Nous entamons la 39e réunion du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Nous sommes aujourd'hui le jeudi 10 mai 2012, et nous allons poursuivre l'examen du projet de loi .
Nos invités d'aujourd'hui vont témoigner par vidéoconférence depuis Winnipeg, au Manitoba. Nous allons accueillir, de la Manitoba Keewatinowi Okimakanak Inc., le grand chef David Harper, ainsi que Michael Anderson, directeur du secrétariat des ressources naturelles.
Ils ne sont pas encore arrivés, mais nous accueillons aussi ici, à titre personnel, M. Steve Sullivan.
Bienvenue parmi nous, monsieur Sullivan.
Steve Sullivan est l'ancien ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels.
Je dois vous prévenir, monsieur Sullivan, qu'il ne va pas vous être facile de témoigner après l'actuel ombudsman, parce qu'elle a fait une superbe performance. Vous pourrez le lui dire si vous en avez l'occasion.
Nous vous souhaitons la bienvenue parmi nous et nous avons hâte d'écouter ce que vous avez à nous dire.
Je vois qu'il y a un peu d'activité à Winnipeg.
Nous vous souhaitons la bienvenue. Nous entendez-vous à Winnipeg?
Une voix: Oui, je vous entends.
Le président: Très bien. Ils sont en train de faire quelques ajustements audio.
Nous attendons, je suppose, l'arrivée de David Harper, le grand chef, et de Michael Anderson.
Une voix: Michael est arrivé, mais nous attendons l'autre témoin.
Le président: Je propose que nous commencions, puisque nous avons un témoin ici, à Ottawa.
Je vais inviter M. Sullivan à nous faire une déclaration liminaire.
Et quand M. Harper et M. Anderson seront prêts, nous pourrons les écouter à leur tour.
Monsieur Sullivan, bienvenue parmi nous.
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Merci, monsieur le président.
Merci de m'avoir invité cet après-midi. Ma déclaration sera très courte.
Voilà près de 20 ans que je m'intéresse de près à la situation des victimes, notamment à titre de défenseur de leurs droits ou, comme vous l'avez mentionné, à titre d'ancien ombudsman. À l'heure actuelle, je travaille pour les Services aux victimes d'Ottawa, qui est un petit organisme communautaire d'Ottawa, mais c'est à titre personnel que je comparais aujourd'hui.
Je vous dirai d'emblée que j'appuie les principes du projet de loi . Je ne suis pas qualifié pour parler des questions fédérales-provinciales qui ont été abordées par certains témoins et que j'ai eu l'occasion de lire, notamment à propos de la constitutionnalité du projet de loi, mais j'appuie le principe du texte qui est proposé. J'estime qu'il est logique qu'une personne qui est détenue dans un pénitencier fédéral parce qu'elle a causé des préjudices à une victime, et qui est sommée de verser une indemnité à la victime des préjudices en question, que cette personne, donc, manifeste du respect pour les droits juridiques et civils qu'elle a bafoués et qu'elle verse l'indemnité que le tribunal lui a infligée. À mon avis, la procédure envisagée est simple et logique.
Cela dit — et ce n'est nullement une critique à l'égard du parrain du projet de loi —, je ne pense pas que cela aura beaucoup d'impact sur la majorité des victimes d'actes criminels. Des témoins vous ont dit qu'il y a actuellement environ 575 détenus fédéraux qui sont assujettis à une ordonnance de dédommagement. Ce n'est pas beaucoup. Un petit nombre d'entre eux ont des suramendes compensatoires en retard. Je pense que c'est autour de 700. Ça donne une idée des problèmes qui se posent quand les tribunaux rendent une ordonnance de dédommagement, sans compter que, très souvent, les suramendes compensatoires sont annulées, malgré la décision des tribunaux. Mais ce sont là des questions qui débordent du cadre du projet de loi.
Je ne sais pas quel mécanisme pourrait être mis en place pour que les Services correctionnels soient informés des ordonnances décidées par les tribunaux si une victime, par exemple, ou sa famille, poursuit un délinquant au civil. Ce n'est pas très fréquent non plus. Les victimes ou les familles n'ont généralement pas les moyens financiers d'intenter des poursuites civiles, et je suppose donc que le nombre de délinquants incarcérés dans des pénitenciers fédéraux et concernés par ce projet de loi est relativement peu élevé.
Je n'ai pas eu l'occasion de rencontrer beaucoup de victimes qui recevaient, que ce soit par un mécanisme fédéral ou par un mécanisme provincial, une indemnité du délinquant qui leur avait causé des préjudices. Je me souviens tout particulièrement d’un cas où le délinquant purgeait une peine d'emprisonnement à vie pour un meurtre et recevait une indemnité d'un établissement qu'il avait fréquenté dans son enfance et où il avait subi des mauvais traitements. Mais à part ce cas-là, je n'en connais pas beaucoup d'autres. Je ne pense pas que la plupart des victimes puissent obtenir de tels jugements au civil.
Comme je l'ai dit, mon intention n'est pas de critiquer le parrain du projet de loi. Au contraire, j'en approuve tout à fait le principe. Je n'ai pas grand-chose d'autre à dire, et je serai ravi de répondre aux questions que vous voudrez me poser.
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Merci beaucoup. Je vais faire quelques commentaires au sujet du projet de loi.
Tansi, boozhoo, edlanet’e, je vous salue, monsieur le président, membres du comité et madame la secrétaire.
Au nom des Premières nations du nord du Manitoba, qui sont au nombre de 30, et des 65 000 citoyens des Premières nations que représente la Manitoba Keewatinowi Okimakanak — la MKO —, j'aimerais vous remercier de nous inviter à faire des commentaires et des recommandations au sujet du projet de loi .
Les 30 Premières nations de la MKO ont pour objectif que chacune des Premières nations MKO soit le lieu d'habitation le plus sûr pour les citoyens des Premières nations MKO. Les Premières nations MKO se sont engagées à atteindre les plus hauts niveaux de sécurité publique et communautaire, par des mesures préventives et réparatrices mises en œuvre par des services de police communautaires.
L'objectif de ces initiatives est de mettre l'accent sur la réconciliation entre la victime, la communauté et le délinquant, ainsi que sur la réhabilitation et la réinsertion des délinquants, afin que ces derniers redeviennent des membres productifs de la famille et de la communauté. Cette vision reflète également le droit coutumier inhérent ainsi que les valeurs culturelles et communautaires des Premières nations MKO.
Le projet de loi propose de faciliter la réconciliation entre la victime et le délinquant en faisant en sorte que les indemnités payées par Sa Majesté au délinquant soient versées directement à la victime, conformément à l'ordre de priorité indiqué au paragraphe 78.1(1).
L'article 2 du projet de loi propose de modifier la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition en ajoutant un nouveau paragraphe 78.1(1), qui dispose que « Sa Majesté la Reine du chef du Canada s'acquitte des dettes à payer au délinquant à qui un tribunal administratif ou judiciaire ou un organisme a accordé une indemnité à la suite d'une action ou d'une poursuite en justice contre elle, ou contre un de ses mandataires ou employés dans le cadre de l'exécution de ses fonctions, par le paiement des montants suivants »; le projet de loi établit ensuite un ordre de priorité.
La MKO craint que le paiement ou l’indemnité versé à un délinquant dans le cadre de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens et approuvé par les tribunaux ne soit inclus dans la liste envisagée dans le projet de loi , eu égard à l’indemnité versée à un délinquant par un tribunal ou un organisme à la suite d'une action ou d'une poursuite en justice contre Sa Majesté du chef du Canada. Si je me souviens bien, il y a au moins neuf ordonnances qui ont été prises par les tribunaux pour approuver la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens, à la suite de recours collectifs.
Les membres des Premières nations qui reçoivent un paiement ou une indemnité dans le cadre de la Convention le reçoivent parce qu'ils sont eux aussi des victimes. Le paiement ou l'indemnité est essentiellement un dédommagement pour les préjudices qu'ils ont subis dans le système des pensionnats indiens. Les excuses présentées le 11 juin 2008 par le sont la reconnaissance, par le gouvernement, des conséquences importantes que le système des pensionnats indiens a eues pour des milliers de membres des Premières nations. L'alinéa 718.2 e) du Code criminel reconnaît également les impacts potentiels de la colonisation, notamment les effets du système des pensionnats indiens sur les circonstances des délinquants autochtones.
L'alinéa 718.2 e) oblige le juge qui détermine la peine à tenir compte, dans l'examen de toutes les sanctions substitutives applicables, des circonstances des délinquants autochtones, afin de déterminer la sanction qui convient le mieux. L'arrêt de 1999 de la Cour suprême du Canada, R. c. Gladue, renforce cette responsabilité ou obligation du tribunal, pour ce qui est de la détermination de la peine à infliger à des délinquants autochtones.
Au Canada, 20 p. 100 des détenus des pénitenciers fédéraux sont des Autochtones. Au Manitoba, 70 p. 100 des détenus des pénitenciers provinciaux et 50 p. 100 des détenus des deux pénitenciers fédéraux sont des Autochtones. Pourtant, les Autochtones ne représentent que 15 p. 100 de la population du Manitoba et environ 4 p. 100 de la population du Canada. Au Manitoba, les délinquants autochtones sont plus souvent envoyés en prison que les délinquants non autochtones; qui plus est, ils représentent plus des deux tiers des délinquants incarcérés, mais moins de la moitié de ceux qui bénéficient d'une mise en liberté sous condition.
La sur-représentation écrasante des délinquants autochtones dans le système judiciaire canadien est due en partie aux séquelles que le système des pensionnats indiens a laissées chez les survivants, leurs familles et leurs communautés. Il ne faut pas oublier qu'un grand nombre de délinquants autochtones sont aussi des survivants de ce système et qu'à ce titre, ce sont aussi des victimes.
Il serait inapproprié, contraire à l'esprit dans lequel les excuses ont été faites et contraire aux objectifs de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens que Sa Majesté saisisse l'indemnité qu'elle accorde au délinquant à titre de dédommagement, parce que c'est un survivant du système des pensionnats indiens, alors que l'infraction commise par le survivant peut, au moins en partie, être attribuée aux effets délétères du système des pensionnats indiens.
Pour ce qui est du projet de loi , la MKO recommande de modifier l'article 2 du projet de loi pour exclure ou exempter expressément, de la liste d'indemnités envisagée à l'article 78.1 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, tout paiement ou indemnité accordé dans le cadre de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens.
La MKO recommande également que des spécialistes de la convention en question soient invités à comparaître devant votre comité pour parler de la procédure qui y est suivie, sous la supervision des tribunaux.
C'est la fin de ma déclaration liminaire.
Ekosani. Mahsi’cho. Meegwetch.
Merci beaucoup.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie M. Sullivan et M. Anderson de comparaître devant nous aujourd'hui.
Monsieur Anderson, je vais commencer par vous. Au cours des témoignages que nous avons entendus tout au long de notre examen de ce projet de loi, on nous a dit combien il est important que les victimes d'actes criminels et les membres de leurs familles puissent recevoir un dédommagement. À propos de l'ordre de priorité énoncé dans ce projet de loi, d'autres témoins nous ont conseillé de ne pas inclure les indemnités accordées dans le cadre de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens.
Pour exprimer son profond regret vis-à-vis du traitement infligé aux enfants des pensionnats indiens, le premier ministre a présenté des excuses en 2008, au nom des Canadiens. Pourriez-vous nous expliquer davantage pourquoi il faut exclure de ce projet de loi les paiements accordés dans le cadre de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens, tout en préservant le principe du dédommagement des victimes?
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Je vous remercie beaucoup de votre question.
Comme je l'ai dit au début de ma déclaration, la réconciliation entre la victime, le délinquant et la communauté est un principe fondamental de nos interventions en matière de justice réparatrice et de police communautaire — la sécurité publique —, sur notre territoire. C'est encore plus vrai lorsqu'il s'agit d'une petite communauté, dont les membres vont devoir vivre ensemble pendant une bonne partie sinon la totalité de leur vie, il faut absolument que la réconciliation se fasse, et c'est pour nous un objectif primordial.
Je sais qu'à l'occasion d'un autre projet de loi dont vous aviez été saisi, le projet de loi , un représentant des Inuits du Nunavut vous a expliqué ce que provoque le retour d'un délinquant dans une petite communauté de moins de 200 habitants, lorsque la réconciliation n'a pas eu lieu.
C'est la même chose chez nous. Les indemnités accordées dans le cadre de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens visent à donner une nouvelle chance à une personne dont la vie a été gravement perturbée à la suite de son passage dans le système des pensionnats indiens.
Les deux types de paiements — le Paiement d'expérience commune, et le paiement au titre du Processus d'évaluation indépendant — sont une forme de dédommagement et de réconciliation, eu égard aux effets des politiques du gouvernement et des agissements de certains membres du clergé vis-à-vis de certaines personnes. Ces indemnités visent à aider ces personnes à redémarrer une nouvelle vie.
Si on fait en sorte que ces indemnités doivent être reversées aux victimes d'un acte criminel qu'ils ont peut-être commis à cause des séquelles du système des pensionnats, on annule complètement la raison d'être de l'indemnité et on compromet les chances de ces individus de se réconcilier avec la société canadienne.
Cela dit, le concept de la réconciliation est un principe fondamental du droit coutumier. Même si l'on exclut ces indemnités des dispositions de la loi, on n'empêche pas les délinquants de décider d'en verser une partie à leur victime, dans le but de faciliter leur réconciliation personnelle avec les actes qu'ils ont commis.
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Monsieur Sullivan, avec tout ce que vous avez fait pour la cause des victimes, pourriez-vous nous dire ce que ça veut dire pour ces gens-là — ce qu'ils ressentent en tant que victimes — lorsqu'ils constatent que leur gouvernement refuse d'admettre que les délinquants devraient être tenus de leur payer un dédommagement? Des témoins nous ont dit que les juges n'imposent pas toujours une ordonnance de dédommagement, et cela pose un problème car la victime ne peut manifestement pas toucher une indemnité qui n'a pas été accordée par le juge.
Ce n'est pas uniquement une question d'argent, car l'argent ne répare jamais complètement le mal qui a été fait aux victimes. Mais il y a quand même un message qui leur était envoyé par les gouvernements précédents et que ce projet de loi veut justement changer. Ce message est que les délinquants, étant donné l'endroit où ils se trouvent, ne sont pas nécessairement assujettis aux mêmes règles que les autres Canadiens, même lorsqu'il s'agit de l'obligation de payer ses dettes.
Pourriez-vous nous expliquer, vu l'expérience que vous avez, ce que ça apportera à la victime de savoir que le délinquant qui est assujetti à une ordonnance de dédommagement sera obligé de lui reverser une partie de l'argent qu'il reçoit, le cas échéant?
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Les tribunaux accordent malheureusement très rarement des ordonnances de dédommagement, et cela arrive surtout dans les cas d'infractions contre les biens. Le code prévoit des montants forfaitaires. Par exemple, si le téléviseur qui a été cassé coûtait 500 dollars, c'est le chiffre qu'on donne au tribunal.
Les juges peuvent aussi accorder des ordonnances de dédommagement pour des infractions non liées à des biens, mais dans ces cas-là, c'est souvent difficile à quantifier. Au moment de la détermination de la peine, qui se fait souvent rapidement en raison d'une négociation de plaidoyer, entre autres, le dédommagement en fait rarement partie.
Ça peut être très frustrant pour les victimes qui s'attendent à recevoir un dédommagement. Souvent, c'est accompagné d'une ordonnance de probation. Par exemple, un délinquant reçoit une peine d'emprisonnement provinciale et une ordonnance de probation, et s'il ne paie pas l'indemnité de dédommagement à la fin de sa peine, la victime doit alors s'adresser à un tribunal civil pour se faire payer. Ce n'est pas une solution pour la plupart des victimes, qui n'ont franchement ni les moyens ni l'énergie de passer par tout ça.
C'est donc doublement frustrant de voir qu'un délinquant qui doit payer une indemnité de dédommagement ne le fait pas. Des études montrent que les victimes apprécient souvent ne serait-ce qu'un effort de sa part pour rembourser. Supposons par exemple qu'on vous doive 1 000 $ et que le type fasse un effort pour vous rembourser 100 $. Ça peut prendre des années, mais, pour les victimes, c'est plus précieux qu'une indemnité du gouvernement.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je tiens à remercier les deux témoins qui comparaissent aujourd'hui.
J'aimerais tout d'abord m'adresser à M. Anderson. Nous avons écouté votre témoignage avec beaucoup d'intérêt, surtout lorsque vous avez parlé des indemnités accordées dans le cadre de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens.
Avant de revenir là-dessus, je tiens à vous dire que le NPD a préparé un amendement visant à exclure ces indemnités du projet de loi, à cause d'autres problèmes dont on nous a fait part. Si j'ai bien compris, vous avez dit que l'inclusion de ces indemnités dans le projet de loi poserait deux problèmes.
Premièrement, cela écarterait le processus de réconciliation du contexte culturel. Deuxièmement, ça retarderait la décision que doit prendre le délinquant d'entreprendre le processus de réconciliation.
Je vous ai bien compris?
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En guise de dédommagement à une personne qui aurait été leur victime à un moment donné…?
M. Randall Garrison: Oui.
M. Michael Anderson: Je sais que ces indemnités peuvent être redistribuées au sein de la communauté pour acheter des biens nécessaires, comme des équipements de chasse et de pêche, afin d'améliorer l'ordinaire des familles.
Dans certains cas, il se peut que ces indemnités contribuent indirectement à améliorer l'ordinaire des personnes à qui ils ont pu causer des préjudices. Mais je n'ai pas d'exemple précis qui me vienne à l'esprit, avec un lien direct entre les deux.
Chez les Premières nations, le concept général est avant tout celui de la communauté. Lorsqu'une personne prend des mesures pour faire profiter la communauté de son processus de guérison et de ses conséquences matérielles, par exemple en achetant les équipements de chasse et de pêche dont a besoin la communauté, en rénovant des maisons, etc., ces mesures profitent à un grand nombre de personnes et, partant, à la communauté dans son ensemble.
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Il y aurait toutes sortes de choses à faire, et nous pourrions en parler pendant des heures. Je pense que ce projet de loi est très ciblé.
Pour ce qui est des indemnités accordées dans le cadre de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens, je pense qu'en pratique, cela concerne à mon avis un très petit nombre de détenus. Il faudrait qu'un membre des Premières nations soit incarcéré dans une prison fédérale, qu'il se soit fait imposer une ordonnance de dédommagement ou une suramende compensatoire, et qu’il touche également une indemnité de la Convention de règlement.
Les suramendes compensatoires sont très faibles, en réalité. En général, elles vont de 50 à 100 $. Autrement dit, pour le délinquant qui touche une indemnité et qui doit payer une suramende, ce n'est vraiment pas grand-chose. Sauf dans les cas de crimes de cols blancs, les ordonnances de dédommagement sont relativement peu élevées. Elles concernent essentiellement les biens.
Ce ne sont pas des montants importants, donc je ne pense pas que ça posera un gros problème. À mon avis, c’est l’étape finale du processus.
Ce que je trouve intéressant, par contre, c'est ce qui se fait au niveau de la justice réparatrice. Le Service correctionnel du Canada a un programme qui permet à la victime de rencontrer le délinquant afin de parler des torts qu’il lui a causés. Je sais que des familles l'ont fait dans des cas d'homicides et d'agressions sexuelles. C'est un programme qui marche remarquablement bien et qui est respecté dans le monde entier. C'est très positif. Les victimes qui décident d'y participer — ce n'est pas pour tout le monde, et je n'encouragerais pas les gens à le faire car c'est très personnel — s’en disent généralement extrêmement satisfaites.
J'appuie donc ce genre de mécanisme, aussi bien au sein du Service correctionnel qu'ailleurs, car cela rapproche notre système de la détermination de la peine des principes de la justice réparatrice… Ce genre de mécanisme est prévu dans le Code criminel, mais on n’en voit guère dans la pratique.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins de comparaître devant nous aujourd'hui.
Monsieur Anderson, je vais commencer par vous. Personne n'est plus sensible que moi à la cause des victimes des pensionnats indiens, mais votre recommandation d'exclure les indemnités accordées par la Convention de règlement me laisse perplexe. Je suis assez d'accord avec M. Sullivan, pour les raisons que je vais vous donner dans un instant. Je n'ai pas encore vu l'amendement du NPD, mais je suppose qu'il vise à exempter ces indemnités du projet de loi.
En guise d'introduction, je vous dirai que j'ai été avocat pendant un certain nombre d'années, et que j'étais spécialisé dans les assurances. Je ne voudrais pas que vous pensiez que je n'ai aucune sympathie pour votre cause — car c'est tout à fait le contraire —, mais vous avez indiqué que les indemnités versées aux victimes du système des pensionnats représentaient la réparation d'un tort qui leur a été causé. Je suis d'accord avec vous, mais je pense que toutes les victimes qui présentent une revendication — pour un tort qui leur a été causé par le gouvernement ou lors d'un accident de voiture — estiment que l’indemnité qui leur est versée est la réparation d'un tort. Je ne cherche pas à minimiser les souffrances que les gens que vous représentez ont éprouvées, mais c’est toujours ce que pensent les victimes, non sans raison d’ailleurs.
Voici ma question. Au Manitoba… Je ne connais pas bien le droit manitobain sur les débiteurs et les créanciers, mais je connais bien celui de l'Alberta. Les indemnités accordées dans le cadre de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens ne sont pas exemptées de l'application des droits d'exécution normalement consentis aux créanciers par la législation provinciale; autrement dit, le créancier, et j'ai justement eu l'occasion d'en représenter un, d’une personne qui reçoit ce genre d'indemnités peut en demander la saisie. Est-ce que c’est différent au Manitoba?
C'est une discussion fascinante et très instructive, je la suis avec beaucoup d'intérêt.
Si j'ai bien compris, M. Sullivan et M. Anderson sont aux antipodes sur cette question, n'est-ce pas?
Une voix: Oui.
M. Francis Scarpaleggia: Si je comprends bien, monsieur Anderson, votre argument, qui se tient tout à fait, consiste à dire que les indemnités versées aux victimes des pensionnats ont été accordées par le gouvernement fédéral pour préparer les torts que celui-ci a causés à de nombreux élèves de ces pensionnats.
C'est bien ça votre raisonnement? C'est ce que j'ai cru comprendre, mais je veux être sûr de ne pas me tromper.
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Comme je l’ai dit, je ne suis pas avocat et je ne peux pas vous donner un avis juridique, mais la convention de règlement et les ententes qui ont été négociées témoignent de la responsabilité qu’assume chacune des parties, et définissent clairement la façon dont ces responsabilités doivent être exécutées.
Les excuses qui ont été présentées sont la reconnaissance morale, par le gouvernement, du rôle qu'il a joué. Pour un membre des Premières nations, et conformément au droit coutumier des Premières nations, une personne n'a qu'une parole. C'est quelque chose de très important, que le représentant actuel de la Reine aux négociations des traités ne doit pas perdre de vue: l'engagement de construire un pays ensemble, dans la paix et l'harmonie, a été pris peu après la signature des traités. Les conséquences sont évidentes dans le libellé des excuses qui ont été présentées le 11 juin 2008.
La signification de cette reconnaissance est claire, et elle l'est aussi dans le texte des ententes elles-mêmes; d'où la recommandation que nous vous faisons de convoquer devant votre comité un responsable de l'administration de la Convention de règlement et des revendications, ainsi que du financement et du versement des indemnités.
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Vous avez raison de dire qu'on ne devrait avoir qu'une parole, et je pense que ça devrait s'appliquer à tout le monde.
Permettez-moi de vous donner un exemple hypothétique — très hypothétique — d'une situation où le gouvernement fédéral est responsable — peut-être pas directement, mais peut-être indirectement — d'avoir causé un tort à une personne et se voit contraint de lui verser un dédommagement, et vous me direz ce que vous en pensez. Je suis curieux de voir comment vous allez y répondre, et vous aussi, monsieur Sullivan, si vous le voulez.
Supposons que nous ayons affaire à un cas de harcèlement sexuel dans la fonction publique; ça pourrait être à la GRC, mais il vaut mieux garder la GRC en dehors de ça; mon exemple est donc purement hypothétique.
Supposons qu'une fonctionnaire du gouvernement soit victime de grave harcèlement sexuel, à telle enseigne qu'elle finit par souffrir du syndrome de stress post-traumatique, ce qui n'est pas impossible dans ces circonstances. Étant donné que les gens qui souffrent de ce syndrome peuvent se nuire à eux-mêmes et à d'autres, supposons que cette femme commette un crime — contre des biens, par exemple —, qu'elle soit condamnée à une peine de prison et qu'elle reçoive un dédommagement ou une indemnité du gouvernement fédéral pour le harcèlement qu'elle a subi.
Pensez-vous que cette indemnité devrait, elle aussi, être exemptée de la liste?
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Merci beaucoup, monsieur Anderson.
Je m'adresse maintenant à M. Sullivan.
L'ombudsman fédérale actuelle nous a parlé du projet de loi . Dans ses commentaires, elle a mentionné qu'il était impératif de se concentrer, entre autres, sur ce que les victimes vivent en ce moment, mais aussi sur la réhabilitation des délinquants, afin de s'assurer que les crimes ne se répètent pas.
Quand vous lisez le projet de loi C-350, y voyez-vous une façon par laquelle on pourrait faire participer le délinquant à ce type de mesures pour l'aider dans sa réhabilitation?
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Si nous vivions dans un monde parfait, nous n'aurions pas besoin de prisons; il n'y aurait pas de délinquants. Dans un monde idéal, ce qui est de l'ordre du possible, le délinquant qui reçoit une indemnité du gouvernement ou d'un autre organisme la reverse de son plein gré à sa victime. Nous nous entendons là-dessus. Mais il ne s'agit pas simplement de reverser l'argent à la victime. Il faut que les tribunaux rendent une ordonnance de dédommagement, ce qui est extrêmement rare.
Mais on peut espérer que le processus qui sera suivi ou les encouragements qui seront donnés… Je crois que le projet de loi prévoit que le plan correctionnel doit encourager les délinquants à rembourser leur victime. On peut espérer que ça fera partie du programme que devront suivre les délinquants: vous avez victimisé telle personne et vous avez maintenant la responsabilité de réparer votre faute auprès de cette personne et de lui présenter des excuses.
Le nombre de délinquants qui seraient prêts à faire ça nous surprendrait sans doute. Après avoir participé à un programme, il y en a peut-être qui seraient tout à fait prêts à le faire. Mais cela dit, même s'ils ne sont pas prêts à le faire, je pense qu'il est juste de leur dire qu'ils vont devoir quand même le faire, puisque c'est ce qui est prévu dans la peine qui a été infligée par le tribunal.
Je parle de la peine que les délinquants doivent purger. Respecter une ordonnance de dédommagement n'est pas seulement une responsabilité, c'est une obligation juridique qui fait partie de la peine qui a été infligée, au même titre que la peine d'emprisonnement ou l'interdiction de boire de l'alcool pendant une période de probation. Pour beaucoup de délinquants, je pense que ça peut faire partie de l'effort de réhabilitation.
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C'est possible. Dans le projet de loi , on met davantage l'accent sur les encouragements à donner aux délinquants, dans leur plan correctionnel, pour qu'ils payent le dédommagement à la victime et la suramende compensatoire, entre autres.
Je sais qu'en Saskatchewan, le gouvernement offre une aide aux victimes, pas dans les prisons fédérales, mais de façon générale, en encourageant les délinquants à respecter l'ordonnance de dédommagement. Il y a beaucoup de choses novatrices qui se font en Amérique du Nord et à l'étranger, et qui encouragent le dédommagement des victimes; à mon avis, c'est positif pour les victimes, et ça encourage aussi les délinquants à assumer leurs responsabilités.
L'un des avantages des programmes de justice réparatrice et des programmes qui facilitent le dialogue entre les victimes et les délinquants est qu'ils favorisent nettement le paiement du dédommagement. Les délinquants en arrivent à comprendre le mal qu'ils ont fait. Souvent, ils sont tenus de rencontrer la personne à qui ils ont causé du tort, et ils comprennent que l'argent qu'ils vont verser va aller non seulement au gouvernement mais aussi à la victime. Ça a un effet considérable sur les délinquants.
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Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier les deux témoins.
Monsieur Anderson, j'apprécie beaucoup tout ce que vous avez dit jusqu'à présent. Vous avez remarquablement bien répondu à des questions difficiles, et vous avez donné des exemples qui justifient qu'on fasse des distinctions parmi les groupes de victimes, même si beaucoup de gens pensent que ces distinctions ne sont pas nécessaires.
Je pense qu'en réponse à la question de M. Scarpaleggia, vous avez fort bien expliqué ces différences. Personnellement, j'avais l'intention de vous poser exactement la même question, en espérant entendre une réponse raisonnable. La vôtre était excellente.
J'aimerais maintenant vous poser la question suivante. Nous savons que le projet de loi porte essentiellement sur le versement d'un dédommagement et l’aide à apporter aux victimes. Dans l'ordre de priorité qu’énonce le projet de loi, il est question des montants que le délinquant doit verser au profit d'un enfant ou d'un époux. Je suis sûr que vous connaissez ce sujet beaucoup mieux que n'importe qui d'entre nous, car la criminalité qui sévit dans les communautés des Premières nations et dans les collectivités autochtones, et vous réussissez d'ailleurs pas mal à la circonscrire… Prenons le cas des délinquants qui sont incarcérés dans un pénitencier fédéral — et nous abordons la question des indemnités aux victimes du système des pensionnats — et qui sont bénéficiaires de ce type d'indemnités; on sait que ces détenus ont laissé leurs familles sans ressources dans la communauté, et je pense que l'objectif du projet de loi est de faire en sorte que ces familles ne seront pas doublement victimisées.
En effet, on peut dire que la mère et les enfants qui se retrouvent seuls sont eux aussi des victimes. S’ils ne sont pas les victimes du crime qui a été commis, ils sont victimes en ce sens qu'ils ont perdu un époux et un père. Tant que celui-ci est derrière les barreaux, les enfants n'ont plus de chef traditionnel, quelqu'un qui peut leur apprendre le mode de vie traditionnel. Nous savons aussi que, bien souvent, l'absence du chef de famille s'accompagne de difficultés financières, qui ne font qu'aggraver la situation.
Libre à vous de répondre comme bon vous semble, mais que feriez-vous si un membre de votre communauté était incarcéré dans un pénitencier fédéral, qu'il recevait l'indemnité en question mais qu'il refusait de la verser à sa famille dans le besoin? Les membres de sa famille sont eux aussi des membres de la communauté. Et ils sont victimes à la fois du crime et du système des pensionnats.
En fait, j'aimerais tout simplement connaître votre réaction, surtout si vous pouvez l'exposer de façon aussi éloquente qu'en réponse aux autres questions. Comment peut-on concilier cela? Je pense que c'est ça l'esprit véritable du projet de loi. Sans chercher à nuire à qui que ce soit, on essaie d'assurer la protection de toutes les parties en cause.
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Vous avez mentionné un certain nombre de choses. Je vous remercie de vos commentaires et de votre question.
La sécurité de nos familles est le souci primordial des responsables de nos communautés, d'autant que ça fait partie de notre droit coutumier, depuis bien avant la signature des traités. Quand on parle des séquelles du système des pensionnats, de la colonisation, de la période postérieure aux traités, etc., on le constate crûment dans les statistiques.
Par exemple, 88 p. 100 des Autochtones incarcérés au pénitencier de Stoney Mountain ont été, dans leur enfance, placés dans des familles d'accueil. C'est très dur pour les familles, les communautés et les prestataires de soins de reconnaître qu'à partir du moment où ces enfants sont arrachés à leur famille, à bien des égards, leur vie prend un mauvais tournant.
Il faut déployer énormément d'efforts pour remettre ces gens-là dans le droit chemin et pour les réconcilier avec leur propre communauté. C'est le problème auquel nous faisons face. Nous voyons bien qu'il y a un lien: les individus qui ont été maltraités dans leur enfance, dans les pensionnats, maltraitent plus tard les membres de leur propre famille. C'est le problème auquel nous faisons face.
Quand je dis que nous jouons la carte de la prévention communautaire et de la justice réparatrice, je veux dire que nous nous efforçons avant tout d'intégrer les effets de tous ces éléments et de créer une communauté capable d'assurer la sécurité de tous ses membres. Quand je disais tout à l'heure que notre objectif est de faire en sorte que la communauté doit être le lieu d'habitation le plus sûr pour tous ses membres, il nous faut par conséquent surmonter toutes ces difficultés et trouver une solution aux problèmes qui se posent dans la vie quotidienne, selon les circonstances. Nous devons absolument trouver une solution au nombre terriblement disproportionné de délinquants autochtones et au nombre terriblement disproportionné de détenus qui ont été placés, dans leur enfance, dans des familles d'accueil.
Pour nous, la protection de la famille est assurément une priorité, mais nous estimons que c'est au détenu et aux membres de sa famille de décider si l'indemnité qu'il reçoit doit leur être reversée. C'est une ressource importante pour la famille.
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Je pense que l'impact sera limité car il y a très peu de délinquants dans les pénitenciers fédéraux qui font l'objet d'une ordonnance de dédommagement ou d'une suramende compensatoire.
C'est vrai que les victimes se plaignent beaucoup que les délinquants ne soient pas tenus de payer un dédommagement. Le dédommagement va à la victime, et la suramende compensatoire va à la province, par conséquent, lorsque le délinquant ne paie pas, ça crée beaucoup de frustration. Mais c'est sans doute davantage un problème avec ceux qui purgent des peines provinciales, car à ce moment-là, il s'agit généralement de crimes contre les biens, et il y a peu de délinquants de cette catégorie dans les pénitenciers fédéraux.
Donc je ne pense pas que ça serait un problème... C'est vrai que la plupart des victimes que j'ai rencontrées se plaignaient que leur type était incarcéré dans une prison fédérale, qu'il faisait l'objet d'une ordonnance de dédommagement mais qu'il ne payait pas, et elles voulaient donc faire quelque chose. Bien sûr, il faut aussi que le détenu reçoive une indemnité d'un organisme quelconque. Bref, il n'y a pas beaucoup de cas où toutes ces conditions sont réunies.
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Pour employer un terme cri, je dirai
Kwayaskonikiwin. Ça veut dire atteindre un certain équilibre, rétablir la situation.
Quand un problème surgit dans la vie d'une personne ou d'une communauté, nos responsables de la justice communautaire et des programmes de justice réparatrice estiment qu'il est très important de rétablir la situation en essayant de concilier l'acte de l'individu, les circonstances qui ont influé sur l'individu, et bien sûr la relation entre la victime et le délinquant.
La réhabilitation, au sens ordinaire, peut faire partie de tout ça, mais notre objectif, notre vision, c'est vraiment de concilier les actes d'un individu et de rétablir l'équilibre...
M. Jean Rousseau: Excusez-moi, monsieur...
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Merci beaucoup, monsieur Rousseau.
Je tiens à remercier M. Anderson et M. Sullivan d'avoir témoigné devant notre comité aujourd'hui. Vous nous avez dit des choses très intéressantes. Merci.
Chers membres du comité, nous allons faire une pause de quelques instants pour permettre à nos invités de quitter la salle. Nous avons une question de régie interne à régler, et ensuite, nous parlerons d'un détail mineur concernant le rapport.
Nous allons suspendre les travaux et siéger à huis clos une fois que les invités auront quitté la salle.
Merci.
[La séance se poursuit à huis clos.]
[La séance publique reprend.]
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Dans votre première explication, vous avez dit qu'avant l'entrée en vigueur de la partie contraignante du projet de loi, ils auraient cette possibilité. Pendant combien de temps l'auraient-ils avant l'entrée en vigueur de la partie contraignante? Il faudrait que ça soit plus clair...
Y a-t-il d'autres questions là-dessus? Êtes-vous prêts à passer au vote? Ceux qui sont pour l'amendement NDP-1?
(L'amendement est rejeté.)
Le président: L'article 1 est-il adopté?
(L'article 1 est adopté.)
(Article 2)
Le président: Pour l'article 2, vous avez reçu l'amendement du gouvernement.
Le greffier me dit que nous devons commencer par celui-ci, parce que s'il est adopté, le vôtre ne le sera pas. L'amendement du NPD sera redondant ou il sera écarté d'office.
Si vous voulez expliquer...
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Merci beaucoup, monsieur le président.
L'amendement est assez long, alors je vais le lire avant d'en expliquer la raison d'être.
Ce que nous proposons, en substance, à l'article 78.1, c'est notamment de peaufiner le libellé. Par exemple, au lieu de « Pour favoriser la réalisation du », nous proposons « En vue de la réalisation du », par souci d'uniformité. Voilà pour le paragraphe 78.1(1).
Notre projet de paragraphe 78.1(2) dispose que « Si le délinquant doit payer plus d'une somme visée à l'un des alinéas (1) a) à d), les sommes à payer au titre de cet alinéa sont payées selon une part proportionnelle si les fonds sont insuffisants pour les acquitter en entier. » Il s'agit simplement de préciser que, si un détenu doit verser une pension alimentaire pour deux enfants de lits différents, la somme sera répartie proportionnellement entre les deux enfants, et non pas en fonction des cinq catégories différentes — c'est cinq ou quatre?
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Quatre catégories — ça serait réparti proportionnellement dans la même catégorie.
Le projet de paragraphe 78.1(3) dispose que « Le paragraphe (1) ne s'applique pas aux frais ou dépens accordés par le tribunal dans sa décision. » Là encore, il s'agit de préciser le libellé. Si les frais ou dépens sont déterminés dans la décision, ils seront attribués en priorité, et le reste le sera en vertu du paragraphe 78.1.(1) proposé.
Le projet de paragraphe 78.1(4) nous ramène à quelque chose dont nous avons entendu parler par des témoins. Nous pensons qu'il est important de préciser que « Le paragraphe (1) ne s'applique pas aux sommes à payer au délinquant en exécution de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens », qui est entrée en vigueur le 19 septembre 2007. Encore une fois, cela ne donne pas pour autant carte blanche aux créanciers. Cela concerne uniquement le paragraphe (1).
Pour ce qui de la deuxième partie, c'est-à-dire le projet de paragraphe 78.1.(5), des témoins nous ont dit que ce serait très difficile pour le SCC à administrer. Nous avons donc jugé bon d'alléger le fardeau du SCC en ne lui donnant pas la responsabilité de rechercher les créanciers. Ce sera aux créanciers d'informer le SCC que le délinquant leur doit de l'argent. De cette façon, le libellé sera plus clair.
Pour ce qui est du projet de paragraphe 78.1(6), nous voulons simplement clarifier les choses en disant que « Sa Majesté ne tient compte que des jugements ou ordonnances à l'égard desquels un avis a été reçu aux termes du paragraphe (5) ». C'est simplement par souci de cohérence.
Les projets de paragraphes 78.2.(1) et 78.2.(2) donnent essentiellement au SCC et au ministère des Finances le pouvoir de s'échanger des informations sans contrevenir à des lois sur la protection de la vie privée.
Une voix: Vous en êtes au numéro six?
Mme Candice Hoeppner: Non, je suis désolée. J'en suis aux projets de paragraphes 78.2(1) et 78.2(2). Le paragraphe 78.2(1) stipule que: « Afin d'établir si la personne à qui Sa Majesté doit payer une somme... ». Ça leur donne la possibilité de s'échanger des informations. Au paragraphe 78.2(2), le SCC peut...
Les trois lignes de notre projet d'article 78.3 prévoient que les règlements seront pris en conformité avec les autres lois.
Ce sont là des petits détails à régler, par rapport à l'ARC et à d'autres lois, et ça ne change rien au contenu ou à l'objectif du projet de loi. Les principaux changements proposés dans ces amendements consistent à exempter les indemnités accordées en vertu de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens, et à demander aux créanciers d'informer le SCC lorsque des détenus leur doivent de l'argent. Ce sont là les deux principaux changements, sans oublier la possibilité qui est donnée au SCC et au ministère des Finances de s'échanger des informations.
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Je voudrais dire pour commencer que le gouvernement a tenu compte des remarques de certains témoins et des suggestions que nous avons faites.
Je pense qu'il est très important que nous accordions cette exemption à ceux qui touchent une indemnité dans le cadre de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens, et je remercie le gouvernement de l'avoir inclus dans ses amendements.
Nous avions également soulevé la question des coûts administratifs, à laquelle vous avez essayé de répondre.
Nous aimerions vous présenter deux sous-amendements à ce sujet, mais je peux d'ores et déjà vous dire que, de façon générale, même s'ils ne sont pas adoptés, nous sommes très satisfaits de la tournure que prennent les choses.
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J'ai déjà vu des ordonnances d'un tribunal de la famille, et généralement, comme on dit en français, c'est...
[Français]
chicane
[Traduction]
entre les deux époux, — style « c'est ma fin de semaine ». J'ai vu pas mal d'ordonnances dans ma carrière, et j'ai constaté qu'on y évitait généralement les termes « enfant », « sous la garde de », etc.
Je me demande, monsieur Garrison ou madame Lefebvre, si vous avez reçu ça d'un avocat qui pratique le droit de la famille au Québec, et si vous savez quelles conséquences ça risquerait d'avoir...? Ma préoccupation est la même. Parfois, en voulant être trop précis, on ne fait qu'aggraver les choses.
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Je vous remercie de vos commentaires.
Comme vous le savez, certaines choses sont différentes au Québec, si on les compare au reste du Canada. C'est le cas notamment en ce qui a trait aux conjoints de fait et aux époux. Selon le Code civil du Québec, les conjoints de fait et les époux n'ont pas les mêmes droits pour plusieurs choses. En ce moment, il y a un procès gigantesque qui porte sur les droits des conjoints de fait et des époux. C'est en train de se discuter. On ne peut pas dire le nom de la personne, même si elle est assez connue au Canada. Ça se passe au Québec.
En lisant cela, j'ai certaines craintes concernant les enfants des conjoints de fait. Je ne peux pas me prononcer pour le reste du Canada sur ça, mais il se peut que ce soit mal interprété au Québec. C'est pourquoi il serait important de l'ajouter.
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Je comprends le problème de Mme Doré Lefebvre. Je sais à quelle cause elle fait allusion, ça concerne des biens matrimoniaux, ce qui est tout à fait différent d'une pension alimentaire pour un enfant, et ce n'est pas de cela qu'il est question ici.
Vous dites que les tribunaux du Québec sont parfois moins enclins à accorder une pension alimentaire aux enfants lorsque les parents ne sont pas mariés. Je comprends. Cela dit, elle ne peut pas contourner cette difficulté en proposant de modifier la définition à l'alinéa 78.1(1)a). Le projet de loi ne s'appliquera qu'aux ordonnances de tribunal.
Si un tribunal du Québec refuse, pour quelque raison que ce soit, d'ordonner le versement d'une pension alimentaire au profit des enfants lorsque les parents ne sont pas mariés, je comprends les problèmes que ça peut poser. Je dirai même que je n'approuve pas cette décision. Mais ça n'a rien à voir avec ce projet de loi qui ne s'applique, à juste titre, qu'à des ordonnances relatives à des pensions alimentaires.
Merci, monsieur le président.
Quand on commence à dire que « ça ne relève pas du projet de loi », ça m'inquiète.
Puisqu'il n'y a pas d'autres questions au sujet du sous-amendement, nous allons passer au vote. Tous ceux qui sont pour le sous-amendement visant à supprimer l'alinéa d)?
(Le sous-amendement est rejeté.)
Le président: Nous revenons maintenant à l'amendement G-1. Tous ceux qui sont pour l'amendement G-1, qui est présenté par le gouvernement?
Je suis désolé, madame Murray, mais je n'avais pas votre nom sur la liste.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je dois vous dire que j'apprécie beaucoup le climat de collaboration qui règne dans ce comité. Je suis très impressionnée.
Je n'ai pas pu me joindre à vous pendant toutes ces semaines où vous avez examiné ce projet de loi d'initiative parlementaire, mais je suis étonnée de voir qu'autant de modifications aussi importantes nous sont proposées à peine quelques minutes avant la mise aux voix de ce projet de loi. Ça m'est d'autant plus difficile de les appuyer, au nom des libéraux.
Même si nous appuyons les principes de ce projet de loi — et je pense que nous avons activement contribué aux délibérations sur le sujet —, je ne suis pas en mesure d'appuyer cet amendement, non pas parce que je conteste sa raison d'être, comme le NPD semble le dire, mais parce que la procédure qui a été suivie m'empêche de lui accorder toute l'attention nécessaire.
J'aimerais vous soumettre une demande. Dorénavant, serait-il possible que la consultation préalable que nécessite un tel amendement se fasse un peu plus tôt, et non pas 45 minutes avant la mise aux voix du projet de loi?
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Je prends note, mais je dois aussi vous rappeler que des amendements ou des sous-amendements peuvent être présentés spontanément pendant l'examen article par article.
C'est vrai qu'il est imprimé... mais vous savez, il arrive que les députés rédigent leur amendement sur place. Il faut alors que les greffiers se dépêchent d'aller en faire des photocopies. Mais je prends bonne note de votre remarque, madame Murray.
Y a-t-il d'autres interventions sur l'amendement? Non. Tous ceux qui sont pour l'amendement du gouvernement G-1?
(L'amendement est adopté.)
Le président: Parfait. L'article 2 modifié est-il adopté?
(L'article 2 modifié est adopté.)
Le président: Le titre est-il adopté?
Des voix: Oui.
Le président: Le projet de loi modifié est-il adopté?
Des voix: Oui.
Le président: Puis-je faire rapport du projet de loi modifié à la Chambre?
Des voix: Oui.
Le président: Le comité doit-il demander la réimpression du projet de loi?
Des voix: Oui.
Le président: Chers collègues, je pense que nous arrivons à la fin.
Je vous remercie tous de votre collaboration. C'est bien que nous ayons terminé, voilà une bonne chose de faite.
La séance est levée.