:
La greffière m'a indiqué que nous avions le quorum. Je déclare la séance ouverte.
Bienvenue à la 41e réunion du Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées de la Chambre des communes. La réunion d’aujourd’hui se déroule de nouveau en mode hybride, conformément à l’ordre de la Chambre du 23 juin 2022. Les gens participent en personne et à distance par le biais de l’application Zoom.
Pour assurer le bon déroulement de la réunion, je vais adresser quelques observations à l’intention des témoins et des membres du Comité. Avant de parler, veuillez attendre que je vous donne la parole en citant votre nom. Celles et ceux qui participent virtuellement sont invités à cliquer sur l’icône de main levée. Avant de parler, cliquez sur l’icône du microphone pour activer votre micro. L'agent des délibérations et de la vérification gérera les micros des personnes dans la salle, et la greffière et moi administrerons l’ordre des interventions. Nous vous remercions de votre patience et de votre compréhension à cet égard.
Vous pouvez vous exprimer dans la langue officielle de votre choix. Si l'interprétation est interrompue, veuillez me le signaler. Nous suspendrons alors la séance, le temps de corriger la situation. Je rappelle à tous les participants qu'ils ne doivent pas faire de saisie d’écran en cours de réunion.
Conformément à l’ordre adopté le mardi 18 octobre 2022, le Comité entreprend son étude du projet de loi , Loi visant à réduire la pauvreté et à assurer la sécurité financière des personnes handicapées en établissant la Prestation canadienne pour personnes handicapées et modifiant la Loi de l’impôt sur le revenu en conséquence.
Je vais prendre un moment pour rappeler aux participants ainsi qu’aux personnes qui suivent nos délibérations dans la salle ou par vidéoconférence, que, le 24 octobre, le Comité a adopté une motion comprenant des instructions à l’intention de la greffière pour qu’elle examine les options susceptibles de permettre à tous les témoins et aux membres du public de participer pleinement à l’étude du projet de loi . Dans sa planification de réunions inclusives et accessibles, le Comité a pris des dispositions pour assurer l’interprétation gestuelle en langues des signes, américaine et québécoise, pour les témoins qui comparaissent en personne et par Zoom, ainsi que pour les membres de notre auditoire. Les interprètes gestuels sont enregistrés sur vidéo aux fins d'intégration à l’enregistrement vidéo archivé des délibérations. L'enregistrement en question, qui sera disponible plus tard sur ParlVU, sera accessible par l’entremise du site Web du Comité. Afin d'aider les interprètes dans leur travail, je demande à tous les députés et aux témoins qui comparaissent aujourd’hui de se présenter à chaque prise de parole et de s'exprimer lentement.
Enfin, si un membre de l’auditoire a besoin d’aide, et cela n'importe quand, qu'il en en avise un membre du personnel ou la greffière.
Je souhaite informer tous les membres du Comité que les témoins qui comparaissent virtuellement aujourd’hui ont terminé le test technique pour vérifier la qualité de leur connexion et de leur équipement, ainsi que du son de l’interprétation dans les deux langues officielles.
Je souhaite la bienvenue à nos témoins. Nous allons commencer notre discussion par une déclaration liminaire de cinq minutes.
Nous avons le plaisir d’accueillir l’honorable Carla Qualtrough, ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et de l’Inclusion des personnes handicapées, ainsi qu’Alexis Conrad, sous-ministre adjoint principal, Direction générale de la sécurité du revenu et du développement social et Horizons de politiques Canada. Nous accueillons virtuellement Krista Wilcox, directrice générale du Bureau de la condition des personnes handicapées.
Nous allons commencer par la ministre Qualtrough qui aura cinq minutes, après quoi nous passerons aux questions des membres du Comité.
Oui, madame Gray, je vous écoute.
[Français]
Je salue les membres du Comité.
J'aimerais remercier le Comité de ses travaux, qui visent à créer un pays plus inclusif pour les personnes en situation de handicap. Je remercie aussi tous les partis d'avoir appuyé le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture.
[Traduction]
Chers collègues, vous avez devant vous un projet de loi vraiment clair, dans son objectif et son format. Le projet de loi permettrait de créer la Prestation canadienne pour les personnes handicapées, un supplément au revenu mensuel créé sur le modèle du Supplément de revenu garanti, qui serait versé directement aux personnes en situation de handicap en âge de travailler et qui ont un faible revenu. Les objectifs du projet de loi C‑22 sont la réduction de la pauvreté et la sécurité financière. La dure réalité est que les personnes en situation de handicap en âge de travailler au Canada sont deux fois plus à risque de vivre dans la pauvreté que les autres citoyens et citoyennes. Environ une personne en situation de handicap en âge de travailler sur quatre vit sous le seuil de la pauvreté.
De nombreuses personnes en situation de handicap au Canada connaissent un niveau moyen de sécurité financière pour la première fois en tant qu'adultes lorsqu'elles atteignent 65 ans et ont accès au Supplément de revenu garanti et à la Sécurité de la vieillesse. Le niveau de pauvreté diminue de plus de 60 % pour les personnes en situation de handicap entre l'âge de 64 et de 65 ans — de 23 % à 9 %. Je sais que vous conviendrez tous que c'est inacceptable. Je ne parle pas de la diminution de la pauvreté, mais du fait qu'elle ait été de 23 %.
La Prestation canadienne pour les personnes handicapées serait créée et mise en œuvre dans le cadre du projet de loi , qui constitue le cadre légal pour la création de la prestation proposée. Il prévoit aussi un processus réglementaire public subséquent par lequel les détails spécifiques de cette prestation seront établis. Cela fait partie de la conception. C'est intentionnel. Cette approche souligne le rôle important que doit jouer la communauté des personnes en situation de handicap dans ce processus, de même que la complexité des services et systèmes de soutien à cette communauté déjà en place dans les provinces et les territoires.
Permettez-moi de revenir un peu en arrière. Dès le départ, j'avais deux priorités dans l'élaboration de cette prestation proposée. D'abord, il fallait que la communauté des personnes en situation de handicap participe à chaque étape du processus. Ensuite, il devait y avoir de la rigueur dans les échanges avec les provinces et les territoires pour nous assurer que les gens s'en sortiraient mieux et que les prestations et services en place ne seraient pas réduits.
En ce qui a trait à ma première priorité, nous avons collaboré étroitement avec la communauté des personnes en situation de handicap. Le principe du « rien sans nous » est enchâssé dans le projet de loi . L'exigence de Loi canadienne sur l'accessibilité voulant que les personnes en situation de handicap participent à l'élaboration et à la conception des lois, des politiques, des programmes et des services est aussi enchâssée dans le projet de loi C‑22. Et les obligations du Canada en vertu de la Convention des droits des personnes handicapées des Nations Unies le sont aussi.
[Français]
Nous avons investi 12 millions de dollars sur trois ans dans le budget de 2021, afin de travailler avec la communauté des personnes en situation de handicap au sujet de la création de la prestation. Nous avons réalisé un sondage en ligne et organisé des tables rondes et d'autres formes de consultation. Nous avons financé des organismes nationaux pour les personnes en situation de handicap, afin qu'ils mobilisent directement leur communauté.
Nous n'imposerons pas nos décisions à cette communauté et nous ne ferons pas de nivellement par le bas.
[Traduction]
Des intervenants comme Inclusion Canada ont dit clairement qu'ils ne voulaient pas que les décisions soient prises sans la participation significative de la communauté des personnes en situation de handicap. L'organisme People First of Canada a indiqué qu'un des principes clés était de faire participer les personnes ayant une déficience intellectuelle à l'étape de la conception de la prestation. L'organisme Le handicap sans pauvreté souhaite que le projet de loi soit adopté rapidement au Parlement, et a hâte de participer au processus réglementaire afin que toute une gamme d'expériences vécues soit entendue et écoutée. Il y a encore d'autres témoignages.
Nous avons travaillé avec la communauté à chacune des étapes et nous continuerons de mobiliser la communauté des personnes en situation de handicap, de solliciter leurs commentaires, et de leur répondre au cours de cette phase et des phases suivantes touchant l'élaboration et la mise en œuvre de la prestation proposée, y compris le processus réglementaire.
[Français]
En ce qui a trait à ma deuxième priorité, c'est grâce à la collaboration avec les provinces et les territoires que nous pouvons réaliser des progrès réels en ce qui a trait au versement et aux retombées possibles de cette prestation.
Le projet de loi reconnaît le rôle principal que jouent les provinces et les territoires pour offrir des mesures de soutien et des services aux personnes en situation de handicap. Chaque province et chaque territoire au Canada s'est doté d'un environnement politique unique concernant les prestations et les mesures de soutien pour les personnes en situation de handicap.
[Traduction]
Bien honnêtement, je ne pourrais pas exagérer la complexité des systèmes avec lesquels nous travaillons. Il y a en fait 13 différents systèmes provinciaux et territoriaux en jeu ici, et chacun d'eux a sa propre combinaison de services et de mesures de soutien. Certains sont intégrés dans la loi ou la réglementation, d'autres font partie de la mise en œuvre d'un programme. Il existe différentes définitions de l'incapacité, et tout un éventail de critères d'admissibilité, non seulement d'une compétence à l'autre, mais aussi à l'intérieur de celles‑ci.
Dans certains cas, l'admissibilité à un programme pour les personnes en situation de handicap permet l'accès à un autre. Dans d'autres, le fait d'être inscrite à un programme peut exclure une personne d'un autre programme ou réduire les prestations qui lui sont versées. D'une compétence à l'autre, il existe différents traitements d'autres formes de revenu, différents taux de réduction et différents traitements du revenu ou du soutien apporté par l'époux ou la famille.
Par exemple, l'Alberta possède une structure de prestations pour les personnes ayant un handicap grave. Les clients doivent être considérablement limités dans leur capacité à travailler, et leur handicap doit se qualifier comme étant « probablement permanent ». Le montant de la prestation est élevé, et les couples peuvent conserver plus de deux fois plus de leur revenu d'emploi que s'ils étaient célibataires avant de voir leurs prestations diminuer.
[Français]
L'Ontario offre une aide plus large et moins ciblée. Les incapacités admissibles n'ont pas besoin d'être graves et peuvent toucher le travail, les soins personnels ou la participation à la vie communautaire. On doit s'attendre à ce que l'incapacité dure au moins un an. Les prestations sont calculées à partir du revenu familial. L'exemption du revenu d'emploi est calculée séparément pour chacun des membres d'un couple.
[Traduction]
Les Territoires du Nord-Ouest offrent des prestations qui sont adaptées au coût élevé de la vie dans le Nord. L'admissibilité est fondée sur la capacité à réaliser des activités sur une base quotidienne. Le montant des prestations couvre le coût réel d'un logement à loyer modique et des services, sans limites établies. Les exemptions du revenu d'emploi sont calculées sur le revenu du ménage.
Et ce ne sont là que 3 exemples sur 13.
Le projet de loi autorise à conclure des ententes avec les provinces et les territoires dans la mise en œuvre les dispositions de la Loi. C'est très important. La Prestation canadienne pour les personnes handicapées vise à s'ajouter au soutien provincial et territorial et non pas à le remplacer.
Voyant l'écosystème complexe que je viens de décrire, nous devons harmoniser nos systèmes pour faire en sorte que des prestations ne soient pas réduites et que tous ceux qui reçoivent la Prestation canadienne pour les personnes handicapées s'en sortent mieux. Cela signifie qu'il faut s'assurer que les aides au revenu ne sont pas diminuées, et que l'admissibilité aux services et aux programmes n'en est pas réduite. Nous devons aider les gens à s'en sortir. Nous devons aider les gens à sortir de la pauvreté. D'un bout à l'autre du pays, les programmes et les prestations de revenu destinés aux personnes en situation de handicap laissent les bénéficiaires bien en dessous du seuil de la pauvreté. Le revenu total moyen des personnes en situation de handicap en âge de travailler qui vivent dans la pauvreté et reçoivent de l'assistance sociale est de 12 600 $. C'est bien loin du seuil national de la pauvreté, qui varie entre 19 000 et 25 000 $ par année, selon le lieu de résidence.
Je suis heureuse de déclarer que la collaboration avec les provinces et les territoires va bon train. Il existe un plan FPT auquel toutes les compétences ont adhéré. Les provinces et les territoires soutiennent l'approche de la loi-cadre. Ils sont heureux de voir qu'il n'y a pas d'approche « universelle » qui optimiserait les répercussions de cette nouvelle prestation fédérale dans l'éventail complexe des systèmes provinciaux et territoriaux. Ils partagent notre engagement à aider les gens à vivre mieux et à les sortir de pauvreté. C'est important. Nous avons absolument besoin de flexibilité dans nos travaux avec les provinces et les territoires. Je voudrais souligner rapidement que l'ensemble du gouvernement du Canada travaille également à assurer l'interaction entre les prestations fédérales.
Chers collègues, avec le projet de loi , nous avons la possibilité d'instaurer un changement qu'on ne voit qu'une fois par génération. Grâce au projet de loi C‑22, nous faisons les choses différemment, et ce, volontairement. Le projet de loi C‑22 nous permettra de travailler en collaboration avec la communauté des personnes en situation de handicap et avec les provinces et les territoires pour que la prestation atteigne son objectif de réduire la pauvreté chez les personnes en situation de handicap en âge de travailler.
Je serai heureuse de répondre à vos questions.
:
Merci, monsieur le président.
Je m'appelle Louise Chabot et je suis la députée de Thérèse‑De Blainville, au Québec.
Madame la ministre, je vous remercie d'être présente parmi nous pour répondre aux nombreuses questions que nous avons concernant ce projet de loi. Vous avez eu raison de remercier d'entrée de jeu tous les partis d'avoir adopté ce projet de loi à la Chambre afin qu'il puisse être étudié ici, au Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées.
Vous avez dit dans votre discours d'ouverture que vos objectifs étaient clairs. Je pense que c'est effectivement le cas. Il s'agit notamment de réduire la pauvreté et l'intention est de ne pas faire de nivellement par le bas. Cependant, pour les parlementaires qui devront se prononcer sur ce projet de loi, il y a quelque chose de gênant sur le plan démocratique. En effet, l'essentiel du projet de loi, hormis les objectifs, sera mis en application par voie de règlements.
Par exemple, au paragraphe 11(1), il est question des critères d'admissibilité à la Prestation canadienne pour les personnes handicapées. Cependant, on ne connaît pas ces critères. On ne connaît pas non plus le montant de la prestation et la méthode de calcul de ce montant. Ces deux éléments seront établis par voie de règlement. Si nous n'obtenons pas plus de détails, l'adoption de ce projet de loi sera un peu comme un chèque en blanc.
Vous aviez déposé le projet de loi , et, un an plus tard, vous avez déposé le projet de loi . Nous savons pourquoi le projet de loi C‑35 ne s'est pas rendu plus loin.
Il serait important que vous nous indiquiez deux choses. Premièrement, en ce qui a trait au seuil de pauvreté, avez-vous en tête un montant minimal? Deuxièmement, vous avez dit dans votre discours que beaucoup de gens avaient un revenu de 12 600 $ par année et que le seuil de pauvreté variait entre 19 000 $ et 25 000 $. Qu'est-ce que votre ministère envisage pour permettre de réellement sortir les gens de la pauvreté? Vous devez certainement avoir une idée.
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Merci, monsieur le président. Je m’appelle Bonita Zarrillo et je viens de Port Moody—Coquitlam, en Colombie-Britannique.
Merci beaucoup, madame la ministre, d’être venue aujourd’hui. Je sais que la semaine dernière, lorsque nous avons eu une séance d’information technique, il y avait beaucoup de questions sans réponse, beaucoup de questions qui sont restées sans réponse. Je suppose qu’il faut réfléchir au contexte dans lequel nous avons cette discussion. Autour de nous, le coût de la vie monte en flèche, nous savons que les loyers, le prix de la nourriture, le coût du chauffage — toutes ces choses — augmentent à un rythme exponentiel, et que les personnes handicapées ont encore plus de difficulté à payer leurs factures et à joindre les deux bouts.
Vous avez mentionné aujourd’hui une période d’environ six ans. Je tiens à mentionner que, depuis sept ans que votre gouvernement est au pouvoir, les personnes handicapées n’ont pas pu obtenir l’aide dont elles ont besoin pour manger à leur faim et planifier leur vie en toute sécurité. Pendant que les PDG des épiceries s'en mettent plein les poches, les personnes handicapées sont encore plus à risque.
Les Canadiens handicapés veulent savoir quand la Prestation canadienne pour personnes handicapées sera versée dans leur compte bancaire afin qu’ils puissent joindre les deux bouts.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je m’appelle Rosemarie Falk, députée de Battlefords—Lloydminster, en Saskatchewan.
Merci, madame la ministre, d’avoir pris le temps de venir nous rencontrer aujourd’hui.
Nous savons qu’une prestation pour les personnes handicapées a le potentiel, comme vous en avez parlé, d’améliorer considérablement le bien-être financier et global de nombreux Canadiens. Alors que les coûts continuent de grimper et que l’abordabilité est une question qui préoccupe tout le monde, nous savons que la pression financière est encore plus grande pour les Canadiens handicapés, qui ont déjà un coût de la vie plus élevé. Bien que l’intention déclarée du projet de loi , la mesure dont nous sommes saisis, semble faire l’objet d’un consensus, il ne s’agit en réalité que d’une coquille vide, une expression qui, selon moi, décrit bien une loi-cadre. Tous les détails critiques de ce projet de loi ont été omis.
C’est très semblable à ce qui s'est passé quand le Comité a étudié le projet de loi au cours de la 42e législature. C’est à ce moment‑là que votre gouvernement a choisi, encore une fois, d’exclure tout mordant de la loi et de laisser cela à la réglementation.
Ma question, madame la ministre, est la suivante: pourquoi avez-vous décidé d’exclure tous les détails critiques de la loi et, en fin de compte, de les soustraire à l’examen du Parlement?
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je m’appelle Michael Coteau et je représente la circonscription de Don Valley-Est, en Ontario.
Merci beaucoup, madame la ministre, d’être ici aujourd’hui.
Je sais que la présentation d'un programme de ce genre est un moment marquant pour les Canadiens. Je tiens à vous remercier de vos efforts et du travail que vous avez accompli, non seulement à la Chambre des communes, mais même avant votre arrivée à la Chambre.
Ma question a un certain lien avec la relation entre les provinces et les territoires. Nous savons qu’il y aura d’importants partenaires dans cette entreprise. Cela ne fait aucun doute. Bon nombre de provinces et de territoires offrent leur propre ensemble de programmes et de services.
Je suppose que la question est la suivante: comment vous assurez-vous qu’au bout du compte, d’un océan à l’autre, la mise en oeuvre de cette mesure sera uniforme? Il existe une grande variété de programmes. Je sais qu’en Ontario, il y a des programmes particuliers qui peuvent différer de ceux des autres provinces.
Comment peut‑on assurer l’uniformité dans ce genre de modèle?
:
C’est une question très importante. C’est pourquoi le plan de travail global est si important. C’est pourquoi les principes généraux sont importants. C’est pourquoi nous devons travailler individuellement. Nous devons travailler à un niveau multilatéral pour nous assurer que nous allons tous dans la même direction, mais aussi à un niveau plus bilatéral lorsque nous négocions l'interaction des prestations avec les provinces et les territoires.
Par exemple, il se peut qu'une province examine une prestation fédérale, comme la prestation pour le logement ou l’ACE, et qu'elle ait, dans son propre système, une liste d’exemptions, des choses dont elle ne tient pas compte pour calculer le revenu afin de permettre à une personne d’obtenir ses prestations. La solution, dans cette province, serait peut-être d’inscrire la prestation sur cette liste, dans cette colonne du grand livre. Une autre province pourrait ne pas avoir cette liste; une autre province pourrait avoir une façon différente de déterminer les prestations.
Ce que le gouvernement a réussi à faire très rapidement, à la suite des élections de 2015, c’est d'obtenir que toutes les provinces du pays ne considéreraient pas l’Allocation canadienne pour enfants comme un revenu aux fins des mesures de soutien et de l’aide sociale. Nous avons un modèle. Nous avons un précédent datant de notre gouvernement. Il y a beaucoup de variables, mais il y a aussi de fortes indications et beaucoup d’espoir que nous serons en mesure de franchir la ligne d’arrivée.
Je ne pense pas qu’il sera difficile de le faire, mais nous devons le faire comme il faut.
Je vais prendre un exemple que nous connaissons tous, à savoir le Supplément de revenu garanti en lien avec les prestations de retraite.
Cela semble plus simple parce que ce sont les prestations de retraite. Il y a un montant maximum qu'on peut toucher au titre du Supplément de revenu garanti, si on gagne, par exemple, 20 700 $. Je donne un chiffre rond.
Je reprends cet exemple et je l'applique au Québec. C'est un exemple que je donne. Ce n'est pas la réalité.
Disons que le revenu de base est de 24 000 $ par année pour les personnes en situation de handicap au Québec. Finalement, une décision par règlement établit que le seuil de pauvreté correspond à un revenu de 24 000 $.
Est-ce que cela signifie que, pour les provinces ou les territoires ayant des régimes généreux, il est possible qu'il n'y ait rien de plus pour les personnes en situation de handicap? Autrement dit, ce montant serait établi selon une géométrie variable. Est-ce exact?
:
Merci d'être de retour.
Le Comité reprend son étude du projet de loi , Loi visant à réduire la pauvreté et à renforcer la sécurité financière des personnes handicapées par l’établissement de la prestation canadienne pour les personnes handicapées et apportant une modification corrélative à la Loi de l’impôt sur le revenu.
Pour aider les interprètes, je rappelle à tous les députés et aux témoins qui comparaissent aujourd'hui de se présenter lorsque nous leur céderons la parole et de parler lentement.
Aux témoins qui comparaissent virtuellement ou en présentiel, vous pouvez choisir de vous exprimer dans la langue officielle de votre choix. Si les services d'interprétation sont interrompus, je vous prie de me le signaler. Nous suspendrons la séance jusqu'à ce que le problème soit réglé.
Veuillez attendre que je vous donne la parole avant de parler. Pour ceux qui participent par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro. Veuillez désactiver votre micro lorsque vous ne parlez pas. Lorsque vous parlez, parlez lentement et clairement.
Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence.
Je souhaite maintenant la bienvenue à nos témoins. Nous avons cinq minutes pour les déclarations préliminaires, après quoi nous passerons aux questions.
De l'Institut national canadien pour les aveugles, nous accueillons M. Thomas Simpson, directeur général des affaires publiques, et Mme Bryanna Regimbald, coordonnatrice de programme. De l'organisme Le handicap sans pauvreté, nous accueillons Mme Michelle Hewitt, présidente du Conseil d'administration, et Mme Rabia Khedr, directrice nationale. De la Société canadienne de la sclérose en plaques, nous accueillons Mme Julie Kelndorfer, directrice des relations avec le gouvernement et des actions sociales, et Marie-Ève Simard, directrice du marketing et des communications.
Nous allons commencer par M. Simpson, pour cinq minutes.
Monsieur Simpson, vous avez la parole.
:
Merci, monsieur le président.
Je m'appelle Thomas Simpson. Je suis directeur général des affaires publiques et du programme Ouvrir les portes du travail de l'Institut national canadien pour les aveugles, l'INCA. Je suis accompagné aujourd'hui de ma collègue Bryanna Regimbald, coordonnatrice d'Ouvrir les portes du travail.
Depuis 104 ans, l'INCA est le plus important des organismes qui soutiennent les Canadiens aveugles ou atteints de cécité partielle. Nous offrons partout au Canada des programmes de soutien affectif et social aux personnes qui ont une perte de vision. L'Institut est heureux de comparaître devant le Comité aujourd'hui pour appuyer le projet de loi . Notre témoignage présente les commentaires et les opinions de la communauté des personnes qui vivent avec une perte de vision. Ces commentaires proviennent des vastes consultations que l'Institut a menées cette année.
Soyons clairs. Les personnes handicapées ont besoin de la Prestation canadienne pour les personnes handicapées, et nous sommes heureux que l'on ait déposé un projet de loi pour les faire sortir de la pauvreté. Aujourd'hui, nous vous donnerons un aperçu des raisons pour lesquelles les personnes aveugles ou malvoyantes ont besoin de cette prestation, et nous vous proposerons des moyens de renforcer cette loi.
Je vais céder la parole à ma collègue.
:
Merci, monsieur Simpson.
Je m'appelle Bryanna Regimbald et je suis coordonnatrice du programme Come to Work de l'INCA. Je vis avec une perte de vision depuis ma naissance. Le programme Come to Work soutient des personnes complètement aveugles ou malvoyantes. Mon travail quotidien m'a permis de constater les nombreux obstacles auxquels les participants au programme se heurtent et les faibles montants d'aide qui les maintiennent dans la pauvreté.
Tout au long de ma vie, j'ai fait face à de nombreuses difficultés dans les domaines de l'éducation, de l'emploi et face aux activités de la vie quotidienne. De nombreux participants de la communauté des personnes qui vivent avec une perte de vision me disent qu'elles dépendent de l'aide sociale, mais qu'elles voudraient vraiment en sortir. Le coût de la vie a augmenté pour tout le monde. Pour les personnes handicapées, c'est encore pire. Non seulement elles font quotidiennement face à des obstacles sociétaux à cause de leur handicap, mais le fait de vivre dans la pauvreté ajoute infiniment plus de difficultés.
Le seul fait d'avoir un handicap accroît les coûts que ces personnes doivent assumer, comme le transport privé, les appareils de haute technologie qui aident à l'orientation autonome et, dans certains cas, les soins vétérinaires pour les chiens-guides.
J'espère que ce projet de loi sera adopté rapidement afin que le gouvernement puisse collaborer aussitôt que possible avec la communauté des personnes handicapées pour définir les critères d'admissibilité et le montant des prestations ainsi que pour établir un processus avec les provinces et les territoires qui tienne compte de l'objectif de la Prestation canadienne pour les personnes handicapées.
Je vais maintenant repasser la parole à M. Simpson.
:
Merci, madame Regimbald.
Mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous demande d'envisager plusieurs amendements que nous recommandons d'apporter pour renforcer le projet de loi .
Premièrement, il sera nécessaire de gérer la prestation canadienne pour personnes handicapées parallèlement à une stratégie nationale d'emploi pour les personnes handicapées. De cette façon, la Prestation canadienne pour les personnes handicapées ne retiendra pas les personnes handicapées aptes au travail dans leur dépendance de l'aide sociale. La Prestation canadienne pour les personnes handicapées devrait être conçue comme un tremplin les aidant à sauter de la pauvreté à l'emploi et non comme un filet dans lequel les emprisonner. Cette stratégie doit cibler les employeurs afin de leur souligner les avantages d'embaucher des personnes handicapées, notamment des personnes qui vivent avec une perte de vision.
Bien que les aînés soient admissibles à la Sécurité de la vieillesse et au Supplément de revenu garanti, l'invalidité et la pauvreté ne disparaissent pas comme par magie lorsqu'ils atteignent 65 ans. Certaines provinces cessent d'octroyer des mesures de soutien dès qu'une personne atteint 65 ans. Par exemple, le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées cesse, dès qu'ils atteignent 65 ans, de leur verser la prestation pour chien-guide de 84 $ par mois qui les aide à assumer les frais d'un chien-guide. En Ontario, les personnes âgées qui vivent avec une perte de vision doivent assumer seules les coûts qui leur étaient subventionnés. Il faut éliminer de ce projet de loi toutes les restrictions dues à l'âge des membres de cette communauté.
Dans le cadre de nos fonctions au programme Ouvrir les portes du travail, Mme Regimbald et moi constatons que les programmes provinciaux et territoriaux de soutien aux personnes handicapées sont inadéquats. Les gens hésitent à chercher de l'emploi par crainte de perdre leurs services médicaux essentiels ou d'autres avantages fournis par les programmes provinciaux. Autrement dit, ce projet de loi doit régler ce problème et prévoir une façon de récupérer de l'argent ou d'autres prestations sans décourager les gens qui sont aptes et qui voudraient travailler.
Ce projet de loi confirmera dans son Règlement des éléments importants de la Prestation canadienne pour les personnes handicapées. L'INCA recommande qu'on l'amende pour exiger que le Règlement soit adopté dans l'année suivant l'entrée en vigueur de la loi afin de ne pas retarder le versement des prestations aux millions de Canadiens qui attendent ce programme.
Enfin, nous pensons que la Prestation canadienne pour les personnes handicapées devrait s'inspirer de l'Allocation canadienne pour enfants. La Loi sur la prestation universelle pour la garde d'enfants, qui régit l'Allocation canadienne pour enfants, précise le montant que celle‑ci doit verser aux Canadiens. L'INCA suggère que le projet de loi soit amendé afin de prévoir une somme minimale que les personnes handicapées recevront obligatoirement de la Prestation canadienne pour les personnes handicapées.
En conclusion, l'INCA appuie le projet de loi . Il faut l'adopter et le mettre en vigueur le plus rapidement possible. L'INCA aimerait également appuyer publiquement les mémoires présentés par l'AODA Alliance et par l'Alliance pour l'égalité des personnes aveugles du Canada.
Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.
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Merci de nous avoir invitées à prendre la parole aujourd'hui.
Je m'appelle Michelle Hewitt et je suis présidente de l'organisme Le handicap sans pauvreté. Je suis accompagnée de Mme Rabia Khedr, directrice nationale de notre organisme.
Nous sommes ici aujourd'hui pour vous parler du projet de loi , Loi sur la prestation canadienne pour les personnes handicapées. Nous tenons à souligner la nécessité de l'adopter le plus rapidement possible pour les personnes handicapées qui vivent dans la pauvreté, notamment les Noirs, les Autochtones et les personnes racisées qui vivent avec un handicap et qui sont encore plus marginalisés dans notre société.
Les statistiques sur les personnes handicapées vivant dans la pauvreté sont épouvantables. Il y a deux fois plus de personnes handicapées qui vivent dans la pauvreté que de personnes non handicapées. Nous sommes au Canada en 2022. Personne ne mérite de vivre dans la pauvreté, et certainement pas parce que le destin leur a infligé un handicap dès la naissance ou plus tard dans leur vie.
Les personnes handicapées ne vivent pas dans la pauvreté parce qu'elles n'ont rien à apporter à la société, bien au contraire. Elles vivent dans la pauvreté parce que personne ne reconnaît leur valeur. En fait, les personnes handicapées apportent une contribution de plus de 47 milliards de dollars à l'économie canadienne.
Vivre avec un handicap n'est pas bon marché. Le Tylenol n'est plus un cachet que l'on prend à l'occasion pour un mal de tête, mais un médicament qui gère quotidiennement la douleur. Nos activités quotidiennes les plus personnelles, comme la toilette, ne sont pas gratuites. J'ai une amie qui a attendu trois ans pour obtenir de son programme provincial un nouveau fauteuil roulant électrique, mais elle a constaté que le seul fauteuil roulant qui lui était offert était beaucoup trop grand pour elle.
Nous parlons de sortir les personnes handicapées de la pauvreté, mais qu'est‑ce que cela signifie vraiment? Les seuils de pauvreté officiels du Canada utilisent la mesure du panier de consommation, mais ce panier ne tient pas compte des handicaps.
Nous entendons les récits de personnes handicapées qui vivent continuellement dans la pauvreté, car ces gens sont nos amis et nos proches. Nous pouvons vous parler de l'homme qui a abordé Mme Khedr dans le stationnement d'une épicerie en lui offrant d'échanger des billets d'autobus contre de la nourriture, ou de mon amie qui vit de mois en mois avec une aide médicale à mourir approuvée et qui se demande si ce mois sera le dernier parce qu'elle n'a pas les moyens de survivre.
Tout au long de ces audiences, vous entendrez beaucoup de récits de personnes handicapées vivant dans la pauvreté, mais vous y décèlerez un thème commun. Nous nous entendons tous sur l'urgence de mettre fin à la pauvreté des personnes handicapées. Nous devons le faire tout de suite.
Le 19 octobre, nous avons eu l'honneur d'être à la tribune de la Chambre lorsque le projet de loi a fait l'objet d'un vote à l'étape de la deuxième lecture. Ce vote unanime a profondément ému les 10 membres de notre délégation. Nous sommes ici aujourd'hui pour vous demander de maintenir cet esprit de collaboration bipartisane pour faire passer ce projet de loi à l'étape de la troisième lecture, pour obtenir l'appui unanime de la Chambre et pour l'adopter rapidement au Sénat afin qu'il lui accorde la sanction royale.
Nous croyons que cette prestation sera plus efficace si ses détails sont conçus en collaboration avec des personnes handicapées comme nous. Cette collaboration ne peut pas avoir lieu dans ce comité, à la Chambre ou au Sénat. Elle ne peut se produire que dans le cadre de l'élaboration du Règlement en traitant les personnes handicapées comme des partenaires égaux dans ce processus.
Repensez, pendant un instant, à la dernière personne handicapée que vous avez croisée dans votre vie. Demandez-vous ce que votre comité devrait faire pour cette personne.
Les personnes handicapées ont maintenant besoin que vous fassiez avancer cette loi-cadre. Implorez vos collègues parlementaires de faire ce qui s'impose pour les personnes handicapées dans cet esprit de collaboration bipartisane afin de faire passer ce projet de loi à l'étape de la troisième lecture à l'unanimité, sans autre débat. Dites à vos collègues du Comité des finances d'affecter des fonds dans le budget du printemps 2023 pour commencer à verser cette prestation dès l'automne 2023. Exhortez les fonctionnaires qui travaillent à la mise en œuvre de la prestation à se demander si les processus qu'ils créent profitent vraiment aux personnes handicapées, ou si leur esprit est encore prisonnier des anciennes méthodes discriminatoires fondées sur la capacité physique, ce capacitisme qui est si endémique dans nos systèmes.
Le temps presse. L'inflation a haussé le prix des aliments de 11,6 %, mais les prestations d'invalidité provinciales ne sont pas indexées. Autrement dit, les personnes handicapées se retrouvent chaque jour un peu plus désavantagées par rapport au reste de la population.
Les personnes handicapées font face à un autre hiver, mais vous avez le pouvoir de veiller à ce que ce soit le dernier qu'elles devront affronter en vivant sous le seuil de la pauvreté. Merci.
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Merci, monsieur le président, et bonjour, mesdames et messieurs les membres du Comité.
Je m'appelle Julie Kelndorfer et, avec ma collègue Marie-Ève Simard, je représente la Société canadienne de la sclérose en plaques. C'est un honneur de comparaître devant votre comité dans le cadre de votre étude du projet de loi , Loi sur la prestation canadienne pour les personnes handicapées.
Je tiens à souligner tout d'abord que le Canada a l'un des taux de sclérose en plaques les plus élevés au monde. Ce trouble auto-immun incite le corps à attaquer son propre système nerveux, ce qui perturbe les signaux du cerveau et de la moelle épinière. La sclérose en plaques ne se manifeste jamais de la même manière. Les symptômes varient de la perte de vision ou de mobilité à la fatigue et à l'incontinence. Bien que certains patients ressentent dès le début une diminution progressive de leurs capacités, la majorité des personnes atteintes de sclérose en plaques vivent un cycle de rechutes et de rémissions appelées des « épisodes », et donc une invalidité épisodique. Malheureusement, chez bien des patients, les dommages causés par ces épisodes s'accumulent au fil du temps, ce qui entraîne une progression permanente de l'invalidité.
À l'heure actuelle, il n'y a pas de remède. Pour beaucoup de gens comme moi — on m'a diagnostiquée il y a 18 ans, alors que mon fils n'avait qu'un an —, vivre avec la sclérose en plaques, c'est vivre dans l'incertitude. Je ne sais jamais si un symptôme comme un tremblement des mains qui m'empêche de couper ma nourriture durera une journée, un mois ou un an, ou s'il ne cessera jamais. Chaque jour, nous nous réveillons sans savoir ce qui nous attend.
L'objectif de la Société canadienne de la sclérose en plaques est de veiller à ce que les Canadiens qui en sont atteints et leurs familles puissent participer pleinement à tous les aspects de la vie, malgré l'incertitude dans laquelle ils vivent. La sécurité du revenu est fondamentale. Nous sommes ici aujourd'hui pour souligner le besoin urgent d'adopter la prestation canadienne pour les personnes handicapées. Nous tenons à insister sur le fait qu'elle doit inclure les Canadiens qui vivent avec une invalidité épisodique. Nous vous demandons d'amender ce projet de loi pour y inclure la même définition d'invalidité que celle qui se trouve dans la Loi canadienne sur l'accessibilité.
On ne saurait sous-estimer les effets de la pauvreté sur les Canadiens atteints de sclérose en plaques. Les résultats de recherche indiquent que l’incapacité des patients qui ont un statut socioéconomique inférieur progresse plus rapidement et que leur pronostic est plus faible. Ces personnes atteignent plus rapidement les jalons de l'incapacité physique, comme la difficulté de marcher.
Les études de recherche ont aussi démontré que les patients commencent dès les premières années suivant leur diagnostic à souffrir de graves conséquences économiques. Ils doivent non seulement payer des médicaments, des traitements de réadaptation et du transport, mais il leur faut des services et de l'équipement. Les aides à l'alimentation, à la mobilité et au bain ne sont que quelques-uns des articles qui figurent à leur liste, qui est aussi longue que coûteuse. Imaginez devoir choisir entre chauffer votre maison ou vous rendre à des rendez-vous médicaux, ou entre acheter de la nourriture saine ou voir un physiothérapeute qui vous aide à marcher.
On peut intervenir dès le début en administrant des traitements qui transformeront la vie et la maladie. Ces traitements peuvent ralentir ou faire cesser l'évolution d'une invalidité irréversible, mais leurs coûts sont très élevés. Selon un rapport publié en 2020 par le Conference Board du Canada, en un an seulement, les Canadiens atteints de sclérose en plaques et leurs familles ont payé plus de 39 millions de dollars de leur poche.
Si les patients et leurs familles n'ont pas les moyens de payer des traitements, la maladie empire. Il devient alors très difficile de travailler et de maintenir une vie autonome, ce qui exerce une pression supplémentaire sur leur situation financière, et leurs symptômes s'aggravent. Leur vie part à la dérive.
Les défis que pose la sclérose en plaques, conjugués aux multiples obstacles que posent les systèmes de soutien gouvernementaux actuels, se sont amplifiés à cause de la pandémie et de l'augmentation du coût de la vie. Soulignons aussi l'aspect sexospécifique de cette maladie, puisque 75 % des Canadiens qui vivent avec la sclérose en plaques sont des femmes.
La Prestation canadienne pour personnes handicapées cible les Canadiens en âge de travailler, dont les personnes atteintes de sclérose en plaques. La plupart du temps, elle les frappe entre 20 et 49 ans. Pendant cette période de leur vie, ces gens sont au sommet de leur carrière, ils ont une famille bien établie et gagnent bien leur vie.
Ray, qui vit avec la sclérose en plaques, craint le jour où il devra cesser de travailler. En effet, plus de 60 % des personnes atteintes de sclérose en plaques se retrouvent au chômage. Ce taux est élevé, compte vu leur niveau d'études et de réussite professionnelle. En 2019, le Comité HUMA a étudié les besoins des Canadiens ayant des invalidités épisodiques dans le contexte du revenu et de l'emploi et il a produit un excellent rapport.
Votre comité a maintenant l'occasion d'harmoniser cette loi avec la définition la plus récente du handicap que l'on trouve dans la Loi canadienne sur l'accessibilité.
Pendant les consultations sur la Loi canadienne sur l’accessibilité, les membres de la communauté de la sclérose en plaques et les autres personnes ayant une invalidité épisodique ont fait d’énormes efforts pour que l'on ajoute leur invalidité à la définition de la Loi. C’était extraordinaire de nous voir inclus dans la définition globale de « handicap ». Nous nous attendions à ce qu’à l’avenir, toutes les lois et tous les programmes respectent cette définition globale.
Chaque jour, les personnes atteintes de sclérose en plaques se réveillent dans l'adversité et s'acharnent à persévérer.
Elles ont énormément de peine à joindre les deux bouts, alors travaillons ensemble pour faire adopter rapidement ce projet de loi afin d'alléger leur lutte, de réduire la pauvreté et de soutenir la sécurité financière des personnes qui sont en âge de travailler, mais qui vivent avec des handicaps très divers, y compris une invalidité épisodique.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
Bonjour à tous. Je suis Michelle Ferreri, députée de Peterborough—Kawartha. Je suis heureuse d'être ici. Nous discutons en ce moment d'un projet de loi très important.
J'aimerais poser ma première question à Thomas — si je peux me permettre de vous tutoyer. Merci beaucoup de votre témoignage.
Je vous remercie tous de votre témoignage.
Michelle, le vôtre a été très solide également.
Ce que vous avez dit au sujet d'une stratégie nationale de l'emploi était vraiment juste. Je pense que vous avez tout à fait raison de dire qu'il faut s'assurer que les employeurs sont ouverts à ce genre d'initiatives. Ce que je veux vraiment approfondir, c'est... Vous avez dit que vous appuyez ce projet de loi. Je pense que tout le monde est d'accord pour aider et faire le nécessaire, faire ce qu'il faut. La ligne est mince, et j'essaie de ne pas être trop critique, mais nous devons être assez vigilants pour veiller à ce que le tout soit fait correctement. Vous avez dit appuyer les recommandations de l'AODA Alliance. C'est une lettre au ton assez direct.
Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je vais vous lire deux ou trois choses et j'aimerais savoir ce que vous en pensez. « En résumé, voici ce qui cloche dans le libellé actuel du projet de loi. » Je ne vais pas tout lire, parce qu'il y a plusieurs pages, mais je vais lire quelques paragraphes.
Le projet de loi ne garantit pas un moyen rapide, équitable, non bureaucratique et accessible pour les personnes handicapées de demander la prestation canadienne pour les personnes handicapées, ni un processus d'appel équitable et rapide pour les personnes dont la demande est refusée.
L'objectif déclaré du projet de loi en soi est dilué. Il ne vise pas à éliminer la pauvreté chez les personnes handicapées. Il ne vise même pas à réduire sensiblement la pauvreté des personnes handicapées. La plus petite amélioration pour les personnes handicapées permettrait d'atteindre cet objectif dérisoire.
On y indique aussi que le projet de loi « ne fixe pas de montant minimum pour la prestation canadienne pour les personnes handicapées ni de date de début du versement par le gouvernement », et on n'y précise aucun âge non plus.
Qu'en pensez-vous? Pour ce qui est de respecter ces délais... de faire le travail nécessaire et de le mettre en œuvre, dans quelle mesure croyez-vous que ces recommandations sont réalisables?
Comme Thomas l'a dit, il y a de nombreux coûts auxquels les gens — et je ne les blâme pas — ne pensent pas, d'après ce que nous comprenons, qu'il s'agisse des fonds pour l'achat d'une canne blanche ou de fournitures pour des chiens-guides et des choses du genre, qui ne sont peut-être pas couvertes par certains fonds. Par exemple, pour moi, auparavant... Si je vivais dans une région en périphérie, par exemple, dans les banlieues, parfois il n'y a pas nécessairement de transport en commun disponible, ou il faut marcher davantage et, en général, les gens qui ont une perte de vision parfois ne... Il y a des gens, des malvoyants aux complètement aveugles, qui ne sont pas à l'aise de faire certaines choses à différentes étapes. Peut-être qu'une personne n'est pas à l'aise de marcher jusqu'à un arrêt d'autobus accessible, alors elle doit appeler un taxi pour se rendre au travail, et ce genre de choses.
Dans l'ensemble, il y a de nombreux aspects financiers qui ne sont pas pris en compte, malheureusement, et cela se fonde uniquement sur la connaissance de ce qui vient avec la perte de vision pour différentes personnes. Pour ma part, tout au long de mon cheminement scolaire, j'ai eu besoin de différentes ressources, et tout cela coûte de l'argent. Pour ce qui est d'essayer d'obtenir ces mesures de soutien, cela varie.
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Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à tous les témoins présents aujourd'hui. Je suis très heureux qu'ils soient ici.
J'aimerais poser une question à Rabia Khedr.
Merci beaucoup d'être ici sur la Colline du Parlement le jour du vote. Je sais que vous êtes venue me rencontrer avec un groupe de personnes...
En passant, je m'appelle Michael Coteau, député de Don Valley-Est.
Je tiens à vous remercier d'être venus rencontrer les membres pour discuter de l'élaboration conjointe. Lorsque vous avez quitté mon bureau, c'est l'un des messages que j'ai retenus, soit l'importance de l'élaboration conjointe et le respect du principe général « rien sans nous ».
Certains membres du Comité ont laissé entendre que l'adoption directe d'un cadre qui permet d'exposer les détails du programme dans le règlement et de se concentrer là‑dessus dans le cadre de l'élaboration conjointe n'est pas la bonne approche. Ils préféreraient voir tout cela dans le projet de loi.
Pouvez-vous nous parler de l'importance de l'élaboration conjointe par le biais de la réglementation?
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Encore une fois, c'est l'expérience vécue qui apportera les connaissances, l'expertise et les nuances que les gens qui occupent des postes de pouvoir, et dont le travail consiste à élaborer des règlements, ne possèdent pas nécessairement. Ce sont des renseignements qu'on ne peut obtenir d'un groupe de discussion, d'une consultation ou d'un document de recherche. Lorsque vous discutez de tous les détails en tant que partenaires égaux, c'est là que l'expérience vécue entre en ligne de compte. C'est essentiel. C'est comme si les gens avaient l'impression... Par exemple, je suis aveugle. Les aveugles ne sont pas tous pareils, mais en général, nous avons des besoins communs.
Nous aimons savoir qui est dans une pièce avec nous. Lorsque les gens choisissent de décrire de façon exagérée, parce qu'ils supposent que nous devons voir chaque petit détail de la façon dont ils le voient, ce n'est pas nécessairement l'approche dont nous avons besoin. Il est important d'avoir à la table des personnes qui ont bénéficié du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées, le POSPH, et qui savent ce qui est couvert et ce qui ne l'est pas, et par quoi la disposition de récupération, en réalité, se traduit dans leur vie.
On dit peut-être « aucune récupération », mais il y a d'autres éléments de soutien et de services provinciaux qui n'ont pas été pris en compte par la recherche et les connaissances spécialisées qui accompagnent l'élaboration conjointe. Encore une fois, c'est dans cet esprit que nous travaillons. Faire le travail dans un véritable état d'esprit de « ne rien décider sans nous » signifie nous inclure à la table en tant que partenaires égaux, et pas seulement par la « participation ». C'est une façon de fonctionner, et la consultation en est une autre.
C'est une question d'élaboration conjointe et de collaboration. Par conséquent, s'il y a des obstacles, nous sommes en mesure de les surmonter, parce que nous les rencontrons tous les jours.
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Je vous remercie grandement, chers témoins, de vous prêter à l'exercice de nous parler de ce que vous vivez en tant que personne en situation de handicap, mais également de témoigner au nom des groupes que vous représentez.
Je pense que nous entendons bien le message.
J'ai notamment entendu celui d'un groupe qui nous disait d'adopter le projet de loi sans amendement. J'ai aussi entendu le message des gens de la Société canadienne de la sclérose en plaques, selon lesquels il faudrait peut-être amender le projet de loi pour y inclure, dans une définition, que la sclérose en plaques est épisodique, comme on le sait.
J'aimerais que vous nous en disiez davantage.
Nous sommes derrière vous pour que cela se fasse par et pour les personnes en situation de handicap. Il est cependant assez particulier pour nous, comme parlementaires, d'adopter un projet de loi alors que les détails les plus importants ne sont pas connus, c'est-à-dire les critères d'admissibilité, les conditions des prestations et le montant de la prestation.
Dans le cadre des consultations, nous avons demandé votre point de vue sur ces questions, parce que cela nous semble important, surtout lorsque cela se fait par voie réglementaire. Nous comprenons aussi qu'il y a une urgence d'agir pour la prestation, et vous savez que, par voie réglementaire, cela peut être long.
Ma question s'adressera aux gens de la Société canadienne de la sclérose en plaques.
Quand vous parlez de modifier le projet de loi relativement au fait qu'il s'agit d'une maladie et de handicaps épisodiques, à quoi pensez-vous exactement?
Pourquoi est-ce important? À quel endroit précis du projet de loi pourrions-nous agir?
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Essentiellement, en Ontario, par exemple, quelqu'un qui vit dans un foyer de groupe reçoit 1 227 $. L'établissement où la personne vit lui fait payer le logement et la nourriture, soit environ 1 075 $. Il lui reste donc environ 150 $ pour subvenir à ses besoins essentiels. En raison de la récente augmentation de 5 %, elle a essentiellement reçu une augmentation de 5 $.
Si elle n'a pas de famille pour subvenir à ses besoins fondamentaux, elle est forcée de vivre dans la pauvreté — et encore une fois, ce n'est pas de sa faute. Elle est née avec un problème génétique qui l'oblige à vivre avec l'autisme, avec un retard global du développement, avec une paralysie cérébrale, avec le syndrome de Down et ainsi de suite. Dans bien des cas, le handicap est si sévère qu'elle ne comprend même pas le concept de travail, ou c'est simplement que la nature de son handicap l'empêche d'être suffisamment productive pour gagner sa vie.
Tout le monde veut travailler. Les personnes ayant une déficience intellectuelle veulent un emploi. Elles veulent être productives. Cependant, en ce qui concerne les obstacles à l'emploi auxquels elles font face, ce ne sont pas tous les obstacles qui peuvent être éliminés ou atténués. Dans bien des cas, comme je l'ai dit, il y a des gens comme mon regretté frère, qui ne comprenaient pas la notion de travail. Mon frère, qui vit actuellement dans un foyer degroupe, veut travailler, mais il ne peut tout simplement pas occuper un emploi en raison de la nature de son handicap. Si je n'étais pas là, et si mes parents n'étaient pas là, si sa famille n'était pas là, on lui offrirait la charité pour ses vêtements, pour ses produits d'hygiène ou pour tous les articles de soins personnels dont il aurait besoin, parce que le revenu qu'il lui reste est insuffisant. S'il ne vivait pas dans un foyer de groupe, il serait dans la rue, car il n'aurait pas les moyens de payer son loyer.
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Bien sûr. D'après les dernières recherches menées par l'INCA, les personnes aveugles ou malvoyantes ont un taux d'emploi à temps plein de 31 %, ce qui est assez catastrophique.
Une stratégie nationale de l'emploi doit tenir compte de certaines choses.
Elle doit veiller à ce que le développement des compétences permette aux personnes handicapées d'entrer sur le marché du travail et de réussir le travail qu'elles souhaitent faire. Il faut tenir compte de la charge cognitive liée à la recherche d'un emploi, de ce que cela signifie de devoir rivaliser encore et encore pour obtenir un poste, et de l'obstacle que cela peut créer pour quelqu'un qui veut se trouver un emploi.
Plus important encore, elle doit tenir compte des changements de culture et d'attitude des employeurs. Je ne pense pas que beaucoup d'employeurs canadiens cherchent activement à ne pas embaucher de personnes handicapées. Cependant, je ne sais pas s'ils savent ce qu'ils ne savent pas, si vous voyez ce que je veux dire — les obstacles inconnus qu'ils créent. Les employeurs doivent comprendre cela un peu mieux, et être conscients des avantages qu'une personne handicapée — ou d'une personne aveugle ou partiellement aveugle, dans le cas de l'INCA — apportera au milieu de travail.
Il faut aussi envisager des améliorations à l'accessibilité pour s'assurer que les gens peuvent entrer dans leur lieu de travail, que ce soit par une rampe ou par ces nouveaux ascenseurs, par exemple, dans lesquels vous devez appuyer sur un écran qui ne comporte pas de boutons tactiles qui vous montrent l'ascenseur que vous devez utiliser. Si vous êtes aveugle ou malvoyant et que vous ne pouvez pas vous rendre à votre étage dès votre première journée, comment allez-vous réussir?
Il faut tenir compte d'un certain nombre de facteurs pour élaborer une stratégie globale de l'emploi.