:
La séance est ouverte. Bonjour tout le monde.
[Français]
Je vous souhaite la bienvenue à la 33e réunion du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord.
[Traduction]
Nous sommes réunis aujourd'hui sur le territoire non cédé de la nation algonquine anishinabe.
Nous devons régler quelques questions d'ordre administratif avant d'entendre nos témoins sur le projet de loi .
[Français]
Premièrement, nous devons approuver le budget proposé pour l'étude du projet de loi , que vous avez tous reçu.
Les membres du Comité sont-ils d'accord pour approuver le budget?
Des députés: D'accord.
[Traduction]
Le président: Deuxièmement, est‑il convenu que la greffière soumette au greffier du Comité de liaison, d'ici le 21 octobre, l'ébauche de budget pour les déplacements proposés du Comité pour la période de janvier à mars 2023? Vous devriez l'avoir reçu également.
Des députés: D'accord.
:
Je vous remercie beaucoup de nous avoir permis de vous parler aujourd'hui.
Tout ce que je veux dire, c'est que j'existe. C'est peut-être une question existentielle pour un lundi matin, mais je suis la conseillère législative pour ce projet de loi, et je serais heureuse de vous aider.
Le message principal que je tiens à vous communiquer aujourd'hui, c'est que si vous avez des instructions relatives à la rédaction d'amendements, veuillez m'en faire part dès que possible, afin que je puisse faire rédiger ces amendements et déterminer s'ils soulèvent des problèmes de rédaction d'ordre juridique ou législatif. Soyez assurés que le secret professionnel s'applique, de sorte que je ne divulguerai aucun de vos amendements à moins que vous ne m'y autorisiez, pas même à quelqu'un de votre propre caucus.
Le processus de rédaction des amendements prend du temps. Si vous avez déjà participé à un projet de loi d'initiative parlementaire, vous savez que nous devons prévoir du temps pour la révision, la traduction, etc. Veuillez donc faire preuve d'indulgence si nous ne vous répondons pas tout de suite.
C'est à peu près tout ce que je voulais dire.
Même si vous n'avez pas encore d'instructions précises, n'hésitez pas à m'appeler pour discuter de la meilleure façon de formuler quelque chose. Nous avons des documents et des modèles qui peuvent vous aider à organiser vos réflexions.
Je vous remercie beaucoup de votre attention.
:
En quelques mots également, mon rôle à titre de greffière législative affectée au projet de loi consiste à aider le Comité pendant l'étude article par article du projet de loi. Si les membres du Comité ont des questions sur la recevabilité procédurale des amendements qu'ils souhaitent présenter une fois qu'ils ont été rédigés par Mme Schorah ou s'ils ont des questions au sujet de l'étude article par article du projet de loi, ils ne doivent pas hésiter à communiquer avec moi dès que possible.
Afin d'aider le Comité à effectuer une étude article par article ordonnée, j'organiserai tous les amendements que les membres du Comité auront soumis à la greffière en ensembles d'amendements. Je préparerai également un ordre du jour qui contiendra chaque article du projet de loi et tous les amendements présentés. Cet ordre du jour sera distribué à tous les membres du Comité peu après la date limite de présentation des amendements. Je serai également présente dans la salle pour l'étude article par article du projet de loi.
[Français]
Mes coordonnées se trouvent dans la note de service que la greffière a déjà envoyée à tous les membres du Comité.
Cela me fera plaisir de répondre à toutes les questions des membres du Comité concernant la recevabilité procédurale des amendements qu'ils souhaiteraient apporter au projet de loi et de leur donner des conseils de manière confidentielle, comme le disait ma collègue Mme Schrorah.
De plus, j'encourage tous les députés à communiquer avec ma collègue afin que leurs amendements soient rédigés dans les deux langues officielles, et ce, le plus rapidement possible.
Enfin, si les députés ont des questions, je les invite à communiquer avec moi sans hésiter.
:
Je vous remercie, madame Thivierge et madame Schorah. Je ne vois pas de main levée, et je vous remercie donc de ces brèves explications au sujet du processus de présentation d'amendements et de l'étude article par article.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins, qui représentent des organismes autochtones nationaux.
De l'Assemblée des Premières Nations, nous accueillons la cheffe nationale RoseAnne Archibald, ainsi que Julie McGregor, directrice, Justice. Elles comparaissent par vidéoconférence aujourd'hui.
Nous accueillons également Natan Obed, président d'Inuit Tapiriit Kanatami, qui comparaît en personne. Nous avons aussi Cassidy Caron, présidente du Ralliement national des Métis, qui comparaît en personne.
Afin d'assurer le bon déroulement de la réunion, j'aimerais maintenant énoncer quelques règles à suivre
Les membres du Comité et les témoins peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Des services d'interprétation en anglais, en français et en inuktitut sont offerts pour la réunion d'aujourd'hui. Veuillez faire preuve de patience avec le service d'interprétation, car il se peut qu'il y ait un retard dans l'interprétation en inuktitut, puisque ces interventions doivent être interprétées en anglais avant d'être interprétées en français, et vice versa.
Pour les personnes qui participent par vidéoconférence, le bouton d'interprétation se trouve au bas de votre écran. Il s'agit du petit globe rond. Vous pouvez écouter dans l'une des langues indiquées. Si vous perdez l'interprétation, veuillez m'en informer immédiatement, et nous suspendrons la séance jusqu'à ce que nous ayons corrigé la situation.
Il y a aussi une fonction « Lever la main » au bas de l'écran. Vous pouvez l'utiliser à tout moment si vous souhaitez prendre la parole ou alerter la présidence.
Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je vous reconnaisse par votre nom. Si vous êtes en vidéoconférence, veuillez cliquer sur l'icône du microphone pour l'activer. Lorsque vous parlez, veuillez le faire lentement et clairement. Lorsque vous ne parlez pas, votre microphone doit être en sourdine. Cela aidera grandement nos interprètes.
Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés par l'entremise de la présidence.
[Français]
J'invite maintenant chaque organisation à prononcer une allocution d'ouverture de cinq minutes. Il y aura ensuite une période où les députés pourront poser des questions.
[Traduction]
J'aimerais maintenant inviter la cheffe nationale RoseAnne Archibald à faire une déclaration préliminaire de cinq minutes.
:
Je vous remercie, monsieur le président.
Mes commentaires risquent de dépasser le temps imparti, et je pense donc que je vais passer directement aux recommandations de l'APN à l'égard du projet de loi.
[La témoin s'exprime en cri et fournit le texte suivant:]
Wahcheeyay misiway. RoseAnne Archibald nitishinikahsoon. Taykwa Tagmou ishinakataow kawocheean.
[La témoin fournit un texte en anglais dont voici la traduction:]
Bonjour tout le monde. Je m'appelle RoseAnne Archibald et je viens d'un endroit appelé Taykwa Tagmou.
[Traduction]
Je suis heureuse d'être ici aujourd'hui pour m'adresser au Comité. Donnez-moi seulement un instant pour retrouver mes notes.
Comme je l'ai dit, je suis ici pour communiquer le point de vue de l'APN sur le projet de loi . Je vais résumer le point de vue de l'APN sur les répercussions des anciens établissements résidentiels. Je ne les appelle plus des écoles, car il s'agissait d'établissements d'assimilation et de génocide où des milliers de nos enfants sont morts.
Je parlerai de la mise en œuvre des appels à l'action no 53 à 56 de la Commission de vérité et réconciliation du Canada. Je vous ferai part de certaines des préoccupations de l'APN au sujet du projet de loi .
J'aimerais passer directement à cette partie, monsieur le président, car je crois que je vais manquer de temps pour les modifications et les suggestions que nous avons proposées pour le projet de loi.
En ce qui concerne les nominations, l'article 8 de la loi proposée stipule que le premier conseil d'administration sera choisi par le ministre « en collaboration avec le comité de transition ».
L'article 9 stipule que le conseil d'administration sera composé « d'au moins neuf » administrateurs et que l'APN, l'ITK et le Ralliement national des Métis proposeront chacun un administrateur. On peut présumer que le ministre aurait alors le pouvoir discrétionnaire de nommer les six à neuf autres membres du premier conseil d'administration. Essentiellement, le ministre a le pouvoir de nommer les deux tiers des membres du premier conseil d'administration du Conseil national de réconciliation.
L'article 11 stipule qu'au moins les deux tiers des administrateurs doivent être des Autochtones, mais aucune distinction n'est faite entre les Premières Nations, les Inuits et les Métis.
En raison des répercussions historiques de ces établissements sur notre peuple, il est de la plus haute importance que le conseil d'administration du Conseil national de réconciliation soit véritablement indépendant du gouvernement et qu'il reflète l'impact considérable que ces établissements ont eu sur les Premières Nations. Il est donc très inquiétant que le projet de loi accorde au ministre un vaste pouvoir discrétionnaire de nommer la majorité des…
:
Nous avons proposé des amendements pour l'article 10.
L'Assemblée des Premières Nations propose de modifier l'article 10 pour permettre les mises en candidature qui suivent pour le premier conseil d'administration: l'Assemblée des Premières Nations, trois candidats; l'Inuit Tapiriit Kanatami, deux candidats; le Ralliement national des Métis, deux candidats; les deux à cinq derniers candidats doivent être mis en candidature et nommés par le ministre, en collaboration avec le comité de transition.
Cette répartition vise à réserver la majorité des candidatures aux Premières Nations, aux Inuits et aux Métis. Non au gouvernement fédéral.
Notre deuxième sujet de discussion concerne la représentativité. L'article 12 du projet de loi...
:
Nous faisons ces recommandations parce que nous estimons abusif que le gouvernement fédéral s'attribue le pouvoir discrétionnaire de nommer la majorité du conseil d'administration qui sera chargé du contrôle indépendant de ses propres actions, ce qui est également très paternaliste et contraire à l'esprit et à l'intention de la réconciliation.
Nous proposons de modifier l'article 10 pour permettre les mises en candidature qui suivent pour le premier conseil d'administration: l'Assemblée des Premières Nations, trois candidats; l'Inuit Tapiriit Kanatami, deux candidats; le Ralliement national des Métis, deux candidats; les deux à cinq derniers candidats doivent être mis en candidature et nommés par le ministre, en collaboration avec le comité de transition. Cette répartition vise à réserver la majorité des candidatures aux Premières Nations, aux Inuits et aux Métis et non au gouvernement fédéral.
La deuxième partie est une proposition d'amendement visant l'article 12, sur la représentativité. Actuellement, cet article dit que le conseil d'administration doit être composé de façon à assurer, dans la mesure du possible, la représentation des Premières Nations, des Inuits, des Métis et des autres peuples du Canada. Nous, à l'Assemblée des Premières Nations, nous prétendons que la représentation des Premières Nations est capitale. Elle n'est pas facultative, elle est obligatoire.
Je termine ici... Oh, pardon, voici l'amendement proposé: L'Assemblée des Premières Nations propose que l'article 12 soit modifié pour que le conseil d'administration du Conseil comprenne obligatoirement des administrateurs qui représentent les Premières Nations.
La troisième partie n'est pas un amendement. Elle concerne le financement. Le projet de loi ne comporte aucune disposition relative au financement ou au budget de fonctionnement. Il dit seulement que le Conseil national de réconciliation doit s'acquitter de ses obligations en matière de rapports financiers. Nous proposons également un amendement pour le financement. Pour que ce conseil soit vraiment indépendant et pourvu en ressources suffisantes pour assurer la permanence de son important travail, l'Assemblée des Premières Nations recommande d'amender le projet de loi par l'ajout de dispositions garantissant son financement.
Je tiens à vous remercier, en dépit de nos problèmes techniques. Nous vous communiquerons le texte intégral de mon exposé, que j'ai rédigé.
Migwetch, ninanâskomon, kisâkhitin, c'est‑à‑dire, dans ma langue, merci, je suis reconnaissante, je vous aime.
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Nakurmiik. Merci, monsieur le président.
C'est bon de voir tout le monde ici en personne.
Nous sommes ravis de vous faire part de notre point de vue sur le projet de loi et la création d'un conseil national de réconciliation.
Grâce au travail accompli dans le cadre de la Commission de vérité et réconciliation, de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones assassinées et disparues et de nombreuses autres initiatives, il a été possible de cerner et de décrire les traumatismes généralisés subis par les peuples autochtones à l'époque coloniale et leur lien avec la situation actuelle des peuples autochtones.
Bien que l'Inuit Nunangat, notre terre natale, représente plus de 40 % de la masse terrestre et 72 % du littoral du Canada, elle est éloignée et souvent absente des préoccupations des décideurs, des représentants du gouvernement et de la plupart des Canadiens. Nous saluons la vaste portée du projet de loi et des dispositions conçus pour traiter des mesures de réconciliation.
Dans certains cas, les expériences vécues par les Inuits correspondent à celles des autres peuples autochtones, mais dans de nombreux cas, les conséquences de la colonisation ont touché les Inuits de façon particulière. Nous avons travaillé avec le gouvernement du Canada en vue d'une approche de réconciliation fondée sur les différences en matière de justice, mais aussi pour le travail en cours avec le gouvernement du Canada. À titre d'exemple — et bon nombre de ces initiatives ont été mises en œuvre par le Comité de partenariat entre les Inuits et la Couronne —, nous avons veillé à ce que les Inuits qui sont exclus soient inclus dans la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens. Nous avons aussi travaillé à ce que le gouvernement fédéral reconnaisse davantage la Commission de vérité du Qikiqtani et prenne des mesures en conséquence, à ce qu'il reconnaisse la réinstallation des Ahiarmiut dans le centre du Nunavut et présente des excuses à cet égard, et à ce qu'il termine le travail de longue date lié à l'Initiative de Nanilavut de sorte que les familles puissent identifier les tombes des êtres chers qui ont été emmenés dans des sanatoriums du sud pour y être traités contre la tuberculose. Quand les personnes décédaient, leurs familles et leurs proches n'étaient pas prévenus et ne connaissaient pas l'endroit où elles étaient enterrées.
Avec les nombreuses initiatives panautochtones qui sont mises en œuvre, on risque entre autres de perdre de vue les incidences particulières de la colonisation des Inuits et les moyens concrets de progresser. Nous notons que l'organisme proposé est principalement axé sur la production de rapports et la sensibilisation. Il ne serait pas en mesure d'apporter une réparation significative aux conséquences de la colonisation qui persistent. C'est la raison pour laquelle ITK a proposé la création d'un tribunal des droits de la personne pour les peuples autochtones, par l'entremise de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et de la mise en œuvre de cette loi. Ainsi, on s'assurerait de définir clairement la responsabilité du gouvernement en matière de recours et de réparation pour toutes les situations où les droits de la personne des Inuits n'ont pas été respectés ou ont été violés.
Le projet de loi dont il est question ici vise à faire quelque chose de complètement différent, et c'est la raison pour laquelle de nombreux éléments différents sont nécessaires. À ce stade, il faut créer des tribunaux, des conseils ou des organismes chargés de veiller à ce que nous mettions en œuvre non seulement les appels à l'action de la CVR et les appels à la justice de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, mais aussi les dispositions liées à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
Ce sont les raisons pour lesquelles ITK souligne souvent qu'il faut inclure des représentants inuits au sein des organismes fédéraux qui ont une incidence sur les droits des Inuits et, en outre, que les Inuits doivent être en mesure de déterminer leur représentation.
Nous n'avons pas de modifications précises à vous proposer aujourd'hui. Nous sommes encore en train de comprendre ce projet de loi et d'en discuter avec notre conseil d'administration, mais les principes soulevés par le chef national Archibald sont très semblables à ceux que nous poserions, je crois, pour nous assurer que le Conseil est composé de représentants des Premières Nations, des Inuits et des Métis et que ces processus de nomination sont très différents en vertu de la loi proposée, car il s'agit de la création d'une société sans but lucratif par opposition à un organisme gouvernemental.
Je me réjouis à l'idée de continuer de discuter avec vous de ce projet de loi particulier pendant la période dont nous disposons.
Tansi, tout le monde.
Je m'appelle Cassidy Caron. Je me présente devant vous aujourd'hui à titre de présidente du Ralliement national des Métis, l'organisme reconnu comme étant le représentant national et international de la nation métisse du Canada depuis 1983.
Pour ceux d'entre vous qui ne le savent peut-être pas, le Ralliement national des Métis est formé des dirigeants démocratiquement élus au sein des gouvernements provinciaux des Métis qui existent actuellement dans les provinces de l'Ontario, de la Saskatchewan, de l'Alberta et de la Colombie-Britannique, et ce sont eux qui lui donnent son mandat.
En 2017, le gouvernement du Canada et les gouvernements métis ont conclu l'Accord Canada-Nation métisse. Entre autres, l'accord vise à faire progresser la réconciliation compte tenu des droits, des intérêts et des aspirations de la nation métisse. Quatre des cinq gouvernements métis reconnus comme signataires de cet accord sont les gouvernements qui composent actuellement le Ralliement national des Métis.
Nos gouvernements métis, par l'entremise de leurs registres et de leurs structures de gouvernance démocratiquement élues aux échelons local, régional et provincial, ont le mandat et l'autorisation de représenter les citoyens de la nation métisse dans le cadre de leurs compétences respectives, notamment en ce qui a trait aux droits et intérêts collectifs des Métis et aux revendications non réglées à l'égard de la Couronne.
Depuis 1983, la priorité du Ralliement national des Métis reste de faire entendre la voix distincte des Métis à l'échelle nationale et internationale, et nous continuerons de faire cheminer les dossiers d'importance collective et de servir la nation métisse comme le voulaient nos fondateurs.
Je veux commencer ce matin en exprimant ma gratitude pour le travail accompli par le Comité de transition jusqu'à présent dans l'élaboration de ce projet de loi, et en remerciant le conseil provisoire qui a siégé en 2017 et 2018 et dont le mandat était d'orienter le Comité de transition, ainsi que tous ceux qui ont participé et contribué à la Commission de vérité et réconciliation, où cette idée d'un Conseil national pour la vérité et la réconciliation a été formulée pour la première fois comme mécanisme de responsabilisation. C'est grâce au travail considérable d'un grand nombre de personnes qui ont consacré à cela temps et efforts que nous en sommes arrivés là aujourd'hui. Leurs efforts doivent être reconnus.
Beaucoup de temps s'est écoulé depuis la publication de la recommandation visant à établir le Conseil national, mais nous préférons ne pas nous attarder sur le temps écoulé et plutôt concentrer notre attention sur le travail considérable qui nous attend sur la voie de la réconciliation. Répondre à l'appel à l'action 53 de la CVR constituera un élément important de notre cheminement collectif, dans ce pays, et le projet de loi est une mesure législative importante qui peut soutenir les efforts que nous continuons de déployer sur la voie de la réconciliation.
Bien que le projet de loi soutienne cette démarche par la création de cette organisation indépendante, apolitique, permanente, et dirigée par des Autochtones, nous croyons que, dans certaines circonstances, il n'en fait pas assez pour permettre au gouvernement fédéral de véritablement se positionner pour répondre à l'appel à l'action 55, ce qui est essentiel à la réussite du Conseil national et aux progrès. L'appel à l'action 55 demande au gouvernement du Canada de fournir de l'information clé au Conseil à l'appui de son mandat, notamment les rapports ou les données que le Conseil national demande.
Dans son libellé actuel, le projet de loi ne prévoit pas de mécanismes ou de facilitateurs, tels qu'un pouvoir d'assignation à comparaître, qui garantiraient que le gouvernement actuel ou les gouvernements futurs ne puissent pas bloquer ou refuser l'accès complet aux rapports ou aux données qu'il faut au Conseil pour s'acquitter de son mandat. Il est important de se demander comment le Conseil pourra surveiller avec succès l'état de la réconciliation si la loi ne lui confère pas les pouvoirs nécessaires pour accéder à ces données essentielles.
Je tiens toutefois à souligner que le Ralliement national des Métis, grâce au siège qui lui est réservé au sein de ce conseil, aura pour rôle et fonction essentiels de soutenir la mise en œuvre de l'appel à l'action 55, contribuant ainsi au succès du Conseil national de réconciliation.
À mesure que nous progressons vers la souveraineté des données, le Ralliement national des Métis vise à soutenir nos gouvernements métis dans les domaines de la gouvernance et de la gestion de l'information, et il travaille à pouvoir recueillir, analyser, évaluer et gérer les données de la nation métisse, y compris les données qui pourront contribuer aux rapports sur les progrès de la réconciliation.
De plus, la mission et les attributions du Conseil, telles qu'elles sont énoncées dans la loi proposée, correspondent à la compréhension qu'a le Ralliement national des Métis de la façon dont nous continuerons, collectivement, à favoriser le déploiement d'efforts de réconciliation. Les recherches et les rapports qui seront produits par le Conseil national peuvent également fournir une excellente occasion de souligner le travail positif qui se fait au sein de nos communautés en matière de réconciliation.
Je terminerai en remerciant une fois de plus les personnes qui ont contribué à l'élaboration du projet de loi. En tant que présidente de l'organisation porte-parole nationale reconnue des Métis, je me réjouis de l'importance qui est accordée, dans le projet de loi, à la nécessité de garantir que les Autochtones soient majoritaires au sein de ce conseil et de protéger la capacité des trois organisations autochtones nationales de nommer les membres du conseil d'administration.
Nous espérons que l'adoption de ce projet de loi se traduira par la formation d'un conseil d'administration du Conseil national qui pourra appliquer une approche fondée sur les distinctions et remplir son mandat du mieux qu'il peut pour tous les peuples autochtones.
Merci.
:
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie tous d'être ici aujourd'hui et de participer aux discussions sur ce projet de loi important.
J'allais parler de la question de l'indépendance, mais puisque vous avez tous déjà donné vos points de vue à cet égard, je vais passer à un autre sujet.
En 2018, lorsque le conseil d'administration provisoire a publié ses 20 recommandations, qui comprenaient une bonne partie du cadre de ce qui nous occupe aujourd'hui, il y avait un certain nombre de recommandations. Elles ont été intégrées à la partie intitulée « Mission et attributions » du projet de loi .
Ce qui a été ajouté dans le projet de loi et qui ne figurait pas dans les recommandations au départ, c'est l'idée de « faire progresser les efforts ». Dans les recommandations initiales, il était en fait question de faire progresser la réconciliation.
Je pense que ce qui m'irrite un peu, c'est que je me demande comment on mesure la progression des efforts par rapport à la progression de la réconciliation. Faire progresser les efforts, est‑ce suffisant selon vos organisations?
Vous pouvez tous répondre à la question. Elle ne s'adresse pas à un témoin en particulier. Alors, allez‑y, l'un après l'autre.
:
Merci beaucoup de la question.
Oui. Les efforts sont des efforts et les résultats sont des résultats. Lorsqu'on parle de réconciliation, je pense que ce qui manque au Canada, c'est l'élément de la vérité du rapport de la Commission de vérité et réconciliation. La vérité au sujet de ce qui s'est passé dans ce pays n'est toujours pas très connue et elle est peu enseignée.
L'autre aspect à cet égard, c'est qu'une fois que la vérité est connue, nous pouvons commencer à parler de réconciliation et à poser des gestes de réconciliation. Une chose qui manque dans ce processus de la Commission de vérité et réconciliation, à mon avis, ce sont les réparations qui sont nécessaires à la réconciliation.
Il s'agit, par exemple, de restituer aux Premières Nations les terres qui leur ont été enlevées de manière inappropriée ou par des moyens infâmes. Toutes ces terres doivent être rendues aux Premières Nations.
Le chemin vers la réconciliation... Je dirais que si nous étions dans un livre sur la réconciliation, nous sommes aujourd'hui à la première phrase du premier chapitre.
Je ne connais pas non plus les subtilités de l'élaboration de mesures législatives et de son contenu, mais je sais que les mots ont beaucoup de pouvoir et qu'ils doivent être analysés de manière critique.
Dans un sens, il est important de savoir que la réconciliation n'est pas simplement quelque chose qui se réalise. On doit prendre différentes mesures pour la faire progresser. Dans ce cas, si le mot « efforts » est interprété dans ce sens, je le comprends, mais s'il risque d'être mal interprété, il faut le clarifier.
Pour la nation métisse, plus précisément, le chemin vers la réconciliation comprend un certain nombre de mesures importantes à prendre et de changements significatifs à apporter. Nous avons des rapports qui énoncent des indicateurs permettant de mesurer ces efforts dans ces situations.
C'est une excellente question. Si nous pouvons obtenir des précisions ou une interprétation spécifique du mot « efforts », le projet de loi n'en serait que renforcé.
:
Il me reste très peu de temps. Je vais poser une question très brièvement.
M. Littlechild, par exemple, a critiqué le fait que le projet de loi n'a pas été rédigé en collaboration avec les peuples autochtones. La semaine dernière, le ministre a affirmé au contraire que c'était le cas. M. Littlechild dit que ce n'est peut-être pas le cas.
À votre avis — et vous participez à ce processus depuis le début —, la critique selon laquelle le projet de loi n'a pas été rédigé en collaboration avec les peuples autochtones est-elle exacte, ou diriez-vous, comme le ministre, que les peuples autochtones ont été consultés et que le tout a été fait avec leur collaboration?
Encore une fois, vous pouvez tous répondre à ma question, rapidement.
:
Merci, monsieur le président.
Monsieur le président Obed, madame la présidente Caron et madame la cheffe Archibald, je vous remercie de vos témoignages, que j'ai écoutés avec intérêt et attention.
Plusieurs des sujets que j'aurais souhaité aborder avec vous ont déjà été abordés. On voit donc que cela intéresse le Comité, nommément la question de la représentativité du conseil d'administration et de l'indépendance de ses membres. Selon moi, la question de la représentativité du Conseil national de réconciliation est un facteur déterminant de sa crédibilité et de sa légitimité, aux yeux des Premières Nations et des peuples autochtones.
Je me posais une question concernant un élément qui a été moins abordé: les deux tiers des membres du conseil d'administration seraient autochtones et le tiers d'entre eux seraient allochtones. Qu'est-ce que cela signifie, pour vous? Monsieur Obed, je vous ai entendu dire qu'il fallait qu'il y ait aussi des alliés au sein du conseil d'administration. J'aimerais savoir quelles sont vos positions respectives quant au fait que le tiers de ses membres seraient allochtones. Par ailleurs, je suis curieuse de savoir qui devrait nommer ces personnes, selon vous.
Sentez-vous bien libres de moduler vos réponses selon vos intérêts respectifs, mais j'aimerais entendre l'opinion de chacun d'entre vous là-dessus. Madame Archibald, je sais que vous devrez nous quitter à un certain moment, alors je vous inviterais à répondre en premier. Vous pourrez répondre par la suite, monsieur Obed et madame Caron.
:
Je vous remercie beaucoup de la question.
Il est très important que, pour la réconciliation, la population non autochtone soit représentée. J'ai beaucoup parlé des établissements d'assimilation et de génocide, et les gens ne cessent de dire « eh bien, le génocide vous est arrivé à vous ». Le fait est que quelqu'un a commis le génocide. Il s'agit donc d'une relation. La partie négative de cette relation, ce sont les gouvernements non autochtones et les non-Autochtones. Pour apaiser cette relation et avancer, il faut que les non-Autochtones empruntent le chemin de la réconciliation avec nous. En outre, il est important qu'en tant que Premières Nations représentées au Conseil national, nous participions à la sélection des non-Autochtones.
Nous avons vu de nombreux cas où des gens n'avaient pas vérifié correctement les antécédents de certaines personnes nommées, et on se retrouve avec des personnes qui sont très racistes, par exemple. Je pense que le travail du conseil consiste à s'attaquer à ce type de racisme systémique, ainsi qu'au racisme ouvert et caché qui existe au Canada. Il va sans dire qu'il n'est pas souhaitable qu'un suprémaciste blanc, par exemple, fasse partie de ce conseil, et nous devons donc avoir notre mot à dire dans la sélection de cette personne. Je pense que, de concert avec le gouvernement et en tant que groupe que nous formons avec l'ITK et les Métis, nous voulons que les meilleurs Canadiens siègent à ce conseil.
Meegwetch.
:
Je vous remercie de cette question.
Je pense qu'il est important de comprendre quel type d'entité ce projet de loi vise à créer en vertu de la Loi sur les sociétés, comparativement à un organisme de type gouvernemental qui nécessiterait des nominations du gouverneur en conseil, ou comparativement à une société à but non lucratif, qui le plus souvent choisit elle-même ses administrateurs après sa création.
C'est pourquoi le conseil d'administration provisoire est si important. C'est pourquoi sa composition sera si déterminante dans ce qu'il adviendra finalement de l'organisme visé par ce projet de loi. Parce que, à part un rapport au ministre chaque année, il n'y aura aucune surveillance, aucun groupe parlementaire n'en fera le suivi, comme on le voit parfois dans d'autres textes de loi ou d'autres mécanismes de réconciliation.
Il est très important de bien faire les choses dès le début. Nous ne sommes pas nécessairement opposés à ce qu'un organe soit constitué en vertu de la Loi sur les sociétés, mais à l'ITK, nous voulons être des partenaires dans le processus de façon beaucoup plus robuste que ne le laisse présager cet organe provisoire, qui sera essentiellement composé de personnes nommées par le ministre.
:
Ah, d'accord. Il m'en reste plus que je ne le pensais.
J'en profiterai pour poser une question.
Monsieur Obed, ce que vous avez dit m'a interpellée: vous êtes encore en train d'évaluer le projet de loi , alors qu'aujourd'hui, nous vous demandons, dans une certaine mesure, quelles sont vos recommandations. Je sais qu'il est important pour le Comité de faire ce travail, évidemment, car il est pressant d'avoir un organe comme celui-ci pour la réconciliation. Cela dit, préfériez-vous que nous procédions rapidement aux prochaines étapes ou que nous prenions un peu plus de temps pour nous assurer de faire les choses comme vous le souhaitez?
Ma question s'adresse également à Mme la cheffe Archibald et à Mme la présidente Caron.
:
[
La députée s'exprime en inuktitut ainsi qu'il suit:]
ᐋ, ᓯᕗᕐᓕᕐᒥ ᖁᔭᓐᓇᒦᒃ, ᑕᒪᑦᓯ ᖃᐃᒐᑦᓯ ᐋ, ᑐᓐᖓᓱᑦ-ᓯᓱ ᑐᓐᖓᓱᑦᑎᑦᓱᓯ ᑕᒪᑦᓯ, ᐋ, ᖁᕕᐊᓇᖅᑐᓂᒃ ᐅᖃᓪᓚᒃᑲᑦᓯ ᐱᒻᒪᕆᐅᔪᓂᒃ ᐅᖃᓪᓚᑦᓱᓯᓪᓗ, ᐅᓇ, ᐋᒻ, ᐅᖃᓕᒫᖅᓱᒍ ᐃᒻᒥᓂᖅ ᐅᔾᔨᕆᓚᐅᕋᒃᑯᓪᓕ ᓄᓇᖃᖅᑳᖅ-ᓯᒪᔪᖅᑎᒍᑦ ᐱᔪᓐᓇᐅᑎᕗᑦ ᓱᕋᑦᑕᐅᕋᔪᒻᒪᑕ ᓴᐳᔾᔭᐅᒐᔪᓐ-ᖏᓇᑦᑕ ᐱᔪᓐᓇᐅᑎᕗᑦ ᓱᕋᑦᑕᐅᒐᓗᐊᕌᒐᒥᒃ, ᑖᓐᓇ ᐃᓱᒪᒋᓪᓗᒍ ᑖᓐᓇ ᒪᓕᒐᑦᓴᖅ ᐅᖃᓕᒫᓚᐅᕋᒃᑯ ᓈᒻᒪᒃᑲ-ᓗᐊᕐᒪᖔᖅ ᐋ, ᐱᔪᓐᓇᐅᑎᕗᑦ ᓴᐳᔾᔭᐅᑦᓯᐊᕐᓂᐊᕋᓗᐊ-ᕐᒪᖔᖅ, ᐋ, ᑐᑭᓯᐅᒪᔪᖓᐅᒐᓗᐊᖅ ᐋ, ᐅᖃᓕᒫᕌᓂᑦᓯ-ᐊᖅᓯᒪᖅᑰᓐᖏᑕᓯ, ᑭᓯᐊᓂ ᐊᐱᕆᔪᒪᔭᑉ ᐊᐱᕆᔪᒪᕙᑦᓯ ᑕᒪᑦᓯ ᐋ, ᐱᖓᓲᔪᑦᓯᒍᑦ ᑭᐅᔪᓐᓇᕐᒪᖔᑦᓯᒍᑦ ᑖᓐᓇ ᐋ, ᓈᒻᒪᖕᒪᖔᖅ ᐃᓗᓕᖏᑦ ᐋ, ᐱᔪᓐᓇᐅᑏᑦ ᓴᐳᔾᔭᐅᑦᓯᐊᕐ-ᓂᐊᕋᓗᐊᕐᒪᖔᑦ ᐋᖅᑭᑦᓯᐊᖅᓯᒪᒐᓗᐊᕐᒪᖔᑦ ᑖᓐᓇ ᑭᐅᔪᓐᓇᕈᑦᓯᐅᒃ.
[Les propos en inuktitut sont interprétés en anglais puis traduits ainsi:]
Tout d'abord, je vous remercie d'être ici. Soyez tous les bienvenus.
Vous nous avez fait part de commentaires très importants aujourd'hui. Je sais qu'en tant qu'Autochtones, nous avons vu nos droits violés à maintes reprises. Nous n'arrivons jamais vraiment à rien quand nos droits sont bafoués. J'ai lu ce projet de loi pour m'assurer que nos droits y sont bien protégés.
Je ne sais pas trop si vous avez pu bien l'examiner. Je voudrais vous demander à tous les trois si vous pouvez répondre à cette question. Examinez le contenu de ce projet de loi et assurez-vous qu'il est correctement rédigé, qu'il correspond bien à ce que vous en comprenez.
[Traduction]
:
Merci beaucoup pour cette question.
Le processus d'élaboration d'une loi, même si l'on affirme faire de la corédaction, est toujours imparfait.
Nous l'avons vu avec le projet de loi , sur la protection de l'enfance. Nous l'avons vu avec les projets de loi sur les langues et sur la DNUDPA, donc il n'y a jamais de processus parfait, dans lequel tout le monde obtient ce qu'il veut, mais nous nous attendons, à tout le moins, à être adéquatement inclus dans le processus. Dans le cas présent, en tant que cheffe nationale, je ne me suis vraiment pas sentie pleinement incluse dans l'élaboration de ce projet de loi, c'est donc un problème. Quoi qu'il en soit, les chefs régionaux et moi-même nous sommes réunis au cours du dernier trimestre, et c'est nous qui avons recommandé d'aller de l'avant avec la mise en application des...
:
Commençons sans plus tarder.
Nous siégerons jusqu'à 13 h 5 afin d'accorder une heure complète à notre étude.
Je rappelle aux témoins qui se joignent à nous d'utiliser les boutons d'interprétation au bas de l'écran pour sélectionner la langue dans laquelle ils souhaitent entendre les témoignages. Il y aura des questions, qui pourront être posées en anglais, en français ou en inuktitut, donc soyez‑en prévenus. Si jamais vous n'entendez plus l'interprétation, veuillez en avertir le président.
Bienvenue aux personnes qui se joignent à nous pour cette deuxième heure. Nous recevons, de l'Association des femmes autochtones du Canada, Carol McBride, présidente, et Allison MacIntosh, conseillère technique juridique.
Nous accueillons également M. Harold Calla, président exécutif du Conseil de gestion financière des Premières Nations.
[Français]
Finalement, nous recevons le grand chef Gérard Coulombe, président de l'Alliance autochtone du Québec.
Nous demandons aux témoins de faire une présentation de cinq minutes. Les membres du Comité pourront ensuite poser des questions.
[Traduction]
Sans plus tarder, j'invite le premier intervenant, M. Harold Calla, à prendre la parole pour cinq minutes.
:
Merci, monsieur le président.
J'aimerais tout d'abord rendre honneur au peuple à qui appartient le territoire traditionnel sur lequel nous tenons cette rencontre aujourd'hui et le remercier. J'aimerais également remercier le Comité de cette invitation à comparaître aujourd'hui.
Je salue les objectifs du projet de loi et j'espère que vous y accorderez une attention soutenue, avec célérité. La tâche est considérable. La réconciliation englobe bien des choses différentes pour différents peuples. Elle nécessite un effort et un engagement collectifs de chacun d'entre nous et de nos gouvernements.
Je suis content de voir que le projet de loi établit un processus légitime de reddition de comptes comme je n'en ai jamais vu auparavant, selon lequel il y aura des rapports directs au Parlement auxquels il faudra répondre. J'applaudis cela.
Ce que je me demande, quand je lis ce projet de loi, c'est si nous comprenons bien de quoi il s'agit. La route vers la réconciliation avec les peuples autochtones doit comprendre des changements qui transformeront le statu quo. Cela nécessitera, au fil du temps, des changements législatifs, réglementaires et politiques. La communauté autochtone aura besoin des mêmes infrastructures institutionnelles que celles dont bénéficient les autres gouvernements afin de pouvoir échanger avec eux sur un pied d'égalité et élaborer des stratégies visant la réconciliation.
Il faut reconnaître que ce sera une entreprise de longue haleine qui ne pourra pas se réaliser uniquement grâce au travail d'Ottawa et des capitales provinciales. Ce travail passera par la mobilisation, la discussion et l'évolution. Il doit commencer dans les communautés autochtones et rayonner à partir de là.
Il est essentiel que ce processus soit soutenu par l'ensemble du gouvernement et que le besoin de ressources adéquates et stables soit reconnu et se traduise par un financement prescrit par la loi. Le Canada doit demander dès maintenant la participation des communautés autochtones pour élaborer conjointement une stratégie de gestion du changement coordonnée à l'échelle du gouvernement afin de relever les défis que comportera la transition vers l'autonomie gouvernementale pour les communautés autochtones.
Le travail de réconciliation doit répondre au besoin d'établir une gouvernance et des capacités financières modernes au sein des communautés autochtones. Le consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause nécessite que les communautés aient cette capacité. Les communautés autochtones iront de l'avant lorsqu'elles se sentiront prêtes à le faire. Nul ne peut les forcer.
À l'heure actuelle, ce sont les organisations autochtones qui font une grande partie du travail qui doit être fait. Le conseil devra reconnaître leur travail et les intégrer à la structure de ses propres travaux. À titre d'exemple, l'institution que je préside, le Conseil de gestion financière des Premières Nations, offre des services à plus de 300 nations relevant de la Loi sur les Indiens partout au pays. Nous écoutons nos clients lorsqu'ils nous expriment leurs préoccupations depuis 15 ans et nous produisons un document que nous appelons la Feuille de route, pour aider les peuples autochtones à trouver une voie pour éliminer la pauvreté et accéder à la prospérité grâce à une bonne gouvernance, à l'accès au capital, au développement économique et à l'exercice de pouvoirs financiers accrus. Nous vous avons remis de la documentation à ce sujet aujourd'hui. Vous pourrez y jeter un coup d'oeil.
Je reconnais que l'objectif de ce conseil n'est pas de remplacer la voix et les responsabilités des détenteurs de droits. Il s'agit de les soutenir en fonction de leurs besoins et de tenir toutes les parties prenantes informées des progrès réalisés.
Le préambule du projet de loi semble porteur de réconciliation. On y reconnaît l'autonomie gouvernementale des peuples autochtones, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, de même que les appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation, et je dirais même, l'article 35 de la Loi constitutionnelle.
Toutefois, la réalité est que les politiques, les règlements et les lois actuels des gouvernements fédéral et provinciaux qui structurent, définissent et régissent les relations entre les peuples autochtones et les gouvernements du Canada et des provinces n'accordent pas aux peuples autochtones la reconnaissance nécessaire à la réconciliation. Nous devons donc accepter, dès le départ, de parler d'une transformation de la relation et d'un changement systémique au sein de celle‑ci.
Je crois qu'il y a une volonté en ce sens au Canada. Nous avons commencé par reconnaître notre histoire et les torts que nous avons subis, et nous avons ensuite admis que la relation actuelle ne nuit pas seulement aux Autochtones, mais également à toutes les Canadiennes et à tous les Canadiens. Pour réaliser la réconciliation, il est important d'accepter que nous parlons de partage des pouvoirs décisionnels et de la richesse du Canada. Je crois que le Conseil sera en mesure de surveiller les mesures en ce sens et d'en faire rapport au Parlement.
J'estime très important que le Parlement comprenne bien que c'est ce qu'on entend par transformation. Je ne suis pas certain que nous sachions à quel point la réconciliation est nécessaire pour assurer la croissance économique future du Canada et maintenir notre qualité de vie. Les normes de durabilité, ainsi que les rapports sur les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance ont une incidence sur la capacité de notre économie à continuer de fonctionner comme par le passé.
La communauté internationale cherche à améliorer la prise en compte des répercussions par la présentation de rapports, afin que les parties prenantes puissent déterminer quelles activités économiques et quelles entreprises répondent aux préoccupations de la communauté internationale. Cette information exercera une influence sur les décisions de placement, sur la disponibilité du capital ainsi que sur son coût.
Le Canada a le privilège de posséder des ressources naturelles en abondance, et les questions autochtones sont un enjeu réel au sein des mouvements internationaux. Le projet de loi montre au monde entier que le Canada comprend et qu'il est prêt à passer à l'action. Nous vivons une époque exaltante pour le Canada. Si nous nous réconcilions, nous nous garantirons un avenir rempli de possibilités.
Merci.
:
Bonjour, honorables membres du Comité, et merci d'avoir invité l'AFAC à s'exprimer sur cet important projet de loi.
Tout d'abord, j'aimerais reconnaître que nous sommes réunis sur un territoire non cédé de la nation algonquine Anishinabe. Je me sens très à l'aise ici aujourd'hui, parce que c'est ma patrie.
Le projet de loi , Loi prévoyant la constitution d'un conseil national de réconciliation, est un projet de loi important, que l'AFAC attendait depuis longtemps. Cependant, nous sommes découragées de lire que les femmes autochtones n'ont pas été incluses dans le projet de loi. L'article 10 prévoit que le Conseil national de réconciliation comprenne trois organisations autochtones nationales, au lieu de cinq. L'AFAC est déçue d'être exclue.
Ce projet de loi établit un conseil national de réconciliation, une organisation indépendante, apolitique, permanente et dirigée par des Autochtones, dont le but est de faire progresser les efforts de réconciliation avec les peuples autochtones. Il répond aux appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation 53 à 55. Ces appels à l'action sont essentiels, parce qu'ils permettront de légiférer sur la mise en œuvre des 94 appels à l'action.
Comme vous le savez, la mise en œuvre est l'aspect le plus important de toutes les mesures visant à réparer les préjudices. Les principales questions nécessitant une responsabilisation, selon les appels à l'action 53 à 55, sont celles touchant les violences commises dans les pensionnats et le colonialisme, qui sont à l'origine des traumatismes intergénérationnels.
L'AFAC a un rôle unique à jouer au sein du Conseil national de réconciliation. Par exemple, elle offre la perspective des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées. Nous offrons une expertise spécialisée, des outils comme l'analyse comparative entre les sexes adaptée à la culture, qui tient compte de l'intersectionnalité.
Notre association administre plusieurs programmes dont le programme Safe Passage, une initiative communautaire axée sur les survivantes, qui tient compte des traumatismes vécus et a été créée par l'AFAC pour suivre les cas de femmes et de filles autochtones, ainsi que de personnes autochtones bispirituelles, transgenres et de genre différent disparues et assassinées. Ce projet est le premier du genre, mené par des Autochtones pour des Autochtones. L'AFAC est une voix représentative unique et inclusive qui garantit que la perspective des FFADA soit prise en compte.
Bien que le Canada reconnaisse cinq organisations nationales, dont l'AFAC, seules trois seront mandatées pour former le conseil d'administration. L'exclusion de l'AFAC des discussions nationales sur la mise en œuvre de la réconciliation constitue un rejet important pour l'association, parce que nous sommes des expertes reconnues des questions liées aux femmes et aux filles autochtones. Les personnes représentées par l'AFAC font face à des taux élevés de trahison institutionnelle, d'incarcération, de violence et d'abus, or tous ces enjeux devraient être au cœur des discussions sur la réconciliation. La présence d'une représentante de l'AFAC au sein du conseil d'administration du Conseil national pour la réconciliation garantirait que le processus soit inclusif et que les voix des femmes autochtones et des personnes de genre différent soient prises en compte. Nous sommes des leaders, des décideuses et des gardiennes du savoir appréciées par nos familles, nos communautés et nos gouvernements. Sans notre apport, il est peu probable qu'on envisage dans les discussions des solutions sexospécifiques à la discrimination systémique permanente causée par le colonialisme et le patriarcat. C'est une question d'équité et de revendication du pouvoir matriarcal.
Dans l'accord entre le Canada et l'AFAC, le Canada s'est engagé à prendre en compte le point de vue distinct des femmes et des filles autochtones et des personnes autochtones de sexe différent. Le fait de ne pas inclure les femmes autochtones dans cette instance créera un précédent dévastateur dans ce pays et dans le monde, dans le contexte actuel d'un génocide avéré contre les femmes et les filles autochtones.
Honorables députés, l'Association des femmes autochtones du Canada demande donc que le projet de loi soit modifié, à l'article 10, pour inclure une administratrice de l'AFAC au conseil d'administration du Conseil national de réconciliation. Si le projet de loi reste tel quel, le gouvernement du Canada aura perpétué, dans la loi, la marginalisation des femmes, des filles, des personnes bispirituelles, des transgenres et des personnes de diverses identités de genre autochtones.
Cela dit, je tiens à vous remercier. Chi-meegwetch. Thank you.
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Merci, monsieur le président.
Ce matin, je vais d'abord vous parler au nom de mon chef national, M. Elmer St. Pierre, qui ne peut être présent, ni en personne ni de façon virtuelle, en raison de problèmes de santé.
Avant de commencer, j'aimerais reconnaître le territoire traditionnel non cédé des peuples algonquins où nous nous réunissons aujourd'hui.
Depuis plus de 50 ans, le Congrès des peuples autochtones, ou CPA, défend les droits et les intérêts des Indiens non inscrits, des Indiens inscrits hors réserve, des Métis et des Inuits du sud. Nous avons souvent été la seule voix de la communauté autochtone hors réserve et nous sommes le seul groupe qui peut vraiment parler au nom de cette communauté.
La réconciliation a toujours été au premier plan de notre organisation et de notre travail.
Aujourd'hui, plus de 80 % des Autochtones vivent hors réserve dans des régions urbaines, rurales et éloignées de l'île de la Tortue. Leurs voix ne peuvent pas être ignorées.
Or, pour les communautés du CPA, le Canada a accompli jusqu'à maintenant très peu de choses en matière de réconciliation. Le fait que nous accusons un retard par rapport aux autres peuples autochtones en est la preuve. Le manque de programmes et de services adaptés à la culture a entraîné une marginalisation accrue de notre peuple, qui est le plus vulnérable et qui souffre déjà de traumatismes historiques causés par les pensionnats indiens et les politiques coloniales.
Pendant des années, le gouvernement canadien n'a pas reconnu les peuples du CPA. Ce n'est qu'après une bataille juridique de 17 ans que la question a pu obtenir une réponse une fois pour toutes. Malgré cette victoire, le gouvernement continue de diviser et de choisir les peuples avec lesquels il veut travailler. Cela laisse la majorité des Autochtones à l'écart, oubliés et sans accès aux soutiens nécessaires.
Nous félicitons le gouvernement fédéral d'avoir répondu aux appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation du Canada pour créer le Conseil national de réconciliation. Nous l'appuyons pleinement. Cependant, la réconciliation ne peut se limiter à certains groupes; elle doit s'adresser à tous.
S'il était mis en œuvre aujourd'hui, le projet de loi exclurait davantage notre peuple. Le projet de loi stipule que « la réconciliation exige des efforts collectifs de tous les peuples [autochtones] et [...] de plusieurs générations ». En ne prévoyant pas de sièges au conseil d'administration pour notre peuple, ce projet de loi permet au gouvernement de choisir politiquement les peuples autochtones avec qui il veut travailler et néglige la voix de la majorité d'entre eux. Si nous voulons vraiment parvenir à une réconciliation, aucune communauté ne doit être exclue.
Je vais maintenant parler au nom de l'Alliance autochtone du Québec.
J'aimerais souligner encore une fois que nous nous réunissons aujourd'hui sur le territoire traditionnel non cédé des peuples algonquins, dont je suis fier, car c'est l'une de mes origines autochtones.
Je m'appelle Gérard Coulombe. Je suis le président de l'Alliance autochtone du Québec et membre du conseil d'administration du Congrès des peuples autochtones.
Le Congrès des peuples autochtones n'a jamais été consulté lors de l'élaboration de ce projet de loi et n'y a pas participé. Nous avons été exclus des discussions bilatérales avec le gouvernement sur cette question, malgré l'arrêt Daniels et la signature de l'Accord politique Canada-Congrès des peuples autochtones. Notre exclusion du Conseil national de réconciliation, alors que nous sommes une organisation autochtone nationale, est une décision politique qui est un affront à la réconciliation. Ce projet de loi est discriminatoire envers des centaines de milliers d'Autochtones représentés par le CPA. Il ne respecte pas l'engagement du gouvernement à l'égard de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Une véritable réconciliation ne pourra se produire que lorsque tous les peuples autochtones participeront au processus décisionnel.
En terminant, j'aimerais dire que l'Alliance autochtone du Québec est l'une des 11 organisations autochtones du Canada. Les membres affiliés au Congrès des peuples autochtones couvrent 10 provinces et un territoire, soit pratiquement tout le territoire du Canada. On peut donc dire que le Congrès des peuples autochtones représente les Autochtones hors réserve inscrits ou non inscrits, les Métis et les Inuits, et ce, à la grandeur du pays.
Merci.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à nos témoins. Nous accueillons des gens d'une grande compétence et nous en sommes reconnaissants.
Je vais essayer de poser des questions courtes, car je n'ai que six minutes.
Commençons par Mme McBride.
J'imagine que vous n'avez pas été consultée lors de la rédaction du projet de loi . D'après vos commentaires, cinq ans, c'est une attente beaucoup trop longue pour qu'une personne de votre association soit nommée au premier conseil d'administration, qui trace la voie pour les conseils d'administration subséquents.
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Oui, c'est exact. L'AFAC n'a pas été consultée sur ce projet de loi, et nous avons attendu assez longtemps pour qu'il soit présenté. À mon avis, le problème n'est pas tant ce que dit ce projet de loi extrêmement prioritaire, mais ce qu'il ne dit pas, ainsi que le précédent très préoccupant qu'il crée en perpétuant l'exclusion des femmes, des filles, des personnes bispirituelles, des transgenres et des personnes de diverses identités de genre autochtones, sur fond de génocide continu.
Pour répondre à votre question, cinq ans, c'est trop long à attendre d'être incluses dans ce projet de loi. Je pense qu'il est inquiétant, encore une fois, comme la présidente McBride l'a indiqué, que des sièges au conseil sont réservés à trois importantes organisations autochtones nationales, mais que l'AFAC soit laissée de côté. Pour l'AFAC, c'est plutôt déroutant, étant donné que nous avons, en fait, un accord avec le gouvernement du Canada. L'article 1.1 de cet accord honore explicitement l'engagement d'inclure les femmes autochtones dans des discussions continues, et nous nous retrouvons pourtant exclues, encore une fois. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il s'agit d'un précédent dévastateur. On dirait bien une autre promesse creuse et non tenue par le gouvernement du Canada.
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Non, le Congrès des peuples autochtones n'a pas été consulté pour l'élaboration de ce projet de loi, et nous trouvons cela très dommage.
Il faut rappeler que le Congrès des peuples autochtones s'est battu pendant 17 ou 18 ans devant la Cour suprême du Canada pour faire reconnaître les peuples qui constituent ses membres. La Cour suprême du Canada a accordé cette reconnaissance, mais le Congrès des peuples autochtones a dû défendre la cause pendant 17 ans. Je pense à M. Harry Daniels, qui a consacré une partie de sa vie à cette cause. Dans un bureau de poste cette semaine, j'ai même vu un timbre à son effigie. Le travail de M. Daniels nous a permis de remporter cette cause.
Par ailleurs, un accord politique a été signé entre le gouvernement fédéral et le Congrès des peuples autochtones. L'arrêt Daniels a été rendu en 2016 et, deux ans plus tard, en 2018, cet accord politique a été signé. Dans celui-ci, le gouvernement s'engage à travailler en étroite collaboration avec le Congrès des peuples autochtones pour faire avancer la cause autochtone au Canada.
Malgré tout cela, nous ne sommes même pas consultés ni invités à la table. C'est un très grand affront au Congrès des peuples autochtones.
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En effet, mais avant, nous n'avons pas eu l'occasion, auparavant, de contribuer à un rapport destiné au Parlement sur ces questions. Cela découlera de cette mesure législative. Je pense que c'est important. C'est en partie pourquoi j'ai accepté l'invitation à venir ici.
Pour moi, la réconciliation se rapporte à l'article 35. Nous avons subi des répercussions considérables en raison de la colonisation et nous devons composer avec cela. Il s'agit de problèmes très graves que je ne veux surtout pas minimiser, mais nous devons regarder vers l'avenir. À quoi ressemblera le monde lorsque nous aurons la reconnaissance prévue à l'article 35 et que la réconciliation sera une réalité? Qu'avons-nous concrètement aujourd'hui, et que devons-nous changer?
Voilà pourquoi je suis ici aujourd'hui. Je suis venu dire aux parlementaires que vous aurez un rapport, puis vous aurez des responsabilités découlant de ses conclusions. Vous devrez alors apporter les changements nécessaires pour mettre en œuvre la réconciliation et la reconnaissance prévue à l'article 35. Cela passera en partie par les communautés autochtones, mais en somme, vous devrez prendre des décisions pour changer la relation de manière systématique afin de créer une capacité et une infrastructure institutionnelle dans les communautés des Premières Nations qu'elles peuvent gérer. Si nous ne parlons pas de cela, c'est une autre promesse non tenue.
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Pour compenser, je vais simplement poursuivre dans la même veine que M. Schmale. Je pense qu'il a déjà obtenu de M. Calla la réponse que je voulais.
Monsieur Calla, vous ne vous ressemblez pas du tout; j'ai l'habitude de voir le petit personnage de Zoom. Je ne vous avais même pas reconnu. J'ai toujours été impressionné par votre témoignage.
Vous avez parlé de la nécessité d'un changement transformateur. Selon moi, cela signifie, plus que tout, une véritable amélioration du niveau de vie des Autochtones partout au Canada. Je pense que c'est ce que vous avez fait, avec votre organisme. Je pense que c'est ce dont vous parlez chaque fois que nous discutons avec vous, et cela me réjouit. C'est ce que votre organisme cherche à faire.
En quelque sorte, vous avez déjà répondu à cette question lorsque vous avez mentionné pourquoi vous êtes venu ici. À la lecture du projet de loi, je constate que la fonction de ce conseil est d'élaborer un plan d'action pour surveiller la recherche, de mener de la recherche, et de surveiller les politiques. En somme, cela fait beaucoup d'examens et de rapports, mais peut-être pas beaucoup d'action et de changement transformateur. Vous avez peut-être déjà répondu à cela en disant que vous appuyez ce projet de loi parce qu'il favorisera des résultats concrets au lieu d'être une autre tribune politique pour discuter.
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Merci, monsieur le président.
J'aimerais remercier M. Calla, Mme McBride, Mme MacIntosh et M. Coulombe de leurs témoignages respectifs.
J'aimerais poser une question aux représentantes de l'Association des femmes autochtones du Canada au sujet de la représentativité. Je reviens souvent sur cette question au Comité. C'est effectivement un élément du projet de loi qui pose problème à plusieurs personnes. Cela touche la consultation, d'une part, mais également la représentation au sein même du conseil d'administration, d'autre part.
Même si je suis ici pour écouter votre point de vue, je dois dire que je suis interpellée par les mêmes éléments du projet de loi que vous. Souvent, j'ai l'impression qu'on traite les femmes comme si elles étaient une minorité. Pourtant, selon les statistiques, les femmes composent plus de la moitié de la population actuelle. Je constate qu'il n'y a pas de volonté de parité dans le projet de loi, et cela m'interpelle. J'aimerais connaître votre impression à ce sujet.
Comme vous l'avez dit à plusieurs reprises, on devrait faire en sorte très rapidement que votre organisation soit représentée au conseil d'administration. Par ailleurs, je ne sais pas s'il y a une volonté d'atteindre une parité hommes-femmes au sein de ce conseil. Cela pourrait être intéressant pour vous. Je sais que ce n'est pas du ressort de votre association, mais c'est une question que je me posais.
:
Ma prochaine question s'adresse à M. Coulombe, de même qu'à M. Calla, bien entendu.
Nous avons parlé de la représentativité. J'aimerais vous poser d'autres questions à cet égard, car je pense que c'est important pour vous aussi.
Monsieur Coulombe, avez-vous quelque chose à ajouter au sujet des organisations qui devraient aussi être incluses dans le conseil d'administration? Comme on le sait, les consultations n'ont pas permis d'entendre tout le monde. Comme l'ont dit les représentantes de l'Association des femmes autochtones du Canada, peut-être que l'ensemble des communautés autochtones ou des personnes autochtones n'est pas représenté.
Que pouvons-nous faire pour nous assurer que le Conseil national de réconciliation est légitime et crédible et qu'il représente l'ensemble des populations autochtones du Canada?
:
D'accord. Merci beaucoup.
Monsieur Calla, je suis heureuse de vous voir.
J'ai été frappée par votre intervention. Vous espérez que ce projet de loi apporte une transformation et un changement systémique. Vous voyez cette mesure comme une grande opportunité.
L'alinéa 7d) du projet de loi énonce que le Conseil surveille les politiques et les programmes du gouvernement du Canada, ainsi que les lois fédérales, qui ont une incidence sur les peuples autochtones.
Selon vous, cette disposition pourra‑t‑elle entraîner la transformation et le changement systémique dont nous avons besoin?
:
Merci pour votre question.
Selon moi, cette mesure est, certes, un pas dans la bonne direction. Néanmoins, encore une fois, comme les femmes autochtones ne figurent pas dans une mesure législative aussi importante, je ne pense pas que cela va suffisamment loin. Le projet de loi ne répond pas au paragraphe 35(4) de la Constitution ni à l'article 20 de la Charte. Il ne renferme rien sur l'article 22 de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Il est silencieux sur le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones et ne donne pas suite aux appels à la justice lancés dans le cadre de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées.
Oui. Le projet de loi est assurément un pas dans la bonne direction, mais il y a un élément de très grande envergure qui n'y figure pas.
:
Merci beaucoup pour vos réponses.
Lorsque j'ai examiné le projet de loi, j'ai voulu y relever les droits qui seraient maintenus ainsi que les lacunes en matière de protection des droits des peuples autochtones. J'étais curieuse de savoir si le projet de loi allait expliquer comment faire pour s'assurer que le conseil aura les outils pour surveiller le respect des droits des Autochtones ou si nos droits allaient continuer à être brimés.
J'ai demandé aux témoins un peu plus tôt leur avis sur la question, mais j'aimerais également avoir une réponse de la part de chacun d'entre vous. J'ai pris l'exemple de la décision du Tribunal canadien des droits de la personne sur la discrimination dirigée contre les enfants des Premières Nations. Les droits de ces enfants ont été bafoués, mais le gouvernement fédéral conteste encore cette décision.
Selon vous, le projet de loi améliore‑t‑il les choses en proposant, par exemple, une approche axée sur les droits qui permettrait de surveiller les progrès réalisés en matière de réconciliation?
Je vais commencer avec monsieur Coulombe.
:
Je pense que si cette mesure pouvait protéger nos droits, ce serait grâce au conseil. S'il a accès aux informations et aux données de l'ensemble du gouvernement, le conseil pourrait promouvoir nos droits comme jamais auparavant. Donc, le projet de loi pourrait aider. Il ne faut pas penser pour autant que les problèmes que nous avons aujourd'hui n'exigent pas d'autres types de mesures. Comme je l'ai souvent dit, quoi que vous fassiez, vous devez imaginer ce que vous voulez obtenir comme résultat dans 20 ans. La solution ne viendra pas du jour au lendemain.
Nous devons composer avec les séquelles du colonialisme. Nos communautés sont aux prises avec la souffrance et la pauvreté. Un état des lieux doit être fourni au Parlement, et les parlementaires doivent évaluer les progrès réalisés.
Trop souvent, lorsque nous mettons en œuvre des politiques, nous ne voulons pas attendre qu'un recensement nous dise, dans cinq ans, si ces politiques sont efficaces ou non. Nous avons besoin d'un processus d'évaluation en temps réel. Plusieurs organismes et établissements au pays ont lancé des initiatives en collaboration avec des ministères pour essayer d'y arriver.
Je pense que le projet de loi pourrait aider, mais nous devons établir un mécanisme qui nous permettra de faire rapport au Parlement par l'entremise du conseil.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
C'est formidable d'être de retour au Comité.
Merci à tous les témoins d'avoir pris le temps de se joindre à nous et de nous faire part de leurs vues. Vos observations étaient toutes très intéressantes.
Comme mon temps est limité, je voudrais revenir, monsieur Calla, sur une réponse que vous avez donnée à une question posée par mon ami, Marcus Powlowski, mon voisin dans le Nord de l'Ontario. La question portait sur le financement lié à la réconciliation et aux services aux Autochtones.
Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que dans bon nombre de cas, le financement du gouvernement est indispensable pour aider à trouver des solutions aux problèmes qui affligent les Autochtones. Je le vois dans ma circonscription, mais nous le constatons également d'une année à l'autre et dans le rapport récent du directeur parlementaire du budget: les fonds dépensés par le gouvernement ne permettent pas aux organisations de se rapprocher de leurs objectifs au même rythme. Alors, il semble y avoir une déconnexion entre les annonces faites à Ottawa et les résultats sur le terrain.
Je voulais vous demander si vous aviez des idées ou des suggestions pour le Comité, qui nous permettraient de nous assurer que le gouvernement en a pour son argent et que les fonds qu'il dépense améliorent la vie des Autochtones partout au pays.
:
Je pense qu'il faut investir dans des solutions dirigées par des Autochtones. Les solutions dirigées par le gouvernement n'ont pas fonctionné.
Si nous regardons les résultats de la Loi sur la gestion financière des Premières Nations, les 300 communautés et le travail effectué par le conseil de gestion financière, y compris dans les communautés aux prises avec des difficultés financières, nous constatons que lorsque les Premières Nations disposent de leur propre système de gouvernance et de leurs propres capacités administratives et fiscales, leurs sources de revenus et leur indice de bien-être augmentent.
Certains investissements judicieux faits dans des institutions financières et dans d'autres organisations comme la nôtre ont permis de mettre en branle des solutions dirigées par des Autochtones. J'espère que le conseil conviendra que nous avons besoin de ce genre de solutions.
Avant toute chose, le conseil devra disposer de ressources adéquates. Il aura besoin d'un secrétariat. Il devra être en mesure d'exercer la diligence raisonnable qui lui permettra de présenter des rapports non épurés au Parlement.
Tout d'abord, je dirais que la portée de ce que peut faire ce conseil ne devrait pas être limitée. Le conseil doit concentrer ses efforts là où la vérité doit être dévoilée.
La réalité économique de la communauté internationale, qui est insatisfaite de la tournure prise par l'économie mondiale ces dernières années, a donné naissance au mouvement des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance, ou ESG. Je les appelle en fait ESGA, car ils comportent tous un élément autochtone.
En fait, je crois que cet organisme pourrait renforcer cette priorité en l'intégrant dans son rapport annuel sur les progrès réalisés déposé au Parlement. Il se passe beaucoup de choses au pays. Les discussions vont bon train au gouvernement fédéral sur la façon dont nous pourrions atteindre la réconciliation économique. Pour ce faire, un changement systémique doit être effectué, de même que la reconnaissance des conséquences du colonialisme, par exemple, sur la capacité des Premières Nations de se tailler une place sur les marchés financiers.
Le conseil pourrait soutenir cet objectif de différentes façons. Nous pourrions ainsi nous attaquer aux problèmes de pauvreté dans les collectivités et offrir aux jeunes des possibilités d'emploi qui les inciteraient à retourner dans leur collectivité après leurs études. Nous devons nous atteler à ces tâches urgentes.
Nous ne pouvons pas continuer à entretenir les symptômes de la pauvreté en injectant de l'argent. Nous devons trouver des solutions. Une des solutions serait, selon moi, d'offrir de vraies occasions d'exercer la gouvernance autonome et de mettre au point nos propres solutions.
La Loi sur la gestion financière des Premières Nations est la mesure législative sur les Autochtones la plus efficace de l'histoire du Canada. Un peu partout au pays, 345 Premières Nations ont choisi de s'impliquer. Les autorités financières des Premières Nations ont fourni cette année, à la demande des Premières Nations, des fonds se chiffrant à 2 milliards de dollars sous forme de prêts pour soutenir le développement économique, créer des emplois dans les communautés et accroître l'indice de bien-être.
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Merci, monsieur le président.
J'ai une dernière question pour l'ensemble des témoins.
Monsieur Calla, on a beaucoup parlé de représentation. Selon vous, quels sont les organismes qui devraient faire partie du conseil d'administration?
Par ailleurs, pensez-vous qu'il devrait y avoir une représentation sectorielle, en quelque sorte? M. Calla a beaucoup parlé d'économie. Bien sûr, on représente l'ensemble des nations et des strates démographiques, idéalement, mais certains secteurs devraient aussi être représentés par les Premières Nations.
Vous avez tout au plus 30 secondes pour me répondre, mais vous pourrez toujours envoyer des informations complémentaires au Comité. Nous vous en sommes très reconnaissants.
Peut-être que vous pouvez débuter, monsieur Coulombe.
Voilà qui met fin à la réunion d'aujourd'hui. Nous avons entendu un excellent groupe de témoins.
Je remercie chaleureusement tous ceux qui ont comparu aujourd'hui. Merci à monsieur Harold Calla, du Conseil de gestion financière des Premières Nations.
[Français]
Je remercie également le grand chef Gérard Coulombe, président de l'Alliance autochtone du Québec.
[Traduction]
Je remercie également Carol McBride et Allison MacIntosh, de l'Association des femmes autochtones du Canada. Votre témoignage était une pièce essentielle de nos délibérations sur le projet de loi . Alors, merci de nous avoir accordé du temps et de nous avoir fait part de vos vues.
Sur ce, chers membres, notre prochaine réunion aura lieu jeudi. Nous poursuivrons alors notre étude du projet de loi .
La séance est levée.