Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Bienvenue à la 28e séance du Comité permanent des pêches et des océans de la Chambre des communes.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le 1er février 2022, le Comité reprend son étude des sciences au ministère des Pêches et des Océans.
Cette réunion se déroule en format hybride conformément à l'ordre de la Chambre du 25 novembre 2021.
Si vous participez par vidéoconférence, quand vous serez prêts à parler, veuillez cliquer sur l'icône pour activer votre micro et parler lentement et clairement. Si vous ne parlez pas, votre micro doit être en sourdine. Pour l'interprétation, vous avez le choix entre l'anglais et le français au bas de votre écran. Je rappelle à tous que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence.
Je vais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins.
Ce sont des gens qui connaissent bien le Comité et les questions relatives aux pêches et j'ai nommé: M. Robert Hardy, consultant en pêches, et M. Christopher Jones, gestionnaire principal à la retraite des pêches au ministère des Pêches et des Océans, qui témoignent à titre personnel. Nous essayons de régler certaines difficultés techniques pour que M. Jones soit correctement branché.
Nous accueillons également Andrew Trites, professeur, Unité de recherche sur les mammifères marins, Institute for the Oceans and Fisheries, Université de la Colombie-Britannique. De plus, de la Fondation David Suzuki, nous accueillons Jeffery Young, analyste principal des sciences et des politiques; d'Oceana Canada, Robert Rangeley, directeur des sciences; et de Wild First, Sean Jones.
Nous allons maintenant passer aux déclarations préliminaires.
Nous allons commencer par M. Hardy, pour cinq minutes ou moins, si possible.
Bonjour monsieur le président, et mesdames et messieurs les membres du Comité permanent des pêches et des océans et autres présentateurs. Je suis heureux de pouvoir m'exprimer sur le sujet le plus important et le plus controversé de la science des pêches, à savoir la prédation par les phoques et son impact sur les pêches de l'Est, de l'Ouest et de l'Arctique du Canada.
Cette année marque le 30e anniversaire de la fermeture de la pêche à la morue du Nord. Autrefois la plus grande pêche du monde, elle a été fermée en juillet 1992 et représente le plus grand licenciement de l'histoire du Canada. Après trois décennies de moratoire, de règlements de pêche imposés et de recherche scientifique continue, la morue du Nord et les autres pêches ne représentent plus qu'une fraction de leur existence antérieure.
Les dernières recherches du MPO indiquent que les stocks de morue demeurent critiques et ne se rétablissent guère. L'industrie de la pêche et le public désignent depuis de nombreuses années les populations record de phoques et la prédation comme étant les causes de cette situation. Cependant, les scientifiques du MPO sont réticents à accepter l'impact des phoques sur les stocks de poissons, c'est‑à‑dire la morue de l'Atlantique, le capelan, le maquereau de l'Atlantique ou le saumon des côtes ouest et est. En effet, le MPO reste sceptique et ne tient pas compte des preuves fournies par les pêcheurs, les associations de l'industrie et la science du phoque d'autres pays de pêche de l'Atlantique Nord. Des pays qui possèdent les mêmes espèces de phoques et de poissons que le nôtre.
L'impact des pinnipèdes sur les pêches fait l'objet de nombreux commentaires à l'échelle internationale. Des pays comme la Norvège, l'Islande, les États-Unis, les pays baltes et la Scandinavie reconnaissent l'impact des phoques. Tous ces pays ont moins d'espèces de phoques que le Canada et la plupart d'entre eux ne comptent que quelques centaines de milliers d'animaux par rapport à nos quelque 10 millions d'animaux combinés.
Le MPO, en janvier 2022, a fourni des informations sur les taux de consommation quotidienne de phoques du Groenland à 3 % de leur poids corporel, ce qui correspond à environ 3 kg par jour, tandis que les données des scientifiques norvégiens indiquent des taux plus élevés, soit jusqu'à 7 à 9 kg par jour. La différence extrapolée sur 7,6 millions de phoques du Groenland est énorme et ne peut être négligée. En 1986 et 1995, la Norvège a connu un déclin significatif de toutes ses ressources halieutiques. Les scientifiques ont parlé d'une « invasion » de phoques du Groenland. L'épuisement des stocks jusqu'en 1992 n'a pas fait l'objet d'un examen similaire par les gestionnaires des pêcheries du Canada.
J'espère que vous avez reçu mon document, et j'y inclus deux graphiques. L'un vient de la science norvégienne. Vous voyez les deux vallées au milieu des années 1980 et au milieu des années 1990, et au‑dessus, on a écrit « invasion des phoques ». Cela vient directement de scientifiques norvégiens. Vous trouverez ci‑dessous un tableau du MPO sur la production de morue de l'Atlantique Nord-Ouest, et vous pouvez voir le déclin qui a mené au moratoire de 1992. Ce déclin, cette ligne horizontale, se poursuit sur tout le graphique sans aucun signe de reprise.
Plus récemment, après la présentation du rapport de l'Équipe scientifique spéciale sur les phoques de l'Atlantique, il a été question d'un Sommet ou forum sur les phoques. Il y a eu beaucoup trop d'études, de comités et de forums sur les phoques sans que des mesures concrètes soient prises. Il existe de nombreuses autres recommandations de l'Équipe scientifique spéciale concernant l'amélioration de l'échantillonnage du régime alimentaire, l'analyse spatiale de l'ensemble de l'habitat du phoque, une plus grande participation des pêcheurs aux programmes scientifiques et l'importante analyse des phoques résidents de rivière. Ces activités scientifiques recommandées devraient être mises en œuvre immédiatement.
En conclusion, voici une citation d'un scientifique principal du MPO, tirée des médias: « Pendant des années, on a dit aux pêcheurs que c'est la pêche qui agit sur les populations. » Il a ajouté que le MPO gère les pêcheurs, pas les poissons, et qu'il est donc normal que les pêcheurs considèrent les phoques comme une espèce concurrente.
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Il a appelé cela « l'envie des prédateurs ». De mon point de vue, et d'après mon expérience, il n'y a « aucune envie » dans l'état actuel de la pêche ou du programme scientifique du Canada. L'heure est à l'action et non à des débats sans fin.
Merci de votre attention. Je répondrai volontiers à vos questions et vous communiquerai toutes les informations utiles.
Monsieur Jones, vous pouvez faire votre déclaration préliminaire en cinq minutes ou moins, s'il vous plaît. Non, vous êtes toujours en sourdine. Vous vous êtes remis en sourdine.
Pouvons-nous demander au technicien de communiquer avec M. Jones pour voir si nous pouvons régler cette question?
Je m'appelle Andrew Trites. Je suis professeur à l'Institut des océans et des pêches de l'Université de la Colombie-Britannique et directeur de l'Unité de recherche sur les mammifères marins.
J'étudie les mammifères marins depuis plus de 40 ans. Mes recherches englobent des études sur le terrain, des travaux de laboratoire et l'analyse de données informatiques. Bon nombre de mes études ont été réalisées en collaboration avec des chercheurs du MPO, du National Marine Fisheries Service des États-Unis et du ministère de la Pêche et de la Chasse de l'Alaska. J'ai également siégé et je siège encore à de nombreux comités consultatifs, dont le groupe de spécialistes des mammifères marins du COSEPAC, le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada. Cela étant, je suis très conscient des menaces et des défis auxquels nous faisons face en matière de conservation des mammifères marins au Canada, ainsi que des défis que posent les mammifères marins pour les pêches.
Le Canada est reconnu comme un chef de file mondial en recherche sur les pêches et les océans, et il sait très bien évaluer la productivité et la qualité de la recherche effectuée par le MPO, par les universités et par d'autres acteurs. Cependant, je pense que notre pays ne fournit pas suffisamment de connaissances scientifiques importantes pour les pêcheurs, les collectivités côtières, les exploitants d'entreprises touristiques et les gestionnaires des pêches, entre autres. Je pense qu'il faut adopter une nouvelle approche pour que la recherche sur les pêches et les océans entreprise au cours des prochaines années réponde aux préoccupations exprimées par les différents secteurs qui ont un intérêt marqué pour la santé des pêches et des écosystèmes marins du Canada.
L'un des programmes de recherche les plus utiles auxquels j'ai participé pendant mon mandat était un programme quinquennal appelé Réseau canadien de recherche sur les pêches, ou RCRP, financé par le Centre de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada et qui a pris fin en 2015. Le RCRP était un programme de recherche administré conjointement par des pêcheurs, des universitaires et des scientifiques du gouvernement, ainsi que des étudiants de deuxième et trosième cycles. Trente universitaires de 15 universités y ont travaillé en étroite collaboration avec le MPO et des représentants des flottilles de pêche de l'Atlantique, du Pacifique et des eaux intérieures du Canada. L'objectif collectif du RCRP était de développer la capacité de recherche sur les pêches et d'améliorer la collaboration entre les secteurs. De l'avis général, il a permis de gagner la confiance des pêcheurs, de faciliter la recherche indépendante — qui était grandement nécessaire —, de produire des résultats utiles et de montrer une façon de remodeler la recherche au Canada pour le mieux.
Malheureusement, il n'a pas été possible pour le CRSNG de poursuivre le programme après 2015, et le MPO a suspendu son financement à l'appui de ce type de recherche collaborative et indépendante. J'estime que le RCRP a été un programme réussi, sans précédent, qui a répondu aux préoccupations soulevées au sujet de la science au ministère des Pêches et des Océans. On aurait dû sa perennité, mais il a été abandonné faute de soutien politique et de financement.
Je vous invite à envisager de rétablir un programme comme le Réseau canadien de recherche sur les pêches ou d'établir un programme national de moindre envergure pour financer des grappes qui s'appuient sur les forces des universités afin d'apporter des réponses aux questions prioritaires du MPO et de l'industrie. Des grappes de recherche, centrées dans les universités, se sont formées partout au Canada pour aborder des questions relatives au homard, au poisson de fond, au saumon, aux changements climatiques, aux mammifères marins et à bien d'autres thèmes. À partir du plan directeur du RCRP, des étudiants diplômés, appuyés par une petite équipe de six mentors — de l'industrie, du MPO et du secteur universitaire, par exemple — formuleraient des plans de recherche, dégageraient des thèmes de recherche et aideraient à obtenir les ressources nécessaires.
Je n'ai aucun doute que le fait de fournir à chaque grappe un budget annuel de, disons, 100 000 $ sera très rentable et accélérera l'atteinte des résultats, outre que cela rendra possible la formation d'étudiants pour les amener à acquérir une nécessaire compréhension profonde des pêches canadiennes et à devenir éventuellement de futures recrues de choix pour le MPO ou pour l'industrie.
En conclusion, je vous encourage à travailler avec les universités pour trouver de nouvelles façons de financer les sciences halieutiques qui rétabliront la confiance et la coopération entre le MPO et l'industrie, et qui renforceront la capacité du Canada d'entreprendre des recherches opportunes et exhaustives sur les pêches. Je crois que la mise à l'essai et le financement de grappes de recherche sur les pêches dans les universités, avec l'appui des gestionnaires et des chercheurs de l'industrie et du MPO, aideraient grandement à répondre à bon nombre des préoccupations soulevées au sujet de la science au sein du ministère des Pêches et des Océans.
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui.
Bonjour, monsieur le président et distingués membres du Comité. Je vous remercie de me donner l'occasion de contribuer à cet important travail.
Je m'appelle Robert Rangeley et je suis le directeur des sciences d'Oceana Canada.
Je souhaite me concentrer sur trois recommandations dans le cadre de cette étude, toutes liées à la mission d'Oceana visant à rétablir l'abondance de nos océans pour aider à nourrir le monde. Nous croyons que ces recommandations sont au cœur de l'établissement des priorités en matière d'information scientifique, de l'efficacité de son utilisation dans la prise de décisions et de la façon dont le MPO partage les fondements de ces décisions avec le public.
Oceana Canada croit que le MPO doit accorder la priorité à l'augmentation de la capacité nécessaire pour achever les plans de rétablissement des pêches, assurer une surveillance adéquate de nos pêches et accroître la responsabilisation du public dans la prise de décisions.
Premièrement, le nouveau règlement sur le rétablissement du Canada devrait marquer un tournant important pour nos pêches, car il garantira que les populations gravement décimées recevront les plans nécessaires à un effort de rétablissement qui se fait attendre depuis longtemps. Bien entendu, le succès dépend de la façon dont les règlements sont mis en œuvre, ce qui exige la collecte de données et la prise de décisions fondées sur de bonnes données scientifiques.
Le MPO dispose maintenant de 24 mois pour créer des plans pour les 16 stocks critiques figurant dans la liste du premier lot du nouveau règlement, et le ministre devra bientôt mettre en lot tous les stocks restants. C'est une bonne nouvelle. Ce qui n'est pas du tout clair, c'est la façon dont les exigences seront respectées, compte tenu des antécédents du MPO.
La vérification annuelle des pêches d'Oceana Canada a révélé que seulement 7 des 33 stocks correspondant au niveau de l'épuisement — soit environ 21 % — font l'objet de plans de rétablissement et que la plupart de ces plans sont de mauvaise qualité. Le MPO ne réalise que 20 % des résultats attendus énoncés dans les plans de travail annuels, mais s'il avait respecté ses priorités, il aurait doublé le nombre de plans de rétablissement en place.
En raison d'un manque de ressources scientifiques, la tâche pourrait être plus importante que ne l'admet le MPO. Une nouvelle analyse portant sur des stocks sur lesquels on dispose de peu de données donne à penser que le nombre total se situant dans la zone critique serait de 58, soit 25 % de tous nos stocks, sans compter le saumon.
Deuxièmement, le MPO doit corriger les incohérences dans le contrôle des prises en mettant pleinement en œuvre la politique de surveillance des pêches introduite en 2019, qui fixe des normes nationales en ce qui a trait aux objectifs et aux méthodes. L'une des raisons pour lesquelles nos stocks continuent de faire l'objet d'une surpêche ou de ne pas se rétablir tient à ce que le MPO sous-estime constamment le nombre de prises, ce qui s'entend de toutes les sources de pêche commerciale et récréative, avec appâts et des prises accessoires. Il n'existe aucune estimation de la mortalité par pêche pour 80 % de nos stocks, et pour le reste, nous n'avons pas une vue d'ensemble. Pour donner une chance aux populations de se rétablir, il faut que, dans sa prise de décisions, le MPO tienne compte de tout ce qui est pris par chaque pêche et de toutes les sources de mortalité.
Troisièmement, le MPO doit communiquer publiquement les conclusions scientifiques sur lesquelles la gestion est fondée avant la prise de décisions relatives aux pêches. Le Secrétariat canadien de consultation scientifique, le SCCS, a pour politique d'assurer la transparence et la diffusion en temps opportun des publications. Malheureusement, moins de 10 % des publications scientifiques sont publiées à temps.
Pire encore, les avis scientifiques les plus pertinents n'étaient souvent pas rendus publics avant que la décision ne soit prise et communiquée. Par conséquent, et malgré l'intention du gouvernement de promouvoir la transparence publique et l'engagement politique, la prise de décisions au MPO peut être trop souvent fondée sur une compréhension erronée ou limitée des preuves scientifiques sous-jacentes.
Pour récapituler, Oceana Canada recommande que le MPO accorde la priorité à la bonification de sa capacité d'élaborer des plans de rétablissement fondés sur la science pour tous les stocks gravement épuisés, qu'il investisse dans la mise en œuvre de la politique de surveillance des pêches afin que nous comptions tout ce que nous prenons et que les fondements scientifiques sur lesquels reposent les décisions de gestion des pêches soient communiqués au grand public.
La santé de l'un des secteurs les plus importants du Canada et l'avenir de nos collectivités côtières dépendent de la façon dont les données scientifiques sont recueillies, utilisées et communiquées.
Pour démontrer qu'il s'acquitte des responsabilités que j'ai énoncées et de ses autres responsabilités, Oceana recommande que le MPO dépose un rapport public annuel au Parlement sur l'état des stocks, les niveaux de dotation et les dépenses par secteur de programme ainsi que sur le rendement de la gestion des pêches.
J'ai limité mon propos à quelques aspects seulement, mais il y a lieu d'envisager un engagement plus vaste et de considérer d'autres sources de données probantes — notamment les communautés autochtones —, qui doivent ultimement éclairer la prise de décisions sur les pêches dans un contexte écosystémique tout en s'attaquant de toute urgence aux menaces croissantes des changements climatiques.
Je m'appelle Sean Jones. Je suis conseiller juridique pour Wild First depuis plus de six ans sur les questions liées à la pisciculture. Je comparais aujourd'hui au nom de Wild First.
Je remercie le Comité et ses membres de mener cette importante étude sur la science au ministère des Pêches et des Océans.
J'ai également travaillé au nom des Premières Nations, notamment la Première Nation 'Namgis et la Première Nation d'Homalco, sur des questions connexes, comme la réglementation illégale du MPO concernant l'orthoréovirus pisciaire, la sortie ordonnée des élevages en parcs en filet de l'archipel Broughton, et la décision de la ministre d'éliminer progressivement les élevages des îles Discovery.
Mon expérience m'a convaincu que la Direction de la gestion de l'aquaculture et le Secrétariat canadien de consultation scientifique suppriment, déforment et ignorent de façon systématique les preuves scientifiques qui démontrent que les élevages en parcs en filet de saumon de l'Atlantique menacent la survie du saumon sauvage du Pacifique. Le MPO compte sur cette suppression et cette déformation des preuves pour se soustraire à ses obligations légales, tant au niveau canadien qu'au niveau international.
Je suis convaincu que la ministre, les députés et la population canadienne ne peuvent se fier ni à la Direction de la gestion de l'aquaculture ni au Secrétariat canadien de consultation scientifique pour une évaluation exacte et objective des dommages causés par les élevages en parcs en filet au saumon du Pacifique en voie de disparition.
Je suggère respectueusement, mais fermement, que le Comité recommande, premièrement, que la ministre nomme un conseiller scientifique indépendant pour l'informer sur le grand nombre de preuves scientifiques qui démontrent que les élevages en parcs en filet infectent le saumon sauvage du Pacifique avec des parasites et des agents pathogènes qui ont des répercussions sur les populations de ce saumon. Cette recommandation est conforme à la conclusion du Comité d'experts indépendant sur les sciences de l'aquaculture de 2018 selon laquelle le MPO n'était pas en mesure d'évaluer les données scientifiques objectivement et à sa recommandation que le MPO nomme un conseiller ministériel sur les questions d'aquaculture.
Deuxièmement, la conduite du MPO et les fautes des gestionnaires du MPO devraient faire l'objet d'une enquête plus approfondie par une tierce partie indépendante, comme un commissaire nommé en vertu de la Loi sur les enquêtes, et de préférence par un enquêteur ayant le pouvoir d'assignation.
Ces deux mesures sont nécessaires pour que la ministre dispose de renseignements exacts.
Je fais ces recommandations après avoir examiné des dizaines de milliers de pages de documents publiés en vertu de la Loi sur l'accès à l'information et après avoir participé à des processus au cours desquels les gestionnaires du MPO ont, entre autres choses, illégalement occulté les résultats de recherches effectuées par des scientifiques canadiens et internationaux et ils ont entravé la communication de ces résultats scientifiques aux décideurs du MPO. Ils ont déformé le contenu des articles scientifiques dans les évaluations des risques et ont dénaturé publiquement le consensus atteint par les scientifiques lors des évaluations des risques, notamment en modifiant les conclusions des scientifiques sans leur consentement. Ils se sont écartés, sans justification, des normes internationales pour le diagnostic des maladies et la détection des épidémies, notamment en permettant aux titulaires de permis de l'industrie de voter sur les évaluations des risques et la façon dont la maladie serait diagnostiquée. Ils ont adopté des critères illégaux pour l'adoption du principe de précaution et ont présenté des conclusions d'évaluations des risques qui n'étaient étayées par aucune preuve et ont refusé d'accéder aux demandes de fournir des preuves à l'appui de ces conclusions.
Cette litanie de méfaits de la part des gestionnaires du MPO est semblable à la conduite de ce ministère lors de l'effondrement de la pêche à la morue de l'Atlantique, lorsque le MPO a régulièrement occulté et déformé les preuves de dommages. La nature pernicieuse et omniprésente de cette inconduite confirme que ce n'est pas le produit de quelques brebis galeuses isolées, mais d'un troupeau malade.
Le juge Cohen a mis en garde contre ce résultat. Le commissaire à l'environnement et au développement durable a conclu que le MPO était sujet aux allégations selon lesquelles il accordait la priorité aux intérêts de l'industrie de l'aquaculture. L'expert scientifique en chef du Canada a confirmé que le MPO ne pouvait pas évaluer les données probantes sans partialité. Le MPO n'a rien fait pour corriger cette inconduite.
Avec tout le respect que je dois au travail de votre comité, je recommande fortement que ceci ne soit qu'une première étape et que le Comité recommande qu'une enquête approfondie soit réalisée par une tierce partie indépendante sur le MPO et ses gestionnaires afin de faire des recommandations sur la réforme nécessaire.
Autrement, la protection et la conservation des pêches publiques du Canada sur la côte Ouest resteront entre de mauvaises mains.
Bonjour, et merci au président et au Comité de m'accueillir ici aujourd'hui.
À titre d'information, je travaille à la conservation du saumon du Pacifique et au rétablissement général des espèces au Canada depuis 20 ans. J'ai participé à divers processus scientifiques et consultations des intervenants organisés par le MPO, y compris le Comité de planification intégrée de la pêche du saumon du Pacifique, le Conseil du fleuve Fraser de la Commission du saumon du Pacifique, des groupes de travail techniques sur l'épaulard résident du Sud et des examens scientifiques du gouvernement, en particulier des évaluations du potentiel de rétablissement des populations en péril de saumon du Pacifique.
La science est l'outil le plus essentiel dans la trousse du ministère des Pêches et des Océans. Grâce à elle, nous pouvons comprendre l'état des pêches et des océans que nous tentons de protéger et de gérer. Elle est aussi notre outil le plus efficace pour déterminer si nous avons bel et bien atteint nos objectifs et suivre nos progrès vers de nouvelles cibles.
À l'heure actuelle, le processus décisionnel du MPO ne fonctionne plus et la science en est la victime ou, pire encore, est devenue un facteur hors sujet. Le MPO a tendance à se montrer le plus invisible possible tout en réduisant au minimum ses responsabilités, ce qui laisse en plan nos poissons, nos océans et tous les Canadiens. Sans une orientation claire et des rapports transparents sur les objectifs mesurables, c'est un résultat inévitable.
Les tables de concertation multilatérales et même les groupes de travail techniques formés par le MPO ont largement servi à repositionner le MPO comme arbitre entre les intérêts plutôt que comme organisme de réglementation et défenseur de données scientifiques et de données probantes. Qui plus est, il arrive encore trop souvent que les employés du MPO aient des conflits d'intérêts avec les activités de pêche ou d'aquaculture qu'ils sont censés réglementer et gérer, marginalisant la science et évitant les décisions difficiles qui doivent être prises dans l'intérêt des poissons, des océans et de l'avenir même de ces secteurs commerciaux.
L'absence d'un cadre de responsabilité transparent est évidente, mais il pourrait en être autrement. En général, le MPO a de bons antécédents en matière de recherche scientifique et de surveillance nécessaire pour évaluer l'état des stocks de poissons et de leur habitat. La capacité de faire de bonnes recherches scientifiques est présente.
Depuis 20 ans, le MPO a réussi à élaborer et à publier plusieurs politiques clés qui ont été motivées par les plus récentes percées scientifiques sur la gestion écologique efficace et qui reflètent les pratiques exemplaires mises en œuvre un peu partout dans le monde. Ces politiques sont notamment la Politique du Canada pour la conservation du saumon sauvage du Pacifique et le Cadre pour la pêche durable.
Bien que le soutien à ces fonctions et politiques fondamentales ait fluctué au fil du temps, nous avons actuellement les ressources et les directives ministérielles — du moins dans le cas du saumon du Pacifique par l'entremise de l'Initiative de la Stratégie relative au saumon du Pacifique — pour vraiment régler les questions en suspens concernant la fonction de gestion et la fonction scientifique du MPO, combler les principales lacunes en matière de surveillance et de recherche essentielles et mettre en œuvre ces politiques fondamentales.
Dans le contexte de la science appliquée aux pêches, il est essentiel de comprendre que les écosystèmes sont extrêmement complexes et que nos systèmes scientifiques et de gestion doivent être conçus pour comprendre les risques et gérer nos propres répercussions. Les interventions que nous avons cherché à garder au minimum ont échoué et les pratiques exemplaires actuelles dans le domaine de la gestion des pêches et des écosystèmes le reconnaissent. De plus, nos tentatives pour manipuler et contrôler les écosystèmes, souvent pour régler des problèmes que nous avons nous-mêmes créés, ont également échoué. Les écloseries de salmonidés, par exemple, ont largement aggravé les problèmes d'abondance et de santé du saumon. Comme l'a dit récemment un collègue universitaire, si les écloseries de saumon étaient un médicament, elles ne seraient pas approuvées par Santé Canada.
La croyance selon laquelle l'abattage sélectif d'un prédateur du saumon, comme les phoques et les otaries, accroîtra les populations de saumons ne tient pas compte de la complexité de ces écosystèmes et des conséquences inattendues qui pourraient survenir. Ces pinnipèdes sont un élément naturel de ces écosystèmes et nos tentatives pour réduire volontairement leur nombre sont encore plus susceptibles d'échouer que nos tentatives de gérer la pêche au saumon elle-même.
Nous avons des plans et des politiques et, dans une large mesure, les ressources humaines et financières pour les mettre en œuvre. Notre problème aujourd'hui est un manque de responsabilisation fondée sur des décisions reposant sur des données scientifiques transparentes. La science doit reprendre sa place au cœur du processus décisionnel et on doit s'assurer qu'elle est suffisamment transparente et libre de toute ingérence politique. Il est normal que les décideurs politiques tiennent compte de plusieurs éléments, mais il est essentiel que les avis et les données scientifiques soient le plus impartiaux que possible et rendus publics.
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Comment pouvons-nous le faire? Mettre en œuvre les politiques existantes qui renferment des avis clairs et fondés sur la science quant à la manière d'atteindre les objectifs de conservation et de gestion. Établir un plan clair pour parvenir à la cogouvernance des pêches avec les Premières Nations. S'engager publiquement à atteindre les objectifs particuliers de ces politiques. Créer un mécanisme de suivi ou d'audit pour ces objectifs, notamment des organismes consultatifs techniques indépendants, le COSEPAC est un bon modèle. Un témoin précédent en a beaucoup parlé.
Faire rapport des résultats et guider leur mise en œuvre. Axer les processus existants ou nouveaux avec les parties prenantes sur l'atteinte de ces objectifs. Restructurer le MPO, le cas échéant, pour soutenir ces changements et éliminer les conflits d'intérêts
Le président: Oui. Nous vous entendons parfaitement.
M. Christopher Jones: Toutes mes excuses. Je travaille avec une technologie qui ne m'a pas été envoyée à temps. C'est mon excuse, et je m'y tiendrai pour l'instant.
Merci à tous de me donner l'occasion de discuter avec vous aujourd'hui. Je suis un ancien gestionnaire principal des pêches. J'ai travaillé à Ottawa, à l'étranger et dans tout le Canada atlantique. J'ai travaillé avec le Secrétariat canadien de consultation scientifique, le SCCS pour demander des évaluations des stocks et des examens du cadre, et j'ai participé à des examens de l'évaluation des stocks et à des révisions scientifiques visant ces examens.
Je vais aborder une série de questions. Il semble que, au cours des dernières années, le MPO ait mis à jour la plupart de ses modèles d'évaluation des stocks, ce qui, pour l'essentiel, a entraîné une révision à la baisse des évaluations. À la suite de ces efforts visant à mettre à jour les modèles d'évaluation récents, plusieurs questions clés se posent et il serait utile de les approfondir. Je travaille actuellement avec un groupe de scientifiques du MPO en retraite, qui travaillent à la fois comme pêcheurs et en mer, avec des entreprises nationales et internationales.
Des questions me viennent à l'esprit et elles sont représentatives de toutes nos discussions. Pourquoi les modèles d'évaluation ont-ils été mis à jour à ce moment‑ci? Certains arguments laissent entendre qu'il était temps d'adopter une approche davantage axée sur la conservation, mais quels paramètres ont été mis à jour et dans quelle mesure? Ce sont les questions techniques qui ressortent des discussions et les scientifiques qui ne font pas partie du ministère sont désireux de les comprendre. Ils ne savent pas exactement quelles données scientifiques ont été utilisées pour mettre à jour ces paramètres.
Prenons l'exemple du flétan. La pêche au flétan se porte bien sur la côte de l'Atlantique depuis des années. La population s'est rétablie grâce aux modèles existants. Cela a suscité des questions. Si le modèle existant était inadéquat ou imparfait, comment la population de flétan aurait-elle pu prospérer alors que ce modèle était utilisé? Pour quelle raison a‑t‑on modifié le modèle si celui‑ci n'avait peut-être pas de défauts? Le nouveau modèle suggère de réduire le quota de 13 %. Cela indique‑t‑il une exactitude accrue du nouveau modèle, ou le modèle a‑t‑il été ajusté pour refléter les objectifs de conservation resserrés? Sinon, y a‑t‑il un seuil d'exactitude que le nouveau modèle d'évaluation vise à atteindre?
Une autre question intéressante me vient à l'esprit, car nous travaillons de près avec des scientifiques scandinaves. Y a‑t‑il des corrélations entre les modèles d'évaluation canadiens mis à jour et les modèles scandinaves typiques d'évaluation des stocks, alors que la plupart des stocks de poissons augmentent ou atteignent un niveau stable record en Scandinavie?
En ce qui concerne la promotion par le ministère des aires marines protégées et des refuges marins et l'augmentation prévue de leur nombre, de leur complexité et de leur taille, quelles ressources physiques et humaines le secteur scientifique du ministère a‑t‑il prévues pour soutenir directement et surveiller par la suite ces initiatives? Autrement dit, dans quelle mesure faudra‑t‑il potentiellement réduire les ressources consacrées à la recherche scientifique pour appuyer la surveillance continue de ces aires protégées dont le nombre et la taille ne cessent d'augmenter?
Quel sera l'impact sur la capacité des ressources scientifiques à poursuivre l'évaluation des stocks si davantage de ces ressources scientifiques étaient affectées à d'autres tâches? Par exemple, dans la région des Maritimes, les stocks ont été séparés en systèmes à deux niveaux dans lesquels les stocks très surveillés sont l'objet d'un travail scientifique important tandis que les stocks moins surveillés reçoivent peu ou pas d'évaluation scientifique. Les intervenants ont été informés que ce ratio pourrait changer et que cela pourrait se traduire à l'avenir par un soutien scientifique en baisse en raison de l'augmentation de la demande par ailleurs.
Voilà quelques questions qui viennent à l'esprit d'un groupe de scientifiques qui travaillent dans l'industrie et sur l'eau. En ce qui concerne nos recommandations, nous espérons que la science sera ouverte et transparente dans le cadre de l'élaboration d'une présentation et de priorités afin que nous puissions tous en débattre à mesure qu'elles progressent.
Avant de commencer, j'ai oublié de mentionner que M. Kram remplace M. Zimmer et que Mme Valdez remplace M. Kelloway.
Bienvenue au Comité permanent des pêches et des océans.
Nous allons maintenant passer aux questions. Je vais demander aux membres du Comité de bien vouloir préciser à qui s'adresse leur question. Nous accueillons aujourd'hui six témoins. Je ne veux pas que tout le monde regarde l'écran et se demande à qui s'adresse la question. C'est votre temps de parole, mais vous perdrez du temps si vous ne précisez pas à qui s'adresse votre question.
Nous allons commencer par M. Perkins, pour six minutes ou moins, s'il vous plaît.
Je remercie les témoins d'être venus pour cette étude importante. Nous vous sommes tous reconnaissants du temps que vous nous accordez.
C'est une étude intéressante. Puisque nous avons deux messieurs Jones, je suppose que je vais devoir utiliser les prénoms. Nous n'utilisons généralement pas les prénoms. Cette question s'adresse à Christopher Jones pour 50 $.
Des voix: Oh, oh!
M. Rick Perkins: Je vais donner la parole à M. Jones pour les premières questions.
Vous avez beaucoup d'expérience, puisque vous avez travaillé dans le domaine des politiques au sein du ministère et que depuis que vous avez pris votre retraite, je suppose, vous travaillez avec des groupes et des organisations de pêcheurs.
Pouvez-vous revenir sur votre expérience et la façon dont les gens qui pêchent sur l'eau sont consultés et traités aujourd'hui dans le cadre des consultations, de l'élaboration des données scientifiques et des processus décisionnels mis en place par la ministre, et en quoi cela diffère de ce que vous avez connu à l'époque où vous étiez au ministère?
Les choses ont beaucoup changé au cours des 30 dernières années, comme partout. Par le passé, j'ai pu, au cours de consultations auprès de l'industrie et de groupes de pêcheurs, être accompagné d'une équipe d'économistes, de statisticiens et de scientifiques pour répondre aux questions. C'était très intense. Nous passions beaucoup de temps à préparer les exposés et le dialogue, ainsi qu'à récapituler et à élaborer les recommandations découlant de ces discussions et de ces consultations.
Nous constatons aujourd'hui que la gestion des pêches s'accompagne de consultations de groupes et qu'on suppose que tous les pêcheurs font partie d'une association. Les autres sont écartés, ne sont pas pris en compte, ne participent pas et ne sont pas contactés.
La Gestion des pêches ne semble pas disposer, pour assister aux réunions, de la même équipe de scientifiques, d'économistes et de statisticiens expérimentés en matière d'application de la loi que celle que nous avons eue par le passé. Les pêcheurs, qui sont issus des générations précédentes et actuelles, sont frustrés. Ils posent des questions, que quelqu'un prendra en considération, et peut-être que quelqu'un les recontactera. Ils se sentent également exclus de ce processus, car il est très rare que quelqu'un leur revienne.
Comme mon temps est limité, puis‑je passer à ma prochaine question?
Dans le cas des aires marines protégées, que vous avez mentionnées, il y a deux sujets, dont l'un a été annoncé récemment par la ministre, il s'agit du Refuge marin des canyons orientaux de la Nouvelle-Écosse. L'autre, le Site d'intérêt de la côte Est, fait l'objet de discussions. Avez-vous participé à des échanges avec le ministère au sujet des données scientifiques et de l'objectif de ces aires marines protégées? Le ministère dispose‑t‑il de données scientifiques à l'appui de ce qu'il protège?
C'était difficile. Oui, j'ai travaillé avec le ministère sur ces questions, surtout en ce qui concerne les océans. Nous n'avons pas eu de dialogue avec les scientifiques. Le ministère utilise la science comme argument, mais lorsqu'une de nos délégations s'assoit autour de la table pour analyser et tenter de quantifier l'impact — nous essayons de le mesurer, comme on l'a dit plus tôt — et pour poser les questions, les scientifiques ne sont pas présents. C'est simplement le ministère qui fait référence à la science. C'est un exercice très frustrant, parce que les scientifiques ne sont pas là pour nous donner une réponse directe ou pour nous donner l'occasion de poser des questions directes.
Dans un autre ordre d'idées, j'ai beaucoup parlé, au cours de cette étude, de la décision concernant le maquereau. Le maquereau est évidemment un stock transfrontalier avec les États-Unis. Vous avez beaucoup d'expérience dans les discussions et les négociations internationales dans lesquelles vous représentiez le Canada et le MPO. Savez-vous si le Canada travaille de concert avec les États-Unis à la recherche scientifique sur les stocks de maquereau?
Non nous ne le faisons pas, et c'est l'un des problèmes. L'industrie de la pêche elle-même est transfrontalière en ce qui concerne les contacts et la circulation de l'information. Ni l'industrie américaine, ni l'industrie canadienne n'ont connaissance d'aucun contact entre les scientifiques du MPO et ceux du National Marine Fisheries Service.
À ce sujet, selon l'analyse de mon bureau, le ministère utilise des relevés de la biomasse féconde pour déterminer la biomasse des stocks de maquereau de l'Atlantique. En moyenne, au cours des 10 dernières années, le ministère a fait des recherches scientifiques lorsque l'eau est à 8 degrés, alors que le maquereau fraie entre 10 et 13 degrés.
À votre avis et selon votre expérience, quel peut-être le résultat de ce genre de recherche scientifique?
Cela semble indiquer que la recherche doit contribuer davantage à l'évaluation scientifique. La référence à la température et à l'état des stocks d'œufs en est un exemple. Cependant, il y a des années, et peut-être même plus d'une décennie, des scientifiques sont venus le long des côtes de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve pour travailler avec l'industrie de la pêche, prendre des mesures et développer la base de données pour l'évaluation du maquereau.
Merci, monsieur le président, et merci à tous d'être ici.
Il y a un fil conducteur qui ressort de vos divers témoignages et je vais essayer de le suivre — comme on enfile des perles, à la manière de Glenn Miller. Christopher Jones s'en souvient peut-être.
Monsieur Jones, Christopher, y a‑t‑il eu une époque où les travaux scientifiques étaient effectués à l'extérieur du MPO?
En effet. Pour répondre à votre question, je dirais qu'il y avait un mélange de travaux scientifiques réalisés par le MPO et de travaux scientifiques externes. Je veux dire par là qu'il y avait des organismes scientifiques régionaux, comme l'OPANO, et que les scientifiques du MPO ont communiqué avec les scientifiques du CIEM dans l'Atlantique Est et avec les scientifiques de l'OPANO pour collaborer à la modélisation et aux méthodes d'évaluation.
Nous avons remarqué qu'inévitablement, la science ne nous donne pas de réponses et de conseils définitifs. Résultat, quelqu'un prend une décision et dit qu'elle est fondée sur la science, ce qui favorise les conflits, l'invalidation, les données scientifiques contradictoires, etc. Y a‑t‑il un mécanisme pour régler ces conflits de façon objective afin de trouver une solution à laquelle tout le monde peut acquiescer et dire, nous sommes d'accord.
Mettons qu'une décision a été prise. Prenons l'exemple de la ministre des Pêches et des Océans, qui dit que la décision a été prise en se fondant sur la science. Inévitablement, il y aura des gens qui ne seront pas d'accord avec ces conclusions. Ils ne seront pas d'accord avec les données scientifiques. Ils tenteront d'invalider ces données. Bien sûr, la querelle qui en résultera amènera tout le monde à se demander comment on peut prendre une décision, d'autant plus que bien souvent la science ne nous donne pas des conseils définitifs.
Par conséquent, quelle est la meilleure façon de procéder? Est‑ce le modèle du SCAS?
Je pense que le modèle du SCAS est une bonne approche. À mon avis, le nœud du problème est souvent le degré de certitude des différentes études scientifiques. Il semble que très peu de gens posent cette question: avez-vous confiance en vos résultats?
Pour prendre un exemple typique, nous avons des modèles qui prédisent que l'élimination des phoques de la côte Ouest du Canada augmenterait l'abondance du saumon, et de nombreuses personnes se rallient à cette conclusion sans jamais vous demander dans quelle mesure vous faites confiance à ces résultats. Les gens qui élaborent les modèles et ceux qui savent comment ils sont paramétrés vous diront qu'il y a environ 30 à 40 % de chances que le résultat du modèle soit correct.
Pour bien des gens, si vous devez prendre une décision aussi importante, vous devez avoir une confiance supérieure à 80 %. D'un autre côté, si ce que vous avancez et ce qui est en jeu n'a pas de valeur pour vous, la vie des phoques par exemple, vous pouvez dire qu'une probabilité de 30 à 40 % c'est formidable en regard de la valeur de la pêche.
Pour d'autres, c'est un risque trop important, car il faudra peut-être entre 30 et 40 ans pour découvrir que le pari est perdu.
Monsieur, je vais devoir vous interrompre. C'est passionnant et si vous avez quelque chose à ajouter sur cette question particulière — parce que nous allons passer beaucoup de temps à parler des phoques —, une réponse écrite serait tout à fait merveilleuse, si vous pouvez nous la fournir.
Monsieur Hardy, nous entendons de nombreux commentaires au sujet des phoques et du saumon, des phoques et de la morue. On voit à quel point les stocks de morue et de saumon sont en difficulté. Si une source principale de nourriture est épuisée, pourquoi les populations de phoques augmentent-elles?
Nous n'avons pas vraiment vu beaucoup d'études sur les phoques. La plupart des données que nous avons étudiées, dans le cadre du Groupe de travail sur la science des phoques de l'Atlantique, étaient désuètes. L'analyse du régime en mer a été effectuée avant le milieu des années 1990. L'échantillonnage côtier, réalisé principalement aux mêmes endroits chaque année, a lieu à l'automne et en hiver. Pour ce qui est de l'étude du régime alimentaire, nous ne trouvons pas de capelan ou de morue, parce qu'ils ne sont pas présents près des côtes à Terre-Neuve-et-Labrador à ce moment‑là.
En ce qui concerne la croissance des populations, des chiffres ont été publiés la semaine dernière sur les phoques gris. Selon le MPO, la population a légèrement diminué par rapport au recensement précédent. Un recensement sur le phoque du Groenland aura lieu cette année, en 2022. Je pense donc que cela se fera par l'entremise du MPO. D'ici un an ou deux, nous devrions avoir une idée de la population de phoques du Groenland.
Vous avez parlé tantôt du 30e anniversaire de la fermeture des pêches à la morue. Pour moi, c'est un souvenir impérissable, puisque j'allais à la pêche à la morue avec mon père dans l'estuaire du Saint‑Laurent. Mon père me disait qu'il fallait en profiter pour manger de la morue, car cela ne serait plus possible dans 15 ou 20 ans, que la morue allait disparaître à cause de la situation des phoques.
Aujourd'hui, nous sommes assis tous ensemble et nous réfléchissons à ce résultat. Je dois dire que les pinnipèdes ont le dos large. Croyez-vous sincèrement que nous avons une surpopulation de phoques et qu'ils souffrent eux aussi de cette surpopulation?
Je dois m'excuser. Je suis certain que la question était très bonne, mais je n'ai pas entendu la traduction, alors je n'ai pas l'information ou les connaissances nécessaires pour vous répondre.
Monsieur Hardy, au bas de votre écran, il devrait y avoir une icône sur laquelle vous pouvez cliquer pour obtenir l'interprétation. Vous pouvez choisir « parquet », « anglais » ou « français ». Si vous voulez tout entendre en anglais, choisissez « anglais ». Si vous voulez l'entendre en français, choisissez « français ».
Je vais reprendre ma petite présentation parce que je trouve que c'est important.
En 1990, j'allais en mer dans l'estuaire du Saint‑Laurent avec mon père et nous pêchions la morue. Il s'agissait d'une pêche de loisir. Mon père me disait d'en profiter parce qu'il ne serait plus possible de manger de la morue dans 15 ou 20 ans en raison de l'arrêt de la chasse aux phoques.
Les phoques ont le dos large et on leur en met beaucoup sur les épaules. Pour ma part, je me préoccupe aussi de leur sort. Croyez-vous que la surpopulation de phoques fait souffrir les phoques en ce moment? On entend dire qu'ils n'ont plus de berges et qu'ils ont moins de nourriture qu'ils en avaient. Cela fait aussi partie des préoccupations du Comité.
Croyez-vous que la surpopulation de phoques est aussi dommageable pour les phoques eux-mêmes?
Je vous remercie de votre question. J'ai entendu l'interprétation.
Lorsque vous avez entre 7 et 10 millions d'animaux qui consomment entre 1 et 7 kilogrammes de poisson par jour, la consommation quotidienne est énorme. Les poissons-proies, en particulier le capelan et le hareng dont dépendent d'autres espèces, sont prédominantes dans l'alimentation des phoques. Avec une très grande population de phoques, la consommation de poissons-proies aurait un impact sur d'autres espèces de poissons et sur des espèces de poissons plus grandes, c'est certain.
Il y avait 7,6 millions de phoques du Groenland lors du dernier recensement. Est‑ce que ce chiffre augmente actuellement? S'est‑il stabilisé? Certaines personnes indiquent que la masse corporelle des phoques se réduit. Les données scientifiques indiquent que les taux de reproduction sont en baisse. Il se peut que la population ait atteint sa capacité maximale et qu'à l'avenir, les populations de phoques se réduisent, tout simplement parce qu'ils manquent de nourriture.
J'apprécie les commentaires de votre père sur l'époque où il était sur l'eau. J'ai passé ma vie sur l'eau. J'entends tous les jours des remarques de ce genre. À ce jour, pour être tout à fait honnête avec les gens qui assistent à cette réunion, très peu de choses ont été faites au sujet des phoques. Je pense que nous devons ouvrir les yeux et examiner les études scientifiques qui ont été faites dans d'autres pays et les données disponibles sur le régime alimentaire des phoques.
Ce sera très intéressant de visiter la Norvège, si nous avons la permission de le faire, pour poser ces questions.
Monsieur Hardy, nous sommes dans un contexte où l'on voudrait trouver une solution pour contrôler la population des phoques. J'ai rencontré des chasseurs de phoques qui font la chasse de façon responsable. Rien de la bête n'est perdu ou gaspillé. La chair sert à l'alimentation des Premières Nations qui n'ont plus accès à leur nourriture traditionnelle. Croyez-vous que ce genre de chasse respecterait les critères d'acceptabilité?
Absolument. Le phoque offre de nombreux produits différents pouvant être utilisés. L'animal devrait être utilisé intégralement lorsqu'il est pris.
Je pense que le Canada a raté une occasion de produire des aliments, non seulement pour nos collectivités du Nord, mais aussi pour les pays qui n'ont pas un approvisionnement alimentaire adéquat. Divers efforts sont faits pour d'autres types de produits — les céréales et différents produits — et le phoque, s'il est bien transformé, pourrait offrir une source d'aliments riches en protéines aux nombreuses personnes qui mourront de faim dans le monde. Avec le conflit en cours en Ukraine, nous voyons tous les jours aux actualités que cela va devenir un problème important.
Le phoque est une ressource. Il offre probablement certaines des meilleures protéines. Il est riche en oméga‑3. Tous les professionnels de la santé soulignent les bienfaits des oméga‑3. Le phoque offre des oméga‑3 de qualité supérieure.
Il y a beaucoup de choses à faire et il faut agir. Nous avons besoin que notre gouvernement appuie la recherche sur les produits, le développement des marchés et l'accès aux marchés, parce qu'au fil des ans, comme nous le savons, les groupes de défense des droits des animaux ont...
Croyez-vous que le MPO et le gouvernement devraient investir des sommes supplémentaires pour faire une promotion juste et acceptable, si jamais on prenait la décision de rétablir une certaine chasse au phoque respectueuse et responsable? Avons-nous besoin de financer une meilleure promotion?
Absolument. Je pense que tous les ministères fédéraux qui travaillent avec les gouvernements provinciaux, les collectivités locales et les groupes autochtones doivent collaborer et trouver une façon d'aller de l'avant.
Vous avez tout à fait raison de dire à quel point la chasse au phoque est sans cruauté. Elle a été étudiée à maintes reprises par des vétérinaires internationaux. La chasse est aussi peu cruelle qu'une chasse aux animaux sauvages peut l'être. Il faut collaborer, trouver une utilisation et récolter les 455 000 animaux — rien que pour le phoque du Groenland — qui correspondent au quota en place.
Beaucoup croient que si nous pouvions prélever le quota, nous verrions un impact immédiat sur nos pêches dans le Canada atlantique et sur des problèmes semblables sur la côte Ouest.
Merci aux témoins qui sont ici aujourd'hui pour tous les renseignements importants qu'ils nous ont fournis.
J'aimerais poser ma question à M. Young, qui est avec nous aujourd'hui et je m'en réjouis.
Monsieur Young, vous avez parlé de l'importance de prendre des décisions, de comprendre la complexité des écosystèmes et du fait que les tentatives antérieures de manipulation et de contrôle de nos écosystèmes marins complexes ne se sont pas révélées fructueuses. Vous avez également parlé de l'importance de la cogestion avec les Premières Nations et vous en avez fait l'une de vos recommandations.
Pourriez-vous nous parler un peu des liens entre l'approche écosystémique et la cogestion des Premières Nations? En quoi ces processus décisionnels dans un modèle de cogestion aideraient-ils à prendre des décisions plus judicieuses et plus durables pour les pêches et pour notre environnement marin?
En fin de compte, ce que j'essayais de dire, c'est que la science n'est pas nécessairement une compréhension parfaite des choses, et c'est particulièrement vrai lorsqu'il s'agit d'écosystèmes et d'espèces sauvages qui vivent sous l'eau. Néanmoins, au bout du compte, nous pouvons appliquer nos propres principes et objectifs, puis essayer de déterminer si cela fonctionne. La science joue un rôle clé à cet égard. Elle prospère à la lumière du jour et, en définitive, il est très important de s'assurer qu'elle est rendue publique et que les décisions politiques sont éclairées par cette science, et que les autres comprennent de quoi il s'agit.
La cogouvernance est essentielle si nous voulons vraiment adapter notre gestion des pêches et des écosystèmes aquatiques et la ramener à la place qui lui revient. C'est aussi l'occasion de réexaminer la façon dont nous considérons les écosystèmes du point de vue scientifique et leur rôle dans la gestion.
Dans l'état actuel des choses, nous ne progressons pas suffisamment vers la cogestion d'une manière qui nous permette de profiter de cette occasion et de donner aux collectivités des Premières Nations les moyens d'assumer elles-mêmes ces responsabilités. Il y a de multiples exemples de leadership extrêmement puissant de la part des collectivités des Premières Nations qui intègrent le savoir traditionnel et la science dans une approche ouverte et transparente de la gestion des pêches, et c'est un modèle à suivre.
Le long de la côte Ouest, un certain nombre de collectivités ont vraiment pris des mesures au cours des 10, 15 ou 20 dernières années, en élaborant des programmes scientifiques entièrement nouveaux et de nouvelles approches de la gestion des pêches qui sont beaucoup plus conformes aux pratiques exemplaires mondiales. Il s'agit notamment des Nuu-chah-nulth sur la côte ouest de l'île de Vancouver et de diverses collectivités du bassin hydrographique de la rivière Skeena. Dans l'ensemble du bassin hydrographique du Fraser, les collectivités font des efforts très importants pour mieux comprendre la dynamique de la population de leurs propres saumons et pour développer certains de ces modèles de cogouvernance avec le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial pour revenir au rétablissement du saumon et, au bout du compte, pour obtenir un retour du saumon dans ces collectivités pour qu'elles puissent en profiter.
Pour mieux aller de l'avant, il est bon que nous examinions les pratiques exemplaires des administrations internationales en matière de science. Pourriez-vous nous donner des exemples de ces pratiques que le Canada devrait peut-être imiter?
Le témoin précédent a parlé de gouvernance collaborative avec les Premières Nations. Je pense qu'au Canada, c'est un modèle qui peut amener une autre voix à la table. Dans le cadre du processus du SCAS, les Premières Nations sont exclues même si l'obligation de consulter est déclenchée.
S'agissant de l'aquaculture des poissons, le Canada doit suivre plus étroitement les lignes directrices de l'Organisation mondiale de la santé animale, l'OIE, ainsi que par son code et ses manuels sur la santé des animaux aquatiques. Par exemple, lorsque le MPO a récemment autorisé les titulaires de permis de l'industrie à voter sur la façon de diagnostiquer l'IMSC, l'inflammation des muscles squelettiques et cardiaques, une maladie causée par l'orthoréovirus pisciaire, il n'a fourni à ces personnes aucune orientation, aucun mandat concernant les obligations légales du Canada en vertu du Règlement de pêche (dispositions générales) ou en vertu du code aquatique de l'OIE.
Par conséquent, ils ont adopté une définition de la maladie à partir de laquelle il est presque impossible de poser un diagnostic. Ils ont cessé de diagnostiquer la maladie au niveau individuel et ne diagnostiquent l'IMSC que si une mortalité de la population lui est attribuée. Bien sûr, cela crée une aberration sur le plan logique. On ne peut pas attribuer des répercussions à l'échelle de la population si on ne diagnostique pas au niveau individuel, et on ne peut pas diagnostiquer — selon le processus du MPO — les individus à moins d'avoir des répercussions à l'échelle de la population. Cela s'écarte de l'obligation du MPO de mettre en œuvre le principe de précaution, c'est-à-dire prévoir, combattre et prévenir les dommages. Au lieu de cela, le MPO cherche à obtenir la preuve que le mal a été fait avant d'agir.
Le MPO s'écarte également du manuel de l'OIE en milieu aquatique en ce qui concerne les critères d'établissement de la sensibilité du diagnostic des épidémies dans les unités épidémiologiques et le fait de s'appuyer sur une approche scientifique pour le diagnostic au niveau individuel.
De plus, cela a créé d'importants conflits d'intérêts lorsque les titulaires de permis de l'industrie ont été invités à voter sur la façon de diagnostiquer une maladie qui, si elle est détectée, impose un lourd fardeau réglementaire à leurs activités.
Je pense que nous devons suivre les directives internationales de l'OIE sur la gestion de ces conflits d'intérêts, mais le MPO et l'ACIA doivent également suivre ces directives internationales sur la déclaration des maladies émergentes.
Lorsque le RVP a été détecté pour la première fois en 2011 en Colombie-Britannique, cela aurait dû déclencher l'obligation du MPO et de l'ACIA de signaler une maladie émergente, c'est-à-dire qu'un virus étranger détecté en Colombie-Britannique causait une maladie chez le saumon quinnat en voie de disparition. Cette maladie a plutôt été...
Merci à tous les témoins d'être ici aujourd'hui. C'est une étude très intéressante.
J'aimerais commencer par M. Jones, si vous me le permettez.
Vous avez dit dans vos commentaires tout à l'heure et dans votre déclaration préliminaire qu'il y a encore de trop nombreux cas dans lesquels les fonctionnaires du MPO sont en conflit d'intérêts avec les pêches ou les exploitations aquacoles qu'ils sont censé réglementer et gérer, et qu'ils marginalisent encore davantage la science et évitent de prendre les décisions difficiles qui doivent être prises au profit du poisson, des océans et de l'avenir même de ces industries.
Nous n'avons probablement pas le temps aujourd'hui, mais j'aimerais que vous nous en donniez des exemples précis. Je pense que nous sommes tous responsables; nous le sommes certainement comme représentants élus. Le ministère a de très bons employés, mais jusqu'à maintenant, le Comité ne sait pas très bien où vont certaines de ces décisions. Si vous êtes en mesure de fournir l'un ou l'autre de ces exemples, cela aiderait certainement le Comité dans le cadre de cette étude.
Très brièvement, je peux vous donner trois exemples en plus de l'exemple du diagnostic d'IMSC dont j'ai parlé plus tôt.
La première est la suppression d'un diagnostic d'IMSC en 2016. Mme Miller-Saunders et son équipe avaient diagnostiqué l'IMSC en utilisant une définition de cas acceptée à l'échelle internationale. Les documents divulgués en vertu de la Loi sur l'accès à l'information...
Je suis désolé de vous interrompre, mais nous allons très rapidement manquer de temps. Si vous pouviez nous fournir cette information très brièvement aujourd'hui ou par écrit par la suite, ce serait formidable. Merci.
Les documents d'accès à l'information montrent que le MPO et l'industrie ont réécrit le communiqué de presse en supprimant le diagnostic de Mme Miller-Saunders.
Le deuxième exemple concerne la bactérie Tenacibaculum. Au cours de la consultation sur les îles Discovery, les scientifiques du MPO avaient la preuve que la bactérie causait des impacts sur les populations de poissons dans ces îles. Une note d'information a été préparée. Cette note d'information n'est jamais parvenue jusqu'à la ministre. Les gestionnaires du MPO ont préféré informer l'industrie des résultats de cette étude.
Lorsque les Premières Nations, au cours des consultations, ont demandé à avoir accès à ces travaux, on leur a dit qu'il n'y avait aucune preuve que la bactérie Tenacibaculum faisait des dégâts, alors même que le MPO en avait informé l'industrie.
J'aimerais entendre d'autres témoins aujourd'hui, si possible. Nous avons déjà utilisé la moitié de mon temps. Nous vous saurions gré de nous faire parvenir le troisième exemple dans une réponse écrite pour que nous puissions l'examiner.
Ma prochaine question s'adresse à M. Sean Jones.
Monsieur Jones, au cours des dernières années, les juges ont rendu plus de décisions importantes sur les pêches qu'ils ne l'avaient jamais fait auparavant dans mon souvenir. Nous voici en train d'étudier la science au MPO et d'écouter votre témoignage d'avocat. Il ne fait aucun doute que tout respect vous est dû pour le rôle que vous jouez et le travail que vous faites.
À votre avis, la Loi sur les pêches, dans sa forme actuelle, est-elle suffisamment pertinente et à jour pour que les décisions relèvent du ministre et non des juges?
Je pense que la Loi sur les pêches pourrait nécessiter une révision en profondeur de la façon dont les données scientifiques sont utilisées et les pouvoirs de la ministre sont exercés.
Je ne pense pas qu'il y ait de problème à ce que les juges prennent des décisions. Dans les décisions importantes sur les pêches dont j'ai connaissance et qui ont toutes été rendues dans le cadre d'un contrôle judiciaire concernant le RVP et la décision relative aux îles Discovery, le juge n'a pas pris la décision ni n'a imposé sa préférence contre celle de la ministre.
En fait, dans tous ces cas, la cour a simplement renvoyé la décision à la ministre pour qu'elle la réexamine.
À votre avis, les juges rendraient-ils moins de décisions si la ministre s'en tenait à la Loi sur les pêches, qui relève de sa compétence, et à des données scientifiques solides lorsqu'elle prend ses décisions?
Je pense que nous verrions moins de décisions annulées lors d'un contrôle judiciaire si les gestionnaires du MPO fournissaient à la ministre une représentation plus complète et objective des données scientifiques dont elle est saisie.
Dans tous les cas dont j'ai connaissance — les deux décisions concernant le RVP et la décision concernant les îles Discovery —, le dossier présenté à la ministre était très partial et ne tenait pas compte de toutes les données ou de tous les choix disponibles.
Par votre entremise, ma question s'adresse à M. Hardy.
Monsieur Hardy, on a beaucoup parlé de la population de phoques sur les côtes Est et Ouest, surtout sur la côte Est. Si je regarde les chiffres, le quota de prélèvement a été de plusieurs millions d'animaux au cours des dernières années. Moins de 10 % de ce quota s'est traduit par des prises. Que faut‑il faire pour inciter les pêcheurs à exploiter pleinement le quota actuel?
Pourriez-vous en parler brièvement?
Qu'avons-nous manqué? Les pêcheurs ne prélèvent pas le quota autorisé. Pourquoi?
Je pense que c'est très en deçà de plusieurs millions. Il s'agit plutôt de dizaines de milliers au cours des dernières années, pour ce qui est des phoques du Groenland.
Pour augmenter le nombre de prises et faire en sorte qu'il soit rentable pour les pêcheurs de travailler dans des conditions dangereuses, c'est-à-dire habituellement au printemps lorsqu'il y a beaucoup de glace, nos gouvernements doivent ouvrir l'accès au marché.
Mes interlocuteurs dans l'industrie me disent que ce n'est pas un problème de clientèle pour les divers produits. C'est un problème d'accès aux marchés, que ce soit en Europe ou en Asie. Je suppose que nos amis d'Affaires mondiales Canada et de l'Agence canadienne d'inspection des aliments doivent travailler ensemble pour s'assurer que nous faisons tout notre possible pour permettre à ces produits d'atteindre les clients qui veulent les acheter.
Je comprends cela, monsieur Hardy, mais il n'en demeure pas moins que cela fait des années que les pêcheurs n'exploitent pas la ressource à laquelle ils ont accès, alors tant que nous n'aurons pas réglé ce problème, je ne pense pas qu'il y ait de marché. Pour développer une pêche, nous devons d'abord en établir le coût, puis être prêts à la subventionner d'une façon ou d'une autre jusqu'à ce que le marché soit développé, parce que, comme je l'ai dit, il y a plusieurs millions de phoques qui ne sont pas utilisés.
J'aimerais passer à M. Chris Jones. Divers témoins nous ont parlé de la modélisation que le MPO utilise dans le domaine scientifique. Cette question a été soulevée par un certain nombre d'organisations de pêcheurs qui avaient des doutes... Elles remettaient en question la modélisation utilisée. Dans votre témoignage, vous avez souligné que les modèles d'évaluation des stocks ont été mis à jour et vous avez comparé les modèles de stocks canadiens et scandinaves.
Qu'en pensez-vous? Savez-vous s'il y a une différence importante entre la modélisation utilisée par les scientifiques canadiens des pêches et celle utilisée par les scientifiques scandinaves? De toute évidence, la Scandinavie a bien géré ses pêches.
Je ne peux pas faire de comparaison directe. Il faudrait beaucoup de temps pour faire une comparaison directe entre la modélisation scandinave et la modélisation canadienne, mais je peux vous donner un aperçu général.
Nous croyons savoir que la modélisation scandinave repose beaucoup sur les données scientifiques, les données recueillies en mer, et qu'il y a une très bonne compréhension, une excellente compréhension, des statistiques, pour revenir à ce qui a été dit plus tôt, et qu'à l'heure actuelle les scandinaves comprennent beaucoup mieux les données que nous. Cette compréhension existait à Pêches et Océans il y a peut-être 25 ans, et je pense que les choses ont beaucoup changé, en ce sens que les scientifiques travaillent en grande partie en laboratoire, sur place et in situ, plutôt qu'en mer. Je pense que c'est la différence entre l'approche scandinave et l'approche canadienne en général.
J'ai une dernière question. Que recommanderiez-vous au Comité sur la façon dont le MPO pourrait intégrer les connaissances des pêcheurs? Il y a un fossé entre les deux. Quelles propositions feriez-vous au Comité et, comme je vais manquer de temps, pourriez-vous faire un suivi par écrit?
Il semble que ce soit la question à régler, c'est-à-dire la méthode d'intégration des connaissances des pêcheurs et des données scientifiques à celles du MPO sur la gestion des stocks. Pourriez-vous en parler brièvement?
Oui. Je pense que l'intégration de la science basée sur les pêcheurs ne concerne pas seulement la science, mais la gestion des pêches. Cela doit se faire de façon générale, et je pense que les scientifiques doivent intégrer les connaissances des pêcheurs directement dans le processus du SCAS. C'est peut-être plus long et plus compliqué, mais cette information est utilisée dans d'autres pays, comme en Scandinavie.
Ma question s'adresse à M. Rangeley. Vous avez parlé de la transparence de l'information, et j'ai envie de vous relancer là-dessus.
Nous avons un problème majeur, entre autres dans le secteur de la Gaspésie. En effet, on a annoncé à des pêcheurs de hareng et de maquereau la fermeture de la pêche à quelques jours de l'ouverture. Ces gens sont maintenant sans travail et sans le sou. Aucun plan, aucune compensation financière ne sont prévus pour les soutenir. Il y a là un manque total de prévisibilité.
Selon vous, la transparence de l'information a-t-elle une incidence sur l'état mental et socioéconomique de nos pêcheurs?
Quelle importance l'accès à l'information peut-il avoir pour eux?
Nous avons fait une analyse — et je peux vous fournir les publications — sur l'actualité de l'information scientifique. Ces pêcheurs auraient dû être au courant des données scientifiques bien à l'avance. Mais nous avons constaté que le SCAS a une politique sur la publication des documents, et elle est fondée sur la transparence. Pourtant, si on passe à travers les documents, en faisant une évaluation très prudente de leur degré d'actualité, seulement 10 % sont publiés à temps. De plus en plus, nous constatons aussi qu'une partie de l'information scientifique contenue dans les documents du SCAS est publiée après qu'une décision a été prise. C'est un véritable problème, surtout pour ceux qui n'assistent pas aux réunions du SCAS. Les pêcheurs y ont peut-être des représentants, mais beaucoup d'entre eux n'y sont pas.
Une solution rapide aussi — et cela se fait dans certaines pêches, comme celle de la morue du Nord —, c'est de tenir une séance d'information technique après la réunion, où il y a divulgation complète des conclusions et des tendances, d'une manière accessible au public, pendant que le processus de publication suit son cours au SCAS. Je pense que c'est un bon modèle et qu'il aurait pu aider les pêcheurs qui avaient l'impression d'être tenus dans l'ignorance quant au fondement scientifique de la décision.
Vous avez parlé de l'importance des plans de rétablissement et des rapports qui sont publiés. Un sujet dont j'ai déjà entendu parler par l'entremise d'Oceana, c'est le rétablissement des stocks de poissons-fourrages.
Je me demande si vous pourriez nous en dire un peu plus sur les préoccupations qui sont apparues et sur certaines des lacunes scientifiques et politiques propres à cet exemple que vous avez vu.
C'est une question fondamentale, très troublante à vrai dire.
Comme nous le savons, les poissons-fourrages sont la base du réseau alimentaire. Ils transfèrent l'énergie à travers l'écosystème aux poissons qui les consomment et dont nous dépendons, ainsi qu'aux oiseaux marins, aux baleines et ainsi de suite. À l'heure actuelle, environ 12 % du volume et 6 % de la valeur de nos pêches fourragères proviennent de stocks en santé. Nous épuisons considérablement les stocks.
Quelqu'un a posé une question tantôt sur le maquereau. Malheureusement, la pêche du maquereau et du hareng a dû être fermée à cause de l'état des stocks. Nous aurions dû les gérer bien avant de prendre ce genre de décision qui cause tant de bouleversements. En fait, lorsqu'on gère les poissons-fourrages, en raison de leur importance, il faut établir un seuil plus élevé pour les pêcher et s'assurer que leur biomasse est élevée, et fixer un plafond aussi. Essentiellement, on met en place des garde-fous, par mesure de précaution, de sorte qu'on ne gère pas ces pêches‑là, parce que les populations fluctuent.
C'est ainsi que cela fonctionne dans d'autres régions, mais ce n'est pas ce que nous faisons au Canada. C'est une question à laquelle j'aimerais vraiment qu'on accorde beaucoup d'attention.
Monsieur Young, pourriez-vous nous parler un peu plus de l'évaluation des stocks, plus précisément des lacunes que nous constatons et de l'incidence que cela peut avoir sur notre capacité future de prendre de bonnes décisions éclairées par la science?
Comme je le disais dans ma déclaration préliminaire, le MPO en général sait comment évaluer les stocks, et il l'a démontré par le passé. Ce qui s'est produit au cours des 20 dernières années, c'est que cette activité a été réduite en bien des endroits, notamment en ce qui concerne le saumon du Pacifique sur la côte Ouest. Non seulement nous perdons les renseignements de base nécessaires pour prendre les bonnes décisions en matière de pêche, mais nous brisons aussi le cycle et la base de données longitudinales qui nous aident vraiment à comprendre à long terme.
Comme je l'ai dit, en ce qui concerne cette espèce du moins, le gouvernement annonçait récemment l'Initiative de la Stratégie du saumon du Pacifique, qui permet de rétablir en partie l'évaluation des stocks — du moins pour le très prisé saumon du Pacifique. Mais, au bout du compte, la capacité d'évaluation des stocks continue de laisser à désirer dans un certain nombre de pêches et, comme M. Rangeley l'a souligné, elle nous fait défaut pour beaucoup trop de nos espèces. Dans la mesure où nous voulons adopter une approche écosystémique, nous devons comprendre non seulement nos espèces cibles, mais aussi les autres espèces de l'écosystème et la façon dont nos actions les affectent.
Ma première question s'adresse à M. Hardy. J'ai quelques questions à lui poser.
Monsieur Hardy, quelle est la raison de la différence marquée entre les estimations scientifiques canadiennes et norvégiennes sur le régime alimentaire des phoques? Pourquoi est-elle si nette?
Il y a beaucoup de variabilité, selon les rapports. Cette valeur de 3 % qui a été publiée en janvier de cette année à partir des données scientifiques du MPO, c'est la plus faible que le ministère ait utilisée depuis 20 ans. Le calcul se base aussi sur un poids corporel moyen plus faible pour les phoques du Groenland adultes. On est passé de 140 à 110 kilogrammes par animal, donc 3 % de 110 kilogrammes donnent 3,3 kilogrammes.
Pour ce qui est des autres données scientifiques et du rapport en particulier qui parle de sept à neuf kilogrammes, je m'en souviens très bien, parce qu'il était très facile à lire. Les chercheurs ont trouvé qu'il fallait neuf kilogrammes par jour aux femelles — parce qu'elles portent des petits, elles ont besoin de plus de nourriture — et sept kilogrammes aux mâles.
Cette étude s'est étendue aussi aux espèces de poissons-proies qui étaient consommées. Les poissons gras comme le hareng, le maquereau et le capelan produisent 2 000 calories par kilogramme, tandis que les poissons maigres et le poisson blanc produisent 1 000 calories par kilogramme. La quantité varie évidemment selon le type de poisson et sa disponibilité, mais si vous étudiez les nombreux rapports qui existent sur le régime alimentaire des phoques dans toute la communauté internationale, vous constaterez qu'il y a beaucoup de variabilité.
Pour les phoques sédentaires qui vivent en aquarium, par exemple, SeaWorld signale qu'ils ont besoin de 5 % de leur poids corporel. S'ils étaient dans la nature, on peut supposer qu'il leur faudrait plus de nourriture que dans un aquarium.
Le Canada collabore à l'échelle internationale dans tous les domaines de la science. Lors de la récente pandémie, nous nous sommes fiés à la science internationale.
Pourquoi le MPO ne peut‑il pas collaborer avec d'autres pays de l'Atlantique Nord, qui partagent le même océan, pour obtenir de meilleures données scientifiques?
C'est une très bonne question. La collaboration est certainement nécessaire. Nous devons voir ce que font les autres pays.
Vous avez parlé des pêches abondantes en Scandinavie, en particulier en Norvège et en Islande. On entend très rarement parler de crise des ressources. Or, ces pays‑là n'ont pas les populations de phoques que nous avons ici, au Canada.
Si on se reporte au rapport norvégien et au graphique que j'ai montré plus tôt, j'ai eu l'occasion d'interroger le scientifique en question. Je lui ai demandé s'il pouvait voir des phoques depuis la côte de la Norvège. Il a répondu que non. Je lui ai demandé quelle serait l'incidence sur la pêche s'il y avait huit millions de phoques depuis 30 ans le long de la côte. Il m'a répondu, en présence des autres membres du groupe de travail sur le phoque de l'Atlantique, que la Norvège aurait un très gros problème.
Monsieur Small, je ne sais pas pourquoi nous ne portons pas plus d'attention, et plus rapidement, à ce qui se dit de par le monde.
Monsieur Hardy, j'ai une question pour vous. Les phoques communs du golfe et de la côte sud de Terre-Neuve-et-Labrador figurent toujours sur la liste des espèces en péril. Nous ne savons pas combien il y en a. Les phoques à capuchon n'ont pas été dénombrés depuis 2015. On ne fait à peu près aucun effort pour mesurer la prédation par les phoques, au grand détriment des parties intéressées.
À votre avis, d'après votre expérience au sein du groupe de travail, le MPO fait‑il tout ce qu'il peut pour savoir combien il y a de phoques et combien ils consomment? Est‑ce qu'il cherche vraiment à le savoir?
Vous savez, il n'y a aucune excuse pour qu'au bout de 30 ans, nous ne sachions pas combien il y a de phoques. Chaque espèce aurait dû être dénombrée à l'heure actuelle, et plusieurs fois même. Pour connaître l'incidence des phoques sur les pêches, il faut savoir combien il y en a. Il faut connaître leur régime quotidien, leur répartition spatiale. Ce sont toutes des choses sur lesquelles les scientifiques du MPO doivent se concentrer.
Si vous venez de Terre-Neuve-et-Labrador, on ne s'entend pas à la base entre l'industrie, les pêcheurs et les scientifiques du MPO dès qu'il est question des phoques. Faites n'importe quelle recherche et vous trouverez les déclarations de nos scientifiques du MPO; essentiellement, elles vont à l'encontre de ce que dit l'industrie. Il faut plus de dialogue. Il faut plus d'ouverture et de transparence.
Nos pêches sont réglementées dans tout le Canada atlantique et l'activité est très faible. Comment se fait‑il qu'après 30 ans de moratoire, la morue du Nord ne soit toujours pas rétablie? Il faut se demander pourquoi. Vous savez, 12 000 tonnes, ce n'est pas une pêche. Je suis allé en Islande à maintes reprises. La plupart des usines là‑bas traitent 20 000 tonnes chacune. La Norvège a un quota d'environ 900 000 tonnes de morue par année. Il n'y a pas de crise de la pêche, parce qu'il n'y a pas de problème de phoques. Il y a 25 000 phoques en Islande.
Nous devons regarder cela de près. Il faut savoir combien il y a de phoques. Dans le cas du phoque commun, nous devons aller jusque dans les fleuves. Je peux vous montrer des centaines de photos de centaines de phoques qui vivent dans un fleuve à longueur d'année. Des scientifiques du MPO m'ont dit qu'ils n'avaient aucune incidence sur les populations de saumon. Ce n'est pas vrai.
Je remercie tous les témoins de leur présence aujourd'hui.
Il est certain qu'un des thèmes intéressants qui ressortent de tout cela est ce que nous entendons par le mot « science ». Sommes-nous tous arrivés à une compréhension commune de ce qu'est la science — un exercice visant à intégrer sans parti pris les connaissances et les preuves recueillies à toutes les sources possibles? C'est là‑dessus que j'aurais quelques questions.
Monsieur Trites, je suis très intéressé par vos recommandations concernant les grappes de recherche. J'aimerais qu'on en parle un peu plus. Je me demande si vous pourriez décrire comment fonctionnerait une grappe de recherche, en vous servant peut-être de l'exemple du saumon du Pacifique en particulier.
L'idée d'une grappe de recherche est d'obtenir l'avis de ceux qui pêchent, de ceux qui font des études, de ceux qui font de la gestion et de ceux qui font de la recherche de pointe.
Parlons du saumon, justement. Nous faisions une étude sur les épaulards, en nous demandant s'il y avait assez de saumons pour soutenir la population des épaulards résidents du sud. Ce qui m'a frappé, c'est que nous avons organisé de petits ateliers avec des guides de pêche sportive. Leur connaissance du saumon dépassait de loin ce que j'avais pu trouver dans des articles scientifiques. Ils nous ont aidés à concevoir une étude, avec l'aide d'entreprises d'observation des baleines, et nous avons réuni les deux ensembles de données. Nous avons découvert que la population décroissante des épaulards résidents du sud avait à sa disposition de quatre à six fois plus de saumons que celle des épaulards résidents du nord, pourtant croissante.
Voilà pour moi un exemple où les connaissances de différents intervenants peuvent servir à orienter la science, à configurer les études et à produire des résultats qu'on peut accepter collectivement.
Monsieur Rangeley, à la fin de vos cinq minutes, vous avez parlé de mieux intégrer les points de vue et les connaissances des Autochtones. Je me demande si vous pourriez nous expliquer un peu comment vous procéderiez.
Je pense qu'il y a lieu en effet de s'interroger sur la méthodologie. Nous avons un certain nombre d'engagements au Canada au sujet de la réconciliation avec les Autochtones et de l'inclusion de leurs systèmes de connaissances dans la prise de décisions, mais il ne semble pas y avoir de chemin bien tracé pour y parvenir. Quant à comprendre la somme de connaissances recueillie sur une longue échelle de temps par les communautés autochtones maritimes, grâce à des programmes comme ceux des gardiens et des guetteurs et à d'autres sources de données, je pense sincèrement — et tout le monde sera d'accord, je crois — qu'il y a là de précieuses contributions qu'on aurait avantage à appliquer pour justifier les décisions.
Ce que je demanderais au Comité et au ministère des Pêches et des Océans, c'est de veiller à ce que l'utilisation ou l'intégration de ces connaissances autochtones ne soit pas que de pure forme, et d'établir des mécanismes de gestion et de gouvernance conjointes avec les peuples autochtones.
Monsieur Sean Jones, vous avez parlé tout à l'heure de cogouvernance, en particulier du point de vue de la réglementation. Pourriez-vous nous en dire davantage sur la mise en œuvre de cette cogouvernance et l'intégration des connaissances autochtones?
Je pense que la cogouvernance, ou ce que le MPO appelle parfois la « gouvernance collaborative », doit être mise en œuvre par des accords dont les clauses sont bien nettes. Mes collègues témoins ont parlé du point de vue des Autochtones, en particulier du savoir ancestral de leurs communautés. Il est très important d'intégrer ce savoir, mais n'oublions pas non plus que les communautés autochtones ont leurs propres conseillers scientifiques et qu'elles font peser leurs avis scientifiques dans la balance. C'est une façon de contrer certains des conflits d'intérêts inhérents au processus où l'industrie est surreprésentée.
Donner aux Autochtones une véritable voix au chapitre, notamment au SCAS, permettrait non seulement d'équilibrer la présentation des données probantes, mais aiderait aussi le MPO à remplir son obligation constitutionnelle de consulter et d'accommoder les Premières Nations.
Monsieur Hardy, je voudrais parler des phoques, faut‑il s'en étonner. J'ai posé une question inscrite au Feuilleton de la Chambre des communes sur le contenu stomacal des phoques.
La ministre s'est récemment félicitée à Terre‑Neuve d'avoir dit une évidence, à savoir que les phoques mangent du poisson. Elle a eu une révélation, en quelque sorte. Apparemment, son ministère lui a emboîté le pas: il y a vu une révélation lui aussi.
J'ai demandé au MPO de me fournir l'échantillonnage, sans s'en tenir à une province en particulier, du contenu stomacal des phoques depuis 2017, avec tous les détails. J'ai les 122 pages de la réponse datée du 10 juin, dont 107 proviennent de Terre‑Neuve‑et‑Labrador. Il y a quelques pages sur le Nouveau‑Brunswick, mais rien sur la Nouvelle‑Écosse, le Québec et la Colombie‑Britannique.
Je suis sûr que vous serez stupéfaits d'apprendre que, dans les pages des résultats de tout cet échantillonnage, il est écrit que le contenu des estomacs n'était « pas disponible ». Il a fallu au MPO entre trois et neuf mois pour analyser les échantillons de contenu, et dans son rapport au Parlement, il n'est pas disposé à divulguer ce qu'il trouve dans l'estomac des phoques. Peut-être qu'il a trouvé du bœuf de l'Alberta et qu'il ne veut pas contredire sa ministre qui dit que les phoques mangent du poisson.
Ma question est la suivante. Dans votre groupe de travail sur les phoques, avez-vous eu accès à des données sur le contenu stomacal des phoques?
Oui, des scientifiques du ministère nous ont présenté des exposés sur les différentes espèces de poissons qu'on y a trouvées.
Si vous me permettez, monsieur Perkins, j'aimerais expliquer quelque chose aux gens ici présents.
L'an dernier, pendant la pandémie de COVID‑19, nous avons suivi ce qui se faisait comme échantillonnage stomacal à Terre‑Neuve. Le protocole en usage à Terre‑Neuve est de faire appel aux mêmes pêcheurs année après année, depuis une décennie ou plus, dans la même collectivité, et à la même période de l'année, soit pendant les mois d'hiver de décembre et de janvier.
Ce que je vais dire a probablement de quoi choquer un peu, mais je vais le dire. J'ai parlé personnellement aux pêcheurs chargés de prélever les estomacs de phoques. Eh bien, ces estomacs restaient dans leurs bateaux, ou directement sur leurs quais, pendant des mois avant d'être recueillis par le MPO. C'est dur à croire, mais c'est un fait.
Je me suis dit que c'était peut-être à cause de la COVID. Ce n'est peut-être pas ainsi qu'on procède normalement. Mais quand je leur ai posé la question, ils m'ont répondu que non, c'est bien cela qui se passe.
Donc, pour déterminer ce que mangent les phoques, si nous faisions appel à la science des pêcheurs eux-mêmes, et si les pêcheurs étaient formés pour noter ce qu'ils trouvent dans l'estomac d'un phoque fraîchement amené à bord... Ils peuvent aisément identifier un hareng, un capelan ou un maquereau, parce que si l'estomac est frais, le poisson qui est dedans est frais lui aussi.
Pouvez-vous imaginer la dégradation d'un estomac de phoque laissé sans réfrigération pendant des semaines et des mois d'affilée? Bien sûr, on peut faire une analyse chimique plus tard, et déterminer qu'il y avait de la morue là‑dedans. Mais je pense que l'analyse de l'estomac en fonction de la représentation spatiale et de la saisonnalité...
Il est insensé de dire qu'il n'y a pas d'analyse stomacale en Nouvelle‑Écosse ou au Québec. Cela peut se faire. L'industrie veut le faire dès demain. Elle veut lancer ce programme‑là dès demain. Elle veut prendre des phoques...
C'est choquant, mais c'est cohérent. Certains de ces chiffres datent de 2017, et on dit qu'il a fallu neuf mois pour aller recueillir les estomacs.
Dans les plans de rétablissement du MPO, dans les plans de gestion intégrée des pêches et dans la troisième recommandation, vous avez parlé d'inclure la prédation par les phoques. Je déduis de vos réponses qu'elle ne fait pas partie des plans. Est‑ce que la prédation par les phoques entre en ligne de compte dans les modèles utilisés pour évaluer nos stocks de poissons au Canada atlantique, ou même en Colombie‑Britannique?
Je pense qu'elle est comprise dans la rubrique générale de la « mortalité naturelle ». Il y a un fort pourcentage d'inconnues quand on parle de mortalité naturelle. Qu'est‑ce qui arrive à un saumoneau lorsqu'il quitte la rivière? Il y a de moins en moins de saumons qui reviennent. Est‑ce qu'ils sont capturés ailleurs? Est‑ce qu'ils deviennent la proie d'une autre espèce de poisson? Ou bien est‑ce que les phoques, qu'on trouve dans la plupart des fleuves, en prélèvent une partie?
Non, je suis désolé, monsieur Perkins. Vous dépassez votre temps de 40 secondes. Ce serait empiéter sur le temps de quelqu'un d'autre que de vous laisser la parole plus longtemps durant cette série de questions.
Nous passons maintenant à M. Hardie, pour cinq minutes ou moins, s'il vous plaît.
Je pense que M. Perkins et M. Hardy ont un peu empiété sur l'heure du lunch.
Des voix: Oh, oh!
M. Ken Hardie: Monsieur Young, vous avez dit quelque chose qui, à mon avis, mérite d'être sous les projecteurs. C'était à propos du MPO qui agissait comme un « arbitre » plutôt qu'un organisme de réglementation. Nous avons vu différents exemples de formules de consensus sur la science, où les parties prenantes, par définition, ont un parti pris.
Est‑ce qu'il faudrait enlever au MPO le volet de la résolution des conflits?
À un certain niveau, oui. Il y a plusieurs niveaux à cela. La question des conflits d'intérêts est particulièrement troublante.
En fin de compte, si nous ne précisons pas ce qu'il est censé faire et si nous n'avons pas de mécanisme pour rendre compte de sa réussite à cet égard, il est tout naturel de passer à un mode où on essaie de présenter ce qu'on fait comme conforme à ce qui nous a été demandé, et d'éliminer cette reddition de comptes quand on peut, si bien qu'à la fin, on ne peut plus être taxé d'échec.
Sans système de mesure, c'est la tendance naturelle. Je ne blâme pas le ministère d'avoir pris cette direction.
Malheureusement, faute de temps, je vais devoir passer à quelqu'un d'autre.
M. Sean Jones nous renvoie à l'article d'Ian Bailey paru dans le Globe and Mail au sujet du retard de publication d'une étude sur le réovirus pisciaire, le RVP. On y apprend que Kevin Lamkey, le directeur des communications du MPO, a déclaré que dans le Programme coopératif de recherche-développement en aquaculture, tous les auteurs doivent accepter le contenu du document avant sa publication. Dans le cas de cette étude en particulier, cela a entraîné un retard de 10 ans.
Évidemment, la collaboration est nécessaire, surtout dans l'intérêt d'un processus équitable, mais est‑ce que nous sommes bien servis lorsque, au nom de la collaboration, nous aboutissons à un consensus qui est souvent défini comme le plus petit commun dénominateur? Est‑ce que cela nous sert bien?
Non, cela ne nous sert pas bien, et cela illustre que le MPO n'a pas osé appliquer les garanties juridiques dont il disposait. L'accord de collaboration entre le MPO et ces vétérinaires de l'industrie disait que la publication ne pouvait pas retarder de plus d'un an.
Le commissaire à l'information a conclu que les clauses de l'accord sur la propriété intellectuelle étaient extrêmement en faveur du MPO. Je crois comprendre que Mme Miller-Saunders a pris sur elle de publier le document à titre indépendant et de renoncer à la propriété intellectuelle des coauteurs. Le MPO a quand même retenu cette information, en l'occurrence parce qu'il accordait essentiellement à l'industrie un droit de veto sur les recherches qui pouvaient être publiées.
Nous avons là deux problèmes. Il y a d'abord les accords de collaboration avec l'industrie. Puis il y a le fait que les gestionnaires du MPO choisissent de renoncer aux pouvoirs qu'ils ont en vertu de ces accords d'autoriser les scientifiques à publier leurs travaux de façon indépendante.
Monsieur Rangeley, je ne vous ai pas encore posé de question.
Sommes-nous bien servis par le modèle du SCAS? Est‑ce que la nécessité de collaborer et d'en arriver à un consensus bloque des recherches utiles qui, bien sûr, pourraient être contestées, mais que ce processus de contestation servirait mieux l'intérêt public que de laisser des gens réunis dans une pièce quelque part décider de ce qu'il en est?
Merci. Absolument, nous devons nous fier à la science, aux meilleures données disponibles.
En ce qui concerne le processus du SCAS, ce qui nous préoccupe, c'est l'actualité de l'information. On suppose que les gens qui sont absents d'une réunion du SCAS, par exemple, n'ont rien à ajouter comme données probantes. On suppose aussi qu'ils ne sont pas touchés par les effets du processus scientifique en cours. C'est particulièrement préoccupant lorsque le ministre s'appuie sur cette information pour prendre une décision sur un stock de poissons qui prend des pêcheurs complètement par surprise. La question précédente sur le maquereau en était un exemple.
Nous n'avons pas toutes les données en main, et je profiterais certainement de l'occasion pour dire que la plupart de celles qui se rendent au ministre sont très opaques, c'est‑à‑dire celles sur lesquelles se fondent les décisions scientifiques, et elles ne suivent pas nécessairement le SCAS. J'aimerais attirer l'attention sur la décision récente de reconduire le quota de capelan, sans données à l'appui, alors qu'il est clair par ailleurs que cette pêche est en train de s'effondrer. Elle n'a pas prospéré depuis 30 ans, mais il n'y a aucune transparence quant à la disponibilité de l'information.
Je ne préconise pas ce modèle de consensus, mais plutôt une démarche solide où l'information qui éclaire les décisions du ministre est transparente. C'est pourquoi nous proposons dans nos recommandations quelque chose comme un rapport au Parlement, comme les rapports au Congrès qui sont présentés aux États‑Unis. La reddition de comptes, la responsabilité et la transparence font cruellement défaut à beaucoup de nos processus décisionnels.
Ma question s'adresse à M. Christopher Jones, anciennement du MPO.
Vous ne savez peut-être pas, alors je vous l'annonce, que l'Assemblée nationale du Québec a voté à l'unanimité une motion demandant au MPO d'indemniser les pêcheurs qui sont victimes de la décision, subite et inattendue, d'arrêter la pêche au hareng et au maquereau.
En vous basant sur votre expérience passée, me diriez-vous comment on procède au MPO? Comment en arrive-t-on à prendre une décision aussi subite sans prévenir les pêcheurs?
Bien sûr, on gère les pêches, au MPO, mais il ne faut jamais oublier le facteur humain dans les décisions.
Notre expérience de l'indemnisation venait d'une source différente. Le cas le plus remarquable est celui de la morue du Nord, dont la pêche a été fermée essentiellement à quelque 30 000 personnes. Dans ce cas‑ci, il y a eu un avis inattendu. Pour moi, le fait qu'il n'y ait pas eu beaucoup de dialogue entre le ministère, les scientifiques, les gestionnaires et l'industrie a causé tout à coup beaucoup d'angoisse dans les villages de pêche.
Une fois établi le précédent de l'indemnisation, la réponse peut prendre de nombreuses formes. Elle peut prendre la forme d'engagements scientifiques ou d'autres solutions. Il y a bien des aspects à considérer, ce qui reste à faire.
Cela s'applique également aux zones de protection marine, dont les pêcheurs sont désormais exclus. Ils demandent une indemnisation, et le ministère leur dit que cela ne fait pas partie de ses attributions.
C'est un dossier vaste, qui mériterait qu'on en discute sérieusement. C'est devenu un enjeu politique. Je n'aime pas vous renvoyer la balle, mais c'est là que nous en sommes, je pense.
J'espérais poser une question semblable à quelques-uns de nos témoins d'aujourd'hui.
Monsieur Young, vous avez formulé une sixième recommandation dans votre mémoire — vous en avez parlé aussi — à propos de restructurer le MPO, au besoin, pour appuyer ces changements et éliminer les conflits d'intérêts. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet et nous dire à quoi cela pourrait ressembler? Qu'est‑ce que vous recommanderiez?
C'est un sujet complexe, mais je vais vous donner un aperçu général.
Il faut que la science ait suffisamment d'indépendance et que les avis scientifiques soient présentés de façon claire et impartiale, publiquement et directement au ministre. Nous devons veiller à ce que les avis scientifiques et les recommandations soient transmis au ministre sans ingérence.
Somme toute, il y a bien des façons de procéder. Nous avions autrefois le Conseil de recherches sur les pêcheries du Canada, qui était plus distinctement associé à la science que la gestion elle-même. C'est un modèle que nous pourrions explorer.
Je dirais la même chose que les autres témoins. Je pense que les gestionnaires du MPO doivent laisser les scientifiques communiquer directement avec les décideurs et laisser les notes d'information et les documents qu'ils préparent arriver tels quels au ministre.
Nous avons relevé de nombreux exemples où des scientifiques ont voulu faire passer des renseignements essentiels au ministre, mais où des gestionnaires sont intervenus pour récrire les documents de telle sorte que les données scientifiques apparaissent conformes à la politique en vigueur, au lieu de présenter au ministre la meilleure information disponible.
Je me demande si je peux également avoir un commentaire de M. Trites dans les deux minutes et demie qu'il me reste. Je me rends compte que ce n'est pas beaucoup.
Je pense qu'il y a souvent un cloisonnement entre la science et la gestion. La science est un processus ascendant. La gestion semble être descendante. J'ai l'impression que, dans bien des cas, il n'y a pas de communication entre les deux. Le processus serait bien meilleur si les gestionnaires établissaient des relations avec les scientifiques, ce qui permettrait à ces derniers de mieux comprendre les enjeux.
Ce que je constate, c'est ce fossé entre la science et la gestion.
Je vous ai entendu dire dans votre déclaration préliminaire que la chasse aux phoques n'aurait aucune incidence sur le rétablissement de la productivité de nos océans et sur l'atteinte d'un équilibre. Nous gérons nos océans depuis assez longtemps déjà. Nous avons une certaine expérience dans ce domaine.
Si la chasse aux pinnipèdes ne peut pas aider à rétablir les stocks de poissons, j'ai une autre question. Si la population de phoques doublait ou triplait, que mangeraient-ils? Cela aurait‑il une incidence sur les stocks de poissons?
Ma réponse est simplement que ces systèmes sont très complexes. Le saumon est un prédateur de nombreuses espèces, dont certaines sont à la fois des compétiteurs et des prédateurs pour des espèces cibles, et il est très difficile de prévoir ce qui se passerait dans ce cas.
S'il y avait une explosion continue de la population, si la population poursuivait sur la même trajectoire que maintenant, cela aurait‑il une incidence sur les stocks de poissons, à votre avis?
Il y aurait modification de l'écosystème. Je pense qu'il est difficile de prédire si quelque chose de ce genre va se produire et, le cas échéant, les répercussions que cela aura sur l'écosystème en général.
Je pense que vous êtes d'accord pour dire que beaucoup de poisson serait consommé.
Si nous réduisions cette population par des moyens éthiques durables, nous pourrions fournir au monde des protéines biologiques plus saines, n'est‑ce pas?
Non, je ne pense pas que ce soit aussi simple. Je pense que nous ne savons pas vraiment si nous sommes capables de réduire efficacement ces populations à un niveau qui nous permettrait de faire la différence que nous souhaitons et que nous ne comprenons pas suffisamment bien si la différence que cela créerait en est une que nous souhaitons.
J'ai une question pour M. Young au sujet d'un courriel qui a été envoyé à tous les députés pour leur dire que le projet de loi C‑251 demandait un abattage sélectif. Pouvez-vous nous dire quel article de ce projet de loi demande un abattage sélectif?
Je pense que nous pourrions dire qu'un abattage sélectif est l'abattage intentionnel d'une espèce en supposant que cela profitera à une autre dans un contexte de prédation.
Ma prochaine question s'adresse à M. Hardy, s'il me reste du temps.
D'après votre expérience récente au sein du Groupe de travail scientifique sur le phoque de l'Atlantique, dans quelle mesure le ministère des Pêches et des Océans a‑t‑il collaboré avec votre équipe?
L'équipe était coprésidée par des membres de la direction du MPO. Nous avons eu une bonne collaboration, notamment de ceux qui ont présenté des exposés. Je crois que rien n'est passé sous silence. Nous étions nombreux à comprendre la situation à l'échelle locale. Dans l'ensemble, nous avons formulé des commentaires et des recommandations.
La question qui continue de se poser en ce moment est celle d'un forum ou d'un sommet. Je ne sais pas si vous avez reçu l'information que j'ai envoyée, mais j'ai inclus une liste très détaillée des forums et des comités au sommet sur les phoques qui se sont tenus entre 1992 et aujourd'hui. Je suis sûr que la plupart d'entre vous commencent à en avoir assez d'entendre parler de cela et d'en discuter, mais rien n'a été fait.
La coopération doit se situer sur le plan de l'action. Nous n'avons pas besoin de plus de dialogue.
Celui que je mentionne dans mon document est celui des écloseries de saumon, qui étaient censées améliorer l'abondance globale et, de façon générale, la santé du saumon du Pacifique.
Malheureusement, les dernières données scientifiques montrent que ces écloseries elles-mêmes ont un impact direct, que les poissons d'élevage ne sont pas les mêmes que les poissons sauvages, et que les efforts continus en ce sens pourraient être plus problématiques que bénéfiques pour le saumon sauvage.
Vous avez parlé d'utiliser la science pour reconstituer les stocks, mais cela pourrait entrer en conflit avec la science des pêcheurs. Pourriez-vous élargir la terminologie? Nous entendons constamment que la science des pêcheurs ou les connaissances des pêcheurs sont souvent en contradiction avec les données scientifiques du MPO.
Je ne sais pas exactement où vous voulez en venir, mais il est très clair qu'il y a des renseignements utiles provenant de toutes sortes de milieux... y compris des gens qui vont sur l'eau. C'est très important, mais nous devons suivre la science. Nous devons être très clairs quant à nos objectifs et à la façon dont nous mesurons les résultats de cette information. Souvent, les renseignements anecdotiques sont extrêmement utiles.
Je crois que M. Trites a parlé d'un processus auquel il a participé, qui permet de recueillir des commentaires extrêmement utiles, mais en fin de compte, le ministère doit être très clair quant à ses objectifs et à ce qu'il essaie d'accomplir, adopter une approche de précaution et gérer les risques et l'incertitude, d'une certaine façon, parce que nous n'avons pas toutes les données scientifiques. Lorsque des preuves contradictoires sont présentées, oui, il faut en tenir compte, soit en posant de meilleures questions scientifiques ou des questions supplémentaires, soit en acceptant que cela fasse partie de l'incertitude, puis gérer avec plus de précautions lorsque nous ne savons pas ce qui se passe avec la population.
J'espère que cela répond à votre question. Ce n'était peut-être pas très clair.
Pour poursuivre dans la même veine, lorsque la science entre en conflit avec les connaissances ou la science des pêcheurs, quelle option, selon votre expérience professionnelle, devrait être utilisée?
Les spécialistes des pêches et les représentants des pêches ont amplement l'occasion de participer au processus pour interroger les scientifiques, dans le cadre des réunions d'évaluation des stocks du Secrétariat canadien des avis scientifiques, par exemple. Depuis des années, ils participent fréquemment et activement au processus. Je pense que nous devons poursuivre dans cette direction.
Ce à quoi nous ne pouvons pas nous soumettre, c'est à la remise en question et aux informations anecdotiques après le fait. Nous devons définir clairement le processus et adopter une approche de précaution. Il faut se rappeler que le rétablissement de nos pêches concerne l'avenir. Souvent, la confusion porte sur les avantages à court terme par rapport aux gains à long terme. Nous faisons toujours l'erreur de dire que nous pouvons pêcher plus de poisson aujourd'hui au détriment de nos petits-enfants.
Pour rétablir, il faut tenir compte à la fois des échelles spatiales et temporelles. La valeur de nos pêches est sous-performante. Nous pourrons tirer beaucoup plus de valeur de nos pêches si nous permettons leur rétablissement. Les modèles le montrent clairement. L'histoire le montre aussi. Nous avons une vision à court terme et ce qu'on appelle une base de référence changeante. Nous pensons simplement pouvoir pêcher plus de poisson chaque jour et chaque année et nous battre pour obtenir des quotas annuels. C'est une façon absurde de gérer une pêche que de passer d'un quota annuel à un autre.
Notre ministère doit avoir une vision. Nous avons besoin d'une vision pour les Canadiens, pour rétablir nos océans, dont le rendement laisse nettement à désirer. Seulement environ 30 % de nos pêches sont productives.
Je pourrais peut-être poser une dernière question rapidement à Chris Jones.
Vous avez parlé d'une science à deux vitesses. Rapidement, à quoi pensiez-vous, monsieur Jones, lorsque vous avez parlé de la science à deux vitesses? Je crois que vous faisiez référence aux données scientifiques du MPO.
Le problème se pose dans la région des Maritimes, où des pêches très en vue reçoivent un soutien scientifique plus direct et d'autres pêches qui le sont moins reçoivent très peu de soutien scientifique ou pratiquement aucun. C'est une approche à deux niveaux. Je me serais attendu à ce que la situation ait évolué en 2012, alors que les ressources étaient limitées. Mais on a maintenu la même approche, de sorte que nous avons des pêches qui sont essentiellement exploitées...
Je pense que c'est parce que les ressources étaient limitées. Une décision a dû être prise. La science pouvait être appliquée tous azimuts, chacun profitant d'une petite partie, ou être concentrée sur les pêches plus en vue comme le crabe, le homard et le flétan. Nous nous retrouvons maintenant avec des pêches reposant sur très peu de données scientifiques, voire pas du tout, selon leur profil.
Oui. Je pourrais peut-être poser une brève question avant la fin de la réunion, puisque tous nos témoins sont ici aujourd'hui. Une déclaration a été faite et je me demande, par l'entremise du président, si mon collègue pourrait la clarifier. Je ne me souviens pas des termes exacts, mais cela portait sur la déformation de la vérité par rapport à l'information à laquelle un témoin faisait référence aujourd'hui. Je me demande, par l'entremise du président, si le député pourrait préciser ce qu'il voulait dire. Je veux m'assurer que nous ne sortirons pas de la réunion en accusant un député de déformer les faits. Je pense qu'il vaut la peine de préciser cela.
Si j'ai dit que M. Young avait induit les gens en erreur, ce que je voulais dire, c'est que le groupe que M. Young représente a induit les députés en erreur en insinuant que le projet de loi C‑251 demande un abattage sélectif. Il n'y a pas de disposition de ce genre dans ce projet de loi. Je viens de voir un courriel qui a été envoyé aux députés. Je ne sais pas pourquoi je ne l'ai pas reçu, mais il a été envoyé aux députés par la Fondation David Suzuki.
Encore une fois, je vous rappelle de faire attention aux mots que vous choisissez. Comme le dit souvent le Président de la Chambre, les mots ont du poids.
Cela met fin à notre séance d'aujourd'hui. Merci à tous nos témoins qui ont comparu, en personne et virtuellement, et qui ont fait part de leurs connaissances au Comité aujourd'hui. Je sais que ce sont des connaissances précieuses et qu'elles contribueront certainement à la valeur du rapport au bout du compte.
J'aimerais rappeler rapidement aux membres de s'assurer que leurs téléphones sont éteints lorsqu'ils se trouvent dans la salle du Comité, car il n'y a rien de pire lorsqu'une personne intervient à distance ou dans la salle que d'entendre son téléphone qui sonne, qui tinte, ou les deux. J'ai moi-même été coupable de cela à l'occasion, mais je pense que nous savons tous comment éteindre nos appareils et recevoir quand même nos messages.
Je tiens à remercier chaleureusement nos interprètes d'aujourd'hui de leur excellent travail et de leur patience, ainsi que notre analyste, notre greffière et, bien sûr, tout notre personnel, qui ont fait de cette séance un succès.