:
La séance est ouverte. Bonjour à tous!
[Français]
Je vous souhaite la bienvenue à la 48e réunion du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique de la Chambre des communes.
[Traduction]
Conformément à l'ordre de la Chambre du 23 juin 2022, la réunion se déroulera selon une formule hybride, c'est‑à‑dire le présentiel pour certains membres et le virtuel pour d'autres, qui utiliseront l'application Zoom.
Veuillez me prévenir des difficultés techniques qui surviendront. Veuillez également noter que nous pourrons devoir suspendre les travaux pendant quelques minutes, pour assurer la pleine participation de tous les membres.
[Français]
Conformément à l'article 108(3)h) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 16 mai 2022, le Comité reprend son étude du système d'accès à l'information et de la protection des renseignements personnels.
[Traduction]
Conformément à sa motion de régie interne concernant les tests de connexion avec les témoins, j'informe le Comité que tous les témoins se sont préalablement pliés à ces tests.
Accueillons maintenant les témoins dans l'ordre de leur prise de parole.
D'abord, le président de la B.C. Freedom of Information and Privacy Association, M. Mike Larsen. Ensuite, les représentants du Canadian Foreign Intelligence History Project: M. Alan Barnes; le membre émérite Norman Paterson. Puis M. Andrew Walter Laszlo Koltun, de l'Association Canadienne des Avocats en Immigration. Enfin, les représentants de l'Union of British Columbia Indian Chiefs: la recherchiste en chef Robyn Laba; la directrice administrative et directrice de la recherche Jody Woods; la secrétaire-trésorière Kukpi7 Wilson.
[Français]
Encore aujourd'hui, nous souhaitons la bienvenue à M. Simard, qui remplace M. Villemure. Soyez le bienvenu, monsieur Simard.
[Traduction]
Monsieur Larsen, vous disposez de cinq minutes pour votre déclaration préliminaire.
:
Bonjour à tous. Merci de votre invitation.
Je me nomme Mike Larsen. Je suis membre du corps professoral et coprésident du département de criminologie de l'Université polytechnique Kwantlen. Je comparais au nom de la B.C. Freedom Information and Privacy Association, la FIPA, en ma qualité de président de cette association.
Je vous parle de mon bureau situé sur les terres ancestrales et traditionnelles non cédées des nations Kwantlen, Katzie, Semiahmoo et Tsawwassen.
La FIPA se félicite de l'occasion qu'on lui offre de venir parler de l'accès du Canada au système d'information et de confidentialité des renseignements. Nous rendons hommage aux membres actuels et antérieurs du Comité, pour avoir lancé cette étude et invité des groupes tels que le nôtre à venir témoigner.
Je ferais cependant preuve de négligence si je me taisais sur le court préavis de l'invitation, reçu lundi pour une comparution le mercredi suivant, ce qui laissait peu de temps pour se préparer. Ayant entendu plusieurs groupes alliés qui militent pour le droit à l'information au Canada se plaindre du caractère déraisonnable du préavis, nous estimons que, en se privant de leur avis, le Comité appauvrit son travail.
Cela étant dit, je précise que mes observations sont accompagnées d'un mémoire exposant notre analyse et nos recommandations, lesquelles s'inspirent d'une question et d'une image.
La question que je me pose est à quoi ressemblerait un accès efficace et sans entrave au système d'information au Canada?
Pour y répondre, il est utile de se représenter un oignon. Nous savons tous que l'oignon renferme plusieurs couches et que la santé de chacune d'elles influe sur celle des autres. Nous savons aussi que la belle apparence de l'oignon peut cacher des couches pourries qui ne se révèlent que quand on le tranche.
Tout comme l'oignon en bonne santé, un accès efficace et sans entrave au système d'information pour le Canada serait constitué de plusieurs couches. Au cœur, nous verrions inscrit dans la loi un devoir robuste de consigner ou de documenter les activités et décisions, qui s'appuierait sur des mesures d'application. Toutes les autres couches de notre système de transparence dépendent de la production d'une documentation complète et exacte sur les décisions prises et les processus suivis par le gouvernement.
La couche suivante, autour du centre, serait le cadre de gestion de l'information, qui serait clair et bien pourvu en ressources et qui permettrait la localisation et l'extraction efficaces des documents. Ce cadre aurait besoin d'appuyer la gestion organisée des documents fédéraux tout en servant de base à une carte accessible au public pour accéder aux collections d'information des organismes publics, comme aide à la recherche.
Fondée sur les éléments centraux d'une obligation de consigner et un cadre efficace de gestion des documents, la couche suivante serait une version actualisée et modernisée de la Loi sur l'accès à l'information, qui aurait besoin de s'inspirer d'un engagement profondément enraciné envers l'idée que le droit à l'information fait partie intégrante du fonctionnement d'une démocratie. Sa portée devrait être large et englober tout le spectre des organismes de l'État, notamment les cabinets des ministres et les entités contrôlées par le gouvernement ou généreusement financées par lui.
Il devrait agir en temps opportun et adhérer au principe selon lequel l'accès retardé est un accès refusé, en imposant des limites claires à la durée des prolongements de requêtes. Il devrait être accessible sans péage à l'entrée ni majoration considérable des droits en cours de route, qui nuisent à la transparence. Il serait guidé par une clause impérative axée sur l'intérêt public qui aurait préséance sur toutes les exemptions dans les cas où l'intérêt public pour la divulgation l'emporte sur celui du secret.
De plus, il limiterait vraiment l'application des exemptions et des exceptions en assurant, par exemple, que les interprétations excessivement larges d'avis stratégiques n'autoriseraient pas le refus de communiquer au public des renseignements importants. Fait important, une telle loi aurait besoin d'être appuyée par un commissariat à l'information doté d'importants pouvoirs d'enquête, de prise d'ordonnances et d'exécution.
La couche suivante serait une culture vivante de l'accès, caractérisée par des engagements sincères envers la transparence, au plus haut niveau de l'État, par la dotation efficace en ressources des bureaux d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels au sein des organismes publics et par une formation adéquate. Il faudrait l'ascendant des niveaux supérieurs pour donner le ton, en se chargeant de la responsabilité de transformer les cultures du secret de l'organisation, qui considèrent comme un risque l'accès à l'information, en cultures de la transparence qui reconnaissent comme un droit l'accès à l'information.
Nous arrivons enfin à la couche extérieure, un mécanisme de divulgation proactive reposant sur toutes les couches sous-jacentes et qui exige des organismes publics qu'ils publient de manière automatique et proactive les catégories de documents fréquemment demandés et ceux dont la divulgation est d'intérêt public. Ce mécanisme contribuerait beaucoup à résorber les retards systématiques en répondant aux besoins de transparence, sans reposer sur une dynamique des réponses aux requêtes.
J'ai voulu décrire rapidement les caractéristiques d'un accès efficace et sans entrave à un système d'information de manière à en accentuer les interconnexions. Hélas! notre système actuel d'information ressemble très peu à cette vision! La loi ne l'oblige pas à consigner les choses par écrit. Il ne couvre pas tout le domaine de l'administration publique. Il se caractérise par des retards et des exemptions pour les documents confidentiels du Cabinet, les conseils d'orientation stratégique, etc., et par l'imposition de droits nuisibles à la transparence. Il est insuffisamment financé, il manque de ressources et il est fragilisé par une culture du secret. Voilà un oignon qui abrite beaucoup de pourriture.
En conclusion, je conseille vivement au Comité de faire preuve d'audace et d'idéalisme et de demander des réformes robustes, dont ont urgemment besoin les lois régissant le droit à l'information au Canada.
Merci.
:
Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie de votre invitation à venir m'exprimer sur la question importante de l'accès à l'information.
Je voudrais soulever un problème qui est passé presque inaperçu jusqu'ici, la difficulté d'accéder aux archives du gouvernement. La discussion sur l'accès à l'information s'est en grande partie focalisée sur les documents courants, mais des obstacles majeurs entravent l'obtention des documents du gouvernement qui remontent à plusieurs décennies. Le système d'accès n'a jamais été conçu à cette fin. Quand la loi est entrée en vigueur, il n'était pas prévu qu'elle remplacerait des mécanismes déjà en place pour l'accès aux documents du gouvernement, mais, concrètement, c'est ce qui est arrivé.
Aujourd'hui, aucun mécanisme ne permet de déclassifier et de publier les archives après un certain temps. La prétendue règle de 30 ans n'existe pas au Canada, seul membre du Groupe des cinq, l'alliance constituée pour la mise en commun du renseignement, à ne pas posséder de système de déclassification des archives.
Mon domaine d'étude est l'histoire du renseignement, mais le problème touche une large gamme d'archives sur le renseignement, la sécurité, les affaires internationales et la défense. La plupart des archives du gouvernement canadien sur le renseignement et les affaires internationales qui datent des années 1950 resteront donc inaccessibles jusqu'à ce que quelqu'un formule une requête précise les concernant à la faveur de la Loi sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels. Ces requêtes sont alors examinées suivant le même processus que pour les documents courants. Ignorants du contexte historique des archives, les examinateurs appliquent généralement les mêmes critères au caviardage même si, depuis le temps, les éventuelles sensibilités ont considérablement diminué.
Le gouvernement ne possède aucun mécanisme de suivi des archives déjà déclassifiées, ce qui fait que les ministères consacrent un temps considérable au réexamen des archives déclassifiées ailleurs. Souvent, l'opération prend des années et, dans nos nombreux cas, il aboutit à des plaintes auprès du commissaire à l'information en raison de caviardages abusifs.
Le système actuel embête royalement Bibliothèque et Archives Canada parce qu'il implique que l'immense majorité des archives du gouvernement sur le renseignement, les affaires internationales et la défense ne seront jamais accessibles aux chercheurs, qui sont obligés d'employer le processus prévu par la Loi sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels. Ça signifie également qu'ils ne peuvent que grignoter en surface la masse considérable des archives de l'État détenues par cette organisation.
Le problème touche également d'autres ministères, qui continuent de détenir d'importantes archives, notamment le Bureau du Conseil privé et Affaires mondiales Canada. Ces archives n'ont pas encore été transférées à Bibliothèque et Archives, même si la plupart d'entre elles remontent à plusieurs décennies. Par exemple, le Bureau du Conseil privé détient encore des documents datant de la Seconde Guerre mondiale.
La solution est évidente. Le Canada devrait créer un mécanisme de déclassification, distinct du processus de l'accès à l'information et de protection des renseignements personnels, qui permettrait l'examen et la déclassification proactifs des documents après un délai fixé. Nos alliés ont déjà prouvé que c'était possible. En fait, des mesures limitées ont été prises en ce sens. Sécurité publique Canada anime un projet interministériel de déclassification visant à trouver des moyens pour publier des archives sur le renseignement et la sécurité. Jusqu'ici, cependant, cet effort n'a abouti à la publication d'aucun document.
Le Comité devrait envisager d'inviter des fonctionnaires de Sécurité publique Canada à venir témoigner sur le travail réalisé dans le cadre du projet de déclassification et sur les perspectives visant à rendre accessible aux Canadiens un plus grand nombre d'archives sur le renseignement et la sécurité.
Le gouvernement a souligné à juste titre l'importance de la transparence en matière de renseignement et de sécurité, pour augmenter la confiance du public dans le travail de ces organismes. La publication d'un plus grand nombre d'archives contribuerait à augmenter cette transparence.
Les Canadiens méritent de bien connaître leur histoire, y compris dans les domaines du renseignement, des affaires internationales et de la défense. L'accès convenable aux archives est essentiel à cette connaissance, mais ces documents sont actuellement conservés à l'abri des regards par une loi du Parlement si restrictive qu'elle empêche les chercheurs d'accomplir leur travail.
Merci. Je me réjouis d'avance de vos questions.
:
Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité, pour votre invitation.
Je me nomme Andrew Koltun et je comparais au nom de l'Association Canadienne des Avocats en Immigration, l'ACAI.
L'Association préconise des améliorations aux politiques d'immigration et aux opérations des ministères en matière d'immigration. Elle représente des centaines d'avocats spécialistes de l'immigration de partout au Canada.
Je viens expliquer que, pour les candidats à l'immigration, le système de l'accès à l'information et de protection des renseignements personnels est détraqué par les retards excessifs et déraisonnables. Ces retards entravent l'accès à la justice et engorgent les tribunaux fédéraux. La solution est de limiter légalement à 30 jours les délais de prorogation.
Mes observations se rangent sous quatre rubriques: d'abord, comment les candidats à l'immigration se servent du système; ensuite, les problèmes qu'ils éprouvent; puis les obstacles contre l'accès à la justice imposés par ces problèmes; enfin, des recommandations.
Première rubrique.
Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada est le ministère fédéral qui reçoit le plus de demandes d'accès à l'information: les trois quarts de celles qui sont adressées à un organisme fédéral sous le régime de la Loi sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels. Mais, contrairement aux demandes adressées aux autres ministères, 98,9 % des demandes faites à ce ministère concernent des données personnelles qu'il détient. Des candidats à l'immigration demandent souvent à connaître leur dossier d'immigration et les notes des fonctionnaires qui s'y trouvent. En effet, quand le ministère refuse une décision, il ne motive pas le refus. Pour en connaître les motifs, il faut soit passer par le processus prévu par la loi susmentionnée, soit contester la décision, souvent en Cour fédérale.
Deuxième rubrique. Ce système fondé sur cette loi réserve deux principaux problèmes aux candidats à l'immigration.
Le premier est que le ministère parvient de moins en moins à traiter les demandes d'information dans le délai légal de 30 jours et même à demander des prorogations.
Par le passé, la majorité des demandes faites sous le régime de la loi pour connaître les motifs de refus étaient traitées dans le délai légal de 30 jours. Pendant la COVID, le délai a excédé 60 jours. Mais, depuis quelques mois, une tendance inquiétante se dessine. Le ministère a à la fois cessé de respecter le délai de 30 jours et a même cessé d'envoyer des avis de prorogation quand il ne pouvait respecter le premier délai. À la place, il ne communique tout simplement pas les résultats, et les candidats sont laissés à se morfondre dans l'incertitude du traitement de leur dossier.
Ce qui m'amène au deuxième problème. Même quand une prorogation est accordée, elle est souvent longue et absolument injustifiable. Souvent, le ministère en impose une, générale, de 365 jours pour communiquer une copie du dossier complet d'immigration du candidat. Cette prolongation n'a souvent rien à voir avec le délai nécessaire à la production de ce dossier. Quand la même demande concernant les mêmes documents de demande est faite par la Cour fédérale au ministère, ce dernier peut en produire une copie en une ou deux semaines.
Ce qui m'amène à la troisième rubrique.
Les retards et les prorogations du ministère imposent des obstacles redoutables à l'accès à la justice aux candidats à l'immigration. Jamais, auparavant, la Cour fédérale n'a eu autant d'affaires d'immigration à traiter.
Quand le ministère ne motive pas son refus dans le délai légal de 30 jours, les candidats sont souvent obligés de contester le refus devant la Cour fédérale, simplement pour se servir du pouvoir judiciaire de demander les dossiers pour connaître les motifs du refus. À cause de son insouciance pour les dossiers soumis au processus prévu par la loi sur l'accès à l'information, le ministère transforme les juges et les greffiers de la Cour fédérale en agents chargés d'appliquer ce processus.
Tout ça coûte cher. Pour le candidat, qui doit acquitter les frais judiciaires et juridiques; pour la Cour fédérale, qui a souvent besoin, plus que jamais, de plus de personnel à son greffe pour absorber l'accroissement de la charge de travail.
Ce qui m'amène à ma dernière rubrique, nos recommandations. Pour nous attaquer au retard, nous recommandons de modifier la loi pour qu'elle impose un délai rigide de 30 jours aux prolongations applicables. Comme beaucoup d'autres témoins l'ont fait observer à votre comité, un accès retardé est un accès refusé.
J'ai terminé. Je suis prêt à répondre à vos questions.
:
Merci beaucoup, monsieur Koltun.
Vous avez respecté le temps imparti pour toutes les déclarations préliminaires jusqu'à maintenant, ce qui est excellent. Cela nous laissera plus de temps pour les questions.
Nous poursuivons avec Robyn Laba, Jody Woods et la cheffe Wilson, secrétaire-trésorière de l'Union of British Columbia Indian Chiefs, à qui je souhaite la bienvenue.
Je crois savoir, cheffe Wilson, que c'est vous qui allez prendre la parole.
Vous avez cinq minutes pour votre déclaration préliminaire. Allez‑y, s'il vous plaît.
J'appelle de la part des nations Tseil-Waututh, Musqueam et Squamish, et je reconnais leur souveraineté territoriale. Je suis secrétaire-trésorière de l'Union of British Columbia Indian Chiefs et coprésidente du groupe de travail sur les revendications particulières de la Colombie-Britannique. Je vais vous parler de la façon dont le processus fédéral d'accès à l'information compromet l'accès à la justice des Premières Nations dans le règlement de leurs revendications particulières contre le Canada.
Les revendications particulières sont des griefs historiques présentés contre le gouvernement fédéral par les Premières Nations lorsque le Canada ne respecte pas ses obligations en vertu des lois, des traités, des accords ou des politiques de création de réserves de la Couronne. Le processus fédéral de règlement des revendications particulières et le tribunal des revendications particulières exigent que les Premières Nations soumettent des preuves documentaires à l'appui de leurs revendications contre la Couronne. La plupart de ces preuves sont toutefois détenues par des ministères et des organismes fédéraux, comme Relations Couronne-Autochtones, Services aux Autochtones Canada et Bibliothèque et Archives Canada.
Les Premières Nations doivent donc se prévaloir de la Loi sur l'accès à l'information et de la Loi sur la protection des renseignements personnels pour obtenir les documents détenus par le gouvernement fédéral afin de satisfaire aux exigences de la politique sur les revendications particulières pour le dépôt des revendications. Étant donné que les Premières Nations doivent obtenir des milliers de documents détenus par les ministères fédéraux pour étayer leurs revendications contre la Couronne, le droit d'accès à l'information est un élément fondamental de l'accès des Premières Nations à la justice.
L'indemnisation juste et équitable pour les pertes historiques — un droit énoncé à l'article 28 de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones — est donc un impératif politique si nous voulons progresser vers la réconciliation. Les tribunaux et tous les ordres de gouvernement ont statué que la réconciliation est dans l'intérêt public et que c'est une priorité politique. Les Premières Nations jouissent de droits uniques en matière de souveraineté des données, aux termes de la déclaration des Nations unies et des lois, des protocoles et des structures de gouvernance des Premières Nations.
Parmi les informations incluses dans la définition admise de « données sur les Premières Nations » figurent les informations sur les réserves et les territoires ancestraux des Premières Nations, sur les eaux, les ressources et l'environnement. Le gouvernement fédéral a l'obligation juridique, en vertu de la Loi relative à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, de veiller à ce que toutes les mesures nécessaires soient prises pour faire respecter la déclaration des Nations unies et atteindre ses objectifs.
Dans les lettres de mandat que le a remises aux ministres le 16 décembre 2021, il demande à chacun de mettre en œuvre la déclaration des Nations unies et de travailler en partenariat avec les peuples autochtones pour faire progresser leurs droits. Cela sous-entend de préserver l'honneur de la Couronne dans toutes leurs interactions avec les Premières Nations. Il est nécessaire de veiller à ce que les Premières Nations aient pleinement accès aux documents dont elles ont besoin pour étayer leurs revendications afin de faire respecter la loi et de servir l'intérêt public.
Des revendications particulières sont présentées lorsque le Canada ne respecte pas ses obligations juridiques envers les Premières Nations. La politique du Canada sur les revendications particulières exige que les Premières Nations justifient leurs revendications au moyen de preuves documentaires. La plupart des preuves historiques dont les Premières Nations ont besoin pour appuyer leurs revendications sont la propriété du Canada et des organismes fédéraux. Étant donné que c'est le Canada qui contrôle l'accès à ces preuves, les Premières Nations sont tenues d'invoquer la Loi sur l'accès à l'information et la Loi sur la protection des renseignements personnels pour étayer leurs revendications historiques contre la Couronne. Il s'agit d'un conflit d'intérêts injuste et insoutenable. Le conflit d'intérêts dans lequel se trouve le Canada est le principal obstacle à l'accès complet et équitable des Premières Nations à la justice. Les problèmes systémiques qui accablent le processus d'accès à l'information entravent l'accès des Premières Nations à la justice. Il y a les longs délais de réponse, les vastes exemptions appliquées de manière incohérente et les recours législatifs inefficaces.
L'engagement du Canada à nouer un véritable dialogue avec les Premières Nations est loin de produire les résultats escomptés, et on reste loin d'atteindre les normes minimales pour l'obtention du consentement libre, préalable et éclairé des Premières Nations, conformément à l'article 40 de la déclaration des Nations Unies. Les principes des droits de la personne (tels que l'autodétermination, le respect des droits et des titres des Premières Nations et l'obtention du consentement préalable, libre et éclairé des Premières Nations) doivent être intégrés à la base même de tous les processus d'élaboration, de révision et de modification de la loi fédérale sur l'accès à l'information et des mécanismes réglementaires et administratifs connexes.
Le conflit d'intérêts dans lequel se trouve le Canada dans le contrôle de l'accès des Premières Nations aux documents doit être entièrement éliminé. Le Conseil du Trésor et le ministère de la Justice doivent travailler en partenariat avec les Premières Nations et leurs organisations respectives à l'établissement d'un nouveau régime de gestion de l'information. Ce régime doit respecter les droits des Premières Nations, tels qu'ils sont énoncés dans la déclaration des Nations unies.
D'ici là, le Canada doit reconnaître son devoir de divulgation complète et respecter l'honneur de la Couronne en travaillant en partenariat avec les Premières Nations afin d'élaborer un mécanisme de surveillance indépendant qui assure aux Premières Nations un accès complet et rapide aux documents.
Le Canada doit faire des demandes d'accès à l'information des chercheurs affectés aux revendications des Premières Nations une priorité en embauchant du personnel supplémentaire spécialement pour accélérer le traitement des demandes existantes et imminentes.
Les analystes et les agents d'information du Canada doivent être informés des revendications propres aux Premières Nations, de leurs droits de recours et de leurs droits à l'information, ainsi que de l'impératif de réconciliation entre la Couronne et les Autochtones.
Le Canada doit faire de l'objectif de nouer un véritable dialogue directement avec les Premières Nations et leurs organisations représentatives une priorité dès le début de tout travail stratégique.
Merci.
Il y a encore énormément de pans de l'histoire dont la diffusion reste restreinte. Je les classe, en gros, dans les catégories suivantes: renseignement, sécurité, affaires internationales et défense. Essentiellement, ce sont les domaines de l'histoire qui sont touchés par l'article 15 de la Loi sur l'accès à l'information, qui prévoit des exemptions pour tout ce qui pourrait nuire aux affaires internationales canadiennes, à la défense, etc.
Un très grand nombre de sujets historiques demeurent à diffusion restreinte, notamment les événements survenus pendant la plus grande partie de la guerre froide et depuis. Il y a beaucoup d'autres enjeux diplomatiques et autres sur lesquels il est très difficile d'obtenir des documents.
:
Je vous remercie. C'est une excellente question.
Le fait de ne pas avoir accès à son dossier d'immigration, et plus précisément aux documents que détient déjà IRCC, peut avoir de lourdes conséquences lorsqu'un demandeur fait une autre demande ultérieurement.
Lorsqu'un demandeur soumet une demande en ligne au moyen du portail d'IRCC, il ne reçoit pas de copie des documents qu'il a soumis. Une fois qu'un document est entre les mains du gouvernement, il reste entre les mains du gouvernement.
De plus en plus, quand les gens soumettent des demandes numériques, les disques durs se brisent, les gens changent d'ordinateur et les demandeurs peuvent facilement perdre la trace de ce qu'ils ont soumis. Quand un demandeur n'a pas accès à ses anciens dossiers, il ne peut pas comprendre pourquoi sa demande a été refusée. Sans notes, il ne sait pas sur quoi s'appuie le raisonnement de l'agent. Il n'a pas accès aux dossiers pour faire sa propre analyse et vérifier s'il manque une signature quelque part. Il ne peut pas en juger.
Ainsi, lorsque le traitement de la demande s'étire particulièrement et qu'un demandeur est refusé, il doit attendre la totalité du délai prescrit pour pouvoir présenter une nouvelle demande plus solide qui lui permettra de surmonter le motif du refus.
:
Il y aurait deux aspects, l'un relève de la compétence de ce comité et l'autre, plutôt de la compétence du comité de l'immigration.
Il faudrait d'abord imposer un délai de 30 jours et préciser que les prolongations ne peuvent excéder 30 jours. Cela aiderait de nombreux candidats à l'immigration, parce que souvent, il y a une limite de temps pour répondre aux refus et les contester. Le fait de limiter la prolongation à 30 jours les obligerait à respecter les délais.
Ensuite — et vous pourrez en discuter avec vos collègues du comité de la citoyenneté et de l'immigration —, la solution serait qu'IRCC fournisse automatiquement les raisons du refus dans ses lettres de refus. IRCC a promis qu'elle réfléchirait à cette possibilité lorsqu'elle a répondu à l'enquête systémique de la commissaire à l'information menée de 2018 en 2020. Cela n'a toujours pas produit de résultat.
De même, IRCC n'a pas consulté les parties prenantes ni les avocats en matière d'immigration pour faire de cette initiative une réalité.
:
Il y a divers aspects des dispositions actuelles qui rendent très difficile l'accès aux documents historiques.
C'est en grande partie parce que le gouvernement ne sait pas vraiment ce qu'il a déjà publié. Ces documents sont éparpillés entre différents ministères. Dans certains cas, j'ai réussi à obtenir des documents, puis j'ai demandé un document similaire à un autre ministère. Les ministères n'ont aucun moyen de savoir ce qui a déjà été divulgué par un autre ministère, leurs fonctionnaires passent donc énormément de temps à réexaminer des documents qui ont déjà été divulgués. Ils ne sont tout simplement pas au courant de ce qui a déjà été rendu public, et ils ont encore une vision très étroite de ce qu'ils pensent pouvoir divulguer.
C'est un problème, puis les gens des ministères se plaignent d'être submergés alors qu'ils ne font que se créer du travail supplémentaire.
Les autres problèmes fondamentaux sont davantage liés à la gestion de l'information, par exemple, mais ils se répercutent sur l'accès, parce que si un chercheur n'est pas au courant de l'existence d'un document en particulier, il ne peut pas vraiment le demander. Les demandes d'informations générales sur un sujet donné sont toujours maladroites. Elles ne permettent généralement pas d'obtenir d'informations utiles. Il est beaucoup plus efficace de demander un document d'archives précis, mais comme je l'ai dit, si le chercheur ne sait pas qu'il existe, alors il ne peut pas en faire la demande.
C'est une question complexe, parce qu'il est très important, surtout à la lumière de la déclaration des Nations Unies, de reconnaître les droits autochtones à la souveraineté en matière de données dans l'établissement d'un mécanisme par lequel les Premières Nations pourront obtenir les renseignements les concernant, surtout dans le cadre de démarches judiciaires comme celles des revendications particulières. On travaille actuellement à la mise sur pied d'un centre indépendant pour la résolution des revendications particulières. L'annonce en a été faite la semaine dernière, ou il y a quelques semaines, si je ne me trompe pas. On envisage de créer un mécanisme par lequel l'information circulerait librement vers les Premières Nations engagées dans le processus, sans qu'elle doive être examinée d'abord par le Canada, qui est partie aux revendications.
La question de la souveraineté des données est plus complexe. Dans ce cas, les organes directeurs des Premières Nations doivent être mis à contribution à toutes les étapes, parce que ce sont eux qui sont propriétaires de l'information.
C'est un processus complexe, mais il faut à tout le moins qu'il y ait une sorte de surveillance indépendante dans l'intervalle pour garantir que les Premières Nations engagées dans des démarches judiciaires, en particulier contre la Couronne, aient pleinement accès aux informations auxquelles elles ont droit.
:
Je vais répondre, et je vais aussi demander à Mme Laba si elle a quelque chose à ajouter ensuite.
Il est certain que cette situation rend les choses difficiles. Nous ne savons jamais avec certitude si nous fournissons tous les documents qui existent. C'est souvent vrai lorsque le Canada examine des revendications particulières que nous présentons et qu'il nous transmet certains documents que nous n'avons jamais été en mesure de trouver ou d'obtenir, habituellement sans nous donner un contexte, dois‑je dire honnêtement.
En outre, en ce qui concerne les données, nous sommes confrontés à deux délais d'attente importants, notamment des centaines de jours. Dans un cas, nous avions prévu des années en raison de l'ampleur de la demande, qui est nécessaire pour le type de travail que nous faisons. Il y a toujours des délais d'attente. Ils constituent très clairement des obstacles à l'accès à la justice chez les Premières Nations.
Madame Laba, voulez-vous ajouter quelque chose?
:
J'ai une seule chose à ajouter, très rapidement, pour faire écho aux propos de M. Barnes au sujet de l'accès aux documents historiques.
En particulier, le ministère des Relations Couronne-Autochtones nous a dit qu'il a pour politique de ne pas transmettre des documents historiques. Je parle de documents qui remontent à plus d'une centaine d'années. Il n'a pas à transférer des documents à Bibliothèque et Archives Canada s'il peut justifier qu'il doit les conserver. Nous ne savons absolument pas quels documents possède le ministère, car on ne nous donne pas accès à sa liste des documents. Nous ne savons même pas quels documents sont en sa possession.
Occasionnellement, comme Mme Woods l'a mentionné, lorsque le Canada examine des revendications, nous obtenons des documents de façon arbitraire. Si nous ne sommes pas au courant des documents qui existent, nous ne pouvons certes pas faire preuve de la diligence voulue au nom des Premières Nations qui présentent des revendications juridiques à la Couronne.
Il y a des trous béants en ce qui a trait aux documents historiques. Les Premières Nations n'ont d'autre choix que de présenter des rapports incomplets. Cela nuit à leurs revendications, car elles n'ont pas un portrait complet.
L'UBCIC a l'un des plus importants programmes de recherche sur les revendications particulières au Canada. Nous travaillons sur environ 220 revendications présentées par des Premières Nations de la Colombie-Britannique, qui nous ont confié le mandat de nous en occuper.
La Colombie-Britannique est dans une situation unique en ce sens qu'elle ne compte pas beaucoup de traités historiques. Nos revendications ne concernent habituellement pas des aspects comme le non-respect des promesses consignées dans les traités. Elles portent normalement sur l'aliénation illégale des terres ou des ressources ou bien sur l'incapacité de protéger ou de réserver des terres ou des ressources qui auraient dû l'être en vertu de la loi coloniale. C'est l'un des aspects de notre travail.
Un autre aspect de notre travail consiste à militer en faveur de la réforme des revendications. Nous avons recours aux mécanismes d'accès à l'information dans le cadre de cette partie de notre travail également. Les recherches que nous menons sur les revendications impliquent l'accès aux documents historiques.
Madame Laba, voulez-vous ajouter quelque chose?
:
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Je suis reconnaissant aux témoins qui comparaissent en personne et virtuellement de nous faire profiter de leur expertise.
Je tiens d'abord à vous remercier tous pour votre expertise et vos commentaires aujourd'hui.
Sur le plan pratique, votre témoignage, comme M. Green l'a mentionné, est pris en compte lors de la rédaction de notre rapport et de nos recommandations. Étant donné que le temps est limité pour cette réunion, n'hésitez pas à transmettre ultérieurement au Comité tout ce que vous souhaiteriez ajouter, notamment des recommandations précises que vous n'avez peut-être pas eu le temps de formuler durant la réunion, car tout cela sera également pris en considération.
Je vais poser aux quatre témoins d'aujourd'hui les mêmes questions que j'ai posées à tous les autres témoins.
Il y a deux questions, et la première nécessite seulement un oui ou un non comme réponse. Ensuite, je vais aborder des éléments plus substantiels.
Ma question est la suivante: est‑ce qu'un bon système d'accès à l'information est important pour une démocratie moderne et tout le reste, notamment comprendre notre histoire, la réconciliation et ce genre de choses?
Je vais commencer par M. Koltun. Oui ou non?
Monsieur Koltun, vous avez fait remarquer que les ministères n'ont aucun problème à respecter les obligations en matière de rapports établies par les tribunaux, mais ils sont incapables de répondre en temps opportun aux demandes d'accès à l'information. Je crois que c'est un élément extrêmement important de notre conversation, car, en tant que député, j'ai présenté un certain nombre de demandes d'accès à l'information, et je peux vous dire que, parfois, il faut attendre longtemps, des années avant d'obtenir…
Pouvez-vous nous parler, particulièrement dans votre domaine d'expertise — mais je crois que c'est valable pour l'ensemble du gouvernement —, de la nécessité de permettre un accès en temps opportun aux citoyens ou, dans le domaine de l'immigration, à ceux qui cherchent à obtenir la citoyenneté canadienne, et nous parler de l'importance du bon fonctionnement de ce système? Pouvez-vous mettre cela en évidence?
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Avant de commencer, j'aimerais, à mon tour, reconnaître que nous sommes rassemblés ici sur le territoire non cédé des peuples algonquins de la nation anishinabe.
J'ai deux questions à poser.
D'abord, monsieur Barnes, j'aimerais revenir sur ce que vous venez de dire.
D'une part, vous avez travaillé dans le monde du renseignement de sécurité au Canada et, d'autre part, vous avez fait des recherches sur des questions liées à l'histoire canadienne et sur certaines décisions ont été prises. Vous avez dit que le Royaume‑Uni avait adopté un système presque par défaut. Dès que les documents sont tran qui férés dans leurs archives nationales, les informations y figurant deviennent publiques. Cependant, pour des raisons de sécurité nationale, certains documents sont conservés à part.
Pouvez-vous parler de votre expérience liée à ce qui se passe aux États‑Unis? Ce serait utile pour faire d'autres comparaisons avec les pratiques du Canada.
Depuis que je ne travaille plus au sein du gouvernement, j'ai appris beaucoup plus de choses au sujet du système d'accès à l'information que je n’ai jamais voulu en savoir.
J'ai surtout travaillé sur des dossiers canadiens. Je n'ai jamais consulté les archives britanniques ou américaines, alors je ne connais pas très bien leur fonctionnement.
Le système américain est assez compliqué. Il y a plusieurs éléments. Il y a la loi sur la liberté d'information, qui est similaire à la loi canadienne sur l'accès à l'information, mais il y a aussi d'autres mécanismes permettant de divulguer des documents de façon proactive. Par exemple, les divers organismes du renseignement ont des bureaux responsables de l'histoire, qui divulguent des séries de documents de façon proactive. Par exemple, lors de l'anniversaire de la crise des missiles cubains ou d'un autre événement historique, ces bureaux divulguent un lot de documents, et souvent, une conférence universitaire a lieu en parallèle. Ce concept nous est totalement étranger au Canada.
Le Royaume-Uni a un système différent. Là‑bas, les documents sont divulgués au bout de 30 ans et ils sont versés directement dans les archives, qui sont accessibles. Il y a certaines restrictions, mais même les services du renseignement britanniques ont agi de façon proactive en appuyant la divulgation de documents officiels et autorisés sur l'histoire des diverses agences du renseignement, ce qui a permis d'en apprendre davantage sur la façon dont ces organismes ont fonctionné.
Cela ne s'est pas fait au Canada.
:
Cela touche des questions très complexes sur la gestion des dossiers et ce genre de choses.
En tant que chercheur, j'aimerais qu'il en soit ainsi. Je pense que ce serait très difficile compte tenu de la taille des organisations et de toute la panoplie de documents. Je n'ai pas de solution miracle à proposer quant à la façon de gérer les renseignements. Je pourrais y réfléchir davantage, mais il n'y a pas de solution évidente.
Des mesures ont été prises. Dans le cadre du projet de déclassification que Sécurité publique Canada a lancé, une étude pilote a été menée sur un grand nombre de documents du Comité mixte du renseignement datant des années 1950 et 1960. Les fonctionnaires qui les ont examinés ont déterminé que la plupart de ces documents pouvaient être divulgués. Cependant, les ministères qui possèdent ces documents essaient encore de déterminer ce qu'ils vont en faire. Ils ne sont toujours pas prêts à accepter ce genre de recommandations. Il y a toujours, au sein des ministères, cette culture du secret, de surprotection pour des documents qui ne sont plus aussi sensibles qu'ils ont pu l'être à une époque.
:
J'aimerais préciser quelque chose sur ce point. Lorsque des demandeurs se butent à un refus, ce n'est pas l'accès à leurs documents qui leur est refusé, mais bien leur demande d'immigration. Ils cherchent à connaître les motifs du refus.
Si des gens qui ont fait une demande d'immigration s'adressent à la Cour fédérale, c'est parce qu'elle offre un moyen de contourner le système d'accès à l'information. Le traitement d'une demande d'accès à l'information prend souvent plus de 60 jours, ou plus de 90 jours, ou même parfois jusqu'à un an, alors que lorsqu'une personne s'adresse à la Cour fédérale et que la demande d'autorisation est approuvée, la Cour fédérale rendra une ordonnance et demandera à IRCC de produire le document pour la personne. De même, lorsqu'on dépose un avis de demande d'autorisation et de contrôle judiciaire, la Cour fédérale demande automatiquement à IRCC de produire les motifs du refus.
Voilà pourquoi les demandeurs s'adressent à la Cour fédérale. Dans de nombreux cas, une fois qu'ils ont obtenu ces motifs, ils abandonnent la demande en tant que telle. Ils ne souhaitent pas donner suite au refus. Ils veulent recourir à la Cour fédérale pour obtenir les raisons du refus.
:
Je vous remercie de la question.
Je pense qu'il y a une chose, pour reformuler un peu, et il s'agit de se demander si les retards dans le système sont un bogue ou une caractéristique, et selon le point de vue de qui.
À l'heure actuelle, l'idée qu'il y a des retards systémiques favorise la dissimulation d'information au public, surtout lorsqu'il s'agit de dossiers récents. En tant que spécialiste de la recherche historique, je comprends très bien les difficultés liées à l'accès aux documents historiques, mais bien souvent, nous avons besoin de documents récents.
:
Merci, monsieur le président. Par votre intermédiaire, je commencerai par une question qui s'adresse à la cheffe Wilson, ou peut-être à des membres de son équipe.
Il a été beaucoup question aujourd'hui de la souveraineté sur les données, ce qui est un excellent cadre à une époque où l'information — qu'elle soit sur le Web ou qu'elle soit accessible par d'autres moyens — est presque une forme de monnaie. Comme l'a dit la cheffe Wilson, c'est aussi une voie vers la justice.
À l'heure actuelle, le gouvernement fédéral, en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, protège les renseignements obtenus à titre confidentiel auprès d'autres gouvernements, y compris les gouvernements autochtones. Cependant, la définition actuelle se limite à neuf gouvernements.
À quel point est‑il important d'élargir cette définition pour qu'elle englobe tous les gouvernements autochtones? À quoi cela pourrait‑il ressembler?
Dans sa déclaration préliminaire, la cheffe Wilson a parlé de l'engagement du Canada à nouer un véritable dialogue avec les Premières Nations. Nous avons participé au processus dans le cadre du projet de loi C‑58. Nous avons donné notre point de vue pour ce qui est des documents du ministère de la Justice pour les nations autochtones en ce qui concerne la modernisation de la Loi sur la protection des renseignements personnels, et nous avons collaboré avec le Secrétariat du Conseil du Trésor relativement à ce processus. Or, je dois dire que, bien que tout le monde soit gentil, ces expériences ont été bien en deçà non seulement de nos attentes, mais aussi de ce qui constitue l'engagement du Canada, à notre sens, en vertu de la déclaration des Nations unies. Tout est fait vraiment à la dernière minute. Honnêtement, c'est un peu comme ce processus‑ci, c'est‑à‑dire que nous n'avons eu que deux jours pour nous préparer à la réunion.
La situation était similaire avec le SCT quant aux dispositions sur l'accès à l'information. Dans ce cas, on nous a fait patienter pour nous dire ensuite que nous avions six semaines pour sonder les Premières Nations de partout au Canada et présenter un mémoire.
Il ne s'agit pas d'un partenariat, et c'est pourtant ce dont nous avons besoin. Voilà ce à quoi nous nous attendons.
:
Nos observations d'aujourd'hui sont fondées sur un examen comparatif entre les mécanismes provinciaux de liberté d'information et d'accès à l'information et certains mécanismes internationaux.
À notre avis, l'inclusion du principe de la primauté de l'intérêt public qui permet la publication de renseignements jugés d'intérêt public — de fait, qui exige leur publication, dans certains cas de manière proactive — et qui l'emporte sur les exceptions et les exemptions qui s'appliqueraient autrement à certaines catégories de renseignements est une norme nécessaire pour avoir des lois sur la transparence qui soient robustes et efficaces.
Il existe de nombreux cas où ce principe pourrait être utilisé. Il paraît que c'est l'une des caractéristiques qui définit des lois sur la transparence réfléchies, et nous voulons voir cela au Canada. À l'heure actuelle, nous avons, dans la Loi canadienne sur l'accès à l'information, une disposition très limitée relative à la primauté de l'intérêt public, à l'article 20, qui concerne exclusivement des renseignements provenant de tiers. Ainsi, étendre cette disposition, au minimum, à tous les autres motifs pour lesquels des renseignements pourraient ne pas être divulgués serait un pas très important dans la bonne direction.
J'aimerais maintenant changer de sujet.
Monsieur Larsen, la technologie a beaucoup évolué, et nous constatons une augmentation massive des types de communication. Bien sûr, il y avait autrefois des dossiers dans des classeurs et des lettres envoyées d'un ministère à l'autre par des messagers et ce genre de choses. Aujourd'hui, nous disposons d'une grande diversité de moyens de communications, surtout au sein du gouvernement.
Je me demande si vous avez des commentaires à nous fournir sur la façon dont l'accès à l'information devrait être mis à jour à la lumière de l'élargissement de la portée des moyens de communication. Comment pourrions-nous améliorer l'accès à l'information pour ce qui est, par exemple, de l'utilisation des bases de données technologiques et de la divulgation proactive? Je vais vous demander de répondre en 30 à 45 secondes.
J'aurai ensuite quelques questions pour M. Barnes.
:
Excellent. Je serai bref.
Je pense que c'est une bonne idée que le Comité se penche sur la Public Records Act de 2005 de la Nouvelle-Zélande, qui prévoit une obligation de documentation du travail du gouvernement. Cette loi exige que les personnes qui travaillent pour le gouvernement créent et conservent des registres adéquats qui portent sur leurs activités.
Il existe plusieurs façons de procéder, mais je pense qu'il faut non seulement une exigence législative, mais aussi une norme, afin qu'il n'y ait pas une approche improvisée pour chaque nouveau type de technologie émergente. Il semble que nous sommes toujours en train de courir après les nouvelles technologies plutôt que d'avoir une norme que nous utilisons pour la documentation. Ce serait certainement un point de départ.
Je pense que la modernisation des systèmes que nous utilisons pour la gestion de l'information est une composante essentielle de l'ensemble de ce processus. Les documents doivent être faciles à consulter et à récupérer. Nous devons avoir, par exemple, une architecture de l'information organisée qui intègre de nouvelles formes de technologies, y compris celles que nous utilisons aujourd'hui. Il nous faut élargir la notion de « document » au‑delà de l'idée de documents textuels, car la loi s'applique bien sûr à toutes sortes de documents différents. Nous devons nous assurer que les gens sont facilement capables non seulement de conserver ces documents et de les organiser au sein du gouvernement, mais aussi de comprendre ce qui est disponible et de pouvoir y avoir accès de l'extérieur.
:
Oui. Vous parliez d'un autre mécanisme qui pourrait être utilisé pour traiter les demandes volumineuses.
Je dois dire que j'ai été quelque peu critique envers BAC, et je pense que c'est pour une bonne raison. Cela dit, je pense que BAC a essayé de changer la donne en prenant quelques mesures positives.
Dans le cas de ces demandes très volumineuses, je pense que s'il y a une discussion entre le demandeur et l'institution, il est souvent possible de se concentrer sur ce qui sera le plus utile pour le demandeur.
La commissaire à l'information a maintenant une certaine marge de manœuvre afin d'intervenir sur la question des demandes vexatoires, etc. Je ne sais pas si votre question porte sur ce genre de situation. Il existe un mécanisme pour y remédier.
Je pense que, dans une large mesure, le moyen le plus efficace de répondre à des demandes importantes est d'assurer un échange fructueux entre le demandeur et l'institution.
:
Oui, absolument. Je dirais que ceux que vous avez mentionnés l'ont été à de nombreuses reprises par le passé. On peut donc commencer à travailler sur ce sujet, même si nous ne verrons pas les résultats immédiatement.
Je pense que le renforcement de la divulgation proactive est un mécanisme vraiment important, parce qu'en fin de compte, les gens recherchent des renseignements et utilisent la Loi sur l'accès à l'information, pas nécessairement en dernier recours, mais parce qu'il n'y a pas d'autres moyens facilement accessibles.
Il y a beaucoup de demandes pour des catégories de renseignements ordinaires, mais il n'y a pas assez de directives dans la Loi fédérale sur les processus de divulgation proactive de certaines catégories et de leur mise à disposition. Je pense — et nous le constatons dans d'autres pays — qu'améliorer nos processus permettra d'alléger la pression sur le système, et c'est quelque chose qui peut se produire d'emblée, vraiment, si nous commençons à y travailler immédiatement.
Pour rester fidèle à ma façon de poser mes questions aux témoins à la vitesse de l'éclair, je poserai la question suivante à ceux qui se concentrent sur ce sujet depuis un certain temps.
Le gouvernement a créé le poste de ministre du Gouvernement numérique, ce que j'ai trouvé intéressant. Je croyais que ce dernier était censé apporter quelques améliorations quant à l'utilisation des systèmes informatiques dans l'ensemble du gouvernement. Ce poste a existé de juillet 2018 à octobre 2021, puis on l'a abandonné sans cérémonie.
Monsieur Larsen, avez-vous déjà participé à des consultations avec ce ministère? Avez-vous fourni des commentaires sur les façons qui permettraient de simplifier les services offerts, ce qui pourrait éventuellement inclure l'accès à l'information?
:
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Normalement, je le fais après la séance, mais tant qu'à avoir la parole, je veux remercier non seulement les témoins, mais aussi toutes les personnes qui rendent possible la présente séance, comme la greffière, les analystes et, bien entendu, les employés des TI et des services des immeubles. C'est une brève remarque que je fais avant de passer à mes questions. Souvent, on les remercie après les faits, mais je le fais maintenant avec plaisir.
Monsieur Koltun, je m'interroge à propos d'une situation particulière qui concerne les demandes d'accès à l'information. L'accès à l'information joue un grand rôle, mais a une incidence sur le fonctionnement d'un ministère.
Pouvez-vous traiter de la question de l'accès à l'information et nous dire si le Comité pourrait présenter des recommandations pratiques au gouvernement afin qu'il modifie le système pour que les gens ne soient pas obligés de présenter une demande d'accès à l'information pour obtenir des renseignements de base et d'en présenter une autre pour comprendre pourquoi l'information n'a pas été divulguée ou a été caviardée?
En une minute environ, pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet?
Je vais poursuivre dans le même sens.
Monsieur Koltun, en ce qui concerne les dossiers d'immigration nécessitant une demande d'accès à l'information, quel est le taux d'échec des demandes de cet ordre? Il y a des intervenants qui aident les gens à faire une demande d'accès à l'information. J'ai l'impression qu'il n'y a pas beaucoup de cas où les demandeurs peuvent eux-mêmes compléter une demande. Ils doivent faire appel à des avocats comme vous ou faire affaire avec le bureau de leur député pour voir quel est le problème.
Il est difficile pour moi de savoir quel est le taux de réussite, parce qu'on n'entend jamais parler des dossiers qui se sont bien passés. À mon bureau de circonscription, on ne nous soumet que les cas où les choses vont mal.
De votre côté, vous en savez peut-être plus. Y a-t-il des cas où cela se passe bien?
:
C'est une question juste.
IRCC communique de moins en moins avec les demandeurs. Le traitement des demandes accuse maintenant des années de retard, les arriérés totalisant 2,5 millions de dossiers. Souvent, la seule manière d'avoir une idée de la raison pour laquelle un dossier accuse du retard, c'est de déposer une demande d'accès à l'information.
Les avocats en immigration ont-ils coutume de présenter une demande d'accès à l'information pour tous les clients? De façon générale, oui. Ce n'est pas pour embourber le système, mais parce qu'il n'y a aucun autre renseignement pour les personnes qui font une demande d'immigration. Elles ne peuvent pas se présenter à un bureau d'IRCC pour s'adresser à un préposé au guichet comme on peut le faire à Service Canada.
:
C'est une question très importante. Je pense que les gens interprètent parfois les retards systémiques dans les processus... J'ai récemment reçu une réponse pour une demande présentée à la GRC il y a cinq ans. C'est un record pour moi. La FIPA entend souvent des gens qui interprètent les faits et qui pensent que le gouvernement a quelque chose de sinistre à cacher, se disant qu'il n'aurait aucune raison de retenir l'information s'il était blanc comme neige. Ils sautent donc aux conclusions à cet égard.
À mon avis, habituellement, il n'y a pas nécessairement de motif sinistre ou malhonnête, bien que ces retards puissent certainement être utilisés comme arme. C'est plutôt un manque d'efficacité du système qui provoque des arriérés et des retards, mais les gens sont libres d'en interpréter les raisons.
Si quelqu'un remplit sa toute première demande — comme c'est le cas d'un grand nombre de personnes avec lesquelles nous travaillons, car ce ne sont pas des utilisateurs fréquents —, elle peut frapper un mur en remplissant sa demande et perdre confiance à l'égard du système. Cela ne peut qu'amplifier ses autres préoccupations, légitimes ou non, au sujet du fonctionnement de la démocratie.
Tout d'abord, je veux remercier tous les témoins qui ont comparu par Zoom et en personne. J'ai trouvé les renseignements d'aujourd'hui extrêmement utiles. Je suis sûr qu'ils occuperont une place importante dans notre rapport.
Je veux également remercier les personnes qui ont communiqué avec nous pour demander de prendre part à notre étude. Nous poursuivrons nos travaux les 5 et 7 décembre.
Comme je l'ai indiqué précédemment, les informations que vous nous avez fournies aujourd'hui nous sont extrêmement utiles.
Cheffe, je vois que vous levez la main.