:
Je déclare la séance ouverte.
[Français]
Bienvenue à la troisième réunion du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord.
[Traduction]
Nous entamons aujourd'hui notre étude sur les obstacles au développement économique autochtone.
Trois organisations ont accepté de témoigner aujourd'hui: l'Administration financière des Premières Nations, le Conseil de gestion financière des Premières Nations et la Commission de la fiscalité des premières nations.
Nous aurons 90 minutes pour leur poser des questions avant de passer aux autres travaux du Comité.
[Français]
Bien sûr, si vous vous trouvez dans la salle de réunion, vous savez comment respecter les mesures sanitaires qui s'imposent.
[Traduction]
Afin d'assurer le bon déroulement de la réunion, j'aimerais énoncer quelques règles à suivre.
Les députés et les témoins peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Des services d'interprétation sont offerts en anglais, en français et en inuktitut. Autrement dit, vous avez quatre options sur votre écran. Vous pouvez choisir entre l'audio du parquet, l'anglais, le français ou l'inuktitut. Si vous n'arrivez plus à entendre l'interprétation, veuillez m'en informer immédiatement, et nous nous assurerons que l'interprétation est bien rétablie avant de reprendre les travaux. À tout moment, vous pouvez utiliser la fonction « Lever la main » au bas de votre écran si vous voulez prendre la parole ou signaler quelque chose à la présidence.
Les députés qui assistent à la réunion en personne doivent procéder comme ils le feraient normalement si tous les membres du Comité se réunissaient en personne dans une salle de comité.
Lorsque vous intervenez, veuillez parler lentement et clairement. Lorsque vous n'avez pas la parole, votre micro doit être désactivé. Je vous rappelle que toutes les observations des députés doivent être adressées à la présidence.
[Français]
Cinq minutes seront accordées à chaque organisation afin que ses représentants prononcent une allocution d'ouverture. Il y aura ensuite une période au cours de laquelle les membres du Comité poseront des questions.
[Traduction]
Pour la première série de questions, les députés disposeront de six minutes chacun dans l'ordre suivant: Parti conservateur, Parti libéral, Bloc et NPD. Pour le deuxième tour et les tours suivants, voici l'ordre et le temps alloué à chaque intervenant: Parti conservateur, cinq minutes; Parti libéral, cinq minutes; Bloc québécois, deux minutes et demie; Nouveau Parti démocratique, deux minutes et demie; Parti conservateur, cinq minutes; et Parti libéral, cinq minutes. Nous répéterons ce cycle pour les interventions suivantes.
Comme je l'ai dit, nous passerons 90 minutes avec nos témoins, après quoi nous siégerons à huis clos pendant les 30 dernières minutes pour nous occuper des autres travaux du Comité.
J'invite maintenant M. Ernie Daniels, le président-directeur général de l'Administration financière des Premières Nations, à ouvrir le bal.
Monsieur Daniels, vous avez cinq minutes.
Merci.
Je m'appelle Ernie Daniels, et je suis président-directeur général de l'Administration financière des Premières Nations, ou AFPN. Je suis accompagné de Steve Berna, notre directeur des opérations.
Tout d'abord, je tiens à remercier le Comité d'avoir entrepris cette étude et d'en avoir fait sa grande priorité au retour des élections. Comme vous le savez, l'AFPN a pour mandat d'émettre des débentures et d'accorder des prêts aux Premières Nations afin de leur permettre de financer des projets d'infrastructure et de développement économique. Nous travaillons avec les Premières Nations qui sont énumérées à l'annexe de la Loi sur la gestion financière des premières nations. L'adhésion est volontaire. Il y a 140 Premières Nations qui ont franchi toutes les étapes de notre processus d'adhésion. L'AFPN est régie par un conseil d'administration, composé de chefs et de conseillers issus des Premières Nations membres.
Depuis l'émission de notre première débenture en 2014, nous avons consenti 1,7 milliard de dollars en prêts. Cet été, nous prévoyons de franchir le seuil des 2 milliards de dollars. Selon le multiplicateur de la Banque du Canada, notre impact économique total s'élève, jusqu'à présent, à 3,5 milliards de dollars. Si nous appliquons la formule de Statistique Canada, les projets que nous avons financés ont généré plus de 17 000 emplois. Les Premières Nations en sont les principales bénéficiaires, mais il n'en demeure pas moins que les collectivités, les entreprises et les habitants des régions avoisinantes profitent également des possibilités d'emploi, d'approvisionnement et de contrat.
Les débentures que nous avons émises jusqu'ici ont tenu compte de la capacité des Premières Nations participantes à s'acquitter de leurs dettes en fonction de leurs revenus autonomes. Il n'y a jamais eu de défaut de paiement sur aucun des prêts que nous avons accordés, ce qui contribue à notre excellente cote de crédit auprès de Moody's et de Standard and Poor's. Nous pouvons emprunter au même taux d'intérêt que la province de l'Ontario, et nous transférons ces taux aux Premières Nations.
Nous avons atteint une masse critique. Compte tenu de la demande, nous devons en faire beaucoup plus, mais les Premières Nations ont une capacité limitée de générer leurs propres revenus, qui sont à la base de notre modèle. C'est un cercle vicieux: l'activité économique permet de générer ces revenus, mais il faut déjà des revenus pour investir dans l'activité économique. C'est pourquoi nous pensons qu'il est temps d'examiner comment nous pouvons collaborer avec le gouvernement fédéral pour passer à la vitesse supérieure et accélérer considérablement les investissements dans les infrastructures et l'économie des Premières Nations.
Permettez-moi de vous présenter quelques faits, histoire de mettre le tout en contexte. Au chapitre de l'infrastructure, il existe un écart d'au moins 30 milliards de dollars entre les Premières Nations et les autres collectivités canadiennes. Étant donné que les coûts de construction augmentent plus rapidement que le taux d'inflation, cet écart se creuse chaque année. Le budget de Services aux Autochtones Canada se chiffre à environ 2 milliards de dollars par année. Ce n'est pas suffisant pour répondre aux besoins actuels, et encore moins pour éliminer l'arriéré. L'approche actuelle, soit le mode de financement par répartition, ne permettra pas de combler de sitôt les lacunes en matière d'infrastructure, même si le gouvernement fédéral s'est engagé à le faire d'ici 2030. Le développement économique à long terme passe d'abord par l'infrastructure.
En somme, quelque chose doit changer. L'approche de financement en vigueur laisse les Premières Nations de plus en plus à la traîne. À l'AFPN, nous croyons que nous pouvons jouer un plus grand rôle, et nous voulons faire partie de la solution. À cette fin, nous avons élaboré une proposition que nous appelons la « monétisation ». Pour ceux d'entre vous qui possèdent une expérience à l'échelon municipal, la monétisation ressemble beaucoup à la façon dont les villes financent leurs infrastructures. En effet, les villes obtiennent des capitaux qu'elles investissent dans l'immédiat, en fonction de leur capacité à rembourser les débentures dans les années à venir. Grâce à la monétisation, l'AFPN émettrait des débentures sur les marchés financiers qui pourraient servir à financer des infrastructures et d'autres projets de développement économique, tout en profitant des prix actuels. Cela aurait une plus grande incidence générale que l'approche fédérale en cours.
Ce qui manque, c'est une source suffisante de revenus pour assurer le service et le remboursement de la dette. Si l'on s'attend à ce que les Premières Nations comblent cet écart, leurs revenus autonomes seront épuisés bien avant qu'elles y arrivent, auquel cas le gouvernement fédéral serait évidemment le premier partenaire envisagé. Nous ne proposons pas d'émettre une débenture de 30 milliards de dollars garantie par le gouvernement fédéral, mais nous aimerions collaborer avec lui pour mettre à l'essai la monétisation dans le cadre d'un projet pilote.
Voici un exemple: le remplacement des générateurs diesel dans les communautés éloignées. En signant un accord avec le Canada, nous pourrions émettre une débenture pour réunir les fonds qui permettraient aux communautés de concevoir des solutions énergétiques fiables, durables et propres. Un tel projet ferait avancer de nombreuses priorités du gouvernement. Nous pourrions ainsi mettre à l'essai le concept de monétisation, et cela ne coûterait rien ou presque rien au gouvernement puisque le service de la dette serait compensé par les économies réalisées en matière de diesel et de transport. Tout ce qu'il faut, c'est une volonté de la part du gouvernement pour essayer quelque chose de nouveau et d'innovateur.
Je tiens à vous remercier de m'avoir donné l'occasion de témoigner devant vous aujourd'hui. Nous avons hâte de poursuivre le dialogue et de répondre à vos questions.
Merci beaucoup.
:
[
Le témoin s'exprime en langue autochtone.]
[Traduction]
Bonjour.
Je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner devant vous aujourd'hui.
Chaque fois que je comparais devant votre comité, je me rappelle toujours que la Loi sur la gestion financière des premières nations, qui a créé l'Administration financière, la Commission de la fiscalité et le Conseil de gestion financière, a été adoptée avec l'appui de tous les partis. Depuis 2005, nous bénéficions du soutien du Comité en lui présentant le travail que nous accomplissons et les leçons que nous avons tirées de l'expérience de nos clients au fil des ans.
Le Conseil de gestion financière des Premières Nations peut maintenant offrir des services à ses clients à partir de ses bureaux à Vancouver, Winnipeg, Ottawa et Montréal. Il importe également de se rappeler que 321 bandes de partout au pays — des bandes assujetties à la Loi sur les Indiens — se sont inscrites à la Loi sur la gestion financière des premières nations. Le succès que nos clients ont obtenu en utilisant les outils prévus par la Loi est évident. Les trois institutions ont toutes fait leur travail et ont prouvé que les solutions conçues par les Autochtones fonctionnent.
Vous avez reçu une présentation PowerPoint sur une initiative que nous appelons « Feuille de route ». Elle est le fruit de notre réflexion sur les objectifs que devraient atteindre les stratégies de mise en œuvre de la réconciliation sur le plan économique et financier. La feuille de route aborde les problèmes les plus importants que nous constatons et dont nos clients nous ont fait part. Nous y relevons les obstacles au développement économique, en plus de proposer des moyens de les surmonter. Il n'existe pas de solution unique au problème. Il faudra une foule de mesures, ce qui nécessitera des changements d'attitude, de politiques, de lois et de règlements. Nous diviserons la feuille de route en chapitres, que nous comptons publier chaque mois pour permettre aux gens d'en faire l'examen et de présenter leurs observations au cours des six prochains mois.
Les chapitres porteront sur les sujets suivants: statistiques et données; infrastructures; développement économique; compétences et pouvoirs financiers accrus; force de l'union, c'est‑à‑dire regroupement; et amélioration de la gestion du risque. Ces six thèmes correspondent aux domaines dans lesquels il existe, selon nous, des obstacles qui doivent être éliminés. Nous serons heureux de vous présenter directement ces chapitres. Nous veillerons à ce que vous receviez une copie de chacun des chapitres au fur et à mesure de leur publication.
Les obstacles au développement économique persistent. En voici une liste: compétences et pouvoirs financiers limités; partage des revenus; mauvais état des infrastructures dans nos collectivités; accès limité à la monétisation des sources de revenus; nécessité de conclure des accords de transfert modernes entre le Canada, les provinces et les gouvernements des Premières Nations; et, enfin, nécessité de moderniser notre capacité administrative pour répondre aux questions en matière de gestion financière et de gouvernance qui touchent les communautés.
À titre facultatif, nous devons permettre la création d'une masse critique de communautés afin de réaliser des économies d'échelle qui peuvent mobiliser les capacités nécessaires en matière de service à la clientèle et d'administration en vue de satisfaire à la norme du consentement libre, préalable et éclairé.
Le renforcement des capacités doit être appuyé par les nouvelles institutions et organisations des Premières Nations.
Je pense que le Canada doit reconnaître qu'il peut, lui-même, faire progresser le développement économique des communautés grâce à ses approches en matière d'approvisionnement. Le projet Trans Mountain est un bon exemple. En tant que membre du conseil d'administration, je peux vous dire que des contrats d'une valeur de 2,7 milliards de dollars ont été attribués à des entreprises et coentreprises autochtones. Cela représente 3 682 contrats accordés à 71 groupes. Onze pour cent des employés sont autochtones. On parle de 2 064 embauches. La valeur des ententes sur les avantages mutuels s'élève à 619 millions de dollars, soit 68 accords avec 74 nations.
Il faut encourager l'inclusion des Autochtones dans tous les aspects de l'économie. Ce transfert de connaissances facilitera une approche fondée sur le risque pour assurer le développement économique.
Je vous remercie.
Je m'appelle Manny Jules, et je suis le président de la Commission de la fiscalité des premières nations.
Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant le Comité pour contribuer à votre étude sur les obstacles au développement économique autochtone.
La ville d'Ottawa vient d'être le théâtre d'une manifestation contre les restrictions liées à la pandémie. Bon nombre des manifestants sont frustrés par le manque de libertés économiques engendré par la pandémie au cours des 20 derniers mois. Les Autochtones peuvent comprendre leur frustration; nous, nous vivons dans un confinement économique depuis 150 ans à cause de la colonisation. Nous avons été privés de nos libertés économiques lorsque nos champs de compétence, nos pouvoirs financiers et nos titres ont été retirés de la fédération par voie législative et que nos peuples ont été exclus de l'économie. Nos institutions ont été remplacées par une bureaucratie fédérale. Privés de liberté, nous sommes devenus accros aux programmes et à la dépendance.
Je vous rappelle que c'est cette institution, le Parlement du Canada, qui, en 1927, a érigé en infraction la perception de taksis au sein de nos communautés, ce qui aurait servi à payer des avocats pour défendre nos revendications territoriales ou à construire nos propres infrastructures. Nous avons été dépouillés de nos pouvoirs financiers et de nos terres. Le Parlement nous a enlevé notre liberté économique, c'est‑à‑dire la liberté d'occuper des emplois décents, d'avoir accès à de l'eau potable, de recevoir de bons soins de santé et une bonne éducation et, enfin, de bâtir un avenir meilleur pour nos enfants. Le Parlement nous a enlevé la liberté de profiter des nombreux avantages que les citoyens du Canada tiennent pour acquis.
Je comparais devant vous aujourd'hui pour demander une réconciliation économique.
J'ai remis au Comité un document intitulé Combler les écarts systémiques touchant les Autochtones, dans lequel nous abordons et mesurons six obstacles au développement économique autochtone, obstacles causés par la colonisation. Premièrement, sur le plan des infrastructures, nous sommes aux prises avec un écart d'au moins 30 milliards de dollars. Deuxièmement, nous faisons face à un manque d'accès au capital d'environ 175 milliards de dollars. Troisièmement, nous devons composer avec un manque de pouvoir financier d'environ 32 milliards de dollars. Quatrièmement, au chapitre de l'emploi, il nous manque environ 75 000 scientifiques, ingénieurs, mathématiciens, médecins et économistes, ce dont nous avons cruellement besoin. Cinquièmement, nos coûts d'exploitation sont de quatre à six fois plus élevés que ceux du reste du pays. Sixièmement, nous faisons face à un écart d'environ 12 milliards de dollars sur le plan des échanges commerciaux.
Avant de passer en revue nos propositions visant à régler les causes profondes de ces obstacles systémiques, permettez-moi de rappeler au Comité ce qui ne fonctionne pas. On ne peut pas combler ces lacunes par des mesures pseudo-vertueuses ou par des programmes gouvernementaux. Cela ne fait que traiter les symptômes et accroître la dépendance. On ne peut pas non plus combler ces lacunes en misant sur l'expansion de la bureaucratie fédérale. Cela ne fait qu'accroître les coûts d'exploitation et ralentir les innovations. Toutes ces approches prolongent la colonisation et ralentissent la réconciliation économique.
D'après mon expérience, il n'y a qu'un seul moyen efficace de combler ces lacunes: nous devons trouver nous-mêmes des solutions novatrices.
J'ai passé ma vie à travailler avec des leaders, comme le regretté grand chef Tom Bressette, Harold Calla, Ernie Daniels, le chef Robert Louie, le chef Alan Claxton, le chef Joe Mathias et bien d'autres. Ensemble, nous avons mis en place un système d'innovation en trois volets, le tout dirigé par les Autochtones.
En premier lieu, il faut des mesures législatives fédérales qui reconnaissent notre champ de compétence et nos institutions. Il s'agit notamment de la Loi sur la gestion financière des premières nations et de la Loi sur la gestion des terres des premières nations. En deuxième lieu, les Premières Nations ont l'option de recourir à ce champ de compétence et à ces institutions. En troisième lieu, nos institutions mettent au point des solutions administratives et juridiques novatrices, en collaboration avec les Premières Nations participantes, afin d'exercer leurs compétences pour appuyer la croissance économique et les objectifs communautaires.
Notre système a bien fonctionné puisque plus de la moitié de toutes les Premières Nations se prévalent maintenant de ces mesures législatives. Nous estimons que 80 % de toutes les lois autochtones au Canada sont adoptées au moyen de ce cadre. Nous avons appuyé des milliards de dollars en investissements et en recettes publiques. Nous avons amélioré les infrastructures et les services pour ces communautés. Si vous souhaitez nous aider à éliminer les obstacles à nos économies, une des solutions efficaces consiste à élargir ce système d'innovation autochtone.
Tout d'abord, nous proposons la création d'une nouvelle institution aux termes de la Loi sur la gestion financière des premières nations. Il s'agit de l'Institut des infrastructures des Premières Nations, qui s'ajoutera à nos institutions existantes en vue d'aider les nations intéressées à construire les infrastructures environnementales et économiques nécessaires pour soutenir la pérennité des communautés. Cette institution contribuera à réduire les primes d'assurance, à améliorer notre accès aux capitaux et à construire de meilleures infrastructures plus rapidement.
Deuxièmement, nous proposons un élargissement des pouvoirs fiscaux pour inclure les taxes sur le tabac, le cannabis, l'alcool et le carburant. Nous proposons une redevance sur les ressources des Premières Nations sur nos terres ancestrales. La façon la plus rapide de sortir de la dépendance liée à l'ère coloniale est de mettre en œuvre nos pouvoirs fiscaux.
Troisièmement, nous proposons...
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Je vous remercie, monsieur le président, et je suis heureux d'être ici aujourd'hui.
Je veux prendre un instant pour remercier tous les témoins qui sont avec nous aujourd'hui: M. Daniels, M. Calla, M. Jules et M. Berna, qui est assis à l'arrière bien tranquille jusqu'à maintenant. Vous avez accompli un travail incroyable. J'ai eu le privilège d'en voir une partie et j'ai hâte d'entendre ce que vous avez à dire pour nous aider dans notre étude.
Je veux mentionner très clairement les raisons qui nous ont incités à faire cette étude et pourquoi nous avons demandé à la faire. Je sais que nous avons beaucoup de nouveaux membres au sein du Comité et que nous en sommes à notre première étude au cours de cette nouvelle session, mais par le passé, le Comité a travaillé très fort pour améliorer le sort des communautés des Premières Nations.
Dans l'un des mémoires que nous avons reçus aujourd'hui, de M. Jules, je peux lire « l'économie autochtone a la population la plus jeune, la main-d'œuvre à la plus forte croissance, une bonne capacité de production inutilisée et de nombreux avantages sous-utilisés ». Je dirais que nous devons trouver des solutions et que c'est indispensable au succès futur du Canada.
Si j'ai retenu une chose des séances précédentes avec vous, c'est qu'une saine gouvernance mène à des moyens d'agir et que les moyens d'agir mènent au succès, entre autres financier, et que le succès est, au bout du compte, la voie vers l'autodétermination.
Monsieur Calla, vous avez présenté votre projet de feuille de route. J'ai eu le privilège de prendre connaissance d'une partie de vos travaux à quelques reprises, alors ma première question va porter sur ce projet.
Ma question est en fait fort simple. Que font les ministères, ou mieux encore, qu'est‑ce qu'ils ne font pas pour vous fournir l'aide dont vous auriez besoin pour assurer le succès de votre feuille de route?
:
Je vous remercie de la question.
Nous avons présenté la feuille de route à Services aux Autochtones Canada et à Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada. Ils l'ont en main. Ils ne sont pas contre l'idée, mais nous aimerions qu'ils s'en occupent, et qu'il y ait un sentiment d'urgence. Nous ne pouvons attendre deux ou trois ans pour qu'elle soit mise en œuvre. Il faut qu'elle soit acceptée. Nous voulons qu'ils annoncent qu'elle est acceptée. Nous avons besoin qu'elle soit financée dans le cadre du processus de crédits parlementaires. Nous pensons que les trois institutions ont prouvé, par leurs réalisations à ce jour, sa rentabilité.
Ce que je voudrais voir c'est une déclaration selon laquelle la voie vers la réconciliation, sans exclure d'autres approches, est définie par nos actions, par ce que l'on voit dans la feuille de route, et voir aussi un engagement pour que nos trois institutions — nous parlons tous essentiellement de la même chose, mais en l'exprimant un peu différemment — obtiennent ce dont elles ont besoin pour mettre en œuvre leurs idées.
Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration liminaire, je pense qu'il y a un problème. Il faut un changement dans les attitudes, les politiques, les règlements et la loi pour y parvenir, et il faut se mettre d'accord pour commencer à s'y attaquer dès maintenant. Nous ne pouvons attendre 10 ans comme dans le cas de l'adoption de la loi sur la gestion financière pour apporter ces changements. Il faut accroître le sentiment d'urgence.
:
Monsieur Calla, je vais reprendre la balle au bond.
Notre étude porte, en fin de compte, sur les obstacles. Au sujet de vos commentaires, seriez-vous d'accord pour dire qu'il y a toujours eu dans la relation entre le ministère et les Premières Nations des réticences à changer ou à céder un peu de contrôle?
Ne serait‑il pas possible d'améliorer la relation financière en matière de transfert en ayant recours à des formules statistiques basées sur des données qui sont prévisibles plutôt qu'à des fonctionnaires qui ont les mains liées par les structures et les barrières existantes et qui prennent parfois des décisions dans des situations de crise... Je ne critique pas nécessairement les fonctionnaires, mais ils sont placés dans une position où ils doivent travailler à l'intérieur d'un système qui est en place depuis si longtemps qu'il est difficile de le changer.
Je m'excuse d'avoir été aussi long, mais pensez-vous que c'est vrai? Y a‑t‑il des façons de changer cela?
:
Il est vrai qu'il est difficile pour les fonctionnaires d'agir en raison des mandats existants. En fait, je dirais que le gouvernement est lui-même en situation de conflit en raison, d'une part, de sa responsabilité de fiduciaire, d'autre part, de sa responsabilité de protéger la Couronne. Ces deux responsabilités ne concordent pas toujours, selon moi. Je ne suis pas avocat mais comptable, alors je suis certain que des avocats voudront dire le contraire.
Je pense que c'est un problème et qu'on n'encourage pas les fonctionnaires, quel que soit leur niveau, à prendre des risques. Il n'y a aucune tolérance à l'égard du risque.
Ce que font les institutions, c'est se placer entre le gouvernement et les Premières Nations, et nous pouvons gérer ce risque. Nous pouvons déterminer ce risque lié à la gestion.
Ce que nous disons, à mon avis, c'est que les bureaucraties gouvernementales doivent céder la place aux organismes et aux institutions autochtones. Dans le cadre de la loi sur la gestion financière, nous avons prouvé que les solutions conçues par des Autochtones fonctionnent et que vous devez nous donner le pouvoir de continuer à créer.
:
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Je remercie les membres du Comité qui sont ici aujourd'hui, ainsi que, bien sûr, notre greffière, nos analystes et nos interprètes. Je tiens aussi à remercier nos témoins experts d'être avec nous et de nous faire part de leur expertise.
[La députée s'exprime en Wolastoqiyik.]
[Traduction]
Je m'appelle Jenica Atwin. Je suis députée de Fredericton et je viens du territoire wolastoqiyik non cédé ici à Fredericton.
J'aimerais creuser un peu la question de la monétisation des infrastructures. Monsieur le président, j'ai trouvé les discussions très intéressantes, en particulier quand on a parlé du potentiel des solutions d'énergie propre pour les communautés nordiques et éloignées si elles avaient plus de pouvoir d'achat, notamment par la monétisation des infrastructures.
J'aimerais que vous nous expliquiez plus en détail en quoi consiste la monétisation des infrastructures pour les Premières Nations. Comment cela contribuera‑t‑il à générer des recettes et quelle est la meilleure façon de procéder?
:
Merci de cette très bonne question.
La monétisation est un concept très simple. Comme particuliers, nous l'utilisons presque tous les jours. Quand vient le temps d'acheter une maison, habituellement, nous n'avons pas tout l'argent nécessaire. Nous prenons donc une hypothèque basée sur notre capacité financière de la rembourser, soit normalement notre salaire et toute autre source de recettes. Dis simplement, c'est ce en quoi consiste la monétisation.
Le problème, à l'heure actuelle, c'est le système definancement par répartition qui est en place au gouvernement fédéral pour financer les infrastructures dans les communautés autochtones. Ce qui est dans le budget, c'est ce qui est versé pour les infrastructures.
Pour combler le déficit en matière d'infrastructures, le budget s'élève à environ 2 milliards de dollars. Tout ce montant n'est pas consacré aux nouvelles infrastructures; il y a aussi la réfection des infrastructures existantes, en particulier en ces temps de COVID. Nous allons devoir améliorer la ventilation dans nos édifices publics et nos écoles. Ce sera sans doute une priorité.
Deux milliards de dollars par année, ce ne sera pas suffisant pour éliminer le déficit. Nous devons pouvoir tirer des recettes soit de ce 2 milliards de dollars, soit d'un nouveau budget. À titre d'exemple, si nous prenons 1 milliard sur les 2 milliards et consacrons ce montant à l'infrastructure, l'Autorité financière des Premières Nations, grâce à sa capacité d'accès au capital et à ses cotes de crédit, peut sans doute obtenir environ 25 milliards de dollars. Pensez‑y. C'est là tout le pouvoir de l'effet de levier; c'est le pouvoir de la monétisation.
Il en va de même des génératrices au diesel. Nous avons 300 communautés au Canada qui les utilisent, pas toutes, mais il y en a beaucoup. Comme je l'ai mentionné, le coût pourrait être compensé par les économies réalisées pour l'achat du diesel et pour le transport afin de mettre en place des projets de type énergie verte qui seraient durables dans nos communautés.
Je vais demander à M. Berna de vous en dire plus à ce sujet, car il a travaillé dans ce dossier.
Monsieur Berna, vous avez la parole.
:
Excellent. Je vous remercie.
Madame Atwin, si M. Daniels et moi, au nom de l'Autorité financière des Premières Nations, faisons la promotion de ce projet, c'est parce que notre conseil est formé de chefs et de conseillers qui font partie de nos membres, et que 321 Premières Nations dans les 10 provinces et les Territoires du Nord-Ouest se sont joints à nous. Ils nous ont demandé de promouvoir ce projet en leur nom. C'est une demande volontaire de leur part.
Nous avons un plan en cinq étapes. La première consiste pour chacune des administrations à établir ses priorités et ses politiques. Elles peuvent le faire pour l'eau potable, le logement et l'infrastructure. C'est la première étape.
La deuxième étape consiste pour les Premières Nations qui veulent participer à présenter des projets prêts à démarrer qui respectent leurs priorités ou politiques. Le Canada déterminera ceux qui vont aller de l'avant.
À la troisième étape, on demandera à l'Administration financière des premières nations de trouver le financement. Comme nous sommes gouvernés par les Premières Nations, nous levons des fonds au nom des Premières Nations. C'est l'effet de symbiose.
À la quatrième étape, le Canada doit conclure une entente avec l'Autorité financière des Premières Nations et les Premières Nations pour couvrir le total annuel des paiements affectés au remboursement de la dette. Tout comme vous le faites pour votre hypothèque, le Canada le fait également.
La cinquième étape est une étape clé. Dans le cadre du modèle de financement par répartition, on construit une maison, on quitte les lieux, on espère qu'elle sera entretenue et qu'elle durera toute sa vie utile. La cinquième étape consiste à avoir des accords contractuels avec nos communautés des Premières Nations. Nous allons veiller à ce que l'entretien se fasse, alors la vie utile d'une maison de 25 ans sera de 25 ans ou de 50 ans, ou peu importe. L'accord contractuel est ce qui évitera au Canada de devoir revenir pour la construire une deuxième fois.
Je vous remercie.
:
Merci, monsieur le président.
J'aimerais préciser que le témoin pourrait nous envoyer sa réponse par écrit. C'est une proposition que vous pouvez faire également, monsieur le président.
Je souhaite remercier tous les témoins qui sont présents aujourd'hui, soit MM. Daniels, Berna, Calla et Jules.
J'aimerais également féliciter les représentants d'Administration financière des Premières Nations pour le 15e anniversaire de l'organisme. En effet, leur organisme a été fondé en 2006, alors il y avait cet anniversaire à célébrer l'an dernier.
J'aimerais aborder d'autres sujets que ceux dont nous avons parlé jusqu'à maintenant.
Vous avez mentionné que, parmi les 579 communautés des Premières Nations qui pourraient se prévaloir de la Loi sur la gestion financière des Premières Nations, seulement 321 le faisaient. Je me demande, en toute humilité, si une difficulté se pose déjà ou si quelque chose entrave le développement économique, selon vous.
Seriez-vous capables de nous expliquer pourquoi certaines communautés seraient réticentes à se prévaloir de cette possibilité?
:
Je pense qu'il existe quelques obstacles philosophiques concernant les droits ancestraux et l'obligation de fiduciaire. Ce que nous avons ici, c'est ce qu'on appelle une « coalition de partenaires », ceux qui cherchent des solutions indépendantes pour s'occuper d'eux-mêmes.
Je pense que c'est l'un des enjeux fondamentaux, la croyance, surtout dans les régions historiques où il y a eu des traités, qu'il existe une obligation de fiduciaire qui n'est pas respectée. Il n'y a pas de reconnaissance des droits ancestraux et il n'y a pas eu un règlement complet des revendications territoriales. Ils ont donc le sentiment qu'ils peuvent supprimer l'obligation de fiduciaire du gouvernement fédéral. C'est un argument que nous avons entendu lorsque nous préparions le projet de loi, mais les choses changent. Lorsque nous le préparions, on nous disait que 25 Premières Nations au Canada étaient intéressées. Nous en sommes maintenant à 321, y compris quelques communautés très florissantes au Québec.
Nous arrivons à surmonter cet obstacle, mais il demeure dans certains cas.
:
J'aimerais ajouter quelque chose.
Le véritable obstacle est d'avoir une source de recettes adéquate pour soutenir la dette. La seule façon pour nous de croître et d'avoir une économie florissante, c'est d'avoir accès à du financement abordable. Cette loi nous permet de le faire.
Une fois la monétisation acceptée comme forme de financement pour les infrastructures et le développement économique au Canada, vous allez voir beaucoup de Premières Nations vouloir faire le saut — plus qu'à l'heure actuelle. Lorsque j'ai commencé en 2011, ici à l'Autorité financière des premières nations, 69 Premières Nations étaient inscrites à l'annexe de la loi, et aujourd'hui, il y en a 321, alors il y en a beaucoup.
Cela se fait habituellement par l'exemple, comme l'achat de Clearwater par sept communautés micmaques en Atlantique, qui a été une très belle innovation. C'est ce qu'on appelle du développement dans sa plus simple expression, mais elles n'auraient pas été en mesure de le faire si leur seule option avait été de se tourner vers les banques commerciales.
L'effet de levier est important, et c'est ainsi que les communautés génèrent leur propre source de recettes. Toutefois, on pourrait en faire beaucoup plus en trouvant d'autres sources de recettes, comme M. Jules l'a mentionné dans son exposé. Nous avons besoin d'une part de certaines recettes, et les provinces le font déjà. Il faut que le gouvernement fédéral examine aussi cette possibilité.
:
Je vous remercie de vos réponses. Il est très intéressant de voir que le développement que vous faites présentement va peut-être inciter d'autres communautés à se prévaloir de la Loi. Pour ce qui est de l'aspect philosophique, c'est une autre question, en effet.
Je remercie entre autres les Premières Nations de ma région. Vous avez effectivement parlé du Québec. Je pense notamment à la nation innue de Uashat‑Maliotenam et à la Première Nation des Innus Essipit, qui sont deux exemples de Premières Nations qui ont embarqué avec vous dans le processus.
J'ai participé récemment au Grand cercle économique des Peuples autochtones et du Québec, où il a été question des femmes. Je ne dirais pas que ce sujet m'a beaucoup étonnée, étant donné que l’on connaît beaucoup de nouvelles entrepreneures. Évidemment, il est question ici des Premières Nations, mais c'est un sujet auquel toutes les communautés se trouvent liées.
A-t-on pensé à la place que les femmes peuvent occuper? On parle ici de gouvernance, bien entendu. À cet égard, les femmes rencontrent-elles des difficultés qui leur sont propres?
:
Ce n'est pas un problème pour nous. Je viens d'une société matriarcale, alors j'ai l'habitude de recevoir des ordres.
Le fait est qu'il existe sans doute plus de possibilités pour les femmes de progresser dans les communautés autochtones pour les situations dont nous discutons. Ce dont nous avons besoin, c'est des possibilités d'inclusion. Ce que je veux dire, c'est qu'il faut que les jeunes aient la possibilité de participer, par exemple, de jouer un rôle au sein d'une commission des valeurs mobilières pour apprendre à comprendre les marchés de capitaux. Il faut que tous les Autochtones et nos femmes jouent un rôle.
Ce que j'observe au sein des communautés autochtones avec lesquelles nous travaillons, c'est que plus de femmes occupent des postes de direction à tous les niveaux, et je trouve que c'est une très bonne chose.
:
[
La députée s’exprime en inuktitut et l’interprétation en anglais de ses propos est traduite ainsi:]
Merci. Tout d’abord, j’aimerais vous souhaiter la bienvenue, et vous remercier de vous adresser à nous et de faire le point sur ce que vous faites.
J’ai une question pour Harold Calla du Conseil de gestion financière des Premières Nations. J’ai été décontenancée quand il a parlé du pipeline Trans Mountain.
Comment le Conseil de gestion financière des Premières Nations s’est‑il réconcilié avec les Premières Nations qui s’étaient opposées au pipeline Trans Mountain? Lorsqu’il s’agit de développement économique, comment arrivez-vous à des ententes lorsque vous n’êtes pas d’accord sur certaines méthodes et sur certaines façons de faire les choses? Comment résolvez-vous ces questions en matière de développement économique?
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C’est parfait. Merci beaucoup.
Merci à tous de vos témoignages. C’est formidable de voir des visages familiers.
Monsieur Jules, vous étiez un peu sur une lancée, alors je vais m’adresser à vous en premier, si vous me le permettez. Nous parlons des libertés économiques, et je vous sais gré d'en parler. Vous avez dit que ces libertés avaient été restreintes pendant plus de 150 ans et que beaucoup des restrictions à cet égard étaient le fait de lois adoptées par le Parlement.
Que pouvons-nous faire pour soutenir l'élimination de certaines de ces restrictions, réglementations et tracasseries administratives?
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Le point saillant pour moi était une entente de partage des taxes au Nouveau-Brunswick, entente à laquelle le premier ministre Higgs a néanmoins mis fin l’an dernier. Je suis certain que Mme Atwin est au courant de cela. Cette entente sur le partage des taxes avait procuré des millions de dollars aux collectivités individuelles. Il permettait à ces collectivités de partager les revenus générés. Rn fin de compte, c’est cette solution qui est la bonne.
Les gouvernements fédéral et provinciaux doivent accorder aux Premières Nations une marge de manœuvre en matière de taxation et de compétence, afin qu'elles puissent se prendre en charge. C’est pourquoi j’ai fait référence aux modifications apportées à la Loi sur les Indiens en 1927. Essentiellement, ces modifications soutenues par Duncan Campbell Scott ont mis en place les politiques relatives aux pensionnats et un grand nombre des politiques auxquelles nous sommes toujours confrontés, ces politiques inhérentes à la bureaucratie et à la Loi sur les Indiens.
Lorsque je pense à la place qui revient aux Premières Nations et à la façon dont nous pouvons commencer à travailler ensemble, je pense que nous devons légiférer pour nous sortir du pétrin dans lequel nous nous trouvons. Il s’agit de générer des ressources stables par l'intermédiaire de la fiscalité et d’autres compétences, afin que nous puissions commencer à décider de nos priorités sans avoir à demander l’approbation de quelqu’un d’autre.
Nous proposons de développer une approche qui nous amènerait à faire partie de la fédération, ce qui n'est pas le cas présentement. Toutes les ressources du pays sont réparties entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux. D’ailleurs, la première initiative qui nous a permis d’avoir des revenus fiscaux indépendants remonte à 1988. Il est grand temps que nous commencions à considérer la fiscalité comme un levier économique et administratif des plus fondamental. Le gouvernement fédéral pourrait montrer la voie à cet égard.
Cela dit, nous tendons la main pour tenter de résoudre les problèmes au Nouveau-Brunswick. Nous travaillons avec les Micmacs. Nous travaillons également au Manitoba et ici en Colombie-Britannique pour tenter de résoudre ces questions très complexes.
Or, nous commençons à les résoudre, et toutes les institutions qui sont devant vous aujourd’hui témoignent du fait que la stabilité et la compétence mènent au développement et à la croissance économiques, et permettent de s'attaquer localement aux questions de politique sociale. Cela met le pouvoir là où il doit être, c'est‑à‑dire entre les mains des collectivités.
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Merci, monsieur le président.
J’espère que les interprètes peuvent m’entendre. J’ai fait quelques ajustements à mon microphone.
Je tiens tout d’abord à souhaiter la bienvenue à tous les intervenants d’aujourd’hui. Je suis vraiment ravi que Manny Jules, Harold Calla et cet ancien gars du Nord, Ernie Daniels — un de mes collègues de longue date —, comparaissent devant nous.
Ils ont soulevé des points très intéressants. J’espère, monsieur le président, que ces trois témoins nous fourniront les documents auxquels certains d’entre eux ont fait référence, afin que le Comité puisse les utiliser dans le cadre de l'examen qu'il mène sur cette question.
Je n’ai pas besoin de dire à ces trois personnes à quel point cette question est importante. L’examen des obstacles et de la question de la réconciliation économique est très important pour nous si nous voulons avancer. C’est une grande partie de la réconciliation. Dans les Territoires du Nord-Ouest, nous avons beaucoup travaillé sur cette question parce qu’elle doit faire partie du plan de reconstruction et de reconstitution des nations. Il s'agit en fait de savoir comment nous allons nous gouverner et comment nous allons nous financer. Le plan de financement doit être très diversifié parce qu’il n’y a pas un pot unique d’argent dans lequel nous pouvons puiser.
Nous avons beaucoup parlé du partage des recettes tirées de l’exploitation des ressources et, lors de notre dernier congrès libéral, nous avons adopté une motion selon laquelle la moitié des recettes tirées de l’exploitation des ressources qui sont versées au gouvernement fédéral et aux Territoires du Nord-Ouest serait versée aux gouvernements autochtones. Nous avons également parlé de l’imposition de notre propre membrariat une fois que nous aurons signé et réglé les accords d’autonomie gouvernementale et que nous serons allés de l'avant avec le régime foncier.
Un autre élément important est l’examen de la question de l'approvisionnement auprès des entreprises autochtones. Jusqu’à présent, les politiques d’approvisionnement n’ont tout simplement pas fonctionné. Elles sont tellement vieilles et dépassées qu’elles ne fonctionnent pas pour nous. Du reste, elles sont pénibles à utiliser.
Il y a beaucoup de choses qui se passent. J’ai beaucoup aimé le document, l’article, qu’Ernie Daniels a présenté sur le remplacement des générateurs diesel dans les Territoires du Nord-Ouest. Je crois, monsieur Daniels, que vous avez parlé d’une seule source d’argent, et je crois que vous avez fait référence à l’argent qui est destiné aux infrastructures des communautés autochtones, mais je serais curieux de savoir si vous cherchez d’autres sources de financement ou d’autres sources d’argent. Il y avait de l'argent à aller chercher dans le Fonds pour l’énergie dans l'Arctique. Je pense qu'il y avait 400 millions de dollars là‑dedans.
Est‑ce qu’une combinaison de différentes sources de financement du gouvernement vous permettrait d’aller de l’avant et de réaliser un projet pilote? C’est ma première question, et j’en poserai une deuxième une fois que vous aurez répondu à celle‑là.
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Merci, monsieur McLeod. C’est un plaisir de vous revoir.
Oui, l’origine de l’argent n’a pas vraiment d’importance. Je pense que ce qui est vraiment important, c’est qu’il s’agisse d’un flux d’argent, car je ne sais pas si le paiement d’un montant forfaitaire est la chose à faire. Il n’y a probablement pas assez d’argent pour tout faire. Si le déficit sur le plan des infrastructures est d’au moins 30 milliards de dollars — c’est probablement plus; je pense que ce l’est — et si le gouvernement n’est pas en mesure de fournir ce financement dans un court laps de temps, eh bien, on ne s’approchera pas de la cible.
Avec le diesel, c'est peu importe où se trouve le flux de revenus, et dans mon exemple, j'ai précisé que c'est le gouvernement qui paie pour le diesel. Il paie pour le transport. Il y a un coût à cela, donc si nous avions une alternative plus efficace sur le plan énergétique, vous économiseriez sur ce point. C’est une source de revenus, et je sais que les économies et les coûts vont dans un pot commun. Je sais aussi qu'il y a certains aspects complexes à cela. Sauf que s’il y avait aussi une source dédiée, les collectivités pourraient le faire à leur propre rythme, quand elles en ont besoin, quand elles sont prêtes et quand elles sont capables de le faire.
L’obtention de ce flux de revenus est déterminante, et les accords de partage des revenus vont vraiment permettre de construire ces infrastructures et de stimuler le développement économique. Beaucoup de collectivités dont nous finançons les projets construisent des infrastructures avec ce qu’elles ont, mais ce qu’elles font, c’est créer des possibilités qui inciteront des personnes à se lancer en affaires. C’est un peu la même chose.
Nous avons pensé que la filière du diesel couvrait de nombreux aspects importants pour le gouvernement du Canada.
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Que ce soit avant ou après, peu importe; c'était à peu près en 2019, n'est-ce pas? C'était simplement pour avoir une idée.
Je m'excuse, je ne voulais pas vous couper la parole, mais il y a un point que j'aimerais éclaircir. Ma question est peut-être naïve, et je ne veux pas non plus mettre des mots dans la bouche de ma collègue. Celle-ci a également parlé de la réconciliation.
Je me demande si le fait d'occuper ces deux postes peut donner l'impression qu'il s'agit d'un conflit d'intérêts. Je parle ici d'une impression ou d'une perception de conflit d'intérêts, bien entendu. C'est à vous de me répondre selon votre perception. Quoi qu'il en soit, on voit ici qu'il y a deux postes: l'un est très important sur le plan de la direction, tandis que l'autre concerne le conseil d'administration, ce qui est autre chose, mais il reste que c'est le gouvernement du Canada qui vous le demande.
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Eh bien, le Conseil de gestion financière ne l'a pas fait, parce que ce n'est pas son rôle. D'autres personnes ont tenté de discuter avec eux, mais ce n'était pas leur rôle. Ce n'est pas le rôle du Conseil de gestion financière de relancer les gens sur ces questions. Ce n'est pas notre rôle.
À titre personnel, je suis probablement en faveur d'un abandon des carburants fossiles s'effectuant de façon plus pragmatique. La question peut également être posée aux opposants, car, en matière de réconciliation, il y a deux côtés à une médaille. De quelle façon pouvons-nous concilier le fait que les avantages économiques tirés de ces initiatives ne profitent pas aux communautés des Premières Nations qui en subissent les conséquences, d'une part, et l'absence de plans d'assainissement connexes, d'autre part? Je crois que les Premières Nations doivent participer à ces conversations.
Si, dans la foulée de cette participation, les projets sont rejetés, tant pis. C'est mon point de vue. Mais celui‑là ne l'a pas été.
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Merci, monsieur le président.
Merci aux témoins d'être des nôtres aujourd'hui. C'est très apprécié.
Monsieur Calla, vous avez mentionné la nécessité de changer l'attitude, les politiques et la législation, mais vous avez également déclaré ne pas vouloir attendre. C'est plutôt paradoxal de parler de rapidité quand il est question d'attitude, de politiques et de législation.
J'aimerais maintenant m'adresser à M. Jules à propos de sa remarque voulant qu'un autre programme gouvernemental ou expansion de la bureaucratie soit la dernière chose dont nous avons besoin. Ensuite, vous avez enchaîné avec les innovations. Pourriez-vous rapidement nous parler des innovations et nous en donner des exemples, de même que les raisons qui les motivent?
Je suis convaincu que c'est la meilleure façon de procéder. Pourriez-vous nous donner des exemples?
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La Loi sur la gestion financière des premières nations vous donne une idée précise de ce que j'entends par innovation. Il faut être en mesure de créer des institutions qui proposent des idées novatrices. Évidemment, beaucoup des idées mises en pratique depuis plus d'un siècle n'ont rien donné. Il faut arriver à habiliter les personnes et chacune des communautés des Premières Nations à proposer des idées novatrices, tant de façon individuelle que collective.
La Loi sur la gestion financière des premières nations nous a permis d'exploiter une innovation qui transcende les obstacles communautaires, et nous avons réussi à surmonter les obstacles économiques en travaillant ensemble. L'une des plus grandes innovations a trait à la législation fédérale. Elle nous a accordé un territoire de compétence; a veillé à ce que nous puissions créer de la capacité, offrir de la formation et transmettre des compétences aux personnes et aux communautés; et a assuré l'existence d'une réglementation. Tout cela est crucial à nos efforts pour en venir à bâtir toujours plus d'infrastructures en éducation et susciter encore plus d'innovation.
L'éducation a ici une importance vitale, et c'est pourquoi j'ai mentionné l'approche STIEM, c'est‑à‑dire une approche axée sur les sciences, les technologies, l'ingénierie, l'économie et les mathématiques. Nous devons repenser l'enseignement à l'échelon local, mais aussi être en mesure d'inspirer les élèves. Nous espérons que l'Institut des infrastructures des Premières Nations ou IIPN permettra entre autres ce genre de choses afin de pleinement exploiter le potentiel des personnes qui vivent en région éloignée et qui proposent une approche différente pour résoudre un problème. Nous espérons un jour envoyer quelqu'un à la station spatiale, comme notre distingué président ici présent, et cela n'est possible que si nous enseignons de façon différente à nos élèves et les inspirons en conséquence.
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J'ai mentionné que la Loi sur la gestion financière des Premières Nations était une innovation qui émanait d'un besoin au sein des communautés, ici, au Canada. Nous avons dit que la seule façon d'œuvrer à la résolution des causes profondes et systémiques de notre manque de développement économique était de créer nos propres institutions, afin que nous puissions user de nos propres compétences pour prendre des décisions nous-mêmes.
Cette approche, bien sûr, se bute aux autres textes législatifs. Toutefois, ce que cela apporte... L'une des choses que nous avons faites à Kamloops a été d'utiliser les pouvoirs fiscaux pour construire une usine de traitement des eaux de premier plan grâce à nos propres fonds. Certes, le Canada y a contribué, mais nous avons été en mesure d'y parvenir grâce à une approche novatrice rendue possible par la législation. Il y a bien des façons de procéder.
En s'appuyant sur l'IIPN, pourquoi ne construire qu'une seule usine de traitement des eaux quand nous pourrions en construire vingt-cinq? Pourquoi construire une centrale diesel quand, comme l'a proposé M. Daniels, nous pourrions la remplacer par quelque chose de plus novateur pour alimenter les communautés rurales en électricité?
Il y a bien des façons d'aborder l'innovation, mais la plus importante est de nous laisser user pleinement de notre imagination, de nos compétences et de nos ressources pour concrétiser nos idées.
Si on prend l'exemple de certains clients qui figurent dans la Loi sur la gestion financière des Premières Nations, on remarque d'où vient cette innovation et ce qui a créé les possibilités de développement économique. La nation crie d'Opaskwayak, au Manitoba, la nation crie de Fisher River, au Manitoba, les bandes micmaques des Maritimes, toutes ces communautés ont puisé leurs capacités et innovations dans la Loi sur la gestion financière et fait preuve d'imagination pour tirer le maximum des recettes de leurs pouvoirs fiscaux afin de participer au développement économique.
Auparavant, l'économie autochtone était qualifiée d' « économie bungee ». Les fonds investis dans la communauté rebondissaient à l'extérieur de celle‑ci. Il n'y avait aucun roulement économique. C'est toutefois en train de changer dans des endroits comme la nation crie de Fisher River, où, subitement, il y a des activités économiques internes. Tout cela s'est produit dans la foulée de l'accès aux capitaux, de notre accès aux recettes et de notre capacité à comprendre, dans le cadre d'un système de gestion financière, le genre de choses que nous faisons. Ce sont de telles innovations qui en découlent, selon moi.
J'espère que cela répond à votre question.
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Merci beaucoup. Je l'apprécie.
M. Calla y a en quelque sorte fait référence. J'allais parler de l'entente de Clearwater. C'était franchement novateur quand on pense à la façon dont l'entente a été conclue. De publique, l'entreprise est devenue privée. Une part d'innovation et de réflexion s'est avérée nécessaire dans le cadre de la Loi, qui était déjà en vigueur.
La Loi établit des limites, dont la possibilité de transiger uniquement avec une bande relevant de la Loi sur les Indiens. Elle ne nous permet pas de transiger avec un collectif. Nous devons traiter avec chaque Première Nation individuellement. Toutefois, nous y sommes arrivés. Nous avons trouvé une façon où il a été possible pour diverses Premières Nations de collaborer à un seul projet qui va générer des activités économiques dans la région et avoir une incidence franchement positive sur l'économie locale.
Depuis, les Premières Nations se présentent à nous en groupes, s'intéressent à des projets de plus grande envergure. Il y a le chemin de fer proposé, le chemin de fer de Churchill, et le port de Churchill. Environ 40 Premières Nations travaillent là‑dessus et veulent participer à ce projet.
Il faudra éventuellement traiter des limites établies par la Loi, car nous devons remédier au fait qu'un seul bénéficiaire est admissible à un prêt au titre de la Loi sur les Indiens.
Je voulais ajouter cette précision. Merci.
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Merci, monsieur le président.
J'aimerais également remercier tous les témoins pour leur présence devant le Comité aujourd'hui, ainsi que pour leur fascinante contribution jusqu'à maintenant.
Ma première question s'adresse à M. Calla.
L'une des choses citées dans la feuille de route que vous proposez pour les Premières Nations est l'union des forces. La nation Squamish a beaucoup collaboré avec les nations avoisinantes, comme les nations Musqueam, Tsleil-Waututh et Líl̓wat.
Quelles leçons et recommandations souhaitez-vous transmettre aux autres nations, et plus particulièrement au gouvernement fédéral, sur ce que nous pouvons mettre de l'avant ou soutenir pour progresser dans cette voie?
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Je veux revenir sur ce que M. Daniels a dit, c'est‑à‑dire que le gouvernement fédéral doit reconnaître les regroupements et les autoriser. Nous devons délaisser la mentalité associée à la Loi sur les Indiens. Cette loi n'est qu'un cadre.
Vous avez mis en valeur les communautés qui ont pris part aux Jeux olympiques de 2010. C'est en constatant que nous pouvions collectivement en bénéficier, ce qui n'aurait pas été possible chacun de notre côté, que nous avons décidé de nous unir. Auparavant, nous nous affrontions devant les tribunaux. Soudainement, tout a changé, et toute la mentalité connexe aussi.
La présence d'une motivation et d'un avantage économique est en partie ce qui incite les gens à plonger. C'est très important. C'est la capacité de s'unir. Prenez l'exemple de la transaction de Clearwater. S'il y avait eu une entité, pourquoi n'aurions-nous pas pu transiger avec elle? Pourquoi devons-nous transiger individuellement avec chaque bande relevant de la Loi des Indiens?
À la lumière de la croissance économique et des coûts dans les communautés des Premières Nations, il faut commencer à admettre que l'idée que tout doit se faire par l'intermédiaire de la Loi sur les Indiens est caduque. C'est la bande relevant de la Loi sur les Indiens qui sera en charge, et nous devons être en mesure de faciliter ce type d'investissements nécessaires au soutien du développement économique. Toutefois, les gens doivent y voir des avantages. Ce doit être facilité. Le gouvernement doit modifier ses politiques et procédures pour que ce soit possible.
Je suis conscient que tout demande du temps, mais la décision stratégique, le mémoire au Cabinet, doit être présentée pour que l'on puisse en discuter. C'est ce qui compte aujourd'hui.
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Nos membres n'ont exprimé aucune préoccupation. Ils nous demandent de prendre ces mesures et de déterminer comment nous pouvons bâtir plus d'infrastructures dans nos communautés.
Comment allons-nous générer 25 milliards de dollars? J'ai parlé d'un investissement de 1 milliard de dollars. Grâce au recours au levier financier, nous avons accès aux marchés financiers par l'intermédiaire de nos cotes de crédit, qui sont tout à fait respectables. Il s'agit d'ailleurs d'une situation historique. Aucun autre groupe autochtone dans le monde n'emprunte collectivement et n'a obtenu des cotes de crédit comme les nôtres. Il n'y en a pas d'autres. Il s'agit d'une véritable innovation.
M. Berna, qui m'accompagne, connaît bien le recours au levier financier et le travail sur les marchés financiers. À la fin du mois, nous allons émettre notre neuvième obligation depuis 2014. Ce n'est pas mal. Nous sommes bien connus sur le marché international. On achète nos obligations en Europe, au Moyen-Orient et aux États-Unis. Nous pourrions accéder à ces fonds si nous avions la source de revenus nécessaire. Pour un gouvernement, une source de revenus est très précieuse. C'est un atout majeur. Elle vous procure le levier le plus puissant qui soit. Nous pouvons obtenir jusqu'à 15 fois le montant annuel.
Je ne sais pas s'il nous reste du temps pour que M. Berna puisse ajouter quelque chose.
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Merci, monsieur le président.
Je sais qu'il y a beaucoup de comptables dans la salle — M. Calla, M. Berna, M. Daniels et moi-même —, alors nous pourrions probablement parler de monétisation et de ce genre de choses pendant 25 minutes, et non cinq. Je veux être très bref et consacrer mes cinq minutes à l'Institut des infrastructures des Premières nations et à la monétisation.
Dans les plans ministériels de RCAANC, il est question, depuis 2019, de la création et du soutien d'un Institut des infrastructures des Premières nations. Cela fait plusieurs années. Les données montrent clairement qu'il faut cinq fois plus de temps pour faire bâtir un projet dans une Première Nation. Cet obstacle doit être éliminé.
Je pose cette question à toutes les personnes ici présentes, mais je pense que M. Jules a beaucoup parlé de ce sujet. Si le Comité pouvait faire passer un message dans le rapport final au Parlement concernant l'Institut des infrastructures des Premières nations et ses avantages, quel serait‑il? Comment pouvons-nous parvenir à la réalisation de ce projet? Voilà en gros ma question.
Merci aux témoins.
Je dois dire que, de tous les comités auxquels j'ai siégé, celui‑ci est l'un des rares, avec ce groupe de témoins, qui me rende réellement heureux. Je pense que vous serez tous d'accord pour dire que la réponse à tant de difficultés auxquelles est confrontée la communauté autochtone réside dans l'éducation et la prospérité économique. Je pense que ce qui me rend heureux est de voir que la communauté financière autochtone dispose d'un leadership aussi compétent. J'entrevois de bonnes choses pour l'avenir.
Le gouvernement doit toutefois donner à la communauté autochtone les outils dont elle a besoin pour atteindre ses objectifs, et M. Jules a parlé de la nécessité d'un changement législatif. Il a également parlé de la volonté, semble‑t‑il, de disposer d'une compétence fiscale dans d'autres domaines.
Je constate que l'article 83 de la Loi sur les Indiens donne aux chefs et aux conseils le pouvoir d'imposer des taxes à des fins locales, sur les immeubles, ainsi que sur les droits sur ceux‑ci. Je crois que la Loi sur la gestion financière des Premières Nations donne aux chefs et aux conseils des pouvoirs similaires.
J'en déduis, monsieur Jules, que vous voulez étendre ce pouvoir de taxation à d'autres secteurs. De la liste que vous avez mentionnée, je ne me souviens que du cannabis, mais je pense qu'il y avait d'autres choses.
Votre proposition consisterait-elle à modifier la Loi sur les Indiens et la Loi sur la gestion des Premières Nations afin d'autoriser l'imposition de taxes dans ces autres domaines, et de quels domaines s'agirait‑il? Pourriez-vous réellement le faire d'ici cet été? Et qui aurait le pouvoir de déterminer le montant de ces taxes? S'agirait‑il des chefs et des conseils, ou la communauté autochtone dans son ensemble pourrait-elle imposer des taxes sur le cannabis, par exemple?
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C'est une question à plusieurs volets.
Le message est très clair: plus notre compétence fiscale est large, plus la responsabilité, et donc, la surveillance des autres gouvernements diminue. Nous devons avoir une compétence fiscale comme tout autre gouvernement.
J'estime que nombre de ces questions, comme les taxes sur le tabac, le cannabis et le carburant, la taxe d'accise et l'impôt sur le revenu, pourraient être examinées au regard de la Loi d'exécution du budget. Je pense qu'il s'agit de domaines pour lesquels nous avons demandé un élargissement de notre compétence.
En ce qui concerne le calendrier, je propose, par l'intermédiaire de l'Institut des infrastructures, de faire adopter la législation d'ici l'été.
La compétence fiscale revient en définitive à la communauté. Vous parliez de la Loi sur les Indiens. L'article 87 stipule qu'il s'agit d'un droit individuel. La seule dérogation est celle des communautés. La communauté doit décider de quels types de compétence fédérale elle doit s'affranchir pour l'assumer.
Ces cas sont parfois complexes, car ils nécessitent la participation des gouvernements provinciaux. C'est pourquoi nous avons des différends fiscaux au Nouveau-Brunswick et ailleurs au pays, car l'approche n'est pas fondée sur la loi, mais sur les programmes. Ce n'est pas la même chose que la compétence.
Je propose une approche fondée sur la compétence plutôt que sur les programmes. Même le partage des recettes de l'exploitation des ressources est différent, parce que vous ne pouvez pas vous rendre à la banque avec cela. M. Daniels ne peut pas aller sur le marché international des obligations et dire: « J'ai le partage des recettes de l'exploitation des ressources ». Cela pourrait changer, comme nous l'avons vu au Nouveau-Brunswick.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur Calla, j'aimerais vous poser une simple question concernant le problème philosophique que vous avez soulevé et qui fait que l'adhésion de certaines communautés n'est pas quelque chose de gagné.
Pourriez-vous nous en dire davantage là-dessus?
Par ailleurs, on a parlé de Trans Mountain, tout à l'heure. J'imagine que cela peut être perçu comme une prise de position politique de la part du Conseil de gestion financière des Premières Nations.
Croyez-vous que cela peut être un obstacle à l'adhésion des autres Premières Nations?
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Lorsque nous parlons de projets dont la réalisation prend de quatre à six fois plus de temps dans les réserves qu'ailleurs, cela est attribuable au fait que la collectivité manque de ressources. Il y a un manque de capacité à régler les problèmes, un manque de réglementation et un manque de plans de match en ce qui concerne le travail à accomplir. Nous, les représentants d'institutions, travaillons ensemble pour tenter de faire tomber ces barrières de manière à ce qu'il soit possible de faire des affaires sur nos territoires aussi rapidement qu'à l'extérieur de ceux-ci.
Cela exige notamment que nous travaillions avec d'autres institutions, comme le Conseil de gestion des terres des Premières nations, à la modification de la politique sur les ajouts aux réserves et de la politique sur les revendications particulières, et à long terme, à la création de notre propre système de titres fonciers afin que les terres puissent être transférées à notre titre, et non à celui du gouvernement fédéral, ou même des gouvernements provinciaux ou territoriaux.
Pour réduire le temps requis pour les investissements, nous avons besoin d'institutions et de moyens novateurs pour gérer ces problèmes. C'est en fin de compte le cadre des institutions qui comparaissent devant vous aujourd'hui à titre de témoins.
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D'accord, cela m'a échappé. Je ne pouvais pas communiquer avec vous à ce moment-là.
Merci beaucoup.
[Français]
J'aimerais remercier du fond du cœur les témoins qui ont comparu aujourd'hui afin de répondre à nos questions.
[Traduction]
Je remercie infiniment MM. Ernie Daniels, Steve Berna, Harold Calla et Clarence — Manny, si je peux me permettre de vous appeler ainsi, puisque cela semble être votre surnom — Jules.
Je vous remercie vraiment d'avoir apporté des témoignages importants à notre groupe, alors que nous commençons notre étude sur un sujet très important, à savoir les obstacles au développement économique. Nous vous sommes très reconnaissants de votre présence aujourd'hui, et nous nous réjouissons à l'idée de diffuser le rapport une fois qu'il sera publié. Je vous remercie donc une fois de plus.
Chers membres du Comité, j'aimerais lever la séance, afin que nous puissions nous connecter de nouveau pour entreprendre la partie à huis clos de notre réunion, qui commencera dans quelques minutes.
Tous les membres consentent-ils à cela? Je ne vois aucune main levée.
Levons la séance. Je vous remercie infiniment encore une fois.
Désolé, j'ai entendu quelqu'un crier après moi.