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Je déclare la séance ouverte. Bienvenue à la 38
e réunion du Comité permanent des pêches et des océans de la Chambre des communes. La réunion se déroule en format hybride, conformément à l'ordre de la Chambre adopté le 23 juin 2022.
Avant de procéder, j'aimerais préciser quelques points à l'intention des témoins et des membres.
Veuillez attendre que je vous nomme avant d'intervenir. Si vous participez à la séance par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour l'activer et veuillez vous mettre en sourdine lorsque vous n'intervenez pas. En ce qui concerne l'interprétation, les personnes qui utilisent l'application Zoom peuvent sélectionner, au bas de l'écran, le parquet, l'anglais ou le français. Les personnes dans la salle peuvent utiliser l'écouteur et choisir le canal désiré. Veuillez adresser toutes vos interventions à la présidence. Enfin, je rappelle à tous qu'il est interdit de prendre des captures d'écran ou des photos de votre écran. Les délibérations seront disponibles sur le site Web de la Chambre des communes.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le 20 janvier 2022, nous poursuivons notre étude de la baleine noire de l'Atlantique Nord.
Nous allons maintenant passer aux déclarations liminaires. J'aimerais souhaiter la bienvenue à notre premier groupe de témoins. Nous recevons Gilles Thériault, qui représente l'Association des transformateurs de crabe du Nouveau-Brunswick. Nous recevons aussi Charles Poirier et Léona Renaud, respectivement président et directrice du Rassemblement des pêcheurs et pêcheuses des côtes des Îles. M. Glen Best, pêcheur et propriétaire de Glen and Jerry Fisheries Inc., comparaît à titre personnel. Je suis certain que M. Best s'est déjà présenté devant ce comité auparavant.
Merci de prendre le temps de comparaître...
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Monsieur le président et membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invité à comparaître pour discuter de la situation actuelle quant à la baleine noire de l'Atlantique Nord comme espèce en péril.
Je m'appelle Gilles Thériault et je suis le président de l'Association des transformateurs de crabe du Nouveau-Brunswick. En passant, cette année marque ma 50e année d'implication dans l'évolution de la pêche au Canada.
Des voix: Bravo!
M. Gilles Thériault: Je vous remercie beaucoup.
Je dois vous dire, sans être prétentieux, que j'en ai vu de toutes les couleurs.
La présence de la baleine noire de l'Atlantique dans le sud du golfe Saint-Laurent, à partir de 2017, a créé beaucoup de remous, ici et ailleurs, à la suite de malheureux incidents ayant mené à des mortalités. Celles-ci ont été causées par l'empêtrement de baleines dans un cordage utilisé dans la pêche au casier et les heurts entre ces mammifères marins et des bateaux dans nos voies navigables. Nous ne nous en sommes pas encore remis, six ans plus tard. De nos jours, il s'agit d'une crise très longue.
L'industrie du crabe des neiges a été touchée et pointée du doigt comme nulle autre, en particulier aux États‑Unis, et je dirais aussi ailleurs dans le monde.
J'ai témoigné, au nom de l'industrie du crabe des neiges, sur le fait que nous sommes passés d'une réaction initiale où il était question de nuisance à un déploiement d'énergie sans pareil pour protéger la baleine noire et sauver une espèce en péril. Je n'ai jamais vu rien de tel dans ma carrière. Cela se fait dans le cadre d'une nouvelle approche, celle-ci favorisant des plans de gestion et des programmes de recherche-développement novateurs pour la modification des engins de pêche. Il y a une volonté de cohabitation afin de permettre aux pêcheurs de continuer à s'adonner à la pêche grâce à la mise en place de mesures de gestion exceptionnelles pour protéger la baleine.
Dans ce dossier, la collaboration entre les transformateurs et les pêcheurs est sans précédent. Pour ce faire les transformateurs ont mis en place un programme intitulé Fisheries Improvement Program. Quant à nous, nous avons lancé le projet Fisheries Improvement. Les associations de pêcheurs mènent de nombreux projets expérimentaux portant sur les engins de pêche, en particulier celui utilisant une technologie de bouées à la demande.
J'ai aussi observé, dans le cadre de ce processus, une excellente collaboration entre les transformateurs, les pêcheurs et les ministères, tant fédéraux que provinciaux. Nous avons pour objectifs d'établir des plans de pêche annuels et de faciliter la mise en oeuvre d’autres mesures importantes, comme le déglaçage de nos ports. Il y a eu des désaccords et de longues et nombreuses discussions, mais tout cela s'est toujours fait avec la volonté de gérer une pêche de cohabitation, qui assure, dans la mesure du possible, la protection de la baleine, tout en permettant, autant que faire se peut, l'atteinte de nos quotas de crabe des neiges. À mon avis, le travail n’est pas terminé et la bataille n’est pas gagnée.
Je dois vous avouer que je fonde énormément d’espoir dans la pêche utilisant la technologie de bouées à la demande, communément appelée pêche sans cordage. Je crois que les pêcheurs, en raison de leurs énormes efforts visant à mettre au point cette technique de pêche, ont pris les devants par rapport au ministère des Pêches et Océans, ou MPO. Le ministère a du rattrapage à faire pour ce qui est de l'élaboration de mesures de gestion de la pêche au moyen de cette nouvelle technologie.
Cette année, 18 pêcheurs ont utilisé cette technologie, et ils ont pu pêcher dans les zones fermées où les baleines étaient censées être présentes. Pour la première fois, une quantité de crabes non négligeable, pêchés à l'aide de cette nouvelle technologie, a été commercialisée. Cette percée considérable suscite beaucoup d’intérêt de toutes parts. Il s'agit là d'une première, et cela pourrait, dans un avenir pas si lointain, changer la façon dont toutes les pêches avec casier se pratiquent dans les zones fermées, et ce, afin de protéger les espèces en péril, comme la baleine noire.
Nos pêcheurs sont les pionniers d’une pêche révolutionnaire qui, à mon avis, sera un jour pratiquée à l'échelle planétaire.
Il est urgent que le MPO accompagne les pêcheurs dans leurs démarches en mettant en place immédiatement des mesures de gestion et des analyses scientifiques permettant d'éviter le chaos en mer et d'accélérer, de façon ordonnée et le plus rapidement possible, la croissance de cette nouvelle technologie.
Je vous remercie de votre attention.
Je m'appelle Charles Poirier et je suis le président du Rassemblement des pêcheurs et pêcheuses des côtes des Îles, ou RPPCI. Je suis accompagné de Mme Léona Renaud, directrice de notre organisation.
Créé en 2015 par des pêcheurs de homard, le RPPCI est un organisme à but non lucratif. Il regroupe aujourd'hui plus de 200 pêcheurs côtiers des îles de la Madeleine, quelle que soit l'espèce qu'ils pêchent, et c'est la plus grande organisation du Québec.
Le RPPCI a pour mission de faire la promotion des intérêts collectifs des pêcheurs et des pêcheuses côtiers et de voir à leur avancement. Il a aussi pour but d'unir les forces des pêcheurs, tant sur le plan local que national, et de créer des partenariats et des stratégies communes avec d'autres associations et regroupements pour faire avancer les dossiers.
Les membres du RPPCI croient que la pêche côtière est, aujourd'hui — et elle le sera aussi demain —, celle qui peut le mieux se pratiquer en respectant l'environnement marin, celle qui assure le mieux la pérennité des pêches et celle qui contribue le plus à l'économie locale.
Depuis sa création, le RPPCI travaille à la mise en œuvre de plusieurs projets scientifiques permettant l'avancement des pêches, tout en tenant compte des changements climatiques que nous connaissons tous présentement et de la préservation des ressources marines. Le RPPCI participe à plusieurs comités ou groupes de travail touchant les pêches.
Aujourd'hui, nous voulons présenter nos préoccupations sur le passage de la baleine noire dans le golfe du Saint‑Laurent et sur son incidence sur nos pêcheurs. Nous avons transmis un mémoire au Comité. Je ne le lirai pas au complet. Je parlerai immédiatement de l'état de la situation et des propositions formulées par les membres du RPPCI.
Comme il a été mentionné, les membres du RPPCI ont participé à plusieurs présentations et rencontres sur l'adaptation des engins de pêche dans le but de réduire le risque d'empêtrement pour les baleines noires de l'Atlantique. Plusieurs discussions ont aussi eu lieu entre les pêcheurs des îles de la Madeleine sur la possibilité de modifier leurs engins de pêche.
Le constat est unanime parmi les pêcheurs madelinots, peu importe l'espèce qu'ils pêchent: étant donné les courants marins qui se déplacent autour des îles de la Madeleine et dans le golfe du Saint-Laurent, il est illusoire de penser que les types de cordage testés par des homardiers en Gaspésie sont adaptés aux courants marins auxquels sont exposées les îles. Compte tenu des coulées de béton pesant déjà 1 700 livres, il est indéniable que les pêcheurs madelinots auront besoin d'équipement pour pouvoir supporter un poids d'au moins 2 000 livres.
Dans ce contexte, les membres du RPPCI ont donc proposé des mesures concrètes qui auraient pu entrer en vigueur dès le printemps 2022 et qui auraient permis de diminuer le risque d'entrave pour les baleines noires qui circulent autour des îles de la Madeleine. Les membres du RPPCI demandent à Pêches et Océans Canada de modifier le protocole de fermeture des quadrilatères ainsi que les lignes de 10 brasses et de 20 brasses autour des îles de la Madeleine. Les lignes proposées par les membres du RPPCI figurent dans le tableau joint dans son mémoire.
De plus, étant donné que le secteur des îles de la Madeleine fait partie du corridor de passage des baleines noires dans le golfe du Saint-Laurent, le RPPCI propose de mettre à contribution son bateau nommé le RPPCI pour la détection et le suivi des baleines lors de leur passage autour des îles de la Madeleine, plus particulièrement dans la zone de pêche 22, où sont concentrés les pêcheurs de homard madelinots.
Lorsqu'une baleine est détectée dans la zone 22 à une profondeur de 20 brasses ou moins, le Rassemblement s'engage à mettre son bateau et son capitaine à contribution pour suivre la baleine jusqu'à ce qu'elle quitte le secteur. Toutefois, si la baleine se maintient dans la zone 22 pendant plus de 48 heures, le RPPCI est d'accord pour une fermeture « en action », c'est-à-dire pour fermer certains quadrilatères et suivre la baleine de plus près. Avant de déclencher le protocole de fermeture de quadrilatères, le Rassemblement propose que la baleine soit aperçue pendant deux jours consécutifs dans la zone avant la fermeture et que celle-ci ne dure pas plus de 48 heures.
Dans le cas où la baleine noire se trouverait toujours dans la zone de pêche à la fin de ces deux jours, le RPPCI demande au MPO qu'une modification soit apportée au protocole quant à la durée de la fermeture du quadrilatère. Il demande de faire passer la durée de la fermeture, qui était de 14 jours au départ, à sept jours.
En conclusion, j'ajoute que les îles de la Madeleine sont au coeur du golfe du Saint‑Laurent. Toutes les baleines qui passent dans le golfe nagent autour des îles. Notre petite communauté compte 325 pêcheurs de homards et une douzaine de pêcheurs de crabes. L'économie première des îles de la Madeleine reste la pêche aux homards. Le fait de fermer la pêche équivaut à mettre le cadenas sur l'économie locale. Sans la pêche aux homards, l'économie des îles de la Madeleine est anéantie.
C'est pourquoi nous voulons faire apporter des modifications au protocole, ce que nous avons déjà demandé en 2021, parce que toutes les baleines qui passent dans le golfe du Saint‑Laurent passent autour des Îles‑de‑la‑Madeleine. Cela est dangereux pour notre communauté. Nous voulons bien entendu les protéger, mais à ce que nous sachions, jamais une baleine n'est venue à moins de dix brasses de notre secteur.
Ce n'est qu'aujourd'hui que nous avons l'occasion de vous présenter notre mémoire. Nous remercions ceux qui nous ont invités à...
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Bon après-midi. Je remercie le président et les membres du Comité de me permettre de témoigner devant le Comité aujourd'hui.
Mon frère et moi sommes des pêcheurs de quatrième génération. Nous exploitons des navires de 18 à 65 pieds et employons 18 membres d'équipage. La pêche au crabe représente environ 85 % de nos revenus. Comme la valeur au débarquement de l'industrie de la pêche au crabe de Terre-Neuve représentait environ 624 millions de dollars en 2021, vous comprendrez qu'elle est très importante pour nos activités de pêche et pour les collectivités rurales de Terre-Neuve-et-Labrador dans l'ensemble. Sans les crustacés, les collectivités rurales ne seraient pas comme elles sont aujourd'hui. Elles auraient de la difficulté à survivre.
Je pratique la pêche depuis 34 ans à partir de Fogo, sur la côte Nord-Est de Terre-Neuve. Je dois dire que chaque fois que je vois une baleine, et j'en ai vu des centaines, ça demeure une expérience incroyable. Je tiens à ce que notre écosystème marin soit florissant et à ce qu'on lui nuise le moins possible. Pendant ces 34 ans, je n'ai jamais vu une baleine noire, et encore moins un enchevêtrement. Je n'ai entendu parler qu'une seule fois d'un enchevêtrement de baleine, toutes espèces confondues, dans un engin de pêche au crabe.
Si vous consultez la carte interactive sur les baleines noires de l'Atlantique Nord du ministère des Pêches et des Océans et que vous sélectionnez d'octobre 2015 à aujourd'hui, vous constaterez que cette carte ne présente que quatre observations confirmées de baleines au large des côtes Est et Nord-Est pendant cette période. La greffière pourra vous transmettre le lien sur demande. Une de ces observations a eu lieu en septembre et les trois autres en novembre. Il n'y a pas de pêche au crabe ou au homard pendant ces mois, et en fait très peu de pêche avec engins fixes de quelque nature que ce soit.
Même si nous n'avons aucune incidence sur les baleines noires dans ces zones, on nous oblige quand même à utiliser les nouveaux cordages sécuritaires pour les baleines dont l'efficacité n'a pas été démontrée, alors que ce n'est pas obligatoire dans des endroits comme le Nunavut et la Colombie-Britannique parce qu'on juge qu'il ne s'y produit aucun enchevêtrement de baleine. En tant que pêcheurs, nous avons déjà pris des mesures dans le passé pour protéger les baleines et satisfaire aux exigences de la Marine Mammals Protection Act, notamment en procédant au marquage des cordages afin de délimiter les zones de pêche en cas d'enchevêtrement et en réduisant les câbles flottant à la surface.
Depuis que ces mesures ont été mises en place, y a‑t‑il eu la moindre preuve que les activités de pêche provenant des côtes Est et Nord-Est, ou du Labrador, ont provoqué des enchevêtrements de baleines?
En ce qui concerne les cordages sécuritaires pour les baleines, il faut être conscients de l'environnement dans lequel nous travaillons. Il faut faire comprendre au MPO qu'on ne peut appliquer une solution unique à tous les types de pêches et à toutes les zones. Dans le golfe, certains pêcheurs utilisent des casiers individuels, ce qui augmente la densité des lignes verticales dans l'eau. À Terre-Neuve, on utilise des flottilles de casiers, chaque flottille comportant environ 70 casiers et un seul cordage, ce qui réduit grandement les risques pour les baleines.
Pendant la consultation limitée qui a eu lieu l'hiver dernier, les pêcheurs ont appris qu'un maillon de sécurité qui cède à 1 700 livres deviendrait la norme pour tous les types de pêche. Il faut savoir que cela s'applique aux pêcheurs de homard qui pêchent à une profondeur de deux brasses, aux pêcheurs de crabe qui pêchent à une profondeur de 200 brasses et même aux pêcheurs de turbot, qui pêchent à la limite du plateau continental à des profondeurs pouvant atteindre 650 brasses.
Nous pêchons dans des conditions très difficiles en commençant avec la pêche au crabe le 1er avril, tôt dans l'année, afin d'éviter la mortalité des crabes à carapace molle à mesure que la saison progresse. Commencer aussi tôt signifie que nous risquons de rencontrer des glaces ou une mer houleuse. Il est fréquent de traîner des engins dans des vagues de quatre à six mètres. Imaginez un navire de 65 pieds et de 150 tonnes traînant une flottille de casiers à crabe des neiges dans des vagues de quatre à six mètres. Il est presque certain qu'un maillon de sécurité qui cède à 1 700 livres va céder. C'est mathématique. De plus, la technologie sans cordage est loin d'avoir fait ses preuves et n'est pas pratique. Pourquoi tentons-nous de créer une solution à un problème qui n'existe pas dans nos zones de pêche?
Les baleines noires de l'Atlantique Nord font souvent les manchettes à cause de groupes comme le Seafood Watch, de l’aquarium de Monterey Bay, qui recommandent aux gens d'éviter le crabe et le homard canadiens provenant de la côte Est. De tels renseignements sont erronés et laissent entendre que toutes les pêches au crabe et au homard de l'Est du Canada nuisent aux baleines noires. Le ministère devrait plutôt accorder la priorité aux zones où on juge qu'il y a un problème et y concentrer ses ressources tout en conscientisant les groupes écologiques et en faisant la promotion des aspects positifs de la pêche au crabe là où il n'y a aucun enchevêtrement.
Il est si facile de blâmer l'industrie de la pêche lorsqu'on voit des engins sur une baleine. Est‑ce qu'on mène des recherches sur d'autres industries afin de déterminer quels impacts elles ont? Le bruit provenant des routes commerciales achalandées, la pollution ou les activités sismiques qui provoquent d'énormes explosions sous-marines, voilà des sources d'inquiétude pour les pêcheurs. Vous pouvez peut-être comprendre pourquoi nous nous sentons injustement visés.
En terminant, je dirais qu'aucun pêcheur ne veut ni ne peut se permettre de perdre des engins de pêche. Nous avons déjà pris des mesures dans le passé, comme des ficelles biodégradables dans les casiers à crabe afin de permettre aux animaux de se libérer des engins fantômes. Avec ces nouvelles règles concernant l'utilisation de cordages sécuritaires pour les baleines, on augmente en réalité les risques qu'il y ait davantage d'engins fantômes dans l'écosystème marin, ce qui est à l'opposé de l'objectif qu'on souhaite atteindre. En tentant de régler un problème qui n'existe pas dans une zone, le ministère est en train d'en créer un autre beaucoup plus grand.
Même si toutes ces règles et tous ces règlements sont extrêmement importants pour la gestion des espèces marines, le ministère ne doit pas oublier qu'il est également important de gérer les personnes qui travaillent sur l'océan et y gagnent leur vie.
Merci. J'ai hâte de répondre à vos questions.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Mes questions s'adressent à M. Thériault.
Monsieur Thériault, je vous félicite pour vos 50 ans d'activité dans l'industrie de la pêche. Je trouve que vous avez l'air un peu jeune pour avoir 50 ans d'expérience. Blague à part, je vous félicite aussi du travail que vous faites à l'usine McGraw Seafood, qui est située dans la circonscription que je représente. Je tiens à préciser à mes collègues que cette usine appartient entièrement à la Première Nation d'Elsipogtog. D'ailleurs, je salue M. Jake Augustine, le directeur de l'usine.
Selon moi, les efforts fournis par les pêcheurs et par les acteurs de l'industrie au cours des cinq dernières années relèvent du miracle. Nous savons tous deux que nous pourrions faire mieux pour ce qui est de la flexibilité des mesures et pour avoir une pêche un peu plus normale dans les années à venir.
Monsieur Thériault, selon vous, est-il possible d'offrir un peu plus de flexibilité pour ce qui est des mesures et des fermetures temporaires et saisonnières? L'année passée, la pêche dans le golfe était pratiquement fermée au complet, même si l'on avait atteint les quotas, en majorité.
Est-il possible également d'offrir de la flexibilité tout en s'assurant que nos marchés, qui sont très importants aux États‑Unis et ailleurs dans le monde, ne sont pas touchés?
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C'est une question très importante, mais elle est aussi très délicate.
Nous cherchons toujours à concevoir des plans de gestion susceptibles d'assurer que nous atteignions les quotas pour ce type de pêche et de pêcher de manière efficace, tout en protégeant les baleines.
Le plan actuel de gestion ne permet pas d'assurer que les baleines ne vont pas s'empêtrer dans un cordage. Il n'y a pas de garantie à cet égard. D'ailleurs, je crois que nous n'arriverons jamais à protéger entièrement les baleines, à moins que l'on ferme complètement la pêche, ce que recommande l'aquarium de Monterey Bay. Soit dit en passant, je trouve cette idée absurde.
D'une part, je comprends les pêcheurs, qui cherchent toujours à faciliter l'exercice de leur métier tout en s'assurant de protéger les baleines. D'autre part, je comprends aussi le gouvernement du Canada, qui est réticent à l'idée de rendre les mesures plus flexibles, parce qu'une baleine pourrait, par accident, s'empêtrer dans un cordage et mourir.
Autrement dit, je comprends la réticence du gouvernement et je comprends aussi les préoccupations des pêcheurs. Ces derniers connaissent très bien la situation et ils n'ont pas une attitude égoïste.
Je n'ai pas de réponse toute prête à vous fournir, et peut-être qu'il n'y en a pas. L'argument des pêcheurs est raisonnable et il prend en compte le caractère sensible de la question, mais je comprends qu'il faille procéder prudemment.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Monsieur Poirier, la zone des îles de la Madeleine est une zone très particulière, tout comme son économie. L'équilibre socioéconomique des îles est directement lié à la pêche, selon ce que vous nous avez dit. Pour y être allée plusieurs fois, je le confirme. Tout le monde parle de pêche, aux îles. Toute la vie y est animée par la pêche au homard.
J'aimerais avoir vos observations sur ce qui arriverait si le MPO décidait de maintenir son échéance de 2023 concernant la mise en place d'un équipement qui est mal testé ou dont les tests n'ont pas donné de résultats concluants.
À court terme, pour la prochaine année de pêche, quelles en seraient les répercussions pour les pêcheurs et toute l'économie des îles de la Madeleine?
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Permettez-moi de vous donner une petite idée de la situation. Nous sommes 325 pêcheurs dans la zone de pêche des îles de la Madeleine. Il y a donc beaucoup d’achalandage. Vu le grand nombre de pêcheurs, les casiers sont quasiment empilés les uns sur les autres. Entre deux casiers sur la même ligne des eaux, la profondeur peut varier d’environ 20 pieds.
De plus, les fonds marins dans ces eaux sont très rocheux et ils rendent la pêche difficile. Si les exigences prévues sont maintenues et qu'il nous faut utiliser le cordage ayant une faible résistance qui fait présentement l'objet de tests, nos casiers resteront dans l’eau. La baleine ne s'y empêtrera pas, mais nos casiers resteront à l’eau. Ce sera loin d’être acceptable pour l’environnement.
Sur le plan économique, comme nous avons 273 casiers qui valent de 100 à 150 $ chacun, ce ne sera pas une solution très logique non plus.
J’ai participé moi-même à un test lié à l'utilisation d'engins de pêche dont le cordage cède lorsque la tension est supérieure à 1 700 livres. Malheureusement, je n’ai pas une très bonne opinion du résultat. Le cordage a cassé tout seul, étant donné sa faible densité. Ce n’est pas une baleine qui l’a cassé, ce sont le poids de mon bateau et le fond marin qui en étaient la cause.
Nous allons créer un problème écologique qui n’a aucun sens. Les casiers laissés au fond de l’eau vont se défaire au bout d’un an, mais ils vont continuer à capturer des homards tout seuls. Ce ne sera pas très rentable pour les pêcheurs des îles de la Madeleine. Ce n’est pas tous les jours que nous remplaçons une dizaine de casiers.
C’est pour cette raison que nous demandons de reporter l’échéance à 2025 pour que nous ayons plus de temps. Ce n’est pas que nous ne sommes pas d’accord sur le principe, au contraire.
J’écoutais les propos de M. Thériault, tout à l’heure, au sujet des bouées sans cordage. Je voudrais qu’il vienne voir ce qui se passe dans le secteur des îles. Je ne sais pas si vous le savez, mais, moi, même si je vois les bouées du pêcheur d’à côté, nos casiers se retrouvent un par-dessus l’autre de temps en temps. Si nous ne voyons pas où se trouve notre voisin, c’est sûr que nous allons nous nuire mutuellement.
Il n’est pas simplement question d’un casier et d’une bouée. Pour nous, il s’agit d’une ligne de sept casiers et de deux bouées.
Pour revenir à notre bateau, le RPPCI a fait l'acquisition d'un bateau scientifique, qu'il utilise dans le cadre de ses projets.
Je tiens d'abord à préciser qu'une baleine n'est pas censée descendre en bas de 20 brasses, ce dont conviennent tous les scientifiques. Aux îles de la Madeleine, nous sommes sur un plateau de 20 brasses.
Il arrive de temps en temps qu'une baleine passe tout près des îles. Comme une baleine navigue à une vitesse de six nœuds, à cette vitesse et en 10 heures, elle est rendue 60 milles plus loin. Elle est passée. Selon le protocole établi, dès que la présence d'une baleine est signalée, on met le protocole en place et l'on ferme le secteur après 48 heures. Nous avons donc 48 heures pour déplacer nos casiers. Cela dit, après cette période de 48 heures, la baleine est rendue dans un autre secteur. Par conséquent, on ferme un secteur où il n'y a plus de baleine. C'est pour cette raison que nous étions prêts, dès la détection d'une baleine, à mettre à contribution un capitaine et notre bateau pour l'escorter et être sûrs qu'elle ne s'empêtre pas dans nos engins et qu'elle ne vienne pas autour des îles.
S'il y a une baleine autour des îles, nous sommes prêts à fermer notre secteur, et nous le ferons avec plaisir. Or, comme je vous l'expliquais tout à l'heure, nous sommes situés au centre du golfe. Toutes les baleines passent autour des îles de la Madeleine. Si l'on en a détecté 153, les 153 sont passées aux îles, car il ne faut pas oublier que les îles sont situées dans un corridor de passage servant aux baleines.
Les baleines ne s'arrêtent pas pour manger aux îles, puisqu'il n'y a plus de maquereau ni de hareng. Les seules espèces qui sont pêchées présentement, ce sont le homard et le crabe. Les baleines ne viendront pas manger du homard dans des eaux dont la profondeur est d'une brasse. Tant et aussi longtemps qu'elles vont aller manger dans le secteur de la pointe de Gaspé, elles vont passer autour des îles de la Madeleine. Or, nous ne voulons pas revivre ce qui nous est arrivé il y a deux ans.
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Oui, il y a un plan de pêche pour chaque type de pêche. Il s'agit d'un plan annuel. Au début de la saison, le ministère des Pêches et des Océans nous dit: « Voici les règles, ce sont les mêmes que l'an dernier », ou « Nous changeons ceci ou cela ». Cela arrive régulièrement.
Depuis l'arrivée des baleines, en 2017, les plans de pêche et les règles ont beaucoup changé, à juste titre j'ajouterais, en raison de la présence des baleines noires et des incidents d'enchevêtrement et de mortalité.
J'ai constaté un grand effort de collaboration et de coopération dans le but de parvenir à un plan efficace, un effort plus important que ce à quoi j'ai été habitué au fil des ans. Je n'ai jamais vu l'industrie... Je disais la même chose au sujet des transformateurs et des pêcheurs. Très souvent, on tend à camper sur nos positions, mais dans le cas des baleines noires, je suis impressionné de voir à quel point tout le monde collabore vraiment. Ce n'est pas qu'on s'entend sur tout, comme on peut le voir aujourd'hui, mais les efforts déployés par tous afin de trouver une solution sont vraiment impressionnants. Cela a permis d'améliorer ce plan de pêche d'année en année.
Il faut poursuivre ces échanges. Il faut encore écouter ce que MM. Poirier et Best et d'autres ont à dire. Il faut poursuivre cette pratique. Nous avons fait d'énormes progrès, mais on ne peut pas dire qu'on a trouvé la solution et que tout va bien maintenant. Il faut continuer de travailler et d'apporter des changements.
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J'ai effectivement eu l'honneur et le privilège de travailler avec les Premières Nations. Je suis consultant. J'ai mis sur pied une organisation de pêcheurs appelée l'Union des pêcheurs des Maritimes. J'ai quitté cette organisation il y a 35 ans et je suis consultant depuis ce temps. Depuis quelque temps, je m'efforce d'intégrer les Premières Nations à la pêche commerciale. Je crois fermement dans la décision Marshall ainsi que dans la vérité et la réconciliation. C'est très important.
Je suis donc également très actif auprès de la Première Nation d'Elsipogtog, dont je suis très fier, soit dit en passant. Cette communauté possède maintenant l'usine de transformation de crabe des neiges la plus moderne au Canada. Nous venons tout juste de construire une usine de 25 millions de dollars. L'usine est rentable et les profits retournent dans la communauté afin de créer des emplois, entre autres. Il s'agit d'une merveilleuse collaboration, car l'usine est située dans la communauté acadienne. Il s'agit d'une excellente collaboration entre les Acadiens et les Micmacs. Si vous venez visiter notre usine — et vous y êtes tous invités —, vous y verrez un grand panneau indiquant qu'il s'agit d'une collaboration entre les Micmacs et les Acadiens.
La Première Nation d'Elsipogtog possède son propre quota de crabe des neiges et 35 navires de pêche. C'est très important pour la communauté. Cela lui rapporte des millions de dollars par année et, en effet, nous nous assurons qu'elle soit consultée. Je me battrais bec et ongles si ce n'était pas le cas. Le processus est intéressant, car il est en deux volets. Il y a une consultation distincte directement avec les Premières Nations, mais elles sont aussi invitées à participer aux forums plus vastes des comités consultatifs et ainsi de suite.
Pour répondre à votre question, les Premières Nations participent activement au processus et, bien entendu, la situation des baleines les préoccupe beaucoup, comme nous tous d'ailleurs.
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Merci, monsieur le président.
Il a été remplaçant à un comité que je préside et il m'a dit qu'il se vengerait ici. Je le taquine.
Monsieur Thériault, c'est bon de vous voir. Vous êtes un visionnaire dans l'industrie de la pêche sur la côte Est depuis des années. Votre idéologie n'est pas toujours appréciée par les pêcheurs eux-mêmes.
Le Comité a largement entendu des thèmes communs, soit que tout le monde veut protéger la baleine et que tout le monde est conscient des conséquences de revenir à une situation comme celle de 2017 ou même proche de celle‑ci. Plus tôt, vous avez dit que ce serait « dévastateur » pour le marché. Il est devenu évident qu'une approche unique ne conviendra pas à tous. L'autre thème commun, c'est que là où les pêcheurs et les baleines interagissent, quelque chose doit céder, et ce n'est pas dans tout le golfe que les pêcheurs et les baleines interagissent.
Ma question porte sur une déclaration que vous avez faite dans votre présentation, ou peut-être était‑ce dans une réponse. Vous avez mentionné que le MPO doit accompagner les pêcheurs tout au long du chemin pendant que l'on développe cette nouvelle technologie. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur la façon dont le MPO doit accompagner les pêcheurs en cours de route?
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Oui, absolument. C'est un point très important que j'essayais de faire valoir dans mon allocution.
Tout d'abord, je tiens à préciser que la situation à Terre‑Neuve est totalement différente. Il n'y a pas de baleines là‑bas, et je suis donc tout à fait d'accord sur ses préoccupations concernant la mise en place de règlements touchant des zones où il n'y a pas de baleines.
Lorsque je parle d'une pêche sans cordages, je parle d'une pêche qui se déroule dans les zones fermées. Je ne recommande ni ne suggère que la pêche se fasse sans cordages partout. Cela dit, ces zones fermées, à un moment donné, c'était presque la moitié ou plus de nos lieux de pêche. Si on pouvait continuer à y pêcher tout en protégeant les baleines… Je suis convaincu que cette méthode ou cette technique, qui consiste, dans une zone fermée, à poser des pièges, mais à éviter les cordages dans l'eau, serait fantastique. C'est ce qui se fait actuellement.
Ce que je veux dire, c'est que 18 pêcheurs l'ont fait cette année et qu'ils ont eu beaucoup de succès. Certains ont pu prendre leur quota parce qu'ils étaient autorisés à pêcher dans ces zones fermées. Ils ont vraiment pêché dans les zones fermées. Ce que je dis maintenant, c'est que nous devons planifier cette situation. Nous avons besoin de règlements sur la distance à respecter entre les bateaux, sur le nombre de pièges par bateau et sur le nombre de pêcheurs qui seront autorisés à pêcher. Nous devons nous assurer que....
Les pêcheurs évoluent très rapidement. Cette possibilité crée beaucoup d'excitation. Comme je l'ai dit, ils n'y croyaient pas du tout. Maintenant, c'est la voie de l'avenir. Nous devons nous assurer de disposer des règlements appropriés pour la pêche au moyen de cette technologie dans les zones fermées. J'ai l'impression que le ministère est à la traîne en ce moment dans ce domaine.
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Oui, elle l'est de mon point de vue. C'était vraiment une bombe. Nous avons dû réagir rapidement en tant que pays. C'était du jamais vu.
Je ne critique pas le gouvernement. Le gouvernement et le ministère ont fait un travail énorme, à mon avis. Nous sommes encore en train de nous y retrouver. Cela ne veut pas dire qu'il a toujours raison, mais je ne critique pas les tentatives du gouvernement du Canada pour essayer de régler le problème. Au contraire, je les applaudis.
Cela dit, nous devons poursuivre notre travail. Nous devons le perfectionner et nous assurer que nous continuons dans ce sens. Par exemple, il a été question du programme Seafood Watch du Monterey Bay Aquarium, qui recommande aux Américains de ne plus acheter de crabe des neiges et de homard. C'est ridicule, non? Le gouvernement a pris une assez bonne position. J'ai trouvé que c'était bien, mais nous devons être capables d'en faire plus à ce niveau.
En tant que transformateurs, nous étions très concernés. Je n'ai pas eu l'occasion d'en parler, mais je suis vraiment impressionné par le programme d'amélioration des pêches que nous avons. Notre industrie était certifiée par le Marine Stewardship Council, ou MSC, mais à cause de l'enchevêtrement des baleines, cette certification nous a été retirée. Beaucoup de nos acheteurs ont dit que si nous n'étions plus certifiés MSC, ils n'étaient plus certains de pouvoir acheter notre produit. Voilà la situation.
Maintenant, nous prenons des mesures en incluant les pêcheurs, en travaillant avec le gouvernement, en travaillant avec des ONG, dont le New England Aquarium, et en travaillant avec nos acheteurs. Nous avons créé un groupe pour un projet appelé « Projet d'amélioration des pêches » afin de pouvoir récupérer notre certification MSC.
Il y a une coordination extraordinaire, et je ne critique donc personne. Je dis simplement que les choses évoluent très rapidement. Le MPO doit en faire davantage pour s'assurer qu'il suit l'évolution rapide de la technologie sans cordage.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à notre deuxième groupe de témoins.
Nous accueillions les représentants du ministère des Pêches et des Océans, soit M. Marc Mes, directeur général de la Flotte et des services maritimes à la Garde côtière canadienne, et Robert Wight, directeur général de l'Approvisionnement des navires à la Garde côtière canadienne. De plus, M. Nabaa, qui représente le secteur de la construction maritime, se joint à nous par vidéoconférence.
M. Mes fera une déclaration de cinq minutes ou moins. Allez‑y, je vous en prie.
Bonjour monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité.
Je m’appelle Marc Mes et je suis le directeur de la Flotte et des services maritimes de la Garde côtière canadienne. Je suis accompagné aujourd’hui par M. Rob Wight, notre directeur général de l'Approvisionnement des navires, et par Nicholas Nabaa, directeur général des grands projets de construction maritime à Services publics et Approvisionnement Canada.
Je m’adresse à vous aujourd’hui à partir du territoire non cédé du peuple algonquin anishinaabe.
Mon rôle au sein de la Garde côtière canadienne est d’assurer la prestation de services de la flotte à l’appui des programmes de la Garde côtière et du gouvernement et de veiller à la prestation de services aux navigateurs qui assurent leur sécurité et favorisent le mouvement efficace du commerce maritime.
Nous avons le plaisir d’être ici aujourd’hui au nom de la Garde côtière pour parler de nos efforts pour soutenir et protéger la baleine noire de l’Atlantique Nord.
[Français]
En tant qu'organisme chargé d'assurer la sécurité des marins et du secteur maritime, la Garde côtière canadienne se préoccupe beaucoup de nos océans, des mammifères marins et de tout le milieu maritime. Nous travaillons en collaboration avec nos collègues du ministère des Pêches et des Océans, qui souhaitent maintenir des pêches renouvelables et un environnement maritime sain.
[Traduction]
Nous faisons cela surtout par la mise en place de plateformes en mer pour que les principales activités, telles que la science en mer, la conservation et la protection, puissent être menées efficacement par la plus grande flotte du Canada.
Notre flotte de plus de 120 navires, dont des brise-glaces, des navires scientifiques, des baliseurs et des navires de recherche et de sauvetage, pour n’en nommer que quelques-uns, est prête à intervenir 24 heures sur 24, sept jours sur sept. Notre flotte est au cœur de l’exécution des programmes de la Garde côtière, et nous travaillons à la renforcer et à la renouveler grâce à la Stratégie nationale de construction navale.
Nos brise-glaces sont au cœur de notre flotte actuelle. Jusqu'à 19 brise-glaces opèrent chaque hiver pour assurer le déplacement sécuritaire sans interruption du trafic maritime sur les eaux couvertes de glace. Ces mêmes brise-glaces facilitent également l’accès aux eaux libres au printemps, afin que les pêches, comme celle du crabe des neiges au Québec et dans les régions du Golfe, afin que les pêches puissent être ouvertes le plus tôt possible sans compromettre la vie des navigateurs.
Il ne faut pas minimiser l’importance de ces brise-glaces. La Garde côtière travaille en étroite collaboration avec tous les intervenants afin de répondre à leurs attentes pendant l’hiver et pendant les difficiles saisons intermédiaires. C’est quand il y a encore de la glace dans de nombreuses zones, mais qu'en même temps, la glace s’est dégagée dans d’autres zones et des bouées de navigation maritime doivent être placées pour assurer la sécurité de la navigation, tout cela alors que l’industrie de la pêche est impatiente de commencer sa saison.
Sur le plan des actifs de la flotte, les saisons intermédiaires sont l’une des périodes les plus difficiles de l’année où les brise-glaces de la Garde côtière sont très sollicités et où, malheureusement, la demande dépasse ce que nous pouvons offrir — et où des décisions difficiles doivent être prises pour organiser les services par ordre de priorité.
Nous avons également commencé à utiliser des navires de tiers, ou ce que nous appelons des « affrètements ponctuels », grâce à des marchés à commandes établis qui nous permettent de puiser dans ces services, au besoin. Cela nous permet de compléter notre flotte lorsque la demande dépasse notre capacité.
Alors que nous accueillons notre nouvelle flotte, j’ai le plaisir d’annoncer que la Garde côtière sera encore mieux préparée à soutenir les difficiles saisons intermédiaires et à répondre plus largement aux besoins croissants des intervenants, grâce à une nouvelle classe de brise-glaces que nous sommes en train de concevoir, appelés « navires multimissions semi-hauturiers ». Ces brise-glaces plus petits nous permettront d’opérer plus efficacement dans les eaux moins profondes.
J’aimerais également faire part au Comité de l’excellent travail que fait la Garde côtière canadienne pour soutenir l’échange d’information sur les baleines avec les navigateurs. La Garde côtière a créé un « bureau des mammifères marins » dans ses centres des Services de communications et de trafic maritimes aux Escoumins et à Victoria, qui servent de ressource essentielle pour fournir aux navigateurs des renseignements essentiels, comme l’emplacement des baleines, les avertissements de navigation, les restrictions temporaires de vitesse dans les voies de navigation, les fermetures de zones et d’autres renseignements pertinents.
[Français]
Nous travaillons en collaboration avec Transports Canada qui, en tant qu'organisme de réglementation, surveille la conformité des navires quant à ces restrictions de navigation afin de protéger les baleines noires de l'Atlantique Nord des collisions avec les navires dans le golfe du Saint‑Laurent.
[Traduction]
En terminant, j’espère vous avoir communiqué la façon dont nous travaillons en étroite collaboration avec nos clients et partenaires, y compris nos collègues du MPO, sur des questions importantes comme la protection des baleines noires de l’Atlantique Nord — et le rôle essentiel que jouent nos brise-glaces dans leur soutien.
La Garde côtière s’efforce de faire en sorte que sa future flotte soit mieux placée pour répondre aux besoins croissants de ses partenaires et de ses clients, et nous sommes prêts à assurer la continuité du service jusqu’à l’arrivée de la nouvelle flotte.
Sur ce, monsieur le président, je termine ma présentation, et nous serons heureux de répondre à vos questions.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être avec nous aujourd'hui.
Premièrement, monsieur Mes, je vous remercie des efforts que vous avez déployés au cours des dernières années en matière de déglaçage. Juste devant mon bureau de circonscription, je peux voir où ces efforts sont faits, c'est-à-dire dans la baie de Caraquet et, un peu plus loin, dans la baie de Shippagan. C'est particulièrement là, comme vous le savez, que nous avons des problèmes, chaque année. En effet, il faut déglacer ces petits chenaux pour que les pêcheurs de notre région puissent partir un peu plus tôt et ainsi éviter que des baleines s'empêtrent dans leurs cordages. Cela fait aussi en sorte que les baleines ne sont pas sur notre territoire de pêche au début de la saison.
Quelle démarche faut-il entreprendre pour recourir à des tiers, comme vous l'avez dit?
Comme vous le savez, le Groupe Océan est venu prêter main-forte au cours des dernières années, tout comme ECO Technologies, qui est dans notre région.
Quel est le processus à suivre pour accorder ces contrats?
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Merci beaucoup de la question.
Nous procédons par étapes. Premièrement, nous déployons toujours un brise-glace léger à Shippagan et à Caraquet, qui se trouvent dans la péninsule acadienne, au Nouveau‑Brunswick. C'est l'un des endroits où les pêcheurs veulent pouvoir naviguer le plus tôt possible, et je comprends cela parfaitement.
Le brise-glace léger peut briser des glaces mais, évidemment, il est limité par sa taille et par sa calaison, et il ne peut faire qu'une partie de ce travail. Ensuite, nous déployons d'autres ressources de façon successive. On a recours à un navire à affrètement libre. On utilise un petit remorqueur qui peut aller à d'autres endroits où le brise-glace léger ne peut pas se rendre. Ce navire est aussi limité par le fait qu'il ne peut briser que des glaces de 40 centimètres d'épaisseur. Ensuite, on emploie ce qu'on appelle la machine Amphibex; il s'agit essentiellement d'une excavatrice avec des pinces qui flotte sur la glace et qui nous permet de briser d'autres glaces que les deux autres navires ne peuvent pas casser. Cela permet d'élargir les voies de navigation déjà ouvertes par le brise-glace léger et le remorqueur afin que les bateaux de pêche puissent y naviguer.
En dernier recours, nous utilisons notre véhicule à coussin d'air, l'aéroglisseur. Il permet de briser encore davantage de glaces. Nous devons cependant l'utiliser en tenant compte des besoins dans la région de la rivière Restigouche, qui est prioritaire, car, si on ne brise pas les glaces à cet endroit, des propriétés privées seront inondées. L'aéroglisseur sera déployé s'il est disponible.
C'est véritablement une approche en plusieurs étapes qui, dans les dernières années, nous a permis d'ouvrir les ports de pêche environ une semaine plus tôt que d'habitude, en moyenne, grâce au déploiement successif de diverses ressources.
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Je suis très bien votre raisonnement. Je pense qu'il est important de noter ce que vous avez dit, c'est-à-dire que votre brise-glace ne peut pas entrer dans les petits chenaux comme ceux de la baie de Shippagan et de la baie de Caraquet. C'est pour cela, comme vous l'avez dit, qu'il faut recourir à des tiers, comme le Groupe Océan, qui envoie son bateau remorqueur.
Or, vous avez aussi dit que, malheureusement, lorsque l'épaisseur de la glace est supérieure à16 pouces, cela ne fonctionne pas. Nous l'avons vu cette année. Le bateau remorqueur n'a pu se rendre sur place que quelques semaines plus tard qu'à l'habitude à cause de l'épaisseur de la glace.
À ce sujet, vous avez parlé de l'arrivée de nouveaux brise-glaces. Tout le monde les attend, car ils vont pouvoir entrer dans des eaux peu profondes, comme les chenaux des baies de Caraquet et de Shippagan.
Premièrement, avez-vous une idée du moment où ces nouveaux brise-glaces vont être prêts?
Deuxièmement, quelle sera la profondeur d'eau minimale où ces nouveaux navires pourront être utilisés? Vont-ils être en mesure de venir dans les baies de Shippagan et de Caraquet?
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je remercie les représentants de la Garde côtière canadienne d'être parmi nous. Il est toujours très agréable de les recevoir.
Je vais prendre 30 secondes de mon temps de parole pour les remercier. Ma première expérience de navigation a eu lieu quand j'avais sept jours. En effet, c'est le Montcalm, navire de la Garde côtière canadienne, qui nous a transportés, mes parents et moi, de Québec à L'Isle-aux-Coudres, parce que le traversier de L'Isle-aux-Coudres était en panne, le mécanisme d'embrayage étant défectueux. Mon père était capitaine de ce traversier à cette époque. Le capitaine du Montcalm avait alors dit à mon père qu'il nous emmènerait jusqu'à L'Isle-aux-Coudres.
Ce matin aussi le traversier de L'Isle-aux-Coudres était en panne, et les gens auraient bien aimé voir un navire de la Garde côtière canadienne se promener le long de L'Isle-aux-Coudres.
Monsieur Mes, avez-vous parfois eu à intervenir dans la zone 22, qui longe les îles de la Madeleine, lors de passages de baleines? J'imagine que oui, mais j'aimerais savoir combien de fois vous avez dû intervenir et comment cela s'est passé.
Êtes-vous en mesure de nous décrire un peu les circonstances de vos interventions?
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Nous assurons un certain niveau de service pour le déglaçage. Nous communiquons avec l'industrie pour établir l'étendue des services, cerner les priorités et établir l'ordre de priorité des services en conséquence.
La plus grande priorité, ce sont les situations d'urgence ou de détresse. Cela comprend aussi les embâcles, en raison de leurs effets considérables sur l'économie et sur les populations côtières.
La deuxième priorité, ce sont les demandes de service pour le traversier, auxquelles il faut répondre en respectant les termes de l'union. Ces services sont considérés comme prioritaires. Je parle évidemment du service de traversier de Marine Atlantique entre Sydney et Blanc‑Sablon. Selon les termes de l'union, c'est un service prioritaire.
Ensuite, on accorde la priorité aux navires qui transportent des cargaisons vulnérables, qu'il soit question de matières potentiellement polluantes, de matières dangereuses, de denrées périssables ou de navires qui sont essentiels à la survie de la collectivité. Il faut veiller au réapprovisionnement. On se concentre ensuite sur la circulation maritime, les bateaux de pêche, les ports commerciaux et le dégagement des ports de pêche.
On établit ces priorités avec l'industrie des pêches, et on détermine les niveaux de service que la Garde côtière peut assurer. Par exemple, si un navire tombe en panne, et s'il faut se réorganiser, alors il faut rehausser l'ordre de priorité d'une tâche en fonction de ce qui a été convenu avec l'industrie. Les niveaux de service, l'état des glaces et la densité de circulation sont aussi des facteurs déterminants.
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En toute franchise, avec la COVID‑19, nos ressources sont mises à dure épreuve depuis deux ans et demi.
En ce qui a trait, par exemple, aux brise-glaces dans l'Arctique, cette saison, nous avons pu tous les déployer. À l'heure actuelle, nous avons suffisamment de personnel pour déployer nos navires à l'est et à l'ouest ou pour répondre à toute situation dans l'Arctique. La pandémie de COVID‑19 est là, et nous devons composer avec cela. Évidemment, nous devons aussi composer avec la demande de l'industrie mondiale, qui a aussi besoin de mécaniciens et de personnel dans certains domaines spécialisés.
C'est pour cela que nous comptons beaucoup sur le collège. Dans les prochaines années, il y aura de très nombreux diplômés, ce qui nous aidera lorsque viendra le temps de cerner les besoins, de doter les postes, mais aussi de remplacer ceux qui prendront leur retraite dans les années à venir.
Je signale à mes collègues autour de la table que je pose certaines de ces questions parce que ma région est l'une de celles où il est impossible d'aller en mer plus tôt, en raison des embâcles, comme je l'ai mentionné, dans la baie de Caraquet et dans la baie de Shippegan.
Voici ma question pour M. Mes, je crois, ou M. Nabaa. Chaque année, au cours des trois dernières années... Je vous remercie encore une fois des efforts que vous déployez pour le problème de déglaçage que nous connaissons, mais, chaque année, nous nous démenons comme des diables dans l'eau bénite parce que certains contrats avec des tiers ne sont pas conclus adéquatement ou pas conclus du tout. Les ententes avec les tiers conclues avec certaines compagnies comportent de nombreux problèmes.
Pouvez-vous dire au Comité si les contrats avec les tiers, que ce soit le Groupe Océan pour l'an prochain, par exemple, ou avec ECO Technologies, avec la « grenouille » comme nous l'appelons ici...? Êtes-vous en mesure de nous dire si les contrats sont conclus et signés, de sorte que les compagnies pourront intervenir tôt au cours de la prochaine saison si nous avons un problème d'embâcle? Selon les années, parfois il y a de la glace, parfois non, mais pouvez-vous confirmer hors de tout doute que les contrats sont signés au moment où l'on se parle?
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C'est une très bonne question.
Les pêcheurs veulent sortir avant les baleines noires et espérer pouvoir rentrer avant l'arrivée des baleines noires afin qu'elles ne s'empêtrent pas dans les engins de pêche. Cela dépend en partie des conditions météorologiques et du climat, donc si la glace est favorable et qu'il est possible d'utiliser les ressources en cascade, nous le faisons — y compris en recourant à l'aéroglisseur. Nous comprenons la nécessité de laisser sortir les pêcheurs à cause de la présence des baleines noires, et nous sommes donc contraints d'en faire une priorité.
Nous avons deux brise-glaces au centre du Canada, l'un d'entre eux est habituellement attribué à la rivière Restigouche, mais il se pourrait aussi que nous devions faire appel à un autre navire.
Nous faisons de notre mieux pour faire avancer les choses et essayer d'y remédier, mais je comprends que les pêcheurs veulent sortir en mer et pêcher.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Au bénéfice de tous les membres de ce comité, pouvez-vous nous dire s'il serait avantageux d'adopter une gestion dynamique, adéquate et appropriée quant aux mesures de protection touchant la baleine noire et les activités de pêche?
Cela aurait-il un effet bénéfique sur la survie des pêcheurs et sur l'économie liée à la pêche dans ce secteur de l'est du Québec?
Pensez-vous qu'une gestion dynamique pourrait donner de l'espoir aux pêcheurs si nous mettons à contribution vos services en tant que garde côtière, les connaissances des pêcheurs sur le terrain — qui sont extrêmement précieuses — et les interventions du MPO en matière de promotion des efforts exceptionnels observés?
Pourrons-nous, à court terme, faire en sorte que la pêche soit sécuritaire pour les pêcheurs et appropriée en ce qui a trait au commerce étranger?
Y a-t-il d'autres solutions possibles?
Avez-vous des conseils à nous donner à ce sujet?
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Merci, monsieur le président.
En fait, j'allais poser une question sur la capacité d'adaptation permanente requise par les changements résultant de la crise climatique, ainsi que par les variations dans les observations des baleines noires de l'Atlantique Nord et les endroits où on les voit. J'imagine que votre rôle exige une grande capacité d'adaptation. Je me demande si vous pouvez partager avec nous ce que vous pensez être les deux principales choses que nous devrions savoir en tant que comité.
Vous avez parlé de l'importance d'avoir suffisamment de navires, de l'importance d'avoir une capacité suffisante, de l'importance d'avoir différents types de navires pour faire face à différentes conditions, mais quelles sont, selon vous, les deux choses principales, ou la principale chose, que nous devrions savoir, à l'avenir, concernant ce dont vous avez besoin, notamment pour protéger la baleine noire de l'Atlantique Nord et les pêcheurs?
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Merci. C'est une très bonne question.
La première chose — et je crois que vous y avez fait allusion —, c'est le renouvellement de la flotte. Obtenir la flotte et une vaste flotte. Nous aurons un plus grand nombre de brise-glaces et de navires qu'à l'heure actuelle. En soi, cela va nous aider à faire face aux demandes toujours croissantes imposées par la nature et à assurer la prestation de nos programmes.
En plus de la nouvelle flotte, nous avons commencé à envisager ce que nous appelons une initiative de développement durable de la flotte. Il s'agit en fait des effectifs qui seront nécessaires pour les navires plus grands et le nombre plus élevé de navires. Quelles infrastructures seront nécessaires? De quelle formation aurons-nous besoin? La Garde côtière est à se pencher sur cette prochaine étape afin d'être en bonne posture à l'arrivée des nouveaux navires. Selon moi, c'est une des choses cruciales. Nous aurons un plus grand nombre de marins. Il nous faudra offrir plus de formation au collège. Nous aurons une infrastructure différente. Nous aurons un autre type d'expertise à bord des navires afin d'offrir nos programmes de manière différente.
Le deuxième élément est la modernisation du système de navigation maritime. Le monde entier est en train de se numériser et de passer à la communication en temps réel des informations et des données. Il s'agit d'une entreprise cruciale que la Garde côtière dirige de concert avec le ministère. En ce qui concerne les nouveaux navires, dans 10 ans — sinon plus tôt —, les navires seront autonomes. Si nous ne nous dotons pas d'un système de navigation maritime moderne et numérique, il y a de bonnes chances que certains navires autonomes ne viendront pas au Canada. Il est important de nous positionner et nous sommes à entreprendre le travail de numérisation et de modernisation du système de navigation maritime et de communication avec les marins.
Cela conclut les séries de questions pour la journée.
Je tiens à dire un gros merci aux trois témoins qui ont comparu au cours de la deuxième heure et qui nous ont fait part de leurs connaissances sur notre important sujet d'étude.
Je sais que votre temps est toujours précieux, mais vous acceptez toujours de comparaître lorsque nous vous invitons.
Je rappelle aux membres du Comité que la dernière réunion avec témoins au sujet de l'étude sur la baleine noire de l'Atlantique Nord aura lieu mardi. La réunion se terminera avec une demi-heure consacrée aux travaux du Comité, afin de transmettre aux analystes des instructions relatives à la rédaction du rapport.
De manière officieuse, je suppose... M. Morrissey a mentionné que je prendrais ma revanche durant la réunion. La semaine dernière, j'ai remplacé quelqu'un au comité HUMA, dont il est le président, et il a refusé de me donner la parole.
Des voix: Oh, oh!
M. Robert Morrissey: Il avait épuisé le temps dont il disposait.
Le président: Mais je lui ai pardonné peu après.
Des voix: Oh, oh!
Le président: La séance est levée.