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Bienvenue à la 35
e réunion du Comité permanent des pêches et des océans de la Chambre des communes.
La réunion se déroule sous forme hybride, conformément à l'ordre de la Chambre adopté le 23 juin 2022.
Avant de procéder, j'aimerais préciser quelques points à l'intention des témoins et des membres. Veuillez attendre que je vous nomme avant d'intervenir. Si vous participez à la séance par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour l'activer et veuillez vous mettre en sourdine lorsque vous n'intervenez pas. En ce qui concerne l'interprétation, les personnes qui utilisent l'application Zoom peuvent sélectionner, au bas de l'écran, le parquet, l'anglais ou le français. Les personnes dans la salle peuvent utiliser l'écouteur et choisir le canal désiré. Veuillez adresser toutes vos interventions à la présidence. Enfin, je rappelle à tous qu'il est interdit de prendre des captures d'écran ou des photos. Les délibérations seront disponibles sur le site Web de la Chambre des communes.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le 20 janvier 2022, nous poursuivons notre étude de la baleine noire de l'Atlantique Nord. Pendant la première heure et demie, nous entendrons des témoins dans le cadre de cette étude. Nous consacrerons ensuite la dernière demi-heure de la réunion à la discussion des travaux du Comité à huis clos.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à notre premier groupe de témoins.
Nous accueillons les représentants de la Fédération régionale acadienne des pêcheurs professionnels, c'est‑à‑dire Jean Lanteigne, son directeur général, et Martin Noël, le président de l'Association des pêcheurs professionnels crabiers acadiens. Nous accueillons aussi M. Keith Sullivan, le président de Fish, Food and Allied Workers-Unifor. Enfin, nous accueillons Bonnie Morse, gestionnaire de projet de la Grand Manan Fishermen's Association.
Je vous remercie d'avoir pris le temps de comparaître. Vous disposerez chacun d'au plus cinq minutes pour faire une déclaration liminaire.
J'invite MM. Lanteigne et Noël à commencer.
Lorsque vous serez prêts, allez‑y, je vous en prie, pour au plus cinq minutes.
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Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité.
Afin de maximiser le temps de parole qui m'est alloué, j'entrerai immédiatement dans le vif du sujet.
Depuis 2017, la présence des baleines noires dans le golfe a complètement accaparé les agendas de tous ceux [difficultés techniques].
[Difficultés techniques] le ministère des Pêches et des Océans, ou MPO, applique la date de fermeture au 30 juin. Auparavant, c'était le 15 juillet. On a donc raccourci la saison de pêche de 15 jours. De facto, cela contraint le pêcheur à capturer son quota le plus rapidement possible.
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Je disais que, afin de maximiser le temps de parole qui m'est alloué, je vais immédiatement entrer dans le vif du sujet.
Depuis 2017, la présence des baleines noires dans le golfe a complètement accaparé les agendas de tous ceux engagés de près ou de loin dans l'industrie de la pêche dans le Canada atlantique. La pêche aux crabes des neiges est sans aucun doute celle qui a été la plus touchée.
Aujourd'hui, j'aimerais attirer votre attention sur la question de la sécurité en mer.
Tout d'abord, je rappelle que, depuis 2018, le MPO applique la date de fermeture au 30 juin. On a donc raccourci la saison de pêche de 15 jours. De facto, cela contraint le pêcheur à capturer son quota le plus rapidement possible.
Cette importante perte pour ce qui est du temps de pêche s'ajoute au fait qu'il faut maximiser le nombre de jours pendant lesquels on peut pêcher avant l'arrivée des baleines noires.
Cela force toute l'industrie à être à pied d'oeuvre pour commencer la pêche le plus rapidement possible au printemps. Cela devient très risqué, et je vous explique pourquoi.
Même si l'on parle beaucoup du réchauffement planétaire, la saison d'hiver dans le golfe du Saint‑Laurent demeure toujours difficile et risquée. Depuis 2018, des efforts importants en matière de déglaçage des chenaux et des ports ainsi que de mise à l'eau des flottilles sont faits à grands frais et avec beaucoup d'efforts et de risques. La garde-côtière, les ports de pêche, les centres d'entreposage de bateaux et des entreprises privées de toutes sortes, sans oublier les usines de transformation, sont tous mis à contribution afin de permettre le début de la pêche le plus rapidement possible. Tout cela se fait dans des conditions hivernales.
Cette année, notre saison de pêche a commencé le 13 avril. C'était une date de début correcte, et vous serez sans doute d'accord avec moi sur le fait que, en fin de compte, c'est dame Nature qui décide de la journée d'ouverture de la saison.
Des personnes et des organisations préconisent une date fixe, afin que les pêcheurs qui sont en mesure de sortir en mer puissent le faire. Nous sommes entièrement contre cette approche. Un comité d'ouverture a été mis en place, et il est composé de tous les participants à la pêcherie, y compris le MPO, la Garde côtière canadienne et Environnement Canada. Nous considérons que c'est la meilleure façon d'assurer un départ à la pêche sécuritaire pour tous. Autrement, le risque de pertes de vies humaines est beaucoup trop élevé.
Je vais maintenant laisser la parole au président de la Fédération régionale acadienne des pêcheurs professionnels.
Je vous remercie de votre attention.
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Monsieur le président et membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invité à participer à cette réunion.
Je m'appelle Martin Noël. Je suis un pêcheur de crabe des neiges de Shippagan, au Nouveau‑Brunswick. Je suis capitaine d'un bateau et propriétaire d'une entreprise familiale qui compte trois générations de pêcheurs.
Depuis 2018, des mesures sans précédent ont été imposées à l'industrie, telles que des fermetures statiques de territoires de pêche très productifs et des fermetures dynamiques lors de l'observation des baleines. L'évolution de ces mesures a mené à l'élimination des fermetures statiques. Quant aux fermetures dynamiques, elles sont temporaires et saisonnières.
Bien que l'industrie ait bien accueilli ces changements, nous sommes d'avis qu'il est possible de raffiner et d'améliorer ces mesures afin de réduire les effets sur nos pêcheries, tout en protégeant davantage la baleine noire. Le déclenchement des fermetures saisonnières uniquement à partir de juin et l'utilisation des bouées acoustiques pour rouvrir les zones fermées figurent parmi les propositions que nous avons soumises antérieurement.
Les associations de crabiers traditionnels du Nouveau‑Brunswick sont à la troisième année des essais en mer de la technologie des bouées sur demande, communément appelée pêche sans cordage. Nous sommes très fiers des progrès que nous avons accomplis. Il reste encore des améliorations importantes à faire, mais l'intérêt des pêcheurs est grandissant à cet égard. Certaines organisations non gouvernementales, ou ONG, nous qualifient de leader mondial dans cette catégorie.
Nous travaillons, en étroite collaboration avec la Campobello Whale Rescue Team, à l'établissement et à la formation de l'équipe de désempêtrement du golfe, qui a pour mission de secourir les baleines empêtrées. Nous travaillons aussi sur des projets de récupération d'engins perdus et d'engins fantômes.
En ce qui concerne l'exigence relative à la modification des engins de pêche, dont la mise en oeuvre est prévue pour janvier 2023, je dois vous avouer que nous avons des inquiétudes quant à la mise en place de cette mesure. Celle-ci a pour but de réduire la durée et la sévérité des empêtrements potentiels. Des tests et des essais en mer effectués dans les dernières années ont permis d'écarter ou de retenir certaines méthodes, mais il n'est pas encore possible de déterminer quelles sont les méthodes efficaces pour atteindre ce but.
Il ne faut pas oublier que la solution doit être sécuritaire dans le cadre des activités et pour les membres de l'équipage. Si l'on nous impose de modifier notre équipement et que cela réduit la sécurité à bord des navires de pêche ou cause la perte de plus de casiers en mer, ce qui crée ainsi plus d'engins fantômes, on manque carrément le bateau et on ne respecte pas les objectifs à tous les égards.
La collaboration est un élément clé dans ce dossier important. Il y a eu une collaboration sans précédent entre les ONG, le ministère des Pêches et des Océans ainsi que l'industrie des pêches. Sans cette coopération, il serait impossible d'avancer. Le soutien financier accordé par le gouvernement du Canada et celui du Nouveau‑Brunswick sont cruciaux afin que l'adaptation puisse se réaliser.
Je vous remercie.
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Merci. J'espère que vous m'entendez bien.
Au nom des 13 000 membres de Terre-Neuve‑et‑Labrador, je vous remercie de me donner l'occasion de m'adresser à vous.
Le syndicat Fish, Food and Allied Workers représente 10 000 pêcheurs professionnels dans notre province et de nombreux autres travailleurs du secteur de la transformation. Le FFAW reconnaît la nécessité de protéger une espèce menacée comme la baleine noire. Nous avons la durabilité à coeur depuis longtemps et nous participons à une vaste gamme d'activités scientifiques et de conservation, notamment le retrait des engins fantômes et le travail sur des espèces protégées par la LEP, comme le loup de mer et les tortues.
Cependant, le MPO n'a pratiquement pas consulté les pêcheurs de Terre-Neuve‑et‑Labrador à ce sujet. À bien des égards, ce n'est pas surprenant, car il est extrêmement rare de voir ces baleines et surtout pas dans la période où nous pêchons le crabe des neiges et le homard.
Il n'y a tout simplement pas de preuves d'enchevêtrement depuis des décennies pour justifier les restrictions imposées aux pêcheurs de Terre-Neuve‑et‑Labrador, des restrictions qui semblent être conçues pour d'autres pêches dans d'autres environnements. Les pêcheurs de Terre-Neuve‑et‑Labrador ont été bouleversés par la mise au ban décrétée par Seafood Watch et par le fait que l'organisme ne fait pas de distinction entre les pêches régionales.
Wayne Ledwell, du Whales Release and Strandings Group, a été interviewé le 20 septembre pour une émission de la CBC. Il décrit les observations de baleines noires comme étant « sporadiques » et fait remarquer qu'il ne croit pas que les eaux de Terre-Neuve‑et‑Labrador soient l'habitat idéal pour ces animaux. M. Ledwell reconnaît que les engins de pêche dans les eaux de Terre-Neuve présentent peu de risques d'enchevêtrement, surtout dans les pêcheries à engins fixes comme celles du crabe des neiges et du homard et dans les pêcheries à filet maillant.
Le crabe des neiges de cette province est certifié par la norme de durabilité des produits de la mer la plus reconnue au monde, soit celle du Marine Stewardship Council.
La valeur du homard pour les pêcheurs de cette province ne cesse de croître. Au cours des 10 dernières années, la valeur de notre pêche au homard est passée de 17 à plus de 100 millions de dollars par an.
Les membres du FFAW ont assumé la charge de travail et absorbé le coût de la mise en oeuvre de systèmes de cordes de couleur, malgré l'absence de baleines noires dans leurs eaux pendant la pêche.
Le MPO n'a pas vraiment consulté les pêcheurs de Terre-Neuve‑et‑Labrador dans ce dossier et refuse de reconnaître l'apport de pêcheurs expérimentés qui s'y connaissent. En 2021, le MPO a tenu trois réunions virtuelles dans un mince effort pour consulter plus de 3 000 entreprises de pêche susceptibles d'être touchées par cette nouvelle politique. Les réunions ont duré deux heures et demie, avec 40 minutes de discussion après un exposé du MPO, et elles ne peuvent être considérées comme une méthode de consultation appropriée des parties prenantes.
Le FFAW a demandé au MPO pourquoi la Colombie-Britannique et le Nunavut n'ont pas à mettre en oeuvre cette politique s'ils ont eux aussi des espèces en voie de disparition dans leurs eaux. Le MPO a répondu qu'il n'y a aucune preuve d'enchevêtrement d'espèces en voie de disparition dans ces eaux. La solution qu'on propose à un problème qui n'existe pas vraiment à Terre-Neuve‑et‑Labrador est profondément viciée.
Tout d'abord, elle est beaucoup plus susceptible d'entraîner une augmentation des enchevêtrements d'autres mammifères marins qui sont communs dans nos eaux, en raison de la présence de lignes verticales plus nombreuses dans la colonne d'eau. Les pêcheries de Terre-Neuve‑et‑Labrador utilisent des engins de pêche à la palangre, ce qui réduit le nombre de lignes verticales dans l'eau. Par exemple, un pêcheur peut avoir un chapelet de 70 casiers à crabe des neiges qui ne comporte que deux lignes verticales. Il est clair que passer à 20 lignes verticales pour le même engin est un pas dans la mauvaise direction pour prévenir les enchevêtrements.
Ensuite, cela engendrera un désastre environnemental considérable en raison des engins fantômes, car il est impossible de pêcher en eaux profondes avec ce cordage à faible résistance. Il est difficile de retirer les engins fantômes et leur prévention doit être la priorité. Un plus grand nombre d'engins fantômes augmentera encore le risque d'enchevêtrement de mammifères marins et d'autres espèces. Cela va directement à l'encontre des objectifs du Fonds pour les engins fantômes du MPO. Depuis son lancement en 2019, le gouvernement a investi 16,7 millions de dollars dans le programme et, en tant que participant, le FFAW a retiré 16 tonnes d'engins fantômes de nos eaux. L'objectif même du programme est de récupérer les engins de pêche abandonnés, perdus et jetés et d'encourager la durabilité marine.
Enfin, l'absence d'essais pratiques dans notre environnement marin suscite de graves inquiétudes en ce qui concerne la sécurité. Le MPO n'a fourni aucune preuve que ce type d'engin est sûr ou efficace pour la pêche. Il n'a fourni aucune preuve que ce type d'engin a été dûment testé et qu'il résisterait aux marées de l'Atlantique Nord, aux conditions de glace et aux fortes tensions en eaux profondes. Faute de ces preuves montrant que les engins peuvent résister à ces conditions, nous pouvons affirmer avec certitude qu'une grande quantité d'engins et de cordages sera rejetée directement dans l'océan.
Les pêcheurs de Terre-Neuve‑et‑Labrador sont pour la protection des baleines, mais ne peuvent pas souscrire à des changements dans la gestion qui risquent de faire exactement le contraire, notamment en créant d'importantes quantités d'engins fantômes, en augmentant les coûts pour les pêcheurs et leurs familles et en engendrant des problèmes de sécurité dans un environnement de travail déjà extrêmement dangereux.
Je vous remercie. Je suis impatient d'entendre vos questions et de participer à la conversation.
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Bonjour, et merci de nous donner l'occasion de présenter notre exposé.
La Grand Manan Fishermen's Association représente des pêcheurs propriétaires-exploitants indépendants de Grand Manan et de l'île White Head dans la baie de Fundy. Nos quelque 200 membres pêchent le homard, le pétoncle, le poisson de fond et le hareng. La valeur au débarquement de ces pêches s'élève en moyenne à plus de 75 millions de dollars par an et ce secteur est un employeur important pour notre collectivité isolée de 2 600 personnes.
Dans son ensemble, le comté de Charlotte représente 30 % des débarquements provinciaux au Nouveau-Brunswick et on doit un emploi sur cinq au secteur des produits de la mer dans ce comté. Il y avait un peu plus de 400 entreprises de pêche dans le comté lors du recensement de 2016 et près de la moitié d'entre elles étaient basées à Grand Manan et à l'île White Head.
Depuis des générations, nos pêcheurs coexistent avec les baleines noires de l'Atlantique Nord. Nous avons collaboré avec des chercheurs, avec et sans la participation de l'État, afin de faire pour le mieux. Les pêcheurs comprennent que la baleine noire et tous les mammifères marins ont leur place dans l'écosystème et qu'un écosystème sain assure leur longévité autant que celle des animaux qui y vivent. Nous avons pris des mesures qui ont assuré une réelle protection, mais qui n'ont pas toujours été quantifiables dans un rapport gouvernemental. Les pêcheurs ont cru au processus et ils y ont activement participé.
Notre plus grand atout est le moment où se déroule notre pêche au homard. Notre saison de pêche au homard débute le mois prochain, en novembre, et se termine à la fin juin. La stratégie de rétablissement de la baleine noire de l'Atlantique Nord indique que le bassin de Grand Manan est un habitat essentiel, mais seulement à la fin de l'été et au début de l'automne, donc s'il y a chevauchement, il est relativement minime.
En 2018, le ministère des Pêches et des Océans a arbitrairement fermé une partie de notre district de pêche au homard après l'observation d'une seule baleine noire en juin. Les pêcheurs et les scientifiques locaux ont compris depuis longtemps qu'une seule observation au début du printemps n'annonce pas forcément l'arrivée des baleines noires dans la baie. À de rares exceptions près, une seule baleine noire arrive dans la baie, semblant chercher de la nourriture. Si elle n'en trouve pas, elle s'en va sans délai. Nous pensons que cette fermeture de 10 jours a coûté à notre collectivité plus d'un million de dollars en débarquements.
S'il y a un coût financier, il y a aussi un coût social. Les pêcheurs hésitent désormais à signaler toute observation d'une baleine par crainte des répercussions.
Après la fermeture, la GMFA a soumis au ministère un projet pilote qui prévoyait essentiellement une échelle mobile de mesures en fonction du risque. Ces mesures consistaient à réduire le nombre de palangres à la surface de l'eau et incluaient une section de corde moins résistante dans les palangres. Une seule observation d'une seule baleine entraînerait des mesures visant à réduire le nombre de cordes, mais permettrait tout de même de poursuivre la pêche. Des observations ultérieures déclencheraient des mesures supplémentaires. Ce projet a été mis en oeuvre une fois depuis 2018 après l'observation d'une baleine noire dans la semaine précédant notre saison, ce qui ne fait que souligner à quel point notre saison chevauche rarement la présence de baleines noires. Malgré tout, ce projet pilote a été annulé cet hiver, car il était incompatible avec d'autres mesures.
À l'aube de la nouvelle saison, nous sommes confrontés à l'incertitude de fermetures potentielles. Nous sommes inquiets, car il n'y a pas de preuves scientifiques à l'appui d'une fermeture de 15 jours en raison d'une seule observation. L'impact d'une fermeture, surtout à l'automne, peut être dévastateur. Les jours de pêche perdus ne peuvent être récupérés, car le temps se détériore et le homard se déplace moins par temps froid. Nous savons que pendant cette période, les baleines noires se dirigent vers le sud et ne restent pas dans la baie de Fundy.
Nous estimons que bien plus de la moitié de nos débarquements ont lieu au cours des premières semaines de la saison. Ne pas pêcher en raison d'une seule observation d'une baleine noire en transit est insupportable. Ne pas pêcher lorsqu'il n'y a pas de baleines noires en raison d'une mesure arbitraire est inacceptable. Les difficultés économiques liées à ces mesures arbitraires sont supportées par les habitants et les collectivités côtières rurales comme la mienne.
Nos membres sont privés de leurs droits dans ce processus, principalement parce que, malgré l'abondance de baleines noires dans la baie de Fundy jusqu'à la dernière décennie, il n'y a jamais eu d'enchevêtrement connu d'une baleine noire dans un engin de pêche au homard dans la zone de pêche au homard 38.
Le sort des baleines noires de l'Atlantique Nord est un problème réel qui nécessite des solutions réelles, et pas seulement celles qui sont faciles à communiquer. Les pêcheries dans le Canada atlantique sont très différentes. Il est très improbable qu'une seule approche fonctionne pour tout le monde. On ne trouvera des solutions que s'il y a une volonté d'écouter.
Je vous remercie.
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Merci, monsieur le président.
Ma première question s'adresse à M. Sullivan et à Mme Morse.
Lors de la première réunion que nous avons tenue dans le cadre de l'étude que M. Cormier a proposée, nous avons demandé aux fonctionnaires combien d'enchevêtrements avaient été enregistrés dans les eaux canadiennes au cours des cinq années précédentes avec des engins de pêche au homard et au crabe. On nous a répondu qu'il n'y en avait eu qu'un avec des engins de pêche au crabe et que les nécropsies n'ont pas permis de déterminer la cause la plus importante de décès des baleines noires dans nos eaux — surtout au cours des deux années où il y a eu 12 décès, les carcasses étant trop décomposées.
Je vais d'abord m'adresser à M. Sullivan.
Vous dites que vous ne voyez pas beaucoup de baleines noires pendant la saison de pêche. Par conséquent, je soupçonne que vous avez eu affaire à des pêcheurs qui ont fait l'expérience de la corde à faible résistance — de la corde cassable. Pouvez-vous me parler des résultats, d'après votre expérience avec les pêcheurs qui ont testé cet équipement?
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Je commencerai par dire que la conversation et la consultation avec les pêcheurs de Terre-Neuve‑et‑Labrador ont été minimes. C'est un véritable problème pour ceux qui pêchaient dans d'autres régions auparavant, certainement dans la baie de Fundy et le golfe du Saint-Laurent. Nous n'avions pas eu d'observation.
Je ne crois pas vraiment que le MPO a fait l'effort de consulter les pêcheurs de Terre-Neuve‑et‑Labrador. Il était évident que l'utilisation de ce cordage à faible résistance dans certaines de nos pêches était complètement insensée et dangereuse. Ce n'était clairement pas une option et cela risquait d'engendrer plus de problèmes. Il y avait une énorme réticence à participer à certains de ces travaux. Il n'y a pas eu de discussion avec le MPO pour résoudre réellement le problème.
L'information dont je dispose sur les premiers essais, surtout, en ce qui concerne les engins de pêche au crabe — qui, je suppose, nous préoccuperaient davantage en raison de la profondeur des eaux — est que, de façon prévisible, cela n'a pas très bien fonctionné, de façon générale. Je dirais que, dans les eaux plus profondes de Terre-Neuve‑et‑Labrador, nous pouvons nous attendre à ce que ce soit pire que dans la plupart des zones où des essais ont eu lieu.
Je vais m'arrêter là et laisser le temps aux autres de répondre.
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Je vous remercie de la question.
Je vais parler un peu de l'équipement de pêche sans bouée, sans cordage, que nous testons depuis trois ans.
Cela représente évidemment un coût, car c'est une nouvelle technologie qui utilise l'acoustique. Chaque unité coûte à peu près 5 000 $. Nos pêcheurs qui ont fait les tests avaient cinq unités à leur disposition, ce qui représente une valeur totale de 25 000 $.
Des casiers rattachés à l'unité étaient utilisés pour pêcher le crabe. Afin de réduire les coûts, nous sommes donc passés d'une pêche à une trappe ou à un casier individuel à une série de casiers rattachés à une unité. Cela nous a permis en quelque sorte d'acquérir une expérience, une courbe d'apprentissage, pour mettre au point une nouvelle technique de pêche. Cependant, les coûts sont évidemment beaucoup plus élevés que ceux associés à la pêche traditionnelle. Par contre, cela nous permet d'aller pêcher dans des endroits autrement interdits afin d'assurer la protection des baleines noires.
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Je vous remercie beaucoup.
J'aimerais d'abord tous vous féliciter pour les efforts colossaux que vous déployez depuis 2017 en ce qui concerne la protection de la baleine noire. Malgré ce que certains groupes environnementaux peuvent penser, vous êtes un modèle à suivre. Je pense que vous devriez être reconnus mondialement pour tous vos efforts.
Je commencerai par m'adresser à M. Lanteigne et à M. Noël. Je vais parler de la sécurité et je vais revenir sur ce que M. Perkins disait tantôt.
Au cours des cinq dernières années, et peut-être plus particulièrement lors des deux dernières années, mes collègues ont vu sur la carte que le golfe avait pratiquement été fermé au complet à partir de la fin de mai ou même un peu avant, à cause de la présence de baleines noires. Le MPO a déclaré que plus de 90 % du quota avait été pris quand même. Vous avez parlé de l'aspect de la sécurité, qui est très important dans toute cette question.
Premièrement, le fait d'effectuer des fermetures de zones de pêche dynamiques fonctionne-t-il, selon vous?
Ensuite, pouvons-nous apporter des modifications à ces fermetures de zones dynamiques pour permettre à certains territoires d'être plus accessibles et pour ainsi faire en sorte que la sécurité demeure la priorité? Nous voulons certes sauver les baleines noires, mais, comme nous le savons, le fait de déplacer des casiers peut causer des incidents, comme cela a été le cas cette année.
Quelle serait votre solution pour modifier cette mesure quant aux fermetures sans toucher les marchés? Cela a été fait, puisque l'on apporte des modifications depuis cinq ans.
Que proposez-vous à ce sujet?
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Comme je le mentionnais plus tôt, nous pensons qu'il est possible de modifier et d'améliorer les mesures de fermeture.
Il y a deux types de fermetures dynamiques. Lorsque l'on observe la présence d'une baleine, une fermeture temporaire est déclenchée. Au neuvième ou au quinzième jour de cette fermeture, si l'on observe la présence d'une autre baleine, une fermeture saisonnière est déclenchée.
Bien que cette méthode assure une protection aux baleines, elle comporte un problème. Au mois de mai, lorsque les baleines arrivent dans le golfe du Saint‑Laurent, elles sont en période de transition. Elles nagent vers des endroits où il y a de la nourriture. Toutefois, le modèle que nous utilisons ne considère pas ce phénomène. On ferme automatiquement une zone dès que l'on observe la présence d'une baleine. Or, si la baleine est en transition, il est possible que, dès le lendemain, elle ne soit même plus dans la zone, qui a été fermée de façon saisonnière, c'est-à-dire jusqu'à la fin de la saison, voire jusqu'au mois de novembre. Cette façon de procéder empêche les pêcheurs d'accéder à des territoires très productifs où il n'y a même plus de baleines.
Nous pensons que le modèle peut évoluer pour tenir compte de ce phénomène.
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Je vous remercie, madame Desbiens.
C'est très gentil. Je ne m'attendais pas à cela.
Je continue sur ma lancée, monsieur Lanteigne.
On aimerait pouvoir commencer la saison de pêche plus tôt. M. Perkins l'a mentionné. La Garde côtière canadienne est présente depuis 2017. On a déployé des efforts extraordinaires en matière de déglaçage et j'en suis fier. Cependant, il y a toujours eu certains problèmes. À la dernière minute, les appels d'offres ne sont pas faits. Certains bateaux de la Garde côtière ne peuvent pas venir dans nos chenaux, parce qu'ils sont trop gros. Le Groupe Océan, du Québec, a aussi fait des efforts énormes pour nous aider. Malheureusement, en raison de la saison ou du froid, la glace est plus épaisse à certains endroits qu'à d'autres. En outre, on ne sait jamais quand l'aéroglisseur pourra venir.
On fait tous les efforts nécessaires. Cependant, ne pensez-vous pas qu'il serait temps de doter la région de son propre outil, d'un petit brise-glace — comme je le dis depuis plusieurs années —, avec lequel on pourrait déglacer nos chenaux, surtout au Nouveau‑Brunswick? On sait que la glace fond souvent plus vite au Québec, en Nouvelle‑Écosse, à l'Île‑du‑Prince‑Édouard et même à Terre‑Neuve‑et‑Labrador.
Pensez-vous que cet outil supplémentaire pourrait nous aider à commencer la saison plus tôt? Tout le monde pourrait commencer la saison et protéger les baleines en même temps. Nous aurions les outils dont nous avons besoin.
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Je vous remercie de la question.
Oui, il y a des travaux en cours, mais les résultats ne sont pas encore publiés. On essaie de faire de la triangulation avec plusieurs bouées acoustiques. Cela permettrait de situer les baleines. En sachant où celles-ci se trouvent, nous pourrions savoir où fermer la pêche. Si elles se trouvent dans un autre territoire, nous pourrions ouvrir les territoires où elles ne sont plus.
Il y a des progrès et des travaux en cours, mais ils sont de longue haleine. L'acoustique est une technologie qui existe depuis longtemps, mais elle n'a pas connu de grandes avancées. Ce sont les besoins qui amènent l'évolution dans ce domaine. Il y a certainement du potentiel à cet égard.
À mon avis, le gouvernement du Canada pourrait encourager cette piste de solution, qui aiderait les pêcheurs à choisir des territoires productifs.
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Merci beaucoup pour cette question.
Comme je l'ai déjà dit, je pense que l'évolution de ce problème est différente à Terre-Neuve‑et‑Labrador. Ce n'est pas un sujet qui serait au premier rang des préoccupations de tout le monde. Lorsque ce projet a été présenté pour la première fois, je suppose qu'il semblait être une solution toute faite pour les pêcheurs d'ici, mais nous avons dit que cette option n'était tout simplement pas réaliste. Elle ne pouvait pas fonctionner. Il ne s'agit pas forcément de tester des cordes ou des maillons à faible résistance. C'est une question de physique et les pêcheurs savaient très bien que 1 700 livres, c'était beaucoup trop peu pour l'équipement que nous utilisions. Les engins que nous utilisons sont très efficaces pour éviter les mammifères marins.
Le ministère des Pêches et des Océans n'était absolument pas engagé ou intéressé à trouver d'autres moyens et à collaborer avec les pêcheurs dans les régions locales pour régler ces problèmes. C'était une solution qui fonctionnerait peut-être ailleurs, ou qui venait d'Ottawa. Ils ont dit: « Voilà. Adaptez-vous, quoi qu'il arrive et peu importe si c'est réaliste ou non ». J'ai déjà décrit l'approche comme s'ils disaient: « Eh bien, vous devriez d'abord le tester », et moi je pensais: « Oui, vous me donnez une boîte en carton et vous me demandez d'aller sur la lune. » On leur dit que c'est impossible, mais vous les entendez ensuite dire: « Essayez d'abord, de toute façon. Essayez d'abord. » Ce n'était pas une approche raisonnable.
Je pense que la façon dont nous pêchons, avec très peu de lignes verticales déjà dans l'eau pour ces palangres d'engins de pêche au crabe, comme je l'ai dit, qui semble être la principale préoccupation... Nous pouvons chercher des moyens d'en faire la norme. Certaines autres mesures suggérées par le MPO ne font qu'aggraver les problèmes, en augmentant les enchevêtrements de mammifères marins.
J'ai parlé d'un amoureux des baleines qui a consacré sa vie au sauvetage et à la conservation des baleines, peut-être plus que quiconque à Terre-Neuve‑et‑Labrador. Lorsque quelqu'un dans cette position souligne les problèmes liés à l'approche du MPO et dit — et je vais paraphraser — que c'est absurde, je pense que nous avons un problème avec l'approche. Il est temps de commencer à écouter des experts comme M. Ledwell et, j'ajouterais, les pêcheurs.
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Je vous remercie de la question.
Je n'ai pas non plus à portée de main l'information concernant le coût des nombreux vols effectués par Pêches et Océans Canada et les gens chargés de la conservation et de la protection de l'environnement. Toutefois, il y a certainement une grande différence de coût entre l'utilisation des bouées acoustiques et les vols d'avion. Chacune des deux méthodes a ses forces et ses faiblesses.
En avion, quand on repère une baleine, on peut noter l'endroit précis où elle se trouve, ce qui donne une meilleure idée de la zone que nous devons fermer aux pêcheurs. La bouée acoustique, quant à elle, nous permet de détecter une baleine à une plus grande distance, mais elle ne nous permet pas de savoir où elle se situe par rapport à la bouée. C'est donc une faiblesse de la bouée acoustique.
Bref, les vols d'avion coûtent effectivement beaucoup plus cher, mais c'est une méthode beaucoup plus précise pour observer les baleines et connaître leur position.
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Tout d'abord, nous allons privilégier sans équivoque la surveillance continue des baleines noires là‑bas, et nous serions soumis à des fermetures, par exemple, lorsqu'on verrait un certain nombre de baleines. Ce sont des possibilités à envisager, mais en attendant, je pense que des mesures de gestion nous permettent de faire en sorte qu'il y ait moins de possibilités d'enchevêtrement.
De même, je pense qu'il est possible d'examiner les configurations des engins de pêche au crabe, pour pêcher et réduire le nombre de ces lignes verticales dans l'eau. Il s'agit d'une solution tout à fait réalisable et sensée au lieu d'augmenter le nombre de ces lignes. C'est exactement ce que suggéreraient aussi ceux qui se sont penchés sur les enchevêtrements de mammifères marins dans ces zones.
À l'heure actuelle, vous constatez qu'une corde à faible résistance pourrait aider à déprendre une baleine, par exemple. Encore une fois, c'est comme pour les engins fantômes. Il est préférable d'empêcher une baleine de s'empêtrer dans les cordages plutôt que de mettre plus de cordes dans l'eau et d'avoir plus d'enchevêtrements et d'espérer les dépêtrer des cordages et des engins de pêche. Je pense que nous pouvons certainement prendre deux ou trois mesures et nous pouvons apprendre davantage de nos homologues dans les autres parties du golfe et de la baie de Fundy et d'autres régions qui composent avec leur présence depuis plus longtemps.
M. Noël a parlé de certains de ces engins « à la demande ». Je pense que cela prendra du temps lorsqu'on parle de 5 000 $ par pièce d'équipement. Il est évident que c'est une transition difficile pour les gens, mais je crois qu'une fois que nous aurons plus d'expérimentation, d'essais, de confiance, cela pourrait faire partie de la solution.
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Je vous remercie de la question.
Plus tôt, j'ai parlé des cordages et des liens faibles, et j'ai mentionné que nous avions des inquiétudes à cet égard. Les discussions avec le ministère vont se poursuivre aux mois de novembre et de décembre.
Il est question d'appliquer la réglementation au mois de janvier. C'est assez rapide, puisque nous n'avons pas encore trouvé de solution. Personnellement, je crains que cela crée beaucoup plus de cordages fantômes dans la mer, ce qui augmentera le risque pour les baleines noires, même quand les pêcheurs ne seront pas actifs. Un cordage fantôme reste là en permanence, ce qui augmente le travail de récupération.
Je pense que nous avons encore du travail à faire. Nous avons effectué des essais, mais nous en sommes à la première étape. Il reste encore une ou deux autres étapes à franchir avant de déterminer si l'utilisation de cette nouvelle technologie est une réussite.
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Je pense qu'il serait plus responsable et raisonnable de donner un peu plus de flexibilité et de faire des essais en mer un peu plus vastes. Cela nous permettrait de vraiment mesurer les effets de ces cordages.
Comme vous le savez bien, monsieur Cormier, chez nous, les crabiers sont de gros navires, qui sont dotés de matériel lourd.
Un cordage dont le point de rupture est de 1 700 livres n'est pas un cordage fort. Or nous sommes assez près de cette mesure.
À mon avis, il est évident que si l'on met cette mesure en place cette année, ce ne sera pas une bonne idée compte tenu de l'équipement existant.
Au magasin, chez moi, je ne peux pas me procurer cet équipement. À mon avis, c'est un non-sens d'appliquer cette mesure au mois de janvier.
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Je pense qu'il y a assurément place à l'amélioration.
Les neuf quadrilatères que l'on ferme sont des zones énormes, ce sont de grands espaces. Nous avons déjà proposé au ministère des mesures pour rapetisser ces endroits, ainsi que pour agrandir le territoire de pêche de façon sécuritaire pour la baleine. Cela a été rejeté. Nous sommes convaincus qu'il s'agit de l'approche à privilégier.
Plus on concentre la pêche à l'extérieur des zones fermées, plus le risque augmente de voir une baleine s'empêtrer dans l'équipement, vu la grande concentration d'équipement. De plus, c'est plus dangereux pour les pêcheurs, parce que ceux-ci doivent déplacer des casiers rapidement avant d'aller dans des zones où ils ne sont pas certains que la pêche est possible.
Il faut absolument continuer à peaufiner les mesures de fermeture de ces zones. Il faut qu'elles soient fermées moins longtemps et qu'elles soient plus petites. C'est pour le bien des baleines qui sont en déplacement.
Comme il a été dit tantôt, la bouée acoustique autorise une fermeture, mais seule l'observation visuelle permet de rouvrir une zone. Il faut revoir ce mode de fonctionnement.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je ne vais pas prendre deux minutes et demie, parce que j'ai moins de temps maintenant, mais je vais tout de même poursuivre en m'adressant à M. Lanteigne.
Monsieur Lanteigne, vous avez parlé plus tôt d'un comité d'ouverture, en disant que ce serait une très bonne manière de procéder. M. Noël disait que l'application des différentes solutions proposées par le MPO d'ici janvier 2023 était irréalisable. Ce comité d'ouverture pourrait-il alors être une solution de rechange, à court terme, pour demander une échéance plus lointaine, et pourrait-il être mis en place rapidement?
Par ailleurs, serait-il envisageable d'y intégrer une personne qui représente le marché américain?
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De toute évidence, comme nous vivons sur une île, nous sommes très isolés et notre économie dépend entièrement de la mer, que ce soit pour l'industrie de la pêche ou l'aquaculture. Le homard est l'une de nos principales pêcheries, alors tout ce qui lui arrive a un impact énorme sur l'île dans son ensemble.
Pour nous, le début de la saison est l'un des événements les plus attendus, car elle commence en novembre. C'est à ce moment‑là que les baleines noires sortent des eaux canadiennes. Nous n'aurions donc pas tendance à les voir entrer dans la baie de Fundy et traîner dans la région à la recherche de nourriture. Si elles le font, il s'agit d'une traversée très brève de la baie de Fundy, donc, comme mes collègues l'ont dit à propos du passage d'une seule baleine qui risque de fermer de grandes zones de pêche pendant une longue période alors qu'en réalité, les baleines ne sont plus là... Nous devons examiner la durée des fermetures et peut-être les observations de plusieurs baleines si nous allons procéder à une fermeture de longue durée comme celle‑là.
Nous devons aussi tenir compte de certains facteurs de risque lorsque nous envisageons certaines mesures, comme celles dont M. Sullivan a parlé. Si vous avez une zone de pêche où il y a très peu ou pas de chevauchement avec la présence de baleines noires, peut-être n'avons-nous pas besoin de nous concentrer autant sur les mesures dans ces endroits, mais plutôt de travailler davantage en collaboration avec les pêcheurs, qui, je pense, ont différentes solutions. Cependant, ce qui fonctionne dans la baie de Fundy avec nos marées ne fonctionnera probablement pas dans le golfe du Saint-Laurent, pas plus que ce qui fonctionne dans le golfe du Saint-Laurent ne fonctionnera à Terre-Neuve.
Nous devons cesser d'adopter une approche unilatérale qui fonctionnera à l'échelle du Canada atlantique et examiner vraiment des zones précises pour voir comment la pêche s'y déroule, ce qui peut être fait dans ces zones et, concrètement, ce qui doit être fait.
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Merci, monsieur le président.
Ma question s'adresse à M. Noël.
Je sais qu'à Terre-Neuve-et-Labrador, comme M. Sullivan l'a dit, la pêche au crabe se fait au moyen d'un chapelet de 70 casiers qui comporte deux élingues de levage. Dans votre secteur, dans le golfe, pêchez-vous avec des chapelets de casier ou utilisez-vous un seul casier au bout d'une corde verticale?
Si c'est le cas, pensez-vous que l'adoption de casiers à crabe de style japonais, comme ceux que nous utilisons à Terre-Neuve-et-Labrador, réduirait les risques d'enchevêtrement des baleines noires dans les lignes verticales ou des élingues de levage? Ne pensez-vous pas que cela aurait un impact très positif sur ce que nous essayons de faire ici?
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Je vous remercie de la question.
Dans le golfe du Saint‑Laurent, nous pêchons avec des trappes, une bouée, un cordage et un casier. Ce sont des unités, pour utiliser le terme employé à Terre‑Neuve.
Vu la densité des casiers dans les mêmes zones, l'utilisation de casiers japonais en ligne ou d'un chalut causerait beaucoup de chevauchement entre les agrès de pêche. La pêche serait ainsi plus difficile et moins sécuritaire pour nos pêcheurs.
Certains l'ont déjà fait dans notre région, mais c'est un peu difficile. J'ai parlé avec des pêcheurs de Terre‑Neuve qui font ce que vous dites. Il pêchent avec des chaluts de 70 casiers alignés. C'est un monde un peu différent, car la densité des casiers dans une même zone est moins grande à Terre-Neuve, selon ce qui m'a été dit.
Cependant, quand on utilise des bouées sur demande, la pêche sans cordage, on utilise des chaluts de 10 casiers, parce que cela réduit les coûts et qu'il y a moins de pêcheurs dans les mêmes zones de pêche.
J'aimerais remercier chaleureusement, bien sûr, MM. Noël, Lanteigne et Sullivan et Mme Morse pour le temps qu'ils nous ont consacré ce soir.
Nous allons prendre une très courte pause pour permettre aux autres témoins de s'installer. Je crois savoir qu'ils ont tous fait un test de son, sauf un, alors notre pause ne sera pas très longue.
Encore une fois, merci pour votre temps. C'est très apprécié. Profitez du reste de votre journée.
Nous allons suspendre la séance pour quelques minutes.
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Nous reprenons nos travaux.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à notre deuxième groupe de témoins.
Nous accueillions M. Paul Lansbergen, président du Conseil canadien des pêches, ainsi que Molly Aylward, directrice exécutive et Melanie Giffin, biologiste de la vie marine et planificatrice de programme industriel à la Prince Edward Island Fishermen's Association. Nous accueillons aussi M. Michael Barron, président de la Cape Breton Fish Harvesters Association.
Je vous remercie d'avoir pris le temps de vous joindre à nous. Vous disposerez chacun d'au plus cinq minutes pour faire une déclaration liminaire.
J'invite M. Lansbergen à commencer pour au plus cinq minutes, s'il vous plaît.
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Merci, monsieur le président.
Bonjour et merci de m'avoir invité à comparaître devant vous.
Comme beaucoup d'entre vous le savent, le Conseil canadien des pêches est l'association commerciale nationale qui représente les transformateurs de produits de la pêche sauvage de tout le pays, qui pratiquent tous aussi la pêche. Nous faisons la promotion d'une ressource saine et d'une industrie prospère qui joue un rôle vital dans l'économie canadienne.
J'aimerais vous faire part d'abord de certains faits importants du secteur qui sont souvent négligés ou sous-estimés.
Le Canada a un dossier solide en matière de durabilité. Selon le MPO, 98 % de nos stocks de poissons commerciaux sont exploités à des niveaux durables. De plus, le Canada est le deuxième pays au monde à avoir adopté la norme du Marine Stewardship Council, ou MSC, une certification de la gestion durable des pêches par une tierce partie indépendante. Du point de vue économique, la pêche est le principal secteur de l'économie bleue du Canada, avec 90 000 emplois et un PIB annuel de 9 milliards de dollars. Elle assure la vitalité de nos collectivités côtières.
J'ai plusieurs messages clés à vous transmettre aux fins de la discussion d'aujourd'hui.
Premièrement, personne ne veut mettre les baleines en danger. Cela devrait être évident, mais je pense qu'il faut le dire. Ce sont des créatures majestueuses et aucun d'entre nous ne veut leur faire du mal.
Ensuite, personne ne veut perdre son matériel. Cela devrait être évident, mais nous savons que les engins perdus peuvent contribuer au risque d'enchevêtrement et poser d'autres problèmes. Les engins de pêche sont marqués, ils sont signalés en cas de perte et il existe des mesures incitatives, comme des témoins précédents vous l'ont dit, pour que les pêcheurs récupèrent les engins perdus.
En effet, les baleines sont en péril et le Canada a l'obligation légale d'agir. Des représentants du MPO vous ont dit qu'ils devaient agir en vertu de la Loi sur les espèces en péril. Nous devons aussi nous soucier des répercussions sur le marché en vertu de la MMPA, la loi sur la protection des mammifères marins des États-Unis, que vous connaissez également. J'y reviendrai dans un instant.
Les fermetures dynamiques sont une approche efficace. Comme vous l'avez entendu, elles ne sont peut-être pas parfaites, mais le MPO continue d'apprendre d'une année à l'autre. Nous avons certainement beaucoup appris de la première année de fermetures statiques. D'autres témoins, y compris ceux d'aujourd'hui qui participent plus activement aux discussions avec le MPO, vous ont parlé de ces fermetures et de ces approches. Je me contenterai d'ajouter ma voix au choeur qui dit que l'approche dynamique est bien meilleure que les approches statiques adoptées ailleurs. J'encourage le MPO à continuer à discuter avec l'industrie des leçons à retenir d'une année à l'autre.
En ce qui concerne l'accès au marché et l'acceptation du marché, nous devons être conscients des attentes des gouvernements et des clients étrangers. Le marché américain est notre principal marché d'exportation. L'an dernier, il représentait 6,2 milliards de dollars, soit 70 % de nos exportations de produits de la mer. Sur ce montant, le homard représentait 2,2 milliards de dollars et le crabe — principalement le crabe des neiges — 1,9 milliard de dollars, pour un total de 4,1 milliards de dollars. Nous apprendrons dès le mois prochain comment le gouvernement des États-Unis a évalué nos pêcheries dans le cadre de la MMPA. Je suis convaincu que nous obtiendrons de bons résultats aux mesures de comparabilité.
Les réactions peuvent aussi avoir une incidence sur la réputation globale de notre marché au‑delà des pêcheries directement touchées. Malheureusement, le fait est que nous devons répondre aux organisations qui nous critiquent. C'est encore plus frustrant lorsque leurs décisions ne sont pas transparentes ou solidement étayées, mais il est essentiel que l'industrie se défende, et nous l'avons fait. En tant que porte-parole national, le Conseil canadien des pêches a été de plus en plus proactif pour gagner la confiance du public envers le secteur. Il est là pour répondre aussi aux critiques après coup.
Nous nous attendons également à ce qu'il se défende et qu'il défende l'industrie lorsque des questions sont posées sur la façon dont le MPO gère nos ressources. Je pense que le MPO pourrait faire mieux sous ce rapport. N'oublions pas que c'est le MPO qui établit les règles et que lorsque l'on nous critique, cela a des répercussions sur lui aussi.
Enfin, nous attendons que le MSC se défende et qu'il défende l'industrie. Je suis heureux qu'il l'ait fait et qu'il continue de le faire.
Pour conclure, je tiens à souligner que les secteurs du homard et du crabe des neiges innovent à un rythme sans précédent. Les mesures de soutien du gouvernement y contribuent également. J'espère que, d'ici quelques années seulement, le risque d'enchevêtrement sera pratiquement éliminé par l'adoption généralisée d'engins novateurs.
Je vous remercie. Je suis impatient de répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président. Je ferai la déclaration.
Monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invitée à prendre la parole aujourd'hui.
La P.E.I. Fishermen's Association a été créée dans les années 1950 et elle a évolué de concert avec le ministère des Pêches et des Océans afin de créer la relation de travail bien établie que nous entretenons maintenant. L'objectif de notre présence aujourd'hui est de nous pencher sur les mesures de gestion de la baleine noire de l'Atlantique Nord en ce qui concerne l'Île-du-Prince-Édouard et sur la façon dont elles peuvent être adaptées pour assurer une pêche fructueuse sans nuire à l'essor de la population de baleines noires de l'Atlantique Nord.
Avant de nous pencher sur les mesures qui touchent explicitement l'Île-du-Prince-Édouard, nous pensons qu'il est important de souligner une difficulté générale liée au processus à ce jour. Depuis 2017, lorsque la mortalité massive a déclenché des réunions pour discuter de modifications de la gestion, nous estimons qu'il y a eu un manque de consultation réelle des pêcheurs. Il y a eu des réunions du comité consultatif et des sommets sur les engins, mais très peu de pêcheurs ont été invités à y participer.
Les assemblées ont été perçues comme une occasion pour le MPO de cocher une case, alors que les préoccupations et les recommandations exprimées à ces occasions semblent être tombées dans l'oreille d'un sourd. Ce sont les pêcheurs qui sont la clé d'une solution fructueuse. Le MPO devrait donc consacrer beaucoup de temps à parler aux pêcheurs dans chaque zone de pêche au homard afin de déterminer ce qui fonctionnera ou non dans cette région. La première rencontre du MPO avec les pêcheurs de l'Î.‑P.‑É. a eu lieu en août 2022, cinq ans après le début des discussions. Il est encore possible pour le MPO d'accorder plus d'attention à une consultation valable auprès des pêcheurs.
Passons maintenant aux mesures relatives à l'Île‑du-Prince-Édouard.
La première est l'obligation d'utiliser des engins à faible résistance sans danger pour les baleines. La PEIFA comprend l'objectif de cette mesure de gestion. Malheureusement, le MPO ne communique pas suffisamment les détails de ces mesures aux pêcheurs. Ces derniers ont besoin de temps pour modifier leurs engins et le 1er janvier 2023 approche à grands pas. D'habitude, les pêcheurs préparent leurs cordages un an avant la saison. Les pêcheurs aimeraient éviter une situation comme le marquage des engins, qui n'a été annoncée qu'un mois avant la saison et qui a obligé tout le monde à se démener pour trouver de la ficelle et modifier ses engins. Des changements majeurs comme celui‑ci engendrent des problèmes d'approvisionnement qui ralentissent encore plus le processus.
La PEIFA n'a toujours pas obtenu de réponses aux questions suivantes. Quand le MPO présentera-t‑il une liste d'engins approuvés? Où le maillon à faible résistance doit‑il être installé sur la ligne verticale?
La deuxième question concerne les fermetures saisonnières. À l'heure actuelle, Transports Canada discute de la possibilité de modifier la zone restreinte près de la vallée de Shediac, en fonction des observations de baleines de 2022. Il est aussi question de rendre la zone restreinte modulable, de sorte qu'elle puisse être modifiée au cours de la saison, si nécessaire. La PEIFA estime que le MPO pourrait envisager la même modularité en ce qui concerne les fermetures saisonnières. La première fermeture saisonnière en 2022 a été annoncée vers le 19 mai, ce qui a laissé le quadrilatère fermé jusqu'au 15 novembre, soit presque six mois. Une modularité pourrait être intégrée à cette mesure de gestion afin d'examiner la zone chaque mois et de déterminer si la réouverture du quadrilatère présente un risque élevé ou faible. Si le risque est faible et que la réouverture du quadrilatère offre plus de latitude aux pêcheurs, cela devrait être envisagé. Actuellement, il n'y a pas de discussion sur la réouverture d'un quadrilatère une fois qu'il est fermé pour la saison.
La troisième question concerne les lignes d'exclusion de 10 et 20 brasses. Cette mesure de gestion illustre le risque d'interaction plus faible à moindre profondeur et est aussi un exemple d'une mesure qui équilibre la protection des baleines et la possibilité offerte aux pêcheurs d'accéder à des zones de pêche riches.
La PEIFA recommande des mesures de gestion en fonction des profondeurs de pêche plutôt que des observations de baleines. À l'Î.‑P.‑É., les pêcheurs de homard pêchent à des profondeurs allant de 4 à 130 pieds. Il est évident qu'on ne voit pas de baleines noires dans l'Atlantique Nord dans quatre pieds d'eau. Par conséquent, les mesures de gestion imposées aux pêcheurs dans ces zones ne sont pas efficaces pour protéger les baleines. Cependant, elles créent du travail supplémentaire et un risque de perte d'engins pour les pêcheurs. Ce problème pourrait être résolu par la création d'une zone d'exclusion, fondée sur des données scientifiques de la profondeur minimale à laquelle des baleines noires de l'Atlantique Nord sont observées.
À titre d'exemple, si la ligne de 10 brasses était la ligne d'exclusion, cela permettrait à environ 99 % des pêcheurs de l'île d'économiser du temps et de l'argent dans la préparation de leurs engins sans augmenter le risque pour les baleines noires de l'Atlantique Nord. Ces chiffres sont extrapolés à partir de 503 relevés remplis par les pêcheurs de l'île sur la configuration des engins de pêche par l'entremise du Fonds d'adoption des équipements pour la protection des baleines.
La PEIFA a travaillé avec diligence sur ce dossier au fil des ans. Nous participons aux comités et conseils suivants: le groupe de travail technique du MPO, le comité consultatif du MPO, le consortium de la baleine noire de l'Atlantique Nord, le Ropeless Consortium, le groupe de travail technique sur les petits navires de Transports Canada et la Fédération canadienne de la faune. La PEIFA assiste aussi à la réunion des parties prenantes sur la baleine noire de l'Atlantique Nord.
Nous diffusons ensuite aux pêcheurs de l'Î.‑P.‑É. l'information recueillie dans le cadre de réunions consultatives et de réunions des conseils d'administration de l'Île. La PEIFA collabore aussi avec les pêcheurs pour déterminer les engins de pêche sans danger pour les baleines qui pourraient être utilisés à l'Î.‑P.‑É. Ces travaux ont commencé avant la création du Fonds d'adoption des équipements pour la protection des baleines, mais les essais ont été élargis grâce au Fonds en complément de la collecte de données sur la configuration des engins. Nous espérons utiliser l'information sur la configuration des engins pour nous assurer que les mesures de gestion sont efficaces pour l'Île‑du-Prince-Édouard.
Les pêcheurs font aussi leur part en vue de trouver des méthodes efficaces pour retirer les engins fantômes et pour retirer les engins perdus avant qu'ils ne deviennent des engins fantômes. Encore une fois, une partie de ce travail était en cours à l'Île-du-Prince-Édouard avant la création du Fonds pour les engins fantômes, mais les travaux ont été élargis avec l'aide du Fonds.
La PEIFA est consciente qu'il s'agit d'une question complexe. Nous voulons collaborer avec le MPO pour trouver des solutions, mais nous avons aussi l'impression que le MPO a raté des occasions d'écouter les préoccupations des pêcheurs et de discuter de solutions possibles.
Je vous remercie de votre temps.
Bonjour, mesdames et messieurs les députés. C'est un honneur d'être ici pour vous présenter un exposé sur la baleine noire de l'Atlantique Nord. Je m'appelle Michael Barron. Je suis président de la Cape Breton Fish Harvesters Association et propriétaire-exploitant indépendant d'une entreprise de pêche, au homard et au crabe des neiges dans une petite collectivité côtière du nord du Cap-Breton.
En tant qu'industrie, nous nous trouvons dans une situation difficile, étant à l'avant-garde des changements économiques et sociaux qui accompagnent la réconciliation, et devant maintenant faire face à la crise de la baleine noire. Je tiens à souligner qu'en tant qu'industrie, nous sommes très fiers d'être des intendants de l'océan. Notre industrie n'existerait tout simplement pas si la conservation et la durabilité n'étaient pas au cœur de tout ce que nous faisons. Nous sommes très fiers de la durabilité de notre industrie, mais nous avons souvent l'impression que notre savoir-faire est négligé ou rejeté lorsqu'il s'agit de prendre des décisions sur de nouvelles politiques potentielles et les échéanciers de mise en œuvre.
Je tiens vraiment à insister sur le fait que nous devons être plus conscients que la science, les données probantes et les évaluations claires et transparentes des risques doivent être au premier plan des décisions du MPO en matière de politique et de réglementation, et non le sensationnalisme et la désinformation.
Il n'est pas nécessaire de chercher plus loin, que le récent rapport du Monterey Bay Aquarium, qui a inscrit à tort le homard et le crabe des neiges dans la zone rouge, pour voir l'effet qu'un rapport non fondé sur des données probantes peut avoir sur toute une industrie. Bien qu'il ne s'agisse que d'un rapport d'une ONG ne contenant aucune donnée scientifique factuelle ou transparente, il a retenu l'attention des médias et suscité beaucoup d'inquiétude dans l'industrie. Il est également inquiétant de constater que le gouvernement a mis si longtemps à faire une déclaration publique pour soutenir l'industrie et reconnaître ce que nous avons fait pour tenter de prévenir l'enchevêtrement des baleines noires. Je crois savoir que le rapport a été publié à peu près en même temps que la période du deuil de Sa Majesté, et le deuil a duré sept jours.
Permettez-moi d'être clair: aucun enchevêtrement de baleine noire de l'Atlantique Nord lié à des engins de pêche au homard canadiens n'a été signalé ces dernières années, y compris depuis 2017, année où le Canada a renforcé les mesures de protection de la baleine noire. Nous avons été heureux de voir la communiquer ces faits et j'espère que son ministère s'appuie sur notre savoir-faire au lieu de négliger ou de rejeter nos opinions, comme il le fait souvent lorsqu'il prend des décisions sur l'avenir de notre industrie. Cependant, je ne suis pas trop optimiste, puisque nous sommes actuellement précipités dans des modifications d'équipement coûteuses et potentiellement dangereuses qui n'ont pas fait leurs preuves.
Comme d'autres associations, la nôtre teste des engins sans danger pour les baleines. En fait, un de nos membres teste les engins sans corde, une expression qui m'agace beaucoup, car nous avons besoin de corde pour récupérer nos engins. Je préfère l'expression « lignes d'extrémité sur demande ». Néanmoins, nous n'avons pas beaucoup de succès à ce stade, ce qui a de quoi nous inquiéter, étant donné que nous pourrions être contraints de respecter l'échéancier de mise en œuvre du changement d'engin au 1er avril 2023. Cela nous préoccupe beaucoup, car nous sommes à quelques mois seulement de cette date, ce qui laisse peu de temps aux pêcheurs pour effectuer les changements appropriés, sans compter que les nouveaux produits potentiels pourraient être en rupture de stock, car les fournisseurs n'en auront pas assez en réserve.
Cet échéancier précipité préoccupe l'industrie d'un point de vue pratique, mais aussi du point de vue de la sécurité. Nous sommes profondément préoccupés par l'utilisation de cordes ou de maillons de rupture à faible résistance pour transporter notre matériel dans un environnement qui est loin d'être indulgent par moments. Cet équipement peut se libérer ou se briser, et selon le moment et le lieu où cela se produit, cela engendre un énorme problème de sécurité. La libération de cet équipement créerait aussi plus d'engins fantômes. En outre, si cette ligne d'extrémité sur demande est effectivement mise en œuvre, elle pourrait engendrer des conflits potentiels par rapport aux engins. S'il n'y a pas de marque identifiable à la surface de l'eau, un pêcheur pourra poser son engin sur celui d'un autre pêcheur, ce qui pourrait faire échouer les deux unités de ligne d'extrémité sur demande et créer encore plus d'engins fantômes.
Je suppose que je dois reconnaître au MPO un certain mérite. Il a créé ce Fonds pour les engins fantômes au lieu d'apporter des modifications aux engins sans danger pour les baleines, ce qui risque de créer beaucoup d'engins fantômes. De plus, si cette technologie est mise en œuvre pour pêcher dans une zone fermée en raison de l'observation de baleines noires de l'Atlantique Nord, ce sera à un coût très élevé que seuls quelques membres de l'industrie pourront se permettre. Cela pourrait représenter une perte financière énorme non seulement pour le pêcheur, mais pour la collectivité côtière dans laquelle il vit, ce qui signifierait aussi une diminution du revenu imposable pour le gouvernement.
En outre, les problèmes mondiaux ont une incidence sur le prix de notre produit à un moment où le coût de tout augmente. Nous ne sommes pas à l'abri de ces pressions sur les coûts, et j'espère que vous comprenez qu'il s'agit d'un cercle vicieux sans issue claire. Eh bien, il y en a peut-être une: la faillite.
L'industrie des produits de la mer emploie directement plus de 10 % de la population de mon comté natal, le comté de Victoria, en Nouvelle-Écosse, et on fait souvent l'éloge de notre industrie, qui génère environ 2 milliards de dollars de débarquements pour les pêcheurs du Canada atlantique et 3,2 milliards de dollars à l'exportation.
Cela dit, nous semblons toujours être sur la défensive lorsqu'il s'agit des changements d'orientation motivés par de convaincantes campagnes de relations publiques plutôt que par la science, les données probantes et les risques. Comme industrie, nous sommes fiers de notre durabilité, mais nous devons constamment nous repositionner pendant que les autres entités qui utilisent nos magnifiques océans n'ont semble-t-il pas à être en permanence sous le feu des projecteurs.
En conclusion, comprenez que l'industrie ne souhaite pas perturber l'équilibre des écosystèmes où nous pêchons. Nous voulons que la baleine noire de l'Atlantique Nord continue de s'épanouir dans son environnement. Nous voulons continuer à fournir des protéines saines et durables pour étayer la sécurité alimentaire de notre grand pays et du monde entier, et à contribuer au bien-être économique de nos communautés côtières. Nous voulons simplement nous assurer que les politiques sont guidées par les données probantes, la science et l'expertise de l'industrie, et qu'on nous donne le temps nécessaire pour nous adapter à des changements pratiques et logiques.
Je vous remercie. Il me fera plaisir de répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président.
Merci également aux témoins.
Je m'adresserai d'abord à Mme Aylward. Vos propos sur le problème auquel sont confrontés les pêcheurs de l'Île-du-Prince-Édouard en ce qui concerne la modification de la fermeture permanente, en particulier dans les eaux peu profondes, m'ont beaucoup intéressé. Je pense que ça a beaucoup de sens. En fait, comme vous le savez peut-être, l'observation en juin d'une baleine noire dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse a causé une fermeture, mais les pêches pratiquées à des fins alimentaires, sociales et rituelles ont pu continuer dans cette zone.
J'ai écrit à la à ce sujet. Elle m'a répondu le 5 octobre, et je vais citer un extrait de sa réponse.
Comme vous le soulignez, les protocoles de fermeture de la pêche de la baleine noire de l'Atlantique Nord ne s'appliquent pas actuellement aux activités de prélèvement effectuées à des fins alimentaires, sociales et rituelles, qui sont fondées sur des droits, menées à petite échelle et souvent pratiquées en eaux peu profondes, vers lesquelles ces baleines sont moins susceptibles de migrer.
Je n'hésiterais pas à déposer cette lettre auprès du Comité, dans le cadre de l'étude.
La ministre et le ministère reconnaissent, dans leur réponse, que les engins mouillés en eaux peu profondes ne représentent pas une menace pour la baleine noire. Pourriez-vous commenter brièvement?
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Merci de votre question.
Essentiellement, ici à l'Île-du-Prince-Édouard, nous savons que nous pêchons dans des eaux peu profondes par rapport à ce qu'on fait ailleurs. À la lumière des dénombrements que nous avons effectués, nous savons notamment qu'il y a du poisson à une profondeur aussi faible que quatre pieds de profondeur. Effectivement, je conviens avec vous qu'on ne verra pas une baleine noire de l'Atlantique Nord dans quatre pieds d'eau. Il y a des mesures de gestion qui l'indiquent clairement.
Il existe déjà des zones d'exclusion pour les fermetures avec le seuil des 10 et 20 brasses; nous demandons donc une zone d'exclusion basée sur les observations de baleines, ce qui, dans les faits, empêcherait d'obliger les pêcheurs insulaires à utiliser des engins avec maillon de sécurité. Cette mesure est fondée uniquement sur la science et les zones à faible risque, mais elle économiserait temps et argent aux pêcheurs de l'Île-du-Prince-Édouard qui exploitent ces petites zones.
Cette année, notre association a pu distribuer à ses membres la plupart des engins à cordes à faible résistance, moins les maillons de rupture. Nous avions des manchons, des cordes à faible résistance et un autre type de manchon. Avec les particularités de notre pêche à casier unique... C'est la même que pour la PEIFA et dans les autres zones du golfe. Comme nous pêchons dans des eaux relativement peu profondes près de côtes dentelées, une partie des engins sont difficiles à remonter. Nous en avons perdu un certain nombre à cause du frottement et d'autres facteurs, selon les endroits où on nous avait demandé de tester l'efficacité de ces cordes à faible résistance.
En ce qui concerne les ligne d'extrémité sur demande, le pêcheur qui les met à l'essai en a en fait testé trois versions différentes. L'une nécessite deux séries de cordes. Une autre version est empaquetée dans un sac et se libère automatiquement quand on s'en approche. Les résultats n'ont pas été très bons. Une autre version nécessite l'embarquement d'un enrouleur automatique, ce qui oblige le pêcheur à débourser environ 12 000 $ pour l'enrouleur et 4 000 $ pour chaque bouée. Par exemple, pour pêcher le crabe des neiges, ce pêcheur devrait avoir 24 bouées et un enrouleur. Pour le homard, on parle de 275 bouées et d'une enrouleuse à 12 000 $. Économiquement, c'est irréaliste.
Pour ce qui est de la pêche du crabe dans le golfe, qui est pratiquée à de plus grandes profondeurs, y a‑t‑il des recommandations que vous jugez réalistes? Je crois que nous convenons tous de la nécessité de protéger la baleine noire de l'Atlantique Nord, et de protéger notre accès au marché crucial des États-Unis. Tous les pêcheurs craignent vivement que les Américains s'en mêlent, puisqu'ils représentent 70 % de notre marché. Comme vous le savez, l'Île-du-Prince-Édouard en a déjà fait l'expérience quand la fermeture de la frontière américaine à nos pommes de terre a vivement secoué cette industrie.
À ce propos, pourriez-vous nous fournir par écrit d'autres commentaires sur les mesures que vous aimeriez que le Comité recommande au MPO, à la fois pour assurer la protection de la baleine et pour permettre aux pêcheurs d'optimiser leurs efforts de pêche? Seriez-vous en mesure de commenter cet aspect?
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J'aimerais avoir les observations de chacun des témoins sur la question qui suit.
Pouvons-nous nous entendre sur le fait que nous allons trop vite pour ce qui est de la mise en place des dispositions prévues pour janvier 2023?
Sommes-nous d'accord aussi pour qu'il y ait un meilleur équilibre en ce qui concerne l'incidence sur les individus? Lors de la première partie de notre étude aujourd'hui, nous avons entendu dire que cela créait une forme d'anxiété. Parfois, les pêcheurs font une pêche précipitée pour atteindre le quota pendant que la pêche est ouverte, et ce, au cas où elle fermerait. Cela crée beaucoup de tension dans les communautés de pêche.
Êtes-vous d'accord sur le fait de prévoir un certain laps de temps pour mettre en place les dispositions, afin qu'elles soient adaptables selon la situation de la pêche propre à chaque région?
Est-ce deux choses sur lesquelles vous êtes passablement d'accord?
Chaque témoin peut répondre par oui ou par non, ou encore faire un petit commentaire.
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Merci, monsieur le président, et merci à ma collègue Mme Barron.
J'aimerais revenir à Mme Giffin.
Madame Giffin, nous avons entendu divers témoignages reconnaissant que les dispositifs de sondage acoustique sont essentiels pour déterminer le moment où des baleines noires pénètrent dans des zones données, mais qu'en pratique ils n'ont pas servi à déterminer le moment où on pouvait rouvrir les zones de pêche.
Pourriez-vous nous donner notre opinion à ce sujet? À vos yeux de biologiste, de scientifique, est‑ce qu'on pourrait davantage recourir à cette technologie acoustique pour cibler les périodes d'ouverture et de fermeture, particulièrement de fermeture? Nous le faisons très bien pour les fermetures de zones, mais pas pour les réouvertures.
Pourriez-vous nous donner votre avis sur la validité de cette technologie pour la réouverture des zones?
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Merci, monsieur Morrissey.
Nous devons maintenant donner congé à nos témoins, car nous avons des discussions internes à mener et nous devons obligatoirement arrêter à 18 h 15. Nous n'avons malheureusement pas de services après ce délai, et nous devons donner des instructions de rédaction et parler des déplacements. Il nous faut quelques minutes pour passer au huis clos.
Je tiens à remercier chaleureusement M. Lansbergen, M. Barron, Mme Giffin et Mme Aylward d'être venus aujourd'hui faire part aux membres du Comité de leur savoir, qui enrichira certainement le contenu du rapport. Nos analystes ont pris de copieuses notes tout au long de vos témoignages.
Si je ne m'abuse, certains d'entre vous ont été priés de nous envoyer des informations par écrit. Si vous jugez bon d'ajouter d'autres informations à votre témoignage, n'hésitez pas à les envoyer au Comité, qui l'intégrera à l'étude finale assortie de recommandations.
Encore une fois, merci beaucoup. Nous allons maintenant faire une courte pause, pendant que nous passons au huis clos.
[La séance se poursuit à huis clos.]