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Bonjour, chers collègues.
Il s'agit de la 129e séance du Comité permanent des comptes publics, tenue le mardi 26 février 2019
Nous sommes réunis aujourd'hui pour examiner le Rapport 4, La sécurité matérielle des missions diplomatiques canadiennes à l'étranger — Affaires mondiales Canada, des Rapports de l'automne 2018 du vérificateur général du Canada.
Nous avons l'honneur d'accueillir M. Jerome Berthelette, vérificateur général adjoint, et Mme Carol McCalla, directrice principale, tous deux du Bureau du vérificateur général.
Nous accueillons aussi M. Ian Shugart, sous-ministre des Affaires étrangères; Mme Heather Jeffrey, sous-ministre adjointe, Services consulaires, sécurité et gestion des mesures d'urgence; et Dan Danagher, sous-ministre adjoint, Plateforme internationale, tous trois du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement.
Nous vous souhaitons la bienvenue. Je souhaite aussi rappeler aux membres que la séance est télévisée aujourd'hui.
Nous allons donner la parole à M. Berthelette pour qu'il fasse sa déclaration d'ouverture.
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Monsieur le président, je vous remercie de nous donner l'occasion de discuter de notre rapport de l'automne 2018 sur la sécurité matérielle des missions diplomatiques canadiennes à l'étranger. Cet audit visait à examiner si Affaires mondiales Canada appliquait des mesures de sécurité matérielle dans ses missions pour protéger efficacement son personnel et ses biens.
Ces mesures comprennent la mise en place de protections comme des clôtures, des barrières pour véhicules ou des systèmes d'alarme pour empêcher des intrusions ou des attentats. Comme employeur, le ministère doit assurer la sécurité de son personnel. Plus de la moitié des employés des missions travaillent dans des endroits dangereux qui nécessitent des mesures de protection.
Dans l'ensemble, nous avons constaté qu'Affaires mondiales Canada n'avait pas réagi à l'évolution des menaces à la sécurité dans ses missions à l'étranger. Au cours des 10 dernières années, le ministère a reçu 650 millions de dollars pour renforcer la sécurité matérielle dans ses missions où la menace est élevée. Nous avons constaté que la documentation ne suffisait pas à montrer comment la priorité des projets liés à la sécurité matérielle avait été établie pour qu'on puisse s'assurer que les besoins les plus essentiels sont satisfaits. Le ministère avait défini plus de 200 mesures de sécurité, qui devaient être déployées d'urgence dans toutes les missions, mais il n'avait pas encore de plan en place pour les appliquer.
Nous avons relevé des faiblesses dans les évaluations de la sécurité menées par Affaires mondiales Canada dans ses missions. Par exemple, l'évaluation des menaces était périmée pour plus du tiers des missions, et beaucoup d'évaluations de la vulnérabilité étaient incomplètes ou ne recommandaient pas de mesures pour corriger les faiblesses relevées. De fait, les normes de référence précisant les mesures nécessaires afin de protéger les missions contre des attaques physiques directes étaient toujours en cours d'élaboration au moment de notre audit.
Sans ces normes, Affaires mondiales Canada ne peut pas évaluer complètement les mesures de sécurité nécessaires pour protéger efficacement son personnel et ses biens dans les missions. Pourtant, le ministère est responsable de la sécurité du personnel déployé à l'étranger, et bien des missions ont un besoin urgent de mise à niveau de la sécurité.
[Français]
Nous avons examiné les mesures de sécurité dans six missions exposées à un risque élevé, et nous avons relevé des failles majeures dans ces six missions. Le ministère connaissait plusieurs de ces lacunes depuis des années, mais n'avait pas mis en place toutes les mesures recommandées pour les corriger, notamment l'amélioration de la vidéosurveillance et des systèmes d'alarme, ainsi que des barrières pour les véhicules.
Les responsables de la sécurité de ces missions ne connaissaient pas l'état d'avancement des projets approuvés de renforcement de la sécurité matérielle ni les mesures provisoirement requises pour atténuer les risques relevés pour la sécurité. La plupart des projets d'immobilisations du ministère pour renforcer la sécurité avaient des retards d'au moins trois ans, et il allait falloir presque deux fois plus de temps pour les finir par rapport à ce qui avait été prévu initialement. Nous avons constaté que ces retards avaient été causés par des lacunes dans la gestion et la surveillance des projets du ministère. Ainsi, les plans pour les projets de construction n'évaluaient pas assez les risques propres au pays hôte, par exemple les délais pour obtenir les permis, et ils n'incluaient pas non plus ces risques dans les calendriers d'exécution.
D'autres entités fédérales, comme Construction de Défense Canada, ont des connaissances spécialisées et une expérience en matière de projets de construction à l'étranger qui pourraient aider Affaires mondiales Canada à s'assurer que les améliorations importantes de la sécurité respectent les délais et les budgets.
Enfin, nous avons constaté que plus du tiers du personnel travaillant dans certains des endroits les plus dangereux n'avait pas suivi la formation obligatoire de sensibilisation à la sécurité. Affaires mondiales Canada n'avait donc pas l'assurance que ses employés avaient reçu le niveau adéquat de formation de sensibilisation à la sécurité afin d'assurer efficacement leur propre protection. Nous avons formulé cinq recommandations qu'Affaires mondiales Canada a acceptées.
Je termine ainsi ma déclaration d'ouverture. Nous serons heureux de répondre aux questions des membres du Comité.
Merci.
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Merci, monsieur le président, et bonjour, mesdames et messieurs.
Avant de prononcer ma déclaration d'ouverture ce matin, j'aimerais dire que j'avais l'habitude de m'asseoir à côté de M. Michael Ferguson, qui est maintenant décédé. Par votre entremise, monsieur le président, je voudrais offrir nos condoléances à la famille de M. Ferguson, et aussi à ses collègues et aux membres de ce comité qui ont collaboré si étroitement avec l'ancien vérificateur général.
À Affaires mondiales Canada, nous avons pour mandat de servir le Canada et les Canadiens à l'étranger. Pour nous acquitter de ce mandat, nous considérons notre responsabilité à l'égard de la protection de notre personnel, de nos visiteurs et de nos biens au sein du réseau international des missions du Canada comme notre principale priorité.
À cette fin, nous revoyons de façon continue notre posture, nos procédures et nos systèmes de sécurité pour nous assurer qu’ils sont robustes et efficaces et qu’ils tiennent compte des dernières modifications dans l’environnement de sécurité. Ce processus d’examen porte non seulement sur les mesures de sécurité matérielle évaluées dans le cadre de l’audit du Bureau du vérificateur général, mais aussi sur nos procédures de sécurité opérationnelles et sur nos renseignements de sécurité. Ces trois piliers de la sécurité agissent collectivement pour créer des niveaux de protection requis pour notre personnel, nos visiteurs, nos renseignements et nos biens. Nous sommes d’avis qu’aucun pilier ne peut être examiné de façon isolée et, dans de nombreux contextes, des éléments spécifiques, par exemple le déploiement de gardes, peuvent être renforcés pour compenser les faiblesses d’un autre secteur. Cette approche intégrée est conforme à celle adoptée par d’autres ministères des Affaires étrangères.
Affaires mondiales Canada accueille favorablement le rapport du vérificateur général sur le pilier de la sécurité matérielle, et, comme M. Berthelette l'a dit, nous avons accepté toutes ses recommandations. Elles s'alignent dans l'ensemble sur celles qui ont été formulées lors d'un récent audit interne effectué en 2018 par le ministère dans le cadre de son plan actuel d'audit axé sur les risques. L'audit interne a donné lieu à cinq recommandations qui ont été présentées au comité ministériel d'audit au mois de mars l'année passée.
Nous nous réjouissons particulièrement du fait que le Bureau du vérificateur général se soit fié aux résultats de l'audit interne pour étayer ses observations, constatations et recommandations. Comme les membres du Comité le savent, cela ne se produit pas toujours. En particulier, le vérificateur général s'est appuyé sur les travaux d'audit interne effectués dans quatre de nos missions à l'étranger, puis il a mené ses propres travaux dans deux autres missions. Nous saluons cette collaboration et nous nous réjouissons de la cohérence de résultats.
L'an dernier, le ministère a commencé à mettre en oeuvre les recommandations formulées dans le cadre de l'audit interne et, depuis, il a intensifié ses efforts de mise en oeuvre des recommandations du vérificateur général. Le plan d'action découlant des deux audits est en grande partie mis en oeuvre grâce au financement de 1,8 milliard de dollars sur 10 ans que le ministère a reçu dans l'Énoncé économique de 2017 par l'entremise du financement lié à l'obligation de diligence pour améliorer la sécurité dans les missions à l'étranger.
Pour s’assurer que ces investissements sont classés par ordre de priorité, suivis et mis en oeuvre de façon efficace, Affaires mondiales Canada a mis en place un nouveau cadre mondial sur la sécurité. Ce cadre intègre de façon explicite les principes de gestion du risque dans l’élaboration de politiques et la prise de décisions en matière de sécurité et permet l’établissement des priorités et l’affectation des ressources en fonction du risque. Il offre également la souplesse nécessaire pour qu'on puisse s’adapter plus rapidement à l’évolution de l’environnement international en matière de sécurité et répondre aux besoins futurs en matière de sécurité à mesure qu’ils apparaissent.
De plus, les évaluations de la sécurité, qui comprennent à la fois des évaluations de la menace et des évaluations de la vulnérabilité, sont passées d'une approche cyclique d'application uniforme à une approche axée sur le risque qui accorde la priorité à des évaluations plus fréquentes de nos environnements à risque élevé. Ce changement a aussi été appuyé par des communications et des contacts plus réguliers et proactifs avec les équipes de sécurité des missions sur le terrain. Par exemple, une partie des investissements au titre de l'obligation de diligence a servi à acquérir et à mettre en oeuvre un système évolué de gestion de l'information sur la sécurité, qui sert à documenter et à suivre les besoins des missions en matière de sécurité afin de garantir qu'ils sont surveillés et satisfaits de façon efficace.
De plus, conformément aux observations découlant de l'audit portant sur le renforcement de la gouvernance et sur la précision des rôles et des responsabilités, nous avons renforcé — et nous continuerons de le faire — notre processus de gouvernance interne afin de mieux coordonner la prise de décisions et d'améliorer la cohérence et l'exécution efficace des projets de sécurité matérielle dans nos missions à l'étranger.
De façon plus précise, la prise de décisions relativement à l'affectation de ressources à tous les grands projets d'immobilisations a été rationalisée et est supervisée par un comité composé de sous-ministres adjoints. Ce comité se réunit tous les mois et compte parmi ses membres clés l'agent de sécurité du ministère, ce qui est conforme à l'une des recommandations de l'audit.
La présence de l'agent de sécurité du ministère au sein de ce comité reflète le fait que bon nombre de nos projets immobiliers comportent des aspects liés à la sécurité matérielle. Le comité joue un rôle essentiel pour assurer le renforcement de la gestion des projets immobiliers et pour améliorer leur réalisation en temps opportun. De plus, l'exécution des projets est appuyée par un bureau de gestion des projets récemment créé. Ce bureau est chargé du maintien de l'assurance de la qualité, de la rapidité d'exécution des projets, de la surveillance et de la présentation des rapports sur les résultats.
On souligne aussi dans le rapport du vérificateur général la nécessité pour le ministère d'amorcer des discussions avec d'autres ministères et d'adopter des pratiques exemplaires. À cet égard, nous continuerons d'apprendre de nos collègues fédéraux ainsi que des divisions de gestion immobilière respectées de nos homologues étrangers. Ces apprentissages profiteront aussi à la communauté de pratique en gestion de projet du gouvernement du Canada.
Même si la nouvelle structure de gouvernance renforce la surveillance de la gestion des projets et que des pratiques exemplaires continuent d'être adoptées, il est aussi vrai que les projets de sécurité matérielle à l'étranger sont souvent entrepris dans des environnements complexes et, parfois, instables où les lois, les politiques et d'autres conditions locales échappent au contrôle du Canada. De telles situations peuvent gravement entraver l'exécution des projets et nécessiter parfois l'adoption d'autres mesures d'atténuation. De nouveaux systèmes de suivi permettront de surveiller et de signaler les zones où de telles mesures d'atténuation sont nécessaires.
[Français]
Enfin, un autre domaine couvert par le vérificateur général, mais qui n'a pas été examiné dans le cadre de notre audit interne, est la formation en sécurité.
Conformément aux recommandations et dans le cadre de programmes d'investissements relatifs au devoir de diligence, nous avons entrepris des travaux pour renforcer nos compétences et nos capacités en matière de sécurité.
Le programme de formation sur la sécurité a été remanié et sera élargi afin d'améliorer le temps de préparation du personnel du ministère et des employés recrutés sur place. Un nouveau cours de formation obligatoire de cinq jours sur la sécurité a été ajouté au programme d'apprentissage du personnel se rendant dans des environnements dangereux. D'autres cours ont été mis à jour pour suivre l'évolution des besoins en matière de sécurité. Toute la formation vise à répondre aux besoins opérationnels et à atténuer les risques à l'étranger. Un suivi a également été mis en oeuvre pour documenter et surveiller la formation terminée.
En terminant, j'aimerais souligner que la fonction de sécurité matérielle examinée dans le cadre du présent audit ne comprend qu'un seul élément d'une vaste gamme de mesures qui sont utilisées de façon intégrée pour améliorer la protection de notre personnel, de nos visiteurs, de nos renseignements et de nos biens à l'étranger.
D'autres mesures de sécurité, comme les séances d'information sur la sécurité, l'équipement de sécurité, le renseignement en temps réel, les protocoles relatifs aux mouvements du personnel et la protection des gardiens, constituent des améliorations essentielles à la sécurité et des niveaux d'atténuation supplémentaires.
Dans les cas extrêmes, lorsque les risques sont élevés ou que les mesures de sécurité matérielle nécessitent des améliorations qui ne peuvent pas être apportées, des protocoles de mouvement restrictifs et des rajustements à la situation de la mission sont mis en oeuvre pour compenser notamment le retrait des employés et la fermeture de la mission au besoin afin d'assurer la sécurité de tous les employés. Cela a été le cas récemment dans nos missions de Caracas au Venezuela et de La Havane à Cuba.
Incontestablement, la sécurité de nos employés est notre devoir et ma préoccupation première. La modernisation de notre approche à l'égard de tous les éléments requis pour assurer la sécurité et l'efficacité des opérations à l'étranger est en bonne voie et la mise en oeuvre intégrale des recommandations issues de l'audit est facilitée par les investissements récemment annoncés au titre du devoir de diligence.
Nous voyons déjà la portée réelle de ces efforts. L'appui du vérificateur général à l'égard de cette orientation est à la fois apprécié et encourageant.
[Traduction]
Je serai aidé par mes collègues. Dan s'occupe de notre plateforme internationale, et Heather est chargée en particulier de notre programme de services consulaires, de même que des opérations de sécurité et de la gestion des urgences. Heather et moi-même avons comparu devant le Comité récemment.
Merci, monsieur le président.
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Il n'y a aucun doute que ce cas nous préoccupe énormément à plusieurs points de vue et qu'il illustre les limites auxquelles nous faisons face, entre autres à cause de la législation sur la protection des renseignements personnels et du fait que cette question est effectivement devant les tribunaux.
Par ailleurs, il est important de souligner qu'il y a des limites à notre connaissance de ce qui s'est passé et de la nature des risques auxquels nos employés sont exposés.
[Traduction]
Nous sommes très heureux de répondre à des questions à ce sujet, peu importe les limites que nous devons respecter.
Je peux vous dire que nous avons appris au fur et à mesure. Nous avons collaboré le plus possible avec les autorités cubaines. Nous avons collaboré avec nos collègues américains pour en apprendre le plus possible. Nous avons aussi mis en oeuvre plus de mesures pour protéger nos employés à La Havane, y compris la réduction de notre effectif à La Havane en réaction aux préoccupations persistantes et aux incidents survenus là-bas. Nous continuerons d'appliquer cette norme de diligence.
Nous ne connaissons pas toujours l'origine des menaces. Dans ce cas en particulier, il est très troublant que nous ne connaissions pas de façon précise la source du problème. Nous avons fourni les examens diagnostiques et les soins appropriés. Nous continuons de rencontrer les membres du personnel concernés. Ces cas présentent une grande diversité de situations et de réactions au sein même des familles, c'est-à-dire de notre personnel et de leurs personnes à charge, donc il n'y a pas de tendance nette qui permettrait de cerner très clairement le problème ou la nature du problème.
Comme je l'ai mentionné, nous avons appris au fur et à mesure; nous en savons davantage qu'aux premiers jours. Il demeure qu'il s'agit d'une situation extrêmement troublante, et nous accueillons tout conseil technique que nous recevons du personnel soignant ou de nos collègues, de même que d'autres organismes avec lesquels nous collaborons, comme la GRC, et ainsi de suite.
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Tout d'abord, j'aimerais dire que nous acceptons toutes ces constatations et toutes leurs implications. Comme je l'ai dit, nous les avons faites nous-mêmes dans le cadre de notre propre vérification interne.
Ensuite, nous utilisons les ressources dont nous disposons à tout moment, et nous devons affecter ces ressources en fonction des besoins du moment. Dans certains cas, les besoins en matière de sécurité les plus urgents peuvent expliquer les retards dans les projets retenus ou le ralentissement des projets.
Troisièmement, comme je l'ai indiqué, et comme les représentants du Bureau du vérificateur général l'ont indiqué, la documentation des projets, à la fois pour le suivi des besoins et pour le suivi de la mise en oeuvre, manquait, comme c'est souvent le cas. Nous avons maintenant mis en place des systèmes de suivi.
Les cas décrits reflètent la réalité, et nous avons mis en place, comme je l'ai indiqué dans mes commentaires, des mesures qui nous permettent de savoir exactement où nous en sommes dans nos projets et de prendre des décisions en fonction des risques au fur et à mesure qu'ils se manifestent au fil du temps.
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C'est un plaisir de vous revoir. Merci à tous d'être venus.
Commençons par l'objectif de l'audit; le paragraphe 4.6 précise ce qui suit:
L'audit visait à déterminer si Affaires mondiales Canada avait répondu à ses besoins en matière de sécurité matérielle dans les missions canadiennes à l'étranger, de manière à protéger son personnel et ses biens.
Le message général du paragraphe est le suivant:
Dans l'ensemble, Affaires mondiales Canada n'avait pas pris toutes les mesures de sécurité matérielle nécessaires en fonction de l'évolution des menaces pour la sécurité dans ses missions à l'étranger.
De plus, dans les conclusions du paragraphe 4.78, on peut lire ceci:
Nous avons conclu qu'Affaires mondiales Canada n'avait pas entièrement répondu aux impératifs de sécurité matérielle en vue de protéger son personnel et ses biens dans les missions canadiennes à l'étranger.
Je trouve cela vraiment surprenant pour une foule de raisons, dont la plus importante est que, pour la gouvernance, que cela vous plaise ou non, la sécurité est un enjeu énorme. Dans votre ministère, c'est ce que vous faites. J'ai été vraiment surpris et déçu qu'un ministère qui s'occupe en priorité de la sécurité ait ce genre de problèmes avec des choses aussi évidentes. Ce n'est pas comme si le renseignement était difficile à trouver ou que l'analyse avait dérapé. Ce sont des choses fondamentales. C'est vraiment déconcertant quand on pense à la rapidité avec laquelle les choses peuvent changer.
L'un des meilleurs exemples — et c'est un exemple extrême, mais réel —, est celui de l'Iran en 1979. On est passé d'une situation où il n'y avait aucun problème à une crise soudaine du genre qui peut paralyser un gouvernement et une nation pendant des années, si ce n'est pas des décennies. La situation change en un clin d'oeil. Ce sont les premières lignes de défense. J'ai simplement trouvé cela plutôt curieux.
Je vais m'arrêter là. Si vous voulez formuler des commentaires à ce sujet d'une façon ou d'une autre, vous pouvez le faire. Sinon, je vais simplement passer à mes questions.
Je vais reprendre là où vous en étiez tout à l'heure. Vous avez parlé de la gestion de projets. Comme nous le savons, c'est le point faible des gouvernements depuis des années. Toutefois, le vérificateur général renvoie au paragraphe 4.63 au passage suivant:
D'autres entités fédérales qui mettent en oeuvre des projets de renforcement de la sécurité à l'étranger possèdent des connaissances et une expérience dont, à notre avis, Affaires mondiales Canada pourrait profiter. Par exemple, Construction de Défense Canada mène des projets de construction et d'ingénierie dans le monde entier, dont beaucoup comportent des impératifs de sécurité particuliers. L'entité met en oeuvre la plupart de ses projets pour la Défense nationale, mais elle fournit aussi des services à d'autres organismes gouvernementaux, notamment au Centre de la sécurité des télécommunications du Canada. Lors de l'examen spécial de Construction de Défense Canada que nous avons effectué en 2017, nous avions constaté que l'entité avait bien géré
— je les félicite —
les projets et les contrats de construction. Ainsi, l'entité avait examiné les contrats conformément aux exigences des clients, et avait respecté les délais de même que les budgets.
Que dites-vous de cela? Vous avez dit qu'il y a des vulnérabilités, mais le vérificateur général a été en mesure de désigner un acteur important du domaine de l'élaboration des projets qui fait du très bon travail. D'après ce que je sais de la sécurité, quand on commence à parler du Centre de la sécurité des télécommunications Canada, on parle de choses très sérieuses. Il faut que ce soit des gens de confiance.
Pourquoi n'avez-vous pas suivi cette voie? Pourquoi vous êtes-vous laissé...?
La dernière chose que je mentionnerai concerne le tableau de la page 13. Bon sang. Y avait-il des adultes dans la salle?
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Avec plaisir. Je me demandais justement si je n'allais pas demander au président la permission de faire un commentaire à ce sujet.
Mon expérience de sous-ministre dans trois ministères me permet maintenant de cerner une tendance à l'échelle du gouvernement qui, à mon avis, intéresserait grandement le Comité des comptes publics. C'est que, souvent, les fautes qui sont révélées — et à juste titre —, dans le cadre des audits, indiquent une tendance à faire les choses plutôt qu'à les planifier, à en faire le suivi et à les documenter. De plus, quand les ressources sont limitées, la mise en place de systèmes d'information et de systèmes documentaires est perçue, ou a été perçue, comme ayant moins de valeur intrinsèque que les dépenses visant l'objectif principal.
Toutefois, quand ce n'est pas fait, nous avons constaté à maintes reprises qu'il y a un prix à payer pour cela, par exemple de très mauvais rapports du vérificateur général, mais aussi le fait de ne pas savoir exactement à quoi vous avez affaire.
Une bonne planification et une documentation appropriée aident en fait à gérer le risque. De plus, je pense que, de façon générale, c'est quelque chose que nous avons appris à faire dans l'ensemble du gouvernement — non sans peine — , et vous pouvez voir que cette leçon nous aide à aller de l'avant dans ce cas particulier.
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Merci, monsieur Kelly, et merci, monsieur le président.
[Français]
Je vous remercie tous d'être ici ce matin. C'est très agréable de vous voir.
[Traduction]
J'ai eu la très grande chance de faire une carrière pendant 15 ans à Affaires mondiales Canada et j'ai travaillé deux fois à titre d'agente de sécurité dans une mission. Il s'agit donc d'une chose qui me tient réellement à coeur.
Les recommandations formulées dans le rapport et les explications que nous avons entendues ici aujourd'hui m'ont encouragée, mais mon ancienne collègue, Mme Jeffrey, sait certainement que bien souvent, dans la vie, il s'agit de choses pratico-pratiques.
Je repense au temps où je travaillais à la mission; il y avait généralement trois obstacles. J'aimerais aborder brièvement chacun d'entre eux, car on les perd souvent de vue. Je vais bien sûr donner à mes collègues des Affaires étrangères la chance de réagir à chacun d'entre eux.
Le premier est lié au personnel. Certainement, à titre d'agent de gestion des affaires consulaires, nous sommes souvent responsables de trois ou quatre programmes à la fois — les ressources humaines, les propriétés, les finances — et enfin, nous sommes souvent des agents de sécurité, également. La formation m'encourage certainement, et notre collègue Mme Cameron, qui a été chef de mission au Liban, vient bien sûr de ma... Je la considère comme une consoeur. Avons-nous réussi à régler le problème de la capacité? Avons-nous mis assez de gens en poste pour régler effectivement ces problèmes? C'est la première chose.
Le deuxième obstacle que j'ai toujours rencontré — par souci de justice envers le gouvernement du Canada et le peuple canadien —, concerne l'approvisionnement. Évidemment, il s'agit d'une chose qui est toujours incroyablement complexe et chronophage. Les processus d'approvisionnement du gouvernement canadien ne durent pas que quelques jours; ils prennent beaucoup plus de temps. J'étais en poste à l'époque de MERX; je vous rappelle que le seuil était fixé à 75 000 $, de sorte que l'on pouvait certainement installer des systèmes d'alarme simples, mais tout ce qui était plus important exigeait un long processus s'étendant sur plusieurs mois, surtout quand il s'agissait de grandes missions.
Le troisième obstacle, M. Shugart l'a abordé brièvement, c'est l'argent, bien sûr. Avant, c'était l'inverse, il était difficile d'avoir des fonds pour les activités, plutôt que de trouver des activités exigeant de dépenser des fonds.
Pourtant, il semble que ces questions ont été examinées, mais je voulais mettre en relief les trois obstacles que j'ai toujours constatés lorsque j'étais agente de sécurité à la mission. Il s'agit de la capacité du personnel, des processus d'approvisionnement et enfin du financement, même si je suis encouragée par le processus que vous avez présenté.
Monsieur Shugart, pourriez-vous s'il vous plaît commenter ces trois choses? En pratique, ce sont les trois obstacles auxquels je me suis heurtée quand il m'a fallu mettre en oeuvre les mesures nécessaires pour que mon personnel soit en sécurité?
Merci.
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Parfait. Merci, monsieur le président.
Je tiens à faire une simple observation. L'un des défis liés au fait d'avoir à composer avec les enjeux liés à la sécurité dans une démocratie, c'est que la responsabilisation et la transparence ne vont pas nécessairement de pair avec les notions de sécurité et de préparation. Je tiens simplement à dire que j'estime que nous avons fait de l'assez bon travail, et je parle de tout le monde: vous, qui représentez le ministère, le Bureau du vérificateur général, le Comité en tant que tel et la gouvernance du président. Je crois que nous avons fait du mieux que nous pouvions en ce qui a trait à la transparence, sans pour autant miner les entités que nous tentons d'aider. Je tenais à le souligner.
La deuxième chose que je veux dire, et c'est très important, c'est que j'ai vraiment, vraiment aimé ce que vous avez dit, monsieur Shugart, au début de votre réponse à une question précédente. Comme vous le savez, je suis probablement le député qui a fait le moins d'études à n'avoir jamais siégé au Comité des comptes publics et qui y siégera jamais, mais l'une des choses que j'ai apprises au fil des ans au sein du Comité, c'est qu'il y a, d'un côté, la planification, les processus, les freins et contrepoids, les évaluations, puis, de l'autre, lorsque tout ça a été fait, eh bien, il faut tout recommencer, il faut réévaluer les choses revenir en arrière et examiner le tout. Vous connaissez le vieux proverbe des gens de métier: « mesurer deux fois et couper une fois ». C'est tellement important.
Vu votre grande expérience et votre constatation selon laquelle ce n'est pas un domaine où le gouvernement a été efficace... Le Bureau du vérificateur général l'a dit et redit au point où, assurément, j'ai compris et, comme je l'ai dit, c'est moi qui en connais le moins à ce sujet. Par conséquent, je suis heureux de vous l'avoir entendu dire, parce que mon expérience m'apprend qu'on en est là... Il y a ça, puis il y a l'autre aspect de notre travail, qui concerne le suivi afin de nous assurer que vous honorez vos engagements. Ce sont deux choses qui changent vraiment la donne. Je tenais à le souligner.
J'ai une autre question. Comme Mme Yip l'a déjà souligné, 41 % des employés n'ont pas participé au séminaire obligatoire sur la sécurité personnelle, et 35 % des employés n'avaient pas suivi le cours obligatoire sur les milieux hostiles. Lorsqu'il est question de sécurité et de formation obligatoire, ça semble être quelque chose d'assez important pour la plupart des gens. Quand Affaires mondiales a-t-il décidé qu'il pouvait utiliser sa propre définition d'« obligatoire »? Dans quel autre contexte au sein de votre organisation « obligatoire » ne veut pas dire « obligatoire »? Faut-il créer un nouveau mot?
À mes yeux, « obligatoire » veut dire « doit être fait », mais vous ne l'avez pas fait. Même dans votre réponse, vous avez dit que vous allez commencer à le faire et vous avez joué avec les temps de verbe. Vous dites ici: « la formation obligatoire du personnel en poste à l'étranger, en particulier dans les missions où la menace est élevée ou critique, est un élément clé des pratiques préparatoires à l'affectation qu'a adopté Affaires mondiales Canada ». Cependant, vous ne sembliez pas le croire avant que le rapport du vérificateur général vous en tienne responsable.
Alors qu'en est-il de cette notion d'« obligatoire »? À quel moment est-ce que, au sein d'Affaires mondiales, « obligatoire », lorsqu'il est question de sécurité, est devenu non contraignant?
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En tant que président de notre comité de l'éthique, je tiens à dire que l'une des choses que nous avons étudiées de façon exhaustive, c'est la façon dont les groupes peuvent s'organiser rapidement à l'échelle internationale, de nos jours, grâce à des plateformes comme Facebook, entre autres.
Je vous respecte, monsieur, en tant que fonctionnaire, mais permettez-moi de lire le paragraphe 4.18. C'est là où on en arrive, au bout du compte:
Cette constatation est importante parce que les vulnérabilités en matière de sécurité matérielle doivent être corrigées rapidement pour protéger efficacement le personnel et les biens dans les missions à l'étranger.
Vous êtes assis, là, vous passez au travers de l'actuelle réunion du Comité, puis vous retournez à votre vie normale. Vous n'allez pas revenir ici avant peut-être quatre ans — je ne sais pas —, mais il y a une clôture qui n'a pas été réparée depuis huit ans. Qu'avez-vous à dire à ce sujet?
J'ai déjà été patron, et je devais répondre de certaines choses que je n'avais pas bien faites. C'est arrivé rarement, mais c'est tout de même arrivé.
Quel est votre engagement en ce qui a trait au fait de corriger le tir? Allez-vous revenir ici, peut-être l'année prochaine, ou l'année d'après... et même dans 20 ans, la situation n'aura pas été réglée?
À quel moment allez-vous vraiment faire le travail et relever le défi que vous propose le rapport de vérification? Quelle est votre réponse à ça: « Bon, je viens de me faire déculotter, ici, alors je vais m'assurer de régler le problème »?
Quand est-ce que ça va arriver?
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C'est une question qui peut préoccuper beaucoup de députés, parce que nous voyons souvent les ministères prendre des engagements, qu'ils ne respectent jamais par la suite.
Permettez-moi de dire que, au sein du comité des comptes publics, nous avons maintenant adopté une approche de suivi de façon à ce que les sous-ministres — M. Shugart n'en est pas un — ne peuvent pas « venir ici puis s'en laver les mains », c'est-à-dire participer à une réunion et croire s'en être tiré pour une autre année.
Nous allons faire un suivi à ces sujets par l'intermédiaire de nos analystes. L'analyste de la réunion que nous tenons m'a déjà dit qu'il estime que les échéanciers prévus dans le plan d'action peuvent être respectés et sont raisonnables. Cependant, si le travail n'est pas fait, nous allons réinviter les ministères. Je sais que M. Shugart est conscient du fait que, lorsque nous devons tenir une deuxième réunion sur un même sujet, ça ne se passe habituellement pas bien.
Merci de la question. Elle nous a donné l'occasion d'expliquer un peu la situation.
Je tiens à remercier nos invités de leur témoignage aujourd'hui, le vérificateur général, pour son bon travail dans ce dossier, et le ministère d'avoir été là et de rendre des comptes.
Nous allons maintenant suspendre la réunion. Je vais demander à ceux qui n'ont pas besoin de rester de partir assez rapidement afin que nous puissions poursuivre à huis clos pour nous occuper de deux dossiers dont nous voulons discuter rapidement.
[La séance se poursuit à huis clos.]