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ETHI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique


NUMÉRO 069 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 3 mai 2023

[Enregistrement électronique]

(1630)

[Français]

     J'ouvre maintenant la séance.
    Bienvenue à la 69e réunion du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique de la Chambre des communes.
    Conformément à l'article 108(3)h) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mercredi 7 décembre 2022, le Comité reprend son étude sur l'ingérence étrangère et les menaces entourant l'intégrité des institutions démocratiques, de la propriété intellectuelle et de l'État canadien.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue au témoin d'aujourd'hui, M. Alexandre Trudeau, membre de la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau.
    Monsieur Trudeau, vous avez la parole pour cinq minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Je suis bénévole pour la cause de la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau depuis 22 ans et demi. Mon bénévolat a commencé dans les jours qui ont suivi le décès de Pierre Trudeau. En réponse à toutes sortes de propositions qui cherchaient à mobiliser des ressources au nom de Pierre Trudeau, j'ai suggéré qu'on se souvienne de l'homme non pour les causes de son décès ni même pour ses actions politiques, mais pour son service à la vie intellectuelle. S'il devait y avoir un monument en l'honneur de Pierre Trudeau, il devrait illustrer son travail intellectuel incessant, varié et vivant.
    Comme bénévole, à l'invitation du gouvernement de l'heure, je me suis donc joint à un petit groupe de hauts fonctionnaires pour concevoir les programmes de la Fondation, qui venaient justement répondre à un besoin pressant de soutien à la recherche en sciences sociales et humaines au Canada.

[Traduction]

    Toujours à titre de bénévole, j'ai été administrateur et membre du comité exécutif de la Fondation jusqu'à septembre 2020. J'ai aussi siégé aux comités de sélection des quatre présidents successifs de la Fondation.
    Pendant plus d'une vingtaine d'années, j'ai vraiment donné tout ce j'ai pu à la Fondation et à son importante mission. Parmi les privilèges que m'a donnés la vie, un des plus grands a été de servir aux côtés de nombreux Canadiens bénévoles extraordinaires au sein de la structure de gouvernance de la Fondation. Malgré des parcours différents et des convictions idéologiques extrêmement variées, ces bénévoles étaient unanimes à croire que le travail intellectuel rigoureux et l'excellence en recherche universitaire revêtent une importance capitale pour la prospérité, voire pour l'indépendance de notre pays.
    Depuis sa création, la Fondation a remis plusieurs centaines de bourses à nos plus brillants chercheurs et elle leur a donné les outils et la formation nécessaires pour rendre leur travail essentiel plus accessible pour l'ensemble des Canadiens. Les boursiers et les mentors que j'ai eu l'honneur de connaître personnellement m'ont tous rendu très fier d'être canadien.

[Français]

    Grâce à eux, je peux affirmer que le Canada est, malgré tout, encore un fier bastion de la raison, dans un monde qui se perd un peu plus tous les jours.

[Traduction]

    C'est précisément parce qu'il est un bastion de la raison et de la tolérance, et peut-être le dernier refuge de l'humanisme universel, que le Canada est aujourd'hui la cible de l'ingérence étrangère.

[Français]

    L'ingérence étrangère est un problème capital qui vise le bon fonctionnement de nos institutions et de notre démocratie. Plusieurs puissances étrangères sont motivées à influencer l'État canadien de façon perfide.

[Traduction]

J'insiste toutefois sur le fait qu'il n'y a jamais eu d'ingérence étrangère, de possibilité d'ingérence étrangère ni d'intention ou de moyen d'ingérence au sein ou par l'entremise de la fondation Trudeau.

[Français]

    Aucun État ni aucun individu n'a tenté d'influencer le gouvernement canadien par l'entremise de la Fondation.

[Traduction]

    Alors, pourquoi sommes-nous ici aujourd'hui?

[Français]

    Il ne s'agit pas d'une affaire d'ingérence, mais d'une crise de gestion alimentée par de graves fautes commises par notre ex-présidente. Dans son témoignage au Comité, la semaine dernière, et dans ses agissements au cours des derniers mois, elle a soulevé plusieurs questions qui porteraient peut-être à croire qu'il y a eu des tentatives d'ingérence, mais décortiquons-les ensemble.

[Traduction]

Premièrement, il y aurait eu une tentative d'influencer le gouvernement de Justin Trudeau par la voie d'un don à la Fondation Pierre Elliott Trudeau. Deuxièmement, il y aurait une aura de mystère autour de l'identité des donateurs ou de leur affiliation. Troisièmement, ma signature du contrat de don aurait quelque chose d'illégitime. Quatrièmement, il y aurait des irrégularités liées à la délivrance d'un reçu pour don de bienfaisance.

[Français]

    Cinquièmement, il y aurait eu des instructions inappropriées ou inhabituelles de la part du donateur à la Fondation. Sixièmement, il y aurait eu un refus de la part de certains membres du conseil de se récuser d'une enquête sur le don. Septièmement, il y aurait eu un avis juridique de la part des avocats de la Fondation selon lequel certains membres du conseil étaient en conflit d'intérêts et des changements de gouvernance s'imposaient. Huitièmement, la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau aurait cherché à influencer le gouvernement de Justin Trudeau ou aurait eu un quelconque lien avec celui-ci.
    La réponse à toutes ces questions est résolument non.
(1635)

[Traduction]

    J'espère que nous aurons l'occasion d'examiner soigneusement chacune de ces questions pour faire la preuve que la Fondation Pierre Elliot Trudeau n'a jamais été mêlée à une tentative d'ingérence étrangère.
    Merci.
    Merci, monsieur Trudeau, pour votre témoignage.
    Vous avez pris moins de temps que prévu. Je vous en suis reconnaissant et je sais que mes collègues le sont tout autant.
    Avant de commencer, j'ai une mise au point à faire avec le Comité. Hier, les discussions en aparté ont perturbé le travail des interprètes. Nous vous prions donc de vous rendre tout au fond de la salle, à bonne distance des interprètes, si vous devez avoir ce genre de discussions. C'est ma seule demande pour aujourd'hui.
    Monsieur le président, je suis désolée de vous interrompre.
    J'ai un bref rappel au Règlement. Il n'y a pas d'écran devant nous de notre côté, et c'est un peu difficile de suivre les délibérations. Est‑ce que ce serait possible de corriger cela?
    Madame la greffière, pouvez-vous vous en occuper?
    Merci de nous en aviser, madame Hepfner. Nous allons voir à ce que ce soit corrigé.
    Je crois que c'est réglé. Formidable.
    Nous allons passer à une première série de questions. Chaque parti disposera de six minutes.
    M. Barrett va commencer. Vous avez la parole pour six minutes.
    Merci de vous présenter devant nous, monsieur Trudeau.
    Vous avez demandé pourquoi nous sommes ici aujourd'hui, et vous avez énuméré quelques raisons. Nous sommes ici parce que nous avons lu dans le Globe and Mail que le Service canadien du renseignement de sécurité, le SCRS, a mis au jour une opération d'ingérence visant le premier ministre par l'entremise de dons à la fondation Trudeau.
    Vous nous avez présenté une liste de questions. J'espère pouvoir vous donner la possibilité de répondre à quelques-unes de ces questions, mais je n'ai pas beaucoup de temps. Je vous serais reconnaissant de donner des réponses concises.
    Quel est le nombre de dons pour lesquels vous avez signé des ententes quand vous étiez à la fondation Trudeau?
    À part les dons que j'ai faits moi-même, j'ai seulement signé l'entente mentionnée.
    Vous avez signé une seule entente. En 18 ans, vous en avez signé seulement une.
    C'est exact… En fait, en 20 ans.
    N'est‑ce pas un peu surprenant?
    Les circonstances ont fait que j'ai dû signer cette entente.
    Elles ont fait que vous avez dû signer l'entente... Je suis content que vous parliez des circonstances.
    Avez-vous participé aux négociations liées à d'autres dons?
    Pas que je me souvienne. J'ai participé un peu aux négociations pour le don de John MacBain, mais de manière officieuse. Il peut arriver que des membres des structures de gouvernance engagent des négociations concernant des dons, mais c'est habituellement le président de la Fondation qui fait ce travail.
    D'accord.
    Nous savons que des agents consulaires de Pékin ont participé aux négociations dès le début, ou du moins qu'ils étaient présents aux rencontres sur les modalités de ce don avec la Fondation. Est‑ce exact?
    Je n'ai pas assisté à ces rencontres. Ils étaient peut-être présents à la cérémonie de signature...
    Vous devez comprendre que les donateurs, M. Zhang Bin et M. Niu Gensheng, ne parlent pas du tout anglais. On peut souvent avoir l'impression que le rôle des agents consulaires est d'offrir des services de traduction gratuits et de meilleure qualité que d'autres qui n'ont pas d'expertise en traduction diplomatique. Ces hommes prenaient ces dons au sérieux.
    Est‑ce qu'ils ont participé à d'autres événements que la cérémonie de signature?
    Je vous pose cette question parce que nous avons accès à des documents qui font état de la présence d'agents consulaires à la rencontre avec M. Rosenberg et plusieurs autres personnes, dont Mme Comtois, la présidente et cheffe de la direction. Toujours d'après ces documents, la mesure de suivi découlant de cette réunion était d'obtenir votre approbation, monsieur Trudeau.
    C'est juste, et la raison en est bien simple: je devais autoriser l'Université de Montréal à utiliser le nom de mon père. À titre de membre de la famille, j'autorisais l'Université de Montréal à utiliser le nom de Pierre Trudeau pour lancer un programme de bourses.
    La volonté de Pékin d'avoir accès à un chef d'un pays du G7 et de l'influencer est amplement documentée. Nous savons que des opérations d'ingérence étrangère sont menées dans beaucoup de pays, sinon dans tous les pays. En l'occurrence, nous avons vu que le don... Des doublures, ou des personnes agissant au nom... Selon l'information recueillie par écoute électronique, le don devait être remboursé par le Parti communiste chinois, le PCC...
(1640)
    Vous avez eu accès à la preuve d'écoute électronique?
    C'était dans l'article du Globe and Mail, monsieur.
    Les comptes rendus fondés sur une seule source...
    Monsieur le président, puis‑je invoquer le Règlement?
    Je suis désolé. Je vous écoute.
    Je n'ai pas interrompu M. Trudeau et je lui demanderais de faire preuve de la même courtoisie à mon égard.
    Monsieur Trudeau, c'est M. Barrett qui pose les questions. Quand il vous demande de répondre, nous vous prions de le faire de manière convenable.
    Allez‑y, monsieur Barrett. J'ai arrêté le chronomètre. Il vous reste deux minutes.
    Leur volonté de mener une opération d'ingérence est démontrée dans l'article du Globe and Mail et, cinq mois après la signature du contrat de don, les deux hommes ont bénéficié d'un accès direct au premier ministre.
    Si vous voulez mon avis, ces 140 000 $ ont été plutôt bien investis puisque les deux hommes ont rencontré le premier ministre.
    Dans cette affaire, des agents consulaires de la République populaire de Chine donnent des instructions sur l'utilisation du don. Pour la première et unique fois en 18 ans de collaboration avec la Fondation, le frère du premier ministre, c'est‑à‑dire vous, monsieur, signe une entente de don. Et pour couronner le tout, des activités de financement sont organisées en vue d'offrir un accès privilégié à Justin Trudeau, le premier ministre. Tout cela soulève des questions extrêmement troublantes pour les Canadiens.
    Dans vos réponses à mes premières questions, vous avez affirmé que vous n'aviez pas le choix de signer l'entente. Pourquoi étiez-vous obligé de la signer?
    C'était une entente tripartite — ou même quadripartite à bien des égards — entre la Fondation, moi-même, à titre de représentant de la famille Trudeau, l'Université de Montréal et les donateurs.
    J'ai signé avant tout parce que M. Rosenberg me l'a demandé. J'avais aussi un pouvoir de signature à ce moment. Je signais régulièrement des chèques de la Fondation.
    Je présume que j'aurais pu donner une procuration à M. Rosenberg pour qu'il signe au nom de la famille, mais il a suggéré que je le fasse en tant que représentant à la cérémonie et par respect pour ces hommes. En passant, je n'ai toujours aucune raison de croire que leurs motifs n'étaient pas honorables.
    C'est pour cette raison que j'ai signé l'entente. J'ai agi en tant que membre de la famille autorisant l'utilisation de son nom.
    Monsieur Trudeau, monsieur Barrett, merci.
    Les six prochaines minutes seront réservées à Mme Hepfner. Vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Trudeau, d'être ici aujourd'hui et de répondre à nos questions.
    Vous avez exprimé publiquement votre souhait de comparaître devant ce comité afin de donner votre point de vue sur l'ingérence étrangère et la Fondation. Vous avez même indiqué que c'était urgent. C'est assez inhabituel. En règle générale, les gens ne se bousculent pas au portillon pour témoigner devant nous.
    Pouvez-vous nous expliquer pourquoi vous jugiez nécessaire d'être ici aujourd'hui?
    Je voulais le faire parce que la réputation, mais surtout le travail des boursiers... Ce qui est essentiel pour la Fondation, ce n'est pas la structure de gouvernance, la politique, les interprétations, mais les très nombreuses personnes de grande qualité qui travaillent avec beaucoup de sérieux. Et ces personnes ont posé des questions.
    J'aurais aimé que la Fondation soit examinée avec impartialité, et tout le reste, par la vérificatrice générale, comme l'avait demandé le président du conseil d'administration. Cette enquête aurait permis, selon moi, de faire connaître la vérité et de dissiper les doutes. C'était important pour moi. Je savais que les feux seraient braqués sur moi et que c'était probablement nécessaire pour faire des corrections importantes.
    Il y a eu énormément de désinformation dès le départ, et je dirais même dans l'article du Globe and Mail. À mon avis, un article fondé sur une seule source anonyme est du mauvais travail journalistique. Le compte rendu des faits est problématique puisque le versement de 1 million de dollars à la fondation Trudeau n'est jamais mis en doute.
    D'où sort l'idée que les donateurs seraient remboursés? Ces hommes, considérant leur statut en Chine... Niu Gensheng, par exemple, est un philanthrope admiré. Les philanthropes de sa trempe sont rares et ils sont admirés en Chine.
    À mon avis, plusieurs rectifications étaient nécessaires pour permettre à la Fondation de poursuivre son excellent travail et pour qu'on arrête de semer des doutes à son sujet.
(1645)
    Au fond, comme vous l'avez dit, la Fondation est un organisme de bienfaisance indépendant et non partisan qui distribue des bourses à des jeunes. Elle leur offre du mentorat. Elle les soutient pour qu'ils puissent contribuer à leur tour à la communauté.
    Je comprends que tout cela vous touche personnellement. La Fondation porte le nom de votre père. Elle a été créée pour honorer sa mémoire. Pouvez-vous nous parler un peu du travail que vous avez fait au sein de la Fondation depuis plus d'une vingtaine d'années?
    Merci de poser cette question.
    Comme je l'ai mentionné, j'étais un bénévole parmi tant d'autres. Je ne suis absolument pas plus important que les autres bénévoles. J'ai siégé à la plupart des comités, sauf peut-être le comité des finances. J'ai travaillé à la Fondation dès sa création.
    Ce qui compte, ce n'est pas nous, ce n'est pas ce qu'on dit, mais c'est le travail qui est réalisé. C'est le travail de recherche qui est important, mais pas seulement. L'important est le soutien qui est donné aux chercheurs pour les aider à trouver de nouveaux moyens pour faire connaître leur travail et pour comprendre comment les choses fonctionnent à l'extérieur des milieux universitaires.
    Il a beaucoup été question de rencontres avec des fonctionnaires. C'est quelque chose dont la Fondation est très fière. C'est une des raisons pour lesquelles nous étions aussi enthousiastes d'avoir recruté un homme d'envergure comme Morris Rosenberg. Il permettait à de brillants chercheurs canadiens de découvrir comment fonctionne l'appareil gouvernemental hors de toute partisanerie, partialité ou influence. Le seul objectif était de permettre à des gens parmi les plus brillants au Canada de comprendre comment le gouvernement fonctionne et comment faire valoir leurs idées auprès des fonctionnaires.
    Vous nous avez donné une liste de choses qui selon vous sont inexactes dans ce que les médias ont rapporté concernant le don versé en 2016. Souhaitez-vous que d'autres corrections soient inscrites au compte rendu?
    Il y a en beaucoup. Je voulais justement passer à travers la liste.
    Vous avez deux minutes.
    Des voix: Ha, ha!
    Bien.
    Comme je l'ai mentionné, les donateurs, avant leur venue, quand ils m'ont approché la première fois… En fait, c'est l'Université de Montréal qui m'a approché pour obtenir un don afin de commémorer Pierre Trudeau à titre d'ancien étudiant, mais aussi d'ancien professeur. Ces donateurs avaient déjà versé 800 000 $ pour la recherche médicale à l'Université de Toronto… Plutôt, à ce moment, il y avait un seul donateur, Zhang Bin, et le but était de rendre hommage à Norman Bethune.
     Si vous connaissez la Chine, et surtout si vous avez parcouru ce pays et rencontré des aînés, vous avez certainement entendu ces deux choses: « Jianádà hao de » et « Bethune, Trudeau ». Vous avez entendu que ces deux hommes étaient des amis de la Chine. Je ne parle pas du gouvernement chinois, mais du peuple chinois.
    Je n'ai donc pas été surpris, mais plutôt honoré quand on a proposé de créer un programme de bourses en hommage à Pierre Trudeau. Je le répète, tout ce qui a été dit comme quoi l'Université de Montréal aurait été approchée en premier pour en faire un intermédiaire et éventuellement exercer de l'influence sur un gouvernement Trudeau qui n'était pas encore élu, mais qui le serait…
    J'ai eu un premier contact en décembre 2013, par la voie d'une lettre du secrétariat de la Faculté de droit. À ce moment, nous étions encore très loin d'un gouvernement Trudeau, et même de l'élection d'un Trudeau comme chef de l'opposition.
    Je le répète, les allégations comme quoi c'était un stratagème sont selon moi totalement fausses.
    Comme il me reste seulement 30 secondes, j'aimerais que vous confirmiez rapidement, pour que les choses soient bien claires, qu'il n'y a jamais eu de lien entre le gouvernement dirigé par votre frère et la Fondation Trudeau.
    Il n'y a jamais eu de tel lien, absolument aucun. La Fondation est un organisme à vocation universitaire qui verse des bourses.
    Bien entendu, il existe un lien entre la Fondation et le ministère de l'Innovation, comme on l'appelle maintenant. Si je me souviens bien, il s'appelait le ministère de l'Industrie au début de la Fondation. Elle a une obligation de faire rapport et elle s'y conforme. Les rapports, et tout le reste, sont publics. Cela dit, le lien entre la Fondation et la fonction publique se limite au suivi du mandat qui lui a été donné à sa création d'administrer les programmes de bourses et de mentorat.
    Le lien est de cette nature. Il n'y a pas de lien politique et il n'y en a jamais eu.
    Merci, monsieur Trudeau. Merci, madame Hepfner.

[Français]

     Monsieur Villemure, vous avez maintenant la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Trudeau, je vous remercie de votre présence.
    Mes questions vont être courtes, parce que mon temps de parole est limité.
    Avant d'aller au fond des choses, j'aimerais savoir si on vous a demandé d'être ici aujourd'hui.
    Non.
    Avez-vous été préparé par le bureau du premier ministre, par exemple?
    Bien sûr que non.
    D'accord. Il faut toujours poser la question. Je vous remercie.
    Vous avez quitté la Fondation en 2020. Est-ce exact?
    Non, je n'ai pas quitté la Fondation, mais le comité de direction et le conseil d'administration. Je suis toujours membre de la Fondation.
(1650)
    D'accord.
    Pourquoi avez-vous quitté le comité de direction et le conseil d'administration?
    En toute franchise, c'était pour prendre une pause; j'ai été très actif au sein de la Fondation pendant 20 ans.
    D'accord.
     Dans votre allocution d'ouverture, au septième ou au huitième point, vous avez mentionné les circonstances que Mme Fournier a relatées relativement au départ des membres du conseil d'administration. Vous n'étiez déjà plus là à ce moment-là, n'est-ce pas?
    Non, je ne l'étais pas.
    De quelles sources tenez-vous ces informations?
    Je les tiens de témoins directs. De plus, on m'a tout récemment fourni un compte rendu très détaillé de tous les événements.
     Les éléments amenés par Mme Fournier sont-ils donc faux?
    Certains le sont, oui.
    À quelle cause était dû son départ?
    Il était dû à une crise de gestion, à une mésentente.
    Selon mes notes, il y avait l'impression au début d'une espèce d'énervement par rapport à l'énoncé du Globe and Mail. Très vite, le président du conseil a voulu mettre sur pied une enquête indépendante, que Mme Fournier tenait à administrer elle-même, ce qui allait à l'encontre des principes de gouvernance, du moins pour la plupart des avocats du conseil. Ces derniers voulaient absolument que ce soit un comité indépendant composé de gens de l'externe.
     En citant des avocats du conseil, Mme Fournier a aussi accusé certains membres du conseil, dont le président, d'être en conflit d'intérêts, et a avancé qu'ils devaient se récuser de leur poste. Encore une fois, je n'étais pas témoin, mais je suis très au courant, parce qu'ils l'ont écrit. Quand le conseil a demandé les preuves ou les opinions des avocats, ceux-ci ont nié. Il y avait donc une crise de confiance, il faut le dire, dans le fait qu'elle avançait quelque chose d'assez sérieux qui impliquait des changements de gouvernance majeurs et qui n'était pas vrai.
    Ce que vous dites, votre version, contredit la sienne.
    Oui, c'est cela. Je crois que le président du conseil viendra témoigner; il pourra vous donner plus de détails.
    Elle mentionnait qu'elle voulait la tenue d'une enquête indépendante par un bureau d'avocats et de juricomptables, je crois, qui n'étaient pas impliqués dans l'affaire, et elle avait demandé, selon ses dires, que les membres du conseil impliqués se récusent, comme c'est de bonne pratique en matière de gouvernance.
    Aucun des administrateurs n'a jamais refusé de se récuser. Au contraire, ces derniers essayaient de se mobiliser pour mettre en place un comité indépendant d'administrateurs qui n'avaient pas été présents au moment de ces événements. À la fin, même dans les jours précédant la démission de Mme Fournier, le conseil avait un consensus sur le fait de créer un comité et tout le reste.
     Tout à coup, elle a démissionné. Je pense que la confiance s'était évaporée du moment où elle avait faussement rapporté les opinions des avocats du conseil. Elle voulait essentiellement mettre en place un autre président du conseil selon des principes non écrits.
    D'accord, j'accepte votre réponse, qui est néanmoins le contraire de ses dires.
    Trouvez-vous qu'elle a été bien traitée lors de son départ?
    Jusqu'au dernier moment, personne ne s'attendait à son départ. Le président du conseil pensait avoir un consensus sur une façon d'aller de l'avant. C'était le vendredi de Pâques. Le lundi de Pâques, sans qu'il y ait eu de communication officielle entre les membres du conseil, les démissions ont commencé tout d'un coup, puis elle a démissionné aussi.
    Elle a démissionné avec huit autres personnes.
    En fait, tout le monde a démissionné, sauf trois personnes.
    Tout le monde est parti, sauf trois personnes.
    Elle nous a mentionné qu'elle avait reçu la visite du service des technologies de l'information pendant six heures chez elle afin de faire une fouille de matériel informatique, ce qui, selon ma compréhension, s'apparente à une perquisition. Qu'en savez-vous?
    C'est la première fois que j'entends cela. Comme il y avait eu de la mauvaise foi et qu'il y avait une inquiétude par rapport à de la mésinformation, je pense que la Fondation a décidé de prendre le contrôle des ordinateurs et de l'information qui lui appartenaient.
(1655)
    Vous avez mentionné tantôt que vous avez été signataire du don en question. On a compris les circonstances. Or, toujours selon les dires de Mme Fournier, vous n'aviez pas le pouvoir d'être signataire. Il n'y avait pas de pouvoir délégué comme tel. Peut-être cela a-t-il été fait pour le nom, ce qui est autre chose.
    Comme je l'expliquais, c'était un contrat à quatre; personne d'autre n'aurait pu signer. Quand le président m'a demandé de signer, je n'y ai vu aucun problème, puisque je signais des choses tout le temps.
    Vous aviez donc un pouvoir de signature dans d'autres affaires.
    Oui. Je signais les chèques de paie, par exemple, parce qu'il devait y avoir deux signataires. J'habite près de la Fondation; il m'arrivait de signer.
    Quand un don vous arrive comme cela, je dirais du champ gauche, quelle que soit sa provenance, y a-t-il des circonstances qui amènent les donateurs à vous rencontrer?
    Il faut vous rappeler, comme je l'ai expliqué, que le don ne nous était pas offert. Il avait été organisé avec la Faculté de droit de l'Université de Montréal. Quand M. Jean-François Gaudreault-DesBiens, professeur de droit à la Faculté, est venu me voir au nom de son doyen, je lui ai dit que, depuis la création de la Fondation, tous les efforts de collecte de fonds au nom de Pierre Elliot Trudeau devaient passer par la Fondation Pierre-Elliot-Trudeau. On se disait qu'on avait un monopole, mais ils avaient tellement une belle occasion. Je l'avais rencontré en 2014, le 10 ou le 16 janvier. À ce moment-là...
     Merci, monsieur Trudeau. C'était là tout le temps dont disposait M. Villemure.

[Traduction]

    Monsieur Green, vous avez la parole pour six minutes.
    Nous vous écoutons.
    Bienvenue au Comité. Je dois vous dire que j'ai plaidé, lors d'une réunion précédente, pour que vous ne soyez pas invité devant le Comité, mais vous vous êtes porté volontaire. Vous voici donc devant le Comité aujourd'hui et il est à espérer que vous pourrez nous éclairer un peu.
    Dans votre déclaration liminaire, vous avez présenté une liste en huit points. Puis‑je vous demander de fournir cette liste au Comité quand vous en aurez l'occasion?
    Corrigez-moi si je fais erreur, mais je présume que vous avez entendu les témoignages précédents. Vous les avez entendus. Beaucoup de déclarations ont été faites et vous avez maintenant la possibilité d'en réfuter quelques-unes.
    Vous avez notamment parlé de la récusation de membres du conseil, au point 6. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi ce n'est pas un problème à votre avis?
    Permettez-moi de commencer en rappelant que le président a été secrétaire de la société Power Corporation du Canada pendant des dizaines d'années. Je dirais que cet homme compte parmi les plus grands experts en matière de gouvernance d'entreprise au Canada. La direction d'un conseil d'administration est une seconde nature pour lui. Il faisait ce travail au sein de l'une des sociétés privées les plus rigoureuses au pays. Son sens du décorum et du respect est exceptionnel. C'est assurément un homme de grande valeur.
    Dès que des doutes ont été émis au sujet de la Fondation, nous avons tous voulu que les choses soient mises au clair. Il était important pour nous de montrer qu'il n'y avait pas de problème. Nous étions prêts à subir une enquête, peu importe qui…
    Qui sont les autres personnes qui auraient pu être en conflit d'intérêts?
    Mme Fournier a soutenu que les avocats lui avaient dit que toutes les personnes qui avaient eu un rôle actif dans les structures de gouvernance durant les années où le don aurait… C'était faux. Aucun avocat ne lui a dit cela. Devant le conseil d'administration, les avocats ont affirmé que ce n'était pas possible parce que c'était beaucoup trop tôt pour donner ce genre d'avis.
    L'important était de constituer un comité indépendant avant ces événements…
    Constitué d'administrateurs…
    ... oui, un comité d'administrateurs parce que notre règlement prévoit que les avocats et les experts externes rendent des comptes au conseil d'administration et non à direction. En fait, c'est une règle de gouvernance assez standard.
    Le président a immédiatement tenté… Dès qu'il a été question d'une crise liée à la gestion de l'information, il a pris des dispositions en vue d'une enquête indépendante menée par trois administrateurs qui n'étaient pas au conseil au moment des événements. Il a suivi son instinct, ou sa seconde nature.
    Excusez-moi de vous interrompre, mais je dois dire que je suis assez étonné, considérant la composition du conseil d'administration, que vous vous soyez retrouvés avec ce qui s'apparente à un problème de gestion de crise. C'est assez étonnant considérant les administrateurs chevronnés qui composaient le conseil et, très franchement, les témoignages contradictoires qui ont été livrés au Comité.
    J'ai moi-même siégé au conseil d'administration d'une fondation communautaire locale, et j'avoue que j'ai du mal à comprendre comment vous en êtes arrivés là, mais ce n'est pas le sujet de notre réunion. Nous sommes ici pour parler d'ingérence étrangère. Compte tenu des allégations que nous avons entendues, je trouve important que vous ayez la possibilité de répliquer.
    Dans un article du journal Le Devoir sur le climat au sein de la Fondation, vous déclarez qu'il y avait une crise de gestion et vous l'attribuez à des erreurs de jugement et à des fautes graves.
    Dans votre déclaration liminaire, vous avez aussi déclaré que vous aviez siégé à un comité chargé d'embaucher un président. Est‑ce exact?
    C'est exact. J'ai siégé aux quatre comités de sélection.
    Vous avez donc participé au processus d'embauche de Mme Fournier.
    Oui.
    Elle était également une ancienne boursière, n'est‑ce pas?
    Oui. Elle faisait partie de la première cohorte de boursiers.
    Depuis combien de temps la connaissez-vous?
    Je la connais depuis 20 ans.
    Qu'est‑ce qui a mal tourné?
    Je peux seulement faire des hypothèses.
    Le climat était devenu plus difficile au sein de la Fondation. Elle était très compétente et, du point de vue du conseil d'administration, elle gérait très bien le programme, ce qui est loi d'être facile, mais au sein du personnel… Le conseil d'administration commençait à voir de plus en plus…
    Je suis membre de la Fondation et j'ai certaines responsabilités liées à la garde, mais je ne suis pas directement… Et malgré tout, j'entendais parler du taux de roulement très élevé au sein du personnel.
(1700)
    Il y a aussi eu des allégations concernant le climat hostile au sein du conseil d'administration, les manœuvres d'intimidation, les conflits…
    Au conseil d'administration? Non, le climat n'a jamais été hostile.
    Il y a eu beaucoup de tensions les dernières semaines à cause de la confrontation avec la direction, qui voulait mener sa propre enquête et qui donnait des informations trompeuses au conseil d'administration.
    Êtes-vous au courant qu'elle a proposé de fournir des documents qui pourraient contredire votre témoignage?
    Tant mieux si tous les documents qui existent sont divulgués. Si le président du conseil veut divulguer… J'aimerais soumettre le compte rendu des événements selon les administrateurs.
    Au cours de son témoignage, Mme Fournier a soutenu qu'elle n'a pas utilisé l'argent du don parce qu'il n'a pas été fait dans le cadre de son mandat ni du mandat précédent.
    Vous avez participé aux discussions et aux négociations avec les donateurs, qui ont établi comme condition que l'argent serve à l'organisation de cours sur la Chine. Pourquoi avez-vous accepté que le don soit assorti de cette condition même si cela ne concordait pas avec…
    J'ai signé le contrat, mais je n'ai pas participé aux négociations de l'entente.
    Pourtant, vous étiez partie à l'entente.
    Quand Jean‑François Gaudreault‑DesBiens m'a contacté, nous étions dans une période de transition. Notre président était parti et nous étions dans…
    Vous avez pris part aux négociations.
    Je n'ai pas pris part aux négociations. J'étais…
    D'après un article paru dans Le Devoir
    On me tenait au courant.
    En 2019, la doyenne de la Faculté de droit de l'Université de Montréal, Mme France Houle, a écrit que la Fondation Trudeau souhaitait remettre un don de 200 000 $ à la faculté. Elle faisait référence à un échange entre vous, Alexandre Trudeau, et son prédécesseur, M. Gaudreault‑DesBiens, dont vous avez parlé, au cours duquel vous auriez mentionné l'intention de la Fondation de verser ce don.
    Vous souvenez-vous de cet échange?
    J'ai rencontré M. Gaudreault‑DesBiens. J'ai même rencontré le donateur le 2 juin. Cela dit, mes communications avec eux ont eu lieu durant la période de transition dont j'ai parlé.
    En juin, quand j'ai finalement rencontré le recteur de l'université et le donateur, je leur ai dit exactement la même chose, c'est‑à‑dire que nous venions d'embaucher un nouveau président et qu'il avait le mandat de gérer et de négocier les dons.
    Avec le recul, pensez-vous que vous auriez dû simplement remettre ce don à l'Université?
    Monsieur Green, je suis désolé. C'est vraiment une partie du travail que je déteste, mais je n'ai pas le choix de vous couper la parole puisque je suis le gardien du temps. Je vous ai même laissé un peu plus de temps.
    C'est ce qui met fin au premier tour. Nous devrions avoir du temps pour un second tour complet.
    Nous allons commencer avec M. Barrett. Vous avez cinq minutes.
    Monsieur Trudeau, vous avez mentionné que votre engagement dans ce dossier remonte à décembre 2013, soit huit mois après l'élection de votre frère comme chef du Parti libéral.
    J'ai mal entendu. Quelle est la question au juste?
    Je relatais ce que vous avez dit concernant le début de votre engagement dans ce dossier par l'intermédiaire de l'université en décembre 2013. Est‑ce exact?
(1705)
    Oui, c'est exact.
    C'était huit mois avant l'élection de votre frère comme chef du Parti libéral.
    Par la suite, en septembre 2014, des responsables du régime ont participé à une réunion de négociation du don en question avec la Fondation.
    En septembre 2015, quelques semaines avant les élections fédérales, les pressions se sont intensifiées et les choses se sont précipitées, et tout à coup il restait moins d'une journée pour signer le contrat de don… Au bout du compte, l'entente ne s'est pas concrétisée.
    En mai 2016, deux semaines avant la signature du contrat de don, des représentants de l'Association chinoise de l'industrie culturelle ont rencontré le premier ministre au domicile de Benson Wong, le président du conseil d'administration de la Chambre de commerce chinoise du Canada.
    L'entente de don a été conclue en juin et, en juillet de la même année, l'Association chinoise de l'industrie culturelle a confirmé qu'un premier versement de 70 000 $ avait été effectué.
    En octobre, Justin Trudeau a rencontré M. Gensheng.
    Le processus s'est étiré sur des années, mais il semble que l'urgence se soit manifestée seulement en lien avec des événements politiques impliquant le premier ministre en poste d'un pays du G7, avec la participation directe de responsables du régime dictatorial chinois.
    Quand avez-vous rencontré Zhang Bin la première fois?
    Le 2 juin 2014.
    Vous savez que l'argent n'a jamais été dépensé, n'est‑ce pas? Les dons ont été versés en deux tranches, puis la troisième a été, en fait, refusée et nous n'avons jamais lancé le programme ou dépensé l'argent.
    Je vous remercie.
    Quand avez-vous rencontré Niu Gensheng pour la première fois?
    Je ne l'ai rencontré qu'à la cérémonie de signature à l'Université de Montréal.
    C'était en 2016?
    Je crois, oui.
    Quand vous avez rencontré M. Zhang, de quoi avez-vous parlé? Est‑ce que vous avez parlé spécifiquement du mandat de la Fondation? A‑t‑il été question d'affaires politiques, de la culture au Canada?
    Il me semble me rappeler que, quand je l'ai rencontré en juin, il a dit qu'il était tout à fait ravi de... Là encore, les agents consulaires traduisaient ce qu'il disait. Je ne me rappelle pas s'ils étaient... C'étaient tous de simples agents, mais il était enthousiasmé par ce qu'il avait fait à l'Université de Toronto et il se réjouissait de faire quelque chose de semblable à l'Université de Montréal.
    Je pense que M. Lefebvre a mentionné à un moment donné qu'il était un peu contrarié que la famille Trudeau se mêle tout à coup de la Fondation Trudeau. Il voulait appliquer à l'Université de Montréal le même modèle qu'il avait appliqué à l'Université de Toronto.
    Il était amical, mais pas trop, et je lui ai dit ce que je disais à M. Green, qu'il devait attendre que le nouveau président prenne ses fonctions pour entamer les négociations.
    Est‑ce que ce don et son lien avec le Parti communiste chinois n'ont jamais déclenché chez vous de signal d'alarme?
    Vous avez dit le lien avec le Parti communiste chinois. Ce don venait d'une entreprise privée en règle au Canada. Il s'agit d'une entreprise qui a son compte bancaire à la Banque de Montréal, qui est régie par des règles très strictes en ce qui concerne le blanchiment d'argent et tout le reste.
    La réponse est donc non.
    Je l'ai vérifié dès que j'ai su qu'il était en... Qu'est‑ce que cette association de l'industrie culturelle chinoise? Ce n'est pas le British Council ou le Goethe-Institut, mais ces derniers sont des organismes paragouvernementaux...
    Je reprends la parole, car il me reste 30 secondes.
    La China Cultural Industry Association est considérée comme un outil de pouvoir discret au service du Parti communiste chinois. C'est un fait établi.
    Quand avez-vous appris que les services de renseignement canadiens enquêtaient sur ce qui semblait être une opération d'influence? Quand l'avez-vous découvert, qui vous en a parlé?
    Comme d'autres, je l'ai seulement lu dans le Globe and Mail, et j'en ai aussitôt mis en doute la véracité. Je ne pense pas qu'il s'agisse d'une information exacte.
    Combien de temps me reste‑t‑il?
    Votre temps de parole est écoulé. Je vous remercie, monsieur Barrett.
    Monsieur Trudeau, la prochaine question vous sera posée par Mme Martinez Ferrada.

[Français]

     Madame Martinez‑Ferrada, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Trudeau, d'être ici parmi nous.
    Je voulais vous donner l'occasion de répondre à certaines des questions que vous avez soulevées dans votre allocution à propos de ces fameux huit points. J'ai l'impression que vous n'avez pas donné certaines réponses au Comité. Vous avez un petit peu touché à la question de l'influence. Vous avez aussi expliqué la question de l'allégation sur la signature du don. Ce n'est cependant pas le cas pour la question de l'irrégularité du reçu. Je voulais vous donner l'occasion d'y répondre.
    C'est important parce que cette question du reçu était au centre du témoignage de notre ex-présidente, tout comme le fait que je sois signataire.
    Les deux premières tranches du don sont venues du même compte de banque, un compte légitime détenu par la Banque de Montréal pour la compagnie Millennium Golden Eagle Canada. Comme je l'expliquais, les banques sont régies par des lois assez sévères sur le blanchiment d'argent. Ainsi, quand une banque dit que le compte est légitime, c'est un signe que la compagnie respecte les normes canadiennes. Étant donné que les dons sont venus du même compte, le reçu a été remis au nom de cette compagnie.
    Je reviens à la première question à propos d'instructions possibles. De ce que je comprends du monde des organismes de bienfaisance, il arrive souvent que des individus ordonnent à leur compagnie de faire des dons ou les y incitent. C'est exactement ce qu'il s'est passé ici. Deux membres d'une même famille, soit M. Zhang Bin et son collaborateur, qui est son oncle, ont incité une compagnie bien établie au Canada et menant des activités légitimes, à faire un don. Le reçu a été remis à cette compagnie.
    S'il y a eu des instructions, si, par exemple, elles sont venues à un moment donné de l'association culturelle industrielle dont parlait M. Barrett, c'est quant à moi à des fins de traduction. En tant que membre de cette association, M. Zhang s'y référait pour faire traduire des documents importants et des instructions comme celle d'envoyer un reçu à l'adresse en Chine d'une compagnie. Là encore, il n'y a rien à redire.
    J'aurais voulu que la vérificatrice générale inspecte tout cela, mais, bien évidemment, on le fait ici.
(1710)
    Vous auriez donc souhaité qu'il y ait une enquête indépendante en bonne et due forme.
    Oui. Il n'y a absolument rien de problématique dans tout ce dossier.
    Parfait.
    Je vais vous poser les mêmes questions que j'ai posées aux autres témoins qui sont passés ici, à propos des relations de la Fondation avec le gouvernement, voire avec les gouvernements de façon générale puisque, avant 2015, ce n'était pas le gouvernement actuel qui était en place.
    Selon vous, la Fondation ne fait preuve d'aucune partisanerie.
    Zéro.
    À la création de la Fondation, les fonctionnaires avaient créé trois catégories de membres: les membres de la famille, qui sont au nombre de 3; les membres ordinaires, qui sont au nombre de 19; et 6 membres pour le gouvernement. Le premier et seul gouvernement à s'être prévalu de cette catégorie de membres est celui de M. Chrétien. Par la suite, aucun autre gouvernement n'a nommé de membres ou d'administrateurs. La Fondation a retenu les mêmes qui étaient là à l'époque. Maintenant, il ne reste qu'un des deux administrateurs. Pour ainsi dire, le gouvernement Trudeau et le gouvernement Harper ont à peine exercé le droit qui leur a été donné à la création de la Fondation.
     Avez-vous déjà parlé à votre frère de ce don?
    Non. Cependant, je lui parlais de la Fondation avant qu'il se lance en politique, car il siégeait parfois à la Fondation. Mon frère m'a dit un jour qu'il me faisait confiance en ce qui avait trait à la Fondation. Comme il avait d'autres chats à fouetter, il ne s'y impliquait pas beaucoup. C'était le cas même avant qu'il n'écrive sa lettre disant que, comme chef du Parti libéral, il n'allait plus pouvoir y remplir de fonction. Depuis qu'il est premier ministre, nous n'en avons jamais parlé.
    Pensez-vous que la situation dans laquelle nous sommes actuellement, en ce qui concerne les relations, l'ingérence et la situation géopolitique, fait que vous vous retrouvez ici aujourd'hui? Ces questions ont déjà été soulevées en 2016 dans des articles de journaux. Pourquoi, à votre avis, êtes-vous ici aujourd'hui?
    Nous sommes ici en raison d'une crise de gestion. Nous ne le serions pas si la présidente n'avait pas tenu à faire circuler de la désinformation au conseil. Il est vrai que le climat géopolitique a beaucoup changé, à plusieurs reprises. Je comprends donc très bien que ce comité a la responsabilité d'enquêter sur les questions concernant l'ingérence et la Chine. C'est pour cette raison que je comparais devant vous et que je suis parfaitement de bonne foi.
    Merci, monsieur Trudeau. Merci, madame Martinez Ferrada.
    Je cède maintenant la parole à M. Villemure pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président. Deux minutes et demie, ce n'est pas long.
    Monsieur Trudeau, comment expliquez-vous que, selon le témoignage de Mme Fournier, les rapports annuels de la Fondation pour 2016‑2017 comportaient des informations contradictoires sur la provenance des dons?
    Je pense que c'est faux. Il faudrait que je voie les rapports annuels, mais cela demeure faux. Concernant la provenance des dons, Mme Fournier essayait d'interpréter les adresses de la compagnie comme s'il y avait quelque chose d'anormal dans le fait que cette compagnie, basée à Dorval si je comprends bien, appartenait à un citoyen chinois.
    Elle a essayé de soulever ce point, ce qui est correct, mais nous aurions pu le faire dans le cadre d'une enquête indépendante. Cependant, Mme Fournier jugeait à l'avance les informations et s'en servait pour susciter de l'attention. Nous sommes rendus ici pour cette raison.
    Pour faire toute la lumière, je comprends que le recours à un comité indépendant du conseil d'administration est une pratique qu'on retrouve dans le monde de la gouvernance. Cependant, dans le cas présent, il a été dit qu'on irait encore plus loin pour démontrer qu'on était plus blanc que blanc, en recourant à un juricomptable et à un cabinet d'avocats. C'est ce qui a été refusé par les trois membres restants.
    Non, pas du tout, c'est ce qui était souhaité.
     J'aimerais soumettre un compte rendu de tout ce qui s'est passé, selon des témoins directs. Ce serait présenté selon les dates de tous les événements et reflèterait les procès-verbaux relatant tout ce qui s'est passé au conseil.
(1715)
    Je vous prie de le déposer.
    Ce sera très éclairant. Dès le début, le président du conseil voulait absolument créer et mettre sur pied un comité indépendant, qui aurait étudié la situation et donné à un cabinet d'avocats et de comptables le mandat de faire une enquête. Nous voulions tous que la vérité sorte, en bonne et due forme, sachant qu'il n'y avait rien à redire.
    Il y a donc une contradiction entre l'allégation de Mme Fournier et votre version.
    Il y a une contradiction.
    D'accord. Nous avons noté que les dons à la Fondation, l'année précédente et l'année suivante, se situaient autour de 20 000 $ ou 25 000 $. Le montant de 200 000 $ représente donc un don important.
    Il s'agit de 140 000 $ et ce n'était pas si important. En effet, à cette période, le président du conseil, John McCall MacBain, avait fait un don de trois millions de dollars.
     Il faut dire qu'en 2013, la notion de diplomatie à caractère universitaire était encore intéressante pour la Fondation, tout comme ce l'est encore pour d'autres pays. Dès que mon frère est devenu premier ministre, cependant, il devenait problématique pour la Fondation de se livrer à une telle diplomatie à caractère universitaire avec la Chine, et ce, pour un certain nombre de raisons que ce comité est en mesure de comprendre.
    En 2013, on savait déjà que la Chine...
    En 2013, la diplomatie à caractère universitaire avec la Chine était très intéressante. Faire venir des chercheurs chinois et les faire participer aux événements de la Fondation était intéressant. Le but était de créer des liens et que l'Université de Montréal ait de très bons contacts avec...

[Traduction]

    Merci, messieurs Trudeau et Villemure.
    Monsieur Green, vous disposez de deux minutes et demie.
    Je vous remercie.
    Monsieur Trudeau, vous pouvez comprendre que le sujet est délicat. Je suis sûr que vous avez grandi dans un mode de vie qui vous valait beaucoup d'attention, c'est le moins qu'on puisse dire.
    Quelles précautions la Fondation Trudeau a‑t‑elle prises pour s'assurer qu'il y avait une séparation bien étanche entre vous et votre frère — entre le travail politique partisan et le travail de la Fondation?
    Il en était toujours question, surtout dans les premiers temps. D'abord, il y a eu la documentation pour s'assurer que tout était bien consigné, à vrai dire, longtemps avant qu'il devienne premier ministre.
    Est‑ce que c'était consigné dans le cadre de politiques...
    C'était consigné dans une lettre de lui et il était reconnu par le conseil, je crois, et les membres que c'était officiel. Les statuts de la Fondation sont un peu étranges et, en fait, ils stipulent que trois membres de la famille sont les exécuteurs testamentaires. Cela venait des fonctionnaires qui ont rédigé les statuts. Alors, évidemment, Justin Trudeau est et était un des exécuteurs du dernier testament de Pierre Trudeau. Il a donc fallu nous corriger.
    Après coup, pratiquement à chaque réunion, nous avons dit que c'était une ère nouvelle et...
    Est‑ce qu'il y avait des politiques et des procédures écrites?
    Je n'ai connaissance d'aucune.
    Nous revenons à la question de la gouvernance. Nous revenons aux experts en la matière autour de la table — d'éminents avocats, des représentants de Power Corporation —, mais il n'y avait pas de politiques et de procédures, rien d'écrit que vous puissiez soumettre au Comité pour nous donner l'assurance qu'un processus était en place selon lequel, si des situations délicates sur le plan politique se présentaient, il y aurait une séparation étanche entre celui qui est maintenant le premier ministre et la Fondation.
    La séparation étanche était constamment réaffirmée et il était constamment rappelé au public et à n'importe qui que nous sommes une organisation non partisane sans liens politiques.
    Je vous donnerai l'occasion de le clarifier officiellement. Vous n'avez pas à donner de noms, mais peut‑on dire sans risquer de se tromper que vous aviez probablement des personnes nommées venant de milieux et de partis politiques différents?
    Tout à fait. Il s'agissait de personnes très bien venant de différents partis.
    En ce qui concerne la question du don, pensez-vous que le donateur indiqué sur le reçu aux fins d'impôt était le vrai donateur des 200 000 $?
    Le reçu aux fins d'impôt était établi au nom d'une entreprise et les vrais donateurs étaient ces personnes. Conformément à la pratique habituelle depuis, je crois — comme je l'expliquais — Hamilton c. Banque de Montréal dans les années 1920, les entreprises sont autorisées à faire des dons au nom de personnes.
    À la dernière réunion du Comité, un article paru dans La Presse a été mentionné. Il y était dit qu'en 2016, un membre du conseil d'administration a informé un cadre que le vrai donateur n'était pas celui dont le nom figurait sur le reçu aux fins d'impôt. C'est une allégation qui a été faite. Dans son témoignage, Mme Pascale Fournier a déclaré que le membre du conseil d'administration en question était Farah Mohamed.
    En 2016, avez-vous été informé que le vrai donateur n'était apparemment pas celui dont le nom figurait sur le reçu aux fins d'impôt?
    Il est tout à fait faux — c'est une de mes remarques — qu'il y ait eu des doutes à propos de ces donateurs. Ça a toujours été cette entreprise, avec plusieurs adresses — ce qui a permis à notre ancienne présidente de semer la confusion sur le sujet — et ces deux personnes. Il n'y avait aucun doute à ce sujet alors et il n'y en a jamais eu.
    Le temps de parole est écoulé. Si je vous ai laissé le dépasser un peu, c'est parce que vous avez mentionné Hamilton, monsieur Green.
(1720)
    Il a mentionné quoi?
    « Hamilton ». C'est le mot du jour.

[Français]

     Monsieur Berthold, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup, monsieur Trudeau, de votre présence.
    Vous avez dit vous inquiéter de l'ingérence du régime communiste chinois dans les démocraties. Selon vous, depuis quand le régime communiste chinois tente-t-il de s'ingérer dans les universités partout dans le monde et dans les démocraties?
    Vous le sauriez mieux que moi, mais je sais que toutes les grandes puissances du monde essaient de faire de l'ingérence d'une façon ou d'une autre. La Chine, selon ce que j'en sais, serait quatrième sur la liste des pays qui posent la plus grande menace en matière d'ingérence.
    Vous connaissez bien la Chine, vous l'avez étudiée pendant des années.
    Oui, absolument.
    Vous êtes donc au courant que ce régime tente de s'ingérer dans les démocraties occidentales depuis longtemps.
    Ce n'est peut-être pas une question d'ingérence. Le plus grand danger est lié aux acquisitions commerciales.
    Merci.
    Compte tenu des relations de longue date de la famille Trudeau et de votre père avec la Chine, de l'admiration de votre frère Justin pour la dictature basique du régime communiste, comme il l'a lui-même déclaré...
    Il a parlé à...
    ... et de votre propre relation avec la Chine et le régime en place, la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau devenait une cible de choix pour un régime qui cherche à étendre son influence sur le monde, comme vous l'avez mentionné. Le Canada en particulier devenait aussi une cible, en raison du poste politique qu'occupait votre frère, qui était à l'époque chef d'un parti politique et qui est maintenant premier ministre.
    Quelle est votre question?
    Croyez-vous que la famille Trudeau devenait une cible de choix pour un régime qui cherchait à influencer un pays et à étendre ses tentacules?
    Non. Peut-être que c'est le cas pour mon frère, je ne peux pas parler pour lui, mais ni moi ni la Fondation n'avons vu de soupçon de tentative d'ingérence.
    Avec toutes les connaissances que vous avez et tout ce que vous avez écrit, jamais vous n'avez pensé que le Canada pouvait devenir une cible.
    Théoriquement, j'imagine que c'était possible, mais j'étais présent dans toutes les activités de la Fondation, à cette époque-là du moins, et je n'ai pas...
    Le nom Trudeau n'a jamais...
    Je refuse de croire que ces gens avaient un objectif d'ingérence. Si c'était le cas, pourquoi n'ont-ils pas gardé de lien avec moi?
    Le seul don auquel vous avez participé est celui qui provient d'une entreprise en Chine. Le seul contrat que vous avez signé est un contrat qui a été signé avec une entreprise chinoise.
    C'est le seul don qui impliquait une autre partie.
    Était-ce la seule cérémonie de signature à laquelle vous avez assisté pour un don?
    Comme je le dis depuis tantôt, c'est le seul don qui impliquait d'autres parties. Il y avait trois ou quatre parties. S'il y avait eu d'autres dons où la famille Trudeau devait prêter son nom à un autre organisme, je les aurais fait signer aussi.
     N'avez-vous pas vu une volonté de ces gens d'avoir un représentant de la famille Trudeau à la signature?
    Non.
    Comme je l'ai dit, le désintérêt pour la famille Trudeau était assez marqué lors de la première rencontre.
    Il y avait une reconnaissance du père, Pierre Elliott Trudeau, mais on ne voulait pas, semble-t-il, la participation de la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau, parce que cela ne suivait pas leur modèle.
    Dans une communication, une lettre de M. Guy Lefebvre adressée à M. Rosenberg, le 20 septembre 2014, il est écrit ceci:
Alexandre a notamment suggéré que M. Bin Zhang pourrait nous aider afin de créer un projet d'une ampleur plus grande qui permettrait à quelques universités canadiennes de recevoir des dons de la Chine en mémoire de Pierre-Elliott Trudeau.
     Vous aviez donc des attentes.
    À l'époque, je ne cachais pas que je trouvais important que les universités canadiennes participent à la diplomatie universitaire.
    C'était déjà connu.
    Nous souhaitons tous que la Chine évolue vers quelque chose qui ressemblerait plus à un État de droit. Ce serait la meilleure chose. Toutefois, faire affaire directement avec le gouvernement chinois est très difficile.
    C'est écrit dans votre livre, vous avez vous-même défendu le régime communiste chinois.
    Non. Je ne l'ai pas défendu. Il faut reconnaître certaines réalisations de ce régime. Franchement, il faut comparer la Chine à la Chine, et non la Chine à la France ou au Canada.
    En Chine, par exemple, lors de la période après Mao Zedong, les premières années de la révolution étaient terribles sur le plan humanitaire. Toutefois, dès l'entrée en poste de Deng Xiaoping, on a assisté à une période qui est maintenant terminée depuis l'arrivée de Xi Jinping.
    La Chine nouvelle est une Chine qui tente d'avoir de l'influence, de faire de l'ingérence et d'étendre ses tentacules partout au monde.
    Comme le font d'autres pays, notamment l'Inde et les États‑Unis.
    Je ne parle pas des autres pays. Je parle de la Chine, parce que vous êtes un spécialiste de la Chine, monsieur Trudeau.
    Oui. Absolument. J'aurais été le premier à le voir, s'il y avait eu des tentatives d'ingérence, et il n'y en a pas eu.
    Vous pensez donc que le Service canadien du renseignement de sécurité a complètement tort.
(1725)
    Je ne le sais pas, mais je pense que le reportage du Globe and Mail est faux.
    Pourtant, selon la même source, hier, le premier ministre a organisé une rencontre avec un député conservateur pour l'informer de tentatives d'intimidation de la part d'un diplomate chinois. C'est donc probablement la même source qui a fourni les mêmes renseignements concernant la fondation Trudeau, monsieur Trudeau.
    Nous ne le savons pas vraiment, monsieur Berthold.
    Il ne faut pas choisir uniquement les informations qu'on veut.
    Nous ne le savons pas, monsieur Berthold. Tout cela, c'est...
    Les cinq minutes sont écoulées.
    Merci.

[Traduction]

    Monsieur Bains, vous avez les cinq dernières minutes de cette série de questions. Vous avez la parole, monsieur.
    Je vous remercie, monsieur le président. Je vous remercie, monsieur Trudeau d'être des nôtres et de beaucoup nous éclairer sur cette situation.
    En tant que professeur d'université, je comprends l'importance qu'une bourse d'études peut avoir pour un jeune et sa famille. Je vous interrogerai un peu à ce sujet. Quels sont les effets à court, à moyen et à long terme de votre investissement sous forme de bourses d'études dans des étudiants et leur avenir?
    Je vous remercie, monsieur Bains. C'est pour cela fondamentalement que la Fondation Trudeau a été créée.
    Notre pays a tout à gagner à ce qu'autant de ses dirigeants que possible soient très instruits. Les bourses d'études de la Fondation Trudeau, surtout de la façon dont elles sont associées aux mentorats et aux bourses de recherche, visent à avoir... Ce sont déjà de brillants étudiants universitaires quand nous les choisissons, mais les exposer à la façon dont les idées peuvent circuler et sortir du monde universitaire est essentiel dans l'expérience de la Fondation Trudeau.
    Comme je l'expliquais, ils sont régulièrement exposés à des tables rondes avec de hauts fonctionnaires pour comprendre comment les fonctionnaires prennent les problèmes et essaient de les digérer pour ensuite les transformer en politiques. Avec ces genres de dirigeants d'entreprise, d'activistes, avec les tribunaux, à bien des égards, la Fondation essayait d'accroître l'expérience universitaire et de l'élargir à d'autres sphères afin que ces boursiers, même si ce ne sont que des étudiants, sachent beaucoup mieux communiquer en dehors de leurs départements et interagir avec le monde extérieur. Nous voyons maintenant que les premières séries de boursiers sont devenues d'éminents Canadiens — beaucoup dans des universités, quelques-uns ailleurs. Certains sont devenus maires de villes canadiennes. L'expérience vise à créer des leaders, à former des personnes qui servent le pays en s'appuyant sur la raison.
    Ils sont les futurs dirigeants du pays.
    À combien s'élève la bourse d'études moyenne?
    Il me semble que c'est une bourse d'études de 60 000 $ avec une allocation de déplacement de 20 000 $.
    L'objectif en créant la Fondation était de permettre à des étudiants universitaires — dont notre ancienne présidente a même dit qu'ils sont formés pour être ultra-spécialisés —de se familiariser avec autre chose que leurs départements et de participer à des rencontres universitaires qui n'auraient pas été à leur portée autrement. Cela fait partie de l'allocation de déplacement.
    Vous avez mentionné les domaines de recherche. Somme toute, il est important que ce travail se poursuive et que l'organisme de bienfaisance puisse continuer d'aider les jeunes. Comment envisagez-vous l'avenir?
    J'en profite pour leur dire que cela n'a rien à voir avec eux. Il s'agit d'une crise politique et d'une crise de gestion.
    Pour ce qui est de la crise de gestion, la bonne nouvelle, c'est qu'elle est terminée. La Fondation se reconstruit déjà et est sur le point d'annoncer la prochaine cohorte de boursiers. Ces personnes doivent poursuivre leur formidable travail, et la raison pour laquelle elles ont été choisies pour faire ce travail n'a rien à voir avec ce dont nous parlons aujourd'hui. C'est pour elles une pénible distraction.
    C'est probablement la principale raison pour laquelle je suis venu ici. Ce n'est pas au sujet de ce que fait la Fondation. La Fondation soutient des chefs de file de la recherche universitaire.
    Pour revenir à ce que vous disiez, nous avons entendu deux experts, Artur Wilczynski et Michel Juneau-Katsuya, qui abondaient dans le même sens et disaient que si nous étudions l'ingérence étrangère, nous devons le faire de façon non partisane.
    Êtes-vous d'accord qu'il est important d'enquêter sur l'ingérence étrangère de manière objective et non partisane?
    C'est plus important que jamais. L'ingérence étrangère a déjà des conséquences importantes dans notre pays.
    Je pense effectivement que la Chine a encore beaucoup de chemin à parcourir. C'est un pays très ethnocentré. Il ne comprend pas vraiment les démocraties et tout le reste, mais le danger existe bien. J'ai entendu dire que les Russes utilisaient les médias sociaux pour semer des doutes au sujet de la vaccination longtemps avant la pandémie. Nous avons vu ce que la désinformation en matière de santé peut faire à des démocraties. En fait, ce comité devrait probablement se réunir tous les jours, toutes les semaines, tous les ans parce que le nombre de choses...
    Je suis désolé de le dire franchement, c'est une perte de temps parce qu'il n'y a pas de problème d'ingérence étrangère à la Fondation. Je sais que la documentation le montrera clairement une fois qu'elle sera communiquée.
(1730)
    Je crois que votre temps de parole est terminé, monsieur Bains.
    Voilà qui conclut notre première série de questions.
    Je tiens à préciser que je suis prêt à ce que nous nous réunissions tous les jours, s'il le faut, pour faire toute la lumière sur cette affaire.
    Des députés: Oh, oh!
    Le président: Comme nous l'avons fait avec d'autres témoins que nous avons gardés deux heures, nous remettons le compteur à zéro.
    La première intervention de six minutes sera celle de M. Cooper. Vous avez la parole, monsieur, et vous disposez de six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur Trudeau.
    Permettez-moi d'abord de dire que votre affirmation selon laquelle des diplomates chinois étaient présents aux réunions avec la Fondation pour la négociation du don pour offrir des services de traduction aux donateurs est tout à fait surréaliste. C'est absurde.
    Vous avez également déclaré que Millennium Golden Eagle, source du don, est une entreprise canadienne en règle. Il s'agit d'une société-écran qui a son siège social dans une maison à Dorval et qui est contrôlée par la China Cultural Industry Association, qui fait partie du Département du travail du Front uni. Les reçus ont été envoyés à Hong Kong, puis à Pékin, à l'adresse même de cette entreprise contrôlée par le Département du travail du Front uni.
    Pensez-vous vraiment qu'il s'agisse d'une entreprise en règle?
    Je prends l'opinion de la Banque de Montréal sur la question très au sérieux.
    Il me semble qu'aucun Canadien qui est sérieux au sujet de l'ingérence chinoise ne considérerait que cette entreprise est en règle. Aucun, en tout cas, n'estimerait qu'il s'agit d'une vraie entreprise canadienne...
    Si elle avait voulu s'ingérer, j'en aurais trouvé des traces.
    Monsieur Trudeau, je suis maître du temps. Je pose les questions, vous y répondez.
    Monsieur le président, passons à autre chose. Le 10 septembre 2015, Mme Élise Comtois, directrice générale de la Fondation Trudeau, a envoyé au comité exécutif un courriel où elle disait espérer organiser rapidement une cérémonie de signature pour le lundi 14 septembre 2015. Il est précisé dans ce courriel que vous représenterez le conseil d'administration de la Fondation et la famille. Il se trouve que la date de cette réunion précipitée de la cérémonie de signature avec les donateurs coïncidait avec une période où votre frère et le Parti libéral connaissaient une embellie dans les sondages et où il était réaliste de penser que votre frère allait devenir premier ministre du Canada, ce qui est arrivé un mois plus tard.
    Cette cérémonie de signature n'a pas eu lieu. Le vendredi 11 septembre 2015, Natalka Harris, de la Fondation Trudeau, vous a envoyé un courriel pour vous expliquer qu'il restait des questions à régler, pas entre la Fondation Trudeau et les donateurs, mais avec l'Université de Montréal. Néanmoins, elle vous demandait de venir de Vancouver le week-end suivant pour rencontrer quand même les donateurs afin de les remercier du don à venir.
    Cette rencontre a-t-elle eu lieu? Êtes-vous venu à Montréal?
    Je vis à Montréal. Il y a donc une erreur...
(1735)
    Mais vous vous trouviez alors à Vancouver.
    Non, je n'ai aucun souvenir de cette rencontre.
    Je me rappelle que je regardais le débat en septembre quand j'ai soudain compris que, mon Dieu, mon frère allait devenir premier ministre. C'est un moment que je n'oublierai jamais, mais non, je n'ai aucun souvenir de cette rencontre.
    Je peux même communiquer les courriels. La première fois que l'Université de Montréal m'a contacté, c'était urgent. Elle voulait rencontrer immédiatement les donateurs pour obtenir l'argent tout de suite afin de lancer une bourse d'études de 1 million de dollars à l'Université de Montréal.
    Vous avez dit que vous avez rencontré M. Zhang en juin 2014. Combien de fois l'avez-vous rencontré après cela?
    Je l'ai rencontré à la cérémonie de signature, la deuxième fois.
    D'accord, vous ne l'avez donc pas rencontré en 2015.
    En 2015, cela n'a pas pu se faire. Comme je l'ai dit, c'était très urgent en 2013. Le premier courriel que j'ai reçu expliquait qu'il se présentait une magnifique possibilité avec des Chinois sérieux qui voulaient faire un don à l'université et qu'on souhaitait me rencontrer dès que possible.
    Je vous remercie de votre réponse.
    Le 19 mai 2016, Justin Trudeau a organisé à Toronto un dîner avec accès privilégié en échange de dons auquel a assisté M. Zhang Bin. Étiez-vous présent?
    Non, je n'y étais pas. J'en ai entendu parler, comme beaucoup d'entre vous, dans les journaux. C'était le moment de se dire, « Vous savez quoi? Plus de diplomatie universitaire à la Fondation Trudeau ».
    Pourquoi M. Zhang Bin se trouvait‑il à une soirée-bénéfice pour Justin Trudeau — à une activité de financement donnant un accès privilégié —, alors qu'il n'est pas citoyen canadien? C'est un ressortissant chinois qui ne peut pas faire de don. Pourquoi se trouvait‑il là‑bas?
    Je vous parie qu'il voulait une photo avec le premier ministre pour la montrer à ses amis.
    Une photo du premier ministre...
    Il faudrait que vous lui demandiez. Je n'ai aucune raison de douter... Cet homme n'a jamais rien tenté qui ressemble à de l'ingérence. En ce qui me concerne, c'est un homme honorable.
    Vous n'avez rien vu qui ressemblerait à une ingérence étrangère et, moins de deux semaines plus tard, il y a soudain un chèque de 70 000 $ à l'ordre de la Fondation Trudeau.
    Le processus, en ce qui concerne ces fonds, a commencé en 2014. Ils voulaient aller très vite au début, comme je l'ai dit. Ils voulaient que cela se fasse à l'Université de Montréal. La Fondation Trudeau, de son point de vue, était un regrettable ajout.
    Il y a un nouveau premier ministre. C'est un homme riche qui aime les réceptions. Je pense qu'il voulait être pris en photo avec lui.
    Tout à coup, il se trouve là, à une activité de financement donnant un accès privilégié.
    Pensez-vous qu'il ait parlé de politique?
    Oui, j'en suis certain.
    Il vous reste cinq secondes, monsieur Cooper.
    Je vous remercie.
    Monsieur Fergus, je crois que vous êtes le suivant. Vous disposez de six minutes. Vous avez la parole.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur Trudeau, de votre présence aujourd'hui.
    Les huit questions que vous avez soulevées dans votre allocution d'ouverture m'ont vraiment intéressé. J'aimerais en savoir davantage sur certaines d'entre elles parce que l'objectif de ce comité est vraiment d'examiner ces questions.
     Tout d'abord, y a-t-il un lien entre la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau et le gouvernement de Justin Trudeau? Ensuite, y a-t-il des exemples de tentatives d'ingérence? J'aimerais avoir votre opinion là-dessus, parce qu'on a entendu ces choses de la part d'autres témoins.
    Vous aviez commencé à répondre à la première question. J'aimerais poursuivre en vous posant certaines questions que j'ai posées aux autres témoins, soit M. Rosenberg et Mme Fournier.
    Y avait-il des rencontres entre la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau et le Cabinet du premier ministre?
    Bien sûr que non.
    Y en avait-il avec le premier ministre?
    Non.
    Y en avait-il avec son personnel ou des personnes qui ont des liens directs ou indirects?
    Non.
    Il n'y avait donc aucun lien entre les deux.
    Non. Comme je l'ai expliqué à M. Green, c'était le mot d'ordre, surtout au début. Cette apparence et cette réalité qu'il ne devait pas y avoir de contact entre eux devaient être en béton. Même à l'époque Harper, on sentait qu'il y avait des gens, dont le chef de l'opposition dès son arrivée à la Chambre, qui voulaient politiser la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau.
    Comme je l'ai expliqué au début, la Fondation est un organisme à vocation universitaire. On veut y reconnaître que le travail intellectuel est peut-être le plus grand service qu'on peut rendre à notre pays, à l'image de Pierre Trudeau qui, avant et après sa vie en politique, était un intellectuel. Il ne s'agissait pas de commémorer ses idées, mais de propager cette conviction que le Canada est un pays d'idées variées, multiples et changeantes. Soutenir le travail universitaire est une bonne chose pour le pays.
     Je vous remercie.
    J'aimerais revenir à l'accusation selon laquelle il y a eu ingérence de la part des donateurs.
    Quelles conditions étaient assorties à ce don?
(1740)
    Il n'y avait pas de conditions. Ils se sont entendus pour créer... C'est M. Rosenberg qui l'avait suggéré. Comme je l'ai expliqué, ce n'était pas leur idée de faire un don à la Fondation Pierre Elliott Trudeau.
    Vous avez dit que vous aviez reçu un courriel urgent vous demandant de vous présenter à l'Université de Montréal. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
    J'ai remis au Comité un article de l'Université de Toronto qui explique à quel point celle-ci était fière de recevoir de l'argent de ce donateur et de commémorer M. Bethune.
    Quand j'ai rencontré le donateur, au mois de juin, il m'a dit que ce moment l'avait rendu tellement heureux qu'il voulait faire la même chose pour l'Université de Montréal, une université francophone, afin de commérer un autre grand Canadien, selon les Chinois, M. Pierre Elliott Trudeau. Il voulait le faire à l'automne 2013. J'imagine qu'il y a eu des ententes avec M.  Lefebvre. Évidemment, puisque la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau existait, on a pensé qu'il vaudrait mieux consulter d'abord la famille de M. Trudeau.
    Vous avez dit que vous aviez été invité à vous impliquer au sein de la Fondation parce que vous étiez le garant du nom ou de la marque Pierre Elliott Trudeau.
    En effet, mon frère ne le faisait pas, parce qu'il avait d'autres choses à faire. Par défaut, c'est moi qui m'occupais des affaires privées liées à la famille. D'ailleurs, je le fais encore.
    Le donateur et l'Université de Montréal auraient voulu que cela se fasse très rapidement et que je leur donne le feu vert. J'écrivais alors un livre sur la Chine et je trouvais qu'il était capital que le Canada participe à l'éducation de la Chine, si je peux m'exprimer ainsi. Il fallait faire comprendre aux chercheurs chinois et à la population chinoise comment on fait les choses au Canada et pourquoi le modèle canadien est le meilleur au monde, ce en quoi je crois franchement.
    La population chinoise nous fait confiance, à cause du Dr Bethune et de M. Trudeau. Autrefois, les gens de la Chine disaient que les Canadiens étaient des Occidentaux en qui ils peuvent avoir confiance. Je ne crois pas qu'ils le disent encore aujourd'hui.
    Je vous demande de répondre brièvement à ma dernière question, car il ne me reste que peu de temps de parole.
    Qui a d'abord suggéré que la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau pourrait servir de véhicule pour transmettre la contribution à l'Université de Montréal?
     J'ai dit à l'Université de Montréal que, normalement, tous les dons universitaires devaient passer par la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau. Ce n'est pas ce qu'elle voulait entendre, mais je lui ai demandé d'attendre l'arrivée en poste du président, un haut fonctionnaire. Après tout, s'il y a quelqu'un qui comprend la démocratie, c'est M. Rosenberg. Lors d'un breffage, il a dit qu'il y aurait un intérêt possible à créer un programme de dons qui impliquerait l'Université de Montréal et, peut-être, la Fondation. C'est aussi ce que j'ai dit au donateur et à l'Université de Montréal.
    Je n'ai pas participé aux négociations, parce que ce n'est pas le rôle d'un bénévole.
    Merci, messieurs Trudeau et Fergus.
    Monsieur Villemure, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Trudeau, si Mme Pascale Fournier était le problème de la Fondation, pourquoi croyez-vous que les huit autres administrateurs ont démissionné avec elle?
    Certains, parmi eux, croyaient ce qu'elle disait. Ils étaient probablement de bonne foi, mais ils avaient peur. Quand la présidente elle-même se présente comme avocate... S'ils avaient eu un peu plus de bon sens, ils auraient attendu l'enquête.
     D'ailleurs, dans le dernier courriel envoyé avant la démission de Mme Fournier, on disait qu'une enquête allait être lancée. J'imagine que l'ancienne présidente était frustrée que l'enquête se fasse indépendamment de l'administration.
    Quand même, beaucoup de gens ont démissionné en bloc.
    Il ne faut pas oublier que plusieurs d'entre eux étaient des bénévoles. Qui veut faire du bénévolat dans une ambiance de tension et de bataille? Certains ont quitté le conseil d'administration pour cette raison.
     Vous savez, il y a énormément de points qui ne concordent pas entre les deux versions.
    Pourquoi le Comité vous croirait-il plutôt que Mme Fournier, par exemple?
(1745)
    Vous allez entendre le témoignage du président du Conseil.
    Demandez à Mme Fournier de vous présenter les opinions des avocats selon lesquels il y avait un conflit d'intérêts. Elle ne sera pas capable de les présenter, parce que les avocats eux-mêmes ont dit qu'il n'y en avait pas.
    Bien sûr, ce n'est que ma parole, mais il existe des preuves de cela. Vous en trouverez dans les preuves documentaires à venir, par exemple.
    Comme je l'ai dit, je n'étais pas administrateur, mais les administrateurs qui viendront témoigner vous les présenteront.
    Nous ne trouverons donc pas de preuve de conflit d'intérêts. Est-ce que c'est cela?
    Vous ne trouverez pas de preuve que des avocats ont dit qu'il y avait un confit d'intérêts. Vous pouvez même appeler les responsables parce qu'ils étaient à la cour, par exemple. On pourrait appeler tout le monde et on ne s'attarderait qu'à cette question.
    Quels bureaux d'avocats étaient impliqués?
    Il s'agit de Borden Ladner Gervais et de Miller Thomson.
    Je sais que vous avez un intérêt manifeste pour la Chine.
    Qu'est-ce qui vous y a amené? Comment êtes-vous arrivé là?
    En 2005, M. Jacques Hébert, qui avait écrit le livre Deux innocents en Chine rouge de concert avec mon père à la suite d'un voyage en 1960, avait essentiellement dit que la Chine était pauvre, problématique, etc., mais qu'un jour, dans quelques décennies, la Chine allait devenir quelque chose d'important.
    En 2005, une maison d'édition de Shanghai voulait publier ce livre. En effet, la Chine devenant plus riche, elle faisait ce genre de choses, à l'époque. Elle voulait lire ce que les étrangers avaient écrit sur la Chine et a donc fait traduire en langue chinoise, pour la première fois, le livre Deux innocents en Chine rouge. Elle a invité M. Hébert à se rendre en Chine et m'a demandé d'écrire la préface, à titre de fils de Pierre Trudeau, écrivain, ce que j'ai fait.
    Ce n'était pas la première fois que j'allais en Chine. En effet, j'y suis allé la première fois en 1990, à l'âge de 17 ans.
    Y êtes-vous allé souvent?
    Oui, j'y suis allé souvent. À partir de 2005, j'y suis allé une ou deux fois par année pendant 10 ans.
    Êtes-vous déjà allé en Chine avec M. Chrétien?
    Non.
    Non? Je sais qu'il aimait bien la Chine.
    Il aimait peut-être bien la Chine, mais le genre de voyage que je fais n'est pas le même que les voyages politiques que font les politiciens ou les chefs d'État. Je suis intéressé par le petit monde, et je me promène en Chine en observant les choses qui ne sont pas facilement vues à...
    Vous vous intéressez à l'envers du décor.
    Oui, je m'intéresse à l'envers du décor et au vrai monde.
    Avez-vous déjà eu des rencontres avec le consul chinois à Toronto?
    Non.
    En avez-vous eu à Montréal, ou avec des consuls ou des ambassadeurs chinois au Canada?
    Je pense avoir assisté à un événement, où il y avait beaucoup de politiciens d'ailleurs, au Centre national des Arts pour célébrer, l'anniversaire des relations entre la Chine et le Canada, je crois. À mon avis, à ce moment-là, il y avait des diplomates.
    Avez-vous eu de telles rencontres, en Chine, avec des diplomates chinois ou canadiens?
    Effectivement, j'ai rencontré des diplomates canadiens en Chine; en fait, j'ai beaucoup d'amis qui sont des diplomates canadiens en Chine. Pour ce qui est des diplomates et des hauts fonctionnaires chinois, j'en ai effectivement déjà rencontré en Chine.
    Connaissez-vous M. Guy Saint‑Jacques?
    Oui, je le connais de nom.
    Il disait ce matin dans le journal que vous étiez un idiot utile.
    Cela me surprend d'entendre cela de la part d'un homme supposément sérieux.
    Il n'a manifestement pas lu mon livre. S'il l'avait lu, il aurait vu que l'approche est pas mal plus nuancée que cela.
    C'est quand même surprenant.
    Il s'agit du Journal de Montréal, on s'entend. Ce n'est pas nécessairement le meilleur forum pour tenir des propos sérieux.
    Je ne suis pas certain que M. Guy Saint‑Jacques ait dit cela. Si oui, il faudrait qu'il me parle. Pourquoi trouve-t-il cela?
    C'est franchement injuste. J'ai écrit un livre sérieux sur le peuple chinois. Je ne fais pas l'apologie du gouvernement communiste chinois. Premièrement, il n'est même plus communiste, et, deuxièmement, c'est un gouvernement impérial. Voilà ce qu'il faut comprendre.
    Cependant, vous connaissez M. Saint‑Jacques, quand même.
    Je le connais de réputation, oui.
    L'avez-vous déjà rencontré?
    Probablement, oui.
(1750)
    Apparemment, il s'est formé une opinion en tout cas, à tout hasard.
    Quelles sont vos positions politiques en ce qui concerne la Chine, maintenant? Vous l'avez connue tout au long de l'histoire, mais maintenant, aujourd'hui, qu'en est-il?
    Le gouvernement de Xi Jinping est un grand problème pour la Chine et pour le monde. Il marque une transition de la période que j'appellerais la période de Deng Xiaoping, qui était une période d'ouverture, d'une certaine modestie diplomatique, à une période très impériale, très dure qui, en fait, répond à un monde qui devient plus dur. C'est un homme fort qui ne tolère...
    C'est triste, mais, sur le plan de la liberté — nous souhaitons tous la liberté du peuple chinois —, la Chine ne se rendra peut-être pas au même niveau que le nôtre, peu de pays le seront. Le summum de la liberté aura été en 2010, selon moi. Depuis ce moment-là, on voit qu'il y a un déclin à cet égard.
    Merci, monsieur Trudeau.
    Le temps de parole de M. Villemure est écoulé.

[Traduction]

    Monsieur Green, vous disposez de six minutes. Allez‑y, monsieur.
    Je vous remercie.
    Je vais revenir sur la question de la gouvernance.
    Vous avez entendu les questions aujourd'hui, les allégations qui ont été faites au Comité, la confusion concernant les politiques écrites. L'ancienne présidente, Mme Pascale Fournier, a déclaré que, lorsqu'elle a pris ses fonctions, elle a dû instituer une série de politiques écrites. Est‑ce vrai?
    Oui.
    Il n'y en avait aucune avant cela?
    Non. Il y en avait quelques-unes, mais il en fallait plus. C'est certain.
    Convenez-vous qu'il est un peu étrange, étant donné les types de personne, le calibre des personnes, qui siégeaient au conseil, qu'il n'y ait pas eu de politiques écrites élémentaires sur certains de ces sujets?
    En fait, non. Ces politiques concernaient en partie une évolution naturelle de notre... Aux débuts du conseil, est‑ce que nous aurions eu une politique sur...? Quand on démarre, quand on se préoccupe du harcèlement sexuel ou de genres de choses qui sont importantes pour les universitaires, mais...
     Pour en venir plus précisément au risque politique que représentaient pour le conseil un ancien premier ministre et son fils, actuellement politicien, qui est devenu chef de parti et premier ministre, et son frère, il me semble inhabituel qu'il n'y ait pas eu de politique à ce propos.
    Tous mes collègues connaissent le type de relation que j'ai avec mon frère, qui est une relation fraternelle.
    Certainement, mais le public ne le sait pas.
    Le public ne le sait pas, autre raison pour laquelle je suis heureux d'être ici. Il ne croirait probablement jamais que mon frère et moi... Je fais partie des rares adultes dans ce pays qui peuvent lui offrir un monde en dehors de la politique.
    J'en conviens, mais vous avez mentionné quelque chose. C'était en réponse aux questions du député conservateur qui a parlé d'accès privilégié en contrepartie de dons. Vous avez dit que vous avez compris à un moment qu'il ne devrait plus y avoir...
    De diplomatie universitaire.
    ... de diplomatie universitaire.
    Du moins pas avec la Chine ou...
    Quand vous avez compris cela, avez-vous envoyé un texto à votre frère, l'avez-vous contacté pour lui dire que vous étiez peut-être allé trop loin?
    Non. Il y a une exception, mais je ne parle pas d'affaires publiques avec mon frère. Jamais. Je ne le fais pas par texto ni quand je le vois...
    Avant de venir au Comité, vous n'avez à aucun moment...
    Avant de venir au Comité, nous n'avons discuté de rien...
    Est‑ce que ses conseillers au Cabinet du premier ministre...
    Non...
    Quelqu'un vous a‑t‑il conseillé ou préparé à cette comparution devant le Comité?
    Non. Je n'ai eu aucun contact avec le Cabinet du premier ministre. Je n'en ai pas eu depuis que ce gouvernement est au pouvoir, sauf que des avocats du Cabinet du premier ministre m'ont posé des questions un jour sur des biens communs, mais c'est une affaire privée.
    Je veux vous donner l'occasion de parler à propos du SCRS. Je suppose que si vous faites l'objet d'une enquête, par exemple... Est‑ce qu'à un moment donné, quelqu'un en dehors de la Fondation a attiré votre attention sur le fait que la Fondation puisse être la cible d'une ingérence étrangère?
    Non.
    Encore une fois, comme M. Rosenberg l'a dit hier, si quelqu'un en avait été informé à l'époque, ç'aurait été lui. De nouveau, c'est pourquoi je doute de la véracité de cette information.
    Vous avez parlé de votre livre nuancé, de votre compréhension de la Chine. Nous avons parlé de la China Cultural Industry Association. Quand on regarde sur son site Web, on voit que le fondateur d'Alibaba, un des hommes les plus riches du monde, en fait partie.
    Oui, il y a Evergrande...
    Evergrande devrait probablement faire l'objet d'une autre conversation, une autre fois, mais avez-vous fait preuve de diligence raisonnable? Saviez-vous à qui vous aviez affaire?
    Oui, tout à fait...
    Y a‑t‑il eu des rapports au conseil d'administration?
    Permettez-moi de revenir à la diplomatie universitaire...
    Non, monsieur. Il me reste trois minutes.
    Y a‑t‑il eu des rapports au conseil d'administration sur la diligence raisonnable dont il a été fait preuve au sujet de ce don en particulier?
    Non. Voilà ce que j'ai dit à M. Rosenberg...
    Est‑ce que M. Rosenberg aurait fourni, par écrit, des documents qui auraient présenté une analyse en bonne et due forme de ce qui est un des dons les plus importants...
(1755)
    Non, ce n'était pas un don important. Il y en a eu de plus importants...
    Certainement, mais 200 000 $, cela reste une grosse somme.
    Au tout début, il s'agissait, avec ce don, d'élargir la diplomatie universitaire afin de...
    Quand vous avez fait vos recherches pour votre livre, vous avez entendu parler le l'Institut Confucius, n'est‑ce pas?
    J'en connais l'existence.
    Vous êtes au courant des allégations, ou du moins de certaines des déclarations publiques, selon lesquelles il s'agit en fait d'un outil de propagande du gouvernement chinois.
    Oui, surtout plus récemment, tout à fait.
    Mais à l'époque, même l'Institut Confucius était très controversé.
    Là encore, il ressemble à...
    La Chine a beaucoup de chemin à faire en ce qui concerne les organisations de la société civile, c'est certain.
    Ce à quoi j'en viens, monsieur, c'est que je ne crois pas que vous soyez un idiot utile. Je pense que vous êtes quelqu'un qui a pris le temps de comprendre et de connaître la culture à laquelle vous avez affaire. Je dirai — comme je l'ai dit à M. Morris Rosenberg — que c'est la naïveté de l'Occident de penser qu'il est possible de dialoguer avec la Chine et de la changer, et pas l'inverse, qui fait que nous en sommes là.
    Encore une fois, c'est une déclaration politique, mais sans rapport avec l'ingérence.
    Si vous saviez ce qu'on reprochait à l'Institut Confucius, si vous saviez que le gouvernement chinois utilise activement ce type d'influence culturelle, d'influence universitaire, pourquoi n'étiez-vous pas mieux préparé au conseil d'administration, étant donné la nature de la Fondation, étant donné le fait que votre frère est premier ministre? Pourquoi n'y a‑t‑il pas eu plus de devoir de diligence au conseil d'administration pour vous protéger de cela?
    Comme je l'ai dit, j'ai joué un plus grand rôle plus tôt. J'ai à peine entendu parler du don chinois avant sa signature, quelle que soit la date. C'était en 2016.
     M. Rosenberg avait toute ma confiance comme fonctionnaire de haut niveau qui sait gérer ce genre de choses, et il l'a toujours, alors je sentais que nous étions entre bonnes mains.
    Pour conclure, je dirai ceci, monsieur. Il y aura probablement d'autres témoignages. Certains contrarieront probablement le vôtre. Je veux vous donner l'occasion et vous inviter à nous fournir, par écrit, toute réfutation que vous pourriez avoir à ce sujet, en plus de fournir plus de détails sur l'un de ces huit points qui, selon vous, pourraient apporter plus de clarté sur les questions qui ont été traitées ici.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie, monsieur Green.
    Ceci conclut notre première série de questions.
    Nous passons maintenant à la deuxième série, que nous allons commencer avec des tours de cinq minutes.
    Monsieur Genuis, vous êtes le premier pour cinq minutes. Allez‑y, monsieur.
     Je suis conscient qu'un conflit de faits ressort de votre témoignage. Vous avez dit que Mme Fournier avait tort, tout comme le Globe and Mail. Vous avez aussi laissé entendre que vous n'étiez pas d'accord avec le SCRS. Le Comité et le public vont devoir décider des faits auxquels ils donnent foi.
     J'ai lu votre livre sur la Chine et je sais que vous avez beaucoup réfléchi à la Chine. Deux choses m'apparaissent particulièrement incroyables dans votre témoignage.
     La première concerne la montée en flèche des dons étrangers à la Fondation Trudeau dès que votre frère est devenu premier ministre. L'allégation n'est pas que la Fondation prenait des positions politiques, mais que les gens faisaient des dons à la Fondation en espérant s'attirer les faveurs du premier ministre.
     Même sans tenir compte de tous les autres faits, il semble suspect à première vue qu'il y ait eu une augmentation massive des dons étrangers dès que le premier ministre est entré en fonctions, mais vous semblez affirmer qu'il s'agit d'une coïncidence.
    La deuxième chose, d'après ce que vous dites... Nous parlons de différentes rencontres. Des représentants du consulat ou des personnes affiliées à des organisations soutenues par le Front uni participent à ces rencontres. Vous dites que dans tous les cas, ces personnes ne sont probablement là que pour servir d'interprètes.
     L'implication de votre commentaire, monsieur, c'est qu'il n'y a pas d'interprètes qualifiés disponibles au Canada qui ne sont pas affiliés au gouvernement chinois, ou qu'il est en quelque sorte normal pour des Chinois apolitiques au Canada de s'adresser au gouvernement chinois pour obtenir de l'aide en matière d'interprétation.
    N'est‑ce pas incroyable?
    Vous posez deux questions.
    Premièrement, en ce qui concerne la hausse des dons étrangers, il n'y a pas eu de hausse de dons étrangers. Nous avons eu un nouveau président à ce moment‑là, par coïncidence. Il s'agissait de John McCall MacBain, un monsieur très riche et porté sur la philanthrope qui vit en Suisse et qui a fait un don important. C'est à cela que se résume l'augmentation. C'est le président de notre conseil d'administration, un Canadien éminent et très respecté, qui a fait un don très généreux.
    Je pense que les chiffres montreront quelque chose de différent.
    C'est l'augmentation. Cela n'a rien à voir avec la politique.
    Votre deuxième question, je crois, était que...
    Êtes-vous en train de nous dire...
    Oui, la Chine fonctionne ainsi. L'idée que...
    Non, nous ne parlons pas de la Chine. Nous parlons du Canada. Nous parlons de l'idée que si vous avez besoin d'un interprète qualifié de l'anglais ou du français vers une langue chinoise, il serait normal que les gens s'adressent au consulat ou à une organisation affiliée au Front uni et demandent son aide.
    N'est‑ce pas absurde?
    Je ne sais même pas s'il s'agissait d'interprètes. Je dis qu'il faut en tenir compte pour comprendre comment M. Zhang Bin agissait en tant que non-anglophone et non-francophone...
    Le problème, c'est que des membres du consulat étaient présents. Il y avait des gens de ces organisations affiliées au gouvernement chinois...
    Nous avons accueilli des représentants du consulat d'autres pays à certains moments. C'est une bonne chose de faire de la diplomatie universitaire. C'est une bonne chose.
    Il ne s'agit pas de n'importe quel autre pays, monsieur. Cela n'a pas déclenché...
    À l'époque, en 2015 et 2016, la Chine n'était pas l'endroit difficile qu'elle est devenue. Nous n'étions pas sur nos gardes de la même façon. Personne ne l'était. Même nos agents du SCRS le diront. Les choses ont beaucoup changé.
    Monsieur, je pense qu'il est juste de dire que les choses ont changé, mais je pense que beaucoup de gens étaient au courant et étaient inquiets.
     Vous avez également accepté beaucoup d'engagements en tant que conférencier, personnellement, avec les Instituts Confucius au Canada...
    Beaucoup?
    J'aimerais savoir si vous avez été rémunéré pour le travail que vous avez effectué avec l'Institut Confucius.
(1800)
    Je crois avoir pris la parole une fois à l'Institut Confucius, dans le cadre d'un événement parallèle, parce que j'étais à...
    Tout d'abord, je suis un lecteur de Confucius, donc l'Institut Confucius...
    Oui, tout comme moi. Les Instituts Confucius n'ont rien à voir avec l'oeuvre ou l'héritage de Confucius.
    Non, la culture chinoise est...
    Pouvez-vous répondre à la question, cependant? Avez-vous été rémunéré pour ce travail que vous avez fait pour les Instituts Confucius?
    Je ne crois pas, non.
    Vos sociétés de production cinématographique ont-elles déjà reçu des fonds de personnes ou d'institutions chinoises basées en Chine?
    Je crois que mon livre a été traduit en chinois, et j'ai reçu un paiement d'un éditeur chinois, un paiement assez modeste, pour être franc.
     Oui, j'ai vendu des choses en Chine, notamment mon livre. En ce qui concerne mes films, je n'ai jamais réalisé de film qui a été vendu en Chine.
    Est‑ce que des institutions affiliées au gouvernement chinois, des institutions basées en Chine, ont financé vos travaux à un moment ou à un autre?
    Non.
    Très bien.
    Vous dites dans votre livre qu'il vous arrive encore de défendre le PCC. Vous avez entre autres déclaré que vous ne pensiez pas que la Chine aurait pu aller aussi loin et aussi vite sans l'unité et la puissance d'organisation que le parti lui a procurées.
    Le croyez-vous toujours?
    C'est le point clé pour comprendre l'histoire récente de la Chine. Il faut vraiment comparer la Chine avec Chine pour faire une analyse juste de la Chine.
     Les principes unificateurs, surtout après le règne de Deng Xiaoping, comme je l'ai dit, découlant de...
    Croyez-vous toujours à cette affirmation? Est‑ce que cela reflète toujours votre vision du monde?
    Est‑ce que je crois que le gouvernement chinois a fait des progrès économiques considérables? Je le crois, oui, dans une certaine période.
    Pensez-vous que le PCC, cette Chine, n'aurait pas pu progresser ainsi sans l'unité et la puissance d'organisation que lui conférait le PCC? C'est ce que vous soutenez dans le livre. Le croyez-vous toujours?
    Pourrions-nous avoir une réponse brève, s'il vous plaît.
    C'est une hypothèse. Il est difficile de le savoir, mais je pense qu'il faut reconnaître que les principes d'organisation du Parti communiste chinois ont eu un impact économique considérable sur le pays. C'est exact, oui.
    C'est tout, monsieur Genuis, je vous remercie.
    Merci, monsieur Trudeau.
    Monsieur Housefather, bienvenue au Comité. Vous disposez de cinq minutes. Allez‑y, je vous en prie.
    Merci, monsieur le président. C'est un plaisir d'être ici.
     Merci beaucoup, monsieur Trudeau, d'être ici aujourd'hui.
     J'aimerais régler quelques points en suspens, car nous arrivons à la fin de votre témoignage.
     Je consulte le site Web de Corporations Canada, et Millennium Golden Eagle International Inc. au Canada est une entreprise en règle, selon le site Web de Corporations Canada, et ce, depuis le 20 avril 2012. Pensez-vous que nous devrions pouvoir nous fier au site de Corporations Canada pour déterminer si une entreprise est en règle?
    Je dirais que oui. Je ne suis ni comptable ni expert en finances, mais c'est un bon point de départ.
    Comme vous l'avez mentionné, c'est la Banque de Montréal qui détient leurs comptes bancaires, et la Banque est donc tenue de faire preuve de diligence à l'égard des entreprises avant d'ouvrir un tel compte. De même, nous pourrions nous fier à un tel élément.
    C'est aussi un très bon signe.
    Excellent.
    Nous arrivons ensuite à la question du don. Des gens ont avancé différents chiffres. J'ai entendu plusieurs fois 200 000 $. C'était 140 000 $, n'est‑ce pas?
    Le contrat prévoyait 200 000 $ pour organiser des conférences, mais il devait y avoir deux versements. Le versement de 140 000 $ a été fait et il a été décidé, pour des raisons politiques, que nous n'allions pas accepter le dernier versement parce que nous n'allions pas mettre le programme en place de toute façon.
    Exactement, alors j'en viens à la question des 140 000 $: quelle était l'importance de ce montant? Combien d'argent y avait‑il sur le compte bancaire de la Fondation Trudeau à l'époque? Combien d'argent y avait‑il?
    Eh bien, c'était de l'ordre de 145 millions de dollars, peut-être.
    Il y avait 145 millions de dollars, donc les 140 000 $ représentaient manifestement un montant assez négligeable dans le contexte général.
    Oui, et je voulais m'étendre sur la nécessité d'une diplomatie universitaire. Cela n'a jamais été une question d'argent. Il s'agissait d'essayer d'exposer de brillants étudiants chinois aux façons de faire canadiennes.
    Parfait, et le reçu de don pour impôt a été remis à l'entreprise qui a fait le don.
    C'est exact.
    On s'est beaucoup inquiété du fait qu'il a été envoyé par la poste quelque part en Chine à un domicile personnel. Si je suis un Canadien vivant à l'étranger et que je reçois mes documents fiscaux là où je vis à l'étranger, je dois quand même produire ma déclaration de revenus canadienne avec la preuve de dons. Connaissez-vous une raison pour laquelle quelqu'un utiliserait un reçu fiscal canadien pour un don s'il n'a pas à payer d'impôts au Canada?
    Encore une fois, je ne suis pas un... Mais comme M. Rosenberg l'a dit hier, il est évident que cela ne peut servir qu'à une entreprise canadienne pour sa déclaration de revenus au Canada. Cela me semble assez clair.
    Pour payer des impôts au Canada, il faut avoir d'autres activités au Canada. Sinon, vous ne seriez pas assujetti à l'impôt au Canada, n'est‑ce pas?
    Oui, il faut avoir des revenus au Canada.
    Il ne s'agit donc pas d'une société fictive qui ne faisait rien. Il est clair qu'elle avait des revenus quelconques.
    Permettez-moi de vous poser aussi la question suivante.
    Il est facile de jongler avec des dates et de dire que les libéraux faisaient des gains dans les sondages en septembre 2015, tout comme Hillary Clinton à l'époque des primaires démocrates aux États-Unis contre Bernie Sanders, et tout comme le Brexit. Je peux citer beaucoup de choses différentes qui se produisaient à peu près au même moment, alors qu'il y avait une chronologie d'événements.
     Vous avez évoqué la cérémonie et les quatre parties de l'accord. La famille Trudeau en faisait-elle partie? Vous avez parlé des signataires. Y avait‑il quatre lignes où vous avez signé également au nom de la famille Trudeau?
(1805)
    Non, la signature comportait trois parties. Je signais au nom de la Fondation et de la famille.
    « De la famille » parce que vous cédiez à l'Université de Montréal les droits d'utiliser le nom de votre père et en tant qu'exécuteur testamentaire, c'était à vous de le faire.
    C'est exact.
    La Fondation n'aurait pas pu le faire. M. Rosenberg n'aurait pas pu le faire lui-même.
    Je suppose qu'il aurait probablement fallu que je signe une procuration. Je l'aurais peut-être fait si je n'avais pu être présent, mais il y avait un élément cérémoniel, comme M. Rosenberg l'a dit. Nous avons tous estimé que c'était très approprié et que ce n'était pas déplacé.
    C'est parfait.

[Français]

    Je ne sais pas combien de temps de parole il me reste, mais j'aimerais vous poser une dernière question.
    Vous avez parlé d'un compte rendu. Quel administrateur a écrit ce compte rendu?
    Ce sont les trois administrateurs restants et deux autres qui sont partis. Il a été écrit en groupe.
    D'accord.
    Pour témoigner aujourd'hui de ce qui s'est produit selon vous, vous êtes-vous fié à ce qui avait été écrit par les administrateurs qui étaient présents à ces réunions?
    Oui. Il y a aussi les avocats qui en ont été témoins et qui continuent de dire qu'ils n'avaient jamais formulé un avis selon lequel il y avait un conflit d'intérêts qui nécessitait des changements de gouvernance, dont la démission du président du conseil, par exemple.

[Traduction]

    Monsieur le président, me reste‑t‑il du temps?
    Il vous reste 30 secondes.
    Puis‑je vous demander dans ma dernière question, monsieur Trudeau, si vous estimez qu'un ou l'autre de ces huit points n'a pas été suffisamment éclairci et sur lequel vous aimeriez vous étendre?
    Je dois reconnaître que nous avons couvert beaucoup de points différents. Comme je l'ai dit, je vais accepter l'offre de M. Green. Si les travaux se poursuivent et que je doive soumettre d'autres observations, je le ferai.
    Merci, monsieur Housefather et monsieur Trudeau.

[Français]

    Monsieur Villemure, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Trudeau, vous avez donc fait des représentations au nom de la Fondation au fil des années.
    Parlez-vous de représentations publiques?
    Non, je parle de représenter la Fondation dans des rencontres.
    Ce n'est pas arrivé très souvent, mais cela arrive, oui.
    Avez-vous déjà rencontré l'Aga Khan à Paris au nom de la Fondation?
    Non.
    L'avez-vous déjà rencontré, de façon générale?
    Oui, j'ai rencontré l'Aga Khan à Ottawa, il y a environ 10 ans, quand il y a inauguré son centre.
    D'accord.
    Il n'y a pas de lien avec la Fondation, n'est-ce pas?
    Non.
    D'accord.
    Connaissez-vous David Johnston?
    Oui, je le connais depuis mon enfance.
    Il est également un amateur de la Chine.
    Oui, c'est un homme érudit qui s'intéresse à beaucoup de choses.
    Quelle est votre relation avec lui?
    Je l'ai connu très jeune. C'était un ami de mon père. Nous faisions du ski ensemble. C'est aussi un très grand Canadien, et il l'est depuis très longtemps. Je connais ses filles. C'est un ami de la famille, il faut le dire.
    Vous avez donc une certaine proximité avec M. Johnston.
    Récemment, non, mais nous avons déjà été proches. Quand j'étais plus jeune, nous allions chez lui, nous faisions du ski ensemble et nous mangions ensemble souvent.
    C'est parce que vous avez parlé tantôt d'un comité indépendant pour faire la lumière sur la crise de gouvernance, et M. Johnston nous dit souvent qu'il est indépendant dans sa fonction de rapporteur spécial. Celle-ci n'est pas liée à notre comité, j'en conviens, mais s'agit-il du même type d'indépendance ou du même type de proximité?
    Me demandez-vous de me prononcer sur l'indépendance de M. Johnston en tant que...
    J'ai débuté en disant que vous aviez parlé d'un comité indépendant pour la vérification diligente.
    En ce qui concerne les critères, le comité devait servir à rédiger le mandat, par exemple, des enquêteurs en matière de droit et de comptabilité.
    Pour être indépendant, il ne faut pas être lié, n'est-ce pas?
    C'est exact. Vous allez voir, dans le compte rendu de la réunion du conseil, que tout cela était matière à débats.
    D'accord.
    S'il ne faut pas être lié pour être indépendant, M. Johnston est-il indépendant comme rapporteur, étant donné qu'il est lié?
    Vous me demandez de me prononcer sur des décisions du gouvernement que je n'ai pas trop surveillées.
    Pour moi, David Johnston est un Canadien au-dessus de tout soupçon. C'est un homme très honorable, dans le vrai sens du mot; cela ne tient pas qu'à son titre. Je pense que ce pays peut lui faire confiance à tous les égards pour n'importe quelle tâche, franchement.
    Merci beaucoup.
    Merci, messieurs Villemure et Trudeau.

[Traduction]

    Monsieur Green, vous disposez de deux minutes et demie. Allez‑y.
    Merci. Je vais poursuivre dans la même veine.
     Nous avons posé cette question à M. Rosenberg. Vous avez peut-être suivi la discussion.
     Vous avez parlé de certaines tensions au sein du conseil d'administration au sujet d'un audit indépendant. Nous vivons une situation où, selon des allégations, le gouvernement chinois a directement intimidé et menacé un député. Nous vivons dans une situation où il y a des allégations d'ingérence dans les élections de 2019 et 2021. Nous vivons une situation où ces allégations et ces fuites — des fuites non vérifiées et honnêtes, censées provenir du SCRS ou de je ne sais où — visent la Fondation, et M. Johnston a été nommé rapporteur spécial.
     Notre position en tant que néo-démocrates, et je la partage, est qu'il doit y avoir une enquête publique indépendante sur l'ingérence étrangère.
    Je dois comprendre, monsieur, que vous êtes ici aujourd'hui pour protéger l'héritage de votre famille et la Fondation. S'il devait y avoir une enquête publique, je me demande si vous seriez disposé à ce que les éléments qui ont été révélés ici soient remis à la commission — un peu comme la commission Rouleau, qui a fourni un très bon cadre — pour procéder à un audit judiciaire de la Fondation afin d'assurer au public qu'à aucun moment, celle‑ci n'a servi à influencer le premier ministre.
     Seriez-vous ouvert à cela?
(1810)
    Écoutez, je ne suis pas un décideur au sein de la Fondation à l'heure actuelle. Je ne siège pas au conseil d'administration, donc...
    Je vous pose la question en tant que personne qui était là comme membre de la famille...
    Comme je l'ai toujours dit, je pense que tout effort pour...
    À un moment donné, je suis ici pour dire que nous perdons notre temps avec la notion d'ingérence. Je n'en ai vu aucune trace et je ne pense pas...
    Malheureusement, ce n'est pas à vous d'en décider, monsieur.
    C'est exact.
    Malheureusement, lorsqu'il est question d'intérêts, de conflits d'intérêts et d'intérêts pécuniaires, la perception a autant d'importance que la réalité. Je vais vous croire sur parole et je vais me fier à votre témoignage aujourd'hui, mais vous avez intérêt à clarifier les choses à ce sujet.
    Je veux défendre la Fondation, c'est certain.
    Oui, et en toute justice pour votre famille, je suppose que vous voudriez défendre l'héritage de votre père, qui est maintenant plongé dans ce monde vraiment trouble...
    Je pense que l'héritage de mon père est ailleurs, en dehors de tout cela, à bien des égards.
     Comme je l'ai dit, je pense qu'il s'agit d'une grande distraction par rapport à l'importante mission de la Fondation.
    Très bien, alors seriez-vous ouvert à un audit indépendant...
    Bien honnêtement, je ne peux qu'accueillir favorablement tous les efforts déployés pour clarifier la situation, quelle qu'en soit la forme.
     Je ne suis pas un décideur en la matière. Je sais que le conseil d'administration lance une enquête indépendante, comme c'était l'objectif de ces dernières semaines, ce qui a donné lieu à la querelle dont nous parlons.
     Je sais que le président du conseil d'administration a demandé à la vérificatrice générale d'examiner nos affaires, donc l'occasion... Je ne suis pas avocat non plus, mais les tribunaux peuvent également être saisis de cette question. Les tribunaux sont vraiment impartiaux. Ce comité est un forum politique, et nous devons comprendre que tout le monde ici a ses propres objectifs et ce n'est donc pas forcément le meilleur endroit pour obtenir la vérité, mais je veux que la vérité éclate, c'est certain.
    Merci, monsieur Green et monsieur Trudeau.
    Nous en sommes toujours au tour de cinq minutes.
    Monsieur Brock, vous avez la parole pour cinq minutes. Allez‑y.
    Merci, monsieur le président.
     Monsieur Trudeau, votre affirmation selon laquelle vous avez une relation fraternelle avec votre frère n'est pas tout à fait exacte. Vous lui avez prêté main-forte dans sa course à l'investiture en 2008 et vous avez joué un rôle extrêmement important dans sa campagne à la chefferie en 2013. Avant que votre frère ne parte pour la Chine en 2016, il a lu votre livre et cinq jours après son retour, il vous a accompagné à un événement de promotion pour votre livre.
     Dans ces circonstances, conviendriez-vous avec moi que les deux riches ressortissants chinois milliardaires ayant des liens directs avec le régime communiste qui vous influençaient exerçaient une influence directe sur le premier ministre?
    Non, je suis tout à fait en désaccord avec le tableau que vous brossez.
    Je n'ai pas joué un rôle important en 2013. Je n'ai joué aucun rôle en 2013. J'ai aidé mon frère au début de 2012, lorsqu'il avait une équipe embryonnaire, et je l'ai aidé de façon très fraternelle...
     Merci, monsieur Trudeau.
     Je tiens à confirmer un certain nombre de points. Je fais un peu de ménage ici.
     Vous n'avez signé qu'un seul don dans l'histoire de la Fondation, le désormais tristement célèbre don de 200 000 $ du régime de Pékin. Est‑ce exact?
    Je pense que nous avons déjà traité de cette question de long en large. Je vous ai dit pourquoi je l'ai signé.
    La réponse est donc oui. Merci, monsieur Trudeau.
    Vous n'avez pas remis en question le fait que les reçus fiscaux étaient envoyés en Chine, en fin de compte, n'est‑ce pas?
    J'ai expliqué que l'envoi de reçus fiscaux en Chine, parce que le donateur était un citoyen chinois, n'a soulevé aucune confusion ni aucun drapeau rouge à quelque niveau que ce soit.
    En fait, vous avez dit — et je vous cite — que Millennium Golden Eagle International était une entreprise légitime active au Canada.
     Cependant, si vous aviez fait preuve de diligence raisonnable, ce que vous prétendez avoir fait, et comme le conseil d'administration et votre organisation ont prétendu l'avoir fait, vous auriez appris que l'adresse de cette multinationale se trouvait à Dorval, en banlieue de Montréal. Il s'agissait d'un manoir de 4 000 à 5 000 pieds carrés. C'était une très grande maison avec une piscine et un terrain de basket.
     Étiez-vous au courant?
(1815)
    Je remettrais en question votre compréhension du milieu des affaires au Canada. L'adresse du siège social de ma compagnie de téléphone est une maison de style Art déco sur l'avenue des Pins.
    Étiez-vous au courant des faits que je viens d'exposer?
    J'ai été mis au courant, et cela n'a rien d'étrange.
    Je vous remercie.
     Saviez-vous aussi que l'adresse de cette société inscrite à Hong Kong, à laquelle le reçu original a été envoyé, n'existe pas en réalité? Un journaliste du Globe and Mail de passage à Hong Kong s'est rendu à l'adresse pour essayer de se renseigner sur les exploitants de cette société, et la personne qui a répondu à la porte n'en avait aucune idée.
    En étiez-vous au courant, monsieur?
    Non, je n'étais pas au courant. Je sais que les adresses des sociétés sont assez peu pertinentes, franchement, pour déterminer la nature de la propriété et la nature des impôts.
    Je vous remercie. Rien n'est pertinent. Je comprends.
     Vous n'avez pas remis en question l'urgence de faire le don dans le sillage d'événements politiques majeurs pour votre frère, le premier ministre, n'est‑ce pas?
    Je suis désolé, pourriez-vous répéter la question?
    Vous n'avez pas remis en question l'urgence de faire le don dans le sillage d'événements politiques majeurs pour votre frère.
    Non, parce qu'il y avait urgence bien avant que mon frère n'entre en politique.
    Vous n'avez jamais remis en question l'intention des riches milliardaires liés directement au régime communiste qui s'intéressaient beaucoup aux bourses d'études de la Fondation Trudeau. Vous n'avez pas remis cela en question.
    Ils ne s'intéressaient pas aux bourses d'études de la Fondation Trudeau. C'est devenu une condition à leur collaboration avec l'Université de Montréal.
     Vous avez dit que vous aviez exprimé certaines préoccupations au sujet de l'article du Globe. Vous avez dit qu'il s'agissait simplement de renseignements.
     J'ai fait carrière comme procureur de la Couronne. Je m'appuie sur des preuves lorsque je présente un dossier. La preuve que nous avons ici, qui provient d'une source anonyme à l'agence d'espionnage du Canada, est qu'il existe en fait une conversation enregistrée entre M. Zhang, le philanthrope que vous prétendez être un simple homme d'affaires légitime, et un attaché commercial anonyme de l'un des consulats de Chine au Canada, dans laquelle ils discutent des chances que votre frère batte les conservateurs de Stephen Harper et forme le gouvernement. En outre, et plus dommageable encore, il y a les instructions selon lesquelles Pékin lui rembourserait la totalité du don à la Fondation Trudeau.
     Vous avez écarté cela comme étant simplement, quoi, des ouï-dire?
    Les faits sont faux. Il n'a jamais été question d'un don d'un million de dollars à la Fondation Trudeau.
    Non, c'était 200 000 $. Soyons plus précis.
    Mais l'article du Globe and Mail parle d'un million de dollars, alors quand les faits sont erronés... Vous n'avez pas vu la preuve, et je ne la verrai pas non plus, alors je réserve mon jugement.
    Pensez-vous que le consulat qui a nui à la famille d'un député conservateur siégeant au Parlement et qui a menacé ce député devrait être immédiatement expulsé?
    Je ne suis pas au courant des faits de cette situation, alors je ne me prononcerai pas.
    Vous ne lisez pas les journaux?
     Je vous remercie, monsieur Brock.
     Madame Saks, vous avez la parole pour cinq minutes.
     Je signale aux membres du Comité que si je calcule le temps, il devrait nous rester environ six minutes après l'intervention de Mme Saks. Nous allons accorder trois dernières minutes aux conservateurs et trois dernières minutes aux libéraux à la fin.
     Madame Saks, vous disposez de cinq minutes. Allez‑y, je vous en prie.
    Merci, monsieur le président. Je remercie M. Trudeau de s'être joint à nous.
     J'aimerais me pencher sur le contexte. Je pense que le contexte est vraiment important. C'est lié à ce que vous avez mentionné à propos de votre profonde compréhension de la Chine: il y a la Chine d'hier et la Chine d'aujourd'hui.
     J'aimerais revenir à la Chine de 2013. Saviez-vous si M. Zhang avait fait d'autres dons très importants à d'autres établissements universitaires au Canada à cette époque?
    Oui, comme je l'ai mentionné dès le départ, il souhaitait répéter à l'Université de Montréal le don qu'il avait fait en l'honneur de Norman Bethune à l'Université de Toronto pour sa faculté de médecine.
    Oui, il s'agissait donc d'un don d'un million de dollars à l'Université de Toronto.
    Il s'agissait de 800 000 $ pour la faculté de médecine. C'est le seul élément de preuve que je vous ai fourni. C'est très clair. Il était clair pour moi dès le départ qu'il s'agissait d'un don légitime fait par un philanthrope légitime.
    C'est exact, et aucune interrogation n'avait été soulevée à l'époque à l'Université de Toronto à propos de la philanthropie de M. Zhang ou de la source de cette philanthropie.
(1820)
    Non.
    J'aimerais que nous approfondissions un peu ce point, parce que le contexte est important. Je crois comprendre que M. Zhang avait l'intention de faire un don à l'Université de Montréal, et que la Fondation Trudeau, en raison de son excellent travail en matière de bourses d'études dans ce programme, en est venue à en faire partie, mais des négociations ont été nécessaires. M. Zhang ne s'est pas simplement réveillé un matin et a décidé: « Je veux faire un don à la Fondation Trudeau tout comme j'ai fait un don à la faculté de médecine de l'Université de Toronto ».
    Non. Il n'avait aucun intérêt à faire un don à la Fondation Trudeau.
    Il y a eu beaucoup de négociations a priori.
    Il allait y avoir un partenariat. Il devait être présenté.... Comme le président de l'Université de Montréal l'a dit, il y avait une certaine réticence de sa part à compliquer ce qu'il voulait faire, c'est‑à‑dire conclure un accord simple du type de celui qu'il avait conclu avec l'Université de Toronto.
    Je comprends.
     Très bien, approfondissons le contexte de cette période.
     C'était en 2013 et 2014. Les conservateurs de M. Harper étaient au pouvoir. Stephen Harper cherchait énergiquement à conclure à l'époque avec Xi Jinping un accord commercial secret de 31 ans avec la Chine. C'est ce qui se passait.
     À l'époque, le gouvernement Harper ou ses représentants vous ont-ils mis au courant, vous ou la Fondation Trudeau? Est‑ce que le SCRS est venu voir la Fondation Trudeau à cette époque‑là pour lui dire: « Vous savez, nous sommes un peu préoccupés par l'influence étrangère potentielle des contributions de M. Zhang », que ce soit à la Fondation Trudeau, à l'Université de Montréal ou à l'Université de Toronto? Y a‑t‑il eu des conversations de cette nature?
     Il n'y a pas eu de conversations.
    Vous dites que le gouvernement Harper, alors qu'il était au pouvoir et qu'il concluait des accords commerciaux secrets avec le gouvernement chinois et Xi Jinping, n'a pas mis en garde la Fondation Trudeau, qui était en réalité une entité de la fonction publique, en partie, pour ce qui est de sa création et de ses statuts. À l'époque du gouvernement conservateur, personne n'a pensé à vous informer ou à vous dire: « Attention ».
    C'est exactement cela. S'il y avait eu des preuves accablantes, je pense qu'elles auraient été portées à l'attention de quelqu'un.
    C'était la Chine à l'époque, n'est‑ce pas?
    C'était la Chine à l'époque.
    Mes collègues ici présents essaient de faire le lien avec la Chine d'aujourd'hui et les préoccupations qu'ils ont à propos des allégations concernant un membre du Parti conservateur lors d'un vote qui, en fait... Je faisais partie du comité des affaires étrangères à l'époque et j'ai moi aussi été bannie par la Chine en raison de l'étude sur les Ouïghours. Pensez-vous qu'il y a là un peu de pontifiement divinatoire en ce qui concerne les liens potentiels entre la Fondation Trudeau et ce genre de...?
    Si je pense que… qu'entendez-vous par « pontifiement divinatoire »?
    Ils prétendent qu'il y a un quelconque lien direct avec ce qui se passe aujourd'hui en Chine.
     Parlons du contexte. C'est la Chine de 2023, une décennie s'est donc écoulée.
    Le monde a changé, mais c'est le lot de la politique de regarder peu en arrière et de ne pas voir les changements dans le monde. Nos objectifs diplomatiques et la nature même de la diplomatie ont changé. Stephen Harper souhaitait vivement commercer avec la Chine. Nous commerçons encore avec la Chine.
     Regardez autour de vous: la pièce est remplie d'objets fabriqués en Chine. Nous entretenons des relations étroites avec la Chine, et cela se poursuit. La diplomatie est très difficile pour de nombreuses raisons à l'heure actuelle, et elle évolue sans cesse. Elle a d'ailleurs beaucoup changé depuis la première fois où ce don a été évoqué.
    Les objectifs mêmes de l'enseignement supérieur... auxquels je crois toujours, soit dit en passant: je ne pense tout simplement pas que la Fondation Trudeau puisse le faire tant qu'il y aura un gouvernement Trudeau.
    Dans le contexte de la Chine de l'époque, le gouvernement Harper n'a pas jugé nécessaire de lever un drapeau rouge au sujet de la Fondation Trudeau ou de l'une ou l'autre de ces contributions.
    C'est exact.
    Très bien.
     Combien de temps me reste‑t‑il, monsieur le président?
     Il vous reste 12 secondes.
    Je cède mon temps de parole, et M. Turnbull prendra ces trois minutes lorsque son tour viendra.
    Très bien, je vous remercie. Il reste six minutes, trois et trois.
     Monsieur Barrett, la parole est à vous pour trois minutes.
    Vous avez fait quelques caractérisations que je qualifierais de malheureuses à propos du travail journalistique, que ce soit en disant que le Journal de Montréal n'est pas une source crédible d'information ou en critiquant le Globe and Mail. Nous savons que la famille du député Michael Chong a fait l'objet d'intimidation sur l'ordre de Pékin. C'est un fait, que vous ayez eu l'occasion de le lire ou non.
     Pensez-vous que les fonctionnaires consulaires qui ont orchestré cette campagne d'intimidation devraient être expulsés?
    Il faudrait que je lise les faits plus attentivement. Bien honnêtement, je ne suis pas fonctionnaire ni même éditorialiste. Je vous accorde que les risques d'ingérence malveillante de la Chine au Canada augmentent de jour en jour et doivent être pris très au sérieux. Je pense que tous les membres du Comité prennent ces risques très au sérieux et je suis convaincu, bien honnêtement, que le gouvernement — pas seulement les élus, mais aussi la fonction publique — agira conformément à toutes les règles. Je ne suis pas...
(1825)
    Avez-vous déjà organisé des collectes de fonds politiques pour votre frère depuis qu'il s'est présenté à l'investiture ou qu'il a été élu pour la première fois lors d'une élection générale ou à la chefferie?
    Au début, j'en faisais beaucoup, parce qu'il avait un effectif de deux. Ai‑je organisé des collectes de fonds? J'en ai organisé une chez moi, oui, peut-être lorsqu'il était député... J'ai réuni quelques amis et, oui, j'ai organisé des collectes de fonds.
    Vous avez été nommé liquidateur de la succession de votre père. Est‑ce exact?
    C'est exact, oui.
    Les actifs comprennent des droits d'auteur sur des livres et des redevances par l'entremise d'une société à numéro. Est‑ce exact?
    D'une certaine façon, il y a des droits sur des livres, oui, en...
    Avez-vous le contrôle de la société à numéro?
    J'ai le contrôle, oui. Eh bien, contrôle...
    J'en suis le président.
    Vous êtes le président. Quels sont les intérêts en jeu? Quelle est la répartition entre vous et votre frère?
    Comme mon père a travaillé dans un cabinet d'avocats pendant les 20 dernières années de sa vie, il était entouré de fiscalistes. Il y avait beaucoup de sociétés et, au fil des ans, nous en avons lentement réduit le nombre. Il en reste une, qui comprend quelques biens immobiliers et des droits d'auteur. Elle est à peine opérationnelle, mais elle existe toujours.
     J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Il s'agit d'une question privée, probablement, je suppose.
    Allez‑y pour votre rappel au Règlement, madame Saks.
    Je ne vois pas la pertinence d'une société privée dans le cadre de ce témoignage.
    Eh bien, soyez patiente, et vous le découvrirez, madame Saks. Je vais continuer à interroger le témoin et vous pourrez essayer d'interrompre, je suppose.
    C'est condescendant.
    Nous sommes passés par là hier.
     À moins qu'il s'agisse d'une question de procédure prévue au Règlement...
    Pardon? Votre interruption n'est pas utile, monsieur Turnbull.
    Pouvons-nous faire preuve d'un peu de...?
    Un instant, s'il vous plaît. Nous avons presque terminé.
     Comme je l'ai dit hier, à moins qu'il s'agisse d'une question de procédure prévue au Règlement, les membres ont le droit de poser les questions qu'ils veulent poser. Je ne vois rien dans l'intervention de Mme Saks qui soit contraire au Règlement. Nous allons poursuivre avec M. Barrett.
     Monsieur Barrett, il vous reste 27 secondes, allez‑y, monsieur.
    Tout au long du témoignage que nous avons entendu aujourd'hui, vous êtes très sûr de certaines choses. Puis, lorsque nous parlons de ce qui se rapporte directement à l'ingérence étrangère, qu'il s'agisse des reportages... Le SCRS dispose d'une écoute électronique qui confirme qu'il s'agissait d'une opération d'influence. Vous dites que vous n'en savez rien. Vous ne savez rien non plus de l'adresse de ces donateurs à Hong Kong, qui correspond à celle de l'Association chinoise de l'industrie culturelle.
    Très bien, monsieur Barrett...
     Vous dites que ce qui rachète ces gens, c'est qu'ils ont un compte bancaire. Eh bien, les trafiquants de drogue ont des comptes bancaires, monsieur. Cela ne veut pas dire qu'ils dirigent des entreprises dignes de confiance.
    Monsieur Barrett, votre temps est écoulé.
     Monsieur Trudeau, je vais vous donner une seconde pour réagir à ce que nous venons d'entendre, si vous le souhaitez.
    Il y a beaucoup d'insinuations et d'interprétations erronées. Je ne pense pas avoir besoin d'y réagir.
    Monsieur Turnbull, vous disposez des trois dernières minutes.
     Allez‑y, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
     Merci, monsieur Trudeau, d'être ici. J'ai écouté attentivement votre témoignage.
     Je voulais adopter une approche un peu différente, car j'ai un lien personnel avec la Fondation Trudeau, par mon meilleur ami d'enfance.
     C'est un Métis-Cri qui a subi un traumatisme intergénérationnel, qui a lutté contre la toxicomanie, qui a vécu l'itinérance et qui a commis des larcins et des délits. Il est allé en prison et a touché le fond. Il a fini par intégrer un programme de désintoxication et il a commencé à changer sa vie. Il est retourné aux études. Il a obtenu un baccalauréat, une maîtrise et un doctorat. Il est également devenu l'auteur d'un livre à succès intitulé From the Ashes.
     Il a bénéficié d'une aide importante de la Fondation Trudeau. C'est un boursier Trudeau. Il s'appelle Jesse Thistle et il a déclaré: « Après avoir obtenu la bourse Trudeau, je me suis dit: ‘Oh, ma vie va changer maintenant' ».
     Je pense qu'il est important que le travail caritatif de cette Fondation se poursuive parce qu'elle fait un travail profond, utile et marquant, et elle l'a toujours fait.
     Quelle est, selon vous, la voie à suivre?
    La crise de gouvernance, la crise de gestion est terminée. Notre enquête est lancée.
    Une enquête sur le roulement du personnel est en cours. Nous savons qu'il y a eu un certain roulement, mais il y avait de graves problèmes de gestion sous notre ancienne présidente. Cette enquête doit être menée. Ce sont autant de distractions qui nous détournent des choses comme les travaux de Jesse Thistle, que je connais bien.
     Ce sont des personnes extraordinaires. Demandez à tous ceux qui ont eu affaire à elles. Comme je l'ai dit, elles nous rendent fiers d'être Canadiens. Je sais qu'elles sont déterminées. On n'obtient pas une bourse de la Fondation Trudeau sans faire preuve d'un dévouement et d'une discipline extraordinaires.
     Néanmoins, l'idée même que la bourse qu'elles sont si fières de recevoir a été injustement contestée est la raison de ma présence ici.
     Je les encourage à garder la tête haute et à travailler. C'est le travail de la raison, et le travail de la raison est le travail d'une société juste que nous pouvons tous appuyer, quel que soit notre parti. Le travail intellectuel dans ce pays est le meilleur de notre pays.
(1830)
    Je ne peux qu'être d'accord avec vous sur ce point. Je crois qu'il est tout à fait injuste de traîner la Fondation Trudeau dans la boue à des fins partisanes. C'est une honte.
     Je vous remercie d'être ici. J'espère que la Fondation poursuivra son travail.
    Merci, monsieur Turnbull.
     Ceci conclut le témoignage d'aujourd'hui.
     Monsieur Trudeau, au nom du Comité et au nom des Canadiens, je tiens à vous remercier d'être venu.
     Je tiens également à remercier notre greffière pour avoir tout mis en place, ainsi que nos analystes et nos techniciens.
     Mesdames et messieurs, je vous souhaite un bon week-end. C'est la dernière réunion du Comité cette semaine.
     La séance est levée.
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