Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Bienvenue à la 22e réunion du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique de la Chambre des communes.
[Traduction]
Conformément au paragraphe 81(4) du Règlement, le Comité étudie le Budget principal des dépenses 2022‑2023: crédit 1 sous la rubrique Commissariat au lobbying; crédit 1 sous la rubrique Commissariat aux conflits d’intérêts et à l’éthique; crédit 1 sous la rubrique Bureau du conseiller sénatorial en éthique; et les crédits 1 et 5 sous la rubrique Commissariats à l’information et à la protection de la vie privée du Canada, renvoyés au Comité le mardi 1er mars 2022.
La réunion d’aujourd’hui se déroule de façon hybride, conformément à l’ordre de la Chambre du 25 novembre 2021. Les députés et les témoins sont présents en personne dans la salle et à distance à l’aide de l’application Zoom. Je pense que tout le monde, y compris notre témoin d’aujourd’hui, connaît la formule.
Avant de passer à notre témoin d’aujourd’hui, nous devons nous occuper d’une question administrative. Il s’agit du budget pour l’étude du Budget principal des dépenses. Ce document a été distribué à tout le monde ce matin.
J’avais hâte de prendre la parole devant votre comité.
[Français]
J'ai bien hâte de répondre à vos questions concernant le travail que nous effectuons, au Commissariat à l'information du Canada, pour protéger le droit d'accès, et ce, par l'entremise de nos enquêtes, de l'orientation que nous fournissons aux demandeurs d'information et aux institutions, et de nos observations au sujet du système d'accès à l'information.
[Traduction]
Durant l'exercice 2021‑2022, le Commissariat a reçu un nombre record de plaintes Nous avons enregistré près de 7 000 plaintes entre le 1er avril 2021 et le 31 mars 2022. Cela représente une augmentation de 70 % par rapport à l’exercice précédent.
Mon équipe reste déterminée à faire en sorte que la Loi sur l’accès à l’information soit appliquée et que les demandeurs puissent accéder à l’information à laquelle ils ont droit. Toutefois, ce flux continu de plaintes, qui ne cesse de croître, représente un défi considérable pour le Commissariat.
Pour relever ce défi, nous avons consacré toutes les ressources possibles au traitement des plaintes. Parmi les efforts extraordinaires que nous avons déployés à cette fin, nous avons suspendu les dépenses en capital, les projets à long terme et toutes les embauches, excepté les enquêteurs, afin de consacrer davantage de ressources aux enquêtes, ce qui nous a permis de fermer près de 6 800 dossiers au cours du dernier exercice. C’est beaucoup plus que les 4 400 dossiers que nous nous attendions à fermer, compte tenu de notre financement actuel.
Mais malgré ces gains d'efficacité et nos résultats qui s'améliorent continuellement, nous ne pouvons pas tenir le rythme. Notre arriéré continue de croître. Concrètement, cela signifie que les plaintes des Canadiens et Canadiennes concernant leurs demandes d'information liées aux contrats signés par le gouvernement durant la pandémie de COVID‑19 ne sont pas résolues en temps opportun.
(1105)
[Français]
Cela signifie que des résidants de votre circonscription n'ont toujours pas obtenu l'information qu'ils recherchent concernant les demandes d'immigration de leurs proches.
Cela signifie aussi que de nombreuses communautés des Premières Nations se voient toujours refuser l'accès à des documents qui pourraient nous aider à faire avancer la réconciliation.
[Traduction]
Le défi est d'une telle ampleur que nous ne pouvons pas innover pour trouver des solutions. Nous risquons de ne plus être en mesure de fournir le service le plus élémentaire à la population canadienne. Le Commissariat aura besoin de ressources supplémentaires pour réduire le nombre de plaintes dans son inventaire, tout en veillant à ce que les nouvelles plaintes soient traitées en temps opportun.
[Français]
Depuis déjà un certain temps, je signale les problèmes liés au système d'accès à l'information, qui se sont aggravés depuis le début de la pandémie. En mars 2020, j'ai déclaré qu'un système d'accès adéquat était essentiel pour assurer la responsabilité et la transparence ainsi que pour obtenir la confiance du public.
[Traduction]
Dans l'ensemble du système fédéral d’accès à l’information, les institutions ont eu plus de deux ans pour s’adapter à la réalité de la pandémie et aux défis que celle‑ci a entraînés dans notre vie quotidienne et notre environnement de travail. Et pourtant, la COVID‑19 continue de servir d'excuse pour justifier le mauvais rendement dans le domaine de l’accès à l’information.
Ce n’est pas acceptable. Les institutions doivent respecter leurs obligations législatives. Lors de mes rencontres avec les ministres et les hauts dirigeants, je souligne qu’ils doivent faire de l’accès à l'information une priorité.
[Français]
Il n'est pas nécessaire d'attendre des modifications législatives pour agir, d'autant plus que l'examen de la Loi sur l'accès à l'information que le gouvernement était légalement tenu d'entreprendre en 2020 n'est pas encore terminé. Le rapport du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada sur l'examen du système d'accès devait initialement être rendu public au début de 2022, mais il n'est malheureusement pas encore disponible.
[Traduction]
De plus, même s'il est manifeste que la capacité des institutions à traiter les demandes d’accès s’est globalement dégradée, le récent budget ne prévoyait que très peu de fonds pour la renforcer. Tout cela brosse un portrait sombre de l’état de l’accès en 2022.
[Français]
Je me ferai maintenant un plaisir de répondre à vos questions.
Merci beaucoup, madame Maynard, et merci d’être venue aujourd’hui.
Je vais commencer par la question du budget, sur laquelle vous avez terminé.
Votre budget de cette année a été réduit de plus de 800 000 $ par rapport à celui de l’an dernier, et vous avez des dépenses supplémentaires de plus de 2,1 millions de dollars. Vous avez parlé de la façon dont vous avez traité plus de 6 800 dossiers. Comme ce budget devait servir à traiter plus de 4 400 dossiers, cela fait donc moins d'argent. Nous n’avons pas là le montant nécessaire pour le traitement de ces plaintes.
En fait, mon budget n’a pas été réduit. Il y a deux ans, il a été augmenté de 3 millions de dollars.
En ce qui concerne les plaintes traitées, le budget qui nous a été accordé était pour le traitement de 4 400 dossiers par année. Ce que je disais, c’est que même si notre financement a été augmenté, maintenant que nous recevons environ 6 500 plaintes par année, nous ne sommes pas en mesure de suivre le rythme.
Madame Maynard, je regarde le Budget principal des dépenses de 2022‑2023. Le budget des dépenses à ce jour est de 16 millions de dollars. Je regarde les dépenses du programme du Commissariat à l'information et le montant indiqué est de 14,1 millions de dollars. C’est une différence de 2,1 millions de dollars.
Je pense que c’est parce que nous avons été en mesure de reporter une somme de 1,8 million de dollars d’une année précédente qui n’avait pas été dépensée. Notre financement est le même depuis trois ans.
Pour cette année, nous venons de commencer à rassembler les chiffres. Nous espérons pouvoir les soumettre d’ici la fin de l’été. En raison de l’augmentation d’environ 2 000 cas par année, et de toutes les infrastructures que nous n’avons pas pu mettre en place parce que nous n’avions pas assez d’argent, je pense que nous demanderons 3 à 5 millions de dollars supplémentaires.
Étant donné que nous sommes maintenant en mesure, avec le personnel dont je dispose, de traiter environ 6 000 plaintes, j’espère que nous pourrons suivre le rythme. Nous devrons fermer environ 2 000 dossiers de plus par année, parce que nous avons actuellement un arriéré de 4 000 dossiers. Leur nombre ne cessera pas de croître. Pour vous donner une idée, ce mois‑ci, nous avons reçu 1 000 nouvelles plaintes. Si cette tendance se poursuit pendant le reste de l’année, nous parlons d’environ 12 000 plaintes pour 2022‑2023.
Lorsque j’ai été nommée en 2018, nous avions un arriéré de 2 400 plaintes. Certaines remontaient à 2010. Heureusement, sur les 2 400 plaintes d’avant 2018, il n'en reste plus que 400. Nous nous en tirons très bien. Ce sont malheureusement des cas complexes. Cependant, nous avons environ 4 000 plaintes datant d'avant 2022, ce qui nous donne un arriéré de 4 000 plaintes, qui ne cesse de croître.
Si ces dossiers sont complexes... À quel point le sont-ils pour prendre plus de deux ans? Avez-vous des dossiers qui datent de plus de deux ans, mais qui ne sont pas complexes? Pourquoi en avez-vous qui datent certainement de plus de deux ans? Vous pourriez peut-être me donner un exemple.
Nous avons des dossiers portant sur des documents « secrets » ou « très secrets ». Cela complique l'enquête. Nous avons besoin d’une infrastructure spéciale et d’une délégation spéciale pour enquêter sur ces cas parce qu’il s’agit de documents touchant la sécurité nationale. Ensuite, il faut aussi parler à l’institution. Certains des analystes qui ont traité ces demandes sont partis, alors nous devons parfois recommencer à zéro en communiquant avec l’organisation afin de comprendre pourquoi elle a caviardé les documents.
Parfois, c’est compliqué simplement parce qu’il y a des milliers de pages. Nous avons récemment eu un dossier venant du ministère de la Justice qui comptait 22 000 pages. Quand on l'examine ligne par ligne, cela prend beaucoup de temps...
En moyenne, qu’est‑ce qui constitue un rendement raisonnable pour votre ministère? Quel serait votre mandat si vous aviez tout ce qu'il faut, si vous aviez tout le financement dont vous avez besoin? Pas pour une demande complexe, mais pour une demande moyenne, quel rendement moyen obtiendriez-vous? Que voudriez-vous?
Notre objectif est de mener une enquête dans un délai de 90 jours, mais nous ne sommes pas en mesure de le faire.
Nous menons une enquête dans un délai de 90 jours, dans les cas où le délai est expiré, c’est‑à‑dire quand les institutions n’ont pas répondu en 30 jours à la demande ou n’ont pas demandé de prolongation. Nous essayons de le faire en trois mois.
Pour les enquêtes sur les exemptions et les caviardages, nous pouvons prendre de six mois à un an environ pour mener une enquête de longueur normale.
Quelle est la moyenne à l’heure actuelle? Je ne sais pas si vous l’avez mentionné. À l’heure actuelle, combien de temps faut‑il en moyenne à une personne qui présente une demande d'accès à l'information pour obtenir une réponse?
La loi oblige les institutions à répondre aux demandes dans les 30 jours. Je crois que ce délai est respecté pour seulement 62 % des demandes. Je pense que si notre bureau reçoit plus de plaintes, c'est parce que les délais ne sont pas respectés dans 45 % à 50 % des cas.
Merci, madame Maynard, d’être ici aujourd’hui pour répondre à nos questions.
Vous avez mentionné dans votre déclaration préliminaire que la COVID‑19 servait d'excuse pour justifier un mauvais rendement, ce qui n'est pas acceptable. Je suis d’accord, mais je me demande si vous pouvez nous aider à comprendre un peu les répercussions de la pandémie sur l’ensemble du système.
Y a‑t‑il eu plus de demandes d’accès à l’information pendant cette période? Quelles ont été les répercussions sur ceux qui ont essayé de répondre à ces demandes? Pourquoi devez-vous répondre à des milliers de plaintes supplémentaires?
Au cours de la première année de la pandémie, nous avons constaté une diminution du nombre de demandes. Je pense que les Canadiens avaient d’autres problèmes à régler. Il était compréhensible que les gens soient plus préoccupés par leur santé et leur sécurité que par les demandes d’accès à l’information, mais au cours de la dernière année, nous avons constaté une augmentation du nombre de ces demandes.
Le problème, c’est que les fonctionnaires n’avaient pas le droit de retourner dans leurs bureaux pour travailler sur des dossiers. Souvent, on demandait aux services de l’AIPRP d'attendre tard dans la nuit ou le week-end pour se connecter au serveur afin que le réseau ne soit pas débordé par les gens qui travaillaient.
Au début, au cours des six premiers mois, il a été très difficile pour les analystes de l'AIPRP de répondre aux demandes d’accès, parce qu’ils n’avaient pas l’infrastructure nécessaire ou n’avaient pas accès aux copies papier des documents demandés. Ou encore, les BPR — les bureaux de première responsabilité — ou d’autres personnes travaillant dans les institutions ne répondaient tout simplement pas. Souvent, les demandes d'accès sont au bas de la liste de leurs priorités. Ils s'occupent de leur programme et leurs activités. Cela a certainement posé un problème pour les analystes.
Maintenant, après deux ans, nous disons qu’il n’y a plus d’excuses. Les employés peuvent retourner au bureau.
C'est le cas chez nous. Nous avons des employés qui viennent au bureau. Nous respectons les restrictions et les limites en matière de santé, mais nous devons être en mesure de faire notre travail.
En vertu de la loi, il est impossible de cesser de répondre aux demandes d’accès à l'information. C’est une obligation en vertu de la loi, et les institutions ont la responsabilité de trouver des moyens de le faire. Certains ministères ont profité de l’occasion pour innover et mettre en place des technologies qui leur ont permis de répondre aux demandes en continuant de travailler à distance. D’autres ministères prennent un peu plus de temps pour saisir cette opportunité et cette occasion d'améliorer leur système.
Quand j’étais journaliste au Hamilton Spectator, déposer des demandes d’accès à l’information et chercher des sujets sur lesquels en déposer faisait quasiment partie intégrante de nos fonctions. C’était une tâche très lourde. Il y avait beaucoup de documentation. Il fallait la classer, l’envoyer. Nous recevions en retour d’épaisses liasses de documents.
Comment cela a‑t‑il changé au cours des 20 dernières années? Est‑ce plus numérisé maintenant, et pouvons-nous faire plus pour numériser le système afin qu’il soit plus accessible, plus transparent, et que les gens puissent obtenir plus facilement l’information à laquelle ils ont droit?
En fait, cela a un double effet. Nos systèmes sont maintenant plus numérisés. Le gouvernement travaille électroniquement. Le travail à domicile a permis de créer des documents par voie électronique plutôt que sur papier. Cela nous facilite les choses. Je pense que nous nous servons également du courrier électronique pour répondre aux demandes d’accès. Nous utilisons postel.
D’un autre côté, comme nous créons maintenant des documents par voie électronique et que nous communiquons avec les gens par courriel et par message texte, cela crée une quantité monstrueuse d’information. Je cite parfois l’exemple d’un échange de courriels que quatre personnes ont gardé dans leur boîte de réception. Si vous avez une demande d’accès, nous disons normalement que le destinataire principal de l’échange devrait conserver les courriels. Les autres ne devraient pas en avoir de copie.
La plupart des gens n’effacent pas les courriels ou ne classent pas ces documents correctement. Je suis sûre que vous et moi en sommes également coupables. Vous vous retrouvez avec des doubles et un grand nombre de pages. Nous avons maintenant des réponses de 500 pages à des demandes d’accès à l’information pour lesquelles vous auriez normalement reçu 10 pages.
Cela a créé un problème différent. La gestion de l’information pose certainement de sérieuses difficultés pour le gouvernement, et pas seulement le nôtre. La plupart des institutions ont ce problème. Nous essayons d’inciter les dirigeants à fournir à leurs employés des outils leur permettant d’effacer, de gérer, de nettoyer et de conserver uniquement les documents qui sont importants, mais ce n'est pas ce que nous constatons, de sorte que les demandes donnent des réponses de plus en plus volumineuses.
Je comprends que vos employés peuvent travailler à distance. Quelles en ont été les répercussions? Cela a‑t‑il été globalement positif, ou négatif? Peut-être pourriez-vous nous en parler un peu.
Cela a été très positif pour mon bureau. J’en ai été très satisfaite. En fait, cela m'a étonnée. Nous avons commencé à travailler à distance immédiatement, en 2020. Tous les dossiers que nous avons ici ont été numérisés. Nous avons fermé 6 800 dossiers l’an dernier. C’est un record. Nous n’en avions jamais traité plus de 6 000 en un an. Je pense que le fait de travailler à domicile et de donner à nos employés les outils pour le faire nous a beaucoup aidés. Les seuls dossiers que nous devons traiter au bureau sont les dossiers secrets et très secrets, alors nous avons des employés qui viennent pour ces dossiers.
Madame la commissaire, je vous remercie d'être parmi nous ce matin.
Je vais commencer en vous posant une question sur une lettre que vous avez envoyée, le 8 juillet 2021, à M. Duclos, qui était alors président du Conseil du Trésor, pour lui faire part de vos observations à la suite de rencontres avec divers ministres. Entre autres choses, on reconnaissait l'importance de se doter d'un programme de déclassification.
Je vais vous donner un élément de contexte. J'ai beaucoup analysé l'histoire de la déclassification des documents, et on se rend compte qu'il y a souvent une surclassification, c'est-à-dire qu'on procède trop souvent à la classification des documents. Vous en avez d'ailleurs parlé un peu plus tôt.
Selon un article récent du magazine Foreign Affairs, en une seule année aux États‑Unis, 4 millions de personnes ont classifié 50 millions de documents, ce qui représente un coût de 18 milliards de dollars. Évidemment, ici, c'est à plus petite échelle. En conclusion, on mentionne que la plupart de ces documents ne contiennent pas de secrets importants, en réalité, et qu'on ne les classifie que par précaution ou pour éviter d'avoir à rendre des comptes.
Votre question touche deux problèmes particuliers.
Lorsqu'on classifie des documents, on peut leur attribuer notamment les niveaux « secret » ou « très secret ». Selon ce que nous voyons, certains documents n'auraient pas dû être classifiés à ces niveaux. Comme vous le dites, quand les gens voient un document classifié « secret » ou « très secret », souvent ils le caviardent par mesure de sécurité, car ils ont peur de laisser passer des informations secrètes. Si la classification était mieux faite, certaines informations seraient assurément transmises plus rapidement.
Par ailleurs, certains documents datant de 50 ou 60 ans sont encore classifiés aux niveaux « secret » ou « très secret ». Nous aimerions qu'il existe un programme dans le cadre duquel le gouvernement se pencherait sur ces documents historiques afin de déterminer s'il s'agit vraiment de documents qui sont encore secrets ou de nature délicate en 2022 ou si, au contraire, il est possible de les déclassifier pour que les gens y aient accès plus rapidement.
Il y aurait donc une espèce de déclassification par désuétude, d'une part. D'autre part, il faudrait peut-être faire l'effort d'éviter de faire de la surclassification simplement de peur d'avoir peur.
Évidemment, vous savez comme moi que les secrets sont bons à garder, mais tout ne constitue pas un secret, en effet.
La mission de votre commissariat est de favoriser la transparence et la responsabilisation à l'échelle de l'administration fédérale. Si l'on résume cela en quelques mots, il s'agit donc de fédérer la confiance. Comment y arrivez-vous?
Vous avez mentionné quelques ministères qui collaborent moins que d'autres. Cependant, de façon générale, l'administration fédérale tente-t-elle de vous mettre des bâtons dans les roues ou, au contraire, les relations sont-elles plutôt pacifiques?
En fait, nous avons une très bonne collaboration avec les institutions dans le cadre de nos enquêtes. La difficulté vient du fait que les gens font de plus en plus de demandes d'accès à l'information. Les gens sont de plus en plus nombreux à poser des questions sur notre gouvernement, ses décisions et ses dépenses.
Le système de demande d'accès à l'information coûte beaucoup d'argent à mon commissariat, qui doit mener des enquêtes, et au gouvernement, qui doit gérer tout cela. Si on veut diminuer la pression que ce système exerce sur le gouvernement, il faut que celui-ci commence à donner de l'information de façon volontaire. Je parle ici de faire une divulgation proactive et volontaire et de rendre l'information disponible dans les deux langues officielles sur le site du gouvernement. Les Canadiens ne devraient pas être obligés de faire une demande d'accès à l'information alors qu'on sait qu'il s'agit d'une information à laquelle ils devraient avoir accès.
Cela va aider aussi sur le plan de la responsabilisation, dont je parlais tout à l'heure. Les Canadiens auront de plus en plus confiance dans le gouvernement s'ils ont accès à de l'information qui a été rendue publique de façon proactive, sans qu'ils aient été obligés de faire une demande d'accès à l'information. Souvent, les gens qui présentent des demandes à notre bureau pensent qu'il s'agit d'information que le gouvernement veut garder secrète et qu'il ne veut pas révéler. Or, ce n'est pas le cas. C'est simplement qu'il y a une quantité considérable d'informations. Nous voulons que les institutions se posent la question et déterminent, de façon proactive, à quelles informations les Canadiens devraient avoir accès. Ainsi, les gens ne seraient pas obligés d'attendre la réponse à leur demande d'accès à l'information.
Pourrait-on proposer une modification législative pour forcer les organismes gouvernementaux à faire un tel effort, c'est-à-dire à faire du ménage dans les documents désuets et à en déclassifier certains, afin de vous aider dans votre tâche?
La partie 2 de la Loi sur l'accès à l'information oblige déjà les ministères et les bureaux de ministre à donner des informations particulières, notamment celles relatives aux dépenses. C'est un bon début.
Ce que je suggère irait encore plus loin. Par exemple, aux États‑Unis, après trois demandes d'accès à l'information sur un même sujet, l'information est automatiquement rendue publique. Le gouvernement canadien pourrait prévoir des dispositions législatives afin qu'il y ait un mécanisme semblable. Il pourrait aussi prendre de telles mesures de façon volontaire, mais ce n'est pas le cas présentement.
La GRC collabore, mais elle a un arriéré considérable. Nous travaillons présentement avec elle. Récemment, nous avons rapidement réglé 50 plaintes, alors je crois qu'elle prend la situation au sérieux.
Je ne le sais pas. Il faudrait que je m'informe à ce sujet avant de vous répondre. Nous avons plus de 300 plaintes concernant la GRC, alors il y en a sûrement quelques-unes qui datent de cinq ou six ans.
Je vais poursuivre dans la même veine assez rapidement. Je parle de M. Michael Dagg, qui a présenté une demande à la GRC et qui s’est fait dire qu’il aurait un délai de traitement de 80 ans.
Pourriez-vous nous parler de l’efficacité d’un programme censé favoriser la transparence du gouvernement alors que les gens qui cherchent des informations de nature délicate doivent attendre 80 ans pour obtenir des informations substantielles?
Le cas dont vous parlez est, en fait, un dossier de la GRC qui a été transféré à Bibliothèque et Archives. Bibliothèque et Archives Canada a demandé une prolongation de 80 ans pour répondre à la demande.
Bibliothèque et Archives Canada se trouve dans une situation très particulière et très difficile en ce sens qu'il a les documents en sa possession, mais que ce sont souvent des documents qui ont été créés par une autre institution. Il doit alors consulter l’institution d’où provient l’information. Cette consultation prend...
Je mentionnerai simplement que la demande portait sur le projet Anecdote.
Pendant que nous parlons de la GRC, il y a une autre histoire. Vous avez cité des exemples américains. Je vais porter à votre attention le travail sur COINTELPRO dans les années 1970 et ce qui a été qualifié de sabotage administratif. En fait, Paul Marsden, l’ancien archiviste des Affaires militaires de Bibliothèque et Archives Canada, a dit qu'« un phénomène unique en son genre étranglait lentement l’histoire canadienne, et qu'il fallait le dénoncer » à propos de ces processus.
Pourriez-vous nous expliquer pourquoi la transparence de ces types de documents d’archives sensibles... Je pense que dans ce dossier particulier, il est question de la sensibilité du SCRS et de la GRC à l’égard de la chambre forte RG146.
Pouvez-vous nous parler de la nécessité de déclassifier automatiquement l’information dans l’intérêt public?
C’est exactement ce dont nous parlions tout à l’heure.
Nous avons besoin au Canada d’un programme dans le cadre duquel ces vieux dossiers, qui sont secrets, très secrets ou qui contiennent des renseignements de nature délicate... Notre histoire, en ce qui concerne certains documents de sécurité nationale très précis datant d'il y a 50 ans ou 60 ans, est toujours classée secrète ou très secrète. Si nous n’avons pas un programme dans le cadre duquel un comité, un groupe ou quelqu’un d’autre les examine après un certain nombre d’années et les déclassifie pour les rendre disponibles, nous continuerons de voir des demandes d’accès refusées, comme celle de M. Dagg, qui a fait l'objet d'une prolongation de 80 ans.
Les États-Unis ont actuellement un programme de déclassification. Il y a un programme automatique dans le cadre duquel, après 20 ans ou 25 ans, des documents comme ceux concernant le Project Anecdote sont examinés et déclassifiés, ce qui rend l’accès à ces dossiers beaucoup plus facile.
Ce que j’ai entendu dans votre déclaration, ce que je lis dans votre lettre au Conseil du Trésor, et la franchise avec laquelle vous en parlez donne à réfléchir. En fait, j’appellerais cela le canari dans la mine de charbon. C’est une mise en accusation.
Dans vos recommandations, les recommandations 7 et 8 portent précisément sur les documents confidentiels du Cabinet. En tant que député qui croit que nous avons des privilèges parlementaires nous permettant d’aller au fond de notre travail et d’avoir accès à ces documents, j'ai constaté que le gouvernement, particulièrement celui‑ci, a tendance à faire de tout ce qui concerne la sécurité nationale un secret du Cabinet et, par conséquent, rien n’est accessible.
Dans votre lettre, vous mentionnez que vous avez eu des discussions avec 12 des 16 ministres. Vous avez parlé de la nécessité de donner l’exemple. Je conviens que l’attitude reflète le leadership. À partir de là, combien de ces ministres vous ont répondu en vous présentant un plan pour l’élaboration d’un programme de déclassification?
Je sais qu’à l’heure actuelle, le ministère de la Sécurité publique mène un projet pilote sur certains documents précis dans le cadre duquel un comité examine la déclassification.
J’ai entendu dire que le SCT envisage de mettre en place un tel programme, mais il n’y a rien de concret jusqu’à présent. J’entends des rumeurs et ce sont plutôt des ouï-dire, mais le ministre de la Sécurité publique a un plan.
Aux fins du compte rendu, pouvez-vous confirmer que ce sont deux des 16 ministres qui ont au moins dit qu’ils amorçaient un projet quelconque à cet égard?
Non, les ministères ne sont pas.. Je pense que nous avons besoin d’un programme global pour le gouvernement fédéral. Si chacun des ministères commence son propre programme, cela ne permettra pas d'accomplir grand-chose. Je pense qu’ils doivent agir ensemble.
La plupart des institutions ne traitent pas ce genre de documents, mais nous avons Bibliothèque et Archives, Affaires mondiales, le BCP, le MDN, la GRC, les Services publics...
Comme il me reste peu de temps et que la réponse doit être brève, je vais vous poser la question suivante. Dans votre liste de recommandations, pensez-vous avoir bien saisi l’orientation et les recommandations du Comité pour faire en sorte qu'à l'issue de cette étude, nous ayons la base des recommandations qui garantiront l'existence d'un programme pangouvernemental de déclassification? Voulez-vous ajouter quelque chose?
J’aimerais vous renvoyer à mon rapport spécial que j’ai déposé, il y a deux semaines, pour Bibliothèque et Archives Canada sur une enquête systémique dans le cadre de laquelle nous avons formulé des recommandations concernant la déclassification.
Nous avons également produit un rapport, il y a quelques années, sur ce sujet précis. Il est accessible et je pourrai vous envoyer le lien après ma comparution, si vous le voulez.
Monsieur le président, à titre d’information, pourrions-nous simplement demander que ces documents nous soient soumis par écrit, pour que nos analystes puissent les examiner en vue de formuler des recommandations finales?
Merci, madame la commissaire, d’être venue témoigner devant le Comité.
Je crois fermement que l’une des caractéristiques d’une démocratie qui fonctionne bien est un régime d’accès à l’information efficace, efficient et fiable. Êtes-vous d’accord?
Depuis mon élection en 2019, mon bureau a déposé un peu plus de 300 demandes d’accès à l’information. Environ 50 ou 60 sont en suspens.
Ma question porte en grande partie sur une lettre que vous avez envoyée au ministre Duclos lorsqu’il était ministre d’un portefeuille différent. Je vais vous en lire un extrait: « Comme vous le savez, la pandémie n’a pas suspendu le droit d’accès. En fait, elle a accru le besoin de transparence du gouvernement, un effort qui exige le leadership collectif de tous les membres du Cabinet. »
Madame la commissaire, avez-vous vu ce leadership au cours de la pandémie?
Nous n’avons pas pu voir de mesures concrètes. Je sais que le Secrétariat du Conseil du Trésor prend certaines mesures, mais nous attendons toujours un rapport sur l’examen législatif du système. Certains ministères s’en tirent très bien. Je dirais que l’Agence du revenu du Canada a fait preuve de beaucoup d’innovation pour être en mesure de répondre aux demandes d’accès qui étaient de plus en plus nombreuses en raison de la PCU et de toutes les prestations qu’elle a mises en place. Dans l’ensemble, il est très difficile de cerner les mesures prises.
Selon les renseignements fournis par Bibliothèque et Archives Canada, 80 % des demandes ne respectaient pas les délais prévus dans la loi. Il y a d’autres ministères aussi, la GRC, l’ARC et d’autres. Je sais que vous avez écrit à 16 d'entre eux.
Quelle est la solution? Faut‑il d'autres sanctions? S’agit‑il de ressources? Pourriez-vous résumer en 30 secondes? Je sais que nous avons peu de temps. Quelle est la solution?
C’est une culture d’ouverture et d’abandon des secrets, comme nous en avons parlé plus tôt. Il faudra plus de ressources, mais aussi une meilleure gestion de l’information... Il y a beaucoup de facteurs différents dont il faut tenir compte. Ce n’est pas une seule chose.
Je suis convaincue que les dirigeants doivent indiquer qu’ils veulent être ouverts et transparents et qu’ils doivent ensuite joindre le geste à la parole.
Je signale que cette question a certainement été soulevée lors des élections de 2015. Le gouvernement semblait crier victoire, mais, d’après ce que vous avez décrit aujourd’hui, ce n’est certainement pas une victoire dont il y a lieu d'être fier.
Madame la commissaire, avez-vous déjà remarqué de l’ingérence politique à l'égard des demandes d’accès à l’information?
Nous n’avons reçu aucune plainte concernant ce genre d’ingérence. Je crois savoir que Mme Legault, la commissaire qui m’a précédée, a mené une enquête à ce sujet. Il y a un rapport sur notre site Web concernant ce genre d’ingérence, mais c’était avant moi.
Y a‑t‑il déjà eu des cas où des agents de l’accès à l’information ont été réprimandés, sanctionnés ou limogés en raison de leur rendement, qui auraient pu être liés à la divulgation de renseignements dans le cadre de demandes d’accès à l’information?
Je ne pourrais pas vous le dire. Je ne suis au courant de rien. Si nous constatons dans le cadre de notre enquête que quelqu’un a tenté de s'opposer ou d’intervenir et que cela pourrait être intentionnel, je ne peux pas enquêter sur ce genre d'agissements. Je peux les référer au ministre Lametti, qui peut enquêter sur les actions criminelles. Je sais que nous avons renvoyé six cas de ce genre, et je ne pense pas qu’il y ait jamais eu d’enquête de la GRC ou du gouvernement à ce sujet.
Pour que ce soit bien clair, dans le peu de temps qu’il me reste, vous avez renvoyé six affaires de ce genre au ministre de la Justice, mais il n’y a jamais eu d’enquête.
Je remercie la commissaire d’être venue aujourd’hui et de répondre avec franchise à nos questions.
Je sais que M. Green a affirmé que tout lui semble être traité comme un renseignement confidentiel du Cabinet.
Madame la commissaire, je vais peut-être commencer par vous demander s’il y a des preuves que les propos de M. Green sont fondés et que tout est traité comme un renseignement confidentiel du Cabinet.
Je ne suis au courant que des cas qui me sont renvoyés par suite de plaintes. Nous recevons des dossiers contenant des renseignements confidentiels du Cabinet qui ont été caviardés. Malheureusement, je n’ai pas le pouvoir d’examiner ces documents. Je dois croire nos institutions sur parole lorsqu’elles disent que ce sont des documents confidentiels du Cabinet.
Ce n’est pas la majorité de nos documents. Il n’y a qu’un petit nombre de cas qui concernent les documents confidentiels du Cabinet. Je ne pourrais pas vous dire si c’est une excuse dont se servent les institutions.
Je ne pourrais pas vous le dire tout de suite. Je ne crois pas que plus de 5 % de nos dossiers portent sur des documents confidentiels du Cabinet.
Ce qui arrive souvent, c’est que les demandeurs savent qu’ils n’ont pas droit à ces documents, alors ils les excluent de leur demande en disant: « Je veux tout sauf les documents confidentiels du Cabinet. » Nous traitons souvent des plaintes concernant des renseignements personnels ou des conseils et des recommandations. Lorsqu’il y a des documents confidentiels du Cabinet, comme je l’ai dit, nous n’avons pas le droit de les voir. Il est donc difficile pour nous de déterminer s’il s’agit bien de documents confidentiels du Cabinet ou non.
Mon ami et collègue, M. Kurek, a dit que depuis 2019, depuis qu’il a été élu, il a présenté des demandes d’accès à l’information environ 300 fois.
Sur les 6 000 demandes que vous avez reçues au cours de la dernière année ou des deux dernières années, combien étaient des demandes frivoles ou à l’aveuglette?
Nous ne tenons pas compte des intentions des demandeurs. On nous demande d’examiner la demande pour nous assurer qu’on y a répondu à temps ou que les caviardages sont appropriés. Il y a un article dans la loi qui permet aux institutions de refuser de répondre à une demande frivole ou de mauvaise foi, mais elles doivent me demander la permission de le faire. Au cours des deux dernières années, nous avons reçu peut-être une douzaine de ces demandes, et nous n’avons répondu oui qu’à une ou deux.
Les demandes d’accès à l’information et l’accès à l’information contribuent grandement à renforcer la confiance dans les institutions publiques et la gouvernance. Depuis 2015, le gouvernement a investi environ 50 millions de dollars pour accroître la transparence au sein du gouvernement.
Pensez-vous que nous devrions aller plus loin? Sommes-nous sur la bonne voie? Avez-vous des conseils à nous donner sur la façon de continuer à renforcer la confiance du public?
Je suis tout à fait d’accord pour dire qu’il faut augmenter les ressources au sein des institutions. Elles ont besoin d’analystes mieux formés. Elles ont besoin de ressources humaines, mais aussi de technologie pour répondre à l’augmentation de la demande. Il y a certainement des investissements à faire, mais comme je l’ai dit plus tôt, il y a toutes sortes de facteurs qui ont une incidence sur l’ensemble du système.
Ma présentation au Conseil du Trésor porte à la fois sur les recommandations législatives et sur la façon dont nous pouvons améliorer le système. Je vous invite à la lire. Je vous enverrai le document si vous le voulez par écrit. Les ressources sont une des solutions, mais l’orientation de nos dirigeants en matière de transparence, d’ouverture et de divulgation proactive est certainement la voie à suivre.
En ce qui concerne les demandes d’accès à l’information que vous recevez, consignez-vous quels sont les ministères à qui ces demandes sont adressées ou qui demande l’information? Pouvons nous obtenir ces renseignements?
Nous consignons seulement le nombre de plaintes que nous recevons. Le Secrétariat du Conseil du Trésor est l'administrateur de la Loi. Il reçoit donc le rapport annuel de chaque institution, de sorte qu'il sait quelles institutions reçoivent des demandes et quel en est le nombre.
D'après mes statistiques, je peux vous dire qu'Immigration Canada est en tête de liste pour les plaintes que nous recevons, mais qu'il reçoit également plus de 120 000 demandes par année. Nous avons en ce moment environ 4 000 dossiers concernant IRCC. L'ASFC est la deuxième institution au sujet de laquelle nous recevons le plus de plaintes. La GRC vient au troisième rang. L'ARC est au quatrième rang. Le BCP est au cinquième.
Nous suivons les institutions en ce qui concerne le nombre de plaintes que nous recevons, mais pas le nombre de demandes qu'elles reçoivent.
Pour terminer, nous avons parlé aujourd'hui au Comité des renseignements classifiés, des renseignements très secrets. Pensez-vous qu'il y a...? Évidemment, lorsqu'on caviarde de l'information, c'est pour protéger la sécurité nationale et la sécurité publique. À votre avis, où est l'équilibre entre l'accès à l'information pour le public et le maintien de la sécurité du Canada?
La Loi prévoit un bon critère. Il faut prouver le préjudice. Si l'on fournit l'information, cela va‑t‑il nuire à nos relations avec d'autres pays ou à l'information elle-même? La nature délicate des renseignements diminue parfois avec le temps. C'est pourquoi nous parlons d'un programme de déclassification.
Parfois, quand on crée un document, l'information est très sensible, mais si le document a été créé il y a 10, 20 ou 50 ans, cette sensibilité disparaît. Nous pouvons vous dire que nous avons vu des documents que d'autres pays ont publiés, mais que le Canada ne publie toujours pas. Nous remettons souvent cela en question. Cette information est déjà publique dans un autre pays, alors pourquoi le Canada n'est‑il pas prêt à la divulguer?
Madame la commissaire, je vous serais reconnaissant de nous faire parvenir par écrit, si possible, des détails sur le dernier élément dont vous nous avez fait part. Je parle de renseignements qui demeurent classifiés ici alors qu'ils sont pourtant disponibles dans d'autres pays ou même sur Internet.
J'aimerais maintenant parler des motifs de refus. Si quelqu'un fait une demande d'accès et qu'elle est refusée, il y a un processus permettant de réviser la demande. Au bout du compte, si elle est refusée une deuxième fois, existe-t-il un processus d'appel à l'extérieur du commissariat, ou est-ce que tout se passe à l'intérieur de celui-ci?
Nous sommes la première étape de révision au gouvernement fédéral. Si l’on n'est pas satisfait de l'enquête ou du rapport d'enquête de mon bureau, on peut s'adresser à la Cour fédérale par la suite.
C'est justement ce que quelqu'un de ma circonscription m'écrivait.
Tantôt, vous avez parlé du manque de leadership ou, du moins, de la nécessité de démontrer du leadership. Pouvez-vous me décrire quel genre de leadership vous aimeriez voir à ce chapitre?
Nous avons une unité d'accès qui travaille très fort pour convaincre le gouvernement ou les ministères concernés de donner de l'information. Ces gens appliquent la Loi pour essayer d'encourager la divulgation de l'information. Or, certains fonctionnaires sont plus réticents. Ce que nous voulons, c'est que les ministres, les sous-ministres et les sous-ministres adjoints donnent leur permission pour la divulgation, qu'ils délèguent aux fonctionnaires leur autorité pour divulguer de l'information et qu'ils les invitent ou les encouragent à divulguer de l'information.
Par exemple, un sous-ministre à qui j'ai déjà parlé a pour habitude, lorsqu'il écrit des notes de breffage, d'encercler l'information qui est déjà publique et qui devrait être divulguée immédiatement. De cette façon, les gens utilisent leur autorité pour divulguer de l'information et on évite le processus de révision.
Cependant, c'est souvent l'inverse qu'on voit: en regardant un document, les gens pensent à l'information qu'ils ne peuvent pas donner, plutôt qu'à celle qu'ils peuvent divulguer.
Ce que nous voulons, c'est que les dirigeants des institutions encouragent la transparence. Nous voulons que ce message soit clair, pour que les gens n'aient pas peur de divulguer de l'information.
Je tiens à souligner que nous sommes ici pour discuter du budget des dépenses. Je sais que nous avons transformé cela en une grande inquisition. Je vais essayer de revenir à ce cadre.
En janvier dernier, votre bureau a terminé l'enquête systémique sur les réponses tardives de Bibliothèque et Archives Canada aux demandes d'accès à l'information. Vous avez constaté que près de 80 % des demandes traitées par Bibliothèque et Archives Canada ne respectaient pas les délais prévus dans la Loi.
Votre rapport contenait plusieurs recommandations à l'intention du ministre du Patrimoine canadien. Cependant, dans votre évaluation de la réponse du ministre, vous avez dit:
La réponse du ministre ne mentionne aucune stratégie pour réduire l'arriéré accumulé. Dans sa réponse, la priorité est plutôt accordée aux demandes classées comme urgentes et à celles liées aux recours collectifs.
La réponse du ministre ne me convainc pas qu'il comprend à quel point la situation à BAC est critique et je me dois d'insister pour qu'il veille à ce que l'arriéré soit traité de la façon la plus efficace possible.
Vous avez parlé de:
L'élaboration de processus simplifiés, l'adoption d'approches innovatrices, ainsi que l'établissement d'échéanciers et d'objectifs [...] que BAC et le ministre pourraient envisager et mettre en œuvre.
C'est toute une déclaration qui, à mon avis, témoigne du malaise général. Pouvez-vous nous parler davantage de ces préoccupations et nous dire si quelque chose a changé votre opinion?
Je crois savoir qu'un plan d'action est en cours de préparation et qu'il nous sera communiqué, ainsi qu'au public, au cours des six prochains mois. BAC s'efforce d'obtenir plus de ressources humaines et financières, ce dont il a absolument besoin. Quant à savoir si nous verrons un changement... Nous n'en avons pas encore vu, parce que nous continuons de recevoir des plaintes et de prendre des mesures. J'espère que mon message a été bien compris.
Certains ont tenté d'écarter ou de minimiser, peut-être, l'impact du secret du Cabinet sur la transparence et la reddition de comptes. Vous avez deux recommandations à ce sujet. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi vous avez décidé de les inclure?
Nous sommes l'un des seuls pays du Commonwealth à ne pas avoir un organisme indépendant du gouvernement pour examiner les documents confidentiels du Cabinet. Comme je l'ai dit plus tôt, les demandeurs comprennent qu'ils n'ont pas droit à ces documents. Il m'est difficile de leur dire si les documents caviardés sont effectivement des documents confidentiels du Cabinet, alors ils vont souvent les exclure de la plainte.
J'ai vu un cas où des documents ont été considérés par erreur comme des renseignements confidentiels du Cabinet alors qu'ils n'en étaient pas. On le voit aussi parfois pour les avis juridiques. Des documents concernant des discussions entre avocats ou des conseils stratégiques qui ne sont pas des conseils juridiques sont catalogués comme des avis juridiques visés par l'exemption prévue à l'article 23.
J'ai toujours pensé que le fait d'avoir quelqu'un qui est indépendant du gouvernement pour examiner ces documents permettrait de dire au demandeur « Faites-nous confiance, c'est bien un document confidentiel du Cabinet », augmenterait la confiance des Canadiens envers notre gouvernement. Il n'y a rien de pire que de se faire dire qu'on ne peut pas...
Je tiens à remercier la commissaire Maynard de sa présence parmi nous aujourd'hui et de son témoignage.
J'aimerais revenir un peu en arrière. Vous dites que vous avez renvoyé six cas au procureur général. Sur quelle période ces six cas ont-ils été renvoyés? Dans quelles circonstances les ministères ont-ils refusé de répondre et pourquoi ont-ils dû obtenir ce genre d'avis juridique?
Je ne peux pas entrer dans les détails des plaintes ou des enquêtes comme telles. Lorsque nous voyons des actes qui pourraient être interprétés comme une tentative intentionnelle de cacher, d'effacer ou d'enlever l'accès à quelqu'un, je ne peux pas enquêter pour savoir s'il s'agit d'une intention criminelle, alors je renvoie le cas au procureur général. Je pense avoir mentionné deux ou trois cas de ce genre survenus au cours de mon mandat, et il y en a eu quelques-uns avant moi.
Je n'ai probablement pas de plaintes contre eux, alors je ne pourrais pas vous le dire. Nous savons lesquels ne font pas bien leur travail, mais en même temps, nous recevons un certain nombre de plaintes...
Quels sont les pires contrevenants? Pouvez-vous nous dire combien de temps il faut aux ministères pour traiter les demandes et combien de plaintes les visent parce qu'ils ont refusé de répondre à des demandes?
Dans mon rapport annuel annuel, nous énumérons les 10 ou 20 principales institutions. La plupart du temps, ce sont les mêmes: IRCC, l'ASFC, la GRC, l'ARC, le BCP et Bibliothèque et Archives. Ils font habituellement l'objet du plus grand nombre de plaintes. Quant à savoir si ces plaintes sont fondées ou non, c'est une autre histoire.
Je peux vous dire qu'IRCC a certainement de la difficulté à répondre à 120 000 demandes d'accès à l'information de la part de clients qui essaient de savoir où en est leur dossier d'immigration ou de réfugié. C'est ce qui m'a amenée à faire une enquête systématique l'an dernier. J'ai rédigé un rapport spécial sur IRCC et j'ai formulé un certain nombre de recommandations. L'augmentation de l'information qu'IRCC fournit à ses clients réduira certainement le nombre de demandes d'accès et de plaintes.
Est‑ce que ces ministères et le gouvernement en général ont investi suffisamment afin d'avoir assez d'agents d'information pour répondre aux demandes qu'ils reçoivent?
Je sais qu'IRCC investit vraiment dans sa technologie pour fournir plus d'information et pour changer le système, comme le portail qu'il a sur son site, mais je pense que ce plan d'action s'étale sur une période de trois ans en raison de la quantité de travail qui doit être fait. Nous n'avons toujours pas vu de résultats tangibles suite à ces changements. La GRC a également un plan très rigoureux pour tenter de répondre aux demandes d'accès à l'information.
C'est souvent presque décourageant. Même pour moi — j'ai un arriéré de 4 000 plaintes. Lorsque vous fermez un dossier et que vous en recevez trois autres, que faites-vous? C'est vraiment difficile. C'est pourquoi notre gouvernement doit faire autre chose. Nous devons trouver des façons de fournir des renseignements en dehors des demandes d'accès à l'information. Le système est débordé.
Vous avez mentionné que plusieurs ministères ont pu s'adapter à la pandémie grâce à la technologie. Pourquoi les pratiques exemplaires n'ont-elles pas été utilisées dans tous les ministères lorsque vous avez examiné lesquels ont eu un bon rendement pendant cette période difficile et lesquels s'en sont servis comme excuse?
Je sais que le Secrétariat du Conseil du Trésor utilise des pratiques exemplaires et qu'il les partage avec toutes les institutions, mais comme pour tout le reste, nous sommes pratiquement livrés à nous-mêmes. Même à mon bureau, nous avons notre propre service d'accès, parce que je suis également assujettie à la Loi. À un moment donné...
Il est vraiment difficile de travailler avec d'autres institutions et de s'entraider. Nous essayons de le faire aussi. Lorsque je rencontre des responsables de l'AIPRP, je leur dis d'aller parler à l'ARC, qui se sert maintenant de postel pour les demandes d'information. Ils pourraient faire la même chose, ou se servir de l'intelligence artificielle pour faire leurs recherches. Nous leur transmettons des pratiques exemplaires, mais c'est vraiment au gestionnaire et au ministre d'un ministère de mettre ces choses en place.
Je remercie notre témoin de sa présence parmi nous aujourd'hui.
iPolitics signale que Dean Beeby, expert bien connu en matière d'AIPRP, recommande vivement la mise à jour du système d'AIPRP, notamment par un appel d'offres visant à remplacer les processus papier ou manuels par un système plus numérisé. Êtes-vous pour ce genre d'entreprise?
Oui. Totalement. Je crois comprendre que le SCT est en train de mettre en place un système pour les demandes en ligne et les réponses en ligne, dont nous faisons partie... C'est comme un projet pilote. Je pense que ce sera certainement utile, dans la mesure où les institutions participeront à ce projet pilote. Espérons que cela favorisera d'autres types d'innovations.
Avant que le gouvernement ne réforme la Loi, de nombreuses demandes visaient des renseignements qui sont maintenant publiés de façon proactive. Je pense que vous avez mentionné quelque chose à ce sujet plus tôt.
Pensez-vous que la publication proactive a permis de réduire le nombre de demandes d'accès à l'information, puisque les Canadiens peuvent obtenir plus de renseignements en ligne? D'un autre côté, pensez-vous que cela a augmenté la complexité moyenne des demandes, étant donné que des demandes aussi simples ne sont plus déposées?
Je dirais que la partie 2 de la Loi, qui prévoit la divulgation proactive... Il s'agit d'une divulgation proactive obligatoire. C'était la politique en vigueur avant. Elle a été suivie par tous les cabinets des ministres, alors cela n'a pas vraiment changé grand-chose. Ces renseignements étaient habituellement fournis de façon proactive, sans que ce soit inscrit dans la Loi.
D'après notre expérience, cela n'a pas réduit le nombre de demandes parce que ce n'est pas vraiment ce que les Canadiens recherchent. Je crois que beaucoup de Canadiens demandent des renseignements sur les dépenses, la COVID et les vaccins. Ces renseignements ne figurent pas sur la liste de divulgation proactive.
Ma prochaine question porte sur le pouvoir d'ordonner aux institutions de divulguer des renseignements. Depuis 2019, votre bureau a le pouvoir d'ordonner aux institutions de divulguer de l'information. À quelle fréquence avez-vous utilisé ce pouvoir et a‑t‑il contribué à améliorer la transparence?
Il a vraiment contribué à l'améliorer. Nous avons utilisé ce pouvoir plus de 40 fois. Ce qui facilite les choses, c'est de dire aux institutions que nous sommes sur le point d'ordonner la divulgation. Parfois, cela a vraiment facilité les discussions et le respect de la Loi, sans que nous ayons à émettre à une ordonnance.
Ce qui a également facilité les choses, c'est le pouvoir de publier nos rapports. Je n'ai jamais pu publier les résultats de nos enquêtes avant 2019. Il nous manque 35 années de précédents que nous n'avons pas pu publier dans le cadre d'un rapport annuel, par exemple sous la forme d'un résumé dans le rapport annuel. Nous pouvons maintenant publier des rapports complets. Ils sont accessibles sur notre site Web. Nous avons une base de données.
Il n'est pas nécessaire que ce soit une ordonnance. Ce pourrait être une recommandation. C'est vraiment utile, car nous pouvons renvoyer les institutions à ces rapports et leur dire: « Vous voyez? Votre cas est exactement comme celui‑là », ou nous pouvons renvoyer les plaignants à ces cas. Cela aide vraiment à régler les cas de façon informelle.
Le problème, c'est que nous n'avons pas, à l'heure actuelle, de programme de déclassification. Dans les cas dont nous avons parlé plus tôt, il arrive que des documents historiques de sécurité nationale soient encore classifiés comme secrets ou très secrets. Lorsque ces documents sont considérés comme sensibles, le processus de traitement d'une demande d'accès est encore plus difficile pour les analystes et pour nos enquêteurs parce que nous devons démontrer que l'information est publique ou qu'elle a déjà été diffusée, ou qu'elle n'est plus sensible. Ce n'est pas parce qu'un document est classifié qu'il ne peut pas être divulgué. Cela complique encore les choses.
Cela m'a finalement permis d'embaucher environ 25 nouveaux enquêteurs à temps plein au lieu d'avoir des consultants et de les laisser partir à la fin de l'année. Nous avons maintenant des plans de rétention et des plans de perfectionnement, et nous avons donc un plus grand groupe d'enquêteurs pour s'occuper de nos plaintes.
Madame Maynard, je vous remercie de vos réponses toujours claires.
Je dispose seulement de deux minutes et demie, alors nous allons devoir tenter de faire court.
Est-ce que la mission du Commissariat comprend un volet d'éducation destiné tant aux ministères et aux organismes qu'à la population? Dans le fond, est-ce qu'on instruit les gens ou les ministères sur ce qu'est une information privilégiée ou un secret, par exemple? Faites-vous ce genre d'éducation?
Oui, nous le faisons. La loi qui régit le Commissariat ne me donne pas expressément cette autorité, contrairement à la loi régissant le commissaire à la protection de la vie privée, par exemple, qui lui donne un mandat d'éducation en la matière, mais je le fais de toute façon, parce que je trouve cela important.
C'est une des raisons pour lesquelles nous avions demandé d'avoir l'autorité de publier nos rapports. Nous établissons des lignes directrices et nous publions des directives sur notre site Internet. Cela permet aux gens de voir que nous sommes constants dans nos décisions et de mieux comprendre le processus que nous suivons dans le cadre de nos enquêtes.
Il y a différentes raisons pour lesquelles on devrait garder des informations secrètes. Il y a assurément de bonnes raisons liées à la sécurité nationale, mais il arrive aussi que l'on garde secret le contenu de certaines rencontres lors desquelles les gens du gouvernement ont des décisions à prendre, car cela permet aux gens d'échanger librement, sans se sentir obligés de faire attention à ce qu'ils disent. Toutefois, comme vous l'avez dit tout à l'heure, cela doit être limité aux documents ou aux sujets très sensibles.
En terminant, je voudrais parler de votre enquête sur IRCC, qui était sur votre liste d'organismes voyous, pour ainsi dire. Est-ce que la lenteur du Commissariat — je ne vous vise pas du tout en disant cela — finit par créer une lenteur dans le système d'immigration?
Non. En fait, les plaintes que nous recevons concernant IRCC sont habituellement traitées dans un délai de 30 jours. Les fonctionnaires d'IRCC répondent très rapidement aux demandes; ils ne parviennent pas à le faire dans un délai de 30 jours, mais souvent ils le font en moins de 60 jours. Donc, il arrive souvent qu'une personne dépose une plainte au Commissariat, mais que, avant que nous ayons commencé à l'examiner, elle reçoive l'information qu'elle avait demandée. Alors, ce sont des dossiers que nous fermons rapidement, en ce qui concerne IRCC.
Je ne peux m’empêcher de remarquer que vos dépenses de programme dans le Budget principal des dépenses de 2021 étaient d’environ 14,9 millions de dollars, alors que dans le Budget principal des dépenses de 2022‑2023, elles sont d’environ 14,1 millions de dollars. Je me pose des questions. Nous avons parlé d’augmentations, mais nous constatons une diminution d’environ 815 000 $. Je remarque également que, dans votre plan ministériel, vous avez parlé d’une augmentation du nombre de plaintes, mais que vous ne semblez pas avoir l’intention d’augmenter vos ressources humaines au cours des trois prochaines années.
Notre financement était fondé sur la fermeture de 4 000 dossiers environ par année. Comme je l’ai dit, nos plaintes ont presque doublé. En fait, nous avons investi dans notre personnel, dans la formation et dans des modèles et des processus, mais comme je l’ai dit dans ma déclaration préliminaire, l’innovation a maintenant atteint ses limites. Nous avons fait tout ce que nous pouvions. Nous avons fourni tous les outils possibles et nous avons maintenant besoin de plus de gens et de moins de plaintes.
Je pense que les 800 000 $ correspondent à des crédits de l’année précédente, que nous n'avons pas utilisés. Nous avons donc demandé au gouvernement de nous les redonner pour que nous puissions les dépenser l’année dernière. Nous allons maintenant demander plus d’argent pour accroître nos ressources et notre infrastructure de TI.
Nous avons obtenu 3 millions de dollars pour embaucher 25 personnes. Il m'en faudrait au moins 25 de plus, donc au moins 3 millions de dollars, mais cela ne me permettra pas de payer mes services généraux pour appuyer ces employés, et le bureau de la traduction dont nous avons besoin pour publier plus de rapports et plus de lignes directrices.
Tout cela doit être très bien calculé cette fois‑ci, afin que l’impact de l’augmentation de mon bureau ne se fasse pas sentir non plus sur les autres secteurs.
Avant de redonner la parole à M. Bezan, je vais exercer ma prérogative de président. J’ai quelques questions.
Madame la commissaire, c’est la première fois que j’ai l’occasion de vous poser des questions. Cependant, j’en ai posé à votre prédécesseure au début de la 42e législature, et ce qui m’a frappé dans votre déclaration préliminaire, c’est à quel point la situation semble avoir peu changé au cours des dernières années.
Je pense que c'est dû à des problèmes qui ont touché plusieurs gouvernements successifs. Les problèmes dont votre prédécesseure a parlé au Comité remontaient à une époque antérieure. Aujourd'hui, vous dites que vous avez tiré la sonnette d'alarme pour signaler que le système s'effondrait ou qu'il était débordé.
C’est exactement ce dont la commissaire Legault s’était plainte en 2016. Notre comité a fait une enquête sur l’ensemble du système, et les témoins ont parlé, les uns après les autres, d’une culture du secret généralisée qui existe depuis des décennies. Pouvez-vous nous en dire plus?
Oui. Nous voyons des problèmes semblables. La situation ne s’est pas améliorée.
Je pense qu'elle s'est absolument améliorée dans certains ministères. Cependant, dans l’ensemble, Mme Legault l’a dit et nous le répétons: les Canadiens demandent de plus en plus d’information à leur gouvernement. Les demandes ont augmenté de 225 % au cours des six dernières années. Les ressources nécessaires pour soutenir ce système n’ont pas été augmentées.
Que faudra‑t‑il faire pour que le gouvernement tienne sa promesse d’ouverture par défaut?
Les témoins que nous avons entendus dans le cadre de ces études — et il semble que les choses n’aient pas beaucoup changé — ont parlé d'un refus systématique. La première réaction semble être: quels motifs pouvons-nous invoquer pour rejeter cette demande d’accès à l’information, ou combien de temps pouvons-nous la faire traîner? Ce sont des choses qui n’ont pas changé depuis très longtemps, semble‑t‑il. Je suis sûr que je pourrais revenir sur des témoignages que le Comité a entendus il y a 10 ou 20 ans et trouver certains des mêmes problèmes.
Que faudra‑t‑il faire pour changer la culture du gouvernement afin qu’il adhère au principe d’ouverture par défaut?
Comme vous le savez, un changement de culture prend beaucoup de temps. Nous avons certainement besoin de dirigeants plus sérieux qui donnent des instructions à leurs employés, à leurs fonctionnaires, pour qu’ils divulguent par défaut, comme vous le dites. Nous avons besoin d’une loi plus robuste. Nous devons réduire l’impact de certains articles de la loi.
Certaines des exceptions, comme l’article 21 sur les « avis ou recommandations », sont utilisées à outrance et font l’objet d’abus dans l’ensemble du gouvernement, parce que tout est considéré comme un avis ou une recommandation, alors qu'en réalité, les conclusions... Il y a tellement de choses que nous pouvons divulguer sur ces documents lorsque l’article 21 est invoqué. C’est l’une des recommandations que j’ai formulées dans mon mémoire au SCT. L’article 21 doit absolument se limiter à des cas très précis pour que les institutions n’aient plus ce pouvoir discrétionnaire. Elles doivent appliquer la loi telle qu’elle est.
Il y a des façons de rendre la loi plus précise et moins facile à interpréter. C’est censé être plus précis.
Il faut aussi encourager l'usage du pouvoir discrétionnaire. Il est très rare qu'il soit utilisé pour les avis juridiques, par exemple. Même si l’avis juridique a été rédigé il y a 60 ans... Parfois, je me demande s’il est vraiment important de protéger tel document encore maintenant, mais il m’est très difficile de dire à un ministre qu'il ne fait pas un usage raisonnable de son pouvoir discrétionnaire.
Il faut regarder les faits. Nous devons tenir compte de l’intérêt public. C’est une autre chose que la loi ne prévoit pas vraiment. L’information que nous cachons devrait-elle être divulguée parce que c'est dans l’intérêt public...?
J’ai pris beaucoup plus de temps que prévu, mais j’ai une question précise à poser très rapidement.
Votre prédécesseure a décrit le projet de loi C‑58 au cours d’une réunion remarquable qui a eu lieu au sein de ce comité, et elle a laissé entendre que c’était un pas en arrière, et non un pas en avant. Êtes-vous d’accord avec elle?
À l’époque, j’étais d’accord pour dire que ce n’était pas suffisant, mais nous avons apporté beaucoup de changements. Malheureusement, le projet de loi C‑58 n’a pas fait l’objet de beaucoup de consultations lorsqu’il a été déposé.
Si vous regardez la première ébauche du projet de loi C‑58 et le texte qui a été adopté, il y a eu beaucoup de changements, et ces changements ont, en fait, été très utiles pour mon bureau et pour le système également. C’était un bon début.
Vous m’avez un peu coupé l’herbe sous le pied. J’aimerais également discuter avec la commissaire des types de modifications législatives dont elle a besoin pour avoir le pouvoir de veiller à ce que la transparence soit respectée, à ce que l’information soit communiquée en temps opportun et à ce qu'il n'y ait pas d’abus de pouvoir. Ces abus ont lieu lorsque le gouvernement tente de se servir de la classification « Secret », « Très secret » ou « Document confidentiel du Cabinet » pour des questions comme l’achat d'EPI et invoque la sécurité nationale lorsqu'il achète des choses comme des masques, des gants et des respirateurs.
Je demande encore une fois... En tant que comité, nous voulons envisager de faire les choses de façon proactive. Quels changements législatifs précis devons-nous intégrer à la loi pour nous assurer que vous avez le pouvoir de tout faire pour obliger un ministère à produire des rapports et pour faire en sorte que des amendes soient imposées et que les autorités compétentes déterminent si elles doivent ou non porter des accusations?
Je vous invite à lire le mémoire et les recommandations que j'ai adressés au ministre Duclos, en 2020, en ce qui concerne l’examen législatif et le système dans son ensemble. J’ai formulé des recommandations très précises, mais la question principale...
Aux fins de la réunion d’aujourd’hui, pouvez-vous nous rappeler quels sont les changements de haut niveau qui doivent être apportés et pourquoi le Conseil du Trésor et le gouvernement n’ont pas donné suite à ces recommandations?
Ils étaient censés publier leur rapport au début de l’année, mais apparemment, cela a été retardé jusqu’en décembre.
Plus précisément, il y a des choses dans la loi qui doivent être modifiées. Le délai de 30 jours est bien, mais il ne tient pas compte de la consultation entre les institutions. Il doit y avoir des limites au nombre de consultations ou à leur durée parce qu’à l’heure actuelle, lorsque les institutions demandent des prolongations, c'est souvent à cause de ces consultations, qui ne sont pas obligatoires, soit dit en passant. L’institution n’a pas à les faire, mais souvent, elle s'y sent obligée.
Mon bureau doit avoir accès aux documents confidentiels du Cabinet, afin que quelqu’un qui, comme je l’ai dit plus tôt, est indépendant du gouvernement, puisse les examiner et convaincre les Canadiens que ce sont bien des documents confidentiels du Cabinet.
Le pouvoir que je détiens est vraiment utile, mais si une institution ne répond pas à mon ordonnance — cela ne s’est pas encore produit —, je n’ai aucun mécanisme pour m’assurer qu'elle sera respectée. J’aimerais qu’il y ait un processus de certification afin que je puisse m’adresser à la Cour fédérale pour faire certifier l’ordonnance. Cela aurait un autre impact sur les institutions, si elles refusent de faire quoi que ce soit au sujet des ordonnances ou d’y répondre.
De plus, toutes les exemptions et exclusions doivent être revues dans le but de réduire leur incidence et de les rendre plus strictes afin de limiter leur effet le plus possible.
Nous devons aussi étendre la loi aux sous-traitants et aux tiers qui fournissent des services publics au gouvernement fédéral. À l’heure actuelle, ils ne sont pas assujettis à la loi. Je pense que les Canadiens verraient cela d'un très bon œil.
En ce qui concerne la question des documents confidentiels du Cabinet, est‑il de plus en plus fréquent qu'on se serve de la classification « Secret » et « Très secret » pour que le gouvernement puisse se soustraire à une demande d’accès à l’information?
Comme je l’ai dit plus tôt, il m'est vraiment difficile de me prononcer parce que nous n’avons pas accès aux documents confidentiels du Cabinet, et les demandeurs acceptent souvent de ne pas les demander. Ils laissent tomber parce qu’ils savent que personne ne peut leur dire si les documents qui ont été caviardés à titre de documents confidentiels du Cabinet sont effectivement des documents confidentiels du Cabinet. Nous ne pouvons pas les examiner. Nous n’avons pas vu d’augmentation ou de diminution parce que nous ne voyons pas ces documents.
Lorsque j’ai examiné le dossier de la Défense nationale, nous avons constaté que les fonctionnaires du ministère utilisaient des mots et des noms de code pour contourner les demandes d’accès à l’information. Avez-vous vu cela dans d’autres ministères?
Madame la commissaire, je vous remercie de nous donner des réponses si exhaustives à nos questions. Je l'apprécie.
Les résumés en ligne des demandes d'accès à l'information qui ont été traitées sont supprimés au bout de deux ans. Ne serait‑il pas utile, selon vous, que le gouvernement les garde en ligne plus longtemps? Quelle est la justification de cette période de deux ans?
Je vais devoir vous demander de vous informer auprès du Conseil du Trésor, parce que cela relève de sa politique sur le processus que doit suivre une institution en répondant à une demande d'accès. Des plaignants me disent que certaines des demandes ne sont même pas publiées sur le site Web de l'institution. C'est quelque chose que nous pourrions examiner. Je sais qu'il y a des plaintes à ce sujet. Je connais des gens qui s'en plaignent, mais nous n'avons reçu aucune plainte officielle à cet égard.
Il serait utile, je pense, que les demandes soient accessibles durant une plus longue période. Le Comité pourrait examiner cela et recommander une période d'accès appropriée. Au bout d'un certain temps, certains renseignements ne sont plus pertinents, mais une période de deux ans, n'est‑ce pas un peu court?
Je vous remercie. C'est une information très utile.
Je sais que des collègues vous ont déjà interrogée — c'est en fait l'objet de notre réunion — au sujet des dépenses de votre bureau. Avant l'arrivée au pouvoir de notre gouvernement en 2015, vos autorisations de dépenser s'élevaient à 9,9 millions de dollars, et vous avez dépensé 9,3 millions de dollars. Pour l'exercice 2021‑2022, vos autorisations de dépenser s'élevaient à 14,9 millions de dollars, ce qui représente une hausse importante, et vous avez dépensé 14,5 millions de dollars. Cette année, votre pouvoir de dépenser est de 16,3 millions de dollars.
Il s'agit là de hausses importantes, et nous constatons que le nombre d'employés est également en hausse. Croyez-vous que ces augmentations contribuent à renforcer la confiance du public dans l'ensemble du gouvernement, ce qui est un rôle important de votre bureau?
Nous avons indéniablement besoin de plus d'employés et de ressources pour nous acquitter des nouveaux pouvoirs que nous confère le projet de loi C‑58. Cela explique une partie de la hausse de notre budget.
Nous avons demandé des fonds supplémentaires pendant quatre années successives par le biais d'une présentation au Conseil du Trésor. Ces fonds nous ont été accordés temporairement pendant trois ans, mais depuis deux ans ce financement est devenu permanent. Cela nous est très utile, parce qu'avec le financement temporaire, tout ce que nous pouvions faire, c'était d'embaucher des gens et les laisser partir à la fin de l'année. Ce n'était pas possible de les maintenir en poste. Nous avons maintenant un financement de base plus permanent, mais ce n'est malheureusement pas suffisant, comme je l'ai dit tout à l'heure.
Lorsque l'information est déjà publique, une institution peut invoquer ce prétexte pour ne pas répondre à une demande d'accès et se contenter de diriger le demandeur vers cette information. Plus il y aura de renseignements publiés, moins il y aura de demandes d'accès et plus il y aura de demandes ciblées. Parfois des gens prennent connaissance d'une information et nous demandent plus de détails à ce sujet.
Actuellement, nous constatons que l'information fournie n'est pas celle que les Canadiens demandent. Comme ils ne peuvent malheureusement pas trouver les renseignements qu'ils veulent, ils doivent faire une demande d'accès à l'information.
Lorsque nous faisons une demande d'accès à l'information ou de liberté d'information, si cette demande concerne une personne donnée ou un dossier donné par rapport à des renseignements confidentiels du Cabinet, quelle est l'incidence sur les lois en matière de protection de la vie privée, si quelqu'un peut utiliser la liberté d'information pour obtenir un renseignement personnel concernant un citoyen?
Est‑ce que cela est protégé par la loi? Est‑ce une source de préoccupation pour votre commissariat?
En fait, la Loi sur l'accès à l'information prévoit une exemption en vertu de laquelle des renseignements personnels sont caviardés, sauf si vous avez obtenu le consentement de la personne concernée ou si l'information est publique. C'est probablement l'exemption la plus utilisée que nous voyons pour les demandes d'accès à l'information.
Cela est rarement contesté. Nos institutions comprennent ce qu'est la vie privée et la protection de l'information. Il arrive rarement que nous ne soyons pas d'accord avec l'institution, mais c'est très rare et nous prenons cet enjeu très au sérieux. Nous avons reçu un bon rapport du commissaire à la protection de la vie privée sur ce genre de cas.
La confiance, c'est de savoir que l'information qu'il nous est permis de donner aux gens est bonne et complète, et qu'ils peuvent l'utiliser pour se prononcer ou pour prendre des décisions à certains sujets.
Maintenant, remontons un peu plus haut dans la hiérarchie et parlons du gouvernement en général. Pour ma part, j'ai souvent défini la confiance comme étant la non-nécessité de faire la preuve d'une chose, à tout hasard.
Est-ce que la population a confiance dans le gouvernement?
C'est une question que vous devrez poser aux Canadiens et aux Canadiennes. Il y a eu des élections récemment. Je crois que les gens sont curieux et qu'ils posent beaucoup de questions. Personnellement, j'ai trois jeunes garçons et ils posent souvent des questions assez difficiles. Je pense que c'est là qu'est rendue la génération actuelle de Canadiens.
Je ne sais pas s'il y a un lien à faire avec le nombre de demandes de renseignements qui sont fondées. Cependant, je peux vous dire que, si le gouvernement peut leur donner rapidement l'information qu'ils demandent, les Canadiens auront moins tendance à se tourner vers des sources qui ne sont pas très fiables ou vers les médias sociaux, qui peuvent donner de la mauvaise information.
C'est pour cette raison que le gouvernement a la responsabilité de donner le plus rapidement possible l'information demandée. Ainsi, même s'ils ne sont pas d'accord sur certaines informations ou décisions, au moins les gens comprennent mieux ce qui a été fait et les circonstances dans lesquelles cela s'est fait.
Cela explique très bien la deuxième partie de votre mission, qui porte sur la responsabilisation à l'échelle de l'administration fédérale. S'il y avait plus de divulgation, au moins on saurait que l'information divulguée est vraie, contrairement à la désinformation souvent véhiculée par les médias sociaux, notamment. Au moins, on aurait la chance d'avoir les faits réels et de tenir la bonne discussion.
Selon votre bureau, vous accordez une attention particulière à l'analyse comparative entre les sexes Plus dans votre plan ministériel. Je cite: « Pour savoir si le programme du Commissariat comporte des obstacles à l'accès, le Commissariat étudie la meilleure façon de recueillir des données désagrégées sur les plaintes provenant de membres des groupes visés par l'ACS+. » Je soulève la question parce que je sais qu'il y a un problème concernant un recours collectif intenté par des fonctionnaires noirs et je pense que vous avez fait allusion à la façon dont le privilège de la Couronne a tendance à bloquer la diffusion d'une partie de l'information.
J'aimerais savoir si vous enquêtez actuellement, au nom des fonctionnaires noirs, sur la dissimulation de données désagrégées très importantes pour la période de 1991 à 2018.
Je ne pourrais pas vous dire précisément si nous avons reçu une plainte ni sur quoi portent nos enquêtes. L'autre contrainte que nous avons, c'est que nous ne connaissons généralement pas l'identité des demandeurs ou des plaignants qui font appel à nous, sauf s'ils s'identifient. Je ne suis pas autorisée à demander si la personne est issue de la communauté noire ou d'une Première Nation.
Il nous arrive parfois, dans le cadre d'une enquête, d'apprendre à qui nous avons affaire, mais c'est vraiment intéressant lorsque les gens nous disent qui ils sont. Cela nous permet d'accorder la priorité à certains de ces cas, surtout quand le besoin d'information est urgent. Malheureusement, comme vous pouvez le constater, nous enquêtons sur 6 000 cas par année...
Il ne me reste qu'une minute. Dans votre allocution préliminaire, vous avez parlé des obstacles auxquels se heurtaient les Premières Nations pour obtenir de l'information. Là encore, j'aurais cru que, dans le cadre d'un processus équitable, de bonne foi et de nation à nation, le gouvernement ferait preuve d'ouverture, comme pour les revendications territoriales et d'autres accords.
Pouvez-vous nous expliquer comment les Premières Nations sont particulièrement touchées par certains des obstacles inhérents à ce processus?
Elles sont très touchées. Cette semaine, j'ai rencontré le directeur de la recherche sur les revendications nationales. La plupart du temps, son équipe a recours au processus informel. Si elle n'obtient pas l'information souhaitée, elle doit suivre le processus officiel et déposer une plainte à mon bureau. Cela occasionne des délais supplémentaires.
Je me réjouis de voir que le ministre Miller parle de fournir plus de renseignements et de favoriser la réconciliation en traitant les revendications des membres des communautés autochtones. J'espère voir bientôt la lumière au bout du tunnel.
Je vous remercie de la franchise dont vous faites preuve avec nous aujourd'hui, madame la commissaire.
L'un des défis que j'ai constatés depuis deux ans et demi, c'est la grave pénurie d'agents de l'AIPRP. Il n'y a tout simplement pas assez de personnel dans les ministères pour répondre aux demandes. Selon votre expérience et votre évaluation de la situation, ce problème se fait‑il sentir dans l'ensemble du gouvernement?
Tout à fait. Certaines institutions nous ont dit qu'elles ont les ressources financières pour embaucher plus d'agents, mais elles n'arrivent pas à trouver de gens qualifiés pour travailler dans ce domaine. C'est un travail très difficile parce que vous vous retrouvez toujours entre la personne qui demande de l'information et l'institution qui ne veut pas la fournir ou qui tarde à recueillir les renseignements. Vous êtes constamment en train de vous battre entre les deux.
Ce n'est pas un travail facile et il est aussi très difficile d'obtenir de la formation. J'ai entendu dire que le SCT lance un projet pour recruter un bassin de candidats qui seront répartis entre les institutions et qui, je l'espère, recevront une formation. Je souhaite que ce projet fonctionne, tout en aidant les institutions.
Vous avez parlé de l'utilisation de la technologie, par exemple de l'intelligence artificielle et d'autres moyens. Pouvez-vous nous indiquer des pays comparables au nôtre qui s'en tirent bien, des pays dont les lois, les politiques et les pratiques pourraient nous inspirer?
Je ne connais aucun pays susceptible d'avoir une meilleure technologie, mais je suis certaine qu'il y en a. C'est parfois très difficile de se comparer à d'autres pays. Certains de nos ministères, comme Pêches et Océans Canada, se sont dotés de systèmes qui leur permettent de répondre rapidement aux demandes d'accès à l'information. Le SCRS s'en tire plutôt bien. Je sais qu'il ne fournit pas beaucoup de renseignements, mais il n'a pas de problème à trouver l'information. Il y a de bonnes pratiques ici au Canada.
C'est une raison de promouvoir ces bonnes pratiques dans l'ensemble du gouvernement.
Pour avoir présenté quelques demandes d'accès à l'information, je sais qu'il y a des lacunes, notamment parce que certaines demandes visaient de l'information qui avait déjà été mentionnée dans une lettre ou dans un courriel, mais il est impossible d'obtenir cette information par le biais d'une demande d'accès à l'information. Cela se passe par téléphone ou par courriel: « Appelez-moi et nous en discuterons plus longuement ». Comment pouvons-nous garantir l'ouverture et la transparence lorsque, intentionnellement ou non, il y a des façons de contourner le système?
Actuellement, comme la loi n'oblige pas le gouvernement fédéral à documenter ses décisions, les institutions peuvent donc documenter ce qu'elles veulent. Elles sont encouragées à toujours prendre des notes et à s'assurer que les décisions importantes sont consignées quelque part, mais il n'y a pas de processus uniforme. Avec le télétravail, c'est encore pire.
Nous avons eu un premier cas où une personne demandait l'enregistrement vidéo d'une réunion d'équipe, ce qui est nouveau pour notre gouvernement. La réunion d'équipe n'avait pas été enregistrée et personne n'avait pris le temps de rédiger le procès-verbal de cette réunion. C'est une situation nouvelle, et il faudra trouver des solutions. Il n'est pas obligatoire d'enregistrer la réunion, mais quelqu'un doit rédiger le procès-verbal des réunions. Vous devez vous assurer qu'il est ensuite correctement consigné afin de pouvoir le retrouver s'il y a une demande d'accès à l'information à ce sujet. Il serait vraiment utile que le devoir de documenter soit ajouté à la loi.
Je vous remercie de reconnaître l'existence de ces lacunes. Comme il y a très peu de documentation, je dirais qu'il est impossible d'évaluer le volume de renseignements manquants.
En ce qui concerne la COVID, le télétravail et la forte hausse de demandes d'accès à l'information, dans votre lettre au ministre Duclos, vous dites que la loi et les obligations qui y sont associées sont mal connues. Le gouvernement doit‑il faire un effort pour s'assurer qu'elles sont comprises de manière uniforme à la grandeur du gouvernement?
Monsieur Kurek, vous vous êtes lancé dans une longue question alors qu'il ne vous restait que quelques secondes. Je vais permettre à notre témoin de répondre brièvement, si elle le souhaite, ou peut-être de répondre plus tard.
Je crois comprendre que le ministre Duclos et son cabinet ont informé les institutions qu'elles ne pouvaient pas cesser de travailler avec... La loi les oblige à répondre aux demandes d'accès. Nous leur avons dit la même chose. Durant la pandémie, nous avons constaté que certains bureaux avaient complètement fermé leurs portes, ce qui était inacceptable.
Je tiens à vous remercier également, madame Maynard, d'être avec nous aujourd'hui. C'est une discussion très importante qui est allée plus loin que le budget des dépenses, mais je pense que c'est la meilleure tribune pour déterminer comment nous pouvons le mieux vous servir avec les budgets dont nous sommes saisis.
Je tiens à souligner que depuis 2015, le gouvernement a investi plus de 50 millions de dollars de plus pour améliorer l'accès à l'information des Canadiens. Il a toutefois été question aujourd'hui des arriérés et des augmentations budgétaires qui ont été assez importantes certaines années. Avec l'investissement de 50 millions de dollars pour 2022, diriez-vous qu'il y a plus de transparence aujourd'hui qu'il y a 10 ou 20 ans, ou est‑ce que l'équilibre demeure aussi fragile, parce que le volume de demandes est tellement élevé que, malgré les sommes investies, le degré de transparence est au même niveau qu'il y a 10 ans?
Vu la forte augmentation des demandes — 225 % en six ans, comme je l'ai dit —, il est indéniable que le volume de renseignements fournis est plus élevé. Les demandes sont beaucoup plus nombreuses. Il y a un intérêt accru, mais nous pouvons certainement faire plus, et pas seulement en investissant plus d'argent dans les bureaux. Nous devons encourager la divulgation volontaire, proactive. Nous devons investir dans d'autres moyens parce que nous n'aurons jamais assez de ressources si nous ne pouvons pas fournir l'information sans passer par une demande d'accès à l'information.
Mon bureau ne sera jamais assez grand et les institutions n'auront jamais assez de ressources pour répondre à cette forte augmentation des demandes.
Vous avez également dit que lorsque des gens présentent des demandes, ils hésitent à le faire ou s'empêchent pratiquement de le faire en croyant qu'il s'agit de renseignements confidentiels du Cabinet. Ils se disent qu'ils ne peuvent demander ces renseignements et ils ne le font pas. Ma question comportera donc deux volets.
Premièrement, pourquoi la confidentialité du Cabinet est-elle importante? Deuxièmement, comme la confidentialité du Cabinet est un principe fondamental de notre régime gouvernemental, est‑il important, selon vous, de protéger le secret des discussions? Premièrement, pourquoi est‑ce un élément important de notre régime et, deuxièmement, à quoi ressemblerait une plus grande ouverture?
Je suis tout à fait d'accord pour dire qu'il est important que les ministres et les membres du Cabinet puissent discuter franchement et ouvertement des politiques, des lois et des changements touchant l'avenir du Canada et que le secret de ces discussions soit protégé.
Quand je demande l'autorisation d'examiner les documents confidentiels du Cabinet, ce n'est pas pour les divulguer. C'est ce que la plupart des gens ne comprennent pas. C'est vraiment pour m'assurer que nous utilisons correctement l'exception visant ces documents confidentiels du Cabinet. Actuellement, il n'y a aucun moyen de remettre cela en question.
Ce que je voudrais, c'est de continuer à protéger les documents confidentiels du Cabinet, tout en disposant d'un mécanisme d'examen afin que nous sachions si un gouvernement utilise cette exception de manière appropriée et qu'il n'en abuse pas.
Dans les recommandations que vous avez faites précédemment, y a‑t‑il eu des discussions visant à déterminer les paramètres d'un tel mécanisme, ou n'en sommes-nous pas encore là?
Je souhaite présenter la motion dont j'ai donné avis oralement il y a environ une semaine. Je vais en faire lecture, si cela vous convient. Je propose:
Que, conformément à l'article 108(2) du Règlement, le comité entreprenne une étude qui examine la question de la surveillance numérique par les employeurs des Canadiens qui travaillent à domicile, y compris: a) la prévalence de la surveillance numérique par les employeurs; b) le type de surveillance recueillie; c) la façon dont les données de surveillance personnelle sont stockées et sécurisées; d) les règles en place pour protéger le droit à la vie privée des employés qui travaillent à domicile; e) les droits de divulgation et de permission des employés en matière de collecte de données; que le comité fasse rapport de ses conclusions et recommandations à la Chambre.
Quand nous avons discuté de cette motion à ce moment‑là, je sais que certains députés ont dit que cela s'apparentait à l'étude sur l'intelligence artificielle que nous avons proposée, mais c'est tout à fait différent, en fait. Cette motion ne porte pas seulement sur l'intelligence artificielle, mais sur le fait qu'un nombre croissant de fonctionnaires travaillent à domicile et que les employeurs semblent prendre de plus en plus de liberté quant aux types d'intrusion qu'ils peuvent faire dans la vie privée des gens. Elle concerne la question plus générale du télétravail, de la vie privée des fonctionnaires, leur droit à la vie privée ainsi que la façon dont nous protégeons ce droit lorsqu'ils travaillent à domicile, isolés de leurs collègues et de leurs syndicats.
Mon collègue Michael Coteau a constaté que les employeurs surveillent de plus en plus leurs employés qui font du télétravail. Il ne s'agit pas seulement d'intelligence artificielle. Il s'agit de protéger la vie privée des employés qui travaillent à domicile. C'est devenu un gros problème depuis la pandémie parce qu'ils sont très nombreux à faire du télétravail. Cette motion est importante parce qu'elle va au‑delà de l'intelligence artificielle.
Madame Hepfner, il vous reste encore 45 secondes, si vous souhaitez poser une question à la commissaire. Autrement, nous passerons au prochain intervenant.
J'aimerais proposer une motion dont j'ai donné avis il y a quelques semaines. Je vais la lire aux fins du compte rendu.
Je propose:
Que, conformément à l'article 108(3)(h)(vii) du Règlement, le Comité mène une étude sur le système d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels, qui viole régulièrement son propre mandat de transparence gouvernementale par des retards et une mauvaise gestion; que l'étude comporte au moins cinq réunions et que le comité fasse rapport de ses conclusions à la Chambre.
Je propose un amendement et je reconnais qu'il y a eu des consultations. Je propose de supprimer de la motion les mots « qui viole régulièrement son propre mandat de transparence gouvernementale par des retards et une mauvaise gestion ».
Que, conformément à l'article 108(3)(h)(vii) du Règlement, le Comité mène une étude sur le système d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels; que l'étude comporte au moins cinq réunions et que le comité fasse rapport de ses conclusions à la Chambre.
Par votre entremise, monsieur le président, j'aimerais poser une question à M. Williams. La portée de cette étude me semble très vaste. Quel en est l'objectif, exactement?
Cette motion n'a pas vraiment fait l'objet de débat. Je pose cette question rapidement à mon collègue.
Je pense que les témoignages aujourd'hui étaient clairs quant à l'objectif, monsieur le président. Je pense que cette étude permettra d'approfondir la question et de faire en sorte que nous ne nous contentons pas d'entendre les témoignages, mais que nous faisons des recommandations au Parlement pour que les changements nécessaires soient apportés.
Comme nous l'avons entendu, une période de plus de 2 ou de 80 ans, c'est beaucoup trop long. Les Canadiens veulent que le Commissariat exécute son mandat. C'est une étude qui nous permettrait de présenter de bonnes recommandations au Parlement pour régler ce problème. Merci.
Je veux apporter des précisions à nouveau. Ce bureau est très vaste. Les témoignages d'aujourd'hui nous ont permis de constater les nombreux volets de son mandat. Je suis très favorable à ce que nous entreprenions cette étude. Je me demande seulement si le député peut en restreindre la portée. Ce serait un bon moment pour le faire.
C'est peut-être ce que vous pensez, mais le député ne pourra pas le faire sur le plan de la procédure, parce que cela nécessiterait un amendement à sa propre motion. Si vous avez une suggestion à faire pour en restreindre la portée, vous pouvez la proposer sous forme d'amendement. Autrement, c'est sur cette motion que vous devrons nous prononcer.
Puis‑je vous demander de nous fournir des statistiques sur le mandat des agents de l'AIPRP de l'ensemble du gouvernement? Si vous ne le pouvez pas, pourriez-vous déposer d'autres renseignements auprès du Comité?
Actuellement, la loi prévoit des mandats de sept ans. Je pense que la plupart des commissaires ont prolongé leur mandat de quelques années, mais je pourrai vous revenir avec les chiffres exacts relatifs à chaque commissaire qui m'ont précédée.
J'aimerais seulement savoir si la commissaire peut nous donner de l'information sur le nombre de députés qui ont présenté des demandes d'accès à l'information au cours des six dernières années. Est‑ce un renseignement qu'elle peut communiquer au Comité?
Je ne pourrais pas vous le dire. Nous ne conservons pas ces demandes. Nous avons seulement des statistiques générales sur les demandes présentées par des citoyens ou des journalistes. Je peux vous faire parvenir ces statistiques, mais je ne pense pas qu'elles concernent les députés.