Il s'agit de la 72e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Nous sommes le mardi 26 février 2013. La séance d'aujourd'hui est télévisée, alors j'encourage tous les députés à éteindre leurs téléphones cellulaires ou, du moins, à les mettre en mode silencieux.
Nous aurons droit ce matin à une séance d'information sur le rapport d'enquête d'intérêt public concernant les incidents de harcèlement en milieu de travail au sein de la Gendarmerie royale du Canada.
Le premier témoin que nous entendrons ce matin nous vient de la Commission des plaintes du public contre la GRC. Il s'agit du président par intérim de la commission, M. Ian McPhail.
Nous vous souhaitons la bienvenue, monsieur.
Nous accueillons également Richard Evans, le directeur principal des opérations, et Lisa-Marie Inman, la directrice des examens et enquêtes.
Nous vous remercions de comparaître à nouveau devant le comité. Nous vous en sommes très reconnaissants. Nous vous remercions également du rapport que vous nous avez présenté à point nommé afin de nous donner l'occasion de l'étudier.
J'invite le président à faire une déclaration préliminaire, après quoi les députés pourront poser leurs questions et, on l'espère, obtenir vos réponses.
Monsieur McPhail, on vous écoute.
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Merci, monsieur le président. Nous vous remercions de nous avoir invités à comparaître devant le comité.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de me donner l'occasion de faire part au comité des résultats de l'enquête de la commission en ce qui concerne le harcèlement en milieu de travail à la GRC. Vous vous rappellerez qu'à l'automne 2011, plusieurs membres de la GRC, pour la plupart des femmes, ont formulé publiquement des allégations de harcèlement sexuel, ce qui a soulevé des questions dans l'esprit des Canadiens.
Étant donné que l'appui du public est d'une importance fondamentale pour que la police assume ses obligations, j'ai jugé qu'il était nécessaire de déposer une plainte et de lancer une enquête d'intérêt public à l'égard de la conduite de membres de la GRC sur la façon dont les allégations de harcèlement en milieu de travail ont été traitées.
L'enquête portait sur la conformité aux politiques et aux procédures de la GRC, le caractère adéquat de ces politiques, la rigueur et l'impartialité des enquêtes qui ont été menées sur les allégations de harcèlement ainsi que la formation sur le harcèlement. Au total, la commission a examiné 718 plaintes de harcèlement déposées entre 2005 et 2011.
Nous avons constaté que, pour la plupart, le problème concernait l'abus d'autorité — en d'autres mots, l'intimidation. L'enquête a également révélé que la plupart des présumés incidents de harcèlement se sont produits entre des membres de la GRC. Plus de 60 p. 100 des plaignants et plus de 70 p. 100 des mis en cause étaient des policiers en uniforme.
La ventilation selon le sexe des plaignants indiquait pratiquement une division égale entre les hommes et les femmes, tandis que chez les mis en cause, les hommes prédominaient. L'examen de la commission a aussi permis d'établir qu'on avait traité la plupart des plaintes de harcèlement en conformité avec la politique de la GRC sur le harcèlement. Cependant, comme on pouvait interpréter cette politique de différentes manières, son application n'était pas uniforme.
Cela étant dit, l'enquête a aussi révélé que le conflit en milieu de travail et le harcèlement existent bel et bien à la GRC. En somme, le rapport recommande vivement à la GRC d'entreprendre certaines étapes concrètes et mesurables pour améliorer sa manière de régler les allégations de conflit en milieu de travail et de harcèlement. Elle doit notamment modifier sa politique sur le harcèlement pour la rendre plus inclusive; établir, en dehors de la chaîne de commandement divisionnaire, une fonction centralisée de surveillance et de coordination des plaintes de harcèlement; mettre en oeuvre un mécanisme externe d'examen des décisions en matière de harcèlement, séparé du processus des relations de travail à la GRC, mais sans l'exclure; et fixer des délais pour la résolution des plaintes grâce aux nouveaux pouvoirs prévus par le projet de loi .
La commission a également recommandé que la GRC élabore une méthode d'évaluation exhaustive servant à mesurer et à quantifier les efforts accomplis pour un milieu de travail respectueux et que les résultats d'évaluation soient rendus publics. Ces mesures ont pour but d'améliorer la transparence du processus.
Même si les données empiriques présentées à la commission n'appuient pas la croyance largement répandue que la GRC est aux prises avec un problème systémique de harcèlement sexuel, il n'y a aucune preuve du contraire. Selon les membres de la GRC, seul un processus qu'ils définissent comme étant accessible, équitable, transparent et efficace permettra aux gens de se sentir à l'aise pour aller de l'avant.
Le harcèlement est un problème complexe qui exige une solution complexe. Les énoncés de politique et les procédures écrites ne suffisent pas à régler la question. Il doit y avoir, de la part de la GRC, une intention de créer un milieu de travail respectueux, et cette intention doit être suivie par des gestes concrets.
J'espère que l'enquête de la commission aidera à éclairer la GRC dans le cadre de ses efforts et permettra de promouvoir le plan d'action du commissaire sur l'égalité entre les sexes et le respect, lequel a été publié récemment.
Je me ferai maintenant un plaisir de répondre à vos questions.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur McPhail, je vous remercie d'être présent.
J'aimerais aussi remercier M. Evans et Mme Inman d'être avec nous. C'est extrêmement important, surtout à la suite du rapport que nous avons reçu.
Monsieur McPhail, votre rapport a conclu qu'il n'y avait pas de preuve concrète d'un problème systémique de harcèlement, mais de votre propre aveu, l'enquête était restreinte par le mandat et les pouvoirs de la commission. Votre rapport dépendait de plaintes existantes et de soumissions publiques.
Nous savons que souvent le harcèlement sexuel n'est pas dénoncé et que plus de 200 femmes ont entrepris un recours collectif contre la GRC.
Croyez-vous que votre enquête a été restreinte par votre mandat et les pouvoirs dont vous disposiez? Croyez-vous que le problème du harcèlement sexuel au sein de la GRC mérite d'être étudié davantage?
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En fait, vos questions vont au coeur même de nos recommandations, à savoir l'idée qu'il faut commencer à centraliser la tenue des dossiers.
Par exemple, il nous a fallu un certain temps pour repérer les divers dossiers de harcèlement. Je peux vous dire que la GRC s'est montrée tout à fait coopérative en nous remettant ces dossiers, mais ceux-ci étaient conservés dans les diverses divisions. À notre avis, il est important que les cadres supérieurs de la GRC aient accès à cette information, ne serait-ce que pour se doter d'un outil de gestion. Ce n'est pas le cas jusqu'à maintenant. Nous recommandons donc que la tenue des dossiers soit centralisée.
Nous recommandons également que la GRC conserve des dossiers pour les cas réglés à l'amiable. Nous prônons la rationalisation du processus. Nous proposons que la GRC nomme un cadre supérieur, à l'extérieur de la chaîne de commandement, qui serait chargé des questions de harcèlement. Nous préconisons aussi la conduite d'un examen externe de la façon dont la GRC a traité ces questions.
En somme, nos recommandations visent la manière dont le processus devrait se dérouler afin de le rendre plus ouvert, équitable, transparent et rapide. Nous sommes convaincus que si ces mesures sont prises, les personnes désireuses de porter plainte se sentiront plus à l'aise de le faire.
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Merci, monsieur le président.
Je suis heureux de vous revoir, monsieur McPhail.
Il va de soi que vos recommandations entraîneront certains coûts mais, si j'ai bien compris, vous n'étiez pas chargés d'estimer les coûts qu'occasionnerait la mise en oeuvre de vos recommandations.
Soit dit en passant, vos recommandations sont excellentes, et j'espère que la GRC allouera les ressources nécessaires pour les mettre complètement en oeuvre — mais, encore une fois, comme le gouvernement réduit les budgets de la GRC, celle-ci doit restreindre ses coûts, tout en répondant à d'autres demandes dont nous avons entendu parler, en particulier dans le cadre de notre étude des aspects économiques liés aux services de police. En raison des contraintes budgétaires, je doute qu'un jour, vos recommandations soient mises en oeuvre dans la mesure où vous le souhaiteriez. Toutefois, je suppose que ce n'est pas vraiment à vous de formuler des observations à ce sujet.
En ce qui concerne votre sixième recommandation, la GRC emploie-t-elle en ce moment des enquêteurs en matière de harcèlement?
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Merci, monsieur le président.
Je vous remercie d'être parmi nous.
À votre bureau, 718 dossiers ont été ouverts. Or selon la croyance populaire et les communications, pour chaque plainte déposée, il y a 21 personnes qui n'ont pas porté plainte. D'après un calcul rapide, ça nous donnerait un total d'environ 15 078 plaintes possibles.
Lorsqu'on parle d'un problème systémique à la GRC concernant le harcèlement, on soulève la question: est-ce un mythe ou une réalité?
À ce sujet, je vais citer la conclusion de votre rapport.
[...] la simple perception de l'existence d'un mauvais traitement systémique des employés par des collègues et des superviseurs, peu importe le sexe, [...] est en soi suffisante pour avoir une incidence [systémique] tant sur la confiance du public que sur la manière dont la police est perçue.
Que ce soit un mythe ou une réalité, on peut dire qu'il y a une incidence systémique. Je suis un peu étonnée. En fait, c'est toujours pareil: les fautifs sont souvent mieux protégés que les victimes. On essaie de régler la plainte avant qu'elle ne devienne publique et de faire en sorte que les personnes en cause s'entendent, pour qu'il n'y ait pas de plainte et que ça n'aille pas plus loin.
Lorsqu'un individu vole un simple litre de lait dans une épicerie, il est arrêté. On fait toute une histoire pour un litre de lait. Ici, il est question de harcèlement. C'est grave. Ce n'est pas à prendre à la légère. La réputation de la GRC dans son ensemble est en cause dans ce dossier. C'est vraiment sérieux.
Vous avez parlé des superviseurs. Parmi eux, combien y a-t-il d'hommes? Combien y a-t-il de femmes ou de personnes qui seront prises en considération par le superviseur? Parmi ces superviseurs, y a-t-il des femmes, et, le cas échéant, quel pourcentage représentent-elles?
Si mon affirmation est exacte, veuillez m’en informer. Votre rapport indique ce qui suit: « Les allégations de harcèlement en milieu de travail à la GRC ne sont pas un phénomène nouveau ». En effet, dans le cadre d’un sondage interne mené dans les années 1990, un certain nombre de membres de la GRC ont signalé avoir été victime de harcèlement sexuel en milieu de travail.
Si cette déclaration concernant le harcèlement en milieu de travail qui sévit depuis les années 1990 est exacte — et nous parlons en ce moment de résultats datant d’il y a un quart de siècle, soit quelque 25 années —, diriez-vous que, selon votre enquête et votre analyse, le taux de harcèlement sexuel augmente? Il nous faut utiliser des pourcentages, car il pourrait y avoir d’autres cas, et la GRC est le plus important employeur d’agents de police du monde entier. Si, simplement en le mentionnant, on tient compte du fait que, dans notre société d’aujourd’hui, les gens sont plus enclins à signaler le harcèlement sexuel, qu’ils ne l’étaient il y a 10 ou 15 ans, faut-il en conclure que le harcèlement sexuel est à la hausse? Diriez-vous que cette affirmation est exacte? N’hésitez pas à nous communiquer les raisons qui motivent votre réponse.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie M. McPhail et son personnel d'être venus aujourd'hui.
J’aimerais commencer par dire que les députés de ce côté-ci de la table ne remettent nullement en question l'intégrité de la commission ou les efforts qu'elle a déployés pour préparer ce rapport. Compte tenu de la teneur de certaines des questions qui vous ont été posées tout à l'heure, je me vois forcé d'utiliser l’analogie suivante: si l'on marche sur un trottoir en regardant vers le sol pour repérer des nids-de-poule, on ne trouvera aucune preuve de l'existence d'un poteau devant nous. Toutefois, cela ne nous empêchera tout de même pas de percuter le poteau en question. Je pense que c'est ce qu'on observe dans le rapport.
Dans les limites de ce que vous appelez votre mandat, vous avez brillamment réussi à examiner un certain aspect du problème, à savoir la façon dont la GRC gère les plaintes qu'elle reçoit. Cependant, vous n'avez pas été en mesure d'étudier le problème plus vaste qui a poussé de 200 à 300 femmes à porter devant les tribunaux des causes ayant trait au harcèlement sexuel au sein de la GRC.
Étant donné que vous êtes président par intérim d'une organisation qui a perdu deux employés l'année dernière, à la suite de compressions budgétaires, est-ce que certaines contraintes en matière de ressources vous ont forcé à limiter votre mandat?
:
Nous allons nous arrêter une minute pour permettre au témoin de se retirer et aux prochains témoins de s'installer.
Très bien. Reprenons nos travaux.
Bienvenue au Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Ce matin, nous avons une séance d'information sur le rapport d'enquête d'intérêt public concernant des incidents de harcèlement en milieu de travail au sein de la Gendarmerie royale du Canada.
Notre témoin, pour la deuxième heure, est le commissaire Bob Paulson, de la Gendarmerie royale du Canada. Nous remercions le commissaire de toujours prendre le temps de revenir nous aider dans nos délibérations, quel que soit le sujet, tant que cela concerne la Gendarmerie royale du Canada. Nous savons que vous êtes venu témoigner à quelques reprises et nous vous en sommes toujours reconnaissants.
Soyez donc le bienvenu. Nous avons hâte d'entendre vos observations. Si vous pouviez ensuite répondre à quelques-unes de nos questions, monsieur le commissaire, nous vous en serions également reconnaissants.
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Merci, monsieur le président.
Mesdames et messieurs les membres du comité, bonjour.
L'automne dernier, la GRC a réalisé à ma demande une étude comparative entre les sexes. Cette évaluation se voulait un examen objectif de nos pratiques et de nos politiques pour relever toute forme d'inégalité entre les sexes. Il s'agissait d'une des nombreuses initiatives de transformation visant à améliorer les choses à la GRC. Il y a deux semaines, notre plan d'action faisant suite à cette étude a été diffusé.
Notre plan s'articule autour de deux thèmes: la culture et la composition de la GRC.
[Français]
Notre plan comporte 37 mesures qui, entre autres, permettront d'augmenter considérablement le nombre de recrues féminines au sein de la GRC, avec pour objectif un taux de 30 % de membres féminins réguliers d'ici 2025.
[Traduction]
Nous prenons des mesures pour dissiper le manque de confiance et de transparence dans le processus de promotion afin de ménager un milieu de travail plus accueillant et plus respectueux.
[Français]
Nous entendons aussi favoriser le maintien en poste des effectifs féminins de la GRC.
[Traduction]
C'est un plan transformateur et novateur, qui nous poussera à nous dépasser pour atteindre nos objectifs. Chaque employé a un rôle à jouer. Je suis persuadé que nous réaliserons notre but et que nous saurons répondre aux attentes des Canadiens à l'égard de la GRC.
[Français]
Récemment, la Commission des plaintes du public contre la GRC a déposé son rapport sur le harcèlement en milieu de travail au sein de la GRC. Vous m'avez d'ailleurs convié à parler de ce sujet.
[Traduction]
Nous convenons tous qu'un examen civil indépendant est absolument essentiel pour préserver la confiance du public à l'égard du service de police. La commission présente dans son rapport une évaluation objective et indépendante de notre rendement sur cette question, et la GRC accepte ses constatations.
J'insiste cependant sur le fait que la commission a conclu que:
Les données empiriques recueillies relativement aux plaintes officielles de harcèlement n'étayent pas l'hypothèse selon laquelle la GRC est aux prises avec un problème systémique de harcèlement sexuel ou de harcèlement fondé sur le sexe en milieu de travail.
[Français]
La Commission des plaintes du public contre la GRC a relevé, comme nombre d'entre nous, je crois, de graves problèmes en matière de harcèlement, de discipline et de milieu de travail à la GRC.
[Traduction]
Pendant que les membres de la commission s'affairaient à cet important examen sur le harcèlement dans la GRC, j'ai fait mon propre examen, pour en arriver aux mêmes conclusions. J'ai déjà apporté de nombreux changements qui donnent suite aux recommandations de la commission, et je ne tarderai pas à aborder celles qui restent à mettre en oeuvre.
[Français]
La commission a fait 11 recommandations afin de nous aider à assurer un milieu de travail respectueux pour nos employés. Sur le fond, je les accepte toutes.
La GRC a déjà fait des progrès à l'égard de la plupart de ces points, notamment en mettant en place un mécanisme centralisé de supervision des plaintes de harcèlement et en élaborant des normes de service à l'égard du processus.
[Traduction]
La centralisation du processus de surveillance lié aux plaintes de harcèlement que j'ai demandée l'an dernier est appuyée par un outil de gestion des cas qui a déjà permis d'améliorer la surveillance et la présentation de rapports, tout en rehaussant la responsabilisation à tous les niveaux. Il me permet également, ainsi qu'à mon personnel, de relever les tendances et de mettre en oeuvre des stratégies de prévention.
Un nouveau guide sur la façon d'aborder le harcèlement sera distribué à l'interne dans les semaines à venir. Ce guide aidera les employés à analyser les situations qui pourraient constituer des cas de harcèlement au travail, tout en soulignant l'importance de les résoudre rapidement. Durant leur stage à Dépôt, tous les cadets de la GRC reçoivent une formation à ce sujet et sur l'importance de favoriser un milieu de travail respectueux.
[Français]
Nous avons également mis en oeuvre une formation obligatoire en ligne sur la sensibilisation et la prévention en matière de harcèlement à l'intention des employés. À l'heure actuelle, 94 % d'entre eux l'ont suivie.
[Traduction]
Les nouveaux superviseurs et gestionnaires reçoivent une formation supplémentaire sur la gestion des relations en milieu de travail, la promotion d'un lieu de travail respectueux et l'application de notre processus d'enquête sur les cas de harcèlement. Par ailleurs, nous avons parachevé et nous apprêtons à diffuser notre code de déontologie, qui comprend une obligation conforme aux normes de l'industrie, soit celle de rendre compte des relations de travail. Cela dit, la GRC doit toujours composer avec un régime déontologique ancré législativement qui est désuet, accusatoire et assujetti à des lourdeurs procédurales.
Le , Loi visant à accroître la responsabilité de la Gendarmerie royale du Canada, s'il est adopté, permettra d'établir un régime de gestion des ressources humaines équitable et efficient, axé sur le règlement rapide des problèmes de conduite et ce, par le niveau de gestion le plus approprié.
[Français]
Monsieur le président, membres du comité, je tiens à vous dire que la GRC accomplit des progrès. Il nous reste encore beaucoup à faire pour moderniser réellement notre institution, mais nous avons entamé le processus. Les Canadiens devraient reconnaître que, ce faisant, nous continuons de remplir notre mandat fondamental, soit d'assurer la sécurité des foyers et des collectivités du Canada.
[Traduction]
Cela revient à remplacer les moteurs et les instruments d'un gros avion de ligne. Le hic, c'est qu'il faut le faire en plein vol. Je suis toutefois convaincu que les hommes et les femmes de la gendarmerie ont l'étoffe voulue pour le faire.
[Français]
Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.
:
On doit faire la lumière sur l'approche de la tolérance zéro.
Ils en ont été informés. Ce que j'ai dit à mes gestionnaires, à commencer par les sous-commissaires, c'est que les dirigeants doivent participer à la gestion de leurs effectifs. Autrement dit, il y aura des conséquences pour les gestionnaires, les dirigeants et les superviseurs qui n'interviennent pas lorsqu'ils remarquent des traits de personnalité et des comportements chez des employés sur le lieu de travail, mais qui n'agissent pas non plus lorsque des gens déposent des plaintes.
C'est notre approche de la tolérance zéro, mais ce que nous visons vraiment, c'est d'avoir des travailleurs qui participent pleinement, qui sont bien conscients de la question des conflits et du harcèlement en milieu de travail et qui sont disposés à intervenir dès que la situation est connue ou dès qu'il est raisonnable de croire qu'une telle situation existe.
Par conséquent, je pense que les gestionnaires adoptent une approche beaucoup plus active à cet égard. J'aurais cru que nous aurions enregistré une hausse des plaintes, et c'est encore possible, même si ce n'est pas le cas jusqu'à présent. Je pense néanmoins que nous réussissons à faire savoir aux gens qu'ils ne doivent pas seulement rester les bras croisés à ne rien faire lorsque de telles situations surviennent.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Commissaire Paulson, je vous remercie beaucoup d'être présent. C'est grandement apprécié, surtout quand on a un sujet aussi important et aussi délicat que celui que nous étudions aujourd'hui.
Tout d'abord, vous avez parlé un peu, au début de vos remarques, des 37 mesures du plan que vous voulez présenter pour augmenter le nombre de femmes au sein de la GRC. Le ministre de la Sécurité publique vous avait envoyé une lettre, en novembre dernier, je crois, sur ce même sujet, soit l'augmentation du nombre de femmes au sein de la GRC.
Croyez-vous avoir les ressources nécessaires actuellement pour mettre en oeuvre ces 37 mesures que vous avez présentées dans le plan que vous avez remis?
:
Je vous remercie de votre question.
Je crois que oui. On n'a pas besoin de beaucoup de ressources pour le faire. Il faut un changement de mentalité et une modification de la façon de gérer.
[Traduction]
Autrement dit, je pense que ce n'est pas forcément tributaire des ressources, même s'il faudra consacrer une certaine quantité de ressources. Par exemple, j'ai récemment autorisé la mise en oeuvre complète de notre nouveau programme de formation de la direction. Pour ce faire, il faut des ressources, mais des ressources sont mises à ma disposition au sein de l'organisation. Pour notre initiative de recrutement, qui devrait cibler des groupes précis, surtout les femmes et les groupes d'équité en matière d'emploi, nous pourrions avoir besoin de quelques employés supplémentaires, mais nous pouvons les trouver par l'entremise des RH.
Il y aura donc sans aucun doute des coûts associés aux ressources, mais je pense que le tout repose davantage sur la capacité du gestionnaire de lire le plan, de le mettre en oeuvre et de rendre des comptes concernant sa mise en oeuvre. Il s'agit davantage de changer la mentalité au sein de l'organisation que d'injecter des fonds.
:
Oui, on va entreprendre des actions. Par exemple, il y aura des présentations dans les écoles et devant des groupes de femmes.
[Traduction]
Nous ciblons le groupe souhaité. Par exemple, je me soucie peu d'atteindre un taux de participation des femmes de 50 p. 100 d'ici deux ans, même si bien des gens critiquent l'idée. C'est très ambitieux. Certains déclarent que la disponibilité sur le marché du travail est aux alentours de 27 p. 100 ou moins. Je ne pense pas cependant qu'on a simplement à émettre un communiqué de presse pour annoncer qu'on embauchera plus de femmes. Il faut faire de la sensibilisation dans nos écoles et dans les groupes destinés aux filles dans nos communautés, telles que les Guides, et cibler ce groupe.
Je peux vous dire que je me suis adressé au nom de la GRC à un groupe participant au programme Rencontres du Canada il y a de cela quelques semaines. Il y avait probablement 200 jeunes dans l'auditoire. Je dirais que 80 p. 100 de ces jeunes étaient des filles de partout au pays. Je ne suis pas aussi certain que d'autres que les manchettes et la contreverse des derniers temps ont fait peur aux femmes. En fait, je constate que les femmes prêtent un intérêt accru à l'organisation.
Mais pour répondre à votre question plus précisément, nous devons cibler des groupes et surmonter les obstacles auxquels nous nous sommes heurtés dans le passé, notamment de trop tenir compte de nos obligations contractuelles visant à essayer de recruter de façon équitable partout au pays. Si les femmes que nous recrutons viennent en fait de deux ou trois provinces et qu'une main-d'oeuvre de sexe féminin est disponible dans ces provinces, alors c'est là où nous recruterons.
C'est une réponse un peu vague. J'en suis désolé.
Dans son rapport, M. McPhail a révélé qu'il ne pouvait pas trouver — et il a été assez précis lorsqu'il a témoigné devant vous — de preuves de harcèlement systémique à la GRC. Je me demande si vous pourriez vous prononcer à ce sujet.
Diriez-vous également qu'en tant que règle, si vous entamez une enquête avec une prémisse donnée en tête et que vous posez des questions qui soutiennent cette prémisse et pas celles qui pourraient vous mener vers une autre piste, ou si vous faites fi de certains éléments, vous trouverez des preuves? Je fais référence à un cas où, si quelqu'un veut dire d'emblée qu'il y a un problème systémique à la GRC et n'a que cela en tête, il en arrivera à ce résultat. Toutefois, dans une enquête indépendante et objective, on parvient à un résultat donné.
J'imagine que ce que je vous demande, c'est si vous croyez que la GRC a un problème systémique de harcèlement, et plus particulièrement de harcèlement sexuel.
Avez-vous examiné les pratiques exemplaires d'autres organisations policières pour offrir de la formation aux enquêteurs et élaborer ces politiques et ces principes?
:
En voici une, très rapidement: je me plains de la façon dont vous me posez des questions; j'ai le sentiment que vous me harcelez. Alors, la présidence intervient, voit ce qui se passe et dit, non, je ne pense pas ce soit du harcèlement; je crois que tous les deux vous ne vous comprenez pas et je souhaiterais que vous trouviez une solution.
Puis, vous contestez la décision de la présidence, vous dites que c'est une mauvaise décision et que vous avez un grief. Pour cela, il faut utiliser un formulaire différent, c'est un mécanisme distinct. Nous traitons à la fois le grief et la plainte de harcèlement.
Puis, une fois que le grief est étudié, nous fermons le dossier de harcèlement et toute décision rendue dans le cadre de ce cas de harcèlement...
M. Francis Scarpaleggia: Bien.
Comm. Bob Paulson: Donc, que l'action soit positive ou négative, elle fait l'objet d'un grief.
:
Je vous remercie de cette question.
Oui, c'est possible, mais il faut tenter de mener l'enquête le plus rapidement possible.
[Traduction]
Au stade de l'enquête, la majorité des enquêteurs sont des agents externes à l'unité à laquelle ils sont attachés. Occasionnellement, ils ne le sont pas, ils peuvent faire partie du détachement, mais pas de l'unité de travail. Cela revient à ce que je disais plus tôt, monsieur le président, au sujet de la recommandation visant un mécanisme externe d'examen des plaintes de harcèlement. Je suis en faveur de votre suggestion, celle d'avoir des comités.
Nous avons actuellement, dans l'Ouest, quelques comités d'employés qui s'intéressent de près à la façon dont sont traités les plaintes de harcèlement et les problèmes en milieu de travail. Je crois que cela mérite plus ample réflexion, mais il est délicat d'avoir des enquêteurs externes pour tous les cas, car ce n'est tout simplement pas faisable.
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... désolé, 30 p. 100, il faudrait que non seulement les femmes estiment que le milieu de travail est exempt de harcèlement, mais que les hommes le pensent aussi. Ce n'est pas une question qui ne touche qu'un genre; il est crucial que quelqu'un qui envisage une carrière à la GRC sache qu'il ou elle ne va pas subir de harcèlement dans son milieu de travail.
Pour moi, il y a deux enjeux. L'un à l'intérieur de la force, soit de s'assurer que cette question va être réglée, et je pense que le projet de loi aidera, et le rapport aussi, je l'espère; et le deuxième enjeu est le manque manifeste de confiance de la population au service de laquelle vous travaillez et il faut la convaincre que des mesures sont prises au sein de la force pour enrayer le problème.
Qu'avez-vous à dire sur ces deux enjeux et comment allez-vous les aborder? La recommandation 11 dit qu'une méthode d'évaluation exhaustive sera élaborée afin de s'assurer que les changements produisent les effets désirés et qu'on fasse part au public des résultats d'une telle évaluation.
Pouvez-vous nous dire ce que vous envisagez de faire pour mettre en oeuvre cette recommandation, puis comment allez-vous communiquer les résultats?
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Certainement. Merci pour la question.
Notre plan d'action aborde de nombreuses questions soulevées dans le rapport de la CPP. Nous prévoyons de communiquer régulièrement les progrès que nous réaliserons. C'est un moyen de regagner la confiance du public qui, comme vous l'avez dit, a été ébranlée par ces comportements regrettables, inutiles et scandaleux.
C'est ce que je prévois de faire, honnêtement: mettre en oeuvre le plan d'action, faire rapport de ses résultats au gouvernement et aux Canadiens. Mais j'espère aussi, pour revenir à l'analogie de la réparation d'un avion en plein vol, qu'en se concentrant sur les principales activités du service que nous offrons aux Canadiens, c'est-à-dire d'assurer leur sécurité dans leurs maisons et dans leurs collectivités — nos obligations opérationnelles —, nous pourrons rétablir le sentiment de confiance de la population à l'égard de la force.
Nous communiquerons les progrès au public — c'est aussi une recommandation de la CCP — et nous verrons alors si nous réalisons ou non des progrès. Nous avons pris quelques mesures pour réduire les plaintes de harcèlement et nous devrons rendre des comptes à ce sujet.
Merci.
Merci monsieur le commissaire d'être ici aujourd'hui.
Bien évidemment nous accueillons favorablement le rapport Égalité entre les sexes et respect. Nous avons peut-être des questions sur des lacunes que nous avons notées dans le rapport. Je vous souhaite bonne chance pour l'appliquer sans les ressources adéquates. Toutefois, mes questions ressemblent un peu à celles que j'ai posées à M. McPhail, soit que le rapport a tendance à parler de particularités plutôt que de généralités.
À la page 4, vous dites que la GRC n'a rien à gagner à nier l'évidence. Selon moi, il y a deux gros problèmes qui n'ont pas été soulevés directement et qui d'une certaine façon détermineront la réussite de votre plan.
L'un de ces problèmes est le fait que plus de 200 femmes ont intenté des recours collectifs contre la GRC. Elles ne sont pas mentionnées dans le rapport de M. McPhail parce qu'il ne s'est pas intéressé à elles, il est donc facile aux gens de dire qu'il n'y a pas vraiment de problème systémique de harcèlement sexuel. Qu'il y ait ou pas le mot « systémique » m'importe peu. Le fait est qu'il y a un problème.
Nous avons ce rapport et vous avez aussi le récent rapport de Human Rights Watch sur les femmes autochtones disparues et assassinées qui dit, que vous soyez d'accord ou pas, que des femmes ne déposent pas plainte parce qu'elles ne font pas confiance au système existant.
C'est ma question. Comment envisagez-vous de régler ces deux problèmes majeurs qui sont à la base de votre réussite de recrutement d'un plus grand nombre de femmes à la GRC?
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Merci, monsieur le président.
Permettez-moi de commencer immédiatement par établir la distinction entre les deux problèmes que vous avez reliés. Pour moi, ils sont complètement distincts. Je peux comprendre pourquoi vous voudriez les mettre dans la même phrase, mais les femmes de notre organisation doivent se sentir en confiance dans un milieu de travail sûr, et c'est l'objectif principal de notre plan d'action, pas seulement pour les femmes, mais pour les hommes, pour tous les employés.
Quand je dis que nous ne gagnerons rien à nier l'évidence, je n'ai pas nié l'évidence. Je sais qu'il y a un problème et nous essayons de le régler. En revanche, l'idée que des allégations pas encore fondées peuvent être faites et jeter les bases d'une grande restructuration des processus et des systèmes m'est étrangère. Ça ne veut rien dire du tout. C'est la raison pour laquelle je voulais avoir l'étude comparative entre les sexes. J'ai besoin de faits objectifs pour pouvoir formuler une réponse.
J'ai une vision pour l'organisation. Nous allons de l'avant. Ces problèmes se produisent. Pour les résoudre, il faut que je les comprenne. Et ça fait partie du mécanisme interne lié à ces poursuites, etc.
Je connais des femmes de l'organisation qui ont été harcelées. Je les ai rencontrées. J'ai pleuré avec elles. Ce qui est arrivé à certaines d'entre elles est terrible. Nous devons réparer ces torts et nous essayons de redresser la situation.
Mettons cela de côté pour un instant et parlons de Human Rights Watch. Dans ce cas aussi, je pense que des femmes ont peur de se plaindre, je dois comprendre pourquoi. Je dois m'assurer que c'est vrai. Cela ne fait pas partie de mon expérience. Mon expérience n'est pas de voir des personnes ne pas se plaindre de crainte de représailles de la part de la GRC. C'est quelque chose qui m'est étranger, j'ai donc besoin de plus d'information, et je dois l'obtenir. Je pense que nous devons faire attention à ne pas nous laisser entraîner trop loin dans certains de ces cas.
Il y a quelques cas effrayants. Le rapport de Human Rights Watch mentionne un cas qui fait l'objet d'un procès. Un policier aurait, au cours d'une arrestation, frappé une jeune femme au visage. Nous avons porté une accusation contre lui. Il est traduit en justice, il y a des accusations criminelles contre lui, maintenant même. Nous n'avons pas hésité à le faire.
Je pense que nous devons être prudents à l'avenir. Je veux avoir toute l'information. Je veux comprendre cette situation. Je veux que mes collègues et mes collaborateurs la comprennent, et s'il faut corriger quelque chose, nous la corrigerons.