:
À l'ordre, s'il vous plaît.
Bonjour à toutes et à tous. Je vous souhaite la bienvenue à la 11e réunion du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord.
[Traduction]
Nous nous réunissons aujourd'hui sur le territoire non cédé du peuple algonquin anishinabe.
[Français]
Nous continuons aujourd'hui notre deuxième étude sur les effets de la pénurie de logements sur les peuples autochtones du Canada.
[Traduction]
Nous accueillons dans notre premier groupe de témoins Herb Lehr, président, du Metis Settlements General Council; Richard Derocher, vice-chef, du Meadow Lake Tribal Council; et Stan Delorme, président, du Buffalo Lake Métis Settlement.
[Français]
Je voudrais vous rappeler les exigences du Bureau de régie interne concernant l'éloignement physique et le port du masque.
[Traduction]
Pour assurer le bon déroulement de la séance, j'aimerais vous faire part de quelques règles.
Les députés et les témoins peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Des services d'interprétation en anglais, en français, en inuktitut et en innu sont offerts pendant la séance. Au bas de votre écran, vous avez le choix entre parquet, anglais ou français. Si vous n'entendez plus l'interprétation, veuillez m'en aviser immédiatement et nous allons veiller à ce qu'elle soit rétablie avant de poursuivre les délibérations. Vous pouvez utiliser à tout moment la fonction « Lever la main », en bas de l'écran, si vous souhaitez prendre la parole ou attirer l'attention du président.
Avant de parler, veuillez attendre que je vous nomme. Lorsque vous avez la parole, veuillez parler lentement et clairement. Si vous n'avez pas la parole, votre microphone devrait être en sourdine.
Je demande aux membres du Comité de mentionner à quel témoin s'adresse leur question.
Je rappelle à tout le monde que tous les commentaires doivent être adressés au président.
Nous allons commencer par les exposés de nos trois invités, après quoi, nous passerons à la période de questions.
Monsieur Lehr, vous avez la parole pendant cinq minutes.
:
Je vous remercie, monsieur le président, et je remercie les membres du Comité de leur invitation à témoigner.
Je m'appelle Herb Lehr. Je suis le président élu du Metis Settlements General Council, ou MSGC. Je pense qu'il est essentiel pour vous tous de comprendre que les établissements métis sont uniques [difficultés techniques] par tout autre groupe de Métis au Canada. Nous sommes la seule assise territoriale [difficultés techniques] d'autres Métis. Cela nous amène des défis, mais aussi des possibilités, et ce sont de ces possibilités dont je veux vous parler surtout aujourd'hui.
Ne parlons pas du passé. Je suis certain que vous avez été inondés d'information vous montrant que les efforts du passé n'ont pas servi notre peuple, même s'ils étaient bien intentionnés. Statistique Canada, votre propre organisme, possède les preuves que le logement dans nos communautés laisse à désirer.
L'une des failles des statistiques est qu'elles ne montrent pas que le problème du logement dépasse les frontières de nos communautés. Les maisons délabrées et le manque de logements forcent nos gens à quitter leurs communautés, et l'itinérance les suit partout où ils vont.
Au Canada, les Métis ont la population qui croît le plus rapidement. Cinquante-cinq pour cent de la population dans nos établissements ont moins de 20 ans, et 28 % ont moins de 5 ans. Sans accès au logement, nos jeunes, qui sont dynamiques et pleins de potentiel, quittent nos communautés, et nous savons que cela entraîne de graves problèmes de protection de l'enfance, ainsi que d'autres problèmes sociaux.
Si nous regardons au‑delà de ces statistiques et pensons à l'avenir prometteur de nos jeunes, et si nous saisissons l'occasion de voir le logement différemment et de manière holistique, nous pouvons revigorer nos communautés à partir de la base. Le système actuel ne voit qu'un seul type de famille: la famille nucléaire. Les codes du bâtiment reflètent ce parti pris, si bien que nos familles non nucléaires, dont plusieurs générations partagent le même espace, en souffrent. Le surpeuplement, la moisissure [difficultés techniques] des infrastructures sont de véritables fléaux au sein de nos communautés qui forcent nos gens à partir et à chercher quelque chose de mieux. Ils découvrent alors qu'ailleurs, ce n'est pas mieux. Bien trop souvent, c'est pire. Loin de leurs familles, de leurs communautés et de leurs réseaux de soutien, nos gens sont seuls et vulnérables.
Nos communautés ont toujours été contraintes de s'occuper du logement de la manière la plus économique possible, en parant au plus pressé, et très souvent en temps de crise. En effet, les logements existants n'ont pas été conçus pour résister aux environnements extrêmes, éloignés et ruraux dans lesquels nous vivons. Le résultat est que nos gens vivent dans des roulottes et des maisons modulaires qui étaient censées être une solution temporaire en attendant mieux, mais rien de mieux n'est arrivé.
Je suis ici pour demander la possibilité de planifier nos maisons et nos communautés à l'aide de nouvelles technologies qui correspondent mieux à nos valeurs traditionnelles. Nous voulons avoir la marge de manœuvre nécessaire pour faire construire des maisons métisses par des Métis. Nous voulons que tout financement accordé au logement comprenne des fonds pour le renforcement des capacités, afin que nos gens puissent être formés pour construire ces nouvelles maisons durables et adaptées à notre culture. Nous ne voulons pas seulement les maisons durables que nos gens méritent; nous voulons aussi stimuler l'économie de nos communautés en utilisant les compétences existantes de nos membres, mais aussi en tenant compte du potentiel de nos jeunes qui n'ont pas encore choisi leur voie.
Les nouveaux accords et programmes doivent tenir compte du coût réel de la construction des maisons dans les communautés éloignées et rurales. Nous devons être en mesure de stocker les matériaux, de profiter des achats en gros et d'avoir les matériaux à portée de main lorsqu'ils sont nécessaires.
Il faut tenir compte du fait que nos gens ne vivent pas rapprochés de leurs voisins et que l'infrastructure de soutien est donc plus coûteuse. Nous avons besoin de logements qui tiennent compte aussi du fait que beaucoup de nos gens ont des handicaps et que nos maisons doivent donc être adaptées. Nous avons besoin de logements qui tiennent compte du fait que nos aînés sont pris en charge par leur famille à la maison pendant beaucoup plus longtemps que ce qui est courant dans les communautés non autochtones. Nous devons également nous occuper des maisons plus anciennes qui ont besoin de rénovations et de réparations, et qui nécessitent une modernisation de l'infrastructure vieillissante qui les soutient.
En outre, nous voulons envisager des solutions novatrices et respectueuses de l'environnement, comme l'énergie solaire et les maisons en chanvre, les maisons en béton cellulaire qui résistent aux moisissures, sont ignifuges et ont une durée de vie de plus de 100 ans. Bien que nous allions de l'avant avec notre accord-cadre fédéral, un financement immédiat est nécessaire si nous voulons remédier à la pénurie de logements avec laquelle les établissements sont aux prises depuis bien trop longtemps.
En conclusion, je remercie encore une fois le Comité de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui. Nous vous fournirons des données sur le logement plus tard cette semaine, afin que vous ayez une vue d'ensemble et tous les détails.
Je me ferai maintenant un plaisir de répondre à vos questions. [Difficultés techniques]
:
Bonjour à tous, et je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner devant le Comité.
Monsieur Lehr, votre exposé était magnifique.
Je me présente tout d'abord, je suis le vice-chef cri du Meadow Lake Tribal Council, ou MLTC. Le Meadow Lake Tribal Council se trouve dans le Nord-Ouest de la Saskatchewan et regroupe neuf Premières Nations, dont cinq sont cries et quatre sont dénées. Notre territoire s'étend sur presque tout le Nord-Ouest de la Saskatchewan. Nous avons une population d'environ 16 000 personnes. La croissance des différentes communautés sur notre territoire varie beaucoup. Certaines communautés connaissent une croissance économique, d'autres non. Certaines améliorent leur bien-être, d'autres non. Je sers donc des gens ayant des besoins très différents au sein de leurs communautés.
Je veux vous parler du logement, plus particulièrement du budget qui y est alloué.
J'ai été conseiller de la Première Nation de Flying Dust pendant 18 ans et gestionnaire de bande pendant quatre ans, alors je connais bien ma Première Nation, une Première Nation crie. La Première Nation de Flying Dust reçoit le même budget pour le logement depuis plus de 30 ans.
C'est un problème pour nous. À part l'indexation, il n'y a eu aucune augmentation du budget du logement au cours des 30 dernières années. Je crois qu'à Flying Dust, il s'élève à un peu moins de 300 000 $, et l'assurance des maisons coûte environ 180 000 $ par année, ce qui laisse environ de 100 000 $ à 110 000 $ pour la construction et la rénovation. Je suis convaincu que la situation est la même pour toutes les autres Premières Nations du territoire, le territoire du MLTC.
Nous sommes donc aux prises avec un problème bien précis: comment faire pour répondre aux besoins de logement de nos Premières Nations avec 110 000 $?
N'oubliez pas la région dans laquelle nous nous trouvons. Nous sommes dans le Nord-Ouest de la Saskatchewan. Le coût de construction est de 20 % à 30 % plus élevé que dans le Sud de la Saskatchewan. Et c'est le cas même près de l'endroit où je me trouve, à Meadow Lake, en Saskatchewan, le coût est de 20 % à 30 % plus élevé que dans le Sud de la province.
Le prix de la construction d'une maison moyenne dans le Nord-Ouest de la Saskatchewan est d'environ 230 000 $, et on parle d'un bungalow de trois chambres. On ne peut même pas terminer de construire une maison avec le montant dont nous disposons, et c'est sans parler de la liste des rénovations. Nos maisons se détériorent et il n'y a pas d'argent pour les rénover comme elles devraient l'être. Par conséquent, en ce qui concerne le logement, les chefs et les conseils de ces communautés sont coincés.
Un autre élément a des répercussions majeures sur le logement. Les nouveaux projets de loi, comme le , et les différents cas d'appartenance qui ont été présentés par le Canada et transférés aux Premières Nations font en sorte que notre population augmente, non seulement en raison de la croissance normale de la population, mais aussi en raison de l'arrivée de nouveaux membres, soit en raison de la clause grand-mère ou de tout autre nouveau cas d'appartenance. Cela rend la situation encore plus difficile, car nous avons maintenant de nouveaux membres qui s'attendent à avoir un logement sur la réserve parce que c'est ce qu'ils voient, ce qui accroît la pression sur le chef et le conseil.
J'aimerais également vous parler du surpeuplement des logements. La maison moyenne sur le territoire du Meadow Lake Tribal Council compte 7,9 personnes.
Je vais prendre l'exemple de Flying Dust, parce que je suis de là‑bas et que je connais bien les chiffres. Flying Dust a 2,2 personnes par maison. Flying Dust a un assez bon programme de logement, mais la pénurie est toujours là. Il n'y a que 2,2 personnes dans les maisons que nous avons, principalement à cause des petites familles et parce que Flying Dust a construit ce que nous appelons une « loge des aînés », qui abrite 10 aînés dans des logements individuels. Ces loges ne correspondent pas aux établissements de soins de longue durée que vous connaissez. Il s'agit plutôt de logements de niveaux d'assistance un et deux, où ils peuvent s'occuper d'eux-mêmes ou bénéficier souvent de l'aide du personnel infirmier et de membres de la famille.
Le surpeuplement, comme je l'ai indiqué, est d'un peu plus de 7,9 personnes par maison, je crois. Cela crée des problèmes de bien-être mental, surtout pour nos adolescents.
Les adolescents se disputent avec leurs parents. Tous ceux d'entre nous qui sont parents savent que cela arrive. Ils ont une petite bagarre avec leur frère ou leur sœur ou avec leurs parents. Dans une maison normale, cette personne peut aller dans sa chambre pour réfléchir. Dans nos maisons, ce n'est pas possible. Ils partagent leur chambre — parfois deux ou trois enfants, voire deux adolescents, par chambre — ce qui ne leur laisse pas l'espace nécessaire pour aller réfléchir.
Ce qui se passe dans ce cas, c'est que les jeunes quittent le foyer frustrés et furieux. Ils partent et cherchent d'autres options, ce qui les conduit généralement à l'alcoolisme, à la toxicomanie et à la recherche d'amis. Parfois, c'est lié aux gangs.
C'est la réalité quand on habite dans le Nord de la Saskatchewan et qu'il n'y a pas d'endroit pour aller réfléchir. C'est un problème dont je parle souvent...
:
Bonjour. Merci beaucoup au Comité de m'avoir accordé le temps de faire un exposé, et merci aux deux témoins qui m'ont précédé.
Je m'appelle Stan Delorme. Je suis le président du Buffalo Lake Métis Settlement, l'établissement métis du lac Buffalo. Notre conseil compte quatre membres et un président.
L'établissement métis du lac Buffalo est situé dans le nord-est de l'Alberta, à la porte de Fort McMurray, près de lac La Biche. Nous sommes l'un des huit établissements métis et nous sommes les seuls du genre au Canada. Je crois que nous sommes les seuls propriétaires fonciers d'établissements métis au Canada.
Le lac Buffalo est situé à environ 200 kilomètres au nord-est d'Edmonton, qui est le grand centre le plus proche pour tout type de magasinage. L'établissement compte environ 700 adultes, ce qui ne comprend pas les enfants de moins de 18 ans. Étant donné les 240 logements que nous avons et le nombre de personnes qui restent sur les terres de l'établissement, il y a une grave pénurie de logements.
Nous estimons qu'à tout moment, environ 1 200 personnes vivent au lac Buffalo. Ces derniers temps, nous avons constaté une augmentation du nombre de familles qui souhaitent réintégrer la communauté, un phénomène attribuable à la COVID. Certaines aimeraient revenir, mais malheureusement, il y a une pénurie de logements qui les empêche de le faire.
La capacité de construire des maisons et de répondre aux besoins de base en matière de logement est grandement insuffisante. Les fonds provinciaux consacrés au logement ont diminué, ce qui oblige notre organisme à faire appel à des programmes fédéraux en la matière, comme l'Initiative pour la création rapide de logements. Aux termes des exigences associées à ces fonds, les unités modulaires ne sont que transitoires puisqu'elles sont plus petites que les logements modulaires durables normaux.
Comme je l'ai dit, le lac Buffalo compte environ 240 maisons, et son parc immobilier, si on peut l'appeler ainsi, est vieillissant, le dernier lot de maisons ayant été construit en 2008. Les maisons construites ces dernières années sont très peu nombreuses. Je dois ajouter que des gens vivent encore dans des maisons qui ont été construites dans les années 1970 et au début des années 1980. De même, un grand pourcentage de maisons a été construit dans les années 1990.
Au nombre de nos infrastructures, on peut signaler 160 kilomètres de routes en gravier. Nous avons une usine de traitement d'eau qui tombe en désuétude et qui, évidemment, nous coûte un peu plus d'argent que ce que nous avions prévu. Nous avons deux camions de livraison d'eau qui transportent quotidiennement l'eau jusqu'aux maisons, ce qui augmente également les coûts de notre budget opérationnel.
Les effets de la pénurie de logements comprennent les maladies dues aux moisissures — je crois que Herb Lehr en a parlé dans une certaine mesure —, une augmentation des coûts d'infrastructure ainsi qu'une pression haussière sur le budget prévu pour l'eau, les égouts et les livraisons d'eau. De façon générale, les familles sont privées de repos et de sommeil, et il y a une perte en matière d'éducation découlant du coût élevé des services publics, lequel a augmenté de façon spectaculaire au cours des derniers mois. Parfois, les familles doivent choisir entre chauffer leur maison, s'éclairer et se procurer de la nourriture.
Notre population est jeune. Nous avons de jeunes familles avec un ou deux enfants qui vivent avec leurs parents, et parfois avec leurs grands-parents. Ce sont des familles multigénérationnelles. Nous avons aussi des personnes âgées qui risquent de devenir des sans-abri. Ces personnes utilisent toutes les options possibles, comme de vivre dans des roulottes pendant les mois d'hiver et se brancher à l'électricité dans la cour de leur famille.
En juillet 2019, l'établissement métis du lac Buffalo a tenu une consultation sur le logement auprès de ses membres, ce qui lui a permis de recueillir des observations sur les besoins en matière de logement. Ces observations ont fait état du besoin particulier des familles monoparentales qui vivent avec leurs parents et grands-parents ainsi que de celui des personnes âgées qui n'ont pas de logement et sont sans abri — ce qui sous-tend que certains des logements que ces aînés ont dû quitter n'étaient pas appropriés.
Nous avons des familles nombreuses et multigénérationnelles qui vivent dans une seule maison, comme cet exemple particulier où l'on retrouve 13 personnes vivant au même endroit. Pouvez-vous imaginer vivre à 13 dans un bungalow de deux ou trois chambres? Il y a des grands-parents, des parents, des enfants et des petits-enfants qui vivent tous dans la même maison.
Nous sommes actuellement...
Nous avons actuellement 40 personnes sur la liste d'attente. Nous avons besoin de logements abordables dans notre communauté. La vaste majorité de nos habitants ont des revenus très limités et, même comparativement à de nombreuses autres communautés autochtones du Canada, le taux de chômage chez nos jeunes est élevé, car beaucoup d'entre eux restent encore dans la maison de leurs parents. Certains sont allés au collège et à l'université pour commencer leur carrière, mais en raison du coût élevé de la vie et des études — et du manque d'argent pour ces dernières —, les jeunes ne peuvent pas vraiment se permettre de partir. Ils sont donc forcés de rester à la maison avec leurs parents ou leurs grands-parents.
J'ai encore beaucoup de choses à dire, mais je pourrai probablement les intégrer aux questions qui nous seront posées.
Sur ce, je remercie beaucoup le Comité de nous avoir écoutés aujourd'hui.
:
Merci, monsieur le président.
Merci à tous les intervenants qui sont ici aujourd'hui.
Je vais focaliser mes questions sur les établissements métis. Je remercie très sincèrement M. Delorme et M. Lehr d'être ici aujourd'hui. Comme M. Delorme l'a mentionné, les établissements métis en Alberta sont uniques au Canada, puisqu'il y en a huit au total, dont la moitié à Lakeland. Je suis également heureuse d'être accompagnée de notre collègue du NPD pour la journée, dont je représente les nombreux parents et amis, ce que je suis fière de faire.
En raison de cette réalité, je me suis donné pour mission de me battre avec autant d'ardeur pour toutes les communautés autochtones et les personnes vivant dans les établissements métis de Lakeland que pour tous les autres résidents.
Monsieur Delorme, pour donner une meilleure idée de la situation à nos collègues ici etaux Canadiens, pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les infrastructures des établissements métis en général et sur ceux du lac Buffalo en particulier. Vendredi dernier, la ministre était ici et elle ne savait pas combien d'argent avait été versé aux établissements métis. Je crois comprendre que le logement a été regroupé dans le volet infrastructures par le gouvernement. C'est d'ailleurs ce gouvernement qui, en 2021, s'est engagé à verser 40 millions de dollars aux établissements métis, une somme dont on attend toujours de voir la couleur.
Pourriez-vous nous donner une idée de votre budget annuel en matière d'infrastructures et du montant que vous avez effectivement reçu du gouvernement fédéral cette année, et nous expliquer comment les revenus sont générés dans votre communauté?
Le Ralliement national des Métis et la Métis Nation of Alberta n'ont jamais transféré d'argent au Conseil général des établissements métis. Ils vont là‑bas, à Ottawa. Ils disent qu'ils parlent en notre nom, même si nous n'avons jamais renoncé à cette prérogative. Nous disons que nous sommes autonomes par rapport à nous-mêmes.
Nous avons un arrangement avec le gouvernement fédéral, une entente-cadre que nous avons signée, mais à cause de la COVID, nous n'avons pas été en mesure de lui donner suite. Pour autant que je sache, seuls les organismes nationaux ont reçu des fonds, bien que j'aie entendu dire que les Métis des Territoires du Nord-Ouest ont signé une nouvelle entente et qu'ils reçoivent maintenant des fonds eux aussi. Nous espérons que cela va changer.
:
Merci, monsieur le président.
Merci à mes collègues du Comité, ainsi qu'au président Delorme, au vice-chef Derocher et au président Lehr. Merci beaucoup de nous avoir accordé du temps aujourd'hui.
Je viens d'un territoire abénaquis, où les communautés micmaques et wolastoqey... C'est un privilège, et je suis reconnaissante d'en apprendre davantage sur les communautés métisses, en particulier sur ces droits relatifs aux terres.
Le 17 décembre 2018, le Conseil général des établissements métis a signé une entente-cadre avec le gouvernement du Canada, qui prévoit un processus de négociation en vue, notamment, de développer conjointement une relation de gouvernement à gouvernement entre la Couronne et le Metis Settlements General Council afin de favoriser la réconciliation entre les gouvernements. L'une des priorités de négociation comprend des discussions exploratoires sur les besoins uniques et les structures existantes en matière de logement sur les terres des établissements métis.
Pour le président Lehr, depuis la signature de l'entente-cadre, quels progrès ont été réalisés, le cas échéant, à l'égard des priorités du Conseil général des établissements métis, notamment en matière de logement?
:
Merci, monsieur le président.
J'aimerais tout d'abord remercier les témoins, M. Delorme, le vice-chef Derocher et M. Lehr, de leur présentation.
J'aurais quelques questions à poser à chacun d'entre eux.
D'une part, j'aimerais qu'on parle des logements. Je sais que certains ont abordé cette question relativement aux coûts, à l'éloignement, à l'isolement et à la main-d'œuvre. Il y a une semaine, nous en avons discuté avec les ministres. On nous disait que, dans la construction de maisons plus éloignées, on tenait finalement compte de ces coûts actuellement plus importants.
Puisque ce n'est pas nécessairement l'écho que j'entends partout, j'aimerais avoir l'avis de chacun d'entre vous. Je vous pose la question tout simplement afin de faire des demandes précises aux différents ministères à cet égard et pour que vous puissiez évidemment avoir des maisons qui correspondent à vos besoins.
Je sais que vous avez mentionné que vous receviez un montant de 110 000 $, je crois, pour construire une maison dans certaines communautés. Cela est impossible chez moi, dans ma circonscription. J'imagine que c'est la même chose pour vous.
Voilà ce sur quoi j'aimerais que vous nous en disiez davantage.
:
Le fait que nous soyons dans le Nord est certainement un facteur pour tout, que ce soit le logement ou même les couches et le lait.
Comme vous le savez, notre territoire s'étend jusqu'à La Loche, où vit la nation dénée de Clearwater River, à 430 km au nord de Meadow Lake, en Saskatchewan. Meadow Lake est le plus grand centre de notre territoire et se trouve à quelque 330 km de Saskatoon, le centre géographique de la Saskatchewan. Voilà notre emplacement.
Il en coûte environ 10 % de plus pour construire des maisons à Meadow Lake qu'à Saskatoon. Les coûts augmentent au fur et à mesure que l'on monte vers le nord, avec une majoration de plus de 30 % pour les nations dénées de Clearwater River, de Birch Narrows ou de Buffalo River, qui sont nos collectivités les plus septentrionales, sans oublier English River, qui se trouve au bout de la route à l'autre extrémité de notre territoire.
Vous pouvez constater à quel point ces facteurs influent sur notre capacité de construction, car nous devons dépenser 100 $, alors que vous ne dépensez que 70 $. Comme je l'ai dit plus tôt, s'il en coûte de 215 000 à 220 000 $ pour construire une maison de taille moyenne ordinaire à Meadow Lake, comme un bungalow à trois chambres à coucher, il faut majorer la somme de 30 % en se souvenant que le financement n'a pas changé depuis plus de 30 ans. La Loche compte une population de 2 000 habitants, et une collectivité de cette taille dispose d'un budget de 330 000 $. Une seule maison suffirait à défoncer le budget sans rien laisser pour les infrastructures ou les rénovations.
Cela vous donne une idée de la situation.
Vous nous avez donné une réponse assez complète, notamment en donnant un exemple de situation géographique et en mentionnant les difficultés que vous rencontrez et que l'on retrouve également dans ma circonscription.
J'aimerais peut-être aller un peu plus loin.
Vous avez donné des exemples montrant que l'argent ne suffit pas. J'avais pour ma part entendu qu'au contraire, on tenait compte de la distance et de l'isolement.
Seriez-vous d'accord pour dire que les montants octroyés devraient être modulés en fonction de toutes les difficultés rencontrées, et ce, afin que ces montants puissent être équivalents à ceux octroyés dans des régions plus au sud qui sont reliées par la route et où les matériaux sont disponibles et moins chers.
J'ai entendu dire en comité qu'on en tenait déjà compte. Or on en tient peut-être compte de façon très générale en faisant quelques distinctions entre les communautés. La situation semble être un peu plus grave, d'après ce que j'entends ici.
J'aimerais savoir si vous êtes d'accord. N'hésitez pas à me corriger si je n'ai pas la bonne lecture des choses.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je tiens à remercier mes collègues, notamment Mme Stubbs qui veille à notre collaboration sur ce dossier important. Je tiens aussi à remercier M. McLeod, qui a déjà travaillé sur le dossier des établissements métis. Merci également à MM. Schmale et Vidal, qui ont été sensibilisés au problème et qui continuent à œuvrer pour le compte des collectivités.
J'aimerais parler de quelque chose qui me touche profondément. J'ai grandi dans l'Établissement métis de Fishing Lake, une des collectivités dont il est question aujourd'hui, et j'en suis un fier membre. J'ai l'honneur de jouir des droits et des privilèges qui en découlent. Je suis également fier de représenter le peuple métis ailleurs, ici au Parlement et bien sûr au sein du Comité.
J'aimerais vous expliquer le caractère unique de ces collectivités. On a dit plus tôt qu'elles ne relèvent pas du Ralliement national des Métis. Elles ne font pas partie de la Métis Nation of Alberta. Leur statut est unique. Le cadre actuel, qui repose sur une « politique fondée sur les distinctions », une phrase que l'on entend répéter le parti ministériel, ne vise pas ces collectivités. Je demanderai exceptionnellement à mes collègues de saisir le caractère unique des établissements.
Les collectivités ont été fondées par une loi de l'Assemblée législative de l'Alberta. Cela crée donc des circonstances particulières et explique aussi pourquoi le jugement rendu par la Cour suprême en 2016 est d'une importance si critique pour le gouvernement, qui doit en tenir compte. La Cour suprême a été saisie d'une affaire semblable en 1930. Les Inuits ont demandé de l'aide au gouvernement pour leur peuple. À l'époque, le gouvernement a refusé en indiquant tout simplement que les Inuits ne correspondaient pas à la définition des « Indiens » du paragraphe 91.24 de la Loi constitutionnelle. En 2016, la même demande a été présentée au nom du peuple métis.
Or, il y a une loi provinciale particulière qui comporte une disposition spéciale. L'Assemblée législative de l'Alberta a modifié, en vertu de l'article 43 de la Loi constitutionnelle, une disposition prévoyant la cession de ses responsabilités à l'égard des établissements si le gouvernement fédéral était prêt à les assumer et à reconnaître l'identité autochtone et métisse des collectivités. Le dossier est inactif depuis 1990. Voilà ce que le protocole d'entente et le cadre sont censés faire, réduire les obstacles en matière de compétence posés par l'Assemblée législative de l'Alberta.
Je demanderai à mon ami, le président Herb Lehr, de décrire l'état de ses relations avec le gouvernement provincial en sachant qu'il est question de quatre lois provinciales. Les membres d'autres collectivités ont parlé du problème de financement. Les établissements métis relèvent entièrement de la province. Le gouvernement provincial doit examiner ses responsabilités et travailler dans un esprit de collaboration à la table trilatérale.
Monsieur Lehr, pouvez-vous décrire l'évolution des relations avec la province? Permettent-elles de satisfaire aux besoins des collectivités? Le gouvernement fédéral devrait‑il intervenir?
:
Nous avons actuellement une entente à long terme avec le gouvernement fédéral qui sera en vigueur jusqu'à la fin du prochain exercice. Nous devrions avoir droit à 5 millions de dollars par année. Or, les établissements ne reçoivent strictement rien. Une partie des fonds sert aux infrastructures. Une autre partie est versée à la GRC pour les services de police dont le prix, comme vous le savez peut-être, vient de grimper de 300 000 $ à cause de la convention collective.
[Difficultés techniques]… et finalement, il ne reste rien des 5 millions de dollars. Je n'ai rien envoyé aux huit établissements pour les aider au chapitre des services essentiels ou de la gouvernance communautaire. Voilà une partie du problème que nous connaissons maintenant.
Le gouvernement de l'Alberta a proposé des amendements dans le projet de loi no 57, notamment en ce qui a trait à notre capacité à faire des ponctions dans ce que nous appelons notre fonds pour l'avenir. Il nous reste environ 20 millions de dollars. Le texte a été modifié pour indiquer que le recours au fonds nécessitait l'accord de huit collectivités. Dans le passé cependant, seulement six établissements devaient s'entendre sur une question financière pour un plan d'action financière. Le gouvernement provincial a apporté un amendement pour que ce soient huit établissements.
Nous ne recevons aucun fonds de la province pour le logement et très peu de fonds pour les infrastructures de quiconque. La province ne nous verse rien pour la gouvernance ou les services essentiels actuellement.
J'aimerais profiter du temps pour me concentrer sur la question et il se peut que M. Lehr puisse nous en dire plus.
La réalité, c'est que depuis 1990, le gouvernement provincial exerce une influence énorme sur les établissements métis et jouit d'une compétence quasi exclusive à leur égard.
En votre qualité de président, pensez-vous que la relation a permis de répondre aux besoins des établissements métis?
Je vous prie d'être bref.
:
Merci, monsieur le président.
J'ai trois minutes et tellement de questions. Je serai extrêmement bref.
J'ai parfois l'impression que les gens qui évoluent dans la bulle d'Ottawa perdent la perspective des personnes qui sont sur le terrain, et je remercie tous les témoins d'être des nôtres aujourd'hui, car vous nous faites connaître votre réalité quotidienne. Merci.
Ma première question est destinée au vice-chef Derocher.
Vous avez dit que vous représentez neuf Premières Nations dans la région nord-ouest de la Saskatchewan. Vous nous avez parlé des conditions différentes en matière de logement chez les neuf Premières Nations.
Pouvez-vous nous indiquer quels sont les facteurs fondamentaux qui expliquent certaines des différences? Quels sont certains des facteurs clés?
:
Ce sont certainement des facteurs économiques, monsieur Vidal.
Prenons par exemple la Première Nation de Flying Dust, qui se trouve à côté de Meadow Lake, en Saskatchewan. C'est le plus grand centre de notre territoire et il offre la possibilité de tirer des avantages économiques. La Première Nation de Flying Dust a ainsi de meilleures chances de s'attaquer aux problèmes de logement que nous éprouvons.
Comme je l'ai indiqué, nous avons de jeunes gens qui payent un loyer de 1 200 $ par mois sur le territoire de la Première Nation de Flying Dust, même s'ils ne gagnent que 16 ou 18 $ de l'heure. Leur loyer gruge 45 % de leurs revenus et ils vivent dans la réserve, et non dans la ville de Meadow Lake.
Plus on avance vers le nord, moins les occasions économiques sont bonnes. Il s'agit de collectivités éloignées. Les seules possibilités, c'est de travailler pour les Premières Nations ou aller dans le Nord de l'Alberta pour y vivre deux semaines et ensuite rentrer une semaine. Voilà les occasions qui existent dans le Nord de la Saskatchewan.
Ce sont des facteurs économiques et je dis toujours que nous devons créer notre propre économie.
:
Merci beaucoup, monsieur McCleod.
Nous avons demandé 50 millions de dollars par année au gouvernement fédéral à titre de mesure provisoire. La demande a été faite il y a quelques années. Nous savons que l'entente à long terme viendra bientôt à échéance et que le projet de loi no 57 vient d'entrer en vigueur.
Le Metis Settlements General Council, pour lequel je travaille, dispose actuellement d'un [Difficultés techniques] budget de [Difficultés techniques] millions de dollars. J'ai 850 000 $ pour le prochain exercice, dont 200 000 $ qui serviront à éclairer et à chauffer nos bâtiments.
Notre administration centrale est fauchée. Certaines de nos collectivités ont un peu d'argent en réserve qui servira à fournir des services essentiels. Certaines collectivités ont très peu de moyens et risquent de ne pas pouvoir assurer les livraisons d'eau, niveler les routes ou offrir des services quelconques d'ici la fin du prochain exercice sans apport du gouvernement fédéral.
:
Merci, monsieur le président.
J'ai beaucoup discuté avec le vice-chef Derocher tout à l'heure. J'aimerais donc entendre maintenant ce que M. Delorme et M. Lehr ont à dire sur cette même question. Je rappelle qu'il s'agissait de l'adaptation et de l'augmentation du financement. Ici, je mets le mot « augmentation » entre guillemets.
Considérez-vous que ce financement couvre le coût des matériaux et celui du transport, par exemple, qui ne cessent d'augmenter?
Monsieur Lehr, monsieur Delorme, je vous laisse la parole.
:
Je répondrai volontiers. Je vous remercie beaucoup de la question.
Au cours des deux dernières années, nous avons certainement remarqué ici que le coût des matériaux, de la livraison, du carburant et de tout est élevé, ce qui, essentiellement, a des répercussions également.
Nous avons notamment remarqué que dans le cadre du programme de logements de transition, par exemple, nous avons dû construire des logements plus petits pour composer les sommes qui nous sont versées sous forme de subventions. D'autres coûts sont entrés en ligne de compte également, notamment pour les conduites d'eau et d'égout et les services publics, dont l'installation est coûteuse. Il faut également construire les voies d'accès sur les sites.
Ce sont toutes des dépenses élevées. Quand on observe les coûts, on constate qu'ils sont prohibitifs. Nous sommes donc obligés de construire des logements plus petits.
:
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Je veux vous lire un extrait de la Constitution of Alberta Amendment Act, pour que tout le monde comprenne que l'Alberta a omis de respecter une obligation que prévoit sa constitution. Cet extrait commence ainsi:
Attendu que les Métis étaient présents quand la province de l'Alberta a été établie, et qu'eux et les terres réservées à leur usage constituent une partie unique de l'histoire et de la culture de la province;
Attendu qu'il est souhaité que les Métis continuent de disposer de terres pour préserver et renforcer leur culture et leur identité [...] et obtenir l'autonomie gouvernementale en vertu des lois de l'Alberta et qu'à cette fin, Sa Majesté la Reine du chef de l'Alberta en accorde le droit de propriété au Metis Settlements General Council;
Attendu que Sa Majecté la Reine du chef de l'Alberta a proposé que les terres ainsi accordées soient protégées par la Constitution du Canada[...]
Pause dramatique.
[...] il convient qu'elles soient protégées par la constitution de la province d'ici à ce que ce soit le cas [...]
Voilà pour l'Alberta.
La province a failli à une obligation prévue dans la constitution. C'est incroyable. Quand on s'intéresse au Manitoba, par exemple, on constate qu'il n'a pas respecté une obligation à l'égard des Métis. Ces derniers se sont adressés à la Cour suprême en 2013 pour réclamer plus de 1,4 million d'acres de terre. Cette dernière a statué que la province devait rendre ces terres aux Métis.
À titre de parlementaires, nous devons nous assurer que la modification constitutionnelle sous l'article 43 est respectée. Les Albertains se sont battus pour reconnaître les Métis, et ces derniers ont lutté pour que le Canada les reconnaisse. Je suis fier d'être le premier député issu d'un établissement métis à être élu à la Chambre des communes. Je manquerais à mon devoir si je ne m'assurais pas que cette obligation constitutionnelle soit comprise par le Canada et que nous prenions des mesures concrètes pour que ces terres soient protégées en vertu de la loi suprême qu'est la Consitution.
Monsieur le président Herb Lehr, avez-vous des observations à formuler sur la Constitution et votre souhait que nos terres soient protégées par la Constitution du Canada?
:
Ce sera long, lire mon texte en français.
Bonjour, je m'appelle Nina Malek. Je suis conseillère au Conseil des Innus de Pakua Shipu des Premières Nations.
Je suis avec vous aujourd'hui au nom de notre chef, M. Guy Mestenapéo, et de mes collègues du Conseil de Pakua Shipu.
Je remercie les membres du Comité permanent des affaires autochtones de la Chambre des communes de me donner l'occasion de partager le point de vue de notre communauté sur un sujet aussi important que les effets de la pénurie de logements sur notre peuple autochtone, les Innus.
Nous sommes une communauté innue de 400 membres située dans la région de la Basse-Côte‑Nord près du fleuve Saint-Laurent, au Québec. Il est plus exact de mentionner que la communauté de Pakua Shipu est située dans le Nitassinan, un territoire non cédé des Premières Nations des Innus. La grande majorité d'entre nous, presque tous, vivent dans la communauté et notre population est particulièrement jeune. Près de la moitié de nos membres ont moins de 25 ans.
Nous vivons dans une communauté éloignée située à 500 kilomètres à l'est de Sept‑Îles. Nous sommes isolés puisque notre communauté n'est pas raccordée au réseau routier du reste de la province.
Notre village n'a pas encore le statut officiel de réserve autochtone. Nous sommes un établissement autochtone sur le plan administratif. Le gouvernement fédéral tarde à prendre des mesures dans ce dossier.
Nous avons enclenché des procédures de création de réserves et d'agrandissement du périmètre de notre village. Nous espérions concrétiser des projets à court terme.
Nos données les plus récentes indiquent que notre parc immobilier comprend 70 logements. Chaque logement a un taux d'occupation moyen de 5,1 membres provenant de la communauté, ce qui est largement plus élevé que celui de la province, qui est d'environ de 2,3 personnes par logement.
Tout cela témoigne d'un problème de surpeuplement dans notre communauté. Nous avons plusieurs logements qui sont occupés par plus d'une famille. Il y a parfois deux, et même trois familles. Souvent, ce sont des ménages multigénérationnels composés de grands-parents, de parents et d'enfants qui partagent un même toit par manque d'options. La majorité ce ces logements sont situés à l'intérieur de la communauté.
Vous comprenez certainement que si notre communauté a un taux d'occupation moyen de 5,1 personnes par logement, cela signifie que certaines unités d'habitation comptent sept, huit ou neuf personnes, et même plus encore.
Cette situation n'est pas étrangère à divers problèmes que nous connaissons localement. L'un des effets de la pénurie de logements dans la communauté nous rend très vulnérables à des situations exceptionnelles comme la pandémie de COVID‑19. Le confinement a changé la vie de plusieurs personnes au pays. Chez nous, les deux dernières années ont été marquées par une vague anormale de suicides. Je ne sais pas si on peut établir une relation aussi directe, mais il faut néanmoins reconnaître que quelqu'un se suicide dans le même espace que quelqu'un d'autre. Après plusieurs mois de confinement, c'est une situation qui sort de l'ordinaire dans une communauté de seulement 400 personnes. Le surpeuplement amène une situation familiale difficile et des événements parfois malheureux en raison de la promiscuité.
Je ne veux pas m'attarder sur les aspects négatifs. J'aime mieux aborder la question sous un angle positif, à savoir que de bonnes conditions de logement favorisent une bonne santé individuelle, un contexte social sain et de bons résultats scolaires. Nos conditions de logement ne sont pas propices à aller dans cette direction.
L'état de la situation du logement dans notre communauté est un dossier bien documenté depuis plus de 20 ans. Grâce à l'Assemblée des Premières Nations Québec‑Labrador et à nos gens qui travaillent en habitation, nous avons des données fiables indiquant qu'il faudrait ajouter d'ici 5 ans au moins 50 logements pour éliminer le surpeuplement dans nos maisons, remplacer les logements désuets et répondre à la croissance de la population.
Nous aimerions maintenant poser des questions. Puisque l'interprétation en innu est maintenant offerte, vous pourrez répondre en innu aux questions qui vous seront posées.
Nous nous excusons de ce contretemps.
[Traduction]
Honorables collègues, nous espérons que Mme Clayton ne tardera pas à se joindre à nous.
Alvina Paul ne témoignera pas en raison d'un problème de communication quelconque. Nous entendrons donc seulement deux témoins.
Nous pouvons maintenant commencer à poser des questions. Vous cherchiez les autres témoins. Je sais que Mme Gill voudrait poser des questions.
[Français]
Madame Gill, vous pouvez commencer et vous avez la parole pour six minutes.
:
Merci, monsieur le président.
[La députée s'exprime en innu ainsi qu’il suit:]
Tshinashkumitin ishkueu Malek.
[Les propos en innu sont traduits ainsi:]
Je vous remercie, madame Malek.
[Français]
Lors de votre comparution d'aujourd'hui, n'hésitez pas à m'interrompre si je parle trop vite pour l'interprétation.
Dans votre témoignage, vous avez dit que vous vouliez aborder la question sous un angle positif. Je suis très heureuse et fière de vous accueillir, avec mes collègues, au Comité permanent des affaires autochtones et du Nord. Cela nous permettra d'entendre une voix particulière...
Monsieur le président, j'entends le son en double. Cela fait que j'ai de la difficulté à me concentrer.
:
Non, ça va, le problème est réglé. J'aime bien ma voix, mais pas à ce point-là, monsieur le président.
Je reviens à vous, madame Malek.
Quels éléments positifs souhaitez-vous apporter au Comité relativement à une communauté comme celle de Pakua Shipu?
De plus, pouvez-vous décrire davantage la communauté? Vous avez parlé de la situation géographique, mais pouvez-vous nous parler de toutes les difficultés que rencontre la communauté? Il faudrait résoudre ces difficultés, afin de justement pouvoir construire des habitations qui répondent aux demandes des communautés.
Si j'ai bien compris, une autre question est importante pour vous, et c'est toute la question de la rénovation des différentes résidences dans la communauté de Pakua Shipu.
Tshinashkumitin.
:
Présentement, nous sommes isolés. C'est une longue distance pour venir ici. [
Difficultés techniques] le chantier, c'est vraiment lent. Avoir juste une maison de plus par année, ce n'est pas assez.
Dans la communauté de Pakua Shipu, souvent 15 personnes d'une même famille vivent dans une maison. C'est long, avoir de nouvelles maisons. Ce n'est qu'une fois par année, et ce n'est pas beaucoup. Nous avons reçu du matériel chaque année, mais c'est vraiment lent. Nous sommes isolés présentement.
C'est très important pour moi d'avoir plus rapidement de nombreuses maisons ici, pour installer la communauté de Pakua Shipu. Nous sommes 400 personnes présentement. Il y a de 60 à 70 maisons à Pakua Shipu. Tous les enfants vont à l'école à l'extérieur de la communauté. Il y a quelques élèves qui sont diplômés, mais nous n'avons pas de logements pour installer les personnes qui reviennent dans la communauté après leurs études. L'élément le plus important est que nous manquons de logements. Nous ne savons pas où loger les diplômés universitaires et collégiaux. Ils sont encore à l'extérieur de la communauté. Ils travaillent à l'extérieur, en attendant que nous leur trouvions des logements.
Il y a 12 personnes qui voulaient revenir à Pakua Shipu, mais nous manquions de logements. Les jeunes qui ont terminé les études travaillent à l'extérieur, en anglais ou en français. La population qui est partie veut revenir pour travailler ici, pour agrandir le village, pour avoir des logements, des maisons aussi, et tout le reste.
Personnellement, je ne suis pas vraiment diplômée. Comme j'apprenais plus lentement, la durée de logement était trop courte, l'année scolaire était trop courte pour que je réussisse. Nous avons délaissé beaucoup les études avant 1990, et même avant 1984. J'ai quitté l'école. Nous ne pouvions pas aller étudier sans quitter le village.
Nous avons besoin de logements parce qu'il en manque dans la communauté. Les gens se plaignent parce que nous ne pouvons pas fournir les logements. Nous en avons besoin.
:
Je ne veux pas vous interrompre, madame Malek.
Si vous voulez écouter l'interprétation en innu, vous pouvez le faire si vous le sélectionnez à votre écran.
Vous parlez de solutions. Pour vous, essentiellement, la chose la plus importante, c'est d'avoir du financement. Je trouve intéressant que nous puissions le mentionner ici au Comité, pour résoudre ce problème. L'impact de tout cela, c'est l'exode, parce qu'il n'y a plus de place pour loger les jeunes qui veulent revenir. Il n'y a pas moyen d'agrandir le village. Il n'y a pas de place pour avoir des enfants.
Je vous vois hocher de la tête. En fait, vous avez besoin d'argent d'abord, et, ensuite, vous serez capables de vous loger correctement. Cela dit, au rythme où vont les choses actuellement, cela ne fonctionne pas pour vous à Pakua Shipu, de même qu'à Unamen Shipu et à d'autres endroits sur la Côte‑Nord et au Labrador. Est-ce bien cela?
:
Merci beaucoup, madame Gill.
[Traduction]
Je remarque que notre deuxième témoin, Eva Clayton, présidente du gouvernement Nisga'a Lisims, est maintenant avec nous.
Bienvenue, madame Clayton. Je vous remercie de vous joindre à nous. Nous allons tenter de remettre la séance sur les rails.
On vous a probablement informée que vous disposeriez de cinq minutes pour faire une allocution d'ouverture. Si vous êtes prête à la faire, vous avez la parole.
:
[
La députée s'exprime en inuktitut ainsi qu'il suit:]
ᐋᒻ, ᓯᕗᓪᓕᕐᒥ ᖁᔭᓐᓇᒦᒃ, ᑐᓐᖓᓱᒋᑦᓯ, ᐊᑦᓱᐊᓗᒃ ᑐᓴᕐᓂᕋᑦᓯ, ᐋᒻ, ᒦᓇ ᐅᓂᒃᑳᕐᑎᓪᓗᑎᑦ ᐊᑦᓱᐊᓗᒃ ᐃᑉᐱᓐᓂᐊᕆᖅᑲᐅᕙᒋᑦ, ᓄᓇᒋᔭᓐᓂᒃ ᑭᒡᒐᖅᑐᖅᑕᒃᑲ ᐊᔾᔨᐸᓗᑦᓯᐊᖏᓐᓂ ᐅᓂᒃ-ᑳᖅᑲᐅᒐᕕᑦ, ᑖᒃᑯᐊ ᐃᓅᓯᕆᔭᑦᓯ ᐊᒥᓱᓄᑦ ᓄᓇᕗᒻᒥᐅᓄᑦ ᐊᑐᖅᑕᐅᓲᖑᒻᒥᒻᒪᑕ, ᐋᒻ, ᐊᐱᕆ-ᒍᒪᕙᒋᑦ ᖃᓄᕐᓕ, ᐋ, ᑐᓴᖅᓯᒪᕐᒪᖔᖅᐱᑦ ᓄᓇᖅᑲᑎᓐᓂᒃ ᓱᓇᒥᒃ ᐃᓪᓗᓕᕆᔾᔪᑎᓐᓂᒃ ᐱᔭ-ᕆᐊᖃᕐᒪᖔᑦ ᓄᓇᒋᔭᑦᓯᓐᓂᒃ ᐅᖃᐅᔾᔭᐅᓯᒪᒻᒪᖔᖅᐱᑦ, ᖁᔭᓐᓇᒦᒃ.
[Les propos en inuktitut sont interprétés en anglais puis traduits ainsi:]
Je veux tout d'abord vous remercier et vous souhaiter la bienvenue à la présente séance. Il était bon d'entendre vos histoires et ce que vous faites.
Madame Malek, quand vous avez parlé de votre travail, j'ai senti une grande présence; c'est comme dans ma ville. Vous avez parlé de ma ville, des mêmes conditions. Nos vies sont toutes touchées comme celles de votre communauté sur le plan du logement.
Que vous ont dit les membres de votre nation à propos des besoins de leurs communautés en matière de logement abordable?
:
[
La députée s'exprime en inuktitut ainsi qu'il suit:]
ᖁᔭᓐᓇᒦ, ᓯᕗᓪᓕᕐᒥ ᑐᓐᖓᓱᑦᑎᑦᓱᒪᕙᒋᑦ, ᐋ, ᖁᔭᓐᓇᒦᒃ ᐅᓂᒃᑳᖅᑲᐅᒐᕕᑦ ᑖᒃᑯᐊ ᐅᓂᒃᑲᐅ-ᑎᒋᔭᑎᑦ ᓄᓇᕗᒻᒥᐅᑦ ᐃᓅᓯᕆᔭᖏᓐᓂᒃ ᐊᔾᔨᑦᓯᐊᖏᓐᓂᒃ ᐅᓂᒃᑳᖅᑲᐅᒐᕕᑦ ᐃᑉᐱᓐᓂᐊᕆᕙᒋ. ᐃᒪᓐᓇ ᐊᐱᕆᒍᒪᕙᒋᑦ, ᖃᓄᕐᓕ ᑐᓴᖅᓯᒪᕕᑦ ᓄᓇᖅᑲᑎᓐᓂᒃ ᓱᓇᒥᒃ ᐃᓪᓗᓕᕆᔾᔪᑎᓐᓂᒃ ᐱᔭᕆᐊᖃᕐᒪᖔᑦᑕ.
[Les propos en inuktitut sont interprétés en anglais puis traduits ainsi:]
Je vous remercie.
Je voudrais d'abord vous souhaiter la bienvenue et vous remercier de votre exposé. Ce que vous avez dit à propos de votre situation s'apparente beaucoup à ce qui se passe au Nunavut. La situation est exactement la même, et j'ai compris vos sentiments quand vous parliez de la situation et de la crise.
Que vous ont dit les membres de la nation à propos...
[Traduction]
:
[
La députée s'exprime en inuktitut ainsi qu'il suit:]
ᐃ, ᐋᒻ, ᓯᕗᕐᓕᕐᒥ ᖁᔭᓕᒍᒪᕙᒋᑦ ᐅᓂᒃᑳᖅᑲᐅᒐᕕᑦ ᐅᓂᒃᑲᐅᑎᒋᔭᑎᑦ ᓄᓇᒋᔭᒻᒪ ᑭᒡᒐᖅᑐᖅ-ᑕᒃᑲ ᐊᔾᔨᒋᑦᓯᐊᕐᒪᒋᑦ.
[Les propos en inuktitut sont interprétés en anglais puis traduits ainsi:]
Une fois encore, je veux vous remercier de votre exposé.
La situation que vous avez décrite s'apparente beaucoup à celle qui prévaut chez moi, au Nunavut...
:
Cela ne fonctionne pas.
[Traduction]
Malheureusement, chers collègues, je pense que nous ne devrons pas seulement suspendre la séance, mais la lever. Nous devrons nous reprendre à un autre moment, je le crains. Nous éprouvons des difficultés techniques de part et d'autre.
[Français]
Madame Malek, merci beaucoup de votre témoignage, aujourd'hui. Nous nous excusons des difficultés techniques, mais nous allons devoir lever la séance.