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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 028 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 6 mars 2012

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

    Bonjour à tous, et bienvenue à notre comité.
    Le Comité permanent de la sécurité publique et nationale tient sa 28e séance. Nous sommes le mardi 6 mars 2012.
    Nous poursuivons aujourd'hui l'étude sur la surveillance électronique dans le contexte des services correctionnels et de la mise en liberté sous condition ainsi que dans celui de l'application des lois sur l'immigration, dans le but d'en déterminer l'efficacité, d'examiner le rapport coût-efficacité et l'état de préparation de la mise en oeuvre.
    Au cours de notre première heure, nous allons entendre Larry Motiuk, conseiller spécial de l'Équipe du renouvellement de l'infrastructure du Service correctionnel du Canada. Il a travaillé pour le Service correctionnel du Canada sur les normes régissant la surveillance des détenus mis en liberté sous condition, sur les ex-détenus, sur les délinquants violents ou à risque élevé ainsi que sur les processus d'évaluation et les programmes de traitement. M. Motiuk est professeur affecté à la recherche à l'Université Carleton et il possède un doctorat en psychologie.
    Monsieur, nous vous souhaitons la bienvenue au comité. Nous vous remercions d'être venu. Nous avons déjà entendu des représentants du Service correctionnel du Canada, mais je sais que votre témoignage apporte toujours des éléments nouveaux et nous sommes heureux de pouvoir obtenir des commentaires d'une personne qui a peut-être un point de vue légèrement différent.
    Puis-je vous inviter à présenter votre déclaration préliminaire?
    Je remercie le président et les membres du comité de m'avoir invité à parler aujourd'hui des initiatives du Service correctionnel du Canada en matière de surveillance électronique.
     Je m'appelle Larry Motiuk, et je suis actuellement affecté, à titre de conseiller spécial, à l'Équipe de transformation et de renouvellement du Service correctionnel du Canada. Je suis titulaire d'un doctorat en psychologie et d'une maîtrise en psychologie clinique.
     Avant cette affectation, j'ai été directeur général des Programmes pour délinquants et de la réinsertion sociale, de 2006 à 2010, à l'administration centrale du SCC. Dans le cadre de mes fonctions, j'ai fourni des conseils sur les politiques, la planification et les dispositions législatives touchant la gestion opérationnelle des délinquants en établissement et dans la collectivité. C'est au cours de cette période que j'ai participé, au sein de notre équipe de gestion, à la mise en place du Programme pilote de surveillance électronique.
    Au cours des 25 ans où j'ai travaillé au SCC, j'ai également été directeur général de la recherche pendant 13 ans, au cours desquels j'ai supervisé et évalué des projets de recherche opérationnelle d'envergure nationale. Ces projets portaient notamment sur les normes nationales régissant la surveillance des détenus mis en liberté sous condition, sur la santé mentale, les délinquants sexuels, la gestion du risque et l'efficacité des programmes correctionnels.
     J'ai rédigé de nombreuses publications au fil des ans et travaillé en étroite collaboration avec les divers ministères des services correctionnels à l'étranger. De plus, j'ai siégé au conseil d'administration de l'International Community Corrections Association, de 1999 à 2005.
    À l'image de l'étude actuellement entreprise par le comité permanent, le Comité d'examen du Service correctionnel du Canada s'est penché, en octobre 2007, sur le recours à la surveillance électronique dans la collectivité et a entendu diverses opinions préconisant l'utilisation de cette technologie pour contrôler tous les délinquants mis en liberté et aussi une utilisation limitée à certains délinquants soumis à une surveillance prolongée par le SCC.
     C'est à peu près au moment où le SCC examinait le recours à la surveillance électronique, que, si j'ai bien compris, vous avez entendu parler de l'analyse documentaire sur la surveillance électronique, réalisée par la Direction de la recherche du SCC.
     En réponse aux nombreuses observations et recommandations formulées par le comité d'examen, le SCC a lancé le Programme de transformation, une initiative ambitieuse visant à améliorer les activités du SCC et à renforcer la sécurité des Canadiens.
     Un grand nombre des initiatives mises en place dans le cadre du Programme de transformation ont été intégrées aux activités et aux plans du SCC, mais le travail n'est pas encore terminé, et le Programme de transformation demeure de la plus haute importance pour le SCC. Le SCC continue de réaliser des progrès dans les initiatives en cours du Programme de transformation qui ont permis au SCC de mieux se positionner afin de gérer efficacement la population de délinquants actuelle et de relever les nouveaux défis.
     Ces initiatives interreliées s'inscrivent dans les thèmes suivants: responsabilisation accrue des délinquants, élimination des drogues dans les établissements carcéraux, amélioration des programmes correctionnels et des compétences des délinquants relativement à l'employabilité, modernisation de l'infrastructure physique et renforcement des services correctionnels communautaires.
    Le projet pilote de surveillance électronique venait appuyer le Programme de transformation du SCC en augmentant la sécurité de la collectivité et du personnel, tout en accentuant la responsabilisation des délinquants, un élément clé de l'objectif du renforcement des services correctionnels communautaires.
     Le Service correctionnel du Canada en est à la phase 3 de son Programme de transformation, qui vise à assurer l'intégration continue des initiatives de transformation.
     En septembre 2008, le Programme pilote de surveillance électronique, PPSE, a été mis en oeuvre, et cela, dans un délai relativement court. Une proposition de projet, une charte du projet, un concept des opérations et des évaluations des facteurs relatifs à la vie privée ont été préparés. Les lignes directrices et les protocoles d'intervention élaborés en appui au PPSE ont été approuvés. On a créé de nombreux formulaires et documents opérationnels afin d'appuyer le projet et d'atténuer les risques.
     Plusieurs groupes de travail faisant appel à des intervenants internes ont été mis sur pied: le groupe de travail sur la SE, le groupe de travail des SGISE — notre volet technologie informatique — y compris l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels (AIPRP). Nous avons tenu des réunions hebdomadaires du comité national et un groupe de travail chargé de l'évaluation a été formé.
     La formation des agents communautaires de libération conditionnelle a eu lieu dans les bureaux de Hamilton, du centre-ville de Toronto, de l'Est de Toronto, de l'Ouest de Toronto, de London et de Kingston, et 32 employés l'ont suivie.
     Des séances d'information ont été organisées dans différents établissements de la région de l'Ontario et avec des partenaires des services de police dans la région métropolitaine de Toronto. Tous les intervenants externes ont été informés au moyen d'une lettre personnelle et de la distribution de dépliants d'information sur le PPSE, en plus d'être invités à demander de plus amples renseignements.
     Le programme pilote, initialement mis en oeuvre dans le District central de l'Ontario, a par la suite été étendu pour englober la plus grande partie de l'Ontario et le district du Nunavut.
    Les agents de libération conditionnelle ont permis au SCC de suivre jusqu'à 30 délinquants en même temps. Le SCC a obtenu ces services dans le cadre d'une lettre d'entente avec le gouvernement de la Nouvelle-Écosse, qui a fourni l'expertise en technologie.
     L'entente initiale conclue avec le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a expiré en septembre 2009, mais les services associés au projet pilote fournis par la Nouvelle-Écosse ont été prolongés d'un an, jusqu'en août 2010.
    Ma participation directe au projet pilote de surveillance électronique a pris fin en mars 2009. À ce moment-là, 22 délinquants ayant participé au PPSE n'ont entraîné aucun incident notable, ni soulevé de préoccupations importantes. Trois délinquants ont terminé le programme avec succès, et leurs bracelets ont été retirés.
    J'aimerais conclure ma déclaration préliminaire en mentionnant que le Canada a toujours pu s'enorgueillir d'être un chef de file mondial dans le domaine de la recherche correctionnelle et de la réadaptation. Que ce soit pour la mise au point d'outils d'évaluation scientifique pour le classement des détenus selon le niveau de sécurité, l'affectation aux programmes et le risque lié à la mise en liberté ou pour la conception et la prestation de programmes de réadaptation et de méthodes de surveillance à la fine pointe du progrès, nos spécialistes des services correctionnels ont toujours été à l'avant-garde.
     C'est grâce au talent et aux efforts des chercheurs et des spécialistes que le Canada obtient autant de succès. Nous devons plus que jamais miser sur l'avantage que nous possédons sur les plans de la technologie et de la recherche en matière correctionnelle.
     Je suis impatient de discuter avec vous de ces questions. Il est important que le point de vue correctionnel soit présenté à ce genre de réunion et que toutes les composantes du système de justice pénale travaillent ensemble pour obtenir des résultats efficaces et positifs en ce qui concerne la sécurité publique.
    Je vous remercie.
(1540)
    Merci, monsieur Motiuk.
    Nous allons maintenant passer au premier tour de questions.
    Nous allons donner la parole à Mme Hoeppner, pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, Monsieur Motiuk, d'être venu aujourd'hui.
    Au cours de notre dernière séance, nous avons entendu le témoignage d'un de vos collègues, qui, je crois a aussi participé à cette étude, M. Brian Grant, et il nous a donné une idée de la nature de l'étude effectuée en 2007.
    Je me demande si vous pouvez nous donner un aperçu général, basé sur votre participation à la collecte de... Je crois savoir que l'étude consistait à recenser la recherche et les autres études pour préparer ce rapport.
     Dans cette optique et également en vous fondant sur votre expérience sur le plan de l'aide fournie aux délinquants pour qu'ils retournent dans la société en étant réadaptés, pouvez-vous nous dire, quels sont, à votre avis, les avantages et les points forts de la surveillance électronique? J'aimerais également savoir quelles seraient les composantes et les aspects négatifs qui ne seraient pas très utiles pour ce qui est de réadapter les délinquants et de réduire la récidive?
    Pour répondre à la première partie de la question au sujet de l'examen de la recherche sur la surveillance électronique qui a été fait en 2007 et publié par la direction de la recherche, je le connais très bien parce que cet examen a en fait été lancé au moment où j'étais directeur général de la recherche.
     À cette époque, nous recherchions constamment de nouvelles méthodes et de nouvelles technologies applicables à la surveillance des délinquants et la façon de faire habituelle consiste à procéder à un examen systématique de la recherche effectuée, à explorer toute une gamme de questions et à prévoir les difficultés et le reste. Un des aspects les plus notables, si l'on se reporte à l'année 2006-2007, était que nous n'utilisions pas la technologie de la surveillance électronique, alors que de nombreux autres pays le faisaient tout comme, sur le plan national, certaines provinces.
    La technologie et son application ont soulevé à l'époque une certaine controverse. Nous avons néanmoins entrepris d'effectuer un examen systématique et approfondi. Je crois savoir que cet examen vous a été communiqué; on peut le consulter sur Internet, sur le site Web de la direction de la recherche du SCC. J'imagine que M. Grant vous a donné un résumé des points saillants de l'examen et des observations qu'il contient.
    Un des aspects à considérer qui est ressorti de la recherche portait sur l'efficacité de la SE pour réaliser tous les objectifs recherchés. Les résultats tirés de l'examen de la recherche étaient équivoques et mitigés. Lorsque l'on dit équivoques et mitigés, cela veut dire qu'il ne s'agit pas d'expérimenter, de démontrer ou d'adopter la technologie pour voir quelle orientation choisir. Les principaux facteurs justifiant la mise en oeuvre de cette technologie qui ressortaient de cet examen de la recherche étaient, dans l'ensemble, la volonté de réduire la population carcérale dans les autres pays ou de trouver les moyens de réduire les coûts. L'examen de la recherche effectué à l'époque indiquait qu'il y avait encore beaucoup à faire. La recherche ne disait pas que cela ne se ferait pas, mais que c'était encore à faire.
     Aspect classique de la plupart des examens de la recherche, nous avons également constaté que nous avions besoin d'études utilisant une méthodologie plus raffinée pour être en mesure de suivre des nouvelles technologies. Je peux vous garantir que cette technologie a considérablement progressé ces dernières années. Il a été frappant de constater qu'au moment où les évaluations et les études ont été publiées, la technologie avait déjà considérablement évolué.
    À cette époque, les aspects étudiés étaient la différence entre la technologie des émetteurs de fréquence radio et celle du GPS; personne n'avait beaucoup d'expérience dans l'utilisation de cette technologie, mais celle-ci suscitait énormément d'intérêt. Il existait également à l'époque une technologie qui combinait les deux. L'idée de base est que nous voulions utiliser la technologie la plus moderne possible et adopter une approche axée sur la technologie GPS. J'ai pensé qu'il serait intéressant de lancer un projet pilote qui aurait pour but de tester cette technologie.
    Pour répondre à la question portant sur les résultats de cette recherche, je dirais que nous avons constaté qu'il fallait faire encore davantage de recherche pour suivre les nouvelles technologies et pour bien comprendre à quoi serait associée la composante de valeur ajoutée de cette technologie, une fois intégrée aux stratégies existantes de surveillance communautaire.
    C'est l'examen de la recherche qui a été effectué à l'époque. Pour en revenir à la question de savoir ce que nous a appris notre examen de la recherche, je répondrai de la façon suivante à la question sur la surveillance communautaire et l'expérience acquise dans ce domaine.
     Dès que j'ai commencé à travailler pour le service correctionnel du Canada, j'ai été affecté au projet d'élaboration des normes régissant la surveillance des détenus mis en liberté sous condition. À l'époque, je venais du système provincial qui avait adopté une technologie basée sur l'évaluation du risque et des besoins de délinquants pour déterminer la fréquence optimale des contacts avec les probationnaires et les libérés conditionnels pour ce qui est des normes de surveillance dans le système provincial ontarien et nous envisagions d'en faire une norme de surveillance — nous voulions établir la fréquence optimale des contacts pour les délinquants fédéraux qui étaient surveillés dans la collectivité.
    La plus grosse partie de ce travail faisait suite à une grande enquête qui avait été tenue au milieu des années 1980, l'enquête Ruygrok, qui avait formulé des recommandations importantes au sujet des normes de surveillance communautaire des délinquants et des façons d'améliorer nos stratégies de surveillance. C'est ce qui a constitué le défi permanent des services correctionnels communautaires, à savoir améliorer les normes et les pratiques, améliorer la réponse aux préoccupations en matière de sécurité publique, réduire le risque de récidive des délinquants faisant l'objet d'une surveillance dans la collectivité et favoriser une réintégration plus sûre et la transition entre les établissements et la collectivité.
(1545)
    Le Service correctionnel du Canada a lancé de nombreuses autres initiatives pendant toutes ces années. Je me souviens des stratégies de gestion communautaire des délinquants et de la stratégie correctionnelle qui remontent au début des années 1990 et qui examinaient l'intégration par rapport à la continuité des soins du point de vue de la gestion des cas, de l'évaluation initiale à l'admission jusqu'à la surveillance et l'intervention institutionnelles pendant l'incarcération, la préparation des cas, la préparation de la mise en liberté et ensuite, la surveillance communautaire.
    Dans chacun de ces domaines, de grandes initiatives ont été lancées pour rechercher les moyens de réduire les coûts, pour améliorer l'efficacité et apporter des améliorations.
    Je dirais sans doute qu'un des principaux domaines dans lequel les progrès les plus importants ont été réalisés est celui des programmes correctionnels au sein du Service correctionnel du Canada. Nous avons des programmes correctionnels de pointe. Ils sont basés, évalués et étudiés à partir de données scientifiques; ils sont internationalement reconnus et il a été démontré qu'ils entraînaient une réduction importante de la récidive.
    Merci.
    Votre temps de parole est écoulé. Vous pourrez peut-être poser une question supplémentaire par la suite.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Chicoine.

[Français]

    Vous disposez de sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Motiuk, merci beaucoup d'être venu comparaître aujourd'hui pour nous faire part de vos expériences.
    J'aimerais que vous reveniez sur les avantages et les inconvénients. La plupart des personnes venues témoigner devant le comité ont eu de la difficulté à mettre en évidence les avantages de la surveillance électronique. Cela semble être coûteux, et il ne semble pas y avoir beaucoup d'avantages à cela.
    Votre expérience avec les projets-pilotes réalisés vous permet-elle d'établir que la surveillance électronique comporte des avantages clairs, ou encore que ces avantages sont mitigés, comme semblent le croire la plupart des gens qui sont venus devant le comité?

[Traduction]

    Comme vous le savez, le projet pilote a été évalué en examinant un certain nombre d'aspects. Je crois savoir que le comité a distribué ce document, qui examine de façon approfondie des aspects comme l'utilité de la technologie de la surveillance électronique et la question de savoir si elle est conforme aux priorités du gouvernement énoncées dans notre document de mission. Cette technologie a été déclarée être conforme aux priorités du gouvernement en matière de protection du public et de sécurité, ainsi qu'à notre document de mission pour ce qui est de ce que nous essayions d'obtenir.
    Sur le plan de la mise en oeuvre, l'évaluation a fait ressortir un certain nombre d'aspects comme des défis technologiques — qui vont de la pile au poids de l'appareil lui-même jusqu'à la dérive du signal et à l'alarme de sabotage.
    Un des principaux objectifs du projet pilote était de tester la technologie, d'acquérir de l'expérience avec chacun de ces modèles sur le plan de la durée de vie de la pile, de la dérive du signal, l'incommodité du port du bracelet et des appareils, tout cela jusqu'aux alarmes de sabotage et aux fausses alarmes.
    En utilisant cet équipement, nos agents opérationnels ont acquis une grande expérience de la façon de s'en servir. Le projet pilote a donné des résultats extrêmement utiles: il a permis de trouver des solutions technologiques et de les utiliser. D'après ce que je comprends, il existe une meilleure technologie et de meilleures façons de s'en servir. D'après ce que m'ont dit mes collaborateurs et les rapports qu'ils m'ont fournis pendant le projet pilote, je pense qu'il est possible de résoudre la plupart de ces problèmes, même si nous continuerons à connaître certaines difficultés. C'était là un des problèmes techniques mentionnés par la plupart des intéressés.
    En ce qui concerne le succès du projet pilote, l'évaluation a permis de constater qu'il n'était pas concluant, ce qui est conforme aux conclusions des autres études. Il n'a toujours pas été démontré que ces technologies permettent de faire des économies et offrent d'autres avantages. C'était un projet pilote qui portait sur un petit groupe d'individus choisis. Nous ne pourrons pas faire véritablement des économies sans mettre en oeuvre ce projet à l'échelon national et sans l'appliquer à un plus grand nombre d'individus, ce qui permettrait d'en retirer ces avantages. Le potentiel existe toujours. C'est donc un aspect qui n'est pas démontré et qui ne pourra l'être, si nous n'élargissons pas la portée du projet.
    Nous avons toutefois obtenu quelques avantages inattendus. Certains délinquants ont déclaré en avoir retiré un avantage personnel, dans le sens que cette surveillance a amélioré leurs possibilités de réinsertion sociale et les a aidés dans ce domaine. Ils ont passé des entrevues et ont été interrogés sur certains sujets de ce genre au cours de l'évaluation. Le projet pourrait donc offrir certains avantages dans ce domaine.
    Je lui vois toutefois au moins un point fort, celui d'ajout intéressant aux outils de surveillance. À tout le moins, cette technologie modernise notre capacité de savoir où se trouvent les individus qui doivent respecter certaines conditions en matière de zone géographique — des zones d'inclusion ou d'exclusion ou les endroits où ils doivent en théorie se trouver. Cela réduit également les efforts que nous devons déployer pour chercher le moyen d'intervenir, dans le cas où une alarme se déclencherait.
    Nous savons également que cela renforce ce que nous appelons « la responsabilisation des délinquants ». Pour un bon nombre de délinquants, la responsabilisation est associée à leur attitude, à leur comportement et à une compréhension de la façon dont ils agissent. Le fait que les délinquants aient été surveillés pendant toute cette période les a amenés à être extrêmement conscients du fait que nous savions où ils se trouvaient, et ils ont eu tendance à respecter ce genre de restriction.
    Cette technologie offre également d'autres possibilités à long terme. Nous savons qu'elle peut avoir pour effet de réduire la durée de l'application des conditions en matière de résidence. Elle pourrait être utilisée pour renforcer les stratégies communautaires et être intégrée à d'autres éléments, comme les rapports entre l'agent de libération conditionnelle et le délinquant. Nous savons également qu'elle peut être intégrée à une stratégie comportant des programmes communautaires, d'autres mécanismes de soutien, et qu'elle pourrait également renforcer ces mesures. Nous savons encore qu'elle peut offrir une solution de rechange à la suspension ou à la révocation de la libération, selon la situation particulière de l'individu concerné.
    Offre-t-elle donc des avantages de ce côté? Je dirais que oui. Sur le plan de la technologie, pour ce qui est des coûts, nous savons que les coûts diminueront si nous élargissons la portée du programme et renforçons notre capacité de l'utiliser pour différents types de délinquants.
(1550)
    Le projet pilote était limité à certains types de délinquant, pour la plupart les délinquants représentant un risque faible parmi tous les délinquants fédéraux faisant l'objet d'une surveillance. Il ne visait pas une clientèle à risque élevé, pour laquelle cette technologie pourrait fort bien offrir des avantages à l'avenir. Il faudra attendre une autre évaluation pour obtenir des éclaircissements sur cette question.
(1555)
    Il vous reste environ 40 secondes.

[Français]

    Comme vous l'avez mentionné, le Service correctionnel du Canada est un modèle pour le monde entier. Or puisque la surveillance électronique n'a pas beaucoup été utilisée et que, selon les recherches, c'est encore très coûteux, ne serait-il pas plus avantageux, au chapitre de la sécurité publique, de continuer à investir dans les programmes de réadaptation plutôt que dans une technologie qui n'est pas encore éprouvée?

[Traduction]

    Pour ce qui est de l'investissement dans les programmes de réinsertion sociale, le service et le gouvernement du Canada fournissent des ressources et ont investi dans l'élaboration de programmes.
    Une des grandes initiatives du programme de transformation a pour but de développer notre technologie et d'élaborer un modèle de programme correctionnel intégré qui soit multidimensionnel, qui nous fasse progresser sur le plan de la mise en oeuvre des programmes — un démarrage plus rapide des programmes pour les détenus ainsi que les diverses mesures prises dans la collectivité pour assurer la surveillance. Nous investissons dans ce domaine.
     Parallèlement, il faut également investir dans des outils de surveillance qui, combinés à notre stratégie communautaire globale nous permettront de faciliter la surveillance des délinquants et d'obtenir des données sur certains dossiers pour savoir ce que nous devons faire pour atteindre notre objectif, qui est le respect des conditions.
    Merci.
    Nous allons maintenant revenir du côté du gouvernement.
    Monsieur Norlock, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président. Je m'adresse à vous pour remercier le témoin d'avoir comparu.
    Je vais essayer de poser une brève question. Vous y avez déjà répondu en partie de différentes façons, mais j'aimerais avoir des réponses claires.
    Lorsque nous avons décidé au départ d'étudier ce programme, j'ai pensé que c'était un outil qui permettrait de faire des économies. Je suis une personne qui aime se donner des objectifs et je dirais donc que l'objectif général est celui que vous avez décrit: responsabiliser davantage la personne qui doit se réadapter, tout en essayant de réduire les coûts.
    C'est donc sur cet objectif que j'ai axé ma réflexion parce qu'il me semble particulièrement intéressant que ce programme offre la possibilité d'épargner beaucoup d'argent. Je crois que certains témoins nous ont déclaré que le coût par jour était d'environ 20 $, alors que la détention d'un détenu dans une cellule coûte entre 100 et 200 $ par jour. Cela m'indique dès le départ qu'il serait important de faire certaines choses en dehors des établissements correctionnels.
    Cela dit, et étant donné que votre programme a donné des résultats qui ne sont pas concluants, j'imagine que mettre sur pied un programme national — en fixant certaines limites de temps, parce que dans notre monde où il y a des gouvernements et une opposition, il n'est pas possible de mettre sur pied un programme permanent s'il ne vous donne pas les résultats... Serait-ce d'après vous une bonne idée que le comité propose, parmi ses recommandations, que l'on mette sur pied qu'un programme national qui s'appliquerait à la majorité des types de contrevenants pendant une certaine période — et je vais vous laisser décider quelle devrait être la durée souhaitable de cette période, mais je dirais que 18 mois à deux ans devraient suffire — en se fondant sur certaines choses que j'ai dites?
    Je dirais dès le départ que la mise en oeuvre, à l'échelon national, de la surveillance électronique et l'évaluation d'un tel programme deux ou trois ans après seraient des mesures extrêmement utiles. Cela nous permettrait d'élargir les critères de sélection au-delà des individus qui représentent un risque faible, ce qui nous empêche de démontrer qu'un tel programme a des répercussions intéressantes sur le plan des résultats dans le domaine de la mise en liberté sous condition pour cette raison.
    Recommander un programme de portée nationale au Canada est un aspect important à cause de l'étendue géographique de notre pays et de l'éloignement des lieux où nous devons assurer une surveillance. Cela est vraiment une excellente idée, du point de vue opérationnel, mais également du point de vue méthodologique.
    Pour ce qui est des délais, vous avez raison de penser que nous avons besoin de temps pour lancer une initiative de surveillance électronique et la mettre en oeuvre. En général, une période de deux à trois ans est idéale.
    Dans notre environnement opérationnel, il est assez courant de procéder à des évaluations cycliques pour examiner l'application dans le temps de nos programmes. Ces évaluations s'effectuent sur une période de trois à cinq ans pour un programme ou une mesure du genre. Il faut qu'elles soient bien conçues, bien gérées et qu'elles intègrent la mesure de plusieurs résultats pertinents. Il serait extrêmement important de mesurer certains résultats. Il serait bon de suivre les délinquants qui ont fait l'objet d'une suspension ou d'une révocation de leur mise en liberté et qui ont été renvoyés dans un établissement; ce pourrait être un des résultats qu'il faudrait examiner.
    Le respect des conditions de résidence qui sont imposées aux délinquants serait peut-être un autre résultat à mesurer. Un tel programme permettrait peut-être de réduire la durée d'application des conditions, ce qui veut dire que, même dans la collectivité, les coûts associés à l'accueil d'un détenu dans une maison de transition ou dans un centre correctionnel communautaire pourraient également être réduits.
    De sorte que, oui, une mise en oeuvre à l'échelon national pourrait offrir certains avantages.
    Du point de vue de la technologie, il nous faudra trouver les appareils et l'équipement et avoir les ressources pour les acquérir. Je pense que l'état de préparation opérationnel qui était le but du projet pilote initial, à savoir prouver que cela est possible... mais il faudrait également l'étendre au-delà d'une seule région pour pouvoir vraiment en mesurer l'impact. En allant au-delà d'une région, qui était la région de l'Ontario pour notre organisation, nous pourrions alors vraiment savoir quels seraient les résultats.
(1600)
    Je vous remercie.
    Comme vous le savez peut-être, nous avons parlé au cours d'une de nos dernières séances aux personnes qui fournissent ces appareils et la technologie. Au cours des cinq ou six années pendant lesquelles j'ai été député, toute une série d'appareils techniques sont apparus, avec lesquels même notre président jouait — je veux dire travaillait — avant la séance.
    Ma question va donc être la suivante. On nous a parlé des problèmes que pouvait poser le fait que la personne qui porte un de ces appareils prend le métro et fait des choses de ce genre. Je me demande si l'étude que vous avez effectuée vous a permis de déterminer — et je suis heureux de voir que vous avez parlé des caractéristiques géographiques du Canada — s'il y a une différence entre l'efficacité de ces appareils dans les zones urbaines et dans les zones rurales. Il n'y avait pas de métro dans les collectivités dans lesquelles j'ai vécu. Elles sont situées dans des régions rurales et on n'y trouve pas beaucoup d'édifices de grande hauteur.
    Avez-vous constaté des différences sur ce plan? Pourriez-vous nous en dire davantage?
    J'ai moi-même constaté certaines de ces limites au début de la mise en oeuvre du projet pilote à laquelle j'ai participé. Nous étions en train de surveiller des délinquants au centre-ville de Toronto et il arrivait qu'ils disparaissent tout à coup dans le métro. Mais ils doivent tout de même réapparaître à un moment donné. Nous avons progressivement appris à reconnaître leurs types de comportement. Nos agents de libération conditionnelle sont devenus très habiles, tout comme le centre de surveillance, à discerner ces comportements et à en tirer des déductions.
    Sur le plan opérationnel, il existe certaines façons de régler ces problèmes à mesure que l'on acquiert de l'expérience avec la surveillance, en particulier pour ces zones mortes dans les édifices de grande hauteur et ailleurs.
    Pour ce qui est des zones rurales, nous avons surtout visé, dans les débuts du projet pilote, la région du Grand Toronto. Je pense qu'aujourd'hui, la technologie a fait des progrès. Je crois qu'il existe des façons de surmonter ces obstacles. C'est la raison pour laquelle nous lançons des projets pilotes, pour acquérir cette expérience de façon à mieux cerner les limites de cette technologie.
    Je dirais également au sujet des alertes de sabotage, auxquelles il ne faut pas toujours nécessairement répondre mais plutôt disposer de moyens supplémentaires pour vérifier ce qui se passe, il peut parfois suffire de faire un appel téléphonique. On pourrait également demander à une source d'information de vérifier où se trouve réellement l'individu en question, plutôt que d'envoyer un protocole d'intervention au service de police pour l'arrêter.
    Il existe également d'autres mécanismes de vérification, d'autres façons de réagir à ce genre de situation. Il faut approuver cette technologie, en comprendre les limites, chercher à l'améliorer et apprendre à en contourner les faiblesses, comme nous le disons, à l'égard des limites de ces appareils.
    Je vous remercie.
    Nous allons maintenant donner la parole à monsieur Scarpaleggia.
    Merci, monsieur le président.
    Vous avez fait une étude, vous avez recensé toutes les études et vous avez lancé un projet pilote. Je crois que d'autres études ont été faites à l'étranger, si je ne m'abuse.
     Qu'est-ce que peut apporter notre étude à vous et à votre ministère? Quels en sont les avantages pour vous? Nous avons écouté votre témoignage et celui d'autres personnes au sujet de la recherche qu'elles ont effectuée. Comment cette étude peut-elle vous aider?
(1605)
    Vous êtes placés dans une situation unique qui vous permet d'entendre le témoignage de divers experts et de vous familiariser avec la technologie de pointe. Je crois savoir que des fournisseurs de ces appareils sont venus vous parler de l'état actuel de la technologie. Vous avez eu la possibilité d'entendre divers points de vue sur l'utilisation de la technologie de la surveillance électronique.
    Je vais examiner avec beaucoup d'intérêt vos recommandations portant sur les aspects que nous pourrions améliorer dans notre pratique correctionnelle au Canada pour atteindre l'objectif ultime — améliorer la sécurité du public et la réinsertion sociale.
    Je dis en fait que nous n'avons rien entendu que vous ne connaissez pas déjà et que les fonctionnaires de votre ministère ne connaissent pas déjà. En fait, c'est vous qui nous informez; que pouvons-nous donc faire pour vous? S'agit-il simplement de recommander — et là, je crois que vous avez abordé cet aspect dans votre réponse à une autre question — que l'on affecte davantage de fonds à une étude beaucoup plus importante? Est-ce cela qui serait utile pour votre ministère?
    Je pense que cela nous serait effectivement utile. Chaque fois que nous essayons d'améliorer nos pratiques correctionnelles et que nous obtenons du financement, ou même si nous réussissons à mettre en oeuvre des recommandations législatives et des changements au droit, à la pratique et aux politiques, cela est utile.
    Votre ministère a-t-il déjà demandé aux autorités supérieures de financer une nouvelle étude? Votre ministère est-il prêt à demander le financement que vous aimeriez que nous recommandions?
    Je dois avouer que cela fait au moins un an que je ne participe plus à ce qui se fait dans ce domaine, mais je crois savoir que le ministère est en train de préparer des demandes de proposition. Elles visent les améliorations systémiques touchant toute la gamme des soins offerts par le service correctionnel. Je crois que tout cela est en route. Nous avons une équipe de la surveillance électronique qui attend que soit adopté le projet de loi C-10 et nous disposons d'un certain appui dans ce domaine. Nous procédons à des consultations avec les fournisseurs de service et les autres groupes de recherche pour faire progresser notre technologie.
    Si l'élargissement du recours à la surveillance électronique fait déjà partie du projet de loi C-10, cela veut dire qu'il était déjà prévu d'élargir cette utilisation. J'imagine que cette décision était fondée sur des données scientifiques indiquant qu'elle est efficace. Je crois que nous nous trouvons dans une sorte de cercle vicieux puisque le gouvernement va de l'avant avec la surveillance électronique étant donné qu'il a même inclus des dispositions à ce sujet dans son projet de loi. Vous semblez aller de l'avant pour ce qui est de financer d'autres recherches et puis nous intervenons pour vous recommander de poursuivre dans cette direction. Je ne comprends pas très bien ce qui se passe.
    Les résultats sont mitigés. Vous avez parlé de résultats mitigés ou équivoques. Mais il y a un domaine où, je vous le dis franchement, l'application de cette technologie n'est pas compliquée — elle ne mettrait personne directement en danger, même si le système n'est pas parfait — elle consisterait à suivre les déplacements de certaines personnes. Si vous preniez une population qui représente un risque très faible, et que vous vouliez simplement savoir où elle se trouve à un moment donné, ce serait, je pense, une excellente technologie. Elle ne serait pas dangereuse parce que les personnes que vous suivez ne sont pas nécessairement des délinquants dangereux, ni même vraiment des délinquants.
    Par exemple, pensez-vous que cette technologie pourrait s'appliquer plus facilement au domaine de l'immigration? On pourrait vouloir suivre les demandeurs d'asile déboutés, pour lesquels le gouvernement s'attend à ce qu'ils quittent le pays et même peut-être, pour lesquels le gouvernement a pris une mesure d'expulsion. Ne serait-ce pas là une utilisation qui représenterait le risque le plus faible et qui sera peut-être la plus efficace, étant donné que, dans les autres domaines, les résultats sont mitigés et que vous pourriez connaître des problèmes si la technologie n'est pas parfaite et que vous l'appliquez à des délinquants à risque élevé, cela pourrait créer un danger pour la sécurité publique si les choses ne fonctionnent pas comme on le souhaiterait?
    Ne pensez-vous pas que la meilleure façon d'utiliser cette technologie est simplement de suivre les déplacements de certaines personnes pour savoir où elles se trouvent?
(1610)
    Eh bien, suivre les déplacements des gens est une des utilisations possibles, mais il y en a une plus importante encore qui est de surveiller le respect des conditions. Qu'il s'agisse de restrictions géographiques ou de violations du couvre-feu, c'est un résultat important que de savoir que le délinquant qui fait l'objet d'une surveillance communautaire associée à une mise en liberté sous condition respecte ses conditions, qu'il s'agisse de conditions spéciales imposées par la Commission nationale des libérations conditionnelles du Canada ou...
    Puis-je vous interrompre pour vous poser une dernière question, parce qu'il ne reste pas beaucoup de temps.
    Vous en n'avez plus, il vous reste trois secondes. Merci, monsieur Scarpaleggia.
    Nous allons maintenant revenir à Mme Morin.

[Français]

    Vous disposez de cinq minutes.
    Je voudrais tout d'abord remercier M. Motiuk d'être ici aujourd'hui.
    Voici ma première question. Vous avez parlé un peu plus tôt de la responsabilisation des délinquants dans votre projet-pilote. Il faut rappeler que les délinquants qui participaient à ce projet-pilote étaient tous volontaires. À supposer qu'on mette systématiquement des bracelets de surveillance électronique à tous les délinquants en liberté conditionnelle, croyez-vous que ces délinquants feraient preuve d'une aussi grande responsabilisation et d'une volonté de collaborer comme dans le projet-pilote?

[Traduction]

    Je vais répondre à cette question en deux parties. Premièrement, il y a l'idée que tous les délinquants mis en liberté sous condition seraient surveillés de cette façon. Je ne pense pas que cela se fera. Je pense qu'il faudra élaborer des critères précis pour choisir ceux qui vont bénéficier d'une surveillance accrue dans ce domaine, pour veiller à ce que soient respectés les restrictions géographiques, les couvre-feux, les endroits où aller, ce genre de choses. De ce point de vue, je répondrai à cette question par non, nous ne voulons pas utiliser cette technologie pour tout le monde.

[Français]

    Merci.
    Par ailleurs, vous disiez que cette façon de faire avait été adoptée ailleurs dans le monde. Je crois avoir compris de vos propos que ça s'était fait ailleurs avant de se faire au Canada. On dit aussi que des gouvernements ont affirmé ne pas avoir économisé d'argent. On sait donc que ce n'est peut-être pas la solution idéale pour faire des économies. Tout de même, y a-t-il eu d'autres études comparatives impliquant le Canada et d'autres pays semblables où la surveillance électronique a été utilisée?

[Traduction]

    Je répondrai à cette question en disant qu'il est toujours difficile de faire des comparaisons parfaites entre ce qui se fait ici et ce qui se fait ailleurs, sur le plan des objectifs recherchés avec ces diverses technologies.
    Certains pays estiment que cette technologie est utile pour certains genres d'affaires pour lesquelles nous ne l'avons pas encore essayée. Un exemple classique serait les personnes déclarées coupables d'une infraction sexuelle qui font l'objet d'une surveillance, par exemple, parce qu'elles représentent un risque plus élevé que d'autres pour ce qui est du respect des restrictions géographiques ou des zones d'exclusion concernant leurs déplacements.
    Nous n'avons pas d'expérience dans ce domaine, ni même dans le cadre de notre projet pilote. Néanmoins, dans l'ensemble, d'autres pays ont testé la technologie, parce qu'ils recherchaient des solutions à certains problèmes très courants, comme l'augmentation des coûts associés à l'incarcération, la recherche d'autres moyens de surveiller les délinquants, d'empêcher ces personnes de retourner trop tôt dans la société. Il existe peut-être d'autres solutions et ces pays les explorent.
    Si nous regardons ce que font la plupart des autres pays, nous constatons qu'ils font face aux mêmes défis. Ils comprennent l'augmentation des coûts, l'augmentation des populations carcérales à gérer, ainsi que la gestion des populations de délinquants à caractéristiques complexes.
    Nous ajoutons les aspects reliés aux restrictions géographiques. Dans certains cas, les autorités ne font pas face aux mêmes défis, parce qu'il s'agit de zones relativement peu étendues, sur le plan géographique. Pour nous, la situation est différente.
    Il y a plusieurs opinions sur la façon dont nous pourrions probablement renforcer la protection de la société en adoptant toutes les technologies, en les essayant et en voyant comment elles peuvent améliorer les résultats.
(1615)
    Vous avez 30 secondes.

[Français]

    Je serai brève.
    Étant donné que les résultats du projet-pilote ne sont pas concluants, pourquoi aller plus loin? Est-ce que ce sera plus concluant si on va plus loin?

[Traduction]

    Le projet pilote comportait un certain nombre d'objectifs qui nous ont fourni des données importantes. Le principal objectif du projet pilote de la surveillance électronique était de voir si nous étions capables d'utiliser cette technologie, c'était le premier et le principal objectif.
    Nous voulions vérifier si nous étions capables de recevoir les données provenant de ces appareils, de les utiliser pour mieux comprendre le délinquant, notamment sa façon de se comporter lorsqu'il est sous surveillance.
    Le projet pilote a permis d'atteindre pleinement cet objectif. Avant ce projet, la seule expérience que nous avions était celle de notre ministère. Au cours de la première étape, nous avons demandé à 15 membres de notre personnel de porter des bracelets dans les locaux de l'administration centrale et à l'extérieur. C'est ainsi que nous avons testé ces appareils. C'est l'expérience que nous avons acquise au cours de la première étape.
    Au cours de la seconde, nous avons utilisé des délinquants qui ont accepté volontairement de participer au projet et qui faisaient déjà l'objet d'une surveillance communautaire. Et ensuite, nous avons étendu le projet à ceux qui étaient sur le point d'être mis en liberté, mais qui devaient respecter des conditions de résidence ou de couvre-feu et ils y ont participé volontairement.
    Je vous remercie.
    Nous allons maintenant revenir du côté du gouvernement.
    Monsieur Aspin, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Motiuk, de comparaître devant le comité pour nous exposer vos connaissances.
    Je m'intéresse à un point de vue plus large et je me demandais si vous pensez qu'il existe dans le monde des technologies qui sont plus efficaces que celles qui sont utilisées au Canada.
    Pour ce qui est des technologies permettant de surveiller le respect des conditions pendant que le délinquant fait l'objet de surveillance dans la collectivité, je dirais qu'il n'existe pas à ma connaissance de technologie supérieure ou plus efficace.
    Je sais par contre que ce domaine évolue. Il y a de meilleures technologies qui s'intéressent à des aspects comme la durée de la pile, le problème des dérives du signal, le sabotage des appareils, l'enlèvement des appareils et les alarmes associées à ces manoeuvres.
    Quelles que soient les technologies qui existent à l'heure actuelle, je suis sûr que ceux qui pensent aller de l'avant avec un autre projet pilote vont utiliser la meilleure technologie existante.
    D'après ce que je sais, il n'y a pas de technologie qui soit meilleure, mais je pense qu'ajouter ces technologies à notre trousse d'outils de surveillance est une mesure utile.
    Je me demandais si vous pensiez qu'il serait souhaitable d'envisager d'utiliser ces technologies dans un autre milieu correctionnel.
    Pensez-vous au milieu correctionnel lui-même, comme les établissements?
    Oui.
    Cette technologie a été explorée dans d'autres domaines, comme les milieux ouverts, les milieux carcéraux. Nous n'avons pas encore examiné ces possibilités. S'il y a là des possibilités, nous allons peut-être les examiner à l'avenir.
    Je sais que la technologie vise toujours à savoir si la personne surveillée se trouve bien là où elle est. Il est probable que cet aspect soit également étudié ailleurs.
    Jusqu'ici, je ne connais pas de meilleure technologie, ni de cas où elle a été utilisée à l'intérieur des établissements correctionnels.
(1620)
    Cela a-t-il été proposé?
    Pas vraiment. Je n'ai pas entendu dire que cela avait été proposé. Cela a été envisagé, étudié comme une possibilité à explorer à l'avenir, mais sur le plan opérationnel, cela n'a pas été encore fait.
    Nous avons centré le projet sur le domaine qui représente le risque le plus élevé pour l'organisation. Ce sont les gens qui sont mis en liberté sous condition qui peuvent poser un danger pour la société et ne respectent pas leurs conditions. C'est le genre de renseignements précis que nous voulions obtenir.
    Nous savons où se trouvent ceux qui sont neutralisés et qui sont dans nos établissements de sécurité.
    Je me demandais si vous connaissiez d'autres projets pilotes qui ont pu être lancés ailleurs dans le domaine de la surveillance électronique.
    Je ne possède pas toutes les données sur le seul dont je suis à peu près au courant, mais je crois savoir que le Bureau fédéral des prisons des États-Unis examine cette technologie ou qu'il l'utilise et la teste également. C'est le seul projet que je connaisse à l'heure actuelle et que je puisse mentionner au comité.
    Merci.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie. Nous allons maintenant passer à M. Sandhu, pour cinq minutes.
    Merci d'être venu aujourd'hui.
     Nous avons eu des témoignages qui indiquent que le projet pilote a connu beaucoup de difficultés, notamment beaucoup de problèmes techniques. Il y avait de nombreux défis concernant la réception de signaux parasites, la perte et la dérive du signal. Un des experts que nous avons entendus ici a déclaré à un journaliste que c'était un désastre.
    Vous l'avez déjà mentionné, mais j'ai tendance à penser que les économies que l'on pourrait faire avec ce projet pilote n'ont toujours pas été réalisées. Nous n'avons encore pas fait d'analyse coûts-avantages pour ce qui est des économies réelles.
    Je suis quelque peu troublé et vous pouvez peut-être répondre à ma question. Comme vous l'avez fait remarquer, il semble que le Service correctionnel du Canada souhaite aller de l'avant avec cette technologie et la mettre en oeuvre dans l'ensemble du Canada; pourtant, nous ne savons pas ce que cela va coûter et nous ne savons pas quels seront les avantages que nous allons en retirer. Je suis un député, et je pense qu'une de mes principales responsabilités est d'être prudent avec l'argent des Canadiens et pourtant il n'y a aucun élément qui montre que nous allons faire des économies. Vous nous demandez d'investir... et pourtant l'utilité de cette technologie n'a pas encore été établie ou elle n'a pas permis d'en retirer clairement des avantages.
    Qu'en pensez-vous?
    Encore une fois, je crois que les économies découlant de l'utilisation de la technologie de la surveillance électronique sont encore du domaine du futur. Nous ne ferons pas d'économies tant que nous n'irons pas au-delà d'un projet pilote et appliquerons cette technologie de façon plus large à la population carcérale, et pour ensuite, examiner les résultats.
    Vous avez parlé d'un certain nombre de problèmes techniques qui sont apparus au cours de l'expérience de la SE, au début de notre projet. Cela faisait partie du projet, tester cette capacité. Nous avons examiné cette technologie et avons appris beaucoup de choses pendant la mise en oeuvre du projet pilote.
    Quant à savoir si l'objectif était d'avoir un effet direct sur la récidive, je vous répondrai que ce n'était pas le but recherché. Nous ne pensons pas que la SE aura un effet direct sur la récidive; elle constitue plutôt un outil de surveillance, que nous sommes en mesure d'intégrer aux autres mesures que nous prenons et qui donnent de bons résultats pour ceux qui en ont besoin.
    Là encore, c'est une question de sélection, de faire correspondre la stratégie à la gestion du délinquant dans la collectivité et d'atteindre notre but ultime, la réintégration dans la société ou l'amélioration de la sécurité publique.
    Cette question a été posée plus tôt par un collègue. J'aimerais que vous répondiez directement à cette question.
     Le gouvernement dispose de fonds limités. Je crois que ces fonds sont limités. Nous avons vu des études qui montrent que, si vous dépensez un dollar dans tel domaine, cela rapporte x dollars. Si nous dépensons un dollar sur la réadaptation sociale, on constate qu'il y a une certaine somme d'argent qui revient au gouvernement ou à la société. Pouvez-vous quantifier l'aspect financier de la surveillance électronique et nous dire quels sont les avantages que nous allons en retirer?
(1625)
    Pour nous, la surveillance électronique ne constitue pas un outil ou un programme axé sur la réinsertion sociale. Nous la voyons davantage comme un outil de surveillance. Nous cherchons à donner à nos agents de libération conditionnelle ou aux agents qui s'occupent de la surveillance communautaire, des outils qui leur permettent de suivre le respect des conditions, des restrictions géographiques, du couvre-feu et des déplacements d'un détenu libéré. Si nous décidons d'investir dans notre capacité à suivre le respect des conditions imposées au délinquant, avec des outils meilleurs que ceux que nous utilisions auparavant, alors nous espérons renforcer notre capacité de transformer l'organisation pour renforcer également la sécurité de la société et de notre personnel.
    Je vous remercie.
    Vouliez-vous poser une question, madame Hoeppner?
    J'ai un commentaire et ensuite, une question.
    Parmi les témoins que nous avons entendus, il y en avait un certain nombre qui était favorable à la surveillance électronique, mais aucun d'entre eux n'a déclaré qu'il s'agissait d'une solution magique qui allait réduire la récidive ou la criminalité ou encore favoriser la réadaptation des délinquants, à moins qu'elle ne soit associée à d'excellents programmes. Je pense que cela nous a été répété de nombreuses fois. Ceux qui critiquaient la surveillance électronique insistaient surtout sur l'idée que ce sont les programmes personnalisés qui sont l'élément essentiel en matière de réadaptation sociale.
    On nous a dit, même ceux qui critiquaient ces technologies, que la surveillance électronique est un outil utile dans le contexte dont vous avez parlé, à savoir la surveillance de ces individus pour savoir s'ils respectent leurs conditions. Si nous prenons un peu de recul et examinons l'ensemble de ces témoignages, on peut dire qu'ils vont tous dans le même sens. On nous a dit et répété que ce n'était pas une solution magique. Ce n'est pas une solution applicable à toutes les situations. Cela fait partie d'un ensemble et des mesures que le gouvernement peut prendre pour obtenir de meilleurs résultats dans le domaine correctionnel.
    Voici ma brève question, s'il me reste un moment. Nous avons entendu dire qu'au Manitoba, on utilisait la surveillance électronique pour les jeunes délinquants qui avaient volé des voitures. Je ne sais même pas s'il s'agissait d'un projet pilote officiel. Le problème est qu'ils se contentaient de retirer l'appareil. Ils retiraient ces dispositifs et il ne semblait pas y avoir de conséquences. Je me demande si la mise en liberté sous condition des jeunes contrevenants s'effectue différemment que celle des délinquants adultes.
    Dans les études que vous avez examinées, a-t-on mentionné le problème qui venait du fait que les délinquants adultes retiraient tout simplement leur bracelet? Ou est-ce que peut-être ils ne le faisaient pas à cause des conséquences?
    Je vous répondrai simplement qu'en termes de gestion des délinquants, l'apprentissage par les conséquences est important et que, si quelqu'un décide de ne pas respecter les directives — pendant le projet pilote, on les appelait directives locales — à savoir porter le bracelet, il en subisse les conséquences qui pourraient être la détention. C'est là un outil très efficace à lui seul. Il est important qu'un comportement ait des conséquences concrètes.
    Je ne suis pas au courant de l'expérience manitobaine à l'égard des jeunes contrevenants. J'imagine que, s'il n'y avait pas de conséquences, il n'est guère surprenant qu'ils le fassent. S'il n'y a pas de conséquences, ils vont continuer à ne pas respecter les directives.
    Nous axons notre action en fonction de quatre principes fondamentaux de gestion du risque. Le premier est une bonne analyse des évaluations. Le second est une bonne communication. La surveillance des activités est un autre principe de gestion du risque qui est vraiment important. S'il y a un problème, il faut intervenir. C'est l'aspect surveillance que nous voulons améliorer avec notre technologie, dans tous les domaines, au sein des services correctionnels.
    Monsieur Moore, vouliez-vous poser une brève question en qualité de membre invité?
    Oh non, c'est très bien ainsi, monsieur le président. Je vous remercie. Cela a été très intéressant.
(1630)
    Très bien. Eh bien, voilà qui achève le temps que nous avions prévu pour vous entendre aujourd'hui. Nous vous remercions d'être venu et remercions le Service correctionnel de s'être présenté ici pratiquement chaque fois que nous le lui avons demandé. Je vous remercie.
    Nous allons suspendre la séance pour un instant, et nous allons nous préparer pour nos deux prochains invités, qui vont tous les deux témoigner par vidéoconférence. Merci.
(1630)

(1635)
    Bonjour. Lors de la deuxième heure de cette séance, nous allons poursuivre notre étude de la surveillance électronique. Notre premier témoin au cours de cette heure, qui va comparaître par vidéoconférence à partir de Toronto, est Mme Barbara Jackman, avocate spécialisée en droit de l'immigration et des réfugiés.
    Est-ce que vous entendez bien, madame Jackman?
    Oui, j'entends bien, je vous remercie. Est-ce que vous m'entendez?
    On vous entend très bien.
    Mme Jackman participe activement au programme de formation juridique permanente de l'Association du Barreau canadien ainsi qu'aux travaux du Barreau du Haut-Canada et des congrès universitaires et communautaires. Elle est bien connue au Canada en tant que militante sur les questions liées à la pratique du droit de l'immigration et des réfugiés, du profilage racial, du rôle et des pratiques de la Cour fédérale et de la Cour suprême du Canada, des questions portant sur l'immigration et la sécurité nationale du Canada, ainsi que sur les normes et les pratiques nationales et internationales en matière de droits de la personne.
    Nous espérons pouvoir aussi accueillir cet après-midi, Lorne Waldman. Je vais vous le présenter tout de suite, même si j'ai cru comprendre qu'il n'était pas encore arrivé. C'est un avocat spécialisé en droit de l'immigration canadienne et en droits de la personne. M. Waldman a comparu à maintes reprises devant les tribunaux canadiens à tous les niveaux et il a été le défenseur dans nombre de procès importants touchant le droit de l'immigration et les réfugiés. Il est connu au Canada en tant que conseiller intervenant fréquemment dans les médias sur les questions liées à l'immigration et aux réfugiés. En août 2007, M. Waldman s'est vu décerner par l'Association du Barreau canadien le prix Louis Saint-Laurent au titre de sa contribution au sein de la profession juridique.
    Notre comité est impatient d'entendre son témoignage ainsi que celui de Mme Jackman.
    Nous allons vous écouter en premier lieu, madame Jackman.
    Nous savons, simplement pour que les membres du comité en soient informés, que M. Waldman doit venir témoigner après sa sortie du tribunal. Nous espérons qu'il sera en mesure de comparaître.
    Madame Jackman, vous avez la parole.
    On m'a dit de présenter un exposé, après quoi les membres du comité me poseraient éventuellement des questions.
    Je vais tout d'abord vous faire part de mon expérience en ce qui a trait à la surveillance électronique. J'ai représenté trois clients qui ont été soumis à une surveillance électronique dans le cadre de la politique d'immigration. Deux d'entre eux posaient un problème de sécurité nationale et le troisième était accusé d'avoir été mêlé aux activités d'un gang de rue un certain nombre d'années auparavant sans que ce soit le cas au moment considéré. Ces hommes ont été soumis à une surveillance électronique, en plus de se voir imposer d'autres conditions.
    Dans les deux affaires impliquant la sécurité nationale auxquelles j'ai pris part et qui ont fait appel à une surveillance électronique, celle-ci s'est poursuivie du printemps 2007 à l'heure actuelle, de sorte que ces personnes portent un bracelet GPS depuis environ cinq ans. L'homme qui a été soumis à une surveillance électronique en raison d'une criminalité antérieure dans une affaire d'immigration a dû porter un bracelet pendant plus de deux ans.
    Si j'en crois mon expérience, je ne recommanderais jamais cette solution, à moins que ce soit à court terme, pendant une période fixe, pour des individus pour lesquels elle ne représente que la seule solution de rechange à une détention permanente dans le cadre de l'immigration. Je considère que cette solution peut être bonne dans certains cas, mais il faut que ce soit sur une période limitée. Lorsque cette mesure est appliquée indéfiniment, elle peut être cruelle, surtout lorsqu'elle vient s'ajouter à d'autres mesures, telles que l'assignation à résidence. À certains égards, j'estime qu'elle est plus cruelle que le fait de maintenir ces individus en détention, parce qu'ils sont hors du système carcéral et, à partir du moment où ils sont assignés à résidence tout en devant porter un bracelet GPS, ils sont détenus à leur propre domicile. C'est leur famille qui devient leur gardien, de même que la personne sans visage qui les surveille quelque part sur un écran GPS.
    Cette mesure peut être utile dans certains cas, mais il faut vraiment se demander si elle est justifiée. Ainsi, il peut être utile de mettre pendant un certain temps un bracelet GPS à des jeunes accusés d'avoir fait partie de gangs de rue, lorsqu'ils sont libérés sous caution, ou même dans le cadre de l'immigration, lorsqu'ils font face à un renvoi, plutôt que de les incarcérer, en les soumettant à un couvre-feu. S'ils ont un couvre-feu de 11 heures, on peut savoir s'ils sont rentrés chez eux à cette heure-là, en raison du GPS. Dans ce cas, le risque c'est qu'ils se retrouvent avec leur bande et d'autres jeunes en soirée pour commettre des délits. Il y a des raisons de recourir à cette technique dans des situations bien précises — non pas lorsqu'elle vient s'ajouter à une assignation à résidence, mais lorsqu'on impose un couvre-feu.
    Elle peut être aussi utile, non pas seulement dans le cadre de la justice pénale, mais pour des personnes qui souffrent de problèmes mentaux et dont on veut assurer la sécurité. C'est une façon de les localiser. Le procédé peut être utile lorsque l'on ne veut pas que des pédophiles, par exemple, fréquentent certains secteurs. On veut les éloigner des parcs et des établissements scolaires. On peut donc, de cette façon, vérifier à l'aide du GPS s'ils se tiennent à l'écart de ces secteurs. On peut savoir s'ils vont à tel ou tel endroit.
    Dans la plupart des cas, je ne pense pas que ce soit nécessaire, et on risque véritablement de perdre de vue dans quel but cette mesure a été imposée au départ. C'est ce qui s'est passé dans les affaires qui nous ont occupés. Je n'ai pas lu la transcription de tous les témoignages qui vous ont été présentés, mais j'ai pu relever que John Hutton avait déclaré que c'étaient les infractions sur des points de détail qui posaient un problème. C'est ce qui s'est passé dans nos affaires.
    Si vous consultez la jurisprudence des requêtes en révision présentées devant la Cour fédérale en ce qui concerne les certificats de sécurité faisant l'objet d'une surveillance par GPS, vous constaterez que c'est avant tout le non-respect des conditions fixées qui posait problème et non pas les infractions éventuelles à la sécurité nationale.
    Nous avons passé des jours et des jours à plaider devant les tribunaux en gaspillant l'argent du gouvernement. Dans l'une de ces affaires, l'intéressé n'avait pas le droit de prendre le bateau. On l'a retrouvé sur un pédalo. S'agissait-il ou non d'une infraction aux conditions fixées? L'intéressé peut aussi rentrer dans un bâtiment qui bloque les ondes du GPS. Il faut savoir que le GPS ne fonctionne pas dans le métro ou dans les centres commerciaux. Il est vraiment inutile pour nombre d'activités courantes. Dans des cas de ce genre, y a-t-il ou non infraction aux conditions fixées? Il faut éviter de gaspiller trois ou quatre jours devant un tribunal à faire venir des experts pour savoir si l'on a respecté ou non une condition, plutôt que de parler de sécurité nationale, qui est la véritable raison de l'imposition au départ de la surveillance GPS.
(1640)
    Personne d'entre nous n'y avait pensé, cependant. Tout est parti de l'affaire Harkat. Par la suite, d'autres avocats ainsi que les tribunaux ont pris le relais et se sont dit que plutôt que de détenir ces personnes pendant une longue période, il était peut-être préférable d'essayer la surveillance GPS couplée avec une assignation à résidence. Avec le recul, je me garderais bien de proposer une telle solution dans ce genre d'affaires.
    Dans l'une des affaires dont je me suis occupée, l'homme en cause a fait deux tentatives de suicide. Ce n'était pas simplement dû à la surveillance GPS; il y avait aussi l'assignation à résidence. Si la famille est quelque peu dysfonctionnelle, cela exacerbe les tensions. L'intéressé ne peut pas sortir de son domicile sans être accompagné par un surveillant, et s'il ne s'entend pas avec celui-ci, il est bloqué chez lui. De nombreux problèmes se posent sur une longue période.
    J'estime par ailleurs que cette méthode n'offre pas la protection qu'elle est censée accorder. Ainsi, la préoccupation dans nos affaires était que l'on ne voulait pas que ces individus aient de mauvaises fréquentations. Dans la pratique, on ne peut pas savoir avec le GPS s'ils communiquent ou non avec d'autres. On ne peut que les localiser et savoir où ils vont, et non pas avec qui ils parlent. Le but recherché n'est alors pas atteint. Cette solution est onéreuse, et elle n'en vaut pas la peine.
    Je pense que dans nos affaires c'est devenu en fait une béquille. Parce que la méthode existe, on s'en sert, qu'on en ait besoin ou non. Nous avons donc des clients qui sont soumis depuis cinq ans à une surveillance GPS. D'après ce que j'ai pu entendre dans l'ensemble au sujet de la surveillance GPS, on a en général recours à cette méthode que sur des périodes bien précises. Ce n'est pas le cas, toutefois, dans nos affaires. Je ne suis donc pas en faveur de ce procédé, sauf dans des cas très rares.
    En matière d'immigration, il y a d'autres modes de contrôle, tels que l'obligation de parler directement avec un responsable. On peut obliger l'intéressé à téléphoner tous les jours si on veut pouvoir le localiser. On demande assez souvent à l'intéressé de se présenter en personne. On peut rattacher les gens à un programme de libération sous caution — même si le programme de libération sous caution de Toronto, qui donne de très bons résultats, n'est pas autorisé à prendre en charge certaines affaires. Malheureusement, ce sont justement celles qu'il devrait prendre en charge, telles que les affaires liées aux bandes organisées et à la sécurité, parce qu'il assure une bonne supervision et oblige les gens à rester directement en contact avec certains responsables.
    Voilà tout ce que j'avais à dire.
(1645)
    Merci, madame Jackman.
    Monsieur Rathgeber.
    Merci, monsieur le président, et je remercie Mme Jackman de son témoignage sur cette question.
    Vous nous dites que vous avez eu trois clients ayant fait l'expérience de la surveillance électronique. J'aimerais savoir s'ils ont participé volontairement à une certaine forme de projet pilote ou si cela leur a été imposé par un tribunal ou par le Service correctionnel du Canada. Ce n'est pas un procédé qui est largement utilisé et je suis surpris d'apprendre que trois de vos clients y ont été soumis.
    Dans ces trois affaires, lorsque la surveillance par GPS leur a été imposée au départ, ils y ont consenti. Dans les trois affaires où la surveillance électronique a été imposée à nos clients, c'est un juge de la Cour fédérale qui l'a imposée. Dans l'affaire pénale impliquant une question d'immigration, c'est un membre de la Section d'immigration qui a imposé cette mesure, à laquelle venaient s'ajouter une assignation à résidence et d'autres conditions.
    Le problème s'est posé deux ans plus tard. Les justiciables ne voulaient plus de la surveillance GPS et le tribunal n'a pas voulu les en y libérer. C'est devenu une béquille dont les tribunaux font un usage immodéré. Je le dis en me fondant sur tout ce qui s'est passé ces cinq dernières années.
    Cela ne faisait pas partie d'un projet pilote? C'était en fait l'une des conditions de leur libération?
    Oui. Il serait bon que l'on étudie leur cas. Ils ont tous souffert de problèmes psychiatriques graves à la suite de cette surveillance GPS à long terme.
    Bien sûr. Vous conviendrez toutefois avec moi que le seul moyen pour eux d'être libérés, que ce soit d'un centre de détention provisoire ou de tout autre centre de détention en matière d'immigration, était de se soumettre à certaines conditions, l'une d'entre elles étant le port d'un dispositif de surveillance électronique. Leur état mental ne peut être qu'amélioré lorsqu'on les libère d'un centre de détention en leur faisant respecter les conditions que juge appropriées la Commission d'appel de l'immigration ou le tribunal.
    Non, je ne le pense pas. Selon mon expérience...
    Excusez-moi, poursuivez.
    Voulez-vous dire par là que leur état mental aurait été meilleur s'ils étaient restés incarcérés?
    Je pense que ça aurait été la même chose. Ils étaient de toute évidence déprimés en prison. Toutefois, leur état ne s'est pas amélioré lorsqu'on les a libérés, en raison de toutes les difficultés qu'ils ont rencontrées étant donné les conditions mises à leur libération. On ne peut pas transformer en gardien la femme et les enfants d'un détenu libéré. Lorsqu'il a besoin d'acheter quelque chose à Home Hardware ou à Home Depot, il ne peut pas y aller sans sa femme. Ce n'est pas lui qui a fixé les conditions, elles font partie d'un système, et ce système est très préjudiciable à sa santé mentale. En règle générale, la surveillance GPS n'est pas appliquée isolément; elle s'accompagne d'une assignation à résidence.
    En supposant que ce soit vrai, qu'on ne peut pas transformer en gardien la famille et le conjoint d'un détenu libéré — et je pense qu'il nous faudra avoir cette discussion à un autre moment — qu'est-ce qui fait qu'une personne accepte d'être libérée lorsque l'une des conditions est le port d'un bracelet GPS. Il m'apparaît que la difficulté ne provenait pas du GPS. La difficulté, c'est que ces personnes ne voulaient pas que leur conjoint et leur famille soient leurs gardiens. C'est ce qui a rendu difficile la libération. Ce n'est pas le dispositif qui posait un problème; c'est la nature des geôliers.
    Ce n'était pas le dispositif en soi, mais dans ce cadre l'intéressé devait appeler chaque fois qu'il sortait et chaque fois qu'il rentrait chez lui. Il fallait indiquer au responsable quel était l'itinéraire suivi, rendre compte en détail de tous ses déplacements. Il y avait un dispositif de surveillance qui les suivait partout. Le problème n'est donc pas celui de la surveillance GPS; c'est l'intrusion dans la vie personnelle. Il se trouvait qu'ils avaient effectivement accepté ces conditions. Ce que je vous dis aujourd'hui, c'est que si j'avais su à l'époque que l'ensemble des conditions était si préjudiciable à long terme — pendant six mois, c'est très bien, mais non pendant cinq ans — j'aurais recommandé à mes clients de ne jamais accepter.
    Je n'ai jamais pratiqué le droit de l'immigration, et il faut donc que vous m'aidiez ici.
    Est-ce que ces affaires ne sont pas revues périodiquement? Je sais qu'il faut attendre longtemps avant qu'un appel sur le statut de réfugié soit finalement tranché, mais les conditions de la libération ne sont-elles pas revues périodiquement? Si la libération sous condition s'avère, pour une raison quelconque, insoutenable ou impossible à supporter, la personne concernée ne peut-elle pas accepter d'être incarcérée?
(1650)
    La détention, une fois qu'on a été libéré, n'est pas non plus une solution. Je n'affirmerai pas qu'une libération sous condition est préférable à la détention — c'est pire que la détention. Les deux solutions sont mauvaises à long terme lorsqu'on n'est pas soupçonné d'avoir commis un acte criminel. Ces personnes peuvent poser un risque mais, d'un point de vue pénal, elles ont purgé leur peine. Du point de vue de l'immigration, elles risquent d'être expulsées; c'est là le problème, et c'est pourquoi elles sont soumises à une surveillance. Toutefois, je ne pense pas que la solution soit de les remettre en prison.
    Oui, il y a effectivement des mesures de révision. Nous retournons devant le tribunal et nous nous efforçons de faire supprimer la surveillance GPS. Pour l'instant, nous n'avons pas réussi. Le tribunal a maintenu cette mesure parce qu'elle avait été imposée au départ.
    Sur le plan national, savez-vous, c'est un chiffre que je ne connais pas, combien de mesures de renvoi sont prises au Canada chaque année par la Cour fédérale ou par la Commission d'appel de l'immigration?
    Non, mais je sais par contre que la surveillance GPS est appliquée à cinq ou six personnes en tout dans notre pays. Elle n'est pas largement utilisée. On ne fait que commencer à s'en servir.
    Je vous comprends. Ce que je vous demande, c'est si vous avez une idée — et j'imagine que je peux trouver quelque part la réponse — du pourcentage de mesures de renvoi qui font l'objet d'une application volontaire?
    Je n'en ai malheureusement aucune idée. Je n'ai pas les statistiques. Il vous faudra les trouver.
    Je sais par contre que l'on demande aux gens de parler régulièrement à un responsable. Il vous faudrait étudier cette question, il me semble que l'on a employé cette méthode avec beaucoup de succès pour localiser ces personnes.
    Cela ne permettra de les localiser que jusqu'à la date de leur mesure de renvoi. On peut penser que s'ils n'ont pas l'intention de respecter les conditions de la mesure de renvoi, ils ne vont pas téléphoner le jour suivant, et c'est là tout le problème. C'est dans ce cas...
    Sauf que l'on a pris l'habitude dernièrement d'incarcérer en fait ces personnes passibles d'un renvoi avant que les dispositions de renvoi soient prises.
    Je comprends bien, mais le problème ici, ou du moins c'est ce qu'il me semble, c'est que si on donne à une personne le choix entre la détention et une libération sous conditions, l'une d'entre elles étant la surveillance électronique, il me semble que la plupart des gens vont choisir la liberté et par conséquent vont porter un dispositif de surveillance — ce qui limite leur liberté, je vous le concède, mais moins que la détention. Je suis bien convaincu que ce dispositif est plus efficace si la personne en cause risque d'enfreindre une mesure de renvoi.
    Je pense que mon temps est écoulé, monsieur le président.
    Oui, votre temps est écoulé.
    Je vous remercie.
    Je remercie le témoin.
    Nous allons maintenant revenir à l'opposition. Nous allons donner la parole à M. Garrison, qui disposera de sept minutes.
    Merci, madame Jackman, d'être venue aujourd'hui.
    Je considère que votre témoignage est précieux car vous êtes le premier témoin que j'entends qui a été directement au contact de clients soumis à ce genre de conditions.
    J'aimerais revenir sur ce que vous avez dit concernant le fait que l'on n'a jamais étudié l'expérience subie par vos clients. Vous l'avez simplement mentionné en passant. Personne n'a jamais entrepris d'étudier, que ce soit les tribunaux ou tout autre service au sein du gouvernement, les répercussions de ce genre de conditions?
    Nous avons demandé à l'occasion des évaluations psychiatriques de nos clients à différents stades, aussi bien pendant leur détention que lorsqu'ils étaient libérés. Je n'affirme pas que la prison est préférable à la mise en liberté; je vous dis simplement que lorsqu'on impose un ensemble de restrictions, l'une d'entre elles étant la surveillance GPS, les problèmes psychiatriques continuent à se poser.
    Il y a une autre chose. Si le problème est aussi grave, c'est aussi parce que la famille, qu'elle fasse ou non office de geôlier, est affectée par la situation. Lorsque les agents viennent vérifier le mécanisme de surveillance GPS, les enfants les voient pénétrer dans le domicile avec des armes à feu. Et cela se produit très souvent. Voilà donc ce qui se passe... Il n'y a pas que l'intéressé qui se retrouve en prison; c'est lui, c'est sa femme, ce sont ses enfants que la situation dérange. Voilà pourquoi, entre autres, c'est si difficile, parce que les enfants souffrent aussi de cette situation.
    En concluez-vous par conséquent qu'à votre avis ce traitement est plus cruel que la détention?
    Sur un certain plan, je considère effectivement que ce traitement est cruel à long terme. Je ne vous parle pas de quelqu'un qu'on astreint pendant six mois à subir cette situation sans lui imposer en même temps une assignation à résidence, simplement pour qu'il respecte un couvre-feu ou toute autre condition de ce genre. La situation n'est alors pas la même. Le problème se pose lorsqu'intervient en même une assignation à résidence et que la famille est touchée. J'estime que ce traitement peut être cruel lorsqu'il s'étend sur une longue période.
    Dans votre exposé, vous nous dites que cette façon de procéder se transforme en béquille ou en recours automatique, le tribunal se contentant de maintenir les mêmes conditions sans se demander si elles sont véritablement utiles. Est-ce que je résume bien votre pensée?
    Je considère que c'est exactement ce qui s'est passé dans nos affaires. Une fois que l'on a adopté la mesure, on hésite à s'en débarrasser parce que c'est devenu une habitude. On ne se demande donc pas si c'est utile ou non. Je n'ai eu qu'un seul de ces clients posant un problème de sécurité dans une affaire pénale. Il a quitté le Canada et il est en train d'être parrainé pour y revenir.
(1655)
    Je sais que le temps nous est compté. J'aimerais maintenant que l'on parle du recours plus fréquent à la surveillance électronique pour les demandeurs du statut de réfugié, ce qui semble être envisagé ici. Pouvez-vous nous dire quelles sont les obligations du Canada en droit international aux termes des conventions sur les réfugiés et si cette forme de surveillance des demandeurs du statut de réfugié est conforme à nos obligations au plan international?
    Tant que le statut de réfugié n'a pas été reconnu, l'intéressé n'est qu'un réfugié présumé. Il faut que quelqu'un prenne une décision. Nous sommes cependant censés respecter la convention relative au statut de réfugié, et cela signifie qu'on n'a pas le droit de sanctionner les personnes qui demandent à être protégées par le Canada. Il est possible qu'on ne considère pas la surveillance GPS comme une sanction contre les personnes, mais dans la pratique c'est une sanction, et je considère que cela enfreint nos obligations en droit international.
    Je peux comprendre que lorsqu'on se préoccupe de questions de criminalité ou de sécurité, on veut s'assurer pendant une période donnée que l'intéressé va respecter ses obligations. Quelqu'un a évoqué le problème du renvoi. Qu'on le fasse en attendant une réponse de l'agent d'ERAR pour que la mesure lui soit appliquée à très court terme, avant le renvoi, et non pas pendant les cinq, six, sept, huit, dix années qu'il passe au Canada. C'est injuste et en plus c'est coûteux; c'est un gaspillage d'argent.
    Là encore, je me contenterai d'insister sur les coûts. Considérez-vous que ce recours à la surveillance électronique est un gaspillage de ressources?
    C'est tout à fait mon avis.
    Savez-vous ce qui se passe dans les affaires impliquant des certificats de sécurité? Il vous faut demander à l'ASFC combien de personnes elle affecte à la surveillance GPS. Il y a en permanence deux agents qui opèrent par roulement pour exercer une surveillance dans trois affaires — trois affaires. Je ne sais pas combien de personnes ont été engagées pour travailler dans ce service. Il continue à opérer et son seul travail est d'exercer une surveillance GPS en s'assurant que toutes les conditions sont respectées. On ne se contente pas de la surveillance GPS; l'intéressé doit appeler et dire ce qu'il va faire pour que les agents puissent le suivre alors qu'ils pourraient très bien le surveiller sur une carte GPS. C'est devenu en soi une industrie au sein du gouvernement. Ils se donnent du travail les uns aux autres dans ce cadre.
    Je vous parie que si vous demandiez combien cela coûte, cela se monterait à des millions de dollars. On a consacré des millions de dollars à la surveillance GPS. Avec quels résultats? Ces personnes ne passent pas leurs nuits à courir au sein de bandes organisées et à entrer par effraction dans les bâtiments. Ce sont des hommes mûrs qui ont une famille.
    Dans l'étude que fait notre comité nous avons combiné les deux choses: le recours à ce système dans les affaires pénales ainsi que dans les affaires liées à l'immigration et au statut de réfugié. Vous nous dites ici que le procédé vous paraît d'une certaine utilité dans les affaires pénales, mais que vous ne voyez pas l'intérêt dans les affaires liées à l'immigration et au statut de réfugié, sauf lorsqu'elles ont une dimension criminelle?
    Je peux comprendre, surtout lorsqu'on a affaire à des jeunes — il en va de même dans les affaires pénales — qui ont commis des vols par effraction et que l'on veut obliger à rester à domicile, on puisse utilement leur imposer un couvre-feu s'accompagnant d'une surveillance GPS, mais là encore, pendant une période bien déterminée, pas trop longue. C'est sur une longue période que ce procédé devient très contraignant.
    Il me reste 40 secondes.
    Pouvez-vous revenir un instant sur certains des problèmes posés aux membres des familles et nous dire rapidement quelles sont les répercussions sur les familles?
    Je vous le répète, tout se combine. La surveillance GPS est en place et les agents se présentent au domicile.
    Dans l'une des affaires, les agents se sont présentés au domicile. Ils ont constaté que l'un des garçons jouait avec un pistolet en plastique, ce qui a posé un gros problème lors de l'audience. L'enfant se sentait coupable d'avoir mis son père en difficulté avec ce pistolet en plastique. Voilà le genre de problème qui se pose. Si les agents se sont rendus à domicile, c'était pour exercer une surveillance sur le père, pour vérifier la situation. Ils ont alors découvert le pistolet servant de jouet.
    La situation n'est pas facile.
    Madame Jackman, je vous remercie.
    C'est un problème.
    Merci, madame Jackman.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Moore.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, madame Jackman, pour votre témoignage.
    Concernant les trois personnes que vous avez défendues, en dehors des infractions de détail que vous avez évoquées concernant la surveillance électronique, y a-t-il eu d'autres infractions graves aux conditions fixées — des infractions qui vous paraîtraient graves — pendant la période de surveillance?
(1700)
    Absolument aucune.
    D'ailleurs, dans l'affaire dont je continue à m'occuper, celle qui implique un certificat de sécurité, le gouvernement l'a reconnu.
    Je m'efforce de concilier deux choses. Vous avez indiqué que dans certaines affaires ce procédé était plus cruel que la détention, et pourtant le témoin du Service correctionnel du Canada qui vous a précédée nous a dit que la seule façon pour que la surveillance électronique donne de bons résultats dans certaines conditions était de faire en sorte qu'en cas de non-respect d'une ou plusieurs conditions de la surveillance électronique, on procède à une nouvelle incarcération. Ce que craignent ces personnes, c'est le risque de devoir être à nouveau incarcérées et c'est pourquoi elles respectent les conditions de leur surveillance électronique. Pouvez-vous m'expliquer cette divergence? Il paraît évident que dans le cas de vos clients et des personnes suivies par le Service correctionnel du Canada dans le cadre de son projet pilote, la menace liée à une nouvelle incarcération était bien présente et qu'ils préféraient la surveillance électronique à la détention. Pouvez-vous concilier ces deux arguments?
    Je pense que la plupart des gens vont choisir la surveillance électronique de préférence à la détention, mais tout dépend des conditions qui y sont attachées. Si vous imposez une surveillance GPS à un jeune en lui enjoignant d'être chez lui à 11 heures et en ajoutant une certaine clause de non-association, le GPS va bien vous dire s'il est chez lui à 11 heures, mais non pas avec qui il va entrer en communication. La mesure n'a qu'un intérêt limité, mais dans ce cas elle n'est peut-être pas trop contraignante. Même dans ce cas, je considère néanmoins qu'il faut que ce soit sur une courte période et que l'intéressé ne soit pas obligé d'appeler chaque fois qu'il rentre chez lui ou qu'il en sort pour qu'on sache où il va.
    Dans les affaires qui nous occupent, d'autres conditions étaient attachées à cette mesure, il y avait par conséquent une assignation à résidence, et ces personnes ne pouvaient sortir que si elles étaient accompagnées par un surveillant, il leur fallait appeler l'ASFC chaque fois qu'elles allaient quelque part et, à l'origine, elles devaient obtenir l'autorisation de l'ASFC pour sortir. Elles étaient donc constamment en contact avec les responsables du gouvernement, et cela se répercutait sur leur vie de famille. Il pouvait arriver, par exemple, qu'elles veuillent aller faire leur épicerie et que l'ASFC leur dise de le faire plus tard, sans leur en donner la raison, parce que quelqu'un était malade dans le service ou qu'il manquait de personnel. Les enfants se trouvaient brimés.
    Ce sont donc plusieurs facteurs qui interviennent en même temps.
    Voilà tout un tas de situations qui n'ont peut-être rien à voir avec notre discussion concernant la surveillance électronique. Il n'a jamais été question que le fait d'être astreint à une mesure de renvoi ou de faire l'objet d'une libération conditionnelle soit une partie de plaisir. Bien évidemment, les conséquences sont assez graves. La détention est une des possibilités, mais il me paraît très clair que cette façon de procéder permet à ces personnes d'être libérées au sein de la société avec leur famille, tout en étant étroitement surveillées. Dans les affaires citées par le témoin précédent, ainsi que dans celle de vos trois clients, aucune infraction majeure n'a été constatée. Je considère donc que ce sont des réussites.
    Vous avez par ailleurs indiqué qu'il y a des cas où le recours à la surveillance électronique est très utile, et vous avez pris comme exemple le cas des pédophiles qui ne doivent pas fréquenter les parcs ou certains lieux précis. Pouvez-vous nous dire plus précisément pour quelle raison cette façon de procéder est utile dans ces cas-là?
    C'est parce qu'il y a dans ces cas-là des secteurs géographiques précis que l'on peut repérer sur une carte, ce qui permet alors de suivre une personne à la trace. Si elle s'approche de ces secteurs, on sait alors qu'elle s'apprête à enfreindre les conditions. Dans ce cas, le dispositif a une raison d'être. Il me semble que lorsque des jeunes fréquentent les membres d'une bande organisée le soir, un couvre-feu peut être utile, et c'est là une façon de faire respecter le couvre-feu.
    Je vais vous donner un exemple. L'ASFC a entrepris d'obliger ces personnes à parler directement avec un responsable. Plutôt que de leur demander de se rendre toutes les semaines ou tous les mois en personne dans les bureaux de l'ASFC, on leur demande de communiquer verbalement. Étant donné que cette méthode est simple à appliquer, l'ASFC a alors décidé de l'imposer à tout le monde. Tout le monde est appelé à rendre des comptes au téléphone, même si aucun juge de l'immigration n'a imposé cette condition, parce que c'est facile à appliquer. Le problème avec la surveillance GPS — parce que c'est déjà arrivé — c'est qu'on va finir par l'appliquer lorsqu'on n'en a pas besoin. Je pense qu'on peut en justifier l'utilisation pour les jeunes impliqués dans des activités criminelles, pour les malades mentaux ou pour les pédophiles, mais ce n'est pas le cas pour la plupart des gens. La plupart d'entre eux se conforment à la loi, respectent les conditions fixées et n'ont pas de casier judiciaire, donc pourquoi recourir à ce genre de procédé? Je ne comprends pas.
(1705)
    Merci, madame Jackman.
    Je ne pense pas qu'il soit bon d'appliquer cette mesure à tout le monde, mais il y a des cas où elle peut être justifiée.
    Si une personne n'appelle pas et ne se rend pas au rendez-vous obligatoire qui suit, comment savoir où elle se trouve sans recourir à la surveillance électronique?
    Les agents retrouvent généralement très rapidement ce genre de personnes — bon nombre d'entre elles.
    Il vous faut considérer les statistiques. Bien sûr, il y a des gens qui se perdent dans la nature, et il peut y avoir là un problème. Dans ce cas, si vous estimez qu'une personne risque de se perdre dans la nature, une surveillance GPS peut être utile, mais pas dans tous les cas. Comme je vous l'ai dit, il faut que ce soit pour une période déterminée.
    Prenons le cas d'une personne qui vient déposer une demande de réfugié. Cela englobe toute une famille. Vous savez que la situation dans le pays d'origine est très mauvaise. Vous avez peur au bout du compte que ces gens aient peur de retourner chez eux, même si on leur refuse la condition de réfugié. Si vous estimez qu'une surveillance GPS peut être utile, imposez-la à la fin de la procédure, lorsqu'il faut procéder à un examen des risques avant renvoi et non pendant les cinq années de leur présence au Canada. Limitez la chose pendant le temps qu'il vous paraît nécessaire.
    Là encore, il faut que ce soit justifié. C'est à un juge de l'immigration de se prononcer, et non pas à un agent de l'ASFC qui décide arbitrairement d'imposer cette mesure. C'est trop contraignant.
    Merci, madame Jackman.
    Nous allons redonner la parole à l'opposition. Monsieur Scarpaleggia, vous disposez de sept minutes.
    Merci, madame Jackman.
    Pourriez-vous être un petit peu plus précise lorsque vous nous dites qu'un agent de l'Agence des services frontaliers du Canada peut arbitrairement imposer une surveillance GPS à une personne? J'ai été quelque peu surpris de vous l'entendre dire. Je pensais que la décision était prise à un plus haut niveau.
    J'ai dit que cette décision devait être prise à un plus haut niveau.
    Ce qui m'inquiète à l'heure actuelle, c'est que les agents de l'ASFC obligent des personnes à communiquer verbalement avec un responsable sans passer devant un juge de l'immigration et sans se demander si c'est nécessaire. Ils appellent absolument tout le monde, sans aucune raison. Tout le monde est appelé.
    C'est ce qui me préoccupe. C'est l'une des préoccupations au sujet de la surveillance GPS.
    Si l'on doit imposer ce mécanisme, il faut que ça se fasse par l'intermédiaire de la section de l'immigration, un juge se chargeant de prononcer la décision.
    Vous représentez M. Harkat. C'est bien ça?
    Non, je représente M. Jaballah. J'ai par le passé représenté M. Mahjoub et M. Almrei.
    Vous avez un ou deux clients qui font l'objet d'un certificat de sécurité et d'une surveillance GPS attachée à leur libération conditionnelle. C'est bien ça?
    Oui. Pour le moment, j'ai un client qui est toujours soumis à une surveillance GPS.
    Cela dure depuis cinq ans environ?
    Oui, en avril ça fera cinq ans. Il est marié et il a six enfants.
    Il fait l'objet d'un certificat de sécurité, ce qui signifie que les responsables du gouvernement estiment qu'il présente des risques, qu'il convient de le surveiller.
    Vous estimez qu'on devrait supprimer la surveillance GPS sans autre solution de rechange; éventuellement qu'il soit tenu de se présenter à l'occasion. Ai-je raison? C'est bien ça que vous préconisez?
    Non, ce n'est pas ce que je dis. Il y a une grande quantité d'argent qui sert de cautionnement dans cette affaire, conditionnel et en espèces. On recourt traditionnellement au cautionnement pour s'assurer que les gens respectent les conditions fixées. Ainsi, si votre femme a déposé 10 000 $ et si vous savez qu'elle n'a pas 10 000 $ à perdre, on peut partir du principe que vous allez respecter les conditions fixées pour ne pas lui faire perdre cet argent.
    C'est pourquoi nous avons des cautionnements, et il y a d'autres moyens de s'assurer que les gens respectent les conditions.
    Dans le cas de mon client, la grande préoccupation était qu'il entre en communication avec d'autres personnes accusées d'être impliquées dans les mouvements extrémistes musulmans ou islamiques. La grande préoccupation était celle de la communication. La surveillance GPS ne répond pas à cette exigence. Je vous pose la question, comment pourrait-on savoir avec qui ces gens communiquent?
    Il est possible de procéder à des écoutes téléphoniques et d'intercepter le courrier. C'est beaucoup plus efficace que la surveillance GPS lorsqu'on veut savoir avec qui ces gens communiquent.
(1710)
    Il y a donc des écoutes téléphoniques et une interception du courrier.
    Oui, c'est la pratique courante.
    Est-ce que vous retournez régulièrement devant les tribunaux pour demander que les conditions soient modifiées et que l'on supprime la surveillance GPS pour les raisons que vous venez de nous donner?
    Comment procède-t-on? Y a-t-il des révisions périodiques?
    Il y a des révisions périodiques, tous les six mois après la dernière décision rendue, de sorte que cela se produit environ une fois par an. L'un des juges, la juge Dawson, a dit de cette révision que si la personne se soumettait aux conditions, elle parviendrait progressivement à une plus grande liberté que celle dont elle disposait au départ. Ce n'est pas ainsi que ça s'est passé. Les conditions ont été allégées avec le temps, mais elles restent terriblement contraignantes.
    Vous connaissez bien, évidemment, le projet de loi C-4, qui vient d'être intégré au projet de loi C-31, le nouveau projet de loi sur l'immigration. Aux termes des dispositions du projet de loi C-4, on pouvait envisager la possibilité d'interner des groupes de réfugiés, pendant des périodes allant jusqu'à un an, si j'ai bien compris. Pensez-vous que dans ce genre de situation lorsque, par exemple, une famille est détenue, une surveillance électronique à court terme pourrait remplacer la détention? Avez-vous le sentiment que le gouvernement pourrait s'orienter dans ce sens?
    On a proposé dans les médias que plutôt que de maintenir les gens en détention, on pourrait peut-être leur appliquer une surveillance pendant un certain temps. Est-ce que vous y seriez favorable? Jugez-vous ce traitement cruel ou pensez-vous qu'il est préférable à la détention sur une période allant jusqu'à un an?
    On me demande de choisir... entre la peste et le choléra. Les deux solutions sont mauvaises. Pour ce qui est de la détention d'un an, nous avons oeuvré pendant des années, avant d'aller devant la Cour suprême du Canada dans l'affaire Charkaoui, pour supprimer la détention arbitraire. Nous avons gagné devant la Cour suprême du Canada. Elle a déclaré qu'on ne peut pas procéder à une détention en l'absence d'examen préalable. Il faut qu'il y ait un examen de la nécessité de procéder à la détention.
    Que fait donc le gouvernement? Il nous propose maintenant une nouvelle loi qui place les gens en détention sans en avoir examiné la nécessité. Cela sonne comme une insulte à la Cour suprême du Canada, qui s'est prononcée dans l'affaire Charkaoui. Il vous faut lire cet arrêt.
    Vous me demandez s'il est préférable d'avoir une surveillance GPS ou de placer ces gens en détention pendant un an... à partir du moment où les deux choses ne sont pas nécessaires au départ, je ne sais vraiment pas quoi vous répondre. À moins que la nécessité d'une surveillance GPS ou de la détention soit justifiée, je suis contre l'une et l'autre de ces mesures. Elles sont injustifiées.
    Je vous comprends.
    Ce projet de loi, à votre avis, ne respecte pas les dispositions de la Charte. Il ne faudra pas attendre longtemps pour que cette disposition soit déclarée inconstitutionnelle. C'est bien ça?
    Si j'en juge par l'arrêt Charkaoui, effectivement, je ne pense pas que ces dispositions seront validées.
    Nous allons essayer de nous en tenir à notre étude.
    De quel projet de loi parlez-vous, du projet de loi sur l'immigration?
    Combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste 30 secondes.
    Je vais renoncer à ces 30 secondes pour me punir de m'être écarté du sujet.
    Deux fois dans la même journée, ça va. Je vous remercie.
    Nous allons redonner la parole à M. Chicoine.

[Français]

    Vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Je partagerai mon temps de parole avec M. Sandhu. Je ne poserai qu'une ou deux questions.
    Je voudrais simplement revenir sur les problèmes familiaux causés par la surveillance électronique. Quelle est la durée maximale de surveillance électronique qui pourrait être imposée à une personne visée par un certificat de sécurité, idéalement? Un peu plus tôt, vous avez parlé de six mois. Toutefois, ce n'est peut-être pas assez, si l'on veut entreprendre des procédures judiciaires, pour se débarrasser de cette personne. Auriez-vous une autre option à la surveillance électronique?

[Traduction]

    Oui. J'estime que si l'intéressé respecte les conditions pendant les six premiers mois, il doit y avoir une solution de rechange à la surveillance GPS et à l'assignation à résidence, s'il doit être assigné à résidence. Je ne pense pas que ce soient de bonnes solutions dans la plupart des cas. Je préconise que l'on impose d'entrer en communication avec des responsables et d'autres solutions de ce genre. Il est préférable d'entrer en communication avec un responsable que de devoir se présenter en personne. Je ne dis pas qu'il ne faut pas exercer de surveillance; c'est indispensable lorsqu'il y a des risques, mais on ne doit pas recourir à la surveillance GPS dans tous les cas.
    La difficulté avec la surveillance GPS, et je pense que c'est la même chose pour tout système électronique, c'est qu'il y a de nombreuses pannes, ce qui oblige les agents de l'ASFC à se présenter en personne au domicile ou à faire venir des techniciens. Il y a donc une présence constante. Dans les affaires qui nous ont occupés, je dirai cependant que ce n'est pas seulement la surveillance GPS; il y a aussi d'autres facteurs, comme l'interception du courrier. Les responsables se présentent tous les jours pour intercepter le courrier. Il y a donc une présence constante, une intervention régulière des agents de l'État et de la police des frontières au domicile de l'intéressé. Cela entraîne des répercussions.
(1715)

[Français]

    Donc, le GPS est ajouté pour rien, puisque les personnes visées par un certificat de sécurité sont constamment suivies, n'est-ce pas?

[Traduction]

    Ces personnes sont censées être suivies, mais elles ne le sont pas. C'est ce qui est si ridicule dans ce genre d'affaires, comme dans le cas d'Hassan Almrei. Il faisait l'objet d'une surveillance GPS. Il n'avait pas de famille pour l'accompagner dans ses sorties, ce qui fait qu'il devait rester chez lui. Il était autorisé à aller prier s'il prenait un taxi mais, pour l'essentiel, il était en fait assigné à résidence sous surveillance GPS.
    Dans cette affaire, il a obtenu gain de cause. On a jugé qu'il n'était pas un risque pour la sécurité et, du jour au lendemain, il est devenu entièrement libre. Imaginez la situation. Comment se fait-il que le jour dit il ne présentait plus aucune menace alors que le jour d'avant il était assigné à résidence avec une surveillance GPS? Les conditions imposées étaient trop strictes.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Allez-y, monsieur Sandhu. Vous disposez de deux minutes.
    Vous avez indiqué que la surveillance électronique pouvait être utile une fois qu'a été prise une mesure de renvoi. C'est bien ça?
    Il faut que je fasse bien attention à ce que je dis. Ce n'est pas une solution que je recommande pour tout le monde. À ma connaissance, la plupart des gens respectent les conditions d'une mesure de renvoi. J'ai eu des clients qui ont perdu leur cause et qui ont pris l'avion pour quitter de leur plein gré le Canada.
    Toutefois, si on a vraiment peur que l'intéressé se perde dans la nature, à la fin de la procédure on le convoque, on l'invite à subir un examen des risques avant renvoi et on lui demande de présenter une demande. C'est à la fin de la procédure. À ce moment-là, lorsqu'ils ne savent pas s'ils vont être acceptés aux termes de l'ERAR, la plupart des gens — je dirais pratiquement la totalité — vont chercher un dossier pour présenter une demande.
    Si l'on craint que l'intéressé se perde dans la nature, il peut être logique de le traduire devant un responsable pour envisager la possibilité de lui imposer une surveillance GPS. Cette solution serait bien moins onéreuse pour le gouvernement que celle qui consiste à gaspiller des millions de dollars en imposant une surveillance GPS à des gens qui n'en ont pas besoin.
    Nous avons entendu dire que ces dispositifs de surveillance GPS sont très faciles à enlever. Donc, si quelqu'un veut se perdre dans la nature, il lui suffit de se débarrasser de ce dispositif. Peut-on faire quelque chose de ce point de vue?
    Mes clients n'ont jamais cherché à s'en débarrasser. Je sais qu'ils sont gênés par le port de ce dispositif à long terme. L'un de mes clients éprouvait de ce fait des démangeaisons. Il lui fallait porter des chaussettes et on a dû installer l'appareil sur l'autre pied, ce qui fait qu'il y a des problèmes. Je ne sais pas si ces dispositifs sont faciles à enlever parce qu'à ma connaissance personne n'a essayé de le faire.
    Je vous remercie.
    Nous allons redonner la parole au gouvernement en commençant par Mme Hoeppner, qui sera suivie de Mme Young.
    Merci, et je remercie Mme Jackman.
    Il me semble que le témoin avait autre chose à ajouter.
    Je tenais simplement à ajouter que si on peut s'en débarrasser facilement, l'intéressé peut le laisser chez lui et personne ne saura qu'il est parti.
    Merci, madame Jackman.
    J'écoute avec intérêt votre témoignage. Je dois dire que d'autres témoins que nous avons entendus au sujet des délinquants ne sont pas d'accord avec vous et contredisent votre témoignage sur le fait, par exemple, que les pédophiles sont de bons candidats pour la surveillance électronique — et cela pour diverses raisons, notamment parce que cela n'aide pas en fait la réinsertion étant donné que le système correctionnel court un grand risque lorsqu'il laisse sortir un pédophile en espérant qu'il se tiendra à l'écart des lieux susceptibles de l'amener à récidiver.
    Je suis aussi très surprise par le fait que vous nous disiez que les malades mentaux pourraient aussi tirer profit de la surveillance électronique. Une des choses qui me préoccupe aussi — et je comprends bien que lorsqu'on impose des conditions à quelqu'un, ce peut être gênant... Mais il y a des raisons pour lesquelles on impose des conditions à une personne, qu'elle fasse l'objet d'une mesure de renvoi parce qu'elle se trouve illégalement au Canada ou parce qu'elle a enfreint la loi. Ce sont des conséquences dont nous reconnaissons évidemment l'importance.
    Nous voulons que les gens qui arrivent illégalement au Canada et qui font l'objet d'une mesure de renvoi quittent le pays. Je suis sûre que vous savez qu'il y a à l'heure actuelle 44 000 mandats d'arrestation de personnes qui se trouvent illégalement au Canada et qui sont perdues dans la nature — nous ne savons pas où elles se trouvent.
    Mon objection en vous écoutant — et j'essaie de tout concilier — c'est qu'il y a des individus qui se trouvent illégalement au Canada alors qu'ils sont venus en tant que réfugiés ou pour d'autres raisons et qu'on leur a demandé de partir... Ils sont là illégalement; ce ne sont pas des citoyens canadiens qui ont enfreint la loi et que l'on s'efforce de réinsérer. En réalité, on cherche à faire en sorte qu'ils quittent le pays comme cela leur a été ordonné.
    Que peut-on faire, si on ne leur impose aucune condition — vous ne voulez pas qu'on les assigne à résidence, parce que cela les dérange et constitue une gêne — et si on n’est pas censé leur imposer une surveillance électronique…? Ils sont 44 000 au Canada qui font l'objet d'un mandat. Que proposez-vous...? Vous ne voulez pas non plus qu'on les mette en prison. Vous vous indignez parce que l'on propose éventuellement de placer de grands groupes en détention lorsque le ministre juge qu'il a besoin de plus de temps pour procéder à une évaluation. C'est une chose sur laquelle vous avez beaucoup insisté en parlant avec M. Scarpaleggia.
    Il ne faut donc pas que ces personnes soient détenues; elles ne doivent pas faire l'objet d'une assignation à résidence; vous ne voulez pas qu'elles soient tenues de communiquer avec un responsable, solution qui vous a paru inquiétante. Quelle est donc la solution que vous préconisez pour que 44 000 personnes ne vivent pas illégalement au Canada et ne soient pas perdues dans la nature?
(1720)
    Laissez-moi répondre de la manière suivante à vos préoccupations.
    Tout d'abord, le Canada n'est pas un État policier, vous m'excuserez, mais je ne veux pas qu'il le devienne.
    En second lieu, je ne vous dis pas qu'il ne faut pas exercer un contrôle sur les immigrants. On peut exercer un contrôle sur les personnes qui n'ont aucune raison d'être au Canada. Je vous dis simplement que ce contrôle doit être justifié. On ne doit pas pouvoir l'imposer à 300 000 personnes tout simplement parce qu'on pense qu'il y a 44 000 illégaux. Ce n'est pas de cette façon qu'opère le droit. Nous sommes censés juger chaque affaire selon ses mérites.
    Nous ne « pensons pas » qu'il y a 44 000 illégaux; il y a à l'heure actuellement 44 000 mandats lancés contre des personnes qui sont illégalement au Canada. Nous n'avons pas inventé ce chiffre.
    Je ne dis pas que vous avez inventé ce chiffre. Je vous dis que ce n'est pas parce que certaines personnes ont enfreint les conditions fixées, qu'il faut partir du principe que c'est le cas de toutes.
    Laissez-moi ajouter une chose. Je ne me prononce pas — je ne suis pas une spécialiste — au sujet des pédophiles. J'ai juste lancé une idée. Je sais par contre que les dispositifs de surveillance GPS sont employés au sujet des personnes souffrant de la maladie d'Alzheimer, parce qu'elles s'enfuient de chez elles. Cela permet au personnel de savoir qu'elles ne sont plus là où elles étaient censées se trouver, et ce dispositif est utile dans ce cadre. Je vous dis donc qu'il donne des résultats dans certaines situations.
    En ce qui concerne les personnes qui se trouvent illégalement au Canada, on peut exiger des garanties. C'est la même chose que pour les libérations sous caution dans les procès pénaux, les amis et la famille déposent un certain montant d'argent qu'ils perdent si le justiciable se perd dans la nature.
    On peut exiger que l'intéressé communique avec un responsable — ne me faites pas dire ce que je ne veux pas dire... Je n'exclus pas cette solution; je dis simplement qu'il ne faut pas l'imposer à tous tout simplement parce qu'elle existe. Nous devons adapter les conditions imposées, quelles qu'elles soient, aux différents individus, et la meilleure façon de le faire est de demander à un membre de la section de l'immigration d'en évaluer la nécessité. Il peut être très utile de demander à l'intéressé de communiquer régulièrement avec un responsable, et cette mesure ne manque pas d'être employée.
    On peut avoir recours pour certaines personnes au programme de cautionnement qui implique une surveillance active et des visites régulières. Il y a de nombreux mécanismes qui sont en place.
    La surveillance GPS n'est d'ailleurs pas la panacée pour protéger le Canada contre tout le monde. Ce n'est pas le genre de mesure que l'on peut appliquer à tous; il faut examiner chaque cas en particulier. Je n'aime pas cette mesure, parce que j'ai vu quelles en étaient les conséquences sur mes clients.
    Merci, madame Jackman.
    Nous allons maintenant redonner la parole à M. Sandhu, qui disposera de cinq minutes.
    Je vais partager mon temps avec M. Garrison.
    Très bien.
    Je vais revenir à mon...
    En fait, voulez-vous terminer votre...? Je vois que vous avez été interrompue à quelques reprises. Souhaitez-vous répondre aux questions que vous a posées tout à l'heure Mme Hoeppner?
    Non, ça va comme ça.
    Très bien. J'en reviens à ma première question, que je vous ai posée la dernière fois.
    Lorsqu'une mesure de renvoi est prise, si l'intéressé ne veut pas rentrer chez lui, il lui suffit de retirer la surveillance GPS ou le contrôle électronique, quel que soit le dispositif qu'on lui a imposé. Il peut alors se perdre dans la nature au Canada. C'est bien ça?
(1725)
    Je n'en sais pas assez pour vous dire comment on peut se débarrasser du bracelet GPS. Aucun de mes clients n'a tenté de le faire, et je ne sais donc pas jusqu'à quel point il est facile de retirer le bracelet. Je pars du principe que si l'intéressé parvient à le couper, il le laissera simplement chez lui. Personne ne saura qu'il a quitté son domicile. On ne sait que vous êtes parti que lorsque le GPS se déclenche lorsqu'on quitte le lieu de résidence. Les responsables ne sauront rien si le bracelet est enlevé et reste sur place.
    Vous nous avez dit qu'il vous avait fallu vous présenter devant un tribunal à plusieurs reprises et gaspiller les ressources de la justice au sujet des conditions non respectées par vos clients.
    Pouvez-vous nous donner une idée des difficultés rencontrées par vos clients du point de vue technique au sujet du GPS ou de la surveillance électronique? Au sujet de certaines conditions non respectées, avez-vous dû expliquer aux agents de l'ASFC que la surveillance GPS ne fonctionnait pas ou qu'il y avait des problèmes techniques?
    Lorsque mon client venait me voir, le GPS ne fonctionnait pas. Si l'ASFC ne savait pas que mon client était venu me voir — et par conséquent si elle ignorait que le système de surveillance n'allait pas fonctionner, elle s'inquiétait...
    Il est arrivé que le GPS positionne mon client avec un écart de 30 kilomètres par rapport à la réalité, parce que ce dispositif n'est pas toujours précis ou exact. Si mon client se rendait dans un centre commercial pour faire des achats en famille, le GPS ne fonctionnait pas. Parfois, une alarme se déclenchait sans raison. Donc, effectivement, le GPS pose des problèmes en permanence, ce qui fait que les agents de l'ASFC sont constamment en contact avec le client.
    Je vais laisser la parole à M. Garrison.
    Monsieur Garrison.
    Je vous remercie.
    Notre temps est sur le point de s'écouler, de sorte que je vais en revenir à vos déclarations selon lesquelles il y a là une condition superfétatoire et inutile. Est-ce que selon vous nous disposons d'ores et déjà de mécanismes suffisants sans qu'il faille y ajouter la surveillance GPS ou d'autres conditions?
    Je vous le dis bien franchement: nous n'avons rien besoin d'ajouter. On peut appliquer la surveillance GPS dès maintenant. Mon client, celui qui a été expulsé pour des raisons pénales, s'est vu imposer un bracelet GPS par un membre de la section de l'immigration. Dans mes affaires impliquant un certificat de sécurité, le bracelet GPS a été imposé par un juge de la Cour fédérale.
    Les responsables disposent de pouvoirs étendus pour imposer des conditions au justiciable. Ces conditions peuvent englober la surveillance GPS aussi bien que l'assignation à résidence. On n'a pas besoin de rajouter spécialement certaines mesures; elles existent déjà. D'ailleurs, à l'heure actuelle, elles sont rarement utilisées. On n'y a recours que dans les cas vraiment graves.
    Est-ce que selon vous, indépendamment de la surveillance GPS, les autres moyens dont nous disposons sont suffisants?
    Les autres moyens donnent des résultats depuis que je pratique le droit et, je suis sûre, avant cela, il y a plus de 30 ans. Pour la plupart, elles se sont révélées assez efficaces.
    Dans les quelques cas où la surveillance GPS a été imposée... Ce ne sont que des cas isolés; on n'a pas jugé nécessaire de le faire dans les autres. L'ASFC ne l'a pas demandé.
    Vous estimez donc que lorsque cette mesure doit être appliquée pendant plus de six mois, elle n'apporte rien de plus et se révèle en fait assez préjudiciable.
    Oui. Je pense que lorsqu'on cherche à faire en sorte qu'une personne respecte les conditions fixées, il est possible d'imposer cette mesure pendant six mois et de réexaminer l'affaire à ce moment-là dans le but d'éliminer cette contrainte. On ne peut pas l'imposer pendant cinq ans.
    Je vous remercie.
    Merci.
    Il ne nous reste que deux minutes. Je pense que Mme Young a une question qu'elle cherche à poser depuis un moment.
    Madame Young, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je vous demanderais de poser rapidement votre question.
    Je vais faire très vite.
    Merci d'être venue témoigner, madame Jackman. Vous avez réussi à écarter tout un tas d'allégations et d'insinuations qui paraissent intéressantes mais qui ne sont pas prouvées.
    J'aimerais vous demander — en votre qualité d'avocate spécialisée dans les questions liées à l'immigration et au statut de réfugié, il serait peut-être bon que nous nous en tenions à votre domaine de compétence — quelle est la différence entre un réfugié et un demandeur du statut de réfugié.
    Selon la convention, toute personne qui a besoin de protection peut demander à bénéficier du statut de réfugié. Tant que ces personnes ne sont pas reconnues comme réfugiées, elles peuvent être renvoyées dans leur pays d'origine. Elles sont traitées comme des réfugiées tant qu'une décision n'a pas été prise. Une fois qu'une décision est prise et qu'on les considère comme des réfugiées, cela confirme le statut qu'elles avaient déjà. C'est ainsi que la question est envisagée selon le droit international.
    Nous ne traitons pas les demandeurs du statut de réfugié comme des criminels, nous ne l'avons jamais fait.
(1730)
    Très bien. Vous nous dites toutefois que certaines personnes font l'objet de certificats, par exemple, et que trois d'entre elles ont éventuellement été soumises à une surveillance électronique. C'est bien ça?
    Oui, il y a deux affaires impliquant des certificats de sécurité et une affaire pénale.
    Autrement dit, il y a ici certains demandeurs qui ont un dossier criminel...
    Ce ne sont pas des demandeurs du statut de réfugié. Ce sont des éléments très dangereux.
    Très bien.
    Je vous le dis bien clairement. Ces personnes ont d'ores et déjà été jugées dangereuses. Il s'agissait de réfugiés et non pas de demandeurs d'asile.
    S'il en est ainsi, et si l'on se trouve dans l'obligation de choisir entre la détention, comme vous l'avez exposé précédemment, et la surveillance électronique, et compte tenu du fait que vous avez affirmé que la surveillance électronique était contraignante et que ces gens devaient rendre des comptes aux fonctionnaires du gouvernement, par exemple, n'êtes-vous pas d'avis que s'ils étaient incarcérés il leur faudrait aussi avoir affaire aux fonctionnaires du gouvernement?
    Avant que mes clients soient soumis à une surveillance GPS, je vous aurais dit qu'effectivement, c'était préférable. La Cour suprême du Canada l'a elle-même affirmé dans l'arrêt Charkaoui.
    Après avoir fait l'expérience pendant cinq ans des difficultés éprouvées par mes clients en raison des conditions imposées — pas seulement la surveillance GPS, mais l'assignation à résidence et autres conditions de ce type, je dirais maintenant que cette solution n'est pas préférable. Vous m'excuserez, mais ce n'est pas mieux. Vous pouvez penser le contraire, mais ce n'est pas mon avis.
    Je vous remercie.
    Madame Jackman, notre heure est écoulée. Nous avons bien apprécié votre témoignage et vos réponses à nos questions.
    Les cloches sont en train de sonner, ce qui signifie que les membres de notre comité doivent aller en Chambre pour voter.
    Merci beaucoup pour votre contribution. Si vous avez d'autres réponses à nous donner, si vous estimez éventuellement que vous auriez pu répondre de manière différente, ou si encore vous avez quelque chose à rajouter, n'hésitez pas à communiquer avec notre greffier, qui se chargera de communiquer la chose aux membres du comité. Je vous remercie.
    Mesdames et messieurs, la séance est levée.
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