Je vous souhaite à tous la bienvenue à la 42e réunion du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique de la Chambre des communes.
[Français]
La réunion d'aujourd'hui se déroule dans un format hybride, conformément à l'ordre adopté par la Chambre le jeudi 23 juin 2022. Par conséquent, les membres assistent à la séance soit en personne, soit à distance au moyen de l'application Zoom.
M. Villemure m'a assuré que les tests de son ont tous été faits auprès des témoins.
[Traduction]
Si des problèmes techniques surviennent, veuillez m'en informer immédiatement. Je précise que nous pourrions devoir suspendre la séance pendant quelques minutes, puisqu'il faut veiller à ce que tous les membres puissent participer correctement aux délibérations.
Conformément à l'alinéa 108(3)h) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 16 mai 2022, le Comité reprend son étude du système d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels.
Je souhaite la bienvenue aux témoins.
Nous accueillons M. Ken Rubin, recherchiste d'enquête et défenseur de la transparence, qui comparaît à titre personnel, M. Allan Cutler, ancien président de Canadians for Accountability, et M. Duff Conacher, cofondateur de Démocratie en surveillance.
Monsieur Rubin, vous avez la parole pour présenter un exposé liminaire de cinq minutes.
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Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité.
Le Comité m'a invité à témoigner au sujet de l'état de l'accès à l'information au Canada. Je vais vous parler de mon expérience. Soit dit en passant, il s'agit de la 15e étude de cette nature, et j'ai présenté plus de 15 exposés sur ce sujet, parmi la bonne quarantaine que j'ai faits au Parlement à propos de questions d'intérêt public. Je suis là depuis un moment.
Mes démarches d'intérêt public visant à obtenir l'accès à l'information ont débuté une quinzaine d'années avant l'adoption du régime de la Loi sur l'accès à l'information, il y a 40 ans. Tout ce qu'ont fait les mesures législatives sur l'accès à l'information qui ont été adoptées, c'est multiplier les obstacles à mon travail et à celui d'autres personnes qui cherchent à faire connaître le fonctionnement réel d'Ottawa.
Depuis l'adoption de la Loi sur l'accès à l'information, les fonctionnaires affirment, sans sourciller, que la loi a toujours marché assez bien, ne nécessitant que de légères modifications à l'occasion. Ce dont on a constamment besoin, disent-ils, c'est de l'injection de millions de dollars en plus — pour eux, bien sûr —, mais ces ressources supplémentaires servent malheureusement à renforcer leur position tout en ne permettant aux Canadiens de ne recevoir que des documents tronqués, ce qui brime leur liberté de savoir.
Voici des exemples qui montrent comment ce faux accès sert principalement les intérêts de ceux qui veulent que les Canadiens ne sachent rien ou presque rien.
Le premier exemple, c'est la dissimulation des sépultures d'enfants anonymes près de pensionnats honteux où sévissait le racisme. Le deuxième, c'est le camouflage des pots‑de‑vin et des trafics d'influence, qu'il s'agisse du scandale du Pacifique, du scandale des commandites ou de la débâcle de SNC-Lavalin. Troisièmement, on ferme depuis trop longtemps les yeux sur la conduite disgracieuse de Hockey Canada, des forces armées et de la GRC, qui ont refusé de se saisir des cas d'agression sexuelle et de préjudice — allant jusqu'à les encourager —, tout cela au vu et au su de responsables gouvernementaux. Quatrième exemple: les efforts déployés pour empêcher la population de connaître le scandale des machinations pour fixer le prix du pain et pour minimiser la pression exercée sur les Canadiens par les grandes banques, à un moment où elles réalisent des profits records. Cinquième exemple, les Canadiens sont tenus dans l'ignorance au sujet des politiques qui leur donnent les prix les plus élevés au monde pour la téléphonie mobile, et au sujet du lobbying en coulisse qui leur a valu des prix parmi les plus élevés au monde pour les médicaments et l'alimentation. Il est difficile d'obtenir de l'information sur ces questions.
De plus, il est plus que triste, il est même dégoûtant, que les travailleurs de première ligne dans les services de santé n'aient pas obtenu des renseignements plus complets et des données moins déroutantes des autorités pendant la pandémie. J'ai personnellement été témoin de la suppression de renseignements venant de dénonciateurs, comme Pierre Blais et Shiv Chopra, qui ont tenté d'alerter le public au sujet des risques pour la santé, et j'ai reçu des documents tronqués, après des délais et des plaintes répétées, au sujet de fonctionnaires qui ont aidé et financé les industries mortelles de l'amiante et du tabac au Canada et à l'étranger. J'ai vu des documents caviardés à l'extrême — même s'ils avaient été demandés avec le consentement de Maher Arar et de Monia Mazigh — au sujet de l'information erronée transmise par les autorités qui a valu à Maher Arar d'être livré à des tortionnaires syriens.
Comme d'autres, je me suis battu pour obtenir des documents sur le gaspillage de milliards de dollars en technologies de l'information qui fonctionnent à peine. Considérez seulement les révélations partielles sur les millions de dollars injectés dans l'application ArriveCAN, alors que d'autres solutions peu coûteuses et connues ont été écartées.
Tout cela est rendu possible grâce à un lourd système de protection des documents confidentiels du Cabinet, des conseils politiques, juridiques et économiques, des documents commerciaux confidentiels, grâce aux tours de passe-passe qui permettent d'escamoter, par exemple, l'information sur les coûts réels et les bénéficiaires de contrats importants, comme le programme de navires de combat, qui coûte des milliards.
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Notre pays est relativement jeune, mais nous sommes bien connus dans le monde entier pour notre culture du secret et la corruption qui sévit chez nous. Le Canada se classe au bas de l'échelle en ce qui concerne les capacités de divulgation. D'autres pays, comme la Nouvelle-Zélande, divulguent rapidement les documents du Cabinet.
J'ai proposé de nombreuses solutions, mais on n'en a tenu aucun compte. Ce dont nous avons besoin, c'est d'une divulgation automatique, rapide et complète, garantie par la liberté d'expression et les droits constitutionnels, d'une obligation de servir et d'un régime de peines sévères intégré à une loi sur le droit de savoir.
Mettons fin à la culture du secret et à la corruption au Canada afin que nous puissions obtenir de vraies données et non pas les bribes dispensées par le gouvernement fédéral. Il ne fait aucun doute, cependant, que moi-même et d'autres devrons encore nous prévaloir de notre droit à l'information grandement amélioré, si jamais nous l'obtenons. Sinon, comme par le passé, moi-même et d'autres continuerons de lutter pour obtenir des bribes de données en dépit de multiples obstacles.
Il faut que d'autres se joignent à nous. Comme le dit mon site Web: « Ce que les gens ne savent pas peut souvent leur nuire. »
Enfin...
Contrairement à M. Rubin, je ne vais pas parler de ce qui doit se faire. Je vais vous expliquer où nous en sommes et décrire la situation réelle où se trouvent les dénonciateurs, ceux qui essaient de savoir ce qui se passe.
Les responsables du régime d'AIPRP sont censés apporter leur aide, non se comporter en gardiens d'un château qui refusent d'abaisser le pont-levis. Ils sont censés apporter leur aide, mais ils ne le font pas. De nombreuses demandes d'accès à l'information, et j'en ai fait l'expérience, remontent à plus d'un an. J'en ai une qui est en attente depuis cinq ans. Je me suis fait dire qu'on ignore quand il sera possible d'y répondre, qu'il y a d'autres priorités. Voilà qui vous donne une idée de l'accueil réservé aux demandes d'accès à l'information.
Un agent de l'accès l'information vient de me dire carrément que si j'ai un problème, je n'ai qu'à porter plainte auprès de la commissaire à l'information. Pourquoi les agents ont-ils cette réaction? Parce qu'ils savent que la commissaire est tellement débordée qu'il pourrait s'écouler de deux à trois ans avant qu'elle ou ses collaborateurs ne s'occupent du problème. La difficulté est réelle.
Michael Dagg est malheureusement décédé, mais il était très actif dans le domaine de l'AIPRP. J'ai la copie d'une lettre qui lui a été envoyée par les Archives. Il s'agit de deux lettres, en fait. L'une portait sur une certaine demande. On disait qu'il faudrait une prorogation de 1 000 jours au‑delà du délai réglementaire de 30 jours. La deuxième lettre dit que la prorogation sera de 80 ans. On a osé lui écrire qu'il lui faudrait attendre 80 ans pour obtenir l'information.
Ce n'est pas tout. Michael Dagg et moi nous sommes occupés de Brad Birkenfeld. Il s'agissait d'obtenir du ministère de la Justice les documents que Brad Birkenfeld lui a remis en 2008. Nous avons même reçu des lettres disant que nous étions autorisés à obtenir l'information. Le ministère de la Justice refusait de la communiquer. À deux reprises, il a prétendu qu'il n'y avait aucun document. Plus tard, il a soudain constaté qu'il y en avait plus de 6 000. Il y en avait partout.
Enfin, j'ai demandé aux agents pourquoi, huit ans plus tard, ils avaient transmis des documents à l'ARC. Tout à coup, l'ARC a présenté une demande d'accès à l'information, et ils y ont répondu. Ils ont sans doute dû expliquer à l'ARC comment rédiger la requête. Je leur ai demandé pourquoi ils avaient envoyé l'information après n'avoir rien fait pendant huit ans. Ils m'ont simplement répondu: « Nous ne comprenons pas votre question. » J'attends des documents qui me diront pourquoi ils n'ont rien fait. La réaction: « Nous ne comprenons pas la question. » Voilà qui en dit long sur leur attitude. Bien sûr, ils ne veulent surtout pas que nous ayons l'information. Ils nous évitent, au fond.
Les agents de l'accès à l'information sont censés apporter leur aide. C'est ce que dit la loi. Ils n'en font rien. Par exemple, un agent de la GRC me dit: « La Direction de l'AIPRP ne répond pas aux questions. » Si je dis que je cherche des renseignements particuliers qui figurent dans un document, je me fais répondre que si j'ai des questions, je dois les envoyer au service des relations avec les médias.
Autre chose encore. Lorsque je dis ce que je cherche, on me répond: « C'est de l'information. Si vous pouviez me dire de quel document il s'agit... » Mais je n'en sais rien. Je peux vous dire quelle information je cherche et ce qui figure dans le document, mais pas qu'il s'agit du document 4 de tel dossier. Comment puis‑je le savoir? La GRC vient de rejeter ma demande. Je signale que ce cas a été soumis à la commissaire à l'information. Il est en attente. Cela fait environ un an maintenant. On finira par l'examiner. Je sais que...
Le président: Il vous reste une minute, monsieur.
M. Allan Cutler: D'accord.
En un mot, les dénonciateurs ne peuvent pas attendre indéfiniment. Ils n'ont plus recours aux services d'accès à l'information. Ce n'est pas la peine. Ils risquent d'être démasqués. Plus on met de temps à répondre à la demande, plus ils risquent d'être repérés et démasqués. Ils refusent donc d'emprunter cette voie. Ils ne le font plus. Nous faisons l'impossible pour contourner ce régime d'accès. Nous n'y avons pas recours.
Comme Ken Rubin l'a dit, lorsque nous recevons l'information, elle est édulcorée au point d'être inutile. Disons que je présente une demande d'accès. Je me retrouve devant toute une liste d'exceptions. Premièrement, comme je ne suis pas avocat, je ne peux pas toutes les examiner. Deuxièmement, je ne suis pas autorisé à contester une exception, parce qu'il m'est interdit de voir les renseignements visés. Encore une fois, il faut s'adresser à la commissaire à l'information. Il faut faire la queue. Qu'il suffise de dire que rien ne va plus.
Les dénonciateurs externes avec lesquels je fais affaire aujourd'hui disent — et plus d'un me l'a dit — qu'il y a de longs délais et que des documents sont détruits. Ils considèrent qu'il faut maintenant tenir compte dans leur activité de la corruption au sein du gouvernement.
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Merci beaucoup, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité, de me donner l'occasion de comparaître.
Comme Ken Rubin, j'ai déjà comparu maintes fois pour parler de ce sujet, entre autres. Dans le cas de la question à l'étude, ma dernière comparution remonte à 20 ans. Aujourd'hui, j'entends résumer 18 modifications importantes à apporter à la loi et à son système d'application, après quoi, je me ferai un plaisir de répondre aux questions.
Les 18 modifications sont inspirées principalement par le rapport unanime que le Comité a publié en juin 2016, le rapport de mars 2015 présenté par l'ancienne commissaire à l'information et le rapport de janvier 2021 remis par la commissaire actuelle, qui ont tous réclamé des modifications clés, ainsi que, bien sûr, le rapport publié en décembre 2021 par le gouvernement à l'issue de consultations publiques qu'il a menées l'an dernier et qui ont clairement montré que tous les intervenants appuient 10 modifications clés.
Les premières modifications qui s'imposent concernent les règles. La Loi sur l'accès à l'information n'est plus efficace, comme tous ces rapports et les deux autres témoins l'ont souligné.
Pour commencer, il faudrait modifier la loi pour qu'elle vise toutes les institutions gouvernementales, les institutions financées par l'État et les institutions à vocation publique, y compris les services des cabinets. Cette modification a été recommandée par de nombreux intervenants, experts et commissaires. Les autres recommandations que je vais présenter sont également réclamées par les intervenants depuis des années.
Deuxièmement, il faut exiger que chaque institution tienne un registre détaillé des décisions et des mesures prises. Il n'y a aucune raison pour que ce registre ne puisse être tenu et versé sur un site Web interrogeable, car il y a constamment, dans l'appareil gouvernemental, des réunions et des décisions en matière de communication. Ce système électronique est très simple à concevoir et à mettre en place.
Troisièmement, il devrait y avoir une divulgation systématique non seulement des communications, des réunions et des processus décisionnels, mais aussi de tous les documents en ligne qui peuvent être divulgués et dont la communication est dans l'intérêt public. Il devrait y avoir une divulgation systématique dans une base de données en ligne interrogeable, de sorte qu'on ait besoin de présenter moins de demandes.
Quatrièmement, toutes les institutions devraient être tenues de répondre aux demandes d'accès à l'information le plus tôt possible. On ne devrait pouvoir dépasser le délai de 30 jours qu'avec la permission du commissaire. La prorogation maximale de délai serait de 60 jours.
Cinquièmement, toutes les exceptions à la divulgation devraient être clairement et étroitement définies et se limiter aux domaines où l'intérêt public exige le secret.
Sixièmement, le commissaire devrait être autorisé à examiner tous les refus de divulgation et à ordonner la divulgation si elle ne cause pas de préjudice ou si elle est dans l'intérêt public. Si des documents ne sont pas divulgués à cause d'une exception d'intérêt public, ils devraient l'être au plus tard 20 ans après. Cette période serait plus brève pour les documents du Cabinet.
Septièmement, quiconque fait des recherches factuelles ou portant sur des politiques pour le compte du gouvernement dans un domaine qui n'est pas visé par une exception devrait être autorisé à parler publiquement aux médias du sujet étudié et de ses constatations et conclusions sans avoir à obtenir l'approbation de qui que ce soit.
Huitièmement, il faudrait modifier la loi pour permettre à toute personne, même si elle ne vit pas au Canada, de présenter des demandes d'accès à l'information.
Neuvièmement, il faudrait éliminer les droits de 5 $ et interdire aux institutions d'exiger des frais de recherche pour des documents qui n'ont pas été conservés d'une manière qui en facilite l'accès.
Rappelons qu'aucune loi ne s'applique d'elle-même. Des modifications s'imposent pour renforcer le dispositif d'application de la loi, dont il est avéré qu'il n'est pas assez solide pour empêcher les délais et les refus opposés au droit du public de savoir.
Par conséquent, la dixième recommandation veut que le commissaire ait le pouvoir explicite d'exiger des changements systémiques dans les institutions afin qu'elles respectent mieux la loi, notamment en ce qui concerne l'efficacité de la gestion des documents.
Onzièmement, le commissaire devrait avoir le pouvoir et le mandat de sanctionner les infractions, avec des amendes modulées en fonction de la gravité de l'infraction, pour des manquements comme l'entrave intentionnelle à l'accès, la non-création de documents, une mauvaise tenue des documents ou des délais dans la réponse à une demande.
Le président: Il vous reste une minute, monsieur Conacher.
M. Duff Conacher: Merci.
La douzième recommandation veut que les pénalités comprennent, pour les fonctionnaires qui tentent d'échapper aux sanctions en démissionnant ou en prenant leur retraite, la perte ou la récupération partielle de toute indemnité de départ ou de pension.
Treizièmement, le commissaire devrait être tenu de publier sa décision sur un site Web consultable au sujet de chaque plainte qu'il reçoit, de chaque cas qu'il examine, et il doit y avoir un droit clair, pour tout membre du public, d'interjeter appel de toute décision auprès d'un tribunal.
Je passe à la recommandation no 14. Le commissaire est actuellement choisi par le Cabinet du parti au pouvoir selon un processus partisan secret. La Cour d'appel fédérale a statué que le Cabinet est partial lorsqu'il fait ce genre de nomination. Une commission des nominations entièrement indépendante et impartiale devrait être mise sur pied pour chercher et nommer des candidats qualifiés qui seraient approuvés par un comité multipartite de la Chambre chargé de doter les postes de cette nature.
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Oui, à propos des mémoires. J'en ai soumis un au Comité qui propose 18 recommandations. Les députés le recevront lorsqu'il sera traduit.
Je reviens à une question dont Michel Drapeau a parlé lundi. Il a proposé que les demandeurs puissent s'adresser aux tribunaux après un an d'attente. Selon moi, ce n'est pas une solution, étant donné que les tribunaux ne sont pas plus rapides et ont aussi un arriéré.
La vraie solution, c'est que le Parlement soit tenu d'accorder les fonds que le Commissariat demande chaque année, que le vérificateur général et le directeur parlementaire du budget évaluent et établissent ce qui est nécessaire pour assurer une application efficace et rapide de la loi, et que les fonctionnaires reçoivent une formation efficace sur la façon de faire respecter le droit de savoir et le droit d'accès.
Cela réglerait bon nombre des problèmes existants, car en plus des peines que j'ai proposées, tous sauraient qu'ils vont se faire prendre s'ils enfreignent la loi, et qu'ils recevront une sanction sans tarder. Cela permettrait d'assainir considérablement la situation.
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À l'heure actuelle, il y a un mythe selon lequel nous avons un droit à l'information, mais tant que nous n'aurons pas établi fermement, en vertu de l'alinéa 2b) de la Charte — qui porte sur la liberté d'expression — que nous avons le droit d'avoir accès à l'information, nous ne savons pas à quoi nous en tenir.
Peu m'importe ce que les tribunaux disent d'un droit quasi constitutionnel. Tant qu'il n'est pas inscrit dans la loi que nous avons tel droit constitutionnel, nous n'avons pas ce droit. C'est plutôt un privilège, et les gens du gouvernement en profitent.
Cela fait partie du problème de la culture du secret. Tout le monde, des deux côtés, aime dire que rien ne marche. Le fait que rien ne marche sert les intérêts de qui? Des fonctionnaires qui veulent préserver le secret.
Tant que le système ne sera pas vraiment réformé, laissant moins de place au secret, et tant que nous n'aurons pas un droit, le système d'accès à l'information ne marchera jamais. Jamais.
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Les lois provinciales sont généralement calquées sur la loi fédérale, ce qui arrive souvent au Canada si le gouvernement fédéral fait adopter une loi. La même chose s'est produite avec la Loi sur le lobbying et certaines règles d'éthique. Essentiellement, les provinces copient la mesure fédérale.
Nous remarquons les mêmes échappatoires partout au Canada. Certaines provinces ont accordé au commissaire le pouvoir de rendre des ordonnances analogue à celui qu'on a offert et accordé récemment au commissaire fédéral, mais cela n'a pas été suffisant pour mettre fin aux refus et aux délais parce que, encore une fois, les manquements à la loi ne sont passibles d'aucune peine.
Celui qui se gare illégalement n'importe où au Canada, même si cela ne cause aucun tort, même si le véhicule n'est pas garé devant une bouche d'incendie et ne dérange personne, est passible d'une amende plus élevée, d'une peine plus lourde que celle de l'agent qui oppose un déni fondamental du droit du public de connaître des renseignements clés qui révéleraient des actes répréhensibles du gouvernement et des milliards de dollars de gaspillage. Il y a quelque chose de pervers dans notre système.
Certaines provinces reconnaissent la primauté de l'intérêt public. Ce n'est pas suffisant, car les pouvoirs d'exécution des commissaires ne sont pas assez forts. Quelques provinces ont quelques mesures meilleures que celles qui sont prévues au niveau fédéral, mais dans l'ensemble, les résultats sont les mêmes parce qu'il y a les mêmes échappatoires. Même faiblesse de l'application de la loi et même absence de sanctions pour ces violations fondamentales de droits démocratiques clés.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je tiens à remercier encore une fois les témoins d'être là. Ils nous donnent une information vraiment importante. J'ai beaucoup appris. Ce que je veux retenir de tout cela, c'est qu'il y a un coût lié aux problèmes systémiques et culturels dans l'interprétation du droit d'accès à l'information. Je l'entends parfaitement.
Je tiens à remercier M. Rubin d'avoir fait ressortir les coûts que les Canadiens doivent subir. Les pensionnats, les pots‑de‑vin, les scandales, les renflouements de sociétés privées, les problèmes que nous voyons à Hockey Canada, dans les forces armées, à la GRC... Ce sont autant de coûts réels pour les Canadiens, pour leurs droits et pour leur capacité de vraiment comprendre ce qui se passe et comment ils sont touchés et lésés. C'est ce que je ressens et c'est ce que j'entends clairement aujourd'hui. Je tiens donc à vous remercier.
Récemment, bien sûr, nous avons vu encore d'autres suppressions, comme la suppression de 10 000 documents par le ministre de la Justice relativement aux survivants des pensionnats autochtones dans une affaire en instance devant les tribunaux. Cela se passe au moment où nous nous parlons, encore aujourd'hui. Ces problèmes ne vont pas se dissiper. Ils ne cessent de s'aggraver.
Monsieur Rubin, je n'ai pas beaucoup de temps, mais je voudrais que vous nous parliez de l'examen législatif de la Loi sur l'accès à l'information. Vous avez dit dans votre exposé que vous n'alliez pas y participer. Chez quelqu'un qui possède vos connaissances et vos compétences, ce choix est certainement raisonné. Pourquoi ne voulez-vous pas participer à ce processus?