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Bonjour, chers collègues.
Nous sommes le mercredi 17 octobre 2018, et il s'agit de la 112e séance du Comité permanent des comptes publics.
Nous sommes ici, cet après-midi, pour étudier le Rapport 5, Les écarts socioéconomiques dans les réserves des Premières Nations — Services aux Autochtones Canada, des Rapports du printemps 2018 du vérificateur général du Canada.
Nous avons le plaisir d'accueillir un certain nombre de témoins pour nous aider dans cette étude, mais avant toute chose, je souhaite attirer votre attention sur la tribune. Nous sommes très heureux d'accueillir aujourd'hui, dans la section du public, une délégation du comité de la responsabilité des finances de l'État du Conseil représentatif du peuple de l'Indonésie. Je demanderais aux membres de la délégation de se lever.
Des députés: Bravo!
Le président: Nous vous souhaitons la bienvenue parmi nous aujourd'hui.
Nous avons eu le plaisir de les accueillir à l'occasion d'un dîner, hier, où ils nous ont parlé des mesures de responsabilité et de transparence en place en Indonésie, de leur comité et d'une commission avec qui ils travaillent de pair. En rompant le pain, à table, nous avons pu en apprendre un peu plus sur leur régime, et eux sur le nôtre.
Nous avons aussi le plaisir et l'honneur de recevoir aujourd'hui M. Michael Ferguson, vérificateur général du Canada, ainsi que M. Joe Martire, directeur principal au Bureau du vérificateur général du Canada.
Je vous souhaite la bienvenue.
Du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien...
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Monsieur le président, je vous remercie de nous donner l'occasion de discuter de notre rapport du printemps 2018 sur les écarts socioéconomiques dans les réserves des Premières Nations.
Je suis accompagné aujourd'hui du directeur principal de l'audit, M. Joe Martire.
Les gouvernements qui se sont succédé ont pris beaucoup d'engagements afin d'améliorer le bien-être des membres des Premières Nations, et le ministère chargé de donner suite à la plupart de ces engagements est Services aux Autochtones Canada.
Dans cet audit, nous avons évalué les progrès de Services aux Autochtones Canada pour combler les écarts socioéconomiques entre les membres des Premières Nations vivant dans les réserves et les autres Canadiens, et comment il en avait fait rapport. L'audit visait aussi à vérifier si le ministère avait utilisé adéquatement les données à sa disposition pour améliorer les programmes d'enseignement afin de combler l'écart en matière d'éducation et d'améliorer le bien-être socioéconomique.
[Français]
Nous avons constaté que le principal outil de Services aux Autochtones Canada pour mesurer le bien-être socioéconomique dans les réserves, l'Indice du bien-être des collectivités, n'était pas complet. L'Indice englobait des données de Statistique Canada sur la scolarité, l'emploi, le revenu et le logement, mais il ne tenait pas compte de plusieurs aspects du bien-être qui sont aussi importants pour les membres des Premières Nations, tels que la santé, l'environnement, la langue et la culture.
Monsieur le président, pour combler les écarts socioéconomiques et augmenter la qualité de vie dans les réserves, les décideurs fédéraux et les Premières Nations doivent avoir de l'information sur les conditions socioéconomiques des membres des Premières Nations et des données de programmes fiables, pertinentes et à jour.
Services aux Autochtones Canada demande aux Premières Nations de lui fournir une grande quantité de données sur les populations vivant dans les réserves. Le ministère obtient aussi des données de Statistique Canada ainsi que d'autres ministères fédéraux, d'organisations autochtones et d'autres sources. Cependant, nous avons constaté que le ministère n'avait pas utilisé adéquatement le grand volume de données de programmes fournies par les Premières Nations, ou d'autres données disponibles, pour établir si la qualité de vie des membres des Premières Nations vivant dans les réserves s'était améliorée et en rendre compte.
[Traduction]
Par exemple, le ministère n'a pas mesuré ni communiqué adéquatement l'écart en matière d'éducation. À l'aide des données sur l'éducation amassées par le ministère, nous avons calculé que l'écart quant au taux d'obtention d'un diplôme d'études secondaires (ou l'équivalent) entre les Autochtones vivant dans les réserves et les autres Canadiens avait augmenté entre 2001 et 2016.
Nous avons aussi constaté que les Premières Nations avaient un accès limité au Système d'information sur l'éducation du ministère et aux analyses connexes. Depuis 2008, le ministère a dépensé environ 64 millions de dollars pour élaborer et exploiter ce système. Le système était destiné à saisir et à analyser les données sur l'éducation des Premières Nations pour guider la prise de décisions.
Services aux Autochtones Canada a aussi mal utilisé les données sur l'éducation qu'il a amassées pour améliorer les résultats dans ce domaine. Par exemple, le ministère a dépensé 42 millions de dollars sur 4 ans pour préparer les élèves des Premières Nations à s'inscrire à des programmes d'études postsecondaires. Cependant, nous avons constaté que seulement 8 % des élèves inscrits avaient achevé le programme préparatoire. Malgré la faiblesse de ces résultats, le ministère n'a pas collaboré avec les Premières Nations ou les établissements scolaires pour augmenter le taux de réussite.
[Français]
Monsieur le président, c'est avec des rapports complets et exacts du ministère que le Parlement, les Canadiens et les Premières Nations peuvent connaître l'étendue réelle des résultats des programmes fédéraux et des progrès faits pour combler les écarts socioéconomiques entre les membres des Premières Nations et les autres Canadiens.
Nous avons constaté que le ministère n'avait pas communiqué la plupart des résultats en matière d'éducation, même s'il s'était engagé à le faire il y a 18 ans, pour déterminer si des progrès avaient été faits en vue de combler l'écart dans ce domaine. Par exemple, il n'a pas fait rapport sur l'assiduité scolaire ni sur l'enseignement des langues des Premières Nations.
[Traduction]
Nous avons aussi constaté que le ministère avait publié des données inexactes sur les résultats scolaires des Premières Nations. Par exemple, le ministère a surévalué dans une proportion allant jusqu'à 29 points de pourcentage les taux d'obtention du diplôme d'études secondaires parce qu'il n'a pas tenu compte des décrochages entre les 9e et 11e années. De plus, les données du ministère montraient qu'entre les exercices 2014-2015 et 2015-2016, le taux d'obtention du diplôme avait augmenté alors que, selon nos calculs, il avait baissé.
Nous avons conclu que Services aux Autochtones Canada n'avait pas mesuré de façon satisfaisante les progrès du Canada en vue de combler les écarts socioéconomiques entre les membres des Premières Nations vivant dans les réserves et les autres Canadiens, et qu'il n'en avait pas fait dûment rapport. Nous avons aussi conclu qu'il n'avait pas fait bon usage des données à sa disposition pour améliorer les programmes d'éducation.
[Français]
Notre rapport contient trois recommandations visant à améliorer les progrès du Canada pour combler les écarts socioéconomiques entre les membres des Premières Nations dans les réserves et les autres Canadiens, et à en rendre compte.
Je termine ainsi ma déclaration d'ouverture. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
Je vous remercie.
:
Je remercie les membres du Comité de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui à cette 112
e réunion du Comité. Je tiens à souligner que nous nous réunissons sur le territoire traditionnel algonquin.
[Traduction]
Je ferai d'abord une chose qui n'est probablement pas autorisée par le protocole. Je saisirai l'occasion pour rappeler à ceux qui ne le savent pas que demain, c'est le jeûne d'un jour dans le cadre de la Campagne Moose Hide. Pour ceux d'entre vous qui voudraient de l'information à ce sujet, il y aura des gens sur la Colline du Parlement demain, qui seront là pour venir vous voir. C'est un très bel événement qui rassemble des hommes contre la violence faite aux femmes et aux filles. Nous vous encourageons à y participer.
Je suis accompagné aujourd'hui de Paul Thoppil, dirigeant principal des finances, des résultats et de I'exécution, ainsi que de Shelie Laforest, directrice principale intérimaire, Secteur des programmes et des partenariats en matière d'éducation et de développement social.
Mes collègues et moi-même avons examiné attentivement le rapport du printemps sur les écarts socioéconomiques et les données sur l'éducation pour les Premières Nations vivant dans les réserves. Je souligne que Services aux Autochtones Canada souscrit aux trois recommandations du rapport qui se rapportent à lui.
[Français]
Je passerai en revue chacune des recommandations et je ferai brièvement le point sur les progrès que nous avons déjà accomplis, après quoi je serai heureux de répondre à vos questions, mais d'abord, permettez-moi de situer notre réponse dans son contexte.
[Traduction]
Le gouvernement du Canada travaille à renouveler sa relation avec les peuples autochtones. Nous sommes déterminés à travailler avec nos partenaires pour modifier les modèles de financement et créer des occasions permettant aux Premières Nations d'avoir la maîtrise des questions qui les concernent, notamment l'éducation.
Il ne s'agit pas d'un concept nouveau, mais d'un concept dont on a longtemps fait abstraction. II y a plus de 20 ans, une déclaration du président du Collège de la Fédération des lndiens de la Saskatchewan était citée dans le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones: « L'éducation des Autochtones en vue de l'autonomie, lorsqu'elle est contrôlée par les Autochtones, donne de bons résultats. » C'est notre but.
[Français]
Le gouvernement du Canada prend maintenant d'importantes mesures stratégiques, en collaboration avec ses partenaires des Premières Nations, pour appuyer l'autodétermination des Premières Nations en matière d'éducation.
[Traduction]
Permettez-moi maintenant d'expliquer nos réponses à chacune des trois recommandations.
La première recommandation concerne la collaboration avec les Premières Nations et d'autres partenaires pour mesurer le bien-être socioéconomique général des membres des Premières Nations vivant dans les réserves et faire rapport à cet égard, ainsi que pour examiner d'autres aspects du bien-être socioéconomique que les Premières Nations jugent prioritaires, comme la langue et la culture.
Je suis heureux de vous informer que c'est précisément ce que nous faisons. Une grande partie de ce travail est déjà en cours avec l'Assemblée des Premières Nations et d'autres partenaires. Comme première étape et dans le cadre de l'élaboration conjointe d'une nouvelle relation financière, nous travaillons avec l'Assemblée des Premières Nations et d'autres partenaires clés, comme le Centre de gouvernance de l'information des Premières Nations, à l'élaboration d'un projet de cadre national axé sur les résultats. Je crois d'ailleurs que vous en avez reçu la version provisoire.
[Français]
Grâce à ce cadre, nous espérons mesurer les écarts dans certains domaines, comme le niveau de vie, l'éducation et la santé, entre les Premières Nations et les non-Autochtones au Canada, afin de savoir si nous commençons à combler ces écarts.
[Traduction]
Les résultats du projet de cadre concordent avec les objectifs de développement durable des Nations unies, qui sont très complets. L'adoption d'une vue d'ensemble des types de résultats que nous souhaitons obtenir nous aidera à collaborer activement avec les peuples autochtones afin de définir des mesures de réussite qui seront utiles à toutes les parties. Cela signifie que nous pouvons mesurer de façon plus exhaustive les progrès accomplis en ce qui a trait à de nombreux aspects du bien-être, notamment la langue et la culture.
Au final, nous visons à élaborer conjointement des données de référence sur les écarts socioéconomiques d'ici trois ans afin de commencer à mesurer systématiquement les progrès réalisés en vue de combler ces écarts et d'en faire rapport.
[Français]
Il est essentiel de collaborer à chaque étape, depuis la définition d'indicateurs pertinents pour toutes les parties jusqu'à l'intégration des connaissances et des points de vue des Premières Nations dans l'exposé narratif. Nous sommes déterminés à suivre un processus respectueux et à prendre le temps de bien faire les choses.
[Traduction]
J'aborderai maintenant la deuxième recommandation, qui porte sur la collecte, l'utilisation et le partage de données sur l'éducation avec les partenaires des Premières Nations en vue d'améliorer les résultats en matière d'éducation des membres des Premières Nations vivant dans les réserves. Le ministère est d'accord avec cette recommandation, et nous déployons déjà beaucoup d'efforts pour la mettre en oeuvre.
Services aux Autochtones Canada a investi dans les relations avec les Premières Nations pour gérer les données sur l'éducation. Nous collaborons à cerner les résultats qui se révèlent pertinents et qui pourraient remplacer ce que nous mesurons actuellement. Nous opérons également un changement de paradigme en vue de la prise en charge par les Premières Nations. Ainsi, les Premières Nations recueilleront les données pertinentes qui seront communiquées à leurs collectivités, et le gouvernement du Canada en sera informé.
[Français]
Nous savons que le renforcement de la capacité de gouvernance des données des Premières Nations est essentiel à cet égard. C'est pourquoi, dans le cadre de notre nouvelle relation financière, comme je l'ai mentionné plus tôt, des mesures sont prévues afin d'appuyer la conception d'une stratégie nationale de gouvernance des données pour les Premières Nations.
[Traduction]
Nous avons également collaboré avec les partenaires des Premières Nations pour élaborer conjointement une nouvelle politique en matière d'éducation de la maternelle à la 12e année, qui orientera l'élaboration d'approches régionales et inclura la responsabilité mutuelle et l'amélioration de la collecte, de l'utilisation et du partage des données. En décembre 2017, l'Assemblée des Premières Nations a ratifié nos travaux conjoints liés à cette politique qui reflète l'objectif de la prise en charge par les Premières Nations de l'éducation des Premières Nations. Il n'y aura jamais « une » solution universelle pour l'éducation des Premières Nations. C'est pourquoi nous travaillons à renforcer les approches régionales. Un exemple récent et audacieux à cet égard est l'Accord tripartite en matière d'éducation en Colombie-Britannique, que nous considérons comme notre point de repère initial pour ce genre de travail de collaboration régionale, car il est très complet.
[Français]
En élaborant des ententes régionales avec les Premières Nations et d'autres partenaires, nous pouvons tous être sur la même longueur d'onde quant à ce que nous mesurons, à la façon dont nous nous y prenons ainsi qu'à l'interprétation dans le futur.
[Traduction]
Je me pencherai à présent sur la troisième recommandation, qui porte sur la nécessité d'assurer l'intégrité et l'exactitude des rapports sur les résultats des Premières Nations en matière d'éducation. Services aux Autochtones Canada est d'accord avec cette recommandation. Comme je l'ai mentionné, notre travail de transformation de l'éducation consiste à convenir de façons de promouvoir des résultats complets et exacts. Pour ce qui est des rapports sur les taux de diplomation, le ministère a toujours été très clair sur ce dont il rend des comptes. Le vérificateur général n'a pas contesté nos données, mais il a proposé une autre approche.
[Français]
Je conviens qu'il s'agit d'une situation complexe, puisque les provinces mesurent souvent les taux de diplomation de façon différente. Certains le font sur trois ans ou sur quatre ans.
[Traduction]
D'autres le feront sur une plus courte période. Cela varie vraiment d'un endroit à l'autre.
[Français]
De plus, comme vous le savez, dans le cas des Premières Nations, de nombreux élèves peuvent passer du régime dans les réserves au régime en dehors des réserves.
[Traduction]
Cette mobilité doit être prise en compte si nous voulons mesurer les résultats adéquatement.
Notre travail de transformation de l'éducation comprendra une mise à jour du cadre des résultats et des modifications nécessaires au Système d'information sur l'éducation, ou au système qui lui succédera. Cela contribuera grandement à répondre aux préoccupations du vérificateur.
[Français]
En résumé, monsieur le président, mon ministère accueille favorablement toutes les recommandations du vérificateur général du Canada et est en bonne voie d'adopter une nouvelle approche en matière d'éducation pour les Premières Nations, qui permettra de répondre aux préoccupations quant aux lacunes en matière de données et aux écarts socioéconomiques.
Je tiens à remercier les membres du Comité de leur attention.
Nous répondrons maintenant à vos questions.
:
Merci, monsieur le président.
Avant d'entrer dans les détails du rapport, j'ai quelques observations à faire.
Elles concernent d'abord les « Questions d'une importance particulière » qui figurent dans le rapport Le Point de la vérificatrice générale du Canada en 2011, Sheila Fraser, un rapport au Parlement. Voici ce qu'a dit Mme Fraser à l'époque, sous le sous-titre « Les conditions de vie dans les réserves des Premières nations »:
Entre 2001 et le printemps 2010, j'ai publié 16 chapitres qui abordaient directement des questions touchant les Premières nations et les Inuits, et 15 autres qui traitaient de questions qui ont de l'importance pour les Autochtones. Dans le chapitre 4 du présent rapport Le Point, je constate, avec une profonde déception, qu'en dépit des mesures prises au fil des ans par le gouvernement fédéral en réponse à nos recommandations, un nombre disproportionné de membres des Premières nations n'ont toujours pas accès au même titre que le reste de la population canadienne aux plus élémentaires des services.
Il est évident que les conditions de vie dans les réserves des Premières nations laissent a désirer, comparativement à celles observées ailleurs au Canada. [...] Dans un pays aussi riche que le Canada, un tel contraste est inacceptable.
Voilà ce qu'a dit la prédécesseure immédiate de M. Ferguson en 2011.
Voici ce que M. Ferguson avait à dire dans un message adressé au Parlement le 29 novembre 2016, en dessous du sous-titre « L'absence de progrès »:
En seulement cinq ans, avec une centaine d'audits de performance et d'examens spéciaux à mon actif depuis le début de mon mandat, les résultats de certains audits évoquent les mots de l'illustre Yogi Berra — « encore du déjà vu ».
[...] Un autre thème qui refait trop souvent surface est celui de la disparité de traitement qui touche les peuples autochtones du Canada. À la fin de son mandat, Sheila Fraser, ma prédécesseure, a employé le mot « inacceptable » pour résumer son impression après dix ans d'audits et de recommandations sur les enjeux touchant les Premières Nations. Nous avons continué à auditer ces enjeux après mon entrée en fonction. Chaque année, nous présentons au moins un rapport sur des enjeux qui importent aux Premières Nations, y compris la gestion des urgences et les services de police dans les réserves, l'accès aux services de santé et, plus récemment, les services correctionnels pour les détenus autochtones. Considérant les résultats de ces audits et de ceux qui les ont précédés, je dois dire que la situation actuelle est plus qu'inacceptable.
Puis, nous avons ici le dernier rapport. L'objectif de l'audit est très simple:
L'objectif de l'audit consistait à déterminer si Services aux Autochtones Canada avait mesuré de manière satisfaisante les progrès globaux accomplis par le Canada en vue de combler les écarts socio-économiques entre les membres des Premières Nations vivant dans les réserves et les autres Canadiens, et s'il en avait fait dûment rapport. Nous avons aussi vérifié si le Ministère avait utilisé adéquatement les données à sa disposition pour améliorer les programmes d'enseignement afin de combler les écarts en matière d'éducation.
Sous « Conclusion », le rapport indique ce qui suit:
Nous avons conclu que Services aux Autochtones Canada n'avait pas mesuré de manière satisfaisante les progrès accomplis par le Canada en vue de combler les écarts socio-économiques entre les membres des Premières Nations vivant dans les réserves et les autres Canadiens, et qu'il n'en avait pas fait dûment rapport. Nous avons également conclu que le Ministère n'avait pas utilisé adéquatement les données à sa disposition pour améliorer les programmes d'enseignement.
Quand cette situation changera-t-elle?
Avec tout le respect que je vous dois, je crois que vous êtes très sincère, monsieur le sous-ministre, mais cela fait 15 ans que je siège ici, et d'autres sous-ministres du même ministère sont venus comparaître et ont fait toutes sortes de promesses qu'ils n'ont pas respectées. Pourquoi diable devrions-nous vous croire comparativement à vos prédécesseurs qui nous ont fait eux aussi de belles promesses?
Je suis ravi que cela vous amuse.
Je dois vous dire que je ne suis toujours pas très impressionné. En fait, j'étais un peu déçu. En écoutant vos observations, je n'ai pas senti un sentiment d'urgence. C'était comme s'il s'agissait d'un rapport ordinaire.
Je vais vous donner un exemple, et j'irai plus en profondeur au prochain tour. C'est seulement que j'étais tellement furieux quand j'ai lu le rapport. Compte tenu des rapports qui ont été présentés précédemment, on aurait cru que le ministère serait beaucoup plus sensible au pétrin dans lequel il se trouve devant le Comité. Il se trouve que je lisais les pages 14 et 15. Je vous assure que je n'ai pas feuilleté le rapport pour essayer de trouver... Sur ces deux seules pages, on peut lire les 14 choses suivantes: « ne disposait pas de données », « n'avait pas recueilli », n'avait pas « accès », « ne pouvait toujours pas », « le Ministère n'avait pas fait de distinction », « n'avait pas recueilli », « n'avait pas non plus recueilli », à notre avis « n'avait pas fait de distinction », « n'a pas utilisé adéquatement », « qui auraient pu être utilisées [...], mais qui ne l'avaient pas été », « n'a pas analysé », « n'a pas examiné », « n'avait pas utilisé adéquatement », « n'a pas présenté d'analyse ».
N'a pas, n'avait pas: vous n'avez pas fait votre travail et, jusqu'à maintenant, je n'ai absolument rien entendu qui m'indique qu'il en sera autrement.
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Merci, monsieur Christopherson.
Pour bien faire comprendre ce qu'il dit, nous constatons qu'il y a un certain nombre de grands problèmes. Tout d'abord, les données constituent un problème, comme l'a dit Mme McLeod, dans différents ministères. Le ministère n'a pas recueilli les données nécessaires, importantes et complètes. Il n'a pas utilisé adéquatement les données. C'est un grand problème qu'ont d'autres ministères.
Nous savons également que le gouvernement a beaucoup parlé d'améliorer les relations avec les Premières Nations, et pourtant, le vérificateur général dit, au paragraphe 5.18 de son rapport, que le ministère n'a pas « noué un véritable dialogue avec les Premières Nations pour mesurer de manière satisfaisante si la qualité de vie des personnes vivant dans les réserves s'était améliorée et en faire dûment rapport ». Ce sont des choses importantes. Les données sont importantes, mais la vie de ces gens aussi. Est-ce que leur qualité de vie s'améliore?
Dans le plan d'action, je vois les dates d'achèvement prévues. Eh bien, d'ici juin 2021, la première partie sera terminée, et d'ici juin 2022, une autre sera terminée. Généralement, l'échéance finale prévue est 2022-2023.
Vous pouvez être sûr d'une chose. D'autres échéances sont mentionnées dans le plan d'action, et le Comité suivra de très près l'évolution des choses. Nous voulons voir une nette amélioration pour certains de ces éléments. Il ne s'agit pas seulement de la collecte de données. Il y a aussi l'amélioration mesurable de certaines de ces mesures prises sur les territoires des Premières Nations.
[Français]
Monsieur Massé, vous disposez de sept minutes.
:
Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Tremblay.
Je vais commencer par certains des propos du vérificateur général qui, d'après moi, ne s'appliquent pas tellement au secteur privé, mais qui sont de plus en plus valables en ce qui concerne le gouvernement.
Dans son message qui accompagnait les rapports du printemps, le vérificateur général a souligné que le succès se mesure désormais aux sommes dépensées, et non à des résultats supérieurs pour les peuples autochtones. C'est le cas à l'échelle du gouvernement, franchement. Ce n'est pas un seul gouvernement; cela s'est accentué avec les nombreux gouvernements qui se sont succédé.
La question que je vais vous poser est la suivante. Quel travail venez-vous accomplir devant le Comité aujourd'hui? J'ai l'impression que votre travail, aujourd'hui, est de venir dire au Comité: « Ne vous inquiétez pas. Nous travaillons à cela, et nous allons en venir à bout. Je vais faire tout ce que je peux pour veiller à ce que les résultats soient meilleurs quand nous reviendrons la prochaine fois. »
J'aimerais que votre travail, devant le Comité, aujourd'hui, soit de dire: « Il y a des problèmes très difficiles à résoudre. Nous ne possédons pas toutes les réponses, mais nous allons recueillir les données de manière à avoir l'information nécessaire pour présenter des réponses et des solutions ultérieurement, car ce n'est toujours pas fait. »
J'ai parcouru le rapport, et j'ai trouvé toute la partie sur l'éducation vraiment frustrante. Je vais vous parler de cela en privé, mais j'ai moi-même vécu l'expérience d'essayer d'aider des réserves locales avec les questions d'éducation.
J'ai une question pour le vérificateur général à ce sujet. En matière de financement de l'éducation, êtes-vous en mesure de vérifier chaque dollar dépensé par rapport aux résultats obtenus? Je sais qu'on vous fournit des résultats. Sommes-nous capables de savoir à quoi sert chaque dollar que le gouvernement du Canada a transféré?
:
Quand vous regardez les autres élèves canadiens, vous incluez les élèves autochtones qui sont peut-être partis d'une réserve pour aller vivre hors réserve. Je trouve très important que nous approfondissions notre examen de ces données.
J'ai siégé au Conseil scolaire du district de Toronto pendant neuf ans, et je sais qu'il y a, dans le système d'éducation public, des groupes clés qui sont couramment écartés de l'école. Cela englobe les élèves noirs et les élèves autochtones. Pour faire cette comparaison — et nous avons beaucoup parlé de comparer les mêmes données par opposition aux diverses façons dont vous calculez le taux d'obtention du diplôme —, vous devez tenir compte du fait qu'historiquement, et encore aujourd'hui, les élèves autochtones et les élèves noirs décrochent ou sont écartés de l'école d'une façon disproportionnée. Je trouve que c'est très important, car on pourrait ainsi brosser un tableau montrant clairement l'écart très disproportionné qui sépare les taux de réussite des élèves autochtones de ceux des élèves non autochtones à l'échelle du pays.
Je signale que dans le Conseil scolaire du district de Toronto, on a créé des programmes spécialisés et des écoles parallèles spécialement pour les élèves autochtones et les élèves noirs. L'une de ces écoles est une école alternative afrocentriste, et l'autre est une école pour les élèves des Premières Nations.
Le principe de la réconciliation ne signifie pas seulement qu'il faut veiller à ce que les élèves autochtones dans les réserves aient accès à l'éducation qu'il leur faut pour réussir, mais aussi qu'il faut se pencher sur la façon dont nous nous occupons de l'éducation à l'échelle du pays. Sommes-nous inclusifs? Intégrons-nous l'expérience vécue, les histoires et les cultures des collectivités aux populations diverses? Ce n'est que lorsque la population générale comprendra le savoir et les expériences des Autochtones que nous pourrons, en tant que pays, progresser vers la réconciliation avec les peuples autochtones.
J'aimerais aussi que nous parlions d'analyse comparative entre les sexes. Dans les données que vous avez étudiées concernant l'éducation, avez-vous tenu compte, par exemple, de la façon dont les filles réussissent par rapport aux garçons? Est-ce que cette information a été examinée?
:
Comme je l'ai dit précédemment, les gouvernements ont essayé dans le passé de transférer les responsabilités. Ils l'ont fait dans les années 1970 et 1980. Ce qu'on a surtout fait, à l'époque, c'est transférer les programmes tels quels, sans nécessairement fournir le niveau de financement nécessaire, à l'échelon de la collectivité.
Ce que nous essayons maintenant de faire, c'est de discuter au niveau global de la façon dont on va exactement planifier cela, ainsi que de la structure de reddition de comptes. Nous n'avons pas nécessairement un modèle universel.
Nous travaillons en ce moment à un modèle en Colombie-Britannique. Il permet une meilleure compréhension et une meilleure capacité d'analyser les données, de créer de nouvelles données et, en fait, de créer des programmes ou de modifier les programmes existants. C'est ce que nous souhaitons à l'avenir.
C'est ce que nous faisons maintenant. Comme on l'a déjà mentionné, le succès ne se mesure pas aux sommes dépensées. Vous devez être en mesure d'exclure la question du financement de l'équation pour pouvoir vous concentrer sur le reste.
Je dirais que c'est là où nous en sommes. Nous pouvons dire maintenant que nous nous penchons sur la question du financement, et qu'il faut maintenant que vous déterminiez comment organiser le service. Comment le faites-vous, et que faites-vous?
C'est la discussion que nous avons en ce moment, et c'est très différent de la discussion que nous avions dans le passé.
:
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Je vais d'abord m'adresser à vous, monsieur Ferguson, et, ensuite, j'aimerais entendre M. Tremblay au sujet de certains aspects.
Nous parlons... et vous venez de le mentionner, donc, c'est un très bon lien avec ce dont je veux parler.
Il s'agit d'une relation de nation à nations — au pluriel. Il est clair qu'il ne s'agit pas de quelque chose qui implique le gouvernement fédéral et un seul groupe, ni même le gouvernement fédéral et une seule province. Il y a une multitude d'interlocuteurs qui doivent participer à la négociation en tant que partenaires à part entière, si j'ai bien compris.
Toutefois, une fois que les accords sont conclus, il y a celui avec la Colombie-Britannique comme exemple, qu'en est-il de la reddition de comptes? D'après ce que je comprends, une fois qu'un accord de nation à nation est conclu, notamment un accord avec une province, le gouvernement fédéral cesse d'avoir des attentes en termes de reddition de comptes, sauf, par exemple, en ce qui concerne la Loi canadienne sur la santé. Le gouvernement fédéral s'attend à ce que les provinces respectent le cadre de cette loi, mais il ne leur demande pas de lui montrer exactement comment elles dépensent chaque dollar qui provient du transfert en matière de santé. Elles décident comment elles veulent dépenser cet argent. Il en va de même dans le cas de l'éducation ou de tout autre programme national.
Vous allez conclure ces accords, que vous allez négocier séparément. Il y en aura un certain nombre. En ce moment, nous n'avons pas toutes les données nécessaires pour déterminer si l'écart n'existe plus ou s'il s'est rétréci. Une fois que les accords auront été conclus, comment pourrons-nous obtenir ces données? Si les Premières Nations seront les seules responsables de la gestion des programmes, que ce soit dans le domaine de l'éducation, de la santé ou de la culture, ou de tout autre élément qui devrait être pris en compte selon vous, comment ferons-nous?
Nous avons tous nos différentes questions, puis, normalement, à la fin de la séance, les analystes, les chercheurs, me remettent une question à poser. Ils veulent parfois de l'information pour nous aider à rédiger un rapport sur notre étude.
Vous avez répondu à la question de M. Christopherson concernant l'écart en matière d'éducation et l'absence de rapport à ce sujet, et aussi à celle de Mme Yip, je crois, sur l'assiduité scolaire.
Or, la question qu'on m'a donnée porte sur le fait que le vérificateur général a constaté que le ministère n'avait pas fait rapport sur les résultats concernant la plupart des mesures de rendement. Plus particulièrement, la stratégie de 2014 prévoyait 23 mesures précises, mais le BVG a constaté que le ministère n'avait jamais communiqué les résultats de 17 d'entre elles. Par exemple, comme Mme Yip l'a souligné, il n'a pas fait rapport sur l'assiduité scolaire ni sur l'enseignement des langues autochtones.
Les résultats de 17 des 23 mesures n'ont jamais été communiqués. Pourquoi?
Je pense qu'il a répondu qu'il ne le savait pas à la question de M. Christopherson sur l'écart en matière d'éducation. Que pouvez-vous nous dire sur les autres?
:
Un manque de données: voilà votre réponse.
Très bien. Merci beaucoup.
Je vais demander aux membres du Comité de rester, s'il vous plaît. M. Christopherson a demandé de prendre 5 à 10 minutes pour parler des travaux du Comité.
Je remercie nos invités de leur présence. Les peaux d'original ont été distribuées dans les halls. J'en ai vu plusieurs différentes. Les gens ne les portent peut-être pas aujourd'hui, mais on leur a dit de les porter demain. Elles sont disponibles.
Merci de les avoir apportées, monsieur Tremblay.
Merci à toutes et à tous.
Je conclus habituellement en disant que si vous partez en songeant que vous auriez pu répondre à une question un peu différemment, ou si vous trouvez d'autres renseignements liés à une question qui a été posée, n'hésitez pas à communiquer avec nos analystes ou avec notre greffière. Nous veillerons à ce que vos réponses soient incluses dans notre étude et dans notre rapport.
Merci de votre présence.
Nous allons suspendre la séance pendant une minute ou deux pour permettre à nos invités de sortir, puis nous poursuivrons à huis clos.
[La séance se poursuit à huis clos.]