Passer au contenu
;

ETHI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique


NUMÉRO 065 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le vendredi 21 avril 2023

[Enregistrement électronique]

(0845)

[Français]

    Je déclare la séance ouverte.
    Je vous souhaite la bienvenue à la 65e réunion du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique de la Chambre des communes.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride, conformément à l'ordre de la Chambre adopté le jeudi 23 juin 2022. Par conséquent, les membres peuvent participer en personne ou à distance au moyen de l'application Zoom. En cas de difficulté technique, avertissez-moi immédiatement. Veuillez noter qu'il se peut que la réunion doive être suspendue quelques minutes afin que l'on puisse s'assurer que tous les députés peuvent participer pleinement aux délibérations.
    Conformément à l'article 108(3)h) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mercredi 7 décembre 2022, le Comité reprend son étude de l'ingérence étrangère et des menaces entourant l'intégrité des institutions démocratiques, de la propriété intellectuelle et de l'État canadien.
    Madame la greffière, tous les tests de connexion ont été effectués.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue au témoin d'aujourd'hui, M, Raphaël Glucksmann.

[Traduction]

     Il est président de la Commission spéciale sur l’ingérence étrangère dans l’ensemble des processus démocratiques de l’Union européenne, y compris la désinformation, et sur le renforcement de l’intégrité, de la transparence et de la responsabilité au Parlement européen.

[Français]

    Monsieur Glucksmann, soyez le bienvenu au Comité.
    La parole est à vous pour cinq minutes.

[Traduction]

    Je remercie tous les honorables députés de leur invitation.

[Français]

     Je vous remercie infiniment de votre invitation.
    La commission spéciale que je préside a commencé ses travaux en 2020 et, depuis, nous avons méthodiquement analysé les ingérences étrangères dans tous les processus démocratiques européens.
    Au terme de centaines d'heures d'auditions, d'interactions avec les services de sécurité européens, des lanceurs d'alertes, des journalistes d'investigation, des experts et des diplomates, mais aussi après avoir disséqué les différentes notes confidentielles ou ouvertes, les différents rapports publiés par les différentes institutions dans les pays de l'Union européenne, et après avoir fait des missions sur le terrain, notre verdict à l'endroit des dirigeants européens est assez terrible.
    Pendant de trop longues années, nos dirigeants et nos gouvernements ont laissé libre cours à l'action de pays hostiles au sein même de nos nations. Ces actions peuvent être catégorisées en deux types d'objectifs d'ingérence.
    D'un côté, il y a des pays, des gouvernements, des régimes qui s'ingèrent dans notre vie démocratique pour promouvoir leurs intérêts, obtenir des accords qui leur sont favorables, ou pour empêcher des critiques qui émergent contre leur attitude et leur comportement.
    D'un autre côté, certains régimes peuvent aussi essayer de discréditer des adversaires géopolitiques. Dans cette catégorie d'acteurs, nous classons par exemple le Qatar, qui a utilisé la corruption au sein même du Parlement européen pour promouvoir ses intérêts, obtenir des accords favorables ou discréditer les Émirats arabes unis. C'est une ingérence de type classique.
    Il y a aussi deux autres acteurs qui ont des objectifs différents. Leur but n'est pas tellement de promouvoir leurs intérêts, mais plutôt de déstabiliser et d'affaiblir nos démocraties en tant que telles. Leur but précis est d'entraver notre fonctionnement démocratique. Ces deux acteurs sont la Russie et la Chine.
    Nous avons analysé minutieusement les actions de la Russie et de la Chine en Europe. Je commencerai par la Russie, sachant qu'il faut que je sois bref.
    Le but de la Russie est de semer le chaos dans nos démocraties. C'est une véritable guerre hybride qui a été déclenchée contre l'Union européenne. Pendant très longtemps, il n'y a pas eu de réactions à cette guerre. Quand je parle de « guerre hybride », je parle de cyberattaques contre nos hôpitaux en pleine pandémie. Non loin de mon bureau se trouve le Centre hospitalier Sud Francilien, à Corbeil‑Essonnes, en région parisienne, a été attaqué par des pirates informatiques russes et n'a pas pu fonctionner pendant des semaines.
    Il s'agit de cyberattaques contre nos institutions, mais aussi la pénétration dans les réseaux sociaux, avec les armées de trolls et de robots de M. Prigojine qui, dans toutes les langues de l'Union européenne, visent à favoriser les points de vue les plus extrêmes et la polarisation de nos sociétés.
    Nous avons analysé comment, par exemple, en Espagne, des acteurs russes favorisent à la fois les indépendantistes catalans et les ultranationalistes du parti d'extrême droite Vox, c'est-à-dire les deux pôles les plus opposés du débat politique, avec comme but de polariser le débat et qu'il devienne chaotique.
    L'ingérence prend aussi la forme de la corruption et de la capture des élites. Nous avons analysé comment le système énergétique allemand avait été réorienté en fonction des intérêts russes par M. Schröder, chancelier social-démocrate, et par des gens qui travaillaient avec lui et qui ont tous fini par travailler pour Gazprom.
    C'est aussi le financement de mouvements politiques extrémistes.
    Enfin, c'est aussi l'utilisation d'organisations non gouvernementales, ou ONG, ou de groupes de réflexion ultraréactionnaires, qui remettent en cause l'existence des institutions européennes.
    Tout cela crée un écosystème dont le but est la déstabilisation des démocraties.
    Outre la Russie, l'acteur qui a le plus occupé nos travaux est la Chine.
    Pendant longtemps, la Chine a appartenu à la première catégorie, c'est-à-dire que son but était de promouvoir les intérêts chinois. Depuis quelques années, elle s'inspire du mode opératoire des autorités russes et des méthodes employées par les Russes.
    Nous avons vu que, depuis la pandémie, le but de la Chine était aussi devenu la déstabilisation. Les méthodes chinoises sont assez analogues à celles des Russes. La grande différence est l'importance attachée aux acteurs économiques par rapport aux acteurs politiques. Nous nous sommes rendu compte aussi que, par exemple, au Parlement européen et dans les institutions européennes, les autorités chinoises n'avaient pas besoin d'engager des lobbyistes puisque les grandes compagnies européennes, dont les ventes ont besoin du marché chinois et dont les productions ont besoin de l'appareil productif chinois — elles sont donc complètement liées à la Chine —, faisaient le lobbying et la pénétration en lieu et place des autorités chinoises pour leur compte.
    On nous a donc...
(0850)
     Monsieur Glucksmann, je vous remercie de votre déclaration d'ouverture.
    Nous avons beaucoup de questions de la part des membres du Comité.
    Chaque membre dispose de six minutes pour poser des questions et obtenir des réponses.
    M. Gourde, du Parti conservateur, va commencer le premier tour de questions.
    Monsieur Gourde, vous disposez de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie le témoin d'être des nôtres.
    Votre présentation était vraiment très intéressante.
    Je me pose bien des questions sur la façon dont la communauté européenne fait face à son besoin criant en matière d'énergie. Vous avez parlé de l'influence de la Russie et de la Chine pour déstabiliser des gouvernements. Vous savez qu'un gouvernement réagit lentement. Les autres pays ne sont pas des démocraties, mais des dictatures qui peuvent avoir des intentions plus ou moins cachées, comme vous l'avez dit. Ils réagissent donc plus rapidement.
    Y a-t-il moyen d'être plus efficace? De quelle façon nos démocraties devraient-elles réagir face à ces géants qui veulent déstabiliser l'Europe, et même les Amériques?
(0855)
    Je vous remercie beaucoup de votre question.
    Quelles devraient être nos réactions? Elles devraient déjà être beaucoup plus rapides et beaucoup plus dures. Ce qui a permis ces agressions répétées, c'est d'abord l'absence de sanctions, l'absence de conséquences. En fait, dès qu'il y a une attaque contre une infrastructure stratégique, dès qu'il y a une preuve de corruption, il doit y avoir une sanction. Dans l'Union européenne, il n'y a pas eu de sanctions.
    Ensuite, la grande question qui se pose, à nous, en particulier, comme vous l'avez mentionné, monsieur Gourde, c'est notre dépendance à l'énergie. Jusqu'ici, nous étions totalement dépendants de l'énergie russe et on se rend compte à quel point nous sommes, aujourd'hui, dépendants des productions chinoises, y compris dans les secteurs les plus stratégiques.
    Si vous voulez affirmer une souveraineté européenne, vous devez travailler à réduire vos dépendances. C'est ce que la Commission européenne appelle l'atténuation de risques. À mon avis, c'est la grande œuvre qui doit être la nôtre au cours des années qui viennent. D'ailleurs, nous avions des recommandations très précises à cet égard.
    Le Canada pourrait peut-être contribuer à une partie des approvisionnements de l'Europe, ce qui réduirait, sans doute, la dépendance aux pays que vous avez mentionnés.
    Par contre, il y a une grande résistance, dans notre pays, de la part d'organisations qui ne veulent pas nécessairement qu'on développe les énergies au Canada.
    Croyez-vous que ces organisations peuvent être infiltrées par des pays tels que la Russie et la Chine, qui les financeraient pour empêcher le développement de nos ressources et nos exportations vers l'Europe?
    Vous comprendrez bien que je n'ai évidemment aucun élément sur la pénétration russe ou chinoise au Canada. Par ailleurs, je sais qu'en Europe, il y a eu une tentative de pénétration de tous les acteurs qui promouvaient des intérêts favorables.
     Pour ce qui est du dossier de l'énergie, je vous invite à vous pencher sur le phénomène allemand, puisque cela a été l'élément essentiel. Cela ne se limite pas à Gerhard Schröder. On a fait une sorte d'examen en profondeur du gouvernement allemand de l'époque. Il y a eu des reconversions quasi immédiates jusqu'aux bureaucrates de haut niveau. Ensuite, ils ont travaillé pour Gazprom International..
    L'ouverture de l'Europe à d'autres sources d'approvisionnement est-elle sérieuse et peut-elle être considérée à long terme pour des pays comme le nôtre?
    C'est certain que nous ne dépendrons plus jamais de la Russie sur le plan énergétique. Nous avons réussi à l'échelle européenne à nous détourner de la Russie, mais cela été trop long et cela nous a coûté cher. De plus, le cap qui a été fixé par la Commission européenne, c'est la diversification des fournisseurs et, surtout, le pacte vert pour l'Europe, c'est-à-dire que le développement d'énergies renouvelables reste la grande question qui se pose aux pays européens. Ils n'ont pas tous la même réponse à cet égard, c'est-à-dire la place du nucléaire dans cette équation énergétique.
    Les énergies renouvelables pourront-elles combler la totalité de la demande énergétique ou devrez-vous avoir recours à l'importation, de toute façon?
    Pour l'instant, il est évident que les énergies renouvelables ne peuvent pas couvrir l'ensemble des pays. C'est pour cela qu'il y a la question très importante du nucléaire. Par ailleurs, il est évident aussi que les importations vont permettre de combler ce besoin et qu'elles seront nécessaires. On ne deviendra pas indépendant énergétiquement au cours des années qui viennent. Par contre, il ne faut plus reproduire la même erreur, la même faillite stratégique que dans les années précédentes, c'est-à-dire ne plus dépendre quasi exclusivement d'un régime autoritaire.
    Aujourd'hui, si nous avons besoin même du gaz d'Azerbaïdjan, il ne faut pas se rendre dépendant d'un régime qui ne partage pas les mêmes principes et les mêmes valeurs que l'Union européenne, c'est certain.
     On comprend que l'Europe veuille réduire quand même sa dépendance aux énergies fossiles, mais l'utilisation des énergies fossiles va se poursuivre encore quelques années. D'après vous, pendant combien d'années l'Europe aura-t-elle besoin des énergies fossiles? Est-ce 10, 15, 20 ou 30 ans, voire plus?
(0900)
    D'après les besoins, ce serait davantage, mais, ce qui est certain, c'est que ces besoins doivent être réduits. En fait, la réduction sera progressive et nous en aurons de moins en moins besoin, mais nous en avons encore besoin pour le moment.
    Il vous reste 30 secondes, monsieur Gourde.
    La mise en place d'une commission internationale sur la sécurité énergétique pour appuyer la transition des énergies fossiles vers les énergies renouvelables serait-elle intéressante? Les pays doivent se parler.
    Ce serait très intéressant d'en discuter, étant donné que la priorité transpartisane de l'Union européenne, évidemment, est la transformation écologique et la transition vers des énergies carboneutres.
    Merci, monsieur Glucksmann. Pour votre information, je vais nommer le parti de chaque personne qui vous posera une question. Le prochain est M. Fergus, du Parti libéral.

[Traduction]

     Monsieur Fergus, vous avez la parole.

[Français]

    Bonjour, monsieur Glucksmann. Je vous remercie beaucoup de votre présence aujourd'hui. Nous vous sommes énormément reconnaissants de nous faire part de vos observations et de votre expertise dans ce domaine.
    Dans votre introduction, vous avez dit que certains pays, comme la Chine et, plus particulièrement, la Russie, tentaient de semer la zizanie dans les démocraties.
    Plusieurs témoins qui ont comparu devant le Comité ont dit que la Russie et la Chine menaient des activités, surtout dans les médias sociaux, depuis un bon bout de temps.
     Quelles sont vos observations à ce sujet, avec le recul et selon vos enquêtes? Quand pensez-vous que la Russie et la Chine ont commencé leurs activités de cyberpropagande ou de cyberterrorisme?
    Je vous remercie de la question, monsieur Fergus.
     Selon nous, la date de bascule a été 2007, lorsque des cyberattaques massives ont été menées contre l'Estonie. L'Estonie a été un des premiers pays européens à basculer vers le tout-numérique pour son gouvernement. En 2007, des pirates informatiques russes se sont coordonnés et ont attaqué les institutions estoniennes, rendant le pays quasi ingouvernable pendant quelque temps. Selon nous, cette date a marqué le début de la guerre hybride et des attaques virtuelles massives.
    Ensuite, dans les réseaux sociaux, il y a eu une évolution progressive de la propagande russe. En 2012 ou en 2013, avec la création de l'Internet Research Agency, à Saint‑Pétersbourg, c'est devenu massif et, surtout, structuré et pensé de manière systématique. Ce sont ces deux dates qui ont marqué le basculement de la Russie dans la guerre hybride contre nos démocraties.
    J'insiste sur une chose: l'analyse de ces campagnes est fondamentale pour comprendre la situation. Quand on est un dirigeant démocrate européen, canadien ou américain, on a du mal à comprendre que des dirigeants politiques puissent avoir comme objectif non pas de défendre leurs intérêts au maximum, mais de semer le chaos chez l'autre. On le comprend en étudiant pragmatiquement différentes campagnes qui ont été menées.
    En France, par exemple, il y a eu des campagnes sur la question des violences policières. Des agents russes expliquaient que la police commettait des violences et s'insurgeaient contre les violences policières, tandis que les mêmes fermes à trolls de Saint‑Pétersbourg encourageaient la police à tirer dans la foule. Les deux pôles sont toujours nourris simultanément.
    La contradiction dans ce genre de campagne n'est pas un problème; c'est ce qui constitue la campagne elle-même.
     Effectivement, et on l'a constaté aussi aux États-Unis, où ils ont tenté de polariser la question de la race.
    Voilà pour la Russie. Pour ce qui est de la Chine. Vous dites que ce pays met surtout l'accent sur le cyberterrorisme, mais surtout en ce qui a trait au volet économique.
    Pouvez-vous nous en dire davantage? Quand la Chine a-t-elle commencé ses attaques de cybersécurité contre des institutions économiques?
(0905)
    Pour nous, le mouvement de la Chine est passé par une radicalisation progressive et par la mise en place, en Chine, de structures que nous avons pu découvrir. C'est vraiment Xi Jinping qui développe cette stratégie et cette pensée. La bascule, en matière de campagne de désinformation, de manipulation de l'information et de déstabilisation des réseaux sociaux, s'est faite à l'occasion de la pandémie, un moment de radicalisation dont le but n'est plus tellement de promouvoir une ligne narrative, mais de rendre ingouvernables, en particulier sur la question sanitaire, les pays européens dans lesquels on a mené les études.
    La question économique est, depuis le début, une stratégie du gouvernement chinois. En effet, ce gouvernement estime que la mondialisation permettra finalement aux grandes multinationales européennes de devenir des entreprises fondamentalement chinoises, parce que leurs intérêts seront d'abord en Chine, avant d'être en Allemagne.
    Quand vous prenez une entreprise aussi importante que Volkswagen et que vous analysez leurs chiffres de vente et de production, vous comprenez que, finalement, Volkswagen a un chiffre d'affaires bien supérieur en Chine qu'en Allemagne et que Volkswagen est dépendante du gouvernement chinois. En outre, même quand on a des scandales, comme la présence d'usines de Volkswagen dans la région ouïghoure, où le régime communiste chinois exerce un esclavage systématisé, la compagnie y est toujours présente. Volkswagen aurait économiquement maintenant intérêt à se dégager de cette région. Cependant, ce groupe automobile est l'otage du gouvernement chinois, parce que Volkswagen est l'otage du marché chinois et de l'appareil productif chinois.
    Le gouvernement chinois peut donc décider où Volkswagen va ouvrir ou fermer une usine. Ce n'est plus un choix d'acteur privé, c'est désormais un choix d'otage économique, si vous voulez, volontaire, évidemment, parce que le but est de gagner de l'argent. C'est récurrent et c'est ce qui permet la pénétration du débat européen.
    Il y a aussi la question des infrastructures stratégiques. Il s'agit vraiment d'une stratégie qui passe d'abord par des investissements chinois. À notre avis, la date clé est 2008‑2009, au moment de la crise liée à la dette dans l'Union européenne et, en Grèce, la vente du port du Pirée aux investisseurs chinois.
    Depuis, on constate à quel point c'est une stratégie qui vise à prendre progressivement le contrôle des infrastructures stratégiques.
    Merci beaucoup.
    J'aurai beaucoup d'autres questions plus tard. Je vous remercie.
    Merci, messieurs Fergus et Glucksmann.
    Monsieur Villemure, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci, monsieur Glucksmann, d'être avec nous, ce matin.
    Dans le rapport, vous avez parlé de différents types d'ingérence.
    L'objectif de notre comité est d'évaluer ou d'observer l'ingérence de la Chine sur le plan de l'intégrité de l'État. Votre rapport comprenait une section sur le financement des activités politiques provenant d'acteurs ou de donateurs étrangers.
    J'aimerais que vous puissiez nous éclairer à ce sujet.
     Merci beaucoup.
    Je suis très heureux de vous retrouver.
    La stratégie est la même pour la Russie et la Chine sous cet aspect. Le premier élément problématique pour l'intégrité de l'État est la capture des élites, et donc des réseaux. Une des stratégies de ces deux pays consiste à se transformer, par exemple, en pourvoyeurs de retraites dorées pour nos hauts dirigeants et nos hauts fonctionnaires. Cela compromet l'intégrité du processus décisionnel. Quand vous êtes au sommet d'un État et que vous devez prendre une décision, si vous avez comme perspective de retraite d'être payé par Huawei, vous ne prendrez pas de décisions hostiles à Huawei ou aux intérêts chinois dans l'ensemble.
    Nous avons vraiment exercé des pressions pour qu'on légifère contre le phénomène des portes tournantes ou de la collusion, autrement dit, avec des régimes autoritaires hostiles à nos principes et à nos intérêts. Cela suppose une chose très simple: une entreprise canadienne n'est pas l'équivalent d'une entreprise du système communiste chinois. Pourtant, sur papier, il s'agit de deux entreprises privées. Le seul problème, c'est que quand une entreprise privée chinoise atteint une certaine taille, elle n'est plus privée, en réalité. Elle dépend du Parti communiste, elle doit se soumettre à la Loi sur le renseignement national et avoir, dans son conseil d'administration, un représentant du Parti communiste. En fait, ce ne sont donc plus des acteurs privés; ce sont des acteurs d'un système étatique hostile.
    Le deuxième élément qui concerne l'intégrité de l'État est la question des liens institutionnels. Nous avons réalisé à quel point les coopérations institutionnelles, y compris celles qui sont décentralisées, permettent l'espionnage. Il y a une foule d'autres situations du même type. Cela dit, le problème se pose encore davantage pour les Australiens, par exemple, que pour les Européens.
(0910)
    Quand vous parlez de coopérations institutionnelles, parlez-vous des universités et d'institutions comme celles-là?
    Je parle des universités et des établissements scientifiques, de recherche et de développement. Nous avons réalisé l'ampleur du pillage de technologies qui a été effectué, notamment par le recrutement, tout simplement, de gens formés par nos États et qui décident de partir avec tous leurs acquis et leur travail pour les mettre au service du régime chinois.
    Avez-vous remarqué que le régime chinois finançait de manière directe ou indirecte des activités politiques, soit de tout ce qu'il y a autour du processus démocratique?
    Dans le cas de la Chine, il n'y a pas vraiment de financement direct, en tout cas, de mouvements politiques en Europe. Or c'était le cas de la Russie, qui finançait les différentes extrêmes droites européennes et l'assumait même publiquement en les recevant officiellement et en mettant ses oligarques au service de ce projet d'union des extrêmes droites en Europe et de tous les mouvements qui remettaient en cause des institutions européennes.
     Dans le cas de la Chine, il n'y a pas de jeux politiques ouverts. Par contre, il y a des personnalités politiques qui sont dans l'orbite chinoise et des laboratoires d'idées ou des instituts de recherche qui participent à la vie publique et qui reçoivent des financements directs ou indirects de la Chine. La pénétration de la vie politique se fait donc plus indirectement qu'ouvertement.
    Au moment où nous nous parlons, diriez-vous que l'ingérence étrangère représente un danger important pour la démocratie canadienne?
    Encore une fois, je vous remercie de la question.
    Je suis loin d'être un expert de la question des ingérences étrangères au Canada. Cela dit, ce qui est certain, c'est qu'en Europe, c'est un danger extrême. C'est un danger existentiel. J'espère pour vous que votre démocratie est plus stable que la nôtre et qu'elle est mieux protégée. Toutefois, ce qui est certain, c'est que c'est un danger pour toutes les démocraties. Je peux vous l'affirmer même sans être un expert du Canada.
    Nous devons comprendre une chose. Pendant très longtemps, on n'a pas voulu voir qu'il existe des régimes, non pas dont les intérêts sont contradictoires aux nôtres — c'est normal puisque, même entre démocraties, il peut y avoir des intérêts contradictoires —, mais qui sont philosophiquement, idéologiquement et viscéralement hostiles aux démocraties libérales et dont le but est de nous affaiblir pour établir ce que Xi Jinping et Vladimir Poutine ont nommé ensemble un nouvel ordre international.
    Je ne vois donc pas pourquoi une démocratie aussi importante que celle du Canada serait exempte des menaces qui touchent les autres.
     Dans notre cadre de référence, ou si on peut l'appeler autrement, notre jeu de langage, nous ne sommes pas nécessairement équipés pour penser à ce chaos. Notre habitude parlementaire nous fait penser d'abord au bien commun, et non pas au chaos et à la déstabilisation.
    Or c'est la clé de tout.
    Il est très compliqué d'arriver à entrer dans leur tête. C'est tout l'effort que nous avons dû faire. Pour moi, cela a supposé un décentrage. Il faut lire les théoriciens de ces régimes, comme Vladislav Surkov, en Russie, pour comprendre que le but est le chaos et qu'il ne faut pas chercher une reproduction de nos propres schèmes.
    L'erreur des Occidentaux est souvent de penser que tout le monde raisonne comme eux. Ce n'est pas le cas.
(0915)
    Si vous pouviez nous faire des suggestions de lecture ou de documents, ce serait très utile.
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur Villemure.
    Monsieur Glucksmann, M. Villemure est un député du Bloc québécois. Je vous remercie de vos réponses.
    Le prochain intervenant est M. Green, du Nouveau Parti démocratique. Je pense qu'il va poser ses questions en anglais.

[Traduction]

Assurez-vous d'avoir l'interprétation.
    C'était une simple supposition de ma part, monsieur Green.
    Monsieur Brassard, je me dois de souligner que votre français s'améliore beaucoup.
    J'en remercie ma professeure de français, Anick Robitaille.
    Monsieur Green, vous disposez de six minutes. Allez‑y.
    Je vous remercie beaucoup.
    Merci beaucoup de témoigner aujourd'hui, monsieur Glucksmann. Je m'intéresse vivement au travail que vous effectuez dans l'Union européenne.
    Pour mettre les choses au clair, vous êtes président de la Commission spéciale sur l’ingérence étrangère dans l’ensemble des processus démocratiques de l’Union européenne, y compris la désinformation, et sur le renforcement de l’intégrité, de la transparence et de la responsabilité au Parlement européen.
    Est‑ce exact?
    Oui.
    La résolution adoptée le 9 mars 2022 indique que l'Union européenne doit se doter d'une stratégie coordonnée contre l'ingérence étrangère, laquelle devrait notamment englober l'« ingérence d’acteurs étrangers par le recrutement de personnalités haut placées ».
    Pouvez-vous expliquer pourquoi une stratégie contre l'ingérence étrangère devrait s'intéresser au recrutement des personnalités haut placées?
    Nous avons constaté que parmi les éléments essentiels de l'ingérence étrangère figure la transformation de nos élites, nos élites politiques, bien entendu, mais aussi nos élites économiques et culturelles, en une sorte de supermarché où des acteurs étrangers peuvent arriver avec leurs grosses compagnies et offrir aux élites de l'argent pour travailler pour eux. Les élites travaillent pour ces grosses compagnies, que ce soit Gazprom ou Huawei, avec leurs réseaux, leurs relations et leurs connaissances des affaires internes, et cela permet aux acteurs étrangers d'avoir énormément d'influence sur les décisions politiques du pays.
    En fait, l'ingérence étrangère n'a pas vraiment été découverte en Occident. L'Occident a en quelque sorte créé le problème avec le colonialisme, car c'est une tactique qu'il a employée pendant longtemps dans d'autres pays. Je pense que nous observons cette stratégie à l'œuvre dans nos pays, et c'est probablement ce qui nous trouble.
    Ne conviendriez-vous pas que l'Occident s'est également adonné à ces tactiques pendant des siècles?
    Étant Français, je ne peux que confirmer que le colonialisme s'est appuyé sur ce genre de stratégie. C'est le...
    Dans le contexte canadien, nous avons beaucoup entendu parler des Instituts Confucius pendant un très court laps de temps.
    Est‑il question quelque part dans votre étude de la manière dont nos établissements universitaires ont peut-être été investis ou influencés par des groupes de réflexion financés par des acteurs étrangers?
    Oui, bien entendu, nous avons observé le phénomène.
    Dans vos études, vous êtes-vous déjà intéressés à d'autres pays que la Russie et la Chine, des pays qui peuvent par ailleurs être considérés comme des alliés et qui s'adonneraient à des formes semblables d'ingérence étrangère? Cela a‑t‑il fait partie de votre examen de la responsabilité et de la transparence?
    Oui. Nous avons étudié les États-Unis, par exemple, si c'est là votre question.
    Je suis curieux de savoir quels sont les autres pays dont vous avez peut-être constaté qu'ils s'adonnent à l'ingérence étrangère au sein de l'Union européenne.
    Essentiellement, nous avions pour mandat d'examiner toute forme d'ingérence, d'où qu'elle vienne. Nous avons donc observé de l'ingérence américaine, bien entendu, qu'il s'agisse d'opérations d'influence ou de surveillance.
    Cependant, nous avons également établi une différence entre les objectifs poursuivis par les diasporas afin de favoriser leurs propres intérêts — je donnerai ici l'exemple du Qatar — et les objectifs visant à déstabiliser les institutions, comme dans le cas de la Russie.
     Bien entendu. Avez-vous observé ces phénomènes avec d'autres pays? Par exemple, quelques informations empiriques ont circulé au Canada au sujet de l'Inde. Nous avons parlé des États-Unis. À votre avis, quelle différence existe‑t‑il entre l'ingérence étrangère et l'influence étrangère?
    J'ai entendu dire que c'est de l'influence dans ce cas de l'Occident ou de nos alliés, et de l'ingérence dans celui des pays non alignés. Êtes-vous d'accord avec cette analyse ou voyez-vous les choses autrement?
(0920)
    Je vous donnerai deux exemples tirés de l'histoire américaine pour que vous compreniez ce qui est, selon moi, la différence entre l'influence et l'ingérence.
    Quand les Américains se sont efforcés de provoquer un coup d'État au Chili, c'était de l'ingérence directe, car leur objectif consistait à déstabiliser un gouvernement élu au Chili en 1973, il me semble. Quand les Américains financent divers groupes de réflexion, que ce soit en France ou en Allemagne, c'est de l'influence, puisque l'objectif ne vise pas à déstabiliser le processus démocratique. Il ne s'agit absolument pas de manœuvres secrètes et cela ne menace pas nos lois.
    D'accord. Ces réponses sont utiles. Je vous remercie.
    Par simple curiosité, le Canada a‑t‑il déjà fait surface dans vos études?
    Non.
    C'est bon à savoir.
    Une note d'information du Service de recherche du Parlement européen énonce que « le Registre de transparence [de l'Union européenne] représente le seul mécanisme de transparence parmi les nations de l'OCDE exigeant des groupes de réflexion, centres de recherche et établissements d'enseignement inscrits qu'ils divulguent leur financement. »
    Pouvez-vous décrire l'objectif justifiant de veiller à la divulgation du financement de ces organisations, et recommanderiez-vous d'appliquer une telle mesure au Canada?
    Tout d'abord, je dois dire que notre système n'est pas parfait parce qu'il n'est pas toujours bien mis en œuvre, mais l'idée le sous-tendant ressort manifestement de... Je ne sais pas si vous avez entendu parler du scandale dit du Qatargate, mais ma commission est aussi responsable de faire le suivi à ce sujet. Il faut penser aux ONG. Par exemple, une ONG s'appelait Fight Impunity, un nom qui inspire confiance, en principe. Il est parfait: tout le monde veut lutter contre l'impunité. Ses représentants sont venus nous voir et ont démontré une forte hostilité envers les Émirats arabes unis. L'organisation avait peut-être de bonnes raisons d'être aussi hostile envers cet État, mais le fait est que son financement venait du Qatar. Si la source du financement n'est pas divulguée, les autres parties prenantes ne peuvent bien entendu pas saisir pourquoi un organisme se concentre tant sur certains enjeux.
    Merci, monsieur Green.

[Français]

     Merci, monsieur Glucksmann.

[Traduction]

    Voilà qui met fin à notre première série de questions. Nous allons entamer la seconde.
    Monsieur Kurek, c'est vous qui lancez le bal, pendant cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie notre témoin. J'accorde beaucoup d'importance à vos propos.
    J'aimerais poursuivre sur le thème qu'a abordé M. Gourde au sujet de l'énergie, parce qu'il ne fait aucun doute que les dernières années ont été tumultueuses dans ce secteur. Comme je viens d'une région de notre pays qui produit de l'énergie, je suis la situation de près. J'ai trouvé très intéressants vos propos sur l'expérience européenne et sur l'ingérence liée précisément à l'énergie russe. Vous avez mentionné Gazprom et d'autres parties prenantes. L'expérience du Canada est bien entendu différente parce que nous n'importons d'énergie, à tout le moins pas d'énergie brute. Des produits raffinés sont importés au Canada.
    Je me demande si vous pourriez approfondir ce sujet et, en particulier, l'incidence de ce type d'ingérence — d'influence malveillante — pour déstabiliser les régimes, surtout à un moment où la dynamique de la sphère géopolitique se mêle à un conflit en cours.
    Vous savez, on dit souvent qu'on peut mener des guerres pour des pipelines. En fait, Vladimir Poutine a mené une guerre en se servant de pipelines. Les tuyaux ont servi à une guerre hybride contre les démocraties européennes.
    Je vais expliquer la stratégie entourant Nord Stream, notamment, qui est liée à la mainmise de l'élite. Gerhard Schröder était le chancelier de l'Allemagne démocratique. De cinq à dix jours avant sa défaite électorale en 2005, il a signé une entente pour le projet Nord Stream avec Vladimir Poutine. Quelques semaines après sa défaite planifiée — que tout le monde prévoyait —, il est allé travailler pour Gazprom. Par conséquent, la dépendance de l'Europe au gaz naturel russe n'a fait qu'augmenter jusqu'au 24 février 2022.
    Au début de la guerre, nous avons découvert non seulement que l'Allemagne avait bâti Nord Stream 1 et 2, mais aussi qu'elle avait vendu ses provisions à Gazprom. Gazprom a écoulé ces provisions — ces réserves —, rendant ainsi impossible un embargo des importations de combustible fossile russe. Pendant les six premiers mois de la guerre, l'Union européenne a financé le régime russe à hauteur de 800 millions d'euros par jour en raison de ces politiques.
(0925)
    Je vous remercie de cette réponse, qui est très utile dans le contexte plus général.
    J'aimerais maintenant revenir au rôle du Canada en tant qu'allié de l'Europe et nation démocratique. Certaines interventions activistes m'ont pour le moins frustré: ces actions ont limité la capacité du Canada d'être un partenaire fiable pour fournir de l'énergie. Je me demande si vous avez déjà constaté que des efforts d'états étrangers hostiles ont favorisé et manipulé les questions géopolitiques entourant les importations et les exportations, en plus d'empêcher des alliés — comme le Canada pourrait l'être pour l'Europe — de stopper cette dépendance.
    Oui, je comprends votre perspective, mais nous n'avons pas observé cette situation. Nous avons fait des vérifications, soit dit en passant, et nous n'avons trouvé aucune preuve que des intérêts russes influençaient les mouvements ou les doutes quant aux exportations canadiennes.
    Au début de mon intervention, nous avons parlé de la Russie. Dans la trentaine de secondes qu'il me reste, j'aimerais savoir si vous pourriez nous entretenir de la Chine et nous indiquer s'il y a des parallèles à faire avec l'influence qu'elle exerce; je parle plus précisément du régime communiste de la Chine.
    Oui. La Chine suit les mêmes conventions que la Russie. Quiconque doute de l'existence de l'alliance entre la Chine et la Russie devrait simplement regarder les faits. La Chine applique les mêmes stratégies, à l'exception près que la dépendance qu'elle nourrit ne se limite pas à l'énergie: elle alimente une dépendance totale. Même l'entente sur les céréales, que nous avons raison de mettre en œuvre à l'Union européenne — où beaucoup de subventions sont versées —, comprend des subventions directes à l'appareil de production chinois. Qui, selon vous, construit nos panneaux solaires, par exemple?
    Merci, messieurs Kurek et Glucksmann.
    Monsieur Bains, vous disposez de cinq minutes. Allez‑y.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Glucksmann, je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui et de nous faire part de ce qui se passe à l'Union européenne ainsi que des complexités entourant l'influence, l'ingérence et les différences.
    Nous savons que la Russie est depuis des décennies un acteur incontournable en matière d'ingérence étrangère. Vous avez été conseiller de l'ancien président de la Géorgie, Mikheil Saakashvili. Qu'est‑ce que la Géorgie peut nous apprendre quant aux actions d'ingérence étrangère de la Russie?
    Je vous remercie de mentionner le nom de M. Saakashvili, car, en ce moment même, il est détenu en prison par un pantin russe, l'oligarque géorgien Bidzina Ivanishvili. L'argent représente la première méthode d'ingérence de la Russie. C'est une méthode directe, puis il y en a d'autres. Bien entendu, la Géorgie a subi une invasion militaire et le démembrement de sa nation, 20 % des territoires étant occupés. Le pays a aussi connu la manipulation de l'information et des campagnes.
    Par exemple, les droits des personnes LGBTI n'avaient jamais fait l'objet de controverses dans le débat politique en Géorgie. Puis, du jour au lendemain, des mouvements contre la fierté gaie, notamment, se sont soulevés partout au pays afin de scander que l'homosexualité menaçait directement l'identité géorgienne et que, lorsque Mikheil Saakashvili était au pouvoir, il était un dirigeant pro-occidental semant la décadence au pays. Des milliers et des milliers de personnes véhiculaient ce message. Lorsque nous avons analysé la source de cette propagande, nous avons constaté qu'une opération financée par la Russie était à son origine.
(0930)
    Je vais maintenant aborder la mésinformation et la désinformation dont nous avons beaucoup entendu parler. Je crois que la façon dont elles sont utilisées de nos jours pour perpétrer des attaques représente la plus grande menace contre la démocratie.
    Vous avez parlé de l'Internet Research Agency de la Russie. Qu'a fait l'Union européenne pour la contrer?
    Il est à vrai dire très difficile de lutter contre cette propagande sans violer la liberté d'expression. Si vous croyez que la terre est plate, ce n'est pas un problème pour moi en tant que législateur. Or, si un gouvernement étranger lance des campagnes menant des millions de mes citoyens à croire que la terre est plate, cette propagande devient alors un problème pour moi. Ce n'est pas contre la diffusion d'opinions étranges que nous devons agir; nous devons plutôt empêcher les acteurs étrangers d'utiliser ces méthodes et de les financer.
    Nous avons donc d'abord imposé de la réglementation aux plateformes, ce qui est le plus crucial. Je suis souvent critique à l'égard de l'Union européenne, mais je suis très fier de la législation sur les services numériques, qui vise les plateformes.
    L'an dernier, la ville d'Ottawa a subi une occupation illégale par des manifestants. Selon le National Observer, le radiodiffuseur russe contrôlé par l'état — Russia Today — a diffusé de la désinformation par le biais de serveurs mandataires et d'applications de messagerie de médias sociaux comme Telegram. Les partisans qui appuyaient véritablement le convoi utilisaient communément ces outils de communication.
    Selon vous, comment nos démocraties doivent-elles lutter contre ces efforts visant à fausser les perceptions de la population? Dans l'une de vos réponses, je crois que vous avez mentionné que la stratégie employée consiste simplement à verser des fonds pour diffuser un message qui détournera d'une certaine façon l'attention et qui créera ce type de mouvement. Comment pouvons-nous contrecarrer ces efforts?
    Je suis désolé. Je n'ai pas entendu le début de votre question, mais un élément est que... Je ne connais pas les lois canadiennes, mais je sais que Russia Today est visé par des sanctions en Europe, que tous ses comptes bancaires sont gelés et que l'organisation ne peut plus y exercer ses activités. Nous constatons néanmoins que ces mesures ne parviennent pas du tout à bloquer la communication de la propagande russe.
    Il nous faut cerner les réseaux et les sanctionner, tout en ayant recours, simultanément et très rapidement, à des exemples de luttes cohérentes et victorieuses contre la désinformation et la manipulation de l'information. C'est avec une grande fierté que j'ai présidé la toute première délégation officielle du Parlement européen à Taipei. Je vous encourage à coopérer avec les autorités taiwanaises et à vous inspirer de ce qu'elles font pour permettre l'épanouissement continu de leur démocratie malgré l'attaque constante du Parti communiste chinois à leur endroit.
    Merci.

[Français]

    Merci, messieurs Bains et Glucksmann.
    Monsieur Villemure, vous avez deux minutes et demie pour poser vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je tenterai de faire le mieux possible au cours des deux minutes trente secondes qui me sont imparties.
    Monsieur Glucksmann, j'aimerais savoir si vous avez remarqué si l'arrivée de l'intelligence artificielle a eu un impact sur le type, la façon ou la portée de l'ingérence étrangère.
    Pas encore dans sa pleine mesure, mais cela va arriver extrêmement vite.
    Par exemple, je suis allé au Centre d'excellence de l'OTAN de Riga, où j'ai pu voir les progrès faits par l'intelligence artificielle. Ce sera l'immense problème de demain.
    Pourriez-vous nous parler de ce que vous avez vu à ce centre?
    C'est la capacité à construire des campagnes d'une complexité absolument incroyable, en deux minutes, et sans avoir à employer le moindre salarié.
    J'ai vu ce que cela pouvait produire. Je suis aujourd'hui encore pris de vertige devant notre impréparation à cette capacité destructrice de l'intelligence artificielle.
    Croyez-vous qu'une visite du Comité au Centre d'excellence de l'OTAN serait une bonne idée?
    Effectivement, je pense que ce serait une excellente idée de vous rendre à Riga.
(0935)
    D'accord.
    Qu'est-ce qui pourrait nous permettre de mieux comprendre l'ingérence étrangère? J'entends le chaos, la référence qui n'est pas la nôtre et la manière de penser qui n'est pas la nôtre.
    Qu'est-ce que mes collègues et moi-même pourrions faire afin de mieux saisir l'ensemble et mieux comprendre ce concept qui nous est tout de même étranger?
     Je vais peut-être m'en sortir par une pirouette.
    Comme conseil, il faut lire Les Démons, de Dostoïevski, particulièrement quand Stavroguine dit: « Nous allumerons des incendies! Nous répandrons des légendes... »
    Il faut comprendre que c'est le titre de ces opérations d'ingérence. Le mélange entre une discussion avec des spécialistes de l'intelligence artificielle et une bonne lecture de Dostoïevski permet de comprendre tout de suite comment ces régimes réfléchissent.
    Merci beaucoup.
    L'intellectuel en moi est très heureux d'entendre de tels propos.
    Merci, monsieur Villemure.

[Traduction]

    Nous allons maintenant entendre M. Green pendant deux minutes et demie.
    Allez‑y, monsieur Green.
    Merci.
    Je suis encore très intéressé par ce Registre de transparence, même si le sujet était toujours nébuleux à la fin de ma dernière intervention.
    Monsieur Glucksmann, recommandez-vous que le Canada mette lui aussi en œuvre un registre sur la transparence?
    Il ne revient pas à moi de déterminer ce que vous, en tant que décideurs d'un pays souverain, devriez faire.
    Il ne s'agirait pas d'ingérence étrangère. Ce comité doit formuler des recommandations à ce sujet.
    Je crois effectivement que les registres de transparence sont utiles pour les démocraties, surtout pour les démocraties parlementaires.
    Merci.
    Le Registre de transparence de l'Union européenne est également un des rares registres exigeant des entités inscrites qu'elles divulguent de l'information sur les stratégies indirectes de lobbying. Pouvez-vous décrire quelle forme cette divulgation prend concrètement?
    À vrai dire, je travaille en ce moment au fait que cette exigence n'est pas très efficace. Si vous le désirez, je vous enverrai le fruit de nos discussions qui ont lieu en ce moment. Nous nous attelons à la reformuler, à la clarifier et à accroître son efficacité. Je serai heureux de vous faire part des conclusions de notre discussion...
    Ce serait utile. Merci.
    ... non pas à titre de recommandation, bien entendu, mais à titre informatif seulement.
    Non, ce comité a besoin d'entendre des recommandations afin de les inclure dans les constats. Je peux dire ce que bon me semble, mais il sera beaucoup plus percutant que l'information vienne d'un témoin.
    La résolution adoptée le 9 mars 2022 « considère que les systèmes de classement addictifs et basés sur l’engagement constituent une menace systémique pour notre société » par rapport à l'ingérence étrangère sur les plateformes en ligne. Pouvez-vous expliquer cette citation?
    Je suis désolé. Je n'ai pas entendu la question.
    Une résolution de l'Union européenne datée du 9 mars « considère que les systèmes de classement addictifs et basés sur l’engagement constituent une menace systémique pour notre société » par rapport à l'ingérence étrangère sur les plateformes en ligne. On peut présumer qu'il est question ici des algorithmes. Pouvez-vous expliquer cette citation?
    Oui. Nous avons constaté, grâce à des discussions également avec des scientifiques, que la structure des algorithmes favorise la promotion des opinions addictives, c'est-à-dire celles qui sont notamment les plus radicales ou extrêmes.
    Je m'explique. Lorsque l'émoticône de la colère sur Facebook a une pondération cinq fois plus importante que l'émoticône pour aimer une publication, l'algorithme favorise ce type de polarisation. Le fait est que nous devons réfléchir à un aspect aujourd'hui. Notre agora — notre agora publique, comme on l'appelle — est dans la sphère de la propriété privée. Le simple fait de penser à cette réalité devrait tous nous donner le vertige.
    C'est la raison pour laquelle je voulais mentionner la législation sur les services numériques que l'Union européenne a eu le courage d'imposer, pour lutter contre le lobbying — je dois le préciser — de certaines plateformes. Le message transmis est qu'il faut examiner la sphère publique, car elle a des répercussions publiques.
    C'est important.
    Très bien. Merci, monsieur Green.
    Merci, monsieur Glucksmann.
    Monsieur Glucksmann, je dois vous poser une question. Le Comité aimerait que vous restiez parmi nous un peu plus longtemps, probablement pendant 20 minutes: les membres trouvent votre témoignage fascinant. Accepteriez-vous de rester 20 minutes supplémentaires? Avez-vous le temps?
    Oui, je resterai sans problème.
    D'accord. Cette entente convient à tous.
    Nous allons entamer la prochaine série de questions. M. Barrett, du Parti conservateur, dispose de cinq minutes.
    Allez‑y, monsieur Barrett.
(0940)
    Je vous remercie, monsieur, de vous joindre à nous aujourd'hui. Je suis ravi d'entendre vos perspectives.
    J'aimerais savoir si vous pouvez nous décrire les événements qui ont mené à la création de la Commission spéciale. Je m'intéresse surtout aux mesures de protection pour les dénonciateurs qui faisaient partie du plan proposé.
    J'aimerais aussi que vous nous parliez de la nature non partisane de l'approche adoptée. Si on se fie aux reportages médiatiques en anglais des événements de la fin de l'an dernier, dans le contexte politique canadien, un homologue canadien dans une situation similaire se serait retrouvé dans une position politique difficile pour proposer et promouvoir les types de réformes dont vous nous entretenez aujourd'hui. Si je comprends bien, des personnes partageant vos vues idéologiques étaient au cœur de certains de ces scandales. J'ai lu que ce contexte a mené à la création des réformes. Vous avez toutefois persisté et, à vrai dire, peut-être en dépit de ce fait ou en raison de ce fait... Je crois comprendre que vous avez insisté assez vivement pour ces réformes.
    Pouvez-vous nous parler de ce contexte?
    Oui. Je vous remercie énormément de la question. Je trouve qu'elle est importante.
    La Commission a été créée bien avant le Qatargate et le scandale. J'ai insisté pour la création de la Commission. C'est surtout après Brexit que j'ai vu la nécessité que nous créions ce type de commission. Nous y avons travaillé pendant trois ans et demi, et nous étions censés terminer notre travail lorsque le Qatargate a été dévoilé. J'ai grandement insisté, même si des personnalités — vous avez raison — liées aux sociaux-démocrates étaient impliquées.
    Je crois que, dès le début, nous avons travaillé au sein de la Commission de façon tripartisane. La protection de la démocratie supplante les différences partisanes. C'est en fait la protection du cadre qui nous permet d'avoir des désaccords. Deuxièmement, je crois qu'il est de notre devoir de lutter contre la corruption et contre l'ingérence étrangère, y compris dans nos familles ou groupes politiques respectifs.
    On m'a incité à diriger la Commission parce que tous mes collègues, y compris ceux d'autres groupes politiques, avaient confiance que je travaillerais à réaliser des réformes et à obtenir la vérité, peu importe le drapeau des personnes trahissant la démocratie.
    Dans le scandale du Qatargate, les eurodéputés en question sont accusés d'avoir promu les intérêts d'un État étranger. Est‑ce exact?
    Oui. Les accusations vont même plus loin et impliquent une organisation criminelle.
    Qu'est‑ce qui a éveillé les soupçons quant à ses politiciens et leurs activités? Était-ce le cadre existant? Les rapports que j'ai lus à ce sujet décrivent des activités peu complexes. Elles sont toutefois passées inaperçues pendant un bon moment. Qu'est-ce qui a mené à leur détection ainsi qu'aux accusations, aux arrestations et aux poursuites?
    Tout d'abord, c'est l'enquête des services secrets belges qui a permis de révéler l'affaire au grand jour. Les enquêteurs ont suivi les faits et gestes d'un seul homme, M. Panzeri, un ancien représentant au Parlement européen. Ils ont ensuite établi des liens entre le suspect et des eurodéputés en fonction, des syndicats et des employés d'ONG. C'est l'organisation des services secrets, et non pas nous, qui a découvert le pot aux roses.
(0945)
    Je vous remercie grandement de votre réponse. Mon temps est écoulé.
    Je vous suis reconnaissant de rester parmi nous pour quelques questions supplémentaires. Merci.
    Nous aurons une autre occasion.
    Madame Hepfner, vous disposez de cinq minutes. Veuillez débuter.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je voulais saluer et remercier notre témoin en français. Je vais améliorer mon français, mais, pour le moment, comme je suis toujours plus à l'aise en anglais je vais poursuivre dans cette langue.

[Traduction]

    En tant qu'ancienne journaliste, je suis très frustrée de voir la quantité d'informations trompeuses qui circulent dans le monde. En même temps, nous assistons à une diminution du nombre de salles de rédaction.
    Dernièrement, quelque chose m'a particulièrement frappée sur Twitter, la plateforme américaine de médias sociaux. Nous avons vu des médias d'information comme la NPR aux États-Unis, la BBC et, ici au Canada, CBC/Radio-Canada être qualifiés de médias financés par l'État ou par le gouvernement. Comme par hasard, cela se produit au moment même où des organes de presse et des comptes gouvernementaux russes sont autorisés à revenir sur cette plateforme.
     J'ai ici un article publié ce matin dans le Kingston Whig Standard, qui explique comment la Russie utilise Twitter pour s'attaquer à la démocratie. On y cite un ancien ministre conservateur qui a été diplomate canadien et qui est un spécialiste de la Russie. Il qualifie de « scandaleuse » une telle désignation des radiodiffuseurs publics, car cela laisse entendre que ces organismes sont sous le contrôle éditorial du gouvernement, comme c'est le cas, par exemple, de la télévision russe.
    Je me demande si vous êtes d'accord là‑dessus. Que pensez-vous d'une telle désignation des radiodiffuseurs publics et des médias?
    Je vous remercie beaucoup de votre question, madame Hepfner.
    Je dois dire que, ces derniers temps, Twitter nous inquiète de plus en plus. M. Musk est quelqu'un qui joue avec les règles et qui a des intentions cachées. Ce qui nous pose problème, ce n'est pas le fait que M. Musk a des intentions cachées, mais bien le fait que nous devons veiller à ce que ces intentions cachées n'entrent pas en conflit avec notre sécurité nationale et la décence de nos débats publics.
    Pour répondre à votre question, il s'agit d'une erreur typique commise depuis très longtemps par les dirigeants européens. Il y a une énorme différence entre votre radio publique, notre radio publique et Russia Today. Ne pas reconnaître ce fait et qualifier toutes ces entités de médias parrainés par l'État ou peu importe, c'est en fait gommer la vérité à propos de Russia Today. Russia Today est un outil de propagande. Ce n'est pas un média. La NPR, par exemple, ou la BBC sont des médias. On peut être en désaccord avec leurs renseignements, mais elles ont un code déontologique. Elles ont un conseil d'administration. Elles sont indépendantes. Elles ne se situent pas au même niveau.
    Je vous remercie.
     En Europe, vous avez décidé que les tactiques en matière d'ingérence étrangère peuvent prendre de nombreuses formes, telles que la désinformation, la suppression de l'information, la manipulation de plateformes de médias sociaux, ainsi que les menaces et le harcèlement à l'encontre de journalistes, de chercheurs et de personnalités politiques.
    Diriez-vous que cette désignation des médias actuels pourrait être considérée comme de l'ingérence étrangère?
    Je ne suis pas sûr que je qualifierais cela d'ingérence étrangère. Je parlerais plutôt d'« idiotie utile », qui facilite peut-être l'ingérence étrangère.
    Voilà qui est juste.
    Si un politicien canadien demandait activement à un milliardaire américain d'accuser un organe de presse canadien d'être financé par le gouvernement, que diriez-vous de cela?
    Je ne veux pas m'immiscer dans le débat canadien. Je ne suis pas au courant. Cependant, je me contenterai de répéter ce que j'ai dit: nos radios et nos télévisions publiques sont des médias. Russia Today est un outil de propagande engagé dans une guerre. Par conséquent, si on ne voit pas la différence entre les deux, il y a là un vrai problème.
(0950)
    Je vous remercie.
    Je dois dire que j'ai tendu l'oreille lorsque vous avez dit que l'une des meilleures choses que votre Parlement ait faites, c'était d'imposer de la réglementation aux plateformes. Sachez que nous faisons la même chose ici au Canada grâce à quelques mesures législatives sur lesquelles j'ai eu la chance de travailler dans le cadre de mes fonctions au comité du patrimoine. Pensez-vous qu'il y ait...
    Mon temps est‑il écoulé? D'accord. J'y reviendrai tout à l'heure.
    Je vous remercie.
     Je suis désolé.
    Cela met fin à cette série de questions. Nous vous sommes reconnaissants, monsieur Glucksmann, de rester parmi nous.
    Nous aurons deux tours de cinq minutes, un pour les conservateurs et un pour les libéraux, puis deux minutes et demie pour le Bloc québécois et le NPD.

[Français]

     Monsieur Gourde, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à souligner l'expertise de notre invité aujourd'hui. Nous en sommes ravis.
    L'ingérence étrangère dans nos démocraties a sûrement un but, et il est très intéressant de considérer tous les facteurs géopolitiques qui expliquent pourquoi cette influence est importante pour des pays comme la Russie et la Chine.
    Vous en avez parlé un peu dans votre présentation, au début. Leur but initial est-il de faire augmenter le prix des ressources énergétiques ou d'en vendre davantage? Vous êtes sûrement au courant de quelque chose que nous devrions savoir.
    Dans le cadre de nos recherches, j'ai lu un éditorial russe sur Gazprom où on disait que l'argent n'était pas le seul motif.
    Le but n'est donc pas simplement de faire augmenter le prix, la consommation et les exportations de ressources énergétiques, c'est d'en rendre d'autres pays dépendants. C'est cela, l'enjeu. Le but est géopolitique, idéologique et politique. Ce n'est pas simplement une question d'affaires. C'est ce qu'on a découvert.
    À de multiples reprises, d'ailleurs, ils étaient prêts à sacrifier leurs intérêts pour rendre d'autres pays plus dépendants de leurs ressources, quitte à perdre de l'argent.
    Présentement, avec la guerre en Ukraine, les Russes perdent beaucoup plus que de l'argent. Ils perdent leur jeunesse. Croyez-vous que ce soit dans le même but?
    Depuis le début, le régime de Vladimir Poutine se voit en guerre contre l'Occident, et non contre l'Ukraine, la Géorgie, la Syrie ou la Tchétchénie. Depuis le début, l'ennemi désigné, c'est l'Occident. Il est donc prêt, pour cela, à subir beaucoup de pertes.
    On voit que cela a des répercussions très fortes en Europe. Ici, au Canada, nous en voyons surtout sur le prix de l'énergie, mais nous les sentons moins physiquement. Si cela dégénère, pensez-vous que le Canada pourrait être attaqué à sa frontière nord, puisqu'il y a beaucoup de ressources dans le Nord?
    Pour l'instant, la menace d'une guerre militaire réelle est limitée pour une raison très simple: la résistance ukrainienne a été une grande surprise pour les Russes, tout comme pour les Américains, d'ailleurs. S'il y avait un point d'accord entre les différents services de sécurité, c'était que l'Ukraine devait tomber rapidement, en cas d'invasion. La divine surprise de la résistance du peuple ukrainien nous protège nous, en Europe, et vous, de manière réelle, pour l'instant. Ce sont les Ukrainiens qui meurent. Ils meurent pour défendre l'Ukraine, évidemment, mais, au-delà de cela, ils meurent pour défendre l'ensemble des démocraties libérales.
    Vous avez sûrement su qu'il y a eu de l'ingérence chinoise lors des dernières élections au Canada.
    Quel message avez-vous pour les législateurs canadiens? Devrions-nous considérer cela comme une grande préoccupation pour l'avenir et nous attendre à ce qu'il y ait plus d'ingérence dans les prochaines élections?
    Notre principale mission, en tant que législateurs, est de permettre aux démocraties que nous avons reçues en héritage d'être transmises dans les mêmes conditions de sécurité que nous les avons reçues. Nous devons donc adapter en permanence nos législations pour protéger nos démocraties contre les ingérences. Celles-ci peuvent prendre différentes formes, et ces formes évoluent selon les époques.
    Il est donc extrêmement important de faire votre travail, effectivement. C'est pour cela que votre comité est une bonne chose, je suppose, pour la démocratie canadienne.
    Croyez-vous que, en tant que législateurs canadiens, nous avons le devoir de dénoncer haut et fort l'ingérence chinoise et d'assurer une grande transparence au sujet de ce qui s'est passé au cours des deux dernières élections?
(0955)
    Il n'y a pas de démocratie sans transparence. Cela dit, loin de moi l'idée de vous donner une recommandation sur l'attitude que vous devez adopter pour défendre votre propre démocratie.
     Merci beaucoup. Je vous suis très reconnaissant de votre témoignage d'aujourd'hui. De tous les témoins que j'ai entendus durant ma carrière, vous êtes celui qui a parlé avec le plus d'expérience et de qualité. J'en suis abasourdi.
    Je vous remercie infiniment.
    Merci, monsieur Gourde.
    C'est au tour de M. Fergus de prendre la parole pour cinq minutes. Je vais ensuite donner la parole à M. Villemure pour deux autres minutes et demie, ce qui fera un total de cinq minutes pour lui, puis ce sera au tour de M. Green.
    Monsieur Glucksmann, cela vous convient-il que nous vous retenions pendant 15 autres minutes?
    Oui. Je serai en retard à mon prochain rendez-vous, mais vous êtes plus importants.
    D'accord. Merci beaucoup.

[Traduction]

    Monsieur Fergus, vous disposez de cinq minutes. Je serai strict par rapport au temps. Allez‑y, s'il vous plaît.

[Français]

    Je vous suis reconnaissant de votre générosité, monsieur Glucksmann.
    Monsieur Glucksmann, quand j'ai fait une petite recherche sur les procédures du Parlement européen, j'ai vu qu'il examine des documents classés secrets et très secrets.
    Pouvez-vous nous parler des protocoles mis en place par votre commission pour lui permettre de revoir des documents classés secrets ou très secrets?
    En fait, nous tenons différents types de réunions: les réunions publiques, les réunions à huis clos et les réunions qui supposent l'habilitation au secret. Elles supposent trois types d'accès à l'information. Nos travaux ne sont donc pas tous publics. C'est une évidence.
    D'ailleurs, je dois vous dire que nous aussi avons eu à nous pencher sur le Parlement européen lui-même, puisque nous nous sommes rendu compte que des agents russes suspectés étaient présents lors des réunions à huis clos, pas dans notre commission, mais dans la commission Défense. Toutes ces règles n'ont pas empêché la pénétration de nos travaux.
    Nous avons ici un Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement. Il est composé de parlementaires dont le passé a été bien vérifié et qui s'engagent à revoir n'importe quel document très secret. Toutefois, il y a des limites à ce qu'ils peuvent dévoiler de ces documents par la suite; ils produisent un rapport ultra-secret et un autre, qui est public.
    Croyez-vous que c'est une bonne façon de faire? Est-elle semblable à la vôtre, qui vous permet de revoir des documents que vous pouvez dévoiler et d'autres que vous ne pouvez pas?
    Bien sûr, il y a des documents auxquels on peut avoir accès qui ne doivent pas être rendus publics. Le problème que nous avons chez nous, c'est que, comme vous le savez, l'Union européenne est composée de 27 pays. Les habilitations ne sont pas générées par l'Union européenne, mais plutôt par le pays membre duquel on vient. Cela peut créer des problèmes, chez nous.
    Si j'étais vous, je ne prendrais pas nécessairement exemple sur nos institutions, même si j'ai un respect immense pour celles-ci. À mon avis, avez atteint un degré de cohérence qui doit sûrement être supérieur au nôtre. Nous sommes encore des institutions jeunes. Cela représente à la fois une force, puisque nous sommes capables de les faire évoluer rapidement, mais aussi une faiblesse pour beaucoup d'autres questions.
    Oh, pour une fois, nous vous devançons!
    Des voix: Oh, oh!
    L’hon. Greg Fergus: Il me reste une minute et demie. J'aimerais revenir sur ce que font vraiment la Chine, la Russie, l'Iran et d'autres pays qui veulent semer la zizanie dans les démocraties. Croyez-vous que votre commission spéciale pourrait se doter d'un comité qui pourrait dépasser le huis clos? Serait-il profitable pour elle de se doter d'un comité des parlementaires, comme celui que nous avons au Canada, qui serait chargé d'examiner des documents très secrets?
(1000)
     Ma réponse, très franchement, est oui. En outre, j'ai souvent éprouvé la frustration d'un parlementaire européen quand j'échangeais avec des collègues du Sénat américain, par exemple, et que je découvrais l'importance de leur pouvoir d'enquête.
    Nous n'avons pas cela chez nous. Notre commission spéciale inclut un secrétariat que je trouve formidable, mais nous n’avons ni le pouvoir d'obliger la déclassification ni le pouvoir d'enquêter.
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur Fergus.
    Monsieur Villemure, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Je suis ravi d'avoir droit à cinq minutes plutôt qu'à deux minutes et demie.
    Monsieur Glucksmann, dans le contexte de votre étude, avez-vous observé des tentatives d'États étrangers visant à déstabiliser des services de renseignement?
    Nous avons observé des problèmes, mais nous n'avions pas accès à des informations suffisamment secrètes pour nous permettre de savoir s'il s'agissait de tentatives de déstabilisation.
    D'accord. C'était donc peut-être le cas, mais peut-être pas.
    Avez-vous vu, parmi les journalistes, des tentatives de déstabilisation ou d'ingérence? Je ne parle pas ici des médias en général, mais de certains journalistes.
    Oui, et il y en a beaucoup.
    Pourriez-vous, sans aborder de l'information secrète, évidemment, nous en dire davantage sur les effets de ces actions?
    Il y a des journalistes qui sont employés par le régime russe ou le régime chinois, notamment. Il y a aussi des manœuvres qui consistent à nourrir des journalistes de fausses informations ou de fausses primeurs. Il y a eu récemment un scandale de ce genre à BFMTV, une chaîne de télévision française.
    Les journalistes sont une cible, évidemment.
    Pour résumer l'ensemble de votre propos, le Parlement a un rôle à jouer. On devrait être en mesure, possiblement, d'établir un registre par l'entremise d'une entité indépendante qui permettrait de retracer le financement. Cela rendrait possibles, également, un enregistrement et une surveillance. Il faudrait assurer que cette entité soit indépendante du gouvernement.
    Est-ce bien l'orientation que vous avez présentée plus tôt?
    Oui. Nous sommes, en ce moment même, en train d'effectuer une réforme de nos règles. Notre commission doit arriver très vite à des compromis sur les réformes proposées. Il y a le Registre de transparence, mais aussi un registre des conflits d'intérêts. Pour nous, c'est fondamental.
    D'accord.
     Vous avez dit dans le rapport que certains partis politiques étaient soutenus par du financement étranger. Parle-t-on, par exemple, d'un des 27 États membres de l'Union européenne qui est soutenu par un autre pays de l'Union européenne ou de pays qui sont carrément hors de l'Union européenne?
    Quand nous disons « étranger », nous voulons dire que cela se situe à l'extérieur de l'Union européenne.
    D'accord.
     Est-ce arrivé fréquemment? Quels ont été les effets de cela?
    Cela s'est certainement produit beaucoup plus fréquemment que nous ne le savions. Cependant, ce que nous savons nous permet de savoir que c'est arrivé fréquemment et, en particulier, que l'acteur principal était la Russie.
    On parle donc toujours de la Russie. D'accord.
    Je vous laisse les deux dernières minutes pour que vous nous disiez, spontanément, quelles mesures vous nous suggéreriez de prendre.
    Je pense que la réglementation des plateformes est essentielle pour lutter contre la désinformation. Il faut simplement imposer une responsabilité. On ne peut pas vivre dans un monde d'irresponsabilité. Un journal, quand il diffuse une information qui pose problème, est responsable de cette information. Pourquoi les plateformes qui permettent à ces informations de devenir virales n'en seraient-elles pas responsables? C'est la première chose. On parle ici du contenant.
    En outre, je pense qu'il est fondamental de comprendre l'importance de la presse et des ONG au sein de l'écosystème démocratique. Il faut aller au-delà de la simple logique du marché et permettre à ces organes de recevoir une aide constante.
     Enfin, je pense qu'il est fondamental de comprendre que nous faisons face à des adversaires de la démocratie et que toute faiblesse sera perçue de leur part comme une invitation à l'agression. Nous devons donc avoir des régimes de sanctions. L'Union européenne s'est dotée d'une boîte à outils, mais ceux-ci ne sont pas toujours mis en application.
    Dans le cas du « Qatargate », ce scandale que nous avons mentionné déjà, des sanctions seront imposées aux gens qui se sont fait corrompre, mais quelles sanctions va-t-on imposer au régime du Qatar, qui est lié à cette corruption? Il n'y en aura aucune.
(1005)
     Ouf! C'est remarquable. Le cas du Qatar est particulièrement intéressant.
    Serait-il possible de faire connaître au Comité le genre de boîte à outils que vous avez évoquée?
    Bien sûr. Nous transmettrons aussi les résultats des négociations en cours et les recommandations sur les changements à adopter.
    Ce serait merveilleux.
    Je vous remercie infiniment pour votre témoignage.
    Je vous remercie également.
    Merci, monsieur Glucksmann et monsieur Villemure.
    Les dernières questions seront posées par M. Green.

[Traduction]

     Monsieur Green, vous disposez de cinq minutes. Allez‑y, s'il vous plaît.
     Je vous remercie.
    Monsieur Glucksmann, je pense que vous pouvez constater que votre popularité au sein de notre comité est justifiée, comme en témoignent nos réflexions sur ce que nous pouvons faire de façon constante. Je tiens d'ailleurs à souligner qu'en votre qualité de président de la commission spéciale, l'Union européenne s'est efforcée de suivre l'évolution de la nature de la menace.
     Je sais que vous avez été réticent à formuler des recommandations, mais c'est ainsi que fonctionne notre comité. Nous vous avons invité ici et nous vous demandons de dire les choses franchement.
    Quelles recommandations votre commission spéciale peut-elle faire à l'Union européenne et au Parlement européen?
    Je suis tout à fait disposé à faire des recommandations à l'Union européenne et au Parlement européen, mais j'ai hésité à vous formuler des recommandations parce que je ne connais pas assez bien la situation canadienne.
    Fort bien.
    Quel genre de recommandations pouvez-vous faire à l'Union européenne par l'entremise de votre commission spéciale?
    Premièrement, nous devons protéger les intérêts généraux contre l'ingérence étrangère, mais notre commission s'occupe également de l'ingérence d'intérêts privés. Par exemple, la discussion la plus brûlante au sein de notre commission concerne les conflits d'intérêts des élus. Il s'agit d'un débat essentiel. Nous devons garder à l'esprit que la lutte contre la corruption n'est pas seulement une question de morale ou d'éthique. C'est aussi une question de forces ou de faiblesses de nos institutions.
    Je ne suis pas un moraliste ni même un romancier. Je suis un homme politique élu. Je ne me soucie pas de la conscience personnelle de qui que ce soit. Je me préoccupe du sort des nations, des systèmes. La corruption est un danger pour la survie de la démocratie. C'est un outil dont se servent des puissances étrangères pour affaiblir et asservir nos nations. C'est ce sur quoi nous travaillons, en ce moment même, au Parlement européen.
    Deuxièmement, il faut réaffirmer la notion de contrôle public, à la fois en ce qui concerne les plateformes et la question de savoir comment les chaînes de valeur des plus grandes entreprises européennes sont utilisées par le régime chinois, aujourd'hui même, pour nous affaiblir dans des domaines d'importance stratégique. C'est un aspect primordial, et c'est pourquoi nous collaborons également avec nos amis de...
     Je vais devoir poursuivre ma série de questions — toutes mes excuses.
    Permettez-moi de vous poser la question directement: pensez-vous qu'une commission similaire pourrait être utile ici au Canada, oui ou non? Vous pouvez répondre, même si vous hésitez à le faire.
    En effet, j'hésite à le faire.
    Je suis inquiet pour le sort du pays.
     J'encourage toutes les institutions démocratiques à se doter d'une telle commission.
    Je vous remercie.
    Pensez-vous que chaque État démocratique devrait instaurer un registre d'agents étrangers?
    Je pense que ce serait une bonne chose, mais ce n'est pas encore le cas en Europe.
    Envisagez-vous de le faire?
    Nous en discutons avec la commission.
    Comment votre commission spéciale entend-elle mettre en œuvre, au sein de l'Union européenne, une stratégie coordonnée contre l'ingérence étrangère, comme le préconise la résolution adoptée le 9 mars dernier?
(1010)
    Nous avons travaillé avec la Commission européenne à l'élaboration du programme législatif sur la défense de la démocratie, qui entrera en vigueur à la fin du printemps. Voilà en quoi consistera l'approche, je crois.
    Parmi les nombreuses résolutions ou recommandations, quelles sont celles que vous considérez comme les plus urgentes?
    Elles le sont toutes. La principale serait.... Je suis désolé, mais vous m'avez pris de court.
     Ce n'est pas grave. Dans les 30 secondes qui me restent, permettez-moi de vous proposer quelques points à prendre en considération dans votre correspondance ultérieure avec notre comité.
     Je reconnais que nos démocraties sont très fragiles. Je reconnais qu'elles sont menacées par des acteurs hostiles à l'échelle internationale, qu'il s'agisse d'acteurs explicites ou, bien franchement, de certains de nos alliés.
     Je suis également d'accord pour dire que notre Parlement doit effectuer un examen approfondi, que ce soit par l'entremise de ce comité de l'éthique... Je pense qu'à l'heure actuelle, il serait justifié de créer un comité spécial à cette fin pour rester à l'affût des outils utilisés par des acteurs hostiles étrangers — outils qui évoluent à un rythme effréné — contre le Canada, contre nos démocraties et contre nos institutions démocratiques.
    Lorsque vous examinerez tous ces éléments et que vous en ferez rapport à notre comité, n'hésitez pas à dire les choses crûment. Je vous demande d'examiner la question du point de vue d'un représentant élu qui défend le destin d'un pays et de nous présenter sans ambages toute recommandation que vous jugez appropriée.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
     J'ai votre réponse, car nous avons besoin de vous à ce sujet. Si vous pouvez travailler avec nous sur l'équivalent d'une loi sur les services numériques, ce sera très utile. Cela signifie une responsabilisation à l'égard des plateformes.
    Merci, monsieur Green.

[Français]

     Je vous remercie, monsieur Glucksmann.
    C'est la fin des questions, aujourd'hui.
    Au nom du Comité, et au nom des Canadiens et des Canadiennes de partout au pays, je veux vous remercier de votre témoignage, aujourd'hui.
    Je vous remercie.

[Traduction]

    Je souhaite également vous remercier d'avoir été si généreux de votre temps. L'intérêt des membres du Comité pour ce que vous aviez à dire a manifestement prolongé la durée de votre comparution devant nous. Je tiens donc à vous en remercier.
     Merci beaucoup.
    Je vais suspendre la séance pendant environ une minute, le temps de laisser partir M. Glucksmann, après quoi nous reprendrons la séance publique. Je ne vois pas vraiment la nécessité de siéger à huis clos, car j'aimerais faire le point sur certains travaux du Comité.
    Suspendons la séance pendant une minute.
(1010)

(1015)
    Nous reprenons la séance.
     Je rappelle aux membres du Comité que nous traitons des travaux du Comité. Nous sommes en séance publique.
     Je voulais informer le Comité de l'état d'avancement du calendrier. Tout d'abord, nous avons perdu deux jours — les 5 et 19 mai —, en raison de la motion qui a été adoptée.
    Je vois votre main. Il y a d'abord M. Barrett, puis vous, monsieur Villemure.
    Nous avons donc perdu deux jours, à la suite de la motion qui a été adoptée hier, par consentement unanime, à la Chambre des communes.
    Mardi, nous recevrons les deux derniers témoins dans le cadre de notre étude sur l'accès à l'information, puis les représentants des ministères concernés pendant la deuxième heure. Nous allons laisser du temps, mardi, pour parler des instructions de rédaction. Nous aurons ainsi bouclé la boucle en ce qui concerne cette étude, et je pense qu'il y a suffisamment d'éléments — non seulement à la lumière du rapport provisoire que nous avons reçu, mais aussi à la suite de la comparution de la ministre, etc. — pour que les analystes mettent la dernière main au rapport et fassent des recommandations au Parlement et au gouvernement.
    Le deuxième point concerne la journée de vendredi. Comme vous vous en souvenez, le Comité a adopté mardi une motion sur la nomination du commissaire à l'éthique. J'ai l'intention d'inviter les témoins à comparaître vendredi prochain. Cela repoussera donc un peu l'étude sur l'ingérence étrangère.
    Voilà ce que j'avais à vous dire.
    Monsieur Barrett, j'ai vu votre main. Allez‑y, je vous prie, et nous entendrons ensuite M. Villemure.
    Merci, monsieur le président.
     Je vous remercie d'avoir fait le point sur le calendrier. Je ne sais pas combien de temps nous aurons pour examiner tout cela.
     Je vais présenter une motion. À mon avis, il faut quelques discussions entre les partis au sujet des réunions prévues au‑delà de vendredi prochain et concernant la motion de mardi... Si nous n'avons pas le temps aujourd'hui, nous pourrons en discuter plus tard. J'estime que le calendrier proposé et le plan sont valables, mais comme nous perdons deux réunions, les partis pourront en discuter entre eux.
    Je vois votre main levée, monsieur Fergus.
    Je rappelle aux membres du Comité qu'il nous reste 14 réunions après celle‑ci, en raison des deux que nous avons perdues.
    Allez‑y.
     D'accord.
    En ce qui concerne l'étude sur l'ingérence étrangère, je propose:
Que, dans le cadre de son étude sur l’ingérence étrangère et menaces entourant l'intégrité des institutions démocratiques, de la propriété intellectuelle et de l'État canadien, le comité:
a) Invite Alexandre Trudeau, fondateur et membre de la succession de la Fondation Pierre Elliott Trudeau;
b) Convoque Pascale Fournier et Morris Rosenberg, tous deux anciens président et directeur général de la Fondation Pierre Elliott Trudeau, pour qu'ils comparaissent à une date ne dépassant pas le 5 mai.
     Je crois que mon personnel a distribué des copies papier dans les deux langues officielles.
    Si la motion est recevable, j'ai quelques observations à faire, monsieur le président.
     Madame la greffière, le texte a‑t‑il été distribué aux députés?
    Oui, je l'ai envoyé par courriel.
    Je vous remercie.
    La motion est recevable.
    Monsieur Barrett, vous avez quelques observations à faire. Nous vous écoutons.
    Merci, monsieur le président.
    En ce qui a trait au point b), Pascale Fournier et Morris Rosenberg font partie de la liste de témoins proposés par les conservateurs. Je n'ai reçu aucune indication à l'effet qu'ils ont accepté de venir témoigner, mais je crois comprendre qu'ils n'ont même pas accusé réception, ce qui laisse entendre qu'ils n'ont pas l'intention de comparaître. C'est la raison pour laquelle nous les convoquons.
    Si je peux intervenir vite fait... Voici pourquoi nous n'avons pas reçu d'autres témoins au cours de la seconde heure. Des invitations ont été envoyées, mais nous n'avons malheureusement pas pu remplir les places pour diverses raisons. Je tiens à le préciser. En revanche, cela nous a permis de discuter avec M. Glucksmann un peu plus longtemps.
    Je tenais à le préciser pour la gouverne des membres du Comité.
    Veuillez poursuivre.
(1020)
     Ma dernière observation porte sur le point a), concernant M. Trudeau. La raison de cette invitation — et ce n'est pas une convocation, mais bien une invitation à M. Trudeau —, c'est que de nombreuses sources ont rapporté que le don de 140 000 $ à la Fondation Pierre Elliott Trudeau, qui fait l'objet d'un rapport et qui révèle la présence d'une opération d'influence du régime communiste de Pékin... Nous avons appris depuis que la Fondation avait restitué, à juste titre, ce don au donateur, mais M. Trudeau était le signataire dans le cadre de cette transaction, d'où la pertinence de son témoignage pour notre étude sur l'ingérence étrangère.
     D'accord. Merci, monsieur Barrett.
    Pour débattre de la motion, nous allons entendre MM. Villemure, Fergus et Green.
    Allez‑y, monsieur Villemure.

[Français]

    Mon intervention ne porte pas sur la motion, mais sur un point précédent.

[Traduction]

    D'accord.
    Monsieur Fergus, vous avez la parole.

[Français]

    Tout comme M. Villemure, mon intervention porte sur quelque chose que vous avez dit au début.
    C'est d'accord. Merci.

[Traduction]

    Monsieur Green, vous avez la parole.
     Je souhaite certes examiner toutes les répercussions de l'ingérence étrangère. Je souligne que, concernant cette tendance à faire venir les membres de la famille, je comprends les avantages politiques qui en découlent, mais j'ai l'impression qu'utiliser le Comité de cette manière si nous avons d'autres témoins... À mon sens, les allégations qui sont faites, si elles sont vraies, justifieraient et mériteraient qu'une enquête approfondie soit menée par les autorités compétentes, mais en ce qui concerne le Comité, je ne suis pas très à l'aise avec cette idée, étant donné le travail que nous avons à faire. Je ne suis pas à l'aise d'emprunter cette voie.
    Voici ce que j'ai à dire à mes collègues conservateurs: on remarque de plus en plus une tendance à promener ces questions d'un comité à l'autre pour essayer d'en trouver un où elles vont coller. Cela commence à ressembler aux spaghettis qu'on lance sur le mur. Si vous avez des preuves concrètes, je vous encourage à les présenter et à faire savoir aux gens de quoi il s'agit exactement et précisément, car les commentaires de mon ami, M. Barrett, ne suffisent pas — du moins à mon avis — pour s'engager dans cette voie avec les membres de la famille, étant donné les précédents qu'on a connu à la Chambre. Si on veut s'engager dans cette voie, j'aurais besoin de quelque chose de plus substantiel qu'une opinion.
     Voilà où j'en suis dans ma réflexion pour l'instant. Je serais heureux que nos collègues conservateurs nous expliquent plus en détail pourquoi ils veulent emprunter cette voie, mais en attendant, je ne fais qu'exprimer mon malaise à ce sujet.
    Je vous remercie, monsieur Green.
    Nous passons maintenant à M. Fergus et ensuite à Mme Hepfner.
    Allez‑y.

[Français]

    Je suis d'accord avec M. Green.
    Ce qu'on a fait, ce matin, pendant 90 minutes, était important. Je pense que nous avons appris plusieurs choses sur ce que font les Européens dans un dossier qui est important.
    Je pense que c'est un peu du salissage qu'on fait en ce moment. Que voulez-vous? On voter et on va voir ce qu'on va faire. Moi, je ne suis pas favorable du tout à cette motion.
     Merci, monsieur Fergus.

[Traduction]

     Madame Hepfner, c'est à votre tour.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    J'ai bien apprécié moi aussi les commentaires de M. Green, et je suis d'accord aussi. Cette tendance à revenir sans cesse à ce genre de petits jeux politiques me préoccupe. Je pense que le Comité peut faire du très bon travail, et nous avons proposé des études que nous n'avons pas encore eu le temps de commencer.
    L'étude sur la plateforme TikTok m'intéresse tout particulièrement, et je pense que nous devrions nous y mettre le plus tôt possible. Nous avons vu des États et des administrations prendre des mesures immédiates contre cette plateforme, alors que nous n'avons même pas encore commencé notre étude sur la question.
    Je vais m'en tenir à cela. J'ajouterai simplement que j'aimerais vraiment que nous puissions revenir au travail très important que fait le Comité, comme cela a été le cas ce matin.
(1025)
    Je vous remercie, madame Hepfner.
    Monsieur Green, votre main est encore levée. Allez‑y.
    Oui, je dois admettre encore une fois que j'ai été pris un peu au dépourvu par la motion, et que je n'ai pas eu l'occasion de consulter mon équipe à ce sujet, mais je dirais que je suis ouvert à l'idée que les anciens membres du conseil d'administration et des gens sans lien de parenté témoignent. Si leurs témoignages révèlent des preuves que M. Trudeau est impliqué de près et que cela nécessiterait un autre examen, je serais alors prêt à appuyer l'idée.
    Par votre entremise, monsieur le président, si le motionnaire est encore présent, ou si quelqu'un d'autre veut bien parler en son nom, serait‑il disposé à ce moment‑ci à autoriser que la motion aille de l'avant en gardant les deux premières personnes mentionnées et, dans le cas d'Alexandre Trudeau, à attendre de voir si leurs témoignages rendraient nécessaire sa participation à cette étude?
    Je vais poser la question. Je ne vois pas...
    Monsieur Green, juste pour que vous le sachiez, comme vous n'êtes pas dans la salle, mais sur Zoom, M. Barrett a quitté, sans doute pour participer à la période des questions.
    La question s'adresse directement à un membre du Parti conservateur, alors si quelqu'un peut y répondre...
    Pour rappel, la question de M. Green concerne Mme Fournier et M. Rosenberg.
    Est‑ce exact, monsieur Green?
    C'est exact, et j'ajouterais que s'ils ne sont pas prêts à répondre à la question, je leur recommanderais de laisser la motion de côté pour l'instant et d'y revenir un autre jour, car elle a peu de chance d'être adoptée aujourd'hui.
    Je vois que M. Kurek a la main levée.
    Monsieur Kurek, allez‑y.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je soulignerais que la motion comporte deux éléments très distincts. Dans la partie a), on « invite » M. Trudeau, mais dans la partie b), on « convoque » les personnes mentionnées, alors l'approche est très différente. Je pense que cela répondrait à un aspect des préoccupations de M. Green, car en b), la pression est plus directe et plus forte pour s'assurer que ceux qui sont concernés par cette affaire et qui n'ont pas encore répondu à l'invitation du Comité...
    À ce stade‑ci, bien sûr, si M. Trudeau souhaitait venir témoigner, il pourrait répondre à l'invitation, mais il y a une grande différence entre les deux éléments, alors j'aimerais savoir si cela répond à un aspect des préoccupations de M. Green.
    Je vous remercie, monsieur Kurek.
    Je vois que M. Green a la main levée, et ce sera ensuite au tour de M. Villemure.
     Comme je l'ai dit à mes amis conservateurs, s'ils veulent bien laisser de côté cet élément, et ne conserver que la partie b), je dirais que si, au cours de l'enquête à la partie b) — l'étude à la partie b) avec Pascale Fournier et M. Rosenberg —, on jugeait opportun à ce moment d'envoyer l'invitation à M. Trudeau, je serais alors d'accord.
     Cependant, je suis conscient que le fait d'être impliqué dans ce type d'affaires a presque autant d'effet que d'être convoqué devant le Comité, et c'est pourquoi j'aimerais lui accorder la présomption d'innocence, étant donné sa relation avec le premier ministre, jusqu'à ce que nous ayons de véritables informations qui l'impliqueraient de manière plus sérieuse.
     Je le répète, si le motionnaire est disposé à laisser de côté la partie a) jusqu'à ce que la partie b) ait eu lieu, je suis prêt à réexaminer la question. Si ce n'est pas le cas, je ne souhaite pas vraiment aller de l'avant avec la partie a) dans ce cas particulier.
    Je vous remercie, monsieur Green.
    Monsieur Villemure, j'ai vu que vous aviez la main levée.

[Français]

     Je cède mon tour au Parti conservateur.
    Monsieur Gourde, vous avez la parole.
    Merci, monsieur Gourde.
    Le propos de M. Green ne vise pas à envoyer une autre motion à M. Trudeau.

[Traduction]

    Je pense que M. Green propose de supprimer la partie a) et d'aller de l'avant avec la partie b).
    Je ne veux pas mettre des mots dans la bouche de M. Green. Je vois qu'il a la main levée.
    Monsieur Green.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    M. Green a dit quelque chose d'intéressant. Le Parti conservateur accepterait peut-être de conserver seulement la partie b) de la motion. Aujourd'hui, nous pourrions retirer la partie a). Si nous décidions de remettre la partie a), nous pourrions le faire dans une autre motion.
    Nous pourrions donc accepter cet arrangement suggéré par le NPD.
(1030)

[Traduction]

    Je dis que je suis ouvert à l'idée, pour de bonnes raisons — que je n'ai pas eu l'occasion de mentionner depuis le début de notre courte discussion — de réexaminer la partie a). Je ne veux pas que la motion soit scindée et voir la partie a) servir de petits jeux politiques s'il n'y a pas de preuves assez substantielles, à mon avis, pour la justifier.
    Je propose donc, si les conservateurs sont d'accord, de laisser de côté la partie a) jusqu'à ce que la partie b) ait eu lieu. Après le témoignage des deux personnes mentionnées dans la partie b), j'aurais alors suffisamment d'information pour déterminer si j'appuierais l'idée de faire témoigner Alexandre Trudeau devant le Comité. Je le précise pour que tout soit bien clair.
    Je vous remercie, monsieur Green.
    Le problème que nous avons actuellement, c'est que nous sommes saisis de la motion. Il faut donc qu'elle soit amendée pour supprimer la partie a). Il nous faut le consentement unanime ou un vote sur l'amendement, puis nous reviendrons à la motion principale, sans la partie a).
    Monsieur Villemure, allez‑y.

[Français]

    Je désire proposer un amendement visant à retirer la partie a) de la motion.

[Traduction]

    Nous sommes saisis d'un amendement. Il est recevable.
    Quelqu'un souhaite-t‑il prendre la parole? Avons-nous le consentement unanime pour retirer la partie a)?
    Non. Nous allons donc passer au vote.
    (L'amendement est adopté par 6 voix contre 5.)
    (La motion modifiée est adoptée par 6 voix contre 5.)
    Le président: Je vous remercie.
    Nous avons encore deux intervenants sur d'autres sujets.
(1035)

[Français]

     Monsieur Villemure, la parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais proposer que le Comité visite le Centre d'excellence de l'OTAN qu'a mentionné M. Glucksmann précédemment.
    Je vous remercie. Est-ce une motion?
    Oui.
    D'accord. Avez-vous rédigé la motion dans les deux langues officielles à l'intention du Comité ou non?
    Je vais le faire.
    Mme la greffière dit que cette motion est courte.
    Est-ce que tout le monde est d'accord sur cette motion?

[Traduction]

     Quelqu'un souhaite-t‑il prendre la parole à propos de cette motion?
    Monsieur Green, je vois votre main levée.
    J'allais dire qu'il s'agit d'une motion spontanée, étant donné le témoignage que nous avons entendu, et que le reste n'est sans doute pas nécessaire puisque nous avons l'interprétation.
    Je l'appuie. Tout ce qui entoure l'intelligence artificielle et la cyberguerre m'intéresse beaucoup, alors je remercie M. Villemure de proposer cette motion.
    Je vous remercie, monsieur Green.

[Français]

    Merci, monsieur Villemure.

[Traduction]

    Monsieur Kurek, je vois votre main levée à propos de la motion proposée par M. Villemure.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je veux simplement souligner que, même si la distribution dans les deux langues officielles est importante, comme il s'agit d'une motion simple et opportune, et que cela donne à la greffière la possibilité de commencer à recueillir les détails nécessaires pour établir le budget des déplacements, etc., alors je pense que c'est tout à fait justifié.
    Si la motion est adoptée, nous allons essayer de soumettre le budget dès que possible au comité de liaison. Cela prendra un peu de temps, car il faut que ce soit approuvé. Je vais sans doute devoir comparaître au nom du Comité pour justifier la demande.
    En passant, monsieur Fergus, les déplacements à Gatineau ont été très faciles à justifier. Pour que tout soit clair, la préparation nécessitera un peu de temps dans ce cas, mais nous allons veiller à vous revenir avec un projet de budget juste et raisonnable.
    Nous sommes saisis de cette motion. Il faut soit le consentement unanime, soit un vote.
    Avons-nous le consentement unanime pour la motion proposée par M. Villemure? Je ne vois pas d'objection.
    (La motion est adoptée.)

[Français]

    Je vous remercie, monsieur Villemure.

[Traduction]

    Monsieur Fergus, vous avez la parole.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Au sujet de votre commentaire à propos d'une motion antérieure, étant donné que l'ancienne commissaire à l'éthique par intérim a démissionné, je me demande si cette motion ou cette étude est pertinente maintenant.
    J'en ai parlé pour cette raison. Je dois connaître les intentions du Comité à ce sujet, car, comme vous le savez, la motion a été adoptée.
    Nous avions prévu inviter au moins les deux personnes nommées — la commissaire à l'éthique par intérim et le ministre LeBlanc —, mais le Comité doit me faire part de ses instructions, et il faut qu'il y ait un consentement unanime ou un vote sur la question.
    Dites-moi ce que vous souhaitez faire. Nous agirons ensuite en fonction de la volonté du Comité.
    Comme il reste peu de temps pour les autres études que nous voulons mener, et peut-être aussi pour poursuivre l'étude sur la motion de M. Villemure, je propose que nous passions à autre chose, étant donné que les événements sont passés. J'espère qu'il y aura consensus pour procéder de cette façon.
    Vous proposez cela. J'aurais besoin d'une motion.
    Je propose cette motion.
    D'accord. La motion est de ne pas même entreprendre cette étude. Est‑ce exact?
    La motion est de ne pas même entreprendre l'étude.
    Je vois quelques mains levées.
    Monsieur Green, vous avez été le premier. Allez‑y, s'il vous plaît.
    Je dirais que c'est un peu inutile maintenant. Je pense que nous avons eu une discussion approfondie à ce sujet lors d'une réunion antérieure. Je suis heureux de voir que la commissaire par intérim a décidé de démissionner. C'est malheureux que cela ait pris autant de temps et que ce soit allé aussi loin, mais c'est ce qui s'est produit.
    Je suis satisfait de la situation et je ne vois pas l'intérêt de continuer sur cette voie, étant donné que nos ressources et notre temps sont limités.
(1040)
    Monsieur Kurek, c'est à vous. Allez‑y, s'il vous plaît.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Il est troublant de voir qu'on a cette attitude, assurément chez les députés libéraux, de vouloir rectifier le tir lorsque le gouvernement fait un faux pas, que ses méfaits sont dénoncés et qu'il est vertement critiqué. Si l'opposition croît à l'égard de ses actions, alors il annule une commande ou fait marche arrière dans un contrat. La liste devient trop longue à citer dans le peu de temps que nous avons, monsieur le président.
    Je trouve cela préoccupant de voir que l'attitude que l'on adopte alors est de dire que c'est du passé, que ce n'est plus pertinent, et que cela ne vaut pas la peine d'en discuter.
    Voici ce que je propose. Dans la motion originale, nous avions prévu d'y consacrer trois heures, dont nous disposons, si j'en crois le calendrier. Au lieu de supprimer l'étude dans sa totalité, nous pouvons reconnaître que des erreurs, des erreurs graves, ont été commises. Le fait que la belle-soeur d'un ministre soit nommée commissaire à l'éthique par intérim est un conflit d'intérêts flagrant qui... Je me demande même si Hollywood irait aussi loin.
    Au lieu des trois heures prévues, il serait raisonnable donc de demander qu'on y consacre l'heure que nous avons mardi, afin qu'on tente d'aller au fond de cette affaire et que les membres du Comité puissent poser des questions au nom des nombreux Canadiens qui sont sidérés de voir jusqu'où le gouvernement peut aller, de même que les gestes qu'il pose et qui minent la confiance à l'égard de nos institutions.
    Voilà ce que je propose, monsieur le président. Je suis bien entendu contre l'idée de mettre un terme à l'étude, mais je serais d'accord pour amender ou modifier la motion en raison des nouvelles circonstances. C'est ma position sur ce sujet.
    Je vous remercie, monsieur Kurek.
    Les suggestions et les propositions ne fonctionnent pas dans le Règlement. Il faut avoir des motions officielles. M. Fergus a présenté une motion pour mettre un terme à l'étude.
    Selon ce que j'ai entendu de votre part, monsieur Kurek... et je vais rappeler aux membres du Comité que nous avions approuvé la tenue d'au plus trois réunions sur ce sujet. Si vous proposez un amendement à la motion de M. Fergus, je vous demanderais de le faire officiellement, afin que nous puissions discuter de votre amendement.
    Quel amendement proposeriez-vous, monsieur Kurek?
    Je m'excuse, monsieur Kurek. La greffière vient de m'apporter une précision.
    La motion de M. Fergus est de mettre fin à l'étude. Il n'y a pas d'amendement possible. Sa motion est claire, alors nous l'adoptons ou nous la rejetons. Nous avons besoin du consentement unanime ou d'un vote.
    Monsieur Fergus, vouliez-vous ajouter quelque chose?
    M. Greg Fergus: Non.
    Le président: Vous avez tout dit. D'accord.
    Je vais maintenant demander s'il y a consentement unanime pour adopter la motion de M. Fergus. S'il n'y a pas de consentement unanime, je vais mettre la motion aux voix. Je vois des gens qui hochent la tête.
    Selon le résultat, je reviendrai sans doute à vous, monsieur Kurek.
    (La motion est adoptée par 7 voix contre 3.)
    Le président: La motion de M. Fergus est adoptée. Cela met fin à l'étude sur ce sujet, ce qui nous libérera un peu de temps. Comme je l'ai mentionné plus tôt, il ne reste que 14 réunions, car nous en avons perdu deux.
    Comme il n'y a pas d'autres travaux du Comité, j'en profite pour remercier nos analystes, la greffière et tous les techniciens pour la réunion d'aujourd'hui.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU