Bienvenue à la 40e réunion du Comité permanent des pêches et des océans de la Chambre des communes.
Cette réunion se déroule en format hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 23 juin 2022.
Avant de commencer, j'aimerais préciser quelques points à l'intention des témoins et des membres du Comité.
Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Pour ceux qui participent par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro, et veuillez vous mettre en sourdine lorsque vous ne parlez pas.
En ce qui concerne l'interprétation, les personnes qui utilisent l'application Zoom peuvent sélectionner, au bas de l'écran, le parquet, l'anglais et le français. Les personnes dans la salle peuvent utiliser l'oreillette et sélectionner le canal désiré.
Veuillez adresser toutes vos interventions à la présidence.
Enfin, je rappelle à tous qu'il est interdit de prendre des captures d'écran ou des photos.
Les délibérations seront publiées sur le site Web de la Chambre des communes.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le 20 septembre 2022, le Comité amorce son étude sur la fermeture de la pêche au maquereau dans le Canada atlantique et le golfe du Saint-Laurent.
J'aimerais aussi confirmer aux membres que les tests de son ont été faits pour tous les témoins et que tout est conforme aux exigences.
J'aimerais souhaiter la bienvenue au premier groupe de témoins.
Nous accueillons M. Sebastián Pardo, coordonnateur des pêches durables au Centre d'action écologique. Nous avons aussi Mme Katie Schleit, conseillère principale en halieutique à Océans Nord. Nous avons enfin M. Dominique Robert, professeur et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en écologique halieutique à l'Institut des sciences de la mer de l'Université du Québec à Rimouski, qui comparaît à titre personnel.
Nous allons passer aux déclarations liminaires. Vous avez chacun cinq minutes.
J'invite M. Pardo à commencer.
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Merci, monsieur le président.
[Français]
Bonjour.
Je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner devant vous. Cette étude est très importante, parce que nous devons réfléchir à la façon d'aider les personnes les plus touchées aujourd'hui par les fermetures des pêches. Nous devons aussi réfléchir à la façon de reconstruire les pêcheries pour l'avenir.
[Traduction]
Je détiens un doctorat en sciences halieutiques et je travaille au Centre d'action écologique. Fondé en 1971, le Centre compte parmi les organisations environnementales les plus importantes et les plus anciennes au Canada atlantique. Notre mission est de favoriser les pêches durables et résilientes qui appuient la prospérité des collectivités côtières. Nous sommes membres du Comité consultatif du maquereau de l'Atlantique et nous participons au plan de rétablissement du stock de maquereau depuis le lancement du plan.
Aujourd'hui, je vais me concentrer sur les trois principales raisons pour lesquelles la fermeture de la pêche au maquereau était la bonne décision à prendre. Je vais expliquer également pourquoi la fermeture devrait être maintenue jusqu'à ce que des signes clairs du rétablissement du stock soient observés.
Premièrement, les meilleures données scientifiques disponibles démontrent que le moratoire était la seule option qui restait pour rétablir la population. Le maquereau était classé dans une zone critique pendant la majeure partie de la dernière décennie. Un plan de rétablissement a pris fin en 2020 sans qu'aucun de ses objectifs soit atteint, car les décisions de gestion des pêches prises avant le moratoire dans le but de réduire les prises n'ont pas favorisé la croissance de la population.
En outre, le niveau d'abondance des poissons en âge de procréer en 2021 a été le plus bas jamais enregistré. Les poissons les plus grands et les plus âgés, qui produisent le nombre d'œufs le plus élevé, sont presque disparus de la population. Tous ces indicateurs témoignent de la grande précarité du stock de maquereau et du bien-fondé de la fermeture de la pêche cette année comme option privilégiée de rétablissement de cette population.
Par surcroît, la Loi sur les pêches énonce que les considérations relatives à la conservation des espèces qui se classent dans la zone critique, comme c'est le cas du maquereau, l'emportent dans les décisions sur la gestion des pêches. La fermeture de la pêche au maquereau concorde avec le principe de précaution, qui est la pierre angulaire du cadre législatif sur les pêcheries durables au Canada.
Deuxièmement, l'observation d'un nombre accru de maquereaux dans certaines régions n'est pas forcément un signe de rétablissement. Ce phénomène peut s'expliquer par autre chose que l'accroissement de la population de maquereau.
Ces observations peuvent découler d'un comportement bien documenté chez plusieurs espèces de poissons — notamment la morue —, qui se rassemblent en bancs plus fréquemment lorsque leur population commence à décliner afin de donner l'impression qu'ils sont nombreux. Il y a aussi le fait que bon nombre d'espèces marines de l'Atlantique Nord s'étendent déjà au nord en raison du réchauffement des eaux. Par exemple, le maquereau qui se tenait dans le plateau néo-écossais peut désormais être observé plus au nord, à l'est de Terre-Neuve. Les recherches préliminaires menées par Pêches et Océans, qui ont d'ailleurs été présentées à la dernière réunion du comité consultatif, révèlent que le maquereau à l'est de Terre-Neuve, une des régions où il serait présent en plus forte densité, n'appartiendrait pas à une population reproductrice distincte, comme certains le pensaient.
Cela dit, nous espérons que davantage de ressources seront allouées aux études qui pourraient éclairer ces zones d'ombre.
J'arrive maintenant au point le plus important. Le rétablissement du stock est la seule option à long terme pour les pêcheurs qui dépendent du maquereau; nous devons soutenir ces pêcheurs tout au long du processus de rétablissement. Des milliers de personnes au Canada atlantique et au Québec sont déjà aux prises avec des difficultés financières en raison de la fermeture. Ils vivent également une grande incertitude, car il est difficile de prédire à quel moment la pêche rouvrira.
Malheureusement, les décisions antérieures sur la gestion des pêches consistant à réduire les prises d'une année à l'autre n'ont pas entraîné l'augmentation de la population de maquereau. Elles ont par contre provoqué la lente détérioration de la situation financière des collectivités de pêcheurs. Le rétablissement de la population de maquereau à des niveaux sains serait profitable pour les pêcheurs, qui verraient augmenter considérablement leur volume de prises par rapport aux volumes de la dernière décennie. Les pêcheurs et les transformateurs qui vivent du maquereau seraient plus nombreux, et les appâts, plus facilement accessibles.
En revanche, si la pêche rouvrait avant le rétablissement du stock, il y aurait, certes, un nombre de prises limité à court terme, mais cela risquerait de réduire encore plus la population de maquereau et de faire perdurer les difficultés financières qui affligent les collectivités de pêcheurs.
Dans l'intervalle, il est crucial de soutenir les personnes directement touchées, particulièrement les petits pêcheurs et les employés d'usine, pour leur permettre de joindre les deux bouts pendant les fermetures. Il faut également s'assurer que les collectivités côtières ne seront plus laissées pour compte et qu'elles seront prêtes à reprendre leurs activités lorsque le stock sera de nouveau en santé.
Je vais répéter les trois raisons pour lesquelles la fermeture de la pêche au maquereau devrait être maintenue à court terme jusqu'à ce que des signes clairs de rétablissement soient observés. Premièrement, les meilleures données scientifiques disponibles démontrent que le moratoire était la seule option qui restait pour restaurer la population de maquereau. Deuxièmement, des observations d'une abondance de maquereau dans certaines régions ne sont pas nécessairement le signe d'un rétablissement. Troisièmement, rebâtir le stock est la meilleure option à long terme pour les pêcheurs qui dépendent du maquereau. Ces pêcheurs doivent être soutenus tout au long du processus de rétablissement.
En termes simples, cet enjeu revient à une question de valeurs. Voulons-nous instaurer une aide économique à court terme au prix de la disparition permanente du stock et du maintien à long terme des difficultés financières, ou préférons-nous assurer la durabilité à long terme de ce secteur des pêches et l'avenir des collectivités de pêcheurs?
Merci beaucoup de votre temps. Je répondrai avec plaisir à vos questions.
Merci beaucoup de m'avoir invitée à comparaître aujourd'hui. Je vous parle sur le territoire Mi'kma'ki, et je représente Océans Nord, organisme de bienfaisance canadien qui soutient la conservation marine et les pêches durables en partenariat avec les communautés côtières et autochtones.
J'ai commencé à travailler sur le maquereau en 2014, à l'époque où le total des prises autorisées était 10 fois plus élevé que ce que recommandaient les avis scientifiques du MPO. Le stock s'était déjà gravement appauvri. Depuis, je participe aux travaux scientifiques sur le maquereau et aux efforts de gestion de cette population afin de favoriser le rétablissement du stock en collaboration avec le MPO, l'industrie et les groupes autochtones.
La population de maquereau de l'Atlantique connaît une forte diminution depuis plus d'une décennie. La biomasse du stock reproducteur, ou l'estimation de l'abondance du stock, est à son plus bas niveau jamais enregistré. De plus, bien que l'espérance de vie du maquereau peut atteindre 20 ans, nous voyons rarement des poissons âgés de plus de 5 ans. C'est une caractéristique courante de la surpêche. Pendant plusieurs années, la taille des prises est de plus en plus petite. Le nombre de poissons qui vivent assez longtemps pour se reproduire est de plus en plus faible.
Le rétablissement des pêches est désormais une obligation au titre de la Loi sur les pêches. L'inscription du maquereau parmi les espèces prioritaires a été approuvée par toutes les parties. Un plan de rétablissement a été publié en 2020, fruit de plusieurs années de collaboration et d'efforts sincères de l'industrie pour recommander et prendre des mesures visant à rétablir le stock. Malheureusement, un an après sa publication, l'objectif minimal du plan, en l'occurrence la mise en place d'une trajectoire de croissance positive du stock, n'avait toujours pas été atteint.
À Océans Nord, nous sommes tout à fait convaincus que la décision prise par la ministre en 2022 de fermer la pêche commerciale et la pêche de poisson-appât pour le maquereau de l'Atlantique était difficile, mais nécessaire.
Nous comprenons que la fermeture de 2022 a eu des conséquences financières immédiates pour l'industrie. Bien qu'elle cause une souffrance bien réelle à court terme, la fermeture pourrait rapporter des dividendes à long terme. Le rétablissement du stock comporte des avantages qui sont souvent écartés de l'analyse économique des réductions des quotas de pêche. En 2020, Océans Nord a publié une analyse coûts-avantages menée par la firme Gardner Pinfold Consulting sur les avantages économiques du rétablissement du stock de maquereau. L'analyse a révélé que la réduction des pêches pouvait engendrer des retombées économiques estimées à plus de 54 millions de dollars. Autrement dit, le rétablissement du stock à des niveaux plus sains se solderait par un rendement du capital investi de 12,9 %. Les stocks rétablis profitent à tout le monde et à l'écosystème.
Le fait qu'une bonne partie de l'industrie du homard compte sur le stock considérablement affaibli de poissons-appâts de maquereau fait l'objet de discussions entre l'industrie, le MPO, les ONG et le Marine Stewardship Council depuis au moins 2015. Une étude a estimé qu'il faudrait jusqu'à deux livres d'appâts pour capturer une livre de homard. Le problème n'est pas le maquereau en tant que tel, mais plutôt le volume important de poisson cru utilisé.
Heureusement, plusieurs entreprises et établissements de recherche travaillent depuis plusieurs années à la mise au point d'autres produits qui pourraient être utilisés comme appâts. Une étude a permis de découvrir un appât fait de poisson aussi efficace que les appâts traditionnels, mais doté d'une plus longue durée de vie utile.
Nous saluons le travail des chercheurs et des entreprises qui mettent à l'essai ces appâts qui comportent moins de poisson et les pêcheurs qui essaient ces produits. Nous devons à présent investir encore plus dans les essais.
Nous entendons souvent dire que la science ne tient pas compte du point de vue des pêcheurs. Pourtant, l'industrie se prête et contribue de façon importante aux évaluations examinées par les pairs effectuées par le MPO. En 2020, le MPO a aussi établi un groupe de travail sur le maquereau regroupant des membres de l'industrie et des scientifiques, dont le mandat est de combler les lacunes dans les besoins et les observations d'ordre scientifique. Je veux mentionner également que de nombreux collègues autochtones qui se trouvaient à la table sur le rétablissement croyaient fermement en la science et soutenaient les mesures de rétablissement.
Le MPO n'est pas le seul à signaler des déclins de cette ampleur. Les États-Unis, qui comptent également une population de maquereau, ont observé une trajectoire négative similaire. En 2020, ils ont adopté des mesures d'urgence visant à réduire radicalement les quotas après que leur plan de rétablissement s'est soldé par un échec comme celui du Canada. Il est important que les deux pays poursuivent leur collaboration pour rétablir le stock. Au Canada, des enquêtes sur la pêche récréative ont révélé là aussi une diminution de l'abondance et de la taille des poissons au fil du temps. Ces observations correspondent aux évaluations scientifiques.
La fermeture de la pêche au maquereau se fondait sur des données scientifiques solides, sur des observations des pêches et sur les lois et les politiques du MPO. Les efforts déployés dans le passé pour rétablir le stock au moyen de mesures de gestion et de quotas ont échoué. La fermeture de la pêche était nécessaire pour rétablir le stock afin d'assurer l'avenir de l'industrie et de l'écosystème.
Merci de votre temps.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je suis professeur et titulaire de la chaire de recherche du Canada en écologie halieutique à l'Université du Québec à Rimouski. En 2008, j'ai soutenu une thèse de doctorat sur l'écologie du stade larvaire du maquereau dans le sud du golfe du Saint-Laurent, avec une emphase particulière sur les facteurs environnementaux qui régulent la survie des larves et qui sont donc responsables de la reconstitution du stock adulte.
J'ai ensuite régulièrement travaillé sur cette espèce et participé aux évaluations du stock par Pêches et Océans Canada. Je considère donc que j'ai les connaissances nécessaires pour commenter l'écologie de l'espèce dans un contexte de gestion des pêches.
Contrairement à plusieurs stocks d'espèces fourragères au Canada, l'évaluation du stock de maquereau repose sur un relevé fiable de l'abondance des adultes, dérivée de l'abondance des œufs dans la zone de ponte du sud du golfe du Saint-Laurent. Puisque le maquereau peut changer ses migrations en fonction de la température, il est important de vérifier périodiquement si une proportion substantielle de la ponte se déroule ailleurs que dans la zone couverte par le relevé. Au cours des dernières années, le relevé a été ponctuellement étendu à plusieurs zones comme la côte ouest de Terre-Neuve ou le plateau néo-écossais, mais l'ampleur de la ponte qui est effectuée hors du golfe a toujours été considérée comme négligeable pour le calcul de l'abondance, qui est toujours considéré comme fiable.
L'état critique dans lequel se trouve le stock résulte de deux principales causes: une mortalité très élevée chez les adultes et un faible taux de survie des larves.
Concernant la mortalité chez les adultes, on estime que malgré la forte réduction des prises commerciales au cours des 20 dernières années, alors que le quota est passé de 75 000 tonnes à seulement 4 000 tonnes, la mortalité par la pêche demeurait tout de même trop forte pour favoriser la croissance du stock. En plus d'une pression de pêche élevée, la mortalité naturelle provoquée par les poissons prédateurs, par exemple le thon rouge, a augmenté dans le golfe du Saint-Laurent. Il y a aussi une indication que le stock dans le sud du golfe du Saint-Laurent souffre d'autres prédateurs, comme le phoque gris, qui est aujourd'hui 16 fois plus abondant que pendant les années 1960. La prédation a donc beaucoup augmenté depuis le début des années 2000.
Finalement, des études récentes ayant évalué l'origine des maquereaux capturés durant la pêche hivernale des États-Unis ont révélé qu'une proportion importante des poissons capturés aux États-Unis sont originaires du stock du golfe du Saint-Laurent. Donc, il s'agit d'une autre source de mortalité par la pêche qui est difficile à estimer présentement.
En plus de la forte mortalité qui affecte les adultes, le déclin de l'abondance du maquereau s'explique par une baisse du recrutement depuis les années 2010. Cette réduction de la force du recrutement a été reliée aux conditions environnementales devenues défavorables pour les larves. Lors des premières semaines de vie, la survie des larves dépend directement de leur succès à s'alimenter de leur proie principale: le zooplancton.
Avec le réchauffement rapide du sud du golfe du Saint-Laurent, il y a eu une altération de la période de développement des principales proies du maquereau, qui se développent maintenant plus tôt dans la saison, alors que la période de ponte du maquereau, elle, n'a pas changé. Il en est résulté un déphasage spatial et temporel entre l'émergence des larves et la production des proies, qui a provoqué l'échec du recrutement dans les dernières années. Le taux de rétablissement des stocks dépendra grandement du retour de conditions plus froides favorisant la survie larvaire et le recrutement. Cependant, les projections climatiques à court terme ne permettent malheureusement pas d'entrevoir un retour prochain à ce type de conditions favorables.
Voici maintenant quelques recommandations.
La première est de maintenir au plus bas niveau possible les activités de pêche jusqu'à l'observation de signes de rétablissement du stock adulte.
La deuxième est d'établir une stratégie pour mesurer plus précisément la mortalité par la pêche, incluant la pêche à l'appât dans les régions où il n'est pas obligatoire de déclarer les prises, ainsi que la pêche hivernale aux États-Unis.
La troisième est de travailler à établir un plan de gestion conjoint avec les États‑Unis vu la présence de maquereau du golfe du Saint-Laurent dans leur pêche hivernale.
La dernière est d'utiliser des appâts alternatifs basés sur des espèces hautement abondantes dans le golfe du Saint‑Laurent, comme le sébaste, jusqu'au rétablissement de la population de maquereau.
Merci, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président.
Trois témoins viennent de nous dire qu'ils arrivent essentiellement à la même conclusion, soit que les stocks de maquereaux sont grandement en péril sur la côte Est. Or, j'ai entendu des pêcheurs faire les mêmes observations que M. Small.
Ma première question s'adresse à M. Pardo.
Pouvez-vous expliquer brièvement le fossé entre les observations et les signalements des pêcheurs, d'une part, et, d'autre part, les renseignements scientifiques en raison desquels les trois témoins arrivent à la même conclusion, soit que la fermeture de la pêche représente la seule option pour rétablir le stock?
Monsieur Pardo, pouvez-vous fournir une courte réponse? J'ai une foule de questions.
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Oui. Merci de la question.
De nombreuses raisons expliquent cet écart. L'une d'entre elles est l'espace géographique: oui, on peut apercevoir plus de maquereaux dans certaines zones des eaux terre-neuviennes, mais ces observations ne tiennent pas compte de la situation ailleurs dans la région. Aussi, on nous a relaté des cas isolés dans l'Ouest de Terre-Neuve — dans la région de Gros Morne — où on ne trouve pas de maquereaux. La répartition du maquereau peut être inégale, et l'évaluation du stock est réellement la seule façon d'évaluer la population dans son ensemble.
La divergence s'explique aussi par l'« hyperstabilité ». C'est essentiellement ce qui est arrivé à la morue: plus l'abondance de la ressource diminue, plus les poissons se rassemblent en bancs. Ils se mettent donc à apparaître à certains endroits où on les voit plus aisément. Ils sont plus abondants dans cette zone précise, mais ce n'est pas une représentation exacte du stock entier.
Les changements climatiques jouent aussi un rôle. On sait que les poissons se déplacent plus au nord, alors il se pourrait qu'on observe plus de maquereaux dans la zone nordique et moins dans la zone méridionale.
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Oui, je peux fournir des commentaires à ce sujet.
Étant donné que la biomasse est appauvrie et que les données fournies par le MPO sur l'abondance sont fiables, nous savons que le maquereau est une des rares ressources pélagiques régies par des données robustes au Canada. Je tiens à le souligner.
La pression provenant des pêches doit être réduite. La pêche commerciale est bien gérée et bien contrôlée, contrairement à la pêche à l'appât, et ce, dans toutes les zones du Canada atlantique. Toutefois, les contraintes de pêche devraient s'appliquer à tous les types de pêche, y compris à la pêche récréative.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être des nôtres, c'est toujours instructif.
Monsieur Robert, vous avez dit tout à l'heure que vous récoltiez des données sur le stock de maquereau et que vous les étudiiez depuis 2010. Certaines de vos données proviennent probablement des pêcheurs québécois, qui sont contraints de les compiler.
Comment expliquez-vous, comme vous l'avez relevé dans vos recommandations, que seuls certains groupes de pêcheurs soient contraints de compiler ces données?
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Il est toujours bon d'avoir un plan de gestion qui tienne compte des changements climatiques.
Par contre, dans le cas du maquereau et d'autres espèces semblables, la variation des conditions d'une année à l'autre est très difficile à prédire.
Présentement, le climat tend à se réchauffer, mais il y aura quand même des années plus froides que d'autres. Ces années plus froides vont probablement favoriser un meilleur chevauchement temporel entre les larves et leurs proies. Il faut être patient et, surtout, laisser des reproducteurs dans le milieu. Ainsi, lorsque ces conditions seront réunies, la ponte sera suffisante pour favoriser une importante cohorte.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins de comparaître devant nous aujourd'hui.
Je veux exprimer ma gratitude de participer à cette réunion pendant laquelle nous pouvons discuter ouvertement et écouter ceux qui s'inquiètent de l'utilisation commerciale du maquereau et de ses répercussions sur l'environnement. Nous pouvons aussi en apprendre sur les préoccupations des pêcheurs commerciaux et sur la viabilité à long terme de leur industrie. Je trouve qu'il importe de ne pas se considérer comme des adversaires et de nous en tenir plutôt aux faits et aux façons de collaborer pour accroître la durabilité de nos pêches et de nos océans.
Madame Schleit, j'ai aimé vos commentaires sur les retombées économiques du rétablissement du maquereau et sur les nombreux avantages que nous retirerons tous de ces efforts, y compris sur le plan économique. Vous avez fourni certains chiffres et le taux de rendement de cet investissement. Ce sont des éléments cruciaux que nous devons prendre en considération.
Madame Schleit, pouvez-vous nous fournir un peu plus de détails sur les groupes de travail que vous avez mentionnés, qui incluent l'industrie et les groupes autochtones? À quelle fréquence ces réunions ont-elles eu lieu au fil des ans?
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Je crois que c'est en 2015 que le MPO a formé un groupe de travail sur le plan de rétablissement. Il me semble que ce groupe s'est réuni au moins quatre fois par année. Ajoutons à cela les réunions du comité consultatif, qui ont habituellement lieu une fois par année. Puis, il y a deux évaluations de stocks par année.
Toutes ces réunions réunissent des scientifiques du MPO, de nombreux membres de l'industrie, quelques membres d'ONG et quelques membres des communautés autochtones. Je sais que le MPO a aussi tenu des réunions spéciales avec les communautés autochtones en vue des réunions du comité consultatif afin de mieux écouter et mettre en commun les perspectives.
Ces réunions se déroulaient bien. Les participants étaient nombreux. Comme je l'ai dit, au début, nous nous réunissions en personne quelques fois par année, puis nous sommes passés à des réunions virtuelles. Tous les participants déployaient des efforts de bonne foi pour trouver des solutions, pour déterminer par exemple si on devrait changer la taille des filets ou certaines des saisons.
De nombreuses solutions proposées faisaient ensuite l'objet d'études approfondies par les scientifiques, par exemple. Malheureusement, le constat — s'appuyant sur les avis scientifiques et les analyses scientifiques poussées — était toujours le même: une réduction du total des prises autorisées constituait la solution pour rétablir les stocks.
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J'aimerais faire quelques observations à l'intention des nouveaux témoins.
Veuillez s'il vous plaît attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Ceux qui participent à la réunion avec vidéoconférence doivent cliquer sur l'icône du microphone pour l'activer et le mettre en sourdine lorsqu'ils n'ont pas la parole.
Les participants à la réunion par Zoom ont accès à l'interprétation. Vous avez le choix, au bas de votre écran, entre le son du parquet, l'anglais et le français. Ceux qui se trouvent dans la salle peuvent utiliser l'oreillette et choisir le canal souhaité.
Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence.
J'aimerais maintenant vous présenter les témoins. Nous recevons le président de FFAW — Fish, Food and Allied Workers — Unifor, Keith Sullivan. Il se joint à nous par Zoom. Nous recevons également les représentants du Regroupement des pêcheurs pélagiques professionnels du sud de la Gaspésie: le président, Ghislain Collin, et le pêcheur professionnel Lauréat Lelièvre. Enfin, nous recevons M. Jordan MacDougall, qui est pêcheur professionnel pour l'Inverness South Fishermen’s Asssociation.
Nous vous remercions de témoigner devant nous aujourd'hui. Vous disposerez chacun d'au plus cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire.
J'inviterais M. Sullivan à commencer.
Allez‑y, monsieur.
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Merci. J'espère que vous m'entendez bien.
Au nom de nos 13 000 membres à Terre-Neuve-et-Labrador, je vous remercie de nous donner l'occasion de témoigner devant vous aujourd'hui sur ce sujet important.
Fish, Food and Allied Workers Union représente les pêcheurs côtiers de notre province. Notre syndicat est composé de 3 000 propriétaires d'entreprises et environ 7 000 membres d'équipage. Nous représentons aussi les travailleurs du domaine de la transformation du poisson.
Le maquereau est la principale espèce pélagique pêchée à Terre-Neuve-et-Labrador. Il s'agit d'une importante espèce commerciale associée à de grands débarquements. Comme les stocks traversent les frontières vers les États-Unis, FFAW tente de se faire entendre depuis plus de cinq ans, avec d'autres membres de l'industrie, au sujet du changement des habitudes migratoires, de la faible couverture générale de l'enquête scientifique et des changements des habitudes de pêche afin de considérer la science de manière plus substantielle.
Le 30 mars 2022, le ministère des Pêches et des Océans a annoncé un moratoire sur la pêche commerciale du maquereau à Terre-Neuve-et-Labrador, même si les pêcheurs voyaient d'importants signes de croissance de ces stocks. Ils ne s'attendaient pas à une fermeture, surtout sans un engagement relatif à l'augmentation des relevés destinés aux évaluations de stock. Depuis des années, les pêcheurs font valoir que le Secteur des sciences du ministère sous-estime grandement la biomasse du maquereau et proposent des projets scientifiques pour démontrer ce qu'ils ont observé en mer, mais aucune des recommandations en vue d'un travail de collaboration pour combler cette lacune sur le plan scientifique n'a été mise en œuvre.
Depuis des années, la mauvaise gestion des stocks représente un problème pour les pêcheurs de la province. Le Secteur des sciences du ministère des Pêches et des Océans n'a pas suffisamment de données sur la pêche récréative, qui demeure ouverte tandis que la pêche commerciale est fermée ni sur l'incidence du retrait du maquereau du contingent nordique — ou du maquereau canadien — des eaux américaines.
Bien qu'aux États-Unis, le nombre de prises ait été réduit au cours de la dernière année, la pêche commerciale y est toujours pratiquée cette année, tout comme la pêche récréative du maquereau, alors qu'ici, des gens qui dépendent de cette ressource ont perdu leur travail.
FFAW a demandé à répétition au Secteur des sciences du ministère de revoir son approche relative au maquereau afin de bien comprendre la taille et la migration des stocks. Malheureusement, l'expérience et les connaissances de pêcheurs sont ignorées depuis plus de 10 ans, ce qui a entraîné des pertes financières importantes pour notre industrie.
La fermeture de la pêche au maquereau a entraîné une déception générale, puisque les pêcheurs avaient réussi à prendre plus de prises qu'au cours des années précédentes. Depuis 2016, les intervenants ont fait valoir que la science sous-estimait la biomasse et que les observations judicieuses des pêcheurs continuaient d'être ignorées dans le cadre de la prise de décisions. Ces observations montrent que le maquereau se reproduit dans des zones plus à l'est que ce qu'indiquent les relevés actuels, qui sont faits dans le sud du golfe.
Il est essentiel d'accroître nos connaissances sur les habitudes de reproduction du maquereau de l'Atlantique. L'approche actuelle du ministère des Pêches et des Océans pour évaluer la taille des stocks de maquereau vise les relevés dans le sud du golfe, loin des autres zones où les pêcheurs observent des signes de croissance des populations de maquereau.
Les pêcheurs de maquereau ont constaté une abondance du poisson, malgré le déclin observé dans le cadre de l'évaluation des stocks. Nous avons soulevé à maintes reprises des questions au sujet de sites de reproduction supplémentaires du maquereau à l'extérieur du sud du golfe. Non seulement les pêcheurs ont‑ils vu une abondance de maquereaux pendant la saison de la pêche, mais ceux du sud de Terre-Neuve-et-Labrador en ont aussi vu sur le banc de Saint-Pierre.
FFAW a proposé des méthodes scientifiques qui auraient recours à des échantillons et des données de la province, notamment à une collecte dans toutes les régions, sur une période prolongée. Le pêcheur d'expérience Keith Bath a pêché des maquereaux adultes dans la zone 3Ps en juin et en juillet 2021. M. Bath a fait valoir qu'il y avait de plus en plus de maquereaux adultes dans la région du banc en juillet, tandis qu'au cours des années précédentes, il les attrapait dans ses filets en mai.
Enfin, les chasseurs de partout dans la province, que ce soit sur la côte nord-est ou sud-ouest de la baie Fortune, ont dit avoir trouvé de très petits maquereaux dans l'estomac des guillemots.
Ainsi rassemblées, ces observations donnent à penser que le maquereau se trouve un peu partout dans les eaux de Terre-Neuve-et-Labrador au cours de son cycle de vie.
Lors de la rencontre consultative de l'année dernière, les représentants de FFAW ont présenté de nombreuses preuves de la présence d'importants stocks de maquereau de l'Atlantique et ont demandé au Secteur des sciences du ministère des Pêches et des Océans de revoir son approche dans ce domaine, dans le but de comprendre la taille et les habitudes de migration des stocks. Le ministère nous a avisés de la fermeture de la pêche en 2022.
Notre intérêt et notre engagement à l'égard de la recherche sur le maquereau vont au‑delà d'une simple collecte d'échantillons. FFAW a présenté une demande de financement pour procéder à la recherche sur la microchimie des otolithes en collaboration avec le Secteur des sciences du ministère et les chercheurs universitaires, en vue de déterminer leur maturité. Nous avons aussi réalisé nos propres études cette année en collaboration avec des pêcheurs membres de FFAW, qui paient de leur poche pour faire ce travail, parce que le ministère refuse de le commander.
Nous recommandons au ministère des Pêches et des Océans d'investir immédiatement pour élargir son champ d'études sur le maquereau et de consulter les pêcheurs dans le cadre de ce travail.
Je suis un pêcheur commercial membre de l'Inverness South Fishermen's Association. Je pêche le homard, le thon, le maquereau et le crabe au large de la côte ouest du Cap-Breton.
Il y a environ 15 ans, une grande quantité de poisson passait par ici et les pêcheurs pouvaient vivre partiellement de cette ressource. Aujourd'hui, les poissons ne sont plus là. La biomasse est petite. Les pêcheurs ne peuvent plus attraper de gros poissons, même pour la pêche au thon au cours de l'été et de l'automne, alors qu'ils pouvaient le faire il y a 15 ans.
Nous n'étions pas surpris de voir ce qui s'est passé avec le maquereau, mais nous ne savons pas si ce grand banc de poissons s'est déplacé vers le nord — s'il y a un banc encore plus grand — ou si c'est en raison de la température de l'eau, qui se réchauffe ici.
Nous avons un grand banc de petits maquereaux; l'avenir est donc prometteur.
J'aimerais qu'il y ait plus d'études scientifiques sur le maquereau. Le problème avec une fermeture totale de la pêche comme celle que nous connaissons, c'est la réouverture: que va‑t‑il se passer et comment les ressources seront-elles réparties?
Ce sont nos principales préoccupations.
Merci.
:
Monsieur le président, membres du Comité, bonjour.
Le Regroupement des pêcheurs pélagiques professionnels du Sud de la Gaspésie représente 23 membres qui pêchent depuis longtemps et qui ont été durement touchés par la fermeture de la pêche au printemps, survenue à moins de 48 heures d'avis. Cinq d'entre eux ont été encore plus touchés en raison de leur âge.
Les membres que je représente pêchent le maquereau à la main ou avec des systèmes électriques sur des lignes qui peuvent porter un maximum de 200 hameçons. C'est donc une pêche très sélective, durable et respectueuse de l'environnement et de la faune marine.
Le journal de bord et l'appel d'entrée sont imposés par le ministère des Pêches et des Océans exclusivement aux pêcheurs du Québec et aux senneurs. Malgré nos représentations au Comité consultatif du maquereau de l'Atlantique, à Halifax, où nous avons demandé d'imposer les mêmes contrôles rapides et simples aux autres provinces pour fournir des données précieuses et pertinentes, nos demandes pour préserver la ressource sont restées vaines. Nous n'avons eu aucune nouvelle.
Étant donné que nous avons montré patte blanche pendant des années et que nous avons tout fait en notre pouvoir pour préserver la ressource, nous demandons aujourd'hui une compensation financière d'urgence pour les frais encourus avant la suspension de la pêche et pour la perte de revenus qui découle de notre saison de pêche perdue. De plus, nous voulons être partie aux discussions et aux réunions concernant le maquereau. Nous demandons aussi de faciliter l'accès à d'autres espèces abondantes et lucratives dans le but de surmonter cette crise sans demander de l'aide et des fonds publics pour les prochaines années.
Par ailleurs, nous demandons des pêches sentinelles et scientifiques pour les prochaines années, ainsi que des pêches exploratoires visant d'autres espèces émergentes, afin de diversifier le portefeuille de permis, contribuant ainsi à la rentabilité des entreprises tout en diminuant la pression exercée sur les espèces dont le stock doit être rétabli.
Finalement, nous demandons deux quotas distincts lors du rétablissement de l'espèce, un pour la pêche à l'hameçon et l'autre pour la pêche à la drague dans l'Atlantique.
En conclusion, le Regroupement ne conteste pas la science. Nous croyons au travail des scientifiques et nous voulons le rétablissement de la ressource grâce à des pêches sélectives et durables. Le Regroupement des pêcheurs pélagiques professionnels du Sud de la Gaspésie mérite d'être soutenu par le gouvernement.
Merci.
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Monsieur le président, membres du Comité, bonjour.
Comme je n'ai qu'un peu plus de deux minutes pour vous dresser le portrait de huit mois de frustrations, j'irai droit au but.
Le 30 mars 2022 est une journée qui restera gravée dans ma mémoire pour le reste de ma vie, et pas pour les bonnes raisons. À moins de 48 heures d'avis, et sous prétexte qu'une action urgente était nécessaire pour régénérer les stocks, la pêche au maquereau et la pêche au hareng du printemps ont été suspendues en Gaspésie, chez moi. En un claquement de doigts, une vingtaine de camarades pêcheurs et moi nous sommes retrouvés sans revenu et sans activité commerciale. Une telle décision fait mal. Ce sont des mois de travail et de préparation, ainsi que plusieurs dizaines de milliers de dollars en investissement dans nos bateaux, qui sont devenus inutiles.
C'est ici que le volet le plus sombre de l'histoire commence, parce que ce qui nous a vraiment affectés, c'est d'apprendre qu'aucun programme d'indemnisation n'avait été préparé pour nous. Nous étions laissés à nous-mêmes.
Qu'on me comprenne bien: je ne remets pas en question la décision de suspendre la pêche pour régénérer les stocks, et encore moins l'expertise des scientifiques. Ils font leur travail et je le respecte. Ce que je remets en question, c'est la façon dont le gouvernement fédéral s'y est pris pour nous l'annoncer, alors que les bateaux étaient déjà à l'eau.
Nous sommes un pays du G7 qui est censé offrir un filet social digne de ce nom et ne laisser personne pour compte. Pourquoi nous faut-il être devant vous, à Ottawa, huit mois après la suspension de la pêche pour vous expliquer à quel point cette décision soudaine nous a scié les jambes? Pourquoi n'y avait-il rien de prêt pour nous épauler pendant cette suspension?
Nous sommes maintenant en novembre et nous n'avons toujours aucune indication, aucun programme d'aide, rien du tout. Ce que nous demandons, au-delà des compensations financières, ce sont des pêches prévisibles. Laisser toute une communauté dans l'incertitude pendant plus de huit mois, c'est inhumain.
Je compte sur vous, membres du Comité, pour porter ce message dans vos caucus.
Merci de votre écoute.
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Merci, monsieur le président.
Messieurs Collin et Lelièvre, je vous salue de mon bureau. Je sais que vous êtes à Ottawa, présentement, mais nous avons en commun la Baie des Chaleurs.
Vous parlez à un fils de pêcheur. Mon père a été pêcheur toute sa vie. Il a pêché pratiquement toutes les espèces: homard, hareng, maquereau, crabe. Je connais très bien les préoccupations et les défis que vous vivez présentement.
Ma première question pour vous deux est la suivante: est-ce que vous êtes deux pêcheurs dépendant strictement de la pêche au hareng et au maquereau, ou est-ce que vous faites d'autres sortes de pêches?
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Je vous comprends très bien.
Je veux mettre quelque chose au clair, en mon nom personnel, pas celui des autres collègues de mon propre parti. J'ai rencontré plusieurs groupes, dont des syndicats. J'ai aussi rencontré des groupes de pêcheurs de ma région qui ont également été touchés par cette mesure. Depuis la fermeture de la pêche, je demande une forme de compensation, d'abord pour les pêcheurs qui dépendent strictement de cette pêche. Comme vous l'avez dit, ce sont eux qui sont touchés, ce sont eux que nous avons besoin d'aider. Moi aussi, je trouve un peu dommage qu'après plusieurs mois, il n'y ait pas encore de soutien approprié pour ces pêcheurs.
Vous avez parlé tantôt de pêche scientifique. De quel genre de pêche expérimentale s'agit-il? Je suppose que ce serait pour aider à recueillir un peu plus de données relatives au maquereau et au hareng et à assurer un revenu aux pêcheurs touchés. Est-ce bien cela?
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Merci, monsieur le président.
Messieurs Collin et Lelièvre, j'ai été très bouleversée par vos témoignages, qui m'ont fait penser à mon histoire de pêche au capelan à la fascine, assujettie à un engrenage de décisions universelles qui touchaient les pêcheurs de tous types. Il a fallu sept rencontres pour que Pêches et Océans Canada comprenne que la pêche à la fascine est distincte de ce qui est pratiqué ailleurs.
Je me rends compte que votre type de pêche est très particulier, car c'est une pêche à l'appât. Ce n'est donc pas une pêche massive et agressive pour la ressource, mais bien une pêche très écoresponsable. C'est ce que je comprends.
Nous souhaitons entendre ce que vous avez à dire sur cette pêche si particulière. De plus, comment expliquez-vous que c'est essentiellement vous qui fournissez des données au gouvernement?
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C'est vraiment difficile à dire.
Je ne pouvais pas deviner que la pêche fermerait à 48 heures d'avis. Avant de faire des démarches, j'ai parlé à la personne responsable des pêcheurs pélagiques au regroupement des pêcheurs et des homardiers. Il m'a dit de ne pas me casser la tête et qu'il n'y aurait pas de fermeture de la pêche au maquereau, puisque les taux admissibles de captures avaient été établis pour deux ans. Il ne me garantissait pas que la pêche au hareng resterait ouverte, mais il m'a dit qu'il n'était pas question de fermer celle au maquereau.
J'ai donc dit au jeune qui voulait avoir mon permis de pêche au crabe qu'il pourrait l'avoir, et il a entamé ses démarches. En janvier ou en février, il m'a demandé de signer l'acte de vente. Comme objectif, il avait inscrit 80 000 livres de maquereau pour la saison.
Quand la pêche a été annulée, je n'avais plus de bateau ni de permis de pêche au crabe. Je n'avais plus rien. Quant à lui, il s'est retrouvé avec 80 000 livres de maquereau en moins.
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Les membres du Regroupement des pêcheurs pélagiques professionnels du Sud de la Gaspésie ont toujours travaillé avec le ministère et lui ont toujours fourni des données.
Dans le meilleur des mondes, nous aimerions qu'on ait un peu de considération à notre égard. Nous aimerions aussi qu'on aide financièrement les pêcheurs pour compenser leurs pertes.
Nous voulons aussi pouvoir pratiquer des activités de pêche scientifique, de pêche exploratoire et de pêches sentinelles, non seulement pour redonner un revenu aux pêcheurs, mais aussi pour les garder dans le système.
En effet, si la pêche au maquereau recommence dans cinq ans, certains pêcheurs ne seront peut-être plus là, ce qui nous privera de leur expertise. D'autres n'auront peut-être plus d'équipage. C'est un métier différent de la pêche au homard et de la pêche au crabe.
De cette façon, nous allons pouvoir garder les entreprises. Les aides-pêcheurs vont continuer à travailler avec les capitaines, au lieu de quitter le navire qui coule.
Dans le Saint-Laurent, il se pratique aussi de la pêche scientifique d'autres espèces émergentes. Les membres du Regroupement pourraient pêcher de belles espèces émergentes de poisson et de très bonne qualité, ce qui serait lucratif et permettrait, pendant quelques années de réduire la pression sur les stocks de maquereau.
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Merci, monsieur le président.
Merci aux témoins d'être ici.
[Français]
Bien sûr, je remercie aussi les pêcheurs de leur présence et d'avoir pris le temps de nous parler de leur expérience.
C'est très important et je les en remercie.
[Traduction]
Ma première question s'adresse à M. Sullivan.
Dans la plus récente édition d'automne de votre revue de la FFAW, il y avait un article rédigé par Mme Erin Carruthers. Je m'excuse si je ne prononce pas correctement son nom. Vous avez mentionné l'importance d'élargir la science sur le maquereau. Je voudrais citer quelque chose qu'elle a dit. Je crois que c'est une femme, et je m'en excuse si ce n'est pas le cas. Elle a dit ceci:
[...] un engagement à long terme pour documenter l'abondance, la distribution, l'étendue, le moment et l'âge du maquereau dans les eaux de Terre-Neuve-et-Labrador est nécessaire. Tant que nous n'aurons pas intégré davantage d'observations et de données de Terre-Neuve-et-Labrador dans l'évaluation du stock de maquereau, je ne vois pas comment nous pourrons concilier ces évaluations très différentes de la santé des stocks de maquereau.
Est‑ce également votre position? Pouvez-vous nous en dire un peu sur la façon dont le MPO peut aider les pêcheurs à participer aux recherches nécessaires?
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Mme Erin Carruthers est la scientifique de la FFAW qui travaille en très étroite collaboration avec les pêcheurs. Je pense que la citation est très exacte. Je ne sais pas si j'aurais pu trouver une meilleure façon de le dire moi-même, donc je pense que c'est très clair et bien dit.
Je pense que les données scientifiques sont incomplètes, mais pas nécessairement erronées. Je tiens à le dire par respect pour les scientifiques qui font ce travail. Je ne veux pas être vraiment critique envers leur travail. Nous avons simplement besoin de plus de données scientifiques.
C'est comme si vous faisiez un relevé des caribous des bois dans un rayon de cinq milles autour du Centre Eaton à Dundas Square. Vous faites le travail, mais vous ne trouvez pas de caribou. Il n'y a rien qui cloche avec les méthodes; nous devons simplement chercher ailleurs si nous voulons recenser la population de caribous. Je pense que c'est un peu le cas. Je simplifie à l'extrême, bien entendu, mais j'essaie de souligner que nous ne cherchons pas à savoir où se trouvent réellement les poissons.
Je pense que nous devons vraiment aux personnes qui dépendent de cette pêche de mieux comprendre notre ressource et notre écosystème afin d'élargir notre champ d'action, plus particulièrement lorsque nous voyons la température de l'eau changer et que les changements climatiques sont documentés. Il y a toutes sortes de raisons, mais aucune n'est meilleure que la grande abondance de maquereaux que les pêcheurs ont vue et, à bien des égards, documentée.
Nous présenterons davantage de données au MPO lorsque nous pourrons compiler tous les renseignements. Nous parlerons aux pêcheurs et examinerons les méthodes qu'ils peuvent utiliser, y compris les relevés acoustiques, ce qui peut être fait maintenant et qui, je crois, est fait dans d'autres pays dans le monde.
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Il y a deux préoccupations et irritants réels.
C'est un stock transfrontalier. Les pêcheurs pêchent le même stock de maquereau aux États-Unis et au Canada. Le Canada pêche depuis toujours le maquereau et dépend de ce stock beaucoup plus, je dirais. Une plus grande partie de ce stock se trouve dans la région, mais aujourd'hui, en raison de la gestion canadienne, les pêcheurs en capturent davantage, je pense, simplement dans une perspective à long terme. C'est problématique, et si nous croyons vraiment que le stock est en si grande difficulté, nous devons évidemment travailler avec les États-Unis pour mettre fin à leur pêche, à mon avis. C'est décevant d'un point de vue canadien.
Nous venons de fermer la pêche, comme je l'ai dit. Nous avons mis des gens au chômage, des gens qui dépendaient de ce maquereau dans de nombreuses régions de Terre-Neuve‑et‑Labrador. C'est ce qui s'est passé. De toute évidence, les homologues que nous avons entendus aujourd'hui n'ont pas la possibilité de pêcher, mais les gens peuvent pêcher à des fins récréatives. Je comprends que c'est important, mais le fait de faire passer les besoins récréatifs avant les gens qui dépendent de cette pêche pour leur subsistance n'est pas la bonne liste de priorités pour donner la ressource aux gens. Il faut revoir cela.
À Terre-Neuve‑et‑Labrador, les pêcheurs recueillent des données scientifiques, un peu comme ceux du Québec, à l'aide de registres. Chaque maquereau qui arrive est documenté et entièrement pesé et contribue à la science. Les personnes qui ont le privilège de pratiquer la pêche récréative ne sont pas tenues de le faire, ce qui est également un problème.
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Merci, monsieur le président.
Merci, chers témoins, de votre présence.
Monsieur Sullivan, il y a une étude scientifique ou un document sur le site Web du MPO qui fait état que le maquereau fraie entre 9 et 12 degrés. Plus tôt aujourd'hui, nous avons entendu le témoignage de l'un des scientifiques du MPO qui nous a expliqué qu'ils effectuent la bioscience de la masse de frai dans des eaux à 8, 6, voire 14 degrés, en dehors de la période de biomasse de frai, et tout cela se fait au même endroit dans le golfe. Je me demande si vous pourriez vous prononcer sur la question de mener des travaux scientifiques lorsque la biomasse du stock reproducteur n'est pas dans une eau à la température idéale pour le frai.
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Oui, c'est tout à fait une préoccupation, et nous l'avons vu dans le passé lorsqu'ils sont allés faire ce recensement. Comme nous le savons tous, ce n'est pas la date sur le calendrier qui indique au maquereau quand frayer; ce sont les conditions environnementales, et elles peuvent changer.
Je comprends que c'est difficile à gérer, mais des inquiétudes ont été exprimées quant au fait qu'ils ne surveillent pas le moment où le maquereau est le plus susceptible de frayer, et ce point a été souligné. C'est un problème, à mon avis, une lacune dans la science que nous devrions chercher à expliquer, et nous devrions faire plus pour nous assurer que cette situation ne se produise pas.
Je pense, comme je l'ai signalé plus tôt, que nous devons vraiment examiner là où un plus grand nombre de ces maquereaux se reproduisent pour avoir une idée complète de la situation, ce qui, je pense, finirait par expliquer l'abondance massive de maquereaux que nous observons au large de Terre-Neuve‑et‑Labrador également. Je pense donc qu'il y a une combinaison de mesures à prendre pour améliorer la science.
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Eh bien, je ne suis pas sûr. Nous avons fait de nombreuses suggestions, et jusqu'à présent, je ne pense pas qu'on nous ait beaucoup écoutés. Je pense qu'il est probablement important de travailler avec les pêcheurs dans les régions pour obtenir plus de renseignements sur la composition du stock de maquereau.
Le MPO a lancé un appel pour obtenir des échantillons cette année, et je pense que le ministère a probablement été surpris par le nombre d'échantillons qu'il a obtenus — ils étaient très faciles à attraper, évidemment —, et il a tout simplement manqué d'espace de congélation pour recueillir ces échantillons.
Je ne sais pas si le ministère est prêt à faire cela. Il va falloir qu'il mette en place, à tout le moins, une initiative plus solide, plus fiable et plus organisée et qu'il investisse dans ce projet plutôt que de dépendre simplement de la bonne volonté des gens pour recueillir des échantillons. Il faut investir et travailler avec les pêcheurs de toutes les régions pour renforcer ces données scientifiques.
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J'ai une autre question concernant les États-Unis.
Les États-Unis continuent de pêcher le maquereau à des fins commerciales, et je vous le dis, de Peggy's Cove à Prospect, dans ma circonscription, où se trouvent les pêcheurs de maquereau — de gros maquereaux —, ils en trouvent beaucoup, mais ils ne sont pas autorisés à les pêcher en ce moment, car ce sont des pêcheurs de homard. Les États-Unis continuent d'en pêcher, et ils fixent leur total des prises admissibles, TPA, en émettant une hypothèse sur le TPA du Canada. Si le Canada met fin à la pêche, comme il l'a fait cette année, pensez-vous que les États-Unis prendront plus de maquereaux l'an prochain et fixeront un TPA plus élevé?
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Merci, monsieur Hardie. Voilà qui met fin à la réunion avec notre deuxième groupe de témoins pour aujourd'hui.
Je tiens à remercier sincèrement, bien sûr, monsieur Lelièvre, monsieur Collin et monsieur MacDougall. Par ailleurs, M. Sullivan, bien sûr, est venu si souvent ces derniers temps qu'il pourrait probablement avoir sa propre carte d'accès pour entrer dans la salle. Merci à vous quatre d'avoir transmis vos connaissances aux membres du Comité aujourd'hui. Je suis certain que vos témoignages seront utiles à la rédaction d'un rapport sur cette question très importante.
Pour la gouverne des membres du Comité, j'aimerais leur rappeler qu'il n'y aura pas de réunion du Comité la semaine prochaine. C'est une semaine de relâche, et si vous vous présentez, vous vous sentirez seul.
Lorsque nous nous réunirons à nouveau le mardi 15 novembre, nous terminerons l'étude sur la fermeture de la pêche au maquereau.
Encore une fois, profitez de votre semaine de relâche, et nous vous retrouverons tous ici le 15.
De plus, essayer d'arriver à l'heure aux réunions, car les retards empiètent sur notre temps. Si nous commençons en retard, nous avons toujours une heure limite pour conclure la séance, si bien que nous ne pouvons pas entendre autant de questions que nous le voudrions si nous ne commençons pas la réunion du Comité à l'heure.
Encore une fois, profitez de votre semaine. La séance est levée.