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ETHI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique


NUMÉRO 133 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 10 octobre 2024

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Français]

     La séance est maintenant ouverte.
    Bienvenue à la 133e réunion du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique. Conformément à l'article 108(3)h) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mardi 13 février 2024, le Comité reprend son étude des conséquences de la désinformation et de la mésinformation sur le travail des parlementaires.

[Traduction]

    J'aimerais souhaiter la bienvenue à notre témoin pour la première heure d'aujourd'hui. Nous accueillons M. Richard Gray, vice-président de CTV News, de Bell Media Inc.
    Monsieur Gray, bienvenue. Je crois comprendre que tous les tests sur Zoom ont été effectués. Vous avez cinq minutes tout au plus pour présenter vos observations préliminaires au Comité.
    Allez‑y, monsieur. Merci.
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour aux membres du Comité.
    Je suis heureux d'être ici pour participer à votre étude sur la désinformation et la mésinformation, qui sont des préoccupations importantes pour le Canada. En tant que source de nouvelles la plus regardée au Canada, CTV News se soucie beaucoup des défis posés par un écosystème de l'information en plein changement. Dans un monde qui évolue rapidement, il est plus important que jamais que la population canadienne ait accès à une couverture de l'actualité impartiale, équilibrée et fiable. Étant une entreprise de nouvelles réputée dans une démocratie, il est fondamental pour CTV News de permettre à la population canadienne de savoir ce qui se passe et de clarifier les événements pour qu'elle puisse tirer ses propres conclusions. Cela se fait grâce à des reportages précis, justes et pertinents, présentés de manière claire et convaincante.
    Je tiens à souligner le travail acharné des journalistes et du personnel de CTV News, qui se surpassent chaque jour pour respecter notre mandat en appliquant les normes les plus strictes en matière d'honnêteté, de transparence et d'indépendance. Ce n'est pas toujours un travail facile, mais c'est un travail important qui mérite d'être reconnu.
    Depuis plus de 60 ans, CTV News informe la population canadienne de sujets importants. Parmi les événements des dernières années, il y a eu une pandémie historique, des élections nationales et internationales, des catastrophes naturelles, des crises géopolitiques, des problèmes économiques et plus encore. Grâce au travail assidu de ses journalistes et de son personnel, CTV News est régulièrement reconnue comme étant la source de nouvelles la plus fiable au Canada. Nous en sommes très fiers, car la confiance est une chose que nous prenons très au sérieux.
    Notre mandat est de promouvoir l'intégrité et l'indépendance journalistique en toutes circonstances et en tout temps, sans exception. Nous sommes membres du Trust Project, un réseau mondial d'organismes de presse, et nous nous appuyons sur les outils mis au point par ce réseau pour aider la population canadienne à faire des choix éclairés en matière de nouvelles.
    Notre équipe chargée des nouvelles a la responsabilité de demander aux personnes et aux organisations qui ont du pouvoir et de l'influence de rendre des comptes au public. Et cette responsabilité comprend la manière dont nous gérons nos propres affaires. Dans ce milieu, des erreurs arrivent parfois, malgré tous nos efforts. Je suis convaincu que la manière dont nous réagissons à ces erreurs est essentielle pour maintenir la confiance du public. Cela m'amène à aborder une situation qui a récemment attiré l'attention.
    Un reportage diffusé le 22 septembre sur CTV National News a enfreint nos normes éditoriales élevées attendues et requises. Comme il est d'usage dans ces circonstances, nous avons enquêté pour déterminer s'il y avait eu un manquement aux normes et pratiques éditoriales. L'enquête a révélé que deux membres de l'équipe de CTV News étaient responsables de la modification d'une séquence vidéo. Leurs actions ont enfreint nos normes éditoriales et sont inacceptables. Par conséquent, ces personnes ne font plus partie de l'équipe de CTV News et ne travaillent plus pour une entité de Bell Média. C'est une situation profondément regrettable.
    En 33 ans de carrière dans le domaine des nouvelles, c'est la première fois que je vois cela. J'espère que notre décision traduit l'importance que nous accordons au respect de notre engagement à l'égard de l'équité, de l'objectivité et de la vérité. Notre devoir est de fournir une couverture exacte, impartiale et équilibrée sur des questions importantes pour la population canadienne, et ce, de manière totalement indépendante. C'est primordial pour nous.
    À l'avenir, nous continuerons de déployer des efforts pour gagner la confiance des millions de Canadiens et Canadiennes qui nous font confiance chaque jour. Compte tenu de la demande croissante pour une couverture de l'actualité 24 heures sur 24, CTV News continuera à transformer la façon dont nous diffusons les nouvelles aux Canadiens et aux Canadiennes, à la télévision comme sur le Web.
    Pour quelqu'un ayant plusieurs dizaines d'années d'expérience dans le secteur des nouvelles, j'ai vu de mes propres yeux le déclin de la confiance envers les médias, dû en grande partie à l'augmentation de la désinformation et de la mésinformation, et à leur impact sur les connaissances médiatiques. Cela concerne tout le monde. J'espère que nous pourrons passer du temps ensemble aujourd'hui à discuter de ce défi et des solutions pour lutter contre la désinformation et la mésinformation, afin que nous puissions maintenir et renforcer la confiance dans nos institutions pour les années à venir.
    Merci, monsieur Gray. Je vous remercie d'avoir utilisé un peu moins de temps que prévu.
    Dernièrement, il m'arrive de me dire que la dynamique des séances hybrides, sur Zoom et en personne, est souvent difficile à gérer. Les membres du Comité disposent de peu de temps et chercheront à le maximiser. Veuillez ne pas nous en tenir rigueur, monsieur Gray.
    Nous allons commencer notre première série de questions de six minutes. Je donne la parole à M. Barrett.
    Monsieur Barrett, vous avez six minutes. Allez‑y.
    Monsieur, combien d'argent Bell Média ou CTV News reçoivent-ils en subventions annuelles du gouvernement libéral de Justin Trudeau?
    Contrairement à CBC, ni CTV ni CTV News ne reçoivent de subventions du gouvernement. En fait, chaque année, nous sommes tenus de consacrer au moins 30 % de nos recettes annuelles — ce qui représente 1,2 milliard de dollars depuis 2011 — aux dépenses destinées à la programmation canadienne. Parallèlement, nous perdons 185 millions de dollars par année du côté des opérations de télévision, dont 40 millions de dollars pour les nouvelles seulement.
    CTV n'a reçu aucun allégement réglementaire ou soutien à la rémunération au cours des neuf dernières années. Est‑ce bien ce que vous prétendez?
    Nous ne recevons aucune subvention du gouvernement.
    La question portait sur l'allégement réglementaire ou les subventions salariales au cours des neuf dernières années.
    Une récente décision du gouvernement fédéral a eu une incidence de 40 millions de dollars sur Bell Média, mais ce n'était pas une subvention. Il s'agit de l'élimination d'une taxe sur nos revenus qui existait depuis 1997...
    Il y a eu 40 millions de dollars en allégements réglementaires — je vais vous devancer — et 122 millions de dollars en subventions salariales.
    Je veux parler de...
(1540)
    [Inaudible]
    Pardon?
    Les 40 millions de dollars n'étaient pas une subvention.
    Monsieur, vous corrigez quelque chose que je n'ai pas dit. Partons du bon pied. J'ai parlé d'allégements réglementaires. Il y avait 40 millions de dollars en allégements réglementaires.
    Avez-vous reçu 40 millions de dollars en allégements réglementaires?
    Nous avons reçu un allégement de 40 millions de dollars en raison de l'élimination d'une taxe.
    Très bien. J'ai une idée de la façon dont les choses vont se passer, alors allons‑y.
    Nous avons vu maints exemples de l'activisme de CTV déguisé en journalisme. Je vais vous en donner quelques-uns.
    Le 29 mai dernier, vous avez publié un article intitulé « Poilievre panned for video saying Canadians fleeing to Nicaragua ». Évidemment, ce reportage portait sur les discussions entre le chef de l'opposition et des Canadiens qui en arrachent après neuf années sous un gouvernement dont le vandalisme économique a rendu pratiquement impossible, pour des millions de Canadiens, de survivre ici.
    Le 2 avril, quelques jours plus tard, la Banque Royale du Canada a publié un rapport sur les tendances en matière de logement et l'abordabilité, intitulé « La flambée des charges d’intérêts rend l’achat d’une propriété plus difficile que jamais ». Encore une fois, cela témoigne avec précision des résultats de neuf ans de vie sous le gouvernement néo-démocrate-libéral. Nous ne voyons rien à ce sujet, aucun reportage. Je n'ai pas de reportage de CTV à citer en exemple, ce qui témoigne de l'expérience que M. Poilievre a racontée concernant ces Canadiens.
    Bien entendu, nous avons l'exemple le plus récent de la désinformation flagrante diffusée par votre réseau. Une campagne de désinformation a été orchestrée contre les Canadiens et s'est répandue sur vos plateformes. Au lieu du message livré par M. Poilievre — qui correspond à ce que disent des millions de Canadiens — sur la nécessité de tenir des élections sur la taxe sur le carbone alors que les Canadiens « n'ont pas les moyens de se nourrir, de se chauffer ou de se loger », vous l'avez modifié. Vous avez modifié cette citation de M. Poilievre, pour qu'elle reflète l'argumentaire du Cabinet du premier ministre Justin Trudeau. Nous n'aurions pas pris connaissance de ce cas récent si vous n'aviez pas été dénoncé par un employé du Parti conservateur.
    Vous avez dit que vous êtes désolé, mais nous savons que vous regrettez seulement de vous être fait prendre, n'est‑ce pas?
    Je ne suis pas d'accord avec votre interprétation.
    Êtes-vous désolé?
    Nous avons présenté des excuses à deux reprises pour l'erreur qui s'est produite. Nous avons fait un...
    Avez-vous réexaminé l'ensemble de votre couverture médiatique sur M. Poilievre et les propos qu'il a tenus concernant la taxe sur le carbone des libéraux de Trudeau, qui s'applique à tout? Leur plan est de la quadrupler, ce qui augmentera le prix de l'essence de 60 ¢ le litre. Un Canadien sur quatre ne sait pas d'où viendra son prochain repas. Le recours aux banques alimentaires est monté en flèche et atteint des niveaux sans précédent au pays.
    Avez-vous réexaminé l'ensemble de votre couverture de M. Poilievre, ou la revue de l'historique de la désinformation perpétrée contre les Canadiens par CTV incombera‑t‑elle aux conservateurs? CTV compte‑t‑elle le faire de façon proactive?
    Monsieur, je peux vous assurer que nous sommes parfaitement conscients que nous devrons le faire à l'avenir, non seulement pour nous-mêmes, mais aussi pour les Canadiens, car le lien de confiance a certainement été brisé.
    Je veux donner à M. Gray l'occasion de répondre à cela, monsieur Barrett.
    Allez‑y.
    Merci.
    Je ne suis pas d'accord pour dire que nous menons une campagne de désinformation auprès des Canadiens. Notre rôle est de présenter l'ensemble des points de vue sur les questions de politique publique de manière équilibrée, exacte et équitable, afin que les Canadiens puissent prendre des décisions éclairées sur ces questions. C'est ce que nous faisons toujours, au quotidien.
    Ce qui s'est passé le 22 septembre...
    Monsieur...
    ... était un cas très rare et unique. C'était une erreur et nous avons présenté nos excuses à cet égard.
    Je me demande comment vous savez que cela arrive rarement si vous n'avez pas réexaminé l'ensemble de votre couverture médiatique, comme je l'ai dit.
    Cependant, j’aimerais maintenant que vous nous disiez s'il est approprié, selon vous, que d'autres médias aient critiqué les conservateurs d'avoir dénoncé cette désinformation, alors que vous avez vous-même admis que vous aviez tort. Selon vous, est‑il acceptable que d'autres médias aient critiqué la dénonciation de ce cas de désinformation?
    Monsieur Gray, veuillez répondre brièvement, s'il vous plaît.
    Il ne m'appartient pas de dire comment les autres médias fonctionnent. Mon travail, c'est de gérer CTV News.
    Merci, monsieur Barrett.
    Merci, monsieur Gray.
    Je donne maintenant la parole à Mme Shanahan, pour six minutes.
    Allez‑y, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie le témoin de comparaître devant nous aujourd'hui.
    Monsieur Gray, ma question est la suivante: quelles mesures les journalistes et les dirigeants des salles de rédaction de CTV prennent-ils habituellement pour veiller à ce que les reportages qui sont diffusés respectent les normes journalistiques et éthiques actuelles? Je cherche une réponse assez complète, car nous voulons comprendre. Je ne sais pas si quelqu'un ici a déjà travaillé dans une salle de nouvelles. Ce n'est certainement pas mon cas. Nous voulons comprendre en quoi consiste le processus, du début jusqu'à la diffusion du reportage.
(1545)
    Je dirais que la première composante essentielle de ma réponse consiste à dire que nous avons des politiques très rigoureuses et très fermes dans lesquelles sont énoncées les attentes quant à l'exercice de la profession journalistique.
    Outre ces politiques, nous adhérons aux codes de déontologie respectifs de l’Association des services de nouvelles numériques et radiotélévisées du Canada et de l'Association canadienne des radiodiffuseurs. Au quotidien, dans la salle de nouvelles, on s'attend à ce que tous les membres de notre équipe respectent ces politiques à la lettre.
    Quant aux reportages en soi, ils sont tous approuvés par un membre principal de l'équipe avant leur diffusion afin de nous assurer qu'ils sont exacts sur le plan factuel et que le contenu ne soulève aucune question d'ordre juridique.
    Ce qui s'est produit dans ce cas précis, le 22 septembre, c'est que ces politiques et codes de déontologie ont été enfreints par deux personnes qui travaillaient à CTV National News. Dans un cas, un journaliste a modifié un texte, après approbation par le producteur, modifiant ainsi considérablement le sens et l'intention d'un extrait précis afin qu'il cadre mieux avec le sujet du reportage. Dans le deuxième cas, afin de couvrir un problème technique avec l'enregistrement original, un rédacteur en chef a fait un montage avec deux segments d'une déclaration, créant ainsi un extrait qui ne correspondait pas à ce qui a été dit.
    Je travaille dans le domaine des nouvelles télévisées depuis 33 ans, et je ne me souviens pas d'avoir vu une situation semblable auparavant.
    Comment est‑ce possible? Comment les dirigeants des salles de rédaction... Je suppose qu'il incombe au plus haut responsable de s'assurer que cela ne se produise pas. Il faut donc se demander où était cette personne. Comment veille‑t‑on à ce que les reportages soient diffusés correctement et correspondent aux faits, sans altération? Avez-vous un moyen technique pour le vérifier?
    Évidemment, nous vivons aujourd'hui à une époque où les hypertrucages, la modification de vidéos et tout le reste sont pratiquement un jeu d'enfant.
    Nous avons un mécanisme complexe, à plusieurs niveaux, pour la vérification de tous les faits. Cependant, dans ce cas‑ci, même avec ce mécanisme de contrôle, il aurait été impossible de repérer cette erreur, car comme je l'ai indiqué il y a quelques instants, ce qui s'est passé, c'est que le texte produit et approuvé par le producteur a été modifié après coup, de deux façons, par le journaliste et le rédacteur en chef.
    Encore une fois, c'est une situation que je n'avais jamais vue et avec laquelle je n'avais jamais eu à composer en 33 ans de carrière dans le domaine des nouvelles télévisées.
    Monsieur Gray, le chef du Parti conservateur s'en prend depuis un bon moment déjà aux médias grand public et aux journalistes dans l'intention d'induire les Canadiens en erreur et de leur faire croire que les réseaux d'information auxquels ils faisaient confiance ne sont plus dignes de confiance.
    Pouvez-vous nous parler des dangers que cela représente pour l'état de l'écosystème de l'information au Canada et de la démocratie canadienne?
     La confiance absolue à l'égard de l'ensemble de nos institutions — médias comme gouvernements — est d'une importance capitale. On observe une érosion générale de cette confiance ces dernières années. Je pense...
    Diriez-vous que c'est dû à des déclarations publiques de dirigeants politiques, comme Pierre Poilievre?
(1550)
    Je ne dirais pas forcément cela. Je pense que c'est le résultat d'un certain nombre de choses. Le plus important est sans doute l'évolution de notre société, où l'attitude « si vous n'êtes pas avec nous, vous êtes contre nous » est de plus en plus répandue.
    C'est très intéressant. Comment, alors, ces risques sont-ils exacerbés lorsqu'une situation telle que celle de CTV News, dont nous avons parlé un peu avant, se produit? En d'autres termes, cette attitude du type « si vous n'êtes pas avec nous, vous êtes contre nous »....
    Je pense que le point essentiel à souligner ici — et j'ai essayé de le faire dans mes réponses aux questions jusqu'à maintenant —, c'est que nous avons fait une erreur. C'était une erreur impossible à prévoir. Nous nous sommes immédiatement excusés. Nous avons pris des mesures de suivi pour nous assurer que nos normes étaient respectées. Il a été déterminé que ce n'était pas le cas. Par conséquent, nous avons décidé que les deux employés concernés ne feraient plus partie de CTV News ou de Bell Média, puis nous nous sommes excusés à nouveau.
    Merci, monsieur Gray et madame Shanahan.

[Français]

     Monsieur Gray, avant de donner la parole à M. Villemure, je vous informe qu'il posera peut-être ses questions en français.

[Traduction]

    Assurez-vous simplement que votre canal d'interprétation fonctionne.
    Oui, ça fonctionne.

[Français]

    Monsieur Villemure, vous avez la parole pour six minutes.
     Monsieur Gray, je vous remercie d'être des nôtres aujourd'hui.
    Nous réalisons présentement une étude sur les conséquences de la désinformation sur le travail des parlementaires. Celle-ci, à notre avis, constitue un risque pour la démocratie. Vous venez de parler de la confiance qui diminue, et j'aimerais que vous nous donniez plus de détails à ce sujet. Nous savons qu'elle diminue à l'égard des politiciens, mais aussi à l'endroit des médias.
     Pourriez-vous nous parler un peu de la source de cet effritement ou de cette érosion de la confiance qu'on observe actuellement?

[Traduction]

    La source exacte est très difficile à déterminer. Si je devais m'avancer... La principale cause est probablement les médias sociaux, leur prolifération et la façon dont ils sont consommés. Les informations communiquées sur les médias sociaux ne sont pas assujetties aux normes rigoureuses en matière de journalisme et d'éthique que nous appliquons et que les autres institutions médiatiques — comme le Toronto Star, le Globe and Mail, le National Post, Global News et CBC/Radio-Canada — appliquent à leurs activités. En conséquence, il devient beaucoup plus difficile pour les gens de savoir à quoi ils peuvent faire confiance, à qui ils peuvent faire confiance, à quoi ils devraient faire confiance.

[Français]

    Comment est-ce que CTV définit la désinformation?

[Traduction]

    Je suis désolé, mais je ne suis pas certain de comprendre votre question.

[Français]

     Qu'est-ce que la désinformation, à vos yeux?

[Traduction]

    La désinformation, de mon point de vue, c'est tout ce qui est inexact.

[Français]

    Est-ce que CTV a été la cible de désinformation émanant, par exemple, d'une influence étrangère?

[Traduction]

    Pas à ma connaissance, non.

[Français]

    Est-ce que le réseau CTV est préoccupé par ce genre de risque qu'il pourrait courir? Ici, je parle toujours de la désinformation et de l'influence étrangère.

[Traduction]

    Je me soucie toujours de l'exactitude et de la véracité du journalisme que nous faisons, en fonction des documents sources qui nous sont fournis. C'est pourquoi nous utilisons de multiples reportages, qui sont tous vérifiés de façon indépendante par CTV.

[Français]

     Si je résume votre pensée, la désinformation est causée principalement par les médias sociaux et vous en êtes victime. Est-ce exact?

[Traduction]

    Je dirais que c'est le facteur dominant, du moins de mon point de vue, dans ce pays.
(1555)

[Français]

     Un peu plus tôt, vous avez mentionné l'existence d'un code d'éthique pour les journalistes. C'est mon domaine d'expertise, et je vous dirais qu'un code d'éthique protège plus souvent la personne qui l'a rédigé que la personne qui en fait l'objet.
    Alors, au-delà d'avoir signé un code d'éthique, comment est-ce que CTV s'assure de ne pas diffuser de la désinformation ou de la mésinformation? Rappelez-nous les étapes encore une fois, s'il vous plaît.

[Traduction]

    Encore une fois, ce qui se passe, c'est qu'au fur et à mesure que les reportages sont attribués au début de la journée et que le travail se poursuit tout au long de la journée, les journalistes qui participent à la réalisation de ces reportages font constamment des vérifications auprès des membres de notre équipe de direction et revoient l'information recueillie et l'objet de leurs reportages.
    Lorsqu'ils en arrivent à une version quasi définitive de leur reportage, le texte est soumis à l'examen d'un producteur. Cette révision permet de s'assurer que le reportage est correct sur le plan des faits et qu'il ne pose aucun problème d'ordre juridique. À partir de là, le journaliste travaille avec un rédacteur en chef pour finaliser le reportage et le présenter au journal télévisé.

[Français]

    D'accord.
    Un peu plus tôt, vous nous avez expliqué comment est survenue l'erreur dont mes collègues ont parlé. J'aimerais que vous nous disiez pourquoi cette erreur est survenue. Y avait-il une intention malveillante de semer de la désinformation?
    Vous avez quand même agi rapidement pour congédier les deux employés, malgré leur statut de syndiqués. Cela vous honore, d'un côté, mais nous empêche aussi un peu de savoir ce qui s'est passé.

[Traduction]

    De mon point de vue, il n'y avait pas d'intention malveillante. Il s'agit de deux personnes qui agissaient de façon indépendante pour faire marcher un reportage ce jour‑là.

[Français]

    Il y avait une volonté de semer de la désinformation.

[Traduction]

    Il n'y avait aucune intention de faire de la désinformation.

[Français]

     Toutefois, le résultat était le même.

[Traduction]

    Il n'y avait aucune intention en ce sens, à la base, mais oui, le résultat a été le même. C'est pourquoi nous avons pris les mesures que nous avons prises et ces deux personnes ne font plus partie de l'équipe de CTV News ou de Bell Média.

[Français]

    Vous avez donc agi en fonction de la conséquence, et non de l'intention.

[Traduction]

    Comme je l'ai dit, ce n'était pas intentionnel, non.

[Français]

     Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Villemure.

[Traduction]

    Nous allons maintenant passer à M. Green pendant six minutes.
    Allez‑y, monsieur Green.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue au Comité, monsieur Gray. Je prends très au sérieux vos remarques liminaires. Lorsque des situations comme celle‑ci se produisent, la question est: « Que saviez-vous, quand l'avez-vous su et qu'avez-vous fait à ce sujet? » Il semble que vous ayez agi assez rapidement.
    J'aimerais poursuivre dans la foulée des questions de mon collègue et ami, M. Villemure, au sujet du processus. Selon une déclaration publiée sur les médias sociaux le 26 septembre, les normes éditoriales de CTV News n'ont pas été respectées dans ce cas. Quelles normes éditoriales de CTV News n'ont pas été respectées dans cette affaire, qui a entraîné le congédiement de ces deux employés?
    Il y a eu des violations à quelques-unes de nos politiques. Il y a eu des infractions à trois politiques de CTV News: notre politique sur les fausses déclarations, notre politique sur l'utilisation de matériel source et notre politique sur l'utilisation de sons, en particulier d'extraits d'entrevues.
    Le code de déontologie de la Radio Television Digital News Association, ou RTDNA, a été enfreint à deux reprises, d'abord à l'article 1 qui porte sur l'exactitude, puis à l'article 3 qui porte sur l'authenticité. En ce qui concerne le code de déontologie de l'Association canadienne des radiodiffuseurs, deux articles n'ont pas été respectés. Il s'agit de l'article 5, qui porte sur les nouvelles, et de l'article 6, qui porte sur la présentation complète, équitable et appropriée.
    Il semble qu'il y ait eu une défaillance à bien des égards.
    Ces normes sont-elles semblables à celles d'autres chaînes de nouvelles que vous connaissez? La norme à laquelle vous faites référence s'applique‑t‑elle partout dans l'industrie?
    Oui. Les codes de déontologie de la RTDNA et de l'Association canadienne des radiodiffuseurs sont des normes de l'industrie.
    J'imagine, même si je n'en suis pas certain, que chaque organisation médiatique au pays a sa propre politique.
(1600)
    Quelles mesures les journalistes de CTV News et les responsables de la rédaction prennent-ils généralement pour s'assurer que les reportages diffusés respectent les normes journalistiques et éthiques en vigueur ?
    Ils suivent le processus d'approbation que je viens de décrire.
    En général, combien de personnes participent à ce processus?
    Tout dépend de la nature du reportage. Au moins un cadre supérieur révise chaque reportage. Il peut y en avoir jusqu'à deux ou trois, selon la nature du reportage. Nous pouvons aussi demander à un avocat d'y jeter un coup d'oeil, selon la situation.
    J'aimerais avoir une idée de la culture du milieu de travail.
    En février dernier, Bell Canada a licencié 6 % de ses effectifs. Cela a eu un effet immédiat sur CTV News. Vous êtes cité dans un reportage pour avoir dit que « des journalistes polyvalents remplaceront les équipes de correspondants et de techniciens qui travaillent pour CTV National News ».
    Ces deux personnes seraient-elles considérées comme étant des « journalistes polyvalents » ?
    Non. En fait, ces deux personnes faisaient des reportages dans ce que j'appellerai notre format plus traditionnel. Il s'agit du style que nous continuons de privilégier au sein de nos équipes de Toronto et d'Ottawa, en grande partie en raison de la nature de leur travail. Ces équipes couvrent les sujets de manière plus approfondie et détaillée. Elles participent souvent à des mêlées de presse, où il y a plusieurs journalistes qui posent des questions. Il est plus probable que les sujets couverts à Toronto et à Ottawa impliquent des centaines de personnes, en direct et sur place.
    Je vais entrer dans le vif du sujet.
    Je sais que vous évoluez dans un environnement très dynamique. Il est certain que les journalistes évoluent dans un environnement où tout va très vite. Était‑ce le cas lors du licenciement...
    Je tiens à préciser que le fait d'être en comité vous protège. Vous avez le privilège de parler sans que cela puisse être retenu contre vous dans un procès civil. Vous pourriez peut-être nous parler un peu de la situation: est‑il vrai que ces personnes étaient peut-être simplement à la course et qu'elles ont peut-être pris des raccourcis pour respecter une échéance? Étaient-elles sous pression?
    Je suis toujours préoccupé par les points soulevés par mon ami du Bloc au sujet des motifs derrière tout cela. Je vous dirai, monsieur, qu'à première vue, même si cela a eu des répercussions sur le Parti conservateur — avec lequel je n'ai aucune affinité idéologique — cela reste très préoccupant, car cela sape la confiance non seulement envers les médias, mais envers toute notre démocratie.
    Pouvez-vous nous aider à comprendre? Dans les entretiens de fin d'emploi que vous avez menés, quelles étaient les motivations évoquées, en particulier?
    Les motivations étaient différentes dans les deux cas.
    Dans le premier cas, le clip a été modifié pour supprimer la mention de la taxe carbone, et l'explication donnée était que le reportage avait été écourté en raison de contraintes de temps. Il n'a pas été expressément demandé à ce journaliste de modifier son reportage pour gagner du temps. On nous a expliqué que le journaliste pensait qu'il était entendu que la nature du clip concernait une « élection sur la taxe carbone ».
    Pendant les 15 secondes qui restent, pouvez-vous nous résumer l'autre aspect de la question?
    Oui. Il y avait une erreur technique dans notre enregistrement original qui empêchait de présenter la vidéo telle quelle. Le rédacteur en chef a décidé de manipuler l'audio pour que la vidéo puisse l'inclure.
    Depuis combien de temps ces deux personnes travaillaient-elles? Avaient-elles de l'expérience?
    Ces personnes étaient toutes les deux très expérimentées.
    Je me fais l'écho de la préoccupation de mon homologue conservateur. Si c'est quelque chose que ces personnes se sentaient à l'aise de faire dans ce cas‑ci, comment peut‑on dire qu'elles ne l'ont pas fait dans d'autres cas?
    Comme je l'ai dit à plusieurs reprises, c'est la première fois que je vois une telle chose se produire dans une salle de rédaction en 33 ans d'expérience dans le domaine de l'information télévisée.
    Comment saurait‑on...
    Je suis vraiment désolé. Vous savez que nous avons dépassé le temps imparti, monsieur Green.
(1605)
    Oui. Je vous en suis reconnaissant. Merci. Je ne faisais que tenter ma chance.
    Cela met fin à notre première série de questions.
    J'ai accordé plus de temps au premier tour, étant donné que nous avons un témoin ici. Je vais essayer d'être un peu plus strict au deuxième tour.
    Je tiens à souhaiter la bienvenue à M. Scheer au sein du Comité.
    Monsieur Scheer, vous avez cinq minutes. Allez‑y, monsieur.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je dois revenir à ce que vous avez dit. Vous avez dit que l'extrait vidéo avait été modifié. Vous avez montré aux Canadiens quelque chose qui n'est jamais arrivé. Vous me dites maintenant qu'il n'y avait aucune intention d'induire les Canadiens en erreur et que la raison pour laquelle on a modifié un extrait, c'est qu'il fallait le réduire en raison de contraintes de temps.
    Les mots qui ont été coupés étaient « élection sur la taxe carbone ». Je viens de me chronométrer et cela m'a pris environ 1,2 seconde. Vous me dites qu'il n'y avait pas d'intention de désinformer les Canadiens, qu'il fallait réduire la longueur de l'extrait et qu'il serait manifeste que la citation du chef du Parti conservateur concernait une élection sur la taxe carbone, même si vous avez supprimé les mots « élection sur la taxe carbone ».
    Pouvez-vous comprendre pourquoi nous avons beaucoup de mal à accepter cela?
    Soyons clairs: je vous ai fait part de l'explication donnée par la personne impliquée. Ce n'est pas ainsi que j'explique ce qui s'est produit.
    Êtes-vous d'accord, ou croyez-vous que cela a été délibérément fait pour induire les Canadiens en erreur?
    Je ne crois pas que c'était délibéré, mais il reste...
    Acceptez-vous la...
    ... que c'était une violation de nos normes éditoriales. Ces deux personnes ne font donc plus...
    Acceptez-vous l'explication qu'on vous a donnée?
    Nous avons décidé que, compte tenu de la violation de nos normes éditoriales, ces personnes n'allaient plus travailler à CTV News.
    Quel était le motif selon vous?
    Ce n'est pas à moi de déterminer le motif.
    Des députés: Oh, oh!
    Je vois. D'accord.
    CTV News est une division de Bell Canada, n'est‑ce pas?
    En effet.
    Bell Canada fait des profits d'environ 2,3 milliards de dollars d'après des chiffres de 2023. Est‑ce que c'est à peu près juste? Êtes-vous d'accord?
    Je ne connais pas le rendement de l'ensemble de notre entreprise. Chose certaine, ma responsabilité est...
    Je peux confirmer que c'est vrai. C'est ce que je vois sur votre site Web.
    La division CTV News réalise‑t‑elle un profit pour Bell Canada?
    Non. Nous perdons 40 millions de dollars par année en nouvelles.
    Je vois.
    Bell Canada gagne beaucoup d'argent parce qu'elle mène ses activités dans un marché protégé, n'est‑ce pas?
    Une fois de plus, je suis responsable de la gestion des activités de CTV News. Je ne suis pas cadre à Bell Canada.
    Je peux vous dire que c'est le cas. Elle gagne beaucoup d'argent sur le dos des consommateurs à cause de politiques gouvernementales. En fait, il est indiqué ici que Bell Canada, au cours de la dernière année, a exercé des pressions sur le gouvernement actuel plus de 50 fois. C'est plus de quatre réunions par mois avec des représentants du gouvernement. C'est plus de rencontres avec de hauts placés du gouvernement que ce qu'obtiennent certains députés libéraux.
    J'aimerais souligner que Bell craindrait un gouvernement dirigé par un parti qui croit en des politiques qui accordent la priorité aux consommateurs, au libre marché et à la concurrence. L'entreprise profiterait grandement d'un parti au pouvoir qui maintient le statu quo ou, encore pire, qui enlève encore plus de choix aux consommateurs, ce qui lui permettrait de continuer d'avoir ce genre de marge de profit.
    Les cotes d'écoute de CTV News augmentent-elles ou diminuent-elles d'une année à l'autre? Sont-elles plus élevées cette année qu'elles ne l'étaient l'année dernière?
    Depuis plusieurs années, les cotes d'écoute des télédiffuseurs baissent constamment. Elles diminuent d'une année à l'autre.
    Je me demande pourquoi. Quand on se fait prendre à diffuser des choses pour devoir ensuite admettre que cela ne s'est jamais produit, je peux comprendre pourquoi les cotes d'écoute, ainsi que la confiance, en subissent les conséquences.
    Je peux vous donner deux ou trois exemples précis...
    Je suis désolé, mais il ne me reste qu'une minute environ, et je veux donc comprendre une chose. Y a‑t‑il une cible de diversité à CTV News?
    Notre objectif est de refléter le Canada. Les minorités visibles représentent actuellement 26 % de la population du pays, selon le recensement de 2021.
    Avez-vous une cible relativement à la diversité des points de vue présentés à CTV News?
(1610)
    Comme je l'ai dit plus tôt, notre travail consiste à présenter toutes les facettes des questions de politique publique de manière équilibrée, exacte et juste.
    Cela ne répond pas à la question.
    Avez-vous une politique précise pour faire en sorte que l'orientation éditoriale, les journalistes et les producteurs à CTV News reflètent les allégeances politiques des Canadiens?
    Refléter les allégeances politiques des Canadiens n'est pas le travail des journalistes. Notre travail consiste à présenter les nouvelles de manière impartiale, équilibrée, exacte et juste.
    Me dites-vous que vous n'avez aucun moyen de déterminer si les producteurs, les rédacteurs et les journalistes ont tous les mêmes préjugés favorables aux libéraux? Vous n'avez aucun moyen de le savoir.
    Veuillez répondre rapidement, monsieur Gray.
    Notre équipe n'a pas de préjugé en faveur des libéraux.
    Merci, monsieur Scheer.
    Nous allons passer à M. Fisher sur Zoom.
    Monsieur Fisher, vous avez cinq minutes. Allez‑y, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci d'être ici, monsieur Gray.
    Je dois dire que les questions posées par mes collègues de tous les partis sont excellentes, et je suis certain qu'elles n'avaient absolument rien d'inattendu pour vous. Je vais revenir un peu sur ce qui a été dit pour obtenir des précisions.
    Je veux répéter certaines des choses que vous avez dites dans votre déclaration liminaire. Vous affirmez être la source de nouvelles à laquelle les gens font le plus confiance. Vous avez dit que vous avez la responsabilité de gérer vos propres affaires. Cela me semble être quelque chose de difficile à concilier lorsque nous parlons de l'éléphant dans la pièce aujourd'hui. Nous parlons du contenu diffusé, d'inexactitudes concernant le chef d'un parti politique canadien.
    Je pense que vous avez abordé certaines de ces choses, mais pouvez-vous passer en revue, en apportant quelques éclaircissements, les mesures que vous avez prises pour que vous puissiez encore dire à Bell Média, à CTV News, que vous avez l'intégrité journalistique et le sens de l'éthique qui s'imposent sous l'égide de Bell Média?
    Je vais répondre à votre question en deux parties.
    Premièrement, je vais parler de cet incident particulier. On a porté l'affaire à notre attention. Nous nous sommes immédiatement excusés. Compte tenu de la nature de ce qui s'est passé, j'ai pris des mesures supplémentaires en lançant une enquête sur ce qui, comme je le craignais, était une très grave atteinte à notre code d'éthique et à nos politiques.
    À la suite de cette enquête, nous avons pris la décision de faire deux choses: nous avons renvoyé les deux personnes impliquées dans la violation de nos politiques et nous nous sommes excusés une autre fois. Je pense que c'est tout à fait approprié, compte tenu de ce qui s'est produit, et je pense que cela montre la façon dont nous prenons au sérieux la confiance que les Canadiens ont en nous.
    J'arrive maintenant à la deuxième partie de ma réponse. Au pays, une majorité écrasante de Canadiens choisissent les émissions de CTV comme principale source de nouvelles locales et nationales tous les jours de la semaine. Nous sommes aussi la principale source de nouvelles numériques au pays. Nous ne cherchons pas à nous plier aux exigences d'une audience. Les gens nous écoutent parce que depuis 60 ans, nous présentons un produit qu'ils connaissent, qu'ils aiment et qui leur inspire confiance.
    Vous semblez très sincère, et je veux vous remercier du ton que vous donnez au débat.
    Vous dites n'avoir jamais rien vu de semblable avant, mais pourtant, vous avez également mentionné qu'il aurait été impossible de relever l'erreur.
    Y a‑t‑il eu d'autres erreurs comme celles‑ci qui étaient impossibles à relever et qui ont été diffusées? Pouvez-vous me donner d'autres exemples de ce genre d'erreur qui aurait pu passer inaperçue?
    Les erreurs sont une réalité dans les nouvelles. C'est la nature même de ce que nous faisons. Nous faisons tout notre possible pour éviter qu'elles soient diffusées ou publiées. Nous ne sommes jamais contents lorsqu'elles se produisent. Nous nous en voulons énormément lorsque notre système de freins et de contrepoids échoue.
    Cela se produit en grande partie à cause des pressions liées à l'échéance et en raison du volume de contenu que nous produisons. Chaque année, CTV produit environ 25 000 heures de nouvelles locales, environ 20 000 heures de nouvelles spécialisées et presque 500 heures de bulletins de nouvelles nationales. Le volume est énorme. Nous diffusons des nouvelles qui ont fait l'objet d'une vérification, et nous faisons tout notre possible pour présenter du contenu de manière factuelle, exacte et équilibrée en tout temps. Cependant, il arrive parfois — comme pour tout le monde — que des erreurs se produisent.
(1615)
    Ces employés sont-ils partis de CTV? Ont-ils été totalement renvoyés de Bell?
    Ces deux personnes ne travaillent plus ni pour CTV News ni pour BCE.
    Merci, monsieur Fisher.
    Merci, monsieur Gray.

[Français]

     Monsieur Villemure, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Gray, avant de poser ma première question, vous me permettrez de faire un commentaire éditorial sur la diversité des points de vue politiques.
    J'écoute CTV régulièrement, et je suis toujours un peu surpris, et même offensé, quand je vois qu'on qualifie le Bloc québécois de séparatiste. Le mot véhicule un sens. C'est un terme qui a été vilipendé par Jean Chrétien à l'époque. Aujourd'hui, il contient une certaine forme de négativité. L'usage même du mot met notre position politique dans une mauvaise posture face au Canada anglais.
    Quand on parle de diversité des points de vue, je suis donc un peu sceptique à ce sujet. Pourriez-vous commenter, s'il vous plaît?

[Traduction]

    Comme je l'ai dit à maintes reprises, nous nous efforçons de couvrir les questions de politique publique de manière équilibrée afin que les Canadiens puissent prendre des décisions éclairées sur ces questions. Nous nous efforçons d'inclure tous les points de vue.

[Français]

    Monsieur Gray, je veux juste vous dire un truc.
    En effet, vous couvrez tous les points de vue, ce n'est pas ce qui me cause un problème. Par contre, à chaque usage du mot « séparatiste », un jugement de valeur est fait. Ce n'est pas un jugement de fait, mais un jugement de valeur. Pour ma part, je vous dirais de trouver un synonyme ou un autre terme parce que, ici, je trouve qu'on dérape.
    Je vais revenir au problème qui nous occupe aujourd'hui. J'ai entendu vos explications. Vous faites état de la perte de crédibilité des médias, de la confiance qui s'érode et des volumes d'affaires qui s'érodent. J'arrive ici avec l'esprit ouvert, mais, en entendant des éléments comme ceux entendus aujourd'hui, j'ai un peu de difficulté à avoir plus confiance après le témoignage qu'avant le témoignage.
    Que pourriez-vous faire pour me rassurer? Que pourriez-vous proposer comme solutions, afin que la population soit à l'aise et ait de nouveau confiance en CTV?

[Traduction]

    Je m'attends tout à fait, à la suite de ce qui s'est passé dans ce cas particulier — même s'il s'agissait d'un incident isolé, de mon point de vue —, à ce que nous ayons à regagner un certain degré de confiance auprès des Canadiens et de nos auditeurs.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur Gray.
    Merci, monsieur Villemure.

[Traduction]

    Monsieur Green, vous avez deux minutes et demie. Allez‑y, monsieur.
    Merci.
    Monsieur Gray, compte tenu de votre expérience et des ressources dont vous disposez, quels conseils donneriez-vous aux autres chaînes d'information grand public au Canada?
    Des élections s'en viennent. De toute évidence, les gens vont suivre cela de près. Qu'avez-vous appris de cette situation, et quels conseils donneriez-vous à vos concurrents dans le marché pour veiller à ce que cela ne se reproduise pas?
    Je leur dirais surtout qu'il est absolument essentiel que nous rappelions tous aux membres de nos équipes quelles sont nos politiques et les normes éditoriales attendues. C'est probablement la leçon la plus importante que nous avons tirée de ce qui s'est passé. Il ne faut rien tenir pour acquis, parce que c'est probablement l'approche ou l'attitude qui prévaut dans les salles de nouvelles depuis un certain nombre d'années. Ce serait le premier élément.
    Le deuxième élément serait de rappeler sans cesse ce que j'ai déjà dit, à savoir que notre travail consiste à présenter tous les points de vue sur les questions de politique publique. Il faut maintenir un équilibre. L'exactitude et l'équité sont d'une importance cruciale. C'est notre travail. C'est notre rôle.
(1620)
    Monsieur Gray, je dois vous interrompre. Il me reste environ une minute.
    Vous avez parlé de ce que vous faites à CTV à cet égard. Il y a tout un écosystème dans le secteur des médias d'information. Si vous devez retransmettre des reportages ou utiliser de l'information provenant d'autres chaînes de nouvelles, avez-vous des outils ou des méthodes que vous pouvez utiliser pour vous assurer que ces reportages ne contiennent pas de mésinformation ou de désinformation?
    En ce qui concerne le contenu canadien en radiodiffusion, nous produisons tout ce que nous diffusons. Nous ne reprenons pas de contenu canadien provenant d'une autre source au pays. En ce qui concerne les nouvelles internationales, nous ne faisons affaire qu'avec des organismes qui ont des normes éditoriales semblables aux nôtres.
    C'est bon à savoir.
    Merci beaucoup de témoigner aujourd'hui.
    Merci, monsieur Green.
    Je crois comprendre que M. Cooper et M. Caputo vont partager le temps de parole et disposer chacun de deux minutes et demie. Nous passerons ensuite à M. Housefather.
    Nous allons commencer par M. Cooper.
    Allez‑y.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Gray, vous avez dit à maintes reprises aujourd'hui que, selon vous, il n'y avait aucune intention d'induire la population en erreur. Voyons ce qui s'est passé. CTV a collé ensemble trois petits extraits sonores. Ces extraits sonores ont été collés ensemble — pas même dans l'ordre qu'ils ont été prononcés — pour créer une phrase entièrement inventée. Il s'agissait littéralement d'une fausse nouvelle qui a complètement changé le sens des propos de Pierre Poilievre. Sur quoi vous basez-vous exactement pour conclure qu'il n'y avait aucune intention d'induire la population en erreur?
    Deux anciens membres du personnel de CTV News ont enfreint nos normes éditoriales.
    Vous avez déclaré avec fermeté qu'il n'y a eu aucune intention d'induire la population en erreur, alors je vous pose la question suivante: sur quoi vous basez-vous pour tirer cette conclusion?
    Elle est fondée sur 33 ans d'expérience et sur le fait que c'est la première fois qu'une telle chose se produit.
    Monsieur Gray, personne ne vous croit. Vous avez dit, par exemple, que l'un des deux employés qui ont modifié la vidéo a dit qu'il ou elle croyait qu'on comprendrait qu'il s'agissait des élections sur la taxe sur le carbone. Cependant, on ne parle nulle part des élections sur la taxe sur le carbone, alors sur quoi quelqu'un peut‑il raisonnablement se baser pour croire que la déclaration a été faite dans ce contexte alors que ce contexte n'existait pas? C'est tout le contraire: c'est de la désinformation.
    Je ne suis pas d'accord.
    Vous n'êtes pas d'accord. C'est un fait qu'il n'y a pas eu mention des élections sur la taxe sur le carbone. Vous n'avez aucune crédibilité. CTV a colporté une fausse nouvelle, mais vous n'avez pas présenté d'excuses. Vous n'avez pas expliqué sur quoi vous vous basez pour affirmer qu'il n'y a eu aucune intention d'induire la population en erreur. Il ne suffit pas de dire que vous n'êtes pas d'accord. Personne ne vous croit.
    En fait, nous nous sommes excusés à deux reprises.
    Vous ne vous êtes pas excusés du tout. Vous avez dit qu'il n'y a pas eu d'intention d'induire la population en erreur, mais vous ne pouvez même pas expliquer sur quoi vous vous basez pour l'affirmer.
    Il n'y a eu aucune intention d'induire la population en erreur. Nous nous sommes excusés à deux reprises.
    Vous le dites, mais je vous ai demandé de nous dire sur quoi vous vous basez pour affirmer cela et vous n'avez pas été en mesure de le faire.
    Cela fait deux minutes et 30 secondes.
    Allez‑y, monsieur Caputo.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Gray, j'ai un problème avec quelque chose que vous avez dit, et qui a en fait été répété à plusieurs reprises au Comité. Vous qualifiez cela d'erreur. Maintenez-vous cette position?
    C'était une violation de nos normes éditoriales.
    Monsieur, je vous ai demandé s'il s'agissait d'une erreur; vous l'avez déjà dit. Vous maintenez que c'était une erreur. Est‑ce exact?
(1625)
    Je maintiens que cette histoire a été diffusée d'une manière qui n'aurait pas dû l'être.
    Monsieur, vous avez dit que c'était une erreur. Je vous ferais respectueusement remarquer qu'une erreur, c'est quand je mets du lait plutôt que de la crème dans mon café. Il s'agit ici d'une colossale erreur de jugement, d'un abus de confiance jamais vu de la part de ce qui était autrefois une organisation médiatique digne de confiance. Pour faire suite à ce que M. Cooper a dit, vous avez indiqué... Vous avez expliqué qu'il n'y avait aucune intention de tromper les Canadiens. Monsieur, le croyez-vous vraiment?
    Je maintiens entièrement et catégoriquement mes propos d'aujourd'hui.
    Vous maintenez vos propos selon lesquels il n'y avait aucune intention de tromper les Canadiens. Avez-vous parlé aux personnes concernées pour connaître leurs motifs, monsieur?
    Une enquête approfondie a été menée sur ce qui s'est passé.
    Ce n'est pas ce que j'ai demandé, monsieur. Avec tout le respect que je vous dois, je n'ai pas demandé s'il y avait une enquête. Je vous ai demandé si vous aviez parlé aux journalistes, oui ou non?
    Je ne leur ai pas parlé, sauf lors d'une conversation initiale avec le journaliste le soir où cette affaire a été portée à notre attention.
    C'est sur une brève conversation initiale que vous vous appuyez pour affirmer au Comité qu'il n'y avait pas d'intention malveillante de tromper les gens. Je vous demande si vous le croyez et si vous maintenez ces propos. Je fais respectueusement remarquer que votre affirmation est insoutenable. Nous nous préparons ici à des élections sur la taxe sur le carbone.
    Au bout du compte, avez-vous fait quelque chose ou pris des mesures pour vous assurer que pareille chose ne se reproduira plus? Y a‑t‑il une mesure en particulier?
    Oui, nous avons congédié deux personnes.
    Monsieur, vous avez d'innombrables autres employés. C'est peut-être la pire réponse que vous auriez pu donner. Qu'en est‑il de l'avenir? Cette mesure est rétrospective. Que faites-vous de l'avenir?
    Monsieur, voici ce que je peux dire: pourquoi est‑ce que ce sont toujours les conservateurs qui mènent cette bataille? Pourquoi? Comment se fait‑il que Justin Trudeau et des libéraux ne soient pas mal cités, mais que lorsqu'il s'agit des conservateurs et de Pierre Poilievre, ce genre de chose puisse se produire? C'est une honte.
    Je vais devoir vous arrêter ici.
    Je ne suis pas d'accord avec cette interprétation erronée.
    Merci.
    Monsieur Housefather, vous disposez de cinq minutes. La parole est à vous, monsieur.
    Je vous remercie.
    Monsieur Gray, lorsque vous embauchez des employés, leur demandez-vous quel parti politique ils appuient?
    Non, nous ne faisons pas.
    Vous serait‑il interdit de le faire? Je pense que c'est interdit en vertu de la loi.
    Je m'attendrais à ce que ce ne soit pas permis.
    Je comprends le principe général selon lequel CTV News n'essaie pas d'être partial dans un sens ou dans l'autre, mais permettez-moi de revenir sur cet incident parce que je pense qu'il y a des questions non résolues au sujet desquelles je m'interroge.
    En ce qui concerne cet incident, avez-vous interrogé personnellement les deux journalistes ou les deux personnes de la salle de presse qui ont été congédiés?
    Non, je ne l'ai pas fait.
    Voilà qui m'étonne. Depuis cet incident, avez-vous pris le temps de leur parler directement?
    J'ai lancé à ce sujet une enquête en bonne et due forme qui a été menée par des professionnels. À toutes les étapes, j'ai été informé des discussions en cours, et j'en suis venu à la conclusion, à la suite de cette enquête, qu'il était nécessaire que ces personnes ne soient plus membres de l'équipe de CTV News.
    Je suis d'accord, car il semble que cette affaire exigeait de sévères mesures disciplinaires.
    Cependant, ma question est... Aujourd'hui, vous avez parlé de leurs motifs, et vous avez déclaré que vous ne croyez pas qu'ils aient agi pour de mauvaises raisons. Je n'emploierai pas le mot « erreur » de M. Caputo, même si je pense que vous l'avez utilisé. Comment sauriez-vous si c'en est une si vous n'avez pas pris le temps de parler aux journalistes directement pour comprendre?
    Selon les explications qui ont été données, c'est raisonnable.
    Tout cela est de l'information retransmise, du ouï-dire. Vous êtes venu ici pour témoigner au nom de CTV, alors que vous n'avez pas vraiment pris le temps de vérifier vous-même les faits, dans ce que vous décrivez comme un incident incroyablement grave et fort embarrassant pour le réseau. Pourquoi n'avez-vous pas personnellement pris le temps de rencontrer ces deux personnes pour comprendre?
    Avez-vous regardé les enregistrements précédents de ce journaliste et du producteur pour vérifier s'ils ont fait cela à d'autres occasions? Avez-vous regardé à des enregistrements antérieurs?
    Non, il n'y a jamais eu de...
    Pourquoi ne l'avez-vous pas fait? Si je sais que quelqu'un a fait quelque chose de mal et que c'est incroyablement grave, ne voudrais‑je pas revenir en arrière pour voir si cette personne a déjà agi ainsi? Ce que je veux dire, c'est que vous n'aviez qu'à regarder 10 des 100 affaires couvertes par ce journaliste pour voir ce qu'il en est.
    Pourquoi CTV ne le ferait‑il pas?
(1630)
    Je ne pensais pas que c'était nécessaire.
    Je peux dire que ce ne sont pas seulement les conservateurs qui ont des préoccupations, à mon avis, parce que je ne suis pas conservateur et je suis préoccupé par la façon dont cette affaire semble avoir été traitée en ce qui concerne... Je ne pense pas que l'affaire ait été prise suffisamment au sérieux.
    Avez-vous modifié des politiques? Avez-vous modifié les politiques d'entreprise à la suite de cet incident?
    Nous avons pris les mesures qui s'imposaient dans ce cas‑ci en présentant deux fois des excuses.
    Je ne remets pas vos excuses en question. Je crois que vous vous êtes excusé. Je crois que vous avez congédié deux personnes. Je veux simplement comprendre. À la suite de ce qui s'est passé — deux personnes ont été autorisées à faire quelque chose qui contrevenait à la politique —, qu'a‑t‑on fait pour empêcher deux personnes de faire exactement la même chose à l'avenir? Qu'est‑ce qui a changé dans votre politique?
    Je tiens à corriger quelque chose que vous venez de dire.
    D'accord.
    Deux personnes n'ont pas été « autorisées » à enfreindre la politique. Deux personnes ont enfreint la politique, et cette violation a eu des conséquences.
    Je n'essaie pas d'insinuer que CTV a donné la permission à ces deux personnes d'enfreindre la politique. Les deux ont contrevenu à une politique.
    Qu'est‑ce qui a été fait pour éviter que deux personnes fassent exactement la même chose demain?
    Comme je l'ai dit à maintes reprises, c'est la première fois que je vis une telle situation en 33 ans.
    Je sais, mais vous n'êtes pas retourné en arrière pour voir les reportages que ces personnes ont faits avant. Vous n'avez pas consulté les enregistrements précédents pour vérifier si elles avaient déjà fait cela. Personne n'était au courant simplement parce qu'aucun membre du personnel conservateur ne s'en était rendu compte.
    Vous engagez-vous auprès du Comité à revenir en arrière et à examiner 10 reportages antérieurs de ces deux personnes pour voir s'ils contiennent quelque chose que CTV ignore?
    Je ne pense pas que ce soit nécessaire, car il n'y a jamais eu de plaintes auparavant au sujet de la conduite de ces personnes.
     Des députés: Oh, oh!
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Housefather.
    Malheureusement, c'est tout le temps que nous avions avec M. Gray.
    Monsieur Gray, je tiens à vous remercier d'avoir comparu devant le Comité aujourd'hui et de vous être rendu disponible.
    Je vais suspendre la séance pendant que nous nous préparons à accueillir le prochain groupe de témoins.
    La séance est suspendue.
(1630)

(1640)
    Nous reprenons nos travaux.
    Bon retour à tous. Je vous remercie de votre patience.
    Nous entamons maintenant notre deuxième heure. Je voudrais souhaiter la bienvenue à nos témoins d'aujourd'hui.
    À titre personnel, sur Zoom, nous recevons John McAndrews, directeur général du Laboratoire de la société numérique de l'Université McMaster; ainsi que Neal Kushwaha, président du Centre d'excellence en sécurité nationale.
    Je commencerai par vous, monsieur McAndrews. Vous disposez de cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire.
    La parole est à vous, monsieur. Merci.
    Je m'appelle John McAndrews et je suis directeur général du laboratoire de la société numérique.
    Nous gérons un centre de recherche interdisciplinaire sis à l'Université McMaster de Hamilton. Par souci de transparence, sachez que le Laboratoire de la société numérique reçoit du financement de la Fondation canadienne pour l'innovation, du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada, de Mitacs, de l'Université McMaster et de la société mère de Facebook, Meta. Ces bailleurs de fonds ne décident pas de la façon dont le laboratoire effectue ses recherches ou de ce qu'il publie. Notre liste de contributeurs financiers se trouve sur notre site Web à digitalsocietylab.org. Le laboratoire est également un fier membre du Réseau canadien de recherche sur les médias numériques, qui lui offre du soutien sous la forme d'espace dans le cadre de ses sondages.
    C'est un honneur pour moi de comparaître devant votre comité aujourd'hui.
    Permettez-moi de commencer par expliquer clairement pourquoi, à mon avis, il est si difficile de lutter contre la mésinformation, particulièrement sur les médias sociaux.
    Premièrement, la mésinformation est difficile à détecter et ses effets, difficiles à mesurer. Ce n'est pas impossible, mais difficile.
    Deuxièmement, les technologies sous-jacentes évoluent rapidement dans ce domaine, et il est difficile pour la recherche et les politiques de suivre le rythme.
    Enfin, il y a parfois des compromis difficiles à faire au chapitre de la liberté d'expression quand il faut décider si ou comment on réagit à la mésinformation. À mon avis, il revient au Parlement de prendre certaines de ces décisions, et ce n'est pas une tâche que je vous envie.
    Permettez-moi maintenant de dire quelques mots sur la façon dont le Laboratoire de la société numérique essaie d'apporter de l'aide. Le laboratoire a deux projets de recherche en cours sur la mésinformation. Dans le cadre du premier, nous partons du principe que, même si les nouvelles technologies risquent d'aggraver le problème ancien de la mésinformation, certaines de ces mêmes technologies ont également le potentiel d'aider les humains à lutter contre ce problème. Le laboratoire élabore donc activement des applications d'IA générative pour aider à repérer les affirmations vérifiables dans le flot de publications diffusées sur les médias sociaux, puis tirer parti de l'information sur la façon dont ces affirmations sont créées et publiées afin de fournir des renseignements en temps opportun. Nous voyons ce processus comme une sorte de système d'alerte précoce pour détecter des affirmations potentiellement trompeuses en vue d'un examen humain plus approfondi.
    En ce qui concerne le deuxième projet du laboratoire, nous commencerons par faire remarquer que, malgré le nombre croissant de recherches internationales sur la mésinformation, nous n'en savons toujours pas assez sur les caractéristiques de la mésinformation que le public considère comme préjudiciable et sur les genres de réactions que les citoyens jugent appropriées. À cet égard, le laboratoire a récemment entrepris une nouvelle recherche pilote fondée sur des sondages afin de répondre à ces questions pour nos partenaires du Réseau canadien de recherche sur les médias numériques.
    Les travaux de ces deux projets sont préliminaires et n'ont pas encore été examinés par des pairs, mais je crois qu'ils sont prometteurs pour mieux comprendre la mésinformation et le soutien du public à l'égard des politiques qu'il convient d'adopter pour y réagir.
    Dans le temps qu'il me reste, permettez-moi de vous présenter trois recommandations sur la façon dont le Comité peut contribuer à lutter contre la mésinformation et à bâtir un écosystème d'information plus résilient.
    Premièrement, le Comité devrait recommander un soutien public solide et durable à la recherche sur la mésinformation et ses effets au Canada. Ce soutien devrait prendre la forme d'un financement public de la recherche scientifique de haute qualité, transparente et accessible au public et de règles obligeant les plateformes à communiquer leurs données aux chercheurs dans des conditions et avec des protections appropriées.
    Deuxièmement, comme l'ont proposé des témoins précédents, le Comité devrait également recommander un soutien public solide et durable pour les initiatives qui favorisent les efforts de littératie médiatique et scientifique à jour et fondés sur des données probantes. Il n'y a pas de panacée contre la mésinformation, mais d'après moi, de tels efforts de littératie sont importants, car ils permettent d'éviter en large partie les compromis les plus épineux en matière de liberté d'expression, dont j'ai parlé plus tôt.
    Enfin, le Comité devrait maintenir continuellement sa visibilité dans ce domaine. Il devrait donc, selon moi, tenir des audiences trimestrielles ou annuelles régulières sur l'état de la mésinformation au Canada après avoir terminé la présente étude.
    Permettez-moi de terminer en félicitant les membres du Comité d'avoir entrepris ce travail crucial et opportun.
    J'attends avec impatience les échanges qui suivront. Merci.
(1645)
    Je vous remercie, monsieur McAndrews. Vous avez pris moins que le temps accordé. Le Comité apprécie toujours les messages très succincts.
    Monsieur Kushwaha, cela vous donne un peu plus de temps si vous en avez besoin.
    Allez‑y, monsieur. Vous avez jusqu'à cinq minutes, ou un peu plus, pour vous adresser au Comité.
    Bonjour, monsieur le président, honorables vice-présidents et distingués membres du Comité. Je vous remercie de m'avoir invité à vous faire part des constats et des recommandations du Centre d'excellence pour la sécurité nationale.
    Ce dernier est une ONG canadienne composée d'universitaires et de praticiens s'intéressant aux éléments clés du droit international et national, de la technologie, des politiques et de la politique qui ont une incidence sur le Canada et les Canadiens. Nous aidons les secteurs privé et public à gérer les risques et les problèmes que présentent les auteurs de menaces intérieurs et étrangers dans le cadre de recherches menées à l'échelle nationale et internationale.
    Nos constats sont résumés sous la forme de conseils en matière de protection de la vie privée qui sont communiqués à divers ministères et organismes du gouvernement du Canada pour les aider à élaborer des politiques.
    Je commencerai par quelques informations normalisatrices sur l'espionnage et le sabotage. Dans le domaine du droit international, on s'attend à de l'espionnage et du sabotage de la part d'États étrangers, et ce, depuis bien avant notre naissance à tous. Nous le faisons aussi. De fait, des domaines clés sont considérés comme étant intouchables, notamment les fonctions intrinsèquement gouvernementales et les infrastructures essentielles.
    Lorsque des entités se comportent ainsi, elles peuvent être tenues criminellement responsables en vertu de nos lois nationales. Même si nous nous attendons à ce que les gouvernements étrangers fassent de l'espionnage et du sabotage, nous ne nous attendons pas à ce que les entreprises ou les particuliers étrangers en fassent autant. Lorsqu'ils le font, le gouvernement du pays où ils résident ou où se trouve leur siège social devrait les tenir responsables de leurs actes. Si ce n'est pas le cas, d'autres autorités pourraient considérer que ces acteurs étatiques agissent au nom de leur gouvernement. Le cyberespace offre un autre moyen de mener de telles actions. Ce n'est ni surprenant ni nouveau.
    Cela étant dit, je vous présente nos constats. Le 27 septembre, Vanessa Lloyd et David Vigneault ont témoigné devant la Commission sur l'ingérence étrangère. Ils ont donné des exemples d'activités étrangères menées par les gouvernements de la Chine, du Pakistan, de l'Inde, de l'Iran et d'autres pays. En étudiant les comportements de la Chine et de la Russie à notre centre, nous avons établi la tendance de ces pays et constaté leur capacité à mener par voie cybernétique des activités d'influence complexes qui frôlent — sans le franchir — le seuil du conflit armé, ce qui limite les options du Canada au chapitre des réactions légales. La complexité de leurs méthodes fait aussi en sorte qu'il est très difficile pour le public, et même pour les élus, de les remarquer.
    Par exemple, depuis la COVID, le travail à domicile est très courant et attendu. Des entreprises et des gouvernements du monde entier ont appuyé cet arrangement, y compris l'armée américaine, pour des dossiers classifiés jusqu'à « sercret» dans 2 000 foyers. En ce qui concerne les moyens cybernétiques, les communications sont bien chiffrées et considérées comme protégées. Du point de vue physique, un petit capteur placé sur une fenêtre saisit les voix, qui sont envoyées pour être traitées afin de déterminer les méthodes d'influence. Les fonctionnaires et les élus demeurent des cibles faciles.
    De même, nous avons étudié le comportement des Canadiens qui recueillent des fonds au sein de communautés du Canada pour les envoyer à l'étranger afin d'influencer la population d'un autre pays. Ces genres d'activités ne se limitent pas à des cultures ou à des origines particulières. Certains groupes religieux canadiens envoient de l'argent à l'étranger pour appuyer des manifestations et parfois des actes de violence. De fait, ce n'est pas tout le groupe qui fréquente le lieu de culte qui agit ainsi.
    Nous avons remarqué une augmentation du nombre de groupes criminels organisés actifs, notamment dans les petites villes du Canada. Dans divers restaurants fort respectés, il est possible d'observer des livraisons de drogues commandées par téléphone mobile par des clients aisés et des membres du personnel, comme s'il s'agissait d'une commande Uber. Les groupes du crime organisé envoient leur argent dans des pays étrangers en utilisant des cryptomonnaies et influencent la politique étrangère et les élus publics.
    Nous croyons que les lois canadiennes ne sont pas adéquatement rédigées ou éprouvées pour contrer ces activités. Voilà pourquoi certains gouvernements d'Europe et d'Asie considèrent que le Canada soutient l'influence étrangère et même le terrorisme. Bien que les États-Unis soient un allié solide, leurs points de vue et leurs litiges juridiques sont très différents dans des domaines importants pour le Canada, comme le commerce et notre souveraineté dans l'Arctique. Les entreprises dont le siège social est aux États-Unis exercent une grande influence sur les promotions des fonctionnaires en offrant à ces derniers des postes bien rémunérés à leur retraite, influençant les opérations gouvernementales et les décisions des hauts fonctionnaires. Des entreprises ayant leur siège social à l'étranger emploient des Canadiens, permettant à des États étrangers d'exercer légalement une influence sur l'esprit de leur personnel en poste au Canada par l'entremise de leurs sociétés.
    Il n'existe pas vraiment des solutions rapides. Je passerai à nos recommandations.
    Le gouvernement du Canada devrait entreprendre des programmes éducatifs complets pour immuniser la société canadienne contre la mésinformation et la manipulation de l'information en général en s'inspirant du modèle finlandais. Il y a près d'une décennie, la Finlande a détecté les mêmes vulnérabilités que le Canada d'aujourd'hui et a entrepris un effort d'éducation pansociétal pour protéger la démocratie, en sensibilisant la population, des enfants fréquentant la maternelle jusqu'aux retraités.
    Les électeurs canadiens à l'étranger sont directement soumis à l'autorité et à l'influence d'États étrangers. Nos constats donnent à penser que certains États se servent de cet avantage pour exercer une influence stratégique à long terme. Tout ce qu'on peut raisonnablement faire pour atténuer cette influence sur les Canadiens installés à l'étranger, c'est renforcer les normes internationales en faveur du Canada.
(1650)
    Le cyberespace n'existe que depuis 30 ans et nous n'avons pas encore pu établir un droit coutumier international. Nous avons signé des traités. En 2015, le Canada a ratifié la Convention de Budapest sur la cybercriminalité de 2001, mais nous n'avons pas signé les deux protocoles additionnels, ni la Convention de Malabo de 2014.
    Les fonctionnaires canadiens, tout comme ceux de nombreux autres pays, ont été contraints d'accepter les risques liés à la souveraineté des données au nom du Canada. Il existe des instruments, comme la convention des Nations unies contre la cybercriminalité. Cependant, le centre recommande de rejeter ce traité, car il affaiblirait notre souveraineté. Le centre estime que le Canada devrait continuer de promouvoir le bon comportement des États grâce à une communication ouverte et à des pratiques normatives. Nous devons montrer aux parties étrangères que nous ne soutenons pas les actions menées contre d'autres parties, qu'elles aient lieu au Canada ou qu'elles visent le Canada.
    Je vous remercie pour le temps que vous m'accordez et je vous souhaite bonne chance.
    Merci, monsieur Kushwaha.
    Je vais commencer par donner la parole à M. Caputo. Nous allons d'abord effectuer des tours de six minutes, et M. Caputo sera le premier à poser des questions.
    Allez‑y, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais remercier M. Kushwaha et M. McAndrews d'être présents.
    J'ai écouté leurs observations liminaires avec beaucoup d'intérêt. C'est très intéressant. Je pense que je pourrais avoir de très longues conversations avec vous.
    Vous avez six minutes.
    Des députés: Ha, ha!
    Je n'ai pas dit combien de temps j'allais leur parler, monsieur le président, mais combien de temps je pourrais leur parler, car les personnes qui me connaissent savent que j'aime parler.
    C'est très intéressant, monsieur Kushwaha. Vous avez fait une différence entre les entreprises étrangères et les gouvernements. Ces entités sont différentes. Les gouvernements sont complètement différents. Ce que j'ai trouvé très intéressant que vous disiez qu'une entreprise étrangère peut devenir un organe de l'État qui, d'une certaine façon, met en œuvre les plans du gouvernement.
    Cette description est‑elle exacte?
     Oui, c'est une façon de dire les choses. Veuillez poursuivre.
    Oui. Parfois, le gouvernement fait des choses, qui peuvent être délibérées ou non. Au bout du compte, il peut en résulter de la désinformation ou de la mésinformation. Je vais vous donner un exemple. Laissez‑moi jeter un coup d'œil rapide à mes notes pour trouver la date. Je crois que c'était le 17 septembre 2024. Le gouvernement libéral de M. Trudeau a donné 340 000 $ pour la production d'un film qui a été présenté au Festival international du film de Toronto. À ce que je comprends, il s'agissait d'un film prorusse.
    Je ne pense pas que quelqu'un se soit dit: « C'est exactement ce que nous voulons faire. » Si c'est le cas, cette personne doit être congédiée. Dans le cas contraire, il me semble que le fait d'avoir donné 340 000 $ de votre argent, de mon argent et de notre argent à la propagande prorusse est une énorme erreur. Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?
    Je ne connais pas ce cas ou ce scénario particulier, mais vous fournissez des renseignements intéressants. Sur la base de ce que vous avez dit, je pense qu'il est très difficile pour nous de dire qu'un élu particulier a été responsable de ce processus décisionnel. Comme je l'ai souligné, le problème auquel nous sommes confrontés est que ce sont parfois nos fonctionnaires qui prennent ces décisions préjudiciables.
    J'aimerais apporter un éclaircissement. Il y a trois types d'auteurs de menace interne. Il y a les personnes qui ne sont pas malveillantes, dont les actions n'étaient pas délibérées et qui se disent: « Oups, j'ai fait ceci. Je n'étais pas au courant ». Il y a ensuite les personnes malveillantes qui ont commis une action de façon délibérée. Il y a aussi les personnes qui ne sont pas malveillantes, mais qui ont fait quelque chose de façon délibérée, et c'est le scénario le plus étrange. Ces personnes ne sont pas malveillantes, mais elles pensaient vraiment qu'elles faisaient ce qui était le mieux, et leurs actions ont contrevenu à la politique ou n'ont pas eu le bon résultat.
(1655)
    D'accord.
    Ce que je trouve intéressant dans ce que vous dites, c'est que, très souvent, nous supposons que la mésinformation et la désinformation proviennent de l'extérieur, qu'elles sont externes et qu'elles arrivent au Canada. Cependant, dans l'exemple que je viens de donner, et je sais qu'il y a d'autres... Nous venons de tenir une réunion sur une source d'information qui était autrefois fiable et qui diffuse une désinformation flagrante.
    Ce que je trouve intéressant, c'est qu'il s'agit presque d'un signal d'alarme pour le Canada, qui se rend compte que parfois, on donne 340 000 $ pour la production d'un film qui ne devrait pas être financé, ou nous avons des sources d'information... En tant que parlementaires, nous en subissons les conséquences. Je ne pense pas que le problème vienne seulement de l'extérieur. Je crois que nous devons nous regarder dans le miroir.
    Qu'en pensez-vous?
    C'est intéressant. J'aime l'idée de se regarder dans le miroir, en effet. Je pense que ce commentaire s'applique également aux relations diplomatiques.
    Il est intéressant de noter que, lorsque des parties extérieures reçoivent des fonds, nous leur faisons confiance et croyons qu'elles vont agir dans l'intérêt du Canada. Il est possible qu'elles continuent de le faire, mais leur point de vue peut changer au fil de leurs reportages ou en fonction du travail qu'elles accomplissent, comme dans le cas de ce film.
    C'est une question complexe, car nous devrions peut-être exercer une certaine surveillance. Nous accordons tellement de fonds à tellement d'entités différentes, d'ONG et même d'entités de soutien dans le monde entier. Il serait très difficile d'exercer ce type de contrôle avec les fonds modestes qui nous proviennent de nos contribuables.
    Vous soulevez également un excellent point, à savoir que, très souvent, les gens s'empressent de dire que ce problème ne concerne que la droite, alors qu'une bonne partie de l'argent entre dans les caisses de la gauche. Je n'aime pas opposer la droite à la gauche. Je parlerais plutôt d'extrêmes. Nous les appellerons simplement les extrêmes.
    Beaucoup d'argent provient illégalement d'ONG américaines, par exemple. Je pense que beaucoup de gens estimeraient que ces opinions ne sont pas conformes aux normes canadiennes ou au courant dominant, et ces fonds sont versés à des personnes qui véhiculent les extrêmes au Canada.
    C'est apparemment le cas pendant les élections. Il y a un nom. Il s'agit de la Tides Foundation. D'après ce que j'ai compris, l'argent arrive parfois au Canada, et sert à propager de la désinformation au niveau local.
    Comment pouvons-nous mettre un terme à ce problème?
    Oui, surtout si nous sommes des alliés, si ces fonds viennent de ce que nous appelons des États alliés.
    Je compatis, et nous constatons l'existence de ce problème. Le Canada n'est pas le seul pays à y être confronté. Lorsque nous parlons avec d'autres pays d'Europe, ils nous disent qu'ils font face à la même situation. L'Asie y est confrontée, de même que les États africains.
    C'est regrettable, et je pense que c'est plus évident aujourd'hui. Ce problème a toujours existé.
    Je pense que mon temps est écoulé.
    Je suis désolé, monsieur McAndrews. J'avais également des questions à vous poser.
    Merci.
    Monsieur Bains, vous allez reprendre la parole pour six minutes.
    Allez‑y, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à M. McAndrews et à M. Kushwaha d'être parmi nous aujourd'hui et de nous apporter ces éclairages très intéressants.
    Comme vous le savez, nous menons une discussion sur la désinformation et la mésinformation. Ce comité étudie cette question depuis un certain temps.
    J'ai remarqué que vous aviez mentionné la Finlande, et j'ai également entendu parler de Taïwan. Des témoins précédents ont également déclaré que la Finlande et Taïwan étaient des exemples à suivre en matière de lutte contre la désinformation en raison de leur proximité avec la Russie et la Chine, respectivement.
    Pourriez-vous nous parler de leurs programmes et nous suggérer d'autres moyens d'immuniser les Canadiens contre les effets de la mésinformation et de la désinformation?
    Oui, tout à fait. Merci.
    Comme vous l'avez décrit, la Finlande est évidemment confrontée à un problème de taille à sa porte, et la situation de ce pays n'est pas très différente de la nôtre, si l'on y réfléchit bien. La Finlande a agi immédiatement. Son modèle, contrairement à celui du Canada... Notre politique en matière d'éducation est établie au niveau fédéral, mais elle est mise en œuvre aux niveaux provincial et territorial. Il est très difficile de bien gouverner au Canada comme le fait la Finlande.
    Nous devons trouver des méthodes semblables à celles de leur modèle. Je ne suggère pas que ce soit à ce comité de le faire et je ne propose pas non plus de méthodes politiques pour faire passer ces responsabilités du gouvernement fédéral aux provinces et aux territoires, mais je pense que nous devrions trouver une façon de normaliser ce type d'information, comme nous le faisons pour les mathématiques, la physique, la science et le langage.
    À cet égard, la Finlande a fait un travail remarquable en enseignant aux enfants de maternelle comment le faire en leur donnant des exemples loufoques, puis des exemples réels, comme on le ferait avec n'importe quel enfant. Ils les ont aidés à grandir. Même des personnes âgées et des retraités qui discutent dans un café, qui ont des difficultés avec la technologie et qui reçoivent des renseignements de leurs amis et de leurs voisins, peuvent alors vraiment réfléchir à ce qu'ils entendent et dire: « Vous savez quoi? Laissez‑moi vérifier. Je sais comment faire, parce que cela fait maintenant partie de mon écosystème, de ma vie et de mon être ». Les choses se sont transformées. Ce processus a pris une décennie.
(1700)
    On pourrait rechercher les sources au niveau national, où introduire une politique et la transmettre aux autorités provinciales, qui assureront une sensibilisation ou autre.
    Pensez-vous que la mésinformation et la désinformation augmentent? Vous avez dit qu'elles ont toujours existé. Est‑ce qu'elles augmentent ou est‑ce que les méthodes sont plus sophistiquées? Pourquoi constatons-nous une augmentation de ces activités, ou sont-elles devenues plus évidentes?
    C'est peut-être un peu des deux. Pour dire les choses simplement, j'ai l'impression que de nos jours, nous vivons tous sur des appareils numériques, comme des ordinateurs portables, des ordinateurs et des téléphones mobiles. Les enfants les utilisent. Les adultes aussi. Ils sont un excellent moyen de digérer ces choses. Auparavant, si je voulais voir de la désinformation ou de la mésinformation et que j'étais dans une zone de guerre, je devais ramasser des brochures tombées du ciel, ou si j'étais chez moi, je devais allumer la télévision et regarder une chaîne très spécifique — sinon, je voyais de la neige — pour digérer certaines informations que l'on juge être de la mésinformation ou qui pourraient être considérées comme de la mésinformation. Aujourd'hui, cette information est à portée de main.
    On a l'impression qu'il y en a plus, mais cette information est simplement plus accessible. Il y en a plus et il y a des moyens pour la diffuser plus rapidement. Étant donné que l'on peut utiliser la vidéo de quelqu'un... on pourrait probablement le faire avec cette vidéo, ajuster ma voix, l'appliquer à quelque chose d'autre et utiliser... Je vais utiliser des technologies...
    Il s'agirait d'hypertrucages et d'autres choses de ce genre.
    Tout à fait.
     Vous avez peut-être entendu parler du projet de loi C‑70, Loi concernant la lutte contre l'ingérence étrangère qui vient d'être adopté. L'une des dispositions de cette loi consistait à élargir la portée de l'infraction relative aux actes préparatoires. Si vous connaissez ce projet de loi, pouvez-vous nous expliquer comment il contribuera à lutter contre l'espionnage ou les nouveaux délits d'ingérence étrangère?
    Je peux parler de l'aspect lié à la justice. J'estime que l'on a fait du bon travail dans ce domaine. Je félicite les personnes qui ont travaillé sur le projet de loi C‑70, en particulier en ce qui concerne la capacité de lutter contre ce problème au niveau juridique et l'augmentation de la capacité du SCRS à agir de certaines manières.
    Je pense que nous pourrions parler des détails à une autre occasion, si vous le souhaitez. Le contenu de ce texte limite encore le Canada, mais nous devons prendre des mesures et nous allons dans la bonne direction. C'est positif, et je félicite toutes les personnes qui ont participé à ce processus.
    Pouvez-vous donner un exemple de ces limites et formuler une recommandation pour y remédier? Pouvez-vous le faire?
    Comme nous l'avons décrit précédemment, nous constatons notamment que, pour certains des comportements qui se produisent au Canada, il est très difficile de recueillir des preuves juridiques — c'est probablement le bon terme — ou des données probantes pouvant être présentées devant les tribunaux. Il est donc très difficile de le faire et de démontrer l'intention. Ces deux choses sont problématiques dans tous ces cas.
    Je vais poser la même question à M. McAndrews. Vous avez dit qu'il était difficile d'établir les conséquences réelles de ces choses. Pourriez-vous développer ce point?
    Je m'excuse, monsieur McAndrews, car je sais que nous ne vous avons pas entendu, mais pourriez-vous nous donner une réponse rapide en 15 secondes? Je suis désolé.
(1705)
    Je vous recommande de consulter le numéro de juin de la revue Nature, qui approfondit cette discussion saine sur la prévalence de la désinformation sur les médias sociaux, et ses effets.
     Merci.
    Merci, monsieur Bains.

[Français]

     Monsieur Villemure, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur McAndrews, j'ai beaucoup étudié les travaux du laboratoire sur la société numérique auquel vous appartenez, et j'ai trouvé ses recherches très intéressantes. Beaucoup de personnes sont venues ici nous décrire la désinformation, mais j'aimerais que vous me parliez du futur de la désinformation.

[Traduction]

    Merci beaucoup pour cette question, monsieur Villemure. Je vais faire de mon mieux pour y répondre.
    Dans un témoignage précédent, le professeur Bengio a dit qu'il estimait que nous ne passions pas assez de temps à parler de l'avenir, et je suis tout à fait d'accord. Comme il en a témoigné, à l'heure actuelle, l'intelligence artificielle générative permet de créer plus facilement et à moindre coût des vidéos et des messages audio trompeurs, et de mieux cibler les messages. Nous devons veiller à ce que la recherche et la politique suivent cette évolution. Il est mieux placé que moi pour décrire l'avenir de l'intelligence artificielle générative — je suis politologue de formation —, mais je crains fort que nous ayons du mal à suivre l'évolution de la technologie dans ce domaine.

[Français]

     La référence à M. Bengio est excellente, en passant.
    Notre mandat porte sur la désinformation parlementaire. J'aimerais donc vous demander ce que vous voyez dans votre boule de cristal en ce qui concerne la désinformation parlementaire et politique.

[Traduction]

     Il est toujours difficile de regarder dans une boule de cristal dans ce domaine.
    Je pense que l'hypothèse la plus optimiste consiste à dire que nous allons créer une transition dans laquelle les gens verront de plus en plus d'informations trompeuses et se tourneront vers des sources plus fiables qui disposent d'un code de déontologie de longue date et des ressources nécessaires pour effectuer un travail minutieux de compilation et de présentation de l'information de manière convaincante. C'est le point de vue le plus optimiste.
    L'hypothèse la plus pessimiste est que l'écosystème de l'information deviendra si pollué que les gens s'en désintéresseront. En tant que politologue, je crains non seulement que les gens croient des choses fausses, mais aussi qu'ils n'en sachent pas assez. Je crains que de nombreuses personnes ne s'intéressent pas à la politique, car c'est leur droit et peut-être aussi leur privilège, mais le danger est que si de plus en plus de personnes se désintéressent de la politique parce qu'elles ne peuvent pas distinguer le vrai du faux, notre démocratie se dégradera.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur McAndrews.
    Monsieur Kushwaha, on dirait que, dans toutes les sphères de la vie publique, le vraisemblable a remplacé le vrai et que, le vrai étant maintenant hors de portée, on se satisfait du vraisemblable. C'est, quelque part, ouvrir la porte à la désinformation. Qu'est-ce qu'on fait dans une société qui trouve la vérité hors de portée?
    C'est une belle question: qu'est-ce qu'on fait? Avec toutes les vidéos truquées qu'on voit aujourd'hui, je pense qu'à un moment donné, les gens vont tout laisser passer. On a déjà discuté des difficultés liées à cela, ici.

[Traduction]

    Les gens ne prêteront plus attention à rien, et il va arriver un moment où ce que vous présenterez n'aura plus d'importance.

[Français]

    Je pense qu'il y a déjà des sociétés dans le monde qui sont dans cette situation.

[Traduction]

    Nous devons apprendre de leur expérience.

[Français]

    Plus tôt, vous avez parlé de la ligne mince qui sépare ce qui est légal de ce qui est illégal. Elle les sépare, mais elle les lie en même temps. Pourriez-vous en dire davantage à ce sujet, s'il vous plaît?
    Vous parlez de ce que je disais au sujet de la Chine et de la Russie, c'est bien cela?
    Oui.
    Nous avons fait des études en Europe, avec les Européens, et il est très évident que, depuis 2012 environ, la Russie trouve continuellement de nouvelles façons de se mêler des affaires des autres pays. Ses campagnes sont très évidentes et on peut facilement comprendre ce qu'elle est en train de faire. Cependant, encore une fois, comme cela ne relève pas tout à fait des lois sur la guerre, on ne peut pas faire grand-chose.
(1710)
    De toute évidence.
    Je vais vous poser une autre question difficile. Plus tôt, on a dit que, de nos jours, la vérité importait peu. Vous avez parlé de la Finlande, et quelques personnes nous ont également entretenus de ce sujet. J'ai retenu qu'il était très important d'avoir des médias très forts et de faire de l'éducation dès la petite enfance.
    Or, je me questionne sur la pensée critique, qui ne s'enseigne plus. Il n'y a pas de lieu, au Québec et au Canada, où on l'enseigne, sauf si on fait un doctorat en philosophie, par exemple. Avez-vous une suggestion à ce sujet? Oublions les ordres de gouvernement un instant. Si la population ne s'intéresse pas à la vérité, on ne peut pas espérer l'intéresser à la pensée critique.
    Qu'est-ce que les enfants, et même les plus âgés, voient à la télévision ou sur leur téléphone? Ce sont des célébrités ou des gens qui ont de l'argent, qui conduisent telle ou telle voiture ou qui prennent l'avion pour aller quelque part. Ils ne veulent pas apprendre.
     Ils préfèrent être divertis plutôt qu'être instruits.
    C'est exact.
    D'accord.
    Si je regarde ce qui se passe sur la plateforme X ces jours-ci, je vois que tout le monde semble se battre l'un contre l'autre. C'est une atmosphère négative.
     Monsieur Villemure…
     Ce sera très court.
    D'accord. Allez-y.
    Toute cette négativité n'est pas de la désinformation en soi, mais elle a pour effet de nous pousser à renoncer aux nouvelles.
     C'est tout à fait exact. Or, si vous compariez le Canada à des pays comme la Chine ou même l'Inde, diriez-vous qu'ils sont en train de laisser tomber l'éducation?
    Non, je ne dirais pas cela.
     Merci beaucoup.

[Traduction]

    Monsieur Green, vous disposez de six minutes.
    Allez‑y.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Mes questions s'adresseront à M. McAndrews.
    Je vous souhaite la bienvenue au Comité. Évidemment, en tant que député de Hamilton, je pense que c'est toujours une bonne chose pour les comités parlementaires d'accueillir les meilleurs et les plus brillants pour qu'ils nous fassent profiter de leurs connaissances sur les questions à l'ordre du jour.
     Ma question porte sur votre déclaration liminaire, dans laquelle vous formuliez des recommandations. Vous avez parlé de règles, et je crois que c'était dans le contexte de la transparence concernant les algorithmes. Vous avez parlé de l'application de ces règles dans des conditions appropriées. Est‑ce exact?
    Je faisais référence à des règles qui, avec des permissions et des conditions appropriées, exigeraient que les plateformes partagent certaines informations avec les chercheurs afin de leur permettre d'approfondir leur étude de la désinformation et la recherche d'outils possibles pour y remédier.
    Quelles règles suggéreriez-vous? Le Laboratoire de la société numérique a‑t‑il effectué un travail de fond quant aux règles qui seraient nécessaires?
    La réponse courte est non. La réponse plus longue est que je recommanderais au Comité de se pencher sur la législation sur les services numériques de l'Union européenne et de s'en inspirer comme modèle possible quant à la façon de contraindre les très grandes plateformes à partager leurs données avec les chercheurs — dans ce contexte, les chercheurs basés en Europe. Il devient de plus en plus difficile pour les chercheurs d'accéder aux données des très grandes plateformes, ce qui érode leur capacité à informer les parlementaires.
    Quelles seraient ces « conditions appropriées »? Y avez-vous réfléchi?
    Je peux vous faire part de quelques réflexions provisoires, à savoir que les chercheurs ne devraient pas s'engager là‑dedans dans le but de gagner quelque chose sur le plan commercial et qu'ils devraient s'assurer de maintenir des mesures adéquates pour protéger les renseignements personnels. Les données de certaines plateformes sont publiques, alors que pour d'autres, elles ne le sont pas. Il sera donc important d'accorder une attention particulière à la protection des renseignements personnels des utilisateurs. Ensuite, je pense qu'il faudra appliquer un certain contrôle pour veiller à ce les données appropriées que nous recevrons seront les bonnes, et faire en sorte que les mécanismes nécessaires pour assurer que ce soit le cas seront éventuellement mis en place.
    Dans un témoignage précédent, nous avons parlé un peu de la marchandisation de l'information, de la façon dont elle est vendue — une sorte de capitalisme des données. Je pense à Clearview AI et à la manière dont des personnes semblables peuvent être profilées en ligne grâce à la technologie. Je pense à Cambridge Analytica et à la manière dont elle a été utilisée en 2016. Nous entendons maintenant parler des liens qui existent entre la Russie et des influenceurs de médias sociaux canadiens.
    Selon vous, en tant que politologue, quels sont les plus grands risques liés à la désinformation qui pourraient non seulement avoir une incidence sur le travail du Parlement et des parlementaires, mais aussi sur les futures élections?
(1715)
    Je vous remercie de votre question. C'est une question importante et délicate.
    Comme je l'ai dit tout à l'heure, je pense qu'il s'agit de la capacité des Canadiens à discerner le vrai du faux et à prendre des décisions éclairées. Les Canadiens sont bien informés et prennent de bonnes décisions en conséquence. De même, à mon avis, à moyen terme, aucun parti politique n'a intérêt à polluer l'information en ligne. Je pense que c'est dans notre intérêt commun de construire en fonction de...
    Désolé de vous interrompre, mais j'ai entendu ce que vous avez dit. Or, je suis sûr que vous connaissez Steve Bannon. Steve Bannon a très publiquement parlé d'inonder cet espace avec un mot qui serait antiparlementaire. À l'extrême droite, on parle très ouvertement de « guerre cognitive ». Il semble qu'il y ait, au moins dans le spectre politique, un certain avantage à avoir un environnement qui fait la part belle à la post-vérité, un environnement où les faits n'ont pas d'importance et où les partis politiques peuvent tout inventer au fur et à mesure. N'est‑ce pas le cas?
    Avez-vous trouvé une théorie de corrélation ou de causalité en ce qui concerne la montée du populisme de droite et celle de la désinformation? Je sais que vous avez travaillé sur la COVID et sur les réticences à l'égard des vaccins. Existe‑t‑il une corrélation entre l'idéologie politique et les gains partisans qui pourraient être faits?
    Je ne pense pas que nous voulons prétendre qu'il n'y a pas de politique dans la désinformation. Ce que je veux souligner, c'est que l'édification d'un écosystème résilient sert l'intérêt public et, à moyen terme, l'intérêt des principaux partis politiques. Il serait tout à fait approprié que ce comité se penche sur des exemples pertinents et s'en inspire.
    Cependant, lorsque le Comité considère la formulation de recommandations, lorsque des lois et des règles sont proposées, nous ne voulons pas, je pense, donner l'impression aux Canadiens qu'elles sont conçues pour avantager un parti politique en particulier.
    Je suis d'accord.
    À ce propos, le Laboratoire de la société numérique que vous dirigez a travaillé en 2019 et 2021 sur la réglementation des publicités électorales numériques. D'après ce que vous avez pu dégager de cette étude, quelles sont les recommandations particulières que vous aimeriez présenter au Comité, compte tenu du fait que nous avons potentiellement une élection qui approche et que nous sommes apparemment très en retard sur la mise en place d'une véritable surveillance?
    Merci encore de votre question.
    Je n'ai pas participé directement à ce projet de recherche, mais je serais heureux d'assurer un suivi avec le Comité au nom des chercheurs qui l'ont piloté.
     Comme je l'ai dit dans ma déclaration liminaire, il est essentiel que la société civile et le monde universitaire soient habilités à détecter les fausses informations, à les communiquer au public et à faire en sorte que cette information soit facilement accessible. Je salue le travail de mes collègues du Réseau canadien de recherche sur les médias numériques. Vous avez entendu tout à l'heure Aengus Bridgman, de l'Observatoire de l'écosystème médiatique. Ces gens font de l'excellent travail pour le bien des Canadiens en ce qui concerne la santé de l'écosystème médiatique.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur McAndrews, à la demande de M. Green, notre greffière a pris note de vous contacter pour que vous fournissiez certaines de ces informations au Comité afin que ce dernier en tienne compte lors de la rédaction de son rapport. La greffière vous contactera au nom de M. Green et du Comité.
    Nous avons terminé notre premier tour de table. C'est une discussion très intéressante, messieurs. Je vous en remercie.
    Nous passons maintenant à M. Cooper, pour cinq minutes.
    Vous avez la parole.
     Merci, monsieur le président.
    Monsieur Kushwaha, vous avez parlé de l'ingérence de Pékin et du fait que, dans bien des cas, les tactiques qu'il utilise sont complexes. Dans ce contexte, il est difficile d'utiliser des outils d'application de la loi pour, par exemple, porter des accusations criminelles.
    Les élections de 2019 et de 2021 ont été marquées par un effort concerté d'ingérence de la part de Pékin. Lors des élections de 2021, il est désormais bien établi qu'il y a eu une campagne assez sophistiquée pour faire en sorte d'assurer la réélection des libéraux et la défaite de certains candidats conservateurs, notamment les députés Kenny Chiu et Alice Wong.
    Des élections pourraient avoir lieu d'un moment à l'autre. À votre avis, à l'approche des prochaines élections, le risque d'assister à de telles activités d'ingérence de la part de Pékin ou d'autres États étrangers hostiles est‑il plus grand, moins grand ou tout aussi grand qu'il ne l'était lors des dernières élections?
(1720)
    Je pense que les États étrangers adverses vont jouer leur jeu. Ils vont le faire pour servir leurs propres intérêts et pour leurs propres raisons — qu'il s'agisse d'un politicien ou d'un groupe de personnes qui le font dans leur intérêt personnel ou pour l'avancement de leur pays et de leur point de vue.
    Il est impossible d'échapper à cette réalité. Cela se produira. La question est de savoir comment nous pouvons y faire face. Comment pouvons-nous changer cela?
    Je pense qu'il est important de noter que nos échanges commerciaux avec les États‑Unis s'élèvent à environ 3,4 milliards de dollars par jour. Cela représente environ 66 % de l'ensemble de nos échanges. C'est à peu près le chiffre que j'avais obtenu la dernière fois que j'ai vérifié auprès d'Affaires mondiales Canada.
    Si vous voulez influencer un autre pays pour qu'il fasse ce que vous attendez de lui — qu'il s'agisse de forcer le respect des normes ou de « le neutraliser », si je puis dire — vous avez besoin de quelque chose pour exercer une pression. Mais voilà, notre capacité commerciale n'est pas à la hauteur.
    Il est intéressant que vous parliez de désinformation de la part d'élus, car nous en avons eu un exemple très récemment lorsque le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre, le député libéral Mark Gerretsen, a fait circuler une désinformation éhontée. Il l'a fait délibérément, pour servir des intérêts politiques et a...
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    La vérité fait mal.
    Je ne pense pas que ce soit le moment ou l'endroit pour lancer des attaques personnelles contre d'autres parlementaires. Ce sont des propos non parlementaires.
    C'est du domaine public.
    Vous avez dit vous-même que nous avions une bonne série de témoignages. Je pense qu'il faut faire montre de circonspection.
    Je vous remercie.
    Je vais permettre à M. Cooper de poursuivre ses questions.
    Monsieur Cooper, il vous reste 2 minutes 35 secondes.
    Il s'agit d'une étude sur la désinformation et la mésinformation, et sur l'incidence qu'elles ont sur le travail des parlementaires. Dans ce contexte, les députés peuvent poser des questions très variées.
    Monsieur Cooper, vous avez la parole. Poursuivez, je vous prie.
    Eh bien, je présume que...
    Monsieur le président, puis‑je continuer...
    C'est mon temps de parole, mon temps de parole.
    ... juste sur ce point?
     Si un député remet en question le discours d'un autre député à la Chambre, il pourrait s'agir d'une question de privilège.
    Un député: Non...
    Mme Brenda Shanahan: C'est tout ce que je dis.
    Pour ce qui est du rappel au Règlement, madame Shanahan, je veux dire, il s'agit d'une question qui renvoie à quelque chose qui est du domaine public. M. Cooper n'invente rien. Je lui demande donc de continuer.
    Voilà qui répond à votre rappel au Règlement.
    Monsieur Barrett, allez‑y sur ce rappel au Règlement.
    En ce qui concerne le rappel au Règlement sur la question de savoir si les propos d'un député à la Chambre doivent être remis en question ou non, M. Cooper reste clairement dans le cadre du sujet qui nous occupe, monsieur le président. Sa question concernant M. Gerretsen porte sur l'admission de la diffusion intentionnelle de fausses informations par le député qu'il a nommé, ce que le député a admis avoir fait sous la menace d'un procès.
    C'est important, monsieur le président. Il faut lui accorder un peu de temps pour reformuler sa question.
    Je suis pas mal certain d'avoir abordé cette question dans le cadre particulier de cette étude. Des exemples très précis ont été cités de part et d'autre sur la désinformation et les fausses informations — ou, comme j'aime les appeler, les mensonges — qui ont été disséminées.
    Nous allons laisser M. Cooper continuer pendant 2 minutes 35 secondes, étant donné que nous avons accordé cette latitude à tous les membres de ce comité, ainsi que la possibilité d'évoquer ces exemples particuliers.
    Monsieur Cooper, allez‑y.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je suppose que la vérité fait mal aux libéraux, parce que M. Gerretsen...
    J'invoque de nouveau le Règlement, monsieur le président.
    Comme vous l'avez dit à juste titre, monsieur le président...
    Ce n'est pas parce que vous n'aimez pas ce que quelqu'un dit qu'il s'agit d'un rappel au Règlement pertinent.
    Non, non, absolument pas. J'aime tout ce qui a été dit aujourd'hui. J'apprécie vraiment les témoignages de nos témoins.
    Si nous voulons que cette étude soit honnête et solide...
    C'est ce que nous voulons.
    ... je vous en prie, laissons de côté la partisanerie et la politicaillerie.
    J'ai entendu des propos partisans de tous les côtés aujourd'hui, madame Khalid.
    Je vais laisser M. Cooper poursuivre. Si quelqu'un veut invoquer le Règlement, qu'il le fasse en fonction de règles particulières et j'examinerai la demande en conséquence. Ce n'est pas parce que quelqu'un n'aime pas ce que dit une autre personne qu'il s'agit d'un rappel au Règlement légitime.
     Monsieur Cooper, allez‑y pour 2 minutes 35 secondes, s'il vous plaît.
(1725)
    Je vous remercie.
    C'est mon temps de parole et je peux l'utiliser comme je le souhaite. J'ai noté que la vérité blesse les libéraux. M. Gerretsen a fait circuler une désinformation éhontée à des fins politiques. Et qu'est‑il arrivé? Il a dû se rétracter en raison d'une action en justice intentée contre lui.
    Nous avons été témoins d'une autre désinformation de la part de nul autre qu'un réseau qui prétend être le réseau d'information le plus fiable au Canada, qui a frauduleusement trafiqué une vidéo de Pierre Poilievre. Des ministres de ce gouvernement, dont la ministre St‑Onge et le député Noormohamed, ont défendu la manipulation de cette vidéo. Cela montre bien que les libéraux sont tout à fait favorables à la désinformation tant qu'elle ne se fait pas à leur détriment. Quoi qu'il en soit, cela a été dit.
    Monsieur Kushwaha, vous avez parlé un peu du projet de loi C‑70. L'un des outils que propose ce projet de loi est la création d'un registre des influences étrangères. Pensez-vous que ce registre serait un outil utile pour lutter contre la désinformation et les informations erronées provenant d'États étrangers hostiles?
    Est‑ce que cela concerne les parlementaires ou le monde en général?
    Le monde en général.
    Je peux peut-être vous donner un peu de contexte.
    Je vous en prie.
    Lorsque nous examinons les activités d'ingérence menées par le régime de Pékin lors des élections de 2021, nous constatons que certains médias de langue chinoise appartenant à des intérêts canadiens ont amplifié cette désinformation et qu'ils avaient des liens et des ententes de partenariat avec la République populaire de Chine. Ils devront désormais s'enregistrer.
    C'est dans ce contexte que j'ai soulevé la question du registre des influences étrangères.
    Je vais devoir vous demander une réponse rapide, si vous le pouvez, en 20 ou 30 secondes.
    Ma réponse courte est que je ne pense pas que cela fera une différence. Je ne pense pas qu'un registre fasse une différence, parce qu'on se contentera de passer par quelqu'un d'autre. Si c'était mon équipe qui le faisait, disons, en se comportant de cette manière, et que trois personnes de mon équipe étaient inscrites au registre, je n'aurais pas recours à eux. C'est très simple. Je continuerais à faire ce que je cherche à faire. J'arriverais quand même à mes fins.
    Merci.
    Nous allons maintenant donner la parole à Mme Romanado, pour cinq minutes.
    Allez‑y, je vous prie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Par votre entremise, j'aimerais remercier les témoins d'être ici aujourd'hui.
     Je commencerai par M. Kushwaha. Je vais les classer en trois catégories: les consommateurs d'information, les créateurs d'information et, bien sûr, les canaux de communication.
    Vous avez parlé un peu du citoyen moyen qui regarde les médias. Nous savons qu'il y a eu des cas — et un groupe d'experts précédent vient de nous en parler — où les médias traditionnels ont diffusé des informations erronées, de sorte que de plus en plus de gens se tournent vers d'autres plateformes pour s'informer.
    Comment une personne ordinaire — et vous avez parlé un peu du modèle finlandais — peut-elle savoir si ce qu'elle lit est factuel ou non? Par exemple, ma mère relayait une nouvelle qu'elle avait vue sur Facebook concernant le décès d'un acteur. Cela fait trois fois que ce pauvre acteur est décédé, mais elle continue à faire circuler cette information en pensant qu'elle est vraie. Comment une personne peut-elle faire la différence entre ce qui est vrai et ce qui ne l'est pas sans la faire circuler?
    Elle continue à relayer la même information erronée et la croit véridique. Que nous recommanderiez-vous?
    C'est intéressant. Est‑ce vraiment important que quelqu'un l'ait relayée trois ou quatre fois? Je regarde cela et j'en conclus que l'information a été transmise à quelques reprises. Les gens trouvent la nouvelle intéressante et marquante. Est‑il important qu'ils pensent que la personne est décédée plusieurs fois?
    À mon avis, ce qui compte, c'est la vraie désinformation qui vous induit en erreur en vous faisant croire à quelque chose d'extrêmement préjudiciable, surtout sur le plan sociétal ou politique, et qui vous amène à vous comporter ou à réagir d'une certaine manière qui pourrait modifier votre décision quant à votre intention de vote ou, dans le cas d'un politologue, modifier son comportement et ce qu'il a l'intention de prodiguer comme conseils ou encore, dans le cas d'une personne instable, l'amener peut-être à poser un geste violent.
(1730)
    À cet égard, parlons maintenant des créateurs d'information. J'aimerais me concentrer sur les parlementaires ou les candidats politiques.
    J'ose croire que nous avons la responsabilité de diffuser des renseignements exacts. Il n'y a peut-être pas de règles qui nous empêchent de diffuser de la désinformation, mais je suppose qu'il devrait y avoir une évaluation éthique ou, à la rigueur, une évaluation interne de ce que nous diffusons.
    Je vais donner l'exemple de ce qui se passe au sud de la frontière, où un candidat à la présidence a envoyé de la désinformation au sujet de la FEMA, soit l'agence américaine chargée des secours d'urgence, pendant l'ouragan. En tant que parlementaires, en tant que candidats politiques, nous avons la responsabilité de ne pas diffuser de renseignements erronés qui pourraient mettre la vie des gens en danger. Êtes-vous d'accord?
    Comment pouvons-nous nous assurer que les personnes qui occupent ces postes d'influence comprennent que les ramifications de ce qui est diffusé ont des conséquences réelles?
    Quand on pose une question à quelqu'un dans le domaine politique, il est rare que celui‑ci admette ne pas connaître une réponse. Il faut de l'humilité pour dire simplement: « Vous savez, laissez-moi vérifier et vous revenir là‑dessus. Je ne connais vraiment pas la réponse. » Voilà des phrases que l'on entend rarement, et j'estime qu'elles devraient être jugées acceptables. Vous ne pouvez pas vous souvenir de tout. Quelqu'un ne peut pas vous chuchoter les réponses à l'oreille à chaque instant pour que tout soit parfait. Par exemple, vous allez écorcher mon nom; c'est compliqué. Il n'y a pas de mal à dire « je ne sais pas ».
    À mon sens, si nous encourageons ce genre d'idée, cela contribuera également à promouvoir le concept qu'il n'y a rien de mal à ne pas connaître une réponse tout de suite et à ne pas réagir. Il est correct de dire: « Laissez-moi vérifier l'information. Vous l'avez portée à mon attention. C'est très intéressant. Laissez-moi l'examiner de plus près. » Nul besoin de répondre à brûle-pourpoint. Il n'y a pas de mal à cela.
    En ce qui a trait aux canaux de communication, lorsque les plateformes de médias sociaux — et je vais donner l'exemple de X, anciennement Twitter — permettent la diffusion de mésinformation et de désinformation, quel est le rôle des géants des médias sociaux en ce qui concerne leur responsabilité de vérifier les faits?
    J'ai l'impression que le Canada a vraiment essayé de faire pression sur les géants des médias pour qu'ils vérifient les faits, et ce qui s'est passé, c'est qu'ils ont fait marche arrière, évidemment, comme vous le savez, et ils ont éliminé tout accès. Malheureusement, cela nuit aux Canadiens d'une manière différente.
    Je ne sais pas s'il y a vraiment une bonne réponse de mon côté, alors je m'en excuse. Je ne pense pas avoir de solution ni même d'idée à proposer à ce sujet. Malheureusement, j'ai des opinions négatives à ce sujet. Je pense qu'il y aura des abus.
    Monsieur McAndrews, je n'ai pas eu l'occasion de vous poser des questions, et il ne me reste plus de temps, mais je voulais simplement vous remercier de nous avoir donné cette information concernant le numéro de juin de la revue Nature. J'y jetterai un coup d'œil. Merci.
    Merci, madame Romanado.

[Français]

     Monsieur Villemure, vous avez maintenant la parole pour deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Kushwaha, je vais vous poser une question difficile. Depuis les 20 dernières années, on assiste à la disparition des agences de presse du type de l'Agence France-Presse. En effet, il y en a moins qu'avant. Les médias s'abreuvent donc aux quelques sources qui demeurent.
    Personnellement, je me souviens que, lors de mon passage en Afrique, en 2012 — j'étais en Libye — l'assassinat de Mouammar Kadhafi avait été rapporté différemment en Amérique et en Afrique.
    Ayant peu de sources de nouvelles auxquelles s'abreuver et puisqu'une foule de médias sociaux disséminent de la désinformation, comment peut-on savoir ce qui se passe aujourd'hui quant à la situation en Israël et en Palestine?
    Il y a plusieurs sources, aujourd'hui. Je connais des gens qui vont chercher de l'information sur Telegram ou Signal. Dans des petits groupes WhatsApp, par exemple, il y a un peu de vidéos ou des…
    Ce n'est pas pour M. Tout‑le‑Monde.
    En effet. C'est difficile.

[Traduction]

    Je ne pense vraiment pas que les gens se soucient autant de la vie humaine et de la dignité humaine que nous le pensons. Si c'était le cas, on ferait cesser immédiatement les tueries et les démembrements, et on n'aurait pas besoin de diffuser des vidéos d'événements horribles ou d'enfants retrouvés morts sur les rives, comme nous en avons été témoins. On n'aurait pas non plus à se faire rappeler que tel ou tel incident se soit produit il y a 9 ou 10 ans en se contentant de dire: « Ah, oui, je m'en souviens. » Que faisons-nous de concret à cet égard?
    Si vous vous souciez vraiment de la vie humaine et de la dignité humaine, faites quelque chose.
(1735)

[Français]

     Monsieur McAndrews, je vous pose la même question: comment M. Tout‑le‑Monde peut-il savoir ce qui se passe quant à la situation en Israël et en Palestine, vu l'absence de sources crédibles comme des agences de presse et vu tout ce qu'on peut lire partout?

[Traduction]

    Le conflit israélo-palestinien n'est pas mon domaine d'expertise, mais je me ferai un plaisir d'en parler de façon générale. À mon avis, les différents acteurs doivent avoir les moyens de détecter la mésinformation de manière souple et rapide, puis le tout peut être communiqué publiquement ou sur les plateformes afin que l'on prenne d'éventuelles mesures d'atténuation.
    Les connaissances civiques et scientifiques en matière de médias sont essentielles. Le Comité a entendu HabiloMédias et des experts civiques dans ce domaine, et il devrait continuer d'en apprendre plus à ce sujet et de soutenir les efforts visant à promouvoir les connaissances médiatiques et scientifiques. Le tout doit être fondé sur des données probantes et à jour, et les chercheurs peuvent jouer un rôle pour faire en sorte que ces ressources suivent le rythme des avancées technologiques.

[Français]

     Le citoyen ne sait pas si les sources se basent sur des faits ou des fabulations. À mon avis, le problème, c'est que la crédibilité des médias a été entachée. Aujourd'hui, quelqu'un ayant une opinion sur tel sujet, par exemple sur le vaccin, peut dire n'importe quoi, et on ne peut pas savoir ce qui est vrai. Plus tôt, M. Kushwaha disait que la vérité importait peu. Prenons l'exemple d'une vieille tante qui veut s'informer d'un sujet: elle ne saura jamais si les informations sont vraies ou fausses.
    Il s'agit en effet d'une difficulté, comme je l'ai dit à M. Kushwaha avant la réunion d'aujourd'hui.
    Merci, monsieur Villemure.

[Traduction]

    Monsieur Green, vous avez deux minutes et demie. Allez‑y.
    Merci beaucoup.
    Monsieur McAndrews, pouvez-vous donner des exemples — je sais que vous avez mentionné l'exemple européen — pour ce qui est des pratiques exemplaires dans d'autres pays en vue de contrer les effets de la désinformation, de la mésinformation et de la malinformation dans le travail des parlementaires?
    C'est une excellente question, et je propose de présenter au Comité un mémoire plus détaillé à ce sujet.
    Ce serait très utile, et nous vous encourageons à le faire. Comme vous le savez, vos témoignages sont à la base des recommandations de fond. Ce n'est pas nous qui les formulons dans le cadre de ces études. Cela vient vraiment des experts en la matière.
    Vous pourriez peut-être nous parler un peu de certaines notions erronées sur la mésinformation, la désinformation et la malinformation que vous pourriez avoir relevées dans le cadre de vos recherches — notions erronées qui pourraient être généralement acceptées, mais qui ne constituent peut-être pas la vérité en ce qui concerne ces sujets.
    J'ai deux observations à faire.
    Toujours selon un récent numéro de la revue Nature, il se peut que nous nous trompions à l'égard du volume de désinformation sur les médias sociaux. Nous le surestimons peut-être. C'est pourquoi il est important que les chercheurs aient accès à ces données afin de maintenir la capacité de détecter les cas de mésinformation et de désinformation avec souplesse, mais nous surestimons peut-être la prévalence de la mésinformation. Mes collègues de l'Observatoire de l'écosystème médiatique mesurent la prévalence de la désinformation d'une certaine façon, et cette estimation me paraît assez basse. Ces renseignements sont disponibles dans leurs rapports mensuels sur la situation. Voilà pour le premier aspect.
    Deuxièmement, il y a la relation de cause à effet. Nous pouvons imaginer ou craindre, en effet, que la mésinformation sur les médias sociaux polarise les gens, mais l'autre possibilité, c'est que des personnes aux opinions radicales soient exposées à la désinformation sur les médias sociaux. Il est important de remédier à ce genre d'incertitude au moyen de recherches scientifiques publiques et de grande qualité, et ce, de façon continue, car il s'agit d'une cible mouvante. Cette technologie évolue, et il faut donc une attention soutenue au Canada. Une grande partie de cette recherche se fait aux États-Unis, mais on ne peut pas comparer le Canada aux États-Unis. Il est tout à fait nécessaire d'effectuer également une telle recherche ici, au Canada.
    J'aurais tendance à être d'accord.
    Merci beaucoup aux deux témoins de s'être joints à nous aujourd'hui.
    Je n'ai pas d'autres questions. Merci.
    Merci, monsieur Green.
    Nous avons le temps pour deux interventions de deux minutes et demie, et j'aurais ensuite besoin d'un peu de temps avant la fin de la séance pour parler de la correspondance que X a envoyée aujourd'hui aux membres du Comité. Nous devons simplement en discuter vite fait après la période des questions, mais je m'attends à ce que ce soit très bref.
    Monsieur Barrett, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
(1740)
    Nous avons entendu parler d'entités étrangères hostiles et de régimes étrangers qui financent la violence, comme les manifestations pro-Hamas, pro-terreur et antisémites que nous avons vues dans les rues canadiennes, sans qu'il y ait de conséquences. C'est le résultat de l'incapacité du gouvernement à désigner ces groupes pour ce qu'ils sont. Samidoun en est un exemple; ce groupe jouit actuellement du statut d'organisme sans but lucratif au Canada. Les Houthis au Canada sont légalement autorisés à recueillir des fonds, à faire du recrutement et à s'associer. Les deux devraient être clairement bannis.
    Que devrait faire le gouvernement pour détecter cette ingérence soutenue par des étrangers, ingérence qui mène à l'intimidation d'acteurs tant politiques que non politiques et à la promotion de la haine dans nos rues? C'est très clair dans les deux cas. Les gens peuvent s'en rendre compte par la simple observation et le recours aux renseignements de source ouverte, mais ces groupes proclament eux-mêmes ce qu'ils font.
    Nous avons affirmé qu'il faut les bannir. Que devrait faire le gouvernement pour détecter ces activités de manière proactive?
    Qui ne dit mot consent. Ainsi, les Canadiens pourraient croire que l'information diffusée par ces acteurs malveillants est acceptable. C'est légitimé par le gouvernement parce qu'il n'a pris aucune mesure pour criminaliser ces groupes.
    C'est intéressant: « Qui ne dit mot consent. »
    J'ose espérer que la population a le bon sens de faire des recherches, de prendre des décisions éclairées et de formuler ses propres conclusions, mais je vois où vous voulez en venir. Je comprends ce que vous essayez de décrire.
    Que peut faire le gouvernement?
    Du point de vue des politiques, il y a déjà beaucoup de choses en place. Le problème, c'est que les fonds proviennent de nombreuses sources. À notre centre, nous avons toute une équipe de technologues, et nous avons été en mesure de suivre les transactions en cryptomonnaie provenant de sources étrangères, mais je vois aussi des transactions en provenance du Canada. J'ai trouvé des organisations au Canada qui s'occupent de traiter les transactions en les dirigeant vers une entité unique, qui est ensuite chargée de redistribuer le tout, de sorte qu'il devient impossible d'en déterminer la source et la destination.
    Même si on peut voir les portefeuilles, on ne sait pas exactement à qui ils appartiennent. On voit toutefois que des transactions ont bel et bien lieu, et cela complique les choses, car on a l'impression que les fonds entrent et sortent en même temps. Par conséquent, n'exerçons-nous pas une certaine forme d'influence sur les autres autant qu'ils en exercent sur nous?
    Si ce sont les citoyens qui font ces transactions, celles‑ci pourraient être considérées comme illégales. Il faut avoir des preuves et démontrer l'intention, du moins au Canada. À mon avis, cette tâche est très difficile dans le domaine financier, même pour le CANAFE ou la GRC, parce que ces portefeuilles sont censés être anonymes.
    Merci, monsieur Kushwaha.
    Madame Shanahan, vous avez deux minutes et demie.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Kushwaha, je vais parler en français, parce que c'est un sujet très intéressant pour mes concitoyens de Châteauguay—Lacolle, circonscription qui s'appellera bientôt Châteauguay—Les Jardins‑de‑Napierville.
    Nous sommes de grands consommateurs de plateformes comme Facebook, Instagram et TikTok, entre autres. Nous avons entendu des témoignages concernant Tenet Media, à Montréal, une entreprise qui a participé à une campagne de désinformation russe.
    Quelles seraient les meilleures étapes à suivre, les meilleures mesures à prendre afin de protéger les Canadiens et les Canadiennes, y compris d'eux-mêmes, relativement à ce genre de campagne?
     C'est intéressant. Nous sommes en train de faire une étude en ce moment sur les plateformes en ligne les plus utilisées.
    Prenons l'exemple de TikTok et d'autres services qui peuvent être offerts en chinois. Il y a aussi Instagram, qui est plutôt aux États‑Unis, et Facebook. Séparément, on constate que les utilisateurs d'Instagram au Canada sont beaucoup plus nombreux que les utilisateurs de TikTok. Les utilisateurs d'Instagram en général sont beaucoup plus nombreux que les utilisateurs de TikTok. Il est donc très intéressant de voir que nos partenaires aux États‑Unis sont en train de mettre en place des lois pour réglementer l'utilisation de TikTok, mais pas vraiment celle d'Instagram.
(1745)
    D'accord. C'est intéressant. D'après vous, pourquoi est-ce le cas? Est-ce parce que c'est une compagnie américaine?
    Je ne sais pas pourquoi c'est ainsi, mais je pense qu'on ne veut pas mettre en place des services qui permettraient facilement à des gens de faire passer de l'information venant de la Chine ou d'autres pays, et non pas des États‑Unis.
    Au Canada, nous n'avons pas ces services. Il est donc vraiment difficile pour le Canada de réglementer et de gérer les informations qui sont transmises aux gens.
    Ces compagnies ne sont pas basées au Canada.
    Voyez-vous de nouvelles tendances dans ce genre de désinformation en ce qui concerne ChatGPT ou l'intelligence artificielle? Que voyez-vous là-dedans?
     Je suis désolé, madame Shanahan, mais il faudrait que le témoin donne une réponse très brève.
    Oui.
    Je pense que ceux qui n'utilisent pas ces services seront à la traîne. Il faudra les utiliser, même à l'école. Ce sera normal de le faire.
    Merci.

[Traduction]

    Messieurs Kushwaha et McAndrews, je tiens à vous remercier d'avoir comparu devant le Comité aujourd'hui. Vous nous avez fourni d'excellents renseignements. En tant que président et au nom du Comité, je vous suis vraiment reconnaissant du temps que vous nous avez consacré aujourd'hui.
    Je vais libérer les témoins. Nous avons quelques questions à régler.
    Plus tôt aujourd'hui, chaque membre du Comité a reçu une lettre de X. Comme je l'ai mentionné au Comité mardi, le plan consiste à faire venir ici les entreprises de médias sociaux après le congé de l'Action de grâces. Les représentants de X ont demandé de comparaître à huis clos. En général, le Comité n'a pas l'habitude de recevoir des témoins à huis clos. Ils ont donné leurs raisons. Le hic, c'est que je dois savoir ce que le Comité en pense et comment il souhaite procéder. La décision doit revenir au Comité.
    Je vais d'abord vous donner la parole, madame Khalid, puis ce sera au tour de M. Green.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Comme je l'ai dit à maintes reprises, ce rapport, cette étude, est d'une grande importance. Il serait extrêmement dommage qu'une entreprise comme X, qui a tous les privilèges de contrôler le discours public, ne puisse pas comparaître devant nous et s'exprimer publiquement.
    J'aimerais que son témoignage figure au compte rendu, et je pense que les Canadiens doivent entendre ses représentants et savoir ce qu'ils ont à dire publiquement, parce qu'ils doivent rendre des comptes après tout.
    Je vous remercie.
    Cela dit, s'ils comparaissent devant le Comité — et nous allons leur lancer une autre invitation, si le Comité le souhaite publiquement —, ils peuvent répondre comme bon leur semble. À mon avis, s'ils estiment que des renseignements sont de nature très délicate, ils n'ont qu'à nous le dire. Encore une fois, je suis d'accord avec vous. Ils bénéficient des mêmes privilèges et protections que nous, les députés.
    La parole est à M. Green, qui sera suivi de Mme Romanado.
    Très franchement, monsieur le président, je trouve surprenant que ce soit leur première réaction. Voilà une plateforme qui prétend être une place publique numérique, mais qui demande, dès le départ, à comparaître à huis clos dans une tribune publique. Elon Musk ne bénéficie pas de droits spéciaux, et X non plus. Tout le monde se présente devant le Comité et témoigne en public.
    Je ne suis pas d'accord. Même s'il est vrai qu'ils peuvent dire ce qu'ils veulent, les comités ont le pouvoir de convoquer des personnes et d'exiger la production de preuves et de documents. S'ils se présentent devant le Comité et tentent de faire de l'obstruction de quelque façon que ce soit, ils se rendront, à mon avis, coupables d'outrage au Comité. Par conséquent, nous exigeons et attendons des réponses complètes et sincères.
    Bien franchement, je me fiche de savoir ce qui se passe aux États-Unis. Je veux que les représentants des plateformes de médias sociaux se présentent ici. Je veux qu'ils témoignent en public, et le tout doit figurer au compte rendu.
(1750)
    Merci, monsieur Green.
    Je vais donner la parole à M. Barrett.
    Je me contenterai de répéter brièvement un des points soulevés par M. Green, à savoir que n'importe quel témoin peut dire qu'il ne préfère pas communiquer un élément d'information, mais, au bout du compte, l'information que nous demandons dépend de nous. Nous avons obtenu des résultats satisfaisants au sein de notre comité chaque fois que vous avez informé les témoins de leur obligation de fournir des renseignements.
    Écoutez, nous recevons les témoins en séance publique. Il n'y a pas de précédent ni de traitement de faveur ailleurs pour les plateformes. Franchement, les choses se passent beaucoup plus en douceur pour leurs représentants devant les comités parlementaires que lors des audiences du Congrès.
    Nous pouvons leur répondre en toute diplomatie, mais vous pourriez leur faire savoir que nous avons hâte de les entendre en public. Ils peuvent se présenter sur invitation ou sommation, mais ce sera une séance publique dans un cas comme dans l'autre.
    D'accord. Il y a deux formes de communication. Les témoins peuvent comparaître devant nous pour témoigner de vive voix ou, comme solution de rechange, ils peuvent nous remettre des observations par écrit. Nous avons offert cette option à d'autres témoins.
    Monsieur Villemure, vous avez la parole.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Quand on se qualifie soi-même de média social, être en place dans la société implique une obligation de rendre compte qu'on ne peut éviter. Ils doivent donc venir ici et témoigner en public.

[Traduction]

    Très bien. J'estime que le Comité a décidé à l'unanimité de les inviter à comparaître en public.
    Je me demande quel en sera l'effet sur nos résultats analytiques sur Twitter.
     Des députés: Ha, ha!
    Nous verrons bien.
     Une voix: Certains souffriront plus que d'autres.
    Je vous remercie d'avoir réglé cette question rapidement.
    Écoutez, nous avons repris nos travaux il y a trois semaines. Nous avons eu droit jusqu'ici à une session intéressante. L'Action de grâces approche...
    Cela fait quatre semaines — oui. J'ai perdu le compte.
    Je souhaite à tout le monde une joyeuse Action de grâces. J'espère que vous passerez du bon temps en famille.
    Monsieur Green, lorsque vous reviendrez, assurez-vous d'inviter le fameux coureur à un dîner de célébration, et c'est Mme Khalid qui paiera la note.
     Des députés: Ha, ha!
    Quoi?
    Je vous souhaite un excellent congé de l'Action de grâces, et nous nous reverrons tous à notre retour.
    La séance est levée. Merci.
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