:
Je déclare la séance ouverte.
[Français]
Je vous souhaite la bienvenue à la 119e réunion du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique.
Conformément à l'article 108(3)h) du Règlement et à la motion adoptée le mardi 13 février, le Comité reprend son étude sur les effets de la désinformation et de la mésinformation sur le travail des parlementaires.
[Traduction]
Avant de commencer, j'aimerais à nouveau tous vous rappeler de consulter les cartes sur la table pour connaître les lignes directrices visant à prévenir les incidents acoustiques. Veuillez garder à l'esprit les mesures préventives en place pour protéger la santé et la sécurité de tous les participants, y compris les interprètes. Utilisez uniquement l'oreillette noire approuvée. Les anciennes oreillettes grises ne doivent plus être utilisées. Gardez toujours votre oreillette éloignée de tous les microphones. Lorsque vous n'utilisez pas votre oreillette, placez‑la face vers le bas, sur l'autocollant posé sur la table à cet effet. Je vous remercie de votre coopération.
Avant de commencer, sachez qu'il y aura des cloches au cours de la matinée. Je ne sais pas exactement quand, alors je dois rester à l'affût. Nous allons tous rester à l'affût des votes prévus.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins pour la première heure. Du Service canadien du renseignement de sécurité, nous accueillons Nicole Giles, sous-ministre adjointe principale, politiques et partenariat stratégique — bienvenue, madame Giles —, et Bo Basler, directeur général et coordinateur, ingérence étrangère. Bienvenue parmi nous ce matin, monsieur.
Madame Giles, la parole est à vous pour un maximum de cinq minutes. Allez‑y, je vous prie.
:
Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, bonjour. C'est un honneur pour moi de me joindre à vous aujourd'hui et d'avoir la chance de prendre part à vos discussions sur la mésinformation et la désinformation. Comme vous pouvez l'imaginer, il s'agit de problèmes complexes qui suscitent des préoccupations de différentes natures pour le SCRS, le gouvernement et la population canadienne.
En vertu de la Loi sur le SCRS, le SCRS est chargé de recueillir des renseignements sur les menaces à la sécurité du Canada, de conseiller le gouvernement sur ces menaces, et, s'il y a lieu, de prendre des mesures pour les atténuer.
La mésinformation consiste en la communication d'informations incorrectes ou trompeuses qui sont présentées comme des faits. Quant à la désinformation, elle consiste en la communication délibérée et planifiée de messages trompeurs dans le but de modifier un discours. Lorsque de telles activités forment une menace envers la sécurité du Canada au sens de la Loi sur le SCRS, nous enquêtons et agissons. Le SCRS enquête depuis longtemps sur des auteurs de menace qui, selon lui, ciblent des institutions démocratiques canadiennes en recourant à des menaces ou à des moyens clandestins ou trompeurs. C'est ce que l'on appelle « l'ingérence étrangère ».
[Français]
Des États exploitent de nombreux outils pour contrer les discours canadiens et favoriser leurs propres discours incendiaires.
À mesure que les activités de ces acteurs étatiques deviennent plus sophistiquées, il devient plus difficile de les repérer et de contrer les menaces qu'elles posent. Un nombre croissant d'États conçoivent et utilisent des programmes pour se livrer à de l'ingérence en ligne.
Les campagnes d'ingérence en ligne visent à modifier les opinions des électeurs, le discours public et les choix des décideurs, à semer la confusion et la discorde, ainsi qu'à susciter la méfiance envers les institutions fondamentales et les processus démocratiques du Canada. Les États en cause peuvent appliquer une approche concertée pour amplifier un discours universel, tout en prônant un contenu incendiaire.
[Traduction]
Des acteurs non étatiques peuvent eux aussi employer des tactiques semblables, ce qui peut avoir pour effet d'accentuer la menace. Malheureusement, des extrémistes violents utilisent la mésinformation et désinformation pour promouvoir leurs propres discours, semer la division et la discorde, et susciter de la méfiance envers les institutions et les autorités, et ce, en faveur d'une position idéologique en particulier. Dans des cas extrêmes, la mésinformation et la désinformation en ligne peuvent même permettre de radicaliser des personnes et les inciter à commettre des actes de violence.
Par conséquent, il est fondamental que les Canadiens et les Canadiennes travaillent tous ensemble. De tels efforts requièrent avant tout des discussions éclairées et transparentes entre tous les paliers et secteurs gouvernementaux et avec les communautés, le milieu universitaire et le secteur des affaires. En tant que partenaire engagé, le SCRS continue de mener des enquêtes, de présenter des analyses, de conseiller le gouvernement et, au besoin, de prendre des mesures pour atténuer les menaces. De plus, il communique régulièrement avec les agents publics, dont les députés, pour mieux faire connaître les menaces et aider les personnes concernées à renforcer leurs pratiques en matière de sécurité.
[Français]
Il mène également des activités d'information et de sensibilisation pour aider les intervenants concernés à renforcer leur résilience et à mieux comprendre les activités de cette nature pour protéger leurs intérêts.
[Traduction]
Le SCRS est conscient que les diasporas et les communautés marginalisées sont les principales cibles des activités d'ingérence étrangère et des campagnes de désinformation, et sont souvent les plus vulnérables. C'est pourquoi le SCRS déploie beaucoup d'efforts pour écouter et mieux comprendre les communautés que nous servons, établir des liens de confiance avec elles, et leur transmettre des informations liées aux menaces en plusieurs langues afin de mieux les sensibiliser et de renforcer leur résilience, particulièrement à l'égard de l'ingérence étrangère.
[Français]
Le gouvernement a proposé des modifications à apporter à la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité pour combler les lacunes de celle-ci. La transition mondiale vers les communications et les technologies numériques ont aggravé ces lacunes. Ces modifications aideraient le SCRS à mieux outiller ses partenaires de l'appareil de la sécurité nationale à l'extérieur du gouvernement du Canada.
Pour terminer, je dois dire que je ne peux pas parler publiquement des enquêtes ni des dossiers opérationnels du SCRS, pour assurer la sécurité des Canadiens et des Canadiennes. Cela dit, je suis ravie d'avoir l'occasion de discuter avec vous de façon franche et aussi transparente que possible, et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
:
Merci, monsieur le président, et merci aux témoins pour leur présence aujourd'hui.
Kenny Chiu, ancien député conservateur de Steveston—Richmond-Est, a témoigné deux fois devant un comité. Je crois qu'il s'agissait dans les deux cas du comité de l'éthique.
La première fois qu'il a comparu, le 31 mars 2023, il n'a pas donné de précisions, si ce n'est qu'il a fait une déclaration très audacieuse en disant que l'ingérence étrangère, en particulier de Pékin, en Chine, avait joué un rôle dans sa défaite.
Le candidat libéral, le député Parm Bains, qui a remporté l'élection, a été interrogé par la presse par la suite. On lui a demandé si l'ingérence étrangère avait contribué à son élection. Il a répondu très catégoriquement que non, pas du tout, tout en s'éloignant des caméras. Encore une fois, M. Chiu n'a pas donné de détails concernant M. Bains.
Il l'a cependant fait le 30 avril 2024. M. Chiu a dit:
Permettez-moi maintenant de vous présenter l'adversaire que j'ai affronté lors de la dernière campagne électorale. À mon avis, son ascension au pouvoir n'a été rendue possible que par une campagne de désinformation. Il s'agissait peut-être d'une stratégie calculée ou, à tout le moins, d'une participation volontaire à une campagne de désinformation aujourd'hui avérée. Cet individu a accepté de propager de fausses allégations visant les conservateurs, y compris notre chef de l'époque, Erin O'Toole, et moi-même. Il nous a accusés de répandre des propos racistes et d'attiser un sentiment anti-asiatique. Ces allégations liées à des États étrangers ont alors essaimé sur plusieurs chaînes de médias et groupes de discussion biaisés.
Peu après, M. Chiu a déclaré, à propos de M. Bains:
Mon ancien adversaire s'est engagé publiquement devant la communauté sino-canadienne à ne pas soutenir la création d'un registre sur les agents d'influence étrangers. Cette promesse contredit directement l'annonce faite en 2022 et en 2023 par le ministre de la Sécurité publique de l'époque.
Durant mon intervention, j'ai demandé plus de détails. M. Chiu a dit que M. Bains avait propagé et amplifié cette mésinformation, et lui avait donné de l'importance. Il a dit:
D'après ce que je comprends, il a participé à des entrevues à la radio et à des événements communautaires, où il a annoncé publiquement qu'il n'allait pas appuyer ce qu'il a qualifié de « registre anti-asiatique de l'ingérence étrangère ». Il n'y avait aucune précision sur l'effet que le projet de loi C-282, que j'avais proposé, aurait eu exactement. Il n'y avait aucune mention d'aucun pays, quel qu'il soit. Le fait est qu'il visait à injecter de la transparence dans les activités de lobbying politique, mais il n'a pas saisi ces occasions pour clarifier ces subtilités. Ce faisant, en ne m'aidant pas à rétablir ma réputation, il a contribué à perpétuer les tentatives d'assassinat à mon égard.
Ce sont des propos très précis. Ont-ils été transmis au SCRS?
:
Merci, monsieur le président.
Je prends acte des commentaires de ma collègue, Mme Khalid, sur la présence des témoins. Toutefois, je ne pense pas renoncer à cette occasion de m'entretenir de la motion pendant les 40 prochaines minutes, ce qui va coïncider avec la sonnerie. Par contre, les choses pourraient changer.
De toute manière, advenant l'adoption de ma motion, vous pourrez considérer ce qui suit comme des observations. Il va sans dire que les témoins qui joueront un rôle clé pour concrétiser ce que propose ma motion sont les membres du SCRS — fort probablement Mme Giles et M. Basler —, qui examineront en détail la façon dont M. Bains a renforcé et propagé de la désinformation provenant de Pékin, en Chine. En partant du fait que des activités ont eu lieu dans cette circonscription en particulier, il y a tout lieu de se demander si la même chose s'est produite ailleurs en Colombie-Britannique.
Nous savons que d'autres députés du Parti conservateur ont soulevé des accusations d'ingérence étrangère. J'ai entendu et j'ai lu les grandes lignes de ces accusations. Ces anciens députés du Parti conservateur ont dit en comité avoir senti que l'interférence et l'ingérence étrangères provenant de Pékin en particulier avaient altéré à leurs yeux l'apparence d'équité des élections de 2021, et dans certains cas, des élections de 2019.
Je peux affirmer sans l'ombre d'un doute — c'est probablement la position du SCRS, mais c'est certainement celle de l'ancien chef conservateur Erin O'Toole, du et du gouvernement — que peu importe l'ingérence qui a pu se produire, les tentatives en question n'ont pas influé sur les résultats des élections. L'intégrité des élections a été préservée et l'ingérence n'a pas eu d'incidence sur la composition du gouvernement.
L'ancien chef du Parti conservateur, Erin O'Toole, a affirmé que selon lui l'ingérence avait influé sur les résultats dans au moins huit circonscriptions, dont une au centre de l'Ontario et plusieurs en Colombie-Britannique. Par conséquent, je pense qu'il appartient au Comité d'élargir la portée de son étude pour réaliser un examen qui permettrait d'aller vraiment au fond des choses — en entendant divers experts sur le sujet — afin de déterminer pourquoi et comment les messages de mésinformation et de désinformation ont été amplifiés et utilisés contre des députés conservateurs.
Prenons par exemple l'ancien député Kenny Chiu. Comme je l'ai souligné dans ma première question aux membres du SCRS, M. Chiu a témoigné deux fois. La première fois, il a seulement mentionné qu'il avait l'impression que les activités d'ingérence étrangère avaient influé sur les résultats, sans nommer personne. J'assistais à la séance en question et ce témoignage m'a intrigué.
En fait, je me souviens d'un commentaire de mon collègue, M. Villemure — je suis à peu près certain que lui aussi s'en souvient — qui a soulevé la question de savoir si M. Bains était désormais en conflit d'intérêts en siégeant au Comité et en écoutant des témoignages sur sa circonscription et sur l'ingérence qui s'y est produite. Non seulement M. Bains a observé passivement la mésinformation et la désinformation, mais il a fait quelque chose de pire à mon avis qui a porté atteinte à son intégrité. Il a amplifié les messages faux et inexacts et les a récupérés à des fins purement partisanes.
C'est déplorable. Nous, les parlementaires, nous nous présentons à Ottawa dans l'intention d'exercer nos fonctions avec intégrité, honnêteté et probité.
Je crois au concept de fair-play. C'est ce que j'enseigne à mes enfants. Tirer profit des erreurs des autres, c'est se comporter de manière répréhensible.
Dans ce cas‑ci, M. Bains tirait profit d'une entité étrangère, d'un ennemi étranger et d'un gouvernement communiste désireux de maintenir des relations diplomatiques avec le gouvernement libéral du Canada tout en détenant illégalement les deux Michaels — deux citoyens canadiens.
Nous avons des preuves selon lesquelles plusieurs membres du Parti communiste chinois affectés au Canada soutenaient les activités d'ingérence étrangère de la Chine et se targuaient ouvertement de leur succès. Ils ont, en effet, obtenu les résultats qu'ils souhaitaient en maintenant le gouvernement libéral au pouvoir avec à sa tête un premier ministre qui dit en public exactement le contraire de ce qu'il fait dans la réalité.
Le parle de l'intégrité du Canada et de l'importance de tenir des élections justes et transparentes. Selon lui, des mécanismes sont en place au pays pour contrer l'ingérence étrangère. Visiblement, ces mécanismes sont extrêmement défaillants. Que doivent en comprendre les Canadiens qui écoutent mon intervention? Qu'en est‑il de l'intégrité du premier ministre qui, à l'aube de la campagne électorale de 2015, proclamait fièrement son admiration pour le régime dictatorial chinois?
Le Canada est une nation démocratique. Je ne peux rien imaginer de pire qu'un futur premier ministre qui admire un régime qui supprime les droits de la personne et exécute illégalement ses propres citoyens. Je pense à la place Tiananmen et aux conséquences de ce massacre sur la scène internationale. Le premier ministre était très fier du gouvernement chinois qui avait commis ces violences.
C'est terrible, mais ces convictions sont profondément ancrées dans la famille du premier ministre. Son père était un admirateur de la dictature chinoise et cubaine, tout comme son frère. Le témoignage d'Alexandre Trudeau devant le comité qui se penchait sur la fondation Trudeau a révélé hors de tout doute que le frère du premier ministre s'était rendu plusieurs fois en Chine et qu'il y a été accueilli par le gouvernement chinois. Les témoignages que j'ai entendus indiquent sans équivoque que la Chine n'a pas de relation plus spéciale que sa relation actuelle avec le gouvernement libéral au Canada, plus particulièrement avec le .
Il faut revenir également à la genèse de la motion qui proposait d'examiner les manœuvres effectuées ouvertement par et son gouvernement pour éviter toute étude ou enquête ou tout examen approfondi du rôle de l'ingérence étrangère lors des élections de 2019 et de 2021.
Chaque fois que des éléments ont émergé, les libéraux ont tout fait pour éviter que des études ou des examens plus poussés soient menés. Le parle d'intégrité et d'impartialité du processus électoral, mais lorsque vient le temps d'examiner sa conduite et celle du gouvernement, il dit aux Canadiens: « Il n'y a rien à voir. Faites-nous confiance. Nous avons un système en place pour détecter, signaler et éliminer l'ingérence des ennemis du Canada et pour préserver des élections justes et équitables. »
Par contre, lorsque nous avons réclamé à répétition — comme l'ont fait les conservateurs avec l'appui du Bloc — une enquête complète sur toutes les circonstances, la position du gouvernement était tout à fait à l'opposé. Ce n'est qu'à la toute dernière minute que s'est finalement plié à la volonté du Parlement de faire la lumière sur la question.
Qu'est‑ce que le premier ministre avait fait auparavant? Il avait fait appel à un rapporteur spécial, qui avait le respect des Canadiens et dont personne n'aurait osé contester le jugement. J'estime moi aussi que l'ancien gouverneur général a ce statut au pays. Il l'a mérité. M. Johnson est un homme intègre qui a très bien servi le Canada. Il a été, soit dit en passant, recteur de mon alma mater, l'Université de Waterloo. Il était avocat, professeur de droit et doyen de sa faculté.
C'est ce qui me dérangeait lorsque j'ai été invité — je suis conscient du privilège que j'ai eu — aux réunions du comité où David Johnston a témoigné pour défendre son rapport initial. Je dis « initial » parce que M. Johnson a démissionné avant de déposer son rapport final.
Toutefois, aux yeux des avocats qui siègent au Comité, ce n'était pas seulement la question du conflit d'intérêts réel et de l'objectivité qui posait problème. La question de l'apparence de conflit d'intérêts intervenait également. Lorsque nous avons eu des preuves selon lesquelles la famille de l'ancien gouverneur général et la famille Trudeau entretenaient des liens étroits, que les deux familles vivaient à proximité l'une de l'autre, passaient leurs vacances ensemble et se recevaient à dîner, ces faits qui existaient et qui existent encore ont donné une apparence de conflit d'intérêts du point de vue juridique.
Lorsque j'ai eu l'occasion de soulever la question du conflit d'intérêts directement avec l'ancien gouverneur général, moi qui suis avocat, j'ai été surpris de constater que du point de vue de M. Johnson, la situation n'était pas problématique. Je comprends que ce ne soit pas épineux à ses yeux, mais ce l'était de toute évidence aux yeux des Canadiens. Ce l'était aussi pour les parlementaires, qui savent que les conflits d'intérêts ne s'estompent pas au fil du temps. D'ailleurs, celui dont nous parlons existe encore.
Parmi toutes les personnalités éminentes et érudites qui ont servi le pays sous diverses fonctions, pourquoi avoir choisi David Johnston malgré son historique avec la famille de Justin Trudeau?
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie mon collègue d'avoir présenté cette motion. Elle met en lumière quelque chose qui a été évoqué et insinué, pour ainsi dire, et je suis heureux que nous puissions en parler très directement.
J'aimerais revenir en arrière un instant. Lorsque l'on parle d'ingérence électorale et de circonstances très troublantes, comme celles évoquées dans le rapport de la juge Hogue, qui a certainement été très révélateur, ou de circonstances entourant d'autres exemples d'ingérence électorale, et que le déclare que tout s'est bien déroulé lors des élections de 2019 ou de 2021, et que l'intégrité de ces élections a été préservée, il y a un problème. Ce que l'on a omis de reconnaître, c'est qu'il s'agit là, curieusement, d'une déclaration à l'américaine, car elle ne renvoie pas à notre système, mais plutôt à un système auquel on fait si souvent allusion dans les commentaires politiques au Canada. Cette déclaration ne reflète pas notre système, car au Canada, il n'y a pas qu'une seule élection.
Dans le cas de la présente législature et des deux législatures précédentes, 338 élections distinctes ont eu lieu. Nous n'élisons pas un président. Nous n'élisons pas un premier ministre. Cette déclaration surprendra peut-être ceux qui nous écoutent. L'usage veut que le premier ministre soit le chef du gouvernement. Une foule d’histoires l'expliquent — et il y a eu des contestations constitutionnelles —, mais cela est, en quelque sorte, le résultat de l’évolution d’environ 800 ans d'une démocratie fondée sur le modèle de Westminster.
Je tiens à souligner quelques exemples précis, car l'on dit qu'il n'y a pas eu d'ingérence pendant les élections, et cela est profondément troublant. Examinons quelques règles qui définissent les élections. Il y a les règles financières. À titre de députés et de personnes qui ont participé au processus électoral, notre nom a figuré sur un bulletin de vote au moins une fois, ou plus d'une fois, dans certains cas. Que nous ayons gagné ou non, nous comprenons la plupart des modalités concernant le financement et les règles de publicité et les divers... Nous en avons parlé assez longuement.
Il convient de souligner une particularité de notre système dans le cadre de ce débat: les campagnes électorales se déroulent dans le contexte plus large d'une élection générale. Il faut le comprendre. C'est pour cette raison que l'on parle d'élections générales. Le Parlement est dissous et il n'y a plus de députés. Le Parlement cesse littéralement d'exister. De fait, la Constitution le précise sans équivoque.
Tous ceux d'entre nous qui se sont retrouvés dans cette situation savent que des changements se produisent. Dans le cas de la législature actuelle et des deux législatures précédentes, il y a eu 338 élections lors desquelles des députés ont été élus afin de créer un Parlement. Il existe aussi certains détails propres aux élections partielles. Ces élections partielles auront lieu lorsqu'un député démissionne ou décède, comme nous en avons malheureusement été témoins. Ces situations sont survenues quelques fois au cours des dernières législatures. Cette dynamique existe.
À mon avis, le a été carrément irresponsable lorsqu'il a formulé une déclaration formelle alors qu'elle n'était tout simplement pas vraie. La commission Hogue a été très claire à ce sujet. Je vais donner quelques détails et vous expliquer pourquoi moi et bon nombre de mes électeurs, qui communiquent avec moi régulièrement, ressentons de la frustration en raison de la façon dont le premier ministre aborde les éléments qui pourraient mettre sa situation politique en danger par rapport à ceux qui touchent ses adversaires. J'y reviendrai dans quelques instants.
Il faut souligner — et je tiens à mettre l'accent là‑dessus pour tous ceux qui nous regardent — que lorsque l'une de ces 338 élections est mise en doute, des questions sur l'ensemble du système se posent.
Les allégations ont été formulées très clairement. Mon collègue, M. Brock, a bien décrit ce qui s'est passé dans la circonscription de Steveston—Richmond-Est, mais il existe d'autres situations. Le Parlement est un endroit intéressant. On apprend à connaître les gens. Je le sais pour avoir appris à connaître M. Chiu lorsqu'il était député. Je l'ai entendu dire que des forces malveillantes avaient utilisé son point de vue en faveur de la protection de la démocratie comme une arme contre lui. Il y avait aussi plusieurs autres exemples.
Peut‑on citer une situation précise et dire avec certitude que c'est le moment qui a marqué un tournant? Ce serait extrêmement difficile. Bien franchement, il serait irresponsable de le faire, tout comme il serait irresponsable de prétendre qu'il n'y a pas eu d'ingérence.
Voilà l'élément essentiel, monsieur le président. Nous devons prendre ces allégations au sérieux, car lorsque l'intégrité d'un vote est compromise, nous devons nous poser des questions sur l'ensemble du système. Je pense...
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Il est intéressant de souligner que lorsque moi et d'autres députés ici présents sommes arrivés à la réunion la semaine dernière, les libéraux ne semblaient certainement pas vouloir travailler pendant la pause parlementaire.
Je m'écarte du sujet. Je vais revenir à la motion dont nous sommes saisis.
Comme je le disais, le a été très irresponsable lorsqu'il a formulé ces commentaires au sujet de l'intégrité de nos élections. Je ne sais pas s'il l'a fait de façon délibérée, ou s'il ne savait pas ce qui se passait sous sa gouverne. Comme beaucoup d'autres, j'ai émis des hypothèses quant aux raisons pour lesquelles il a fait ces commentaires.
Il est de plus en plus évident que le bénéficiaire direct de certains cas très graves d'ingérence qui ont eu un effet notable... Cette ingérence a‑t‑elle changé le résultat des élections?
Pour ce qui est de la situation dans son ensemble, nous ne pouvons le dire sans équivoque, mais nous ne pouvons pas nier que cette ingérence ait eu une incidence. Par conséquent, la confiance dans l'ensemble du processus électoral est compromise, surtout lorsque ce processus n'est pas pris au sérieux.
Monsieur le président, quelques sièges — on a dit que cela pouvait aller jusqu'à huit sièges — ont été touchés car il y avait une différence entre le fait d'être... qu'un acteur étranger hostile, qu'il s'agisse de la dictature communiste de Pékin ou d'autres... Je sais qu'il y a d'autres cas où d'autres États et quasi-États ont eu une incidence en tentant d'influencer le résultat des élections.
Nous ne pouvons passer sous silence le fait que cette situation a été ignorée de façon extrêmement désinvolte. Lorsque nous avons des preuves des plus éloquentes sur la circonscription de la vallée du Bas-Fraser dont il est question, et au sujet de laquelle nous avons entendu des témoignages et vu des reportages, il est difficile de contester que cette ingérence a eu des répercussions sur les droits... Je ne parle pas seulement de la personne qui, à l'issue du vote, a obtenu un siège au Parlement. Je me demande surtout si les Canadiens sont réellement en mesure d'exercer leur droit de vote.
Selon moi, si le doute plane quant à ces circonstances, nos institutions démocratiques sont directement menacées, car la confiance est la base même de notre démocratie. Nous devons pouvoir faire confiance au processus. Nous devons pouvoir faire confiance aux institutions. Nous devons être en mesure de croire que lorsque nous nous rendons aux urnes et que nous inscrivons notre vote, ce vote, comme chaque vote dans cette circonscription électorale et dans les 338 autres circonscriptions qui composent ce Parlement — je crois que le prochain Parlement sera composé de 343 circonscriptions, car quelques sièges seront ajoutés —, sera compté. Il faut avoir cette assurance.
Cette conversation et cette motion sont extrêmement précieuses parce que nous devons être prêts à poser les questions difficiles. Qu'il s'agisse de ce qui se passe dans la vallée du Bas-Fraser, en Colombie-Britannique, ou du fait que chaque Canadien devrait avoir la possibilité de voter dans chaque circonscription électorale au pays, sans cette confiance et sans ces conversations difficiles, notre capacité de régler les problèmes auxquels notre système est clairement confronté s'en voit amoindrie.
Monsieur le président, je suis heureux que nous soyons en mesure de parler de la mésinformation et la désinformation, plus précisément, car il est absolument essentiel de s'attaquer de front à ce problème.
Pour ce qui est des circonstances entourant la dictature communiste de Pékin, je tiens à souligner qu'il est devenu très évident qu'il y avait un effort concerté pour... Un parti politique en particulier a bénéficié de ces efforts.
Ce n'est pas seulement moi qui le dis. Il s'agit d'un consensus solide provenant de nombreuses conversations, que ce soit de témoignages devant différents comités, de rapports qui ont été produits à ce sujet ou encore du rapport de la juge Hogue. Il est évident que c'est le cas, et pourtant, lorsque le , qui a le premier...
La responsabilité première d'un premier ministre ne devrait pas avoir trait à ses intérêts politiques. Il peut être surprenant qu'un politicien dise cela, mais je pense que les circonstances dans lesquelles nous nous trouvons ont embrouillé certaines choses entourant l'intégrité qui doit prévaloir dans l'ensemble du processus. Si nous ne pouvons avoir ces conversations difficiles, ces situations pourraient prendre de l'ampleur.
Parler de ce qui se passe constitue la première étape. Les enquêtes, qu'il s'agisse du rapport de la juge Hogue ou autre, doivent constituer une deuxième étape importante. Au bout du compte, cependant, il faut s'attaquer aux problèmes qui ont été soulevés.
Voici à mon avis l'un des plus grands échecs du leadership de . Lorsqu'il s'est rendu compte que ses aspirations politiques étaient peut-être menacées, il n'a épargné aucune dépense. Il a été prêt à intervenir immédiatement et à exiger que des publications sur les médias sociaux soient supprimées afin de réduire au silence quiconque pourrait amplifier cette désinformation. Or — et c'est ce qui est si stupéfiant —, s'il avait été cohérent et qu'il avait aidé ceux qui sont perçus comme ses adversaires politiques, l'on aurait pu respecter le fait qu'il voulait assurer l'intégrité du processus.
Toutefois, il ne l'a pas fait. Lorsque M. Chiu s'est fait traiter de... Pour ceux qui nous écoutent, je ne peux pas imaginer l'enfer que M. Chiu et sa famille ont vécu lorsqu'on l'a qualifié de traître envers ses origines ethniques et d'hostile envers les Chinois. Il est un fier Canadien d'origine chinoise.
Pouvez-vous imaginer, monsieur le président, que vos origines soient remise en question? De voir que l'on a fait preuve d'une indifférence aussi désinvolte à l'égard de l'incidence que cela a eue sur l'intégrité de notre processus électoral soulève immédiatement la question de la pleine participation des Canadiens à ce processus.
Monsieur le président, vous ne serez pas surpris d'apprendre — et je sais que d'autres membres de ce comité viennent de régions rurales — que les députés des régions rurales passent beaucoup de temps en voiture. Pendant la dernière pause parlementaire, j'ai écouté un livre qui portait, essentiellement, sur la construction du chemin de fer au Canada et sur le rôle que ce chemin de fer a joué dans la création de la Confédération. Je n'entrerai pas dans les détails. C'est un livre fascinant.
Le plus révélateur a été ce rappel — j'étais au courant, ayant appris certaines de ces choses à l'école secondaire — de la façon dont les Canadiens d'origine chinoise, en particulier... L'histoire de nombre d'entre eux qui sont venus au Canada n'a rien de réjouissant. Plusieurs gouvernements... Je pense que c'est le gouvernement de Wilfrid Laurier qui a imposé une taxe d'entrée de 500 $ aux Canadiens d'origine chinoise. Si je ne m'abuse, elle a été mise en place au tournant du XX e siècle. Il y a ce genre d'héritage.
Puis, M. Chiu, une personne d'ascendance chinoise, a été élu, mais on lui a coupé l'herbe sous le pied, ce qui l'a empêché de mener une lutte équitable. Nul ne se présente aux élections en sachant qu'il va gagner. Le penser serait décidément la mauvaise attitude, car, qu'il s'agisse de sièges dits assurés ou de sièges qui peuvent changer de main, ou de quoi que ce soit d'autre — peu importe ce que les commentateurs suggèrent —, aucun parlementaire...
Il va sans dire que je ne tiendrais jamais pour acquis le résultat d'une élection, car tout revient à la population. Au bout du compte, il faut faire en sorte que les gens, les Canadiens, puissent se faire entendre.
Nous avons vu le agir rapidement et immédiatement lorsque ce qui se passait concernait ses intérêts politiques. Il a toutefois refusé ou a tardé à agir lorsqu'il était question de ceux qui, autrement... Voici ce qui crée une tendance si préoccupante: lorsqu'il s'agit des actions de... Il ne s'agit pas d'un cas isolé. De fait, c'était stupéfiant. Non seulement il y a une foule d'éléments qui donnent à penser que les libéraux de Trudeau ont été indulgents envers la dictature communiste de Pékin, mais il y a aussi de nombreuses raisons pour lesquelles certaines de ces allégations troublantes semblent être vraies.
Plus précisément, je tiens à souligner qu'une motion a été présentée à la Chambre, pour être mise aux voix, nous donnant ainsi l'occasion de condamner le génocide des musulmans ouïghours, un groupe minoritaire en Chine qui est persécuté sans relâche, au moyen d'avortements forcés, de stérilisations et de travaux forcés. Il est question ici des pires circonstances possible. Qu'a fait le gouvernement? Il y a eu plusieurs occasions. Depuis, il a durci le ton, et je dirais que c'est grâce à la pression qui a été exercée par les conservateurs et par de nombreux autres au pays, y compris les groupes de la diaspora. Un ministre de la Couronne s'est abstenu de voter. Non seulement il y a eu un manque de compréhension étonnant de notre système parlementaire... Je n'entrerai pas dans les détails et je ne dirai pas à quel point c'était insultant, bien franchement...
Cela en dit long sur le refus de dénoncer les violations commises qui sont si évidentes pour la communauté internationale. À une certaine époque, on pouvait compter sur le Canada pour être un chef de file dans la dénonciation de ce genre de choses, mais les libéraux de Trudeau, par crainte d'offenser une dictature... Nous savons très bien que le premier ministre actuel, , en a parlé avant son élection. Il avait une admiration pour... mais il a aussi continué dans le... Je ne me contente pas de dire des choses. C'est exactement ce qu'il a dit lorsqu'on lui a demandé quel pays il admirait. Il aurait pu dire n'importe quoi. Il aurait même pu commencer en apportant des nuances. Vous pouvez lire la citation. Elle est absolument aberrante.
Monsieur le président, nous constatons que dans ce cas et dans tant d'autres, l'on a refusé de prendre des mesures fermes. Un chef doit faire des choix difficiles. Malheureusement, en ce qui concerne les nombreux choix difficiles qui s'imposent pour protéger notre infrastructure démocratique, ce qui est de la plus haute importance, les libéraux se défilent. Il est malheureux que l'on semble ne pas vouloir tenir ces conversations difficiles, et ce n'est pas parce que les occasions de régler le problème se font rares. Je dirais, monsieur le président, que le leadership est ce qui nous permettra de régler ces problèmes. Notre pays a besoin de leadership. Nous, les parlementaires, avons besoin de leadership. Le Parlement compte 338 députés. Le gouvernement est assujetti au Parlement. Ce n'est pas l'inverse. Il est assez incroyable que les membres du gouvernement ne veuillent pas adopter une position ferme.
Je pense aux anciens premiers ministres qui ont pris des positions très fermes, qu'il s'agisse de l'ancien premier ministre Harper, lorsqu'il a refusé de serrer la main de Vladimir Poutine, en disant à cet homme diabolique de quitter l'Ukraine, il y a 10 ans... Pour ce qui est de...