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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 044 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 5 juin 2012

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Bonjour, tout le monde.
     Cette 44e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale, du mardi 5 juin 2012, est ouverte.
     Il s'agit d'une séance d'information sur la stratégie antiterroriste.
    La première heure sera consacrée à l'audition de l'honorable Vic Toews, ministre de la Sécurité publique, que nous remercions de revenir devant le comité. Il était ici lors de notre dernière réunion consacrée au budget des dépenses, et il aura donc à son crédit deux comparutions de suite devant le comité. Nous lui en sommes très reconnaissants.
     Il est accompagné de collaborateurs idoines du ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile, soit Michael McDonald, directeur général, Direction générale des opérations de la sécurité nationale, et John Davies, directeur général, Politiques de la gestion de la sécurité nationale.
    Je rappelle aux membres du comité que le ministre ne peut être avec nous que pendant la première heure mais que ses collaborateurs resteront pour la deuxième.
     Nous vous remercions à nouveau. Nous allons suivre la même procédure que d'habitude, c'est-à-dire que nous commençons par écouter votre déclaration liminaire, monsieur le ministre, après quoi nous aurons un ou deux tours de questions.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Comme vous pouvez le constater, membres du comité, c'est toujours avec plaisir que je comparais devant vous, et je suis heureux d'avoir la possibilité de discuter de la stratégie intitulée Renforcer la résilience face au terrorisme: stratégie antiterroriste du Canada.
    Comme vous l'avez dit, je suis accompagné de collaborateurs qui pourront répondre en détail aux questions des membres du comité s'il y a certains aspects très techniques qui m'échappent.
    Monsieur le président, le Canada est inébranlable dans sa résolution de protéger les Canadiens et d'appuyer les efforts mondiaux de lutte contre le terrorisme. J'ai à maintes reprises répété que la responsabilité la plus fondamentale d'un gouvernement est d'assurer la sécurité de ses citoyens. La stratégie antiterroriste du Canada souligne à quel point cette responsabilité est fondamentale et à quel point le gouvernement la prend au sérieux. Je suis fier que cette stratégie propose une approche claire pour lutter contre le terrorisme tout en mettant un accent précis sur le renforcement de la résilience des collectivités. Elle confirme également que notre gouvernement prendra toutes les mesures raisonnables pour répondre à des menaces réelles et persistantes, et les Canadiens ne s'attendent à rien de moins.
    Je crois comprendre que la majorité des membres du comité connaissent la stratégie, laquelle a été lancée plus tôt au cours de l'année et est accessible à tous les Canadiens sur le site Web de Sécurité publique Canada. Je vais donc passer la stratégie en revue, et je m'attarderai ensuite sur les principaux points et la voie à suivre.
    La stratégie antiterroriste permettra au gouvernement de prioriser ses efforts en matière de lutte contre le terrorisme et de promouvoir une discussion ouverte avec les Canadiens à propos des menaces auxquelles nous faisons face. La stratégie met aussi en valeur l'importance de la coopération avec les partenaires internationaux du Canada, tous les paliers de gouvernement, les organismes de renseignement et d'application de la loi, les intervenants de l'industrie et les groupes spéciaux d'intérêts. En d'autres mots, elle énonce la façon dont l'ensemble du gouvernement travaille à empêcher et à déceler les menaces terroristes, à en priver les auteurs des outils requis et à intervenir le cas échéant.
    D'abord et avant tout, la stratégie met l'accent sur la prévention, car la meilleure solution est d'empêcher les personnes vulnérables de s'imprégner d'idéologies terroristes.
    Le deuxième élément vise à déceler les activités terroristes, en en identifiant les auteurs et ceux qui les soutiennent, ainsi que leurs capacités et leurs plans. Il est essentiel de cerner rapidement les menaces terroristes afin de prévenir les attentats terroristes, et c'est pourquoi, dans le cadre du Plan d'action en réponse à la Commission d'enquête sur l'affaire Air India, nous nous sommes engagés à collaborer avec les organismes du renseignement de sécurité et d'application de la loi pour établir les moyens qui permettraient un échange plus efficace de l'information.
    Le troisième élément de la stratégie vise à priver les terroristes des moyens et des possibilités de mener à bien leurs activités illégales, en atténuant les vulnérabilités et en déjouant les plans terroristes, afin que le Canada et les intérêts canadiens soient des cibles plus difficiles à atteindre pour les éventuels terroristes. Pour ce faire, le gouvernement a apporté des modifications au Code criminel afin d'aider les organismes d'application de la loi à enquêter sur les infractions de terrorisme, en rétablissant les audiences d'investigation et les engagements assortis de conditions.
    Afin de priver les terroristes de la capacité de menacer le Canada et les pays alliés, nous adopterons également de nouvelles dispositions pour ériger en infraction criminelle le fait de quitter, ou de tenter de quitter, le Canada pour commettre une infraction de terrorisme. Pour compléter ces mesures, nous répondrons aussi aux besoins des victimes de terrorisme en adoptant des dispositions qui leur permettront de poursuivre en justice les auteurs de terrorisme et ceux qui les soutiennent.
    Le dernier élément vise à intervenir en cas d'attentats terroristes de façon rapide, organisée et proportionnelle à la gravité de la situation, afin d'assurer un retour rapide à la vie ordinaire et de réduire les conséquences de l'ampleur de l'attentat.
    Sous-tendent ces quatre éléments deux importants thèmes, la résilience et les partenariats. Je vais traiter de ces deux thèmes en commençant par la résilience.
    Dans le contexte des efforts de lutte contre le terrorisme au Canada, la résilience est un concept qu'il importe de comprendre et ce, pour plusieurs raisons. Dans un premier temps, la résilience reflète la capacité des personnes, des collectivités et de la société à rejeter et à écarter les facteurs pouvant susciter des idées associées à la violence et à l'extrémisme violent. En deuxième lieu, la résilience est essentielle pour réduire au minimum les effets psychosociaux découlant d'un attentat terroriste. En d'autres termes, il est important que la réaction de la société face à un événement n'aggrave pas la crise. Finalement, la résilience reflète la capacité des personnes et des collectivités à puiser des forces dans les principes qui lient notre société.
(1535)
    En adoptant le concept de la résilience comme pierre angulaire de la stratégie antiterroriste du Canada, nous établissons l'atténuation comme l'un de nos principaux objectifs, soit l'atténuation des éventuelles conséquences de la polarisation sur la société canadienne pouvant découler des idéologies violentes, ou même des attentats terroristes.
     L'autre thème principal vise à établir et à renforcer les partenariats, à l'échelle nationale et internationale. La réussite de notre stratégie globale repose sur un leadership solide, et c'est pourquoi les administrations municipales, les dirigeants communautaires, le milieu universitaire et les citoyens sont appelés à prendre part aux efforts nationaux.
    Pour ce faire, nous travaillons activement avec les organismes du renseignement de sécurité et d'application de la loi provinciaux et territoriaux, le secteur privé, les organisations non gouvernementales, les organisations civiles et les organismes communautaires. Les équipes intégrées de la sécurité nationale dirigées par la GRC, qui sont basées dans les grandes villes du Canada, sont un exemple de la façon dont les partenaires responsables du maintien de l'ordre et les organismes du renseignement de sécurité travaillent ensemble à l'échelle fédérale, provinciale et territoriale pour enquêter sur les menaces criminelles pouvant compromettre la sécurité nationale.
    À l'échelle locale, nous continuerons également de sensibiliser de nombreuses collectivités à l'aide d'initiatives comme la Table ronde transculturelle sur la sécurité, qui est dirigée conjointement par Sécurité publique Canada et Justice Canada. Dans le cadre de cette initiative, nous pourrons engager des collectivités dans des discussions franches qui aideront à établir un climat de confiance et à créer une vision commune pour une société résiliente au terrorisme sous toutes ses formes. En fait, dans quelques jours, je rencontrerai des dirigeants communautaires du sud de l'Ontario pour discuter d'un éventail de questions liées à la sécurité nationale.
     Monsieur le président, il est important de signaler que différentes initiatives de lutte contre le terrorisme sont en place depuis un certain temps au Canada. Ce que fait la stratégie, et c'est une première, c'est d'énoncer de façon cohérente et uniforme comment ces initiatives contribuent à la mise en oeuvre de l'approche adoptée par le gouvernement pour lutter contre le terrorisme. La stratégie combine également tous les éléments de l'approche actuelle de façon à encourager un engagement plus profond auprès des Canadiens. En échangeant des renseignements sur les menaces terroristes, notre objectif n'est pas de susciter la peur parmi les Canadiens, mais plutôt d'accroître leur sensibilisation à cet égard. Nous reconnaissons qu'il reste beaucoup à apprendre sur la lutte et la prévention du terrorisme dans le contexte canadien. Plus que jamais, il est important que les gouvernements collaborent et échangent de l'information avec des experts d'autres domaines, d'autres nations, du secteur privé et du milieu universitaire.
    Pour ce faire, comme les membres du comité peuvent le savoir, le premier ministre et moi-même avons lancé l'année dernière le projet Kanishka, dans le cadre duquel un financement de 10 millions de dollars sur cinq ans a été versé pour mener des recherches canadiennes sur tous les aspects de lutte et de prévention du terrorisme. Le projet Kanishka a pour objectif de créer un réseau dynamique de scientifiques de toutes les régions du Canada, qui se penchera sur la mise en place de politiques plus efficaces de lutte contre le terrorisme.
     La première série de financement de la recherche visera des thèmes comme l'extrémisme idéologique et la violence, la perception et l'émotion, la résilience et les dynamiques collectives, l'organisation et l'efficacité. Avec de tels investissements, il ne fait pas de doute que les connaissances collectives au sujet de ces enjeux s'amélioreront de même que notre compréhension de la meilleure façon d'y faire face. J'ai eu le plaisir d'annoncer le premier cycle de financement d'une valeur de 1,1 million de dollars qui permettra de former la connaissance et la compréhension de cet enjeu complexe.
    Monsieur le président, permettez-moi de conclure avec quelques mots sur la mise en oeuvre de la stratégie antiterroriste du Canada, particulièrement en ce qui a trait à l'élément de prévention.
    Initialement, les efforts en matière de prévention se concentreront sur les points suivants: mieux comprendre pourquoi et comment les idéologies d'extrémisme violent trouvent écho chez certaines personnes; déterminer les outils qui peuvent aider les collectivités à ne pas se laisser impressionner par ces idéologies; se prévaloir des programmes et des partenariats existants pour aider à la réalisation des objectifs en matière de prévention; établir des indicateurs fiables pour mesurer les résultats et évaluer l'efficacité de nos programmes.
    Comme je l'ai déjà dit, notre gouvernement est persuadé que nous pouvons bâtir une société résiliente à toutes les formes de terrorisme, en informant les Canadiens des menaces à la sécurité auxquelles nous sommes confrontés comme pays et en collaborant avec nos partenaires pour acquérir des connaissances et développer des capacités. La stratégie antiterroriste du Canada souligne l'engagement du Canada de prendre toutes les mesures raisonnables pour lutter contre le terrorisme sous toutes ses formes.
    Sur ce, monsieur le président, je remercie tous les participants encore une fois de leur temps, et je me tiens prêt à répondre à toutes les questions que les membres du comité peuvent avoir.
(1540)
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Nous passons au premier tour de questions.
    Madame Hoeppner, vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie à nouveau le ministre de sa présence. Vous étiez là lors de la séance précédente et nous vous sommes reconnaissants d'être aussi disponible pour le comité, avec vos collaborateurs.
    Monsieur le ministre, je voudrais parler d'abord de la stratégie dans son ensemble, du point de vue de sa nouveauté. Je pense que vous conviendrez qu'aucun gouvernement n'avait encore adopté cette démarche pour faire face au terrorisme. Pouvez-vous nous dire pourquoi notre gouvernement a choisi d'adopter une stratégie très directe et focalisée, par opposition au fait que d'autres gouvernements n'avaient peut-être pas réalisé qu'il y avait là un besoin? C'est peut-être parce que notre monde a changé.
     Pouvez-vous nous expliquer pourquoi notre gouvernement a adopté cette démarche? Je pense que c'est une démarche relativement nouvelle par rapport à celles des gouvernements précédents.
    Merci, madame Hoeppner, j'apprécie la question.
    Notre compréhension du terrorisme a bien sûr évolué depuis une dizaine d'années, notamment depuis les attentats contre les tours jumelles. Cet événement a incontestablement révélé tout un éventail de possibilités que les experts du terrorisme et les agences de sécurité n'avaient tout simplement pas envisagées. Notre pays a dû réagir très rapidement. Je sais que le gouvernement précédent avait adopté certaines dispositions législatives, dispositions que nous avons renouvelées quand elles sont arrivées à échéance parce que nous pensions qu'elles étaient encore nécessaires. Le gouvernement précédent avait pris diverses mesures.
    Ce que nous avons tenté de faire, c'est d'établir des priorités dans les efforts gouvernementaux de lutte contre le terrorisme, et de promouvoir un débat ouvert avec les Canadiens sur la nature des menaces auxquelles nous sommes confrontés. Notre but est d'engager un débat avec tous les secteurs de la société, de façon à les amener à réagir collectivement de manière coordonnée. Des enquêtes comme celle consacrée à l'attentat d’Air India, par exemple, nous ont révélé l'importance du partage des renseignements. Bien que cette enquête ait surtout souligné le partage de renseignements au niveau intérieur, elle a aussi abordé ce partage au niveau international. C'est devenu un aspect très important, surtout quand il s'agit de terrorisme. On ne peut tout simplement pas garder les informations à l'intérieur du Canada et les partager uniquement avec les organismes nationaux d'application des lois et de protection de la sécurité en s'imaginant qu'on a ainsi protégé efficacement la population. Il est indispensable de partager les renseignements avec nos alliés, tout comme nous comptons sur eux pour nous donner des informations qui nous permettront de mieux protéger nos concitoyens.
    Cette nécessité soulève diverses préoccupations que nous ne pouvons négliger, comme les règles de protection des renseignements personnels. Par exemple, quand nous partageons des informations avec un autre pays, comment pouvons-nous nous assurer que celles-ci sont utilisées de manière adéquate et ne serviront pas à des techniques d'interrogation inacceptables? Quel genre de limites pouvons-nous intégrer aux ententes que nous passons avec nos partenaires internationaux?
     En fin de compte, il s'agit là d'une question de coordination de tous les efforts qui sont déjà entrepris, et d'amélioration de ces efforts grâce aux connaissances que nous avons acquises en cours de route. Le projet Kanishka est fondamental pour donner une assise théorique à notre compréhension du terrorisme, que les services de police, les organismes de sécurité, les magistrats et les avocats pourront utiliser pour nous faire avancer dans la résolution de cette problématique très difficile.
(1545)
    Merci.
    Je sais que vous avez parlé des quatre piliers de la stratégie: empêcher, déceler, priver, intervenir.
     J'ai eu le privilège en février de participer à la réunion d'une table ronde transculturelle, avec des personnes représentant une diversité de collectivités et de groupes. Ce que ces personnes apportent au débat est tellement important: leur franchise, le lien avec leur communauté, et leur connaissance concrète de ce qui se passe dans leur communauté.
    Je sais que vous les avez rencontrés et que vous les rencontrerez à nouveau. Pourriez-vous nous parler un peu de l'aspect prévention de la stratégie, du point de vue de vos rencontres avec les leaders communautaires, afin de savoir vraiment ce qui se fait dans les diverses communautés? Les choses changent tellement rapidement, et la radicalisation des gens, qui entraîne la violence, peut se faire tellement vite.
    Pouvez-vous nous parler de vos contacts avec les groupes communautaires, comme ceux de la table ronde transculturelle?
    Certainement. Merci de la question.
     Je pense que vous soulevez une question très importante: le rôle de la collectivité face au terrorisme. Je crois pouvoir dire que nous ne pourrons avoir de succès contre les groupes terroristes sans la collaboration des collectivités dont ils peuvent être issus ou recevoir aide et réconfort. Il nous faut donc engager avec ces collectivités une discussion productive, et les inclure dans les mesures que nous prenons.
     C'est une démarche qu'on applique dans le monde entier pour faire face efficacement aux terroristes et les empêcher de surgir dans la société. Je crois qu'un des aspects les plus déconcertants pour les Canadiens a été de voir apparaître du terrorisme de proximité, pas simplement des extrémistes mais des terroristes issus de communautés établies au Canada depuis longtemps. Les Canadiens sont également déconcertés de voir que des personnes nées au Canada peuvent faire de la politique radicale menant à la violence.
    Bon nombre des communautés en sont conscientes. En coopérant avec les autorités, elles appuient vigoureusement les efforts de notre gouvernement pour lutter contre le terrorisme. Dans un cas précis, je sais qu'une très grande communauté a pris contact avec le gouvernement pour signaler qu'elle était préoccupée par la participation de ses jeunes hommes au jihad et qu'elle souhaitait notre aide pour y faire face. Donc, la table ronde transculturelle et des discussions directes avec les organisations communautaires sont fondamentales pour entraver l'apparition d'un terrorisme de proximité, et aussi pour empêcher des terroristes de l'étranger d'utiliser ces communautés avec lesquelles ils peuvent avoir une affinité ethnique ou culturelle comme base d'activités terroristes.
    Merci, madame Hoeppner.
    Nous passons maintenant à M. Garrison.
    Monsieur Garrison, vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci au ministre d'être revenu. Je suis heureux qu'il ait accepté de revenir. Je suppose que nous ne le verrons pas chaque semaine, étant donné qu'il a un programme sans doute très chargé, mais il a été très généreux avec nous ces deux dernières semaines.
     Permettez-moi de dire d'emblée que l'opposition officielle approuve la stratégie du point de vue de son concept et de ses principes. Nous aurons peut-être des réserves à exprimer quant à la manière dont elle sera structurée et mise en oeuvre, mais nous pensons que c'est une bonne idée d'avoir une stratégie exhaustive comme celle-là. Nous pensons aussi qu'il est important d'avoir une stratégie efficace et adéquatement financée, et nous aurons peut-être quelques questions à poser à ce sujet aujourd'hui.
    Je suis heureux que vous ayez parlé de partenariats et de main tendue aux communautés. Je pense qu'il y a cependant un élément qui manque dans cette stratégie, et c'est l'importance de maintenir la confiance du public dans les activités du gouvernement dans ce domaine. J'y reviendrai dans un instant.
    Avant cela, je me dois de faire la remarque suivante: cette stratégie diffère considérablement de beaucoup d'autres stratégies avancées dans le domaine de la justice, en mettant l'accent sur la prévention et les poursuites. Cela me semble beaucoup plus proche de ce que nous, dans l'opposition, réclamons depuis un certain temps pour d'autres aspects de la justice où l'on a privilégié l'alourdissement des peines. Je ne peux résister à l'envie de dire que cette stratégie semble mettre l'accent sur des choses que nous aurions pu recommander.
    Passons donc maintenant aux principes, notamment à celui qu'exprime l'affirmation suivante:

Ils confirment les valeurs démocratiques du Canada. Ils fournissent une description claire de la façon dont le Canada accomplit son travail. Ils permettent également à la communauté internationale de connaître la position du Canada…
    Il y a ensuite une liste de six principes fondamentaux, le troisième étant le respect de la primauté du droit, et je veux donc interroger le ministre au sujet de la directive qu'il a adressée en septembre dernier au SCRS sur l'utilisation des informations obtenues par la torture. Dans le rapport du comité des Nations Unies sur la torture, publié le 1er  juin, les experts internationaux respectés de ce comité ont exprimé ce qu'ils appellent de graves préoccupations au sujet de cette directive qui, selon eux, porte atteinte à l'article 15 de la convention contre la torture que le Canada a signée.
    Je demande donc au ministre comment il peut justifier sa directive sur la torture, eu égard au troisième principe de sa stratégie antiterrorisme, qui est le respect de la règle de droit.
(1550)
    Merci de ces remarques.
    Je suis heureux de voir tout d'abord que nous partageons les mêmes principes de base. Cela n'est d'ailleurs pas exceptionnel étant donné que ce sont des principes largement reconnus dans le monde entier comme étant ceux à partir desquels on peut formuler une stratégie efficace contre le terrorisme.
     En ce qui concerne l'utilisation d'informations ayant pu être obtenues auprès de sources contestables par le gouvernement canadien, notamment par le SCRS, il y a différents niveaux d'utilisation de ces informations. Je peux vous dire que, même si le gouvernement condamne sans réserve le recours à la torture — nous n'approuvons jamais la torture, sous quelque forme que ce soit —, lorsque nos agences recueillent des informations indiquant que la vie de Canadiens est en jeu, nous ferions preuve de négligence si moi-même ou l'agence concernée n'utilisions pas ces informations.
    Il est très difficile, assis dans son fauteuil à Ottawa, d'examiner d'où viennent les informations et comment elles ont pu être obtenues. Si elles ont une incidence sur la sécurité de Canadiens, nous nous devons de les utiliser.
     Je ne saurais concevoir qu'un gouvernement dise ceci: « Nous venons d'apprendre que des centaines de nos concitoyens risquent d'être tués mais, comme on s'interroge sur l'origine de cette information et sur sa source, nous n'allons pas en tenir compte et laisser périr des centaines de nos concitoyens ». Je ne crois pas qu'il y ait un seul gouvernement responsable au monde qui réagirait de cette manière. Pour ma part, je peux vous dire que nous utiliserons toute information portée à notre attention indiquant que la vie de Canadiens est en péril.
    Permettez-moi cependant de vous répondre, monsieur le ministre, que l'information issue de la torture n'est souvent pas fiable. Donc, en vous fondant sur cette information, vous pourriez commettre une erreur aussi grave que si vous ne l'utilisiez pas.
     Je reviens au respect de la règle de droit. Dans la stratégie, ainsi que dans son annexe relative au cadre législatif, je ne vois aucune mention des obligations internationales du Canada. Quand vous parlez de respect de la règle de droit, voulez-vous parler aussi du respect de nos obligations en vertu du droit international?
(1555)
    Nous respecterons certainement la règle de droit et tout ce qui concerne les droits humains. Ce sont des critères fondamentaux dans notre pays et dans nos stratégies antiterroristes. Nous en tiendrons donc très certainement compte chaque fois que nous ferons quelque chose. C'est important.
    Je trouve cependant curieux que nos obligations légales internationales ne soient pas mentionnées dans ce cadre législatif. Vous n'en avez d'ailleurs pas parlé dans la réponse que vous venez de me faire.
    Il y a de nombreux aspects différents de la règle de droit. Il y a des aspects de la règle de droit qui sont locaux, intérieurs et internationaux. Ces éléments sont tous pris en compte par les agents de sécurité dans l'exercice de leurs fonctions.
    Monsieur Garrison, si vous êtes en train de me dire que, sachant qu'une convention de l'ONU a été violée mais possédant une information indiquant que la vie de Canadiens est en danger, je devrais me croiser les doigts et ne rien faire de cette information, vous vous trompez. J'agirai chaque fois qu'il faudra protéger la vie de Canadiens, chaque fois.
    Merci beaucoup.
    Nous retournons maintenant au côté gouvernemental.
    Monsieur Norlock, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président
    Merci au ministre et à ses collaborateurs de participer à cette séance.
     Le ministre pourrait-il nous donner quelques précisions sur le genre d'investissements qu’a fait notre gouvernement pour la sécurité nationale, et sur les raisons pour lesquelles il les a faits? Vous avez parlé du projet Kanishka. Je pense qu'il y en a d'autres dont vous pourriez parler. Je sais que M. Garrison a dit accepter ces mesures parce qu'il y a consultation et collaboration.
    Pourriez-vous donner des précisions sur ces investissements? Il pourrait s'agir d'investissements garantissant que nos agences collaborent efficacement. Il pourrait s'agir d'investissements touchant la manière dont nous travaillons avec les autres nations.
    Je peux vous donner une réponse très générale, afin d'expliquer dans quels domaines nous faisons des investissements, et mes collaborateurs, M. McDonald et M. Davies, pourront vous donner des chiffres.
    J'ai mentionné le projet Kanishka, issu directement de l'enquête d’Air India, qui concerne 10 millions de dollars sur cinq ans pour ce genre de recherche ciblée. C'est une activité qui a débuté en 2001 et qui n'est donc absolument pas sectaire. Je pense que c'est simplement la reconnaissance que… comme l'a dit M. Garrison quand il a indiqué qu'il pouvait appuyer les principes généraux. Je pense que même le gouvernement précédent, qui n'avait pas nécessairement de stratégie — j'allais dire cohérente mais je ne voudrais pas laisser entendre que sa politique était incohérente — unifiée, puisqu'elle était encore en cours d'élaboration. Depuis 2001, le gouvernement du Canada prend des mesures pour contrer la menace terroriste au moyen de changements législatifs, de programmes ciblés, d'enquêtes criminelles et d'autres initiatives similaires. Par exemple, nous avons créé plusieurs entités qui jouent un rôle dans la lutte contre le terrorisme, comme le Centre intégré d'évaluation du terrorisme, les équipes intégrées de la sécurité nationale pilotées par la GRC, le Centre des opérations du gouvernement et le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada. Il s'agit donc d'une démarche polyvalente.
    Nous avons aussi inscrit dans le Code criminel un certain nombre d'organisations terroristes, et il s'agit là d'une démarche continue. Nous avons déposé la Loi sur la lutte contre le terrorisme, pour renouveler dans le Code criminel les audiences d'investigation et les engagements assortis de conditions, afin d'aider les organismes policiers à faire enquête sur l'activité terroriste. Beaucoup de ces initiatives sont assorties d'investissements et participent d'une politique unifiée qui trouve son expression dans le document que nous avons déposé.
    En ce qui concerne les sommes en jeu, M. Davies peut peut-être vous donner quelques précisions.
     En arrondissant les chiffres, il y a les 10 millions de dollars sur cinq ans pour le projet Kanishka que vient de mentionner le ministre. Nous pensons que c'est un projet très important, car on ne faisait pas jusqu'à présent beaucoup de recherche sur la lutte contre l'extrémisme violent. Cette somme de 10 millions de dollars fait l'envie de tous nos alliés qui ne consacrent pas tellement de ressources à cette activité et qui s'attendent donc à ce que nous soyons en pointe, non seulement au Canada mais mondialement, pour améliorer les connaissances en la matière. Je souligne à ce sujet un investissement dans les universités canadiennes pour créer un réseau national d'amélioration des connaissances dans ce domaine.
    Plusieurs autres annonces importantes ont été faites, même dans le contexte des contraintes budgétaires rigoureuses aujourd'hui, comme l'annonce récente par le premier ministre de 367 millions de dollars sur cinq ans pour le programme de partenariat mondial, qui était à l'origine un investissement du G8 pour aider à sécuriser les installations d'armes de destruction massive à l'étranger. Cela avait débuté dans l'ex-Union soviétique et on a maintenant étendu la portée du projet pour en faire un effort majeur de lutte contre la prolifération à l'étranger et de développement des capacités par le Canada.
    Un troisième investissement un peu plus récent a été l'annonce par le premier ministre de 110 millions de dollars sur trois ans, je crois, pour les forces de sécurité nationale afghanes, afin de les aider à renforcer leurs capacités dans les années à venir.
     Comme l'a dit le ministre, les principaux investissements ont surtout été effectués pour appuyer l'obtention de connaissances par le personnel du portefeuille de la Sécurité publique, pour formuler de nouvelles politiques en collaboration avec les États-Unis, comme l'initiative Par-delà la frontière, et le plan d'action avec ses 16 engagements qui reflètent tous de nouvelles politiques. Voilà donc les principaux investissements pour l'avenir.
(1600)
    Merci beaucoup.
    Pourriez-vous nous parler maintenant de la manière dont le gouvernement entend communiquer aux Canadiens les progrès réalisés avec sa stratégie, notamment en publiant un rapport annuel sur l'évolution de la menace, ce que quelqu'un a déjà mentionné, je crois. Je me demande si vous pourriez indiquer au comité les paramètres de ce rapport annuel et, peut-être, nous donner d'autres précisions.
    Oui, c'est un engagement. Vous aurez constaté que les pages 8 à 12 de la politique font le point sur la menace terroriste actuelle, ainsi que sur la démarche pangouvernementale à ce sujet. Le gouvernement s'est engagé à mettre à jour cette analyse chaque année. Nous collaborons avec la communauté du renseignement de sécurité pour préparer la prochaine version de cette évaluation qui permettra de compléter d'autres types de rapports que vous verrez. En outre, le directeur du Service canadien du renseignement de sécurité publie dans son rapport annuel sa propre évaluation des priorités de sécurité nationale du Canada.
    Je pense que tout le monde convient que cette stratégie, qui est nouvelle, reposera sur un document en constant renouvellement. Il y a certaines choses que nous voudrons probablement y inclure dans les jours à venir, et je peux vous confirmer qu'il y a un engagement à tenir les Canadiens informés à ce sujet.
    Vous dites que ce sera un document constamment renouvelé, ce qui veut dire que les paramètres du rapport annuel n'ont pas encore été pleinement…
    Nous travaillons actuellement avec la communauté pour définir l'évaluation de la menace et la manière dont les quatre piliers seront entérinés législativement et mis en oeuvre par le truchement d'un plan d'action pour chacun des piliers.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, monsieur Norlock.
    C'est maintenant au tour de M. Scarpaleggia.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue, monsieur le ministre.
    Je voudrais avoir des précisions sur ce passage de la page 20 de la stratégie où vous dites que le Canada « doit également favoriser des échanges avec des partenaires non traditionnels avec qui il n'a pas l'habitude de collaborer ». Que voulez-vous dire par là?
    Nous faisons partie de ce qu'on appelle les Cinq-Yeux, c'est-à-dire les Australiens, les Néo-Zélandais, les Américains, les Britanniques et nous. Ce sont nos partenaires traditionnels. Nous avons cependant réalisé que la menace terroriste a une incidence sur d'autres pays avec lesquels nous n'avons pas nécessairement de relations de sécurité étroites. Certains de mes voyages à l'étranger étaient d'ailleurs destinés à consolider ce genre de relations avec d'autres pays, dans le but de passer des accords de sécurité avec eux.
    Toutefois, les accords de ce genre, même s'ils sont très importants, soulèvent de nouveaux problèmes. Comment allons-nous partager nos informations avec ces nouveaux partenaires? Ils n'ont peut-être pas tous le même type de régime démocratique que nous, par exemple. Ils n’adhèrent peut-être pas comme nous à la règle de droit. Donc, dans chaque cas, nous devons nous demander comment il serait possible de partager adéquatement nos informations avec eux.
(1605)
    J'ai cru vous entendre dire dans le passé que ces accords de partage d'informations avec ces nouveaux partenaires non traditionnels devraient être fondés sur le respect du droit des Canadiens à la vie privée, entre autres choses. Qui va décider quelle agence indépendante du gouvernement ou quelle organisation déterminera que telle ou telle entente répond au souci du Canada de protéger la vie privée de ses citoyens, ou n'est pas déraisonnable dans ce contexte? Est-ce le commissaire à la protection de la vie privée?
    En fait, c'est en grande mesure la commissaire à la protection de la vie privée qui nous indique les mesures que nous devrions prendre quand nous passons des ententes.
    Mais vous savez certainement, monsieur le ministre, que cela lui imposera une énorme charge de travail car elle sera censée examiner en détail les mesures que vous avez proposées dans le cadre du projet de loi C-30. Elle devra maintenant surveiller des ententes avec des partenaires non traditionnels, au moment même où son budget est amputé. Comment pourra-t-elle donc faire tout ce travail?
    Je n’en ai pas encore discuté avec elle. Chaque fois que mon ministère a dû traiter avec la commissaire à la protection de la vie privée, elle a toujours réagi de manière très proactive pour faire participer son bureau à l'analyse. À l'heure actuelle, elle se penche sur l'initiative Par-delà la frontière, que nous avons prise avec les Américains et qui a été signée par le premier ministre et le président.
    En effet, ce qui ne fait qu'accroître sa charge de travail. Cela fait une troisième chose dont elle doit s'occuper, ce qui confirme qu'elle a vraiment besoin de ressources supplémentaires.
    Il y a beaucoup plus que trois choses dont elle doit s'occuper.
    Non, je veux parler de trois nouvelles choses, en plus de tout ce qu'elle devait déjà faire.
    L'hon. Vic Toews: Mais…
    M. Francis Scarpallegia: J'aimerais passer un autre sujet.
    Vous avez dit que vous ne voulez pas, évidemment, que le SCRS mène des actions illégales. Vous ne voulez évidemment pas découvrir par surprise que le SCRS aurait pu agir de manière délictueuse. Par conséquent, vous devez le tenir à l'oeil, dans votre intérêt et dans celui des Canadiens, et c'est pourquoi il est tout à fait surprenant que le gouvernement élimine le poste d'inspecteur général.
    Si je ne me trompe, il y avait plus d'une vingtaine de personnes dans ce bureau qui étaient chargées de veiller à ce que le SCRS respecte la loi, pour vous éviter d'être pris par surprise. Je crois d'ailleurs que vous étiez très satisfait du rôle joué par l'inspecteur général, puisque vous avez dit en 2010 que:

L'inspecteur général joue un rôle important en matière d'examen, ce qui m'aide à remplir mes fonctions de ministre et fait en sorte que le SCRS respecte les lois et se conforme aux politiques actuelles.
    Je pense que vous avez besoin de ces ressources et je me demande simplement comment il se fait que vous n'ayez pas réussi à les obtenir, ou que vous n'ayez pas réussi à convaincre le Cabinet de préserver un service que vous estimiez important pour le bon exercice de vos fonctions.
    En fait, la réorganisation ne change rien à mon aptitude fondamentale à garder l'oeil sur le SCRS et, ce qui est encore plus important, pas seulement à garder l'oeil sur le SCRS par le truchement de la Sécurité publique. Je vous rappelle que le bureau de l'inspecteur général n'était pas un bureau indépendant puisqu'il relevait du SCRS lui-même. Ce n'était pas une entité indépendante.
    Sécurité publique peut globalement exercer la même fonction, et nous avons en outre renforcé le CSARS qui peut faire le même genre de travail que l'inspecteur général.
     La seule différence est que nous avons supprimé environ 800 000 $ de dépenses administratives par an. Nous n'avons cependant aucunement réduit notre aptitude à surveiller les activités générales du SCRS et à veiller à ce qu'il coopère.
    Mais l'inspecteur général détenait des pouvoirs très précis en vertu des articles 30 à 33 de la loi sur le SCRS, pouvoirs que le ministère, en s'autosurveillant, ne détient pas.
    De fait, ce qui est intéressant dans ce budget — qui est beaucoup, beaucoup plus qu'un plan financier pour le Canada —, c'est qu'il donne au ministère le pouvoir d'examiner les activités particulières des services et donnera au comité un rapport de cet examen, s'il estime qu'un examen par le service serait inapproprié.
    D'après moi, le ministère ne détient pas les mêmes pouvoirs que ceux que détenait l'inspecteur général au titre des articles 30 à 33 de la Loi sur le SCRS. Je pense qu'il est un peu problématique que cela figure dans un budget et que nous semblions affaiblir votre aptitude à obtenir les renseignements dont vous avez besoin.
    Je voudrais…
(1610)
    Merci, monsieur Scarpaleggia. Je suis obligé de vous interrompre ici. Vous devrez obtenir la réponse à votre question au tour suivant car votre temps de parole est écoulé.
    Monsieur Scott, vous avez cinq minutes pour le deuxième tour.
    Merci, monsieur le président, et merci, monsieur le ministre, de votre présence.
    J'aimerais vous poser quelques questions n'appelant que des réponses très brèves, avant de passer à une chose qui touche au coeur même du respect de la règle de droit, dont vous avez parlé.
    Comme l'a dit mon collègue M. Garrison, nous avons en main les conclusions récentes du Comité contre la torture, et quelques recommandations touchant l'essence même du principe de la règle de droit mentionné dans le document sur la résilience. L'une de ces recommandations, formulée de manière particulièrement vigoureuse, est que MM. Almalki, Elmaati et Nureddin soient indemnisés de la même manière, mais pas nécessairement au même niveau, que M. Arar. Il s'agit là d'un cas particulier mais qui touche au coeur même de la question du renseignement de sécurité et de ce que nous faisons quand les choses dérapent.
    Voici donc une courte question: votre ministère, en tandem avec d'autres, a-t-il l'intention de suivre cette recommandation?
    Cette question a été portée devant les tribunaux et je ne peux donc pas en parler.
    Le Comité contre la torture fait aussi référence au rapport de la commission Arar, qui est loué depuis longtemps pour ses recommandations concernant des modèles de supervision des activités nationales du renseignement de sécurité. J'aimerais que vous nous disiez rapidement si cela est toujours envisagé.
    Dans son rapport, la commission O'Connor a mentionné des modèles de surveillance. Pouvez-vous nous dire si vous avancez entièrement dans une nouvelle direction, notamment en renforçant le CSARS? Pouvez-vous nous donner des informations à ce sujet?
    En ce qui concerne le CSARS et toute cette question de supervision, je tiens à souligner que l'abolition du poste d'inspecteur général ne limite en rien mon aptitude à obtenir des renseignements du SCRS. Si Sécurité publique ne peut les obtenir, en agissant foncièrement en mon nom de la même manière que le faisait l'inspecteur général, je peux demander au CSARS de faire enquête. Donc, la supervision reste exactement la même et nous évitons 800 000 $ de dépenses administratives.
     Par suite du plan d'action de l'enquête d'Air India, nous continuerons à préserver l'efficacité des mécanismes d'examen existant déjà, comme le CSARS, la Commission des plaintes du public contre la GRC, et le Bureau du commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications.
    J'estime, par conséquent, que nous avons tous les moyens possibles d'obliger le SCRS à rendre des comptes, que ce soit par le truchement d'instructions administratives du ministère de la Sécurité publique ou par le truchement d'une requête adressée au CSARS.
    Merci beaucoup.
    Donc, si je comprends bien, votre position est assez définitive sur le système que vous souhaitez.
    En ce qui concerne la règle de droit, vous avez parlé de partenaires non traditionnels faisant partie de l'appareil transnational de partage du renseignement de sécurité. C'était la question centrale de M. Scarpaleggia.
    Nous avons acquis de l'expérience en la matière. Nous avons eu, par exemple, près de 10 années d'expérience en Afghanistan. Nous savons que le SCRS était sur place. Nous savons aussi qu'il y avait d'autres agences de renseignement. J'aimerais savoir si des études sont en cours sur les leçons retenues au sujet du SCRS ou de n'importe quelle autre agence de renseignement, du point de vue de l'obtention de renseignements en Afghanistan.
(1615)
    Je ne peux pas dire que j'ai reçu des informations spéciales concernant uniquement l'Afghanistan. J'ai reçu des informations sur beaucoup de pays et sur notre rôle à l'égard des renseignements que nous avons reçus de nombreux pays, mais je ne saisis pas très bien ce que vous voulez dire quand vous parlez de leçons. Je peux vous dire que le CSARS, le SCRS et Sécurité publique continuent d'apprendre des choses chaque jour, et que moi-même, en qualité de ministre, je continue d'apprendre des choses chaque jour.
    Je pense que le plan que nous avons mis au point fait partie de cette expérience d'apprentissage. J'ai bien aimé ce qu'a dit M. Davies quand il a parlé d'un document en constant renouvellement. Nous continuerons d'apprendre et continuerons d'améliorer la stratégie, mais nous pensons que les aspects fondamentaux de la stratégie sont valides en ce qui concerne les quatre principes que nous avons établis. Je suis heureux que les néo-démocrates approuvent ces quatre principes.
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Merci, monsieur Scott.
    Nous retournons maintenant du côté gouvernemental avec Mme Hoeppner et M. Aspin.
    Merci. Je partagerai mon temps de parole avec M. Aspin.
     Monsieur Toews, je tiens à vous remercier de l'engagement ferme que vous avez pris, et très bien exprimé, d'assurer la sécurité des Canadiens et de faire de la sécurité des Canadiens votre priorité.
    Nous vous avons convoqué aujourd'hui pour parler de notre stratégie antiterroriste. On semble mettre plus l'accent sur le SCRS et sur la supervision, ce qui est important, mais je pense qu'il est aussi important de noter que le SCRS fait un excellent travail pour notre pays. Je pense que nous sommes un modèle dans le monde entier du point de vue du travail que nous faisons. S'il est vrai que la supervision est évidemment très importante, je trouve très intéressant que l'opposition semble s'intéresser avant tout à d'éventuels soupçons à l'égard du SCRS plutôt qu'à notre stratégie.
    Je vais donc revenir à notre stratégie de lutte contre le terrorisme. Je voudrais vous interroger sur toute cette partie de notre stratégie qui concerne les listes de terroristes.
    Je voudrais vous demander — à vous ou à vos collaborateurs, s'ils préfèrent répondre — dans quelle mesure les organisations terroristes, si elles ne figurent pas sur la liste, peuvent recueillir de l'argent au Canada. Il ne s'agit donc pas tant de radicalisation directe, disons, ou d'actes violents au Canada, mais plutôt de la manière dont d'éventuelles organisations terroristes essaieraient d'utiliser le Canada pour recueillir de l'argent, et de la manière dont leur inscription sur la liste peut les en empêcher. Cela concerne autant le Canada que le reste du monde, pour ce qui est de la protection contre le terrorisme.
    Comme l'idéologie, je pense que l'argent est le nerf de la guerre pour les terroristes. Ces organisations ont absolument besoin d'argent pour mener à bien leur action diabolique.
    C'est pour cette raison que le gouvernement du Canada a adopté une démarche polyvalente en termes de mécanismes de rapport et des ententes, par exemple, que nous avons signées avec d'autres pays, notamment les Américains, au sujet de transferts d'argent suscitant des interrogations — même des choses comme la limite de 10 000 $ en termes de dépôts traversant les frontières. Il n'y a pas que le crime organisé qui a besoin de transférer de l'argent, il y a aussi les terroristes.
    La question la plus déconcertante, bien sûr, est l'intimidation de communautés au Canada même qui peuvent avoir une connexion ethnique, culturelle ou religieuse avec ces groupes terroristes, et le fait que de l'argent leur soit extorqué. Cela n'exige pas nécessairement de nouvelles lois, puisque toute forme d'extorsion est en soi illégale, qu'elle soit pratiquée par un terroriste, par le crime organisé ou par un criminel ordinaire. Ce dont nous avons besoin, surtout dans ce contexte, c'est de la coopération des membres des collectivités faisant l'objet d'extorsion. Le moyen le plus efficace de lutter contre le terrorisme, à part les enquêtes menées par les organismes de sécurité, c'est la collaboration des communautés concernées.
    Je pense que M. McDonald a quelques mots à ajouter.
     Les efforts déployés pour combattre le financement terroriste sont un exemple extrêmement bon des efforts internationaux et nationaux qui s'imbriquent pour atteindre un objectif. Depuis les événements du 11 septembre, c'est l'un des principaux objectifs de la communauté internationale, avec le Conseil de sécurité des Nations Unies qui a commencé à dresser la liste de certaines entités associées à Al-Qaïda et aux Talibans, et avec des pays qui mettent en oeuvre ces efforts dans leurs lois nationales pour traiter ces entités listées par les Nations Unies de manière collective et les mettre en action dans leurs lois.
    Très brièvement, les listes permettent d'atteindre deux principaux objectifs. Premièrement, comme l'a dit le ministre, elles coupent les vivres, la possibilité de se financer. De cette manière, et c'est l'un des piliers de la stratégie, nous empêchons les terroristes de recueillir des fonds pour se financer. Mais nous tenons compte aussi du soutien. Vous constaterez, dans la liste du Code criminel, qu’il y a des dispositions indiquant qu'appuyer une entité terroriste ou fournir des fonds, par exemple, à une entité terroriste est une infraction.
    Vous prenez donc un effort international très collectif pour l'ajouter à un effort national et atteindre en même temps deux objectifs très efficaces.
(1620)
    Merci beaucoup.
    Il vous reste une vingtaine de secondes.
    Ça va, monsieur le président. Nous aurons peut-être un deuxième tour.
    Très bien.
    Madame Doré Lefebvre, vous avez cinq minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci, monsieur le ministre. C'est très gentil de revenir témoigner devant le comité.
    Je vais vous poser une question sur le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité. Je comprends que vous avez une très grande confiance envers ce comité, mais je me demande pourquoi le poste de président est toujours vacant sept mois après la démission du dernier président. Il y a eu des allégations de conflit d'intérêts à cause de ses liens avec des revendeurs d'armes internationaux.
    Cela fait quand même sept mois qu'il n'y a plus de président. Pourquoi n'est-il pas remplacé? Avez-vous des plans en ce sens?

[Traduction]

    Oui. C'est une décision du gouvernement qui sera prise par le Cabinet.
    Je conviens avec vous qu'il devrait y avoir là un président permanent. Je suis très satisfait du président suppléant mais, si nous voulons assurer la continuité et la mise en oeuvre de son propre programme, je pense qu'un président permanent est toujours préférable.

[Français]

    Avez-vous fixé une échéance? Cela prendra-t-il du temps avant que ce comité ait un nouveau président permanent?

[Traduction]

    C'est une décision que prendra le Cabinet.

[Français]

    On nous a remis un document sur la Stratégie antiterroriste du Canada de votre ministère. Je suis d'accord sur plusieurs points, qui se trouvent surtout dans les annexes. Par exemple, je conviens de l'importance des agents des services frontaliers dans la gestion du terrorisme au Canada.
    Cependant, le dernier budget prévoit des compressions de 143 millions de dollars dans les postes d'agent des services frontaliers. Comment allons-nous réussir à maintenir un service fort ou le renforcer, si on sabre dans le budget de l'Agence des services frontaliers du Canada?

[Traduction]

    Comme les autres organismes publics, Sécurité publique et les agences qui en relèvent ont toutes dû revoir leurs programmes dans le but d'assurer l'utilisation la plus efficace possible de leurs ressources.
    N'oubliez pas que Sécurité publique a été l'un des plus gros bénéficiaires de deniers publics ces dernières années, surtout depuis 2006. De fait, nous avons augmenté de 26 p. 100 le nombre d'agents frontaliers depuis notre arrivée au pouvoir. C'est une hausse très, très importante.
     Les services frontaliers de première ligne ne sont aucunement pénalisés. De fait l'exercice du PARD, le Plan d'action pour la réduction du déficit, était axé sur la réalisation d'économies administratives sans réduire les services de première ligne.

[Français]

    Donc, vous pouvez nous assurer qu'aucun poste d'agent de première ligne ou d'agent des services frontaliers ne sera éliminé.

[Traduction]

    Nous n'allons pas mettre en danger l'efficacité des efforts substantiels que nous avons déployés sur la première ligne.

[Français]

    D'accord.

[Traduction]

    Il y a toujours de nouvelles manières d'utiliser les ressources. Par exemple, l'une des choses que nous faisons par suite de l'initiative Par-delà la frontière est de voir comment nous pouvons gérer plus efficacement cette frontière. Ma crainte, bien sûr, est que de nombreux petits passages frontaliers ne sont pas nécessairement justifiés sur le plan économique. Pourtant, ils sont essentiels à la vie de nombreuses petites collectivités, au nord et au sud de la frontière.
    Comment pouvons-nous travailler avec les Américains pour les garder ouverts? Nous examinons cette question de très près, notamment sur le plan de la technologie et du partage de services et d'installations. Nous partageons déjà des installations dans certains contextes. Peu de gens savent qu'il y a des installations frontalières partagées entre le Yukon et l'Alaska, Américains et Canadiens travaillant dans les mêmes locaux, pour ainsi dire. Si je me souviens bien, c'est au poste frontalier de Little Gold Creek.
     Si la technologie et le partage des services permettent de réduire les dépenses d'infrastructures, je pense que nous pourrons préserver le plus possible ces postes d'agents de services frontaliers. Nous avons eu une augmentation de 26 p. 100, et je n'ai aucunement l'intention de réduire les services de première ligne, quels qu'ils soient. Par exemple, j'ai déjà dit que je voulais conserver les chiens aux frontières car ce sont essentiellement des chiens renifleurs de drogues.
(1625)
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Merci, madame Doré Lefebvre.
    C'est maintenant au tour de M. Aspin, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le ministre, d'être revenu si rapidement.
    Je pense qu'il s'agit là d'une grande initiative et je vous félicite de faire preuve d'un tel leadership.
    L'opposition a critiqué ceux qui travaillent pour protéger les Canadiens contre les menaces les plus graves, souvent en s'exposant à de grands risques personnels. Pourriez-vous dire au comité comment cette stratégie continuera de permettre au Canada de coopérer avec ses alliés pour lutter contre le terrorisme et pour protéger les Canadiens conformément aux lois canadiennes?
    L'expérience d’Air India nous a vraiment beaucoup appris. Ce fut un événement horrible, tout à fait horrible, mais l'une des choses qu'il nous a apprises a été de réagir efficacement au terrorisme.
    Dans le monde moderne, le terrorisme ne connaît pas de frontières nationales. Il est international, et il arrive parfois que des individus lancent des actions terroristes purement individuelles. À l'époque d'Internet, le lieu d'origine n'a pas vraiment d'importance. On peut se radicaliser. On peut participer à un acte terroriste criminel. On peut coordonner les attaques. Ce que j'ai retenu de l'enquête d’Air India, et de l'enquête Arar, et de la Commission Major — si c'était bien ça, car je perds parfois le fil des commissions, même si elles font un excellent travail —, c'est la nécessité de partager des renseignements avec nos alliés et d'autres qui partagent nos préoccupations sur la menace terroriste.
    Nous partageons ces renseignements pour entraver l'activité des terroristes. Cela a été une expérience extrêmement positive. En même temps, j'estime que nous sommes restés fidèles à la règle de droit et au respect des droits humains, car je ne pense pas que protéger vigoureusement l'ordre public dans la lutte contre les terroristes soit contraire à la règle de droit et aux droits humains. De fait, réprimer vigoureusement le terrorisme préserve les droits humains et la règle de droit dont nous jouissons. Donc, je pense que le partage de renseignements est l'un des aspects les plus importants.
    Le deuxième élément est le partage des ressources. Le programme Shiprider lancé par les Libéraux en 2005 sous forme de projet pilote a extrêmement bien fonctionné. Les Canadiens et les Américains sont sur le même bateau dans les Grands Lacs et ne sont pas entravés par les frontières car ce bateau peut traverser une frontière et, dès qu'il entre dans les eaux canadiennes, c'est un officier canadien qui en prend le commandement. De même, dans les eaux américaines, ce sont les Américains qui commandent. Ces agents ont reçu une formation commune afin d'assurer qu'il se comportent adéquatement dans le respect des lois particulières de chaque pays. Cela a très bien fonctionné, notamment dans le cadre des Jeux olympiques de Vancouver. Évidemment, c'est pourquoi nous proposons une loi sur le programme Shiprider, qui a été très efficace à mon avis.
    C'est donc une question de partage de renseignements, de partage de ressources, et de répression d'une menace terroriste commune.
(1630)
    Merci, monsieur le ministre.
    Il vous reste une minute. M. Rathgeber veut peut-être l'utiliser?
    L'hon. Vic Toews: Je devrais préciser…
    Le président: Le ministre Toews souhaite utiliser cette minute.
    C'était le juge O'Connor qui dirigeait l'enquête Arar et, bien sûr, le juge Major qui dirigeait l'enquête Air India. Je suis désolé si j'ai suscité de la confusion.
    Monsieur Rathgeber, voulez-vous poser une question maintenant ou attendre le tour suivant?
    Je constate que la première heure, prévue avec le ministre, est terminée. Le ministre s'était engagé à nous consacrer une heure et je crois que M. Davies et M. Macdonald restent avec nous.
    Je ne vais pas suspendre la séance mais vous remercier immédiatement d'avoir bien voulu comparaître devant le comité pour répondre à nos questions. Nous vous sommes très reconnaissants d'être revenu devant le comité, monsieur le ministre.
    Je remercie les membres du comité, des deux côtés de cette table, d'avoir posé des questions très intéressantes, et j'espère que mon témoignage vous a donné une meilleure idée de la position du gouvernement sur ces questions.
     Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous continuons immédiatement cette séance, sans interruption.
     Monsieur Rousseau, c'est à vous.

[Français]

    Vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je présume que vous saurez répondre aussi efficacement que M. le ministre.
    Nous sommes préoccupés notamment par le fait qu'à la page 10 de l'énoncé de la Stratégie antiterroriste, on parle des environnementalistes comme de groupes extrémistes d'origine intérieure. Le mois dernier, les journaux nous apprenaient également qu'une coalition des Premières nations de la Colombie-Britannique avait été mise sous surveillance par la GRC à cause de son opposition affirmée au projet de pipeline Northern Gateway de la compagnie Enbridge.
    J'ai la désagréable impression que la Stratégie antiterroriste est utilisée par le présent gouvernement pour diaboliser des groupes dont les revendications sont légitimes et qui ne représentent pas une réelle menace à la sécurité des Canadiens. En politique, il est normal que des groupes de pression s'opposent directement au gouvernement ou à ses politiques. Stigmatiser et diaboliser tous ces groupes, c'est comme museler...

[Traduction]

    Un instant, s'il vous plaît.
    Voulez-vous faire un rappel au règlement, madame Hoeppner?
    Si je ne me trompe, et je vous demande confirmation, les collaborateurs du ministre restent ici pour donner des informations directes, pas pour exprimer des avis sur des questions de fond ou des questions d'ordre politique.

[Français]

    Ce sera une question.

[Traduction]

    Pouvez-vous rendre une décision à ce sujet, monsieur le président?
    Oui, je sais. Il a fait référence à la page 10 de la stratégie.

[Français]

    Oui, oui, c'est écrit dans le document.

[Traduction]

    J'ai bien écouté, mais c'était en référence à un passage de la stratégie qui nous a été présentée.

[Français]

    C'est quand même écrit dans le document.

[Traduction]

    C'est exact, les représentants du ministère ne sont pas censés répondre à des questions à caractère politique.

[Français]

    Je comprends très bien cela, il n'y a pas de problème, mais je fais surtout référence au fait qu'en politique, il est normal qu'il y ait des opposants à un régime.
    Pouvez-vous m'expliquer comment des groupes qui défendent pacifiquement l'environnement ainsi que des groupes autochtones qui défendent leurs terres ancestrales sont considérés comme des menaces à la sécurité nationale? Comment se fait-il qu'on devra consacrer des ressources et de la main-d'oeuvre à la surveillance de ce que nous considérons comme les mauvaises cibles?

[Traduction]

    Merci de la question.
    Je veux d'abord réitérer une remarque que le ministre a faite plusieurs fois, à savoir que l'activité politique ou la protestation légale, quel que soit son caractère, est un droit fondamental au Canada. Je ne pense pas qu'il y ait quoi que ce soit dans la stratégie qui aille à l'encontre de cette règle.
    En réalité, je pense qu'il y a dans la stratégie une distinction entre l'activité légitime et l'activité criminelle. Il y a une référence au militantisme environnemental, et je pense qu'elle est précédée d'un qualificatif concernant la violence reliée à ce genre d'activité. La réalité est qu'il y a eu six attaques contre des pipelines de gaz naturel au Canada ces dernières années, ce qui signifie que c'est une menace réelle.
     L'autre remarque que j'ai faite plus tôt est que nous avons pris l'engagement de mettre à jour annuellement cette évaluation de la menace. Dans ce contexte, nous examinerons cette situation pour voir si cette affirmation reste valide. Cela dit, je répète qu'il n'y a rien dans la stratégie ou rien dans les déclarations qui ont été faites qui permette de penser que l'activité ou la protestation légale est illégitime.
(1635)

[Français]

    Quand on pense à ce qui est arrivé à Toronto il y a quelques jours, pour nous, les gangs de rue représentent vraiment un danger pour la sécurité publique. Sont-ils toujours considérés comme des groupes terroristes ou dangereux pour la société?

[Traduction]

    Non, je pense qu'ils sont considérés comme des groupes criminels. Si c'était une question à caractère fédéral, la GRC interviendrait, mais je suppose que ce cas relève de la police de Toronto. Je ne peux rien ajouter à ce sujet.
    Allez y, monsieur McDonald.
    Outre ce que vient de dire mon collègue M. Davies, je pense qu'il importe de souligner que le Code criminel est parfaitement clair sur les infractions criminelles reliées au terrorisme, notamment l'appui et la facilitation de l'activité terroriste, et sur ce qu'est concrètement une activité terroriste. En outre, les conventions internationales et les protocoles des Nations Unies, auxquels le Canada souscrit, indiquent très clairement quelles activités sont des activités terroristes. Il y a aussi l'aspect légal du droit pénal dont il faut tenir compte.

[Français]

    Euh...

[Traduction]

    Il vous reste un peu de temps.

[Français]

    C'est bien.
     La stratégie constitue-t-elle une nouvelle approche dans la lutte contre le terrorisme? Si on considère les plans d'action, la structure hiérarchique et la répartition des ressources, comment va-t-on faire pour s'assurer qu'il y a une bonne collaboration et une bonne synergie entre tous les ministères, les groupes d'intérêt, et les corps policiers provinciaux et fédéraux? Comment peut-on s'assurer qu'il y aura vraiment un échange d'information clair et efficace entre les différents groupes?

[Traduction]

    C'est une bonne question. Je pense qu'elle concerne le plan de travail de la direction générale de la sécurité nationale, de Sécurité publique, pour l'année à venir. Notre rôle à partir de maintenant est de passer à la mise en oeuvre.
    Dans ce contexte, nous nous penchons sur chacun des piliers. Nous avons dressé des plans de travail clairs pour chacun d'entre eux. Ils sont fondés sur les principes, le partenariat que vous avez évoqué, pas simplement le portefeuille de Sécurité publique et de toute la communauté du renseignement de sécurité, mais aussi les provinces, les municipalités, les organisations non gouvernementales, le secteur privé, etc., pour déterminer ce que nous allons faire à l'égard de chacun de ces piliers, du point de vue de l'établissement de priorités d'ordre législatif, de politiques publiques, de programmes, etc. Ce sera une partie très importante de notre travail dans les douze prochains mois.

[Français]

    Me reste-t-il encore du temps, monsieur le président?

[Traduction]

    Non, votre temps de parole est écoulé.
    Nous retournons maintenant du côté gouvernemental avec M. Rathgeber.
    Merci, monsieur le président.
     Merci aux deux collaborateurs du ministre.
    Pour revenir à la question que vient de poser M. Rousseau au sujet du partage des renseignements et de la coordination de la réponse, je constate qu'il y a à l'annexe A du document intitulé Renforcer la résilience face au terrorisme, une liste d'au moins 20 organismes fédéraux qui ont quelque chose à voir avec la lutte contre le terrorisme, comme Services frontaliers, la GRC, le SCRS, Santé Canada, Finances Canada, et j'en passe.
    Comment sont-ils coordonnés? Comment fonctionnent-ils ensemble? Y a-t-il un chef de file et y a-t-il dédoublement de services et de tâches, avec tous ces organismes chargés d'agir dans le même domaine?
    Je vais vous répondre du point de vue de la politique générale, après quoi M. Macdonald pourra vous parler de l'aspect opérationnel.
    En ce qui concerne la politique générale, tout dépend du problème considéré. Si l'on parle de questions de sécurité nationale reliées à l'admissibilité, cela relève d'un groupe différent. Mais c'est un groupe très similaire à ce qui est mentionner ici, en ce qui concerne la lutte contre l'extrémisme violent, par exemple, quand on élargit le groupe au-delà du monde traditionnel du renseignement de sécurité pour inclure des ministères comme Patrimoine canadien, Ressources humaines et Développement des compétences Canada, etc.
    Sécurité publique est le chef de file à l'égard de beaucoup de ces questions, du fait des nombreuses manières dont elles touchent la sécurité nationale, du point de vue de la coordination et de l'exploitation de l'expertise au palier fédéral et du travail avec les provinces, entre autres. Le Bureau du Conseil privé joue également un rôle essentiel avec le conseiller national pour la sécurité.
    Il y a typiquement des groupes de travail, comme vous pouvez l'imaginer, avec beaucoup de participants, et les informations remontent vers le directeur, le directeur général, le sous-ministre adjoint puis le sous-ministre. Il y a différents comités, selon la nature du problème, qui dispensent des avis au Cabinet. Nous passons une bonne partie de notre temps à coordonner avec d'autres ministères et organismes, c'est certain.
(1640)
    Les groupes de travail fonctionnent bien dans des situations de cette nature mais, s'il y a un problème appelant une réaction immédiate, comme le 11 septembre 2001, qui en assume la responsabilité? Quel est l'organisme en pointe? Qui est chargé de coordonner la réaction du Canada?
    Après le pilier de la prévention, ce que vous demandez, c'est comment on passe à la réaction… C'est une très bonne question. En fait, le gouvernement a le plan fédéral d'intervention d'urgence, qui est le document guidant la manière dont il réagirait à un événement touchant l'intérêt national, et c'est alors Sécurité publique qui serait au coeur des opérations, par le truchement du Centre des opérations du gouvernement.
    Chaque ministère et organisme a son propre mandat législatif et s'acquittera de ses fonctions en conséquence. Toutefois, à partir du premier ministre et jusqu'en bas de la hiérarchie, le plan fédéral d'intervention d'urgence est structuré de manière telle que les décideurs se réunissent, généralement au niveau de sous-ministre adjoint, de sous-ministre, puis du Cabinet. Ils reçoivent des informations, des notes de décision et des notes factuelles sur ce qui se passe en situation de crise. En vertu de leurs mandats respectifs, les ministres sont chargés d'assumer leurs activités mais, globalement, c'est Sécurité publique, par le truchement du Centre des opérations du gouvernement, qui est le noyau des activités, qui prend les informations et les transmet au Cabinet et, en bout de ligne, au premier ministre, s'il y a lieu.
    Est-ce que le Centre des opérations du gouvernement organise des répétitions en temps réel?
    Le Centre des opérations du gouvernement est constamment sur le pied de guerre. Il fonctionne 24 heures sur 24, sept jours par semaine, et organise constamment des exercices et, dans le cadre des exercices, des répétitions. Par exemple, en ce qui concerne le protocole d'incident aérien, qui est un protocole prévoyant la réaction du gouvernement à une menace aérienne, il tient parfois jusqu'à deux ou trois répétitions par semaine afin d'être toujours prêt.
    Comme nous le savons tous, dans l'activité policière, l'application des lois, le renseignement de sécurité ou l'environnement militaire, la clé du succès est de répéter le plus possible les mesures d'intervention.
    Me reste-t-il du temps?
    Il vous reste une minute.
    Je vais donc changer de sujet pour aborder la vieille question de la cybersécurité et des cybermenaces. J'ai rapidement survolé le document mais n'y ai rien vu à ce sujet.
     Pouvez-vous me dire si l'on traite dans ce document ou ailleurs de la perspective d'une cybermenace, d'un ver informatique ou d'un virus pouvant causer une panne dans une centrale électrique ou dans un système de contrôle de la circulation aérienne? Selon Santé publique, la menace informatique est-elle une véritable menace à notre sécurité nationale?
    Monsieur MacDonald.
     Pour répondre à cette question, monsieur le président, je rappelle l'objet fondamental de cette stratégie: contrer le terrorisme sous toutes ses formes, sous toutes ses menaces. La sécurité informatique est en soi une question qui préoccupe vivement le ministère de la Sécurité publique. De fait, celui-ci assume la responsabilité d'une stratégie idoine, et serait le centre de réaction en cas d'incident critique touchant l'informatique. Toutefois, tout cela doit être le résultat d'une menace, au sens nous devons avoir des terroristes provoquant une menace touchant la sécurité informatique, et non pas d'autres individus.
    C'était ce que je demandais.
    Merci. C'est l'un des sujets qui intéressent vivement le comité. Il a déjà été soulevé mais nous savons bien peu de choses à cet égard. Nous serions ravis d'en apprendre un peu plus à ce sujet ultérieurement.
     En attendant, c'est M. Scott qui a la parole.
    Cela tombe bien car mes questions portent précisément là-dessus.
    Je pense que M. Rathgeber a raison, on ne semble pas en parler beaucoup dans la stratégie de résilience.
    Dans la discussion concernant l'infrastructure informatique, il n'y a aucune mention d'un projet de loi que le ministère parrainait à l'évidence au moment même où il préparait ce rapport, c'est-à-dire le projet de loi C-30 sur la surveillance d'Internet. Aujourd'hui, on appelle ça la loi sur les prédateurs d'enfants, ou quelque chose comme ça, mais il s'agit en fait de tous les crimes et de toutes les enquêtes criminelles dans lesquelles des données électroniques sont pertinentes. Il ne s'agit pas seulement des prédateurs d'enfants. C'est l'une des leçons que nous avons tirées de tout cet épisode.
     Voici une brève question: comme vous tentez d'appliquer une démarche assez intégrée, holistique, est-ce que le projet de loi C-30 fait partie intégrante de la stratégie antiterroriste énoncée dans ce document?
    Les pouvoirs figurant dans l'ébauche législative actuelle, le projet de loi C-30, sont une partie du casse-tête critique de tous les efforts de lutte contre le terrorisme, du point de vue de cette stricte interprétation, oui.
(1645)
    Y a-t-il une raison quelconque pour laquelle cela n'a pas été mentionné, ou pourquoi la question de la sécurité informatique n'est pas traitée de manière plus complète dans ce document? Est-ce simplement parce qu'on n'en est qu'au début… Je songe seulement à l'interconnexion holistique de…
    Oui, je crois qu'on fait référence dans la stratégie à l'intérêt des terroristes à employer Internet pour faciliter les attaques. Je me trompe peut-être mais, comme cette menace évolue rapidement, c'est une chose que nous voudrons noter dans la prochaine version de l'évaluation des menaces.
    Il est certain que dans le pilier « empêcher » et la lutte contre l'extrémisme violent, l'une des grandes questions est l'emploi de l'Internet et des médias sociaux comme outils de recrutement, de financement et de propagande. Du point de vue des politiques sur lesquelles nous travaillons, au moins, c'est une chose que nous souhaitons mieux connaître, et elle occupera une place plus importante dans les jours à venir, c'est certain.
    Cela m'amène à la question suivante.
     Il est dit à la page 39 du document qu'il est devenu nécessaire, après le 11 septembre, d'adopter « des lois plus sévères contre la propagande et les crimes haineux ». Certains d'entre nous sommes très préoccupés par le fait que le projet de loi C-304 est sur le point d'être adopté, car c'est un texte qui abroge les dispositions de répression de la propagande haineuse de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Il porte sur les appels robotisés et les sites Web propageant la haine.
     Dans le rapport, les groupes de suprématie blanche sont qualifiés de groupes de terrorisme locaux qui pourraient être préoccupants, ou de groupes pouvant déboucher sur le terrorisme. Dans tout cet exercice de planification, j'aimerais savoir si ce projet de loi C-304 est apparu à un moment quelconque sur l'écran radar de Sécurité publique. Comme c'est un projet de loi d'initiative privée, il se peut fort bien qu'il soit passé inaperçu.
    Tout d'abord, il y a un certain délai entre le moment où ces documents sont rédigés et celui où ils sont publiés. Celui-ci a été publié en février mais il avait été en grande mesure rédigé l'été et l'automne derniers, ce qui veut dire que…
    Le projet de loi a été déposé il y a un an, cependant.
     Vous n'en avez pas connaissance?
    Non.
    Bien. Merci.
    J'ai une dernière question, pour obtenir un éclaircissement.
    Me reste-t-il au moins une minute, monsieur le président?
    Il vous reste une minute et demie.
    Très bien. Merci.
    Je lis en bas de la page 10 que:
Certains groupes terroristes ont des liens plus explicites au Canada… Bien que la guerre civile au Sri Lanka soit terminée, il est important d'empêcher les membres des TLET…
    ... les Tigres de libération de l'Élam tamoul...
de se réfugier au Canada… Par exemple, en mai 2010…
    ... un certain individu...
collecteur de fonds des TLET a été condamné pour financement d'activités terroristes au Canada.
    Je tiens à préciser que les crimes pour lesquels il a été condamné en 2010 ont été commis en 2008, avant la fin de la guerre, en 2009. Y a-t-il une raison particulière pour avoir inclus cette mention très précise dans ce document, en nommant précisément cette personne, un certain groupe terroriste, au sujet de crimes qui n'ont rien à voir avec la résurgence des TLET après la guerre? Est-ce en fait l'indication que nous pensons que les TLET sont en train de se reconstituer au Canada?
    Je pense qu'il me sera nécessaire de vous répondre plus tard. J'imagine que c'est quelque chose qui avait à voir avec le fait que les TLET sont une entité inscrite, et nous devrons donc… Vous venez de soulever un exemple très précis et je préférerais faire des vérifications avant de vous répondre.
    D'accord.
    Vous pouvez faire une très brève déclaration, monsieur Scott.
    D'accord.
    Une courte question, alors.
    Juste une déclaration.
    Comme je n'ai pas de déclaration, j’en reste là.
    Très bien, il vous reste 10 secondes.
    Nous retournons au côté gouvernemental avec Mme Young, pour cinq minutes.
    Je tiens à vous remercier d'être ici aujourd'hui pour répondre à nos questions.
    Considérant toute votre expérience — et ceci a été largement rapporté —, y a-t-il certains facteurs stratégiques qui changent la menace terroriste au Canada ou internationalement?
    Je vais commencer et M. Davies complétera peut-être ma réponse.
    Je pense que vous soulevez un point très important sur la nature même du terrorisme et de la menace terroriste. L'objectif ultime des terroristes est de mener leurs activités pour atteindre leur objectif. Ils changent constamment. Chaque effort entrepris par un pays ou par une coalition de pays est exactement ce qu'attend l'entité terroriste pour changer et s'adapter. Son but ultime est d'atteindre tout ce qu'elle essaye d'atteindre en utilisant n'importe quel moyen, barbare ou non, pour l'atteindre. Une bombe humaine est un excellent exemple du degré de barbarie que cela peut parfois atteindre, et du degré de dévouement des personnes concernées.
    Les facteurs stratégiques fluctuent constamment, en fonction de la solidité du groupe concerné, de son niveau de financement, de son niveau d'armement et de son lieu d'opération. Dispose-t-il d'un refuge quelconque pour opérer ailleurs? Très franchement, la pression que la communauté internationale peut exercer sur le groupe changera aussi sa nature. Le défi des organismes de renseignement et d'exécution des lois est donc précisément d'essayer d'anticiper ce changement. Cela nous ramène encore une fois aux piliers « empêcher » et « priver » de la stratégie.
(1650)
    Le principal facteur mentionné dans la stratégie est la mondialisation et la rapidité avec laquelle des interconnexions sont établies d'un bout à l'autre de la planète, à la fois grâce aux médias sociaux et à la technologie, mais aussi en termes de réseaux de financement. Je pense que c'est pour nous un aspect important. Que l'on parle de réseaux d'approvisionnement ou de réseaux de financement, ces choses-là changent constamment et il nous appartient de suivre ces tendances, qu'il s'agisse de nouvelles techniques, de nouvelles politiques, ou de législation, pour nous assurer que les choses sont constamment à jour.
    Nous étions hier au Sénat pour parler du projet de loi S-9 sur le terrorisme nucléaire, et il y a eu le même genre de débat sur la lutte contre la prolifération que nous avons aujourd'hui sur la lutte contre le terrorisme. Certains groupes sont vivement intéressés à garder une longueur d'avance, à trouver les failles.
     La mondialisation et la rapidité avec laquelle les individus peuvent être en contact les uns avec les autres pour partager des informations et des techniques constituent un gros défi.
    Considérant la place du Canada dans le monde et, comme vous dites, la globalisation rapide du monde — et ceci est évidemment un nouveau document et une nouvelle initiative qui semble tout à fait exhaustive —, y a-t-il des choses que nous devrions aussi examiner à échéance de 10 ou 20 ans du point de vue des politiques ou des opérations?
    C'est une bonne question. Je pense qu'une des choses qu'on peut dire sans crainte de se tromper est que ce que nous considérons comme menace aujourd'hui ne sera pas la menace dans 10 ou 20 ans. En tant qu'auteurs de politiques publiques, je pense que notre position est toujours que rien n'est statique. Il y a 10 ans, en tout cas avant le 11 septembre, la manière dont nous envisagions les menaces était bien différente de celle d'aujourd'hui. Nous postulons que les choses seront très différentes dans 10 ans et que la structure de la communauté du renseignement et de la sécurité, ainsi que son architecture et sa gouvernance, devront peut-être aussi s'adapter à l'évolution de la menace.
     Il est difficile de prévoir 10 ans à l'avance. Je pense que nous avons tendance à voir trois ou cinq ans à l'avance. Si l'on va plus loin, l'incertitude domine, c'est sûr.
    Nous avons vu qu'il y a des groupes terroristes opérant au Canada. Nous en avons aussi certainement entendu parler.
     Pourriez-vous nous donner quelques exemples de ces groupes et du degré d'efficacité de notre travail — et du vôtre, évidemment — pour contrer et atténuer leur impact?
    Très brièvement, nous avons parlé, par exemple, de l'inscription des entités terroristes sur la liste des organisations criminelles, et du fait que geler leurs biens pour leur couper les vivres est crucial. Je n'ai pas le chiffre exact en tête mais je pense qu'il y a quelque chose comme un quart de million de dollars qui sont actuellement gelés dans des établissements financiers canadiens. Ces entités figurent toutes sur la liste qui a été dressée par le ministre au titre du Code criminel ou d'autres listes de sanctions de l'ONU nommant explicitement… Diverses poursuites sont en cours devant les tribunaux pour s'attaquer et poursuivre ceux qui commettent des infractions terroristes.
     Le Canada est une cible du terrorisme. Comme l'a dit John, l'environnement de la menace change, ce qui fait que le fonctionnement de certains groupes terroristes change aussi et que leur présence ou leurs liens au Canada peuvent changer avec le temps. Je le répète, c'est un domaine qui fluctue constamment.
    Je pense que ce sont là deux exemples concrets.
    Merci, monsieur McDonald.
    Nous passons maintenant à M. Scarpaleggia, pour cinq minutes, avant de retourner à…
    Merci beaucoup, monsieur le président.
     En un mot, quelle est vraiment la différence entre cette stratégie et ce qu'on faisait avant?
     Nous ne sommes évidemment pas restés les bras croisés depuis 2001. Il y a eu de la coordination. Il serait faux de dire qu'on vient soudainement de découvrir la coordination. Est-ce que nous nous sommes réveillés récemment en disant: « Et bien, dites donc, nous n'avons pas fait ceci. Nous devrions faire cela »?
    Qu'y a-t-il vraiment de différent dans cette stratégie? Est-ce simplement une consolidation de ce qui se faisait avant, avec un peu de prospective et de planification de mesures à prendre à l'avenir? Qu'y a-t-il vraiment au coeur de tout cela?
(1655)
    C'est une bonne question. Je pense que c'est la première fois qu'on présente une analyse pangouvernementale des menaces auxquelles le Canada et les Canadiens sont confrontés. C'est la première fois que les principes essentiels de la communauté du renseignement de sécurité sont énoncés ensemble, ce qui est un accomplissement important, à mon avis. À première vue, cela peut vous paraître banal mais faire en sorte que 12 à 15 membres de la communauté du renseignement de sécurité énoncent dans un seul endroit les principes que nous respecterons…
    Au fond, il s'agit seulement de rassembler sous l'égide de Sécurité publique…
    C'est un rassemblement de démarches pour le gouvernement, au nom du gouvernement.
    Oui, au nom du gouvernement.
    En outre, si vous prenez le cadre conceptuel, c'est la première fois que nous avons mis ensemble les principes organisateurs qui nous aideront à fixer les priorités pour l'avenir.
    Dans un sens, c'est vrai que c'est le rassemblement de choses qui existent depuis un certain temps. Dans le monde de la sécurité nationale, il est certain que la plupart des Canadiens ne sont pas complètement au courant de toutes les lois et institutions qui existent — et c'était là un aspect important — et de ce qu'est la menace pour eux et aussi pour nos alliés. Bon nombre de nos alliés ont des choses similaires. Les leurs ne sont pas exactement comme cette stratégie mais elles sont similaires. Avoir quelque chose comme cela que nous pouvons concrètement mettre en mains est un outil très important pour nous…
    Depuis combien de temps dure cette consolidation, si je peux dire, des ressources gouvernementales? Ce plan est-il le point culminant d'un processus de 5 ans ou d'un processus de 10 ans, ayant commencé en 2001?
    Ce que vous avez sous les yeux a pris environ un an et demi à rassembler. Je ne sais pas si l'on peut faire une analyse rétrospective pour voir ce qui existait déjà et ce qui n'existait pas mais, en termes d'effort, ce fut un effort de tout le gouvernement. Il a fallu environ un an et demi pour produire ça.
    Fonctionnez-vous à un niveau élevé de… pas d'abstraction mais de gouvernance et de coordination? Ou allez-vous vraiment dans le détail des choses, comme la protection de notre infrastructure d'approvisionnement en eau, par exemple?
    J'étais à une conférence il y a un an et demi où un expert anglais avait sécurisé toutes les usines d'épuration d’eau du pays contre la menace de terrorisme ou de simples méfaits. Il avait des contrats avec d'autres pays. Il m'a dit très franchement qu'ils n'en sont pas encore là.
    Êtes-vous conscient de cet aspect des choses, aussi? Êtes-vous aussi conscient des questions de sécurité des aéroports? En 2005, j'ai eu l'occasion d'aller en Israël avec le ministre libéral des Transports pour faire enquête sur la sécurité du réseau de transport: aéroports, ports et autobus.
     Cela a-t-il été pris en compte dans cette stratégie? Est-ce que toute cette information est intégrée à cette stratégie? Vous occupez-vous de ce genre de choses?
    Je vais commencer et Mike pourra compléter ma réponse.
    En ce qui concerne l'infrastructure critique, comme les systèmes d'approvisionnement en eau, il y a un plan, un plan d'infrastructures critiques, pour le Canada. Vous ne voyez que la moitié de la direction générale de la sécurité nationale du ministère. Les autres éléments sont la cybersécurité et l'infrastructure critique. Il y a un plan très détaillé au palier fédéral pour travailler avec les provinces afin de protéger l'infrastructure critique. Il y a aussi, dans l'entente Par-delà la frontière, des arrangements et des accords pour collaborer plus avec les États-Unis sur cette question.
    Pour ce qui est de la sécurité de l'aviation, Sécurité publique — mon groupe en particulier — pilote le programme de protection des passagers. Nous jouons un très grand rôle dans ce domaine de la sécurité de l'aviation, évidemment avec le ministère des Transports, qui est plus l'opérateur de première ligne pour la gestion de la sécurité.
     Il est difficile de tout intégrer à une seule stratégie. Bon nombre de ces éléments particuliers découlent en cascade. Nous pourrions en parler plus tard.
    Merci, monsieur Davies.
    Vous devrez profiter d'une autre question, monsieur McDonald.
    C'est maintenant au tour de M. Goguen, pour cinq minutes.
(1700)

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    L'échange d'information entre les partenaires est l'un des éléments clés de la stratégie, tant au niveau national qu'international. J'aimerais revenir sur un des commentaires de M. Rousseau. Il a dit qu'on visait les groupes autochtones qui protestaient paisiblement et il a demandé pourquoi on consacrait autant de ressources à cela. Vous avez répondu qu'on ne visait pas les groupes autochtones, mais les activités illégales.
    Si je me rappelle bien, il y a eu la crise d'Octobre dans les années 1970. C'était avant la création du SCRS. Dans ce cas-là, on ne visait pas le peuple québécois, mais les activités illégales du FLQ. Par suite de la crise d'Octobre, il y a eu le rapport de la Commission MacDonald de trois tomes qui traitait des activités de la GRC et de la sécurité publique. On a constaté que les diverses instances gouvernementales échangeaient énormément d'information, et que ces échanges ne respectaient pas la vie privée des individus. Par la suite, il y a eu la Loi sur le SCRS pour légitimer certains échanges d'information.
    Quelles démarches entreprend-on en ce moment afin de faciliter l'échange légitime d'information entre les diverses instances gouvernementales? Commençons par le niveau national.
    Merci, monsieur Goguen.
    Monsieur Davies, c'est à vous.

[Traduction]

    L'un des aspects de l'échange de renseignements est le contact quotidien. Il y a beaucoup de discussions entre les opérateurs, la première ligne, pour partager des renseignements. En ce qui concerne la relation entre la GRC et le service, par exemple, il y a beaucoup de nouveaux protocoles différents pour veiller à ce que les deux fonctionnent bien ensemble, à déconflictualiser les questions et les activités. Les chefs de file de la GRC sont un grand pas en avant en ce qui concerne les équipes intégrées de la sécurité nationale.
    L'une des questions mentionnées comme priorité dans le plan d'action d'Air India est l'amélioration du partage de renseignements intérieur entre les ministères fédéraux. Le problème est que la possibilité de partager légalement les renseignements pertinents du point de vue de la sécurité nationale est entravée par une mosaïque de textes législatifs, entre autres, qui engendrent une aversion au risque du partage. L'une des questions que le gouvernement s'est engagé à examiner dans ce plan d'action est de voir comment améliorer ça, améliorer la culture d'aversion au risque du partage, pour gérer les décisions et parler aux avocats, pour avoir un peu plus de présomption de partage, afin que chacun se sente à l'aise avec une base légale de partage. C'est certainement quelque chose que nous voulons faire.
     Il y a dans le plan d'action Par-delà la frontière l'engagement de travailler plus avec nos homologues américains sur le partage de renseignements. La première étape consiste à comprendre les régimes de protection de la vie privée en vigueur dans chaque pays, la Constitution et la Charte, de façon à savoir clairement ce qu'est la base légale permettant aux agences de sécurité de partager.
    Il vous reste deux minutes.
    En ce qui concerne l'échange de renseignements internationaux, tous les pays n'ont pas avec les États-Unis un programme comme NEXUS — et, bien sûr, les gens font ça volontairement parce que ce sont des voyageurs de confiance. Il va sans dire que nous pouvons exercer beaucoup plus de contrôle sur ce que nous faisons intérieurement que sur ce que nous faisons avec l'échange de renseignements avec d'autres pays. Quels mécanismes et mesures de sauvegarde ont donc été mis en place pour veiller à ce que les droits de nos citoyens soient respectés et qu'il n'y ait pas d'utilisation abusive des informations que nous échangeons?
    De quel genre de renseignements parlez-vous? Voulez-vous parler des informations sur les passagers que partagent à l'avance les compagnies aériennes ou, par exemple, des informations que les organismes d'application des lois pourraient partager sur certaines cibles et sources?
    Pour être tout à fait franc avec vous, je n'ai aucune idée du type d'informations que vous échangez. Quoi qu'il en soit, je veux parler des informations qui seraient particulièrement pertinentes du point de vue de la sécurité, et je vous demande de me dire quelles sont les mesures de sauvegarde à ce sujet.
    Eh bien, tout dépend de ce dont vous parlez. Si vous parlez des informations sur les passagers, il y a des traités, par exemple…
    Ça, c'est simple.
    … en cours de négociation entre le Canada et l'Union européenne pour assurer le transfert légitime de renseignements, afin que les deux parties soient légalement tenues de suivre certaines règles. Celles-ci seront formulées dans des protocoles d'entente, etc.
    C'est la même chose au niveau opérationnel. La GRC, par exemple, aura établi un protocole d'entente avec toute agence de sécurité avec laquelle elle collabore aux États-Unis.
     Il y a donc tout un faisceau d'ententes claires. Elles reposent sur des traités ou sur des lois claires à ce sujet.
(1705)
    Merci beaucoup.
    Nous retournons à M. Garrison, pour cinq minutes.
    Merci beaucoup.
    Je tiens d'abord à faire une remarque préliminaire eu égard aux remarques précédentes de Mme Hoeppner. Je vais vous poser des questions qu'il ne faut pas considérer comme des critiques du SCRS mais plutôt comme l'expression de la nécessité de maintenir l'appui du public à la stratégie de sécurité nationale et à nos organismes de sécurité nationale. Pour ce faire, nous avons besoin d'un solide système de supervision. Nous avons besoin d'assurer le respect de la règle de droit et le respect des droits, au risque de perdre la coopération du public. Ne voyez donc pas dans mes questions l'indication que nous soupçonnons tous les agents du SCRS d'être des agents diaboliques qu'il faut surveiller et maîtriser, mais simplement l'expression de la nécessité de maintenir l'appui du public.
    J'ai donc deux questions que je vous pose tout de suite l'une après l'autre.
    Le ministre a mentionné le dépôt d'un nouveau projet de loi sur le fait de quitter le Canada dans le but de commettre un acte terroriste. Avez-vous des informations quelconques à nous communiquer à ce sujet, tout d'abord en ce qui concerne le moment où ce projet sera déposé? Deuxièmement, l'idée de restreindre le droit de voyager à l'étranger préoccupe vivement de nombreuses communautés immigrantes, qui craignent d'ailleurs déjà qu'elles font peut-être l'objet de profilage racial et peuvent avoir des difficultés à quitter le pays du fait de leur association avec tel ou tel groupe. Avez-vous donc des informations que vous pourriez nous communiquer sur les dispositions de ce futur projet de loi, ou sur les mécanismes de révision qui pourraient être mis en place sous ce régime?
    Je pense que vous faites allusion au projet de loi S-7, qui est une mise à jour de la Loi antiterroriste. Il y a une disposition sur le fait de voyager dans le but de commettre un acte terroriste, et elle clarifie les dispositions juridiques…
    C'est de cette disposition qu'il parlait.
    Oui.
    Je suis désolé mais je n'ai pas lu le projet de loi S-7. Contient-il une disposition de révision des décisions de restriction de la liberté de voyager?
    Permettant la révision judiciaire de ces décisions ou…
    Sans aller jusqu'à une révision judiciaire, ce qui serait dispendieux et difficile pour la plupart des gens.
    Je pense que le projet de loi S-7… C'est le ministère de la Justice qui pilote ce dossier, mais l'objectif est de rendre illégal le fait de participer sciemment aux activités d'un groupe terroriste dans le but de rehausser l'aptitude d'un groupe terroriste à commettre un acte de terrorisme. Donc, le fait de quitter le Canada pour aller dans un camp d'entraînement de terroristes… Ce sera très clairement un acte criminel.
     Je ne sais pas vraiment comment l'on pourrait réviser cette décision. Cela fait partie des modifications au Code criminel.
    Très bien. Je pense que cela nous dépasse un peu tous les deux pour le moment.
    Oui.
    Voici ma deuxième question. Quand on parle de partenariats dans la stratégie, on dit qu'il faut pouvoir « compter sur » toute une liste d'entités, notamment des gouvernements étrangers. J'aimerais savoir ce qu'on entend par là. Cela veut-il simplement échanger des informations, ce qui a fait l'objet d'excellentes questions de M. Goguen? Cela veut-il dire plus que cela? Le ministre a donné l'exemple du programme Shiprider et des programmes communs d'application des lois.
    Ma question est donc de savoir ce qu'on veut dire par « compter sur » ou, en anglais, « engaging with », et s'il y a une sorte de hiérarchie d'engagement avec différents pays, puisqu'on fait souvent référence à des partenaires non traditionnels.
    Je pense que ce mot évoque tout un continuum. Dans certains cas, comme avec les États-Unis, ça pourrait être beaucoup plus que procéder ensemble à l'évaluation des menaces, par exemple, et aller jusqu'à l'harmonisation des critères d'admissibilité.
    Dans le Forum mondial de lutte contre le terrorisme, par exemple, qui est une nouvelle tribune de 30 pays différents, l'idée est d'échanger des informations sur les meilleures pratiques de lutte contre l'extrémisme violent. C'est donc un peu plus que l'échange de renseignements. Il y a évidemment beaucoup d'échanges bilatéraux. L'exemple d'Israël a été mentionné comme pays ayant établi un programme très solide de sécurité de l'aviation et, bien sûr, nous avons des leçons à en tirer.
     Tout dépend donc du problème envisagé, allant d'une coopération très vague à une coopération très forte, je dirais.
    Je crois qu'il y a une distinction importante à faire, ou au moins une remarque importante, sur le partage d'informations, en réponse à votre question sur l'architecture dans la communauté internationale.
    Le partage d'informations ne concerne pas toujours des informations classifiées. Nous partageons des informations classifiées quotidiennement, comme je suis sûr que vous le savez tous. Il y a aussi des informations issues du renseignement financier et du renseignement de sécurité. Il y a des informations à caractère criminel, et il y a bien sûr des informations générales non classifiées.
    La communauté internationale, d'un point de vue général, est organisée dans la communauté même du renseignement de sécurité essentiellement par ceux qui recueillent du renseignement. Il y a donc certains groupes experts de nos alliés fidèles, les Cinq-Yeux comme on les appelle couramment, qui échangent des informations et partagent des informations de toutes sortes, selon leurs mandats législatifs. Il y a aussi d'autres organismes internationaux, certains très formels, comme le G8 et le G20. Dans le G20, l'examen des questions de sécurité nationale ou de terrorisme est un effort relativement nouveau. Nous avons le G7, qui se penche sur les aspects financiers, mais nous avons aussi de nouveaux partenaires, comme l'Organisation de coopération et de développement économiques en Europe, l'OCDE. L'OCDE a pris contact avec mon secteur pour parler de questions de sécurité nationale touchant les investissements étrangers, par exemple, et elle s'est dotée d'un groupe de travail sur le terrorisme, ce qui est quelque chose de nouveau pour nous.
    Nous avons aussi d'autres organismes, comme le Groupe d'action financière, et les organismes régionaux auxquels le Canada est invité à se joindre pour aider d'autres pays. C'est une pléthore mais il y a des structures.
(1710)
    Merci.
    Merci, Monsieur Garrison. Cela faisait cinq minutes et vingt-sept secondes.
    Des voix: Oh, oh!
    Le président: Mme Hoeppner.
    Merci. Ma question sera assez brève.
     Monsieur Davies, quand le ministre était ici, je pense que M. Norlock l’a interrogé sur les investissements qu’a faits notre gouvernement, et vous avez dit, si je me souviens bien, que les autres pays nous envient à cause de ces investissements, et attendent de nous que nous fassions preuve de leadership.
     Pourriez-vous développer votre pensée? En outre, en ce qui concerne la stratégie, y a-t-il beaucoup d'autres pays, par exemple du G8, qui ont aussi formulé leur propre stratégie?
    M. Macdonald pourrait peut-être nous dire si d'autres pays ont adopté des stratégies, ou si nous jouons aussi le rôle de chef de file du fait que nous avons une stratégie? Pourriez-vous parler un peu de notre rôle sur la scène mondiale dans la lutte contre le terrorisme?
    Certainement. Quand je disais qu'on nous envie, je voulais parler de Kanishka, des 10 millions de dollars pour la recherche sur la lutte contre l'extrémisme violent et le terrorisme, de manière générale. Plusieurs pays nous ont dit que nous avons beaucoup de chance d'avoir cette ressource. Comme l'a dit M. Macdonald, il n'y a pas pénurie de groupes de lutte contre le terrorisme au niveau mondial qui cherchent à financer et à catalyser la recherche dans ce domaine.
    Cela nous a aidés à jouer un rôle de chef de file dans un certain nombre de ces groupes. L'un des aspects particuliers est l'évaluation de programmes reliés à la lutte contre l'extrémisme violent. Nous avons tenu ici un colloque début février durant lequel le ministre a lancé la stratégie antiterroriste, ce qui a été considéré comme un grand succès par les autres pays. Nous pilotons maintenant le deuxième stade, et c'est un groupe de 30 pays différents.
    Personne d'autre n'a d'argent ou de ressources pour financer de la recherche dans ce domaine, et on ne fait quasiment pas de recherche là-dessus, ce qui place le Canada dans une position très solide de leadership à ce sujet.
    Veuillez m'excuser, j'oublie la deuxième partie de votre question.
    Il s'agissait de la stratégie globale, du fait que le Canada a une stratégie. Y a-t-il d'autres pays, comme au G8, qui ont ce genre de stratégie?
    L'Australie, le Royaume-Uni et les États-Unis ont des stratégies. Je pense que la nôtre est probablement plus proche de celles de l'Australie et du Royaume-Uni que des États-Unis. Celle des États-Unis est similaire mais un peu différente. Je pense que les Pays-Bas ont une sorte de stratégie similaire. À part ça, je ne sais pas. Je pense que toutes reflètent des principes très similaires. Si vous les comparez, elles sont toutes très similaires du point de vue des principes fondamentaux de résilience, de partenariat, de règle de droit, de terrorisme considéré comme crime, etc. Il y a des manières légèrement différentes d'organiser les principes et les méthodes, et des interprétations légèrement différentes de la menace, mais je pense que nous avons eu la possibilité d'informer tous nos alliés, ou au moins la plupart, sur le contenu de la stratégie. Ils en ont tous pensé beaucoup de bien, c'est certain.
    Avez-vous pu consulter toutes les provinces pour formuler cette stratégie? Quand vous parlez d'informations, je sais que le partage d'informations dont vous parlez est en bonne partie international, mais je suppose que la stratégie concerne en partie le partage d'informations. Les provinces ou municipalités ont-elle participé à l'élaboration de la stratégie?
    Le ministre de la Sécurité publique et, je crois, le ministre de la Justice réunissent tous les deux un groupe de leurs homologues au niveau provincial. Il est appuyé par un groupe au niveau de sous-ministre. Ces deux tribunes nous ont donné l'occasion de les informer sur la stratégie de lutte contre le terrorisme durant son élaboration ainsi que sous sa version définitive.
     Le défi pour l'avenir sera de collaborer plus avec les provinces sur certains aspects de la stratégie et sur le genre de choses auxquelles nous voulons accorder la priorité, étant donné que les ordres du jour de ces rencontres sont très longs. Lutter contre l'extrémisme violent est une question sur laquelle nous désirons vivement travailler avec les provinces, car elle touche des questions relevant plus de la compétence provinciale et municipale, au niveau des travailleurs de première ligne. C'est très similaire à la lutte contre les gangs, au travail avec les collectivités de nouveaux immigrants qui peuvent être isolées, etc. Il y a à l'évidence une très bonne concordance à ce niveau et un besoin évident d'obtenir leur appui pour faire des progrès.
(1715)
    Merci beaucoup. Je n'ai pas d'autre question.
    Merci, madame Hoeppner.
    Monsieur Garrison, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je reviens à la question des partenariats puisque j'avais complètement utilisé mes cinq minutes au tour précédent.
    Quand vous parlez des différents niveaux de collaboration, j'en ai eu une certaine expérience personnelle dans ma vie antérieure lorsque je travaillais en Afghanistan et dirigeais la DNS, la Direction nationale de la sécurité. Je pense qu'on peut dire, considérant ne serait-ce que les dernières semaines, que c'est une organisation qui a eu du succès contre les menaces terroristes. Toutefois, la Commission indépendante des droits humains de l'Afghanistan a condamné la DNS pour ses méthodes. Elle fait fi de la règle de droit et a très souvent recours à la torture.
     Voici ma question: quand on parle d'échange de renseignements, on peut voir les problèmes qui risquent de se poser — et je pense que M. Goguen en a évoqué certains concernant les Canadiens d'origine afghane — si l'on partage des renseignements avec une organisation de ce genre. Quelles sont les garanties de protection des droits de ces Canadiens?
    Tout d'abord, la directive ministérielle sur le partage de renseignements indique très clairement que ce partage doit être légal, nationalement et internationalement. C'est fondamental. Toutes les décisions de partage de renseignements sont également proportionnelles au risque, du point de vue des approbations et du filtrage qui est nécessaire, et cela est énoncé dans la directive ministérielle.
    Une autre manière de voir…
    Quand vous parlez de risques, ce sont des risques pour qui? Des risques de menace terroriste ou des risques pour les droits des particuliers?
    Le risque que la personne soit maltraitée, par exemple. C'est proportionnel à cela. Plus le risque est élevé, plus le niveau d'approbation et de filtrage de cette décision est élevé.
    La directive ministérielle dans ce domaine et dans tous les domaines est également supervisée par le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, qui a la prérogative de se pencher sur ce genre de question et d'en faire rapport au Parlement ainsi qu'au ministre. Donc, cette question est réglée à la fois par la directive ministérielle et par cette possibilité de révision.
    Une dernière question. Le ministre a parlé du rétablissement des audiences d'investigation et des engagements assortis de conditions dans ce projet de loi que nous avons proposé. Nous ne savons pas quand il sera adopté mais, lorsque ces dispositions existaient, nous était-il possible d'en faire un usage efficace pour lutter contre le terrorisme?
    C'est une très bonne question. Elle fait référence à la boîte à outils, ou à ce que nous avions qualifié après le 11 septembre, avec la Loi antiterroriste, le projet de loi C-36, une boîte à outils qui permettrait à la communauté du renseignement de sécurité et d'application des lois d'intervenir de manière adéquate en cas de besoin. Évidemment, cela doit s'accompagner d'une supervision et d’une surveillance efficaces pour s'assurer qu'il n'y a pas d'abus.
    À l'époque, le gouvernement considérait que l'octroi de tels pouvoirs devait s'accompagner d'une clause d'échéance au bout de cinq ans, et nous savons ce qui est arrivé ensuite.
    Je crois que l'audience d'investigation a été invoquée dans un aspect. Les rapports annuels — et j'avais la charge, comme jeune analyste, de rédiger les rapports de fin d'année pour l'utilisation de ces pouvoirs d'investigation — continueraient, et cela faisait partie du mécanisme régulier de reddition de comptes ou de rapports publics.
     Je pense que ce qui compte, c'est qu'il y a une boîte à outils qui est disponible, et qu'elle reste fermée si elle n'est pas nécessaire. S'il y avait une menace de grande ampleur et qu'on doive ouvrir la boîte à outils pour invoquer ce pouvoir, il est là pour être utilisé de manière appropriée. Tel est l'esprit dans lequel cela a été envisagé avec au moins ces deux pouvoirs particuliers.
    Diriez-vous qu'on parle d'une réponse proportionnelle si ces deux questions très graves de droits s'écartaient considérablement de nos anciennes traditions juridiques? Autrement dit, selon moi, vous devriez être confrontés à des menaces de très grand risque pour que ces pouvoirs puissent être invoqués. Dans le projet de loi, il n'y avait aucune notion de proportionnalité. C'étaient simplement des choses qu'on pourrait utiliser.
    Je sais que le renouvellement comprenait certaines améliorations proposées par le comité parlementaire qui s'était penché sur la Loi antiterroriste. L'un des arguments logiques qui en découlent est que le fait que ces pouvoirs n'ont pas été largement employés montre que la communauté d'application des lois et du renseignement de sécurité estimait qu'ils étaient très sérieux, et qu'elle n'a pas ouvert la boîte à outils quand ce n'était pas nécessaire. C'est l'un des arguments qui découle de cela.
(1720)
    Y a-t-il d'autres questions de ce côté-ci? Quelqu'un d'autre? Je n'ai personne sur ma liste.
    Mme Hoeppner et M. Rathgeber.
    Allez-y, Brent.
    Le fait est que le droit de détenir et d'interroger une personne soupçonnée de terrorisme n'existe pas actuellement dans notre arsenal législatif parce que les dispositions de la Loi antiterroriste sont arrivées à échéance et qu'elles n'ont pas été renouvelées lors de la dernière législature.
    J'hésite à vous demander un avis sur la politique mais, du point de vue de l'application des lois telle que vous l'entendez, est-ce un outil qui manque dans la boîte à outils?
    Vous avez raison, je n'ai pas l'intention d'exprimer d'avis sur la politique. Très franchement, il ne nous appartient pas, en qualité de fonctionnaires, d'exprimer des avis de cette nature. Nous ne faisons que dispenser des conseils.
    D'un point de vue personnel, dans ma fonction actuelle, je dirais que, pour le renforcement et la protection de la sécurité du Canada, eu égard à la gravité des infractions sérieuses, avoir une boîte à outils bien garnie est une bonne chose.
    Ce sera mon seul commentaire.
    Je partage votre opinion. Pour revenir à la prémisse de la question de M. Garrison, l'emploi de ce genre de mesure extraordinaire suppose une menace extraordinaire. Vous conviendrez certainement avec moi que les événements du 11 septembre 2001 étaient précisément ce genre d'événement extraordinaire, n'est-ce pas?
    Oui.
    Merci.
    Madame Hoeppner, vouliez-vous participer à ce tour aussi?
    Oui, mais sur un thème un peu différent. Pourriez-vous nous parler un peu plus des autres ministères fédéraux qui ont des rôles à jouer, car il n'y a évidemment pas que Sécurité publique qui soit concernée par l'exécution de cette stratégie. Pouvez-vous donc nous dire quels autres ministères auront des rôles à jouer à cet égard, et quels seront ces rôles?
    Voulez-vous que je vous donne la liste de ceux…
    Oui, si c'est possible.
    D'accord. Comme vous le savez, Sécurité publique est un portefeuille, ce qui veut dire que l'Agence des services frontaliers du Canada, la GRC et le SCRS sont tous des éléments fondamentaux de la communauté du renseignement de sécurité. Outre ce portefeuille, le Bureau du Conseil privé a certainement un rôle de coordination très important, mais il a aussi sa propre capacité d'évaluation, qui est une partie de la stratégie antiterroriste. Le ministère de la Défense et le Centre de la sécurité des télécommunications Canada — le CSTC — sont également des entités fondamentales de la communauté du renseignement de sécurité, tout comme Immigration Canada et Transports Canada. Il est en fait difficile de trouver un ministère qui ne soit pas d'une manière ou d'une autre relié à la communauté du renseignement de sécurité. Normalement, nous disons qu'il y en a une douzaine ou une quinzaine qui jouent un certain rôle à cet égard, même si ce rôle est relativement minime par rapport à leur mandat principal. Dans certains cas, c'est un aspect dominant, comme pour le SCRS, bien évidemment.
    Je ne sais pas si je réponds bien à votre question mais c'est une vaste communauté. Une bonne partie de notre temps est consacrée à réunir tout le monde dans un même lieu, à mettre tout le monde sur la même longueur d'onde, et à faire en sorte que tout le monde marche dans le même sens. C'est essentiellement axé sur le partenariat. Les gens sont généralement sur la même longueur d'onde et veulent marcher dans le même sens mais, comme vous pouvez l'imaginer, il y a beaucoup d'éléments complexes dans toute politique touchant ce domaine.
    Je crois que M. Macdonald souhaite intervenir aussi.
    Très simplement, la manière la plus facile de comprendre ça est souvent de comparer à un oignon. Il y a plusieurs couches dans la communauté du renseignement de sécurité, et les ministères et agences occupent une place centrale au coeur, ou se trouvent à l'extérieur. Ça comprend aussi les politiques et les opérations. Par exemple, vous avez les organismes centraux de collecte du renseignement — SCRS, CSTC, et MAECI pour certains types de renseignements — et vous avez ensuite le ministère de la Défense nationale, les Forces canadiennes, et l'Agence des services frontaliers du Canada.
    Ensuite, vous avez les consommateurs de renseignements, certains ministères qui dispensent des avis de politique à leur ministre, dont Transports Canada, l'Agence de santé publique du Canada, Santé Canada, l'Agence canadienne d'inspection des aliments, Agriculture Canada, et Ressources naturelles Canada.
     Puis, vous avez les analystes, ceux qui évaluent le renseignement, c'est-à-dire le Centre intégré d'évaluation des menaces, le Secrétariat de l'évaluation du renseignement, du Bureau du Conseil privé. Les Forces canadiennes ont un chef du renseignement de la défense.
    La communauté est vaste, mais il y a un coeur — je viens de donner la liste de ses membres — d'entités qui sont chargées de recueillir et d'analyser les renseignements, et l'objectif d'un membre du renseignement de sécurité est de conseiller le gouvernement. C'est la fonction centrale du SCRS. La communauté s'élargit à mesure qu'on s'éloigne des couches de l'oignon. Elle regroupe facilement 20 ministères et organismes.
(1725)
    Merci beaucoup, monsieur McDonald.
     Je pense avoir vu M. Rousseau ou M. Scott.
    Allez y, monsieur Scott.
    Aurons-nous cinq minutes complètes, car j'aimerais partager mon temps de parole avec M. Rousseau?
    Vous avez jusqu'à 17 h 30.
    C'est parfait.
    Pourriez-vous me donner un signal au bout d'une minute et demie ou deux?
    J'essaierai. Je devrai garder un peu de temps pour permettre au président de conclure. Faites vite, donc.
    Je veux simplement revenir à l'Afghanistan car le ministre a répondu en disant que nous tenons généralement compte de tout, que nous revoyons toujours nos actions pour nous perfectionner. Je pense qu'on ne devrait pas oublier que les 10 dernières années ont été une période exceptionnelle et que l'Afghanistan, à un certain niveau, n'a probablement pas figuré sur l'écran radar des Canadiens de manière aussi présente dans notre vie collective qu'il l'a été en réalité.
    Je serais tellement plus heureux de savoir qu'il y a eu dans tout cet examen une analyse interne sérieuse de la nature de la collaboration avec l'Afghanistan dans le domaine du renseignement, à la fois entre les agences canadiennes — le renseignement de la défense et le SCRS, par exemple — et entre les agences canadiennes et les agences afghanes, pour apprendre les leçons voulues au sujet des questions de droits humains et de partage efficace, surtout quand un conflit armé se superpose à l'antiterrorisme. Y a-t-il une étude poussée des leçons apprises durant les 10 dernières années qui a été intégrée à ce processus?
    J'allais juste dire que j'imagine qu'il y a deux couches à la réponse. La première est qu'il y a très probablement des révisions internes que le SCRS a faites au sujet de son expérience en Afghanistan, étant donné la complexité de cet environnement. Je devrais vérifier pour savoir comment le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité s'est penché sur cette question. Il l'a sûrement fait du point de vue de la question des détenus, entre autres, mais je ne sais pas si cela a été fait du point de vue particulier des leçons apprises. Je pourrais vérifier.
    Merci.
    Monsieur Macdonald, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Non.
    Dans ce cas, je cède la parole à M. Rousseau car je suis conscient de l'heure.

[Français]

    Vous avez parlé d'une espèce de boîte à outils, d'un coffret qui va vous permettre de réagir dans telle ou telle situation. Des scénarios ont-ils déjà été envisagés? Avez-vous aussi pensé à la formation des divers corps policiers qui commencent à avoir de plus en plus de plans d'urgence pour réagir à certaines situations? Avez-vous imaginé aussi de quelle façon il faudra former tous ces gens, éventuellement?
    Je vais vous répondre en anglais. Pardonnez-moi, mais ce sera plus facile d'exprimer ainsi exactement mon point de vue.

[Traduction]

    Pas de problème.
    C'est une très bonne question, monsieur le président.
    De fait, il y a à Sécurité publique une direction ou une division qui se consacre exclusivement à l'entraînement, à la fois du point de vue de la réaction d'urgence aux crises — verglas, inondations, incendies, etc. — et du point de vue de la sécurité nationale. Le ministère organise divers types de sessions d'entraînement, et cet entraînement de niveau national comprend souvent des exercices transfrontaliers avec les États-Unis une fois par an. Nous faisons partie de l'Opération Nanook des Forces canadiennes et de l'armée dans le nord chaque été. Il y a aussi d'autres exercices d'entraînement internationaux pour faire face aux événements chimiques, biologiques et radiologiques — CBR.
     Il y a aussi des réponses de moindre niveau. Par exemple, il y a eu des exercices d'entraînement à Toronto au sujet des menaces à la bombe dans le métro, et il y en a eu aussi à Montréal. Et puis, il y a de l'entraînement de niveau local, que reçoivent par exemple les pompiers et les premiers intervenants.
    En bref, la réponse est que l'entraînement est intégré à la démarche, car cela touche directement le Plan fédéral d'intervention d'urgence, le centre des opérations gouvernementales et même, en fait, la prise de décision au niveau national le plus élevé.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Rousseau vous a posé la question qui m'intéressait, qui est une bonne question.
     La fin de semaine dernière, par exemple, je participais à une activité de collecte de fonds dans ma circonscription au fin fond de l'Alberta, où un individu d'une collectivité voisine avait reçu une récompense de la province pour avoir utilisé une stratégie dans un scénario de préparation aux situations d'urgence. J'ai été frappé de voir qu'on coordonnait ce genre de compétition ou ce type de planification avec la province, le gouvernement fédéral et les autorités municipales, qui étaient tous concernés.
    Je tiens à vous remercier d'être venus devant le comité et du travail très important que vous faites. Bien que les Canadiens comprennent que le terrorisme est une menace massive, il y a tout un groupe de gens qui travaillent dur pour protéger leur sécurité. Nous nous attendons aussi à ce qu'il y ait de la transparence, de la reddition de comptes et toutes ces sortes de choses.
     Nous tenons donc à vous remercier pour le travail que vous faites, ainsi que votre ministère et tous ceux d'un bout à l'autre du pays — y compris les premiers intervenants — qui agissent non seulement pour mettre en oeuvre le plan stratégique mais aussi, évidemment, pour intervenir en cas d'attaque. Merci d'être venus nous aider à comprendre un peu mieux la complexité de la sécurité nationale et du terrorisme, et le travail que vous faites.
    La séance est levée.
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