:
Monsieur le président, j'ai le plaisir de vous présenter les résultats de six audits de performance et de deux examens spéciaux qui ont été déposés mardi à la Chambre des communes.
Quand je considère globalement ces audits, ce qui ressort pour moi, encore une fois, c'est que les ministères n'envisagent pas du point de vue des citoyens les résultats des programmes et des services qu'ils livrent. Cela veut dire que je répète le même message audit après audit et année après année, parce que nous voyons que les ministères continuent d'être fixés sur leurs propres activités et oublient le point de vue des citoyens. Les audits livrés cette semaine ne font pas exception, comme nous allons le voir.
Voyons d'abord notre audit du système de paie Phénix. Nous avons examiné les mesures prises par Services publics et Approvisionnement Canada et d'autres ministères et organismes pour corriger les problèmes du système de paie, afin d'avoir un jour un système qui exigera moins d'efforts pour payer les employés du gouvernement et non pas plus.
[Traduction]
Nous avons constaté qu'un an et demi après le lancement du système de paye Phénix par le gouvernement fédéral, plus de 150 000 fonctionnaires attendaient qu'une demande liée à leur paye soit traitée. La valeur des erreurs non corrigées, ce qui comprend tant les paiements en moins que les paiements en trop, s'élevait à environ un demi-milliard de dollars à la fin de juin 2017.
Nous avons observé que, depuis le lancement de Phénix, Services publics et Approvisionnement Canada n'a fait en grande partie que réagir aux problèmes de paye. À notre avis, il faudra des années pour normaliser le système de paye, et bien plus que les 540 millions de dollars annoncés jusqu'à présent par le gouvernement.
Dans une situation semblable au Queensland, en Australie, il a fallu 7 ans et 1,2 milliard de dollars pour régler la majorité des problèmes de paye.
[Français]
Le prochain audit dont je vais parler a examiné comment les centres d'appel de l'Agence du revenu du Canada répondaient aux questions des contribuables.
Globalement, nous avons constaté que les résultats, en lien avec le service à la clientèle, rapportés par l'Agence donnaient l'impression que le service rendu par les centres d'appel était meilleur qu'il ne l'est en réalité.
Par exemple, l'Agence rapporte que les agents des centres d'appel ou le système libre-service répondent à 90 % des appels des contribuables. Si le chiffre de l'Agence n'est pas faux d'un point de vue technique, il ne reflète toutefois pas l'expérience globale du contribuable. Il ne rend pas compte du fait que, en moyenne, le contribuable doit rappeler l'Agence environ quatre fois en l'espace d'une semaine avant de joindre un agent ou le système libre-service.
[Traduction]
Nous avons constaté que les chiffres rapportés par l'Agence ne tiennent pas compte des 29 millions d'appels qu'elle bloque au cours d'une année et qui représentent plus de la moitié du volume total des appels qu'elle reçoit. Ces appels aboutissent à une tonalité de ligne engagée ou à un message enregistré qui invite le contribuable à consulter le site Web de l'Agence ou à rappeler plus tard. Dans l'ensemble, nous avons constaté que seulement 36 % des appels étaient transférés à un agent ou au système libre-service.
Les tests que nous avons effectués et ceux faits par d'autres organismes ont également révélé que l'Agence du revenu du Canada donnait une réponse erronée à près de 30 % des questions des contribuables. Ce taux est beaucoup plus élevé que le taux d'erreur de 6,5 % estimé par l'Agence.
[Français]
Passons maintenant à notre audit de l'initiative de 257 millions de dollars, mené par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, afin d'aider des réfugiés syriens à s'établir au Canada.
Dans l'ensemble, nous avons constaté que les besoins d'établissement de plus de 80 % des réfugiés syriens avaient été évalués.
[Traduction]
Deux observations importantes ressortent néanmoins de cet audit. Premièrement, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada a retardé d'au moins trois mois le transfert de 51 millions de dollars à ses fournisseurs de services. Ce retard a entraîné des réductions de services.
Deuxièmement, le ministère n'a pas recueilli tous les renseignements dont il a besoin pour vérifier si les réfugiés syriens s'intégraient à la société canadienne. Par exemple, le ministère ne sait pas quelle proportion d'enfants syriens d'âge scolaire sont inscrits à l'école.
[Français]
Dans un autre audit, nous avons examiné les programmes fournis par Santé Canada pour aider les Inuits et les Premières Nations à améliorer leur santé buccodentaire.
Dans l'ensemble, nous avons constaté que Santé Canada consacrait plus de 200 millions de dollars chaque année à des services dentaires médicalement nécessaires pour les Inuits et les Premières Nations. Le ministère sait que la santé buccodentaire des Inuits et des Premières Nations est nettement inférieure à celle du reste de la population canadienne, mais il ne sait pas dans quelle mesure son programme de prestations dentaires fait effet.
[Traduction]
Santé Canada sait que son initiative de prévention en santé buccodentaire, d'une valeur de 5 millions de dollars, a amélioré la santé buccodentaire de certains enfants autochtones. Les données du ministère indiquent cependant une diminution du nombre d'enfants inscrits en vertu de cette initiative ainsi que du nombre de services fournis. Comme il ne connaît pas les raisons de cette diminution, le ministère peut difficilement corriger la situation.
Dans notre audit du Service correctionnel du Canada, nous avons constaté que les programmes et services ne répondaient pas aux besoins de réadaptation des femmes détenues, et surtout de celles qui souffrent de troubles mentaux.
L'outil qu'utilise le Service correctionnel pour déterminer quelle cote de sécurité et quels programmes correctionnels assigner aux délinquantes a été conçu pour les hommes, et non pas pour les femmes. Cela signifie que certaines femmes ont été détenues à un niveau de sécurité plus élevé que nécessaire, et que certaines ont été inscrites à des programmes que le Service correctionnel n'a pu offrir avant que la majorité de ces détenues ne soient admissibles pour la première fois à la libération conditionnelle.
Lorsque la libération est retardée, les détenues ne peuvent bénéficier d'une réinsertion progressive dans la société, et il est plus dispendieux de les garder en prison.
[Français]
Nous avons constaté que les équipes de santé mentale de Service correctionnel Canada n'avaient pas le personnel nécessaire pour livrer les services dont les détenues avaient besoin. Nous avons aussi constaté que le Service correctionnel avait placé dans des cellules d'isolement des détenues qui risquaient de se faire mal ou de se suicider. Il n'est pas approprié de placer dans des cellules d'isolement des femmes souffrant de troubles mentaux graves, car elles n'y reçoivent pas le soutien clinique dont elles ont besoin.
Un autre de nos audits visait à déterminer dans quelle mesure le Collège militaire royal du Canada forme, à un coût raisonnable, des élèves officiers pour qu'ils assument leur rôle de leaders dans les Forces armées canadiennes. Le Collège militaire royal du Canada est une université financée par le gouvernement fédéral.
Nous avons constaté que les programmes d'étude du collège sont de bonne qualité, mais que la formation d'un étudiant au Collège coûte environ deux fois plus cher que dans d'autres universités. La Défense nationale n'a pas été en mesure de montrer que les officiers formés au Collège sont plus efficaces dans leurs fonctions que ceux qui entrent dans les Forces armées canadiennes par un autre programme de recrutement.
[Traduction]
Nous avons également constaté que le Collège militaire royal du Canada n'enseignait pas adéquatement aux élèves-officiers le leadership ni la conduite qui était attendue des futurs officiers. Même si le collège est intervenu dans les cas de mauvaise conduite graves, le nombre d'incidents mettant en cause des élèves-officiers supérieurs montre que le collège ne les avait pas préparés à servir de modèles à leurs pairs.
À notre avis, le milieu d'apprentissage au collège n'appuie pas systématiquement l'instruction militaire et l'enseignement de comportements éthiques. Le collège doit se recentrer sur sa vocation d'établissement militaire pour former les leaders dont les Forces armées canadiennes ont besoin.
[Français]
Nos rapports de l'automne au Parlement comprennent aussi des copies des rapports d'examen spécial qui ont été présentés à Énergie atomique du Canada limitée et à la Commission de la capitale nationale depuis la sortie de nos rapports du printemps.
Dans l'ensemble, nous avons constaté qu'Énergie atomique du Canada limitée avait disposé des moyens et des méthodes nécessaires pour devenir un organisme gouvernemental exploité par un entrepreneur du secteur privé. La société a maintenant la tâche d'évaluer l'efficacité et l'efficience de ce nouveau modèle d'entreprise.
[Traduction]
Notre examen de la Commission de la capitale nationale a révélé que plus du quart des actifs de la Commission — dont certains ont une valeur historique — étaient dans un état passable, mauvais ou critique. Les ressources de la Commission, qui ont été autorisées dans son plan d'entreprise approuvé, sont insuffisantes pour restaurer et entretenir ces actifs. La Commission s'est engagée à analyser ses besoins en ressources et à élaborer des scénarios pour y parer.
J'espérais pouvoir parler d'un sujet autre que les résultats pour les citoyens. Je continue de rendre le même message, à savoir que le gouvernement ne comprend pas ses résultats du point de vue des citoyens. Je pense que notre message sur l'importance d'offrir des services axés sur les citoyens est entendu programme par programme, mais rien n'indique qu'il est repris à l'échelle du gouvernement.
[Français]
Quand nous entamons de nouveaux audits, nous notons encore l'absence du souci de bien comprendre ce que les Canadiennes et les Canadiens retirent des programmes gouvernementaux, qu'il s'agisse de réponses à leurs questions fiscales, de soutien en santé mentale pour les détenus, d'une meilleure santé buccodentaire pour les Inuits et les Premières Nations ou de l'étendue des difficultés qu'éprouve le gouvernement à payer ses employés.
[Traduction]
Il semble que notre message n'est pas entendu à l'échelle du gouvernement, et cela me préoccupe. Le gouvernement est censé être au service des citoyens. Pour y arriver, il faut un effort concerté du gouvernement dans son ensemble pour comprendre et mesurer l'expérience des citoyens — pas seulement un programme à la fois, mais pour tous les programmes et services.
[Français]
Je vous remercie, monsieur le président.
[Traduction]
Je suis prêt à répondre à vos questions.
:
Merci, monsieur le président.
Monsieur Ferguson, je vous remercie, ainsi que votre équipe, de l'ensemble du travail que vous réalisez tous les jours. Vos rapports sont basés sur des analyses objectives factuelles, dont le but est évidemment de veiller à ce que les fonds publics soient dépensés de façon correcte et qu'ils soient bien gérés.
Je vais focaliser mes questions davantage sur votre rapport concernant les problèmes liés au système Phénix. Ce rapport, comme les autres, me préoccupe. Je tiens à dire que mes pensées accompagnent l'ensemble des fonctionnaires touchés par les problèmes liés au système Phénix. Mes pensées accompagnent l'ensemble des fonctionnaires à Miramichi, à Matane, à Ottawa et ailleurs, qui travaillent sans relâche pour tenter de régler l'ensemble des problèmes.
Je suis persuadé que tous les députés à la Chambre des communes reçoivent, comme moi, des courriels et des appels de fonctionnaires qui ont des difficultés importantes liées à cette situation. Ils sont dans nos pensées.
Pour mettre les choses en contexte, j'aimerais dire que le système précédent datait de 40 ans. D'ailleurs, votre prédécesseur avait souligné, en 2010, ce qui suit dans un de ses rapports. Je vais le dire en anglais, parce la citation est en anglais:
[Traduction]
Une panne aurait de multiples et graves conséquences. Dans le pire des cas, le gouvernement ne pourrait plus exercer ses activités et servir les Canadiens.
[Français]
Il était donc clair qu'il fallait passer à un nouveau système.
Sept ans plus tard, nous sommes ici pour constater l'ampleur du système. Nous nous entendons sur le fait que ce système n'est pas simple. Il y a plus de 300 000 fonctionnaires dans la fonction publique fédérale, un peu plus de 100 ministères et 105 conventions collectives. Le système de paie doit traiter 9 millions de transactions par année. L'ensemble de ces transactions amène des sommes d'environ 20 milliards de dollars par année. C'est donc un système particulièrement important.
Le gouvernement du Canada a sélectionné le système PeopleSoft de la compagnie IBM. Ma question est très simple.
Admettons qu'une baguette magique nous permette de solutionner aujourd'hui l'ensemble des 494 000 problème en attente. Les analyses que vous avez faites, les rapports et l'ensemble des discussions que vous avez tenues sur le sujet avec l'ensemble des fonctionnaires permettraient-ils au système de fonctionner? Est-ce qu'il est possible de faire des transactions? Est-ce que les transactions de paie pourraient fonctionner si l'ensemble des problèmes disparaissait aujourd'hui?
:
Merci beaucoup, monsieur le président. Je vous félicite pour votre français, qui ne cesse de s'améliorer. Vous avez un exemple devant vous, M. Ferguson, qui est un modèle dans ce domaine. Je vous en remercie et je vous salue.
Messieurs, mesdames, soyez les bienvenus à votre Chambre des communes.
Tout d'abord, je veux me faire l'écho de ce que mon collègue M. Massé a dit tout à l'heure au sujet du système Phénix. Nos pensées accompagnent d'abord et avant tout ces dizaines de milliers de travailleurs canadiens qui attendent, de façon malheureuse, d'être payés convenablement. Comme tout le monde, dans ma circonscription, il y a des employés fédéraux, mais un peu moins que d'employés provinciaux — vous comprendrez que je suis de la région de Québec. Il y a deux semaines, au déjeuner, dans un restaurant de Val-Bélair, j'ai rencontré une dame qui m'a raconté sa tragédie personnelle, les yeux pleins d'eau. C'est à ces gens-là que nous pensons aujourd'hui, et je présume que vous et votre équipe y avez aussi pensé tout au long de la rédaction de ce document.
Monsieur le président, dès les premiers paragraphes de son rapport, M. Ferguson exprime très bien que c'est un système vieux de 40 ans qu'il fallait mettre à jour et que cela a pris sept ans avant d'en arriver là où nous sommes aujourd'hui.
Évidemment, lancer un tel système ne se fait pas sans créer des préoccupations. C'est pour cela que, à deux reprises en 2015, sous l'ancien gouvernement, les décideurs ont suspendu l'application du programme, estimant qu'il n'était pas suffisamment prêt.
L'histoire étant ce qu'elle est, le 24 février 2016, le gouvernement actuel a appuyé sur le bouton pour mettre en marche le système Phénix, avec le cortège de tragédies que l'on connaît. Il a été relancé au mois d'avril, tout allait bien et tout était beau, mais finalement, cela a été un drame.
Monsieur le vérificateur général, je vais citer le point 1.86 de votre rapport, lequel est assez cinglant:
Nous avons constaté qu'au cours des 16 mois qui ont suivi le début des problèmes de paye [...], aucune structure globale de gouvernance et de surveillance des efforts déployés n'avait été établie [...] Services publics et Approvisionnement Canada n'a pas collaboré avec les ministères [...] aucune structure de gouvernance n'avait été établie pour déterminer les comités et groupes de travail nécessaires et définir leurs rôles et responsabilités afin de donner une orientation claire ou de coordonner leurs travaux.
Bref, on s'est mis la tête dans le sable. On n'a pas fait face à la réalité et on a travaillé en vase clos plutôt que main dans la main.
Monsieur Ferguson, comment expliquez-vous un tel laxisme?
:
Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Ferguson, et merci à tout votre personnel.
Par où commencer?
Pour la toute première fois, après avoir parlé à quelques-uns de mes collègues, je crois qu'on souhaite beaucoup tenir une séance sur chacun de ces sujets. Premièrement, il n'y a que six chapitres. Deuxièmement, notre comité est incroyablement efficace lorsqu'il le veut, et nous parvenons à accomplir beaucoup de travail. Chacun de ces audits porte non seulement sur un problème ponctuel, mais sur un aspect important des services gouvernementaux offerts aux citoyens. J'espère, chers collègues, que nous trouverons le moyen d'organiser une séance publique sur chacun de ces chapitres.
Monsieur le président, comme nous sommes saisis d'un rapport global, j'aimerais dire quelques mots, avec votre permission, sur le message général que le vérificateur général nous transmet aujourd'hui.
Monsieur Ferguson, vous avez commencé et terminé votre exposé par la même idée. Dans le jargon du métier de vérificateur, il s'agit de propos assez durs. Je veux simplement prendre un instant pour souligner ce message, après quoi je vous poserai quelques questions.
Encore une fois, chers collègues, nous avons une obligation. C'est ici que les choses se décident et, malgré tout le bon travail accompli par le vérificateur général, si nous ne sommes pas en mesure d'instaurer des changements au sein du gouvernement, ces efforts s'avéreront inutiles. Il est vraiment important que nous fassions bien les choses non seulement à petite échelle, mais aussi à grande échelle.
Le vérificateur général nous dit que, lorsqu'il considère globalement ces audits, ce qui ressort pour lui encore une fois, c'est que les ministères n'envisagent pas du point de vue des citoyens les résultats de leurs programmes et services.
Toujours selon le vérificateur général, beaucoup de ministères sont passés maîtres dans l'art de mesurer les progrès réalisés à l'interne. Ils suivent des étapes dans le cadre de leur processus et ils en mesurent les résultats, puis ils annoncent qu'ils s'en tirent très bien ou très mal, mais au bout du compte, quels services les Canadiens reçoivent-ils au juste?
Le vérificateur général affirme — et je poursuis ma lecture — qu'il répète le même message, audit après audit et année après année, parce qu'on voit que les ministères continuent d'être fixés sur leurs propres activités et qu'ils oublient le point de vue des citoyens. Je viens d'en donner un exemple. Les audits publiés cette semaine ne font pas exception.
Ensuite, le vérificateur général finit par dire: « J'espérais pouvoir parler d'un sujet autre que les résultats pour les citoyens. Je continue de rendre le même message, à savoir que le gouvernement ne comprend pas ses résultats du point de vue des citoyens. »
Ce sont là des paroles sévères venant de la part d'un vérificateur.
Il ajoute: « Je pense que notre message sur l'importance d'offrir des services axés sur les citoyens est entendu programme par programme, mais rien n'indique qu'il est repris à l'échelle du gouvernement. »
Fait intéressant, d'après mon expérience, c'est normalement l'inverse qui se produit. Les hauts fonctionnaires disent: « Oui, nous comprenons. Nous en sommes conscients. Nous allons nous pencher là-dessus. » Puis ils s'en vont, et rien de concret ne semble être accompli au sein des ministères. Ce que nous observons maintenant, c'est que certains des ministères prennent parfois des mesures, mais il n'y a aucun leadership à grande échelle.
Je vais passer au dernier point, et je poserai ensuite une question, monsieur le président.
Le vérificateur général conclut en disant ceci:
Il semble que notre message n'est pas entendu à l'échelle du gouvernement, et cela me préoccupe. Le gouvernement est censé être au service des citoyens. Pour y arriver, il faut un effort concerté du gouvernement dans son ensemble pour comprendre et mesurer l'expérience des citoyens — pas seulement un programme à la fois, mais pour tous les programmes et services.
Encore une fois, si le gouvernement — et cela comprend tous les parlementaires — ne répond pas aux besoins des Canadiens sur le plan des services, alors les citoyens sont en droit de penser que l'argent des impôts est gaspillé — et nous voulons justement éliminer tout gaspillage.
J'en viens donc à ma question, monsieur le vérificateur général. Je commence à vieillir et je ne sais pas quelle expression on utilise de nos jours — faire un remue-méninges, sortir des sentiers battus, ou peu importe. De toute évidence, les mesures que nous prenons ne fonctionnent pas. Que pouvons-nous faire d'extraordinaire? Y a-t-il des mesures que nous pouvons prendre pour vraiment pousser les limites de ce que notre comité peut faire en collaboration avec vous?
Cette situation ne peut plus durer. Je siège ici depuis 14 ans. Je ne veux pas passer 14 autres années à entendre le vérificateur général répéter chaque fois les mêmes choses, sans que rien ne change.
Nous sommes des agents de changement. Que pouvons-nous faire, monsieur Ferguson? Poussez-nous à agir. Cherchons à dépasser nos limites. Comment pouvons-nous vous aider à transformer le gouvernement afin qu'il réponde aux besoins de ses citoyens? Comment nous y prendre?
:
Je vais d'abord parler d'un sujet que vous venez d'évoquer et j'aborderai peut-être ensuite une autre question.
Le Comité a maintenant convoqué, pour la deuxième fois, les représentants d'un ministère, après environ un an ou un an et demi, afin qu'ils viennent parler d'un audit effectué auparavant. Je crois que cela envoie un bon message dans l'ensemble du système, à savoir que le Comité tient sérieusement à ce que les ministères règlent les problèmes que nous observons. C'est ce que le Comité a déjà entrepris de faire, et je l'encourage à continuer dans cette voie. Selon moi, c'est un message important pour l'appareil gouvernemental.
En ce qui concerne le message que j'ai livré aujourd'hui, voici en partie là où je veux en venir. Lorsque nous menons un audit, relevons des problèmes et formulons des recommandations, le ministère concerné prend l'engagement de s'en occuper; il se peut fort bien que les fonctionnaires s'attellent à la tâche, mais nous ne saurons pas vraiment s'ils y ont donné suite ni dans quelle mesure ils ont obtenu de bons résultats tant que nous n'aurons pas fait un suivi. En tout cas, ils pourraient très bien avoir réglé les problèmes.
Ce qui m'inquiète toutefois... Je vais prendre l'exemple de l'audit sur les centres d'appels de l'Agence du revenu du Canada. Le message général à retenir dans cet audit ne diffère pas trop de celui que nous avons livré il y a quelques années dans le cas des anciens combattants qui essaient d'avoir accès à des services de santé mentale. Ce qui me préoccupe quand je parle des résultats à l'échelle du gouvernement, c'est qu'on dirait presque que les ministères ne s'intéressent qu'aux audits les concernant. Ils devraient également examiner les audits que nous effectuons en ce qui a trait à d'autres ministères et programmes afin de comprendre ce qu'ils doivent faire dans le cadre de leurs programmes pour se trouver en bonne posture. Ainsi, quand vient le temps pour moi de vérifier leurs programmes, je peux dire: « Oui, ils mettent en oeuvre ce programme et ils semblent essayer de le comprendre du point de vue des citoyens. »
À mon avis, il est très important que les ministères tirent des leçons à partir des audits menés auprès des autres. Le Comité pourrait peut-être envisager, entre autres, de produire une sorte de rapport sommaire global de certains des problèmes communs qui ressortent de divers rapports, ainsi qu'un bilan des leçons que les ministères devraient en tirer. Quels sont les thèmes récurrents? Les ministères devraient y accorder plus d'attention.
Ensuite, si notre audit de suivi montre qu'ils n'ont pas réglé les problèmes, le Comité sera en mesure de leur dire: « Écoutez, nous vous avons même fourni une feuille de route qui met en évidence les leçons à tirer des audits réalisés auprès d'autres ministères. »
Manifestement, ils ne prennent pas d'eux-mêmes cette initiative; ils auraient donc besoin d'un peu d'aide. C'est peut-être un rôle que le Comité pourrait jouer.
Je remercie le vérificateur général de nous fournir ces rapports. Ils sont assurément de formidables occasions d'apprendre pour les gouvernements, pas seulement pour le gouvernement fédéral, mais bien pour tous les gouvernements du pays.
J'aimerais commencer en prenant le relais du M. Christopherson et en passant directement à l'audit sur l'ARC, l'Agence du revenu du Canada.
Selon moi, le message qu'il faut retenir à la lecture de chaque rapport individuel, c'est qu'en ce qui concerne Phénix, nous laissons tomber nos propres employés. Pour un certain nombre d'autres aspects, comme en ce qui concerne l'ARC, nous laissons tomber les citoyens du Canada. En général, on dirait bien que le service axé sur le client ne fait pas partie de la mentalité ou de la culture du gouvernement du Canada.
Dans le cas particulier de l'ARC, il semble que la façon de rapporter les activités au vérificateur général est problématique — qu'il s'agisse de comparer des pommes avec des pommes, dans le sens du nombre de personnes par rapport au volume des appels. Comme vous l'avez souligné, il y a ce problème des appels bloqués. Il y a aussi un problème concernant le type de renseignements donnés aux clients, qui sont les contribuables canadiens, et l'exactitude de cette information. C'est 30 % des renseignements donnés aux citoyens qui sont erronés.
Ce sont des problèmes de taille qui plombent l'ARC et qui s'ajoutent aux autres problèmes majeurs dont nous avons été mis au courant récemment, mais qui ne font pas partie du rapport. Nous sommes tout de même en mesure de dégager un thème concernant ce qui est en train de se passer à l'ARC. De toute évidence, il faudra un travail de grande envergure pour redresser la situation.
Aux fins d'illustration, faisons une comparaison avec le secteur privé. Si vous appelez une entreprise du secteur privé pour savoir ce que vous lui devez — prenons l'exemple d'une entreprise de télécommunications, puisque les entreprises de ce domaine sont de grosses organisations — ou pour connaître les paramètres selon lesquels vous devez effectuer vos paiements, l'entreprise n'aura pas de difficulté à répondre à vos questions. Elle sera rapidement en mesure de vous dire combien vous lui devez et pourquoi vous lui devez ce montant. C'est quelque chose qui se fait de façon courante. Vous n'aurez pas à téléphoner huit fois avant d'avoir votre réponse. On vous répondra sur-le-champ.
Ce qui nous amène au problème que je voulais soulever. Je réfléchissais à notre conversation d'hier soir. Nous avons eu la possibilité de vous parler de cela à quelques occasions. On a constaté que les employés de l'agence n'ont pas la formation nécessaire pour répondre aux questions des citoyens et qu'ils évitent par conséquent d'y répondre. En outre, il semble que le fait de communiquer des renseignements aux citoyens les rend nerveux. Le problème est-il particulier à l'ARC, ou est-ce la mauvaise gestion et la bureaucratie qui atteindraient tout à coup des sommets inégalés?
:
Merci, monsieur le président, et merci encore au vérificateur général et à son équipe.
Lorsque vous préparez le calendrier de vérification — et vous pourriez peut-être nous parler un peu de votre façon de procéder à cet égard —, il y a un certain nombre de priorités, mais il y a aussi une certaine marge de manoeuvre. Vous êtes néanmoins en mesure de voir les thèmes principaux de chaque série de rapports. C'est ma quatrième ronde, et j'en suis bien consciente.
Lorsque vous parlez de ces rapports, nous prenons la mesure du rendement des différents ministères. Nous regardons si les contribuables en ont pour leur argent. Pour ce faire, je me fie à un certain nombre de mesures. Bien entendu, je tiens compte du coût des programmes, mais aussi de choses comme la sécurité publique et la santé des citoyens, un thème auquel vous avez déjà fait référence dans le passé, mais aussi en tant que vérificateur général.
Nous voyons cela dans les programmes de santé buccodentaire pour les Premières Nations, lorsque nous nous penchons sur la santé de nos citoyens les plus vulnérables. Un autre thème qui émerge et qui ne manque pas de surprendre — car je pense que nous avons toujours tiré une grande fierté de la qualité de notre fonction publique et des services que le gouvernement prodigue aux citoyens —, c'est que la qualité semble être devenue problématique. C'est ce que je constate.
Le système Phénix est une préoccupation de taille pour nous, et nous allons avoir l'occasion de regarder cela de très près d'ici quelque temps. Lorsqu'il est question des centres d'appels de l'Agence du revenu du Canada, on pourrait avoir l'impression qu'ils répondent à vos questions alors que ce n'est pas du tout le cas. Même lorsque nous faisons quelque chose d'urgent comme de sortir l'argent des organismes d’aide à l’établissement pour les réfugiés syriens, nous avons eu de la difficulté à acheminer l'argent jusqu'aux intervenants sur le terrain. Il y a aussi des problèmes en ce qui concerne nos populations vulnérables, les délinquantes dans les établissements correctionnels, sans parler du simple problème de qualité qui plombe notre façon de former nos futurs agents.
Lorsque vous faites ces examens, vous formulez des recommandations. Est-il déjà arrivé que des organismes ou des ministères aient de la difficulté à accepter vos recommandations? Quelle sorte de réponse vous a-t-on donnée dans ces cas-là? Pouvez-vous nous dire un mot sur ce qui arrivera aux futurs plans d'action?
:
Je ferais probablement quelques suggestions.
D’une part, lorsqu’un projet est approuvé initialement — que l’on parle d’un système de paie, de Services partagés ou de quoi que ce soit d’autre —, il est peu probable qu’au moment de la conception de l’idée ou de l’acceptation du projet, le responsable du projet soit en mesure de prévoir avec précision les coûts du projet, sa date d’achèvement et son incidence finale en matière d’économies potentielles. Je dirais qu’il est extrêmement rare, au moment de la conception de ces projets très complexes, que quelqu’un soit en mesure de dire qu’ils coûteront tel ou tel montant, qu’ils seront achevés à telle ou telle date et qu’ils vous permettront de réaliser telle ou telle économie.
Ces paramètres doivent être actualisés tout au long du projet, en fonction de ce que l’on apprend au cours du projet. Il faudra que l’on comprenne que le projet commence à paraître plus complexe qu’on l’imaginait au début et que, par conséquent, ses coûts seront peut-être plus élevés et que sa date d’achèvement sera peut-être reportée davantage.
Les aspects suivants devront être pris en considération, à savoir que nous ne pourrons peut-être pas accomplir tout ce que nous pensions être en mesure d’accomplir en premier lieu ou que nous pourrons peut-être l’accomplir, mais que le projet ne nous permettra pas de réaliser toutes les économies anticipées.
Tous ces paramètres devront être actualisés au cours du projet. Je pense que, trop souvent, les projets continuent d’être mesurés en fonction de chiffres qui ont été établis au tout début du projet. Je pense que c’est l’une des choses que l’on doit comprendre à propos de ces types de projets.
D’autre part, je dirais qu’il ne faut jamais sous-estimer l’importance d’avoir une bonne structure de gouvernance pour gérer les projets complexes. Il ne faut pas que toutes les responsabilités soient confiées à l’équipe ou aux personnes responsables de l’exécution du projet. Il faut qu’une surveillance soit exercée par des gens qui ne sont pas chargés de l’exécution du projet. Il faut que des experts indépendants puissent conseiller les personnes responsables de la surveillance. Il pourrait s’agir de vérificateurs internes ou d’évaluateurs externes, mais ces personnes devraient relever des gens responsables de la surveillance, et non des personnes chargées de l’exécution du projet.
Je ne dis pas que c’est ce qui s’est produit dans l’un ou l’autre de ces cas. Je soutiens simplement que, d’un point de vue conceptuel, ce sont les genres de mesures qui s'imposent, à mon avis.
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Je peux vous dire ce qu'ils ont fait — ils n'ont rien fait. C'est indiqué dans leur rapport.
Je soulève cette question, car je trouve qu'elle est très à propos. Nous nous penchons non seulement sur les résultats, mais aussi sur la surveillance. A-t-on exercé une surveillance adéquate? Dans la négative...
M. Ferguson vient d'y faire allusion. On parle ici de 2,3 millions de dollars de l'argent des contribuables qui ont été affectés au Bureau de l'ombudsman des contribuables, qui relève uniquement du ministre du Revenu national.
Sachez que c'est un document intéressant, chers collègues. Par exemple, on peut y lire que: « Notre rôle n'est pas celui d'un défenseur, ni des contribuables, ni de l'ARC », et pourtant, sous la rubrique « Qui nous servons », on peut lire: « Nous sommes au service des contribuables ».
Il s'agit d'une magnifique brochure, soit dit en passant — en papier glacé et avec de très belles photos. On a passé beaucoup de temps à préparer ce beau produit.
Quoi qu'il en soit, à la page 23, il est question de ces 2,3 millions de dollars, mais le principal problème qui a été relevé par le vérificateur était l'incapacité des Canadiens à communiquer avec l'ARC. Les contribuables ne sont même pas capables d'entrer en contact avec l'Agence — et voilà à quoi ont servi ces 2,3 millions de dollars. Sous la rubrique « Communiquer avec l'ARC par l'entremise des lignes de demandes de renseignements généraux », on peut lire:
Au cours des dernières années, notre Bureau a reçu de nombreuses plaintes de la part de contribuables et de représentants qui affirmaient qu'il était très difficile de joindre les lignes de demandes de renseignements généraux de l'ARC. Une plainte souvent exprimée par les contribuables était que les lignes étaient occupées, peu importe le moment de la journée, ce qui les obligeait à effectuer des appels multiples.
C'est très précis. Qu'ont-ils fait pour remédier à la situation?
Étant donné l'annonce de financement pour améliorer l'accès téléphonique et les initiatives en cours à l'ARC, notre Bureau ne mènera pas d'examen pour le moment,
— mais soyez rassurés —
... nous continuerons de surveiller cet enjeu.
Par conséquent, la somme de 2,3 millions de dollars a été consacrée à la surveillance, et au bout du compte, c'est le vérificateur général qui nous a signalé le problème.
Normalement, nous ne nous engageons pas dans cette voie, mais j'aimerais discuter avec mes collègues de la façon d'aborder cette question. Le Bureau de l'ombudsman existe pour aider les Canadiens à régler ce type de problèmes, et d'après ce que je peux voir, il a échoué dans son mandat. Dans le cadre de notre étude, et c'est peut-être une façon de résoudre le problème, nous pourrions demander au ministre — de qui relève l'ombudsman — de revoir son mandat ou d'y apporter des modifications.
Ce bureau nous coûte 2,3 millions de dollars, et lorsqu'il y a un enjeu de cette importance, c'est tout ce qu'il a à dire. Le ministre a dit: « Tout va bien, parce que nous augmentons le budget », alors l'ombudsman a répondu: « Parfait. Dans ce cas, le problème est réglé. » Ce n'est pas ce qu'on peut appeler de la surveillance.
L'ombudsman des contribuables va vite savoir que nous n'allons pas en rester là.
Je vais m'arrêter ici pour l'instant. En fait, c'était plus une déclaration qu'autre chose, mais c'est une situation qui me frustre beaucoup. Si vous pouvez y répondre, j'en serais ravi, sinon, au moins je me serai vidé le coeur.
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Merci beaucoup. Tout d'abord, je tiens à remercier le vérificateur général et son équipe pour leur travail remarquable et cette série de rapports.
J'aimerais revenir sur les préoccupations qui ont été exprimées par mes collègues autour de la table, particulièrement M. Christopherson. Dans sa déclaration, le vérificateur général a indiqué qu'année après année, audit après audit, on constate que les ministères continuent de se concentrer sur leurs propres activités plutôt que sur les intérêts des citoyens.
Nous avons parlé aujourd'hui des préoccupations des citoyens, de leur expérience, du service qui leur est offert. J'aimerais prendre un moment pour d'abord déconstruire cette terminologie, car je crois qu'il est très important que nous sachions clairement qui nous servons. Pour moi, ce sont les Canadiens, dans le sens le plus général et le plus inclusif possible, qu'on parle de la santé buccodentaire des enfants des Premières Nations et des collectivités inuites, des réfugiés syriens qui ont été accueillis dans leur nouveau pays, des délinquantes autochtones qui ne bénéficient pas de programmes adaptés à leur culture ou des détenues en général qui doivent suivre des programmes correctionnels conçus pour les hommes et non pour les femmes. À mon sens, il faut que ce soit clair que nous visons tous les Canadiens et nous devons être en mesure d'offrir les types de services et de programmes qui répondent à leurs besoins.
Cela dit, je vais principalement m'attarder au rapport sur les problèmes liés au système de paye Phénix.
La pièce 1.2 du rapport du vérificateur général est un graphique du nombre de fonctionnaires ayant des demandes d'intervention de paye en attente dans 46 ministères et organismes. Le graphique montre clairement que sur 2 ans, il y avait 15 000 fonctionnaires ayant des demandes d'intervention de paye en attente dans les ministères et organismes desservis par le Centre des services de paye de Miramichi. Ce nombre est passé à 35 000 en janvier 2016, lorsque Phénix a été lancé, puis il y a eu une explosion du nombre de demandes d'intervention jusqu'en juin 2017, où le nombre s'élevait à 150 000.
Si je regarde ce graphique, je comprends d'emblée que ce sont les employés qui travaillent dans ces 46 ministères et organismes. Cependant, en lisant le rapport, je constate qu'on n'a pas pris en compte les demandes d'intervention de paye en attente de tous les ministères au cours de ces deux années, car certains d'entre eux n'avaient pas mis en oeuvre ces systèmes.
J'aimerais donc que le vérificateur général me dise ce que cela signifie. À première vue, cela représente une importante et inquiétante augmentation du nombre de cas. Or, en lisant le rapport, il semble que cette augmentation puisse être attribuée aux ministères qui n'avaient pas recours au Centre des services de paye de Miramichi ou au système de paye Phénix durant la période visée.
J'aimerais donc avoir l'avis du vérificateur général là-dessus.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie, ainsi que toute votre équipe, d'être ici avec nous aujourd'hui monsieur Ferguson,.
Je vais reprendre là où M. Deltell a laissé, à savoir le sujet de l'accueil des réfugiés syriens. J'aimerais vous dire, ainsi qu'à tous les députés, que la vérificatrice du Québec vient tout juste de présenter son rapport aujourd'hui. Il contient tout un chapitre sur l'accueil des réfugiés et des immigrants. Je vous renvoie à ce rapport, qui n'est pas reluisant en ce qui touche les services offerts par le gouvernement du Québec, pour ce qui est du suivi qu'il a effectué en matière d'accueil et d'intégration. Or cela relève de sa responsabilité. Déjà là, on sonne une alerte importante, du fait que le gouvernement fédéral n'arrive pas à recevoir l'information nécessaire pour vérifier où en sont les nouveaux arrivants au Canada quant à leur intégration et à leur établissement.
Cela dit, le Québec étant l'exception, dans les autres provinces, comment se fait cette collecte de données qui permettra d'estimer si nous atteignons ou non nos objectifs d'accueil, d'établissement et d'intégration?
J'ai déjà soulevé la question à propos d'un autre sujet. Les sondages d'opinion du client, dans ce cas-ci de la personne qui reçoit les services, sont relativement faciles à effectuer, parce que nous savons où se trouvent ces personnes, du moins au cours des deux premières années. Serait-il possible de recommander au ministère d'en faire une pratique continuelle et de mener des sondages pour savoir si elles ont effectivement reçu des soins de santé, de l'éducation ou de l'aide à la recherche d'emploi? Tout cela fait partie des services offerts. Pourrait-on étudier cette possibilité et serait-il souhaitable de recueillir ces données?
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Pour ce qui est de notre audit sur les délinquantes, nous avons essayé de voir dans quelle mesure le Service correctionnel du Canada répondait à leurs besoins particuliers.
Puisque le gouvernement a fermé la prison des femmes de Kingston il y a 25 ans, nous avons essayé de voir dans quelle mesure le Service correctionnel du Canada offrait maintenant des programmes et des services qui répondent aux besoins particuliers des femmes, comme le lui oblige la loi.
Essentiellement, nous avons constaté que le Service correctionnel du Canada n'avait pas encore créé d'outil de détermination de la cote de sécurité conçu pour les délinquantes. Il utilise toujours celui qu'il a mis au point pour les délinquants il y a 25 ans. De plus, il utilise cet outil pour déterminer les besoins en réadaptation, ce qui pose problème parce que l'outil n'avait pas été conçu à cette fin. Ce qui nous apparaît plus préoccupant encore, c'est qu'il a conçu un outil pour déterminer quel type de programme conviendrait aux délinquantes, mais qu'il ne l'a pas encore utilisé.
Nous avons constaté qu'il avait élaboré des programmes correctionnels spécialement conçus pour les délinquantes et pour les délinquantes autochtones. Le problème, c'est qu'il n'a pas été en mesure de les leur offrir avant qu'elles deviennent admissibles à leur première libération conditionnelle. Par conséquent, des délinquantes sont restées en détention après la date à laquelle elles devenaient admissibles à une libération conditionnelle et ont donc purgé le plus gros de leur peine en détention plutôt que dans la communauté, ce qui aurait été plus efficace pour leur réinsertion à long terme.
Dans le Service correctionnel, la plupart des délinquantes purgent des peines de courte durée, ce qui signifie qu'elles deviennent admissibles à une libération conditionnelle dans l'année suivant leur admission. Néanmoins, le SCC n'est pas en mesure d'exécuter les programmes avant. Nous avons recommandé qu'il améliore la prestation des programmes correctionnels aux délinquantes.
Enfin, nous avons examiné la prestation des services de santé mentale, car une grande partie des délinquantes présentent des troubles de santé mentale. Nous avons constaté que les plans de traitement n'étaient pas établis en temps opportun. On ne faisait pas de suivi systématique sur la prestation des services de santé mentale aux délinquantes. Les ressources dont le SCC disait avoir besoin quant aux places en hôpital psychiatrique et aux psychologues étaient nettement insuffisantes.
Nous nous sommes penchés sur le nombre de femmes placées en isolement et sur les femmes souffrant de maladie mentale qui avaient été placées en isolement, ce que nous avons trouvé problématique.
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Merci, monsieur le président.
Je vous remercie d'avoir mis l'accent sur cette question. C'est un élément très important, et j'aimerais prendre la parole un moment.
J'ai un peu d'expérience à cet égard. Lorsque j'étais au conseil régional, j'ai présidé un groupe de travail sur les personnes ayant des troubles psychiatriques, comme on le disait à l'époque. Le problème, c'était que des gens ayant des problèmes de santé mentale étaient dans la rue et entraient dans un cycle lorsqu'on demandait à la police d'intervenir.
Il ne faut pas oublier que c'est une question de santé mentale. On demande aux policiers d'intervenir, mais ils ne savent pas quoi faire et souvent, ils envoient la personne à l'hôpital. Le système hospitalier est peut-être capable de stabiliser la personne pendant un certain temps, mais elle retournera ensuite dans la rue. Si elle souffre de maladie mentale, elle se conduira encore mal. Je ne sais pas si c'est la bonne façon de le dire, mais il y aura encore des problèmes. C'est un cycle.
Quelques années plus tard, je me retrouve à la table du cabinet en tant que ministre responsable des services correctionnels provinciaux, puis voilà, toutes les études que j'examine indiquent la même chose.
J'ai bien essayé, mais je n'ai absolument rien changé. J'aimerais dire que je l'ai fait, mais ce n'est pas le cas. Nous voici maintenant aujourd'hui, deux décennies et demie plus tard, à faire face au même problème. Encore une fois, c'est un cycle: la police intervient, elle envoie les gens dans le système de santé mentale, et ils finissent par se retrouver dans le système de justice pénale, et cela ne devrait pas être le cas. Ce ne sont pas des criminels. Ils ont des problèmes de santé mentale, mais nous n'avons pas de système qui nous permet de faire face à cette situation.
Personnellement, j'ai vu cette situation à l'échelle locale, à l'échelle provinciale, et je la vois maintenant à l'échelle fédérale. Vous venez de terminer, monsieur le vérificateur général, en parlant de l'idée de mener un examen général important sur la question. Je vous supplie de le faire.
D'après mon expérience, peu importe ce que de bonnes personnes essaient de faire, nous ne sommes pas capables de changer la situation. De plus en plus de gens ont des problèmes de santé mentale. Les choses ne feront qu'empirer à cet égard. Il nous faut une forte intervention qui changera la donne, et cela doit venir de vous et de votre bureau.
Pour ce que cela vaut, je veux vous soutenir le plus possible dans l'examen de l'ensemble du système. Nous avons besoin d'une révision en profondeur et je vous remercie, monsieur le président, d'avoir mis l'accent là-dessus. C'est une question essentielle, peu importe à qui l'on parle dans la société. Nous avons une occasion unique de participer, du moins, au changement de donne, si nous le pouvons.
S'il vous plaît, allons de l'avant. Autrement, le cycle se poursuivra, et nous ne répondrons pas aux besoins de nos citoyens.
Merci.