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INAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du Nord


NUMÉRO 123 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 10 octobre 2024

[Enregistrement électronique]

(0820)

[Traduction]

    Bienvenue à la 123e réunion du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord de la Chambre des communes.
     Je vais commencer, comme nous le faisons toujours, en rappelant que nous sommes réunis sur le territoire ancestral non cédé du peuple algonquin Anishinabe, et exprimer ma gratitude de pouvoir faire le travail important de ce comité sur les terres dont ce peuple est l'intendant depuis des temps immémoriaux.
     Conformément à l'ordre de renvoi du mercredi 5 juin 2024, le Comité reprend l'étude du projet de loi C-61, Loi concernant l'eau, les sources d'eau, l'eau potable, les eaux usées et les infrastructures connexes sur les terres des Premières Nations.
    Je souhaite la bienvenue aux témoins de notre premier groupe.
    De l'Assemblée des Premières Nations, nous accueillons la cheffe nationale Cindy Woodhouse Nepinak. Celle‑ci est accompagnée de Christopher Rapson, conseiller juridique, et d'Irving Leblanc, ancien directeur des Infrastructures et de l'eau potable.
    De l'Assemblée des chefs du Manitoba, nous accueillons la cheffe intérimaire Betsy Kennedy. Elle participera par vidéoconférence. Nous accueillons également le chef Kelsey Jacko, des Premières Nations de Cold Lake. Et, enfin, de la Nation crie de Kehewin, nous accueillons le chef Trevor John.
    Bienvenue à tous. Vous disposerez chacun de cinq minutes pour faire votre exposé préliminaire, après quoi nous passerons aux questions.
    Sur ce, commençons par la cheffe nationale Cindy Woodhouse.
    Monsieur le président, la situation est un peu différente. Comme il s'agit de ma première comparution en tant que cheffe nationale, je vais vous demander de m'accorder quelques minutes de plus.
    Le Créateur nous donne la vie aujourd'hui — à nous tous — pour que nous puissions vivre et respirer. C'est lui qui nous fournit de l'eau potable et des sources d'eau propre.
    Je sais que la cheffe Kennedy est en ligne. Puis‑je lui demander de nous faire partir du bon pied en priant pour cette journée et pour nous tous et nos familles? L'Action de grâce approche, et j'aimerais lui faire cette demande. Nous parlons d'un enjeu important, mais je vous demande de nous accorder du temps pour remercier quelqu'un qui est au‑dessus de nous et qui nous a aidés à être ici aujourd'hui.
    Merci, madame.
    Merci pour cette journée très agréable. Merci à notre Créateur, qui est ici pour nous rassembler afin de sauver nos communautés. Nous sommes ici pour protéger les terres où nous vivons et continuons de vivre. Avec l'aide de notre Créateur, nous pouvons nous-mêmes contribuer à les préserver et continuer à faire tout ce que nous pouvons sur l'île de la Tortue. Nous vous demandons de nous protéger et de nous guider dans ce que nous devons faire pour nos enfants et notre avenir.
    Amen.
     C'est tellement agréable de vous voir tous.
    Pour ceux d'entre vous qui ne me connaissent pas, sachez que j'ai grandi dans une petite communauté du Manitoba située à environ deux heures et demie de route de Winnipeg. Je tiens à remercier la cheffe Kennedy d'avoir joué un rôle important pendant cette période de transition. Nous ne nous sommes pas encore rencontrées. C'est la première fois aujourd'hui que nous sommes en contact. J'en profite donc pour la remercier de tout son travail.
    Avant de poursuivre, je tiens à honorer une de mes collègues décédée depuis peu. Je salue la grande cheffe Merrick et je tiens également à remercier les chefs ici présents de s'être joints à moi. Je remercie également mes collègues et mon personnel de l'Assemblée des Premières Nations.
     Je suis la cheffe nationale de l'Assemblée des Premières Nations depuis 10 mois. J'ai hâte de travailler avec vous tous pendant les trois années à venir.
    Je tiens à souligner que nous sommes réunis ici sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin. Je remercie également le Comité de m'avoir invitée à parler du projet de loi C-61 au nom de l'Assemblée des Premières Nations.
    L'Assemblée des Premières Nations préconise depuis longtemps un financement et des ressources pour faire face aux crises de l'eau qui touchent nos communautés. Le gouvernement fédéral n'a fait jusqu'ici que trahir les Premières Nations en sous-finançant systématiquement les services d'approvisionnement en eau potable et de traitement des eaux usées et en mettant en œuvre des programmes sans tenir compte des droits et de l'autonomie des Premières Nations.
    Le 5 juin, il s'est produit une rupture de la principale conduite d'eau à Calgary, et cela a donné lieu à un avis d'ébullition et à des mesures de conservation qui ont fait les manchettes nationales. Voilà un contraste saisissant avec la couverture médiatique des problèmes d'eau potable qui, dans certaines communautés des Premières Nations, perdurent depuis des décennies. Comparativement aux autres Canadiens, les Premières Nations qui vivent dans les réserves sont 90 fois plus susceptibles de ne pas avoir accès à l'eau courante.
    Au cours des trois dernières décennies, il y a toujours eu au moins une centaine d'avis à long terme et à court terme dans des communautés des Premières Nations, et 30 avis à long terme sont toujours en vigueur. Les Premières Nations ne reçoivent pas la même qualité de services d'approvisionnement en eau et de traitement des eaux usées que la population canadienne en général.
    Le projet de loi C-61 est une occasion importante de corriger cette injustice de longue date. L'Assemblée des Premières Nations est convaincue que le projet de loi dont le Comité est saisi répond à l'une de ses principales priorités, à savoir assurer aux citoyens des Premières Nations une eau potable propre et salubre et des services suffisants de traitement des eaux usées. Il vise à régler les crises de l'eau qui perdurent dans les communautés de Premières Nations partout au Canada et à garantir un changement significatif.
    L'Assemblée des Premières Nations a travaillé avec diligence pour veiller à ce que la loi contienne les exigences minimales nécessaires telles qu'elles ont été énoncées par les Premières Nations. La sanction royale du projet de loi C‑61 est une occasion cruciale de s'attaquer au problème et de veiller à ce que les Premières Nations aient accès à des services suffisants d'approvisionnement en eau potable et de traitement des eaux usées, ainsi qu'à des programmes qui respectent leurs besoins, leurs droits et le principe d'autodétermination.
    Le projet de loi C-61 a fait l'objet de discussions et a été élaboré conjointement par Services aux Autochtones Canada et l'Assemblée des Premières Nations, et je félicite des gens comme Joanne Wilkinson, Phil Fontaine et la cheffe Linda Debassige qui, il y a quelques Noëls — à Noël, tout le monde se reposait —, ont continué à travailler sur le projet. Je leur rends hommage. Il y a aussi Irving Leblanc à mes côtés. Je le remercie de son travail acharné et de son dévouement envers notre peuple depuis de très nombreuses années.
     C'est une étape importante dans la reconnaissance des droits inhérents des Premières Nations et de leur compétence à l'égard de questions cruciales.
    La version actuelle du projet de loi comporte des améliorations importantes par rapport aux versions antérieures, et elle traduit une évolution dans la mise en œuvre des éléments essentiels circonscrits par l'Assemblée des Premières Nations au cours des consultations organisées de 2019 à 2023.
    Le projet de loi reconnaît le droit inhérent des Premières Nations à la gestion autonome des sources d'eau. L'Assemblée des Premières Nations a toujours préconisé l'inclusion de la protection des sources d'eau en lien avec le droit inhérent des Premières Nations à la gestion autonome de l'eau potable, des eaux usées et des infrastructures connexes.
    Il est entendu que la protection de l'eau depuis la source jusqu'au robinet est le moyen le plus sûr, le plus efficient, le plus efficace, le plus reconnu et le plus rentable de gérer l'eau potable à long terme.
(0825)
     Le projet de loi comporte des mesures louables pour régler les problèmes de financement qui perdurent. Actuellement, le financement des services d'approvisionnement en eau et de traitement des eaux usées dépend entièrement du bon vouloir du ministre.
    Il est vrai que l'inclusion des transferts de fonds prévus par la loi aurait fourni des garanties aux Premières Nations, mais le projet de loi engage le gouvernement à élaborer, en collaboration avec les Premières Nations, un mécanisme de financement direct et à long terme.
    Le projet de loi prévoit que le ministre devra consulter les Premières Nations et collaborer avec elles pour élaborer un cadre comportant un financement suffisant qui réponde aux besoins financiers réels des Premières Nations et qui garantisse des services comparables à ceux qui sont offerts aux collectivités non autochtones. Un libellé sans équivoque permettra de protéger durablement les Premières Nations et de veiller à ce qu'elles obtiennent les moyens financiers dont elles ont besoin pour les années à venir.
    Le projet de loi comprend des dispositions importantes sur les normes. Les Premières Nations ont droit à une qualité et une quantité d'eau potable et à une qualité de traitement des eaux usées qui respectent ou dépassent les normes les plus élevées des autres administrations canadiennes afin de combler le vide réglementaire fédéral actuel.
    Compte tenu des consultations tenues de 2019 à 2023, le projet de loi précise maintenant les normes applicables à la qualité de l'eau, à la quantité d'eau et au traitement des eaux usées pour les réseaux publics et privés, en fonction d'une évaluation de tous les besoins actuels et éventuels.
    Il protège les Premières Nations et leur permet d'élaborer leurs propres normes et de répondre à tous leurs besoins en eau, qu'il s'agisse des besoins domestiques, institutionnels, commerciaux ou industriels, pour les aider à se développer.
    Le projet de loi prévoit des dispositions importantes sur les ressources et le soutien des Premières Nations en matière de gouvernance. Il comprend un engagement à créer une Commission des eaux des Premières Nations pour appuyer l'objet et les principes de la loi.
    Le projet de loi prévoit que le ministre devra consulter les Premières Nations et collaborer avec elles à l'élaboration d'un mandat, d'une période définie pour l'élaboration conjointe et d'un engagement en matière de financement. Il permet la création d'institutions de gouvernance qui devront être dirigées par les Premières Nations à leur façon et à leur rythme.
    Il y a un mécanisme important pour conclure des accords transfrontaliers. L'Assemblée des Premières Nations n'a pas élaboré conjointement le libellé des articles relatifs aux zones de protection, mais, à la suite de ses représentations, le projet de loi comprend une disposition au sujet des accords transfrontaliers sur les sources d'eau pour veiller à ce que les Premières Nations participent à tous les accords qui les concernent.
    Il est essentiel de protéger les sources d'eau qui se trouvent souvent à l'extérieur des réserves. Ces zones se trouvent sur des territoires traditionnels et ancestraux des Premières Nations où les provinces et les territoires exercent des compétences élargies. Il ne suffit pas de régler le problème des sources d'eau dans les réserves; il faut aussi protéger celles qui fournissent de l'eau potable aux Premières Nations.
    Une des principales préoccupations soulevées par les Premières Nations est l'immunité et la responsabilité. Le projet de loi prévoit qu'aucun employé ou personne embauché par une Première Nation ne peut être tenu responsable s'il a agi de bonne foi dans l'exercice de ses fonctions en fournissant des services d'approvisionnement en eau et de traitement des eaux usées. Une Première Nation peut quand même être tenue responsable, et il est important de reconnaître qu'un financement suffisant va de pair avec l'acceptation de la responsabilité. Aucune Première Nation ne saurait assumer la responsabilité d'un système sous-financé.
    L'Assemblée des Premières Nations est déterminée à se défendre contre les amendements qui auraient pour effet de réduire ou d'affaiblir le projet de loi. Nous devons veiller à ce que celui‑ci soit aussi rigoureux que possible, et c'est pourquoi nous proposons des amendements pour l'améliorer en ce qui concerne les zones de protection, les normes, comme l'exigence qu'il y ait suffisamment d'eau pour répondre à tous les besoins, notamment pour l'agriculture, pour protection contre les incendies, pour les activités industrielles, commerciales, etc., mais aussi le cadre de financement, la Commission des eaux des Premières Nations, la responsabilité, l'immunité et l'indemnisation, et, enfin, le principe de faire de son mieux.
    Les détails de ces amendements figurent dans le mémoire que nous avons remis au Comité.
    Faute de loi, il n'existe actuellement aucune norme ni aucun règlement exécutoire, aucune reconnaissance des droits de gérance sur l'eau et les eaux usées des terres des Premières Nations et aucun mécanisme de financement durable à long terme. Une loi exhaustive conforme à la DNUDPA permettra de consolider l'engagement du Canada en matière de réconciliation. On dit depuis des décennies que cette question est urgente. Il est maintenant temps d'agir.
    En conclusion, le Canada reconnaît le droit d'accès à l'eau potable et à des services sanitaires pour tous et il a des obligations envers toutes les Premières Nations. C'est un moment important pour le Canada et pour les Premières Nations. Nous espérons que vous nous aiderez à faire avancer ce dossier.
    Je veux simplement vous dire chi-meegwetch d'aborder cet enjeu très important. Merci de votre temps.
(0830)
     C'est un moment important pour nous tous.
    Meegwetch de m'accueillir ici aujourd'hui.
    Merci beaucoup, madame.
    Nous allons maintenant écouter l'exposé préliminaire de la cheffe intérimaire Betsy Kennedy de l'Assemblée des chefs du Manitoba.
    Madame, vous avez un maximum de cinq minutes pour faire votre exposé.
    Bonjour.
    Je tiens à remercier le Comité permanent des affaires autochtones et du Nord de me donner l'occasion de m'adresser à lui aujourd'hui au sujet du projet de loi C‑61.
    Je suis la cheffe de la Première Nation de War Lake et je comparais devant vous comme grande cheffe intérimaire de l'Assemblée des chefs du Manitoba.
    Je voudrais commencer par expliquer l'importance de la crise de l'eau pour les Premières Nations du Manitoba.
    Comme chacun sait, le manque d'accès à l'eau potable a des effets catastrophiques sur notre santé. Certains, cependant, sont peut-être moins au courant de la multitude d'effets néfastes que cela a sur le bien-être. Beaucoup d'enfants qui vivent dans des communautés sans eau potable sont très malades. Ils ont des symptômes en raison desquels ils doivent chercher de l'aide chaque jour de leur vie. Cela dure parfois jusqu'à l'âge adulte. C'est très stressant pour les familles. Parfois, ils ne savent pas vers qui se tourner. Je l'ai vu de mes yeux. Ma propre famille vit la même situation — les Premières Nations reçoivent constamment des avis d'ébullition de l'eau.
    Je veux également vous dire que nous appuyons la Première Nation de Shamattawa dans ses préoccupations au sujet de l'eau potable. Nous devrions avoir accès à la même eau potable que tous les autres Canadiens. Nous avons légalement le droit d'être là, d'avoir accès à de l'eau potable et d'avoir de l'eau dans toutes les Premières Nations du Canada.
    La transmission d'enseignements et de connaissances importants de génération en génération a été perturbée. Cette perte a provoqué une déconnexion entre les Premières Nations et la terre, alors que ce lien est fondamental dans notre vision du monde. Il ne faut pas en sous-estimer les répercussions sur le bien-être, la spiritualité et les concepts identitaires.
    C'est à partir de ce savoir que je tiens à exprimer mes préoccupations au sujet de l'incidence du projet de loi sur le droit des Premières Nations à l'autodétermination.
    Le projet de loi s'inscrit dans un cadre semblable à celui des lois canadiennes en vigueur, qui limitent la reconnaissance du droit inhérent des Premières Nations à l'autonomie gouvernementale par des moyens législatifs. Pour faire court, le Parlement dit aux Premières Nations comment adopter des lois dans leurs champs de compétences propres, subordonnant les gouvernements autochtones et compromettant la relation de nation à nation. L'ACM rejette l'idée que la compétence et le pouvoir de légiférer des Premières Nations dépendent de la législation fédérale. Une nation ne saurait en contrôler ou en valider une autre dans le cadre d'une véritable relation de nation à nation. Cette relation suppose la reconnaissance égale des lois et de l'autorité de chacune.
    Il est également préoccupant que le projet de loi ne reconnaisse la compétence des Premières Nations que sur leurs terres, comme si l'eau était statique et ne s'écoulait pas d'une région à l'autre. Je tiens à souligner ce que la cheffe nationale a dit au sujet de l'eau qui coule dans de nombreuses directions. Nous n'utilisons pas seulement l'eau des Premières Nations, car nous vivons aussi à l'extérieur des réserves. Il y a des eaux de source dans des zones que nous voulons également protéger.
(0835)
     On ne reconnaît donc pas la compétence des Premières Nations sur une grande partie de leurs territoires ancestraux et issus de traités au Manitoba.
    Dans l'ensemble, le projet de loi ne reconnaît pas intégralement la compétence des Premières Nations et il témoigne d'un manque de respect pour nos lois. Il ne fait que reconnaître l'autorité des Premières Nations sur les ressources en eau à l'intérieur des limites de leurs terres, même si l'eau ne connaît pas de frontières.
     Quand on construit des bâtiments ou des routes, les constructeurs ne demandent pas leur avis aux Premières Nations. Nous savons où se trouvent les eaux grâce aux puits qui existent depuis longtemps. On se contente de les détruire au bulldozer. Ce sont ces eaux que nous voulons protéger. Ce sont des eaux propres. Dans certains cas, elles ne servent pas seulement à se désaltérer, puisqu'elles contiennent des minéraux qui aident à soigner.
     Pour pouvoir protéger l'eau, nous souhaitons inclure le principe de la protection de l'eau dans le projet de loi C‑61. Nous ne voulons pas protéger seulement les eaux des réserves, mais aussi celles qui s'écoulent à l'extérieur. L'eau est partout, et nous voulons la protéger.
    Il y a beaucoup d'entreprises industrielles en activité. C'est pour cela que beaucoup d'entre nous sont aux prises avec des problèmes de santé. Ces problèmes sont au cœur de ce que nous essayons de faire pour protéger nos enfants et nos petits-enfants de certaines maladies. Cela mérite notre attention.
    Les médecins...
(0840)
    Madame, je suis vraiment désolé de vous interrompre, mais nous avons dépassé le temps prévu pour les exposés préliminaires.
     Vous aurez du temps quand nous passerons aux séries de questions. Veuillez garder cette idée en tête pour pouvoir y revenir à ce moment‑là.
    Merci.
    Je suis désolé.
    La parole est au chef Kelsey Jacko, des Premières Nations de Cold Lake, pour un exposé préliminaire d'au maximum cinq minutes.
    Je m'appelle Kelsey Jacko et je suis le chef des Premières nations de Cold Lake. Merci de prendre du temps pour nous écouter aujourd'hui.
    Merci à la cheffe Cindy Woodhouse d'avoir contribué à la réalisation de ce projet.
    Vous avez reçu nos mémoires techniques, mais, aujourd'hui, je veux vous parler du fond du cœur. Je tiens à souligner que nous nous réunissons aujourd'hui sur les terres du peuple algonquin, qui a été et qui est toujours un intendant bienveillant de la terre.
    Dans ma culture, comme c'est le cas de tous les peuples reliés à la terre, l'eau est synonyme de vie. Avant même notre naissance, nous vivons dans l'eau du ventre de notre mère. Lue Chok Tue et Ha Tue sont depuis toujours la source autour de laquelle les miens ont axé leur vie depuis des temps immémoriaux. Les gens se déplacent d'une saison à l'autre — à Ha Tue, pour le piégeage et le camp d'hiver, et à Lue Chok Tue, pour les mois d'été. Nos pratiques relevant du traité dépendent de ces eaux. Dans le traité, le segment « tant que la rivière coulera » renvoie à la capacité de mon peuple de continuer à vivre et à faire vivre de nouvelles générations. C'est aussi la vie de nos poissons, de nos animaux, de nos oiseaux et de nos insectes.
    Nous comprenons l'intention d'une loi sur la gestion des eaux et nous convenons que la protection des sources d'eau est essentielle. Mais la loi ne fournit pas de vrais outils. C'est davantage une proposition qu'une mesure législative.
    Ma nation a la chance d'avoir accordé moins de permis au titre d'activités industrielles et agricoles que la plupart des autres nations. Pourtant, à mesure que la démographie autochtone augmentera, nous serons les derniers à avoir voix au chapitre au sujet de l'eau, même si nous étions ici bien avant que les Européens ne puissent même découvrir ce continent. À moins de changement, nos préoccupations seront toujours les dernières à être entendues à cet égard.
    Le refus systématique du Canada de financer les infrastructures d'approvisionnement en eau dans les réserves a placé la plupart des nations au dernier rang en raison de la loi albertaine du premier arrivé premier servi. D'autres provinces ont des lois semblables, et, tant que nos droits inhérents ne seront pas reconnus dans les cadres législatifs, nos communautés seront vulnérables.
    En Alberta, l'approvisionnement en eau est très problématique, parce que la croissance démographique fait augmenter les besoins et que les terres s'assèchent. Le Nord de la Saskatchewan ressemblera‑t‑il un jour au Colorado et atteindra‑t‑il la mer? Nos entreprises et nos villes vont-elles s'effondrer avec notre environnement? Le barrage Bennett a détruit le gagne-pain de nos cousins dénés à Fort Chipewyan.
    Dans les territoires visés par le Traité no 7, seulement 7 % des ressources sont affectées à la gestion du poisson, de la faune et de l'habitat en général. Les besoins en débit d'entrée, c'est‑à‑dire ce qui permet de soutenir les habitats essentiels, ne sont pas bien compris. En réalité, nous ne savons pas si la quantité d'eau actuelle est suffisante pour le poisson. Nous ne savons rien des quantités nécessaires aux milieux humides et aux aquifères qui les soutiennent — et par « nous », j'entends l'humanité.
    Aujourd'hui, les provinces, les organismes de réglementation et le secteur privé s'emploient à déverser l'eau des sables bitumineux dans la rivière, volontairement ou accidentellement — et ils mentent, comme dans le cas de Kearl. Nous savons que le Canada collabore avec le secteur privé pour faciliter un déversement au ralenti, mais ce n'est pas la solution. Ils ont dit qu'ils pouvaient nettoyer l'eau, et ils devraient le faire en effet. En fait, ils la prennent en otage.
    Dans ma région, on installe des conduites destinées à aspirer de grandes quantités d'eau de notre lac à des fins industrielles et domestiques. Cette année, le niveau du lac était si bas que les prélèvements ont dû être suspendus, et, à l'endroit où nos enfants ont appris à faire du kayak et du canot, il y avait 50 mètres supplémentaires de plage. Cela signifie que les entreprises se tournent tout simplement vers les eaux souterraines. Mais ces aquifères ont baissé d'une trentaine de mètres en raison de l'utilisation des sables bitumineux.
    L'AER, c'est‑à‑dire l'organisme de réglementation de l'énergie de l'Alberta, laisse les entreprises polluer les eaux souterraines peu profondes tant qu'elles paient leur bail. Ces entreprises peuvent partir n'importe quand, mais mon peuple est là pour toujours, et de nouvelles générations viendront.
    Les bassins hydrographiques qui se déversent de l'Alberta et de la Saskatchewan dont nous dépendons traversent le polygone de tir aérien de Cold Lake. Nous devrons composer avec trois gouvernements. Le MDN et la Saskatchewan ont tous deux appuyé les efforts visant à accroître la protection du territoire, et Parcs Canada travaille avec nous à la création d'un corridor écologique qui protégera la plus grande rivière qui coule dans notre lac, mais, de façon générale, nous savons que les changements climatiques entraîneront d'autres années de basses eaux. Personne ne semble s'intéresser à la surveillance et à la gestion nécessaires à la durabilité.
    Nous reconnaissons que le projet de loi est une tentative sincère pour faire avancer un dossier complexe. Nous devons veiller à ce qu'il offre des solutions plus concrètes et des outils vraiment utilisables. Sur le plan de la réglementation, la majorité des considérations relatives à l'eau sont liées à son utilisation. L'examen des répercussions environnementales de la baisse des nappes phréatiques et de la disponibilité de débits d'entrée arrive bon dernier. Ce n'est pas une façon de faire respecter le traité.
    Les Premières Nations de Cold Lake font partie d'une commission régionale des services publics qui est un partenariat entre ma nation et nos voisins immédiats. Beaucoup parmi eux puisent leur eau dans le lac Cold. Nous faisons de notre mieux pour travailler ensemble à la gestion des ressources locales.
(0845)
     Cependant, l'Alberta ne veut même pas partager les principaux indicateurs de rendement qu'elle utilise pour s'assurer que les permis d'utilisation d'eau sont soutenables. Le gouvernement de l'Alberta ne veut visiblement pas imposer de rationnement d'eau aux entreprises privées, même en période de crise. Cela étant, comment croire que la province va collaborer avec nous en matière de prévention?
    La surveillance des entreprises industrielles repose principalement sur des statistiques autodéclarées. Comme on l'a vu récemment au sujet des rejets de méthane, ces chiffres sont rarement fiables, malheureusement. Compte tenu de l'importance de la terre et des droits issus de traités de tous les peuples signataires, c'est en confiant la protection des sources d'eau aux nations autochtones que l'on pourra régler le problème du mandant-mandataire auquel se heurtent la plupart des gouvernements.
    Si j'ai bien compris, ce projet de loi vise à donner aux nations des outils clairs pour faire respecter leurs droits inhérents sur l'eau. Cependant, la version actuelle du projet de loi ne reconnaît pas concrètement ces droits. Il semble plutôt proposer une solution de coentreprise.
    Il faut comprendre que les nations n'ont jamais renoncé à leur droit de prendre soin de l'eau. C'est ce que nous entendons par droits inhérents. L'idée que l'on peut posséder l'eau, en vigueur à l'époque du traité, revenait à dire qu'on peut être propriétaire des étoiles: c'est une impossibilité ridicule. Le droit canadien reconnaît déjà ce concept. On peut vendre le droit d'accès, de déplacement, d'utilisation et de pollution, mais pas l'eau elle-même.
    Si vous tenez vraiment à protéger les sources d'eau et à reconnaître les droits inhérents et la responsabilité des Premières Nations comme protecteurs, je vous invite à réfléchir à ce que le projet de loi offre sur le terrain à nos techniciens, en particulier pour les nations à qui on demande de s'associer à des gouvernements provinciaux peu disposés à le faire ou qui seront forcées de s'engager dans un partenariat à quatre, comme le feraient les Premières Nations de Cold Lake, ou PNCL.
    Si votre objectif est d'être de bons partenaires de traité plutôt que de demander à la province de coopérer, vous devez reconnaître la nature intergouvernementale de cette ressource et utiliser le champ de compétence dont vous disposez dans ce projet de loi.
    Mahsi cho. Merci de votre temps.
    Merci beaucoup, monsieur Jacko.
    Nous allons passer à notre quatrième et dernier exposé préliminaire, celui du chef Trevor John.
    Vous avez au maximum cinq minutes, monsieur.
    D'abord et avant tout, je tiens à remercier le Créateur de nous avoir accordé cette belle journée et cette rencontre.
    Je tiens à remercier notre cheffe nationale, Cindy Woodhouse Nepinak, de nous avoir aidés à avoir cette rencontre avec vous tous.
    J'aimerais remercier notre aînée de nous avoir bénis par une prière ce matin. Il est toujours bon de commencer par une prière dans notre culture, alors merci à notre aînée Betsy.
    Pour ceux d'entre vous qui ne me connaissent pas, je m'appelle Trevor John. Je suis de la Nation crie de Kehewin, Traité no 6, région de l'Alberta.
    Tansi, Boozhoo, et bonjour.
    La Nation crie de Kehewin, comme bon nombre de nos tribus cries voisines, est située près d'une source d'eau. Ce n'est pas par erreur. Nos ancêtres, à l'époque des traités, et avec les représentants du Dominion du Canada, ont délimité des espaces que la Loi sur les Indiens appelle des réserves, où notre peuple devait avoir accès au droit fondamental à l'eau potable. Les traités eux-mêmes sont considérés comme durables à perpétuité tant que le soleil brille, que l'herbe pousse et, oui, que l'eau coule.
    Le Canada a l'obligation durable, en vertu de notre relation créée par traité, de veiller à ce que les Premières Nations signataires de traités soient soutenues en ce qui concerne l'eau et les infrastructures connexes. Ce projet de loi vise à abandonner tout cela en faveur du droit à l'autodétermination prévu à l'article 35. C'est inacceptable, honteux et immoral, et pourtant, voilà exactement où nous en sommes en 2024.
    Il faut dire que le préambule du projet de loi C‑61 contient des mots qui sonnent bien et qui parlent bien de réconciliation et de reconnaissance. Cela semble bien à première vue, mais cela n'oblige pas le Canada ou l'Alberta à s'assurer que ce projet de loi atteindra l'objectif ciblé par le préambule, c'est‑à‑dire assurer la salubrité et la viabilité de l'eau et de l'infrastructure connexe si ce n'est qu'ils doivent faire de leur mieux.
    Si ce projet de loi est adopté, nous estimons qu'il ne sera pas lié à la mise en œuvre des traités, aux objectifs de planification ou aux jalons. Le projet de loi C‑61 ressemble à une promesse d'avenir, mais il ne correspond pas à la réalité de l'Alberta. Ce projet de loi n'offre pas de garantie, ou ne lie pas l'Alberta, et d'après notre vaste expérience avec l'Alberta, il n'existe actuellement aucune reconnaissance ou relation nous permettant d'être sûrs que nos peuples auront une infrastructure durable.
    Le projet de loi C‑61 s'intitule « Loi concernant l'eau, les sources d'eau, les eaux usées et les infrastructures connexes sur les terres des Premières Nations ».
    Dans le projet de loi, il est dit « sur et sous les terres des Premières Nations », et la compétence en vertu du traité s'entend de l'ensemble du territoire visé par le traité. Pour bon nombre de nos nations, cela va bien au‑delà des frontières provinciales où nos réserves sont désignées. C'est ce qu'il faut concilier pour que le projet de loi ait un sens.
    Dans son plan d'action, le Canada s'engage à « mettre en œuvre honorablement les traités historiques et modernes », conformément à l'article 37 de la déclaration des Nations unies. Le projet de loi C‑61 doit chercher à assurer cela, dans le cadre des processus de discussion du Canada.
    En tant que chef de ma nation, j'estime que cela n'honore pas l'engagement à l'égard de la déclaration des Nations unies, et que ce projet de loi, comme ceux qui l'ont précédé, nous laissera tomber.
    Le projet de loi C‑61 ne donne aux Premières Nations signataires de traités aucune assurance d'améliorer la salubrité de l'eau et de répondre aux besoins actuels ou croissants en matière d'infrastructure hydraulique. Il contient des échappatoires importantes permettant au Canada de retarder la mise en oeuvre et les décisions concernant les engagements à fournir du financement pour répondre à des besoins de longue date. Il ne prévoit pas d'obligations contraignantes visant à assurer des ressources adéquates et cohérentes pour répondre aux besoins ou à la façon dont ces besoins réels pourraient changer au fil du temps, compte tenu des changements climatiques et d'autres répercussions connexes.
    Le projet de loi dit que le Canada fera de son mieux pour assurer l'accès à de l'eau potable propre et salubre dans les réserves, mais ce n'est pas contraignant. Sans plan de mise en oeuvre clair qui tienne compte des coûts réels et complets en fonction de ces besoins, nous préparons le terrain pour de nouveaux défis pour les prochaines générations. C'est inacceptable.
(0850)
     Le Canada parle souvent d'une approche pangouvernementale en matière de réconciliation. En ce qui concerne l'eau, une approche bilatérale des traités pourrait y contribuer, mais au lieu de cela, cet été, par l'entremise d'un décret, le Canada a donné la permission aux gouvernements de l'Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba de redistribuer l'eau à leurs fins, sans aucune interaction avec nos gouvernements. Ce n'est pas un bon point de départ pour que nous ayons l'assurance que la formulation « faire de son mieux » nous aidera, et que nos besoins en matière d'eau et d'infrastructures connexes seront prioritaires.
    Depuis 2019, le Canada a indiqué qu'il transférerait graduellement tous les programmes et services aux Premières Nations qui le souhaitent. Il utilise des normes de comparabilité qui sont des normes provinciales pour la mise en oeuvre du transfert de responsabilité, et il appelle cela une « autodétermination ». Il nous semble, en tant que dirigeants des traités, que le Canada, par l'entremise de SAC, essaie de se soustraire à son obligation légale parce qu'il sait ce que nous savons, car nous l'avons dit, à savoir que le déficit d'infrastructure dans nos nations est beaucoup plus grand que ce que l'APN lui a dit.
     Aujourd'hui, je demande, au nom de mon peuple, que le Canada prenne des mesures concrètes et travaille avec nous pour répondre aux besoins réels dont il est responsable en vertu des traités. Comme nous l'avons dit aux ministres, le mot « traité » signifie qu'il faut faire preuve de bonne foi pour s'adapter aux besoins réels des nations en matière d'eau et d'infrastructure, et veiller à ce que le projet de loi C‑61 soit modifié pour répondre à ces besoins, comme promis dans le cadre de la relation scellée par traité.
     Merci.
(0855)
     Merci beaucoup, chef.
     Sur ce, nous allons passer à notre premier tour de questions. Je vais le raccourcir un peu, car je voudrais que nous puissions avoir deux tours. Nous allons accorder cinq minutes à chacun pour le premier tour.
     Nous allons commencer par le Parti conservateur.
    Monsieur Melillo, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier toutes les personnes qui se sont jointes à nous pour parler de cette importante mesure législative.
     Je tiens d'abord à offrir mes condoléances à la cheffe Kennedy à l'occasion du décès de la grande cheffe Merrick. Je sais que cela a été un choc pour bien des gens partout au pays, y compris moi-même. J'avais justement l'intention de la rencontrer à peu près à ce moment‑là, alors cela a été tout un choc.
     Je tiens à vous remercier du travail que vous avez accompli dans l'intervalle et de votre présence ici pour veiller à ce que l'Assemblée des chefs du Manitoba} ait voix au chapitre pendant cette importante discussion.
     Je vais commencer par vous, si vous le permettez, cheffe Kennedy.
    Je me demande si vous pourriez décrire la participation de l'Assemblée des chefs du Manitoba au processus de consultation sur l'élaboration de ce projet de loi.
     Cheffe Kennedy, vous allez devoir baisser votre microphone pour que nous puissions vous entendre.
    Merci.
     Merci.
     En 2013, l'ACM a élaboré un projet de stratégie sur l'eau des Premières Nations dans le cadre d'un processus qui a permis aux Premières Nations du Manitoba de se réunir pour exprimer leurs points de vue et partager leurs connaissances. Cette ébauche décrit les principales questions et mesures liées aux droits relatifs à l'eau, à l'accès, à la protection et à la gestion qui pourraient être élaborées dans le contexte du projet de loi C‑61.
    Merci.
     Merci beaucoup. Je comprends cela.
     J'aimerais poser une question à la cheffe nationale Woodhouse.
     Des représentants de SAC et des témoins qui ont comparu devant le Comité nous ont dit que le gouvernement a tenu compte de la rétroaction directe des Premières Nations pour élaborer ce projet de loi. Pouvez-vous nous donner des exemples de commentaires directs de l'APN qui ont été intégrés dans le projet de loi C‑61?
    Je vais devoir demander cela à mon personnel, s'il vous plaît, parce qu'il a passé les notes au peigne fin.
    L'un des principaux exemples de rétroaction directe de l'APN et des Premières Nations que le gouvernement a intégré dans l'avant-projet de loi est la protection des sources d'eau. Je pense que c'est vraiment l'exemple clé. Cela se fait au moyen d'un certain nombre de mécanismes, mais c'est vraiment le principal changement par rapport aux ébauches précédentes qui reflétaient les commentaires des Premières Nations et de l'Assemblée des Premières Nations.
     Je comprends cela aussi. Merci.
    Je veux revenir à la cheffe nationale ou à la personne qui répondra.
    Vous avez mentionné certains amendements, et il y en a un concernant les zones de protection également. Je sais qu'il y a un mémoire, mais pour le Comité et pour ceux qui nous regardent, pourriez-vous décrire plus en détail l'amendement de l'APN concernant les zones de protection?
(0900)
     Je suis désolé. Je n'ai pas tout à fait compris, monsieur Melillo.
     La cheffe nationale a fait allusion à un amendement concernant les zones de protection. Je me demande si vous pourriez parler de l'amendement proposé.
     Malheureusement, j'avais déjà quitté l'APN lorsque ces amendements ont été proposés. Je vais demander à mon collègue de vous en parler.
    Je vous remercie de la question.
    C'est l'un des principaux amendements que l'APN propose relativement au projet de loi.
    En ce qui concerne les zones de protection, l'ébauche, dans sa forme actuelle, ne reconnaît que partiellement la compétence des Premières Nations sur les sources d'eau hors réserve. En fait, cette reconnaissance et cette affirmation dépendent de la conclusion d'ententes entre les Premières nations et les gouvernements provinciaux, fédéraux et territoriaux.
    Maintenant, comme d'autres témoins vous l'ont dit, cette compétence — la compétence inhérente des Premières Nations de protéger leurs sources — ne dépend pas d'une loi fédérale, que ce soit ce projet de loi ou toute autre loi. Cela ne dépend pas de la conclusion d'un accord par les Premières Nations.
    Les amendements que nous proposons visent à reconnaître pleinement cette compétence. L'un des mécanismes que nous proposons a déjà été examiné et approuvé par la Cour suprême du Canada. C'est le mécanisme qui était prévu dans le projet de loi C‑92, Loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis.
    Ce mécanisme, à notre avis, rendrait justice aux Premières Nations en ce qui concerne la reconnaissance et l'affirmation de leur compétence inhérente sur les sources d'eau et la protection de ces eaux.
     Merci beaucoup, monsieur Melillo.
    Nous allons maintenant passer au deuxième intervenant.
    Monsieur Carr, vous avez cinq minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
     J'aimerais commencer par deux remarques personnelles et faire écho à certains sentiments qui ont déjà été exprimés.
    Grande cheffe Kennedy, je suis heureux d'être ici avec vous ce matin. En tant que seul représentant du Manitoba autour de la table, je peux certainement partager les sentiments d'un grand nombre de députés et d'habitants de la province à l'égard de notre chagrin et de notre choc à la suite du décès de la cheffe Merrick. J'ai très hâte de travailler avec vous et de poursuivre l'héritage, la voie et la vision qu'elle a établis alors que vous assumez ces importantes responsabilités en tant que grande cheffe de l'ACM.
    Cheffe Woodhouse, c'est un moment spécial pour moi, parce que nous nous connaissons, vous et moi, depuis l'âge de 15 ans. Je vous ai vue travailler fort et devenir une dirigeante inspirante et éloquente. Une bonne partie de ma compréhension de notre histoire en ce qui a trait aux peuples des Premières Nations, à l'élaboration de nos politiques publiques et à notre cheminement vers la vérité et la réconciliation a été éclairée par le mentorat, l'orientation et l'amitié que vous m'avez fournis au fil des ans. Être avec vous à ce titre est très spécial pour moi.
    J'aimerais prendre un peu de recul, cheffe nationale, et vous demander de parler de façon plus générale de l'évolution de ce dossier de l'eau au cours des dernières années, de votre point de vue. En tant que cheffe régionale, vous avez consacré pas mal de temps à son élaboration.
    Je me demande si vous pouvez nous dire comment vous avez vu l'évolution de notre politique publique sur la protection des droits des Premières Nations, particulièrement en ce qui concerne l'eau, depuis que vous êtes cheffe régionale, et où nous en sommes aujourd'hui, alors que nous parlons de la mise en œuvre des mesures figurant dans le projet de loi C‑61.
     Certainement, et je vous en remercie.
    Je suis heureuse de vous voir ce matin. Je ne peux m'empêcher de me souvenir de votre père lorsqu'il fréquentait ces lieux. Je suis de tout cœur avec vous et votre famille, et je vous offre mes sincères condoléances à l'occasion de son décès.
     Je suis heureuse que nous soyons réunis ici aujourd'hui. C'est un plaisir de vous voir tous.
    Je dois dire que c'est un moment très important pour les Premières Nations du Canada. Je sais qu'il y avait une ancienne loi et que nous l'abrogeons. Ne revenons pas à la façon dont ce projet de loi a été élaboré dans le passé. C'était très blessant pour les Premières Nations. Je sais aussi qu'il n'est pas facile de travailler conjointement, et je sais que nous sommes ici pour parler d'amendements à ce projet de loi.
    Quand je vivais dans une communauté des Premières Nations lorsque j'étais une petite fille, je pouvais facilement boire de l'eau. C'est là que j'ai grandi. Je sais que nous avons fait beaucoup de chemin dans les communautés des Premières Nations, mais nous n'en avons pas fait assez. Après avoir observé la façon dont le premier élément de cette loi a été conçu, je pense que si cela avait été fait comme il faut, nous ne serions sans doute pas ici aujourd'hui. Nous aurions suivi une voie différente. Nous sommes ici maintenant, et nous sommes maintenant ensemble. Nous sommes ici pour essayer de nous entendre sur un projet de loi. Nous avons entendu les amendements que de nombreux intervenants ont proposés avant moi, et je pense que si nous pouvons inclure certains de ces éléments dans ce projet de loi, nous pourrons faire avancer les choses très rapidement.
    En même temps, je sais que les Premières Nations n'ont jamais cédé leur compétence sur leurs cours d'eau traditionnels ou leurs sources d'eau. L'Assemblée générale des Nations unies reconnaît le « droit humain à l'eau et à l'assainissement » et le droit à un environnement propre, sain et durable. Nous n'avons pas cela à l'heure actuelle, alors je sais que la loi est un outil nécessaire pour apporter des changements significatifs à la crise actuelle de l'eau à laquelle font face les Premières Nations partout au Canada.
    Les lois et la façon dont elles sont élaborées sont essentielles pour la qualité de vie et l'autodétermination des Premières Nations. Toutefois, le processus ne se limite pas à la consultation. Il exige une coopération et une collaboration de bonne foi. C'est le principe à la base d'une élaboration conjointe qui fait référence à un processus de collaboration bidirectionnelle. C'est le fondement de l'engagement que le Canada a pris en vertu de l'article 5 de la loi sur la déclaration des Nations unies, la LDNUDPA, qui exige que le projet de loi réponde à cette exigence. Tous les yeux le scruteront pour voir s'il y répond et si le Canada est sincère dans les engagements pris dans la LDNUDPA.
    C'est un moment important pour les Premières Nations du Canada. Je sais que dans les Premières Nations, nous n'avons pas les choses élémentaires que beaucoup de Canadiens tiennent pour acquises. J'ai vécu dans deux communautés des Premières Nations. Je n'ai jamais eu accès à de l'eau potable dans ni l'une ni l'autre. J'ai tellement l'habitude de boire de l'eau embouteillée qu'il est parfois difficile, quand on sort d'une réserve, de devoir boire de l'eau comme celle qui se trouve à côté de moi aujourd'hui, parce que nous sommes tellement habitués à boire de l'eau embouteillée. Je pense que c'est la réalité pour de nombreuses Premières Nations du pays, et j'espère que nous pourrons un jour régler ce problème.
    Je suis également découragée lorsque je vois des pêcheurs dans le lac Winnipeg. Je dois dire que les pêcheurs des Premières Nations de Winnipeg sortent des filets pleins de choses de toutes sortes. Nous devons faire mieux dans ce pays. Cela commence à se voir dans nos eaux. Les animaux commencent à nous le montrer. Nos gens commencent à nous le montrer.
    J'ai hâte de travailler avec vous tous pour trouver la voie à suivre, et je pense que c'est un pas dans la bonne direction pour aller dans la bonne voie ensemble.
    Merci.
(0905)
     Merci beaucoup, monsieur Carr.

[Français]

     Monsieur Lemire, vous avez la parole pour cinq minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Tout d'abord, je veux également offrir mes condoléances à la grande cheffe Kennedy, ainsi qu'à tous les membres des Premières Nations du Manitoba.
    Grande cheffe Woodhouse, nous avons entendu les appels d'un certain nombre d'organisations autochtones en faveur de changements pour renforcer le projet de loi et veiller à ce que leurs droits issus de traités, comme les droits relatifs à leurs terres, ne soient pas suspendus ou érodés par la nouvelle loi. Plusieurs arguments ont été entendus lors de l'assemblée générale de l'Assemblée des Premières Nations, qui s'est tenue à Montréal en juillet dernier et à laquelle j'ai assisté. Plusieurs arguments ont aussi été présentés à ce comité. Toutefois, nous n'avons pas à ce jour reçu le mémoire de l'Assemblée des Premières Nations. Pouvez-vous nous décrire concrètement les amendements que vous recommandez? Vous nous les avez mentionnés, mais j'aimerais que nous puissions les noter plus exactement.

[Traduction]

    Je vous remercie de la question.
    En ce qui concerne les droits issus de traités des Premières Nations, cela nous ramène encore une fois aux zones de protection.
    Nous comprenons que le projet de loi ne définit pas pour l'instant les « zones de protection ». L'un des amendements proposés par l'Assemblée des Premières Nations est donc le début d'une définition des zones de protection qui inclurait à la fois le territoire traditionnel et le territoire visé par un traité des Premières Nations lorsque les sources d'eau passent de ces territoires aux terres des Premières Nations.
    De plus, bien sûr, les Premières Nations ont le droit inhérent et issu de traités de protéger les sources d'eau dans ces territoires, et notre amendement en tient compte.
(0910)

[Français]

     Selon vous, comment est-ce coordonné avec les provinces, qui sont responsables de la gestion de l'eau?

[Traduction]

     Cela nous ramène au mécanisme dont j'ai parlé plus tôt. Comme je l'ai dit, c'est un mécanisme qui a déjà été mis à l'essai et approuvé par la Cour suprême du Canada en ce qui concerne la coordination et l'application des lois dans les endroits où il y a chevauchement de compétences. Nous croyons que ce mécanisme, adapté de ce qu'on appelait le projet de loi C‑92, permettrait de régler ces chevauchements de compétences et de coordonner les lois d'une manière qui respecte la compétence des Premières Nations, tant les droits inhérents que les droits issus de traités.

[Français]

    De quelle façon voyez-vous les négociations quand les cours d'eau coulent dans plus d'une province? Comment définit-on les zones de protection ou les aires protégées?
    Je pense par exemple à la rivière Kitchissippi, ou rivière des Outaouais: au-delà des champs de compétence, comment peut-on garantir sa protection et assurer la qualité de l'eau?

[Traduction]

    C'est une question de coordination. Nous vivons dans un pays de fédéralisme coopératif. Cela exige que les provinces, le gouvernement fédéral et les Premières Nations participent aux discussions et aux négociations lorsque les compétences se chevauchent.
    Malheureusement, si l'une de ces parties choisit de ne pas se présenter à la table ou refuse de conclure une entente, cela peut, de toute évidence, retarder les négociations et nous placer dans une impasse.
    Cela ne peut pas être permis. Nous ne pouvons pas faire obstacle à la compétence des Premières Nations dans ces circonstances. C'est une compétence inhérente. Elle doit passer avant les autres compétences et devrait avoir la force d'une loi fédérale et, par conséquent, avoir préséance sur les lois provinciales lorsque les gouvernements provinciaux refusent de conclure de tels accords de coordination.

[Français]

    Dans un esprit de dialogue de nation à nation, je me permets amicalement d'inviter l'Assemblée des Premières Nations à rendre ses documents disponibles en français. Ce serait évidemment plus facile pour les communautés francophones, qui, en majorité, sont au Québec.
    Quels éléments pourrions-nous ajouter au préambule? De l'avis de tous les députés, il manque un élément fondamental au préambule. Il faudrait y ajouter un élément visant à reconnaître l'importance de l'élaboration des traités et des initiatives de réconciliation, ainsi qu'à guider des partenariats constructifs.

[Traduction]

     Oui, c'est assez difficile lorsqu'il s'agit de discuter avec les provinces.
    Notre traité est antérieur à la création des provinces ou à quoi que ce soit d'autre, et c'est une question de confiance. Beaucoup de provinces ne sont pas transparentes avec les Premières Nations. Nous devons participer à la surveillance pour nous assurer que l'eau est salubre.
    Comme je l'ai dit, nous sommes les derniers sur la liste, et il ne devrait pas en être ainsi. Nous étions ici avant la création du Canada. C'est un peu difficile lorsque vous avez un partenaire qui ne veut pas travailler avec vous, alors bien souvent, les pourparlers tombent dans l'impasse ou piétinent. C'est très frustrant pour les Premières Nations.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur Lemire.

[Traduction]

    Nous allons maintenant passer à Mme Idlout, qui se joint à nous par vidéoconférence.
    Vous avez cinq minutes ou moins.
    Qujannamiik, Iksivautaq.
    Je remercie tous les témoins de comparaître devant notre comité sur une question aussi importante.
    Je partage les sentiments de la cheffe par intérim Betsy Kennedy au sujet de la perte que nous ressentons tous en raison du décès soudain de la cheffe Merrick. Elle a joué un rôle très important, et nous vous sommes très reconnaissants d'assumer ce rôle en cette période d'urgence. Je vous remercie également de votre témoignage.
    J'avoue être déçue de ce comité, parce que le temps dont nous disposons pour poser des questions aux nombreux témoins a été limité. Je suis déçue, parce que nous essayons de faire comparaître le plus de témoins possible, surtout en sachant que sur les 634 Premières Nations, seulement 31 % environ ont été consultées dans le cadre de l'élaboration de ce projet de loi.
    À mon avis, cela ne respecte pas la norme de l'obligation de consultation. Je pense qu'il est très important que nous entendions le plus de témoins possible.
    Nous avons entendu un excellent témoignage, par exemple, de la part du chef Trevor John, qui nous a fait part très clairement des préoccupations concernant les sources d'eau, la compétence et l'infrastructure durable. Ces choses ne sont pas assez claires dans le projet de loi, surtout en cette période où nous savons tous que les Premières Nations ont géré l'eau avec leurs propres lois avant que le Canada ne leur vole leur compétence, et il est tout à fait inacceptable qu'il essaie de la restituer dans le projet de loi C‑61.
    Nous devons faire un meilleur travail pour nous assurer que les traités des Premières Nations sont mis en œuvre et que le droit des Premières Nations à l'eau est respecté, ce qui n'est pas le cas dans le projet de loi C‑61.
    Cheffe Cindy Woodhouse Nepinak, je vous félicite d'être devenue cheffe nationale de l'Assemblée des Premières Nations. Je voudrais parler de la cause de la Première Nation Shamattawa devant la Cour fédérale, dans laquelle l'avocat fédéral, Scott Farlinger, a d'abord reconnu qu'il y a eu un sous-investissement historique dans l'eau des Premières Nations, mais a également fait valoir que « tout va mieux maintenant ».
    Pourriez-vous répondre à cela, cheffe Woodhouse?
(0915)
    Absolument. Nous sommes solidaires de Shamattawa. J'ai grandi comme... Je compatis avec les gens de là‑bas, et j'invite tous les membres du Comité et le Canada à venir visiter nos communautés et à voir ce à quoi nos Premières Nations sont confrontées au quotidien en ce qui concerne des droits fondamentaux de la personne, comme l'accès à l'eau potable et aux sources d'eau.
    Quand vous vous rendez dans ces communautés, vous constatez la disparité à laquelle font face bon nombre de nos Premières Nations. Ce pays a beaucoup de comptes à rendre sur ce que nous avons vécu depuis 150 ans. Je sais que ce n'est pas ce que nous entendons au sujet de la relation entre les Premières Nations et le reste du pays. Je suis heureuse que nous soyons enfin ici, que nous ayons ces discussions très difficiles les uns avec les autres. Elles ne sont pas toujours faciles, mais elles sont absolument nécessaires, même lorsqu'il s'agit de choses comme l'eau potable et l'assainissement.
    Je sais qu'il y a beaucoup de travail à faire. Je sais que c'est une situation très difficile, et je suis de tout cœur avec la Première Nation de Shamattawa.
    Le Canada doit redresser les torts causés à la Première Nation de Shamattawa. Nous ne pouvons pas la laisser en suspens. En ce qui concerne la ministre, je me réjouis de ses commentaires sur l'eau et de ses efforts à cet égard, mais quand les avocats du ministère de la Justice font de telles déclarations... La main droite a besoin de savoir ce que fait la main gauche quand vous allez parler à mon peuple, aux Premières Nations. Vous ne pouvez pas dire une chose, après quoi vos avocats viennent dire autre chose d'un point de vue juridique. Sur le plan politique — oui, d'accord, la volonté d'agir est là. Je suis heureuse que vous soyez tous ici aujourd'hui. Je vous félicite tous d'être ici avec nous.
    En même temps, vos avocats rédigent toutes ces lois, et c'est ce qui suscite notre méfiance. Ces avocats sont là, puis ils vont en cour et disent ce genre de stupidités aux Premières Nations. Ils nous donnent l'impression que... Je pensais que nous faisions des progrès.
    En tant que cheffe nationale, j'ai trouvé difficile d'entendre cela la veille de ma venue ici. Je suis heureuse que nous travaillions à ce projet de loi et que nous essayions d'élaborer et d'examiner ensemble certains de ces éléments, mais nous devons vraiment travailler plus fort ensemble. De toute évidence, vous voyez des failles, même avant que le Comité ne se réunisse ce matin.
    Comme je l'ai dit, je suis de tout cœur avec la Première Nation de Shamattawa. Le Canada doit redresser les torts qui lui ont été causés.
    Merci.
     Merci beaucoup.
    Ma prochaine question s'adresse à...
    Je suis désolé, madame Idlout; je vais devoir vous interrompre. Je m'excuse, mais le temps est écoulé. Vous aurez une autre occasion de poser une question.
    Nous allons passer à notre deuxième tour. Je vais le réduire de moitié. Je veux faire en sorte que tout le monde ait l'occasion d'intervenir de nouveau.
    Je vais donner la parole à M. Shields pour deux minutes et demie.
(0920)
    Merci, monsieur le président.
    Merci, chers témoins, pour votre présence.
    Je vous remercie d'avoir déclaré que malgré que les ministres reconnaissent publiquement la responsabilité fédérale en matière de crise de l'eau, ils continuent d'appuyer une position tout à fait contraire devant les tribunaux. C'est ce qu'a dit hier la fédération du Manitoba. Je le comprends.
    Lorsque je regarde ce projet de loi, je vois le gouvernement canadien, les gouvernements provinciaux, la commission canadienne des eaux et la commission des eaux des Premières Nations. Quoi que vous disiez, avec ce projet de loi, nous n'allons pas résoudre la crise de l'eau demain. Nous allons passer des années devant les tribunaux. Vous le savez.
    Si ce projet de loi autorisait le gouvernement à construire des stations d'épuration en coopération avec toutes les nations du pays à partir de demain, nous pourrions mettre en place des centres de formation régionaux dotés d'un personnel de soutien pour former les personnes chargées de l'épuration des eaux, disponibles 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. Nous pourrions mettre en place un système permettant d'approvisionner ces stations d'épuration, à l'instar des transferts d'urgence dans le domaine de la santé, afin qu'un avion puisse vous apporter immédiatement une pièce. Si nous avions une loi en ce sens, nous pourrions commencer à résoudre ces problèmes rapidement. Ce projet de loi me dit que nous allons être bloqués devant les tribunaux pendant des années, et que vous n'aurez pas d'accès à l'eau potable pendant des années.
    Nous devons modifier la loi pour agir dès maintenant. Ce projet de loi ne fonctionne pas. Il va nous bloquer devant les tribunaux pendant des années dans de nombreuses administrations. Je veux que le problème de l'eau soit réglé tout de suite. Pas vous? Oui. Ce projet de loi n'y parviendra pas. Il ne fera que nous paralyser devant les tribunaux.
    Je ne suis pas sûr qu'il y avait une question directe.
    Je suis frustré.
    Je comprends.
     J'ai écouté les gens. Je connais les problèmes. Je sais ce que sont les stations d'épuration. J'ai travaillé dans ce domaine. Nous pourrions régler ce problème si ce projet de loi était adéquat. Mais ce n'est pas le cas. Il nous lie aux commissions des eaux et aux gouvernements autochtones, provinciaux et fédéraux. Nous nous retrouverons tous devant les tribunaux. Il ne permet pas d'obtenir de l'eau potable, pas le moins du monde.
    J'invoque le Règlement.
     Vous pouvez invoquer le Règlement, monsieur McLeod.
    Monsieur le président, je sais que M. Shields est enthousiaste et qu'il a le vent en poupe, mais il ne parle pas dans le micro. Pour les personnes qui, comme moi, ont des problèmes d'audition, il est difficile de le suivre.
    Je suis désolé.
    Je pense avoir été assez clair. Je suis très frustré. Je suis frustré par un projet de loi dont je pense qu'il finira devant les tribunaux, avec des conflits de compétence. Ce projet de loi ne prévoit pas de processus permettant d'aller de l'avant, de commencer à construire des stations d'épuration, de former le personnel, de préparer l'équipement et de livrer les pièces. C'est ce qu'il faut faire. Ce projet de loi ne fera qu'entraîner des poursuites, des différends et des années de querelles juridiques.
    Je veux qu'il se passe quelque chose pour qu'elle puisse boire de l'eau au robinet, et pour que vous puissiez laver vos enfants dans une baignoire dans votre communauté sans craindre qu'ils meurent d'un cancer. C'est à cela qu'il faut remédier.
    Merci beaucoup, monsieur Shields.
    Merci. Je vais juste dire quelque chose à ce sujet, et j'ai quelque chose à vous reprocher à tous les deux, les libéraux et les conservateurs.
    Les conservateurs avaient un projet de loi en 2013 que nous avons dû abroger. C'est pourquoi nous sommes ici. Nous essayons d'y remédier par le biais de ce projet de loi. Je sais que nous avons encore beaucoup de chemin à faire, mais je pense que vous êtes tous les deux fautifs.
    Le gardien du savoir avec moi ici a travaillé toute sa vie pour nous au sein des Premières Nations, et j'aimerais donc lui faire l'honneur et le respect de le laisser dire quelques mots.
    Merci, cheffe nationale et monsieur le président.
    Comme l'a dit la cheffe nationale, je travaille dans ce domaine depuis 2006, et avant cela avec les Chiefs of Ontario au sujet de la tragédie de Walkerton.
    Lorsque j'étais à l'APN, nous avons eu l'occasion de rencontrer l'ancien ministre Prentice, paix à son âme, et lorsqu'on lui a demandé ce qu'il faudrait faire pour résoudre ce problème, il a répondu que c'était une question d'argent, et c'est tout. C'est une question d'argent et de volonté du gouvernement de mettre sa volonté et ses efforts au service de ce que vous venez de mentionner, monsieur Shields.
    Merci beaucoup, monsieur Shields.
    Nous passons donc ensuite à Mme Atwin, qui a deux minutes et demie.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je sais que nous avons très peu de temps. Il y a tant de choses que je pourrais dire, mais je veux entendre les voix des peuples autochtones. Je veux entendre les voix de nos dirigeants qui sont ici aujourd'hui. C'est formidable d'avoir votre témoignage.
    Très rapidement, je vais entrer dans le vif du sujet.
     Cheffe nationale, vous participez depuis le début à ce projet de loi. Comment l'APN a‑t‑elle élaboré et structuré ce processus de mobilisation?
    Nous avons beaucoup entendu parler de cette consultation. Certains se sentent exclus. Pouvez-vous nous parler de ce processus?
(0925)
    Je le peux, absolument. Je vous remercie de cette question.
    Je sais que nous avons constaté qu'il y a un fossé énorme dans ce pays, bien sûr. Je sais que ces discussions sont toujours difficiles à mener, mais je me dois de féliciter de nombreux techniciens, le personnel de l'Assemblée des Premières Nations et les chefs d'avoir donné un mandat. Nos chefs viennent à nos assemblées. Ils nous disent ce qu'ils souhaitent. Nous mettons cela en avant aujourd'hui de manière positive. Il est certain qu'ils nous demandent depuis de nombreuses années d'essayer de corriger et d'abroger certains de ces éléments, et de veiller à ce que quelque chose nous protège.
     Comme nous le voyons actuellement, il y a beaucoup de rejets dans les eaux. Tout le monde est concerné. Tous les secteurs sont en cause. Nous sommes tous fautifs, chacun d'entre nous.
    La plupart du temps, nous ne tenons pas compte de notre empreinte carbone, moi y compris. Je sais que nous devons faire quelque chose.
    Je félicite les bureaucrates et les nombreuses personnes présentes autour de cette table qui se sont engagées à essayer de résoudre ce problème. Je vous demande d'examiner sérieusement les amendements à ce projet de loi déposés par l'Assemblée des Premières Nations. Allons très rapidement de l'avant pour obtenir la sanction royale.
    Nous savons tous que les choses tournent au ralenti, mais dans cette enceinte, nous avons la possibilité de prendre notre souffle et de faire du travail tous les jours. Améliorons les choses pour que nos enfants n'aient pas à discuter de ce même problème et pour que nous nous protégions pour les générations à venir.
    Dans l'état actuel des choses, quand on voit des litres d'eaux usées brutes déversées dans les rivières et des produits chimiques déversés dans nos rivières et nos lacs, quel tort sommes-nous en train de nous infliger? Il n'y a pas de planète B et il n'y a pas de surplus d'eau quelque part. La plupart de cette eau se trouve dans notre beau pays. Travaillons‑y et restons unis.
    Je m'arrêterai là. Je ne sais pas si mon gardien du savoir aimerait ajouter autre chose.
    Merci, cheffe nationale.
    Monsieur le président, je serai très rapide sur une question plus technique.
    En réalité, l'APN a tenu des séances de mobilisation dans toutes les régions. Nous avons rencontré des techniciens des Premières Nations et d'autres personnes. Cela a donné lieu à des documents résumant 26 points conceptuels de ce que nous avons entendu à travers le pays. Ceux‑ci ont été regroupés dans les six points essentiels que la cheffe nationale a mentionnés au début, notamment la responsabilité, le financement et la protection des sources d'eau.
    Tel était le processus. À l'époque, l'APN a fait preuve de diligence et a obtenu l'avis de toutes les régions.
    Là encore, il s'agit d'une décision prise sur la base d'une résolution des chefs et de l'assemblée.
     Merci beaucoup, madame Atwin.

[Français]

     Monsieur Lemire, vous avez la parole pour une minute et demie.
     Merci, monsieur le président.
    Grande cheffe Woodhouse, êtes-vous en faveur de l'interdiction de construire un dépotoir de déchets nucléaires près de Deep River et de Chalk River, le long de la rivière Kitchissippi, ou rivière des Outaouais?
    C'est une évidence pour les Premières Nations comme les Anishinabe, ainsi que pour nous. Je suis curieux d'entendre votre point de vue.

[Traduction]

     Absolument, je suis en faveur de cette interdiction. Pourquoi voudriez-vous mettre des déchets nucléaires près d'une source d'eau ou de l'eau que nous devrons tous boire et que nos petits-enfants devront boire?

[Français]

    C'est notre défi, dans l'Est, notamment au Québec, comme l'exploitation du pétrole peut en être un dans l'Ouest.
    Vous avez indiqué que les gouvernements provinciaux ne devaient pas négocier de mauvaise foi ni se défiler lors de la négociation d'ententes sur des zones de protection. Quels moyens permettraient aux Premières Nations de se faire valoir et de protéger l'eau de surface dont s'alimentent plus de 4 millions de personnes, tout en respectant les pratiques culturelles du territoire?
    On donne souvent des passe-droits aux industries, et aucune réglementation ne les empêche d'utiliser cette eau potable. De plus, il n'y a aucune obligation concernant la qualité de l'eau qu'ils rejettent dans la nature. Je suis d'accord avec les chefs des Premières Nations de Cold Lake et de la nation crie de Kehewin: il manque des éléments dans ce projet de loi concernant la responsabilité sociale inhérente à la conformité à la Charte canadienne des droits et libertés. On pourrait notamment parler de l'obligation des entreprises et de l'État de protéger l'eau et les habitants.
(0930)

[Traduction]

     Oui, c'est très frustrant. J'entends votre… En ce qui concerne la responsabilité et d'autres aspects, la science n'est pas absolue. En ce qui concerne l'étude, vous savez, les gens continuent à manger du poisson. Le poisson était autrefois l'aliment le plus sain qui soit.
    C'est un peu difficile, à vrai dire, avec le français et le reste dans l'écouteur.
    Comment imaginez-vous l'équilibre? Tout le monde pense à l'économie, mais l'environnement souffre. Même les espèces en péril… J'ai l'impression qu'on n'en tient pas compte. Il semble que l'économie l'emporte sur l'environnement, et nous nous engageons vraiment dans cette voie. C'est difficile, et nous sommes frustrés. Nous ne sommes même pas invités à la table pour en parler.
    Lorsque l'on parle de sécheresse, nous sommes considérés comme des « autres », et c'est un peu irrespectueux alors que nous sommes les premiers peuples de ces terres. Nous devrions participer à la recherche scientifique. Vous savez, on peut trouver de l'eau dans l'air, mais en ce qui concerne le déversement des bassins de résidus dans les rivières, nous pensons que ce n'est pas sécuritaire. Où irons-nous en cas de catastrophe écologique? Les empreintes continuent de grossir, n'est‑ce pas?
    Chef, je suis vraiment, vraiment désolé. Je vais devoir…
    Oui, je pourrais continuer ici tous les jours, toute la journée. Vous savez, ce n'est pas assez long. Il y a de la place pour des amendements. J'ai apporté mon soutien technique et tout le reste, mais nous sommes ici aujourd'hui en toute bonne foi. Je le fais par gentillesse. Je le fais par gentillesse, mais je vous remercie pour votre temps. J'espère que nous aurons plus de temps à l'avenir.
    Mahsi.
    Meegwetch.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur Lemire.

[Traduction]

    Nous retournons ensuite à Mme Idlout, qui a une minute et demie.
    Merci.
     Je partage votre frustration quant au manque de temps accordé pour poser des questions à nos témoins. J'aimerais que nous ayons un meilleur processus. Je pense que nous pouvons faire beaucoup mieux en tant que comité.
    Ma question s'adresse au conseiller juridique, Christopher Rapson.
    Sachant que les traités ne sont pas pleinement mis en œuvre avec les Premières Nations et que le Canada a ratifié de nombreux instruments internationaux relatifs au droit à l'eau, pouvez-vous nous dire comment ce gouvernement...? En tant qu'avocat, comment conciliez-vous la défense dans l'affaire Shamattawa?
    Je citerai ce qu'ils ont dit dans leur défense concernant la Shamattawa First Nation: « Le Canada n'a aucune obligation légale ni aucun devoir d'exploiter et d'entretenir les systèmes d'approvisionnement en eau des plaignants. »
    Pouvez-vous commenter, s'il vous plaît?
     Oui, absolument.
    Bien entendu, l'Assemblée des Premières Nations ne serait pas d'accord avec la position juridique adoptée par les avocats du ministère de la Justice dans l'affaire Shamattawa. Nous soutenons la Shamattawa First Nation dans son action collective et nous pensons bien sûr que le Canada a cette obligation légale. Nous pensons qu'elle est ancrée dans la Constitution et dans les traités. Le Canada a certainement adopté ces instruments des droits internationaux de la personne.
    La position du ministère de la Justice dans cette affaire n'est pas conforme à ces lois, et c'est une raison de plus pour laquelle nous avons besoin de ce projet de loi. Nous avons besoin que ce projet de loi soit clair, sans l'expression « fait de son mieux », car les Premières Nations ne peuvent évidemment pas compter sur les gouvernements fédéraux pour faire de leur mieux. Nous avons besoin d'engagements fermes pour que les avocats du ministère de la Justice et tous les autres sachent clairement que le Canada a cette obligation légale.
    Voilà ma réponse.
     Merci beaucoup, madame Idlout.
    Nous passons maintenant à M. Melillo, pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président. Je ne savais pas qu'il y avait un autre tour. Je suis heureux d'avoir l'occasion de poser quelques questions supplémentaires. Je pense juste à où je me suis arrêté.
    En ce qui concerne les amendements proposés, je remercie tout le monde d'avoir eu ces discussions.
    Je vais donner la parole au chef John, puis au chef Jacko.
    Je vous demanderai à tous deux de commenter le processus de consultation et la manière dont il s'est déroulé. Nous avons entendu, je pense, des choses différentes selon les intervenants. De toute évidence, il y a eu une certaine participation des Premières Nations, mais, comme le député néo-démocrate l'a mentionné, les consultations globales ont porté sur un très petit nombre de Premières Nations au pays. Je me demande si vous pourriez nous dire quel rôle vous devriez vraiment jouer dans le processus de développement.
(0935)
     C'est très frustrant, car nous n'avons pas été consultés sur l'élaboration de ce projet de loi. Je partage le sentiment du chef des Mikisew, qui parle de l'eau. Personne ne parle de l'eau à l'exception de ma nation. L'eau est l'esprit de ma vie.
    Nous devons nous occuper de l'Alberta. Nous devons avoir une place à la table. Nos paroles ne sont pas entendues. Comment traiter avec le gouvernement de l'Alberta lorsque tous nos lacs sont empoisonnés? Quand j'étais jeune, je pouvais boire de l'eau partout. Cold Lake est le seul lac à deux sources d'eau qui subsiste en Alberta. C'est un lac très pur, et j'espère que nous pourrons le conserver.
    Nous avons besoin de commentaires à ce sujet. Nous devons être présents à la table lorsqu'il est question des répercussions sur les droits issus des traités, car les sources d'eau sont à l'origine de tout. Que vont manger les animaux? La biodiversité évolue. C'est tout simplement frustrant.
    Vous parlez de consultation; nous n'avons pas eu notre mot à dire dans l'élaboration de ce projet de loi, et cela devrait changer. Nous sommes ici aujourd'hui pour parler d'amendements. Mon technicien a déjà donné son avis. Nous devons avoir une place à la table. Nous sommes déjà devant les tribunaux. Pourquoi ne pouvons-nous pas résoudre ces problèmes? Nous devrions être présents à la table dès le début lorsqu'il est question de l'eau. À la naissance, nous venons tous de l'eau. L'eau, c'est la vie. Les choses doivent changer.
    Je m'en tiendrai là avant que vous me coupiez la parole.
    Mahsi.
    Merci beaucoup, monsieur Melillo.
    Pour notre dernier intervenant, je donne la parole à M. Battiste, pour deux minutes et demie.
     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les chefs de leur témoignage.
    Cheffe nationale, je suis très heureux de vous voir et de vous entendre aujourd'hui.
    Tout au long de l'histoire du Canada, nous avons été témoins de beaucoup de racisme environnemental en ce qui concerne les communautés des Premières Nations touchées par les entreprises, les ordonnances provinciales et beaucoup d'autres choses. Je connais certaines des communautés touchées par ce problème.
    Je me demande si vous pourriez nous dire comment ce projet de loi, mais aussi le projet de loi sur le racisme environnemental que nous avons présenté, peuvent contribuer à résoudre certains des problèmes en suspens.
     Je vous remercie de cette question.
    En ce qui concerne le projet de loi C‑61, l'APN et les Premières Nations du Canada ont toujours défendu de nombreux points, comme la reconnaissance de notre droit inhérent sur les sources d'eau — je pense que nous devons travailler en ce sens; les normes binationales minimales, bien sûr; l'engagement à l'égard d'un cadre de financement; et la protection de la responsabilité pour les employés des services d'eau des gouvernements des Premières Nations. Nous avons beaucoup de problèmes à régler.
    Vous avez tout à fait raison. Comme l'a dit le chef Jacko, l'industrie est trop présente. Qu'est‑ce qui l'emporte? L'environnement, ou l'industrie? Nous ne sommes pas en équilibre, mes amis. Nous le savons. Alors que nous vivons un moment très important de l'histoire de notre peuple, nous devons unir nos efforts et faire ce qu'il faut.
    Vous avez entendu beaucoup d'entre nous aujourd'hui. Vous avez entendu nos experts. Nous avons déjà soumis notre mémoire, j'en suis certaine. Nous vous invitons tous à le lire et à prendre en considération la position de l'APN et nos amendements. Faisons les choses correctement, une fois pour toutes. Faisons vite. Nous n'avons pas le temps d'attendre. La planète nous attend. Chaque jour, les Premières Nations attendent de l'eau potable. C'est inacceptable. Je vous invite tous à vous mettre au travail.
    Je regarde le personnel à l'arrière. Je vous remercie également pour votre engagement.
    Il faut faire les choses correctement et obtenir la sanction royale avec les amendements.
    Merci.
(0940)
     Merci beaucoup, monsieur Battiste.
    Voilà qui conclut notre premier groupe de témoins.
    Une dernière remarque s'impose. C'est [difficultés techniques].
    Un processus parallèle est en cours au comité de l'environnement, avec l'Agence canadienne de l'eau et la modernisation de la Loi sur les ressources en eau du Canada. Tout cela va de pair avec l'élaboration de ce projet de loi sur l'eau. Cela a une incidence directe sur ce qui en ressort. La santé de l'eau douce sera abordée dans le cadre de la question des zones de protection. Ces deux éléments vont vraiment de pair.
     Merci beaucoup de cette précision.
     J'aimerais ajouter quelque chose.
    Merci à tous de reconnaître la perte que nous avons subie au Manitoba avec le décès de notre regrettée grande cheffe Cathy Merrick. Elle nous a beaucoup soutenus dans nos efforts pour protéger nos eaux.
    Je voudrais également ajouter qu'en 2008, l'Assembly of Manitoba Chiefs a présenté une résolution dans le cadre du projet de loi proposé sur l'eau potable. Je veux pouvoir envoyer ce document au Comité pour qu'il puisse l'examiner, car c'est un sujet de préoccupation depuis un certain temps. Je suis cheffe depuis 2006, et la situation de l'eau n'a pas changé. Elle n'a pas changé du tout, et c'est la raison pour laquelle nous sommes ici pour essayer de protéger nos Premières Nations.
     Je vous remercie de m'avoir entendue.
     Merci beaucoup, cheffe Kennedy.
     Merci aux témoins. Bien sûr, nous pourrions certainement passer encore quelques heures ici, et j'apprécie vraiment votre temps et votre contribution. Les mémoires que vous avez présentés à l'avance vont certainement enrichir l'étude de ce projet de loi, ainsi que les amendements qui, j'en suis sûr, seront proposés. J'aimerais vous remercier encore.
    Nous allons suspendre brièvement la séance avant de passer au groupe suivant.
(0940)

(0945)
     Nous reprenons nos travaux.
    Je suis très reconnaissant à notre deuxième groupe et aux excellents témoins que nous accueillons aujourd'hui, notamment l'honorable Patty Hajdu, ministre des Services aux Autochtones Canada. Elle est entourée de fonctionnaires du ministère, dont Gina Wilson, Paula Hadden‑Jokiel, Nelson Barbosa et Douglas Fairbairn.
    Sur ce, nous allons entrer dans le vif du sujet.
    Madame la ministre, je vous donne la parole pour une déclaration préliminaire de cinq minutes ou moins.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je pourrai rester un peu plus longtemps que prévu en raison du retard au début, mais je pense que nous devons nous arrêter quinze minutes avant l'heure. Je tiens vraiment à ce que nous ayons une conversation approfondie sur ce sujet.
    Je suis très heureuse que le Comité ait entendu autant de témoins au cours de l'étude de ce projet de loi. Nous devons respecter les voix des Premières Nations, et c'est la diversité de ces expressions et de ces points de vue qui fait de notre pays un endroit si fantastique.
    Je suis très heureuse de me joindre à vous aujourd'hui sur le territoire traditionnel et non cédé des peuples algonquins anishinabes pour discuter du projet de loi C-61, qui, comme vous le savez, s'intitule Loi sur l'eau propre des Premières Nations. Ce projet de loi, comme vous l'ont dit les témoins, est le fruit d'un immense travail, d'une collaboration, d'un partage des connaissances et d'une réelle volonté de la part des partenaires des Premières Nations. C'est vraiment grâce à leur travail, à leurs contributions et à leur leadership que nous en sommes là aujourd'hui.
    Le jour où le projet de loi C-61 a été présenté, la cheffe Erica Beaudin de la Première Nation de Cowessess a déclaré: « Je crois qu'aujourd'hui est un jour historique non seulement parce que le projet de loi a été présenté, mais aussi parce que c'est le début d'une époque où nos enfants naîtront avec les règlements nécessaires. »
    À mesure que le projet de loi franchit les étapes du processus parlementaire, il nous incombe maintenant, en tant que parlementaires, de traiter ce projet de loi avec le respect et l'urgence qu'il mérite. Je suis d'accord avec tout le monde pour dire qu'il est inacceptable que certaines communautés des Premières Nations n'aient pas accès à de l'eau potable salubre et propre. C'est ce qui a mené à la promesse de mettre fin aux avis à long terme sur la qualité de l'eau potable qui a été faite en 2015, et nous avons fait des progrès importants. En fait, j'ai le plaisir de vous annoncer qu'hier encore, la Première Nation de Fort Severn a levé son avis à long terme sur la qualité de l'eau potable. Celui‑ci était en place depuis décembre 2022.
    Toutefois, nous ne sortirons jamais de ce cycle d'avis d'ébullition de l'eau à long terme et d'avis d'ébullition de l'eau à court terme si nous ne corrigeons pas le système qui a permis à ce processus de se produire en premier lieu. C'est l'intention sous-jacente du projet de loi C-61. Il faut changer la façon dont nous faisons les choses dans ce pays pour ne plus jamais nous retrouver dans la position qui était la nôtre en 2015.
    Le projet de loi C-61 établirait des normes minimales pour les services d'approvisionnement en eau sur les terres des Premières Nations en fonction du choix de ces dernières. Il affirmerait le droit inhérent des Premières Nations à l'autonomie gouvernementale en matière d'eau, en soutenant l'autorité, la gestion, l'entretien et la protection de l'eau des Premières Nations dans, sur et sous leurs terres.
    Il renforce également le rôle essentiel que jouent les provinces et les territoires. Dans le cadre de cette étude, vous avez entendu de nombreuses histoires de gouvernements provinciaux, y compris pendant que j'écoutais d'autres témoins, des gouvernements provinciaux qui ont ignoré et exclu les Premières Nations en ce qui concerne les droits relatifs à l'eau et la gestion des ressources. En tant que gouvernement fédéral, nous avons la responsabilité de veiller à ce que les Premières Nations disposent des outils dont elles ont besoin pour garantir l'affirmation de leurs droits inhérents et le respect de leurs compétences.
    En fait, le chef Knowlton a déclaré: « Vous devriez être derrière nous, devant nous ou à nos côtés dans toutes les batailles que nous aurons avec l'Alberta. Il s'agit d'une compétence fédérale. Votre obligation, la responsabilité fiduciaire du Canada, est de protéger les premières nations avec lesquelles vous avez signé un traité. »
     Je sais qu'aucun gouvernement provincial ni territorial n'a choisi de participer à cette étude, et c'est décevant, car il s'agit en fait d'une occasion pour les provinces et les territoires de travailler plus étroitement avec les partenaires des Premières Nations, mais ce projet de loi fournit des outils pour encourager et soutenir ces relations, et c'est un signal de la nécessité cruciale de cette loi.
    Le projet de loi C-61 exige que le gouvernement du Canada fasse de son mieux pour assurer un financement adéquat et durable des services d'approvisionnement en eau sur les terres des Premières Nations, et que ces services soient comparables à ceux des communautés non autochtones. L'expression « faire de son mieux » fixe une norme élevée en vertu de laquelle le gouvernement du Canada est légalement responsable devant les Premières Nations. En outre, la souplesse du projet de loi garantit que les Premières Nations détermineront exactement les ressources dont elles ont besoin pour financer et entretenir correctement leurs systèmes d'approvisionnement en eau.
    L'Atlantic First Nations Water Authority l'a bien dit:
L'un doit passer avant l'autre. Nous ne saurons pas de combien d'argent nous avons besoin tant que nous n'aurons pas élaboré nos règlements. Grâce à ces règlements, nous pourrons déterminer le montant dont nous avons besoin et élaborer notre vision stratégique à long terme pour cette infrastructure.
    Le projet de loi C-61 est le reflet de l'engagement direct, de la collaboration étendue et du partage des connaissances avec les partenaires des Premières Nations, et vous avez entendu de nombreux témoins parler de la façon dont ils ont contribué au projet de loi et de ce qu'ils ont préconisé pour l'inclusion.
    Les partenaires des Premières Nations ont étroitement collaboré à ce projet de loi, et nous avons travaillé avec eux et les avons tenus au courant. J'espère que cela ouvrira la voie au type de codéveloppement que ce pays pourrait utiliser pour de nombreux types de lois.
    Le processus de mobilisation ne s'est pas arrêté à l'introduction. Nous avons poursuivi le travail que vous faites dans le cadre de cette étude et, comme je l'ai dit depuis le début, nous sommes ouverts aux moyens de rendre ce projet de loi encore plus solide, en nous laissant guider par les voix des Premières Nations.
(0950)
     La cheffe émérite Emily Whetung‑MacInnes nous demande quelque chose:
[D]e grâce, ne politisez pas l'accès des Premières Nations à l'une des ressources de première nécessité. C'est une question trop importante pour qu'on s'embourbe dans la politique partisane. Le projet de loi que vous étudiez concerne un sous-groupe de Canadiens dont les droits de la personne sont ignorés depuis trop longtemps.
    Le projet de loi C-61 est une étape cruciale pour s'assurer que les générations futures de communautés comme Neskantaga, Tataskweyak et Curve Lake ne sauront jamais ce que c'est que de vivre sans source d'eau potable fiable et sûre. En travaillant ensemble, nous avons la possibilité de faire de ce projet une réalité pour des milliers de personnes.
    Monsieur le président, je me ferai un plaisir de répondre à toute question ou de partager plus d'informations avec le Comité sur l'importance de ce projet de loi.
    Meegwetch. Qujannamiik.Marsi. Merci.
(0955)
    Merci beaucoup, madame la ministre.
    Nous allons maintenant lancer notre premier tour de questions.
    La parole est à M. Melillo, du Parti conservateur. Vous avez six minutes, monsieur.
    J'ai un rappel à faire avant que nous commencions. Comme nous avons déjà eu des problèmes de son, je vous demande de parler directement dans le microphone quand vous avez la parole. Comme nous le savons, certains collègues et témoins ont eu de la difficulté à entendre les échanges.
    Je vous remercie, monsieur le président
    Madame la ministre, je vous remercie de votre présence. Merci également de votre patience, car nous avons dépassé le temps alloué avec le premier groupe de témoins.
    Je suis heureux de voir que vous reconnaissez le travail du Comité et son écoute des voix des Premières Nations. Je pense que c'est très important. Pour être franc, nous avons tous travaillé de bonne foi pour améliorer ce projet de loi.
    Il semble que nous sommes en train de faire une partie du travail de consultation qui aurait dû être fait avant l'élaboration de ce projet de loi. Madame la ministre, vous avez affirmé que ce projet de loi avait été élaboré en collaboration ou presque. C'est ce que vous avez dit, mais de nombreuses Premières Nations nous ont dit qu'elles n'avaient pas l'impression d'avoir été entendues à ce sujet.
    Le chef Sheldon Sunshine a dit au Comité que le projet de loi C‑61 avait reçu l'appui de seulement 100 Premières Nations parmi plus de 600. Il a dit cela dans le cadre d'un échange portant sur l'Assemblée des Premières Nations.
    Nous avons pris connaissance de certains des amendements qui ont été proposés. Nous avons également entendu des chefs et des dirigeants communautaires qui souhaitent carrément jeter le projet de loi à la poubelle. Sur un sujet aussi important, je pense que c'est un choc pour beaucoup. Voilà dans quelle situation nous nous trouvons à cause du manque de consultation.
    Pouvez‑vous nous expliquer, madame la ministre, comment s'est déroulé le processus de consultation et pourquoi un si grand nombre de voix en ont été exclues?
    Merci beaucoup pour cette question.
    Je signale que des consultations exhaustives ont eu lieu. En fait, nous avons eu des échanges concertés et directs avec les nations visées par les Traités nos 6, 7 et 8, qui ont l'impression de ne pas être représentées par l'Assemblée des Premières Nations. Nous avons travaillé avec ces nations, autant la hiérarchie politique — j'ai moi‑même eu des échanges directs avec ces chefs — que le ministère. Nous avons tenu de nombreuses réunions et consultations et nous avons écouté les idées proposées par les gens de cette région pour nous assurer qu'elles sont prises en compte.
    De plus, nous avons publié en ligne une ébauche du projet de loi et l'approche adoptée pour que les gens de partout au pays puissent en prendre connaissance. Nous avons tenu des centaines de consultations. Nous avons organisé des visites d'un océan à l'autre. L'APN a organisé des tournées à la grandeur du pays, de même que le Canada.
    Nous demeurons à l'écoute, tout comme vous. Nous avons entendu d'excellentes idées sur la façon d'améliorer le projet de loi. Ces points de vue sont importants. Comme je l'ai dit publiquement à la Chambre et ailleurs, nous sommes très ouverts aux amendements qui renforcent le projet de loi. Nous continuerons d'être à l'écoute de nos partenaires.
    M. Eric Morillo: Je vous remercie...
    L'hon. Patty Hajdu: Avec votre permission, monsieur le président, j'ajouterais...
    Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse. J'ai peu de temps...
    J'ajouterais que la plupart des chefs disent qu'il y a une lacune actuellement...
    Monsieur le président, avec tout le respect que je vous dois, j'aimerais reprendre la parole...
    Il n'y a ni réglementation ni protection. Nous devons donc adopter notre projet de loi.
    Merci.
    Madame la ministre et chers collègues, permettez‑moi de faire une courte pause.
    Les interprètes ont beaucoup de difficulté à faire leur travail quand vous parlez en même temps. Veuillez parler chacun à votre tour.
    Monsieur Melillo, c'est à vous.
    Merci encore, monsieur le président.
    Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse, mais je suis certain que vous pouvez aussi comprendre que nous disposons de peu de temps ici au Comité.
    Je veux maintenant parler du nombre d'avis à long terme concernant la qualité de l'eau potable qui ont été émis.
    Au début de l'année, lorsque j'ai pris la parole à la Chambre à ce sujet, 28 avis à long terme étaient en vigueur. Le 28 septembre, selon des données rendues publiques, il y en avait 33. C'est indéniablement une augmentation.
    Madame la ministre, pouvez‑vous nous dire combien d'avis à long terme sur la qualité de l'eau potable sont en vigueur aujourd'hui?
    Il y en a 32.
    Il y en a 32. Comme je le disais, le nombre a donc augmenté au cours de la dernière année. Dans une perspective générale, de nouveaux avis d'ébullition de l'eau ont été émis. Pouvez‑vous nous dire ce qui s'est passé pour qu'on émette de nouveaux avis?
(1000)
    Tout d'abord, je vous fais remarquer que depuis 2015, nous avons levé 144 avis d'ébullition d'eau à long terme. Avec tout le respect que je dois au député, je trouve un peu ironique de constater qu'à cause de la négligence crasse du gouvernement conservateur précédent, 144 avis d'ébullition de l'eau avaient été émis, mais...
    Madame la ministre, c'est toujours facile de parler des gouvernements précédents. Vous avez eu neuf ans pour agir.
    Toute l'information sur chaque endroit visé par un avis d'ébullition de l'eau rendue est rendue publique dans le cadre de l'engagement de transparence que nous avons pris auprès des Canadiens à ce sujet.
    Comme vous l'ont dit les chefs et les conseils, des avis d'ébullition de l'eau à court terme peuvent devenir des avis à long terme pour une diversité de raisons. Nous travaillons avec chaque collectivité pour nous assurer que les solutions appropriées sont proposées et mises en place afin que ces avis soient éventuellement levés.
    Je vous remercie, madame la ministre.
    J'ai une question à vous poser au sujet d'une communauté de mon district, la Première Nation de Mishkeegogamang, que vous connaissez bien.
    Le 19 janvier 2024, un avis à long terme concernant la qualité de l'eau potable a été levé, mais le 8 mai de la même année, la communauté était à nouveau visée par un avis sur la qualité de l'eau potable. Dans ce cas également, Services aux Autochtones Canada a lamentablement échoué à aider cette nation à conserver son eau potable. Que s'est‑il passé à Mishkeegogamang pour que cela se produise?
    Madame la ministre, veuillez répondre brièvement, si c'est possible.
    Volontiers.
    Tout d'abord, la prémisse de cette question est erronée. En fait, c'est le chef et le conseil qui déterminent à quel moment il convient de lever un avis. Il ne faut pas oublier que les chefs et les conseils exercent leur droit à l'autodétermination pour prendre ces décisions pour leurs communautés.
    Je fais toutefois remarquer que Mishkeegogamang a une nouvelle usine. Nous travaillons actuellement avec la communauté sur les solutions qui posent problème avec l'eau fournie par la nouvelle usine.
    Merci beaucoup, monsieur Melillo.
    La parole est maintenant à M. Hanley. Vous avez six minutes, monsieur.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup d'être ici, madame la ministre, et merci aussi à tous les fonctionnaires qui vous accompagnent. C'est une journée très importante. Nous avons également accueilli la cheffe nationale au cours de cette réunion.
    En ce qui concerne ces avis d'ébullition d'eau plus fermes, vous avez dit que 144 ont été levés depuis 2015. C'est un travail fantastique. Nous avons fait beaucoup de chemin. Si nous avançons plus lentement, je pense, c'est parce que nous nous attaquons aux cas plus complexes. Le travail est plus délicat et peut‑être techniquement plus complexe.
    Selon vous, comment la mise en oeuvre de ce projet de loi permettra‑t‑elle de surmonter ces derniers obstacles et de prévenir également l'émission de nouveaux avis d'ébullition de l'eau, ce qui est vraiment notre objectif?
    Je vous remercie de cette question.
    Je vais répondre à la question à rebours, car je pense vraiment que ce projet de loi... Vous et moi avons tous deux une formation en santé publique, la prévention est donc notre première passion.
    En fait, ce projet de loi met la table pour que nous ne nous retrouvions plus jamais en présence de communautés sans ressources financières suffisantes, sans le soutien technique requis ou incapables d'exercer leur droit inhérent de réglementer l'eau. C'est ce qui est la cause de ces si nombreuses situations insolubles.
    Le gouvernement a dépensé les milliards de dollars pour lever les avis d'ébullition de l'eau, une somme qui s'est accumulée au fil des années de négligence et de financement inéquitable des infrastructures des Premières Nations, notamment des infrastructures d'approvisionnement en eau.
     Un élément important de ce projet de loi est l'élaboration en collaboration de modèles de financement. Comme vous le savez, c'était toujours Ottawa, la ministre des Finances ou le premier ministre qui ont choisi le mécanisme de financement des Premières Nations pour l'approvisionnement en eau et le traitement des eaux usées. Même si le gouvernement fédéral a considérablement augmenté le budget de fonctionnement destiné aux communautés des Premières Nations, ce budget pourrait facilement être réduit sous un nouveau gouvernement. Ce projet de loi précise que la question de l'eau ne peut plus dépendre d'une décision arbitraire du Canada, mais plutôt d'une décision conjointe prise avec les Premières Nations afin que ces dernières puissent établir les règlements pertinents et avoir l'assurance qu'elles bénéficieront d'un financement durable à long terme qui leur permettra de développer une expertise au sein de leurs communautés, tout en leur offrant une certitude quant aux salaires des exploitants et en leur permettant de renforcer leur propre capacité de surveillance et, dans certains cas, de concevoir leurs propres systèmes d'exploitation de l'eau.
    J'ai été estomaquée d'apprendre que des entrepreneurs avaient construit ces usines qui ne règlent pas le problème de la salubrité de l'eau dans les communautés. Ce que nous essayons de faire avec ce projet de loi, du moins en partie, c'est de rétablir l'autodétermination des communautés afin qu'elles puissent développer leur propre expertise et, dans certains cas, s'appuyer sur l'expertise existante afin que des situations semblables ne se reproduisent plus jamais.
(1005)
    Je vous remercie.
    Vous venez de parler de financement. Des témoins nous ont toutefois dit qu'il régnait une certaine incertitude à ce sujet. Comme certains l'ont fait remarquer, le financement n'est pas défini dans le projet de loi. Dans votre déclaration préliminaire, vous avez expliqué que cette lacune sera corrigée par voie de règlement. Il faut que les mesures soient en place.
    Par ailleurs, un témoin nous a dit aujourd'hui même que le gouvernement doit être réaliste et aborder les problèmes de bonne foi. À mon avis, le projet de loi est un pas dans cette direction.
    Que ferez‑vous pour garantir un financement durable, stable et axé sur les besoins pour les services d'approvisionnement en eau des Premières Nations et pour vous assurer que les fonds seront versés par le biais des règlements et des autres mesures qui seront prises ultérieurement?
    C'est l'un des éléments clés de ce projet de loi qui, très franchement, reflète l'engagement et la collaboration qui ont présidé à l'élaboration de ce projet de loi. Durant les consultations initiales, les participants nous ont souvent demandé comment ils pouvaient faire confiance au Canada. C'est essentiellement la question que se posent les Premières Nations. Comment faire confiance au Canada? Pendant longtemps, le Canada n'a pas été un bon partenaire pour les Premières Nations, certains diraient même qu'il ne l'a jamais été.
    Le projet de loi tente justement de regagner cette confiance en créant un mécanisme qui oblige le gouvernement du Canada à établir des modèles de financement en collaboration avec les Premières Nations afin que nous mettions fin à l'approche coloniale dictée par Ottawa, souvent par des décideurs qui n'ont jamais mis les pieds dans la communauté dont les membres seront profondément affectés par ces décisions. Ce projet de loi change les choses. Il change le modèle décisionnel en matière de financement afin que les points de vue exprimés par les Premières Nations à la table soient pris en compte.
    Je suis certaine que vous avez souvent entendu, autour de cette table, des Premières Nations dire — comme me l'a d'ailleurs dit un chef pendant que j'attendais — que les gouvernements provinciaux, territoriaux ou fédéral ne peuvent pas prendre des décisions dans leur dos. Les Premières Nations doivent participer aux discussions. C'est pourquoi le projet de loi a été élaboré en collaboration...
    J'ai une dernière question à poser, si j'ai le temps.
    Elle concerne justement l'élaboration en collaboration. Avez‑vous appris des leçons de cette collaboration que nous pourrions appliquer à de futures mesures législatives?
    Veuillez répondre très brièvement, s'il vous plaît.
    Je préférerais en parler longuement.
    Je dirais qu'au début, les membres qui nous aidaient à rédiger ce projet de loi et à réfléchir à ce qu'était l'élaboration conjointe nous en ont présenté une définition très différente. À la fin, je pense que nous avons appris que l'élaboration conjointe commence beaucoup plus tôt qu'on ne l'imagine.
     Merci beaucoup, monsieur Hanley.

[Français]

     Monsieur Lemire, vous avez la parole pour six minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Si vous me le permettez, je vais partager mon temps de parole avec mon collègue du Parti vert Mike Morrice. Étant donné qu'il veut participer à la manifestation pour soutenir le projet de loi sur la gestion de l'offre, je vais lui donner l'occasion de s'y rendre le plus tôt possible.
(1010)

[Traduction]

     Merci, monsieur Lemire.
    Madame la ministre, je vais commencer par citer ce que nous a dit la cheffe Hill plus tôt cette semaine: « Puis, nous avons le projet de loi C‑61, qui prévoit des dispositions non contraignantes obligeant simplement le gouvernement à promettre de ''faire de son mieux''. C'est une gifle en plein visage. Il n'est pas étonnant que les Premières Nations fassent souvent appel aux tribunaux pour obliger le gouvernement à assumer ses responsabilités lorsqu'elles ont un problème. »
    Dans sa communauté, 70 % des ménages ne sont pas branchés à un réseau d'eau potable fiable. Elle nous a également appris que, bien qu'on nous ait dit que les consultations avaient commencé en 2018, aucun membre des Six Nations n'avait été consulté avant de comparaître pour la première fois devant notre comité il y a à peine quelques jours.
    Si vous nous dites que les Premières Nations ont élaboré conjointement le projet de loi, pourquoi y a‑t‑il un tel écart entre ce que nous disent les communautés touchées, comme les Six Nations, la communauté de la cheffe Hill, et ce que vous nous dites?
     Tout d'abord, je vous remercie d'être venu. Je sais que cela intéresserait beaucoup le parti que vous représentez. Je suis heureuse que vous soyez ici pour parler d'eau potable.
     J'aimerais d'abord répondre à votre question sur les meilleurs efforts. En fait, en 1994, dans une décision de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, le juge Dorgan a déterminé que les « meilleurs efforts » imposaient une obligation plus contraignante qu'un « effort raisonnable »: « L'expression ''meilleurs efforts'' signifie prendre, de bonne foi, toutes les mesures raisonnables pour atteindre l'objectif, mener le processus jusqu'à sa conclusion logique et ne négliger aucune piste. »
    En fait, de nombreux participants à l'élaboration de ce projet de loi reconnaissent que la notion de « meilleurs efforts » est une barre assez importante à atteindre pour le Canada et qu'elle l'oblige à rendre des comptes sur la suffisance du financement, ce à quoi la notion de « meilleurs efforts » fait largement référence dans ce projet de loi.
    Pour ce qui est de la consultation — je ne répéterai pas tout ce que j'ai dit en répondant à M. Melillo —, nous avons tenu de vastes consultations. Nous avons offert pour cela de nombreuses occasions, comme en effectuant des campagnes de sensibilisation directe auprès de toutes les Premières Nations concernées ainsi qu'en offrant des possibilités de soumettre des demandes en ligne et de participer aux consultations.
    Je ne peux pas parler de l'expérience particulière de la cheffe Hill, mais je peux vous dire que nous sommes toujours disposés à parler aux chefs.
    Comme vous le savez, nous nous préparons à répondre aux amendements qui pourraient être proposés au Comité. De plus, nous nous tenons à la disposition de tous les chefs et des conseils qui désireront discuter avec nous.

[Français]

     Merci, madame la ministre.
    À cet égard, il y a un éléphant dans la pièce: pourquoi le ministre des Relations Couronne-Autochtonesn'est-il pas codéfenseur de ce projet de loi avec vous? Il peut certainement déléguer des responsabilités, mais, lorsqu'on parle des droits de la personne des membres des Premières Nations, il est inapproprié qu'il ne soit pas là. On parle de droits, de respect des ententes et de traités, mais il est absent.
    C'est ce que les Premières Nations nous ont mentionné à répétition depuis plusieurs réunions du Comité. Ça envoie le message que le gouvernement considère la gestion de l'eau pour les Premières Nations comme étant quelque chose de purement administratif. Pourtant, c'est un élément primordial, qui est au cœur du développement des Premières Nations. Pourquoi est-ce ainsi?

[Traduction]

    Je tiens tout d'abord à souligner qu'aucun projet de loi ne peut être présenté à la Chambre des communes sans l'appui du Cabinet. Le ministre Anandasangaree collabore étroitement avec moi, comme vous le savez, et j'ai le plein appui du Cabinet pour élaborer ce projet de loi. Autrement, il est évident que je ne serais pas ici aujourd'hui.
    Services aux Autochtones Canada travaille beaucoup avec les communautés des Premières Nations sur l'eau potable et sur la mise en valeur des ressources en eau. Le ministre Anandasangaree a pour mandat de travailler avec les communautés sur des enjeux comme les traités. Cependant, il doit veiller, avec tous nos collègues, à ce que le travail des Premières Nations s'accomplisse efficacement et en temps opportun.
    La responsabilité de ces services relève de mon portefeuille. Mon ministère dispose de fonctionnaires, d'ingénieurs, de techniciens et d'experts juridiques dans ces domaines, alors que son ministère n'en a souvent pas. Le ministre Anandasangaree collabore donc étroitement avec nous. Nous avons aussi travaillé avec d'autres ministres concernés, comme le ministre de l'Environnement, afin d'harmoniser le travail que nous accomplissons pour protéger l'eau dans notre pays.

[Français]

     Il aurait été néanmoins intéressant qu'il soit là pour répondre à ces préoccupations.
    Également, qu'est-ce qui empêche le gouvernement d'investir massivement maintenant pour réduire les écarts dans les infrastructures de plusieurs communautés qui ont témoigné aujourd'hui? Qu'est-ce qui vous empêche d'appuyer le déploiement d'un programme de gardiens du territoire et de reconnaître le savoir des Autochtones? Pourquoi est-ce que ça prend absolument un projet de loi, qui est controversé pour les Premières Nations elles-mêmes, pour avancer?

[Traduction]

     Il peut vous sembler controversé, mais les centaines de membres des Premières Nations qui y ont travaillé ne le trouvent pas controversé. Je dirais que ce projet de loi donne de la certitude au travail dont vous parlez.
    Écoutez, à l'heure actuelle, le Canada peut décider arbitrairement du montant qu'il souhaite allouer à un système d'approvisionnement en eau particulier. Le Canada peut décider arbitrairement qu'il va réduire le financement des opérateurs d'eau dans tout le pays. Le Canada peut décider arbitrairement des règlements à mettre en place.
    En élaborant ce projet de loi, les Premières Nations nous demandent, premièrement, de respecter leur autodétermination et, deuxièmement, d'agir en véritables partenaires. Ce projet de loi répond à ces demandes.
    Il est évident que nous pourrons y apporter des amendements pour le renforcer. Vous délibérerez sur ces amendements. J'attends avec impatience vos réactions. Comme je l'ai dit publiquement, nous sommes ouverts aux amendements qui renforceront l'objectif de ce projet de loi. En réalité, il vise deux objectifs. Le premier est de veiller à ce que les Premières Nations ne se retrouvent jamais dans la même situation qu'avant 2015, alors qu'elles étaient à la merci d'un gouvernement fédéral qui n'accordait pas la priorité à leur droit à l'eau potable. Le deuxième est de mettre en place un cadre qui fournisse aux Premières Nations les outils nécessaires à leur pleine autodétermination pour protéger leurs sources d'eau et leurs systèmes d'approvisionnement en eau. Je ne peux pas imaginer une solution qui n'inclurait pas ces deux éléments.
(1015)

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur Lemire.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à Mme Idlout, pour six minutes.
    Qujannamiik, Iksivautaq.
    Tout d'abord, vous devriez avoir honte, madame la ministre Hajdu, pour la fierté que vous tirez de ce travail. Vous devriez avoir honte d'être fière des investissements qui, selon vous, ont tellement amélioré la situation des Premières Nations, surtout quand on voit toutes les lacunes à combler pour que les Premières Nations bénéficient de possibilités égales dans les domaines de la santé et du développement économique. Les Premières Nations doivent continuellement négocier leur autodétermination sur l'approvisionnement en eau. Je suis très déçue de constater que le travail qui devrait aider les Premières Nations à contrôler leur approvisionnement en eau les restreint encore. Ce travail est censé respecter le droit à l'eau potable, l'autodétermination et les droits fondamentaux des Premières Nations. Vous avez présenté un projet de loi qui est inférieur à la norme minimale fixée par la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
    Je crois fermement que si un tribunal venait à juger le gouvernement fédéral pour ne pas avoir respecté l'obligation de consulter pendant l'élaboration de ce projet de loi, il conclurait que vous avez échoué, surtout s'il apprenait que vous n'avez consulté que 31 % des Premières Nations.
    Le 12 juin dernier, j'ai demandé aux bureaucrates fédéraux qui siégeaient au comité des affaires autochtones et du Nord combien de personnes avaient été invitées à participer. Ils hésitaient beaucoup à nous fournir des chiffres. J'ai dû faire pression sur les bureaucrates Nelson Barbosa et Joanne Wilkinson pour qu'ils me répondent. Ils ont dit que sur les 634 Premières Nations que ce projet de loi concerne, seulement 181 ont été invitées à participer.
    C'est terriblement inquiétant. Des membres de Neskantaga, la Première Nation Mikisew et le conseil national nous l'ont dit. Nous avons entendu Trevor John aujourd'hui ainsi que le chef des Premières Nations de Cold Lake, Kelsey Jacko et bien d'autres qui n'avaient pas reçu cette invitation.
    J'ai été fascinée en vous entendant ce matin déclarer que ce projet de loi nous écarte de l'approche coloniale. La Cour fédérale est actuellement saisie de l'affaire Shamattawa. Pendant cette audience de trois jours, Scott Farlinger, avocat du gouvernement fédéral, a exhorté les plaignants de la Première Nation de Shamattawa à faire preuve d'une certaine maturité en ne proférant pas d'adjectifs inutiles. Il leur a également dit que même s'ils avaient des besoins extrêmes en vertu de l'article 7, le Canada ne les prive pas de leurs droits et ne les empêche pas d'apporter eux-mêmes des solutions. À mon avis, cela nie complètement votre mascarade politique selon laquelle ce projet de loi s'écarte de l'approche coloniale.
    Entretemps, vu la façon dont vous avez présenté ce projet de loi, les Premières Nations seront tenues de consulter et de négocier avec les municipalités, les provinces et les territoires pour obtenir des zones de protection des sources d'eau.
    Comment conciliez-vous tout cela? Si vous respectez vraiment le droit des Premières Nations à l'autodétermination, pourquoi avez-vous présenté un projet de loi qui ne nous donne qu'une notion vague de cette autodétermination?
(1020)
     Merci de nous avoir fait part de votre point de vue, madame Idlout.
    En ce qui concerne la honte, nous serions honteux de ne pas transformer la façon dont nous faisons les choses dans ce pays. C'est ce que ce projet de loi tente de faire. Nous cherchons à transformer la façon dont nous créons des lois qui touchent profondément les peuples des Premières Nations. Nous voulons établir des relations ouvertes, inclusives et évolutives pour inclure les voix des Premières Nations.
    En fait, je suis fière de ce travail. Je suis fière de l'exécuter. C'est un travail difficile à exécuter au sein d'un système colonialiste qui opprime les voix autochtones depuis si longtemps, mais c'est un travail très important.
    Je remercie tous mes collègues d'avoir tenu ces importantes conversations avec des partenaires des Premières Nations. Les témoignages que nous entendons dans ce comité reflètent la difficulté de ces relations.
    Quant à la participation, un certain nombre de personnes ont dit qu'en fait, elles avaient l'impression de participer pleinement. Elles ont ajouté qu'elles participaient plus qu'elles ne l'avaient jamais fait dans le passé. Par exemple, le chef Crowfoot, de Siksika, a souligné que pour la toute première fois, les participants ont pu examiner et commenter un avant-projet de loi. Il a ajouté qu'ils se sont battus avec acharnement, mais que le Canada a réagi en apportant des modifications cruciales au projet de loi.
    N'oubliez pas que le projet de loi que vous étudiez est radicalement différent...
    Madame la ministre, je crains de devoir vous demander de conclure.
    ... de sa version initiale.
     Merci beaucoup, madame Idlout.
    Sur ce, nous allons passer à la deuxième série de questions.
    Pour cinq minutes, je cède la parole à M. Schmale.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci d'être venue, madame la ministre.
     Madame la ministre, selon votre site Web, les principales causes des avis sur la qualité de l'eau potable émis dans les communautés des Premières Nations étaient la désinfection à 32 %, l'équipement à 30 %, la qualité microbiologique à 18 % et la qualité de l'eau de source à 6 %.
    Comme environ 80 % des avis ont trait à l'équipement et à la capacité d'accéder à des pièces pour le réparer ainsi qu'à la formation dans les communautés, comment se fait‑il que ce projet de loi ne mentionne pas la nécessité de désigner une équipe d'intervention rapide? Tout comme une équipe d'urgence en santé, elle pourrait se rendre dans la communauté, y apporter une pièce et réparer l'équipement défectueux avec l'aide de membres de la communauté. Ce projet de loi ne tient absolument pas compte de la plupart des raisons pour lesquelles on émet les avis sur la qualité de l'eau potable.
    En fait, ce projet de loi créera un cadre pour ce genre de travail.
    Je veux souligner ce qui se passe déjà dans certaines de ces situations, alors je vais céder la parole à M. Nelson Barbosa.
    Si nous revenons au projet de loi C‑61, je tiens à attirer votre attention sur les termes « égalité réelle » et « services comparables » en parlant de la disponibilité des pièces. Dans certains cas, il ne faut pas seulement retirer une petite composante ou remplacer une pièce, il faut remplacer la majeure partie du système ou l'agrandir considérablement.
    Quand des pièces importantes sont défaillantes, il ne suffit pas d'envoyer une équipe d'ingénieurs. Nous devons apporter des solutions à long terme à des problèmes qui durent depuis très longtemps. C'est ce que propose ce projet de loi...
     Je comprends cela, mais les municipalités de partout au pays sont en mesure de régler ces problèmes très rapidement.
    Vous avez parlé d'établir un cadre pour développer ce processus, mais les spécifications décrivent exactement le problème à ceux qui savent les lire. Dès que nous savons en quoi le problème consiste, nous pouvons agir tout de suite pour le régler rapidement au lieu d'attendre d'établir un cadre. Ne serait‑il pas plus rapide de traiter le problème au lieu d'attendre qu'on ait élaboré un long processus pour traiter de toutes les autres questions importantes? Réglons le problème dès maintenant afin d'éviter d'énormes frais juridiques.
(1025)
    Vous avez raison, nous faisons face à une urgence extrême. C'est pourquoi chaque communauté a établi un plan. Vous pouvez suivre en ligne les difficultés de toutes les communautés ainsi que leurs progrès.
    Dans certaines communautés, le chef et le conseil sont presque sûrs de pouvoir lever l'avis. D'autres réparent leur système. Je tiens à souligner que dans de nombreux cas — et c'est une énorme différence entre la plupart des municipalités et les Premières Nations —, la majorité des communautés sont très loin de pouvoir transporter rapidement des personnes et du matériel. Cela entrave considérablement leur travail.
    Je tiens à ajouter...
     Je reconnais ces difficultés...
    ... qu'il faut que nous poursuivions ce travail, mais ce projet de loi évite que...
    Il y a toutefois des solutions. C'est un peu comme la santé. En cas d'urgence sanitaire, on peut envoyer quelqu'un rapidement.
    En effet, et le modèle de l'Atlantic First Nations Water Authority est fantastique. C'est pourquoi nous collaborons étroitement avec des partenaires comme l'Agence ontarienne des eaux pour atténuer les situations de crise et pour former des opérateurs.
     Il y a des communautés qui n'ont pas, par exemple, de conducteurs d'installations dûment formés. J'ai discuté avec quelques-unes de ces communautés. Il ne suffit pas d'envoyer de l'argent pour la formation, comme le gouvernement du Canada l'a fait; il faut qu'un membre de la communauté accepte d'assumer la responsabilité de l'approvisionnement en eau.
    Je suis sûre que vous comprenez qu'on ne peut pas imposer cela à une personne. J'ai parlé à des centaines d'opérateurs dans tout le pays, et ils m'ont fait comprendre que l'exploitation d'un réseau d'aqueduc est une fonction très stressante. L'opérateur travaille souvent seul et il est responsable de la salubrité de l'eau pour toute sa communauté. Ces opérateurs sont souvent épuisés. Nous offrons donc aussi du soutien aux communautés qui n'ont qu'un opérateur formé.
     Tout à l'heure, quelqu'un a mentionné les pratiques exemplaires. Je comprends pourquoi cela se trouve dans le projet de loi. Comme nous parlons de soins de santé, je tiens également à souligner que selon le principe de Jordan, la capacité d'obtenir une réponse de votre ministère ne cesse de diminuer. Elle a baissé de 19 % depuis l'année dernière pour respecter ce délai de 12 heures.
    Comme votre ministère n'atteint pas les objectifs qu'il s'est fixés et que nous sommes encore en train d'élaborer d'autres cadres et toutes sortes de choses, comment pouvons-nous croire que les pratiques exemplaires sont assez solides?
    Veuillez répondre très brièvement.
     Ce ne sont pas des pratiques exemplaires, ce sont de « meilleurs efforts ». Nous faisons de notre mieux.
    Pardon... vos meilleurs efforts.
    C'est une question d'argent et de financement, ce qui est complètement différent. Le gouvernement du Canada n'a pas à fournir des services ou à administrer le principe de Jordan. Il doit promettre de garantir un financement adéquat pour que les communautés aient ce qu'il leur faut pour mettre en œuvre leurs propres règlements.
    Merci beaucoup, monsieur Schmale.
    Nous allons maintenant passer à Mme Atwin, pour cinq minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à vous, madame la ministre, et à vos fonctionnaires d'être de nouveau parmi nous aujourd'hui.
    Je voudrais tout d'abord rappeler aux Canadiens et au Comité comment nous en sommes arrivés là, à ce sous-financement chronique, à cette discrimination et à cette oppression dans notre système, à un projet de loi inadéquat qui ne répondait pas aux besoins des communautés autochtones. À l'heure actuelle, il n'existe aucune norme exécutoire pour la protection de l'eau potable et des eaux usées dans les communautés.
     Je trouve qu'on manque de respect pour les peuples autochtones de partout au pays et pour le travail qu'ils accomplissent en ne reconnaissant pas les progrès qu'ils ont réalisés. Nous avons encore bien du chemin à faire. Nous devons continuer à travailler et à nous battre. Mais si l'on ne reconnaît pas tout le chemin que nous avons parcouru, notre avenir ne s'améliorera pas. Je tenais à souligner cela en guise de préambule.
    Madame la ministre, nous avons entendu des observations extraordinaires. C'est un grand honneur pour moi de témoigner devant votre comité. Nous avons entendu des préoccupations. Des amendements ont été proposés. Nous avons peut-être aussi entendu des malentendus sur la façon dont le projet de loi s'appliquera aux communautés.
     J'aimerais passer rapidement en revue certaines de ces préoccupations. On entend souvent dire que le projet de loi C‑61 libère le gouvernement fédéral de sa responsabilité de protéger l'approvisionnement en eau. Pouvez-vous nous expliquer cela?
     Je tiens à souligner à nouveau que la profonde méfiance des Premières Nations à l'égard du gouvernement fédéral ne me surprend pas. En fait, nous devrions tous comprendre que c'est un sous-produit du colonialisme.
    Ce projet de loi vise à modifier notre façon d'élaborer des lois et la façon dont nous décidons, par exemple, d'inclure le point de vue des Premières Nations dans les modèles de financement. J'espère qu'il ouvrira une voie qui incitera notre pays à inclure le point de vue des Premières Nations dans tous les projets de loi dont la Chambre débattra. Il est crucial que nous construisions notre pays et que nous protégions nos magnifiques ressources naturelles en partenariat avec les Premières Nations.
    Je vous remercie pour cette question. Je dirais simplement que ce projet de loi supprime le caractère arbitraire du financement fédéral. C'est un peu étrange que je dise cela, puisque je suis ministre de la Couronne, et pourtant je préconise un cadre qui empêchera le gouvernement fédéral de prendre des décisions arbitraires sans tenir compte des besoins et des faits réels, sans se préoccuper des données scientifiques et des chiffres. En fait, les Premières Nations auront besoin de ces données pour exploiter leurs systèmes de façon équitable.
    Le gouvernement fédéral doit plutôt collaborer avec les Premières Nations pour élaborer des modèles de financement qui les aideront à respecter leurs propres règlements. Ces règlements devraient respecter, ou même surpasser les normes provinciales. La qualité de l'eau des Premières Nations atteindra les mêmes normes que celles du reste du pays, et les communautés disposeront de la puissance fiscale nécessaire pour y parvenir.
     C'est révolutionnaire. Nous n'avons jamais fait cela dans ce pays. Le fait d'être ici pour vous dire que le gouvernement du Canada s'engage à le faire dans ce projet de loi devrait vous rendre fiers d'être députés, car c'est la première fois que le gouvernement du Canada propose une chose de ce genre.
(1030)
    Nous avons aussi entendu dire que si ce projet de loi était adopté, votre rôle de ministre vous conférerait un droit de veto ou la possibilité extraordinaire de prendre des décisions sans consulter les communautés autochtones. Qu'en est‑il exactement?
     Ce projet de loi ne mentionne aucunement un tel pouvoir. En fait, il répartit le pouvoir de façon juste et équitable entre les partenaires des Premières Nations, le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires. Ces derniers seront invités à négocier avec les Premières Nations et avec le gouvernement fédéral pour améliorer leur protection de l'approvisionnement d'eau à tous leurs citoyens. Ce sera une occasion que toutes les provinces et tous les territoires devraient saisir.
    Je suis sûre que vous avez entendu dire — en fait, l'un des témoins qui ont comparu juste avant moi en a parlé — que si nous ne protégeons pas notre eau, nous perdrons la vie. Cela semble très dramatique, mais plus je travaille à l'élaboration de ce projet de loi, plus j'écoute les aînés et les membres des Premières Nations, plus je reconnais cette vérité fondamentale. Ce projet de loi nous permet à tous de mieux prendre soin de la ressource la plus essentielle et la plus précieuse de la vie.
    Merci beaucoup, madame Atwin.

[Français]

     Monsieur Lemire, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
     Merci, monsieur le président.
    Madame la ministre, rien ne vous empêche d'établir des règlements pour encadrer les obligations de l'industrie nucléaire relatives à l'utilisation de l'eau et à la façon dont elle la rejette dans les cours d'eau. Il y en a pour les sociétés minières, notamment.
    Quel rôle précis jouent Environnement et Changement climatique Canada, Santé Canada, Transports Canada et Ressources naturelles Canada dans un projet de loi comme celui-là?
    Merci pour la question.
    C'est très important pour moi, parce qu'il y a des Premières Nations qui subissent les effets de la pollution produite par les pétrolières ou résultant d'autres substances, entre autres. Je pense aux Cris de Mikisew, par exemple.

[Traduction]

    Cette communauté vit dans des circonstances dévastatrices en ce moment.

[Français]

    Leur eau et leurs terres sont contaminées, et ces gens mangent la viande provenant des animaux qui vivent sur leur territoire.

[Traduction]

    Leur rôle est très important, et mon travail s'harmonise avec ce que fait Environnement Canada sur, par exemple, la première mise à jour de la Loi sur les ressources en eau du Canada et sur la commission de l'eau. Il faut que nous protégions mieux les gens des effets des contaminants.
    Vous le savez tous, le ministre Guilbeault a invoqué son mandat de ministre de l'Environnement pour interrompre la production de polluants de l'industrie pétrochimique de Sarnia, dans le Sud de l'Ontario. Ces polluants étaient invisibles et inodores, mais néanmoins cancérogènes. Il a travaillé en étroite collaboration avec la Première Nation avoisinante. Comme vous l'avez peut-être lu, l'entreprise n'était pas très enthousiaste à l'idée de fermer ses portes pendant qu'elle installait de meilleurs filtres et des épurateurs.
    Le chef de cette communauté m'a dit que ses membres vivent dans une vallée chimique. Il a ajouté qu'ils reconnaissent que cette industrie est importante pour l'économie et que même un bon nombre d'entre eux y travaillent, mais que cela ne signifie pas qu'ils approuvent les pratiques qui les empoisonnent.
(1035)

[Français]

     Je me permets une question complémentaire, puisqu'elle est directement liée à votre réponse: seriez-vous en faveur d'une interdiction de construire un dépotoir de déchets nucléaires le long de la rivière Kitchissippi, ou rivière des Outaouais, à Deep River?
    C'est une évidence pour les Premières Nations, particulièrement pour les Anishinabe qui sont venus ici, pour la grande cheffe Woodhouse et pour nous.
    Je ne peux pas vous répondre maintenant, parce que je ne suis pas une scientifique et que je n'ai pas les données nécessaires. C'est une question trop générale pour que je puisse vous répondre par oui ou non.
    Merci beaucoup, monsieur Lemire.

[Traduction]

    Sur ce, nous passons au dernier intervenant de ce groupe de témoins et de la réunion d'aujourd'hui.
    Madame Idlout, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Qujannamiik, Iksivautaq.
     Merci, monsieur le président.
    Je voulais simplement rappeler au Comité, à la lumière des réponses de la ministre sur l'élimination des décisions arbitraires que le gouvernement fédéral peut prendre, que ce genre de déclaration ne tient pas compte des obligations juridiques du gouvernement fédéral à l'égard des Premières Nations. Elle ne tient pas compte de principes constitutionnels importants comme l'honneur de la Couronne et l'obligation fiduciaire du gouvernement fédéral d'agir de bonne foi.
    Je rappelle également au Comité que, dans sa décision concernant la nation Haïda, la Cour suprême a déclaré ce qui suit: « Dans tous ses rapports avec les peuples autochtones, qu'il s'agisse de l'affirmation de sa souveraineté, du règlement de revendications ou de la mise en œuvre de traités, la Couronne doit agir honorablement. »
     Cela n'empêche donc pas le gouvernement fédéral de financer ou d'adopter des lois qui respectent sa relation avec les Premières Nations. En prétendant que ce projet de loi éliminerait la prise de décisions arbitraire, on fait fi de cette relation importante avec les Premières Nations. On ne tient pas compte de l'importance de la réconciliation que le gouvernement doit exercer avec les Premières Nations, plutôt que de refuser d'agir dans le sens de la réconciliation.
    Notre comité se doit d'entendre ceux qui ont été ignorés. Seulement 31 %, nous a‑t‑on dit, ont participé à la soi-disant « élaboration conjointe » de ce projet de loi. Je profite de cette occasion pour veiller à ce que nous comprenions, d'après ce que nous avons entendu, que... Je tiens à rappeler aussi que les Premières Nations ont présenté de nombreux mémoires.
    Le comité des affaires autochtones et du Nord a reçu l'avis de ma motion le 4 octobre.
Que le Comité demande aux analystes de préparer un document synthèse de la correspondance et des mémoires soumis, qui comprend les amendements recommandés et un résumé des enjeux, concernant le projet de loi C‑61, Loi sur l'eau propre des Premières Nations.
    L'Assemblée des Premières Nations nous a dit ce matin qu'elle avait remis son mémoire, mais j'ai vérifié dans ma boîte de réception, et je n'ai vu aucune de ses lettres et aucun mémoire.
    Qujannamiik, Iksivautaq.
    Merci beaucoup, madame Idlout.
     Je crois comprendre que vous avez déjà présenté et distribué cette motion la semaine dernière. Si je comprends bien, vous proposez cette motion maintenant?
     Oui.
    D'accord. Nous pouvons donc passer au débat sur cette motion, s'il y a débat. Je ne crois pas qu'il y en ait. Il ne semble pas y en avoir. La motion est-elle donc adoptée?
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Merci beaucoup, madame Idlout. Les analystes pourront donner suite à cette demande.
    Avant de lever la séance, je tiens à remercier la ministre Hajdu et ses fonctionnaires d'être venus aujourd'hui pour témoigner dans le cadre de cette étude.
    La séance est levée.
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