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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 088 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 8 novembre 2023

[Enregistrement électronique]

(1630)

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Bienvenue à la 88e réunion du Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées de la Chambre des communes. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité reprend son étude de l'incidence des technologies de l'intelligence artificielle sur la main-d'œuvre au Canada.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule en mode hybride, conformément au Règlement, avec des présences sur place en personne et d'autres à distance au moyen de l'application Zoom.
    Pour le bénéfice de tout le monde, je vous demanderais, avant de prendre la parole, d'attendre que je vous nomme. Ceux qui participent à distance, servez-vous de l'icône « Lever la main » pour attirer mon attention. Ceux qui sont dans la salle, levez simplement la main.
    Vous pouvez vous exprimer dans la langue officielle de votre choix. Si le service d'interprétation est interrompu, veuillez me le signaler. Nous suspendrons la séance le temps qu'il soit rétabli. Ceux qui participent à distance, cliquez sur le symbole du globe au bas de votre écran pour obtenir le service d'interprétation. Ceux qui sont dans la salle, vous n'avez qu'à vous servir de l'écouteur.
    Je rappelle aussi aux personnes dans la salle de tenir leur écouteur loin de leur microphone pour éviter les retours de son, qui peuvent endommager l'ouïe des interprètes.
    Tous nos témoins comparaissent virtuellement aujourd'hui. Nous accueillons M. James Bessen, professeur, Initiative de recherche sur la technologie...
    Il n'est pas avec nous. C'est lui qui est absent.
    Nous accueillons par vidéoconférence M. Morgan Frank, professeur au département d'informatique et de systèmes en réseau à l'Université de Pittsburgh. Nous accueillons par vidéoconférence M. Fenwick McKelvey, professeur agrégé de politique des technologies de l'information et de la communication à l'Université Concordia.
    Sur ce, nous passons aux déclarations préliminaires de cinq minutes, en commençant par M. Frank.
    Vous avez cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire, s'il vous plaît.
     Merci beaucoup de m'offrir l'occasion de vous faire part de mes réflexions.
    L'intelligence artificielle générative, ou pour faire court, l'IA générative, suscite de nouvelles inquiétudes pour la stabilité d'emploi, l'éducation et l'avenir du travail, parce qu'elle est capable de faire des choses qui étaient inimaginables voilà 10 ans à peine. En économie du travail, la convention classique est que la technologie n'automatise pas des professions entières, mais plutôt des tâches précises dans un emploi.
    Le problème, c'est que les activités en milieu de travail et les applications de l'IA varient dans l'ensemble de l'économie. Il faut donc simplifier l'heuristique pour arriver à prédire l'automatisation et la stabilité d'emploi. On suppose que les tâches mentales, les tâches de création et celles des cols blancs en général sont à l'abri de l'automatisation, par exemple, parce que la créativité est difficile à évaluer objectivement et que le processus créatif est difficile à décrire de façon algorithmique.
    Pourtant, l'IA générative, avec notamment les grands modèles de langage comme ChatGPT et les générateurs d'images comme Midjourney, fait un travail de création lorsqu'elle écrit une dissertation, un poème ou un code de programmation informatique, ou lorsqu'elle crée une image nouvelle à partir d'une simple invite. Autrement dit, l'intelligence artificielle d'aujourd'hui pulvérise la convention classique qui servait jusqu'ici à éclairer les politiques et les recherches en économie.
    Par exemple, contrairement aux études antérieures sur l'automatisation, un rapport récent d'OpenAI et de l'Université de la Pennsylvanie a révélé que les professions aux États-Unis qui sont le plus exposées aux grands modèles de langage sont celles qui exigent le plus d'études et qui commandent les salaires les plus élevés. Pour s'écarter d'une méthode heuristique de prédiction de l'automatisation, il faudra de nouvelles données mesurant les effets plus directs de l'IA générative.
    Cependant, tout comme les technologies antérieures, l'IA générative effectue des tâches précises en milieu de travail, ce qui veut dire que son incidence la plus directe sur les professions est une transition des compétences et des tâches des travailleurs vers d'autres appelées à compléter l'IA. Si les travailleurs n'arrivent pas à s'adapter, il peut se produire des cessations d'emploi, soit que le travailleur part de son propre chef ou qu'il est congédié par son employeur. Les travailleurs en chômage se mettent en quête d'un nouvel emploi, mais s'ils ont du mal à en trouver un, ils peuvent recevoir des prestations d'assurance-emploi pendant qu'ils poursuivent leur recherche.
    Voilà donc une cascade d'effets qui décrit les conséquences les plus et les moins directes de l'IA, si bien qu'avec des données qui présentent un meilleur portrait des compétences nouvelles exigées, des cessations d'emploi par région, par secteur d'activité ou par profession, et même des données sur les risques de chômage par profession dans l'ensemble de l'économie, il sera plus facile de prédire l'incidence de l'IA sur les travailleurs.
    Il y a des sources de données émergentes, dont les offres d'emploi, les CV des travailleurs et les données des bureaux d'assurance-chômage, qui apportent un nouvel éclairage à ces aspects‑là dans le marché du travail, mais qui échappent souvent aux statistiques habituelles de l'État sur le travail.
    Enfin, comme les changements de compétences sont la conséquence la plus directe de l'avènement de l'IA générative, la prudence dicte de mettre l'accent sur les mécanismes d'acquisition de compétences. Si l'IA générative touchera surtout les emplois de cols blancs, nous devrions alors nous concentrer sur les compétences enseignées au niveau collégial, parce que c'est là normalement que les étudiants s'orientent vers des emplois de cols blancs.
    Bien que les statistiques sur la main-d'œuvre abondent, il est plus difficile de poser un regard sur les compétences collégiales. Si elles sont quantifiées, alors, tout comme nous étudions l'IA générative dans la population active, nous pouvons également évaluer les collèges, les étudiants et les principaux domaines d'études les plus exposés à l'intelligence artificielle. Nous ne devrions pas hésiter à mesurer l'exposition à l'IA générative dans l'éducation. D'après des études de cas récentes, les applications de l'IA générative ne surpassent pas les experts ni n'améliorent sensiblement leur rendement, mais elles font une grande différence en haussant le rendement des non-experts jusqu'à un degré plus comparable à celui des experts dans ces applications.
    Si cette observation vaut pour tous les contextes, alors l'intégration de l'IA générative dans les cursus d'apprentissage pourrait améliorer les objectifs d'apprentissage, en particulier pour les étudiants au rendement inférieur, et par conséquent renforcer les programmes d'éducation.
    En résumé, l'IA générative est nouvelle et stimulante et elle aura une incidence inédite sur la population active par rapport aux technologies précédentes. En fait, elle pulvérise la convention classique sur laquelle on s'est appuyé jusqu'ici pour prédire l'automatisation par intelligence artificielle, parce qu'elle fait le travail de professions que l'on croyait auparavant immunisées contre l'automatisation.
    À l'avenir, il faudrait de préférence mettre l'accent sur les données et les connaissances qui donnent une idée de ce que l'IA peut faire concrètement du point de vue des compétences et des tâches en milieu de travail, et des sources de ces compétences dans la population active.
    Je vous remercie.
(1635)
    Merci, monsieur Frank.
    Nous passons maintenant à M. McKelvey, qui dispose de cinq minutes.
     Monsieur McKelvey, vous avez la parole.
    Je suis professeur agrégé en politique des technologies de l'information et de la communication à l'Université Concordia. Mes recherches portent sur l'intersection des algorithmes et de l'intelligence artificielle en ce qui concerne la politique technologique. Je vous soumets mes observations aujourd'hui à titre de professionnel, et mes opinions n'engagent que moi.
    Je m'adresse à vous depuis le territoire autochtone non cédé de Tiohtià:ke, ou Montréal. La nation des Kanienkehaka est reconnue comme la gardienne des terres et des eaux d'où je vous parle aujourd'hui.
    J'aimerais tout d'abord situer cette étude dans le programme législatif plus général, puis formuler quelques observations précises sur les liens entre les modèles fondamentaux élaborés à partir de données publiques ou d'autres grands ensembles de données, et sur la concentration croissante dans le secteur de l'intelligence artificielle.
    Au Canada, des changements majeurs sont apportés au droit fédéral relatif à la protection des données et de la vie privée par le projet de loi C‑27 qui accorde des exemptions plus importantes pour qui veut recueillir des données à des fins commerciales légitimes. Ces exemptions permettent un recours accru à l'apprentissage automatique et à d'autres catégories de technologies de l'IA qui dépendent des données, ce qui exerce une pression énorme sur une modification tardive, la Loi sur l'intelligence artificielle et les données, afin d'atténuer les applications à risque élevé et les préjudices plausibles. Le travail, l'automatisation, la protection des renseignements personnels et les droits relatifs aux données des travailleurs devraient peser lourd dans ce projet de loi, comme on l'a vu dans le décret sur l'IA aux États-Unis. J'encourage le Comité à étudier les effets du projet de loi C‑27 sur la vie privée en milieu de travail et les conséquences d'une plus grande permissivité à l'égard des données.
    Pour ce qui est de la relation entre le travail et l'intelligence artificielle, j'aimerais faire trois grandes observations fondées sur mon étude de la littérature publiée à ce sujet, et formuler quelques recommandations. Premièrement, l'IA aura des effets sur la population active, répartis de façon inégale. Deuxièmement, ces effets ne concernent pas seulement l'automatisation, mais aussi la qualité du travail. Troisièmement, dans l'état actuel des choses en intelligence artificielle, le pouvoir se concentre dans une poignée d'entreprises de technologie.
    J'ai grandi à Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, à l'ombre des chaînes d'approvisionnement mondiales et d'une main-d'œuvre en mutation. Mes amis travaillaient tous dans des centres d'appels. Maintenant, ces emplois seront confiés à des robots conversationnels, des chatbots, ou du moins assistés par l'IA générative. Mes propres recherches montrent qu'un thème récurrent du débat sur l'IA dans les services de télécommunications est l'automatisation du contact avec la clientèle.
    Je commence par les centres d'appels parce que, comme nous le savons grâce aux travaux d'Enda Brophy, les emplois y sont féminins, précaires et mobiles. Cet exemple nous rappelle une chose importante: les effets de l'IA peuvent marginaliser davantage les travailleurs visés par l'automatisation.
     Les effets de l'IA semblent déjà toucher les travailleurs en sous-traitance précaire, selon un rapport du site Rest of World. Il est essentiel de comprendre les effets intersectionnels de l'IA pour comprendre son incidence sur la main-d'œuvre. Nous commençons à peine à voir comment le Canada s'adaptera à ces changements planétaires et comment il pourrait exporter ses emplois plus précaires à l'étranger et trouver de nouvelles sources de croissance de l'emploi à travers ses régions et ses secteurs.
    Enfin, les travailleurs sont de plus en plus soumis à la gestion par algorithme. Si on ajoute à cela le virage de plus en plus marqué vers la surveillance des lieux de travail, comme l'a étudié Adam Molnar, il devient urgent de protéger les travailleurs contre une collecte abusive de données qui pourrait réduire leur autonomie au travail ou même servir à former des travailleurs moins qualifiés ou des remplaçants automatisés. Selon l'OCDE, les travailleurs soumis à la gestion par algorithme sont plus nombreux à signaler un sentiment de perte d'autonomie.
    Toutes les promesses de l'IA reposent sur la capacité de travailler plus efficacement, mais qui profite de cette efficacité? Des études de l'OCDE révèlent que l'IA peut aussi pousser la cadence et l'intensité du travail. Les conséquences semblent évidentes et sont bien étayées par les études antérieures sur des appareils comme le BlackBerry, qui a bousculé les attentes au travail et favorisé une pression à la disponibilité constante chez les travailleurs. D'autres recherches suggèrent que l'IA présente les plus grands avantages pour les nouveaux employés. On présume que cela permet aux travailleurs de contribuer plus rapidement à l'entreprise, mais le risque est plutôt que l'IA contribue à dévaluer ou à disqualifier des travailleurs. D'où la nécessité de considérer les effets de l'IA non seulement sur les emplois, mais aussi sur la qualité du travail lui-même.
    L'avènement de l'IA générative marque un changement dans la façon dont les suites bureautiques comme Microsoft Office, Google Docs et Adobe Creative Cloud fonctionnent en milieu de travail. Mon dernier commentaire porte moins sur la configuration particulière de l'IA maintenant, mais plutôt sur la dépendance croissante à l'égard de quelques plateformes technologiques qui sont devenues un passage obligé de la productivité au travail et qui intègrent rapidement les fonctions de l'IA générative. L'intelligence artificielle pourrait fixer pour de bon l'emprise de marché de ces entreprises, car leur accès aux données et à l'infonuagique pourrait rendre difficile de les concurrencer, et difficile pour les travailleurs de s'affranchir de leurs produits et services. Les exemples du passé nous enseignent que la technologie de la communication favorise les monopoles sans normes ouvertes ni efforts de décentralisation du pouvoir.
    Je me ferai un plaisir de discuter des recours et des solutions pendant la période des questions, mais j'encourage le Comité à faire un certain nombre de choses.
    Premièrement, il faut examiner comment nous pouvons mieux protéger les travailleurs et leurs droits, mieux protéger les données et contrer la surveillance abusive en milieu de travail, surtout pour veiller à ce que les travailleurs n'apprennent pas eux-mêmes à se retirer de leur emploi.
(1640)
     Deuxièmement, envisager l'arbitrage et un soutien accru du pouvoir de négociation, surtout pour les contrats entre des entrepreneurs indépendants et de grandes entreprises de technologie.
    Troisièmement, veiller à ce que les avantages de l'efficacité soient répartis équitablement, en envisageant par exemple la semaine de travail de quatre jours, en augmentant le salaire minimum et en garantissant le droit à la déconnexion.
    Je vous remercie de m'avoir écouté.
    Merci, monsieur McKelvey.
    Nous allons commencer la première série de questions avec Mme Ferreri, qui dispose de six minutes, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins qui sont ici aujourd'hui pour discuter de l'incidence de l'intelligence artificielle, en particulier, sur la main-d'œuvre, mais aussi de la position du Canada à cet égard.
    Monsieur Frank, êtes-vous canadien? Je sais que vous travaillez dans une université américaine. Êtes-vous canadien?
     Je ne suis pas canadien, non. Je suis américain.
    Que savez-vous de la productivité actuelle du Canada en ce qui concerne l'intelligence artificielle, et de sa position à ce chapitre?
    Je sais que le Canada est très actif dans l'innovation en intelligence artificielle, surtout parce que je m'intéresse de près à l'activité universitaire dans les domaines de l'apprentissage automatique, de l'informatique et de la science des données.
    En fait, le Canada se classe au 29e rang parmi 38 pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques au chapitre du PIB par heure travaillée, et notre secteur privé enregistre les plus faibles taux d'adoption de nouvelles technologies. En fait, nous nous débrouillons très mal dans ce domaine. Nous sommes vraiment en retard dans notre production. Notre productivité a aussi chuté au cours des huit dernières années. On peut lire ici que sur 35 pays de l'OCDE dont les services nationaux de statistique ont mené des enquêtes semblables auprès des entreprises, le Canada se classe au 20e rang pour l'adoption de l'IA. Vingtième sur 35.
    Vous avez soulevé des points très intéressants. J'aimerais que vous nous en disiez davantage. Vous avez parlé de l'aptitude de l'IA à créer. En particulier, vous avez dit quelque chose à propos de ne pas être « à l'abri de l'automatisation ». Qu'entendez-vous par là?
(1645)
    Ce que je veux dire, c'est qu'étant donné que la nature des tâches au travail ou les compétences nécessaires pour accomplir un travail plutôt qu'un autre sont si particulières et si diversifiées, il est difficile de trouver des données qui rendent compte de toute cette variabilité, alors les chercheurs s'en remettent uniquement à l'heuristique. Par exemple, si vous obtenez un diplôme collégial, vous n'avez pas à vous préoccuper de l'automatisation.
    Ce qui est intéressant au sujet de l'IA générative, c'est qu'elle fait du travail qu'on aurait considéré à l'abri de l'automatisation il y a à peine quelques années. Cela signifie qu'il y a de nouveaux pans de l'économie — notamment dans les emplois de cols blancs hautement spécialisés — où l'IA générative effectue certaines tâches professionnelles que nous attendrions plutôt de la part de ces travailleurs. C'est quelque chose de nouveau.
    Comment pensez-vous combler l'écart pour que l'employé apprenne à exploiter l'intelligence artificielle au lieu d'être remplacé par elle?
    C'est une très bonne question. On ne sait pas exactement comment y inciter les employeurs. Je pense que les travailleurs reconnaissent qu'ils doivent se perfectionner pour travailler avec la nouvelle technologie dans leur domaine, quelle qu'elle soit, mais j'ai l'impression que les employeurs et les Ressources humaines ne s'en soucient pas tellement, ou qu'ils n'en voient pas l'utilité.
    Ce qu'on voit beaucoup plus en général, c'est qu'il est plus facile parfois de se séparer d'un travailleur qui est là depuis un certain temps et qui a un salaire plus élevé, lorsqu'on peut embaucher pour beaucoup moins cher quelqu'un qui sort du collège, qui vient d'entrer sur le marché du travail et qui est déjà prêt à travailler avec la nouvelle technologie. Comment on s'y prend exactement pour requalifier des gens qui sont rendus au milieu de leur carrière, la question est ouverte.
    Merci.
    Vous qui êtes de l'autre côté de la frontière et qui regardez ce qui se passe au Canada, comment trouvez-vous que nous nous en tirons sur le plan de la productivité? Je sais que je vous ai donné des statistiques, mais qu'est‑ce qu'on en pense chez vous en général? Est‑ce quelque chose dont vous parlez avec vos pairs et vos collègues?
    Ce que je constate, comme je le disais, c'est que l'activité de recherche sur l'IA est très intense au Canada. J'ai l'impression que, compte tenu des statistiques que vous avez mentionnées, vous auriez beaucoup à gagner à mettre une partie de ce capital intellectuel au service de l'économie du Canada.
    Je crois savoir qu'il y a des entreprises de technologie qui s'y intéressent en des endroits comme Vancouver, par exemple, mais cette concentration d'entreprises et de travailleurs est de loin surpassée par d'autres endroits aux États-Unis, notamment New York et la Silicon Valley, en périphérie de San Francisco. Ce type de masse critique n'a peut-être pas encore trouvé une place au Canada.
    Vous venez de soulever un point très important. Nous avons le potentiel pour attirer le talent, attirer les emplois et accroître notre PIB, mais il y a des obstacles qui empêchent les gens de venir au Canada. Je ne sais pas si vous voulez élaborer là‑dessus, mais je serais curieuse de savoir si vous avez entendu parler de notre crise du logement, de notre inflation ou de problèmes de ce genre.
     Oui. Je n'ai pas grand-chose à dire là‑dessus, même si nous avons les mêmes problèmes aux États-Unis.
    Merci.
    Si je peux m'adresser à vous, monsieur Fenwick, votre témoignage semblait être contre l'IA. Même à voir ce que vous publiez dans Internet Daemons: Digital Communications Possessed, on dirait que vous avez une piètre opinion de quelque chose qui peut servir d'outil.
     C'est important. La pâte dentifrice est sortie du tube, comme on dit. Comment pouvons-nous nous en servir à notre avantage au lieu d'avoir peur de quelque chose qui est inévitable?
    Je ne dirais que j'ai une piètre opinion de l'intelligence artificielle. Je dirais que je suis prudent. Ma responsabilité consiste à cerner les écarts entre l'exploitation et le déploiement de l'intelligence artificielle dans le contexte réglementaire actuel du Canada et, en particulier, certains des angles sous lesquels nous parlons de la place du Canada dans une économie politique mondiale axée sur l'intelligence artificielle.
    Certaines de mes inquiétudes au sujet de l'IA générative tiennent à ses répercussions et à son rapport avec le droit canadien relatif au respect de la vie privée. Ce dont nous sommes témoins — et je pense que c'est loin d'être banal —, c'est d'une espèce de piratage classique de l'approvisionnement. En effet, des technologies comme ChatGPT ont été livrées au public et les travailleurs les adoptent et s'y embrouillent sans qu'on ait vraiment eu le temps de voir comment elles s'intègrent dans la population active.
    C'est un peu la même stratégie que celle dont se servent des entreprises comme Clearview AI pour essayer d'adapter l'utilisation des outils de l'IA dans les corps policiers, en usant d'une tactique semblable pour contourner les mécanismes d'approvisionnement classiques. Ces types de stratégies font partie de ce que j'espère dénoncer. Je suis moins préoccupé par la technologie elle-même, nécessairement, que par sa mise en œuvre et son exploitation avec une idée claire de ses répercussions sociales.
(1650)
    Je vous remercie de votre réponse et je m'excuse de vous avoir appelé « monsieur Fenwick » tantôt, alors que c'est « monsieur McKelvey ». Je suis désolée.
    Merci, madame Ferreri.
    Monsieur Coteau, vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins de leur présence aujourd'hui. C'est passionnant d'entendre des experts sur ce sujet très intéressant. Merci de nous consacrer de votre temps.
    Je vais peut-être commencer par M. Frank.
    Vous avez laissé entendre que l'IA générative pourrait toucher davantage les cols blancs que ceux que nous appelons habituellement les cols bleus, et je présume que l'automatisation toucherait moins les cols blancs que l'IA.
    Pouvez-vous nous en dire un peu plus au sujet de ces deux technologies? Je sais que notre étude porte sur l'intelligence artificielle, mais je pense que c'est important, parce que la question qui vient ensuite est la suivante: quelle incidence l'intégration ou l'intersection de ces deux technologies aura‑t‑elle sur les deux secteurs de la population active?
    Pour être plus précis, oui, les cols blancs et les cols bleus de l'économie entière sont menacés d'automatisation par la technologie, bien que la technologie soit en fait très différente pour les uns et les autres. L'exemple classique qui vient à l'esprit pour les cols bleus est sans doute la robotique dans la fabrication, tandis que pour les cols blancs, jusqu'à récemment, c'étaient des choses comme la programmation informatique et l'apprentissage automatique.
     Il semble que les cols bleus courent un plus grand risque d'être entièrement remplacés par des choses comme la robotique — imaginez un tapis roulant où un bras robotisé remplace entièrement quelqu'un qui devrait autrement manipuler des objets —, tandis que les cols blancs deviennent plus productifs, parce que l'apprentissage automatique facilite l'analyse des données et permet de se concentrer davantage sur l'interprétation des résultats au lieu de calculer des nombres.
    L'IA générative est différente parce qu'elle semble se charger en fait de la partie plus cognitive du travail de col blanc. Elle est capable d'interpréter des résultats en plus de ce que fait déjà l'apprentissage automatique de l'IA tout court, calculer des nombres, par exemple. C'est ce qui la rend fondamentalement différente et qui fait qu'elle se prête au travail qui correspond habituellement à un emploi de col blanc plutôt qu'à un emploi de col bleu.
    Oui.
    Vous passez beaucoup de temps dans ce domaine d'étude. Je suis certain que vous voyez des choses qui vous étonnent sur le marché du travail, des choses qui peuvent même vous décontenancer, des choses qui perturbent. Pouvez-vous nous donner un exemple de quelque chose que vous avez peut-être vu au cours de la dernière année et qui vous a décontenancé un peu en raison des perturbations qui en découlent dans un secteur? Avez-vous des exemples...?
     La génération d'images a pris un essor fulgurant rien que ces deux dernières années. Elle fonctionne très bien par rapport à il y a cinq ans. Elle s'améliore à un rythme plus rapide, et elle se généralise dans d'autres modalités également. On commence à voir des choses comme la création non pas d'une seule image à partir d'une invite, mais aussi de plusieurs images ensemble, qui sont toutes cohérentes. Vous pourriez penser à une page de BD, par exemple, et même créer des vidéos entières en décrivant les caractéristiques des objets figurant dans l'image et comment ils vont interagir dans le temps.
    C'est vraiment un domaine promis à une grande expansion, ce qui suscite beaucoup d'incertitude dans le monde de la création intellectuelle. L'exemple le plus évident est celui des outils comme Midjourney ou DALL‑E d'OpenAI, qui sont des plateformes de génération d'images. Que représentent ces outils pour l'avenir des graphistes? Il semble qu'il y ait un risque de voir leur travail complètement automatisé, mais je ne pense pas que c'est ce qui va se produire. Je m'attends à ce que ces outils rendent l'idéation, qui n'est qu'une étape du processus créatif, beaucoup plus rapide et beaucoup plus évolutive. Les graphistes n'en seront que plus efficaces. Peut-être qu'ils pourront offrir leurs services à moindre prix, vu que l'idéation leur prendra beaucoup moins de temps. D'après les études économiques, nous savons que lorsqu'il y a pareille augmentation de la productivité, l'augmentation de la demande n'a pas toujours besoin d'être linéaire. Il arrive qu'on voie augmenter la demande lorsqu'un bien ou un article devient plus facile à produire.
(1655)
    Merci beaucoup de votre réponse.
    Monsieur McKelvey, j'ai une brève question pour vous. Vous avez parlé de la protection des droits des travailleurs ou simplement de la protection des travailleurs en général face à l'intelligence artificielle qui s'intègre de plus en plus dans le milieu où ils travaillent.
    Comment pouvons-nous, les législateurs, élaborer des politiques, des règlements et des lois capables de suivre la cadence de changements aussi rapides? Même dans votre domaine et avec votre compétence, vous ne pourriez sans doute pas prédire avec exactitude ce qui va arriver même l'année prochaine.
    Comment pouvons-nous prendre les devants et être certains que les politiques, les lois et les règlements que nous mettons en place conviendront aux situations de demain? Avez-vous des réflexions à ce sujet en ce qui concerne les droits des travailleurs?
    Monsieur, je vous assure que je ne peux prédire l'avenir ni prévoir quand s'éteindra la lumière dans mon bureau.
    Je peux cependant vous dire qu'il y a des tendances à long terme. Il est important de souligner que l'intelligence artificielle générative arrive dans un contexte politique assez solide, à en juger par les discussions et les préoccupations de plus en plus présentes au sein du gouvernement concernant l'influence exercée par les grandes entreprises de technologie.
    Deux choses me viennent surtout à l'esprit. La première, c'est l'approche que certains gouvernements étrangers ont cherché à adopter pour ce qui est de l'arbitrage et pour reconnaître et soutenir notre pouvoir de négociation collective lorsqu'il existe une telle asymétrie entre une grande plateforme et une personne qui travaille sur cette plateforme. J'ajoute que de nombreux secteurs de la création en ligne sont au cœur du débat sur les répercussions des algorithmes, en particulier sur la création de contenu.
    Je pense qu'il faut essayer de déterminer comment intervenir pour atténuer les asymétries des forces de négociation à certains endroits. Deuxièmement, il faut aussi se pencher sur les contrats et le droit contractuel, parce qu'à bien des égards, nous avons affaire à des ententes de service conclues avec de grandes institutions et des fournisseurs de services infonuagiques. Là aussi, il doit y avoir des symétries en place. Je pense que ce sont là les deux principaux points à prendre en compte.
    Enfin, il faut porter attention aux changements qui se produisent en matière de surveillance dans les lieux de travail. C'est une tendance de longue date. Il est certain que le virage vers la gestion algorithmique et les programmes de surveillance des employés sont là pour de bon. Il y aurait lieu, à mon avis, d'y consacrer une attention soutenue.
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur Croteau.

[Français]

     Madame Chabot, vous avez la parole pour six minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins.
     J'étais heureuse qu'un important forum sur l'encadrement de l'intelligence artificielle, auquel ont participé plusieurs acteurs, ait lieu au Québec la semaine dernière. Même s'il y a un manque de données, on commence à voir des études d'impact intéressantes. Je tenais à le souligner.
    Ma première question s'adresse à vous, monsieur McKelvey.
    Dans votre allocution, vous avez parlé du projet de loi C‑27. Je précise que ce n'est pas notre comité qui étudie ce projet de loi. En effet, il est étudié par un autre comité. Un de mes collègues m'a dit que, dans l'étude dudit projet de loi, on était seulement rendu à la protection des données. On n'est donc pas encore au cœur du défi que représente l'intelligence artificielle.
    Vous nous avez sensibilisés à l'idée que le Comité des ressources humaines, du développement des compétences et de la condition des personnes handicapées puisse étudier les effets du projet de loi C‑27. À votre avis, devrait-on faire cela simultanément plutôt que l'un après l'autre? Pouvez-vous nous en dire plus à cet égard?

[Traduction]

    Tout d'abord, je vous signale que certaines de mes observations découlaient du Forum sur l'intelligence artificielle qui a eu lieu à Montréal et des discussions d'experts sur la main-d'œuvre. Il est important de souligner que les dirigeants du Québec ont adopté une approche différente pour traiter les répercussions sociales de l'intelligence artificielle. C'est une démarche incontournable pour faire valoir que l'intelligence artificielle n'est pas simplement un enjeu économique, mais aussi un enjeu social.
    Le problème, c'est que le projet de loi C‑27 est déjà assez complexe en soi, sans parler de la modification de la Loi sur l'intelligence artificielle et les données. C'est vraiment le moment idéal de tout faire pour que cette loi, d'une importance capitale, fonctionne; il serait donc souhaitable que votre comité en fasse un examen approfondi en portant une attention particulière aux répercussions que le projet de loi C‑27 aura sur la main-d'œuvre .
    Vu le peu de temps dont disposera le Comité pour analyser les multiples changements, je pense que ce ne sera pas suffisant pour faire un examen approfondi. Il s'agit là d'un important exercice pour coordonner la politique en matière d'IA à la grandeur de l'appareil gouvernemental. En faisant mes propres recherches, j'ai constaté que cette coordination faisait défaut.
(1700)

[Français]

    Je vous remercie. Il s'agit d'un très bon argument.
     Vous avez mentionné trois choses au sujet de la main-d'œuvre. Vous avez dit, entre autres, que les effets allaient être répartis inégalement. Vous avez aussi parlé de la qualité du travail, ce qui est d'un grand intérêt pour moi. Tout à l'heure, ma collègue conservatrice a parlé de productivité. À mon avis, la productivité n'est pas seulement en lien avec le nombre d'heures travaillées; la qualité du travail est aussi importante.
    Selon vous, quels seront les effets de l'intelligence artificielle sur le plan de la qualité du travail?

[Traduction]

    Je tiens d'abord à préciser que l'intelligence artificielle est une notion complexe.
    J'apprécie le travail de M. Frank qui établit une distinction entre l'IA générative, dont il est question ici, et l'IA dans son sens plus général. Il y a certes un vaste débat en cours autour de l'incidence de l'IA mais je pense qu'en ce moment même, nous parlons de l'intelligence artificielle générative.
    Les deux choses auxquelles je pense, c'est d'abord le fait que la position du Canada, du moins dans le paysage de l'IA générative, est différente de sa position dans l'écosystème de l'IA en général. Nous constatons que de grandes sociétés américaines ont commencé à lancer quelques-uns de leurs produits phares — par exemple ChatGPT et d'autres — qui ne font pas nécessairement partie de l'écosystème canadien, selon moi. Cela soulève une première question, à savoir quelle est notre marge d'autonomie en milieu de travail, quels outils nous pouvons utiliser et dans quelle mesure nous emboîtons le pas. Je pense que c'est un virage important.
    Le deuxième point, c'est que mon domaine d'étude porte surtout sur les systèmes médiatiques. Mon expérience la plus pertinente pour comprendre les effets de l'intelligence artificielle consiste à observer les créateurs en ligne et la réglementation relative aux plateformes. Je dirais qu'une grande partie des répercussions de l'intelligence artificielle sont liées à la génération automatisée d'annonces publicitaires.
    Facebook lance de nouvelles fonctions pour générer automatiquement des publicités au moyen de l'IA. Une grande partie du contenu est de la création de haut niveau, et je pense que c'est dans ce flux quotidien de production d'information que cet impact va surtout se produire. Je pense notamment que nos systèmes d'information sont maintenant prêts à absorber un gros volume de contenu de faible qualité. Cela a soulevé un vent d'inquiétude et l'un des impacts que nous observons actuellement dans le domaine journalistique, c'est l'attention que portent les travailleurs à la génération d'articles pour décoder l'algorithme.
    Ma première préoccupation, c'est que cela risque de conduire à une dévaluation du travail actuel, parce qu'il sera possible de le faire plus vite et plus efficacement. Mon deuxième commentaire — qui découle de ma lecture des documents de l'OCDE —, c'est le risque potentiel de déqualification des tâches, en ce sens qu'en automatisant certaines tâches, cela facilite l'exécution d'autres types de tâches. Je pense que cette approche concerne surtout l'IA générative et s'applique de manière directive. Elle est intégrée à des progiciels de productivité et déployée dans l'espoir que les gens apprendront à l'utiliser.
    Il est important de souligner que la société OpenAI, qui a lancé ChatGPT, a délibérément tenté de pirater et de perturber le milieu de travail. Cette démonstration publique du fonctionnement de ChatGPT prouve bien qu'il s'agit d'une stratégie d'affaires sur laquelle nous devons nous pencher.
(1705)

[Français]

     Merci, monsieur McKelvey et madame Chabot.

[Traduction]

    Madame Zarrillo, vous avez six minutes, je vous en prie.
    Merci également à nos témoins.
    Ma première question est pour M. McKelvey.
    En tant que législateurs, nous en sommes clairement au tout début de notre étude et je suis certaine qu'elle évoluera au fil du temps. Pour l'instant, je veux mettre l'accent sur les failles manifestes au sujet desquelles nous devons légiférer. Vous en avez souligné trois et je vous en remercie.
    Pouvez-vous nous expliquer ce que vous voulez dire par la distribution équitable des gains en efficience. Avec l'éclairage intersectionnel que vous avez apporté à cette discussion, qui tient compte du genre... Il pourrait y avoir d'autres facteurs identitaires, bien entendu. Comme notre comité se penche sur l'inclusion des personnes handicapées, je suis très curieuse de savoir comment l'IA pourrait profiter ou nuire aux personnes handicapées et faciliter leur intégration au marché du travail.
    Dans cette optique, pouvez-vous nous expliquer comment les travailleurs seront protégés et pourront profiter de cette évolution évidente?
    Je tiens à souligner qu'il existe des possibilités. Ce qui est important au sujet de l'IA générative, c'est de réfléchir à la façon dont ces possibilités changent les obstacles à l'accès au travail, en particulier lorsqu'il s'agit de se faire passer pour un locuteur de langue maternelle anglaise, par exemple.
    Si nous voulons nous adapter et tenter de comprendre les multiples couches, nous devons d'abord essayer d'identifier l'un des avantages potentiels, tout en tenant compte de certains indicateurs que nous utilisons pour les compétences au travail, comme l'aptitude à rédiger en anglais. Cela pourrait aider une personne dont l'anglais n'est pas la langue maternelle d'acquérir cette compétence. Cela va jusqu'à l'aptitude en grammaire.
    Nous essayons de trouver des moyens de répondre aux différents... Deux choses se profilent à l'horizon selon moi. La première est le changement qui se produira au sein de la main-d'œuvre précaire, c'est‑à‑dire chez les personnes qui travaillent à contrat, par quarts ou à la demande. L'intelligence artificielle ne changera pas leur situation, mais je pense qu'elle met en évidence l'importance d'étudier les changements au sein du marché du travail et l'utilisation accrue des plateformes, comme nous le constatons avec Uber.
    Je pense que c'est vraiment là qu'il risque d'y avoir des répercussions. Est‑ce que l'IA jouera un rôle dans ce que nous appelons la « gestion algorithmique » de ces plateformes? Nous parlons de gens qui se tournent souvent vers des emplois de dernier recours ou des emplois... Dans un sens, c'est là un bon moyen de protéger les travailleurs qui font ce genre de petits boulots.
    Deuxièmement, il faut essayer de voir, de manière générale, dans quelle mesure nous avons recours à ce type d'arrangement tacite avec quelques grandes entreprises de technologie qui fournissent une infrastructure essentielle et dans quelle mesure elles comprennent l'impact que leurs pratiques de collecte de données, qui sont peut-être déjà en place, produit sur la main-d'œuvre.
    Ce sont les meilleures hypothèses que je peux avancer. Dans ce vaste débat, nous devons surtout chercher à comprendre si la force motrice de ce genre de productivité sera simplement...? Dans quels domaines cette technologie sera‑t‑elle adoptée et quels en seront les moteurs? D'après ce que je constate, l'IA générative encourage l'automatisation dans des secteurs qui semblent déjà automatisables, comme la création de contenu. C'est une manière de dire que les emplois qui ont déjà été déqualifiés ou marginalisés seront davantage touchés par ce virage vers l'IA générative.
    Je vous remercie.
    J'espérais que vous vous attarderiez davantage sur les répercussions en fonction des sexes, et sur la façon dont nous devons examiner ces données — je parle aussi de l'incidence sur les personnes handicapées. Y a‑t‑il déjà eu des discussions sur la manière dont les données doivent être ventilées? Y a‑t‑il eu des discussions sur le volume disproportionné de données existant déjà dans ces grands systèmes qui n'accordent pas la même importance aux voix des femmes, des personnes racisées et des personnes handicapées?
    En me préparant à cette réunion, j'ai essayé de trouver des éléments probants indiquant d'où viendraient ces impacts. Je n'ai réussi à trouver aucune publication portant sur les impacts comparatifs entre les hommes et les femmes au Canada. Je signale que cette question est largement abordée dans les discussions sur l'intelligence artificielle, spécialement en ce qui concerne les modèles génératifs et les préjugés qu'ils perpétuent.
    Quand nous parlons de ces différentes voix, il importe de préciser quelles voix ces systèmes reproduisent. C'est un travail fascinant. Quand vous cherchez et demandez à un modèle d'IA génératif de représenter un médecin, s'agira‑t‑il davantage d'un homme ou d'une femme? C'est la même chose quand on veut représenter... Pour décrire une personne originaire d'un autre pays, dans quelle mesure ces systèmes reproduiront-ils certains stéréotypes?
    Je précise que je suis tout à fait d'accord avec vous pour dire qu'il est nécessaire de déterminer, dans une optique intersectionnelle, quelles seront les répercussions de l'automatisation et de l'IA générative sur les emplois. Il y a vraiment une recherche à faire là‑dessus. Il y a aussi une préoccupation évidente au sujet des préjugés inhérents et incrustés dans ces technologies qui sont déployées comme des solutions pour accroître la productivité au travail.
(1710)
    Merci beaucoup. Nous n'avons pas fini d'en parler, je le sais.
    Je reviens à la protection des revenus des travailleurs. Tout le monde est au courant de la grève des scénaristes, et c'est maintenant l'industrie cinématographique qui est touchée. Cette grève a vraiment des répercussions sur les collectivités des deux côtés de la frontière. Je veux parler des travailleurs, des créateurs qui en subissent déjà les répercussions. Pouvez-vous nous parler brièvement de l'importance de protéger les revenus et les renseignements personnels ainsi que de l'importance que prend aujourd'hui la collecte de données. Je veux surtout savoir ce que nous devons faire pour protéger les revenus des travailleurs.
    Veuillez répondre brièvement, monsieur McKelvey.
    Je pense qu'il faut taxer les grandes plateformes, et il y a un débat en cours à ce sujet, et s'assurer qu'elles paient leur juste part. Je sais que le mouvement s'est essoufflé dans les pays de l'OCDE. Vous devez absolument vous assurer que les gains ou les profits d'un grand nombre de ces grandes plateformes ne sortent pas du Canada. Vous devez notamment vous assurer qu'il existe de solides réseaux de sécurité sociale pour soutenir les travailleurs en général, et pour cela, vous devez bonifier le salaire minimum...
    Il y a un grand débat à ce sujet. C'est un peu difficile d'y voir clair parce que c'est une question très complexe. L'idée d'un revenu de base universel est souvent évoquée. Je pense que ce serait un frein aux mesures visant à offrir aux travailleurs des protections plus solides. Il y a une panoplie de mesures qui pourraient être mises en place.
    Les créateurs ont lancé des discussions productives à cet égard, d'après ce que j'ai entendu. Ils sont préoccupés. De toute évidence, le secteur de la création s'inquiète de l'évolution de l'IA générative.
    Monsieur McKelvey...
    Cela donne une idée de ce qu'est un arrangement important. Si cette technologie n'est pas utilisée dans un environnement neutre, elle est alors utilisée par les grands studios, les créateurs et dans leurs relations mutuelles.
    Je pense...
    Monsieur McKelvey, je vous demanderais de bien vouloir conclure. Je suis certain que d'autres députés souhaitent vous poser des questions. J'ai un horaire à respecter, je vais donc donner la parole à M. Aitchison.
    Monsieur McKelvey, vous pourrez conclure votre réflexion en répondant à une autre question. Je vous remercie.
    Monsieur Aitchison, vous avez cinq minutes, je vous en prie.
    J'ai quelques questions à poser, mais je suis curieux d'entendre le reste de votre raisonnement, monsieur McKelvey. Pouvez-vous terminer?
    Merci beaucoup de m'en donner le temps.
    Je voulais simplement dire que ce qui est intéressant, du moins au sujet de la grève des scénaristes, c'est que les négociations portaient sur l'accès aux données et les mesures à prendre pour aider les travailleurs à comprendre quelle était leur place au sein de l'organisation. Cela me semble un élément important.
    Il y a aussi une inquiétude en ce qui concerne les modèles de franchise et la création du prochain film Marvel, ou encore concernant un genre de production culturelle axée sur la répétition du même type de contenu. Les travailleurs craignaient donc que leurs scénarios ou leur contenu soient utilisés pour former des modèles qui, au bout du compte, affaibliraient ou remplaceraient leur pouvoir de négociation. Il est important de situer cela dans son contexte et de dire si la génération automatisée de contenu apporte un avantage ou accroît la valeur perçue.
    Le troisième élément, c'est ce que les acteurs sont en train de négocier, et il semble y avoir une nette divergence à cet égard. Est‑ce qu'ils détiennent un droit sur leur visage et est‑ce que les studios détiennent le droit pérenne de modifier leur image? Ce débat démontre clairement que les travailleurs doivent avoir des droits sur les données et des droits sur leurs renseignements personnels. La guilde des acteurs et la guilde des scénaristes n'ont ménagé aucun effort pour démontrer que c'est là une préoccupation généralisée, et pas seulement Hollywood.
    D'accord. Je vous remercie.
    Je fais partie des personnes qui ont encore du mal à saisir toute l'ampleur de l'intelligence artificielle, mais il est indéniable que la technologie connaît un essor exponentiel depuis une cinquantaine d'années.
    Pouvez-vous me donner un exemple d'une technologie apparue il y a une génération et qui a eu un impact semblable sur nos marchés du travail et sur notre société, tout en suscitant le même niveau d'inquiétude, de prudence ou d'intérêt.
    Ma question s'adresse à nos deux témoins.
(1715)
    Volontiers. Je vais commencer.
    C'est Internet qui me vient à l'esprit. Je ne sais pas si cette technologie a suscité les mêmes inquiétudes, mais elle était certes omniprésente dans de nombreux domaines et elle a transformé la nature de nombreux emplois. Cependant, Internet a aussi favorisé la création d'une multitude de nouveaux emplois qui étaient inimaginables avant sa création. Je dirais qu'Internet est un exemple, bien que le débat qu'il a suscité à ses débuts était plus nuancé.
    Monsieur McKelvey, allez‑y.
    Je vais donner un exemple canadien, le BlackBerry. À l'époque où j'étais employé, mes patrons se baladaient avec leur BlackBerry et je les trouvais très cool. En fait, cette technologie a suscité l'espoir d'une vaste connexion et a transformé la dynamique et le rythme du travail. J'allais justement en parler dans mes commentaires. Je pense aussi qu'elle a donné lieu à un autre changement, parce que lorsqu'on pense à Internet, nous nous imaginons assis devant un ordinateur en train de réfléchir, alors que nous sommes en train de nous tourner vers un environnement mobile.
    Au sujet de l'impact de l'intelligence artificielle, je pense notamment à la nouvelle caméra de Google qui est capable de supprimer des gens de ses images. Le débat à propos que tout ce que la technologie devrait nous permettre de faire nous rappelle à quel point la technologie mobile et les téléphones mobiles ont eu une incidence sur la main-d'œuvre. Ce phénomène a été analysé au Canada.
    Pour donner suite à ce que M. McKelvey vient de dire, Internet et le BlackBerry sont deux excellents exemples. L'arrivée de ces deux technologies a‑t‑elle suscité le même degré d'inquiétude concernant le droit à la vie privée, par exemple, comparativement à celui suscité par l'intelligence artificielle dont nous discutons en ce moment?
    Je réfléchissais justement à cela. Dans les premiers jours de l'émergence des entreprises point-com, nous ne pensions pas que leur essor ou leur influence serait aussi important. Si nous avons tiré des enseignements de cela, et je pense que nous pouvons... En fait, je suis venu ici pour tenter de vous faire comprendre que ces technologies ont été déployées d'une manière plus réfléchie.
    L'arrivée d'Internet a fait surgir cette idée de la connectivité et donné l'impression que cette technologie allait combler les fossés numériques. Certaines de ces préoccupations liées à la protection de la vie privée ont donc disparu.
    En revanche, ces préoccupations ont pris beaucoup plus d'importance aujourd'hui, en raison notamment de la technologie mobile et de la capacité des téléphones mobiles à jouer un rôle assez sophistiqué dans le réseau de détection et de surveillance des publicités. J'espère que nous avons tiré des leçons de nos débats et des défis que pose la gouvernance des plateformes. Prenons l'exemple de l'initiative de détection du piratage lancée par OpenAI. C'est un genre de stratégie que les entreprises adoptent de plus en plus. J'espère que nous sommes plus efficaces et plus rapides que par le passé pour sonner l'alarme au sujet de la protection de la vie privée et des données personnelles des utilisateurs.
    Je dois donner au BlackBerry le mérite qui lui revient. C'était un outil fantastique. Maintenant, je dois sans cesse relever mes courriels parce que j'ai été formé pour le faire. D'une certaine façon, je regrette de ne pas y avoir pensé avant.
    Merci beaucoup.
    Je vous remercie, monsieur Aitchison.
    Nous passons maintenant à M. Van Bynen. Vous avez cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je commence sans doute à réfléchir à mon âge, mais en voyant la transformation de la technologie dont parlait M. Aitchison, je ne peux m'empêcher de penser que Netflix a fait disparaître les magasins de vidéos, que Apple Music a fait disparaître les magasins de disques et de cassettes et qu'Uber a transformé l'industrie du taxi. Je pense à Zoom qui a remplacé les appels téléphoniques. La technologie a changé les comportements et les demandes des consommateurs. Je pense que ses répercussions sur la main-d'œuvre seront considérables.
    J'adresse ma première question à M. Frank. J'ai souvent pensé avec inquiétude que les organismes de réglementation réglementent en regardant dans le rétroviseur plutôt que vers le pare-brise, là où nous devrions concentrer toute notre attention. Cela pose le dilemme entre ce que nous pouvons prédire avec un degré raisonnable de certitude, et ce que nous ne pouvons pas prédire.
(1720)
    Il est très difficile de prédire à quoi ressembleront les technologies émergentes dans le futur. Si j'avais ce talent, bien entendu, je serais peut-être en train de jouer à la bourse, au lieu d'être ici en train de discuter avec vous.
    C'est un mystère. Vous pouvez vous appuyer sur les récents changements, les récentes dynamiques pour essayer de prédire ce qui s'en vient. En ce qui concerne la réglementation, dans un domaine où la technologie est si récente et où nous ne cessons de découvrir de nouvelles fonctions et applications — j'ai l'impression qu'on nous annonce quelque chose de nouveau et de fascinant toutes les deux semaines —, une bonne façon de procéder est d'inviter les représentants de l'industrie et les chercheurs à participer au débat sur la réglementation.
    Pour cela, je vous conseille de permettre aux experts d'exprimer leur point de vue confidentiellement, afin qu'ils puissent communiquer avec les législateurs en public et aussi en privé. Vous auriez ainsi une excellente occasion de comprendre ce qui s'en vient et d'essayer d'anticiper.
    Vous avez recommandé la mise en place d'un cadre décisionnel, en raison de l'incertitude étroitement liée à notre capacité de prévoir les changements technologiques. Quels facteurs ou principes devraient être inclus dans ce cadre?
    Il sera essentiel d'obtenir des opinions d'expert de la part des entités qui développent et déploient des plateformes. Par ailleurs, il est tout aussi important de consulter des gens éclairés qui se fondent uniquement sur des données empiriques relativement à l'utilisation de ces outils, car cela échappe parfois au contrôle des développeurs et des entreprises.
    À mon avis, il est très difficile d'obtenir ce genre de données, mais il y a des options qui pourraient être utiles pour voir comment les travailleurs modifient leur utilisation de la technologie en temps réel et comment les employeurs changent leurs exigences en matière de technologie en temps réel. Cela vous changerait des statistiques officielles du gouvernement sur la main-d'œuvre.
    À l'instar des États-Unis, le Canada est un pays diversifié. Selon vous, y a‑t‑il une grande différence entre l'impact de l'IA sur les travailleurs qui habitent dans de grands centres urbains comparativement à ceux qui vivent dans de petites villes ou de petites collectivités?
    Si nous pensons particulièrement à l'IA générative, je m'attends à ce qu'il y ait beaucoup de retombées positives pour les travailleurs qui résident actuellement dans les villes. Il sera difficile de faire en sorte que ces retombées économiques profitent également aux travailleurs des régions rurales. C'est parce que le travail réalisé pour les entreprises de technologie ou le travail de collecte de données — autrement dit, le travail lié aux technologies d'IA générative, mais aussi aux outils susceptibles d'être créés au moyen de ces technologies d'IA — est en grande partie accompli par des travailleurs qui ont tendance à vivre dans de grands centres urbains.
    L'accès aux données, à l'informatique et aux services d'IA requiert aussi beaucoup d'infrastructure. Par exemple, l'accès à Internet haute vitesse est évidemment très courant dans les villes. La situation s'améliore dans les collectivités rurales, mais pas partout. C'est un argument simple pour dire que si les esprits les plus brillants habitaient dans des collectivités rurales, ils se heurteraient quand même à des obstacles liés à l'infrastructure.
    Excellent.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Merci, monsieur Van Bynen.

[Français]

     Madame Chabot, vous disposez de deux minutes et demie.
    J'aurais bien aimé que mon temps de parole soit de cinq minutes, monsieur le président.
    Ma prochaine question est courte et s'adresse à M. McKelvey.
    Dans votre allocution d'ouverture, vous avez donné l'exemple des centres d'appels. Personnellement, je suis en contact avec de nombreux syndicats, et je dois dire que, en matière des télécommunications, c'est assez effarant. Il y a des réalités actuelles que je ne connaissais pas. On n'a qu'à penser à Bell, à Vidéotron ou à Telus; il y a une délocalisation, partout dans le monde, des centres d'appel. Cela pose un problème d'iniquité sur le plan des rapports et des conditions de travail.
    Quelles difficultés l'intelligence artificielle générative va-t-elle ajouter à tout cela?

[Traduction]

     Je dirais que mon expertise s'est toujours située essentiellement dans le secteur des télécommunications. Les discussions sur l'intelligence artificielle font ressortir un véritable virage vers l'automatisation. Je pensais qu'il y aurait plus de débats, mais dans mon examen des ouvrages publiés sur le sujet, j'ai constaté qu'on mettait l'accent sur l'automatisation, et ce, dans tous les aspects. Je pense que l'automatisation dans les centres d'appels avec les agents conversationnels fait partie intégrante de ce qui se fait déjà.
    Je crois notamment qu'il est important de tenir compte des voix qui viennent de la base et de celles des travailleurs qui ressentent l'impact direct de ces systèmes d'IA sur leur milieu de travail au quotidien. Je pense que c'était un aspect important de l'accent mis sur les centres d'appels. Pour ma part, à tout le moins, c'est ce que j'entrevoyais au niveau professionnel pour l'avenir.
(1725)

[Français]

    Nous allons espérer un avenir de qualité.
    Monsieur Frank, dans votre exposé, vous avez non seulement parlé des défis et des compétences, mais aussi des élèves en difficulté. Pour moi, il est important de comprendre si l'intelligence artificielle va être un atout ou un risque, particulièrement pour les élèves en difficulté. On le sait, il faut compter sur des humains pour soutenir ces élèves, tant sur le plan de leurs compétences, de leurs habiletés et de leurs difficultés.
    Comment l'intelligence artificielle touchera-t-elle ces élèves?

[Traduction]

    C'est une excellente question.
    On n'a pas effectué le même volume de recherches sur les mécanismes par lesquels les travailleurs acquièrent des compétences que sur l'IA et ses répercussions sur les compétences de la main-d'œuvre. La scolarité est certainement l'un des principaux mécanismes qui permettent aux gens d'acquérir des compétences avant d'entrer sur le marché du travail, mais je pense que l'intelligence artificielle est un outil qui aidera vraiment à la formation des élèves.
    Je vais vous donner un exemple simple. Je suis professeur. À l'heure actuelle, je dois répondre à chaque courriel de chaque étudiant qui a des questions qui nécessitent des précisions de ma part. Vous pouvez imaginer que si un outil d'intelligence artificielle regroupant certaines des précisions que mon assistant à l'enseignement ou moi-même fournissons pouvait être mis à la disposition des étudiants instantanément, en temps réel, à n'importe quelle heure de la journée, cela pourrait les aider à comprendre. Si des questions subsistaient, ils pourraient me les soumettre ou les transmettre à mon assistant à l'enseignement.
    L'autre chose que nous constatons, du moins dans les quelques études que j'ai vues qui sont en fait des essais contrôlés aléatoires, certains travailleurs ayant accès à l'IA générative et d'autres pas, c'est que l'effet le plus important de l'IA générative est d'amener le rendement des non-experts au niveau de celui des experts. Si cette observation s'appliquait dans divers cas, cela pourrait signifier que les élèves sous-performants pourraient atteindre le niveau des élèves très performants en ayant accès à ces outils. Cela pourrait être à l'origine d'une vaste dynamique ou d'excellents résultats, grâce auxquels tout le monde pourrait aspirer au même niveau d'excellence dans l'enseignement supérieur.

[Français]

    Madame Chabot, vouliez-vous ajouter un commentaire?
    J'aimerais bien poursuivre cette conversation, mais il ne me reste que 15 secondes. Je ne crois pas pouvoir en profiter,
    Merci.

[Traduction]

     Nous reviendrons à vous.
    Madame Zarrillo, vous avez deux minutes et demie. Je vous en prie.
    Merci.
    Je vais poursuivre dans la même veine avec M. Frank. Nous parlons depuis des décennies de la propriété intellectuelle et du fait qu'elle appartient à l'entreprise et pas nécessairement au travailleur. Elle est la propriété de la compagnie. On discute maintenant de la propriété cognitive. Une bonne partie des données qui sont déjà recueillies par les grandes organisations proviennent des idées, de la scolarité, des pensées et des opinions de personnes, et elles sont maintenant monétisées par quelqu'un d'autre.
    Je m'intéresse beaucoup à la façon dont nous protégeons la propriété cognitive des travailleurs, surtout maintenant, dans les situations où nous commençons à intégrer une grande partie de cette propriété cognitive dans des outils d'intelligence artificielle. Monsieur Frank, avez-vous une idée de la façon dont nous pouvons protéger les travailleurs en ce qui concerne leurs opinions, leur scolarité, leurs compétences, leurs connaissances et leurs talents?
     Je veux d'abord m'assurer de bien comprendre votre question. Voulez-vous parler de la protection de la propriété intellectuelle des travailleurs qui aident à créer ces algorithmes d'intelligence artificielle ou de la propriété intellectuelle des gens qui ont généré les données — et qui peuvent ou non être des employés de l'entreprise — qui ont été utilisées pour former l'algorithme d'intelligence artificielle?
(1730)
    Je veux parler du premier cas.
     Je ne pense pas nécessairement aux algorithmes, ces personnes faisant simplement leur travail. Elles répondent à des appels téléphoniques ou elles font simplement leur travail comme elles l'ont toujours fait, sauf que maintenant, ce travail pourrait servir à l'IA générative. Les pensées, les opinions, la propriété intellectuelle et la propriété cognitive des gens sont récupérées et monétisées par les sociétés. Comment pouvons-nous assurer la protection des travailleurs dans ce contexte?
    D'accord. Je comprends mieux.
    Je dirais que ce n'est pas nouveau pour l'IA, cette dynamique où les idées, les pensées et les perspectives des travailleurs sont transformées en IA. Cela s'apparente d'ailleurs aux perspectives des programmeurs qui construisent des sites Web de médias sociaux qui sont codées dans la programmation et intégrées dans le code derrière le site Web.
    Je dirais que ce sujet n'est pas nécessairement nouveau. Je pense que le fait d'avoir des travailleurs qui réfléchissent à ces questions — par exemple, la représentation et la façon dont nous tenons compte des différents points de vue — et d'intégrer les idées de ces gens dans le volet ingénierie de ces outils est vraiment efficace pour cette raison exactement.
    Une autre idée qui me vient à l'esprit est que les outils d'IA générative qui font beaucoup de vagues à l'heure actuelle, des choses comme ChatGPT et Midjourney pour la génération d'images, ne pourraient pas être produits ici avec mon ordinateur portable ou même avec les ordinateurs que j'ai dans mon laboratoire à l'université. Ce sont vraiment des choses qui exigent une collaboration entre des gens intelligents pouvant rédiger des codes très efficaces et qui dépendent d'énormes quantités de ressources du côté informatique et du côté de la formation. Je ne pense pas qu'un projet comme celui de ChatGPT aurait vu le jour sans la collaboration des gens intelligents qui s'occupent du codage et les ressources que l'entreprise peut consacrer à un projet comme celui‑là.
    Merci, madame Zarrillo. Nous reviendrons à vous, j'en suis sûr.
    Madame Gray, vous avez cinq minutes. Je vous en prie.
     Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins d'être ici aujourd'hui.
     Avant de poser mes questions, j'aimerais proposer la motion suivante:
Le Comité entreprend immédiatement un examen en cinq réunions de l'impact disproportionné de la taxe sur le carbone sur les personnes à faible revenu.
     La motion a été distribuée aux membres du Comité.
    Nous savons que la taxe sur le carbone a des répercussions sur les Canadiens vulnérables, parce qu'elle fait augmenter le coût de biens de base comme l'essence, le chauffage et l'épicerie. Le gouvernement libéral a admis qu'il doublait son plan de taxation du carbone, notamment en quadruplant la taxe sur le carbone imposée aux Canadiens. La pause temporaire annoncée par le gouvernement libéral pour la taxe sur le carbone sur le mazout domestique laissera de côté 97 % des Canadiens. Le Comité doit étudier comment la mise en œuvre de la politique du gouvernement sur la taxe sur le carbone fait augmenter le coût de la vie pour les personnes les plus vulnérables.
    Cela est tout particulièrement pertinent pour le Comité, son mandat étant de discuter des études qu'il peut faire et qu'il devrait prioriser. Notre mandat comprend les questions de sécurité du revenu et d'invalidité. La taxe sur le carbone a une incidence sur la sécurité du revenu en faisant augmenter le prix des produits de première nécessité. De plus, la hausse des coûts de la taxe sur le carbone a des répercussions sur les personnes les plus vulnérables de notre société, en particulier les personnes handicapées. Au cours de l'étude de la Loi sur la prestation canadienne pour les personnes handicapées, le Comité a entendu de nombreux témoignages selon lesquels les personnes handicapées avaient de la difficulté à se payer des biens de première nécessité. Nous avons même entendu parler de gens qui envisageaient l'aide médicale à mourir, l'AMM, parce qu'ils jugeaient qu'ils n'avaient plus les moyens de vivre. Tous ces témoignages ont eu lieu avant la plus récente augmentation de la taxe sur le carbone cet été.
    J'ai proposé cette motion. J'espère que le Comité l'appuiera.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci, madame Gray.
    Pour la gouverne des témoins, une députée a proposé une motion, ce qui est la prérogative des membres du Comité. Nous devons nous en occuper avant de reprendre les témoignages sur notre étude.
    Je crois comprendre que la motion est recevable.
    Allez‑y, monsieur Coteau, puis monsieur Fragiskatos. Je vous en prie.
(1735)
    Puis‑je dire une chose, monsieur le président? Nous pourrions peut-être avoir une idée de la durée du débat. Je ne sais pas s'il va prendre beaucoup de temps.
    Les témoins sont très occupés. Je ne veux pas qu'ils soient obligés d'attendre ici pendant 15 minutes ou une demi-heure, et que nous n'ayons plus de temps pour terminer ce que nous faisons.
    Monsieur le président, nous devrions simplement passer au vote.
     Je ne peux pas répondre à cette question. C'est totalement du ressort du Comité.
    La discussion porte sur la motion dont le Comité est maintenant saisi. Elle est recevable.
    Monsieur Fragiskatos, nous allons discuter de la motion.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le président, par respect pour notre collègue, Mme Chabot, qui était sortie, je me demande si vous pourriez simplement préciser qu'une motion a été présentée, même si je pense qu'elle sait où nous en sommes.
    C'est simplement pour que nous soyons sur la même longueur d'onde, étant donné qu'elle s'est absentée.
    Oui.
    Mesdames et messieurs les membres du Comité, Mme Gray a proposé une motion. Je vais demander au greffier de lire la motion dont nous sommes saisis.
    La motion est la suivante:
Le Comité entreprend immédiatement un examen en cinq réunions de l'impact disproportionné de la taxe sur le carbone sur les personnes à faible revenu.
    Y a‑t‑il des commentaires?
    Allez‑y, monsieur Fragiskatos. Je vous en prie.
    Je n'ai qu'un bref commentaire, monsieur le président.
    Cette question, ainsi que d'autres concernant la taxe sur le carbone, ont fait l'objet d'un long débat à la Chambre des communes. Elle continuera d'être longuement débattue par d'autres comités compétents de la Chambre. C'est pourquoi je pense que nous devrions faire en sorte que ce soit là que ces conversations se poursuivent.
    Nous n'appuierons donc pas la motion de Mme Gray.
     Ne voyant rien d'autre...
    Madame Zarrillo, allez‑y au sujet de la motion. Je vous en prie.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie de vos commentaires sur le mandat du Comité.
    Nous savons que de nombreuses familles et de nombreuses personnes ont du mal à joindre les deux bouts, et nous aimerions tous que la question de prestation canadienne pour les personnes handicapées soit réglée beaucoup plus rapidement.
    J'aimerais discuter d'une chose. En mars dernier, j'ai présenté une motion que je n'ai pas déposée. Je l'ai simplement envoyé au Comité. Je m'intéresse réellement aux crédits d'impôt. Où en sommes-nous au chapitre des crédits d'impôt? Comment pouvons-nous augmenter le revenu des gens?
    Selon moi, une chose est certaine, à savoir qu'il arrive souvent que les aînés et les personnes handicapées ne produisent pas de déclaration de revenus. Ils ne produisent pas leurs déclarations de revenus à temps, ce qui leur fait perdre leur SRG et une partie de leurs prestations de soutien du revenu. Au cours des deux dernières années, j'ai découvert qu'il y a des étudiants qui sortent de l'école et qui ne comprennent pas ce à quoi ils ont droit et quel soutien du revenu ils peuvent obtenir.
    Bien que je sois tout à fait d'accord pour essayer de comprendre comment nous pouvons augmenter le revenu des gens, je crains que la portée de cette motion soit limitée et qu'elle n'englobe que la taxe sur le carbone. J'aimerais que ce comité se penche sur cette question et que nous discutions peut-être de la possibilité d'examiner les mesures de soutien du revenu dont les personnes vulnérables ont besoin, les mesures de soutien du revenu auxquelles elles n'ont pas eu accès, les droits qu'elles n'ont pas utilisés et qui leur reviennent, mais auxquels elles n'ont pas eu accès en raison de différents obstacles, et peut-être même parce qu'elles n'ont pas produit de déclaration de revenus.
    Je pense notamment à la déclaration de revenus automatique, qui représenterait une excellente occasion d'augmenter le revenu de ces personnes.
    Même si j'aime l'esprit de la motion, je pense que nous devons avoir une discussion plus large sur la façon dont nous soutenons les personnes vulnérables dans ce pays.
    Je vais m'arrêter ici.
    Merci, madame Zarrillo.
    Madame Chabot, allez‑y au sujet de la motion. Je vous en prie.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je comprends ce que dit ma collègue du NPD, Mme Zarrillo. Toutefois, la motion de Mme Gray, telle qu'elle nous est présentée, demande à notre comité d'entreprendre une étude sur la taxe sur le carbone. Notre comité établit des liens avec les personnes à faible revenu, alors que d'autres comités font des liens avec d'autres domaines.
    Je suis en désaccord sur la motion de Mme Gray. Les considérations concernant la taxe sur le carbone, les avantages comme les désavantages, sont largement débattues. Je ne crois pas qu'il soit pertinent d'entreprendre cette discussion à notre comité.
    Merci.
(1740)

[Traduction]

    Je ne vois pas d'autres commentaires.
    Monsieur le greffier, pourrions-nous avoir un vote par appel nominal sur la motion dont le Comité est actuellement saisi?
    (La motion est rejetée par 7 voix contre 4.)
    Le président: Nous allons revenir aux témoignages.
    Madame Gray, vous avez quatre minutes et demie. Je vous en prie.
     Merci, monsieur le président.
    C'est vraiment malheureux, étant donné que les gens souffrent beaucoup, mais je vais passer aux questions que j'ai pour les témoins aujourd'hui.
    J'ai la même question pour les deux témoins. J'aimerais savoir ce que vous pensez de cela. Les États-Unis viennent de publier leurs règles en matière d'intelligence artificielle. Je me demande si vous avez eu l'occasion de les passer en revue. Plus précisément, croyez-vous qu'il y a un avantage à ce que le Canada harmonise éventuellement ses règles avec celles des États-Unis, et peut-être d'autres pays, comme ceux de l'Union européenne? J'aimerais avoir votre avis là‑dessus.
    Nous pourrions peut-être commencer par M. Frank.
    Bien sûr. Merci.
    C'est une bonne question. Je n'ai pas examiné tous les détails du décret de l'administration Biden. Je sais qu'on s'inquiète beaucoup des emplois, de la protection des données, de la propriété intellectuelle et de ses détenteurs. Je pense qu'il y a un grand risque que chaque pays ait sa propre réglementation pour chacune de ces dimensions, ce qui créerait un véritable problème rendant inefficaces les règlements de tous les pays.
    Ce qu'il y a avec l'IA, c'est qu'elle est numérique, alors il est facile d'expédier des données d'un pays à n'importe quel autre endroit dans le monde, d'utiliser ces données dans un système d'IA et d'expédier les résultats ou même la base de codage de l'IA proprement dite. Le partage au‑delà des frontières est facile.
    Je pense qu'il serait beaucoup plus efficace que les pays collaborent pour s'entendre sur un ensemble normalisé de règlements portant sur toutes les dimensions qu'ils jugent préoccupantes.
     Merci.
    Je vais demander à M. McKelvey de répondre également.
    Oui, j'ai pu examiner cela brièvement, mais pas en profondeur. Je dirais que cela montre certainement les lacunes évidentes que je vois dans l'approche du Canada à l'égard de la Loi sur l'intelligence artificielle et les données. On constate un traitement beaucoup plus complet des préjudices potentiels et une volonté de s'engager dans les enjeux sectoriels liés à l'intelligence artificielle. Je pense que c'est un document qu'il vaut la peine d'étudier, simplement pour comprendre la complexité des défis auxquels font face les organismes de réglementation et les législateurs... et ensuite, par rapport à la loi.
    Je suis d'accord avec M. Frank pour dire qu'il faut probablement une approche harmonisée. Le Canada est très actif à cet égard, dans une certaine mesure, que ce soit en participant à un partenariat mondial sur l'IA ou à certains accords bilatéraux avec la France ou le Royaume-Uni. Je pense qu'il y a un débat concernant la nécessité pour le Canada de se positionner dans les cas où, à tout le moins — et je sais qu'il y a des efforts de discussion de traités avec l'UE au sujet de l'intelligence artificielle —, cela fonctionne en parallèle avec les États-Unis.
    La seule chose que je dirais, c'est qu'avec le projet de loi C‑27 et la Loi 25 du Québec, je pense qu'il y a un grand test de conformité au Règlement général sur la protection des données. En réalité, lorsqu'il est question de notre programme législatif en matière d'intelligence artificielle, ce qui devrait être à l'avant-plan, c'est la compréhension de ce qui se passe en Europe au sujet des dispositions législatives sur l'intelligence artificielle, ainsi qu'avec les États-Unis dans une moindre mesure, bien que je salue ce que ce décret a permis d'accomplir.
(1745)
    Excellent. Merci.
    Vous avez répondu en partie à la question suivante que j'allais poser.
    Je vais donc la poser à M. Frank.
    Comment cela pourrait‑il s'intégrer, selon vous, dans le cadre de futures négociations commerciales? Y a‑t‑il des problèmes commerciaux dont nous devrions être au courant maintenant — des effets pouvant nuire à la compétitivité du Canada?
    Vous n'avez qu'une minute pour répondre, alors qu'en pensez-vous?
     Rapidement, je dirais qu'il y a une préoccupation au sujet d'une consolidation du pouvoir à l'heure actuelle; il n'y a qu'une poignée d'entreprises qui sont en mesure de construire ces systèmes d'intelligence artificielle très puissants.
    D'un autre côté, dans les négociations commerciales, une chose qui me préoccupe, c'est que les données d'une population peuvent être utilisées pour entraîner des logiciels dans un autre pays.
    Il sera important de trouver des moyens de permettre aux gens de faire partie d'une société mondiale connectée, mais aussi de protéger les intérêts d'une population contre la mauvaise utilisation par une entreprise située ailleurs, qui fonctionne selon un ensemble différent de règles.
    Merci, madame Gray.
    Monsieur Kusmierczyk, vous avez cinq minutes. Je vous en prie.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur excellente et instructive conversation sur ce sujet important.
    Monsieur Frank, nous parlons de l'impact de l'intelligence artificielle sur les travailleurs et la main-d'œuvre. Comment allons-nous mesurer cet impact sur les travailleurs et comment allons-nous évaluer les répercussions dans les divers secteurs?
    J'adore cette question, sur laquelle je me suis beaucoup penché.
    La recherche sur l'automatisation fait beaucoup appel à la notion d'« exposition ». Les travailleurs sont exposés ou les tâches sont exposées à l'IA. La définition d'« exposition » ne suscite pas beaucoup d'engagements. C'est parce que certains travailleurs sont libérés par la technologie pour faire d'autres tâches qui complètent l'intelligence artificielle, de sorte qu'ils deviennent plus productifs et plus utiles avec l'intelligence artificielle. Dans un cas extrême, où de nombreuses tâches sont automatisées par l'IA, il se peut que celle‑ci se substitue complètement au travailleur, ce qui aura un résultat négatif pour lui.
    Je pense que nous devons être plus précis que de simplement dire qu'un travailleur ou une tâche sera exposé à l'avenir. Pour ce faire, il faut obtenir des données sur la façon dont les ensembles de compétences évoluent en réponse à l'introduction de l'IA. Lorsqu'un nouvel outil voit le jour, dans un monde idéal, nous devrions avoir des données qui reflètent ce que chaque travailleur fait tout le temps.
    Bien sûr, il y a beaucoup de préoccupations liées à la protection de la vie privée, mais pour les besoins de la conversation, imaginons ce monde idéal. Nous aurions de très bons renseignements sur les changements qui surviennent lorsqu'un nouvel outil est offert à un travailleur. Vous pouvez même imaginer de petites expériences naturelles de randomisation pour déterminer qui a accès à une technologie et qui n'y a pas accès. Cela pourrait mener à la compréhension de l'impact des changements technologiques.
    Ce serait l'idéal, mais je pense qu'il y a des choses qui sont très près de l'idéal et qui seraient aussi très utiles.
    Je suis beaucoup plus familier avec les statistiques sur la main-d'œuvre disponibles aux États-Unis qu'au Canada. Ceux d'entre vous qui ont lu mon mémoire l'ont probablement remarqué très rapidement.
    Les dynamiques du travail très importantes, comme les taux de cessation d'emploi ou le chômage, ne sont généralement pas décrites par industrie, par entreprise ou par titre d'emploi. De toute évidence, le fait d'aborder ces concepts à un niveau plus précis permettrait un rapprochement avec les conséquences des changements dans les compétences, ainsi que des interventions stratégiques plus proactives — pas seulement au niveau de l'intelligence artificielle, mais de toute perturbation du travail à l'avenir.
     Habituellement, lorsque nous examinons l'impact de la technologie sur l'industrie, par exemple, nous examinons, disons, l'impact sur le revenu. Nous constatons aussi, comme vous l'avez dit, un tel impact sur le chômage, les pertes d'emplois et ainsi de suite. Ce sont des instruments très directs, n'est‑ce pas?
    Ai‑je raison de dire que cela ne brosse pas un tableau complet de l'incidence de l'IA sur le milieu de travail?
     Oui, vous avez tout à fait raison. Dans le contexte américain, du moins, je peux montrer qu'il y a des changements dans la probabilité de recevoir des prestations de chômage ou des changements dans les taux de cessation d'emploi, du moins en ce qui concerne les estimations tirées de mes recherches, qui ne comportent pas une corrélation très grande avec les changements dans la part de l'emploi pour une profession au sein d'un État.
    Je pense qu'il y a des preuves qui montrent que l'examen des changements dans l'emploi et les salaires ne tient pas compte d'autres dynamiques qui peuvent se produire et, en particulier, de la dynamique particulièrement négative qui nous inquiète le plus avec l'IA.
    Merci, professeur.
    J'ai une question pour M. McKelvey.
    Un sommet vient de prendre fin ici, sur la Colline du Parlement, le Sommet canadien pour les aidants. Huit millions de Canadiens sont des proches aidants, et beaucoup d'entre eux font cela gratuitement. Nous avons aussi une grande partie de notre économie qui est consacrée à la prestation de soins rémunérés et qui est constituée des infirmières, des préposés aux services de soutien à la personne, des soins à domicile, de la garde d'enfants et ainsi de suite.
    Je voulais vous demander si vous pouviez nous dire comment l'intelligence artificielle pourrait avoir une incidence sur la prestation des soins au Canada. Si vous n'êtes pas en mesure de nous parler de cela en particulier, quelles questions pourrions-nous poser pour déterminer l'incidence potentielle de l'IA sur la prestation des soins au Canada?
(1750)
    Évidemment, ce n'est pas mon domaine d'expertise, mais je dirais que j'ai été amené à participer à certaines discussions à ce sujet, parce qu'à Montréal, il y avait une proposition d'introduire un robot dans un foyer pour personnes âgées pour prendre soin d'elles. Cela m'a amené à faire enquête sur les effets de cette mesure.
     Le meilleur endroit avec lequel établir un parallèle est le Japon. Je pense qu'il y a eu beaucoup d'efforts pour automatiser la prestation des soins au Japon, mais cela n'a pas été efficace dans l'ensemble, parce que l'entretien de bon nombre de ces technologies coûte aussi cher que l'octroi des ressources nécessaires aux fournisseurs de soins en place.
    Je pense qu'il y a une sorte de changement de valeurs, où, encore une fois, on cible les répercussions culturelles de l'intelligence artificielle. On pense que la technologie sera plus efficace que de simplement payer une infirmière ou un soignant pour une fonction. Je dirais que, d'après tout ce que j'ai vu, les avantages sont surestimés par rapport au potentiel, et aussi, vraiment, il s'agit de quelque chose qui doit s'inscrire dans un système de soins holistique plus vaste, qui évalue même les types d'avantages — et je ne nie pas qu'il y en a —, en veillant à ce qu'il y ait des ressources adéquates pour appuyer nos fournisseurs de soins de première ligne essentiels.
    Merci, monsieur Kusmierczyk.
    Madame Falk, vous avez cinq minutes. Je vous en prie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je sais que, par le passé, le Comité a mené une étude sur le travail précaire. Le travail précaire est en croissance et, en fait, il est très répandu.
    Je crois que c'est vous, professeur McKelvey, qui avez mentionné le mot « précaire », alors j'ai pensé vous poser la question suivante: pensez-vous que le travail précaire deviendra plus répandu, plus courant, lorsque nous verrons l'intelligence artificielle se développer ou peut-être même être absorbée par les entreprises?
    Compte tenu de mes faibles capacités de prévision, je ne peux pas établir de corrélation directe entre une augmentation du travail précaire et l'intelligence artificielle.
     Je dirais que là où nous verrons un effet important, et là où nous voulons nous occuper des répercussions de l'intelligence artificielle, c'est dans le cas des travailleurs précaires et des travailleurs à la demande, parce que nous savons que ce sont ces travailleurs qui sont déjà assujettis à la gestion algorithmique, qui sont déjà soumis à de nouvelles formes de surveillance en milieu de travail et, au bout du compte, qui ont des ententes complexes en matière de données avec leurs fournisseurs de plateformes, qui essaient souvent de trouver des façons de les diriger.
    L'autre aspect, je dirais, c'est que si nous envisageons de passer à des environnements plus hybrides et de changer la façon dont les organisations sont conçues, je pense qu'il y a certainement une tendance à essayer de créer plus de services sur demande, ce qui entraîne, potentiellement, une sorte de relation précaire à cause du type de travailleur à la demande. J'ai l'impression que ce qui est en partie à risque ici, c'est que les plateformes changent aussi la façon dont la main-d'œuvre se réorganise, ce qui pourrait donner lieu à plus d'interchangeabilité dans l'emploi. Le risque serait différent, parce que les gens seraient majoritairement des entrepreneurs.
     Diriez-vous que les législateurs devraient tenir compte spécifiquement des travailleurs précaires?
(1755)
    Oui. Définitivement. J'ai parlé plus tôt du pouvoir de négociation asymétrique. Si vous regardez les plateformes de médias sociaux en ligne, vous constaterez de réels déséquilibres dans les données. Nous avons des tonnes de preuves selon lesquelles les travailleurs essaient d'assujettir les créateurs de contenu en ligne à la façon dont les plateformes fonctionnent et modifient leurs analyses de données. Cela montre vraiment que le milieu de travail est très concrètement précaire, les solutions populaires qui y sont utilisées pouvant changer du jour au lendemain.
    Je pense que cela témoigne de la croissance d'une partie de la main-d'œuvre, mais aussi des répercussions réelles que cela peut avoir. Si vous faites affaire avec une entreprise qui s'oriente vers des formes plus dynamiques de gestion, au moyen de stratégies émergentes en matière d'intelligence artificielle, cela crée certainement des conditions de précarité.
     Merci.
    Je sais que le Comité a entendu parler de la pénurie de main-d'œuvre dans tous les secteurs industriels au Canada — et j'en ai certainement entendu parler dans mon bureau en tant que députée, comme tous les autres députés, j'en suis sûre. Peu importe le secteur — on recherche du personnel et on ne peut pas en trouver.
    Rapidement, je m'adresse à vous deux, parce que je n'ai plus beaucoup de temps. Croyez-vous qu'il y aura des industries qui seront plus susceptibles de perdre des emplois en raison de l'intelligence artificielle? De plus, comment les industries peuvent-elles se préparer à cela?
    Je peux commencer.
    Oui, je pense que l'impact de l'IA générative et de toute autre technologie sera biaisé et se fera davantage sentir dans certaines industries. Il ne s'agira habituellement pas d'un impact général sur l'ensemble de l'économie. Dans le cas de l'IA générative, j'imagine que nous verrons beaucoup de progrès qui sont une aubaine pour les travailleurs et une aubaine pour le capital dans la technologie, mais nous verrons aussi de nouvelles possibilités découlant de ces nouveaux outils, qui ne sont pas nécessairement liées au développement, comme dans les domaines de la médecine, des communications et des médias.
    Je pense que beaucoup de retombées ne se sont pas encore matérialisées. Beaucoup de gens travaillent à cela, et je m'attends à ce qu'ils obtiennent des résultats.
    Nous allons terminer avec M. Fragiskatos, Mme Chabot et Mme Zarrillo. Nous avons perdu un peu de temps avec la motion, alors c'est juste pour tout le monde.
    Monsieur Fragiskatos, vous avez cinq minutes. Je vous en prie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci aux deux témoins qui sont parmi nous aujourd'hui.
    Je vais vous poser à tous les deux la même question. C'est une question très générale. J'aime bien procéder ainsi, parce que cela aide à résumer ce que nous avons entendu des témoins, surtout lorsque le sujet est vaste et très important au chapitre de la politique publique. De toute évidence, nous nous penchons sur l'intelligence artificielle en ce qui concerne précisément la main-d'œuvre, mais il y a de nombreuses façons de l'envisager.
    Quelles sont les parties les plus importantes de votre témoignage à retenir? À votre avis, quels sont les éléments clés que le Comité devrait garder à l'esprit lorsqu'il se penchera sur cette question et lorsqu'il formulera des recommandations au gouvernement sur la voie à suivre?
    Premièrement, il faut tenir compte de cela dans le contexte du projet de loi C‑27 et de la façon dont nous essayons de comprendre la protection de la vie privée et les données. Ce qui est vraiment important maintenant, c'est de reconnaître notre pouvoir en matière de données. L'intelligence artificielle démontre que de grandes quantités de données peuvent être recueillies et qu'il est possible de mobiliser ces données. En réalité, il s'agit d'essayer de considérer les dispositions législatives sur la protection des renseignements personnels et les données comme ayant une portée plus large que les préoccupations traditionnelles au sujet des renseignements personnels. Il s'agit d'un changement important dont nous avons été témoins, qui se concrétise maintenant.
    Je pense que la deuxième chose, c'est d'essayer de comprendre ces effets inégaux et disparates. Nous allons certainement entendre de nombreux témoignages sur les avantages de l'intelligence artificielle. Je pense qu'il incombe au gouvernement de comprendre et de protéger les travailleurs marginalisés et précaires qui pourraient ne pas bénéficier de ces avantages.
    Cela fait certainement partie de ce qui se passe avec l'IA générative. Nous essayons de comprendre quelque chose qui se situe dans une classe à part. C'est pourquoi on accorde autant d'attention à cela en ce moment. Il s'agit d'une catégorie différente de travailleurs, généralement des cols blancs, qui pourraient maintenant faire face à une plus grande concurrence de la part des solutions automatisées. Cela ne veut pas dire que les effets seront faciles à prévoir, mais cela signifie également que nous constatons un changement marqué. Il faut en tenir compte dans la façon dont nous allons comprendre cette relation avec l'intelligence artificielle et le marché du travail.
    Enfin, il s'agit de veiller à ce que nous ayons de solides protections pour les travailleurs et à ce que cela fasse partie de notre programme législatif.
(1800)
     Merci beaucoup.
    Je vais poser la même question à l'autre témoin. Qu'est‑ce que vous voulez que notre comité garde à l'esprit, parmi toutes les choses très importantes que vous avez soulevées ici aujourd'hui?
    Je dirais que la partie la plus importante de mon témoignage est que, si vous vous sentez pris de court ou surpris par ce que l'intelligence artificielle peut faire en ce moment, vous n'êtes pas les seuls. Le milieu de la recherche, les économistes, les informaticiens, tous ces gens ont vraiment été surpris par les exemples récents d'intelligence artificielle générative. La raison pour laquelle nous sommes surpris, c'est que les outils, les données et le cadre que nous avons utilisés pour réfléchir à l'IA et à l'avenir du monde du travail, du moins dans mon cas, sont de toute évidence désuets. Ils ne sont pas assez dynamiques pour tenir compte de ce que l'IA générative peut faire.
    À l'avenir, je suggérerais que les données utilisées par les décideurs et les chercheurs soient adaptées, afin que nous puissions mieux réagir à ce que fait réellement l'IA et mieux préparer les travailleurs qui sont directement touchés par l'IA, grâce à ces données améliorées. Des données sur les compétences, à mon avis, aideraient beaucoup à éclairer l'élaboration des politiques et la recherche.
    Notre président me dit que j'ai le temps de poser une autre question. En fait, la question n'est pas la mienne. C'est plutôt celle de mon collègue, M. Van Bynen, qui voulait des précisions sur ce qu'on entend par « gestion algorithmique ». Ce serait utile aux fins du compte rendu.
    La gestion algorithmique est un terme général pour parler des différents types de techniques d'utilisation des ordinateurs et de l'intelligence artificielle, de l'analyse prédictive, pour gérer l'horaire des travailleurs, pour parler de leur rendement, pour les évaluer et pour leur attribuer des tâches. Je pense qu'Uber est un bon exemple de gestion algorithmique, et cela est lié aux programmes de surveillance des employés ou aux types de systèmes rattachés aux ressources humaines qui surveillent et évaluent le rendement des travailleurs.
    L'un des autres exemples que je connais, c'est que, si vous êtes un travailleur à la demande ou un pigiste, vous devez souvent installer un logiciel de suivi qui prend des captures d'écran de votre productivité sur une certaine période. Cela décrit globalement ce dont je parle. Il s'agit simplement de nouvelles formes plus invasives de surveillance des travailleurs et de surveillance en milieu de travail, et cela est en partie lié aux formes de données utilisées pour gérer les travailleurs.
    Merci, monsieur Fragiskatos.

[Français]

     Madame Chabot, vous avez deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse aux deux témoins. Je devrais pouvoir obtenir des réponses brèves.
    L'étude que nous sommes en train de faire vise particulièrement l'incidence de l'intelligence artificielle sur la main-d'œuvre. On pourrait aussi se demander si ces technologies ont une plus grande incidence sur les femmes et les personnes en situation de handicap et si cela les discrimine.
    À cette étape de notre étude, si vous aviez une ou deux recommandations à nous faire, quelles seraient-elles, monsieur Frank?

[Traduction]

     Je vous recommanderais de chercher de l'information empirique de qualité et détaillée sur les travailleurs qui subissent des perturbations en raison de l'IA, sur ce à quoi ces perturbations ressemblent exactement et, par conséquent, sur ce que cela signifie pour leur sécurité d'emploi et leur capacité de trouver un nouvel emploi si c'est le genre de perturbations auxquelles ils font face.

[Français]

    Qu'en pensez-vous, monsieur McKelvey?

[Traduction]

    Brièvement, j'aimerais mentionner une étude du Centre des travailleurs et travailleuses immigrants de Montréal, qui examine les applications de la gestion algorithmique dans la gestion des entrepôts. Je pense qu'il est important d'entendre le point de vue des travailleurs et de ceux qui sont touchés par cela pour comprendre la situation et essayer de suivre ce qui se passe. Pour approfondir la question, il faut développer des capacités et surveiller le développement technologique par l'entremise de quelque chose du genre de l'Office of Technology Assessment, comme les États-Unis l'ont fait auparavant, pour essayer de renforcer les capacités, afin de comprendre ces répercussions.

[Français]

    Monsieur Frank, je vais vous poser une question au sujet des données, parce que je veux être certaine de vous avoir bien compris.
    Dans votre témoignage, vous avez dit qu'on avait besoin de plus de données. Cela faisait aussi partie de vos recommandations.
    Vous avez aussi dit que le chômage nous donnera plus de données, si j'ai bien compris ce que vous vouliez dire. Or cela m'inquiète un peu. Je veux bien qu'on utilise la technologie pour effectuer certaines tâches, mais pas pour remplacer des employés. Si cela met en jeu des emplois, à notre avis, ce ne devrait pas être une solution.
    J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Quand on utilise une nouvelle technologie, ne devrait-on pas viser la requalification plutôt que le chômage?
(1805)

[Traduction]

     Je ne voulais pas dire que le chômage est une solution. À titre de précision, ce que je voulais dire, c'est qu'il est souvent difficile de savoir pourquoi il y a du chômage. Vous pourriez constater une hausse du chômage dans une certaine province du Canada et vouloir comprendre pourquoi cela se produit, ce qui n'est pas toujours si facile. Il faut explorer d'autres sources de données pour mieux comprendre exactement quelles industries ou quels travailleurs en particulier sont au chômage.
    Le fait d'avoir des données sur le chômage qui vous donnent une idée des personnes qui subissent ce niveau de perturbation sera très utile pour élaborer une réponse proactive. À mon avis, c'est en comprenant mieux les estimations de la probabilité que les travailleurs se retrouvent au chômage, compte tenu du marché du travail dans lequel ils se trouvent, de leur titre de poste... J'imagine que d'autres facteurs jouent également un rôle. Par exemple, leur niveau de scolarité et peut-être leur ethnicité et leur sexe seraient des variables supplémentaires intéressantes à avoir — mais en les considérant comme des risques de chômage, en fonction de l'endroit où se situent les travailleurs dans l'économie.
    Merci.

[Français]

     Merci, madame Chabot.

[Traduction]

    Pour conclure, nous avons Mme Zarrillo pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Je veux présenter de nouveau ma motion aujourd'hui. Je vais le faire rapidement et il me restera peut-être un peu de temps à la fin.
    Cela concerne les personnes handicapées et leur expérience avec Air Canada. Je suis sûre que, depuis lundi, nous avons tous vu le reportage de Marketplace.
    Je veux proposer l'étude de la motion suivante. Je propose:
Que, compte tenu des nombreux rapports récents faisant état de personnes handicapées victimes de discrimination et de traitements inacceptables lorsqu'elles voyagent avec Air Canada, et qu'Air Canada a admis avoir violé la réglementation canadienne sur les personnes handicapées, que, conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées invite dès que possible le PDG d'Air Canada, Michael Rousseau, à se présenter devant le Comité pendant au moins une heure, afin d'expliquer ces violations relatives aux personnes handicapées et la façon dont ils vont corriger la situation; qu'un rapport de cette réunion soit préparé et présenté à la Chambre; et que, conformément à l'article 109 du Règlement, le gouvernement dépose une réponse globale au rapport et explique comment il entend remédier à la situation.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, madame Zarrillo.
    Le greffier m'informe que la motion est recevable.
    Le Comité souhaite‑t‑il adopter la motion?
    (La motion est adoptée.)
    Le président: La motion est adoptée à l'unanimité, madame Zarrillo, et il vous reste encore deux minutes. Je vous en prie.
    Merci beaucoup.
    Ma question s'adresse à M. McKelvey.
    Vous avez beaucoup parlé du projet de loi C‑27. La question est très vaste. Je me demande si vous pensez que le volet main-d'œuvre, le volet travailleurs, de l'intelligence artificielle devrait avoir sa propre loi autonome, ou si vous pensez que les travailleurs seront dûment protégés dans le projet de loi C‑27.
    Je dirais deux choses brièvement. Le projet de loi C‑27 prévoit des exemptions importantes relativement aux types de données qui peuvent être recueillies, à savoir qu'elles doivent être anonymisées ou qu'elles doivent correspondre à des besoins légitimes commerciaux. J'ai l'impression que cela mérite qu'on se penche davantage sur ce que cela implique et sur les répercussions possibles sur les travailleurs.
    Deuxièmement, en réalité, ce que ces exemptions font... Elles sont renforcées par la LIAD — la Loi sur l'intelligence artificielle et les données, qui vient à la fin —, ce qui suscite des préoccupations importantes, car cela confère beaucoup de pouvoirs d'enquête à un commissaire aux données dont le rôle est vaguement défini. En fait, j'ai l'impression qu'une partie de la tâche, avant le programme législatif, consiste à passer de l'intelligence artificielle comme simple stratégie économique à une réflexion sur des façons d'atténuer les répercussions sociales négatives et positives qu'elle peut avoir.
    Oui, je pense qu'il serait avantageux de trouver des façons d'aborder les répercussions sur les travailleurs et de veiller à ce qu'il y ait une loi ciblée, car je pense que ce n'est pas quelque chose qui sera abordé dans un projet de loi omnibus.
    Merci beaucoup. Je vais considérer cela comme une deuxième mesure législative nécessaire.
    Je veux simplement demander... Vous avez mentionné Uber. Y a‑t‑il une ou deux questions à ce sujet que vous recommanderiez au Comité d'aborder dans le cadre de cette étude?
(1810)
    Je n'ai pas le nom des entreprises en tête, mais je me tournerais vers certaines entreprises de ressources humaines qui fournissent certains de ces services de gestion. Je pense que cela fait partie de... Je serais heureux de... s'il y a une façon de faire des commentaires, mais je pense qu'il est intéressant d'examiner ce que les entreprises essaient de faire pour intégrer l'intelligence artificielle dans les ressources humaines. Il y a une forte expansion de l'industrie dans ce cas, alors je pense qu'il serait vraiment utile d'entendre comment ces types d'outils sont mis au point, mais je n'ai pas le nom des entreprises en tête — toutes mes excuses.
     Merci, madame Zarrillo.
    Monsieur McKelvey et monsieur Frank, si vous voulez fournir une réponse écrite à la question de Mme Zarrillo sur les entreprises qui pourraient intéresser le Comité, vous pouvez la transmettre au greffier du Comité.
    Sur ce, je tiens à vous remercier tous les deux d'avoir comparu devant le Comité aujourd'hui et de nous avoir présenté des témoignages très instructifs sur ce nouveau sujet dont il sera question pendant un certain temps.
     Nous allons terminer cette partie de la réunion. Nous allons suspendre la séance pendant quelques instants, puis nous reprendrons à huis clos pour discuter des travaux du Comité.
    Monsieur McKelvey et monsieur Frank, vous pouvez quitter Zoom si vous le souhaitez. Encore une fois, merci beaucoup.
    La séance est suspendue.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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