La séance est ouverte.
[Français]
Je vous souhaite la bienvenue à la cinquième réunion du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord.
[Traduction]
Nous recevons aujourd'hui deux groupe de témoins dans le cadre de notre étude sur les obstacles au développement économique autochtone.
Le premier groupe sera composé de Mme Patty Hadu, ministre des Services aux Autochtones, et de M. Dan Vandal, ministre des Affaires du Nord.
Les deux ministres sont accompagnés pour l'occasion de représentants de l'Agence canadienne de développement économique du Nord, du ministère des Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord, du ministère des Services aux Autochtones, de l'Agence fédérale de développement économique pour le Nord de l'Ontario, et de Développement économique Canada pour les Prairies.
[Français]
Le deuxième groupe de témoins sera composé de M. Adam Jourdain, directeur général adjoint de la Corporation développement économique Nikanik,
[Traduction]
Mme Dawn Madahbee Leach, du Conseil national de développement économique des Autochtones, et de M. Clint David de la Nunasi Corporation.
[Français]
Je demande à tous ceux et celles qui sont sur place de respecter les mesures sanitaires; nous les connaissons bien.
[Traduction]
Des services d'interprétation sont offerts en anglais, en français et en inuktitut. Si jamais vous n'entendez plus l'interprétation, veuillez m'en aviser immédiatement. Vous pouvez utiliser en tout temps la fonction « Lever la main » si vous souhaitez prendre la parole ou signaler quelque chose à la présidence.
Les députés qui assistent à la réunion en personne doivent procéder comme ils le feraient normalement si tous les membres du Comité se réunissaient en personne dans une salle de comité. Lorsque vous intervenez, veuillez parler lentement et clairement. Lorsque vous n'avez pas la parole, votre micro doit être désactivé.
Je vous rappelle que toutes les observations des députés doivent être adressées à la présidence.
[Français]
Chaque ministre est invité à faire une présentation de cinq minutes. Par la suite, il y aura une période de questions.
[Traduction]
Pour la première série de questions, les députés disposeront de six minutes chacun. Pour les tours suivants, voici l'ordre et le temps alloué à chaque intervenant: Parti conservateur, cinq minutes; Parti libéral, cinq minutes; Bloc québécois, deux minutes et demie; Nouveau Parti démocratique, deux minutes et demie; Parti conservateur, cinq minutes; et Parti libéral, cinq minutes. Si nous arrivons au bout du temps alloué pendant un tour de questions, nous poursuivons la séquence comme prévu.
Je cède maintenant la parole à la ministre Hajdu qui va nous présenter ses observations préliminaires.
:
Merci beaucoup, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité. Je suis honorée d'être avec vous pour ma première comparution devant ce comité.
Je vous parle aujourd'hui depuis le territoire visé par le traité Robinson-Supérieur, et plus précisément depuis le territoire traditionnel de la Première Nation de Fort William. Il faut bien sûr souligner également la contribution des Métis dans la région au fil de plusieurs générations.
L'établissement d'une relation renouvelée avec les peuples autochtones du Canada fait partie des grandes priorités de notre gouvernement depuis son accession au pouvoir. Je m'emploie à consolider ces liens en valorisant d'abord et avant toute l'équité, la confiance et l'autodétermination, autant de principes essentiels à l'établissement d'une relation saine et durable.
[Français]
Services aux Autochtones Canada travaille en partenariat avec les partenaires des Premières Nations, des Inuits et des Métis, et ce, partout au pays. Nous visons à offrir des services de grande qualité de façon uniforme, en utilisant une approche qui reconnaît les distinctions entre les communautés autochtones.
[Traduction]
Tout notre travail s'articule autour d'une croyance profonde en l'égalité réelle des chances et des résultats. Le Canada sera un pays plus fort lorsque chacun et chacune aura une chance équitable de réussir. Pour ce faire, il faut notamment progresser vers l'autodétermination à la faveur d'une croissance économique soutenue et veiller à ce que les Autochtones aient accès aux mesures de soutien aux entreprises.
Toutes les collectivités ont besoin d'une base économique solide pour pouvoir croître et prospérer, mais nous reconnaissons qu'il existe des obstacles supplémentaires au développement économique autochtone. Je veux vous parler aujourd'hui de quelques-uns de ces obstacles et des moyens à prendre pour en venir à bout, car il faut bien comprendre la nature des problèmes pour pouvoir travailler ensemble à la recherche de solutions.
Quels sont donc ces obstacles? Tout d'abord, le manque d'accès au capital est l'une des principales difficultés auxquelles sont confrontés les Autochtones qui veulent lancer une entreprise ou la faire croître.
Pour faciliter l'accès au capital, l'Association nationale des sociétés autochtones de financement administre le Programme d'entrepreneuriat autochtone qui fournit quelque 25 millions de dollars par année en capitaux propres pour permettre à des entrepreneurs autochtones de contracter des prêts commerciaux à un coût abordable. C'est également dans le cadre du Programme d'entrepreneuriat autochtone que l'on offre le nouveau Fonds de croissance autochtone doté d'un budget de 150 millions de dollars. Ce fonds géré et conçu par les Autochtones est une importante initiative de redressement économique qui permettra aux entreprises autochtones d'avoir accès à une source de capitaux totalement indépendante.
Les entreprises autochtones continuent de ressentir les effets négatifs de la COVID-19 qui s'ajoutent aux obstacles auxquels elles étaient déjà confrontées avant la pandémie. Bien que le Conseil canadien pour l'entreprise autochtone ait indiqué la semaine dernière que la situation s'améliore, de nombreuses entreprises autochtones continuent d'être affectées négativement.
Pour combler les lacunes des initiatives de relance économique destinées à l'ensemble de la population dans le contexte de la COVID-19, notre ministère offre aux entreprises autochtones des mesures de soutien ciblées depuis le début de la pandémie. Services aux Autochtones Canada a investi quelque 890 millions de dollars dans ces mesures afin d'appuyer les entreprises autochtones. Cette aide vient s'ajouter aux programmes généraux visant à favoriser le développement économique et aux autres mécanismes de soutien mis en place par le gouvernement du Canada auxquels les entreprises autochtones peuvent également avoir accès dans le cadre du Plan d'intervention économique pour répondre à la COVID-19.
Parmi ces mesures de soutien ciblées, notons le Fonds d'appui aux entreprises communautaires autochtones qui vient en aide aux entreprises admissibles inuites, métisses et des Premières Nations dont les revenus ont diminué en raison de la pandémie.
En Colombie-Britannique, ce fonds a permis d'offrir un soutien d'urgence indispensable de plus de 2 millions de dollars à l'établissement St. Eugene Golf Resort & Casino à Cranbrook. Cette entreprise appartenant à cinq Premières Nations est l'une des pierres d'assise importantes de l'industrie touristique régionale. Elle procure de l'emploi à plus de 200 personnes, y compris de nombreux membres des Premières Nations. On a ainsi aidé l'entreprise à éponger ses frais d'exploitation fixes ainsi que les coûts supplémentaires engagés pour l'adaptation à la pandémie et la préservation des actifs.
L'hôtel se prépare maintenant à ouvrir ses portes au printemps et, bien que l'industrie touristique ne soit pas pleinement relancée, l'aide financière obtenue du Fonds d'appui aux entreprises communautaires autochtones a contribué au maintien de cette entreprise communautaire et des emplois qu'elle offre localement.
Comme je suis également la ministre responsable de l'Agence fédérale de développement économique pour le Nord de l'Ontario (FedNor), je dois absolument souligner que le Fonds d'aide et de relance régionale continue d'aider les entreprises et les organisations autochtones à atténuer les répercussions de la pandémie et à relancer leurs activités. FedNor joue un rôle essentiel en offrant un soutien bien senti à ses clients autochtones dans leurs efforts continus de planification, de développement économique communautaire et de renforcement des capacités.
Services aux autochtones Canada a aussi consenti des investissements pour aider les communautés autochtones à éponger les pertes de revenus autonomes attribuables à la pandémie. L'Initiative de revenus autonomes dans les communautés autochtones a aidé à compenser partiellement la baisse de ces revenus pour que les communautés métisses, inuites et des Premières Nations puissent continuer à offrir à leurs membres les programmes communautaires de base et les services essentiels.
Notre ministère a aussi multiplié les actions en vue d'éliminer les obstacles qui se dressent devant les entreprises autochtones qui souhaitent participer aux marchés publics fédéraux. En août 2021, nous avons mis à jour la Stratégie d'approvisionnement auprès des entreprises autochtones et annoncé un nouvel objectif obligatoire pour l'ensemble du gouvernement. Ainsi, les entreprises détenues et dirigées par des Autochtones doivent obtenir une proportion d'au moins 5 % de la valeur totale des contrats fédéraux.
Nous allons poursuivre la collaboration avec nos partenaires autochtones afin d'élaborer une approche à long terme pour transformer l'approvisionnement auprès de leurs entreprises.
[Français]
Les entreprises établies dans la communauté autochtone peuvent également faire face à un manque d'accès aux territoires et aux infrastructures adéquates. Les entrepreneurs autochtones peuvent éprouver des difficultés à trouver un espace physique pour mener leurs affaires et à accéder aux réseaux d'affaires. De plus, leur accès à l'électricité et à une connexion Internet est peu fiable. Enfin, ils peuvent avoir de la difficulté à acheminer les marchandises vers les marchés, en raison de l'éloignement et des infrastructures routières médiocres ou non disponibles. Il s'agit de problèmes complexes.
Notre gouvernement travaille en étroite collaboration avec les Autochtones et les organismes de partout au pays pour s'attaquer aux causes profondes de ces obstacles et pour améliorer les réseautages économiques globaux.
:
Merci. Je suis heureux d'être parmi vous aujourd'hui.
Tansi. Bonjour.
Je vous parle depuis mon bureau de circonscription de Saint Boniface—Saint Vital à Winnipeg, patrie de la nation métisse et territoire visé par le Traité no 1.
[Français]
Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui pour discuter du développement économique autochtone.
Je suis accompagné Paula Isaak, présidente de l'Agence canadienne de développement économique du Nord, par Serge Beaudoin, sous-ministre adjoint des Affaires du Nord, et par Mohan Denetto, conseiller exécutif à Développement économique Canada pour les Prairies.
En tant que , j'ai eu l'occasion d'écouter les partenaires autochtones, qui m'ont fait part des obstacles auxquels ils sont confrontés en matière de développement économique.
L'accès au développement des compétences et aux possibilités d'éducation est souvent limité par l'infrastructure, par la connectivité, par le logement, et j'en passe. Notre gouvernement continue à faire des progrès en ce qui a trait à l'élimination de bon nombre de ces obstacles. J'aimerais d'ailleurs donner quelques exemples à cet égard.
[Traduction]
L'accès à l'éducation de qualité pour les jeunes est essentiel non seulement pour leur réussite personnelle, mais aussi pour la prospérité des économies locales et pour le Canada dans son ensemble. C'est une question qui me tient à cœur depuis l'époque où, comme conseiller municipal à Winnipeg, j'ai guidé l'élaboration de la stratégie pour les jeunes autochtones, la première du genre au Canada, et pour avoir été moi-même travailleur social et intervenant auprès des jeunes au Centre Mamaweyatitan, en plein cœur de Winnipeg.
Nous consentons de nouveaux investissements en éducation dans le Nord. Nous fournissons des fonds pour la construction d'un pavillon des sciences à l'Université du Yukon et pour transformer le collège Aurora en université polytechnique, en plus d'injecter 13 millions de dollars dans le Centre Dechinta pour la recherche et l'apprentissage. J'ai en outre annoncé la création d'un groupe de travail sur l'éducation postsecondaire qui formulera des recommandations quant aux moyens à mettre en oeuvre pour combler l'écart entre le Nord et le Sud pour ce qui de l'éducation et de la formation professionnelle.
CanNor joue un rôle particulièrement important auprès des entreprises autochtones des différents territoires. Au cours des trois dernières années, plus de 60 % du financement offert par CanNor est allé à des bénéficiaires autochtones. CanNor a notamment investi dans des projets de développement des pêches à petite échelle au Nunavut. Réalisés en partenariat avec les associations de chasseurs et de trappeurs, ces projets soutiennent la recherche exploratoire sur les pêches côtières aux fins du développement d'entreprises commerciales de pêche appartenant à la communauté dans trois hameaux.
Dans les Territoires du Nord-Ouest, nous avons investi dans le projet pilote de Cheetah Resources sur les terres rares de Nechalacho. Nous appuyons ainsi l'exploitation durable des ressources en partenariat avec la Det'on Cho Corporation, l'organe de développement économique de la Première Nation des Dénés Yellowknives.
Au Yukon, nous appuyons une entreprise autochtone locale, Grandma Treesaw's Bannock and Catering Services, pour la réalisation d'un projet d'un an visant l'exportation aux États-Unis d'un mélange sec pour la préparation de la bannique.
Notre gouvernement collabore avec différents partenaires pour la gestion et la remise en état de sites contaminés, une initiative qui va améliorer les perspectives d'emploi, de formation et d'entrepreneuriat pour les nations autochtones et les résidents du Nord.
Les entreprises autochtones des Prairies doivent composer avec des difficultés tout à fait uniques. Nous y déployons donc des programmes d'investissement afin de favoriser la croissance économique et la prospérité. Les Services de développement des entreprises autochtones soutiennent l'entrepreneuriat au stade initial pour les entrepreneurs et les établissements commerciaux autochtones nouveaux ou déjà en affaires.
À Churchill, au Manitoba, le groupe Arctic Gateway contribue aux activités d'entretien du chemin de fer de la baie d'Hudson. Environ 70 % des employés de ce groupe sont autochtones.
Nous sommes conscients qu'il y a encore beaucoup à faire, mais nous savons que la diversification et l'innovation sont des éléments clés dans notre quête de résilience et de réconciliation. Pour atteindre ces objectifs, il faut permettre à nos partenaires autochtones d'avoir leur mot à dire. C'est justement pour cette raison que nous avons mis en place le Cadre stratégique pour l'Arctique et le Nord. Tous ensemble, nous nous employons à élargir les perspectives à long terme pour la protection du riche environnement naturel du Nord, le développement de communautés plus saines, la prise en compte des droits et des intérêts des peuples autochtones et le soutien à une économie diversifiée, durable et dynamique pour le Nord et l'Arctique.
[Français]
Encore une fois, je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de comparaître devant le Comité.
Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Qujannamiik. Merci beaucoup. Thank you.
Bonjour à tous nos témoins et merci aux deux ministres d'avoir accepté de comparaître devant le Comité pour discuter de ce sujet très important. Comme nous avons pu l'entendre lors de nos séances précédentes et comme vous l'avez vous-même signalé dans vos observations, il ne saurait y avoir de véritable réconciliation avec les Autochtones sans qu'il y ait également réconciliation sur le plan économique.
Nous allons donc partir de ce principe. Dans le cadre de cette première étude, nous avons accueilli récemment des témoins qui nous en ont dit davantage à ce sujet, notamment quant à la nécessité de mettre l'accent sur l'économie, l'approvisionnement public, les programmes de soutien et l'accès aux marchés pour les entreprises.
C'est dans ce contexte que j'aimerais que nous parlions, madame Hajdu, des plans de reprise des activités et du Programme d'entrepreneuriat autochtone. Selon le rapport sur les résultats de votre ministère rendu public ce mois-ci, vous vous étiez fixé l'objectif modeste d'augmenter de 2 % le nombre d'entreprises autochtones créées ou prenant de l'expansion. Vous avez raté cette cible avec une diminution de 6,92 %. Je note cependant que vous expliquez que le nombre net d'entreprises créées pourrait encore diminuer en raison de la fermeture de nombreuses entreprises autochtones, mais qu'il devrait augmenter par la suite avec la levée de certaines mesures temporaires.
Étant donné ces résultats, pouvez-vous nous dire, madame la ministre, à quel moment votre gouvernement mettra-t-il enfin en oeuvre un plan pour mettre un terme aux exigences et aux restrictions fédérales de telle sorte que les entreprises autochtones puissent se remettre de la pandémie et prospérer de nouveau?
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie les deux ministres de se joindre à nous. J'ai vraiment aimé les exposés. Ils étaient assurément très informatifs et intéressants.
J'ai travaillé aux questions autochtones pendant la majeure partie de ma vie adulte et j'essaie d'améliorer la qualité de vie de la communauté dans laquelle je vis et des communautés du Nord. À l'âge de 17 ans, j'assistais aux réunions des conseils tribaux. On y discutait à l'époque de certaines des questions dont nous parlons encore aujourd'hui.
Beaucoup d'efforts ont été déployés pour ramener ce qui a été perdu. Dans les Territoires du Nord-Ouest, nous avons maintenant 14 tables qui parlent de revendications territoriales, de régime foncier, d'autonomie gouvernementale et d'indemnisation. Ce sont tous des sujets importants et nous devons réparer certains des torts qui nous ont été causés. Nous avons également fait beaucoup de progrès sur le plan du partage des recettes de l'exploitation des ressources et de la participation obligatoire au processus. Tout cela est important.
Cependant, nous avions besoin que certains changements soient apportés. J'ai été très heureux que la nouvelle politique financière sur l'autonomie gouvernementale voie le jour. Elle a été élaborée dans le cadre d'une approche collaborative avec les peuples autochtones et c'est un bon document.
Je voulais demander à la ministre si elle peut me dire de quelle façon ce document — que l'on appelle le livre vert — couvre le développement économique et en quoi ce sera bénéfique pour les peuples autochtones.
:
Le gouvernement a mis en place un programme décennal de 2,2 milliards de dollars pour assainir les mines contaminées et abandonnées partout dans le Nord. Il y a eu des investissements importants et il continuera d'y en avoir. Le but des programmes est de veiller à que les terres et les eaux soient assainies pour les prochaines générations. Il nous incombe de veiller à ce que ce soit les nations autochtones qui vivent aux alentours des sites miniers, ainsi que les autres habitants du Nord, qui bénéficient des emplois, de l'approvisionnement et des bénéfices découlant de l'assainissement.
Au cours des deux ou trois dernières années, vous et moi, ainsi que la , qui a fait un travail remarquable dans ce dossier, avons établi un très bon partenariat avec les Dénés Yellowknives pour l'assainissement de la mine Giant. C'était vraiment l'un des moments les plus tristes de l'histoire du Canada: la terre a été exploitée et de l'arsenic a tout simplement été jeté partout sur le territoire et dans l'eau et absorbé par les peuples autochtones. C'est une partie très triste de l'histoire du Canada, qui a été, franchement, ignorée pendant trop longtemps.
Ce n'est plus le cas. Nous sommes à la table avec le : moi, vous, à titre député de la région et, surtout, les Dénés Yellowknives. En tant que personne, en tant que député, je ne serai pas satisfait tant que le gouvernement du Canada ne présentera pas d'excuses aux Dénés Yellowknives.
Nous travaillons en partenariat. Il y a un grand leadership sur place avec vous et les Dénés Yellowknives. Nous allons continuer de travailler avec le et le à ce programme très important.
:
Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier les ministres et le personnel qui les accompagne de leur présence, un vendredi après-midi. Je comprends le sacrifice que cela représente.
Je veux revenir un peu sur ce qu'a dit la ministre Hajdu.
Dans votre déclaration préliminaire, vous avez dit que les collectivités avaient besoin d'une base économique solide pour pouvoir croître et prospérer. Vous avez dit qu'il fallait progresser vers l'autodétermination à la faveur d'une croissance économique soutenue. Pourtant, dans le discours du Trône et dans votre lettre de mandat et celle du , le seul élément auquel on a fait référence qui concerne la croissance économique, ou le soutien aux populations autochtones d'un point de vue économique, c'est le Programme d'entrepreneuriat autochtone. J'ai eu plusieurs discussions avec des organisations autochtones nationales et, franchement, elles étaient très inquiètes à ce sujet.
La vaste expérience que j'ai acquise après deux ans et demi sur la Colline — c'est une blague, soit dit en passant —, m'a appris entre autres que si des choses ne figurent pas dans les lettres de mandat, si elles ne sont pas dans le discours du Trône, alors on commence à remettre en question le niveau des priorités.
Je suis simplement curieux. La réconciliation économique a vraiment été laissée de côté dans tous ces documents. Dans quelle mesure cette question est-elle une priorité pour le gouvernement, vraiment?
:
Nous savons tous que c'est un principe universel que la clé d'une meilleure vie est une meilleure éducation. Malheureusement, pour les nations et les peuples autochtones, les effets de la colonisation et de la politique gouvernementale visant à faire disparaître l'Indien de la personne ont eu des conséquences horribles sur le niveau d'instruction.
En tant que ministre des Affaires du Nord, je sais combien notre gouvernement est engagé. Premièrement, nous avons investi des dizaines de millions de dollars dans les budgets des dernières années. Il y a eu 13 millions de dollars sur cinq ans pour le Centre de recherche et d'apprentissage Dechinta et 26 millions de dollars sur cinq ans pour un nouveau bâtiment scientifique à l'Université du Yukon.
De manière tout aussi importante, il y a environ un an, nous avons créé un groupe de travail indépendant sur l'amélioration de l'éducation postsecondaire dans le Nord, dans la foulée du budget de 2019. Tous les territoires du Nord y sont représentés, y compris l'Arctique, le Nord du Manitoba et, je crois, le Nord de l'Ontario. L'objectif et le mandat de ce groupe sont de mener des consultations, de parler avec la fonction publique, de parler avec les éducateurs et de vraiment soumettre des recommandations à notre gouvernement sur ce qu'il faut faire pour améliorer les résultats en éducation postsecondaire dans le Nord. Cependant, il est difficile de séparer l'enseignement postsecondaire de l'enseignement primaire, parce que sans une bonne base, on ne peut pas avoir un bon système d'enseignement postsecondaire, donc tout est lié. Pour avoir une bonne base, il faut veiller à ce que la société génère de bons déterminants sociaux de la santé.
Il y a un besoin qui est évident, et c'est celui de la technologie. Si cette pandémie nous a appris quelque chose, c'est que nous avons besoin de connectivité partout au pays. Nous avons un Fonds pour la large bande universelle très ambitieux. Nous voulons que 100 % du Canada soit connecté d'ici 2030, si je ne me trompe pas. Cette connectivité est essentielle pour l'éducation, mais aussi pour la santé, pour des soins de santé à distance qui pourraient être très bénéfiques, et pour le commerce et les affaires. Nous en sommes dépendants maintenant.
Vous avez posé une question sur la Stratégie pour la jeunesse autochtone à Winnipeg. C'était il y a quelques années. L'idée principale était que la ville de Winnipeg était confrontée au vieillissement de sa main-d'œuvre. Nous avions une main-d'œuvre vieillissante d'un côté, et de l'autre, des jeunes autochtones, la population qui connaît la croissance la plus rapide à Winnipeg. Nous devions relier les deux au moyen de mentorat, de programmes de formation, d'accords de travail coopératif et de systèmes d'éducation. Je ne sais plus très bien où nous en sommes à cet égard, mais à l'époque, cela avait été accueilli positivement. C'est une chose que nous devons faire au pays.
Je pense que la grande particularité des entreprises autochtones, c'est qu'elles ont souvent une assise financière beaucoup plus fragile que les autres. C'est la raison pour laquelle notre ministère a investi près de 900 millions de dollars — corrigez-moi si je me trompe, madame Fox — pour aider les entreprises autochtones pendant la pandémie de COVID‑19.
Nous savions que plus nous pourrions aider ces entreprises, comme toute autre entreprise, au moyen de diverses mesures de santé publique, plus elles pourraient en ressortir fortes à la fin et maintenir leur empreinte économique dans les collectivités et les régions qui ont déjà le plus de mal à établir cette empreinte au départ.
Par exemple, l'un des domaines dans lesquels les peuples autochtones étaient peut-être surreprésentés, ou à tout le moins dans lesquels ils ont été très touchés, c'est celui du tourisme. Beaucoup de communautés autochtones comptent beaucoup sur le tourisme pour leur développement économique. Bien sûr, le tourisme a grandement souffert de la pandémie.
:
[
La députée s'exprime en inuktitut ainsi qu'il suit:]
ᖁᔭᓐᓇᒦᒃ, ᑖᓐᒧᑦ ᐊᐱᕆᒋᐊᖅᐸᓪᓕᐊᖅᖃᐅᔭᒃᑲ ᑲᔪᓯᒋᐊᑐᐃᓐᓇᕐᓗᒍ, ᐱᒋᐊᖅᖃᐅᒐᒪ ᓲᕐᓗ ᓄᓇᖃᖅᖄᖅᓯᒪᔪᐃᑦ ᐅᑭᐅᖅᑕᖅᑐᕐᒥᐅᓪᓗ ᓄᓇᖏᑦ ᐅᖅᓱᐊᓗᖕᒥᑦ ᐊᑐᐃᓐᓇᓲᖑᖕᒪᑕ. ᑕᒪᓐᓇ ᐅᖅᓱᐊᓗᒃ ᐊᒃᓱᕉᑕᐅᑉᓗᓂ ᐊᒻᒪᓗ ᐊᕙᑎᑦᑎᓐᓂ ᓱᕋᒃᑎᕆᕙᒃᖢᓂ, ᐅᖅᓱᐊᓗᒡᓗ ᐊᑭᑦᑐᕆᐊᖅᐸᓪᓕᐊᑐᐃᓐᓇᕐᒪᑦ. ᑕᒪᒃᑯᐊ ᐊᑭᑦᑐᕆᐊᖅᐸᓪᓕᐊᑎᓪᓗᒋᑦ, ᐊᐱᕆᔪᒪᕙᕋ ᑖᓐᓇ ᒥᓂᔅᑕ ᖃᓄᑎᒋ ᐱᓕᕆᐊᖃᓲᖑᖕᒪᖔᑦ ᓄᓇᖃᖅᖄᖅᓯᒪᔪᐃᑦ ᓇᖕᒥᓂᖁᑎᖏᓐᓂᑦ, ᓲᕐᓗ ᑕᒪᒃᑯᐊ ᐱᓕᕆᔩᑦ ᖁᓪᓕᒃᑯᑦ ᐅᕝᕙᓘᓐᓃᑦ ᑭᕙᓪᓕᕐᒥᑦ ᑲᑐᔾᔨᖃᑎᒌᒃᑯᑦ ᐱᓕᕆᐊᖃᕋᓱᒃᑎᓪᓗᒋᑦ Hydro Fibre Link-ᒥᑦ ᑕᐃᔭᐅᔪᒥᓐ.
[Les propos en inuktitut sont interprétés en anglais puis traduits ainsi:]
Merci.
Ma question s'adresse encore au ministre des Affaires du Nord.
Dans les communautés autochtones et inuites, nous dépendons beaucoup du diesel, qui est très polluant pour l'environnement. Les prix grimpent sans cesse, et le coût de la vie qui ne cesse d'augmenter. J'aimerais poser la question suivante au ministre: comment... la Qikiqtaaluk Corporation ou la Kivalliq Inuit Association dans leur travail sur l'énergie propre. Comment les aidez-vous?
[Traduction]
:
[
Le témoin s'exprime en innu ainsi qu’il suit:]
Kuei!
Kassinu etashiek. Niminueniten anutshish kashikat tshetshi imian, tshetshi uauitaman ne ka ishpipinitakan shuniat.
[Les propos en innu sont traduits ainsi:]
J’offre mes salutations à vous tous.
Je suis heureux de pouvoir prendre la parole afin de parler de la croissance économique.
[Français]
Monsieur le président, chers membres du Comité et chers participants, permettez-moi tout d'abord de souligner que je vous parle présentement depuis la communauté de Wemotaci sur le territoire ancestral Nitaskinan, dont le nom signifie « notre terre », qui est le territoire de la nation atikamekw. Je suis pour ma part Innu originaire de la communauté d'Uashat mak Mani‑utenam.
C'est avec enthousiasme que je me joins à vous aujourd'hui, afin de discuter d'un sujet qui me tient particulièrement à cœur, c'est-à-dire le développement économique autochtone. Si je m'intéresse particulièrement au développement économique, c'est que j'ai rapidement compris, au cours de ma carrière, que c'est le principal outil à la disposition des communautés autochtones pour assurer notre émancipation et améliorer nos conditions de vie et le contexte psychosocial de nos membres. Malheureusement, même si le concept de développement économique peut paraître simple et applicable à tous, il est évident que, pour les communautés autochtones, il y a encore beaucoup de chemin à parcourir. Dans les prochains instants, je reviendrai donc sur ce qui constitue le sujet de cette rencontre, c'est-à-dire les obstacles au développement économique autochtone. Cela dit, j'aimerais d'abord démontrer que le développement économique est possible dans les communautés.
Lorsque je suis arrivé, en 2014, à Wemotaci, une communauté atikamekw de 2 000 personnes, pour occuper le poste de directeur général de la Corporation développement économique Nikanik, le portrait était sombre et nous partions de loin. À titre d'exemple, il n'y avait plus d'essence dans la communauté depuis plus de huit mois, et les résidants devaient s'approvisionner à La Tuque, donc à 115 kilomètres de distance. Enfin, pour l'ensemble de la communauté, qui n'avait ni plan, ni stratégie ni objectif de développement, le montant annuel des projets était d'environ 250 000 $ et le budget de développement de 40 000 $ couvrait à peine mon salaire. Des sociétés en commandite étaient en difficulté, le taux de chômage était très élevé et on comptait moins de 10 entreprises privées.
Il aura fallu qu'un nouveau conseil, ayant une vision claire du développement économique, soit élu pour mettre en marche la locomotive du changement et lancer de nouveaux projets qui répondaient principalement aux besoins essentiels de la communauté. Dans un premier temps, nous avons donc entrepris la mise en place de la fibre optique pour nous sortir de l'isolement, remis en état la station service pour assurer l'approvisionnement en essence, construit un centre d'affaires pour nos entrepreneurs, et, surtout, nous avons élaboré et mis en œuvre un plan de relance réaliste avec des objectifs clairs et réalisables.
Maintenant, grâce à ce plan, je suis fier de vous dire que nous avons redressé la situation et contribué à l'amélioration des conditions de vie de plusieurs membres de la communauté. À l'heure actuelle, on parle de projets totalisant 182 millions de dollars, d'un budget de 300 000 $ destiné au développement économique, d'un nombre sans cesse croissant d'emplois stables, de 32 entrepreneurs privés et d'un taux de chômage qui a diminué. Le plan de relance nous a permis de rêver grand et de prouver à tous que, malgré les préjugés qui sont tenaces, nous sommes capables de réaliser des projets majeurs.
Puisqu'il est principalement question aujourd'hui des obstacles auxquels nous sommes confrontés, je vous énumérerai quelques aspects, qui, selon mon expérience, freinent le développement économique dans nos communautés.
La mise de fonds de 10 % nécessaire pour tout nouveau projet en contexte autochtone est une exigence des ministères fédéral et provincial qui ne tient véritablement pas compte de la capacité financière des communautés et des individus. Pour ce qui est de la recherche de financement auprès des institutions privées, sauf exception, celles-ci restent encore à ce jour méfiantes devant nos organismes.
La lourdeur administrative des gouvernements, tant québécois que canadien, est un frein réel qui compromet la réalisation de bon nombre d'occasions. Les programmes de la formation de la main-d'œuvre ne sont pas adaptés aux réalités des travailleurs potentiels. L'éloignement des communautés cause des coûts supplémentaires d'approvisionnement et des inégalités entre communautés en ce qui concerne l'accès aux programmes de financement et les montants alloués. L'exploitation des ressources naturelles est inéquitable.
Mon temps de parole est limité à cinq minutes, ce qui est vraiment trop court.
Je serai heureux de préciser chacun de ces obstacles lors de la période de questions.
Je terminerai en rappelant que nous, les Autochtones, avons une riche histoire de relations commerciales, et ce, depuis bien avant l'arrivée des premiers Européens sur nos territoires. Il nous appartient de retrouver nos réflexes passés et de construire ce que j'appellerai le « Autochtones inc. » de demain. Pour y arriver, il faut toutefois cerner et surmonter tous les obstacles qui se dressent sur notre route. Pour cela, les gouvernements, les institutions financières, la société civile et l'ensemble des instances qui interviennent se doivent de devenir des agents facilitateurs et de réels partenaires. C'est dans l'intérêt de tous.
Tshinashkumitin.
:
[
La témoin s'exprime en anishinaabemowin et fournit le texte suivant:]
Aanii - Biidaabin dezhnikaaz, jiijaak dodem, mnidoo mnising ndoonjibaa.
[La témoin fournit une version en anglais dont voici la traduction:]
Bonjour. Je m’appelle Soleil levant. Je viens du clan de la grue. Je demeure sur l'île Manitoulin, qui fait partie du territoire traditionnel de la nation anishinaabe.
[Traduction]
Meegwetch et merci de me permettre de m'exprimer aujourd'hui devant vous au sujet des obstacles au développement économique des Autochtones.
Je suis présidente du Conseil national de développement économique des Autochtones, une organisation apolitique créée par le ministère et chargée de conseiller le gouvernement fédéral sur les questions liées au développement économique des Autochtones.
Le Conseil a été fondé en 1990 et est formé de dirigeants d'entreprises et de communautés des Premières Nations, des Inuits et des Métis de tout le Canada. Pour vous aider dans votre travail, je vous invite à consulter le site Web de notre conseil, qui comprend notre série de rapports d'étapes sur l'évolution de l'économie des Autochtones à l'échelle nationale. Notre prochain rapport sera publié en 2023.
Je vous invite aussi à consulter notre rapport intitulé « Réconciliation : stimuler l'économie canadienne de 27,7 milliards $ », ainsi que le rapport de 2019 de l'OCDE « Linking Indigenous Peoples to Regional Development », et la stratégie économique autochtone nationale pour le Canada, à venir. Si les recommandations de ces rapports étaient mises en œuvre, un grand nombre des obstacles économiques seraient levés.
L'ensemble de la population canadienne est maintenant plus au courant de la vérité sur le traitement par le gouvernement du Canada des Autochtones dans ce pays. Alors que les effets du colonialisme ont été dévastateurs pour la santé sociale, physique et mentale de nos communautés, l'un de ses objectifs les plus vils était l'exclusion délibérée des Autochtones de la distribution de leur part de richesse de notre pays.
Je me dois d'insister sur le fait que les populations autochtones continuent de se heurter à des obstacles systémiques et institutionnels profondément ancrés dans le domaine juridique, dans le milieu de l'éducation, dans le secteur de la santé, ainsi que dans le paysage gouvernemental et économique du Canada.
Pour que le gouvernement du Canada puisse réparer ces dommages, il faut comprendre que la réconciliation sera impossible sans des économies autochtones dynamiques, caractérisées par l'autosuffisance économique et l'égalité socioéconomique avec le reste du Canada.
Les études prouvent à l'envi que, lorsque les communautés autochtones prospèrent, leur région prospère aussi. Il suffit d'examiner les récents rapports dans lesquels sont décrites les contributions annuelles de milliards de dollars des Autochtones aux économies du Canada atlantique, du Manitoba et de l'Alberta. Si les Autochtones bénéficiaient des mêmes niveaux de scolarité, de revenu et d'emploi ainsi que des mêmes possibilités commerciales que les autres Canadiens, le PIB augmenterait d'un montant allant de 30 à plus de 100 milliards de dollars par an.
En plus des rapports mentionnés, nous recommandons des solutions qui peuvent ouvrir la voie vers la réconciliation économique.
Premièrement, s'assurer que le plan de mise en œuvre de la Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones est élaboré conjointement avec des Autochtones.
Deuxièmement, reconnaître officiellement nos compétences et les cadres juridiques que nous concevons afin de superviser le développement de nos territoires et d'y participer.
Troisièmement, appuyer la mise sur pied d'institutions dirigées par des Autochtones qui aident à renforcer la capacité économique autochtone, à mettre en commun les pratiques de pointe ainsi qu'à offrir des programmes et des services. On travaille déjà à des institutions pour les infrastructures communautaires et l'approvisionnement auprès des entreprises autochtones.
Quatrièmement, soutenir le réseau des institutions financières autochtones en leur fournissant des capitaux pour appuyer la croissance et l'expansion du secteur des entreprises autochtones, accroître les occasions d'emploi, leur permettre de fournir des prêts hypothécaires, et contribuer à réduire l'arriéré de logements pour les Autochtones que l'on connaît actuellement.
Cinquièmement, accroître le financement pour le développement économique et commercial autochtone à 10 % du total des dépenses que le gouvernement du Canada consacre aux Autochtones, en partie pour compenser les insuffisances de financement passées, et pour souligner le fait que chaque dollar dépensé pour le développement économique des Autochtones permet de générer d'importants avantages communautaires et sociaux et d'améliorer les économies régionales dans l'ensemble du Canada.
Enfin, mettre en œuvre la stratégie économique nationale autochtone pour le Canada, qui sera bientôt rendue publique et qui est le fruit de la collaboration entre plus de 20 organisations autochtones nationales. Il s'agit de notre vision de la réconciliation économique. Cette stratégie est fondée sur les quatre piliers stratégiques que voici: les gens; les terres; les infrastructures; les finances. La stratégie comprend des appels à la prospérité économique et s'adresse à tous les niveaux de gouvernement, aux grandes entreprises canadiennes, aux petites entreprises, à toutes les institutions partout au pays et à nos propres gens.
En conclusion, vous avez une occasion de contribuer à éliminer les obstacles à l'inclusion économique des Autochtones. Pour mettre en œuvre les solutions proposées, vous devez corriger les disparités du passé, modifier les mentalités, démontrer de la volonté politique et effectuer de réels investissements financiers, sachant que toute la population du Canada y gagnera.
Meegwetch. Merci.
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Je vous remercie, monsieur le président et honorables membres du Comité.
C'est un réel honneur de témoigner, et certainement en présence de ma chère amie Dawn Madahbee Leach et de M. Jourdain. Vous avez fait un excellent travail.
Je commencerai en vous fournissant des informations de base sur la Nunasi Corporation, après quoi je traiterai des trois obstacles qui, selon moi, contribuent de freiner la croissance des entreprises et des communautés autochtones.
Pour ma part, je suis Inuk, un Inuit du Labrador qui a l'honneur de diriger depuis deux ans la Nunasi Corporation, une société inuite renommée. Nunasi est une société formée d'Inuits de plein droit du Nunavut appartenant à deux associations inuites régionales et une société de développement régional inuite. Forte d'une telle structure, Nunasi appartient à tous les bénéficiaires individuels en vertu de l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut, dont un fait partie du Comité, il me semble.
Nunasi a une histoire fort intéressante. De fait, il s'agit de la plus ancienne société de développement inuite du pays. Elle a été créée en 1976 par Inuit Tapirisat du Canada, maintenant appelée ITK, pour assurer la participation des Inuits aux occasions économiques escomptées une fois que les revendications territoriales des Inuits auraient été réglées. Elle a contribué à une variété d'activités d'affaires dans diverses industries, et certaines de ces entreprises sont toujours en activité aujourd'hui. Nunasi a notamment investi dans des installations médicales situées à Ottawa, Winnipeg, Edmonton et Yellowknife. Ces installations, appelées « largas », offrent des logements sécuritaires et adaptés à la culture aux résidants du Nunavut ayant besoin de soins médicaux dans les hôpitaux du Sud.
Nunasi met aujourd'hui l'accent sur les services de santé afin de tirer parti de la réussite des largas; sur l'énergie, s'intéressant notamment au développement de l'énergie renouvelable au Nunavut; les infrastructures; les transports et les marchés fédéraux.
Je vais maintenant vous faire part de certaines de mes réflexions sur les obstacles, qui se manifestent notamment au chapitre de l'accès aux capitaux. Les entreprises autochtones et inuites sont très différentes de ce qu'elles étaient il y a à peine 20 ans. Les droits enchâssés dans les ententes modernes sur les revendications territoriales et la reconnaissance des droits autochtones dans la foulée de poursuites judiciaires à l'issue favorable permettent aux communautés autochtones de participer davantage aux activités de développement sur leurs terres traditionnelles.
Des expressions comme « obligation de consulter » et « consentement préalable libre et éclairé » sont devenues monnaie courante dans certaines industries. Les ententes sur les répercussions et les avantages présentent de multiples avantages aux communautés autochtones, notamment sous la forme de formation, de perfectionnement, d'emplois et de contrats d'acquisition. Certains projets permettent aux communautés et aux sociétés de développement autochtones d'être en partie propriétaires du projet ou d'un actif important.
Trop souvent, les communautés ne disposent tout simplement pas du capital financier nécessaire pour agir d'égal à égal avec leur partenaire. Les prêteurs traditionnels ne leur accordant généralement pas de prêt, elles doivent laisser passer l'occasion ou recevoir du soutien du partenaire ou d'une autre source à un prix souvent considéré élevé. Je pense que les sociétés d'État fédérales et d'autres institutions ont véritablement l'occasion de fournir ce capital à un taux raisonnable avec un mécanisme de prêt. Cela permettrait à la communauté de participer au projet et de bénéficier des avantages financiers plus tôt au cours du processus.
Pour ce qui est de l'approvisionnement social, le gouvernement fédéral a annoncé, le 31 janvier dernier, que Nasittuq, une entreprise appartenant majoritairement à des Inuits, avait remporté le contrat pour l'exploitation et l'entretien du Système d'alerte du Nord. Ce contrat d'une valeur de près de 600 millions de dollars s'étalera sur sept ans, et s'il est prolongé, il a le potentiel de s'élever à 1,3 milliard de dollars. Parmi les actionnaires inuits de Nasittuq figurent Nunasi et des sociétés de développement régional de l'Inuit Nunangat. Il s'agit d'une excellente nouvelle pour Nunasi et nos collègues et, à dire vrai, un exemple de réconciliation économique à l'œuvre.
Le gouvernement fédéral a pris un engagement de 5 % pour favoriser l'expansion des entreprises autochtones, ce qui pourrait représenter plus de 1 milliard de dollars annuellement. Maintenant que cet engagement est pris, j'encourage vivement le gouvernement fédéral à le mettre en œuvre rapidement et à recourir une approche fondée sur les distinctions pour que les entreprises inuites en profitent.
Je recommanderais également que le gouvernement fédéral envisage d'offrir des incitatifs aux entreprises de compétence fédérale pour qu'elles élaborent de solides politiques d'approvisionnement avantageuses pour les entreprises autochtones. Comme nous l'avons constaté au pays, ce sont normalement chez les entreprises du secteur des ressources naturelles que les processus d'approvisionnement connaissent le plus de succès, ce qui est logique quand on pense à la nature de leurs activités dans les territoires traditionnels.
Cependant, ces pratiques exemplaires devraient s'étendre à d'autres entreprises de diverses industries. Les entreprises autochtones sont diversifiées et si l'occasion leur est donnée, elles combleront les besoins d'approvisionnement de ces entreprises.
Le dernier point que je veux soulever, monsieur le président, est celui des investissements en infrastructure.
En octobre 2020, Nunavut Tunngavik Incorporated, au Nunavut, a publié le rapport sur les lacunes en matière d'infrastructure au Nunavut, lequel met en lumière les déficits dans des domaines de l'infrastructure comme l'eau, le logement, le service à large bande et l'énergie fiable.
La communauté a besoin de ces éléments d'infrastructure de base pour créer un environnement propice à l'entrepreneuriat et pour attirer l'investissement. Ce rapport ne comprenait pas d'évaluation de coût, mais la plus récente annonce de financement du gouvernement fédéral au titre du Fonds d'infrastructure aux communautés autochtones de 4,3 milliards de dollars, dans le cadre duquel les Inuits ont reçu plus de 500 millions de dollars, constitue certainement un pas dans la bonne direction.
Dans un rapport publié en 2016, toutefois, le Conseil canadien pour les partenariats public-privé a évalué le déficit en infrastructure des Premièes Nations à seulement 30 milliards de dollars. Sept ans plus tard, on ne peut que présumer que ce chiffre est plus élevé.
Inuit Tapiriit Kanatami a récemment calculé qu'il faudrait plus de 3 milliards de dollars pour combler les besoins de base en logements des Inuits.
Ainsi, quand on prend en compte le nombre de logements seulement et y ajoute le déficit en infrastructures des Premières nations, on peut aisément présumer que le déficit en infrastructure des communautés autochtones en général est probablement plus près de 60 à 70 milliards de dollars.
Si nous voulons abattre les obstacles au développement économique des Autochtones, nous devons veiller à ce que les communautés bénéficient des conditions propices à une économie qui fonctionne bien, et cela commence avec les infrastructures.
Je vous remercie de m'avoir accordé du temps aujourd'hui. Je répondrai à vos questions avec plaisir.
Nakurmiik.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Permettez-moi de dire que c'est un plaisir d'entendre les messages puissants et inspirants de nos témoins.
Quel bonheur que vous ayez pu nous accorder du temps aujourd'hui.
Je représente une circonscription rurale du Nord-Est de l'Alberta et je suis très fière de représenter tous les électeurs de Lakeland, y compris les neuf communautés autochtones et métisses, avec lesquelles je travaille régulièrement pour tenter de trouver des moyens concrets et tangibles pour faire exactement ce que vous proposez de faire aujourd'hui. Bien entendu, vous ne vous étonnerez pas que presque chaque communauté de ma région de l'Alberta travaille depuis longtemps en partenariat avec des promoteurs du secteur privé, des établissements universitaires et tous les ordres de gouvernement pour exploiter de manière responsable les ressources de la région, c'est‑à‑dire principalement le pétrole, le gaz et le pétrole lourd. On y trouve également les principaux entrepreneurs et propriétaires d'entreprise qui offrent des services à l'industrie.
Je suis toujours enchantée d'entendre des témoignages comme les vôtres sur la manière dont nous pouvons faire progresser la réconciliation économique. Les communautés que je représente m'inspirent. Elles créent des emplois, pas seulement sur leur population, mais aussi pour les gens de la région et de la province.
Je m'attaque à un grand nombre des défis que vous avez évoqués aujourd'hui. Il s'agit principalement de l'accès au capital, du renforcement des capacités dans les communautés pour qu'elles puissent participer efficacement au processus de réglementation, et du besoin que l'État honore ses obligations de mener des consultations bidirectionnelles dynamiques avec les communautés autochtones, plutôt que de simplement cocher des cases sur une liste au lieu d'envoyer des décideurs à la table, comme l'a fait remarquer le dernier témoin, afin de combler rapidement les besoins de base en infrastructure qui nuisent au développement des communautés autochtones.
Monsieur Jourdain, je pense que vous vouliez approfondir un peu les choses. Je ferai peut-être un deux pour un, puis chacun d'entre vous pourra répondre à ces questions à tour de rôle.
J'aimerais vous donner l'occasion de nous en dire plus à deux égards, soit sur les recommandations pour réduire l'aversion au risque de l'État ou du gouvernement et les multiples couches de bureaucratie qui peuvent l'être, et les recommandations sur l'accès au capital.
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Je vais d'abord répondre à votre deuxième question.
En fait, des outils existent déjà. La Loi sur la gestion financière des premières nations nous permet de déroger à la Loi sur les Indiens, mais uniquement sur le plan financier. À Wemotaci, nous avons décidé d'adhérer à cette loi, qui nous permet d'obtenir des capitaux, mais seulement par l'entremise de l'Autorité financière des Premières Nations. Nous avons alors accès à des liquidités nous permettant de développer certains projets, et ce, grâce à des taux d'intérêt avantageux. Le dernier taux d'intérêt qu'on nous a accordé se situait autour de 2,3 %.
Il faut dire que les institutions bancaires ou financières sont toujours réticentes à nous accorder du financement, même si nous avons adhéré à cette loi. Nous devons toujours nous justifier, et cela constitue un obstacle. Pourtant, nous avons d'excellents projets qui tiennent la route et qui répondent aux objectifs de notre communauté.
C'est très difficile pour nous si les taux d'intérêt avoisinent les 7, 8 ou 9 % pour certains projets. C'était déjà un frein incroyable pour l'avancement des communautés, surtout des communautés éloignées comme celle de Wemotaci.
J'espère avoir répondu à votre question.
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Je me ferais un plaisir de répondre aussi à vos deux questions.
J'ai été enchantée d'entendre mon bon ami Harold Calla parler de l'équilibre qu'il faut trouver entre la responsabilité fiduciaire du gouvernement et le fait qu'il est très réfractaire au risque. Selon moi, on peut contribuer à résoudre la question en soutenant l'établissement d'institutions autochtones. Nous devons être responsables de nos propres activités et de nos propres actions.
Je suis persuadée qu'il faut offrir du soutien, comme je l'ai indiquée dans une de nos recommandations, afin d'aider les institutions et les centres d'excellence dirigés par des Autochtones. Ce sont là des moyens cruciaux de contribuer à résoudre les problèmes d'aversion au risque du gouvernement quand il prend certaines décisions. Je pense que notre peuple est prêt et a maintenant la capacité de s'attaquer à ces questions et de prendre lui-même ces décisions. J'appuierais sans réserve ce transfert de programmes, de services et de toutes les ressources nécessaires pour soutenir les institutions autochtones.
J'ai parlé du concept d'institut autochtone en matière d'infrastructure, dont il a été question plus tôt. Je pense qu'il s'agit d'un élément également essentiel pour combler nos besoins.
En ce qui concerne l'accès au capital, je pense qu'il faut comprendre certaines choses. Il existe au Canada un exemple de grande réussite que l'on ne trouve pas dans d'autres pays, et c'est celui des institutions financières autochtones. Ces institutions devraient être soutenues. Il n'en existe dans aucun autre pays, mais leurs capacités sont limitées. La plupart d'entre elles ne peuvent accorder que des prêts de 300 000 $ tout au plus pour un projet. Eh bien, sachez que c'est le prix d'une pièce d'équipement. On ne peut même plus construire un édifice décent avec ce montant.
Il est donc crucial de disposer de plus de capitaux. Nous connaissons la réussite de ces institutions financières autochtones, qui ont pu injecter 3,3 milliards de dollars dans l'économie canadienne en investissant dans des entreprises autochtones et en appuyant le démarrage de nouvelles entreprises autochtones. Nous avons la capacité, mais nous devrons résoudre toute la question de l'approvisionnement et des contrats dont nous parlons pour atteindre la cible de 5 %. Il faut qu'il y ait plus d'entreprises autochtones et que nous les aidions à renforcer leurs capacités pour qu'elles puissent participer efficacement à de nombreux marchés.
En outre, nous devons...
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Lorsque je parle d'accès au capital, ce serait effectivement sous forme de prêts, mais cela concernerait les capitaux propres.
J'aimerais seulement faire un bref commentaire sur l'accès au capital. Autrefois, le trop grand nombre de collectivités et de sociétés de développement représentait un défi. Aujourd'hui encore, il est difficile pour les entrepreneurs autochtones d'avoir accès aux capitaux d'emprunt. C'est pourquoi les IFA dont Mme Leach parlait plus tôt représentent un élément fondamental de l'écosystème pour soutenir les entreprises autochtones, mais elles ont encore des plafonds. Cela représente un énorme défi.
Je pense qu'il y a là une occasion formidable, mais pas nécessairement pour la création d'une nouvelle société d'État. La Banque de développement du Canada est un très bon exemple. En effet, elle offre d'excellents services bancaires aux Autochtones, comme ce que l'on voit avec la Banque TD, la Banque de Montréal, la Banque Royale du Canada et la CIBC. Je pense qu'elle a fait un excellent travail pour fournir des capitaux d'emprunt aux collectivités et aux sociétés de développement et qu'elle a même pris des risques supplémentaires pour soutenir les entrepreneurs.
Maintenant que les collectivités envisagent de participer à des projets à grande échelle et même à moyenne échelle, ces types de capitaux propres sont essentiels. Ce n'est pas quelque chose de nouveau. Cela s'est même produit dans une autre province, à savoir l'Ontario, par l'entremise de la Loi sur l'énergie verte qui, selon moi, est un programme tout à fait brillant. Il s'agissait en fait d'une initiative du gouvernement de l'Ontario qui visait à obtenir l'engagement des Autochtones dans les projets liés à l'énergie verte. Ce programme offrait donc une garantie pour aider les institutions financières à prêter des capitaux qui permettraient aux Premières Nations et aux Métis de participer à ces projets. Je pense qu'une initiative de ce type offrirait d'énormes possibilités.
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Merci, monsieur le président.
Kwe, utshimau Jourdain.
Je suis heureuse que tous les participants ici présents puissent nous éclairer davantage sur les façons d'éliminer les obstacles au développement économique des Premières Nations.
Monsieur Jourdain, je suis contente que vous soyez parmi nous. J'ai pour vous de l'admiration et de la reconnaissance. J'ai été heureuse de vous entendre parler d'Autochtones inc. Vous êtes un exemple en matière de renforcement de l'autonomie.
Vous avez parlé de la situation telle qu'elle était en 2014, lorsque vous êtes arrivé, et de la situation telle qu'elle est maintenant. Vous avez donc une expérience diachronique et très concrète du développement économique. Nous entendons trop rarement des témoignages de gens qui sont vraiment sur le terrain. Nous avons reçu des ministres tout à l'heure, bien sûr. Cela dit, vous enrichissez nos échanges aujourd'hui.
Vous avez mentionné que le temps à votre disposition pour faire votre présentation était trop court. En effet, j'aurais aimé que vous nous parliez plus en détail des aspects qui concernent le gouvernement fédéral. Je songe notamment à la question de l'éloignement géographique, qui est une réalité pour les Atikamekw, mais également pour les communautés de chez nous, dans la Côte‑Nord. Vous avez mentionné la communauté de Uashat, à Sept‑Îles, qui représente 15 % de la population de la ville, et ce nombre continue à croître, évidemment. On pourrait parler aussi de la communauté de Chisasibi. C'est le cas aussi en Abitibi. Bref, toutes les communautés sont touchées.
Je vous laisse nous en parler, monsieur Jourdain.
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Tshinashkumitin, madame Gill.
Pour tout projet de développement économique, qu'il s'agisse d'une station-service, de la construction de résidences ou de la construction d'édifices, c'est sûr que nous sommes désavantagés dès le départ, en raison des coûts exponentiels du transport et des matériaux. Un projet qui est réalisé dans la communauté de Wemotaci, dans celle de Chisasibi ou dans la Côte‑Nord est d'emblée plus coûteux qu'un projet semblable réalisé à Montréal ou à Ottawa. C'est avec cette réalité que nous devons composer.
J'ai aussi parlé de la lourdeur administrative. Nous devons produire une demande, puis une autre, et encore une autre. De plus, le temps de réponse des divers ministères est très long. Nous sommes toujours en attente. Nous ratons donc des occasions incroyables parce que nous ne disposons pas de tous les outils nécessaires. Il nous faut des subventions et des programmes afin de pouvoir fonctionner adéquatement et faire de la construction, qu'il s'agisse de développement économique ou résidentiel.
En fin de compte, nous sommes dépendants de la machine fédérale. Est-ce que cette machine peut décentraliser certains pouvoirs? C'est une question qu'il faut se poser.
On parle également de la mise de fonds. Chez nous, les gens vivent pratiquement sous le seuil de la pauvreté, même s'ils travaillent au conseil. Tout à l'heure, une dame a parlé de résidences. Or, il est impossible pour les gens de Wemotaci de s'acheter une maison, étant donné le coût inabordable des matériaux. Tout le monde ne peut pas se permettre de construire une maison qui coûte 250 000 $.
Il faut trouver de nouvelles façons de réfléchir. Cela se fait en collaboration avec les communautés autochtones, et non à Ottawa uniquement. Comme je le dis souvent, certaines communautés autochtones sont proches des villes, mais d'autres sont éloignées. Il s'agit de deux mondes complètement différents. Il est très important de comprendre cette réalité et de prendre cela en considération lorsqu'on accorde des fonds.
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[
La députée s'exprime en inuktitut ainsi qu'il suit:]
ᖁᔭᓐᓇᒦᒃ ᐃᓘᓐᓇᓯ ᖃᐃᒐᔅᓯ ᐅᕙᑦᑎᓐᓄ ᐅᓂᒃᑳᕆᐊᖅᑐᕐᓗᓯᓗ. ᑕᒪᔅᓯ ᑐᓴᕐᓂᕆᓵᖅᐸᓯ. ᐃᑲᔪᖅᑐᐃᓐᓇᐅᑦᑎᐊᕐᓗᓯᒡᓗ ᐅᓂᒃᑲᐅᓯᕆᓵᖅᑕᔅᓯᓐᓂ. ᓄᓇᓯ ᑯᐊᕈᕇᓐᑯᓐᓄᑦ, ᑭᓕᓐᑦ-ᒧᑦ ᐊᐱᕆᓂᐊᕋᒪ. ᑖᓐᓇ ᖃᐅᔨᒪᔭᑦᑎᒍᑦ ᐊᐱᕆᔪᒪᒐᒃᑭᑦ. ᓄᓇᖃᖅᖄᖅᓯᒪᔪᐃᑦ ᐱᓕᕆᐊᑦ ᐅᕝᕙᓘᓐᓃᑦ ᓇᒻᒥᓂᖁᑎᓖᑦ ᐃᓱᒪᒋᔭᐅᔭᕆᐊᖃᕐᒪᖔ ᐸᕐᓇᐃᕙᓪᓕᐊᑎᓪᓗᒋᑦ ᐅᕝᕙᓘᓐᓃᑦ ᐱᓕᕆᐊᖃᕋᓱᒃᐸᓪᓕᐊᑎᓪᓗᒋᑦ ᑲᔪᓯᑎᑦᑎᕙᓪᓕᐊᑎᓪᓗᒋᑦ. ᒪᕐᕉᖕᓂᑦ ᐊᔾᔨᒌᙱᑦᑐᓂᑦ, ᐱᖃᑖ ᓄᖑᓱᐃᑦᑐᖅ ᖃᐅᒻᒪᖅᖁᑏᑦ, ᐊᒻᒪᓗ ᐱᖃᑖ ᑐᓴᐅᒪᔪᓕᕆᔨᔾᔪᑏᑦ ᖁᒻᒧᐊᒃᑎᑦᑎᓯᒪᔪᓂᑦ ᑖᒃᑯᐊ ᐅᑭᐅᖅᑕᖅᑐᕐᒥᑦ ᐊᑐᖅᑕᐅᔭᕆᖃᓪᓗᐊᑕᖅᑎᓪᓗᒋᑦ ᐃᓛ ᐱᖁᑎᕐᔪᐊᑦ ᐱᑕᖃᐅᑦᑎᐊᖏᑉᐸᓪᓕᐊᓂᖏᓐᓂᑦ ᐊᒻᒪᓗ ᐊᕙᑎᑦᑎᓐᓂᑦ ᓴᐳᑦᑎᓇᓱᒃᐸᓪᓕᐊᑎᓪᓗᑕ, ᓇᓗᓇᐃᕆᔪᖕᓇᖅᐱᖅᖃᐃ ᑖᒃᑯᐊ ᒪᕐᕉᒃ ᐅᖃᐅᓯᕆᓵᖅᑕᑦᑎᓐᓂ ᒥᒃᓵᓄᑦ
[Les propos en inuktitut sont interprétés en anglais puis traduits ainsi:]
J'aimerais remercier tous les témoins.
Je vous remercie d'être ici pour nous parler de votre programme. Il nous est très utile d'en apprendre davantage sur votre organisme.
J'aimerais m'adresser au témoin de Nunasi Corporation. À votre connaissance, quelles initiatives ou entreprises dirigées par des Autochtones devraient être prises en compte et incluses dans la planification, l'administration et l'exécution des projets d'énergie renouvelable dans le Nord, ce qui est extrêmement important dans le cadre d'une transition vers l'énergie verte? En effet, nous avons besoin d'énergie propre dans le Nord, car nous manquons d'infrastructures. Pourriez-vous nous parler des projets d'énergie renouvelable dans le Nord?
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Nakurmiik pour votre question. Je m'excuse d'avoir manqué l'interprétation et je vous remercie d'avoir répété la question.
Très brièvement, je pense que lorsqu'il s'agit de la transition vers l'énergie propre qui se produit dans notre pays, la situation du Nunavut et celle de l'Inuit Nunangat ne sont pas nécessairement pleinement prises en compte. En effet, nous faisons manifestement face à des périodes de construction très différentes, des réalités climatiques très différentes, une géographie très différente, etc. Toutefois, cela ne veut pas dire que nous ne devrions pas avoir la possibilité de participer au secteur de l'énergie renouvelable. Une partie de cette activité se déroule en ce moment même.
Le gouvernement du Canada a suggéré quelques approches raisonnables, par l'entremise de RNCan, sur ce qu'il faut faire en matière de soutien financier pour le renforcement des capacités et d'autres initiatives qui permettront de soutenir le développement de l'énergie verte. Dans de nombreux cas comme celui‑ci, madame Idlout, une avalanche de demandes sont présentées dans le cadre d'un programme et nous tentons tous de respecter une échéance donnée, sans nécessairement tenir compte de la réalité du Nord.
Je pense que ce serait formidable si le gouvernement fédéral rassemblait les fonds qu'il consacre actuellement à l'énergie verte dans le Nord pour créer un fond très adaptable qui permettrait aux organismes autochtones et inuits de présenter des demandes de financement. Le fonds devrait avoir un horizon temporel beaucoup plus long pour veiller à ce que cet argent soit investi dans des projets fondamentaux qui présentent un excellent potentiel.
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J'aimerais revenir à un niveau plus fondamental, car nous avons des conversations érudites, ce qui est bien, car nous sommes membres d'un comité parlementaire et nous parlons de capitaux propres, de marchés publics et d'obligation fiduciaire, mais pour quelqu'un comme moi qui n'est pas économiste, parfois, tout cela ne veut pas dire grand-chose.
J'aimerais poser une question d'ordre général sur le Labrador. Si vous pouviez répondre en fonction du village de Nain, ce serait formidable, car j'ai travaillé là‑bas pendant trois ans. J'ai trouvé que c'était une collectivité fantastique et j'ai beaucoup aimé cet endroit. J'y étais médecin. Toutefois, ce n'est pas une collectivité très prospère sur le plan économique et il n'y a pas beaucoup d'entreprises ou d'emplois.
Comme le dit notre collègue du Nord du Québec, tout coûte beaucoup plus cher là‑bas. Lorsque je pense au Labrador et à toutes les collectivités qui sont éparpillées le long de la côte sans être reliées par des routes, et où tout coûte très cher, je me demande comment elles pourraient prospérer sur le plan économique.
Pourriez-vous résumer tout ce que vous avez dit au sujet du développement économique et des obstacles au développement économique, et m'en parler en fonction du Labrador et plus précisément, si possible, en fonction des collectivités situées au nord, notamment Nain, Hopedale et Davis Inlet? Qu'est‑ce qui a bien fonctionné, qu'est‑ce qui n'a pas fonctionné et quels sont vos espoirs? Si vous ne pouvez pas répondre en fonction de ces collectivités, veuillez me parler d'autres collectivités du Labrador.
On ne peut pas atteindre un niveau plus fondamental que celui des collectivités, et je vous suis donc reconnaissant de votre question.
Comme vous pouvez l'imaginer, il y a plus de 50 collectivités inuites d'un bout à l'autre du pays. Toutes sont isolées, sauf dans le Nord des Territoires du Nord-Ouest. Elles sont pratiquement toutes alimentées au diesel et n'ont pas d'accès, pour la plupart — si on exclut Tuktoyaktuk — ou ont un accès très limité en matière d'infrastructure routière, etc.
L'activité commerciale des collectivités inuites dépend, quant à elle, de la possibilité de présenter une demande dans le cadre de contrats fédéraux et de marchés publics fédéraux. Dans certaines collectivités, c'est le cas, par exemple dans les plus grandes collectivités autochtones de l'Inuit Nunangat, y compris Iquauit, et même Nain, d'ailleurs, où se trouve une présence fédérale. Le fait que nous venons de remporter le contrat du Système d'alerte du Nord est un exemple de notre présence sur le territoire et dans la région et de la possibilité de prospérer et de réussir en affaires.
L'autre élément essentiel, c'est l'infrastructure et la nécessité d'établir une infrastructure essentielle. Même si nous n'avons pas de route entre les collectivités, nous avons besoin de cette infrastructure supplémentaire pour les ports en eau profonde, ainsi que des transporteurs aériens et des pistes d'atterrissage essentielles pour assurer le transport des biens et des services.
Internet est à ce point omniprésent dans le monde que nous sommes nombreux à le tenir pour acquis, mais ce n'est pas le cas dans l'Inuit Nunangat. Soyons honnêtes, Internet peut être un outil indispensable dans le cas de certains types de biens et de services offerts par l'entremise d'une entreprise autochtone. La pandémie a prouvé que ce niveau d'activité commerciale peut avoir lieu pratiquement n'importe où. En effet, nous pouvons commander des choses et les recevoir tout en restant assis chez nous en pyjama.
Le fait de ne pas disposer de télécommunications et d'une connexion Internet de qualité, comme l'a mentionné Mme Idlout plus tôt — ou quelque chose comme cela, même si cela peut sembler un peu ambitieux —, a des répercussions profondes sur les petites entreprises et même sur le développement des sociétés dans ces régions.
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C'est une bonne question.
À mon arrivée, en 2014, le développement économique de la communauté de Wemotaci était à son plus bas. Nous avons donc commencé à redresser la situation. Le préjugé à l'égard de notre communauté ne lui était pas favorable sur le plan des projets. Je peux vous dire que, lorsque nous avons présenté nos premiers projets, les gens riaient de nous pendant nos présentations. Pourtant, nous avions des projets bien conçus et des plans d'affaires élaborés par des experts, que nous avions pris le temps de bien relire. Cela a été un moment très difficile pour nous.
Au fil du temps, nous avons gagné en crédibilité auprès des institutions fédérales et provinciales, et même auprès des institutions financières. Aujourd'hui, lorsque nous déposons un projet, il est pris très au sérieux. Nous travaillons de façon professionnelle et nous produisons de très bons documents.
Malgré tout, il y a des préjugés et des craintes qui persistent. Nous le voyons même dans les taux d'intérêt que nous accordent les institutions financières. Il y a encore une certaine crainte, même si c'est un projet solide.
La question se pose: si un Allochtone déposait le même projet qu'un Autochtone, est-ce qu'on les percevrait comme s'il s'agissait de deux mondes différents? Il faut dire les vraies choses.