler avec les gouvernements étrangers et les associations internationales aux enjeux liés à la protection des travailleurs.
En conclusion, le Programme des TET travaille sur plusieurs fronts afin d’accroître continuellement la protection des travailleurs et de minimiser les risques de traite de personnes.
[Français]
Merci de nous avoir permis de vous adresser la parole aujourd'hui.
Nous serons heureux de répondre à vos questions.