HUMA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 13 décembre 2016
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour tout le monde. Je suis heureux de voir que tout le monde est présent, ce matin.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 13 juin 2016, notre Comité reprend son étude sur les stratégies de réduction de la pauvreté.
Nous accueillons ce matin M. Timothy Diette, professeur agrégé Redenbaugh en économie, Washington and Lee University. Nous accueillons également M. Peter Fitzgerald, président, McMaster Children's Hospital. Bienvenue.
Nous allons également entendre par vidéoconférence, à partir de Hamilton, en Ontario, la Dre Ellen Lipman, médecin, Programme en santé mentale pour enfants et adolescents. Merci beaucoup de vous joindre à nous.
Nous recevons Tracy O'Hearn, directrice générale, Pauktuutit Inuit Women of Canada.
Bienvenue à vous tous. Les témoins sont moins nombreux que ce à quoi nous sommes habitués, et je vais donc accorder à chaque groupe 10 minutes pour les déclarations préliminaires.
Nous allons commencer par Timothy. Vous aurez la parole pendant 10 minutes, monsieur.
Merci, monsieur le président et merci aux membres du Comité.
C'est un honneur pour moi d'avoir la possibilité de faire part de quelques réflexions tirées d'une recherche dont j'ai publié les résultats avec mes collègues Art Goldsmith de la Washington and Lee University, William Darity Jr., de l'Université Duke, et Darrick Hamilton de la New School; nos travaux portaient sur les liens entre la pauvreté, le chômage et la santé mentale. De plus, mes commentaires sont étayés par mes travaux d'enseignant à la Washington and Lee University, au sein du programme Shepherd d'études interdisciplinaires sur la pauvreté et les capacités humaines.
J'ai écouté quelques portions des séances récentes de votre Comité et j'ai été impressionné tant par la qualité des témoins que par les questions posées par les membres. J'espère que mes commentaires aideront le Comité à effectuer cet important travail.
Les psychologues et les sociologues ont affirmé, dès les années 1930, que le chômage est préjudiciable à la santé émotionnelle et qu'il mine le tissu social. Les psychologues ont établi entre le manque d'emploi involontaire et la santé mentale des liens conceptuels qui prennent plusieurs formes, par exemple un développement psychosocial incomplet, un sentiment d'impuissance découlant d'un manque perçu de contrôle et l'impossibilité de toucher les avantages non monétaires du travail.
Erikson postule qu'une personnalité saine et un bon développement émotionnel à l'âge adulte exigent de croire que l'on fait des progrès afin de s'enrichir tout en contribuant à sa famille et sa collectivité. Dans le cas contraire, l'estime de soi est menacée, et cela peut provoquer de l'anxiété et des remises en question. Seligman affirme que les sentiments d'impuissance se déclarent lorsqu'une personne estime ne pas avoir beaucoup d'influence sur les événements importants de sa vie, par exemple l'obtention d'un emploi significatif. À son avis, ce sentiment d'impuissance, lorsqu'il perdure, peut mener à la dépression. Jahoda soutient que le chômage est destructeur, sur le plan psychologique, car il prive une personne des produits dérivés de l'emploi, qui sont valorisés quoique invisibles, notamment un quotidien structuré, le partage des expériences et le statut.
Dans le domaine de la psychologie, une conviction répandue veut que la réaction à des événements stressants, comme le chômage, se fasse progressivement et par étapes. L'état de choc caractérise en général la première étape, au cours de laquelle l'individu reste optimiste et intact. À mesure que le chômage se prolonge, l'individu devient pessimiste et est manifestement en détresse; au bout du compte, il devient fataliste quant à sa situation et s'adapte sans enthousiasme à son nouvel état.
On s'attend à ce que les chômeurs montrent les symptômes d'une mauvaise santé mentale en raison de leurs niveaux élevés d'anxiété, de frustration, de désillusion et d'isolement. Qui plus est, il est probable que ces sentiments seront plus vifs chez les personnes dont les responsabilités financières sont plus lourdes et celles qui se considèrent comme davantage efficaces en raison du fait qu'elles ont déjà obtenu des succès dans toutes sortes de domaines, y compris à l'école et au travail. C'est pourquoi les gens plus scolarisés sont particulièrement vulnérables aux conséquences débilitantes sur le plan émotionnel du chômage. Une foule de facteurs peuvent atténuer les effets psychologiques négatifs d'un chômage involontaire, y compris la compréhension de l'époux ou de l'épouse, des parents, des frères et soeurs, des enfants adultes et des amis.
Les spécialistes des sciences sociales de diverses disciplines ont réuni des données transversales montrant un lien entre le chômage et divers indicateurs de la santé mentale; toutefois, les chercheurs reconnaissent qu'il se peut que le lien de cause à effet soit inverse, c'est-à-dire qu'une mauvaise santé mentale ait entraîné le chômage, ce qui remettrait leurs résultats en question.
De nombreux chercheurs cherchent une solution à ce problème en examinant des personnes qui alternent entre l'emploi et le chômage; toutefois, leurs conclusions, qui confirment un lien entre le chômage et une diminution du bien-être émotionnel, bien que convaincantes, ne prouvent pas définitivement l'existence d'un lien de cause à effet, car il se peut qu'un aspect que le chercheur n'aurait pas observé ait changé avant que la personne ne perde son emploi et que c'est ce facteur, par exemple une déception au travail ou un problème de santé imprévu, qui aurait causé préjudice à son bien-être émotionnel. Kessler, Turner et House ont relevé une deuxième faille des études conventionnelles utilisant à la fois des données transversales et des données longitudinales, à savoir le choix du chômage en fonction de la santé mentale antérieure. Voilà pourquoi il est difficile d'établir clairement si c'est le chômage qui entraîne des problèmes de santé mentale.
Dans une étude récente, mes collègues et moi-même avons utilisé une nouvelle stratégie pour régler ces deux problèmes. Nous avons d'abord limité notre analyse aux personnes qui n'ont jamais eu d'épisode de problème de santé mentale au cours des 52 semaines précédentes.
Cette stratégie diminue la possibilité que ce soient des problèmes de santé mentale qui aient causé le chômage. Elle nous permet également d'interpréter les effets du chômage sur la santé émotionnelle d'une personne qui jouissait avant de perdre son emploi d'une bonne santé mentale. Soulignons toutefois que nos résultats ne peuvent s'appliquer qu'à ce sous-échantillon particulier. Je devrais également souligner que, pour tous nos travaux, nous avons utilisé des données réunies aux États-Unis, et nous hésitons toujours à appliquer les résultats d'un pays à un autre pays.
Ensuite, nous avons séparé les individus de notre échantillon en trois groupes, en fonction de leur historique d'emploi au cours de l'année ou des 52 semaines précédentes : les personnes qui ont travaillé pendant toute cette période, celles qui ont été au chômage moins de 26 semaines, les personnes que j'appelle des chômeurs à court terme, et les personnes qui ont été en chômage 26 semaines ou plus, à savoir les chômeurs à long terme. Cela nous a permis de confirmer l'hypothèse selon laquelle de courts épisodes de chômage sont moins traumatisants que des épisodes prolongés. Nos résultats ont fait la lumière sur un certain nombre d'enjeux clés, et on peut parler des causes avec une plus grande confiance que pour les autres conclusions présentées dans la littérature.
Premièrement, nous ajoutons à la base de données probantes le fait que le chômage à long terme a d'importants effets négatifs sur la santé mentale. Deuxièmement, les effets négatifs — je répète que nous parlons ici des États-Unis — sont plus importants pour les Afro-américains et les Latino-américains. Troisièmement, le chômage à court terme n'a pas d'effet préjudiciable important sur la santé mentale. Quatrièmement, les facteurs atténuants potentiels, que j'ai mentionnés plus tôt, ne semblent pas avoir une incidence substantielle sur le risque de souffrir d'une mauvaise santé mentale. Enfin, les gens plus éduqués subissent un fardeau émotionnel plus important lorsqu'ils sont longtemps au chômage.
L'ensemble des données probantes réunies par les spécialistes des sciences sociales, y compris les psychologues, laisse croire que le fait de faire fi des coûts pour la santé mentale équivaut à sous-estimer les effets négatifs d'un chômage de longue durée. Les politiques publiques qui visent l'amélioration du rendement sur le marché du travail devraient donc tenir compte des coûts du chômage pour la santé mentale. Notre recherche met en relief l'importance de mettre en oeuvre des politiques et des programmes qui réduisent le chômage, et en particulier, le chômage à long terme. De plus, les politiques publiques devraient veiller à procurer du soutien aux personnes qui sont longtemps en chômage.
Le chômage n'est pas le seul événement traumatisant associé à des effets négatifs sur la santé mentale. Dans une série d'études que j'ai menées avec les coauteurs mentionnés plus tôt, j'ai examiné les effets d'autres traumatismes, à savoir les agressions sexuelles, la violence exercée par les parents, la violence exercée par d'autres membres de la collectivité et le harcèlement criminel. Tous ces traumatismes, qu'ils aient été vécus pendant l'enfance ou à l'âge adulte, sont associés à des effets négatifs contemporains ou subséquents sur la santé mentale, le bonheur et les résultats scolaires dans le cas des enfants. Le résultat de cet examen figure dans des documents distincts.
Malheureusement, ces traumatismes sont associés à la pauvreté. Toutes ces données probantes mettent en lumière l'importance de tenir compte de manière globale de tous les coûts associés à la pauvreté. Tout cela donne à penser que, même si les outils efficaces de lutte contre la pauvreté exigent que le gouvernement y consacre des ressources importantes, l'autre option — un plus grand nombre de personnes vivant dans la pauvreté — suppose d'importants coûts monétaires et autres pour le gouvernement, les gens et la société aussi.
Merci, monsieur le président, merci aux membres du Comité. J'ai bien hâte d'entendre vos questions.
Merci beaucoup.
C'est maintenant au tour de M. Peter Fitzgerald, président du McMaster Children's Hospital, puis, par vidéoconférence, de la Dre Ellen Lipman.
Vous avez la parole.
Bonjour et merci de m'avoir donné la possibilité de parler avec vous aujourd'hui. Je suis accompagné d'Ellen Lipman, qui témoignera par vidéoconférence, comme vous venez de le dire. J'aimerais souligner que la Dre Lipman dirige le programme de santé des enfants et des jeunes, à notre hôpital, et que c'est l'un des plus importants programmes du Canada. Elle fait en outre partie des principaux chercheurs de ce domaine au Canada. Je crois que vous allez trouver que sa partie de l'exposé est très informative.
J'aimerais pour commencer féliciter votre Comité du travail qu'il effectue, l'étude des stratégies de réduction de la pauvreté, et en particulier de sa décision d'inclure dans cet important travail les enjeux liés à la santé mentale.
Pour fournir un contexte à l'exposé de la Dre Lipman, j'aimerais vous parler un peu de Hamilton, en Ontario. Comme Mme Tassi le sait, on associe habituellement Hamilton à l'industrie de l'acier, ou du moins, on le faisait, car aujourd'hui, Hamilton est une ville diversifiée qui compte plus de 500 000 habitants. Le quart environ des résidents sont nés à l'extérieur du Canada. Le niveau de revenu varie, à l'échelle de la ville, mais la pauvreté est apparente. Le centre-ville de Hamilton est l'une des régions de la province de l'Ontario où le pourcentage de la population vivant dans la pauvreté est le plus élevé. La ville de Hamilton a entre autres pour vision de devenir l'un des meilleurs endroits au Canada où élever un enfant. Toutefois, à Hamilton, un enfant sur quatre environ vit dans la pauvreté. Les liens entre la pauvreté et la santé mentale des enfants et des jeunes sont très importants pour tous ceux qui vivent et travaillent à Hamilton, et en particulier pour ceux qui travaillent dans le secteur de la santé.
J'aimerais maintenant demander à la Dre Lipman de parler de la très importante relation entre la santé mentale des enfants et des jeunes et la pauvreté et d'exposer les stratégies qui, nous le croyons, pourraient se révéler utiles dans ce dossier.
Encore une fois, merci de nous donner l'occasion de vous présenter un exposé aujourd'hui. Je vais parler des relations entre la santé mentale des enfants et des jeunes et la pauvreté, mais j'aimerais pour commencer donner un bref aperçu de ce que nous connaissons sur les problèmes de santé mentale des enfants et des jeunes.
Selon une étude sur le fardeau global de la maladie, les problèmes de santé mentale et les troubles liés à la toxicomanie sont les principales causes de ce fardeau de la maladie à l'échelle du monde, et le Canada ne fait pas exception à la règle. Même si nous pensons souvent que ces troubles se manifestent à l'âge adulte, il est important de reconnaître qu'ils se déclarent au début de la vie, et nous estimons que plus de 1,2 million d'enfants et de jeunes Canadiens, soit environ 20 %, sont touchés par un trouble de la santé mentale.
Les problèmes de santé mentale chez les enfants et les jeunes sont associés à un lourd fardeau de souffrance, y compris les répercussions sur les enfants eux-mêmes et sur les familles ainsi que les coûts pour les secteurs de la santé, de l'éducation et de la justice, pour n'en nommer que quelques-uns. Il est préoccupant de savoir qu'un bon nombre de ces enfants n'ont jamais eu accès à des services spécialisés en santé mentale. Ces problèmes, s'ils ne sont pas traités, auront de profondes conséquences, causant une détresse et des déficiences importantes tout au long de la vie. Jusqu'aux trois quarts des adultes qui ont un problème de santé mentale disent que ces problèmes ont commencé dès l'enfance ou l'adolescence.
De nombreux enfants et jeunes ayant des problèmes de santé mentale sont exposés à la pauvreté, et il y a une association dynamique et bidirectionnelle entre les troubles de santé mentale à l'enfance et à l'adolescence et la pauvreté. Même si nous pensons souvent que la pauvreté est un déterminant d'une mauvaise santé mentale, il est important de reconnaître qu'une mauvaise santé mentale peut contribuer à la pauvreté.
Premièrement, je vais me concentrer sur les problèmes de santé mentale des jeunes et des enfants qui ont une influence sur la pauvreté. Nous savons que ces problèmes sont courants et qu'ils influencent les enfants et les jeunes de nombreuses façons. Par exemple, les enfants qui ont un problème de santé mentale peuvent avoir de la difficulté à faire des choses que la plupart des enfants peuvent faire à cette étape de leur développement, par exemple faire des progrès à l'école, nouer des amitiés positives et s'entendre avec leurs frères et soeurs, leurs enseignants et leurs parents.
Des études prospectives, qui suivent les mêmes enfants jusqu'au début de l'âge adulte, fournissent des données probantes convaincantes sur les effets négatifs à long terme des problèmes de santé mentale à l'enfance sur le fonctionnement des jeunes adultes. Par exemple, 60 % des jeunes adultes qui ont eu des problèmes de santé mentale à l'enfance déclarent des résultats négatifs à l'âge adulte, par exemple le décrochage scolaire et le chômage, par rapport à 20 % des jeunes adultes qui n'ont pas connu de problème de santé mentale pendant l'enfance.
D'autres résultats négatifs chez les adultes comprennent des problèmes de santé mentale et physique, des problèmes de fonctionnement social et des problèmes juridiques. Ces déficiences à l'âge adulte ont clairement une influence sur la stabilité financière et professionnelle, et peuvent contribuer à la pauvreté.
Deuxièmement, je vais m'attacher à la pauvreté en ce qu'elle influence la santé mentale chez les enfants et les jeunes. Les enfants vivant dans la pauvreté sont de deux à trois fois plus susceptibles d'éprouver des problèmes de santé mentale. Les soins prodigués par les parents, la stimulation cognitive et l'accumulation d'une exposition aux facteurs de risques psychosociaux connexes peuvent tous expliquer pourquoi les enfants qui grandissent dans la pauvreté sont plus susceptibles de connaître des problèmes de santé mentale. Par exemple, les parents d'enfants qui vivent dans un ménage pauvre peuvent eux-mêmes avoir des problèmes de santé physique ou mentale, avoir eu de la difficulté à l'école et connaître toujours de la difficulté à conserver un emploi stable ou à fournir des ressources adéquates à leur famille. Les conditions de vie, par exemple un logement surpeuplé, peut ne pas assurer une stimulation cognitive suffisante, ce qui peut contribuer aux mauvais résultats scolaires.
Une exposition précoce à la pauvreté a été associée à une moins bonne santé mentale au début de l'âge adulte, qui découle d'une accumulation de l'exposition aux risques psychosociaux connexes, par exemple la tourmente au sein de la famille, la séparation des membres de la famille et un logement insalubre et surpeuplé. Il est évident que l'expérience de la pauvreté, pendant l'enfance, modifie les dimensions du contexte personnel, familial, scolaire et communautaire dont les enfants ont besoin pour s'épanouir et contribuer de façon significative à la société.
J'aimerais, pour terminer, m'attacher à six recommandations visant l'atténuation des effets de la pauvreté sur la santé mentale des enfants et des jeunes.
Premièrement, il faut commencer de bonne heure. On peut ainsi faire des interventions préventives et précoces, qui ciblent les problèmes comportementaux et émotionnels dès la petite enfance et sont le plus susceptibles d'avoir des répercussions importantes, puisque la trajectoire de ces problèmes commence souvent tôt et a tendance à se maintenir au fil du temps; de plus, la capacité de modifier son comportement de même que la plasticité du cerveau diminuent avec le temps.
Deuxièmement, il faut que les services soient fournis au bon moment. On peut ainsi se concentrer sur les périodes sensibles, sur le plan du développement, par exemple la petite enfance et la préadolescence, dès le moment où des symptômes ou une maladie se présentent.
Troisièmement, nous voulons pouvoir bien identifier les choses. De manière générale, pour bien identifier les choses, il faut une capacité accrue à reconnaître les comportements préoccupants, ce qui veut dire une meilleure éducation au sujet de l'éventail des comportements normaux et des signes précurseurs d'une maladie mentale chez les enfants et les jeunes. Si nous pouvons bien identifier les choses, nous pourrons le faire de façon plus systématique grâce aux systèmes de soins en place, par exemple les visites régulières des bébés et des enfants jusqu'aux soins primaires. Pour que cela fonctionne, nous aurons besoin d'investissements concertés dans le système des soins primaires. Nous voulons aussi que le processus d'identification soit axé sur le soutien, non pas sur la stigmatisation.
Quatrièmement, il faut accroître l'accessibilité des services. Nous proposons d'améliorer la formation des autres professionnels de la santé et aussi d'augmenter le financement des initiatives en santé mentale ciblant les enfants et les jeunes.
Cinquièmement, il faut fournir les services au bon endroit. Nous proposons de mettre en place des programmes universels et ciblés de prévention et d'intervention précoce dans les organismes communautaires et les organismes de santé, où se présentent les enfants qui font face à un risque élevé et les familles qui ont des besoins.
Sixièmement, il faut fournir la bonne intervention. Nous voulons des interventions qui ciblent les facteurs de risque modifiables, par exemple les fournisseurs de soins, la maladie mentale et les stratégies d'adaptation, et des stratégies parentales positives. Nous voulons des interventions systémiques et transversales de façon à pouvoir cibler non pas seulement les difficultés des enfants, mais également les besoins sociaux des familles. Nous voulons des interventions fondées sur des données probantes et nous assurer que ces interventions, si on les utilise, feront l'objet d'une évaluation. Il est certain que nous ne voulons causer aucun préjudice et que nous voulons évaluer le rapport coût-efficacité.
Nous tenons à vous remercier encore une fois de nous avoir donné la possibilité de vous présenter un exposé.
Tout le plaisir est pour nous. Merci beaucoup.
Maintenant, c'est au tour de Tracy O'Hearn, directrice générale de Pauktuutit Inuit Women of Canada.
Merci.
Ullakut. Good morning. Bonjour. Au nom de notre présidente, Rebecca Kudloo, nous remercions le président, les vice-présidents et les membres du Comité de nous avoir invitées aujourd'hui. Nous apprécions énormément l'occasion qu'il nous est donné de faire part des enjeux et des priorités des femmes inuites de toutes les régions du Canada. Mme Kudloo vit à Baker Lake, au Nunavut, le centre géographique du Canada. Elle n'a pas pu venir ici aujourd'hui vous rencontrer.
Nous espérons que votre témoignage et notre participation aideront le premier ministre à s'acquitter de son engagement à l'égard du renouvellement de la relation avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis, qui est fondée sur la réconciliation, Nous apprécions également l'engagement du premier ministre à l'égard de l'égalité entre les sexes. Nous avons bien hâte d'en voir la démonstration.
Mes commentaires, aujourd'hui, sont liés de très près aux témoignages des témoins précédents, même si je présente les choses de manière beaucoup plus générale. Aujourd'hui, j'aimerais brosser pour vous le tableau des enjeux pertinents pour les collectivités inuites dans le contexte de la pauvreté. Après avoir fourni un aperçu général des différents types de ces enjeux prévalents, je parlerai des trois préoccupations les plus pressantes : le manque de logements; la violence contre les femmes, y compris la violence sexuelle contre les enfants; et l'absence généralisée et chronique de soins visant les enfants — qui ne sont pas en général accessibles —, sans parler des interventions à la petite enfance et de toute la gamme des services qui sont tenus pour acquis dans le sud du Canada.
Il est important également de noter que les Inuits forment la population la plus jeune et dont la croissance est la plus forte au pays. Selon les dernières statistiques dont je me souviens, plus de 50 % des Inuits sont âgés de 25 ans ou moins. C'est important, aujourd'hui, et c'est important pour notre avenir immédiat, à moyen et à long terme.
Cela fait des décennies que les collectivités de l'Arctique vivent une crise du logement, et cette crise ne fait qu'empirer chaque année. Il est important de ne pas oublier que cela ne fait que deux générations que les Inuits se sont établis dans des logements permanents. Auparavant, ils menaient une vie nomade, axée sur la subsistance et l'économie traditionnelle. Tout de suite après s'être installés en collectivité, ils ont dû composer avec des institutions de gouvernance, d'éducation et de justice étrangères. Les perturbations et la dislocation culturelle ont été immédiates et profondes, et elles se font toujours sentir aujourd'hui.
Toutes ces choses ont très bien été documentées par la Commission royale sur les peuples autochtones et la Commission de vérité et réconciliation s'est en outre attardée à la question des pensionnats. Nous sommes vraiment heureux que le gouvernement se soit engagé à mettre en oeuvre la totalité des 94 appels à l'action qui ont été présentés et à respecter la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.
La crise du logement, dans le cadre de l'expérience de la colonisation vécue par les Inuits, a créé et empiré les problèmes sociaux, y compris la violence à l'égard des femmes et des enfants, la toxicomanie, le suicide et les problèmes de santé physique et mentale beaucoup plus importants. La réduction de la pauvreté dans les collectivités inuites, et en particulier les femmes inuites, ne peut se faire de façon isolée. Tous ces enjeux doivent être abordés compte tenu de l'ensemble de la population de même que de la différence entre les sexes.
Nous avons récemment mené une étude auprès de 130 femmes inuites, et elles ont affirmé que c'était le logement et l'itinérance qui représentaient le problème le plus grave et le plus urgent dans les collectivités inuites. Elles ont également souligné que l'absence de programmes de soins pour les enfants était un obstacle important aux possibilités d'éducation, de formation et d'emploi.
Lorsque nous sommes arrivées ici, ma collègue m'a rappelé que, selon Statistique Canada, en 2014, 45 % des jeunes enfants du Nunavut vivaient dans la pauvreté. Je répète, 45 %. Les femmes et les enfants inuits vivent également dans des régions du Canada où les taux de violence et l'indice de gravité de la criminalité sont les plus élevés.
Un reportage récent diffusé par le Service du Nord de Radio-Canada a rappelé à tout le monde que, chez les Inuits du Nunavut, selon une enquête sur la santé des Inuits relativement récente, 52 % des femmes inuites et 22 % des hommes déclaraient avoir été victimes de violence sexuelle lorsqu'ils étaient enfants. Étant donné ces chiffres, ces taux, et à la lumière du témoignage des autres estimés témoins qui sont ici aujourd'hui, je sais que vous pourrez comprendre l'ampleur de ces urgents besoins.
Il y a dans la région Inuit Nunangat, qui est composée des quatre régions arctiques du Canada, 53 collectivités. De ce nombre, 70 % n'offrent aucun refuge sûr pour les femmes et les enfants, ni, bien sûr, de programme complet de soutien aux victimes et aux survivants de la violence sexuelle contre les enfants. Ça n'existe tout simplement pas, là-bas.
La majorité des collectivités inuites n'ont accès à aucun programme de santé mentale, du moins pas dans la mesure où ils sont accessibles dans le sud du Canada. C'est en partie parce que, étant donné les enjeux et les autres circonstances dont ont parlé les autres témoins, le traumatisme est généralisé et n'est toujours pas réglé. Cette année, nous avons établi un plan stratégique de prévention de la violence et de guérison. Vous le trouverez sur notre site Web. Je ne voulais pas consacrer trop de temps aux recommandations très détaillées qu'il fournit. Nous y parlons sans détour de la violence sexuelle contre les enfants.
Parlons brièvement du suicide; voici les chiffres concernant le nombre estimé de décès pour 100 000 habitants dans les quatre régions inuites : dans la région d'Inuvialuit, l'Arctique de l'Ouest, 61; au Nunavut, 120, sur 100 000 habitants. Au Nunavik, la région arctique du Québec, 181. Et au Nunatsiavut, sur la côte nord du Labrador, 239. Par comparaison, le taux national de suicide dans la population canadienne se situe dans les environs de 11 décès pour 100 000 habitants.
Comme nous l'avons déjà souligné, la pauvreté contribue au stress mental et à d'autres enjeux sociaux. Les problèmes de santé mentale, de façon absolue, peuvent empêcher une personne de se donner des moyens d'existence durables, peu importe ce que ces moyens peuvent être, chaque personne ayant ses propres mesures de la réussite.
Pour envisager les choses sous l'angle de la culture, d'une culture spécifiquement inuite, il est essentiel de bien comprendre et aborder la complexité de la situation et, à coup sûr, son urgence. Comme je l'ai dit, le Canada a aujourd'hui la possibilité de s'attaquer à ces enjeux et à d'autres enjeux en mettant en oeuvre l'ensemble des recommandations découlant de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.
Nous avons eu l'occasion de prendre connaissance de certains témoignages des personnes qui ont comparu devant vous. Nous soutenons sans hésitation les recommandations présentées par Canada sans pauvreté et West Coast LEAF.
Avec la collaboration de l'ensemble du gouvernement, nous espérons réussir à élaborer des stratégies nouvelles et plus robustes qui nous permettront de nous attaquer aux défis de la réduction de la pauvreté, en particulier la pauvreté que vivent les femmes inuites.
Merci beaucoup de nous avoir accordé de votre temps. Je répondrai avec plaisir à vos questions.
Merci, madame O'Hearn.
Vous avez parlé d'un site Web et de recommandations spécifiques. Vous avez dit qu'elles étaient très détaillées. Vous n'avez pas voulu en parler pendant votre déclaration d'ouverture. Pourriez-vous s'il vous plaît envoyer tout cela à la greffière, pour que nous puissions les étudier?
J'ai apporté une copie. Je vais vous la laisser, avec plaisir. Nous serions heureuses de poursuivre notre conversation.
C'est parfait, excellent.
Merci beaucoup.
J'ai fait preuve de négligence, au début. J'ai oublié d'accueillir un visiteur. Nous avons avec nous le député MacGregor.
Merci de remplacer.
Nous allons commencer tout de suite à poser les questions.
Pour commencer, le député Zimmer.
Merci, monsieur le président.
Merci aux témoins de comparaître aujourd'hui.
J'ai deux questions, elles sont un peu longues.
Timothy, Tracy, notre étude concerne la réduction de la pauvreté. Il est certain que nous avons parlé des conditions associées à la pauvreté. Pour ma part, j'aimerais en premier lieu la prévenir. Comme je l'ai déjà dit, lorsqu'une personne qui a subi un traumatisme a besoin de soins immédiats, il y a la salle d'urgence, mais nous voulons en premier lieu prévenir les accidents. Vous pouvez appeler accident la « pauvreté », si vous acceptez cette comparaison.
Timothy, vous avez parlé de certaines conditions de la pauvreté, des effets de la pauvreté, etc. Étant donné que notre étude vise la réduction de la pauvreté, quelle stratégie utiliseriez-vous pour réduire la pauvreté?
Ma question s'adresse également à Tracy. Dans les collectivités inuites, en particulier, comment réduiriez-vous la pauvreté?
Nous allons commencer par Tim.
Je crois que les économistes vous ont fait comprendre, du moins selon les éléments de preuve que nous connaissons, que la prévention est beaucoup plus efficace. À franchement parler, nos témoins ont formulé deux ou trois suggestions, et ils ont exposé six points, en particulier sur le fait de commencer de bonne heure...
Quant au développement de la petite enfance, je crois qu'il y a les travaux du prix Nobel James Heckman, qui portaient sur les interventions dès la petite enfance. Cela vaut pour toutes les disciplines. Ce ne sont pas seulement les économistes qui en parlent, comme nous l'avons déjà entendu aujourd'hui.
Investir dès le départ — et nous avons parlé de l'importance, du fait qu'il est plus facile de réussir ces interventions si elles se font très tôt —, je crois que c'est ce qui réussit le mieux. Le défi, c'est que nous tentons constamment d'intervenir et, quant à ce qu'il faut faire pour les gens plus vieux, de trouver où nous avons commis des erreurs.
C'est, en quelques mots, ma réponse.
Merci de poser la question; c'est une question assez large.
Je crois qu'il faut immédiatement investir dans le logement. Il est essentiel de nous attaquer à quelques-uns des problèmes de base, les conditions de vie dans les collectivités inuites, que l'on décrit encore comme étant celles du tiers monde. Les interventions dès la petite enfance, l'apprentissage précoce, les soutiens pour les enfants, c'est absolument essentiel.
En même temps, nous devons nous attaquer aux problèmes de la violence, de la toxicomanie et aux autres problèmes sociaux que beaucoup trop d'enfants encore connaissent, et aussi à l'insécurité alimentaire. Les enfants ont faim, dans le Nord. Les besoins sont tellement nombreux, il faut y voir, mais je dirais que ce sont là les interventions les plus urgentes, dans l'immédiat, qui sont nécessaires.
J'aimerais parler un peu plus de ce que vous venez de suggérer, Tracy.
Vous avez parlé de certaines des conditions dans les collectivités inuites. Je ne sais pas si vous avez parlé de la dépression, mais je sais que c'est un problème dans ces régions. Il y a le taux de suicide élevé. Ces conditions entraînent différentes conséquences.
Quoi qu'il en soit, quelle serait à votre avis la condition de base? Je crois que vous avez parlé de l'évolution particulière des peuples inuits, de leur changement au cours des 50 dernières années. Je ne veux pas vous faire dire ce que vous n'avez pas dit, mais je crois que vous avez parlé de 50 ans environ.
Oui.
À ce chapitre, le mot « prévention » est important à mes yeux. Comment pourriez-vous composer avec ces conditions? Vous parlez du logement. Vous parlez de tout le reste. Vous parlez des problèmes à la maison, disons, la violence à la maison. Comment pouvons-nous faire cesser cela? Il est facile de dire que nous devons la réduire, mais comment devons-nous faire?
Je crois que c'est là ma question. J'observe les autres conditions dans les collectivités inuites, par exemple le taux de chômage élevé. Il n'y a pas grand-chose à faire, là-bas. Les gens sont littéralement occupés à regarder le temps passer.
Vous avez évoqué le retour de ces collectivités à leur économie originale. Comment pouvons-nous y revenir, comment pouvons-nous tourner le dos aux conditions actuelles? Est-ce que les collectivités demandent de revenir au mode de vie qui était le leur il y a 50 ans? Dans l'affirmative, comment modifier le temps et l'espace pour en revenir là où il faisait bon vivre? Comment pouvons-nous y retourner?
Je n'ai entendu personne qui disait vouloir reprendre la vie nomade et dépendre de nouveau du commerce des fourrures. Cette époque est depuis longtemps révolue. Je crois que ce qui a changé, c'est la perception que les gens ont du contrôle qu'ils pourraient avoir sur leur vie — l'autonomie, l'autodétermination. Il n'existe pas de solution miracle. Nous ne devons pas non plus oublier que la plupart des collectivités n'ont qu'un seul centre de santé. Il n'y a pas de médecin résident, et il n'y a pas non plus, bien sûr, de soutien spécialisé. Je crois que nous devons chercher d'autres façons d'offrir des services dans les collectivités éloignées.
Nous pourrions aussi reprendre bon nombre des enjeux que Cindy Blackstock a exposés de façon si éloquente au sujet du nombre d'enfants inuits qui sont pris en charge. Tous ces enjeux affectent les enfants inuits. J'aimerais pouvoir vous donner une seule réponse, mais je crois que, de façon plus générale, il s'agit de redonner le contrôle et l'autonomie.
Dans le cadre d'une de nos initiatives, financée par Condition féminine Canada, nous avons eu l'occasion de mener une analyse comparative entre les sexes et pertinente sur le plan culturel touchant la violence et visant à encourager les hommes à prévenir et à réduire la violence. C'est ainsi que nous avons pu réunir un bon volume de données qualitatives touchant les changements — les changements immédiats — de la culture inuite et de l'autonomie, changements qui ont détruit de façon disproportionnée les hommes inuits, qui ne se sentaient plus valorisés dans leur rôle traditionnel de chasseur, c'est-à-dire de pourvoyeur. Cela peut avoir trait au chômage qui est une conséquence des changements culturels.
Il n'y a pas de solution miracle. Je crois qu'un certain nombre de recommandations ont été présentées. Mais nous devons immédiatement commencer à nourrir les enfants, à nous assurer que les enfants sont bien nourris, que leur corps comme leur esprit est nourri, de façon qu'ils puissent grandir. J'aurais aimé pouvoir vous proposer une solution unique, mais c'est complexe.
Merci beaucoup. C'est tout le temps dont nous disposons, malheureusement.
Madame Tassi, s'il vous plaît, vous avez six minutes.
Merci, monsieur le président.
J'aimerais pour commencer remercier les témoins de leurs témoignages et de leur travail dans ce domaine très important.
J'aimerais adresser mes questions à Mme Lipman. Dans votre témoignage, il y a au moins cinq de vos recommandations, voire six, qui concernent l'accès et les interventions précoces; c'est de cela dont j'aimerais parler.
Mon expérience à titre de conseillère auprès des jeunes, à titre d'aumônière pendant plus de 20 ans, me permet d'affirmer qu'il est très difficile d'accéder à des services en santé mentale. Vous avez une expérience pratique du domaine; est-ce que les jeunes qui ont besoin de services en santé mentale peuvent obtenir ces services? Vous pourriez parler des temps d'attente et des problèmes concernant l'intervention précoce et l'accès précoce.
C'est une excellente question, et la réponse sera compliquée. Ce qui pourrait être utile, entre autres, pour comprendre cet enjeu, ce serait une des suggestions que j'ai présentées, qui, en fait, concerne de manière plus générale l'éducation sur l'éventail des comportements normaux et sur les comportements préoccupants, les premiers indices d'une maladie mentale. Si nous pensons à l'éducation de manière générale, c'est en partie parce que les gens qui se présentent à vous pour obtenir des services en santé mentale sont exactement ceux qui ont besoin de ce type d'aide. Cela pourrait faire disparaître le goulot d'étranglement, si nous donnions aux gens qui en ont besoin les services dont ils ont besoin.
Une autre suggestion s'appuie sur l'idée d'offrir une formation plus large aux gens, de façon que l'accès aux services en santé mentale soit plus étendu.
À l'heure actuelle, l'organisation des services de santé mentale est complexe. Je dirais que, couramment, les enfants et les jeunes se présentent au cabinet de leur médecin de famille. Il est vraiment important, si nous voulons que les gens aient accès aux services pertinents, de nous assurer que les médecins de famille ont de bonnes connaissances et connaissent les ressources de la collectivité.
À Hamilton, du moins, les services relèvent de deux ministères de la province de l'Ontario. Une partie est assurée par le ministère de la Santé, et une autre, par le ministère des Services à l'enfance et à la jeunesse. C'est aussi cela qui complique les choses.
Ce que je puis dire, au sujet du ministère des Services à l'enfance et à la jeunesse de l'Ontario, c'est qu'il a lancé une initiative, dans toutes les régions ou dans un certain nombre de régions spécifiques de la province, pour tenter de comprendre le mieux possible les services offerts dans la collectivité, de façon que, lorsque le processus sera terminé, tous les parents, dans toutes les collectivités, pourront répondre à la question de savoir où aller et quels services sont offerts dans la collectivité au cas où un enfant a un problème. C'est ce qu'on appelle l'initiative des organismes responsables.
C'est assez large. Je crois que je n'ai pas parlé des listes d'attente.
Je ne peux parler que des services spécialisés que nous offrons à Hamilton. Nous avons en effet une liste d'attente pour les gens qui demandent une consultation ou qui se présentent pour une évaluation et un traitement, dans le secteur de la santé mentale pour les enfants. Nous essayons d'établir nos priorités en fonction d'un certain nombre de facteurs liés au risque ou à une visite en salle d'urgence, de façon que les gens dont les besoins sont le plus pressants n'auront pas à attendre le plus longtemps. Je ne dirais pas que c'est un processus parfait, mais c'est ainsi que nous essayons de gérer la situation.
Quel est le temps d'attente, en moyenne? Pouvez-vous nous le dire? Est-ce que cette donnée est connue? Est-ce que c'est six mois? Est-ce que c'est six semaines?
Le temps d'attente moyen pour une consultation auprès d'un psychiatre pour enfant est probablement inférieur à trois mois, mais, encore une fois, cela dépend des priorités. Et c'est pour une consultation. Pour une évaluation et un traitement, c'est plus long. Je dirais que le délai est probablement de six mois, voire davantage, mais, encore une fois, nous avons des priorités et nous essayons de nous assurer que les gens dont les besoins sont les plus urgents sont vus le plus rapidement.
J'ai trouvé intéressant ce que vous avez dit au sujet des personnes qui prodiguent des soins. Je dois moi-même faire aujourd'hui une déclaration en vertu de l'article 31 du Règlement, sur la prévention du suicide et sur la reconnaissance du travail des aidants naturels.
Vous avez dit que ces personnes avaient elles aussi besoin de soutien. Auriez-vous des recommandations à présenter à notre Comité qui nous aideraient à encourager ou à soutenir les aidants naturels de façon qu'ils puissent mieux s'occuper de leurs enfants et les aider tout au long de ce parcours?
Je crois qu'il y a tout un éventail de possibilités.
D'une part, dans de nombreuses collectivités, à Hamilton, du moins, il existe souvent des programmes communautaires auxquels les parents peuvent s'adresser s'ils ont besoin d'aide pour s'occuper d'enfants difficiles ou d'enfants qui ne respectent pas les limites. Je crois qu'il faudrait, d'une part, s'assurer que les familles connaissent l'existence de ces programmes, souvent gratuits, qui peuvent les aider à acquérir davantage de connaissances et de compétences.
D'autre part, je crois que, quand quelqu'un consulte son médecin de famille pour faire part de préoccupations touchant un enfant, il faudrait aussi que le médecin examine l'adulte. Les services aux enfants sont très bien séparés des services aux adultes, et c'est dommage. Ce serait magnifique qu'une clinique de santé mentale pour adulte puisse en faire un peu plus et s'intéresse aux besoins des enfants, et que l'inverse se passe dans les cliniques pour enfants. Il est certain que, quand il s'agit d'un enfant, nous évaluons le contexte familial, mais nous n'offrons pas de service en santé mentale aux adultes.
Excellent. Merci beaucoup.
Nous laissons la parole à M. MacGregor, pour six minutes, s'il vous plaît.
Merci, monsieur le président.
J'aimerais remercier tous les témoins qui comparaissent aujourd'hui.
Madame O'Hearn, votre témoignage m'a particulièrement frappé. Étant donné que la population du nord du Canada est relativement petite et qu'elle est à une grande distance de la capitale nationale, il est important d'entendre cela.
Vous avez déclaré qu'on ne pouvait pas s'attaquer à la pauvreté de façon isolée, car elle avait de trop nombreux effets connexes, que cela se perpétue dans un cercle vicieux. Vous ciblez le manque de logements, la violence à l'égard des femmes et des enfants et l'absence de services de garde pour les enfants, dans le Nord.
Nous savons que la violence à l'égard des femmes a des effets catastrophiques sur la santé physique et mentale et qu'elle marginalise encore davantage les femmes déjà pauvres. Comme vous l'avez dit, en 2011, c'est au Nunavut que l'on a enregistré le taux le plus élevé par territoire de cas de violence conjugale ayant fait l'objet d'un rapport de police.
Étant donné l'annonce qu'a faite récemment le gouvernement fédéral, au sujet de la violence à l'égard des femmes, pensez-vous que le gouvernement en fait assez pour mettre fin à la violence contre les femmes et, dans le cas contraire, savez-vous ce que l'on pourrait faire de plus?
Il y a bien d'autres choses à faire, et on peut les faire immédiatement. À notre avis, nous n'avons pas eu d'aussi bons résultats que nous l'espérions au moment de collaborer avec le gouvernement fédéral après les élections. Certains hauts fonctionnaires des ministères m'ont dit qu'ils avaient de la difficulté à s'adapter assez rapidement à cette nouvelle vision du gouvernement. Jusqu'ici, je n'ai pas vu d'interventions ou d'initiatives importantes mises en oeuvre immédiatement par le gouvernement fédéral pour lutter contre la violence dans les collectivités inuites.
Je sais que la ministre Hajdu est en train de préparer un cadre sexospécifique de lutte contre la violence. En réalité, nous n'avons pas beaucoup contribué à ce projet. Je crois que le gouvernement devrait immédiatement lancer des initiatives visant à intervenir, ou du moins à assurer davantage la sécurité publique dans les collectivités inuites.
Merci.
Passons maintenant à la question du logement. Nous savons que l'insécurité à ce chapitre a une incidence sur la santé mentale, et, étant donné la relation particulière à l'égard de laquelle le gouvernement fédéral s'est engagé — une relation renouvelée avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis — et le rôle spécial que joue le gouvernement fédéral auprès des gouvernements territoriaux, quel serait, à votre avis, le rôle que le gouvernement fédéral devrait assumer dans le dossier de l'insécurité en matière de logement?
Les aspects techniques de la question du logement dépassent le mandat de notre organisation. Je sais que les quatre organisations régionales de revendications territoriales essaient activement d'entamer des discussions avec le gouvernement fédéral. Il faut tout simplement qu'il y en ait plus.
La saison propice à la construction pose des défis partout dans l'Arctique. Il faut que les matériaux soient transportés par barges avant le début de la période de construction de l'année. On connaît beaucoup des problèmes. On connaît beaucoup des solutions. Je crois que le gouvernement actuel manifeste davantage de volonté politique, mais cela va au-delà de mon mandat ou de mon expertise, et je ne peux pas vous donner une réponse plus détaillée.
Les investissements dans le logement, de manière générale, pour ce qui est de régler toute la gamme des problèmes associés à la pauvreté... Seriez-vous d'accord pour dire que, si nous arrivons vraiment à offrir aux gens un toit décent et abordable, il y aurait beaucoup de retombées dans d'autres secteurs?
Mon autre question concerne les services de garde pour les enfants.
Il est certain que la prestation pour enfant est un revenu apprécié, je puis vous le dire. J'ai de jeunes enfants, et je me souviens de l'époque, dans ma vie précédente, où mon épouse et moi-même devions travailler pour arriver à payer les services de garde. J'ai bien sûr rencontré de nombreuses familles qui... Même dans les régions du sud du Canada, le manque de places en services de garde est un véritable problème.
Vous avez mentionné spécifiquement, dans votre déclaration préliminaire, que l'absence de places en services de garde — sans tenir compte de la prestation pour enfant — constitue un obstacle important à l'éducation, à la formation, à l'avancement professionnel, et cela vaut en particulier pour les femmes.
Pourriez-vous en dire un peu plus à ce sujet?
Absolument.
Il manque d'infrastructures physiques, il manque physiquement de place pour ouvrir un centre de garde pour les enfants. Les travailleurs des services de garde manquent de possibilités de renforcement de leurs capacités. L'infrastructure, à mon avis, est l'un des principaux défis. Si vous pensez que, par rapport au logement... Il n'est pas rare de voir des logements occupés par 13 ou 14 personnes, et ces logements ont probablement besoin de réparations majeures. Cela limite les options, non pas seulement pour les femmes, mais pour tous les Inuits, et c'est un obstacle infranchissable pour qui veut intervenir sainement au début de la vie.
Merci, monsieur le président.
Merci à nos témoins de ce matin.
Je viens de la circonscription de Saint John—Rothesay, au Nouveau-Brunswick, une circonscription qui arrive malheureusement en tête de liste, au pays, quant à la pauvreté des enfants. Elle arrive au troisième rang quant aux grossesses chez les adolescentes, et, au chapitre de la santé mentale, elle vit une situation de crise. Il est certain que les aidants naturels et les personnes qui offrent de l'aident ne savent plus vers qui se tourner; leurs besoins sont immenses.
Madame Lipman, merci de votre exposé. Mes premières questions s'adressent à vous.
Selon vos recherches, comment la santé mentale des enfants nés de mères adolescentes se compare-t-elle à la santé mentale des enfants dont les parents étaient adultes? Pourriez-vous en dire un peu plus à ce sujet?
Ce que nous savons, c'est que les enfants nés de parents adolescents ont davantage de problèmes de santé mentale que les enfants dont les parents étaient plus vieux, avaient dépassé l'adolescence. Il est important de chercher à connaître les raisons de cet état de fait. Le fait d'être une mère adolescente n'est probablement pas en soi une raison ou une cause. Il arrive souvent que les adolescentes qui deviennent mère aient coupé les liens avec leur famille, vivent dans la pauvreté et ne soient pas très scolarisées. Encore une fois, ce sont ces facteurs de risque psychologiques-là qui contribuent aux difficultés.
C'est compliqué. La raison n'en est pas toujours tout simplement que la mère était une adolescente. Cela tient beaucoup au contexte, et il est important d'en tenir compte également.
Est-ce que vous me comprenez?
Je vous comprends, et je vous remercie.
Évidemment, puisque nous menons cette étude, nous aimerions que les témoins et les personnes qui présentent des exposés nous proposent des façons innovatrices et des idées dont nous pourrons faire état à notre gouvernement de manière à faire changer les choses.
Dans cet esprit, quels changements stratégiques recommanderiez-vous qui nous permettraient de nous attaquer plus efficacement au problème de santé mentale dans ce sous-groupe désavantagé? Que nous suggéreriez-vous de faire?
Je crois qu'il serait important d'offrir aux adolescentes qui deviennent mères des soutiens dans la collectivité, et cela peut prendre toutes sortes de formes. Je sais qu'il y a à Hamilton certains endroits où les femmes peuvent vivre, pendant leur grossesse ou peu après avoir donné naissance, et on y offre des possibilités d'éducation, de façon qu'elles puissent continuer à étudier si elles le désirent.
Je sais qu'il y a dans certaines écoles secondaires des services de garde, et les mères adolescentes peuvent poursuivre leurs études, et cela aussi est important. Cela pourrait prendre plusieurs formes, mais je crois qu'il y a une chose d'importante, c'est qu'elles ne doivent pas avoir à mettre fin à leurs études. Un diplôme d'études secondaires est un indicateur vraiment important de la réussite future, et, si nous les aidions à avoir accès à l'éducation et à tout ce dont ces mères ont besoin, des services de garde, des moyens de stimuler les enfants, également...
Nous avons à Saint John une organisation extraordinaire qui s'appelle First Steps Housing, qui accueille les mères adolescentes et leur offre beaucoup de soutien.
Je crois que ma dernière question à votre intention est la suivante: pourriez-vous me donner des suggestions ou des recommandations sur la façon dont nous pourrions mieux harmoniser le travail des gouvernements fédéral et provinciaux quant aux mesures de soutien pour les soins en santé mentale?
Je connais la situation de l'Ontario mieux que toute autre chose. Et en Ontario aussi, c'est très compliqué, étant donné que deux ministères différents sont concernés. Je crois que la première chose que je dirais, ce serait qu'il faudrait que la province mette de l'ordre dans tout cela en cherchant à rendre cela le moins compliqué possible.
Je crois que les initiatives fédérales que les provinces pourraient reprendre constituent un aspect important auquel il faudrait aussi réfléchir. Récemment, j'assistais à la conférence de la Commission de la santé mentale du Canada, et l'accent était vraiment mis sur les jeunes à l'âge de la transition, les nouveaux adultes. Pour ces jeunes de 15 à 24 ans, qui quittent l'enfance et l'adolescence et entrent dans l'âge adulte, ce type d'initiatives pourrait vraiment être repris par les provinces.
Je m'excuse, je crois que j'ai parlé trop longtemps.
Non, je l'apprécie.
J'essayais tout simplement d'en apprendre le plus possible. J'apprécie vos réponses.
Monsieur Fitzgerald, je suis tout simplement curieux. Est-ce que cet hôpital collabore avec d'autres hôpitaux pour échanger des pratiques exemplaires? Faut-il appliquer une approche gouvernementale au moment d'échanger des pratiques exemplaires associées à des solutions qui fonctionnent? Est-ce que vous comparez souvent vos notes avec celles des autres hôpitaux?
Oui. Je crois que c'est une excellente question. Cela nous ramène en fait à votre commentaire au sujet des politiques, ou à la question de savoir comment nous pouvons échanger des pratiques exemplaires.
Il y a les établissements d'enseignement, et toutes sortes de mécanismes pour faire cela. J'enchaînerais avec votre précédent commentaire au sujet de la politique; le gouvernement fédéral peut avoir une incidence en fournissant des ressources pour la recherche, qui nous permet de recueillir les meilleures données probantes qui soient et de trouver les meilleures possibilités. Nous n'allons pas résoudre tous les problèmes, ni même quelques-uns des problèmes soulevés aujourd'hui, à court terme. Nous devons nous concentrer sur ce qui constituera notre plus importante possibilité. La clé, c'est de cerner cela en utilisant les meilleures données probantes qui soient.
Merci beaucoup.
Je suis désolé, je vous coupe la parole.
Nous passons maintenant à M. Ruimy, s'il vous plaît.
Merci à vous tous d'être venus ici aujourd'hui.
Il me semble que nous tournons en rond. C'est toujours la même chose. Si nous savons que la santé mentale a des liens critiques avec la pauvreté, quels sont les obstacles qui nous empêchent d'aller plus loin, madame Lipman? Qu'est-ce qui nous en empêche?
Si nous savons que la prévention en matière de santé mentale... Et nous savons que la santé mentale est un important facteur de la pauvreté. Nous avons un gouvernement. Nous avons des administrations municipales, provinciales, fédérales, nous avons toutes ces administrations que nous essayons de surveiller. Qu'est-ce qui nous empêche, en fait, d'aller de l'avant? Est-ce strictement une question d'argent ou est-ce une question de politiques? Quels sont les obstacles, entre autres?
Je crois que cela est multidimensionnel. Je crois que l'accès aux ressources en est une partie. Je crois que des données probantes sur les interventions efficaces ou les choses qui peuvent être utiles... Nous avons un bon volume de données, mais nous devons en avoir davantage. Je me ferais l'écho de la suggestion du Dr Fitzgerald, quant à la capacité de mener davantage de recherches pour savoir ce qui fonctionne vraiment, dans cette population.
L'autre chose, tout simplement, c'est en réalité la stigmatisation liée aux problèmes de santé mentale. Je crois que les choses sont bien mieux qu'elles ne l'étaient il y a 20 ans, mais il me serait beaucoup plus facile de vous parler de mon problème de diabète que de mon problème d'anxiété ou de ma dépression. Je crois que le fait que certaines célébrités parlent de leurs problèmes de santé mentale a été utile à certains points de vue, quoique, à certains égards, il y a aussi de la désinformation à ce chapitre. Toutefois, cela a quand même aidé un peu. Je crois que l'accès à Internet et la possibilité de trouver de l'information en un clin d'oeil ont probablement aussi été utiles.
Je crois que, parfois, des jeunes qui ont des préoccupations ou des parents qui s'inquiètent pour leurs enfants hésitent à consulter. Ils ne savent pas vraiment ce qui est normal et ce qui ne l'est pas. Ils pensent que tout se réglera avec le temps. Ils préféreraient ne pas s'en occuper.
Encore une fois, je crois que la stigmatisation systématique, même si la situation est meilleure qu'il y a 20 ou 25 ans, reste probablement toujours un facteur, dans une certaine mesure.
Encore une fois, nous en revenons à la même chose. Il est question d'administrations. Il est question de stigmatisation, qui ne semble pas disparaître.
J'ai rencontré mon conseil de jeunes, il y a deux ou trois semaines, et ils ont passé deux heures à parler de la santé mentale chez les jeunes. Ce sont des élèves qui fréquentent une école. Ce qu'ils affirment, c'est que ces brochures, ces programmes, ne fonctionnent pas. Pour on ne sait trop quelle raison, ils ne fonctionnent pas. Si nous allons un jour tenter de régler la situation, nous avons besoin d'une orientation.
Nous n'arrêtons pas de dire : « Commencez tôt ». Qu'est-ce que cela veut vraiment dire? Comment le gouvernement fédéral aide-t-il à commencer tôt? Est-ce strictement une affaire provinciale?
Cette question s'adresse à quiconque veut intervenir à ce sujet.
Je dirais qu'il est d'intérêt national que les gens comprennent ce que sont une croissance et un développement normaux et quels sont les signes précoces dont nous devrions nous préoccuper et pour lesquels il faudrait obtenir une évaluation ou une aide supplémentaires. Je pense qu'il s'agit d'une position nationale importante à adopter.
Je suis d'accord. Je pense que le gouvernement fédéral a un rôle important à jouer afin de diriger cette initiative relativement à la santé mentale des enfants et des jeunes. Bien entendu, ce n'est pas lui qui fournit les soins. Cette responsabilité est déléguée aux provinces. Toutefois, il est très important qu'il assure un « leadership réfléchi », car nous voulons adopter une approche uniforme à l'échelle du pays. Les écarts dans la pratique réduisent la qualité.
Selon moi, le gouvernement fédéral peut jouer un vrai rôle de leadership pour ce qui est d'établir les normes.
Pour répondre à votre question ainsi qu'à quelques-unes de celles qui ont été posées plus tôt en ce qui concerne l'éducation — sur quoi je me suis concentré —, l'éducation veut aussi dire aider les parents à être de meilleurs parents. Il existe de bons programmes dans le cadre desquels on intervient dès la naissance, puis on commence à fournir de l'aide. Des infirmières rendent visite au ménage et offrent de l'aide. Elles contribuent également à la création d'une communauté en recensant les autres nouvelles mères de la région, afin qu'elles puissent établir un réseau de soutien. Au bout du compte, cela réduit l'anxiété et le stress au sein du ménage.
Comme cela a été mentionné plus tôt, le logement fait partie des éléments qui permettent d'obtenir ce résultat. Certaines des recherches que j'ai menées sur l'itinérance et sur la façon dont elle accroît la probabilité d'être victime de violence abordent la réduction de ces sentiments. Il s'agit là de deux ou trois commentaires.
Merci.
En fin de compte, selon moi, actuellement, nous n'y arrivons pas. Tous nos gouvernements abandonnent nos enfants. Le rôle que nous devons jouer aujourd'hui — et ce que j'espère que nous pourrons en retirer — consiste à façonner les politiques concrètes et les pratiques exemplaires que vous avez mentionnées. Il s'agit de la clé, et c'est ce que nous espérons en retirer. Au bout du compte, nous abandonnons nos enfants.
Je viens tout juste de découvrir que, dans ma circonscription, 15 jeunes — des enfants, des jeunes de 14, 15 ans — vivent dans la rue. Nous en avons 30 autres qui couchent chez des amis. Je suis là à tenter de déterminer comment les aider. Je n'arrête pas de me buter à des « Ce n'est pas notre problème. C'est provincial » ou à des « C'est d'ordre médical ». Cette situation doit cesser. Nous devons trouver une façon de travailler ensemble dans nos politiques.
Je pense que mon temps est écoulé.
Je remercie infiniment les témoins de leur présence pour aborder ce sujet très important. Parmi les réflexions dont nous a fait part mon collègue M. Ruimy concernant la lutte au chapitre des responsabilités des administrations — que ce soit provincial ou fédéral —, je pense que le thème commun, c'est l'importance du leadership assuré par le gouvernement fédéral. Je pense que c'est ce qui a été communiqué, et nous l'avions déjà entendu dire. Qu'il s'agisse de prodiguer des soins aux personnes âgées, de s'occuper des itinérants ou de créer un environnement économique sain dans lequel les gens peuvent prospérer, nous devons voir le gouvernement fédéral assumer un leadership.
Monsieur Diette, j'ai vraiment apprécié votre témoignage et l'importance de découvrir le lien de cause à effet, ce qui cause la pauvreté. J'ai entendu une discussion intéressante il y a deux ou trois semaines au sujet de ce qui crée la richesse, de la façon dont elle est créée et de la façon dont la pauvreté est créée, et s'il s'agit d'un choix.
Dans certains cas, ce pourrait être le cas, mais le leadership du gouvernement fédéral que nous devons créer, c'est un environnement dans lequel il est possible non pas de désespérer, de sombrer dans la dépression, où les gens se sentent piégés à long terme et aboutissent avec des maladies mentales possibles... Il faut plutôt créer un environnement dans lequel les gens ont de l'espoir, qui présente des possibilités de croissance, et où les gens peuvent choisir de sortir de la pauvreté, si on leur en donne l'occasion.
Pendant mon vol de retour — je vis à Vancouver et je prends l'avion pour Ottawa toutes les fins de semaine —, j'ai vu un article très intéressant dans le Financial Post. Il s'intitule « Arrested Development ». Il soulignait que des projets d'infrastructure dont la valeur totalise 129 milliards de dollars sont actuellement bloqués ou arrêtés, au Canada. Cette année seulement, de 8 à 12 milliards de dollars seront perdus.
Nous avons entendu dire qu'il y a une bande autochtone — je n'arrive pas à me souvenir du nom de la personne qui l'a affirmé, mais espérons qu'elle va témoigner —, au sein de laquelle le taux de chômage dans la réserve est passé de 80 % à zéro grâce au développement. Si notre mise en valeur des ressources naturelles crée des emplois et de la prospérité dans les secteurs minier, forestier, pétrolier et gazier et hydroélectrique, une fois que le développement cesse et qu'il n'y a plus de perspectives d'emploi dans ces collectivités, on obtient l'environnement de désespoir.
J'ai trouvé cela très intéressant, et il s'agit encore une fois d'un exemple du fait que le gouvernement doit faire preuve de leadership en s'occupant de cet enjeu. Il a fait une annonce selon laquelle des consultations doivent être tenues et il faut travailler avec les collectivités. Toutefois, il faut également que des décisions sages soient prises pour nous intégrer et créer un environnement dans lequel les gens peuvent travailler.
Parmi vos facteurs de causalité, vous avez évoqué les divers facteurs de stress. Un lourd fardeau fiscal est-il aussi une cause possible de désespoir, lorsque des gens travaillent et triment pour subvenir aux besoins de leur famille, mais ne semblent jamais pouvoir s'en sortir en raison du taux d'imposition? S'agit-il là d'une autre cause possible de dépression et de désespoir... le fait de sembler ne jamais pouvoir s'en sortir?
Cette question échappait à la portée de la recherche que je menais, mais je souscrirais certes à l'idée selon laquelle, en général, ce genre de choses — l'anxiété, les facteurs de stress et certainement la notion d'un lourd fardeau fiscal qui limite les ressources familiales — génère ce genre de stress, tout à fait.
Durant le vol de retour, j'ai également lu un article intitulé « Pension delays contribute to putting more veterans into financial crisis ». L'article mentionne ceci :
L'incapacité du gouvernement fédéral de faire parvenir en temps opportun les chèques de pension aux soldats qui prennent leur retraite fait partie des facteurs qui contribuent à une augmentation marquée du nombre d'appels adressés à une organisation qui s'occupe des anciens combattants en crise, selon un membre de la direction du groupe.
Il s'agit d'anciens combattants — cette année seulement, il y en a eu des centaines — qui deviennent sans abri parce qu'ils ne disposent pas du soutien financier dont ils ont besoin.
Il ne s'agit là que de quelques exemples de domaines dont le gouvernement fédéral — pas le provincial — est responsable. Je ne vais pas attribuer le blâme au gouvernement actuel précisément, mais nous devons faire mieux. Comme l'a dit M. Ruimy, nous devons assurer une meilleure prestation des services. Une grande partie de la discussion a été axée sur la compétence provinciale, mais il y a de nombreuses manières dont le gouvernement fédéral a échoué, lui aussi, et, si nous créons un environnement de désespoir, cela met tout le monde à risque. Êtes-vous d'accord?
[Français]
Merci, monsieur le président.
Merci à tous les témoins d'être ici ce matin.
Ma question s'adresse à Mme O'Hearn et concerne les communautés autochtones et inuites.
Nous savons qu'il y a des enjeux culturels propres à chaque communauté. Des témoins nous ont affirmé qu'il y avait un lien direct entre la capacité à maintenir un emploi, la santé mentale et la réduction de la pauvreté.
Quel est votre avis quant à cette affirmation?
Bonjour.
Je vous remercie de la question. Je m'excuse, mais je parle très peu français.
[Traduction]
Dans les collectivités inuites, il y a souvent un manque de perspectives d'emploi dû à la taille de la collectivité. Nous sommes également préoccupés par l'exploration et la mise en valeur du pétrole et du gaz, en raison du cycle d'expansion et de ralentissement de beaucoup de ces projets d'exploration. Nous savons, de notre point de vue — vu que nous avons effectué des recherches qualitatives, en partenariat avec l'Université de la Colombie-Britannique — que, sans planification adéquate effectuée en consultation avec la collectivité dans le but de prévoir certains des autres problèmes sociaux qui pourraient être aggravés, comme la violence faite aux femmes, la toxicomanie et les ITSS... Il faut procéder à cette planification avant qu'un lieu devienne actif.
Cela me donne aussi la possibilité d'aborder une question précédente. Cela fait un certain temps que j'ai lu la recherche, mais des recherches ont été effectuées au sujet du développement économique et de la correspondance culturelle, et je crois que c'était à Harvard, à la Kennedy School of Government. J'ai le plaisir de rencontrer les chercheurs, mais c'était il y a un certain nombre d'années. J'encouragerais le Comité à examiner ces recherches. Il est question de pratiques exemplaires. Qu'il s'agisse de l'exploitation pétrolière et gazière, de la foresterie ou de la pêche, de tenter de créer de nouvelles économies ou de travailler avec des Autochtones, la correspondance culturelle est une composante essentielle du succès. Que la correspondance soit la langue ou la culture, peu importe ce qu'elle doit être pour une communauté ou une personne particulière, elle peut réellement contribuer au succès.
[Français]
La culture inuite est presque entièrement disparue, ce qui explique en partie le désarroi qui existe dans les communautés. On retrouve 14 petites communautés réparties sur les territoires de la baie d'Hudson et de la baie d'Ungava. Je crois qu'il appartient à chacune de ces communautés de se prendre en main. Ce n'est pas toujours facile. C'est mon expérience de deux années passées avec les Inuits à Kuujjuaq et à Akulivik qui m'amène à tirer ces conclusions.
J'ai une autre question pour vous.
Un représentant de la Commission de la santé mentale du Canada nous a parlé du programme La tête haute. Conçu pour les étudiants adolescents, ce programme a pour but de parler de santé mentale et de réduire la stigmatisation. Il est mené en partenariat avec les communautés et les Premières Nations.
Un programme ainsi réalisé vous semble-t-il porteur de succès dans vos communautés? Comment le gouvernement fédéral peut-il aider à l'élaboration de programmes efficaces?
[Traduction]
Merci. Je pense que vous avez soulevé une bonne question. Dans notre organisation, nous étudions toujours ce qui pourrait fonctionner dans d'autres régions du pays, dans d'autres secteurs de la société, dans l'optique d'adapter des pratiques prometteuses et de travailler avec des experts inuits, quel que puisse être le sujet, qu'il s'agisse de développement sanitaire ou économique, afin de procéder à l'adaptation là où nous le pouvons. Je sais que la Croix-Rouge travaille activement en partenariat avec la Régie régionale de la santé et des services sociaux du Nunavik relativement à un programme appelé EduRespect, un projet de prévention de la violence.
Je suis ravie d'entendre dire que vous avez passé du temps au Nunavik. Toutefois, je dirais que l'inuktitut fait partie des trois langues autochtones du Canada qui devraient survivre, et je pense qu'au Nunavik, environ 80 % de la population mène la majeure partie de sa vie dans cette langue. Il importe de raviver et de soutenir la culture afin qu'elle puisse s'épanouir de nouveau.
J'espère avoir répondu à votre question. Je ne connais pas bien le programme auquel vous avez fait allusion, qu'a fait ressortir l'Association canadienne pour la santé mentale.
Je pense que l'inuktitut est très difficile à comprendre et à parler.
J'ai appris de mes conversations avec les gens, là-bas, que le français et l'anglais sont mis en oeuvre dans les écoles. C'est très bon. Les programmes se déroulent très bien. Bien entendu, la jeune génération est mieux en mesure de parler diverses langues, si elle a cette possibilité.
Je vous remercie de vos délibérations.
Merci.
Maintenant, nous cédons la parole au député Poilievre, pour cinq minutes; vous avez la parole.
Ma question s'adresse à M. Diette.
La raison pour laquelle j'ai pensé que votre témoignage pourrait être particulièrement intéressant, aujourd'hui, c'est que je crois savoir que vous avez effectué certaines recherches sur le lien entre le chômage et la santé mentale. La nature de cette discussion s'apparente à l'oeuf et à la poule. Il est possible qu'une mauvaise santé mentale cause le chômage, mais il est également possible que le chômage donne lieu à une mauvaise santé mentale.
Pouvez-vous nous faire part des conclusions relatives à l'incidence de longues périodes sans travail sur la santé mentale d'une personne?
Merci de poser la question.
Il s'agit certainement d'un problème de l'œuf ou la poule, comme vous dites, et je pense que vous avez bien raison, car cela va bel et bien dans les deux sens. Une partie de ce à quoi nous voulions contribuer dans le cadre de notre recherche consistait à étudier explicitement les cas de chômage causant la mauvaise santé mentale.
Essentiellement, ce que nous avons fait, à cette fin, c'est isoler les variables. Nous avons étudié deux populations différentes. Les membres d'une population avaient connu une mauvaise santé mentale plus tôt; par conséquent, nous les avons tout de même analysés, mais nous avons mis ces données à l'écart et les avons étudiées séparément. Les autres personnes avaient une santé mentale solide avant toute situation de chômage. Nous avons procédé à l'étude et découvert que l'effet d'un chômage à court terme n'était pas préjudiciable. Dans le cadre d'une recherche supplémentaire, nous avons trouvé qu'il était très intéressant que, dans le contexte des États-Unis, chez les femmes afro-américaines, celles qui ont la peau foncée — qui sont plus susceptibles, comme l'avait souligné une recherche antérieure, de faire l'objet de discrimination —, étaient plus susceptibles de sombrer dans la dépression en raison du chômage. Nous avons au moins formulé l'hypothèse selon laquelle c'est parce que leurs perspectives d'emploi ne sont pas aussi bonnes, ce qui nous ramène d'une certaine manière à la question précédente au sujet du rôle des perspectives et de leur influence...
Le désespoir, oui.
Concernant ce que vous avez dit, oui. Le chômage à court terme ne pose pas de problème à ces personnes, mais à long terme... La période de 26 semaines n'a rien de magique. Il s'agit de la période qui était visée dans notre étude. Le chômage à long terme était celui qui était associé à une mauvaise santé mentale.
Il a été dit que l'on a besoin d'un revenu pour vivre, mais on a besoin d'un emploi pour gagner sa vie. Il n'est pas nécessaire que l'emploi soit officiel. Ce peut être élever ses enfants à la maison ou travailler à la ferme familiale, mais un certain type de travail est un besoin humain de base. Seriez-vous d'accord pour dire que le travail est un besoin humain de base qui dépasse le revenu qu'il génère?
Merci de poser la question.
Oui, je souscris à cette opinion. Je veux souligner — je l'ai mentionné un peu dans le témoignage — le rôle important des aspects non monétaires du travail, c'est-à-dire l'idée de la structure de la journée, du but et du sens que tirent les gens du travail, et la façon dont il organise la société, et c'est de cela que parlent les sociologues. Le travail joue un rôle incroyablement important. Pour les personnes qui vivent une situation de chômage ou qui n'ont pas d'espoir, il y a l'importance du counseling en emploi pour les aider à comprendre où pourraient se trouver les perspectives et la formation professionnelle afin de les aider à trouver un nouvel emploi.
Je pense que vos commentaires complètent ceux que j'ai entendus de la part de Mme O'Hearn, quand elle a parlé de la perte de la culture de chasseurs et cueilleurs des hommes autochtones et de la façon dont cette perte affecte leur sentiment d'utilité. Selon l'ancienne tradition, la chasse n'est pas seulement quelque chose que les gens faisaient pour se nourrir; c'est aussi un but dans la vie, et c'est une vocation. Lorsque les gens perdent la capacité de travailler et de contribuer en raison d'une absence de possibilités, je pense que nous convenons tous du fait qu'ils souffrent.
Je me demande si Mme O'Hearn pourrait donner des détails sur les commentaires qu'elle a formulés plus tôt à cet égard.
Merci.
Je suis heureuse d'avoir l'occasion de le faire. Nous n'avons pas eu beaucoup de temps pour nous préparer à comparaître devant vous aujourd'hui, mais, quand nous discutions, hier, au sujet de ce que nous voulions aborder, nous avons parlé des personnes qui établissent un gagne-pain durable en fonction de leurs propres mesures de succès et du fait que le succès n'est pas nécessairement monétaire. Il ne s'agit pas nécessairement de l'accumulation de richesse.
Ce peut être le fait d'être parent, d'élever des enfants et de contribuer au mieux-être de la collectivité et de la famille. La chasse, par exemple, requiert une grande compétence, connaissance, compréhension et interprétation des conditions météorologiques et de la survie au Nunavik, dans l'Arctique ou les régions subarctiques, alors je pense que, en ce qui concerne le travail — tout à fait —, nous le faisons tous les jours et pourrions ne même pas nous rendre compte que, ce que nous faisons, c'est du travail.
Je sais que, dans le passé, il y avait un bien plus grand équilibre et une plus grande valeur attribuée au travail traditionnellement effectué par les hommes et les femmes des cultures inuites et de nos collectivités. Dans la majorité des cas, les hommes étaient les chasseurs, mais les femmes devaient également préparer les peaux. Elles devaient savoir comment faire des vêtements hydrofuges et très chauds, alors il y avait un besoin réciproque, une dépendance à des fins de survie, mais aussi des personnes qui en retiraient de la fierté et un sentiment d'avoir de la valeur pour leur famille et leur collectivité, quelle qu'ait pu être leur contribution.
Je sais que nous vivons dans une économie salariale. Tout le monde ne veut pas une grosse maison à Forest Hill, selon moi. Cela dépend des valeurs de chacun, je suppose, et des souhaits. La question que vous posez est très vaste.
Merci.
Espérons que nous disposerons de plus de temps durant la deuxième série d'interventions pour approfondir cette question.
Je dois passer rapidement au député MacGregor, pour trois minutes.
Merci, monsieur le président.
Madame O'Hearn, nous savons que le taux de suicide chez les Inuits est de 11 fois supérieur à la moyenne nationale et que la majorité de ceux qui font des tentatives sont des personnes âgées de moins de 30 ans. Nous savons que plus de 1 000 appels concernant des tentatives de suicide sont reçus chaque année au Nunavut, territoire dont la population est à peine supérieure à 30 000 personnes. Votre organisation en est une qui répond aux besoins des femmes inuites. Avez-vous une compréhension sexospécifique du suicide au Nunavut? S'agit-il de chaque chose que nous, au gouvernement fédéral, devons mieux comprendre?
Je vous remercie de votre question.
À titre d'exemple, je pense que nous comprenons bien certains des éléments sexospécifiques de ces taux de suicide. Nous avons besoin de données probantes. Nous n'en avons pas.
Dans toute culture et dans tout pays, il est très difficile de recueillir des données probantes au sujet de l'exploitation sexuelle des enfants. C'est très difficile pour beaucoup de raisons. Nous disposons des crimes et des condamnations signalées par la police, qui aident à documenter les taux connus et signalés de criminalité. En réalité, nous ne savons pas quelle est la vraie incidence des crimes non signalés. Nous savons que des recherches précédentes avaient indiqué qu'une femme peut subir jusqu'à 35 agressions dans son domicile avant de s'adresser à la police. Ces choses sont très difficiles à quantifier, et il est très difficile d'élaborer des données probantes pour elles, mais, absolument, nous savons, grâce à notre travail, que la violence physique et sexuelle est un problème, mais il y a aussi le manque de soutien pour survivre à ces traumatismes, et ils deviennent cumulatifs.
Nous parlons du continuum de la violence tout au long de la durée de la vie. Le gouvernement fédéral peut tout à fait apporter une contribution importante au soutien d'une petite partie de ce que nous tentons de faire. Si nous examinons les données probantes précédentes, nous pouvons constater que des travaux ont été effectués en ce qui concerne les expériences néfastes durant l'enfance qui quantifient chaque traumatisme vécu par une personne et tentent de mesurer ces conséquences aggravées qui peuvent avoir un effet cumulatif vraiment dévastateur sur une personne. Afin que l'on puisse élaborer des interventions appropriées, il faut comprendre l'étendue et la profondeur de ces traumatismes, quels qu'ils puissent être.
Tout à fait... concernant le gouvernement fédéral, nous sommes là, et nous sommes prêts. Nous devons rétablir un peu de notre capacité. Il ne s'agit là que d'un exemple du travail que nous voudrions beaucoup entreprendre pour ce qui est de tenter d'établir des données probantes permettant d'offrir des services de soutien culturellement adaptés sur mesure.
Merci.
Nous commençons maintenant la deuxième série de questions.
Nous allons passer au député Poilievre, pour six minutes; vous avez la parole.
Monsieur Diette, je voudrais poursuivre notre discussion sur les questions abordées plus tôt. Vous avez mentionné que les problèmes de santé mentale empiraient à mesure que la période de chômage se prolongeait.
Pouvez-vous me dire ce qui a mené à ce lien, à la lumière de la recherche que vous avez effectuée?
Malheureusement, la nature de la recherche et les données que nous avons utilisées n'ont pas permis d'arriver aux mécanismes sous-jacents. Nous n'avons pas été en mesure de déterminer s'il s'agissait effectivement de problèmes de logement et de sécurité, de manque de nourriture, d'incapacité de payer des factures ou des problèmes liés au mariage.
Compte tenu des techniques statistiques, ce que nous sommes à l'aise de dire, c'est que le lien était causé par la situation de chômage, mais pas nécessairement son origine sous-jacente, si cela a du sens.
Avez-vous été en mesure de confirmer si c'était la privation matérielle liée à la perte de revenus ou s'il s'agissait de l'absence de but quotidien?
Ce sont d'excellentes questions. Malheureusement, notre recherche ne s'y attaque pas directement. Certes, des recherches que j'ai vues menées par d'autres donnent à penser qu'il s'agit essentiellement d'une combinaison de ces facteurs, mais il ne me vient à l'esprit aucune étude qui ait vraiment établi la part précise... relative de ces facteurs.
C'est une autre excellente question. Un volet intéressant — selon moi — de cette question, c'est que les effets négatifs les plus importants touchaient sur les personnes qui seraient susceptibles d'être très bien nanties.
C'était chez les personnes hautement scolarisées, chez les diplômés de l'école secondaire, les diplômés collégiaux, en particulier, que les personnes —si elles devenaient chômeurs à long terme — étaient encore plus susceptibles de ressentir de la dépression ou de l'anxiété.
Nous le prétendons parce qu'elles pourraient avoir un genre d'identité encore plus forte qui est fondée sur leur travail. Par conséquent, compte tenu de l'idée selon laquelle elles sont maintenant séparées de cette identité, elles seraient encore plus susceptibles de subir cette perte de soi, de la perception de qui elles sont.
Vous avez décrit cette cohorte comme étant hautement scolarisée. Avez-vous pu examiner leur valeur nette?
Savez-vous où nous pouvons trouver des recherches qui nous donneraient un aperçu des causes de la dépression et des problèmes de santé mentale chez les personnes au chômage à long terme et qui nous permettraient de déterminer si ces problèmes se retrouvent uniquement chez les personnes à qui le chômage cause de l'insécurité ou une privation matérielles, ou bien s'ils sont également causés aux personnes qui n'ont aucune préoccupation quant à la privation ou à l'insécurité matérielles, mais qui, en raison de leur chômage, éprouvent néanmoins des problèmes de santé mentale?
C'est très certainement ce que notre recherche donne à penser. Je serais certes disposé à vous la fournir après le témoignage.
... faire des choses qui ont de la valeur pour d'autres personnes, c'est essentiel à une situation de bonheur humain.
Si nous voulons faire face au problème de la santé mentale, nous devons libérer les gens afin qu'ils aient des possibilités de travail.
Je serais d'accord avec la mise en garde concernant le fait qu'il soit adapté aux personnes, pour ce qui est de définir le travail de la façon qui serait cohérente pour elles. Ce pourrait être le fait d'élever des enfants, ou des choses qui ont une grande signification, car le travail pourrait ne pas être bien rémunéré.
Tout à fait. Dans le village de Vernon, situé à environ 45 minutes au sud d'ici, il y a un jeune homme handicapé par un retard de développement dont le travail consiste à parcourir tout le village à pied, les jours de recyclage, et à rapporter aux gens leurs bacs à recyclage devant leur porte afin qu'ils n'aient pas à le faire eux-mêmes. C'est du travail sans contrepartie. Ce travail ne lui est pas imposé, mais il le fait. C'est quelque chose qui le fait se sentir utile, et il est considéré comme étant utile dans sa collectivité parce qu'il fait ce travail.
Je suis tout à fait d'accord avec vous sur le fait que nous ne devrions jamais dénigrer le travail de quiconque. Lorsqu'une personne choisit d'apporter une contribution, non seulement elle renforce son estime de soi, mais elle le fait aussi en contribuant à la vie d'autres personnes. Dans tout ce que nous faisons — que ce soit pour les personnes handicapées, pour les personnes qui sont déprimées ou pour celles qui vivent dans des collectivités éloignées —, nous devrions donner à ces personnes la possibilité de travailler et d'avoir cette satisfaction.
Voilà mes commentaires. Merci.
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins.
Ma question s'adresse à Tracy. Vous avez déjà mentionné, ici, que le taux de suicide des jeunes inuits fait partie des plus élevés au monde. Il est de 11 fois la moyenne nationale. Santé Canada prend des mesures pour les collectivités autochtones et inuites dans le but d'améliorer les initiatives en santé mentale grâce à des programmes et à des services, notamment la Stratégie nationale de prévention du suicide chez les jeunes Autochtones et la Stratégie nationale de lutte contre l'abus de l'alcool et des drogues chez les Autochtones. On est déjà en train de prendre ces mesures.
Quelle est l'efficacité de ces programmes pour ce qui est de régler les problèmes de santé au sein des collectivités autochtones et inuites?
Je vous remercie de votre question. Je dois soulever le récent investissement du gouvernement fédéral dans la prévention du suicide pour les Inuits. Il était vraiment le bienvenu et attendu depuis longtemps. Il s'agissait d'un engagement de trois ans pour — je crois — un total de neuf millions de dollars. Je sais que l'Inuit Tapiriit Kanatami travaille activement avec les quatre régions de l'Arctique afin, dans certains cas, d'améliorer ce qui pourrait être accessible ou de commencer à offrir de nouveaux programmes, selon les priorités et les besoins de ces collectivités et régions.
Je n'ai pas lu l'évaluation du PNLAADA depuis un certain temps, alors je ne peux pas parler des données probantes relatives à des programmes comme celui-là. Dans le monde inuit du Canada, il n'y a pas de programmes qui, au fil du temps, peuvent être évalués du point de vue de l'efficacité et de la reproduction, alors on a grandement besoin de l'ITK, des régions, d'organisations comme la nôtre, pour élaborer... Je n'aime pas utiliser le terme « mettre à l'essai », mais on a besoin de travailler avec des experts inuits et avec d'autres experts afin d'élaborer, peut-être, des adaptations de certains des projets qui ont été mentionnés plus tôt, puis de la durabilité nécessaire pour les exécuter au fil du temps afin qu'ils puissent être évalués et modifiés dans le but de mieux répondre à ces besoins.
Pensez-vous que ces programmes ajoutent une quelconque valeur à la stratégie nationale de réduction de la pauvreté?
J'ai une deuxième question à poser. Vous avez affirmé que vous alliez NOUS remettre des copies du site Web, mais il laisse entendre que plus de 70 % des 53 collectivités inuites de l'Arctique canadien ne disposent pas de refuges sécuritaires pour les femmes. Il laisse également entendre que la santé mentale est la principale préoccupation relative à la santé à laquelle font face les collectivités inuites. Cela comprend divers problèmes associés à la violence, à l'abus et aux traumatismes non réglés.
À votre avis, dans quelle mesure ce programme est-il efficace? Quelles autres initiatives pouvons-nous mettre en oeuvre afin de créer des services de santé mentale accessibles pour les collectivités autochtones et inuites?
La récente initiative de prévention du suicide chez les Inuits est un excellent départ. Je sais que la santé mentale a été désignée par les régions inuites comme étant la plus grande priorité depuis un certain nombre d'années, mais aucune ressource n'a été investie aux fins de l'élaboration de programmes. Nous devons étudier des façons novatrices de fournir les services. Par exemple, à Akulivik —, comme M. Robillard l'a mentionné plus tôt —, il n'est pas réaliste d'offrir tout l'éventail des services de soutien en santé mentale et des autres services de soutien, alors nous serions heureux d'avoir la possibilité d'étudier un mode de prestation novateur. La télésanté est utilisée dans une certaine mesure, au Nunavik. Ce ne sont pas des services en personne, mais il s'agit au moins d'un genre de pont entre un endroit comme Akulivik et les spécialistes de Montréal.
Nous avons besoin d'une stratégie sur la santé mentale pour le pays, et nous avons besoin que cette stratégie comporte un volet propre aux Autochtones, aux Inuits et aux Métis.
Nous avons besoin d'une stratégie et d'un programme de logement nationaux au Canada. Cette stratégie et ce programme contribueraient certainement à l'établissement d'une approche complète et éclairée permettant d'accroître même simplement le nombre d'unités de logement accessibles.
Elles sont un début. Nous n'en sommes qu'à un an après les élections. Vous savez, il faut du temps. Il a fallu du temps avant que la ministre Philpott travaille avec des partenaires, y compris l'Inuit Tapiriit Kanatami. Il lui a fallu du temps avant de travailler avec ces partenaires à l'élaboration d'une initiative nationale de prévention du suicide chez les Inuits. La prestation vient tout juste de commencer, alors il est trop tôt pour le dire. Toute initiative de ce genre ne serait que la bienvenue et utile.
Avez-vous des propositions à formuler concernant les enfants atteints d'une maladie mentale dont l'état de santé pourrait être amélioré en temps opportun?
Je crains que le temps soit écoulé. Je suis désolé. Si vous aviez une réponse brève... mais, je pense que cela aurait été une réponse approfondie.
Ma réponse aurait été que je ne suis pas une clinicienne et qu'il y a d'autres experts qui seraient extrêmement heureux de discuter avec vous.
Merci, monsieur le président.
Madame O'Hearn, votre organisation a effectué des travaux très importants dans le domaine du VIH-sida. Nous savons qu'il s'agit d'un problème grave visant les collectivités nordiques et inuites, et je pense qu'il est évident que, de certaines manières, il est lié à la santé mentale et à la pauvreté. Une stigmatisation réelle s'y rattache, et ainsi de suite. D'après les importants travaux qu'a effectués votre organisation sur ce plan et l'expertise sur le terrain que vous possédez, pouvez-vous dire au Comité ce que devrait faire le gouvernement fédéral sur ce plan afin de soutenir les femmes et les collectivités inuites, s'il vous plaît?
Merci de poser cette question très précise.
Nous espérons que le gouvernement fédéral continuera de travailler avec nous, car, malheureusement, le 31 mars prochain, une période de plus de 20 ans de travaux propres à l'association inuite Pauktuutit sur le VIH et sur la santé sexuelle prendra fin. Nous tentons de tenir des discussions avec Santé Canada et avec d'autres responsables. Comme dans le cas de toute population, il faut continuer à sensibiliser les gens et à fournir chaque année de l'information, des ressources et des outils aux jeunes qui arrivent, qui entrent dans la maturité et qui deviennent actifs sexuellement. Ce travail doit être maintenu. Il ne peut pas être effectué grâce à une approche fondée sur des projets annuels, qui est aussi assujettie aux critères changeants des ministères qui les financent.
De façon générale, je crois Santé Canada relativement à ses engagements à l'égard des objectifs 90-90-90 concernant le VIH et, à l'échelle mondiale, relativement à sa contribution au fonds de l'ONU pour le sida lors de la récente conférence mondiale des donateurs. Nous souhaitons obtenir le même degré d'engagement à l'égard de l'élimination du VIH et des ITSS... à l'égard de la santé sexuelle, dans son ensemble, et de la santé mentale en ce qui a trait à la santé sexuelle et inversement, car ces problèmes contribuent à l'accroissement des comportements risqués qui peuvent mener à des rapports sexuels non protégés. Nous savons qu'il y a beaucoup de rapports sexuels non protégés au sein des collectivités inuites, comme en témoignent en partie les taux élevés d'ITSS au pays. Nous espérons que le gouvernement fédéral continuera de travailler avec nous.
Merci beaucoup de votre question.
J'effectue des travaux au sein d'un autre comité, le Comité permanent de la justice et des droits de la personne, et l'étude que nous menons actuellement porte sur l'accès à la justice et, plus précisément, à l'aide juridique. Nous avons entendu des témoignages et reçu des mémoires concernant la forte corrélation entre l'accès à la justice et la façon dont les groupes marginalisés n'y ont pas vraiment accès.
Si vous regardez les clients que vous servez, les collectivités que vous servez, quelle est la situation au chapitre de l'accès à la justice dans les collectivités nordiques, et quelle est l'incidence de cette situation sur la pauvreté? S'agit-il d'une stratégie de réduction de la pauvreté qui pourrait être employée? Je parle du financement actuel et du fait que vous croyez ou non qu'il est adéquat pour les personnes que vous servez.
Notre financement n'est pas adéquat. Je souhaiterais être mieux informée pour vous, mais nous n'entretenons pas une relation fonctionnelle avec Justice Canada ou avec Sécurité publique Canada depuis un certain nombre d'années, pour l'instant. Nous ne sommes pas une organisation de prestation de services. Nous travaillons à l'échelon national. Une chose dans laquelle nous excellons, c'est la communication et l'élaboration de ressources en langage simple — en anglais et en inuktitut — que peuvent utiliser — nous l'espérons — des gens de partout dans l'Arctique. Nous serions ravis de comparaître devant le Comité pour une discussion plus complète. Je pense qu'il existe tout à fait des liens entre la santé mentale, la pauvreté, les crimes de situation et les crimes de nécessité, mais il s'agit d'un sujet pour une discussion beaucoup plus approfondie. Pour parler au nom de notre organisation, je dirai que nous avons besoin de plus de données probantes à ce sujet.
Oui, parce que l'une des choses que nous avons constatées, c'est qu'on a mis davantage l'accent sur l'aide juridique pour les affaires pénales que pour les affaires civiles. Bien entendu, les femmes tendent à être beaucoup plus impliquées dans les affaires civiles — c'est-à-dire dans la partie de la défense de ces affaires — et à obtenir de l'aide juridique pour instruire leur affaire civile.
Je me demande simplement si, à cet égard, vous avez observé des résultats quelconques chez les femmes inuites.
L'accès à la justice est extrêmement limité au sein des collectivités. Le Nunavut est principalement servi par le système des cours itinérantes, alors il s'agit d'un obstacle majeur à l'accès à la justice, et pas seulement pour les femmes. Au Nunavut, il y a une pénurie de juges qui peuvent instruire et trancher des affaires. Il y a des problèmes vraiment fondamentaux relativement à l'accès à la justice dans l'ensemble de l'Inuit Nunangat.
Je m'en voudrais de ne pas profiter de l'occasion pour au moins aborder le problème de la traite de personnes, de la marchandisation du sexe. Un bien trop grand nombre de femmes inuites se retrouvent dans des villes comme Ottawa, Montréal, Winnipeg, Edmonton sans posséder la formation ou les compétences de survie contemporaines nécessaires à la vie en ville. Honnêtement, elles sont bien trop souvent très vulnérables et sont la proie de personnes qui s'adonnent à la traite sexuelle et se retrouvent de force dans des situations marginalisées et très risquées.
C'est tout à fait lié à l'administration de la justice. Je ne peux pas vraiment parler de l'aide juridique. Je serais heureuse de prendre part à une autre conversation.
Merci beaucoup.
Maintenant, nous cédons la parole à la députée Tassi, pour six minutes. Vous avez la parole.
Merci, monsieur le président.
Je voudrais revenir sur les commentaires que M. Fitzgerald et vous avez formulés au sujet de la santé mentale qui serait d'intérêt national. Cela ne fait aucun doute, de même que le lien entre la santé mentale et la pauvreté, lien établi par un certain nombre des témoins qui ont comparu ici. En ce qui concerne la santé mentale, nous savons qu'il y a un argument moral ainsi qu'un argument économique en faveur d'un investissement dans ce domaine. Je voudrais me concentrer un peu sur les avantages économiques d'une intervention précoce.
Je m'adresse à vous, ainsi qu'à Mme Lipman : pouvons-nous parler un peu des avantages économiques d'une intervention précoce, essentiellement, de convaincre un gouvernement d'investir parce qu'au bout du compte, il économisera en investissant tôt? Ensuite — deuxièmement — qu'en est-il des stratégies novatrices? Pouvez-vous nous dire comment le gouvernement fédéral pourrait formuler une stratégie ou une idée qui nous donnera le meilleur résultat pour notre argent?
Monsieur Fitzgerald, j'ai aimé l'idée que vous avez mentionnée au sujet des pratiques exemplaires et de la communication de ces pratiques. Ce pourrait être un exemple. Cette initiative est-elle en cours et, sinon, pourquoi?
Essentiellement, les deux questions que je vous adresse, à tous les deux, portent sur les avantages économiques d'une intervention précoce et sur les stratégies novatrices dans ce domaine qui nous donneraient le meilleur résultat pour notre investissement.
Nous savons maintenant — et nous le savons probablement depuis plus d'une décennie — que la plupart des maladies mentales commencent dans la petite enfance, alors le fait d'intervenir tôt et de façon dynamique nous donne les meilleurs résultats, que ce soit durant l'enfance ou au début de l'âge adulte et au-delà. L'investissement doit avoir lieu tôt. Nous devons aller en amont de ce problème. Une fois que nous arrivons à la fin de l'adolescence ou au début de l'âge adulte, nous avons perdu ce créneau. Nous ne l'avons pas complètement perdu, mais cela va coûter beaucoup plus cher. Il va y avoir des conséquences sur le système judiciaire, à ce moment-là, sur le système d'aide sociale. Une intervention précoce, c'est vraiment l'élément clé, comme nous l'avons souligné plus tôt.
En ce qui concerne les stratégies en général, je vais laisser Mme Lipman intervenir. Toutefois, je voudrais encore une fois affirmer qu'il ne s'agit pas d'une réponse facile. On a besoin des données probantes pour voir où se situent nos meilleures possibilités. Je pense qu'il importe d'adopter une approche nationale à cet égard.
En réfléchissant aux stratégies, il est logique de penser à toute une diversité de niveaux. Selon moi, certaines des stratégies pourraient être des choses qui sont déjà en place. Par exemple, en Ontario et dans d'autres régions du Canada, ainsi qu'à l'étranger, il y a l'instrument relatif au développement précoce. L'une des dirigeantes de cette initiative se trouve à Hamilton, au centre Offord, Magdalena Janus.
Il s'agit essentiellement d'une occasion d'évaluer des enfants de la maternelle ou de la prématernelle afin de voir où ils en sont comparativement à ce qu'on attendrait d'une personne de cet âge et à cette étape, d'un point de vue scolaire, social et ce genre de choses. Je pense qu'il existe des systèmes de surveillance qui peuvent être mis en place afin que l'on puisse au moins repérer tôt les enfants qui pourraient éprouver certaines difficultés. Voilà une idée.
Encore une fois, je vois cela comme une pyramide. Des choses peuvent être accessibles dans la collectivité, lesquelles peuvent aider de nombreux parents et sont liées à des programmes de formation au rôle de parents fondés sur des données probantes et à d'autres genres de choses éducatives auxquelles tous les parents peuvent participer... tout parent qui est incertain de ce qui se passe, ou bien des parents dont les enfants éprouvent des difficultés importantes à l'étape en question. Ensuite, on remonte la pyramide jusqu'à d'autres types de services plus spécialisés. Tout le monde n'a pas besoin de se rendre au sommet de la pyramide, mais nous avons besoin de plus d'occasions d'offrir un vaste éventail de choses aux gens de la collectivité qui ressentent le besoin de les recevoir, puis monter afin que les services spécialisés soient utilisés de la façon qui est la plus logique.
Je pense que nous devons également réfléchir au fait qu'il n'est pas nécessaire que toutes les interactions aient lieu en personne. Je pense qu'il y a assurément beaucoup de bonnes et de mauvaises informations sur Internet. Les gens peuvent avoir recours à des interventions fondées sur les données probantes afin de commencer à réfléchir à la façon dont ils gèrent leurs pensées anxieuses ou dépressives. Je pense que l'idée d'utiliser Internet, et parfois les interventions sur le Web, peut également être utile. Nous devons vraiment aller dans cette direction.
Oui, selon mon expérience personnelle, la stigmatisation entourant la santé mentale empêche beaucoup de jeunes d'accéder aux services de soutien. Dans ma propre collectivité, une jeune femme s'est suicidée, et aucun appel à l'aide n'avait été reçu de cette jeune fille. Beaucoup d'étudiants passent devant mon bureau et n'entrent pas, et je pense qu'il s'agit de la stigmatisation qui s'y rattache.
Quelles choses précises pouvons-nous faire pour aider à atténuer cette stigmatisation ou pour nous en débarrasser? Certaines des suggestions que vous formulez sont merveilleuses, en ce qui concerne les parents et Internet. Avez-vous d'autres suggestions particulières?
Je pense qu'il serait logique que cela fasse partie du programme scolaire. Si on est à l'école secondaire, en 9e année, on reçoit une formation à ce sujet, ou bien on la reçoit en 10e année ou en 8e ou quelque chose, et le sujet est abordé de la même façon que l'histoire, que l'éducation sanitaire, ou ce genre de choses.
Mon expérience personnelle, c'est qu'un de mes patients a participé à quelque chose, à l'école secondaire, où on en parlait, puis il a consulté son conseiller en orientation et lui a dit qu'il pensait avoir un problème de santé mentale; cela a donc été un moyen pour lui de demander de l'aide. Si cela fait partie du programme régulier, je pense que ce pourrait être utile.
Merci encore, monsieur le président.
Je remercie encore nos témoins.
Monsieur Diette, je vais vous donner deux exemples rapides que nous connaissons tous, selon moi. J'ai lu une histoire au sujet d'un professionnel des affaires qui a été mis à pied, qui a eu de la difficulté à obtenir un emploi, qui a sombré dans la maladie mentale et qui, malheureusement, est tombé entre les mailles du filet — pour ainsi dire —, jusqu'à ce qu'il touche le fond. Il était itinérant et ne pouvait pas obtenir de soutien. Une autre situation, c'est celle d'une personne qui était atteinte de maladie mentale et qui avait de la difficulté à trouver un emploi; cette personne s'est elle aussi retrouvée sans abri, dans la rue.
Nous avons habituellement des gens des deux côtés. Comme beaucoup de vos recherches le montrent — je le crois —, ces personnes continuent de tomber entre les mailles du filet sans recevoir beaucoup de soutien. Vous ne croyez pas vraiment que le fait d'obtenir un emploi est le seul moyen de corriger la situation pour elles?
Je pense que l'estime de soi est importante, quelle que soit la façon dont chacun la définit. Il se pourrait que de nombreuses personnes l'acquièrent grâce à un emploi.
Je commence à sortir de mon domaine d'expertise, alors je suis un peu...
N'êtes-vous pas d'accord pour dire que les personnes qui sont dans le besoin exigent beaucoup plus de soutien qu'un simple emploi?
Cela devient un peu un problème de l'oeuf ou la poule. Je pense qu'il s'agit d'un problème très complexe, et, pour reprendre un commentaire formulé plus tôt, l'idée de ramener les choses à un seul facteur est excessivement simpliste. Je pense qu'il y a là beaucoup de nuances.
Selon moi, un emploi peut être une pièce centrale de l'organisation d'une journée et de ce genre de choses.
Seriez-vous d'accord pour dire que cela fait partie de la solution, mais qu'il ne s'agit certes pas de la solution?
Nous ne sommes pas devant un tribunal.
Je voulais obtenir votre commentaire à ce sujet, et je voulais aussi obtenir vos conseils concernant les changements stratégiques que vous recommandez — au gouvernement fédéral — d'apporter pour aider les personnes atteintes de maladie mentale à surmonter les difficultés liées à l'emploi. Quels changements stratégiques pouvons-nous apporter?
Malheureusement, un problème qui se pose immédiatement pour moi tient au fait que je suis un citoyen des États-Unis. Je suis légèrement ignorant...
Ce n'est pas grave. Vous êtes là pour témoigner devant nous, et nous vous en sommes vraiment reconnaissants. Comme je l'ai dit, je pense que votre recherche est très bonne, mais, encore une fois, nous sommes à la recherche d'idées concernant ce que nous pouvons faire, en tant que gouvernement, pour aider. Nous pouvons mettre en œuvre des changements qui aideront les personnes atteintes de maladie mentale. Avez-vous des idées à nous donner?
Je pense qu'il y a d'autres experts ici présents, notamment Mme Lipman, qui peuvent probablement répondre à cette question avec plus d'exactitude que moi. Il s'agit vraiment d'un problème de pratiques exemplaires. Je pense que nous avons souvent tous les mêmes buts en commun, mais que nous avons tous des limites et des contraintes budgétaires quant à ce que nous pouvons faire.
Les enjeux touchant la stigmatisation sont vraiment très importants... aider les employeurs à se rendre compte du fait qu'ils peuvent employer des personnes qui ont des antécédents de maladie mentale et des problèmes de santé mentale. J'imagine que ce serait très important.
Je n'ai pas d'autres idées précises concernant les personnes qui ne sont pas en bonne santé mentale.
Monsieur Fitzgerald, je pense que l'une des choses qui me frustrent, en ce qui concerne le dossier de la santé mentale — pour ainsi dire — ou le dossier de la pauvreté en général, c'est simplement le manque d'innovation et le manque de nouvelles idées et de nouvelles façons d'essayer de faire les choses. Pouvez-vous me faire part de certaines de vos idées, des idées innovatrices que vous avez vues au cours des dernières années relativement à la santé mentale, et quelles idées vous pourriez avoir mises de l'avant?
Je commencerai par dire cela, mais l'innovation que nous avons observée, selon moi, dans notre région — encore une fois — consistait à tenter d'aller en amont, à offrir davantage de services communautaires et davantage de services de groupe, de sorte que nous puissions servir une centaine de familles à la fois, au lieu qu'elles attendent d'obtenir un rendez-vous avec un psychiatre. Il est possible d'étendre ce modèle à l'échelle du Canada. Il y a de nombreuses façons différentes de faire cela.
Encore une fois, nous devons — et je ne voudrais pas avoir l'air d'un disque rayé — savoir où se trouvent les meilleures possibilités pour nous. En tant que chirurgien pédiatrique, je n'irais pas procéder à une intervention chirurgicale à laquelle je viendrais tout juste de penser, la veille. J'examinerais les meilleures données probantes et les meilleurs résultats, et j'appliquerais cette réflexion à l'intervention. Nous avons besoin du même genre de rigueur au moment où nous étudions le problème très difficile qui consiste à s'occuper de la santé mentale chez les enfants et les jeunes et de son lien avec la pauvreté.
Comme vous l'avez mentionné auparavant, quand nous discutions il y a une demi-heure, vous êtes convaincu que les pratiques exemplaires sont communiquées.
Je pense que nous pouvons en faire plus, plus particulièrement dans le domaine de la santé mentale. Selon moi, nous excellons davantage dans d'autres domaines des soins de santé.
Nous avons établi de grandes collaborations nationales et internationales relativement à la sécurité des patients et à la qualité, par exemple, mais nous n'appliquons habituellement pas autant ces principes dans le domaine de la santé mentale. Je pense qu'il y a là une excellente occasion.
Nous avons fait beaucoup de chemin sur le plan des approches de normalisation pour le diagnostic et la prise en charge des cas de maladie mentale, mais je pense qu'il y a encore beaucoup d'écarts et que Mme Lipman souscrirait à cette opinion et pourrait en parler.
Notre temps est écoulé. J'en suis désolé.
Pour le dernier mot, vous disposez d'environ quatre minutes, monsieur le député Warawa.
Merci.
J'apprécie le fait que mon collègue, monsieur Long, pose des questions pour promouvoir les programmes gouvernementaux par rapport aux emplois.
Concernant l'importance de se concentrer sur les causes de la pauvreté, si nous faisons la promotion des programmes gouvernementaux au lieu d'étudier ce qui cause le problème, nous n'allons probablement jamais réussir à régler le problème. Je pense qu'il s'agit de ce que M. Fitzgerald vient tout juste d'aborder. Nous avons affaire à des enjeux complexes. Il faut espérer trouver la cause dans chacune des situations afin de pouvoir aider la personne à sortir de la pauvreté, à sortir du désespoir. Seriez-vous d'accord pour dire qu'il importe que nous trouvions la cause?
Je serais tout à fait d'accord pour dire qu'il est essentiel que l'on trouve la cause. En général, quand on regarde les pratiques exemplaires, ces programmes sont probablement ceux qui vont directement à la source du problème.
Pour revenir sur une question précédente portant sur l'itinérance, Logement d'abord semble donner des résultats très prometteurs. Dans ce cas-là, c'est le rôle des emplois par rapport à celui de Logement d'abord. Il est certain que le succès du programme — au sujet duquel j'ai lu des documents et examiné certaines des recherches — donne à penser que, dans ce cas-là, il s'agit probablement de la pratique exemplaire.
J'ai une question rapide à poser au sujet de la consommation de drogues. Si une personne consomme des drogues illicites et que le gouvernement a promis de changer les lois concernant la marijuana au Canada, si nous n'arrivons pas à bien faire les choses, y a-t-il une corrélation —dans vos études — entre le désespoir et la consommation de drogues illicites?
Il s'agit en fait d'une étude sur laquelle je travaille actuellement. Dans ma tête, j'essaie de réfléchir à certains des résultats. Les résultats préliminaires donnent au moins à penser qu'il peut y avoir une augmentation des comportements négatifs, de façon générale, et de la consommation de drogues en général. Il n'est pas surprenant qu'il puisse s'agir d'un mécanisme d'adaptation pour des personnes désespérées.
J'ai une toute dernière question à poser. L'état de stress post-traumatique est un problème dont nous ne nous étions pas rendu compte qu'il nous touchait il y a des années. Quelle est l'importance de s'en occuper afin de donner, dans l'avenir, de l'espoir aux gens qui sont aux prises avec l'ESPT?
Je n'ai pas étudié les détails de la recherche sur l'ESPT. J'ai regardé la mauvaise santé mentale. Nous avons examiné les diagnostics de dépression, de trouble d'anxiété généralisée et d'ESPT. Dans le cadre de mes recherches, il a été montré que l'état de stress post-traumatique est un problème important et qu'il est lié au chômage, aux agressions sexuelles et aux parents violents. L'ESPT est absolument un enjeu dont il importe que notre société s'occupe.
Ce pourrait être des gens qui souffrent en raison d'une agression sexuelle ou violente, mais le trouble pourrait aussi toucher des intervenants de première ligne et des anciens combattants.
Toutes ces personnes auraient besoin d'être en mesure d'avoir un avenir. Si on ne traite pas les causes, elles sont susceptibles rester dans cet état de pauvreté, de dépression et de désespoir.
J'aurais tendance à penser que le fait de s'y attaquer directement serait le moyen le plus efficient.
Excellent.
Merci, monsieur. Cela nous amène à la clôture.
Je veux remercier tous les témoins de leur présence aujourd'hui.
Je rappellerai au Comité que nous avons une séance prévue pour jeudi, quand nous allons rencontrer les responsables ministériels. Les avis ont été envoyés, et je crois que la majorité d'entre eux ont accepté l'invitation. Nous devons être là, jeudi, en supposant que nous ne suspendons pas nos travaux. La greffière vient tout juste de m'informer du fait que nous ne pouvons pas les suspendre. Elle a beaucoup travaillé afin de s'assurer qu'ils puissent venir. Mais, sérieusement, s'il y a la moindre possibilité que nous suspendions nos travaux avant jeudi, je veux saisir l'occasion de remercier le Comité et toutes les personnes qui nous ont aidés à tenir cette séance.
Je souhaite de joyeuses fêtes à tout le monde. J'espère que j'aurai l'occasion de le redire jeudi.
Merci. La séance est levée.
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