Bienvenue à la 86e réunion du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord. Nous reconnaissons que nous nous réunissons sur le territoire non cédé du peuple algonquin Anishinaabe.
En conformité avec le Règlement, la réunion d'aujourd'hui se déroule en format hybride: certains députés sont avec nous en ligne, mais tous les témoins sont présents dans la salle.
Je pense que tout le monde le sait, mais, pendant que nous siégeons, il est interdit de prendre des photos ou des captures d'écran. Cela vaut pour tout le monde autour de la table ainsi que pour tous les membres de l'auditoire.
Aujourd'hui, nous poursuivons notre étude du projet de loi . Nous avons le plaisir d'accueillir notre ministre, l'honorable ministre des Relations Couronne-Autochtones et son équipe. Si je ne me trompe, même si nous avons commencé en retard, le ministre pourra rester avec nous une heure.
Nous allons commencer par les déclarations préliminaires, puis nous inviterons les représentants du ministère à rester des nôtres et nous poursuivrons la réunion pour la deuxième heure.
Nous nous sommes assurés d'avoir des ressources supplémentaires, alors nous devrions pouvoir avoir deux heures au complet. À dire vrai, j'ai pu obtenir encore plus de ressources — nous n'avons toujours pas reçu l'autorisation —, mais je voulais m'assurer, vu tous les témoignages que nous avons entendus, que nous pourrions rester deux heures complètes. Je sais que beaucoup d'entre nous avons un avion à prendre, ce soir, alors nous allons respecter votre temps.
Monsieur le ministre, je ne sais pas si c'est vous qui allez présenter la déclaration préliminaire, mais, si c'est le cas, vous disposerez de cinq minutes. J'ai mon système de cartons, bien pratique, où le carton jaune veut dire qu'il vous reste 30 secondes, et le carton rouge, que votre temps est écoulé. Vous n'avez pas à vous interrompre; vous pouvez terminer votre pensée, mais ensuite, nous passerons à l'intervenant suivant.
Vous pouvez y aller dès que vous êtes prêt.
Je me trouve aujourd'hui sur le territoire ancestral non cédé du peuple algonquin Anishinaabe pour parler du projet de loi proposé, dont le but est de reconnaître la nation métisse de l'Alberta, la nation métisse de l'Ontario et la nation métisse de la Saskatchewan, ainsi que leur droit à l'autonomie gouvernementale.
[Français]
C'est la première fois que je me présente devant ce comité dans le cadre de mes nouvelles fonctions. Je vous remercie pour tout le travail que vous avez accompli dans le cadre de l'étude de ce projet de loi, et je me réjouis à l'idée de travailler avec vous tous à l'avenir.
[Traduction]
Avant de commencer, j'aimerais remercier tous les membres du Comité. J'y ai siégé pendant de nombreuses années, et je m'ennuie de l'esprit de collégialité et de coopération qui habite ce comité. Je tiens à remercier chacun d'entre vous du travail que vous accomplissez.
Ce que je veux dire, aujourd'hui, c'est que nous avons devant nous une occasion à saisir. Ce projet de loi est une occasion de mettre en œuvre les visions métisses de l'autodétermination, où les droits Métis à l'autonomie gouvernementale seront reconnus par une loi. Il s'agit d'une occasion de redresser un tort qui remonte à bien trop longtemps, au temps où le droit canadien et les gouvernements canadiens ont laissé tomber de nombreuses générations de Métis. C'est une occasion d'œuvrer à la réconciliation, selon une approche de nation à nation.
Depuis des siècles, les Métis se battent pour leurs droits. Ils ont fondé des organismes à but non lucratif enregistrés et ont fait pression sur les gouvernements. Ils ont établi leurs propres structures et institutions de gouvernance, et se sont aussi tournés vers les tribunaux pour faire avancer leurs droits et leurs revendications légitimes.
L'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 reconnaît et confirme l'existence des droits ancestraux et issus de traité pour trois catégories distinctes de peuples autochtones, dont les Métis.
Depuis, les décisions juridiques ont précisé ces droits et défini les critères juridiques devant servir à établir la portée et la teneur des droits ancestraux ainsi que les groupes auxquels ils appartiennent. Entre autres, l'arrêt Powley de la Cour suprême du Canada, en 2003, a fourni des directives relatives à l'appartenance à une communauté métisse.
En février dernier, le Canada a signé des ententes actualisées sur l'autonomie gouvernementale avec la nation métisse de l'Alberta, la nation métisse de l'Ontario et la nation métisse de la Saskatchewan. Ces ententes confirment que chacun de ces gouvernements métis est un gouvernement autochtone ayant compétence sur ses questions de gouvernance essentielles.
Le projet de loi à l'étude reconnaîtrait que ces gouvernements métis sont des gouvernements autochtones. Il mettrait en place un cadre législatif donnant force et effet juridiques aux futurs traités fondamentaux en matière de gouvernance, y compris en ce qui a trait à la citoyenneté, à la sélection des chefs et à l'administration interne.
Ce projet de loi ne concerne pas les droits de récolte, les droit fonciers ou les traités d'autonomie gouvernementale des nations métisses de l'Ontario, de la Saskatchewan et de l'Alberta, lesquels pourraient porter sur les droits de récolte ou les droits d'utilisation des terres.
Le projet de loi proposé touchera uniquement ceux et celles qui décident d'être des citoyens de gouvernements métis. Je veux que ce soit clair: cela ne touche pas aux droits prévus à l'article 35 de n'importe quel autre groupe autochtone, et ce d'aucune façon que ce soit.
[Français]
Cela n'affecte en rien les droits conférés à tout autre groupe autochtone en vertu de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.
[Traduction]
Dans l'éventualité où de futurs traités concerneraient des titulaires de droits prévus à l'article 35, alors ceux-ci seront consultés, car cela est une obligation juridique.
La consultation et la reconnaissance de l'autonomie gouvernementale sont inscrites dans la Déclaration des Nations Unies, qui est une feuille de route vers la réconciliation. La Déclaration des Nations Unies n'est pas seulement une promesse: il s'agit d'une obligation pour le gouvernement de soutenir l'autodétermination et l'autonomie gouvernementale de tous les peuples autochtones. Ce projet de loi, c'est la mise en œuvre concrète de la Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.
Je sais que certains ont soulevé des préoccupations, reflétant surtout des idées fausses, et je suis ici aujourd'hui pour vous les dissiper. Je suis bien décidé à poursuivre nos efforts collectifs avec les nations métisses de l'Alberta, de l'Ontario et de la Saskatchewan.
La lutte pour les droits a été longue et difficile. Rien que dans la salle du Comité où nous nous trouvons présentement, les Métis ont dû écouter des gens qui essayaient de nier leur existence en tant que peuple distinct. J'implore les membres du Comité de faire front commun et de reconnaître l'importance de lutter, au-delà des lignes de parti, pour faire reconnaître ces droits.
Le projet de loi a été élaboré conjointement et est fondé sur les besoins, les priorités et les visions d'un avenir meilleur des Métis. Il est le fruit d'innombrables heures de travail et d'efforts. Un avenir où les droits des Métis seront reconnus dans la loi et respectés par le gouvernement du Canada est maintenant à portée de main.
Je vais répondre à vos questions avec plaisir, et je veux remercier les fonctionnaires ici présents ainsi que ceux et celles qui sont absents de tout le travail qu'ils ont accompli pour nous amener si près du but.
[Français]
Je répondrai avec plaisir à toutes vos questions.
Merci.
:
Merci, monsieur le ministre, de votre déclaration préliminaire. J'aimerais maintenant présenter les fonctionnaires qui vous accompagnent.
Nous accueillons M. Martin Reiher, sous-ministre adjoint principal, Traités et gouvernement autochtone; M. Michael Schintz, gestionnaire des négociations fédérales, Négociations — Centre, traités et gouvernement autochtone; et M. Blake McLaughlin, directeur général, Négociations — Centre, Traités et gouvernement autochtone. Nous accueillons également Mme Julia Raymond, conseillère juridique, du ministère de la Justice.
Sur ce, nous sommes prêts à commencer le premier tour de questions. Chacun des quatre partis représentés disposera de six minutes. M. Schmale prendra la parole en premier.
Dès que vous êtes prêt, vous avez la parole.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci d'être des nôtres, monsieur le ministre.
Nous nous sommes beaucoup intéressés à ce projet de loi dans le cadre de nos travaux dans ce domaine, et nous voulons remercier toutes les personnes ici présentes aujourd'hui du grand intérêt que vous accordez à ce cheminement.
Une chose que nous entendons souvent dire, monsieur le ministre, de la part des Métis et des Premières Nations, c'est que les consultations ne sont pas bien faites. Je crois savoir que ce projet de loi touche la gouvernance des nations métisses de la Saskatchewan, de l'Ontario et de l'Alberta, plus précisément la façon dont elles gouvernent leurs membres, s'occupent des enfants, etc.
Cela étant dit, jusqu'ici, certains groupes — entre autres les chefs de l'Ontario et des groupes métis — ont, si je puis dire, tiré la sonnette d'alarme, pour signaler que les consultations nécessaires pour que l'adoption de ce projet loi se fasse en douceur n'ont pas été adéquates.
Ce projet de loi a été reporté plus d'une fois, alors comment se fait-il qu'il n'y a pas eu de consultation au cours de ces mois importants?
:
Merci, monsieur Schmale.
Merci de la question. Je pense que c'est aussi quelque chose que j'ai entendu, durant mes nombreuses rencontres avec les personnes et les groupes dont vous parlez. Je dirai, d'entrée de jeu, qu'il s'agit essentiellement d'une loi cadre en matière de gouvernance, qui doit faire en sorte que les nations métisses de l'Ontario, de la Saskatchewan et de l'Alberta sont reconnues en tant que gouvernements. Dans les faits, on ne leur accorde pas d'autres droits que cela, et on ne porte aucunement atteinte aux droits de tous les titulaires de droits prévus à l'article 35.
Le devoir de consulter, comme je l'ai dit plus tôt, s'appliquer dès qu'il sera question d'un traité, et il se serait appliqué même si le processus avait été différent ou si sa portée avait été plus large. Je peux dire avec beaucoup de confiance que nous n'avons pas failli au devoir de consulter. Malgré tout, nous avons eu des discussions exhaustives au fil des ans avec de nombreux partenaires, pour comprendre le contexte métis. Par exemple, au Manitoba, nous avons entamé un processus spécial qui se poursuit et qui est très avancé. Nous prévoyons qu'un projet de loi similaire sera déposé, là-bas.
Pour ce qui est des autres groupes métis, certains ne sont peut-être pas dans la même position pour...
:
Merci, monsieur le président.
Merci aux ministres et aux fonctionnaires d'être avec nous aujourd'hui.
Je crois que le ministre sait que je suis un Métis des Territoires du Nord-Ouest, que j'ai participé à des négociations sur des revendications territoriales et sur l'autonomie gouvernementale depuis les années 1970, et que nous n'avons toujours réglé aucune revendication jusqu'ici. Vu ma longue expérience, je connais bien tout ce qui a trait aux négociations.
Je pense que tout le monde sait que les Premières Nations doivent tenir une liste de leurs membres. Du moins, le ministère des Affaires indiennes tient une liste de membres, et il en va de même pour les Inuits, je crois. Cependant, il n'y a pas de liste pour les Métis. Qu'il s'agisse de l'une ou l'autre des trois organisations, que vous soyez Métis, Inuit ou membres des Premières Nations, si vous ne figurez pas sur la liste, vous arriverez difficilement à y être inscrit.
Dans le cadre de notre étude, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt un grand nombre de personnes qui ont témoigné devant le Comité au sujet de l'importance du processus de recensement pour les gouvernements métis. Beaucoup de personnes ont parlé des aspects du recensement et des exigences relatives aux audits indépendants. Certains ont aussi mentionné le fait que le processus d'inscription est l'un des plus sévères et des plus difficiles au Canada, parce que vous devez démontrer tous vos antécédents familiaux avant de pouvoir être inscrit sur la liste.
J'aimerais que le ministre nous parle du processus que le gouvernement du Canada utilise pour assurer l'intégrité des listes de membres des gouvernements métis.
:
Merci, monsieur McLeod.
Écoutez, je pense que le projet de loi respecte le droit des Métis à l'autodétermination, étant donné que les décisions relatives à la citoyenneté relèvent de la compétence du gouvernement métis. Cela correspond aussi au principe établi dans l'arrêt Powley, lequel reconnaissait l'importance de façonner le contexte juridique des droits métis. Je vais énumérer les critères établis par la Cour fédérale, en résumé.
Le premier est l'auto-identification en tant que membre de la communauté métisse. Le deuxième est l'existence attestée de liens ancestraux avec une communauté métisse historique. La troisième est l'acceptation de l'intéressé par la communauté actuelle dont la continuité avec la communauté historique constitue le fondement juridique du droit revendiqué.
Essentiellement, les registraires dans les trois provinces dont il est question ont étudié et examiné ces processus. Dans le cas de l'Ontario, quelque 6 000 citoyens dont les dossiers étaient incomplets ont été retirés de la liste. D'entrée de jeu, il s'agit d'un système d'évaluation très rigoureux qui a identifié des citoyens dans chaque province et établi l'appartenance de ceux qui veulent faire partie de ces nations. Je peux vous confirmer aujourd'hui, sans avoir peur de me tromper, que ce processus va continuer.
Il y a aussi un processus d'audit indépendant, ainsi que des références croisées avec les registres détenus par le gouvernement fédéral. Par exemple, si quelqu'un est identifié sous le régime de la Loi sur les Indiens, alors cette personne fera l'objet d'une référence croisée.
Ces gouvernements suivent des processus très rigoureux pour déterminer la citoyenneté et pour s'assurer de toujours savoir de qui est membre et qui ne l'est pas.
:
Écoutez, il y a des revendications qui se recoupent dans un grand nombre de régions du Canada. Aux tables de négociation, nous avons réussi à en régler beaucoup qui pourraient entrer en conflit. Il y en a eu un certain nombre très récemment où cela a été possible. Ce qu'il faut, c'est collaborer, dans un esprit de partenariat et de réconciliation, avec diverses communautés et nations et des groupes distincts et s'assurer d'atteindre un règlement équitable.
Cela a un caractère historique. Il y a dans beaucoup de régions au Canada un contexte historique profond, surtout lorsqu'il s'agit de situations qui, souvent, sont le fruit de revendications qui se recoupent. C'est triste, mais cela fait aussi partie de notre passé colonial, même si nous essayons de délaisser ce passé et d'aller de l'avant.
Cela pourra seulement arriver, monsieur McLeod, quand nous pouvons être présents à la table pour continuer de coopérer, comme nous le faisons — comme vous l'avez dit — dans les Territoires du Nord-Ouest. Nous reconnaissons qu'il y a souvent des frustrations et des retards. Néanmoins, je pense que les retards servent aussi à veiller à ce que nous obtenions les bons résultats.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur le ministre, j'aimerais vous remercier et, en même temps, vous féliciter publiquement pour votre nomination. Je vous sais gré des commentaires que vous avez faits en début de présentation, selon lesquels ce comité est capable de travailler de façon collaborative. J'espère qu'il en sera toujours ainsi, parce que c'est la façon de faire avancer tous les dossiers qui sont sur la table ici, dont le projet de loi .
J'aimerais maintenant revenir sur ce que vous avez dit sur la question des consultations en discutant avec mon collègue M. McLeod. Vous avez dit que, dans une perspective de réconciliation, les choses devaient être faites d'une certaine manière. Or, au Comité, plusieurs témoins ont dit que le fait d'adopter le projet de loi C‑53, voire le simple fait de le présenter, constituait un recul à l'égard de la réconciliation. Ils faisaient également valoir qu'il ne respecte pas l'article 19 de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
J'aimerais savoir ce que vous répondriez à l'ensemble des témoins qui ont soulevé ces deux arguments.
:
Je suis désolée, monsieur le ministre, mais je dois vous interrompre pour poser une seconde question et faire le lien entre les deux.
Êtes-vous en train de me dire que l'article 4 aurait la prépondérance sur l'article 19? Vous placez les deux articles en opposition. Vous mentionnez l'article 4 en disant qu'on ne parle que de gouvernance. C'est ce qui m'amène à poser ma deuxième question.
M. Justin Roy est venu témoigner cette semaine au nom de la nation Kebaowek. Pour lui, comme pour plusieurs autres témoins, on ne parle pas seulement de mécanismes de gouvernance, ici. Vous avez dit plus tôt que les traités n'auraient pas de lien avec le territoire et les ressources. Pour ces témoins, cependant, cela s'inscrit contre leurs droits et titres et ils ont des craintes à ce sujet. Toute nation a le droit d'avoir son propre mécanisme de gouvernance et de devenir un gouvernement, mais quand on est un gouvernement, on peut négocier des traités, et les traités viennent toucher leurs droits. C'est ce qu'ils nous ont dit.
Que répondriez-vous à M. Justin Roy? A-t-il raison de dire qu'à un moment donné, cela pourrait toucher les droits et titres de la communauté de Kebaowek? Qu'en est-il de ceux des autres Premières Nations qui se situent sur leur propre territoire, au Québec? Est-ce que vous nous dites qu'il n'y a aucune possibilité que cela ait une incidence sur leurs droits et titres?
:
Qujannamiik, Iksivautaq.
Je remercie la présidence.
Je remercie le ministre et les fonctionnaires de leur présence aujourd'hui.
Il s'agit d'un projet de loi très important. Nous avons entendu des membres des Premières Nations et des Métis, mais je ne sais si vous avez porté attention à ce qui a été dit. Avez-vous vraiment écouté ce qui a été dit, dans le cadre de notre étude?
Vous faites signe que oui.
Seriez-vous d'accord pour dire, dans ce cas, que le gouvernement libéral actuel a joué un rôle dans la division des Premières Nations, des Métis et des Inuits, en les montant les uns contre les autres, en présentant ce projet de loi comme le gouvernement l'a fait?
:
Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur le ministre. Je vais vous appeler par votre titre, mais vous pouvez m'appeler comme vous voulez, d'accord?
Dans votre déclaration, vous avez parlé des droits, monsieur le ministre. Je suis certain que vous avez suivi les travaux du Comité sur ce projet de loi; la majeure partie de la discussion tournait autour de la reconnaissance des droits. Je pense que nous pouvons tous reconnaître que l'issue du projet de loi a beaucoup d'importance pour un grand nombre d'intervenants, qui s'intéressent de très près à ce dossier.
Beaucoup de préoccupations que les gens ont exprimées tiennent à l'échec des relations dans le passé. Il y a un manque de confiance. Je dirais que ce projet de loi a mis à l'épreuve les capacités de votre gouvernement à l'égard de certaines de ces relations. La communication — ou plutôt le manque de communication — joue un très grand rôle, parce que c'est ainsi qu'on bâtit la confiance, si vous me permettez de le dire.
Monsieur le ministre, quand nous avons étudié la Déclaration des Nations unies sur les droits des Autochtones, c'est vous qui teniez les rênes du côté du gouvernement, mais ce sont les conservateurs qui ont insisté pour qu'on définisse le « consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause », de façon à ce que la relation soit dorénavant claire.
Si le consentement n'est pas défini, il ne peut pas y avoir de clarté; sans clarté, c'est difficile de bâtir la confiance, et sans confiance, il est difficile d'établir des relations. Je pense que c'est l'une des raisons pour lesquelles ce projet de loi a suscité autant de controverse, pour être honnête. Très franchement, monsieur le ministre, dans le cadre de ce processus, on a monté des groupes autochtones les uns contre les autres, et je pense que c'est quelque chose que nous trouvons tous frustrant.
Pouvez-vous m'expliquer...? Dans votre déclaration, ou peut-être dans votre réponse à l'une des autres questions, vous avez dit que le devoir de consulter n'était pas nécessaire. Peut-être pourriez-vous m'expliquer la différence entre le besoin et le désir de consulter, et peut-être nous dire si les choses seraient mieux aujourd'hui s'il y avait eu une meilleure communication?
Écoutez, la communication, c'est toujours important, et je pense tout particulièrement que mon rôle nécessite énormément de communication... d'écoute, surtout. Je suis conscient — je pense que toutes les personnes assises autour de la table peuvent le comprendre — du fait qu'il y a beaucoup de méfiance. Tout ce qui vient du gouvernement est accueilli avec méfiance, non pas avec confiance. Je reconnais et j'admets les préoccupations dont vous avez parlé. Cela ne fait aucun doute.
Juste pour reculer un peu et revenir à ce projet de loi en particulier, il a été élaboré en collaboration avec... Il y a trois groupes distincts au Canada : les Premières Nations, les Inuits et les Métis. Dans ce cas en particulier, le projet de loi a été élaboré conjointement avec les Métis, plus précisément les trois groupes métis qui représentent l'Ontario, la Saskatchewan et l'Alberta...
:
Je comprends. C'est aussi difficile de poser une question en 30 secondes, mais il reste que j'ai très peu de temps.
Je vais être honnête avec vous. J'ai promis à la Nation métisse de la Saskatchewan, lors de la toute première réunion, que j'allais demander au ministre pourquoi les choses ont tant tardé, alors j'aimerais situer un peu le contexte de ma question. Réfléchissez au processus. Je sais que vous allez me dire que cela a commencé il y a des décennies, mais officiellement, nous avons entamé le processus en 2018, puis en 2019, il y a eu, disons, un projet d'entente. Il y a eu des amendements et des mises à jour, et ensuite, en février 2023, il y a eu une nouvelle entente à jour.
On a promis que ce projet de loi allait être déposé en avril, puis c'était en juin, puis c'était lundi, puis mercredi et enfin c'était vendredi. Il y a eu un très grand nombre de retards, pour des raisons que personne n'a été capable d'expliquer.
En tant que ministre responsable de ce projet de loi, pouvez-vous expliquer au Comité pourquoi il y a eu tous ces retards, et pourquoi les choses ont tant traîné? Qu'est-ce qui se passait, à l'époque, qui a fait en sorte que ce projet de loi a fini par être déposé le tout dernier jour, avant que la Chambre n'ajourne pour l'été?
Je ne peux pas parler du passé, parce que je n'ai pas de détails précis à ce sujet. Tout ce que je peux dire, c'est que le ministre Miller et la ministre Bennett y ont travaillé d'arrache-pied. J'ai personnellement eu de très nombreuses rencontres avec le président McCallum, en Saskatchewan.
J'admets qu'il y a eu des retards, et je reconnais qu'il y a eu de la frustration. Cela dit, nous y sommes arrivés. Nous sommes ici, en train de faire l'étude, et d'après ce que je sais, la prochaine étape sera les amendements.
Profitons de ce moment — saisissons le moment —, et trouvons une façon de faire avancer les choses, ensemble.
:
Oui. Merci de la question.
Je vais commencer, puis je vais peut-être demander à M. Reiher de poursuivre.
Le projet de loi reconnaît essentiellement les trois gouvernements métis en question: ceux de l'Ontario, de la Saskatchewan et de l'Alberta. Une fois qu'ils sont reconnus, il y aura d'autres discussions, autour d'une autre table, sur la possibilité d'un traité, lequel, encore une fois, portera uniquement sur la question des membres, de la gouvernance et des affaires internes de l'organisation.
À ce moment-là, il y aura un processus comprenant des consultations. Je pense que dans ce cas en particulier — et M. Reiher pourra compléter —, une fois que les consultations sont terminées, s'il y a certaines choses qui dépassent ce qui est prévu dans l'entente — si de nouvelles préoccupations sont exprimées —, alors il y aura un processus pour modifier et retravailler le traité. Une fois que le traité sera retravaillé, il y aura ensuite un processus pour le ratifier. Ensuite, une fois que le traité est ratifié, il sera présenté au gouvernement, qui reconnaîtra par décret le traité.
Je pense que M. Reiher pourrait peut-être ajouter quelque chose au sujet du processus, parce qu'il a fait cela de très nombreuses fois.
:
Merci, monsieur le ministre.
À dire vrai, le ministre a très bien expliqué les choses. À la prochaine étape, un traité serait négocié, concernant le sujet même dont il est déjà question dans l'entente actuelle. D'autres choses devront être faites avant l'entrée en vigueur du traité. Chaque groupe devra adopter des constitutions. Deux d'entre eux l'ont déjà fait, et la Nation métisse de l'Ontario y travaille présentement. Certaines lois des gouvernements métis devront être adoptées, et un registre devrait être mis en place pour que les lois soient accessibles. Un plan de mise en œuvre devra être élaboré. Il va aussi falloir établir une entente sur les relations financières.
Toutes ces étapes devront être respectées avant l'approbation d'un traité. Évidemment, il y aurait une consultation avec tous les groupes potentiellement touchés, avant l'entrée en vigueur du traité, puis le traité sera ratifié. Je pense que c'est ce que le ministre a décrit.
:
Merci, monsieur le président.
Monsieur le ministre, j'aimerais poursuivre dans la même veine que plus tôt. Vous avez évoqué la question de la confiance et j'en suis très heureuse. Il est vrai que la confiance doit être gagnée auprès des peuples autochtones, métis et inuits.
Un chef de ma circonscription, Jean-Charles Piétacho, dit — et c'est ce que nous aussi avons vu au Comité — que cela fait des siècles, quelque 500 ans, que ces peuples n'ont pas la parole. De toute évidence, ils vont maintenant prendre la parole. C'est d'ailleurs ce que plusieurs témoins ont dit par rapport à la réconciliation. Ils ont dit être d'accord que des nations aient des droits.
Ils parlent de réconciliation, mais ils aimeraient également parler de vérité. Il faut aussi s'entendre aussi sur la vérité. Je pense que la vérité — comme l'a mentionné également mon collègue M. Vidal plus tôt — fait partie du processus pour gagner la confiance.
J'aimerais revenir sur ma question précédente, parce que je n'ai pas eu de réponse claire. La communauté de Kebaowek et d'autres maintiennent que le projet de loi ouvre présentement une possibilité, pas une éventualité comme vous le soulevez, mais vraiment une possibilité.
Je ne parle pas seulement du présent. Je parle de l'avenir, également. Si nous nous projetons dans l'avenir sans aucune limite de temps, une fois le projet de loi C‑53 en vigueur, y a-t-il la moindre possibilité qu'il y ait des conséquences sur les droits et titres de Kebaowek, par exemple, ou d'autres communautés métisses ou des Premières Nations?
:
Il existe un processus de demande pour devenir membre. Les candidats doivent satisfaire au critère Powley pour garantir que les principes énoncés dans l'arrêt Powley sont respectés. Ensuite, le registraire de chacune des provinces fera appel à un processus de validation par un tiers pour s'assurer que ceux qui ont été admis comme membres sont validés conformément à l'arrêt Powley.
La question, peut-être, monsieur Schmale, à laquelle j'essaie de répondre... Permettez-moi de formuler cela, car il y a une différence entre la façon dont l'appartenance est définie dans la Loi sur les Indiens et la façon dont cela se produit dans le cas des Métis. Il y a là un écart que nous devons, à mon avis, reconnaître, et c'est un écart qui nous oblige à travailler plus fort pour nous assurer de continuer à nous éloigner de la Loi sur les Indiens.
Le problème, comme vous le savez, c'est qu'il existe une exclusion. Il y a une exclusion après la deuxième génération, et nous avons dû l'élargir à plusieurs reprises, mais je pense qu'au bout du compte, la question de l'autodétermination en matière d'appartenance concerne particulièrement les Premières Nations...
:
Merci, monsieur le ministre.
Cela conclut notre première heure.
Je tiens à rappeler aux membres que nous n'allons pas commencer un nouveau deuxième tour; nous allons continuer. Nous allons amorcer les troisième et quatrième tours, et vous aurez cinq, cinq, deux minutes et demie, deux minutes et demie puis cinq minutes et cinq autres. C'est la séquence que nous suivrons jusqu'à la fin.
Je vais suspendre très brièvement afin que tous ceux qui veulent remercier le ministre puissent le faire. Je vais refaire le plein de thé, puis nous reprendrons la séance.
Je demande à ceux qui sont en ligne de ne pas partir. Nous reviendrons dans une minute ou deux. Pour le moment, nous suspendons les travaux.
:
Nous reprenons la séance. Encore une fois, il ne peut y avoir ni images ni saisies d'écran, juste des souvenirs.
Nous allons continuer. J'ai également oublié, dans mes observations liminaires, de souhaiter la bienvenue à tous ceux qui se joignent à nous aujourd'hui. C'est formidable de voir un public très complet. Merci d'avoir trouvé du temps. Je sais que beaucoup d'entre vous sont venus ici souvent, et c'est un plaisir de vous voir.
Monsieur Sidhu, merci d'être également parmi nous.
Passons maintenant directement à la deuxième heure des témoignages. Nous nous efforcerons de terminer au plus tard à 17 h 45 afin de permettre aux membres de ne pas rater leur vol.
Tout d'abord, nous avons M. Vidal, qui a la parole pendant cinq minutes.
:
Je vais consulter la greffière, mais, si je comprends bien, il faut traiter la motion dilatoire, et elle aurait préséance sur le vote sur la motion. Laissez-moi vérifier.
Vous avez raison. Il est indiqué que, pour reprendre le débat, comme la motion avait été présentée avant et que le débat avait été ajourné, si je comprends bien, nous devons procéder à un vote pour reprendre le débat sur cette motion. C'est la même chose. Il faut passer immédiatement au vote.
Donc, la motion que nous avons, donc, est de reprendre le débat sur la motion. C'est la question qui sera mise aux voix. Si nous votons pour, le débat se poursuivra.
Un député: Le résultat est le même.
Le président: Exactement.
Si nous votons contre, il restera en suspens.
Je demanderais maintenant à la greffière de procéder au vote, lequel peut être consigné au compte rendu.
Un député: Si le débat est suspendu, ils continueront d'y revenir.
Un député: Nous pouvons régler rapidement la motion et revenir à notre...
Monsieur le président, je ne sais pas s'il me revient de présenter une position sur cette question.
Je pense que le ministre a indiqué qu'il était disposé à connaître les amendements qui seront proposés et qu'il les examinerait attentivement. Notre rôle sera alors de le soutenir dans ce travail.
En ce moment, notre position, en tant que fonctionnaires, est que la version actuelle du projet de loi atteint les objectifs poursuivis. Ces objectifs consistent essentiellement à reconnaître les droits inhérents de certaines collectivités de l'Alberta, de la Saskatchewan et de l'Ontario et à reconnaître que les gouvernements autochtones mentionnés représentent ces communautés du point de vue des droits protégés par l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Le projet de loi propose un mécanisme d'approbation des futurs traités.
:
Merci, monsieur le président.
Excusez-moi, je dois régler quelque chose. J'ai donné avis d'une motion, l'autre jour. Je pense que nous nous sommes entendus sur la question, donc je vais faire cela très rapidement, je l'espère.
La loi oblige les ministres à comparaître dans les quatre semaines qui suivent le dépôt du Budget supplémentaire des dépenses à la Chambre. Je crois que nous avons convenu que nous allions accorder plus de temps que ce qui était indiqué dans ma motion, et nous pouvons tous être d'accord là-dessus.
Je vais lire ma motion telle qu'elle a été modifiée: « Que, conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité permanent des affaires autochtones et du Nord invite le ministre des Services aux Autochtones Canada, le ministre des Relations Couronne-Autochtones et le ministre des Affaires du Nord à comparaître devant le Comité avant la pause de Noël, 2023, pour discuter du Budget supplémentaire des dépenses (B) 2023-2024, et que la réunion soit télévisée. »
J'ai retiré la date limite du 7 décembre pour laisser du temps au ministre la semaine prochaine.
:
Merci, monsieur le président.
Je voudrais revenir sur la discussion que j'ai eue avec le ministre au sujet de la diligence nécessaire pour s'assurer que tout est en règle en ce qui concerne l'inscription.
Certaines des Premières Nations qui ont témoigné devant nous ont dit avoir des préoccupations quant à la capacité de certains gouvernements métis et de certains de leurs membres à retracer leurs ancêtres dans certaines collectivités. Il était clair qu'une partie des Premières Nations croient que certaines de ces collectivités n'ont pas existé, en particulier en ce qui concerne l'Ontario.
Je viens des Territoires du Nord-Ouest. Nous savons où se trouvait chacune des collectivités métisses avant les certificats et les traités. Je suis sûr que M. Viersen peut en dire autant de l'Alberta.
Nous ne semblons pas avoir des personnes capables de faire cela, ou du moins je n'en connais pas, pour l'Ontario. S'agit-il de quelque chose que le gouvernement a retracé? Le gouvernement a-t-il confirmé que ces collectivités existaient bel et bien, et où, et toutes les informations qui s'y rapportent?
:
Le gouvernement a définitivement cessé de déterminer qui sont chacun des membres des groupes autochtones, conformément à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Les groupes autochtones ont le droit de déterminer eux-mêmes qui sont leurs membres.
Pour le moment, l'objectif n'est pas de suivre ce qui a été fait pour le registre des Indiens. Nous nous tournons plutôt vers un registre plus... Je suppose que nous avançons en nous fondant sur la déclaration et nous respectons le fait que les Premières Nations autonomes ont la capacité, lorsqu'elles concluent des accords d'autonomie gouvernementale, d'établir qui sont leurs citoyens exactement, de la même manière que cela se fait en vertu de la Loi sur les Indiens.
Il est évident qu'elles peuvent également se charger de l'appartenance, mais je conviens que le registre des Indiens existe toujours. En ce qui concerne le registre, c'est un peu différent, mais encore une fois, les normes appliquées à la création du registre des Métis sont strictes.