Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
La séance est ouverte. Bonjour, chers membres du Comité. La greffière m'a informé que nous avions le quorum.
Les tests de son ont été effectués pour les personnes présentes virtuellement. Nous avons encore un petit problème avec un témoin, mais nous verrons en cours de route.
Je vous souhaite la bienvenue à la 105e réunion du Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées.
La réunion d'aujourd’hui se tient sous forme hybride. Des gens y participent en personne et d'autres virtuellement via l'application Zoom.
Vous pouvez vous exprimer dans la langue officielle de votre choix. Pour ceux qui sont présents dans la salle, vous pouvez utiliser les oreillettes pour avoir accès aux services d'interprétation en sélectionnant la langue de votre choix. Pour ceux qui sont présents virtuellement, vous devez cliquer sur l'icône en forme de globe au bas de votre écran et choisir la langue de votre choix. Si les services d'interprétation cessent de fonctionner, veuillez m'en informer. Si vous êtes dans la salle, levez la main. Si vous êtes en virtuel, utilisez la fonction « lever la main ». Nous suspendrons la réunion jusqu'à ce que les services soient rétablis.
Pour protéger la santé auditive de nos interprètes, je rappelle à ceux qui sont dans la salle de s'assurer de tenir leur oreillette loin du microphone, parce que cela crée des bruits parasites qui peuvent causer des problèmes auditifs à nos interprètes.
Veuillez adresser tous vos commentaires à la présidence.
Conformément à l'ordre de renvoi du mardi 27 février 2024, le Comité entreprend son étude sur le projet de loi C‑58, Loi modifiant le Code canadien du travail et le Règlement de 2012 sur le Conseil canadien des relations industrielles.
Avant de présenter les témoins, je tiens à mentionner que nous avons trois nouveaux membres qui se joignent à nous pour l'étude du projet de loi C‑58: Mme Vignola, M. Boulerice et M. Sheehan.
Je vous souhaite la bienvenue au Comité.
Nous accueillons pendant la première heure Lana Payne, présidente nationale Unifor; Chris Aylward, président national de l'Alliance de la Fonction publique du Canada, qui est accompagné de Liam McCarthy, directeur, Directions des négociations et des programmes, et de Daniel Fisher, directeur par intérim. Nous accueillons aussi virtuellement M. Bolduc, secrétaire général de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec.
Nous allons commencer par les déclarations liminaires de cinq minutes. M. Aylward présentera celle de l'Alliance de la Fonction publique du Canada.
Nous commençons par Lana Payne d'Unifor. Vous avez cinq minutes. Allez‑y, je vous prie.
Mesdames et messieurs les membres du Comité, je suis ici aujourd'hui en tant que présidente d'Unifor, un syndicat qui représente 315 000 travailleurs dans l'ensemble du pays, dont près de 70 000 dans le secteur privé sous réglementation fédérale, notamment le transport aérien, routier, ferroviaire et maritime, ainsi que les télécommunications et les médias.
Je vous remercie sincèrement de me donner l'occasion de vous parler du projet de loi C‑58 et du besoin urgent d'adopter une mesure législative anti-briseurs de grève au Canada. Je tiens également à remercier sincèrement les députés de tous les partis politiques à la Chambre des communes qui ont voté à l'unanimité en faveur du projet de loi en deuxième lecture. Nous devons maintenant passer à l'action.
Les relations de travail pacifiques au Canada — et dans le entier d'ailleurs — reposent sur les principes de la négociation collective libre et équitable. Ces principes ont permis d'améliorer les conditions de vie et de travail des travailleurs canadiens au fil des décennies. Aucun pays n'est parvenu à réaliser des progrès et une prospérité partagés pour les travailleurs sans des syndicats forts et des lois sur la négociation collective rigoureuses. Notre capacité à négocier dans un cadre véritablement respectueux de la voix et du pouvoir des travailleurs est historiquement le seul moyen de rehausser les normes pour tous les travailleurs, qu'ils soient syndiqués ou non.
Comme bien d'autres syndicats, Unifor négocie pratiquement une convention collective par jour au Canada. Dans la majorité des cas, les négociations se concluent sans qu'il y ait de conflit. En effet, même dans les rares cas de conflits du travail, les employeurs sont nombreux à s'engager respectueusement dans le processus, notamment en refusant d'avoir recours à des briseurs de grève. Évidemment, les deux parties mènent d'âpres négociations, car cela fait partie du processus. Toutefois, il y a encore des employeurs qui refusent de respecter les droits des travailleurs canadiens et qui se comportent comme si les travailleurs n'avaient pas de droits constitutionnels. C'est ce qui justifie l'importance d'adopter le projet de loi C‑58 le plus rapidement possible.
Je voudrais vous présenter un exemple pertinent d'un employeur dont l'activité relève principalement de la compétence fédérale, mais qui concerne un petit groupe de travailleurs titulaires d'une accréditation provinciale. Le 27 février, au premier jour d'une grève parfaitement légale, Autoport, une filiale de la compagnie très rentable du CN, a fait venir des travailleurs de remplacement — des briseurs de grève — qui ont franchi la ligne de piquetage et ainsi bafoué de façon agressive le droit de grève fondamental de 239 membres d'Unifor en Nouvelle-Écosse. Les briseurs de grève font encore aujourd'hui le travail de nos membres, y compris Heather Wildsmith, 71 ans, à l'emploi d'Autoport depuis 2015, mais aussi mère et grand-mère de cinq adorables petits-enfants. Elle travaille fort chaque jour et retire beaucoup de fierté du travail qu'elle accomplit.
Pendant qu'il était à la table de négociation avec nous ainsi qu'avec un conciliateur fédéral, le CN embauchait et formait des briseurs de grève pour faire le travail de nos membres, ce qui ne correspond pas à une négociation collective libre et équitable.
Le CN est également membre de l'Association des Employeurs des transports et communications de régie fédérale, les ETCOF, laquelle a vigoureusement et activement fait pression non seulement contre ce projet de loi, mais aussi contre le droit de grève des travailleurs au Canada. Je m'en tiendrai à dire que leurs recommandations, que vous entendrez probablement, videraient de tout sens ce projet de loi et, en fait, les droits des travailleurs en matière de négociation collective.
Aussi, je tiens à être très claire sur ce point. Le parcours proposé par les ETCOF mène indéniablement vers le chaos. Il forcera les travailleurs et leurs syndicats à avoir recours à des méthodes plus directes pour faire respecter nos droits collectifs, ce qui entraînera des difficultés majeures aussi bien pour les employeurs que pour les travailleurs et les gouvernements. Cette approche ne mènera pas à la paix ouvrière; elle produira en fait le résultat inverse.
Un projet de loi interdisant les travailleurs de remplacement est nécessaire en raison du recours et de la menace de recours à des briseurs de grève pendant les conflits qui peuvent miner le droit des travailleurs à la négociation collective qui est protégé dans la Constitution; porter atteinte à notre droit constitutionnel de grève; prolonger les conflits de travail, en multipliant par six les délais en cas de recours à des briseurs de grève; éliminer le moyen de pression économique dont disposent les travailleurs pour négocier avec les employeurs; accroître les conflits et la violence sur les lignes de piquetage; compromettre la sécurité sur les lieux de travail; déstabiliser les relations de travail normales, et j'ajouterais, qui deviennent ensuite malsaines et empoisonnées.
De plus, cela n'incite pas les employeurs à négocier et à conclure des contrats équitables là où ils devraient le faire, c'est‑à‑dire à la table de négociation. Selon Unifor, voter pour le projet de loi C‑58 est le moindre que les élus puissent faire.
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Je vous remercie encore une fois pour le plein appui donné à ce projet de loi en deuxième lecture. Il permet de moderniser le système canadien de relations de travail afin de refléter le contexte social et économique de notre époque, où le pouvoir et la richesse accrus des entreprises requièrent un contrepoids efficace.
Comme vous le savez, le Québec et la Colombie-Britannique disposent de lois similaires depuis de nombreuses années, et le Manitoba vient d'annoncer son intention de faire de même.
Le projet de loi C‑58 doit être adopté et mis en œuvre sans tarder, et non pas dans 18 mois, ni dans un an.
Je vous remercie de m'avoir permis de témoigner aujourd'hui. Je répondrai volontiers à vos questions.
Bonjour, et merci de me donner l'occasion de prendre la parole devant le Comité.
L'Alliance de la Fonction publique du Canada, ou AFPC, est l'un des plus grands syndicats du pays et représente plus de 260 000 travailleurs. Parmi ces membres, plusieurs milliers travaillent dans le secteur privé sous réglementation fédérale et seront directement touchés par le projet de loi C‑58. Ces membres travaillent dans les aéroports, les bases militaires, les entreprises de messagerie, les ports, les organismes autochtones de gouvernance et dans les trois territoires.
Pour vous donner un exemple, je reviens tout juste de la Colombie-Britannique, où nos membres, qui travaillent pour IMP Aerospace à la réparation des hélicoptères de recherche et de sauvetage, et qui sont régis par le Code canadien du travail, sont actuellement à la table de négociation.
Les syndicats de tout le pays réclament depuis longtemps une loi progressiste et efficace interdisant les travailleurs de remplacement. L'AFPC s'est réjouie du dépôt du projet de loi C‑58. Nous y sommes presque.
Nous proposons quatre changements simples qui rendront ce projet de loi vraiment efficace pour uniformiser les règles du jeu et assurer une négociation libre et collective pour tous les travailleurs régis dans ce secteur.
Premièrement, le recours à des travailleurs de remplacement fait traîner les conflits de travail et divise les communautés en dressant les travailleurs les uns contre les autres. Les membres de l'AFPC en ont fait l'expérience récemment lors de la grève à la régie du logement d'Iqaluit. Les travailleurs ont fait du piquetage pendant plus de quatre mois, pendant que leur employeur faisait appel à des travailleurs de remplacement pour faire leur travail, au lieu de s'asseoir et de négocier avec eux à la table de négociation.
Les règles du jeu ne sont équitables que si l'interdiction de recourir à des briseurs de grève est totale. Le projet de loi C‑58, tel qu'il est actuellement rédigé, laisse de nombreuses possibilités aux employeurs de faire appel à d'autres personnes pour faire le travail des employés en grève, ce qui n'est pas conforme aux objectifs de ce projet de loi. Nous recommandons que le projet de loi soit amendé afin d'élargir la portée des interdictions relatives à l'exécution du travail des grévistes.
Deuxièmement, telles qu'elles sont rédigées, les modifications législatives n'entreront en vigueur que bien après les prochaines élections. C'est inacceptable, et il devrait être possible de faire entrer en vigueur les propositions relatives au maintien des activités dans les 90 jours — et dans au plus neuf mois pour ce qui est des dispositions anti-briseurs de grève — suivant la sanction royale.
Troisièmement, le libellé du projet de loi concernant l'utilisation d'entrepreneurs dépendants est confus. Le projet de loi doit préciser explicitement que les entrepreneurs dépendants, qui sont des employés de l'unité de négociation, ne peuvent pas faire le travail des grévistes.
Enfin, le délai de prise de décision concernant les services essentiels est trop long. La Cour suprême a précisé que les services essentiels ne devaient pas entraver ou retarder le droit de grève d'un travailleur. Le délai de 90 jours proposé pour que le Conseil canadien des relations industrielles tienne des audiences et rende des décisions en cas de différend entre syndicats et employeurs sur les services essentiels est tout simplement trop long.
Voici les quatre changements que nous proposons: supprimer les exceptions concernant les personnes qui peuvent effectuer le travail des grévistes; raccourcir le délai pour l'entrée en vigueur de la loi; préciser que les entrepreneurs dépendants ne peuvent pas effectuer le travail des grévistes; réduire le délai de prise de décision par le Conseil canadien des relations industrielles pour les accords sur les services essentiels.
Ces changements feront du Code canadien du travail un texte législatif solide, équitable et pérenne, qui apportera un équilibre en milieu de travail.
Je m'en voudrais toutefois de ne pas souligner que le Code canadien du travail ne régit les conditions de travail que d'environ un million de travailleurs au pays. Il est impératif que des lois anti-briseurs de grève soient mises en œuvre dans l'ensemble du pays. Bien que le Comité n'ait pas le pouvoir d'établir de telles règles pour les provinces, il a le pouvoir — et je vous demande de l'utiliser — de modifier la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique fédérale et de veiller à ce que les briseurs de grève ne soient pas utilisés pour saboter les négociations pour les plus de 400 000 travailleurs employés par le gouvernement et ses sociétés et organismes d'État.
En fait, lorsque je quitterai cette pièce, je me rendrai directement à un piquet de grève des employés des fonds non publics. Ces travailleurs apportent un soutien essentiel aux Forces armées canadiennes. Ils sont en grève depuis plus de deux mois parce que leur employeur — un organisme du gouvernement fédéral — a refusé de revenir à la table de négociation avec une offre salariale respectueuse de ces travailleurs et, au lieu de cela, dépense des fonds pour embaucher des travailleurs de remplacement pour faire leur travail. C'est un exemple flagrant qui montre que ce projet de loi est nécessaire, et qu'il est nécessaire d'en étendre la portée.
Je vous remercie du temps que vous m'avez accordé. J'attends vos questions avec impatience.
Bonjour, monsieur le président et honorables membres du Comité.
Je vous remercie de donner à la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, la FTQ, l'occasion de s'exprimer sur le projet de loi C‑58. La FTQ représente 600 000 travailleurs au Québec dans tous les secteurs d'activité, y compris dans des entreprises de compétence fédérale. Nous avons des membres qui travaillent dans les ports, dans les télécommunications, dans la câblodistribution, dans les aéroports et dans le transport ferroviaire, entre autres. Actuellement, nous avons deux groupes qui sont en lockout dans des entreprises sous réglementation fédérale: des employés de Vidéotron à Gatineau, tout près d'où vous êtes actuellement, et des débardeurs du Port de Québec, qui sont en lockout depuis 18 mois.
La FTQ salue la décision du gouvernement actuel de déposer un projet de loi qui vise à interdire l'utilisation de briseurs de grève en cas de conflit, qu'il s'agisse d'un lockout ou d'une grève. Cela fait des années, je dirais même quelques décennies, que la centrale syndicale demande une telle loi. Je dirais aussi que c'est une chose de déposer un projet de loi, mais que c'en est une autre de l'adopter. Or, on doit adopter ce projet de loi très rapidement, car on l'attend depuis longtemps. Il faut qu'il soit adopté au cours de la législature actuelle et, à cette fin, la FTQ demande la collaboration de tous les parlementaires de tous les partis politiques représentés à la Chambre des communes.
Le projet de loi C‑58 était donc attendu depuis longtemps par la FTQ. Son adoption permettra d'améliorer le processus de négociation des conventions collectives, car le recours à des briseurs de grève est une plaie, un cancer qui nuit au règlement des conventions collectives en prolongeant les conflits. Cela a été démontré. Le projet de loi C‑58 vient justement rétablir un certain rapport de force entre les travailleurs et les travailleuses et l'employeur. Le projet de loi vient donner, je dirais, un sens véritable au droit fondamental d'association et de grève, qui est reconnu et qui a été reconnu dans les récentes décisions de la Cour suprême du Canada.
Oui, nous sommes heureux, à la FTQ. En décembre 2022, nous avions déposé un mémoire dans le cadre de la consultation menée par Emploi et Développement social Canada. Nous y abordions nos demandes générales en vue du dépôt d'un projet de loi. Maintenant qu'un tel projet de loi est à l'étude, je dirais que le plus important est que le Parlement réussisse à l'adopter rapidement. D'ailleurs, en ce sens, je vais vous proposer les modifications qui sont les plus importantes à nos yeux.
Premièrement, le projet de loi vise à protéger les travailleurs des secteurs sous réglementation fédérale contre le recours à des briseurs de grève durant une grève ou un lockout. Nous comprenons mal pourquoi, dans le projet de loi actuel, les employés de la fonction publique fédérale ou les employés du Parlement sont exclus du projet de loi. Ils devraient être protégés comme tous les autres travailleurs et toutes les autres travailleuses. C'est peut-être un oubli ou une erreur, mais c'est facilement corrigeable.
Deuxièmement, le nouveau paragraphe 94(5) qu'il est prévu d'ajouter au Code canadien du travail nous inquiète. À la lecture de ce paragraphe, on pourrait conclure qu'un employeur, juste avant le début des négociations, pourrait faire appel à des sous-traitants et que les employés de ce sous-traitant pourraient accomplir les tâches des travailleurs qui sont en lockout ou en grève ou accomplir des tâches similaires. Cela n'a aucun sens pour nous. Dans le texte de la loi, ce serait un peu comme donner à un employeur qui planifie un lockout la recette sur la façon d'utiliser des briseurs de grève sans que, au sens de la loi, ceux-ci soient considérés comme des briseurs de grève. Ce paragraphe nous inquiète énormément. Nous croyons qu'il faut le retirer du projet de loi, tout simplement.
Troisièmement, en ce qui a trait à l'entrée en vigueur de la loi, on prévoit un délai de 18 mois entre le jour de sa sanction et son application. Nous pensons que la nouvelle loi devrait entrer en vigueur dès sa sanction, puisqu'elle ne demande pas la mise en place d'une structure organisationnelle complexe et qu'il n'y a pas de raison, à notre sens, qui justifie un tel délai de 18 mois.
Je remercie tous les témoins d'être avec nous aujourd'hui.
Mes premières questions s'adressent à M. Aylward. Je vous remercie de votre présence et de vos observations.
J'ai des questions au sujet des travailleurs de remplacement. Nous avons vu qu'ils ont été utilisés de différentes façons dans un grand nombre de secteurs.
Monsieur Aylward, un membre de votre conseil d'administration, Mark Weber, qui est président du Syndicat des douanes et de l'immigration, a comparu dernièrement devant le Comité permanent des comptes publics. Il a dit: « nous pensons que l'objectif de l'application est de remplacer nos agents. »
Êtes-vous d'accord avec M. Weber quand il dit que l'application ArriveCan qui a coûté 60 millions de dollars a été conçue pour remplacer les agents?
Des travailleurs vous ont-ils dit être inquiets de voir que des entrepreneurs et des consultants peuvent être utilisés pour les remplacer? Est‑ce une préoccupation dont vous parlent les travailleurs que vous représentez?
Je peux vous dire, par exemple, que les travailleurs en grève que je vais rejoindre en sortant de la réunion sont des employés des fonds non publics. Ils travaillent pour un organisme; ils ne font pas partie de la fonction publique fédérale.
Les membres dont j'ai parlé à Comox en Colombie-Britannique travaillent pour IMP Aerospace. Pourquoi ne travaillent-ils pas pour le gouvernement du Canada? Pourquoi sont-ils sous la férule d'un entrepreneur? Ce sont des travailleurs du secteur public fédéral. Ils réparent des avions militaires, en particulier les hélicoptères de recherche et sauvetage. C'est donc un travail qui, de toute évidence, doit être fait au sein du secteur public fédéral. Pourquoi relèvent-ils d'IMP? Pourquoi ne relèvent-ils pas du ministère de la Défense nationale? Ils travaillent pour un entrepreneur. Ils devraient être des employés du secteur public fédéral.
M. Weber, au sein de votre conseil d'administration, a aussi dit lors de cette réunion:
Une fois que l'application ArriveCAN a été mise en place, les membres ont fait part de leurs préoccupations au syndicat, que nous avons essayé de transmettre à l'employeur. En réalité, il ne semblait pas y avoir de volonté de prendre en compte nos commentaires. Si nos membres avaient été consultés dès le début, je pense qu'une grande partie de ce qui s'est passé n'aurait pas eu lieu.
Êtes-vous d'accord avec M. Weber que le gouvernement aurait pu éviter de gaspiller 60 millions de dollars de l'argent des contribuables pour embaucher des entrepreneurs et des consultants et remplacer des fonctionnaires s'il avait consulté les employés de l'Agence des services frontaliers du Canada ou ses employés des TI?
Oui, je suis totalement d'accord avec cela. Chaque fois que le gouvernement va de l'avant avec un projet sans consulter les syndicats, cela se transforme habituellement en catastrophe.
C'est exactement comme dans le cas du système de paie Phénix. Le gouvernement a fait toutes sortes de promesses au sujet des économies que le système allait permettre de réaliser. Son coût s'élève maintenant à 3 milliards de dollars et ne cesse de croître, et les problèmes ne sont toujours pas réglés.
Un faible niveau de consultation est synonyme de catastrophe. Chaque fois que les employés syndiqués ne sont pas consultés dans un projet, cela se transforme en catastrophe, comme on a pu le voir pour l'application ArriveCAN et le système de paie Phénix.
Le gouvernement a un autre gros projet de TI en cours. C'est le plus gros projet de TI de l'histoire au Canada. Il s'agit du Programme de modernisation du versement des prestations. Nous savons qu'à l'heure actuelle, il dépasse largement le budget prévu et que les retards s'accumulent. Nous savons qu'on a recours à un grand nombre d'entrepreneurs et de consultants pour le faire. Est‑ce que cela vous inquiète?
Encore une fois, chaque fois que l'on a recours à la sous-traitance sans consulter les gens qui accomplissent le travail, cela mène à une catastrophe. Des études ont montré à maintes reprises que le travail du secteur public qui est sous-traité coûte plus cher, n'est pas livré à temps et est de moindre qualité. Nous militons donc pour que le travail se fasse à l'interne. Pourquoi avons-nous tant recours à la sous-traitance?
Avez-vous l'impression que des fonctionnaires se sentent dévalorisés quand le gouvernement ne semble pas vouloir les consulter ou utiliser leurs compétences? Pensez-vous que c'est démotivant pour eux et qu'ils se sentent dévalorisés?
Je pense que n'importe qui dans cette situation se sentirait dévalorisé. Si je suis en poste et que cela fait partie de mon travail de faire certaines tâches et que quelqu'un d'autre est embauché à l'extérieur comme entrepreneur pour superviser ces tâches ou faire les mêmes tâches, cela peut être très démoralisant et ne fait aucun doute.
À ce sujet, pas plus tard qu'en 2023, Statistique Canada nous rapportait que plus de 4,1 millions de personnes disent éprouver des niveaux élevés ou très élevés de stress lié au travail, ce qui représente 21,2 % de tous les employés. Pensez-vous que les travailleurs que vous représentez peuvent subir un stress lié au travail parce qu'ils se sentent remplacés et sous-estimés par le gouvernement, qui dépense des milliards de dollars pour des entrepreneurs et des consultants en sous-traitance?
Chaque fois que le gouvernement a recours à la sous-traitance, le niveau d'anxiété augmente chez les employés, ce qui se comprend. Ils se demandent toujours s'ils seront les prochains. En effet, chaque fois qu'un gouvernement accorde en sous-traitance le travail de la fonction publique, le niveau d'anxiété augmente. Cela ne fait aucun doute.
Je souhaite la bienvenue à tous nos témoins qui sont ici aujourd'hui pour discuter de cette question très importante.
Je viens de la ville de Hamilton, et j'ai eu l'honneur et le privilège de travailler avec des syndicats pendant toute ma vie d'adulte en tant que représentant élu. Je suis très conscient de l'importance d'une loi qui protège les droits des travailleurs. Celle‑ci appartient certainement à cette catégorie.
Madame Payne, vous en avez parlé dans votre déclaration préliminaire, mais cinq minutes ne vous donnent pas beaucoup de temps pour vraiment entrer dans les détails. Pouvez-vous nous parler de la façon dont le recours à des travailleurs de remplacement mine les droits de négociation?
Entre 2011 et 2022, parmi le nombre de conflits de travail que nous avons eus pendant cette période dans les secteurs de compétence fédérale, les employeurs ont eu recours à des briseurs de grève 40 % du temps. Lorsqu'ils le font, ils ont l'impression de ne pas avoir à s'asseoir à la table de négociation et à négocier une convention collective. Cela les empêche de faire ce qui doit être fait, c'est‑à‑dire respecter les travailleurs et négocier avec ceux qui sont syndiqués.
Le conflit du CN à l'installation Autoport en est un parfait exemple. Soit dit en passant, ces travailleurs déchargent des véhicules de luxe. Il n'est pas vraiment dans l'intérêt national qu'une personne obtienne sa Lamborghini très rapidement. C'est exactement ce qu'ils font. Ce sont des véhicules très coûteux, qu'il s'agisse de Porsche ou d'autres marques, et cet employeur, au lieu de s'asseoir et de négocier une convention collective équitable avec nos membres — ce qui, soit dit en passant, est également une indication de respect pour ces travailleurs — a choisi, dès le premier jour du conflit, de confier ces tâches à des travailleurs de remplacement.
Cette décision va prolonger le conflit. Il y a déjà un mois que nous sommes sur la ligne de piquetage là‑bas. C'est démoralisant pour les travailleurs de devoir vivre une telle chose. Ils ont l'impression que les règles ne leur sont pas favorables. Ils renoncent à leur chèque de paye pour essayer d'exercer des pressions économiques sur l'employeur, mais celui‑ci peut les remplacer par des gens qui feront leur travail. Tant que cela ne sera pas interdit, nous n'aurons pas ce que j'appellerai des négociations collectives entièrement justes et libres au pays.
Bien sûr, de nombreux employeurs ne feraient jamais une telle chose. Nous composons avec eux au quotidien. L'année dernière, nous venons d'avoir des négociations dans le secteur de l'automobile, comme vous le savez tous. Nous avons pu négocier des conventions collectives sans précédent pour nos membres. Voilà qui a un effet d’entraînement sur la façon dont nous soutenons les autres travailleurs de ce secteur, y compris ceux non syndiqués de Toyota et de Honda qui ont obtenu des augmentations de salaire grâce à nos efforts à la table de négociation. Nous avons eu de courtes grèves pendant cette période. Pas une seule fois ces employeurs ne songeraient à faire appel à des briseurs de grève.
Il y a donc des employeurs qui respectent les règles, et d'autres ici qui ne le font pas.
Je suis sûr que vous êtes bien au courant de l'argument du bonhomme Sept Heures, selon lequel des grèves prolongées entraînent une hausse des prix et toutes sortes de perturbations économiques. Pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez, pour ce qui est de laisser le processus dont vous venez de parler suivre son cours? À quel point est‑ce important pour respecter les droits des travailleurs? Veuillez aussi parler de ceux qui diraient que les grèves prolongées entraînent une perturbation de l'économie et des prix plus élevés.
Le problème, c'est l'embauche de travailleurs de remplacement, qui prolonge le conflit. Ensuite, on se retrouve par conséquent avec plus de journées de travail perdues. Or, si on utilise tous les incitatifs possibles... Soit dit en passant, nous avons une excellente équipe de conciliateurs fédéraux qui aident les parties à conclure des ententes.
Il y a des grèves de temps à autre. C'est arrivé dans la voie maritime l'an dernier. Vous êtes tous au courant. Elle a duré une semaine, et notre syndicat s'est assuré que nous retournions à la table de négociation. Cette grève a été la première en 55 ans. Cela devrait vous indiquer qu'il y a un problème.
Quand on peut négocier des conventions collectives à maintes reprises et que, tout à coup, on se retrouve avec un conflit pour la première fois en 55 ans, c'est parce qu'il y a une tension qui monte. Dans ce cas, c'était un milieu de travail très toxique. La seule façon dont ces travailleurs ont eu l'impression de pouvoir régler le différend était en arrêtant de travailler. Soit dit en passant, nous avons réglé le problème, et nous avons bien travaillé avec le gouvernement fédéral et les conciliateurs fédéraux pour résoudre cette impasse.
Cependant, c'est aussi un problème. Bon nombre de ces employeurs fédéraux ont toujours eu l'impression d'avoir deux cartes. Elles peuvent embaucher des travailleurs de remplacement, ou elles ont l'impression que le gouvernement va intervenir en leur nom et imposer un retour au travail par voie législative, ou tout envoyer à l'arbitrage exécutoire. Par conséquent, les employeurs n'ont jamais eu l'impression qu'ils devaient s'asseoir à la table et négocier équitablement.
Maintenant, ces choses changent, et il y aura évidemment des employeurs qui diront que le ciel leur tombe sur la tête. Je vous dirais que ce n'est pas vrai. Nous aurons un meilleur système de relations de travail au Canada grâce à cette loi.
Vous avez parlé de l'augmentation des conflits et de la violence qui vient avec les grèves et le recours à des travailleurs de remplacement.
Pour ma part, j'ai vu tellement d'exemples dans la ville de Hamilton, dans différents secteurs, où le recours à des travailleurs de remplacement a nui aux relations entre l'employeur, les syndicats et les employés pendant plus d'une décennie, et probablement des décennies.
Pouvez-vous nous parler de ce qui se passe après la conclusion d'un accord, dans les cas où on a eu recours à des travailleurs de remplacement, et de la relation entre ces trois parties à l'avenir, si vous voulez les appeler ainsi?
Madame Payne, messieurs Aylward et Bolduc, merci beaucoup d'être des nôtres, aujourd'hui.
Monsieur Bolduc, ça me fait plaisir de vous rencontrer aujourd'hui. Je suis la petite fille d'un fier membre du syndicat des Métallos local 5778, de la Côte‑Nord. Mon père était grandement engagé dans le syndicat et je comprends tout à fait le combat que vous menez. Ce sont ces syndiqués des Métallos local 5778, maintenant disparus, qui ont également permis des avancées pour ce qui est de la Loi sur la santé et la sécurité au travail au Québec. Le travail des syndicats est fort important, et il faut le reconnaître.
Vous avez parlé d'une mesure qui est prévue dans le projet de loi actuel, soit la possibilité d'engager des sous-traitants qui pourraient faire le travail pendant une grève ou un lock-out. C'est ce que j'ai pu constater moi aussi à la lecture du nouveau paragraphe 94(5) qu'ajouterait le projet de loi C‑58. Pouvez-vous nous dire les conséquences que pourrait avoir une telle utilisation de sous-traitants sur la durée et la résolution d'un conflit de travail, ainsi que sur la résolution et le désir de l'employeur de s'asseoir à la table des négociations?
Après avoir lu le projet de loi, particulièrement ce paragraphe proposé, j'ai utilisé dans ma présentation le mot « recette », puisque ce paragraphe reviendrait à donner à un employeur qui prévoit mettre ses employés en lock-out une recette pour éviter de se faire accuser d'utiliser des travailleurs de remplacement au sens du projet de loi. En effet, un employeur qui, dans son plan de contingence, prévoit mettre ses travailleurs et travailleuses en lockout pour les forcer à accepter ce qu'ils considèrent comme inacceptable pourrait décider, en fonction de ce paragraphe, d'embaucher un ou deux sous-traitants avant d'envoyer son avis de négociation. En effet, selon les termes du projet de loi, les employés de ce sous-traitant ne seraient pas considérés comme des briseurs de grève, même s'ils font les tâches qui sont assignées aux travailleurs et aux travailleuses ou des tâches semblables. Du moins, c'est notre compréhension de ce paragraphe. Il est sûr que si un employeur applique cette disposition et utilise cette astuce ou cette recette, la conséquence est que le conflit va être long. L'employeur pourra prolonger le conflit, puisqu'il y aura des gens qui feront les tâches des travailleurs et des travailleuses qu'il aura mis en lockout.
Lorsque j'ai fait une partie de mon discours sur ce sujet, je m'étais fait répondre que ça allait à l'encontre de la loi. Considérez-vous donc que ce paragraphe proposé par le projet de loi ne répond pas à la lettre de la loi et qu'il y a une aberration à même le projet de loi actuellement?
Je dirais qu'on doit retirer ce paragraphe puisqu'il va à l'encontre de l'objectif qu'on cherche à atteindre en adoptant une loi visant à contrer le recours à des briseurs de grève. On dit qu'on cherche à rétablir le rapport de force entre les travailleurs et leur employeur, mais, en même temps, on donne la recette pour contrer l'objectif qu'on cherche à atteindre. Pour moi, ça n'a pas de sens.
Madame Payne et monsieur Aylward, êtes-vous du même avis et trouvez-vous que le paragraphe 94(5) proposé par le projet de loi va à l'encontre de l'esprit de la loi?
Vous avez tous les trois mentionné qu'un délai de 18 mois entre la sanction royale et la mise en oeuvre de la loi était inacceptable. Que craignez-vous si on maintient ce délai de 18 mois?
C'est un projet de loi dont nous avions besoin hier. Il n'est pas nécessaire d'en retarder l'adoption aussi longtemps qu'on le propose. Comme je l'ai dit dans mon mémoire, lorsqu'on évalue ce qui constituerait un délai raisonnable — et je comprends qu'on ne peut pas le faire immédiatement —, et qu'on se demande ce qui doit vraiment être fait pour mettre tout en œuvre, il faudra essentiellement neuf mois. Après la sanction royale, le processus ne devrait pas prendre plus de neuf mois. Il est vrai qu'il faut maintenir des activités qui devraient figurer à la loi et ce genre de choses, mais attendre 18 mois et plus est totalement inacceptable.
Ça me fait extrêmement plaisir d'être ici avec vous aujourd'hui pour étudier ce projet de loi crucial. Il s'agit d'un projet de loi extrêmement important pour les droits des travailleurs et des travailleuses d'entreprises sous réglementation fédérale.
Je vais me permettre, en introduction, de rappeler pourquoi on en est arrivé aujourd'hui avec un projet de loi gouvernemental qui propose des mesures anti-briseurs de grève et qui était très attendu par le mouvement syndical, les travailleurs et les travailleuses depuis des décennies.
C'est à la suite de l'élection d'un gouvernement minoritaire, en 2021, que les libéraux et les néo-démocrates ont décidé d'entreprendre des négociations et de conclure une entente de soutien pour assurer le fonctionnement et la stabilité du Parlement. Une des conditions que le NPD avait mises de l'avant était l'adoption d'une loi anti-briseurs de grève, une première, alors que les conservateurs et les libéraux avaient toujours refusé d'appuyer des propositions de lois anti-briseurs de grève.
Nous avons donc forcé le gouvernement minoritaire libéral à accepter de déposer un projet de loi anti-briseurs de grève. Ce projet de loi n'est peut-être pas parfait et il requiert des améliorations, mais, pour la première fois de l'histoire de la politique fédérale, nous avons la possibilité de protéger les droits des travailleurs et des travailleuses en conflit de travail, qu'il s'agisse d'une grève ou d'un lockout.
Du côté du NPD, nous sommes fiers d'avoir pu forcer la main du gouvernement libéral et de pouvoir avoir cette discussion aujourd'hui. Nous sommes fiers d'avoir enfin la possibilité d'éviter des conflits qui se prolongent, d'éviter des conflits avec beaucoup de tensions, d'éviter de briser le rapport de force entre l'unité de négociation syndicale et un employeur qui, en ayant recours à des travailleurs de remplacement, empêche la libre négociation et une pression acceptable et constitutionnelle de la part des travailleurs et des travailleuses.
Monsieur Bolduc, nous nous sommes connus il y a quelques années. Vous étiez président du syndicat du Journal de Québec pendant un conflit de travail. La situation relevait de la réglementation provinciale et soulevait notamment le problème important du travail à distance. En effet, la loi québécoise comportait cette notion d'« établissement », en vertu de laquelle le fait de ne pas se présenter sur les lieux physiques du travail était une manière de contourner les dispositions anti-briseurs de grève.
J'aimerais que vous me disiez à quel point il est important, surtout après la pandémie et étant donné toute l'importance du télétravail, que cette notion d'établissement ne figure pas dans le projet de loi fédéral actuel, afin de protéger les travailleurs qui exercent leurs fonctions à distance, en ligne.
Vous avez tellement raison, monsieur Boulerice. À l'époque, au Journal de Québec, en 2007 et 2008, l'employeur utilisait des travailleurs à l'extérieur de l'établissement, mais le fil de leur ordinateur entrait dans l'établissement pour leur permettre de faire le travail des travailleurs et des travailleuses en lockout, dont je faisais partie. La conséquence est que nous avons vécu un conflit de 16 mois. Sans cette possibilité de l'employeur, je suis convaincu aujourd'hui que le conflit aurait été beaucoup plus court et n'aurait probablement duré que quelques semaines.
Il est donc important de considérer les nouvelles réalités du travail en 2024 pour l'application d'une loi comme celle-là. On n'a qu'à traverser de l'autre côté de la rivière et aller à Gatineau, où plus de 200 travailleurs du Syndicat canadien de la fonction publique, affilié à la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, sont actuellement en lockout. Ces gens travaillent principalement dans un centre d'appels de Vidéotron, une filiale de Québecor, ce même employeur qui avait mis les employés du Journal de Québec en lockout. Cet employeur peut, si on interprète la notion d'« établissement » comme un immeuble en briques et en pierres, utiliser des gens en Afrique, en Égypte, en Europe ou en Amérique du Sud pour faire le travail des travailleurs et travailleuses qui sont en lockout. Il est donc essentiel qu'on tienne compte de cette réalité.
Dans votre introduction, monsieur Boulerice, vous avez parlé du contexte actuel d'un gouvernement minoritaire. C'est pour cette raison qu'à deux ou trois occasions dans ma présentation d'ouverture, j'ai souligné l'importance que ce projet de loi soit adopté durant la législature actuelle.
Merci, monsieur Bolduc. Effectivement, au NPD, nous sommes aussi pressés que vous. De toute façon, c'est un projet de loi qui aurait dû être déposé il y a 20 ou 30 ans. Le Québec a adopté un tel projet de loi il y a presque 50 ans, et la Colombie-Britannique aussi. Nous en avons vu l'effet.
Vous avez commencé à parler de la situation actuelle. Je vais en parler à M. Aylward aussi, plus tard. En ce moment, quelles sont les conséquences de l'absence d'une loi anti-briseurs de grève pour les travailleurs et les travailleuses de Vidéotron à Gatineau et pour les débardeurs du Port de Québec qui sont en lockout depuis 18 mois?
Leur situation est extrêmement difficile. L'employeur n'a pas d'incitatif à revenir à la table des négociations si le conflit de travail n'a aucun impact sur lui parce qu'il peut utiliser des travailleurs qui font le même travail pendant que les autres sont à la rue pendant des mois. C'est assez insultant et difficile à vivre pour ces débardeurs et…
Je remercie infiniment nos témoins d'aujourd'hui. J'apprécie vraiment le travail que vous faites pour défendre nos familles de la classe ouvrière partout au pays. C'est très apprécié.
Monsieur Aylward, je vous remercie de votre témoignage d'aujourd'hui et de certaines des choses que vous avez dites. L'une des questions que je veux vous poser est la suivante: quelle est la différence entre un travailleur de remplacement et l'embauche de consultants externes?
On n'embauche pas un travailleur de remplacement à moins d'être en grève. On engage un entrepreneur pour faire le travail 12 mois par année. Voilà la différence.
On va faire appel à un travailleur de remplacement pour faire mon travail, pendant que je fais la grève sur la ligne de piquetage. Les activités se poursuivent donc. La différence entre un travailleur de remplacement et un entrepreneur, c'est que dans ce dernier cas, je ne récupérerai jamais mon emploi. Disons que la grève est terminée. J'espère que je pourrai retourner à mon travail et que le travailleur de remplacement sera parti. Cependant, si l'employeur a embauché un entrepreneur pour occuper mon emploi, je ne le retrouverai jamais.
Il n'y a rien de pire qu'un travailleur de remplacement — que ce soit très clair. Il n'y a rien de pire qu'un travailleur de remplacement qui va faire le travail de quelqu'un d'autre pendant que l'employé est en grève et essaie de gagner plus d'argent et d'améliorer le sort de sa famille. Il n'y a rien de pire que cela.
Cependant, un entrepreneur arrive tout près au deuxième rang.
Je pense que ce que nous avons appris est scandaleux. Le gouvernement libéral a dépensé 21 milliards de dollars pour des consultants, des entrepreneurs et des intermédiaires en TI grassement payés qui ne font aucun travail informatique. Ce que vous dites aujourd'hui me touche vraiment. Lorsque nous examinons les statistiques sur les familles de la classe ouvrière qui ont recours aux banques alimentaires, ce sont des gens qui, pour revenir à votre point, font exactement ce que vous dites. Ils font simplement la bonne chose. Ils se réveillent, vont travailler, essaient de subvenir à leurs besoins, puis on leur donne une gifle en leur disant: « Nous allons embaucher quelqu'un d'autre, faire appel à des consultants et embaucher des travailleurs en TI. »
Nous savons maintenant qu'une grande partie de cette affaire fait l'objet d'une enquête, ce qui est également choquant.
J'aimerais vous poser une question, et je tiens à ce qu'elle figure au compte rendu. Services publics et Approvisionnement Canada a révélé hier que trois autres entrepreneurs en TI ont escroqué les contribuables pour au moins 5 millions de dollars, et que l'affaire fait l'objet d'une enquête de la GRC. Ces fraudes remontent à 2018. Le ministre des Services publics a dit qu'il s'agissait de la première vague de cas transférés à la GRC.
Cela nous amène à nous demander quelle somme a été versée à des escrocs au moyen de la fraude et de la falsification. Pensez-vous que la situation a empiré? Croyez-vous que c'est un problème progressif? Où en sommes-nous à cet égard, selon vous?
Je pense que la situation a empiré du côté de la sous-traitance. J'ai été heureux de voir que le recours à la sous-traitance a été réduit dans le budget de l'année dernière, en 2023. Les décideurs vont le limiter, ce qui est bien.
Je pense que l'annonce faite hier par les ministres Anand et Duclos est un pas dans la bonne direction pour régler ces problèmes, car il y en a manifestement.
À mon avis, tous ces éléments réunis constituent un moyen de veiller à ce que la situation ne se reproduise pas.
Je ne suis pas trop d'accord avec vous. Je respecte votre point de vue, mais les ministres affirment faire une chose qui ne correspond pas vraiment à la réalité. Je pense qu'il y a un certain écart entre ce qu'ils ont dit qu'ils allaient faire et ce qui se passe réellement, en particulier avec « ArnaqueCAN », qui a beaucoup retenu l'attention. Il y a eu beaucoup de contrats externes.
Je pense que cela nous ramène à la grande question du moral et de la santé mentale en milieu de travail, que vous avez abordée plus tôt. Je ne sais pas si vous avez des chiffres sur les absences au travail. Est‑ce qu'un témoin a des chiffres sur l'incidence sur l'économie des personnes qui ne sont pas en mesure d'aller travailler en raison du stress?
Je pense plus particulièrement à mes amis du Syndicat des employé-e-s de la Sécurité et de la Justice, ou SESJ. Ce sont des agents correctionnels, qui se retrouvent dans des contextes extrêmement précaires et font face à des situations incroyablement difficiles. Il y a des agents qui se suicident. Je songe à toutes ces choses. Vous en avez parlé en mentionnant le moral et le milieu de travail toxique — ce qui revient à votre point, madame Payne. C'est ce qui arrive lorsqu'on doit constamment regarder par-dessus son épaule pour voir si on sera remplacé ou si quelqu'un viendra faire le travail.
Ma question est la suivante: avez-vous un chiffre...
Je remercie les témoins d'être venus et de nous avoir donné un aperçu de ce que je considère être des changements sans précédent aux relations de travail.
Le paragraphe 6(1) du projet de loi C‑58 exigerait que, dans les 15 jours suivant l'avis de négociation collective, l'employeur et le syndicat concluent une entente de maintien des activités décrivant les activités qui doivent être conservées pendant l'arrêt de travail. Quels seraient les avantages et les inconvénients d'une telle mesure?
Comme vous le savez probablement, la loi actuelle contient des dispositions sur les ententes de maintien des services. Nous en concluons constamment. Voici comment ces ententes fonctionnent. Nous rencontrons l'employeur, avec le soutien des agents de conciliation fédéraux et des ministères, pour nous assurer de nous entendre sur les services essentiels qui doivent être maintenus en cas de conflit de travail.
Cette procédure va se poursuivre. Il est important de le faire. Alors que certains affirment que les travailleurs ne se soucient de rien et qu'ils veulent simplement faire la grève, le fait est qu'ils veulent plutôt s'assurer que les lieux de travail sont sécuritaires pendant ces périodes.
Soit dit en passant, nous concluons ce que j'appellerais nos ententes sur le maintien des services dans toutes les administrations du pays, même lorsque la loi ne l'oblige pas. Nous le faisons souvent lorsque nous sommes en négociation dans le secteur forestier, où nous devons nous assurer que les éléments essentiels de l'entreprise se poursuivent pendant le conflit. C'est bien sûr dans notre intérêt, car après un arrêt complet, il faut souvent de nombreux mois pour que ces entreprises se remettent en marche. Personne n'a intérêt à ce que cela se produise.
Nous réglons ces questions à l'avance pour nous assurer que ces activités essentielles se poursuivent, même en cas de conflit de travail.
J'ai certainement une chose à dire. Encore une fois, nous concluons également des ententes de maintien des activités, qui sont essentiellement des ententes sur les services essentiels. Je sais qu'il y a des préoccupations au sujet de la chaîne d'approvisionnement et de la circulation des marchandises. Ce n'est pas une préoccupation, parce que nous avons ces ententes de maintien des services essentiels.
Je suis d'accord avec Mme Payne pour dire que nous y travaillons tout au long de l'année avec les employeurs. Nous ne nous contentons pas de dire: « D'accord, puisque nous allons faire la grève, nous devons conclure l'entente sur les services essentiels dès maintenant. » Nous le faisons tout le temps.
Lorsque nous avons eu notre grève publique fédérale au printemps dernier, nous avions des membres qui auraient dû être considérés comme essentiels sur les bases militaires. Sur une d'entre elles, c'était l'opérateur d’installation de chauffage qui n'était pas essentiel. L'installation de chauffage n'était pas fonctionnelle sur cette base militaire en particulier. Ils nous ont appelés pour nous demander ce qu'ils allaient faire. Nous n'avons pas dit: « Non, tant pis. » Nous avons répondu: « Bien sûr. C'est une question de santé et de sécurité. Nous allons y aller pour l'instant. Nous allons mettre l'usine en marche. La prochaine fois, assurez-vous que vous désignez cette personne comme étant essentielle. »
Nous travaillons tout le temps avec les employeurs, parce que nous comprenons aussi qu'il y a des préoccupations en matière de santé et de sécurité, et aussi pour la sécurité nationale. Dans ce genre de situation, nous collaborons toujours avec les employeurs.
J'aimerais parler un peu plus des craintes en matière de santé et sécurité que vous avez soulevées.
Il me semble que les travailleurs de remplacement, nouveaux dans leurs fonctions, présentent un risque plus élevé d'accidents industriels. Pourriez‑vous nous fournir des statistiques attestant d'un risque plus élevé chez les travailleurs de remplacement?
Je n'ai pas de chiffres à vous donner immédiatement, mais vous avez tout à fait raison. Lorsqu'on fait venir un travailleur de remplacement sur les lieux de travail, fait‑on preuve de diligence raisonnable pour s'assurer que cette personne possède les qualifications requises pour effectuer le travail exigé? Il peut s'agir d'utiliser de la machinerie lourde, donc le travailleur ne met pas que lui‑même en danger; il met les autres en danger aussi.
Je pourrais vous parler de la grève des employés de la régie du logement d'Iqaluit qui a eu lieu l'hiver passé. Je répète que nos membres ont été sur la ligne de piquetage pendant quatre mois. L'employeur faisait venir des travailleurs de remplacement du Sud et ne vérifiait pas leurs qualifications. Ces travailleurs faisaient de la plomberie et des travaux d'électricité dans des logements à Iqaluit. Ces travailleurs de remplacement étaient‑ils qualifiés pour réaliser ce travail? Nous ne le savons pas. Nous avons posé la question, mais on ne nous a jamais répondu.
Oui, chaque fois qu'on fait appel à un travailleur de remplacement, cela présente toujours un risque en matière de santé et sécurité.
Tout à fait. Le risque pour la santé et la sécurité est énorme. Nous connaissons des endroits où il y a eu des problèmes. À mon avis, il n'y a aucun doute que les travailleurs réguliers, nos membres, connaissent bien les lieux de travail et l'équipement et savent comment l'entretenir. Ils savent comment faire tout ce travail. On ne peut pas remplacer ce savoir du jour au lendemain avec des travailleurs de remplacement.
Je vais continuer avec la question des dangers liés à la santé et à la sécurité au travail.
Au Port de Québec, dans ma circonscription, il y a un conflit qui dure depuis 18 mois. Les débardeurs sont ceux qui transbordent équipement et produits d'un navire à la terre ferme ou d'un navire à un autre. Depuis 18 mois, ce sont des gens non formés et non qualifiés qui font ce travail. Parmi les produits transbordés, il y a le nickel qui, lorsqu'il est libéré dans l'air, entraîne des problèmes respiratoires. Il y a aussi du transbordement de nitrate d'ammonium à ce port.
Monsieur Bolduc, que craignent vos employés ou vos syndiqués du Port de Québec lorsqu'ils voient passer les briseurs de grève?
Ils craignent des accidents. Comme vous l'avez dit, un port est un endroit qui reçoit des produits qui peuvent être dangereux.
Dans votre circonscription, madame Vignola, la population est préoccupée par la présence de poussières que dégagent certains produits dont vous avez fait mention. La population se rend plus ou moins compte que ce conflit, qui dure depuis 18 mois, implique des travailleurs non qualifiés qui font le travail des débardeurs en lock-out. La question de santé et de sécurité entre effectivement en ligne de compte, puisque ces produits peuvent mettre en danger la population environnante.
Comme vous venez de le dire, le lockout met donc carrément en danger la santé, voire la vie de la population, mais aussi celles des débardeurs et des sous-traitants.
Merci beaucoup, monsieur le président. Deux minutes et demie, ce n'est pas long. Je vais donc essayer d'être bref.
Monsieur Aylward, vous nous avez parlé du conflit de travail qui touche présentement vos membres appartenant au Personnel des fonds non publics, en l'occurrence des employés qui travaillent sur les bases militaires de la Défense nationale. Je suis allé sur les lignes de piquetage à deux reprises pour appuyer ces travailleuses et faire preuve de solidarité. Je dis « travailleuses », parce que ce sont principalement des femmes, qui revendiquent des salaires et des conditions un peu plus équitables.
Or, nous avons entendu dire que, présentement, elles étaient remplacées dans leur travail par des membres des Forces armées canadiennes. Que pensez-vous du fait que le gouvernement présente une loi anti-briseurs de grève, mais que vos propres membres sont présentement remplacés alors qu'ils sont en conflit de travail? N'est-ce pas un peu contradictoire?
Fonds non publics est un organe du ministère de la Défense nationale. Techniquement, nous avons des membres qui travaillent pour ce ministère. Ils travaillent pour les services de bien-être et moral et de la famille des Forces canadiennes et viennent en aide aux militaires.
Or, des militaires font leur travail à leur place pendant la grève sur les bases militaires, mais bien sûr, les militaires, les membres des Forces armées canadiennes, ne peuvent pas désobéir à un ordre direct. Des militaires font donc le travail de nos membres, qui sont présentement en grève. Comme vous l'avez dit, monsieur Boulerice, cette unité de négociation est principalement composée de femmes, qui appuient les familles de militaires. Or, ce sont actuellement des militaires qui effectuent leurs tâches.
Je serais d'avis qu'il y a là une légère contradiction. Je serais plutôt d'accord, oui.
Madame Payne, vous avez récemment fait une manifestation avec les employés syndiqués de chez Bell Canada, à Ottawa. J'aimerais que vous nous disiez comment une loi anti-briseurs de grève pourrait favoriser les droits de vos membres, notamment dans le secteur ferroviaire et celui des télécommunications, qui est parfois très touché par le recours à des travailleurs de remplacement?
Je sais que je dois vous répondre rapidement; c'est donc ce que je vais faire. Évidemment, lorsque nous étions en négociation avec Bell Canada, l'an dernier... En passant, nous sommes constamment en négociation avec cette entreprise. Dans le secteur des médias et des télécommunications, nous représentons 20 000 travailleurs, et la plupart sont à l'emploi de Bell.
Bell Canada a même envoyé une note de service à tous ses employés. Alors que nous nous apprêtions à conclure une convention collective équitable et que le temps venait à manquer pour les conciliateurs, l'entreprise invitait tous ses employés à franchir leurs propres lignes de piquetage et indiquait que ce comportement serait le bienvenu.
C'est le genre de choses auxquelles nous sommes confrontés tous les jours avec les grandes sociétés. Tout ce que nous demandons, c'est de l'équité dans les négociations, et ce projet de loi va nous aider en ce sens.
C'est ce qui met fin à la première heure de témoignages sur le projet de loi C‑58.
Merci aux témoins de leur présence.
Nous allons suspendre la séance pendant deux minutes, le temps de faire les changements qui s'imposent. Le ministre est le prochain témoin à comparaître.
Merci, chers membres du Comité. Nous reprenons nos travaux pour la deuxième heure ce matin et nous accueillons le ministre O'Regan pour parler du projet de loi C‑58.
Monsieur le ministre, vous êtes accompagnés de Sandra Hassan, sous‑ministre, et de Zia Proulx.
[Français]
Monsieur O'Regan, vous avez la parole pour cinq minutes.
Le mouvement syndical nous dit depuis des années que les travailleurs de remplacement sont mauvais, qu'ils sont une distraction et qu'ils prolongent les conflits de travail. Nous l'avons écouté et, maintenant, nous allons interdire les travailleurs de remplacement.
[Traduction]
J'ai passé beaucoup de temps autour de tables de négociations depuis quelques années. C'est un travail difficile et parfois, tendu. Ce peut même n'être pas beau à voir, mais cela fonctionne. Le Service fédéral de médiation et de conciliation a réglé 96 % des conflits de travail depuis un an. Dans 4 % des cas, on va souvent me voir répéter le même message dans les médias: faites le travail et concentrez‑vous sur les négociations, qui permettent d'en arriver aux meilleures ententes possible, des ententes équitables et durables qui profitent à la fois aux employeurs et aux employés.
Sara Nelson, présidente internationale de l'Association of Flight Attendants, résume la situation avec brio:
La négociation collective vise à résoudre les problèmes. Les entreprises qui doivent y participer s'en tirent généralement mieux, parce qu'elles ont dû aplanir les différends avec les travailleurs à la table de négociation. Dans une négociation collective, deux groupes qui veulent des choses très différentes doivent se réunir et résoudre les problèmes. Si nous avions cet état d'esprit plus souvent... imaginez comment nos politiques seraient différentes.
Les travailleurs de remplacement détournent l'attention de tout ce processus. Ils prolongent les conflits et empoisonnent les relations de travail des années après leur résolution. Le projet de loi C‑58 nous permettra d'interdire l'utilisation de travailleurs de remplacement dans les milieux de travail à réglementation fédérale durant une grève ou un lock‑out. Cela signifie qu'aucun nouveau sous‑traitant ni aucun membre de l'unité de négociation ne pourra franchir la ligne de piquetage. La sanction en cas de violation de l'interdiction pourra s'élever à 100 000 $ par jour.
Bien sûr, les employeurs pourront avoir recours à des travailleurs de remplacement si la santé et sécurité des gens ou la protection d'une propriété ou de l'environnement est à risque. Le projet de loi C‑58 vise à assurer la stabilité à long terme et des relations de travail robustes qui reposent sur la négociation collective libre et équitable. À l'heure actuelle, il y a un côté de la table de négociation qui assume beaucoup de risque. S'il va trop loin dans une négociation, ce côté‑là est perdant. Le travail qu'effectuent les employés, leur pouvoir de négociation, peut être remplacé, mais avec le projet de loi C‑58, le syndicat et l'employeur assumeront tous deux le risque. Les deux seront motivés à poursuivre les négociations; voilà ce que nous voulons.
Prenons par exemple le Port de Québec. Les travailleurs sont en lock‑out depuis 18 mois; j'ai bien dit 18 mois. Des travailleurs de remplacement sont appelés à faire leur travail depuis 18 mois. En quoi cela pourrait‑il être une solution à long terme? Quel genre de relations toxiques l'employeur et le syndicat auront‑ils à réparer dans les années à venir? La négociation collective, c'est difficile, mais actuellement, il y a toujours une partie qui a une voie de sortie. Comme on le dit, la meilleure façon de régler les différends, c'est à la table de négociation. Je ne crois pas aux raccourcis.
On m'a demandé ce qui distingue ce projet de loi des projets de loi d'initiative parlementaire précédents. Permettez‑moi de vous dire que c'est un projet de loi libéral dans le vrai sens du terme. Nous l'avons élaboré de façon tripartite pour nous assurer de trouver le bon équilibre.
Nous avons ce que nous appelons le « processus de maintien des activités ». C'est une entente par laquelle les employeurs et les syndicats s'entendent sur le travail qui va se poursuivre durant une grève ou un lock‑out. C'est une trêve qui se maintient même au cœur du conflit. Ce processus n'est pas exigé présentement, et on peut contourner le système.
Les employeurs et les travailleurs ont demandé des améliorations à ce processus durant nos consultations l'an dernier. Lorsque le projet de loi C‑58 sera adopté, la loi va exiger que l'employeur et le syndicat se consultent et déterminent le travail qui doit se poursuivre durant la grève ou le lock‑out, le cas échéant. Nous établissons un échéancier clair: les parties ont 15 jours pour en venir à une entente. Si elles n'y parviennent pas, l'affaire sera renvoyée au Conseil canadien des relations industrielles qui devra résoudre le différend dans les 90 jours. C'était une demande autant des syndicats que des employeurs. Cette méthode fera augmenter la certitude et la prévisibilité dans les négociations collectives.
Nous croyons en un processus de négociation collective libre et équitable. Nous croyons que la stabilité et la certitude dans nos chaînes d'approvisionnement et nos services sont essentielles. Nous croyons que ces préoccupations ne sont pas mutuellement exclusives. Elles se renforcent plutôt les unes les autres. C'est important. Le Canada est un partenaire commercial fiable dans le monde, mais notre crédibilité dépend du bon fonctionnement de nos chaînes d'approvisionnement, de manière durable. Elle dépend de relations de travail solides et productives. Les parties devront ainsi rester à la table de négociation jusqu'à ce qu'elles concluent une entente.
(0930)
Merci. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Merci, monsieur le président. Merci au ministre de sa présence ici aujourd'hui.
Des témoins nous ont parlé plus tôt aujourd'hui de leurs craintes que des travailleurs soient remplacés par des consultants externes et des sous‑traitants.
Voici la première question que je vous adresse, monsieur le ministre. Selon les comptes publics d'Emploi et Développement social Canada de 2022‑2023, 601 511 775 $ ont été dépensés en consultants externes et sous‑traitants.
De ce montant, combien d'argent a été dépensé en consultants externes et sous‑traitants à votre ministère du Travail et des Aînés?
Merci. Si vous pouviez transmettre cette information au Comité, nous vous en serions très reconnaissants.
Des travailleurs du secteur public nous ont dit qu'ils se sentaient sous‑estimés, à cause du nombre de sous‑traitants et de consultants externes que votre gouvernement utilise. Vous dépensez des milliards de dollars à cette fin. Est‑ce ce que vous disent les employés de votre ministère, monsieur le ministre? Les travailleurs de votre ministère se disent‑ils inquiets d'être remplacés par des sous‑traitants et des consultants externes?
Je vais répondre à cette question aussi. Des entrepreneurs prêtent main‑forte à EDSC, surtout pour des contrats à court terme ou des contrats spécialisés. Nous avons un certain nombre de contrats. Nous en faisons un suivi étroit, et nous vous donnerons les chiffres.
Je m'adresse à vous, monsieur le ministre. Nous avons aussi entendu parler aujourd'hui d'un facteur de démotivation. Nous savons qu'il y a de plus en plus de gens qui présentent des problèmes de santé mentale au pays. Nous avons entendu que le fait que le gouvernement fasse abondamment appel à des consultants externes et à des sous‑traitants crée du stress et des craintes supplémentaires pour les travailleurs. Que pouvez‑vous dire à ce propos? Voyez‑vous ce genre de problème ou en entendez‑vous parler? Ou êtes‑vous si déconnecté des travailleurs que vous représentez?
Non, je ne suis pas si déconnecté des travailleurs que je représente, mais je ne peux pas dire qu'ils ont porté ce problème à mon attention. Je ne sais pas si la sous‑ministre aimerait ajouter quelque chose.
Nous avons entendu des témoignages devant d'autres comités. Par exemple, le président du Syndicat des Douanes et de l'Immigration, qui a récemment comparu devant le Comité permanent des comptes publics, a déclaré: « Nous pensons que l'objectif de l'application [ArriveCAN] est de remplacer nos agents. » C'est ce qu'il a dit dans son témoignage.
Il a également dit: « Une fois que l'application ArriveCAN a été mise en place, les membres ont fait part de leurs préoccupations au syndicat, que nous avons essayé de transmettre à l'employeur. En réalité, il ne semblait pas y avoir de volonté de prendre en compte nos commentaires. Si nos membres avaient été consultés dès le début, je pense qu'une grande partie de ce qui s'est passé n'aurait pas eu lieu. »
C'est ce que nous ont dit les témoins qui ont comparu devant le Comité.
Nous savons que le gouvernement a recours à un nombre record de consultants et de sous-traitants grassement payés, dont beaucoup facturent des honoraires considérablement plus élevés que ceux auxquels les fonctionnaires travailleraient. Nous savons également que bon nombre de ces consultants n'ont rien fait, en réalité. Par exemple, dans le projet ArriveCAN en particulier, nous savons que 72 % du travail qui a été payé n'a pas été fait.
Compte tenu de cela, monsieur le ministre, et compte tenu du nombre de sous-traitants auxquels le gouvernement a recours, ne vous préoccupez-vous pas d'entendre cela de la part des fonctionnaires eux-mêmes, des travailleurs au sein du gouvernement?
Si les travailleurs ont une préoccupation à propos de quoi que ce soit, c'est une préoccupation pour moi aussi. C'est la première fois que j'entends le témoignage que vous citez. Comme pour toute chose, je vais certainement en tenir compte.
Vous semblez un peu déconnecté de ce qui se passe, mais je vais passer à une autre série de questions.
Vous parlez beaucoup des travailleurs, particulièrement dans votre province. C'est pourquoi j'ai trouvé remarquable que votre bon ami Andrew Furey, le premier ministre libéral de Terre-Neuve‑et‑Labrador, ait écrit au gouvernement fédéral pour dire que les travailleurs n'ont pas les moyens de payer la taxe libérale sur le carbone. En fait, le premier mot de sa lettre est « travailleurs ».
Nous savons que la taxe sur le carbone est une taxe très lourde pour les travailleurs. Comment votre gouvernement peut‑il continuer à augmenter la taxe sur le carbone?
Merci beaucoup, monsieur le ministre, madame la sous-ministre et madame Proulx, d'être ici.
Madame la ministre, dans le groupe de témoins précédent, Lana Payne a parlé d'une grand-mère de 71 ans qui a été remplacée. Elle a été remplacée depuis environ un mois. Elle a des enfants et des petits-enfants. Évidemment, c'est très préoccupant.
Monsieur le ministre, pouvez-vous décrire comment le projet de loi C‑58 contribuera à créer une certaine équité et un certain équilibre, pour aider des gens comme cette grand-mère de 71 ans qui est actuellement remplacée par des travailleurs de remplacement?
Je sais qu'au début du processus, on a laissé entendre que j'étais déconnecté des travailleurs. Je ne crois pas que ce soit le cas. Depuis deux ans et demi que je suis au ministère du Travail, une chose qui est devenue très claire pour moi, c'est à quel point il est désespérant pour un travailleur de rester les bras croisés, dans la misère, au péril de la stabilité financière et du bien-être de sa famille, et de voir quelqu'un d'autre faire son travail à sa place. Cela laisse des cicatrices indélébiles.
Pensez simplement à la fierté et à la dignité que chacun d'entre nous tire de son travail, aussi difficile que cela puisse être certains jours. Les gens sont habituellement fiers de leur travail, quel qu'il soit. La plupart le sont. Quand on leur dit que leurs efforts ne valent rien et qu'ils sont parfaitement remplaçables du jour au lendemain... Cela se déroule sous leurs yeux, à un moment où ils souffrent, financièrement, mentalement et peut-être physiquement, pendant l'expérience ardue de la grève. Aucun travailleur ne veut faire la grève. Il est carrément faux de prétendre le contraire: personne ne veut faire la grève.
Lorsque cela se produit, il y a ensuite inévitablement une sorte de réconciliation, et l'employé retourne au travail, mais pensez-vous vraiment qu'il oubliera tout cela? Pensez-vous qu'il oubliera le manque de dignité subi quand l'employeur lui a dit qu'il était parfaitement remplaçable? Cela empoisonnera le milieu de travail pendant des générations.
Nous n'avons plus besoin de cela. Nous sommes plus sages maintenant. Il fut un temps où, pour une raison ou une autre, nous pensions que c'était acceptable. Nous savons tous maintenant qu'on peut faire mieux. Ce n'est pas ainsi qu'on traite les gens. De toute évidence, si l'on veut des règles du jeu équitables, une table de négociation équitable, il ne peut pas y avoir une partie qui peut agir de telle façon, mais pas l'autre. C'est impossible.
Il faut rester concentré sur ce qui se passe à la table. Rester concentré sur ce qui se passe à la table. C'est là que les ententes se concluent. C'est là qu'on fait preuve de respect mutuel. C'est là qu'il peut se bâtir un semblant de confiance en l'avenir, que nous pourrons continuer de nous entendre pour que notre économie demeure stable, prévisible et en croissance.
Dans votre témoignage, vous avez parlé de l'approche tripartite que vous avez adoptée. Vous avez également expliqué en quoi ce projet de loi diffère des précédents projets de loi d'initiative parlementaire.
Pourriez-vous nous en dire davantage sur l'importance de votre approche tripartite à l'égard de ce projet de loi et ce qui nous a menés là aujourd'hui?
Nous avons mené de vastes consultations. J'ai assisté à toutes les réunions, ou du moins aux deux principales que nous avons tenues. Nous nous sommes même donné la peine de bien répartir les sièges. Je ne voulais pas d'une grande table avec les syndicats d'un côté, les employeurs d'un autre et le gouvernement d'un autre. Nous avons essayé de faire preuve de plus de créativité et nous les avons mélangés pour que les gens se rendent compte que nous étions tous ensemble là‑dedans.
Comme vous le savez, lorsqu'un dirigeant syndical blâmait les employeurs pour leurs comportements passés, ces employeurs étaient assis juste à côté de lui. Il était vraiment important que nous arrivions à nous entendre tous ensemble. Le projet de loi lui-même et ce dont nous parlons ici avec le projet de loi C‑58 en sont le résultat direct.
Encore une fois, en quoi ce projet de loi diffère‑t‑il des projets de loi d'initiative parlementaire précédents qui visaient à interdire le recours à des travailleurs de remplacement? En quoi le processus suivi pour le projet de loi C‑58 est‑il différent?
Pouvez-vous également nous expliquer pourquoi nous avons besoin de temps pour bien faire les choses et combien de temps nous avons proposé pour nous assurer que lorsqu'il entrera en vigueur, tout soit fait correctement? Pourriez-vous nous en parler également?
Nous mettons beaucoup de pression sur des gens qui connaissent ce travail mieux que quiconque, selon mon expérience. J'ai pu constater par moi-même l'habileté de nos médiateurs et conciliateurs et la compétence sans pareille du Conseil canadien des relations industrielles. Nous allons leur en demander beaucoup.
Le Comité et la Chambre sont saisis d'un projet de loi de premier ordre. Lorsque nous disons qu'il s'agit d'un projet de loi d'importance historique pour les négociations collectives au pays, nous n'exagérons pas. L'Irlandais en moi n'exagère pas dans ce cas‑ci. Ce que cela signifie, c'est que les gens à qui nous faisons confiance pour assurer la stabilité et la certitude, les gens qui rassemblent les gens autour de la table, nous ont demandé du temps. Je les écoute très, très attentivement. Ce sont eux qui feront le travail.
Précédemment, nous avons entendu les syndicats et nous avons eu à discuter de façon confidentielle de ma question sur leurs craintes concernant ce délai de 18 mois. Ils m'ont alors dit que c'était trop long, que la période devrait être de 9 mois, et qu'une période de 9 mois serait suffisante pour naviguer à travers tout ça. Leur grande crainte est que ce ne soit appliqué qu'après la prochaine élection, avec un résultat incertain, puisque ce n'est pas eux qui décident. Ils craignent qu'en fin de compte, le projet de loi ou son application soit reporté aux calendes grecques.
Nous avons opté pour un délai de 18 mois en suivant les indications fournies par le Conseil canadien des relations industrielles. Les gens qui feront le nécessaire pour en arriver à une entente estiment en effet qu'ils auront besoin de 18 mois, et ce, pour différentes raisons.
Premièrement, la quantité de travail va augmenter, ce qui va nous obliger à embaucher plus de gens.
Deuxièmement, ceux qui sont actuellement en poste, et qui, soit dit en passant, font un travail formidable, doivent en arriver à bien saisir les répercussions de ce projet de loi qui change la donne, évidemment pour le mieux, car, sinon, nous n'irions pas de l'avant avec cette mesure.
Les discussions seront désormais mieux ciblées. La dynamique du pouvoir entre les parties va évoluer. Cela changera la façon dont elles négocient. Il s'agira d'une transformation en profondeur touchant des aspects fondamentaux et des subtilités qui, je dois bien l'avouer, sont parfois difficiles à bien comprendre pour moi. C'est d'ailleurs pour cette raison que nous pouvons compter sur un Service fédéral de médiation et de conciliation dont le taux de réussite atteint 96 % et qui jouit d'une grande crédibilité auprès des syndicats et des employeurs. Quand ces gens‑là me disent qu'ils ont besoin de 18 mois, je les écoute. C'est pourquoi nous proposons ici un délai de 18 mois.
J'ai l'impression que c'est davantage le patronat qui recommande ce délai de 18 mois. S'asseoir autour d'une table ne devrait pas être si compliqué.
Il a aussi été souligné que le paragraphe 94(5) du projet de loi propose d'ajouter au Code canadien du travail est littéralement une recette pour indiquer aux employeurs comment faire pour embaucher des briseurs de grève, comme je l'ai souligné à la Chambre lors des débats à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi. Ce paragraphe indique aux employeurs qu'il faut embaucher des sous-traitants ou des employés de sous-traitants avant de déposer les documents de négociation. Il a donc été suggéré de retirer cet article, qui contreviendrait à l'esprit même de la loi.
Que devons-nous faire avec un article de loi qui est contre l'esprit de la loi?
Je suis désolée, monsieur le ministre, mais ce ne sont pas des théories conspirationnistes. Je ne suis pas conspirationniste. Ce sont les syndicats, des avocats et des professeurs en droit qui ont soulevé cet aspect. Je vous demanderais un tant soit peu de respect sur ce point, s'il vous plaît.
Je trouve inadmissible que l'on insinue que je prête une oreille attentive à qui que ce soit d'autre que nos employés très compétents du Service fédéral de médiation et de conciliation et du CCRI. C'est l'opinion de ces gens‑là qui importe à mes yeux.
Si l'ETCOF réclame un délai de 18 mois, c'est tout à fait son droit. Je peux toutefois vous dire que les gens dont je me préoccupe et ceux pour qui j'ai le plus de respect dans la fonction publique sont ceux qui concluent ces ententes. Ils disent qu'ils ont besoin de 18 mois. Il devient donc essentiel pour moi de prévoir un délai de 18 mois.
Je voudrais aussi remettre les pendules à l'heure. Lorsqu'on ajoute une interdiction de recourir à des travailleurs de remplacement à un processus de négociation déjà extrêmement complexe, il va de soi qu'il faut prévoir encore plus de temps pour ce travail difficile. J'en ai moi-même été témoin à de nombreuses reprises. Ils nous ont dit avoir besoin de 18 mois, et c'est par conséquent le délai que je propose.
Monsieur le ministre, je vous remercie, mais je pense que nous ne nous sommes pas entendus.
Il est plus facile à mes yeux de s'asseoir autour d'une table et de discuter, quitte à ne pas s'entendre, que de laisser des travailleurs comme ceux du Port de Québec dans le néant pendant 18 mois — et ce n'est pas fini — à regarder passer des briseurs de grève. Comme vous l'avez vous-même souligné, ça mine les négociations à très long terme. C'est de ça que je parlais. Il est beaucoup plus facile de s'asseoir autour d'une table que de laisser aller les choses.
Maintenant, s'il vous plaît, le paragraphe 94(5) proposé à l'article 9 du projet de loi respecte-t-il l'esprit de la loi? On pense que ce n'est pas vraiment le cas.
Le nouveau paragraphe 94(5) sert à préciser ce qu'un entrepreneur qui a été engagé avant l'avis de négociation pourrait faire. Il précise que cette personne peut seulement continuer à faire le travail qu'elle faisait avant le début des négociations, et pour la même durée. Si cette personne avait été engagée pour travailler une demi-journée par semaine sur un projet donné, elle ne pourrait, après le début des négociations, continuer à travailler que pour une demi-journée par semaine sur le projet sur lequel elle travaillait avant.
C'est une précision complémentaire au paragraphe 4.
Je tiens simplement à dire, en guise d'introduction, que je suis un peu abasourdi par les propos de mes collègues conservateurs aujourd'hui dans ce comité. Ils semblent soudainement se préoccuper grandement du sort de la fonction publique fédérale et des travailleurs et travailleuses des services publics. Or, ce n'est pas le souvenir que j'ai du régime de M. Stephen Harper, quand les conservateurs étaient au pouvoir.
Cela dit, monsieur le ministre, merci beaucoup d'être devant nous aujourd'hui.
Vous avez dit en introduction qu'il s'agissait d'un projet de loi purement libéral. J'aimerais simplement ajouter qu'il y a un peu de néo-démocrate là-dedans quand même, puisque c'était une condition de l'entente que nous avons négociée avec votre gouvernement minoritaire.
Je dois aussi saluer le fait que les discussions ont été franches et honnêtes entre nous pour l'élaboration du projet de loi C‑58. Ce dernier est évidemment perfectible, et il y a des choses qu'on va vouloir améliorer et corriger en cours de route. Cependant, vous avez de l'expérience, monsieur le ministre, puisque vous avez vu depuis quelques années des conflits de travail dans des secteurs sous réglementation fédérale.
En introduction, j'aimerais que vous expliquiez brièvement l'impact d'une loi anti-briseurs de grève sur les tables des négociations en ce qui a trait au respect des droits des travailleurs et travailleuses des secteurs sous réglementation fédérale.
Tout d'abord, je tiens à présenter mes excuses à l'honorable député. Je serai ravi de lui montrer mes notes d'allocution lors d'une prochaine rencontre. J'ai bel et bien utilisé le qualificatif « libéral » avec un « l » minuscule. Je faisais allusion à l'esprit de tripartisme. Il a tout à fait raison de dire que c'est extrêmement important pour le NPD. C'est l'un des aspects cruciaux de notre entente avec les néo-démocrates. Je suis reconnaissant des bons conseils de M. Boulerice, qui a été extrêmement actif dans ce dossier, mais aussi de Daniel Blaikie, de Matthew Green et d'autres membres du caucus du NPD. Vous ne seriez pas saisis de ce projet de loi aujourd'hui, et il ne se présenterait certainement pas sous cette forme, n'eût été leur apport. Je me réjouis de constater que nous pouvons collaborer de la sorte.
Je suppose que je pourrais illustrer le tout au moyen d'un exemple que je n'ai peut-être pas encore donné au Comité. C'était vraiment très frappant. Heureusement, cela n'a pas fait beaucoup les manchettes. Il s'agit de la grève des pilotes de WestJet qui a failli être déclenchée l'an dernier, avant la longue fin de semaine de mai. Lors de leurs négociations précédentes, une loi les avait obligés à retourner au travail. En fait, leur seule expérience à la table de négociation s'est conclue par cette loi de retour au travail. J'étais là lorsqu'ils sont parvenus à une entente.
Je peux vous assurer que la situation m'inquiétait à l'aube de la longue fin de semaine de mai. Chacune des parties était bien campée sur ses positions. Nous ne pensions pas qu'une entente était possible. Nos médiateurs et nos conciliateurs ont travaillé avec eux jour et nuit, jusqu'à la dernière minute. C'est ainsi que les choses se passent, comme nous le savons tous. Lorsque j'y suis allé, une fois qu'une entente a été conclue, on sabrait le champagne. J'ai vu beaucoup de relations que je qualifierais certes d'acrimonieuses dans un tel contexte, mais, dans ce cas particulier, tous semblaient heureux d'être en compagnie les uns des autres. Ils m'ont indiqué n'avoir jamais vécu cela auparavant.
Je pense qu'il faut voir les choses du point de vue de ceux qui négocient à la table. Je crois que nous nous sommes tous retrouvés dans cette situation à un moment ou à un autre de notre vie. Lorsque vous ressentez la pression que vos membres ou vos commettants exercent sur vous pour qu'un accord soit conclu, vous n'ignorez pas que vous devrez retourner vers ces gens‑là pour leur faire accepter l'entente à laquelle vous serez parvenus. Mais vous êtes tous dans le même bateau. Vous y êtes arrivés ensemble.
J'ai parlé du climat de travail qui peut s'en trouver empoisonné pendant des générations. C'est toutefois aussi une démarche qui peut se révéler extrêmement positive et solidaire. C'est un signe que les deux parties commencent à se faire confiance. Lorsqu'on peut s'appuyer sur un tel sentiment de confiance ou, tout au moins, de professionnalisme — et je suis conscient que le but de l'exercice demeure d'en arriver à une entente —, c'est bon pour notre industrie, c'est bon pour nos travailleurs et c'est bon pour le pays. Faisons‑le tous ensemble.
La négociation collective ne pourra jamais être remplacée. On ne peut pas tendre vers le degré de stabilité ou de certitude recherché et, je dirais même, vers la prospérité souhaitée, si ce processus ne fonctionne pas.
Selon notre perspective, en tant que néo-démocrates, la classe moyenne est aussi une création du mouvement syndical. Cela a permis, par l'entremise des contrats de travail et des négociations libres, d'améliorer les conditions de travail, les salaires ainsi que la santé et la sécurité des travailleurs et des travailleuses dans ce pays. Nous en sommes extrêmement fiers.
Pour revenir au projet de loi sur lequel nous nous penchons, j'aimerais mentionner que des gens sont préoccupés par le respect de certains délais. En effet, s'il n'y a pas d'entente entre les deux parties, le Conseil canadien des relations industrielles, le CCRI, doit trancher dans les 90 jours. Pouvez-vous nous assurer que le CCRI aura les ressources financières et humaines nécessaires pour rendre ces décisions dans les délais indiqués dans le projet de loi?
En effet. Je pense que le député a tout à fait raison. Le CCRI accomplit un travail exemplaire, ce qui lui vaut une réputation enviable. Parfois, la seule mention de son nom ou la simple insinuation qu'il pourrait intervenir d'une façon ou d'une autre peut immédiatement déplacer des montagnes à la table de négociation.
Il nous appartient de veiller à ce que le CCRI, si nous lui confions un volume de travail accru, comme ce serait le cas avec ce projet de loi, dispose de toutes les ressources nécessaires, avec l'incidence qui s'ensuit pour les délais, d'abord et avant tout pour maintenir l'expertise qui a fait sa renommée.
Encore une fois, cela nous ramène au temps requis. Nous avons besoin de ressources, mais aussi de temps. Nous devons nous assurer que les gens qui sont déjà en poste ainsi que les nouvelles personnes que nous devrons inévitablement embaucher ont une compréhension claire et complète de toutes les répercussions de cette nouvelle loi.
D'accord, vous n'avez donc pas de réponse à cette question.
Nous avons entendu tout à l'heure le témoignage de Chris Aylward, président national de l'Alliance de la fonction publique du Canada. Je lui ai demandé directement quelle était la différence entre le recours à un entrepreneur ou à un expert-conseil et l'embauche d'un travailleur de remplacement. Il a répondu assez catégoriquement que c'était épouvantable dans les deux cas, l'embauche de travailleurs de remplacement étant le pire des scénarios, suivie de très près par le recours à des entrepreneurs.
Je pense qu'il y a eu un effet démoralisant assez marqué pour les travailleurs. Il suffit de considérer ce qui s'est passé avec GC Strategies et ArnaqueCan pour une application qui devait coûter 80 000 $ aux contribuables. Je soulève cette question parce que nous essayons de voir comment nous pouvons aider les travailleurs, alors même que les libéraux qui forment le gouvernement disent une chose et semblent faire le contraire.
Si des consultants externes qui... La vérificatrice générale a constaté que l'application ne fonctionnait pas et que personne n'en voulait. Cette application a coûté 60 millions de dollars, mais les dossiers gouvernementaux étaient déficients à un point tel que la vérificatrice générale a dit qu'il était impossible de déterminer le coût réel de l'application. L'ombud de l'approvisionnement a constaté que 76 % des sous-traitants embauchés pour ArriveCAN n'ont en réalité pas travaillé à la mise au point de cette application, et les deux...
Je pense que c'est extrêmement pertinent, car nous avons entendu le témoignage, avant celui du ministre, du président national de l'AFPC, qui a dit que cette question est étroitement liée au phénomène des travailleurs de remplacement. Quand on sait que le gouvernement gaspille 21 milliards de dollars pour le recours à des consultants externes et qu'il en coûte 1 400 $ à chaque famille canadienne, c'est tout ce qu'il y a de plus significatif.
Je vous en suis reconnaissante, car je pense que nous sommes ici pour protéger les familles de la classe ouvrière. Je dirais que le ministre, qui vient de Terre-Neuve, a bel et bien un attachement profond envers les gens. C'est ce que je crois. Je suis allée la semaine dernière au Nouveau-Brunswick où j'ai visité la Valley Food Bank. Au cours de la dernière année, le nombre de bénéficiaires de cette banque alimentaire a triplé. Savez-vous qui est venu grossir ainsi les rangs de leur clientèle? Il s'agit de membres de la classe ouvrière, ces mêmes gens dont vous dites vouloir améliorer le sort en proposant le projet de loi C‑58.
Voici donc la question que je vous poserais en votre qualité de ministre du Travail. Quelles sont, selon vous, les deux raisons pour lesquelles les gens vont travailler?
Je pense qu'ils vont travailler pour un chèque de paie, afin de pouvoir subvenir aux besoins de leur famille, et je pense qu'ils vont travailler pour la poursuite d'un idéal. Suivant les témoignages que nous avons pu entendre, nous savons qu'ils n'ont pas l'impression que cet idéal est atteignable; ils se sentent démoralisés à cause du recours à ces entrepreneurs externes.
En prenant connaissance des messages que nous recevons, nous constatons que les Canadiens voient 46 % de leur chèque de paie s'évaporer en impôt fédéral. Je veux simplement vous le rappeler, monsieur le ministre, car je suis persuadée que vous êtes déjà au courant. Des gens m'écrivent pour me dire qu'ils ne sont nullement incités à aller travailler ou à faire des heures supplémentaires.
Prenons l'exemple d'une personne qui gagne 100 000 $, ce qui a déjà été considéré comme une somme importante. Les gens n'ont jamais fait autant d'argent, mais n'ont jamais non plus été moins bien nantis, comme en témoigne notre taux de croissance économique par habitant, le pire du G7. On n'a rien vu de tel depuis la Grande Crise. Disons que cette personne gagne 30 000 $ de plus en faisant des heures supplémentaires. Je vais mettre les choses en contexte pour les gens. Si un travailleur augmente ses revenus d'un montant semblable, il va payer 22 000 $ de plus en impôt fédéral.
Vous entravez la quête de leur idéal parce que vous les démoralisez en embauchant des consultants externes, et vous leur enlevez la motivation à aller travailler pour améliorer leur situation financière.
Mon autre question porte sur la manchette voulant que la décision de faire appel à 900 travailleurs étrangers à l'usine de batteries de véhicules électriques de Windsor représente une insulte pour les travailleurs canadiens. Comment pouvez-vous affirmer vous soucier du sort des travailleurs tout en prenant de telles mesures?
J'ai bien beau être en mode virtuel, je suis tout simplement stupéfait et consterné d'entendre les députés conservateurs exprimer aujourd'hui ce nouvel intérêt qu'ils viennent de se découvrir pour les syndicats canadiens et la classe ouvrière. C'est carrément incroyable. C'est un virage à 180 degrés. Ce sont pourtant eux qui ont présenté les projets de loi C‑377 et C‑525, sans doute les deux projets de loi les plus antisyndicalistes de notre histoire, avant que nous leur mettions des bâtons dans les roues.
Monsieur le ministre, je tiens à vous féliciter pour le projet de loi C‑58. Voilà une mesure véritablement progressiste pour notre pays. C'est une loi historique qui va aider les travailleurs canadiens à s'assurer une rémunération vraiment appréciable.
Comme nous avons pu le constater aussi bien à la Chambre qu'ici même en Comité — encore une fois, à notre grande déception —, les députés conservateurs ne veulent pas parler du projet de loi C‑58.
Nous savons où veut en venir le chef de l'opposition, et nous avons été témoins de son appui à des projets de loi antisyndicaux. Nous savons aussi qu'il serait favorable à une loi sur le droit au travail suivant le modèle des États‑Unis.
Monsieur le ministre, j'aimerais que vous me disiez pourquoi, selon vous, les députés conservateurs ne veulent pas parler aujourd'hui du projet de loi C‑58.
Permettez-moi d'abord et avant tout... Encore une fois, il s'agit peut-être de l'une des lois les plus importantes de l'histoire du Canada en ce qui concerne les négociations collectives pour les syndicats du secteur privé. L'interdiction des travailleurs de remplacement est une mesure que les dirigeants syndicaux réclament depuis bien avant que le Canada ne devienne un pays.
Même si bon nombre des points qui ont été soulevés relativement à d'autres enjeux — aussi bien des questions d'actualité que des considérations plus vastes liées à l'abordabilité — revêtent une grande importance pour les travailleurs, je peux vous dire qu'ils seraient nombreux à s'indigner du fait que certains utilisent cette plateforme pour faire de la politique partisane, plutôt que de traiter du sujet à l'étude. C'est du temps que nous devons consacrer aux travailleurs. Accordez-leur donc le temps, le respect et la dignité qui leur sont dus en prenant ce projet de loi au sérieux et en en débattant comme il se doit.
C'est ce que je dirais d'abord et avant tout. C'est à ce point important pour eux qu'ils sont venus ici même vous le dire. Les dirigeants des syndicats du pays qui comparaissent devant vous pour témoigner de toute l'importance de ce projet de loi le font parce que leurs membres leur ont dit la même chose. Plus de 150 ans se sont écoulés, et le moment est venu de passer à l'action. Je vous implore de les traiter avec toute la dignité qu'ils méritent en procédant à une étude approfondie de ce projet de loi.
Je sais qu'il n'est pas rare que l'on se serve de la tribune qu'offrent ces comités pour aborder d'autres thématiques, mais je dois vous rappeler toute l'importance de ces questions pour les syndicats et les syndiqués de ce pays. Que cela vous plaise ou non, je vous prierais de bien vouloir vous concentrer là‑dessus. C'est à ce point important.
Merci beaucoup, monsieur le ministre, d'être des nôtres aujourd'hui.
Ce projet de loi est important. Je crois qu'il l'est non seulement pour les travailleurs, mais aussi pour faire en sorte que nous ayons une société qui fonctionne bien et qui permet vraiment aux gens d'accéder à un degré de dignité et de participation suffisant pour bien réussir au Canada.
Je peux vous assurer que ce projet de loi est primordial pour moi personnellement. Ma mère a travaillé dans le secteur des services alimentaires, et on a eu recours à des travailleurs de remplacement quand j'avais environ 15 ans. Nous étions trois garçons à la maison, et ma mère était célibataire. Ils ont fait appel à des travailleurs de remplacement dans un milieu de travail qui était très difficile à l'époque. Ces emplois n'étaient pas très bien rémunérés, mais ils permettaient de payer les factures. En violant les droits des travailleurs de cette manière, j'estime que l'on porte vraiment atteinte à l'intégrité du milieu de travail et des travailleurs eux-mêmes.
Je tiens à vous remercier, vous et votre équipe, de nous avoir amenés à ce point. Je sais que vous avez dû composer avec une forte résistance.
Tout à l'heure, j'ai souligné des aspects du projet de loi qui seraient à améliorer, dont le délai de mise en œuvre et la possibilité de recourir à la sous-traitance avant le dépôt des documents de négociations. Or, il y a aussi un grand absent dans le projet de loi. Je comprends qu'il ne sera peut-être pas possible de l'y ajouter, mais je tiens à le souligner.
Depuis 18 mois, il y a un lockout au Port de Québec. Ce ne sont pas seulement les débardeurs qui vivent ça, mais aussi la population. Les briseurs de grève n'ont pas la formation pour être des débardeurs, et il y a davantage d'incidents reliés à la poussière de nickel dans l'air — ce qui est un danger pour l'ensemble de la population. De plus, il y a du nitrate d'ammonium au port de Québec: faites vos recherches, et je pense que je n'aurai pas besoin de vous donner plus de détails sur ce que peut provoquer la mauvaise manutention de nitrate d'ammonium.
Le problème est que le projet de loi actuel ne s'appliquera pas aux gens qui sont présentement en lockout, et ce, même si le temps d'application est raccourci à neuf mois. Que disons-nous aux débardeurs? Que disons-nous aux employés de Vidéotron qui sont en lockout actuellement? Que leur disons-nous, à eux qui voient passer devant leurs yeux des briseurs de grève qui font leur travail, parfois dangereusement pour les citoyens?
Au Port de Québec, 81 débardeurs sont en lockout depuis 18 mois. Quand un employeur met ses employés en lockout et utilise des travailleurs de remplacement, ce n'est pas juste.
En septembre dernier, des travailleurs se sont rassemblés à la flamme du centenaire à Ottawa pour demander cette loi. J'étais fier de me joindre à eux. En interdisant les travailleurs de remplacement, on met tout le monde au même niveau, et on encourage les parties à négocier et à parvenir à un accord.
Un peu plus tôt, j'ai dit que ce projet de loi était perfectible et que nous pouvions y apporter des améliorations. Évidemment, le délai pour sa mise en œuvre est quelque chose qui a été souligné par les syndicats comme étant problématique, puisqu'elle pourrait ne survenir qu'après les prochaines élections. J'espère que le Comité fera du bon travail pour essayer de considérer les revendications du mouvement syndical et de réduire ce délai de mise en œuvre.
Monsieur le ministre, vous venez tout juste de dire que lorsqu'il y a des travailleurs de remplacement, ce n'est pas juste. Je suis tout à fait d'accord avec vous. Le président de l'Alliance de la fonction publique du Canada a parlé des travailleurs et travailleuses en grève au Personnel des fonds non publics du ministère de la Défense nationale, rapportant l'information voulant que des membres des Forces armées canadiennes soient utilisés comme travailleurs de remplacement pour ces travailleurs et travailleuses en conflit de travail.
S'il n'est pas juste de se faire voler son travail pendant qu'on est en grève, que pouvez-vous faire pour éviter que cette situation se produise avec cette unité qui est en négociations en ce moment?
Comme il peut le comprendre, j'hésite bien évidemment à intervenir dans un dossier particulier, si ce n'est pour dire que...
Mais je voudrais d'abord revenir à ce que je disais plus tôt, lorsque j'ai été interrompu par la députée. J'indiquais m'être montré solidaire des travailleurs du port de Québec et avoir discuté avec eux devant la Flamme du centenaire l'année dernière. Ils sont au courant de ce que nous faisons. Ils appuient sans réserve le travail que nous accomplissons, et ce, même s'ils savent fort bien que ce projet de loi n'aura aucune incidence sur leur situation actuelle.
Je pense que cela en dit long sur leur perception de la lutte de longue haleine que nous devons livrer. Je crois également que je n'aurais pas à faire valoir trop longtemps qu'une loi rétroactive — car c'est bien ce dont il s'agirait ici — ne correspondrait pas à notre mode de fonctionnement habituel. Les législateurs, aussi bien à cette table qu'à la Chambre, envisageraient avec une grande prudence une telle loi qui aurait une incidence rétroactive sur un élément essentiel de notre économie.
Les travailleurs du port de Québec, que j'ai rencontrés et auxquels je me suis joint lorsqu'ils ont manifesté ici à Ottawa l'an dernier, m'ont souhaité bonne chance et nous appuient dans nos efforts pour veiller à ce que les travailleurs de ce pays soient traités avec dignité.
Que pouvez-vous faire pour ces travailleuses et cs travailleurs qui sont présentement en grève à la Défense nationale et qui, semble-t-il, se font remplacer par des membres des Forces armées canadiennes? Si se faire remplacer pendant qu'on est en conflit de travail n'est pas juste, que pouvez-vous dire à ces femmes et à ces hommes qui sont présentement sur les lignes de piquetage et qui voient leur travail être fait par d'autres?
Monsieur Boulerice, je vous répondrai que les travailleurs dont vous parlez ne sont pas assujettis à la partie I du Code canadien du travail. Or, le projet de loi C‑58 vise à modifier cette partie. Ce ne sont donc malheureusement pas des travailleurs qui relèvent de notre compétence.
En examinant de nouveau ce qui s'est passé tout à l'heure, nous avons noté que les rappels au Règlement semblent avoir été faits à même le temps alloué à Mme Ferreri, ce qui explique sa surprise lorsqu'elle a regardé son propre chronomètre. Je sais que vous êtes un président très juste et que vous répartissez toujours le temps de parole avec une grande équité. Cependant, tout indique que c'est bel et bien ce qui est arrivé avec ces derniers rappels au Règlement — ou une grande partie d'entre eux, en tout cas. Je me demande si Mme Ferreri ne pourrait pas récupérer son temps de parole, ce qui lui donnerait entre 20 et 30 secondes supplémentaires.
Merci, madame Gray. Je me suis assuré de chronométrer le tout. J'ai permis un dépassement de 16 secondes pour tenir compte des deux rappels au Règlement. Je vous remercie de votre intervention.
Nous arrivons maintenant au terme de cette séance de deux heures. Plaît‑il au Comité de lever la séance?