Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Bienvenue à la réunion no 38 du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique de la Chambre des communes.
[Traduction]
La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride conformément à l'ordre de la Chambre du 23 juin 2022. Les membres du Comité peuvent donc participer en personne ici même ou à distance au moyen de l'application Zoom.
Cette réunion a lieu conformément au paragraphe 108(3) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 16 mai 2022. Le Comité entame son étude du système d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels.
Je souhaite la bienvenue à notre témoin d'aujourd'hui. Caroline Maynard est commissaire à l'information du Canada.
La parole est à vous, madame la commissaire. Vous pouvez présenter votre exposé préliminaire.
Je vous remercie de m'avoir conviée à cette réunion cet après-midi, afin que je puisse m'adresser à vous une fois de plus.
[Traduction]
En mai dernier, durant ma comparution devant ce comité, j'ai brossé un portrait plutôt sombre de l'état de l'accès à l'information en 2022. À l'issue de cette comparution, j'étais ravie d'apprendre que le Comité avait voté en faveur de la réalisation d'une étude sur le système d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels
J'aimerais recommander que toute étude de ce genre s'amorce par un examen des conclusions dégagées par d'autres comités parlementaires antérieurs, puisque ce n'est pas la première fois que l'accès à l'information est au cœur d'une telle étude. Malheureusement, les études réalisées précédemment n'ont abouti qu'à quelques changements concrets. Je constate par ailleurs que nous sommes toujours dans l'attente d'un rapport sur l'examen du régime d'accès à l'information entreprise par le gouvernement en 2020.
À ce sujet, permettez-moi de vous proposer d'examiner le document que j'ai soumis dans le cadre de cet examen. Ce document fait état de 18 recommandations visant à modifier la Loi. Au nombre de celles-ci figurent des recommandations selon lesquelles les renseignements confidentiels du Cabinet devraient être assujettis à la Loi tout comme ceux des cabinets du premier ministre et des ministres, ainsi que d'autres recommandations qui visent à améliorer les délais de réponse et à limiter la portée des exceptions.
[Français]
Mes recommandations font également état de quatre aspects à privilégier qui ne nécessitent aucune modification législative. Ces quatre aspects sont le leadership et, par extension, la culture; le besoin d'innover et d'affecter plus de ressources au système d'accès; la nécessité de documenter et de gérer l'information; et la déclassification.
[Traduction]
Par ailleurs, je voudrais insister sur le fait que le respect de la Loi telle qu'elle existe actuellement serait une première étape importante dans l'amélioration de l'état de l'accès à l'information. À l'heure actuelle, 30 % des demandes d'accès ne sont pas traitées dans les délais prescrits par la Loi, même en tenant compte des prorogations. Ce nombre ne cesse de croître d'année en année. Pourtant, la Loi sur l'accès à l'information du Canada ne prévoit aucune dérogation à ses obligations, et ce, même dans des circonstances extraordinaires.
Dans le cadre de mes rencontres avec des ministres et hauts fonctionnaires, il est souvent question d'un engagement commun à l'égard du droit d'accès, mais au bout du compte, les actes sont plus éloquents que les mots. Les dirigeants doivent veiller à ce que leurs institutions respectent les obligations législatives.
C'est la raison pour laquelle, cette année, ma déclaration pour la Semaine du droit à l'information était axée sur le thème de la responsabilité: les dirigeants doivent être tenus responsables du rendement de leur institution en matière d'accès à l'information. À l'issue de notre rencontre annuelle tenue à la mi-septembre, mes homologues provinciaux et territoriaux ont abondé dans le même sens en incitant les dirigeants des institutions publiques à assumer leur rôle en matière de respect du droit d'accès et de promotion de la transparence.
[Français]
Si nous désirons réellement améliorer la situation, les dirigeants des institutions fédérales doivent multiplier leurs efforts, et veiller à ce que leur organisation considère l'accès à l'information comme une responsabilité collective et donne au droit d'accès la place de droit quasi constitutionnel qui lui revient.
En terminant, alors que vous entamez cette étude, je suis heureuse de comparaître de nouveau devant vous afin de discuter de toute question qui pourrait contribuer à créer un meilleur système d'accès pour la population canadienne.
Merci.
[Traduction]
Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Je tiens à remercier la commissaire d'avoir pris le temps de venir nous voir et de nous aider dans notre étude.
Le Secrétariat du Conseil du Trésor est en train de procéder à un examen législatif. Cet examen devrait-il être effectué par des fonctionnaires non élus ou par des parlementaires qui doivent rendre des comptes à la population et qui sont souvent ceux qui demandent ce genre d'information?
La loi actuelle, compte tenu des modifications apportées en 2019 prévoit deux examens législatifs obligatoires, l'un par le Parlement et l'autre par le Conseil du Trésor, c'est-à-dire par le gouvernement. Le premier était censé être effectué un an après l'approbation de la loi et ensuite tous les cinq ans.
Le SCT a entamé l'examen en 2020, et nous attendons un rapport sur ses conclusions. À ce que je sache, ce rapport est censé être déposé à la fin du présent exercice. Je ne sais pas si un examen parlementaire a été entrepris, à moins que ce soit ce que vous faites ici. J'imagine que c'est le cas puisque vous commencez un examen du système, et pour moi, le système comprend la loi.
Nous devrions peut-être inclure un examen de la loi pendant que nous entreprenons cette étude.
Dans la liste des ministères qui respectent les règles d'accès à l'information comparativement à ceux qui sont à la traîne, où se situe le Conseil du Trésor? C'est bien lui qui procède à l'examen de votre bureau et de la loi proprement dite. Dans quelle mesure donne-t-il accès à l'information demandée par les Canadiens?
J'ai la liste ici. Le Conseil du Trésor ne figure pas dans les 20 premiers; donc, il ne s'en tire pas si mal, mais aucun ministère ne s'en tire très bien. Tous ont de la difficulté à respecter le délai de 30 jours, et les prolongations posent beaucoup de problèmes. Le nombre de plaintes que mon commissariat a reçues cette année a augmenté de 70 % par rapport à l'an dernier.
À mon avis, c'est surtout une question de leadership. Les ministères dont les dirigeants croient en l'accès à l'information, le prouvent et prévoient les ressources nécessaires pour répondre aux demandes d'accès ont de meilleurs résultats, mais il n'empêche que nous constatons une autre augmentation cette année. Je crois que je pourrais recevoir 10 000 plaintes cette année si la situation perdure.
Je sais que, en plus du temps nécessaire pour obtenir des réponses... J'ai ici une demande qui a pris 270 jours, soit le délai de 30 jours plus 240 autres, en passant par un certain nombre de ministères.
J'ai ici une demande d'accès à l'information. Elle vient du ministère de la Justice. La question portait sur la participation du ministre Mendicino à la falsification éventuelle de dossiers concernant la date d'entrée en vigueur de la Loi sur le Collège des consultants en immigration et en citoyenneté. Tous les documents du ministère de la Justice sont caviardés en vertu du secret professionnel de l'avocat. Est-ce que c'est acceptable quand on parle d'accès à l'information? Même les lignes de l'objet des documents sont caviardées. Tout ce que nous avons, ce sont des adresses de courriel et parfois « Je vous souhaite une excellente fin de semaine ». C'est tout ce qui était à la disposition du public.
Comme vous pouvez vous y attendre, si vous demandez de l'information au ministère de la Justice, la plupart des renseignements sont protégés par le secret professionnel de l'avocat en vertu de l'article 23. Cela dit, les communications entre avocats ne sont pas toutes confidentielles. Je suis avocate moi-même, et beaucoup de mes communications ne sont pas assujetties au secret professionnel. Cela arrive de plus en plus souvent. Il faudrait examiner le cas en question. Je dirais que c'est bien appliqué 75 % du temps, mais il faut quand même examiner les documents pour se faire une idée.
...je peux comparer les deux documents et je peux vous dire... Les plaignants l'apprécient vraiment, parce que nous sommes un organisme d'examen indépendant et que nous pouvons leur dire au téléphone: « C'est un avis juridique, et vous ne pourrez pas l'obtenir » ou « Oui, il y a de quoi pousser l'enquête un peu plus loin. »
En fait, ce que nous avons ici, ce sont 150 pages caviardées ou complètement supprimées en vertu de l'article 23 de la loi, c'est-à-dire du secret professionnel de l'avocat. Je me demande avec quel sentiment de confiance les Canadiens s'adresseront au ministère de la Justice ou... C'est encore pire que ce que nous obtenons du Conseil privé. Quand nous faisons une demande d'accès à l'information au Conseil privé, des segments sont effacés ou raturés et caviardés, mais il est inacceptable qu'ils suppriment tout ce qui pourrait être sans conséquence pour l'information que nous cherchons. On ne peut pas lire entre les lignes quand on ne peut même pas voir ces lignes.
Pour l'instant, votre responsabilité ne s'applique qu'aux ministères. Qu'en est-il des sociétés d'État? Certaines ne sont pas visées par la loi. Je pense à Nav Canada.
Dans ma présentation au Conseil du Trésor, je crois avoir effectivement recommandé que tout organisme fonctionnant au nom du gouvernement et utilisant des fonds publics pour offrir des services aux Canadiens soit assujetti à la loi. La loi s'appliquerait alors aux sociétés d'État et aux entités privées qui sont parfois engagées sous contrat par le gouvernement.
Merci à la commissaire d'être ici aujourd'hui pour nous faire part de son expertise.
J'étais journaliste dans mon ancienne vie, et j'ai déposé de nombreuses demandes d'accès à l'information à l'époque. Au Hamilton Spectator, à la fin des années 1990, il était prévu que les journalistes présenteraient un certain nombre de demandes. On estimait que c'était un bon moyen de trouver de l'information. Certains députés d'en face le font souvent, eux aussi.
Les choses ont beaucoup changé depuis. À l'époque, il pouvait en coûter des centaines de dollars pour obtenir cette information. Cela prenait quand même des mois, et on recevait une estimation des coûts selon le nombre de documents fournis. Aujourd'hui, je crois savoir qu'il y a des frais de base de 5 $, et je me demande dans quelle mesure cela a transformé le travail de votre commissariat.
Dans quelle mesure cela a-t-il transformé le travail, le type de travail et le nombre de demandes que vous recevez?
Je crois en la liberté et j'estime qu'elle devrait être gratuite. Pour moi, 5 $, c'est très raisonnable, et je pense que les Canadiens sont très chanceux de pouvoir avoir accès à l'information gratuitement.
Le problème, c'est que nous ne gérons pas très bien nos renseignements et que certains demandeurs veulent obtenir une énorme quantité de documents, de sorte que les administrations doivent examiner une masse parfois écrasante de papiers et de documents.
Auparavant, comme on facturait le service, le demandeur réduisait la portée de ses demandes parce qu'il ne voulait pas dépenser 1 000 $. De nos jours, ce n'est plus le cas, et les ministères nous disent qu'ils traitent des demandes de milliers de pages. À mon avis, l'un des principaux enjeux est la gestion de l'information. Si nous devions nettoyer notre boîte de courriel... Il arrive qu'une demande porte sur certaines décisions et qu'il y ait 500 pages d'une chaîne de courriels. Si quelqu'un avait simplement conservé les trois ou quatre pages vraiment utiles, on n'aurait pas le problème supplémentaire que représente cette quantité de papier.
Il y a des demandeurs déraisonnables et des gens déraisonnables. C'est pourquoi le gouvernement a également modifié la loi et ajouté une disposition prévoyant que, si on vous adresse une demande frivole ou de mauvaise foi, vous pouvez demander à mon commissariat l'autorisation de ne pas y répondre. Cette mesure n'est pas beaucoup utilisée, et c'est tant mieux parce qu'il s'agit d'un moyen exceptionnel, mais, si un ministère estime qu'une demande est complètement déraisonnable, de mauvaise foi ou non conforme à la Loi sur l'accès à l'information, il peut l'utiliser. Elle a été utilisée et approuvée à quelques reprises au cours des deux dernières années.
Pensez-vous que les choses devraient être plus encadrées à cet égard? Je crois savoir que les gens peuvent demander n'importe quel document à un ministère, ce qui est absolument déraisonnable et impossible quel que soit le ministère. Faudrait-il un cadre pour que ce soit plus équilibré et que le processus soit plus nuancé?
Y a-t-il un moyen, ou est-ce que le processus actuel votre autorité est suffisant?
La loi vise à responsabiliser le gouvernement et à améliorer notre démocratie. Qui va juger si la demande est effectivement faite dans ce but? C'est vraiment difficile. Les journalistes, c'est vrai, demandent parfois plus que ce dont ils ont besoin, parce qu'ils cherchent peut-être un sujet d'article ou parce qu'ils veulent être sûrs de ne rien manquer. Il serait difficile de circonscrire l'intention d'une demande. Le système global actuel permet de garantir la liberté. Nous donnons aux Canadiens tout ce que nous pouvons.
Il y aura peut-être de plus en plus de limitations, et c'est déjà le cas, pour éviter les demandes déraisonnables ou de mauvaise foi, parce que les gens vont commencer à être informés de mes décisions. Je suis en train de publier mes décisions pour donner des lignes directrices expliquant aux administrations quand les utiliser. J'espère que cela réduira le nombre de cas de ce genre.
Je sais que notre gouvernement a pris des mesures proactives pour rendre publics beaucoup de documents auparavant protégés par la loi. Cela a-t-il transformé le travail du Commissariat?
La loi exige maintenant la divulgation proactive d'une grande partie de l'information qui était couverte par des politiques auparavant. La seule chose qui a été ajoutée, et c'est très utile, c'est la liste des titres des notes d'information. Mais, comme on voit désormais les titres, les demandeurs veulent maintenant voir aussi le document; il y a par ailleurs des gens très créatifs qui s'arrangent pour que le titre ne dise pas vraiment sur quoi porte la note d'information. Il serait intéressant de savoir dans quelle mesure cela a fait augmenter le nombre des demandes d'accès à l'information.
J'aimerais que les administrations divulguent de façon proactive les renseignements qui sont demandés par les Canadiens et ne figurent pas sur cette liste. Appelez cela de la divulgation proactive ou de la divulgation volontaire, mais, si vous recevez trois demandes sur le même sujet, par exemple sur des contrats liés à la COVID-19 ou à un vaccin... publiez les documents, et vous ne recevrez pas de demande d'accès par la suite.
À mon avis, c'est là que nous devrions mieux circonscrire ce que les gens demandent.
Vous avez légèrement dépassé votre temps de parole, mais pas trop. Nous avons du temps aujourd'hui. M. Bezan a également pris un peu plus de temps que prévu.
Bonjour, madame Maynard. Je vous remercie d'être ici aujourd'hui.
Lors de votre dernière comparution, très édifiante, vous aviez dit qu'il y avait de nombreux retards en raison du volume de demandes. Diriez-vous que le gouvernement du Canada a une culture de la vie privée?
Je crois que vous voulez dire une culture du secret.
Encore une fois, cela dépend vraiment de l'organisme dont il s'agit, de son sous-ministre, de ses directeurs généraux et de ses fonctionnaires. Chaque organisme est différent. Comme je l'ai dit tout à l'heure, aucun n'est parfait. Cependant, nous voyons une grosse différence quand la tête dirigeante demande des statistiques sur l'accès à l'information afin de savoir où se situent les goulots d'étranglement.
Dans le cas de l'Agence du revenu du Canada, son commissaire demande à savoir toutes les deux semaines ce qui se passe au sujet de l'accès à l'information. Nous avons constaté énormément de progrès dans cet organisme et nous citons en exemple ce type de pratiques auprès des autres organismes.
Il existe une culture du secret dans le sens où les fonctionnaires, lorsqu'ils reçoivent une demande d'accès à l'information, se demandent quels renseignements enlever et non quels renseignements divulguer. C'est une mentalité qui est difficile à changer.
Nous incitons beaucoup les institutions à faire de la formation, non seulement auprès de leur unité d'accès à l'information, mais aussi auprès de tous leurs fonctionnaires, qui devraient, collectivement, avoir un sens de responsabilité, comme je l'ai dit tout à l'heure. Ils font partie de la fonction publique et sont appelés dans le cadre de leur travail à traiter des demandes d'accès à l'information et à examiner les documents qu'ils rédigent et la façon dont ils les protègent. Ces fonctionnaires doivent garder à l'esprit que le but est de communiquer l'information le plus possible, pas de la cacher.
Cela dépend vraiment de la façon dont le contrat a été rédigé. Parfois, il contient des clauses de confidentialité. Il est vraiment difficile de nommer ces motifs spontanément, parce que chaque cas est différent.
Au Commissariat, nous encourageons les gens qui établissent les contrats à faire preuve du plus de transparence possible et à avertir l'entrepreneur que l'information va être accessible aux Canadiens, qui veulent savoir où va leur argent et comment sont prises les décisions.
Si un contrat soulève effectivement des questions de sécurité nationale, il est traité de façon différente. Il faut toutefois que cela vise réellement à éviter un danger ou un abus de confiance.
Les exemptions prévues à la Loi sur l'accès à l'information devraient toujours être invoquées de façon exceptionnelle.
Il y a plusieurs critères. Souvent, nous voyons que deux critères s'appliquent, mais pas le troisième. Malheureusement, l'enquête qui permet d'en arriver à cette conclusion prend souvent deux ou trois ans.
Cette agence fait l'objet de beaucoup de plaintes relatives aux demandes d'immigration, comme dans le cas d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Dans les deux cas, il s'agit plutôt de plaintes se rapportant aux délais de traitement des demandes d'accès à l'information plutôt qu'aux exemptions invoquées.
Toutes les institutions peuvent s'améliorer, mais l'Agence, compte tenu du nombre de demandes d'accès à l'information qu'elle reçoit, est très novatrice et prend l'accès à l'information au sérieux. Elle emploie 250 analystes en accès à l'information, soit le double du nombre d'employés que compte mon commissariat.
Si je comprends bien, vous recommandez que les contrats soient faits comme il faut et qu'ils soient publiés. En fin de compte, vous prônez une culture de l'ouverture plutôt que du secret.
Encore une fois, chaque institution est différente. Santé Canada, par exemple, fait énormément d'efforts. Comme les gens demandent notamment les résultats des tests faits en laboratoire, ce ministère a commencé à les publier, en réponse à cet intérêt.
Les institutions pourraient se baser sur les demandes qu'elles reçoivent chaque année et déterminer les dix renseignements les plus demandés afin de les publier. Aux États‑Unis, après trois demandes, l'information est publiée. Nous pourrions procéder de cette façon au Canada et établir une liste de ce qui est demandé plutôt que d'attendre de recevoir une demande d'accès chaque fois. D'après moi, ces demandes devraient toujours être le dernier recours et l'information devrait déjà être publique. On parle ici de l'information de nos Canadiens.
Dans l'une de vos recommandations, vous avez parlé des documents confidentiels du Cabinet. Or, on constate que le nombre de ceux qui ne sont pas publiés est à la hausse. Que pouvez-vous nous apprendre à ce sujet?
Malheureusement, ces documents ne relèvent pas de mon autorité et sont exclus de l'application de la Loi sur l'accès à l'information à l'heure actuelle. Tout ce que mon bureau reçoit est une confirmation par l'institution que certaines des pages demandées sont visées par cette exclusion.
Par le passé, j'ai recommandé un mécanisme indépendant de révision et que mon commissariat soit autorisé à au moins voir ces documents exclus de façon à pouvoir confirmer que ce sont effectivement des documents confidentiels du Cabinet. Ce genre de situation se produit, comme dans le cas de certains documents refusés au motif qu'ils sont visés par le secret professionnel liant un avocat à son client, aux termes de l'article 23 de la Loi. Or, quand nous révisons ces documents, nous pouvons confirmer qu'il ne s'agit pas d'un avis juridique.
Dans le cas des documents confidentiels du Cabinet, je voudrais pouvoir m'assurer que cette exemption s'applique réellement.
J'aimerais vous souhaiter de nouveau la bienvenue au Comité, madame Maynard. Votre présence ici tombe à point nommé.
Vous avez dit dans votre exposé préliminaire que l'accès à l'information est pour ainsi dire fondamental pour la liberté. Je crois que vous avez utilisé le mot « liberté » à plusieurs reprises. Pourriez-vous nous expliquer les valeurs ou les raisons qui fondent votre conviction que, dans un système démocratique, l'accès à l'information est un élément fondamental de notre liberté?
À mon avis, s'ils n'ont pas d'information, s'ils ne savent pas quelles décisions sont prises en fonction de quels faits et de quelles données et s'ils ne sont pas informés des dépenses, les Canadiens ne sont pas au fait de la situation. On n'arrête pas de dire que les Canadiens perdent confiance en notre démocratie et en nos gouvernements. En passant, ce sont les municipalités qui sont les plus ouvertes. Elles organisent des audiences publiques, et les Canadiens peuvent y être informés des décisions à l'échelle municipale. Il est très difficile d'obtenir de l'information à l'échelle provinciale et à l'échelle fédérale.
C'est pourquoi je pense que nous devons être proactifs dans le partage de l'information, parce que les Canadiens posent de plus en plus de questions. Ils connaissent leurs droits, et s'ils n'obtiennent pas l'information auprès de nos propres administrations, ils vont se tourner vers d'autres sources, et c'est ce qui mène à la désinformation.
C'est pourquoi je pense que plus on leur en donne, même s'ils ne sont pas d'accord... C'est pourquoi la démocratie est si importante: ils n'ont pas à être d'accord avec vous. Ils n'ont pas à être d'accord avec l'autre partie, mais au moins ils comprennent. C'est la même chose avec nos enfants. Ils nous posent des questions, et nous leur expliquons. Ils n'ont pas à être d'accord.
Je pense aux cas où le Cabinet du premier ministre a utilisé des dizaines de décrets secrets. Je pense à mon travail au Comité d'examen de la Loi sur les mesures d'urgence, où des membres importants du Cabinet refusent de divulguer des renseignements de base en dépit de ce qui me semble être notre privilège parlementaire. En fait, certains hauts fonctionnaires disent carrément, aussi bien ici, par la voix de la GRC, qu'à d'autres comités, qu'ils ne nous fourniront pas les renseignements les plus élémentaires. En fait, il y a eu une situation où...
Pourriez-vous arrêter le chronomètre? Est-il possible de faire cesser le bruit provenant du personnel? Cela arrive de temps en temps, et cela fait perdre le fil.
Je vais revenir sur l'idée que ce gouvernement se disait ouvert par défaut. En fait, en 2018, il a créé un ministère du Gouvernement numérique. Ce ministère a existé trois ans, puis il a brusquement été éliminé en 2021. À mon avis, il existe une profonde culture du secret qui tient la population et la Chambre des communes dans l'ignorance des faits.
Comme député, quand j'entends quelqu'un dire qu'il ne veut pas nous donner de notes — vous avez parlé de notes d'information, et je vous renvoie à mon interaction avec la vice-première ministre, qui a carrément refusé de donner des notes d'information de base qui aurait dû être mises à la disposition du Comité — ou qu'il n'y a pas accès — et je parle du ministre de la Sécurité publique de l'époque, M. Bill Blair... Le droit d'accès ne peut exister sans dossiers réels.
Selon vous, est-ce que le fait que les ministères et les administrations ne conservent pas suffisamment de dossiers porte atteinte au droit des Canadiens d'accéder à l'information?
C'est l'objet d'une autre des recommandation que j'ai faites dans mon mémoire, à savoir la nécessité de légiférer sur l'obligation de documenter. Sans dossiers, comme vous venez de le dire, il n'y a pas d'accès.
La politique actuelle est plus ou moins respectée. Le modèle de travail hybride fait qu'il est de plus en plus difficile de savoir ce qui est discuté et ce qui est décidé. Les gens travaillent de chez eux. Ils se servent de Teams. Ils envoient des textos. C'est une préoccupation pour tous les commissaires partout au Canada. Nous avons rédigé une résolution à ce sujet en 2016. La Colombie-Britannique est la seule province qui ait l'obligation législative de documenter.
J'ai encore quelques questions à poser dans le peu de temps qu'il me reste.
Je pense au travail secret de COINTELPRO, qui supposait l'infiltration de mouvements de droits civiques. Des documents rendus publics par le gouvernement américain il y a des décennies sont toujours retenus par le gouvernement canadien.
Les différences entre les deux pays sont-elles simplement de nature législative, ou est-ce que la différence tient à la culture et à l'éducation de ceux qui travaillent au sein des gouvernements et de ces administrations connexes?
Les choses sont effectivement différentes entre les États-Unis et le Canada en matière de déclassification des documents. Ils ont un programme. Tous les 20 ans, les documents secrets ou très secrets font l'objet d'un examen. S'ils sont déclassifiés, ils sont beaucoup plus faciles à...
Nous recommandons également que le gouvernement du Canada ait un programme, que ce soit sur 15, 20 ou 50 ans. À vous de choisir un chiffre. À l'heure actuelle, il n'y a rien, et donc...
Durant la vie à la fois brève et plutôt bizarre selon moi du ministère du Gouvernement numérique, au cours de laquelle le gouvernement a prétendu être accessible et ouvert, avez-vous constaté des améliorations concrètes ou est-ce que, selon vous, la situation s'est aggravée depuis qu'ils ont démantelé ce ministère et abandonné ce mandat sans autre forme de procès?
Merci, madame la commissaire, de vous joindre à nous aujourd'hui pour nous parler de l'importance de l'accès à l'information comme fondement de la démocratie, de la liberté et d'un gouvernement responsable.
Je vais commencer par l'obligation de documenter. J'ai évidemment eu connaissance de problèmes au sujet de renseignements manquants et d'échappatoires qui étaient manifestement... ou de demandes d'accès à l'information concernant des appels téléphoniques, des notes sous forme d'autocollants, des messages vocaux ou des enregistrements. Est-ce à cela que vous faites allusion quand vous parlez de l'obligation de documenter?
Ce que je veux dire, c'est que, après une réunion par exemple, il faut veiller à ce que des procès-verbaux soient dressés et correctement sauvegardés pour qu'ils soient faciles à retrouver. À l'heure actuelle, nous baignons dans un environnement de documents électroniques et de réunions sur Teams. Si personne ne prend le temps de bien documenter ce qui se passe et les décisions qui sont prises et de mettre le tout dans un endroit où l'analyste qui viendra après vous le trouvera, le droit d'accès n'existe pas, puisqu'il n'y a pas de dossiers.
Au sujet des analystes, avez-vous des chiffres sur le nombre d'agents de l'AIPRP qui travaillent à la maison comparativement à ceux qui travaillent au bureau?
Au début de la pandémie de COVID-19, il a été très difficile de travailler et d'effectuer des enquêtes, car la plupart des analystes n'avaient pas accès à leurs serveurs ou à quelque information que ce soit. Aujourd'hui, la COVID n'est plus une excuse. Vous devriez avoir accès à votre serveur et aux documents utiles, et le BPR devrait être en mesure de vous fournir l'information nécessaire.
Les retards sont rarement attribuables à l'analyste. La faute en est plutôt au fonctionnaire qui a le document dans son bureau et qui n'y accorde pas beaucoup de temps.
Avez-vous des chiffres concernant le nombre d'analystes privés comparativement au nombre d'analystes qui travaillent à temps plein pour le gouvernement? Avez-vous des renseignements à ce sujet?
Il serait utile de savoir ce que cela coûte. Je sais qu'on paie des centaines de milliers de dollars, peut-être des millions de dollars, à des entrepreneurs pour répondre à des demandes d'accès à l'information, et il serait bon de le savoir. C'est effectivement une question à poser au SCT.
J'ai quelques autres questions. Concernant les lanceurs d'alerte, je crois vous avoir posé cette question la dernière fois que vous êtes venue nous voir. J'aimerais vous donner l'occasion de parler brièvement de la nécessité de les protéger au Canada.
J'y crois toujours, mais ce n'est pas du tout de mon ressort. S'ils sont protégés d'une façon ou d'une autre... Il faut effectivement les protéger, mais cela ne relève pas de l'accès à l'information en soi.
Je suis curieux de savoir si vous avez déjà remarqué une différence dans les délais de réponse selon les demandeurs qui s'adressent à l'AIPRP. Par exemple, selon qu'il s'agit d'un journaliste, d'un député, d'un simple citoyen ou d'un organisme gouvernemental, avez-vous déjà remarqué une différence dans les délais?
Je ne sais pas comment les administrations traitent ces demandes. Elles ne sont pas censées vérifier qui demande l'information. Sur le plan statistique, je sais que 65 % de toutes les demandes sont faites par des membres de la population générale, et cela m'a surprise. Au début de mon mandat, je pensais que les journalistes ou les partis politiques seraient les principaux demandeurs. Les Canadiens savent qu'ils ont un droit et ils l'utilisent.
On n'est pas censé classer les demandes en fonction du demandeur. C'est premier arrivé, premier servi.
J'ai une dernière question dans les 40 secondes qu'il me reste.
Au sujet des documents confidentiels du Cabinet, j'ai effectivement pu constater que non seulement cela prolonge les délais, mais que cela semble aussi servir régulièrement d'excuse pour ne pas divulguer de renseignements. Pourriez-vous nous dire quels changements seraient nécessaires pour s'assurer qu'un document comme un document confidentiel du Cabinet ne puisse pas servir de prétexte pour éviter la divulgation de documents?
À l'heure actuelle, les documents confidentiels du Cabinet ne relèvent pas de ma compétence. Je ne suis pas autorisée à les voir. J'ai recommandé que les documents qu'on prétend être des documents confidentiels du Cabinet soient soumis au moins au premier niveau de révision indépendante pour que nous puissions confirmer que c'est effectivement ce qu'ils sont.
Merci, monsieur le président, et merci à notre invitée de s'être jointe à nous.
Dans votre rapport annuel de 2021-2022, vous signalez une augmentation saisissante du nombre de plaintes, qui atteignent le niveau le plus élevé depuis la création du Commissariat. Comment peut-on faire diminuer le nombre de plaintes qu'il reçoit chaque année?
Nous devons mieux répondre aux demandes dans les délais prescrits.
La loi prévoit 30 jours, et il est possible de demander une prorogation de délai. En ce moment, de plus en plus d'institutions demandent des prorogations, ne respectent pas les délais de 30 jours ou ne répondent pas du tout. Dans certains cas, les plaignants disent attendre depuis des mois et des mois, sans même obtenir un accusé de réception. Nous devons mieux répondre aux demandes d'accès à l'information.
Les plaintes augmentent de jour en jour. Nous en sommes déjà à 4 900 cette année. Nous devons mieux répondre aux demandes. Nous devons donner des ressources aux services responsables. Il faut sensibiliser les fonctionnaires au fait que cela fait partie de leurs fonctions. C'est un devoir collectif. Les dirigeants doivent transmettre le message à leurs institutions.
Il faut mieux gérer notre information, comme je le disais tout à l'heure. Les demandes sont de plus en plus volumineuses et il faut donc plus de temps pour y répondre. Si l'information était mieux consignée, si les versions provisoires étaient effacées et que les principaux documents ministériels étaient conservés, nous pourrions donner de bonnes réponses et respecter les délais.
Dans votre rapport annuel, vous dites que « l’adoption d’outils technologiques spécialisés » permettra d'améliorer le système d'AIPRP. Avez-vous trouvé des technologies particulières dont le gouvernement devrait prendre note?
Le Comité devrait inviter IRCC, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Depuis mon enquête systémique... Le ministère recevait 160 000 demandes d'accès par année. Aujourd'hui, il en est à 200 000. Il a utilisé des robots pour trouver l'information plus rapidement et la traiter. C'est étonnant. Ses représentants ont donné une présentation aux commissaires provinciaux et territoriaux lors d'une conférence.
La situation est toujours loin d'être parfaite, mais il serait certainement utile que le ministère fournisse volontairement l'information sur son portail au lieu d'attendre les demandes d'accès. Il serait également utile de recourir à des moyens technologiques comme l'intelligence artificielle pour trouver une information semblable dans les documents au lieu de charger quelqu'un de la chercher manuellement. Du reste, certaines institutions utilisent ces moyens.
Au plan de l'accès à l'information, quelles sont les incidences particulières sur les peuples autochtones? Comment pourrions-nous apporter des améliorations?
Il est certain que les efforts de réconciliation en souffrent. Le gouvernement possède tellement d'information que nous devons encore leur communiquer sur ce qui a eu lieu au cours de notre histoire, si nous voulons qu'ils puissent comprendre ce qui s'est passé. La commission a été très utile, mais nous devons communiquer davantage d'information.
Heureusement, beaucoup d'institutions leur donnent l'information sans attendre de se la faire demander. Elles le font en répondant à des demandes officieuses qui évitent aux Autochtones de présenter des demandes d'accès et de payer l'information, mais il y a encore beaucoup de documents dont ils ont besoin et qu'ils n'ont toujours pas. Des avis juridiques, par exemple.
Le ministre Miller a dit que son ministère discutait avec celui de la Justice et cherchait à faire communiquer une partie de cette information. J'ignore où on en est, mais j'espère que cela se traduira par une plus grande communication d'information aux Premières Nations et aux autres Autochtones.
Lorsqu'ils déposent une plainte, le Commissariat les consulte, certainement. Il intervient seulement lorsqu'il y a une plainte et qu'une enquête s'impose. Nous avons pris connaissance de certains cas et nous essayons de leur donner la priorité dans nos enquêtes, étant donné les délais, le volume d'information et le caractère délicat des documents. Il arrive souvent que ce soit une simple question de respect des délais. S'ils obtenaient l'information, ce serait déjà une première étape.
Il s'agit de demandes qu'ils ont faites et qui n'ont pas été satisfaites ou d'une exception qui a été invoquée — comme l'article 23, le secret professionnel de l'avocat — pour des documents dont le ministère de la Justice s'est servi dans des affaires mettant en cause des Autochtones. Il faut voir si le ministre de la Justice pourrait user de son pouvoir discrétionnaire pour autoriser la communication de l'information. Voilà le genre d'échange que nous avons avec les ministères, y compris celui de la Justice.
Madame la commissaire, êtes-vous au courant de l'étude qui a été publiée par la revue Foreign Affairs au printemps sur les critères utilisés aux États‑Unis pour les documents classés « Secret », « Très secret », et ainsi de suite?
On y mentionnait que les fonctionnaires chargés de classifier les documents prenaient des précautions supplémentaires afin de ne pas se faire blâmer. Est-ce un peu ce qu'on voit ici aussi?
On peut effectivement se demander si certains documents auraient dû être classés « Secret » ou « Très secret ».
Nous essayons de démontrer aux fonctionnaires que ce n'est pas parce qu'un document porte l'une ou l'autre de ces mentions que les exemptions de la Loi sur l'accès à l'information doivent s'appliquer. Contrairement à ce que certains pensent, la classification « Secret » ou « Très secret » doit être prise en considération, oui, mais elle ne doit pas automatiquement entraîner l'application de l'exemption relative à la sécurité nationale. Il faut faire attention et appliquer la Loi comme elle est écrite, et non en fonction de la classification du document.
Selon nous, une des dispositions de la Loi qui est utilisée de façon abusive est l'alinéa 21(1)a) concernant les avis ou recommandations, résultant en des documents complètement caviardés. Dans de tels cas, nous ordonnons à l'institution de divulguer l'information factuelle ou statistique qui ne contient pas d'avis ou de recommandation. Les notes d'information contiennent souvent plusieurs pages de ce genre d'information, qui auraient dû être divulguées.
Dans notre soumission au Conseil du Trésor, nous lui avons recommandé d'ajouter dans la Loi une liste d'informations auxquelles l'exemption prévue à l'alinéa 21(1)a) ne devrait pas s'appliquer. On retrouve ce genre de précision dans la loi ontarienne équivalente, ce qui aide beaucoup les fonctionnaires provinciaux à appliquer cette exemption de façon plus cohérente.
Nous devrions au moins avoir la base, sans nécessairement savoir ce qui a été recommandé ou quels ont été les avis. Nous devrions au moins savoir si les bons faits ont été utilisés.
Vous recommandez que le gouvernement du Canada suive l'exemple de pays comme les États-Unis et que l'information soit rendue publique lorsqu'il y a trois demandes d'information ou plus sur le même sujet. Dans votre rapport annuel de 2021-2022, vous soulignez l'augmentation du nombre de plaintes. À votre avis, combien d'entre elles auraient pu être réglées si cette façon de faire avait été adoptée?
Impossible de dire. Nous ne tenons pas de statistiques sur les types d'information demandés. Je voudrais bien pouvoir vous le dire, mais avec 7 000 plaintes par année...
Il y a des leçons à tirer de l'accès à l'information. Quand on sait qu'une crise va survenir, comme celle de la COVID et qu'il faudra des notes d'information à ce sujet, pourquoi ne pas préparer un document normalisé? Tel document sera publié et tel autre non, mais ils sont rédigés en prévision des demandes d'accès à l'information.
Dans votre lettre au président du Conseil du Trésor, en juillet 2021, vous avez souligné « la nécessité de prendre des mesures immédiates et concrètes, plutôt que d’attendre des modifications législatives ». Un an plus tard, quelles mesures concrètes et immédiates le président du Conseil du Trésor a-t-il prises pendant ce laps de temps?
Je vous invite à vous adresser au Conseil du Trésor pour obtenir des précisions. Le Secrétariat du Conseil du Trésor a créé un bassin de personnel où devaient puiser les institutions pour engager de nouveaux analystes. On me dit que l'initiative est récente. C'est une mesure indéniablement nécessaire, car toutes les institutions ont besoin...
Soyons clairs. À votre avis, puisqu'il est question de mesures immédiates et concrètes, est-il juste de dire que d'autres mesures s'imposent? Dans l'affirmative, quelles mesures immédiates et concrètes exigeriez-vous du Conseil du Trésor à l'avenir?
Il nous faut davantage de ressources. Nous avons besoin d'un programme de classification et de formation. Il ne s'agit pas que de ressources humaines, mais aussi de ressources financières et d'innovations.
Merci, monsieur le président, et merci à vous, madame la commissaire Maynard, de vous être jointe à nous.
Je vais consacrer quelques minutes au projet de loi C-58. La dernière fois que des recommandations ont été faites au Parlement, ce projet de loi était censé corriger certains problèmes que nous avions constatés. Trois annnées ont passé depuis que le projet de loi a été mis en application et que des modifications ont été apportées au système d'AIPRP.
Cela a-t-il facilité ou entravé votre travail et celui du commissaire à la protection de la vie privée?
Vous n'ignorez pas que les changements n'ont pas été nombreux, mais l'un d'eux m'a vraiment aidée: le pouvoir qui m'a été accordé de prendre des ordonnances au lieu de formuler de simples recommandations. Lorsque les institutions savent qu'une ordonnance va venir, elles se pressent un peu. Cela nous a donc aidés à traiter des dossiers et à obtenir des règlements informels.
De plus, lorsque nous ne parvenons pas à un règlement informel — le plaignant n'est toujours pas satisfait ou nous prenons une ordonnance —, j'adore le fait que nous puissions maintenant publier les rapports. Auparavant, nous ne pouvions pas le faire. Il nous manquait environ 35 ans de jurisprudence au Commissariat, avec toutes sortes de cas qui ont fait l'objet d'une enquête et des positions qui ont été prises et qui n'ont pas été rendues publiques avant le rapport annuel. Une publication par année, ce n'est pas suffisant.
Nous pouvons maintenant publier tous nos rapports. Cela nous a aidés à expliquer aux plaignants: « C'est un cas très semblable au vôtre. Voici ce qui va se passer. ». Ou encore à expliquer aux institutions: « C'est une position que la commissaire a adoptée, et elle adoptera probablement la même dans votre cas parce qu'il est très semblable. »
Cela aide vraiment à régler les cas. La publication a été une grande amélioration.
Nous avons maintenant les fonds nécessaires pour fermer 4 000 dossiers. Nous avons 7 000 cas, et nous allons en avoir environ 10 000. Il nous faudra certainement plus de ressources.
Je vais bientôt demander des fonds supplémentaires, y compris pour notre capacité de publication, car il faut tout traduire. Nous voulons nous assurer que ces documents sont bien écrits pour que tout le monde puisse les comprendre. Il n'est pas facile de rédiger un rapport sur l'accès à l'information quand on ne peut pas fournir l'information visée par des exceptions. Il faut trouver des façons de donner l'information qui aidera tout le monde ou le plus grand nombre de gens possible.
L'an dernier, nous en avons réglé 6 500. Bon nombre de ces problèmes ont été réglés de façon informelle.
Nous avons consacré tout notre argent à nos enquêtes l'an dernier. Cela ne peut pas durer. Nous devons aider nos services intégrés, nos services juridiques et nos services de traduction.
Comme le volume augmente, nos statistiques montrent que, si nous n'obtenons pas de fonds supplémentaires... Nous pourrions recevoir environ 15 000 plaintes au cours des deux prochaines années.
Le projet de loi C-58 permet aux ministères de rejeter des demandes d'AIPRP avec votre permission. Je vois dans le rapport que vous avez reçu 36 demandes en ce sens et que vous n'en avez approuvé que deux. Pourquoi seulement deux? Y a-t-il eu une augmentation massive des demandes rejetées l'an dernier?
La plupart du temps, c'est parce que les institutions n'ont pas fait leur travail avant de demander la permission de ne pas communiquer l'information.
L'obligation de prêter assistance est très importante. Lorsque quelqu'un demande un nombre énorme de dossiers, ce n'est pas parce qu'il y a beaucoup de documents que la demande elle-même est déraisonnable. Parfois, l'institution ne communique pas avec le demandeur pour tenter de faire diminuer le nombre de documents et lui expliquer qu'il va recevoir 22 millions de pages. Ce que nous conseillons souvent aux institutions, c'est de commencer par prêter assistance au demandeur, de discuter avec lui. Elles doivent faire ces démarches avant de s'adresser à nous.
Il y a là un apprentissage à faire. Si nous donnons des permissions, c'est que les demandes ont clairement été faites de mauvaise foi. Quelqu'un avait déjà reçu tous les documents et les demandait de nouveau. Ce genre de chose.
Ces dernières années, vous avez entendu parler de ministères qui évitaient délibérément de répondre aux demandes d'accès à l'information en utilisant des noms de code. Il y a eu le cas du vice-amiral Mark Norman. Ils ont utilisé un nom de code pour le vice-amiral de façon à se soustraire aux demandes d'accès à l'information.
Y a-t-il des recommandations que nous devons faire pour éviter ces stratagèmes à l'avenir?
Une disposition déjà présente dans la loi précise qu'altérer un document, comme le modifier, l'effacer ou le détruire, peut être un acte criminel. Si je remarque quelque signe d'intervention intentionnelle, je peux en saisir le procureur général.
Je vous remercie de votre présence aujourd'hui, madame Maynard. Je trouve que vos témoignages devant ce comité sont toujours intéressants et que vous nous donnez beaucoup de matière à réflexion.
Mon bureau a étudié certaines données. Vous aviez déjà mentionné le nombre énorme de demandes d'accès à l'information reçues par le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Selon l'analyse de mon bureau, les demandes d'accès à l'information soumises à ce ministère il y a neuf ans représentaient un peu moins de la moitié du nombre total de demandes aux institutions fédérales. Maintenant, elles en représentent presque les trois quarts.
Qu'est-ce qui peut expliquer cette forte hausse du nombre de demandes d'accès à l'information? D'après les comparutions précédentes des représentants du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, nous savons que ce dernier a des problèmes et qu'il est en train de développer un nouveau système de traitement des données pour automatiser le processus. Est-ce que cela va aider à réduire le nombre de demandes d'accès à l'information, selon vous?
Vous l'avez dit, nous recevons énormément de plaintes liées aux demandes d'accès à l'information faites auprès du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, à tel point que j'ai lancé il y a deux ans une enquête systémique. Celle-ci nous a permis de constater que l'information demandée de façon systématique par les agents représentant les immigrants ou les réfugiés est souvent de l'information qui devrait se trouver sur le portail du ministère.
C'est comme si, chaque fois que vous vouliez avoir une information en rapport avec votre avis de cotisation de l'Agence du revenu du Canada, vous deviez faire une demande d'accès à l'information. Il serait complètement déraisonnable de demander aux Canadiens de faire une demande d'accès à l'information pour s'informer de leur propre dossier d'impôt. C'est pourtant ce qui se produit chez Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. En effet, pour savoir où en est leur demande d'immigration ou quelles sont les raisons pour lesquelles elle est a été refusée, les gens doivent faire une demande d'accès à l'information, car ces renseignements ne sont pas accessibles sur le portail du ministère.
En réaction aux conclusions de mon enquête systémique, le ministère est en train de mettre en place un nouveau système offrant plus d'information, comme vous l'avez mentionné. De plus, ses fonctionnaires ont changé le libellé de leurs lettres de décision pour y offrir davantage de détails. Avec le temps, nous espérons que les agents d'immigration vont constater que le portail et ces lettres leur fournissent l'information qu'ils recherchent, et que le nombre de demandes d'accès va diminuer. Ce n'est pas encore le cas.
Je reviens à la question de la divulgation, un autre sujet qui n'est pas nécessairement lié.
Lors de votre témoignage aujourd'hui, vous avez parlé de demandes déraisonnables dans certains cas, tout en disant que les fonctionnaires devraient être plus sages dans le traitement de leurs courriels et documents électroniques.
Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet? De quelle façon le gouvernement peut-il mieux classer les documents électroniques pour faciliter la divulgation de l'information? Au lieu d'avoir une chaîne de 100 courriels, pourrions-nous nous limiter à deux ou trois pages?
Mon bureau a émis une ligne directrice à ce sujet, pour aider les gens à mieux comprendre leurs responsabilités relatives aux courriels. Elle s'intitule « 9 conseils du Commissariat à l’information sur la gestion des courriels ».
Nous constatons que c'est effectivement un problème, même à notre commissariat. Nous allouons souvent une demi-journée aux employés pour faire le ménage dans leur boîte de courriels, parce que nous n'avons plus d'espace mémoire. Ce ne devrait pas être une chose qu'on devrait exiger, les employés devraient le faire de façon systématique.
Par exemple, si vous êtes cinq à vous échanger des courriels, nous recommandons qu'une seule personne, l'auteur du courriel initial, conserve la chaîne de courriels. Sinon, si une demande d'accès à l'information est faite et que les cinq personnes ont gardé cette chaîne, les cinq devront répondre à la demande et vous aurez cinq fois le même échange de courriels.
Il serait préférable d'établir des règles plus claires concernant qui devrait garder les courriels et quels documents sont jugés éphémères. Il n'est pas question ici d'effacer tout le contenu des boîtes de courriels, mais de bien classer les documents nécessaires dans un répertoire où on pourra les retrouver, au lieu de les mettre dans votre propre répertoire, auquel personne d'autre que vous n'aura accès en votre absence.
Vous avez largement dépassé votre temps de parole, monsieur Fergus. Je suis désolé, mais nous aurons encore du temps un peu plus tard.
Nous venons de terminer deux tours complets. Je vais simplement proposer aux membres du Comité une autre répartition du temps qu'il reste. Je propose donc que ce soit cinq et cinq; deux et demie et deux et demie. La période de questions pourrait se terminer vers 18 heures. Je voudrais ensuite consacrer quelques minutes à des affaires de régie interne. Le témoin serait également libéré un peu plus tôt.
Y a-t-il des objections à ce que nous procédions de cette façon? D'accord.
Pas tout à fait. Je vais peut-être faire un dernier appel après les séries de questions afin qu'aucun député ne soit privé de la possibilité de poser toutes ses questions.
Je n'ai pas moi-même le pouvoir de mener une enquête pénale. Mes enquêtes sont de nature administrative. Toutefois, dès que j'ai des éléments qui me portent à croire qu'il y a eu une infraction criminelle, je peux en saisir le procureur, qui décidera s'il y a lieu de poursuivre l'enquête.
À titre d'exemple, dans les sept cas dont vous vous êtes occupée, de quel type d'entrave s'agissait-il? De modifications de documents, de refus de les remettre? Comme nous l'avons vu dans le cas du vice-amiral Mark Norman, il était...
Vous avez parlé de l'examen législatif de la loi. Le paragraphe 67.1(1) énumère tous les actes considérés comme des entraves à l'accès à l'information. Quelles modifications faudrait-il apporter à la loi pour vous donner plus de pouvoirs d'enquête ou de renvoi direct à la GRC?
Je ne pense pas que ma compétence doive s'étendre aux enquêtes sur les infractions criminelles, car il faut que les deux éléments soient bien séparés.
Je voudrais pouvoir envoyer directement plus d'information... La loi dispose que toute l'information est confidentielle. Ce que je puis communiquer à ces entités et au procureur général est très limité. Je voudrais aussi pouvoir faire des renvois directement aux corps policiers provinciaux ou fédéraux plutôt que de passer par le procureur général. Ce serait très utile. Et plus direct.
Je m'intéresse aussi à la façon dont les ministères et les cabinets ministériels contournent les demandes d'accès à l'information. Nous avons déjà parlé du secret professionnel et de son utilisation. Et aussi de la désignation comme document confidentiel du Cabinet comme moyen de contourner les demandes. Ils apposent souvent la mention « secret ». Il est ensuite impossible de caviarder le document parce qu'il porte cette mention. Lorsqu'il s'agit d'approvisionnement, on prétend parfois que, à cause de droits de propriété, personne ne peut regarder le document.
Que devons-nous faire dans la loi pour vous donner le pouvoir et les ressources nécessaires pour examiner ces demandes d'accès à l'information et pour déterminer si oui ou non des documents devraient être rendus publics?
J'ai déjà accès à des avis juridiques et à des documents protégés par le secret professionnel. Je n'ai pas accès aux documents confidentiels du Cabinet pour le moment. Il faut donc étudier la question. Le Canada est l'un des rares pays du Commonwealth à ne pas avoir d'examen indépendant des documents confidentiels du Cabinet. Les Canadiens seraient heureux que cela change.
La confiance des Canadiens envers le gouvernement s'en trouverait renforcée. Je dis toujours que je ne rends pas publics ces documents et que je ne les divulgue pas. Je ne fais que les examiner et décider si l'exclusion est justifiée. Ce serait très utile.
Quant aux autres exceptions, nous avons déjà accès à tous les documents, et nous pouvons comparer la version caviardée et l'original.
Il arrive parfois que nous devions inviter les demandeurs à s'adresser à l'entrepreneur ou à quelque autre entité privée. S'il y a un contrat entre les deux parties et des fonctions exercées auprès des institutions, je crois que celles-ci ont le droit d'obtenir ces documents également.
De quel moyen d'exécution de la loi avons-nous besoin pour abréger les délais? Ils sont censés être de 30 jours; dans un exemple, comme je l'ai dit, le ministère de la Justice a pris 270 jours. J'ai reçu un appel de la Défense nationale au sujet d'une demande que j'ai déposée il y a deux ans; elle n'y a toujours pas répondu.
Que faisons-nous pour nous assurer qu'il y a des sanctions à l'encontre de ceux qui traînent les pieds?
Nous avons simplement besoin de ressources plus importantes. Il nous faut plus d'innovation. Nous avons nettement besoin de plus nombreux dirigeants qui sont convaincus de la valeur de l'accès à l'information et disent à leurs institutions qu'elles devraient affecter les ressources voulues à la communication de l'information.
Monsieur le président, j'aimerais intervenir 30 secondes, si c'est possible, et poser une question relative à la réunion du Comité aujourd'hui.
Vous avez dit souhaiter que cette réunion se termine à 18 h. Or, dans l'avis de convocation, il n'est pas prévu que nous parlions des travaux du Comité. Je me demande donc s'il ne serait pas plutôt possible de laisser les députés poser des questions à l'occasion d'un tour de table, comme le dernier que nous avons eu.
Le président a une certaine latitude dans la répartition du temps de parole. Je ne veux pas que les députés soient privés de la possibilité de poser des questions. Je vais terminer la série de questions selon les modalités acceptées par les partis au début. Lorsque nous aurons terminé, si les députés veulent poser d'autres questions, il restera sans doute du temps. C'est pourquoi j'ai dit que je ferais un dernier appel avant de lever la séance. Nous allons essayer de faire en sorte que tous les députés puissent poser leurs questions.
Je donne la parole à M. Fergus, après quoi nous poursuivrons.
Monsieur le président, je vous remercie pour ces cinq minutes « à la Bezan ».
Je vous remercie aussi, madame Gill.
Madame Maynard, j'aimerais poursuivre sur ce que nous discutions plus tôt. J'ai deux questions pour vous et je vais peut-être vous interrompre pendant votre première réponse pour vous poser ma deuxième question.
Voici ma première question. Selon vous, quel est le pourcentage de l'information fournie en réponse aux demandes d'information qui se répète? Est-ce 5 %, 10 %, 20 % ou plus?
Oui, parce qu'il est rare qu'une personne demande une note d'information en particulier. Elle demande plutôt une note d'information, un courriel, un message texte ou encore une vidéo qui traite d'un sujet donné. La personne reçoit alors une panoplie d'informations avec, souvent, plusieurs éléments en double.
Dans votre recommandation, vous parlez d'une bonne gestion des courriels — je crois qu'il faudrait parler de bonne hygiène du courrier électronique — pour vous assurer de passer de... S'il y a cinq personnes dans un bureau et qu'elles font toutes partie d'une chaîne de courriels, il faudrait que la personne responsable garde les courriels et qu'ils soient conservés à un endroit où ils sont classés et facilement récupérables par la suite, et tous les autres destinataires des mêmes courriels devraient les supprimer.
Soyons pragmatiques. Ce sont des fonctionnaires. Personne ne veut faire les manchettes; personne ne veut se retrouver en mauvaise posture. Disons que quatre des cinq fonctionnaires suppriment leurs courriels, mais qu'il y a peut-être eu une discussion avec l'une des quatre. Ils n'y ont même pas pensé; ils ont simplement effacé leurs courriels. S'il y a enquête, n'aurait-on pas l'impression qu'ils ont caché quelque chose ou qu'ils ont effacé des renseignements pour éviter d'être visés par une demande d'accès à l'information? N'est-ce pas là l'interprétation malveillante qui pourrait être faite? N'y aurait-il pas une pression incroyable sur le fonctionnaire qui, en toute bonne foi, pensait que toute l'information avait été copiée et qu'il était sécuritaire de l'éliminer?
Nous devons nous assurer que les documents sauvegardés ont une valeur pour l'organisation. Nous constatons aussi qu'il y a des échanges sans aucune valeur pour l'organisation.
Des courriels personnels se retrouvent là, parfois: « Venez-vous manger avec nous? »
Nous devons nous assurer de bien saisir l'objet de la discussion. Inutile de conserver les courriels si, à partir de ces messages, on rédige une note de service qui dit: « Nous en avons discuté. C'est ce qui a été pris en considération, et c'est la décision qui a été prise. » Le courriel n'est qu'une conversation. C'est comme avoir une réunion. On n'enregistre pas la réunion; on dresse le procès-verbal à la fin.
Je comprends ce que vous dites. Quelqu'un pourrait craindre d'effacer quelque chose, mais il faut examiner la chaîne de messages et voir quelle en est la valeur pour l'organisation. Faut-il garder tous les courriels sur tout? Non. Il y a des éléments qui permettraient de comprendre une décision, de saisir pourquoi il y a un changement de politique. Si je constate que quatre personnes en ont discuté et que l'échange de courriels a été conservé par au moins une personne, je ne vois pas comment je pourrais être en colère contre les trois fonctionnaires parce qu'ils ont fait une bonne gestion de l'information.
Je vous remercie de votre réponse, madame Maynard. Elle ajoute une nuance importante à considérer pour mes collègues.
Pouvez-vous nous faire parvenir votre guide sur la façon de traiter les informations? Au minimum, cela sera utile aux membres du Comité lors de la production de notre rapport.
Là-dessus, monsieur le président, je vais faire le contraire de ce qu'a fait mon ami M. Bezan et couper court à mes questions pour revenir à l'horaire.
Madame Maynard, vous avez dit que 60 % des demandes d'accès à l'information étaient faites par le public. J'imagine que le reste des demandes proviennent d'autres sources, notamment des élus, ou des Autochtones, dont M. Bains a parlé tout à l'heure.
Serait-il possible d'effectuer une étude des diverses sources des demandes d'accès? Je sais que ce serait très complexe et que la recherche requise serait incroyable, compte tenu des nombreux supports qui existent, ainsi que des sujets et des organismes visés par ces demandes. Cela permettrait pourtant de savoir ce qu'il faut améliorer pour dénouer les nœuds ou enlever les bouchons dont vous parliez.
Dans la demande d'accès, il y a un endroit où les gens ont le choix de dire ou non s'ils font partie d'un groupe donné. Le Conseil du Trésor, qui est responsable des demandes d'accès, pourrait évidemment allonger la liste de ces groupes s'il jugeait la chose appropriée dans le contexte actuel.
Pour ce qui est des bouchons, c'est plus au sein des institutions que nous les constatons.
Deux minutes et demie, cela passe très vite. Je vais donc vous poser ma deuxième question, qui porte sur la langue, un sujet que vous avez évoqué plus tôt.
Dans différents domaines, notamment en traduction et en interprétation, on peine à trouver de la main‑d'œuvre. Cela constitue-t-il un frein à l'accès à l'information pour les gens qui veulent obtenir de l'information en français?
Selon nos statistiques, il n'y a pas énormément de plaintes concernant la langue dans laquelle les documents sont fournis en réponse à des demandes d'accès. Il est très rare que les gens se plaignent de ne pas avoir eu un document dans leur langue.
Le frein se trouve plutôt du côté de la divulgation proactive. En effet, les institutions vont souvent dire qu'elles ne peuvent pas publier un document parce qu'elles devraient le faire dans les deux langues, mais qu'elles n'ont pas les ressources nécessaires pour le faire traduire. C'est bien dommage, parce que si ces documents étaient automatiquement publiés, il y aurait moins de demandes d'accès à l'information.
Vous avez examiné la relation entre avocat et client. Je songe aux recommandations de l'ancienne procureure générale, Jody Wilson-Raybould, au sujet de la séparation du ministère de la Justice et des fonctions de procureur général.
Au sujet des poursuites pour destruction de documents, je voudrais savoir combien de cas vous avez renvoyés au procureur général pour enquête.
À première vue, il semble y avoir un conflit d'intérêts inhérent assez important si le gouvernement agit à la fois à titre d'avocat et de client et que les décisions sur des enquêtes de cette nature ne sont pas prises de façon impartiale, particulièrement lorsqu'il est question de destruction de documents. J'ai parlé du gâchis qui se produit aux États-Unis et du fait qu'il faut tenir les dossiers du gouvernement de façon irréprochable. Le gouvernement voulait peut-être prêter aux responsables des raisons plutôt bienveillantes pour expliquer la disparition de documents.
À votre connaissance, le Comité peut-il de quelque façon demander quelle a été l'issue des sept cas renvoyés au procureur général?
À votre avis, vu vos connaissances de ce domaine particulier du droit, y aurait-il un avantage au plan juridique à dissocier le rôle du procureur général et de celui du ministère de la Justice pour qu'ils soient peut-être un peu plus indépendants l'un de l'autre? Ou pensez-vous que la situation actuelle, le statu quo, ne soulève aucun problème d'ordre juridique?
Je recommande d'éliminer l'étape du renvoi au procureur général et de permettre au commissaire de s'adresser directement au service de police, qui, à mon avis, serait mieux placé pour mener l'enquête.
Mais en fin de compte, une enquête de la GRC aboutirait à la présentation d'une recommandation à un procureur, ce qui, à ma connaissance, relèverait alors du ministère de la Justice. Nous sommes donc de retour au point de départ. Il y a une zone de flou, je dirais, pour être charitable envers le gouvernement.
Monsieur le président, mon temps de parole est écoulé, mais le Comité, dans sa réflexion sur ce témoignage, pourrait-il de quelque manière demander au ministère de la Justice et au procureur général ce qu'il est advenu de ces sept cas et pourquoi ils n'ont pas donné lieu à des poursuites, étant donné qu'ils ont été signalés parce qu'ils comportaient une dimension criminelle?
Les deux derniers seront M. Williams et Mme Khalid. Nous aurons ensuite une dernière chance de poser des questions et nous verrons quelques affaires de régie interne. Nous devrions être libres un peu après 18 heures.
Je suis convaincue que le Commissariat est très indépendant du gouvernement. Nous avons lancé des enquêtes contre tous les ministères, y compris le Bureau du Conseil privé, qui relève du premier ministre. La seule question trouble est celle du financement. Nous n'avons pas été en mesure d'obtenir un processus indépendant qui nous permettrait d'obtenir les fonds qu'il faudrait.
Je dis « nous » parce que beaucoup de mandataires du Parlement, comme le vérificateur général, sont dans la même situation que moi. À l'heure actuelle, si nous voulons plus de fonds, nous devons nous adresser au Conseil du Trésor et au ministère des Finances, sur lesquels nous enquêtons au quotidien, si bien que...
À un moment donné, il a été recommandé de créer un comité parlementaire indépendant chargé d'examiner les demandes de fonds des mandataires du Parlement. Comme nous relevons du Parlement, cette solution conviendrait bien.
Prenez le cas du commissaire à l'intégrité. Il peut compter sur un processus indépendant pour obtenir des fonds. Le directeur général des élections du Canada a également son propre processus. C'est donc réalisable. Mon bureau serait alors complètement indépendant du gouvernement.
Vous avez parlé de l'innovation, à laquelle j'attache beaucoup d'importance, et de l'utilisation de l'intelligence artificielle à IRCC. Y a-t-il d'autres pays qui innovent davantage? Y a-t-il d'autres modèles dont le Canada pourrait s'inspirer pour améliorer le processus et rattraper le retard?
Ces innovations sont principalement liées à la protection de la vie privée, mais une chose que je trouve... Je suis allée rendre visite aux commissaires du Royaume-Uni et de l'Écosse. Ils ont une capacité de surveillance directe des institutions. L'administration n'est pas confiée à une institution gouvernementale comme le Secrétariat du Conseil du Trésor. Les rapports des institutions vont directement au commissaire. Lorsque, après trois mois, quelqu'un éprouve des difficultés ou une institution a du mal à répondre aux demandes, le commissaire a le pouvoir d'intervenir.
Ce modèle d'administration est intéressant, parce qu'on n'attend pas que des plaintes soient présentées; on peut prendre des mesures proactives et faire de la sensibilisation. Ce serait bien.
Certainement, mais tout le monde doit appliquer une loi différente et a des compétences particulières. Il y a des ombudsmans et des commissaires. Nous essayons de suivre ce qui se passe, mais ce sont en fait les institutions qui doivent investir dans ces innovations et voir ce qui peut leur être utile. La technologie est toujours une solution, c'est certain.
Vous avez parlé tout à l'heure de divulgation proactive. D'autres gouvernements utilisent-ils des technologies pour communiquer l'information? Vous avez parlé des municipalités. J'ai travaillé à ce niveau. Il arrive qu'elles ne soient pas proactives.
Quelle est la meilleure recommandation que vous puissiez faire à cet égard, en vous fondant sur ce qui se fait dans d'autres pays ou sur ce que vous estimez que nous devrions mettre en œuvre?
C'est certainement partout la même chose à l'échelle internationale. Tout le monde pousse son gouvernement à faire plus de divulgation proactive. Nous sommes tous d'accord pour dire qu'il est essentiel de fournir plus d'information sans avoir à passer par le système d'accès, qui est déjà débordé.
Un problème que nous avons au Canada... En fait, ce n'est pas un problème. Nous sommes privilégiés, mais nous devons fournir l'information dans les deux langues, ce qui ajoute des difficultés. Beaucoup d'autres pays n'ont pas ce genre de situation à gérer, notamment les États-Unis, qui fournissent beaucoup d'information de façon proactive.
Lors de votre dernière comparution, vous avez parlé des institutions qui ont actuellement les pires dossiers en matière d'information: IRCC, l'ASFC, la GRC, l'ARC et le BCP. Avez-vous parlé à l'une ou l'autre d'entre elles depuis, et êtes-vous encouragée par leurs progrès?
Je suis très encouragée par IRCC. Le ministère élabore un plan d'action en réponse à l'enquête systémique. Les résultats ne sont pas encore au rendez-vous, mais je pense qu'ils viendront. Nous verrons des améliorations. Malheureusement, elles ne sont pas encore acquises, mais c'est déjà un progrès.
J'ai dû faire une enquête systémique à Bibliothèque et Archives, parce que nous ne constations aucune amélioration. Heureusement, cela leur a permis d'obtenir une aide financière substantielle. J'ai hâte de voir le plan d'action et ses répercussions sur leur unité.
Dans la dernière série de questions normalement prévue — et j'ai dit que je ferais un dernier appel après —, Mme Khalid dispose des cinq dernières minutes.
Merci, madame Maynard, d'avoir pris le temps aujourd'hui de répondre à nos nombreuses questions.
J'en ai deux à vous poser.
D'abord et avant tout, avez-vous le sentiment que l'ajout d'un bouton permettant de porter plainte sur votre site Web et dans les médias sociaux a été une bonne innovation qui a modifié le fonctionnement du Commissariat? Cela a-t-il entraîné une augmentation du nombre de demandes d'accès à l'information?
Le nombre de plaintes a diminué. Notre site Web et le formulaire de plainte fournissent des renseignements. Par exemple, est-il trop tard pour porter plainte? Est-ce au Commissariat qu'il faut s'adresser? Le formulaire de plainte en ligne a amélioré l'accessibilité, mais nous l'utilisons aussi comme outil pour éduquer et bien informer les plaignants au sujet des règles relatives au système de plaintes.
Les demandes d'accès à l'information malveillantes sont-elles une réalité? Y a-t-il des demandes qui portent sur un nombre indécent de documents, demandes qui peuvent être faites au nom d'idéologies ou de motifs politiques ou encore pour d'autres raisons? Quel est l'impact sur votre bureau?
Ces demandes doivent avoir plus d'impact sur les institutions elles-mêmes, qui doivent les traiter. Oui, elles existent bel et bien. Nous avons tous un demandeur ou deux qui, pour une raison ou une autre, sont mécontents. Et ils décident de submerger une institution de demandes ou de présenter des demandes frivoles.
Malheureusement, avant 2019, il n'y avait aucun moyen de repousser ces demandes — pas les demandeurs, mais les demandes. Maintenant que nous avons le pouvoir de ne pas y répondre, avec mon autorisation, cela aidera les institutions, je l'espère, parce qu'une seule de ces demandes déraisonnables peut avoir des conséquences énormes pour le fonctionnement d'une unité d'AIPRP ou d'une institution.
Nous espérons qu'avec le temps, et avec une certaine jurisprudence, puisque je publie également ces décisions... Je dois faire attention, car en vertu de la loi actuelle, et c'est une autre recommandation, soit dit en passant... Je veux publier davantage de ces cas, mais en vertu de la loi, je ne peux publier que des rapports d'enquête. Comme les décisions de cette nature ne sont pas censées être publiées, je les résume en évitant de donner le nom de l'institution ou trop de détails. Au moins, nous donnons des lignes directrices sur les types de cas que nous considérons comme frivoles et de mauvaise foi, et d'autres cas où il en va autrement, pour que les institutions comprennent mieux ces règles.
Dans quelle mesure les demandes d'accès à l'information vexatoires, malveillantes ou frivoles ponctionnent-elles vos ressources au cours d'une année donnée?
L'impact est énorme. Mon bureau n'a que trois personnes qui s'occupent de nos propres demandes d'accès. L'an dernier, nous avons reçu une demande qui s'est soldée par l'envoi de 33 000 pages. Nous avons nous-mêmes dû demander une prorogation, parce que nous sommes aussi assujettis à la loi. Nous ne voulons pas rejeter les demandes d'accès, mais nous nous rendons parfois compte qu'il est difficile de négocier ou d'essayer de comprendre la raison d'être de la demande.
Je suis certain que les institutions, comme je l'ai dit, ont toutes un, deux ou trois demandeurs qui sont difficiles ou qui demandent de l'information volumineuse. On finit par s'interroger sur ce que le demandeur va faire de 22 millions de pages.
Monsieur le président, pendant le temps qu'il me reste, je voudrais proposer une motion, si vous êtes d'accord :
Que, conformément à l'article 108(3)(h) du Règlement, le Comité entreprenne une étude sur la vie privée numérique des enfants, afin de s'assurer que les données des enfants canadiens sont protégées de façon adéquate; que le Comité examine les cadres de protection de la vie privée existants, les technologies émergentes telles que les codes de conception adaptés à l'âge, et les pratiques exemplaires émergentes de juridictions comparables, y compris celles mises en œuvre par le Royaume-Uni; que le Comité consacre un minimum de trois réunions à cette étude et fasse rapport de ses conclusions à la Chambre.
Comme de plus en plus d'enfants utilisent des appareils électroniques et ont largement accès au monde numérique, il me semble vraiment que le gouvernement doit faire en sorte que nous examinions en profondeur d'abord la façon dont les entreprises ou les applications et canaux captent des renseignements de nature très délicate sur des enfants très jeunes, et ensuite leurs pratiques en ligne et l'utilisation des données. Il est très important que nous entreprenions cette étude et que nous nous assurions de bien faire les choses dans l'intérêt des enfants canadiens, car la réalité numérique s'immisce de plus en plus dans nos foyers.
Monsieur le président, voilà ce que je propose et j'aimerais beaucoup que le Comité donne son accord.
Monsieur le président, à ce stade-ci, comme vous le savez, notre parti est en train de revoir les rôles des porte-parole officiels, et nous voudrons avoir amplement le temps de discuter de la proposition à notre retour de la pause. Il nous faudra un certain temps.
Je vais tout de suite présenter une motion. Je propose de lever la séance et d'étudier cette proposition à notre retour.