Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Bienvenue à la 80e réunion du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Le Comité se réunit aujourd'hui pour étudier la question de privilège concernant le député de Wellington—Halton Hills et d'autres députés.
J'aimerais rappeler à tous les députés et aux témoins une consigne au sujet des écouteurs de l'interprétation. N'oubliez pas de maintenir les oreillettes loin de votre microphone afin de ne pas provoquer un choc acoustique qui pourrait blesser les oreilles des interprètes. Parfois, lorsque nous intervenons, nous oublions ces choses, alors je vous prie d'y faire attention.
Tous les commentaires seront adressés à la présidence. Je demanderais aux membres du Comité et à nos invités de regarder vos interlocuteurs pendant les échanges, parce qu'ils pourraient vous faire signe indiquant qu'ils désirent reprendre la parole. De cette façon, je n'aurai pas besoin de vous interrompre, ce qui maximisera le temps dont nous disposons.
Nous accueillons aujourd'hui le très honorable David Johnston, rapporteur spécial indépendant sur l'ingérence étrangère. Pour ce qui est des conflits d'intérêts, il a été président de l'Université de Waterloo lorsque j'y étudiais en vue d'obtenir mon diplôme. Nous nous connaissons donc bien, car nous venons tous deux de la région de Waterloo.
Monsieur Johnston, vous avez 10 minutes pour faire votre déclaration préliminaire.
Mais auparavant, j'ai entendu dire que des votes pourraient avoir lieu aujourd'hui. J'aimerais donc que nous nous entendions sur le fait que si nous sommes appelés au vote pendant une déclaration préliminaire ou pendant la première série de questions, nous utiliserons l'application de vote et nous continuerons à travailler. Êtes-vous d'accord? Je vais maintenant vous donner quelques minutes pour préparer vos photos, et quand vous serez tous prêts, nous reprendrons. Cela nous permettra de maximiser le temps que nous passerons ensemble.
Comme cette réunion dure trois heures, je vais modifier la durée des tours de questions. Nous allons commencer par des tours de 10 minutes au lieu de six, puis nous poursuivrons avec les interventions normales de cinq minutes, cinq, deux et demie, deux et demie, cinq et cinq. Nous ferons une courte pause au milieu de la réunion pour reprendre notre souffle, s'il le faut.
Sur ce, monsieur Johnston, vous avez la parole.
[Français]
Soyez le bienvenu au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
Merci, madame la présidente, et merci aux membres du Comité de m'accueillir aujourd'hui pour parler de ce grave problème et du travail qui m'a été confié.
Le 15 mars dernier, le gouvernement m'a nommé rapporteur spécial indépendant sur l'ingérence étrangère. J'avais pour mandat d'évaluer l'ampleur de l'ingérence étrangère et de formuler des recommandations sur les façons de mieux protéger notre démocratie.
Mon premier rapport a révélé que des gouvernements étrangers, notamment la République populaire de Chine, travaillent de façon hostile et clandestine pour miner notre démocratie. J'en suis arrivé à cette conclusion après avoir mené un examen intensif du renseignement très secret et après avoir interviewé de hauts responsables du renseignement, de la sécurité et des élus.
Les méthodes d'ingérence étrangère sont de plus en plus complexes et retorses. J'ai relevé des lacunes importantes dans la capacité qu'a le gouvernement de détecter, de dissuader et de combattre cette menace.
Nous devons corriger cela de toute urgence.
[Français]
C'est pourquoi la prochaine phase de mon travail, qui sera un processus public, portera sur la meilleure façon de lutter contre l'ingérence étrangère.
À partir du mois prochain, j'organiserai des audiences publiques au cours desquelles les Canadiens pourront entendre des fonctionnaires du gouvernement, des experts et des agents responsables de la sécurité et du renseignement, et, surtout, des membres des communautés de diaspora qui sont les plus touchées par les efforts hostiles de gouvernements étrangers.
Pour ce travail, je serai épaulé par trois conseillers spécialisés en sécurité nationale, en renseignement, en droit et en questions relatives aux communautés de diasporas.
Ensemble, nous élaborerons des recommandations sur les changements urgents qui sont nécessaires pour protéger les institutions démocratiques canadiennes et, surtout, la confiance des Canadiens en ces institutions.
(1010)
[Traduction]
Avant de conclure, je pense qu'il est important que je reconnaisse la motion adoptée la semaine dernière à la Chambre des communes. J'ai un profond respect pour la Chambre des communes et pour son droit d'exprimer une opinion sur mon travail.
Certains se sont opposés avec force à ma décision de ne pas lancer une enquête publique. Les gens ont aussi fortement douté de mon intégrité et de mon indépendance. Ces allégations sont fausses, et le fait de les répéter ne les rendra pas véridiques.
La question de l'ingérence étrangère mérite un débat sérieux et vigoureux. Je sais que bien des gens s'opposeront à mes recommandations, mais je ne me laisserai pas décourager et je terminerai mon travail.
Je rappelle respectueusement au Comité et à tous les Canadiens que je ne demande pas simplement que l'on me croie sur parole. Les experts et les parlementaires qui détiennent la cote de sécurité nécessaire pourront examiner non seulement mon travail, mais aussi les renseignements détaillés sur lesquels il est fondé.
Si le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, l'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement et les dirigeants de l'opposition ne sont pas d'accord avec mes conclusions, je leur ai demandé de le dire publiquement, ce qu'ils sont tout à fait autorisés à faire.
[Français]
En conclusion, je voudrais rappeler aux Canadiens et aux membres de ce comité que mon mandat n'est qu'une partie de l'ensemble des efforts et des initiatives visant à détecter, prévenir et combattre l'ingérence étrangère.
[Traduction]
Par conséquent, j'encourage les autres, notamment votre comité, à apporter leur contribution afin de bien équiper le Canada pour qu'il puisse efficacement détecter, dissuader et combattre l'ingérence étrangère.
Merci, monsieur Johnston, pour cette déclaration préliminaire.
J'entends la sonnerie. L'écran est allumé pour que vous puissiez tous voir ce qui se passe. Je pense que nous pourrons terminer les deux premiers tours, alors je vais commencer par vous, monsieur Brock, et je donnerai ensuite la parole à M. Turnbull.
Merci, madame la présidente. Je vais partager mon temps avec mon collègue, M. Barrett.
Bonjour, monsieur Johnston, et merci d'être venu aujourd'hui.
Monsieur Johnston, en 2010, alors qu'il était encore simple citoyen et avant de se lancer en politique, Justin Trudeau a donné une entrevue à CBC Radio au cours de laquelle il a dit qu'il aimait beaucoup dîner avec vous. Il a ajouté que vous meniez d'excellentes conversations sur toutes sortes de sujets. Cette entrevue a eu lieu pendant la période où vous avez été nommé gouverneur général.
Étiez-vous au courant de cette affirmation, monsieur?
Madame la présidente, je n'étais pas au courant de cette affirmation de M. Trudeau. Je l'ai rencontré quand il avait 10 ou 11 ans. Il faisait du ski avec mes enfants quatre ou cinq fois...
Justin Trudeau, lorsqu'il était premier ministre, vous a décrit comme un ami de la famille de longue date, ajoutant que cette amitié s'est consolidée au cours de nombreux étés passés dans les Laurentides dans des chalets avoisinants. Vous n'avez jamais corrigé la description que fait le premier ministre de votre relation avec lui, n'est‑ce pas?
Je vais vous arrêter ici. Je ne pensais pas devoir le faire aussi tôt dans la réunion. Monsieur Brock, vous et moi en avons déjà discuté, alors vous savez très bien que les commentaires doivent s'adresser à la présidence.
Je peux vous assurer que le premier ministre et moi ne sommes pas allés au chalet ensemble, alors arrêtons-nous pendant une seconde. C'est pourquoi je voulais vous accorder un peu plus de temps. Je ferai preuve de clémence pour vous aider à mieux orienter vos questions.
La question que j'ai posée à M. Johnston était la suivante: avez-vous désigné ou modifié l'affirmation que Justin Trudeau, alors premier ministre, a faite, disant que vous étiez un ami de la famille de longue date et que cette amitié s'était cimentée au cours de nombreux étés passés dans des chalets avoisinants dans les Laurentides? Avez-vous confirmé ou nié cela, monsieur?
Madame la présidente, je n'étais pas au courant de l'affirmation qui vient d'être faite. J'ai été ami avec le père de M. Trudeau tout au long de sa vie politique. Nous l'avons encouragé à nous rejoindre comme professeur à l'Université de Montréal.
Merci, monsieur Johnston. Je vais aborder des domaines qui vous permettront de nous en dire plus sur ce que vous avez fait avec le premier ministre.
Je dois passer à autre chose, car mon temps est limité.
En 2016, six ans après votre entrée en fonction au poste de gouverneur général, vous avez accordé une entrevue à CTV. On vous a demandé ce que vous pensiez du fait que la famille Trudeau vivait sur le terrain de Rideau Hall. Sans hésiter, vous avez répondu que c'était merveilleux, parce que leurs enfants jouaient dans le jardin où jouaient vos petits-enfants. Vous avez ajouté qu'il était très beau d'observer la prochaine génération mettre de la vie dans cet endroit.
M. Brock ne cesse de couper la parole au témoin sans lui laisser le temps de répondre.
J'aimerais que nous laissions au moins M. Johnston répondre à la question qui lui est posée. Je pense que ce serait la moindre des politesses et que c'est notre pratique habituelle.
Madame la présidente, si vous me permettez de répondre, mon temps est très limité. La question était de savoir si l'affirmation était exacte ou non. Il n'était pas nécessaire que le témoin élabore.
Je pense que le comité PROC poursuit des normes élevées. Il existe depuis longtemps. Je crois que vous connaissez maintenant ma façon de présider.
À mon avis, ces rappels au Règlement et mes interruptions, que je ne tiens pas du tout à faire, empiètent sur le temps dont nous disposons et qui est très précieux. Je ne pense pas que nous perdrions du temps en laissant le témoin terminer ses phrases. Je pense qu'il convient parfaitement de laisser le témoin répondre.
Monsieur Brock, vous avez la parole, mais n'oublions pas ces choses. Je pense bien que nous réussirons à passer à travers cela. Je sais que vous le pouvez, monsieur Brock, alors je vais vous redonner la parole.
Vous avez ajouté que votre épouse, Sharon, et vous étiez devenus de bons amis avec les Trudeau, que votre relation avec Pierre Trudeau remontait à l'époque des enfants, lorsque les familles se réunissaient pour skier au Mont-Tremblant. Vous avez dit que les trois garçons Trudeau avaient le même âge que vos cinq filles et que vous étiez devenu un joyeux groupe de skieurs au Mont-Tremblant.
Vous avez dit que vos enfants avaient énormément de respect pour Pierre Elliott Trudeau. Il était un père merveilleux et très bon avec les enfants, qui étaient à ce moment‑là des adolescents, et il les amenait à discuter, par exemple, des démocraties dans le monde.
En 2017, monsieur, Paul Wells vous a interviewé. Vous lui avez dit que vous connaissiez Justin Trudeau depuis qu'il avait six ans, car les deux familles passaient leurs vacances dans des chalets avoisinants dans les Laurentides.
En 2017, le premier ministre vous a rendu hommage en vous traitant d'ami de la famille et d'ami de son père. Il a conclu son allocution en disant « Merci, mes amis » à vous et votre épouse. Vous ne vous êtes jamais défendu, en privé ou en public, de cette affirmation de votre amitié avec Justin Trudeau.
Passons maintenant à votre conférence de presse du 23 mai. Vous avez déclaré publiquement les faits fondamentaux de votre amitié avec Justin Trudeau. Vous avez dit vous-même, monsieur, que quand vos enfants avaient entre 7 et 12 ans, vous aviez un condo au pied du Mont-Tremblant. Pierre Elliott Trudeau avait une maison de campagne à 50 kilomètres de là. Pendant sept ans, M. Trudeau et ses trois enfants laissaient leur auto dans le stationnement de votre condo. Une fois, vous avez ramené ces enfants chez leur mère. Vous avez connu Justin Trudeau quand il étudiait à McGill. Après cela, vous n'avez eu aucun contact avec lui jusqu'à ce qu'il soit élu député, puis premier ministre.
Le fait est, monsieur, que vous avez dit que vous n'aviez eu aucun contact d'amitié avec Justin Trudeau pendant 40 ans. Vous avez affirmé ces faits. Plus tard ce jour‑là, vous avez donné une interview au présentateur de CTV, Omar Sachedina, et vous avez déclaré que votre relation avec Justin Trudeau était une allégation malheureuse. Vous avez en grande partie confirmé les mêmes détails qu'à votre conférence de presse, mais vous avez changé la fréquence des voyages de ski à cinq fois sur une période de deux ou trois ans et non sur sept ans.
Monsieur Johnston, ce comité a devant lui deux descriptions complètement différentes de votre relation avec Justin Trudeau. Ces descriptions différentes ne peuvent pas être toutes deux exactes.
Ma question est simple et directe, monsieur Johnston. Avez-vous dit la vérité aux Canadiens le 23 mai ou en 2016?
Madame la présidente, je dis la vérité en ce qui a trait à ma relation avec le premier ministre Trudeau, qui remonte à l'époque où nos enfants étaient adolescents. Pendant près de 40 ans, nous ne nous sommes pas rencontrés, nous n'avons pas soupé ensemble et nous n'avons eu aucun contact particulier. J'étais un ami du père, etc., mais notre relation se limite à cela.
Madame la présidente, j'étais membre de l'association de la Fondation Trudeau — ce qui équivaut à faire partie des actionnaires à une assemblée générale —, et non pas membre de son conseil d'administration.
Je me suis joint à l'organisation en 2018, soit environ un an après avoir quitté mes fonctions de gouverneur général, parce que je m'intéresse depuis très longtemps au soutien aux étudiants — aux étudiants des cycles supérieurs, aux bourses d'études.
En tant que membre de l'association, mon rôle était d'assister aux assemblées générales annuelles et de voter pour la composition du conseil d'administration, mais je n'ai rien eu à voir avec les décisions de la Fondation Trudeau.
Saviez-vous que la Fondation Trudeau avait fait l'objet d'une campagne d'influence étrangère de la part de Pékin et qu'elle avait accepté 140 000 $ de la dictature communiste de Pékin?
Madame la présidente, la première fois que j'ai eu connaissance de ce don en particulier, c'est lorsqu'il en a été fait état dans les journaux et qu'en tant que membre de l'association, j'ai reçu une note de la présidente-directrice générale, comme d'autres membres, je crois, m'indiquant qu'on s'apprêtait à publier un communiqué de presse annonçant que ce don avait été retourné.
Je vous remercie de confirmer que vous étiez au courant.
Compte tenu de vos liens avec la fondation, des rapports de cette dernière avec Pékin et du rôle de Pékin dans votre rapport, voyez-vous un conflit d'intérêts?
Madame la présidente, mon lien avec l'association de la Fondation Trudeau n'a joué aucun rôle dans les décisions prises par le conseil d'administration, l'acceptation de dons, etc.
Madame la présidente, le professeur Iacobucci et moi étions de jeunes professeurs de droit à l'Université de Toronto, lorsque j'avais environ 25 ans, et oui, c'est un ami de longue date.
M. Iacobucci, qui est aussi membre de la Fondation Trudeau, est celui à qui vous avez demandé un avis sur la question de savoir si vous étiez en conflit d'intérêts, et il vous a fourni l'exemption ou l'excuse que vous cherchiez.
Madame la présidente, le juge Iacobucci n'était pas membre de la Fondation Trudeau. Il a servi de mentor à un ou deux étudiants qui étaient des boursiers de la fondation. Le rôle de la fondation n'est pas seulement de fournir des bourses d'études, mais aussi d'offrir des possibilités de mentorat à des étudiants par des gens qui sont respectés dans leur domaine, et c'est de cette fonction qu'il s'est acquitté.
Monsieur, je crois qu'il y a au moins 12 juges à la retraite de la Cour suprême qui ne sont pas associés à la Fondation Trudeau comme l'est M. Iacobucci.
Le cabinet d'avocats de M. Iacobucci, Torys LLP, a également été recruté. Vous avez fait appel à eux pour vous aider. Sheila Block, une donatrice libérale de longue date, travaille pour Torys.
Vous êtes membre d'une association de la Fondation Trudeau. Il y a aussi M. Iacobucci qui est associé à la Fondation Trudeau. Mme Block, qui est une donatrice et une partisane à vie du Parti libéral, a participé récemment à des activités de financement avec le premier ministre. Compte tenu de tout cela, ne voyez-vous pas un conflit d'intérêts?
Faisons une pause, voulez-vous. Vous venez de prendre 23 secondes pour poser cette question. Donnons au témoin 23 secondes pour répondre.
Je n'arrive pas à croire que je suis en train de chronométrer le temps des questions et des réponses pour que cette réunion puisse être fonctionnelle. Tous les députés ont demandé que cette personne nous consacre trois heures — je dis bien trois heures —, ce qui représente beaucoup de temps. Il est souvent question de l'importance de notre temps, mais vous m'obligez à vous interrompe constamment.
Madame la présidente, je ne vois pas de conflit. Sheila Block est une avocate éminente. Elle m'a offert un soutien indéfectible lorsque le premier ministre Harper m'a invité à entreprendre une autre enquête très difficile il y a une quinzaine d'années. Elle est réputée pour la qualité de son travail, et le travail qu'elle a accompli est certainement important et a été bien fait, mais cela dit, les conclusions du rapport sont les miennes.
Peu importe ce que font les avocats en pratique ou les autres en ce qui concerne les contributions aux campagnes politiques, tout cela est du domaine public et bien compris par tous.
Je dirais que nous vous sommes tous redevables des services que vous avez rendus au Canada pendant des décennies. Je tiens à vous remercier pour les nombreux rôles que vous avez assumés et que vous avez fidèlement remplis, ainsi que pour les fonctions que vous avez prises en charge récemment.
Je reconnais que votre rapport soulève des questions et que des préoccupations ont été exprimées. J'irai jusqu'à citer le premier ministre Harper, ce que je fais rarement. Lorsque vous avez été nommé gouverneur général, il a dit que vous représentiez « le meilleur du Canada ».
Je vous suis reconnaissant de comparaître ici aujourd'hui, devant tous les députés, pour répondre à nos questions pendant trois heures. Cela témoigne vraiment de votre engagement envers le Canada.
J'aimerais commencer par mentionner certaines choses que nous avons entendues ici, à ce comité, en ligne, lors de conférences de presse et dans les délibérations de la Chambre.
M. Calkins a dit de Han Dong qu'il est un « agent de Pékin ».
Pierre Poilievre a répété à maintes reprises que Justin Trudeau agissait à l'encontre des intérêts du Canada et au profit d'une dictature étrangère. C'était le 7 mars.
Pierre Poilievre a également dit que le premier ministre « admirait la dictature communiste chinoise [...] Voyant qu'il y avait un lien idéologique, Pékin a décidé que le premier ministre était un ami et qu'il fallait donc l'aider à se faire élire. La Chine s'est ingérée dans notre système électoral deux fois de suite. » M. Poilievre a aussi dit: « Nous savons également que le premier ministre était au courant de ces faits depuis bien longtemps et qu'il a choisi de ne rien faire. »
M. Cooper, qui siège à ce comité, a déclaré que l'invitation à une « séance d'information » représentait un piège flagrant pour museler M. Poilievre en vertu des lois sur la sécurité nationale. Il semble donc que la vérité est maintenant un piège.
La dernière d'une longue liste de prétentions absurdes et sans fondement du Parti conservateur se trouve sur son site Web. On peut y lire: « Le faux rapporteur de Trudeau continue de dissimuler l'ingérence ».
Je dirais au Comité, et à vous aussi, qu'il ne s'agit pas seulement d'exagérations inoffensives ou de cas isolés d'hyperbole partisane. Ces propos sont intentionnels et incendiaires. Ce sont des allégations sans fondement, nuisibles et fausses, qui minent la confiance dans notre démocratie. Elles attisent les sentiments antigouvernementaux à des fins politiques.
Dans votre premier rapport, monsieur Johnston, vous avez dit que vous aviez intégré un large éventail de sources, y compris les délibérations de ce comité. Vous avez fait remarquer que les membres du Comité avaient posé des « questions judicieuses ». Vous avez aussi parlé de l'aspect du « théâtre politique ».
Pensez-vous que ce débat, de même que l'importance de fournir des réponses à la population canadienne, sont bien servis lorsque l'aspect du théâtre politique prend le pas sur le travail d'établissement des faits probants que nous sommes tous appelés à faire?
Madame la présidente, j'encourage les membres du Comité à lire le rapport que nous avons préparé et à se concentrer sur le danger réel que nous courons ici, à savoir l'ingérence étrangère manifeste, présente et envahissante dans notre système électoral.
Dans notre rapport, nous avons tenté d'éviter les discussions partisanes auxquelles vous faites référence, de suivre les faits et d'appliquer la loi de façon rigoureuse et réfléchie. Je nous exhorte à nous pencher sur cette importante question de l'ingérence étrangère, qui exige une attention immédiate de la part de cet organisme et des institutions du Parlement, afin de protéger notre sécurité nationale et nos citoyens.
Il me semble, d'après les conversations que nous avons eues au Comité, qu'il y a des députés qui participent à ces débats et délibérations et qui veulent en venir aux faits et à la question dont nous sommes saisis, alors qu'il y en a d'autres qui évitent cruellement les faits et qui semblent ne pas vouloir en parler.
Monsieur Johnston, il est clair pour moi que les conservateurs ont chanté vos louanges et vanté vos vertus pendant plus d'une décennie. En fait, en 2007, Pierre Poilievre lui-même a dit ceci concernant votre nomination à la tête de l'enquête Mulroney-Schreiber:
Je pense que nous avons affaire à une personne très crédible et je pense que cette histoire lointaine n'enlève rien au fait qu'il a une carrière très distinguée. L'idée qu'il ne devrait pas participer à la vie publique simplement parce qu'il a été nommé à un moment donné dans l'histoire par un ancien premier ministre conservateur est, je pense, un peu extrême. Il s'agit d'une personne très qualifiée, et franchement, je n'ai entendu personne remettre en question son intégrité et je n'ai aucune raison de le faire.
Monsieur Johnston, pourquoi pensez-vous que M. Poilievre a changé d'avis depuis 2007?
Madame la présidente, tout au long de cette étude, je me suis concentré sur les faits liés à l'ingérence étrangère, j'ai essayé d'appliquer la loi, et je vous ai présenté un rapport aussi complet et réfléchi que possible, sachant qu'il serait examiné par le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement et l'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement et, j'espère, que les chefs des trois principaux partis — et je remercie M. Singh d'avoir accepté ce mandat — participeraient à l'examen qui en sera fait.
Mis à part les changements de position des gens sur la question de savoir si mon intégrité s'est évaporée il y a trois ou quatre ans, pour une raison quelconque, avec le changement de gouvernement, je tiens à ce que nous nous attaquions au vrai problème, c'est‑à‑dire l'ingérence étrangère. Examinons ce rapport où figurent nos recommandations. Revoyons-le et agissons de toute urgence pour régler un problème qui est extrêmement grave et qui touche non seulement notre sécurité nationale, mais aussi nos citoyens, de façon très directe, immédiate et grave.
Les conservateurs semblent prétendre que vous avez soudainement trahi votre nature, la personnalité que vous avez bâtie au fil des ans et qu'ils ont qualifiée de crédible et d'intègre, et que vous avez tout à coup abandonné vos principes et votre intégrité lorsque vous avez été nommé par le premier ministre Trudeau à ce poste, ce qui est tout à fait absurde à mes yeux.
Le meilleur prédicteur du comportement futur est le comportement passé, et vous vous êtes bâti au fil du temps une réputation honorable, intègre et crédible. Beaucoup de gens ont dit cela de nous pendant de nombreuses années, et pourtant nous nous retrouvons devant des prétentions contraires.
Je me demande pourquoi ils sont si déterminés à vous attaquer sur ce front. Tout ce que je peux dire, c'est qu'ils n'aiment pas les conclusions de votre rapport, dont la principale qui figure à la page 2 et qui, à mon avis, leur fait peur:
Je n'ai pas relevé de cas où des ministres, le premier ministre ou leur cabinet ont volontairement ignoré des renseignements, des conseils ou des recommandations sur l'ingérence étrangère ni de cas où ils ont été motivés par des considérations partisanes en traitant ces questions.
Pourtant, nous entendons et nous voyons encore souvent des affirmations contraires, des faits souvent déformés, mal perçus et mal interprétés. Nous voyons ici, dans un contexte parlementaire, et à l'extérieur du contexte parlementaire, ce genre de discours, ces affirmations qui sont faites sans preuve et ces fausses interprétations qui sont souvent caractérisées par la mauvaise foi.
À votre avis, ce genre d'activité nuit‑il à notre démocratie?
Premièrement, l'examen et le travail que vous faites visent à renforcer la confiance dans notre démocratie lorsque l'ingérence étrangère la met en péril.
Dans la citation que vous venez de lire, nous avons poursuivi en disant que, dans le cadre de notre examen, nous avons relevé de graves lacunes dans nos systèmes de lutte contre l'ingérence étrangère, qui exigent un examen et des améliorations très importants, et c'est exactement ce que le Comité et les autres organismes du Parlement ont la responsabilité de faire.
L'ingérence étrangère s'est intensifiée dans un sens, et notre capacité d'adaptation a évolué dans l'autre sens. Nous devons combler l'écart entre les deux, mais c'est au Parlement qu'il incombe d'établir les faits, ainsi que de formuler des recommandations et de suggérer des améliorations, en s'appuyant sur les précédents d'autres administrations, en particulier le Groupe des cinq, qui a dû composer avec cette situation depuis plus longtemps, en présence de menaces encore plus graves dans leur cas, qui se font maintenant bien sentir chez nous. Notre travail consiste à nous tourner vers l'avenir et à déterminer comment nous pouvons faire un bien meilleur travail pour mettre en place un système qui traite de l'ingérence étrangère d'une manière constructive et très protectrice pour les intérêts canadiens.
Je suis tout à fait d'accord pour dire qu'il serait bien que les autres partis contribuent à ces discussions de façon constructive et agissent en fonction des faits, mais ce que nous avons vu, c'est... Vous avez intégré la validation dans vos conclusions, mais les députés des partis de l'opposition ne sont pas disposés à se pencher sur l'annexe de votre rapport.
Est‑ce que c'est ce que vous vouliez dire dans votre rapport en parlant du maintien d'un voile d'ignorance?
Madame la présidente, dans notre rapport, nous avons présenté ce que nous pouvions rendre public, tout en respectant pleinement la nature des renseignements classifiés auxquels nous avons eu accès. Nous avons préparé une annexe à ce rapport, dans laquelle nous expliquons en détail les renseignements classifiés qui nous ont permis de tirer certaines de ces conclusions.
Cette information classifiée accompagnera évidemment le rapport présenté à l'OSSNR et au CPSNR, après examen et corrections si nécessaire, mais cela signifie qu'il faut s'atteler à la tâche et que le Parlement doit faire son travail, c'est‑à‑dire s'attaquer de façon constructive et réfléchie à ce danger d'ingérence étrangère dans nos élections.
Il reste trois minutes avant que la période de vote commence. Je vais donner la parole à M. Therrien pour 10 minutes, puis nous ferons une pause pour que tout le monde puisse aller voter.
Monsieur Johnston, vous pouvez répondre dans l'une des deux langues officielles, c'est votre choix. Le temps pris pour l'interprétation ne sera pas compté dans le temps de parole de M. Therrien. Prenez le temps d'écouter la question et les commentaires, et vous pourrez prendre le temps dont vous aurez besoin pour répondre.
Aujourd'hui, nous essayons de défendre le plus possible notre démocratie, qui est prise d'assaut par l'ingérence étrangère. Ce que nous faisons aujourd'hui est extrêmement important.
Quand je fais du porte-à-porte, des gens me disent ne pas être certains qu'ils iront voter. Je suis certain que vous entendez la même chose. Je les encourage alors à le faire en leur disant qu'il est important de voter et de s'impliquer, car leur choix peut décider de la couleur du gouvernement et des politiques qui seront adoptées.
Or il y a de plus en plus d'abstentions, et nous luttons contre cette abstention. Malheureusement, quand on voit ces menaces d'ingérence, il y a une baisse de confiance des gens dans la démocratie et nos institutions. Cela peut les amener à penser que les dés sont pipés, à se demander à quoi cela sert de voter et à se dire que ce sont les étrangers qui décident à leur place. Cela peut prendre des proportions extrêmement importantes. C'est cette confiance qu'il faut protéger, et ce sont nos institutions qu'il faut protéger.
Selon le dernier sondage Léger, 72 % des gens veulent une commission d'enquête publique et indépendante, car l'heure est grave. Il est important de faire toute la lumière sur la question et les gens pensent que c'est la seule façon de s'y prendre. Je ne vais pas vous donner toute la liste, mais de nombreux spécialistes dans le domaine nous disent qu'il faut tenir une enquête publique indépendante. La majorité des députés de la Chambre ont dit qu'il fallait créer une commission d'enquête publique et indépendante.
Dans le document de M. Johnston, ce dernier rejette cette possibilité. J'aimerais savoir pourquoi il rejette l'idée d'une commission d'enquête publique et indépendante qui est demandée par tant de gens.
Madame la présidente, tout d'abord, j'appuie de tout cœur les commentaires qui viennent d'être faits concernant la perte d'intérêt et le manque de compréhension des gens au sujet de la démocratie, et je suis d'avis que nous devons travailler très fort pour bâtir cette confiance.
Je dirais aussi que ce que nous voyons partout dans le monde, c'est une diminution de la confiance à l'égard des démocraties. Au fur et à mesure que les gens s'éloignent de la primauté du droit, qui est si importante dans ce cas‑ci, et adoptent la loi de la primauté, des pouvoirs forts et des gouvernements autocratiques s'installent. C'est le danger auquel nous faisons face.
En ce qui concerne la question de la tenue d'une enquête publique, nous y avons longuement réfléchi. Le dilemme, c'est que nous avons affaire à des renseignements classifiés. Il n'est pas possible de discuter de renseignements classifiés en public, ni de les inclure dans des rapports. Cela est ressorti de façon évidente dans le cadre d'autres enquêtes qui ont eu à traiter de cette question difficile.
Ce que nous avons fait, c'est reconnaître qu'il y a de très graves lacunes, après avoir fait de notre mieux avec les renseignements classifiés sur les questions de responsabilité au sein du gouvernement en matière d'ingérence étrangère. Au cours de la deuxième phase de notre mandat, c'est‑à‑dire au cours des cinq prochains mois, nous nous pencherons sur ces questions dans le cadre d'audiences publiques, auxquelles nous inviterons le public à participer, avec des experts, en mettant l'accent sur l'urgence d'agir. Nous allons commencer par des audiences publiques avec les communautés de la diaspora, qui nous ont fait part de leurs préoccupations, sans obtenir de protection ou de réponses adéquates jusqu'à maintenant.
Pour la suite de notre travail, nous espérons nous attaquer à ce problème et à un certain nombre d'autres qui seront fortement axées sur l'urgence de lutter contre l'ingérence étrangère, en encourageant et en renforçant nos institutions parlementaires, afin d'élaborer les réformes appropriées, de les mettre en place, puis de voir à ce qu'elles soient appliquées d'une manière qui, en fait, renforce la confiance dans notre démocratie.
Madame la présidente, il y a des précédents de commissions d'enquête publique indépendante sur des sujets extrêmement épineux sur lesquels reposent parfois des problèmes pouvant être liés à la sécurité de certains individus en cas de divulgation de l'information. C'est pour cela que, dans les enquêtes publiques indépendantes passées, il y avait des huis clos pour ce genre d'information. C'est la meilleure façon de faire la lumière sur un sujet.
Lors de la commission d'enquête qui s'est penchée sur le cas de Maher Arar, trois services secrets de pays étrangers étaient impliqués. Malgré tout, une commission d'enquête publique indépendante a été mise en avant, tout comme dans le cas de l'attentat commis contre le vol 182 d'Air India. Il y a des précédents.
M. Johnston dit que le sujet d'une commission d'enquête publique indépendante a été discuté et considéré, mais que certains éléments empêchent d'en tenir une. Je lui répondrai très respectueusement que cela s'est déjà fait.
J'irai même plus loin. M. Dan Stanton, ancien directeur exécutif du SCRS a présenté un témoignage assez intéressant. Il estime que M. Johnston se trompe en disant qu'une commission d'enquête publique n'est pas possible. M. Stanton a déclaré que l'ingérence étrangère est l'une des questions de renseignement les plus faciles à explorer dans le cadre d'une enquête publique. Il connaît quand même le tabac!
Monsieur Johnston, j'aimerais connaître votre opinion sur les déclarations de M. Stanton et sur les expériences passées démontrant qu'une commission d'enquête publique indépendante est possible.
Madame la présidente, la question des enquêtes publiques est importante, et nous constatons que lorsqu'il s'agit de renseignements classifiés, la situation devient très difficile. Il a été possible, dans le cadre d'autres examens, de tenir des séances qui ne portaient pas sur des renseignements classifiés et de jeter de la lumière sur ces questions. C'est ce que nous avons l'intention de faire dans le cadre des audiences publiques sur les réformes qui revêtent la plus grande importance pour notre système.
Lorsque le juge O'Connor a terminé l'enquête sur l'affaire Arar, il a affirmé que les enquêtes publiques en vertu de la Loi sur les enquêtes sont des outils très difficiles à utiliser dans les cas où il faut faire la lumière sur des situations, particulièrement des situations de négligence et ainsi de suite. Comme elles sont dirigées par des avocats et comportent des contre-interrogatoires, il est difficile d'obtenir des renseignements classifiés. Cela ne peut pas se faire dans le domaine public. Cela est aussi très coûteux et prend beaucoup de temps et, souvent, cela ne permet pas de faire toute la lumière sur la question.
Ce que nous espérions, bien sûr, au cours des nombreux mois de notre mandat, c'était exactement cela — tenir des audiences publiques sur des questions qui ne font pas partie des renseignements classifiés. Vous vous souviendrez peut-être d'une enquête précédente, soit celle de la Commission McDonald, qui a mené à la création de la Loi sur le SCRS, en vue de prendre la relève de la GRC en matière d'ingérence étrangère. Il a fallu cinq ans à cette commission pour terminer son travail.
On dit qu'une commission d'enquête publique indépendante peut être coûteuse. Quel est le prix d'une démocratie? Quelle est la valeur de la démocratie?
Actuellement, deux partis sont coude à coude dans les sondages, et quelques circonscriptions peuvent décider de la couleur du gouvernement. Or on me dit qu'il peut être coûteux de faire la lumière sur la question. Les gens s'entendent là-dessus: la seule façon de faire la lumière sur cette question, c'est au moyen d'une commission d'enquête publique indépendante. Cela peut être long, mais on pourrait vivre très longtemps dans l'obscurité si on ne fait rien. Ce ne serait pas mieux.
M. Johnston dit qu'il y a des éléments classés « secret » qui ne peuvent pas être dévoilés au grand jour. En quoi est-ce pire que ce qu'on a vu dans le cas de Maher Arar, alors que trois services secrets de trois pays différents étaient impliqués dans cette enquête?
Madame la présidente, en ce qui concerne les audiences publiques que nous envisageons, il sera certainement possible d'inviter des représentants du SCRS et d'autres experts du gouvernement et de l'extérieur du gouvernement à formuler des commentaires à ce sujet.
En ce qui concerne la question des coûts, je tiens à souligner que nous gaspillons beaucoup de temps en ne nous attaquant pas aux véritables problèmes que pose l'ingérence étrangère et en ne proposant pas de réformes, de changements et d'améliorations, de même qu'en n'assurant pas une surveillance minutieuse de nos opérations, afin de veiller à faire un bien meilleur travail que celui que nous faisons à l'heure actuelle, au sujet d'une situation très grave qui n'est pas reconnue pleinement comme un danger pour notre société démocratique au Canada.
On dit que le processus est long, mais je pense qu'il est essentiel. Pour que nous réglions la question une fois pour toutes et que nous ayons la confiance de la population, il est important que nous fassions la lumière sur cette situation.
Il est vrai que nous avons eu le rapport de M. Johnston dans un délai assez court mais, quand je le lis, je n'y vois à peu près rien nous permettant, d'une part, de comprendre que nous pouvons avoir confiance en M. Johnston pour la suite et, d'autre part, de dire que nous avons fait la lumière sur la question.
Je veux revenir à une question simple, monsieur Johnston. J'en appelle à votre intelligence, car je sais que vous êtes un homme très brillant. Votre expérience le prouve. Quelle est la différence entre la classification « secret » de l'information dans le cas de l'ingérence étrangère et la classification « secret » de l'information dans le cas de Maher Arar? Pourquoi le cas actuel est-il pire que celui concernant Maher Arar?
C'est une question simple. Si vous n'y répondez pas, je vais y revenir, parce que je trouve cela important.
Madame la présidente, il est très important de déterminer quand l'information entre dans la sphère de la preuve et quand elle est classifiée ou non. C'est l'une des questions que nous espérons aborder en profondeur lors des audiences publiques qui auront lieu au cours des cinq prochains mois, à savoir si nous avons la bonne orientation et le bon équilibre pour définir ce qui doit être gardé secret et ce qui peut être révélé au grand jour.
Nous avons l'expérience d'autres pays qui se sont attaqués à ce problème très particulier. Il me semble que nous pouvons tirer des leçons de ces expériences et essayer de trouver un meilleur équilibre entre ce qui doit être classifié pour protéger les gens concernés, ainsi que nos alliés du Groupe des cinq.
Je veux simplement vous dire, monsieur Johnston, que ce que vous avez dit est très important.
Ce que je comprends de votre réponse, c'est qu'on ne sait pas pourquoi on ne peut pas tenir une enquête publique indépendante. C'est ce que j'ai entendu. Vous avez dit que cela prendrait quelques mois avant de voir la différence entre les éléments d'information et l'importance de la classification. Vous n'êtes donc même pas prêt à me dire, aujourd'hui, que nous n'avons pas besoin d'une enquête publique indépendante, car il va vous falloir quelques mois pour y réfléchir.
Madame la présidente, par votre entremise, j'aimerais remercier M. Johnston de comparaître aujourd'hui. Merci d'être parmi nous pour discuter du rapport.
J'aimerais faire quelques déclarations préliminaires. Vous avez abordé la question, mais je veux que ce soit clair également de mon point de vue. J'ai dit clairement que je ne suis pas d'accord avec votre conclusion selon laquelle il ne devrait pas y avoir d'enquête publique. Je crois qu'il devrait y avoir une enquête publique. Je pense que c'est la seule façon de vraiment rétablir la confiance du public dans notre système électoral.
La semaine dernière, nous avons adopté une résolution à la Chambre. Vous y avez fait allusion, mais je tiens aussi à dire que nous avons recommandé que vous vous retiriez du poste de rapporteur spécial pour une raison très précise, à savoir l'apparence de partialité. J'ai donné un exemple concret qui, pour une personne raisonnable, démontre clairement l'apparence de partialité, à savoir que l'avocate principale a fait plusieurs dons au Parti libéral et a assisté à une activité de financement avec le premier ministre, pas plus tard qu'en 2021. Pour une personne raisonnable, cette apparence de partialité minerait le travail que vous espérez faire, et ce travail ne peut pas être réalisé en raison de cette apparence de partialité, qui est tellement fondamentale.
Je suis également déçu que vous ayez rejeté le vote majoritaire. La volonté de la Chambre a été exprimée, et vous avez rejeté ce vote. Je pense que c'est décevant.
Je veux utiliser mon temps de parole pour aborder certains détails du rapport. Je vais passer à ma première question, par votre entremise, madame la présidente.
Mon premier point porte sur une question que j'ai posée au premier ministre, le 9 mai, pendant la période des questions. Elle portait sur les répercussions de l'ingérence étrangère sur la diaspora, ce qui, comme vous l'avez mentionné, constituera une partie importante de vos audiences publiques. J'ai posé une question au premier ministre au sujet des répercussions de l'ingérence étrangère sur les diasporas. En réponse, le premier ministre a déclaré que « les diasporas, que ce soient des communautés sino-canadiennes, irano-canadiennes, russo-canadiennes ou indo-canadiennes, sont souvent les premières communautés à être ciblées par l'ingérence étrangère ».
En fait, la conseillère à la sécurité nationale et au renseignement, Jody Thomas, a également souligné que l'ingérence étrangère, en particulier de la part de l'Inde, a une incidence sur les Canadiens et, en particulier, sur la communauté sikhe. De nombreux membres des diasporas vous diront qu'ils ont quitté des communautés assujetties à des régimes répressifs et sont venus au Canada dans l'espoir d'obtenir la sécurité et la liberté, mais qu'ils ont continué d'être poursuivis par le même type d'ingérence. Dans la communauté sikhe, on entend de nombreuses personnes raconter qu'on leur a refusé un visa, ou que leur communauté ou les membres de leur famille ont été menacés, parce qu'ils avaient soulevé des préoccupations au sujet du bilan de l'Inde en matière de droits de la personne, par exemple.
Étant donné qu'il est bien connu que cela existe, et compte tenu surtout que le premier ministre a confirmé l'existence de ces menaces contre les communautés de la diaspora, comment vous attendez-vous à ce que les gens de ces communautés — sachant qu'ils sont déjà ciblés et qu'ils risquent déjà d'être ciblés personnellement ou que leurs familles sont ciblées — aient la confiance nécessaire pour assister à une audience publique, compte tenu de ces menaces pour eux-mêmes ou leur communauté et des réactions et des répercussions possibles sur leurs familles?
Comment ces personnes auront-elles la confiance nécessaire pour se présenter à une audience publique? Comment ce processus fonctionnera‑t‑il pour elles? Y a‑t‑il des mesures qui sont prises pour protéger leur sécurité, compte tenu des préoccupations qu'elles ont?
Je vous remercie de ces questions, qui sont vraiment vitales et importantes et qui nécessitent une attention très réfléchie.
Vous avez tout à fait raison de dire que les communautés de la diaspora ont été victimes d'ingérence et que leur tranquillité a été mise à mal, tout comme leur sécurité et leur bien-être, d'une manière qui est inadmissible. Il nous incombe à tous de voir cela comme une menace très grave pour notre nation, où le pluralisme et le respect de notre patrimoine culturel sont des valeurs très importantes, qui ont été négligées pendant beaucoup trop longtemps.
Je regarde M. Chong, qui a présidé le Comité spécial sur la relation entre le Canada et la République populaire de Chine, par exemple, où ont été entendus des tonnes de témoignages de la diaspora sur cette question. Nous n'avons pas fait le genre de choses que nous aurions dû faire et que nous devons faire — parce que le problème est réel, dommageable et tout simplement inacceptable pour les citoyens canadiens.
Ce que nous espérons faire au cours des cinq prochains mois, c'est de vraiment jeter de la lumière sur cette question des menaces qui pèsent sur les communautés de la diaspora et de trouver des façons beaucoup plus efficaces de, premièrement, nous équiper et d'équiper nos agences de renseignement pour faire face à ces menaces plus efficacement qu'à l'heure actuelle, et deuxièmement, d'informer les Canadiens du fait que tant de membres de la diaspora sont des victimes involontaires de quelque chose qui les dépasse dans une large mesure. En tant que Canadiens, nous avons la responsabilité de les protéger, de les appuyer et de dire que ce n'est pas acceptable et que nous ne laisserons pas la situation perdurer. Nous devons reconnaître que c'est ce qui se passe dans ces communautés et prendre les mesures de protection qui s'imposent à l'échelle gouvernementale.
Au cours du dernier mois environ, nous avons fait un pas en avant en essayant au moins d'expliquer la situation et d'envoyer des avertissements aux députés et aux autres personnes qui ont été victimes de ces choses et dont les familles ont été soumises à ces choses. Cela exige aussi des correctifs très importants.
Merci. J'espère que vous parlerez également des moyens de faire en sorte que ces familles ou ces personnes ne craignent pas de parler de leur situation.
J'aimerais maintenant aborder les graves lacunes que vous avez révélées dans les communications entre les organes de sécurité et le gouvernement. Selon votre rapport, vous n'avez trouvé « aucun exemple où un ministre, le premier ministre ou leurs bureaux respectifs se sont abstenus, en connaissance de cause ou par négligence, de donner suite aux renseignements, conseils ou recommandations fournis ». Il est donc concevable que les ministres ou le premier ministre n'aient pas été correctement informés. Mais vous reconnaissez également dans votre conclusion que des gouvernements étrangers tentent effectivement ou sans aucun doute de s'ingérer dans notre démocratie et que c'est un fait notoire.
Puisque l'ingérence étrangère est avérée et que le gouvernement aurait dû être au courant de cet enjeu en général, ma question portera sur le manque flagrant de curiosité de ce gouvernement. Malgré les preuves claires et crédibles que vous en avez obtenues dans le cadre de votre enquête, à aucun moment le premier ministre ou des ministres n'ont demandé activement ou proactivement au SCRS ou à d'autres organismes de sécurité si des députés étaient visés.
Personne n'a donc jamais tenté d'évaluer proactivement les menaces qui pèsent sur des députés? Vous admettez que le gouvernement n'en a peut-être pas été informé par le SCRS, mais ne s'est‑il jamais demandé si, puisqu'on sait qu'il y a de l'ingérence étrangère, cela pourrait toucher nos députés? Personne n'aurait donc jamais manifesté de curiosité ou d'intérêt à cet égard?
Merci de ces deux questions. Mes réponses seront brèves, mais j'espère qu'elles vous seront utiles.
Quant à savoir si des membres de la diaspora pourront comparaître en toute transparence dans le cadre d'une audience publique, je suis convaincu qu'ils seront nombreux à le faire et que, s'ils ne veulent pas comparaître, ils nous feront parvenir des mémoires. Nous avons déjà reçu environ une demi-douzaine de mémoires de groupes de la diaspora, qui expliquent de façon très douloureuse et éloquente le fardeau qu'ils portent et l'aide dont ils ont besoin. Quant aux personnes qui estiment ne pas pouvoir se présenter, nous les invitons et les encourageons à nous fournir toute l'information qu'elles pourront et, notamment, à nous indiquer les mesures que nous pourrions prendre.
Voyons maintenant la question de la curiosité face à ces menaces étrangères. Dans notre rapport, nous sommes très critiques des lacunes du gouvernement. Nous y expliquons qu'il a été bien souvent lent à réagir et lent à anticiper et que cela doit changer, mais que ce changement doit advenir par le travail de ce comité et d'autres comités parlementaires. Le CPSNR et l'OSSNR — respectivement créés en 2017 et 2019 — sont des comités d'examen et de surveillance. Ils sont chargés de vérifier si nos organismes fonctionnent bien ou non, et nous devons consolider ces institutions.
Il est tout à fait vrai que nous n'avons pas eu ce genre de curiosité, ni le genre de communications qui aurait permis de donner suite à [Inaudible], et j'espère que nous pourrons régler ce problème.
Pour terminer, j'aimerais vous signaler une chose particulièrement inquiétante, à savoir que vous êtes arrivé à une conclusion différente de celle de M. O'Toole. Je rappelle que M. O'Toole a soulevé une question de privilège. Permettez-moi de citer une partie de ce qu'il a dit:
L'exposé du SCRS m'a confirmé ce que je soupçonnais depuis un bon moment, à savoir que mon caucus parlementaire et moi-même avons été la cible d'une campagne sophistiquée de désinformation et de suppression de votes orchestrée par la République populaire de Chine avant et pendant les élections générales de 2021.
Les membres du caucus conservateur et lui-même ont donc été visés.
Dans votre rapport, vous dites au sujet de M. Chiu, qui était membre du Parti conservateur et candidat aux élections de 2021, qu'il n'a pas été possible de faire remonter la désinformation à une source étatique. Nous sommes donc en présence de deux conclusions très différentes, l'une tirée de la séance d'information du SCRS dont parle M. O'Toole, et l'autre, de votre rapport, selon lequel il n'y a pas de preuve claire d'une source étatique. Comment avez-vous pu tirer une conclusion aussi divergente?
Nous avons eu l'occasion de rencontrer M. O'Toole peu de temps avant la fin de notre rapport et nous avons tenu compte de ce qu'il avait à nous dire. Je dois dire qu'il connaît très bien le dossier et qu'il a encore beaucoup à nous apprendre.
Les preuves qui nous ont permis de conclure dans le sens que vous dites étaient tout ce que nous avions à notre disposition à ce moment‑là. Depuis, compte tenu des conversations de M. O'Toole avec le directeur du SCRS, on en a appris beaucoup plus sur ce qui aurait dû être fait et ce qui devra être fait à l'avenir.
Monsieur Johnston, j'ai été un peu choqué quand vous avez dit, dans votre allocution d'ouverture, que les commentaires sur votre intégrité sont faux et que le fait de les répéter ne les rend pas vrais. Pour moi, cette déclaration seule vous place en situation de conflits d'intérêts, particulièrement envers les chefs des partis de l'opposition.
Monsieur Johnston, vous avez été le gouverneur général du Canada. À ce titre, vous ne pouvez pas exercer de rôle politique.
Vous recevez cependant toujours une paie à titre d'ancien gouverneur général. Est-ce exact?
Je me suis joint à l'association de la Fondation Trudeau. C'est comme un actionnaire dans une assemblée générale, et non pas un membre du conseil d'administration. Il ne participe pas aux décisions...
[Inaudible] une assemblée générale annuelle pour voter au conseil d'administration, pour approuver les états financiers — il n'y a aucune participation à quelque activité de financement que ce soit. C'était en 2018, et j'ai démissionné en mars de cette année, quand on m'a confié ces responsabilités.
En 2016, au cours d'une entrevue, vous avez déclaré, au sujet de votre relation avec la famille du premier ministre, que vous aviez appris à connaître les enfants et que votre amitié et votre relation s'étaient vraiment construites à partir des échanges de l'enfance.
Est-ce que vous reconnaissez avoir tenu ces propos, monsieur Johnston?
Je me souviens effectivement d'avoir fait allusion au fait que mes propres enfants et M. Trudeau, quand il était jeune, ont eu l'occasion de skier ensemble quatre ou cinq fois. Entre ce moment et celui où il est devenu premier ministre, je n'ai eu aucune rencontre avec lui, pas plus que nos enfants à ma connaissance.
Lorsqu'ils sont devenus nos voisins à Rideau Hall, je crois bien avoir dit qu'il serait agréable que nos petits-enfants aient la chance de jouer avec ses enfants. Cela ne s'est jamais produit, que je sache, mais cela aurait quand même été une expérience agréable pour nous.
Monsieur Johnston, je vous demanderais, s'il vous plaît, d'être plus bref dans vos réponses. Je veux aborder plusieurs points et je veux être respectueux et vous laisser le temps de répondre, mais j'ai des questions très précises à vous poser.
En 2017, en tant que président de l'Université de Waterloo, vous avez visité l'Université de Chongqing, vous avez rencontré le président Xi Jinping et vous avez par la suite déclaré qu'il était merveilleux d'être de retour en Chine et que vous vous sentiez comme si vous étiez revenu à la maison.
Si j'ai bien compris la question — qu'il est merveilleux de rentrer à la maison —, je crois qu'il s'agissait de M. Trudeau de retour au 24, promenade Sussex, mais que la résidence n'était pas disponible. Le secrétaire du Bureau du gouverneur général avait très galamment offert de libérer Rideau Cottage, où la famille de M. Trudeau s'est installée.
Madame la présidente, je pense que nous avons des problèmes d'interprétation, parce que, depuis le début, les questions que je pose et les réponses ne concordent vraiment pas.
Je vais donc vous demander un peu d'indulgence. Je vais essayer de parler plus lentement, mais nous avons vraiment des problèmes d'interprétation, parce que M. Johnston ne répond pas à mes questions.
Monsieur Johnston, vous avez demandé à M. Iacobucci, un ancien mentor de la Fondation Trudeau, de vous donner son opinion sur un possible conflit d'intérêts dans votre mandat de rapporteur spécial du premier ministre.
Il est vrai que Mme Block a été mon avocate principale dans le cadre de l'enquête Mulroney-Schreiber. Je lui ai demandé de l'être aussi dans cette enquête.
J'ai beaucoup d'autres déclarations comme celles-là que vous avez définies comme étant fausses, monsieur Johnston, mais le temps me manque, malheureusement, en raison des problèmes d'interprétation.
Vous avez écrit un livre dont le titre est Trust, que j'ai ici. Il n'y a pas de version en français. Vous déclarez dans ce livre que les pires dirigeants font de la manipulation en ne divulguant pas des informations vitales ou en ne divulguant que les informations qui soutiennent leurs opinions, leurs décisions et leurs gestes.
Monsieur Johnston, malgré tout le respect que je vous dois et compte tenu de vos années d'expérience, j'ai de la difficulté à croire que, parmi tous les faits que je viens d'énumérer, il n'y a pas une seule chose qui, selon vous, suscite une apparence de conflit d'intérêts pour quelqu'un qui est appelé à présenter un rapport indépendant sur l'ingérence du régime de Pékin dans notre démocratie, ingérence qui aurait favorisé le Parti libéral.
Croyez-vous sincèrement que, dans tout cela, il n'y a rien qui puisse donner l'impression qu'il y a un conflit d'intérêts, et que les Canadiennes et les Canadiens doivent vous croire sur parole?
Je ne crois pas être en conflit d'intérêts et je n'aurais pas assumé cette responsabilité si je l'avais été.
Je précise que, depuis 55 ans, j'ai présidé des comités consultatifs ou y ai participé, peut-être 20 ou 30 fois, en raison de mon impartialité et de mon intégrité. C'est la première fois qu'on remet cela en question ou qu'on laisse entendre que j'ai un conflit d'intérêts.
Je propose qu'on examine mes états de service et qu'on en tire une conclusion à cet égard. Je vous invite encore une fois à vous concentrer sur la question de l'ingérence étrangère, sur ce rapport, qui sera examiné, et sur d'autres. Nous devons faire beaucoup mieux pour nous atteler à cette importante question.
Merci d'être avec nous aujourd'hui, monsieur Johnston. En fait, ce que vous venez de dire va dans le sens de certaines de mes questions.
Avant d'y venir, je tiens à souligner que les conservateurs viennent de poser des questions pendant 15 minutes en tout, mais qu'ils n'en ont pas posé une seule sur l'ingérence étrangère, pas une seule. Ce n'était que diffamation ou théorie du complot au sujet d'enfants qui jouent ensemble.
Monsieur Johnston, compte tenu de votre exposé préliminaire au sujet de la gravité et de l'omniprésence de ce problème, je trouve extrêmement frustrant et décevant que les questions de l'opposition officielle n'aient pas porté sur l'ingérence étrangère pendant ces 15 minutes. Mais il faut savoir — et vous ne le savez pas, monsieur Johnston — que le député conservateur M. Barrett a déjà publié des clips — et je suis certaine que cela aidera à recueillir des fonds ou alimentera les craintes et les théories du complot concernant votre impartialité.
Certaines des questions posées tout à l'heure par M. Brock portaient sur des jeux d'enfants — partagés par vos petits-enfants et les enfants de l'actuel premier ministre. C'est ce que les conservateurs estiment être une preuve tangible: des enfants qui jouent ensemble. Je signale, monsieur Johnston, que dans certaines de vos réponses... Même si les conservateurs voulaient que vous soyez ici et que l'opposition voulait que vous soyez ici pendant trois heures, ils ne voulaient pas que vous répondiez à une seule question. Je trouve cela très révélateur, et, je le redis, ils ont eu leurs clips. C'est vraiment de cela qu'il s'agit. Ils ne s'intéressent pas à l'ingérence étrangère ou à la protection de notre démocratie, parce que, si c'était le cas, ils poseraient des questions sérieuses au lieu de s'adonner à des manœuvres partisanes.
M. Brock a parlé d'une époque où, comme vous l'avez dit vous-même, l'actuel premier ministre avait 11 ans. Cependant, mon collègue M. Turnbull a rappelé que, depuis le temps que vous avez passé avec l'actuel premier ministre à l'âge de 11 ans, M. Poilievre, chef de l'opposition, a défendu votre réputation. Rien dans votre conduite ou votre comportement n'a changé, et la seule conclusion que je puisse en tirer est que les députés de l'opposition ne prennent pas l'ingérence étrangère au sérieux. Ils ne prennent pas la préservation de la démocratie au sérieux. Ils ne cherchent qu'à lancer des attaques partisanes. Monsieur Johnston, vous avez rappelé que certaines des personnes que vous avez employées dans le cadre de l'enquête Mulroney-Schreiber vous ont également aidé à rédiger ce rapport, mais les conservateurs négligent commodément cet élément d'information.
Venons‑en donc aux véritables enjeux entourant l'ingérence étrangère, car je crois que nous devons aux Canadiens de prendre cette question au sérieux. Nous pouvons laisser les conservateurs à leurs manœuvres partisanes et les Canadiens en juger. Je vais donner suite à certaines questions de M. Singh au sujet de M. O'Toole. Nous avons entendu ici le témoignage de M. Chiu. À l'époque, je lui avais demandé s'il pouvait nous communiquer par écrit des éléments de preuve dont il disposait ou des exemples qui l'inquiétaient. Il avait répondu qu'il n'avait jamais sauvegardé ces éléments d'information.
Y avait‑il quelque chose... Le Parti conservateur a‑t‑il fourni des renseignements? M. O'Toole a parlé d'un dossier. En 2022, le Parti conservateur a également effectué un examen interne des résultats des élections de 2021. Est‑ce que certains de ces renseignements figuraient dans les documents que vous avez reçus et examinés?
Certainement. M. Singh a commenté certaines déclarations publiques de M. O'Toole et il a parlé d'un dossier du Parti conservateur sur une partie de l'information concernant WeChat. M. Chiu a déclaré que toutes ces preuves lui avaient été communiquées, mais qu'il ne les avait pas conservées ou quelque chose comme cela. Puis, en janvier 2022, le Parti conservateur a reçu les résultats d'un examen interne effectué par James Cumming.
Avez-vous reçu l'un ou l'autre de ces documents dans le cadre de votre enquête?
Je vais vous donner une réponse prudente, parce que je ne me rappelle pas précisément avoir reçu ces documents.
Ce que je peux dire, c'est que nous avons demandé à M. Poilievre, à quatre reprises, de nous faire part, si possible, de ses observations et de nous rencontrer, mais il n'a pas donné suite.
Deux ou trois jours avant la publication de notre rapport, nous avons reçu une série de documents, qui étaient en grande partie des articles de journaux et d'autres médias. Je ne me souviens pas de documents comme ceux dont vous parlez.
Je vais poser des questions courtes, et j'espère obtenir des réponses courtes cette fois-ci. Je ne veux pas mettre de pression sur M. Johnston, mais je n'ai que deux minutes et demie.
Monsieur Johnston, nous nous entendons pour dire qu'il est très important de rétablir la confiance du public. C'est le but de la démarche, entre autres.
Qu'est-ce qui, selon vous, rétablira la confiance de la population, une commission d'enquête publique et indépendante ou pas de commission du tout?
C'est effectivement notre travail: rétablir la confiance. Dans le reste du rapport et durant les travaux des cinq prochains mois, nous nous consacrerons à éclairer le mieux possible la question essentielle, à savoir les moyens de lutte contre l'ingérence étrangère. D'après le rapport que vous avez lu, ce n'est pas du tout au point. Il faut améliorer considérablement ces moyens.
Grâce à ces audiences publiques, aux témoignages d'experts et d'autres intervenants, et à l'aide que vous apportez au comité d'examen, j'espère que nous pourrons traiter cette question avec toute l'urgence qu'elle mérite, et que nous pourrons être fiers de dire aux Canadiens que nous faisons tout en notre pouvoir pour les protéger.
Ce que j'entends, c'est que M. Johnston va faire la lumière, qu'on ne doit pas s'inquiéter, qu'il est là pour cela, et ainsi de suite.
Le problème est simple. Avant que M. Johnston dépose son rapport, des spécialistes étaient contre une commission d'enquête. Or, après le dépôt de ce rapport, ils y sont maintenant favorables.
Cela veut-il dire que la tentative de faire la lumière extrêmement rapidement et à peu de frais, comme M. Johnston le propose, est un échec? J'ai des noms ici: MM. Daniel Stanton, que j'ai mentionné tantôt, anciennement du SCRS, Michael Wernick et Artur Wilczynski. Ces personnes ont changé d'idée à la suite du dépôt de votre rapport.
Cela veut-il dire que, finalement, il faut un rapport d'une commission d'enquête? Vous n'avez pas convaincu les gens. Ils ont plutôt été convaincus, après le dépôt de votre rapport, qu'une commission d'enquête publique et indépendante est vraiment nécessaire.
Nous avons expliqué les raisons pour lesquelles nous pensons qu'une commission royale d'enquête publique classique ne servirait pas à rétablir la confiance, mais que les audiences publiques dont j'ai parlé le feraient.
Je reviens au juge O'Connor, à la suite du comité Arar, qui estime que les enquêtes publiques, au sens traditionnel du terme, ne sont pas particulièrement utiles et peuvent être épouvantables dans ce genre de situation. Il y a de meilleures façons de s'y prendre. C'est ce que nous devons faire au cours des cinq prochains mois.
Selon un article de Global News paru le 8 février 2023, « les responsables de la sécurité nationale ont averti le premier ministre Justin Trudeau et son cabinet, plus d'un an avant les élections fédérales de 2019 [...] que des agents chinois aidaient des candidats canadiens aux élections ». Dans le rapport de M. Johnston, on fait état d'une première version de la note de service contenant « un passage semblable, mais non identique à cette citation ». Toujours selon le rapport, cette ébauche a fait l'objet d'une « importante révision » avant que la note de service soit envoyée au premier ministre.
M. Johnston a‑t‑il demandé qui avait modifié la note de service et pourquoi?
Je vais citer directement notre rapport. Je dois tenir compte de deux éléments ici. Il y a, d'un côté, les renseignements classifiés et, de l'autre, l'information ouverte. Il est important que je ne franchisse pas la ligne de démarcation.
Pour répondre précisément à la question posée, on peut lire ceci à la page 27 du rapport au sujet de ces énoncés et conclusions dans la presse:
La RPC s’est ingérée dans la nomination de Han Dong comme candidat pour le Parti Libéral dans Don Valley North (Global News, 24 février 2023)
Voici la suite:
Des irrégularités ont été observées dans la nomination de M. Dong en 2019, et il y a des soupçons bien fondés que les irrégularités étaient liées au consulat de la RPC de Toronto, avec lequel M. Dong entretient des liens. Pendant l’examen des renseignements, je n’ai pas trouvé de preuve selon laquelle M. Dong était au courant des irrégularités ou de l’implication possible du consulat de la RPC dans sa nomination.
Le premier ministre a été informé de ces irrégularités, mais aucune recommandation précise n’a été formulée. Il a conclu que rien ne permettait d’exclure M. Dong comme candidat pour Don Valley North. Cette conclusion n’était pas déraisonnable en fonction des renseignements mis à la disposition du premier ministre à cette époque.
Madame la présidente, je répète que je dois faire attention à ne pas divulguer de renseignements classifiés. La note de service parue dans Global News...
La réponse est que la note de service dont il est question dans le rapport de Global News était une première ébauche qui contenait certains énoncés. Cette ébauche n'a pas été distribuée. La version finale contenait une conclusion très différente.
Je ne ferai pas de commentaire, monsieur Johnston, mais je pense que votre commentaire tient lieu de réponse. Le débat d'aujourd'hui ne porte pas sur la façon dont les gens ont reçu l'information, mais plutôt sur l'ingérence étrangère dans les élections.
Continuons.
Nous écouterons M. Chong, qui dispose de cinq minutes, puis ce sera au tour de M. Fergus.
Au cours de la séance d'aujourd'hui, vous avez dit plusieurs fois que le Parlement devait faire son travail. Vous avez dit que c'est le travail du Parlement d'aider à contrer ce que vous appelez la menace toujours croissante de l'ingérence étrangère. Vous nous avez instamment invités à nous concentrer sur la question de l'ingérence étrangère.
Notre travail consiste à demander des comptes au gouvernement. C'est prévu dans les toutes premières dispositions de la Loi constitutionnelle de 1867. L'article 18 nous confère d'immenses pouvoirs à cet égard.
Mais il se trouve que le Parlement n'a pas pu faire son travail parce que le gouvernement nous a lié les mains. Nous n'avons pas pu obtenir de réponses aux questions que nous avons posées au sujet de l'ingérence de la République populaire de Chine dans les affaires du Canada. Les documents gouvernementaux que nous avons demandés ne sont pas divulgués. Et, quand ils le sont, ils sont souvent tellement caviardés qu'ils n'ont pas beaucoup de sens. Les témoins du gouvernement ne répondent pas directement à nos questions.
Non seulement nous ne sommes pas en mesure de faire notre travail à cause de cela, mais le gouvernement court-circuite délibérément le Parlement par l'entremise des entités mêmes dont vous avez parlé dans votre rapport et dans votre témoignage, à savoir le CPSNR, l'OSSNR et même — sauf votre respect, monsieur — votre charge. Toutes ces entités sont nommées par le gouvernement. Ce sont des gens nommés par le premier ministre et qui le servent selon son bon plaisir.
Nous n'avons pas pu faire notre travail. C'est extrêmement frustrant. Au cours des quatre dernières années, les audiences sur l'ingérence étrangère nous ont pris beaucoup de temps et d'efforts. Quatre comités de la Chambre s'y sont intéressés, à savoir le Comité des affaires étrangères, le Sous-comité des droits internationaux de la personne, le Comité Canada-Chine et nous-mêmes, le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. D'après mes calculs, ces quatre comités ont tenu, à eux seuls, 70 réunions au cours desquelles, dans le cadre de l'étude sur l'ingérence de la République populaire de Chine dans les affaires du Canada, 364 témoins ont été entendus pour un total de 152 heures de témoignages. L'ensemble a donné lieu à 1 902 pages de témoignages et à cinq rapports comprenant 31 recommandations précises sur l'ingérence étrangère.
Malgré tout ce travail, nous n'avons toujours pas obtenu de réponses aux questions que nous avons posées au gouvernement et, sauf votre respect, vous ne les obtiendrez pas non plus. Dans votre premier rapport, vous avez indiqué que vos prochaines audiences ne porteraient pas sur qui savait quoi et quand. Il ne s'agira pas d'examiner les dossiers du gouvernement, ni de discuter avec le personnel gouvernemental.
Si le Parlement n'a pas été en mesure d'obtenir de réponses depuis quatre ans, si vous n'allez pas chercher de réponses au cours de vos prochaines audiences et si nous n'avons pas une enquête publique avec tous les pouvoirs d'assignation qui permettraient de convoquer des témoins et de recueillir des preuves, comment diable pourrons-nous obtenir les réponses dont nous avons besoin pour remplir notre fonction constitutionnelle et demander des comptes au gouvernement?
Je dois dire que mon avocate et moi avons passé une heure et demie ou deux heures très instructives avec M. Chong à examiner certains de ces enjeux. Nous avons énormément bénéficié du travail qu'il a lui-même fait dans ce dossier et dans d'autres.
Tout d'abord, le CPSNR et l'OSSNR — avec l'aide des chefs des trois grands partis, je l'espère — auront l'occasion d'examiner notre rapport et nos conclusions et de déterminer s'il y a erreur de notre part à ne pas évaluer la responsabilité là où elle se trouve.
Pour ce qui est de l'incapacité du Parlement à faire bouger le gouvernement, nous allons examiner très attentivement le fonctionnement des organes de surveillance. Nous nous intéresserons notamment à l'OSSNR, qui existe depuis 2019, et au CPSNR, qui existe depuis 2017.
Nous entendrons des experts du renseignement étranger et nous bénéficierons des conseils que vous nous donnerez, monsieur Chong, et qui nous seront très utiles, notamment sur ce qui a été fait, selon vous, depuis quatre ans. Ces deux comités auront un rôle beaucoup plus important et beaucoup plus solide pour assurer une surveillance suffisante et veiller à ce que les activités de surveillance de l'ingérence étrangère soient beaucoup plus efficaces qu'elles ne le sont aujourd'hui.
J'aimerais également vous poser une question sur la façon dont vous pourriez rétablir la confiance de la population dans nos institutions. Il y a huit mois, lorsque le scandale de l'ingérence étrangère a éclaté au grand jour, des gens raisonnables auraient pu faire valoir que la confiance de la population pourrait être rétablie sans une enquête publique indépendante. Cette porte s'est refermée il y a bien longtemps.
Trois fois au cours des trois derniers mois, la Chambre des communes a voté en faveur d'une enquête publique indépendante. Dans les sondages, les Canadiens veulent majoritairement une enquête publique. Mais vous avez fait une recommandation contraire. Ne voyez-vous pas que cette recommandation contraire mine la confiance dans nos institutions démocratiques?
Ce que nous avons recommandé — et ce que nous avons l'intention de faire au cours des cinq prochains mois — c'est de tenir des audiences publiques sur la question très importante de savoir si nos moyens de lutte sont suffisants et, dans le cas contraire, comment améliorer très largement ces moyens. Nous avons l'intention de nous concentrer là‑dessus, car c'est très important pour le Parlement, pour nos organismes et pour la population en général, afin de nous assurer de faire un bien meilleur travail qu'à l'heure actuelle.
Merci de votre présence aujourd'hui, monsieur Johnston. Je vous remercie de votre rapport comme rapporteur spécial indépendant, ainsi que de votre carrière au service de notre pays dans de nombreuses fonctions.
Monsieur Johnston, vous signalez dans votre rapport une série de problèmes structurels dans la façon dont l'information est communiquée par nos organes de sécurité. Pourriez-vous préciser? Quelle pourrait être une première perspective des solutions possibles?
Dans les dernières pages du rapport, nous parlons des questions à examiner à l'étape publique des travaux. Ce sont notamment les suivantes:
Le rôle et la structure du CPSNR, et la possibilité de renforcer le Comité.
Les modifications à la Loi sur le SCRS qui pourraient faciliter la lutte contre l’ingérence étrangère.
Les problèmes liés à l’appareil gouvernemental, notamment:
Les processus de transmission des renseignements aux hauts dirigeants, ce qui comprend une meilleure reddition de comptes afin que les bonnes personnes consultent les bons renseignements, y compris aux échelons supérieurs de la fonction publique et de la politique.
Les protocoles de suivi, afin qu’il soit possible de retracer quelles personnes ont vu quels renseignements et à quel moment.
Une hiérarchisation plus claire des responsabilités en ce qui concerne des recommandations sur la façon de réagir aux renseignements.
Un processus mené par le gouvernement (et non par un organisme) pour la déclassification des renseignements afin d’améliorer la transparence.
Nous parlons également de la nécessité de créer un comité du Cabinet chargé de la sécurité nationale, qui permettrait d'inscrire l'ingérence étrangère dans un contexte où elle devrait être traitée au plus haut niveau et avec un sentiment d'urgence et d'importance.
J'ai bien compris cela. Ce que j'aimerais avoir, c'est plutôt un aperçu préliminaire de ce que nous devrions faire, à votre avis, pour régler le problème d'échange d'information qu'il semble y avoir, d'après ce que vous dites dans votre rapport.
Dans son témoignage devant le Comité, la conseillère à la sécurité nationale et au renseignement auprès du premier ministre, Jody Thomas, a également dit avoir constaté des lacunes. Nous savons qu'elle a mis en place un processus pour les corriger. Est‑ce également ce que vous comprenez, et quelle pourrait être l'utilité de ce processus, selon vous?
D'après ce que je comprends, madame la présidente, ce processus a été lancé par la conseillère à la sécurité nationale et au renseignement. C'est une initiative très bien accueillie.
Je pense qu'il est possible d'entreprendre des réformes importantes, en nous inspirant de l'expérience de certains de nos alliés, comme le Groupe des cinq, pour régler ces problèmes.
Nous devons continuer à encourager nos agences de renseignement à proposer ces changements de manière proactive et nous assurer que le Parlement et les comités comme le vôtre comprennent qu'il est possible de faire mieux et qu'ils ne ménageront aucun effort pour s'assurer que nous serons plus efficaces, et ce, le plus rapidement possible.
Du côté parlementaire, nous avons le Comité parlementaire sur la sécurité nationale et le renseignement. Vous en parlez dans votre rapport. Selon vous, cette tribune se prête-t-elle à l'examen parlementaire de documents, tout en nous permettant de maintenir leur niveau de classification? Et surtout, le CPSNR bénéficie-t‑il d'un accès suffisant aux documents, par rapport à nos partenaires du Groupe des cinq?
Vous soulevez un point intéressant. L'une des questions que nous devons aborder au cours des quatre ou cinq prochains mois, c'est justement celle de savoir si le CPSNR a été correctement constitué en tant que comité exécutif plutôt qu'en tant que comité du Parlement. Ce comité joue un rôle fondamental, au même titre que l'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement.
Ce comité existe depuis maintenant six ans. Il a fait des recommandations. Je pense que nous pouvons faire beaucoup plus pour améliorer notre système. Le CPSNR, l'OSSNR et ce comité de surveillance ont des rôles fondamentaux à jouer.
Dans le cadre de notre préparation à ces audiences publiques, nous essaierons de dresser la liste des points à examiner et nous solliciterons ensuite l'avis d'experts de l'extérieur et de l'intérieur du gouvernement à ce sujet.
Très rapidement, monsieur Johnston, vous avez formulé des recommandations quant aux changements qui devraient être apportés à la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité. D'autres témoins nous ont dit la même chose. Pouvez-vous nous donner plus de détails sur les changements que vous souhaitez?
Madame la présidente, ma première observation, c'est que depuis son adoption en 2003, je crois, cette loi n'a jamais été modifiée en profondeur. Il est temps d'en faire un examen exhaustif.
D'ailleurs, le directeur du SCRS a réclamé cet examen à plusieurs reprises et a fait des recommandations en ce sens. C'est donc un autre dossier qui requiert une attention dans les plus brefs délais. Le...
Je vais vous demander d'attendre un peu avant de poursuivre, parce que nous avons eu un agréable répit et que cet échange est fort intéressant.
La sonnerie se fait entendre. Nous avons un autre vote. J'invite les membres du Comité à faire une pause de 10 minutes. À notre retour, nous reprendrons nos tours de questions de six minutes. Nous aurons probablement le temps de faire deux tours avant de pouvoir voter.
Êtes-vous tous d'accord pour voter au moyen de l'application, comme nous l'avons fait pour le premier vote? Je vais faire une pause pour m'assurer que tous les votes ont été enregistrés et nous poursuivrons ensuite afin de profiter au maximum de notre réunion. Excellent.
Nous serons de retour dans 10 minutes. Merci beaucoup.
Nous allons faire des tours de six minutes. Je garde un oeil sur le chronomètre. Je crois que nous pouvons faire deux, voire trois tours de six minutes, si le temps le permet.
Nous commençons par M. Cooper.
[Français]
Il sera suivi de Mme Romanado, puis de M. Therrien, si nous en avons le temps. Nous voterons très rapidement et nous poursuivrons la réunion, comme nous l'avons fait lors du premier vote.
Monsieur Johnston, lorsqu'on vous a demandé tout à l'heure de concilier ce qui a été dit durant la rencontre d'information entre Erin O'Toole et le SCRS, au cours de laquelle il a été informé que lui-même et le Parti conservateur étaient ciblés par Pékin et que, entre autres choses, le régime de Pékin et des acteurs du régime, notamment le ministère du Front commun, avait amplifié et diffusé de la désinformation, et votre conclusion selon laquelle il vous a été impossible de relier cette désinformation à une source parrainée par l'État. Vous avez répondu que vous êtes arrivés à cette conclusion en vous appuyant sur les éléments de preuve dont vous disposiez à ce moment‑là.
Voulez-vous dire qu'au moment de rédiger votre rapport, vous n'aviez pas en votre possession l'ensemble des preuves et des renseignements pertinents?
Madame la présidente, lorsque nous avons rédigé notre rapport, nous disposions de renseignements provenant du SCRS et d'autres sources, et ce sont ces renseignements qui sont le fondement de notre conclusion.
Vous aviez des renseignements, mais vous avez dit que vous en êtes arrivés à cette conclusion en fonction des renseignements dont vous disposiez à l'époque. Vous avez aussi dit qu'avec ce que vous aviez appris depuis, vous auriez pu aller beaucoup plus loin. C'est à peu près ce que vous avez répondu quand on vous a demandé comment vous pouviez concilier ce que vous avez dit avec ce que M. O'Toole a dit après sa rencontre avec le SCRS.
Madame la présidente, notre rapport s'appuie sur les renseignements que nous avions à notre disposition. Je ne connais pas la teneur de la discussion entre le directeur du SCRS et M. O'Toole. Mais en ce qui concerne...
Madame la présidente, nous détenions des renseignements importants provenant du SCRS et, bien sûr, d'autres entités, notamment de la conseillère à la sécurité nationale, ainsi que de témoignages directs des dirigeants des différents organismes.
Je dirais qu'il y a trois façons possibles de concilier ce que M. O'Toole a dit avec ce qu'il y a dans votre rapport: soit que vous avez omis des renseignements importants, soit que vous avez mal interprété ces renseignements, soit que le gouvernement vous a caché ces renseignements.
Pour être plus précis, j'ajoute qu'à la page 28 de votre rapport, au sujet de l'article paru le 8 septembre dans le Global Times qui contenait de la désinformation — le Global Times étant une entité contrôlée par Pékin —, vous dites à cet égard que « cette circulation n'a pas pu être attribuée à un acteur étatique. »
D'accord. Je vous remercie de cette réponse, parce que les renseignements dont vous disposiez à ce moment‑là comprenaient certainement un rapport du mécanisme de réponse rapide du 18 octobre 2021 qui disait que les médias exploités par le Parti communiste chinois sur la plateforme Douyin — la version chinoise de TikTok — ont publié des vidéos qui reprennent un titre du Global Times, publié le 8 septembre, laissant entendre que la plateforme du PCC amènerait la Chine à rompre ses relations avec le Canada. C'est ce qui a été publié dans un média exploité par le Parti communiste, notamment un média de Douyin qui comptait 26 millions d'abonnés.
Vous aviez cette information. Dans ce cas, pourquoi avez-vous affirmé que vous n'aviez aucune preuve que le régime de Pékin avait joué un rôle dans la circulation de ces faux renseignements?
Madame la présidente, la réponse à cette question, c'est que nous sommes arrivés à la conclusion que nous ne pouvions pas trouver de lien direct avec un acteur étatique. Il ne faisait aucun doute qu'il y avait des activités, mais nous en sommes arrivés à la conclusion qu'elles ne pouvaient être directement attribuées à un acteur étatique.
Le Mécanisme de réponse rapide l'attribuait à un acteur étatique. Il s'agissait d'un média exploité par le Parti communiste. En quoi un « acteur étatique » ne peut‑il pas être un média du Parti communiste?
Non, je parle du rapport du mécanisme de réponse rapide du 18 octobre 2021, l'un des rares documents qui ont été produits à l'intention de notre comité. Vous l'avez certainement lu.
Madame la présidente, à cet égard, l'information que nous avions ne nous a pas permis de conclure qu'il y avait une source parrainée par l'État. Il existe peut-être d'autres informations qui permettraient de clarifier cela, mais ce n'était pas clair pour nous à l'époque.
Eh bien, il y avait des médias exploités par le Parti communiste, dont l'un comptait 26 millions d'abonnés, mais vous avez déclaré sans équivoque que rien n'indiquait que le régime de Pékin faisait circuler et amplifiait de l'information.
À la page 29 de votre rapport, vous dites, au sujet de la mésinformation dont a fait l'objet l'ex‑député Kenny Chiu, qu'il était impossible de la relier à une source parrainée par l'État. Monsieur Johnston, n'étiez-vous pas au courant de cela? Le 10 septembre, un compte associé à HuayiNet, qui est lié au ministère du Front commun, a diffusé de la désinformation provenant d'un autre article du Global Times, qui ciblait cette fois Kenny Chiu. Dans votre rapport, pourtant, vous affirmez catégoriquement que vous n'étiez pas au courant.
Madame la présidente, permettez-moi de citer ce que nous avons écrit à ce sujet à la page 29 de notre rapport:
Les députés canadiens d'origine chinoise, y compris M. Chiu, ont présenté et continuent de présenter un intérêt particulier pour la RPC. Il y avait de la mésinformation en ligne à propos du projet de loi sur les agents étrangers de M. Chiu, qu'il a corrigé dans les médias pendant la campagne. Cependant, la mésinformation n'a pas pu être retracée à une source soutenue par un État. Le gouvernement ne régule pas la consommation de médias sociaux pendant les élections ni à aucun autre moment. Toutefois, il s'est adressé aux plateformes de médias sociaux pour attaquer la mésinformation et la menace qu'elle représente pour la sécurité des élections. Cela ne comprend pas WeChat, qui est basé dans la RPC.
Par votre intermédiaire, je tiens à remercier M. Johnston de sa présence aujourd'hui.
Tout d'abord, monsieur Johnston, je tiens à vous présenter des excuses, à vous et à votre équipe, pour les attaques personnelles dont vous avez fait l'objet, concernant votre intégrité, votre équipe et le travail que vous accomplissez. Je tiens à vous remercier de votre travail sur cette question très grave.
Monsieur Johnston, j'ai lu votre rapport à plusieurs reprises. Je dois dire que j'en arrive à la conclusion que vous avez fait un très bon travail. Il est très clair pour moi que vous avez eu accès à l'information dont vous aviez besoin pour vérifier certaines des déclarations et réfuter une partie de la mésinformation qui a été diffusée. Les renvois aux renseignements qui vous ont amenés à tirer ces conclusions font partie de l'annexe confidentielle intégrée au rapport, dont seules les personnes détenant la cote de sécurité de niveau très secret peuvent prendre connaissance, évidemment.
J'ai deux observations à faire. On entend dire que vous n'avez peut-être pas eu accès à des renseignements supplémentaires. Vous avez dit tout à l'heure que le chef de l'opposition officielle, Pierre Poilievre, a été invité à quatre reprises à fournir des renseignements supplémentaires aux fins de votre examen sur cette question. Il ne vous a fourni aucune information et vous a simplement fait parvenir des copies de reportages médiatiques. Nous croyons savoir que le rapport Cumming, publié dans la foulée des dernières élections, ne vous a pas été fourni.
Y a‑t‑il autre chose? La collecte de renseignements est un processus constant. Il ne s'agit pas de quelque chose de statique, comme une pièce de casse-tête qui, une fois à sa place, ne bouge plus. Avez-vous besoin de plus de renseignements pour poursuivre et achever le travail que vous avez commencé?
Madame la présidente, j'ai deux observations à faire.
La première, c'est que nous avons dû traiter des tonnes d'informations en huit semaines à peine. C'est comme peindre un tableau en une série de coups de pinceau. Vous devez donner un trait de pinceau à la fois pour faire émerger l'image. C'est le seul moyen de faire une synthèse.
Ai‑je la certitude que nous avons vu tous les renseignements que nous aurions voulu ou peut-être dû avoir? Compte tenu de cette mer d’informations, la réponse est non. Je ne sais pas comment nous aurions pu en absorber davantage d'informations que celles que nous avons traitées en l’espace de huit semaines.
Que reste-t‑il à faire? Comme nous l'avons dit, c'est tout l'appareil qui doit faire l'objet d'une révision approfondie. Cela nous donnera une bien meilleure idée du moment où, dans ce nouveau contexte, un renseignement devient une menace et doit être communiqué. Nous ne traitons tout simplement pas l'information aussi efficacement que nous devrions le faire.
Monsieur Johnston, un témoin que nous avons entendu précédemment a dit que les services de renseignement ne comprennent pas vraiment la politique ni les partis politiques, et que les partis politiques et les politiciens ne comprennent pas vraiment ce qu'est la collecte de renseignements et ainsi de suite. Nous devons donc améliorer la communication dans les deux sens entre tous ces intervenants concernant l’ingérence étrangère.
J'aimerais aussi savoir autre chose. Étant donné que le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre se penche sur le sujet, de même que le CPSNR, l'OSSNR, vous-même et d'autres comités, est‑ce que vous recommanderiez que les membres de ce comité reçoivent la cote de sécurité de niveau très secret dont ils ont besoin pour avoir accès aux mêmes renseignements que vous, notamment à l'annexe sur laquelle vous vous êtes manifestement appuyé pour en arriver à vos conclusions? Est‑ce une recommandation que vous feriez, ou pensez-vous que ce serait plutôt un chevauchement des efforts du CPSNR?
Madame la présidente, pour répondre à la deuxième question, je pense que cela mérite un examen très minutieux, surtout si cela permet aux parlementaires de s'acquitter de leurs fonctions.
D'autres pays en ont fait l'expérience. Ils ont mis en place des comités d'examen comme le CPSNR, mais il est logique d'élargir le « cône du silence », pour ainsi dire, et de saisir l'occasion de permettre au Parlement de prendre des décisions en matière de renseignement. Il ne serait peut-être pas nécessaire, selon moi, de conférer cette cote de sécurité à tous les parlementaires, mais je pense que nous pourrions élargir considérablement le rôle des parlementaires, notamment en qui a trait à des enjeux qui les touchent, comme leur sécurité. Il est très clair pour moi que nous ferions un bien meilleur travail si nous cessions de garder l'information confidentielle, si nous cessions de la taire de peur d'affaiblir nos forces. Nous devons trouver des moyens de mettre les parlementaires au courant des renseignements confidentiels.
Pour répondre à votre première question, je dirais que vous avez raison. C'est dans la culture des agences de renseignement de garder l'information confidentielle, et ce, pour de très bonnes raisons. Elles ne veulent pas mettre en danger la vie de leurs sources. Elles sont convaincues qu'elles doivent partager l'information avec d'autres organismes de renseignement. Cependant, d'autres pays ont déployé avec succès des efforts dans le but de mieux gérer cette connexion entre les renseignements classifiés et déclassifiés.
Comme nous parlons de nos ressources en matière de renseignement, vous savez certainement, monsieur Johnston, que mes deux fils sont dans l'armée et que l'un d'eux est officier du renseignement. Je comprends donc très bien l’importance de la sécurité nationale ainsi que la différence entre communiquer une information classifiée en vertu du critère du « besoin de savoir » et mettre en danger nos ressources, ainsi que notre relation avec le Groupe des cinq.
Une chose que nous avons entendue, c'est que nombreux parlementaires ou membres de leur personnel ne savent pas reconnaître ce qu'est une ingérence étrangère. Êtes-vous d’accord pour dire qu'il est nécessaire de mieux les informer si nous voulons être un partenaire crédible dans la recherche d’une solution pour contrer l’ingérence étrangère?
Tout d’abord, permettez-moi de rendre hommage à vos deux fils et de les féliciter pour leur service que j'ai en haute estime.
Deuxièmement, c'est tout un défi de traiter l'information sensible et d'en présenter une version acceptable et compréhensible; comme nous l'avons souligné, nous devons améliorer notre façon de relever ce genre de défis.
La sonnerie vient de cesser. Nous allons accorder à M. Therrien ses six minutes et nous ferons ensuite une pause pour nous assurer que tout le monde a voté.
M. Johnston a beaucoup parlé d'audiences publiques. Quand je parlais d'une commission d'enquête publique, il me répondait souvent qu'il allait tenir des audiences publiques.
Monsieur Johnston, supposons que je sois victime de l'ingérence chinoise, par exemple par un poste de police quelconque. Pensez-vous que j'irais me présenter à une audience publique?
Madame la présidente, il est évident que certaines personnes ne voudront pas comparaître en audience publique. Cela dit, nous encourageons toutes les personnes qui le souhaitent à nous faire parvenir un mémoire, à nous écrire ou à nous faire part de leurs expériences personnelles. Ce serait grandement apprécié et nous espérons pouvoir leur accorder l'attention voulue.
Je vous remercie de votre réponse rapide et précise.
Tenir des audiences publiques, c'est dire aux gens que, s'ils veulent venir parler d'ingérence, ils sont les bienvenus. Mme Cherie Wong a dit très récemment qu'elle n'irait pas à des audiences publiques. Elle est membre de l'Alliance Canada Hong Kong. Elle ne veut pas y aller parce qu'elle craint les représailles.
C'est la différence entre une audience publique et une commission d'enquête. La commission d'enquête va convoquer des gens et assurer le huis clos. Elle peut convoquer des gens et demander qu'on lui fournisse des documents. De cette façon, ces gens pourraient, en toute sécurité, aller discuter avec es membres de la commission, être interrogés et contre-interrogés. L'information ainsi recueillie nous donnerait une meilleure idée de la forme de l'ingérence chinoise chez nous.
Ne trouvez-vous pas, monsieur Johnston, que cette approche est séduisante?
Madame la présidente, selon moi, il est tout à fait possible et approprié que, dans le cadre des audiences publiques, certaines séances aient lieu à huis clos. En fait, comme nous allons poursuivre notre examen des menaces à notre sécurité, je m’attends à ce que nous soyons obligés de le faire à huis clos, ne serait‑ce que pour entendre des fonctionnaires qui ont des renseignements confidentiels à nous communiquer.
Quant aux citoyens qui ne souhaitent pas comparaître en public, mais qui tiennent à nous faire part de faits susceptibles de faire l'objet d'un examen approfondi, je pense qu’il serait tout à fait approprié de les rencontrer à huis clos et de leur assurer toute la protection voulue.
Vous êtes donc favorable à l'idée d'inviter des gens sans nécessairement leur mettre une pression légitime pour obtenir l'information désirée et pour que nous soyons mieux outillés pour faire face à l'ingérence étrangère. C'est ce que je comprends.
Est-ce simplement en invitant des gens que nous allons faire la lumière sur l'ingérence? C'est déjà confirmé. Des victimes membres de la diaspora ont déjà annoncé qu'elles n'iraient pas à ces audiences.
Est-ce là un manque d'information auquel vous serez confronté et qui vous empêchera de faire toute la lumière, conformément à votre mandat?
Personne ne devrait obliger des gens à venir témoigner en public ou à huis clos et à divulguer de l'information, s'ils ne le souhaitent pas. Ce sont des citoyens canadiens. Ils ont le droit de refuser de témoigner et ce droit sera pleinement respecté.
Dans une commission d'enquête, le huis clos est extrêmement important. Je reviens sur la commission Arar. Des gens ont été convoqués, mais ils n'ont pas reçu de menaces à leur intégrité physique ou autre. C'est la preuve qu'une commission d'enquête protège les gens qui sont victimes de ce genre de pression et permet de recueillir l'information la plus complète, comparativement à ce qu'on pourrait obtenir dans des audiences publiques. C'est pour ces raisons que plusieurs experts qui étaient contre une commission d'enquête publique avant le rapport de M. Johnston se sont ravisés après l'avoir lu.
Je reviens maintenant à la conseillère en chef, Mme Sheila Block. Je ne ferai pas un long discours là-dessus. Elle a donné 7 500 $ au Parti libéral et a participé à une activité de financement en 2021, où était aussi le premier ministre.
Le fait de l'avoir choisie comme conseillère en chef vous permet-il d'avoir la confiance des gens qui attendent des solutions à l'ingérence chinoise? Est-ce là un bon geste qui amènera les gens à faire confiance à ce rapporteur spécial?
Madame la présidente, Mme Block est reconnue pour sa sagesse, son impartialité et sa grande intégrité par tous les membres du Barreau du pays qui l'ont côtoyée. Je pense que nous avons eu une chance inouïe de pouvoir compter sur ses compétences, son intégrité et sa détermination à améliorer notre façon de traiter l'ingérence étrangère.
J'ai pleinement confiance en elle, et ce sentiment est largement partagé au pays; elle compte parmi les plus éminents conseillers que nous ayons au Canada.
Les conservateurs ont beaucoup insisté pour savoir s'il était un ami du gouvernement, du premier ministre, et ainsi de suite. Moi, je n'ai pas vraiment posé cette question, pour une raison simple: dans son rapport, il blâme les médias, le SCRS et la fonction publique, mais il ne blâme pas le gouvernement et les ministres. Je trouve que ce rapport est une preuve que, finalement, c'est l'ami du premier ministre.
Madame la présidente, nous ne blâmons ni les médias ni les fonctionnaires dans notre rapport. Ce que nous demandons, c'est de poursuivre ces audiences publiques pour trouver des façons de réformer notre système afin qu’il serve l'intérêt de tous les Canadiens et qu’il fonctionne très bien.
Je vais demander que nous fassions une interruption d'une minute tout au plus, je l'espère, le temps de vérifier que tout le monde a voté et que les votes ont tous été enregistrés.
Je suspends la séance quelques instants. Je vous prie de rester à vos places.
(1200)
(1205)
La présidente: Nous poursuivons la séance.
C'est maintenant au tour de Mme Kwan.
[Français]
Madame Kwan, vous avez la parole pour six minutes.
Monsieur Johnston, dans votre rapport, je lis ceci:
Des irrégularités ont été observées dans la nomination de M. Dong en 2019, et il y a des soupçons bien fondés que les irrégularités étaient liées au consulat de la RPC de Toronto, avec lequel M. Dong entretient des liens.
Avez-vous examiné ces irrégularités? Le cas échéant, de quoi s'agissait‑il?
Madame la présidente, j'essaie d'utiliser les deux côtés de mon cerveau — le côté transparent et le côté confidentiel. Nous en parlons à la page 30:
Han Dong a conseillé le consulat de la RPC de prolonger la détention des « deux Michael » (Global News, 22 mars 2023)
Une transcription alléguée de cette conversation a suscité beaucoup d'intérêt de la part des médias. J'ai examiné le même rapport de renseignement qui a été fourni au premier ministre en lien avec cette allégation, et l'on m’assure qu'il s’agit des seuls renseignements qui portent sur cette question. Je peux déclarer ce qui suit.
L'allégation est fausse. M. Dong a discuté des « deux Michael » avec un représentant de la RPC, mais il n'a pas suggéré au représentant que la RPC prolonge leur détention. L'allégation qu'il a fait cette suggestion a eu un effet très néfaste sur M. Dong. Il a continué à entretenir des liens étroits avec des représentants consulaires de la RPC au moins pendant la campagne électorale de 2021.
Des ministres et le premier ministre ont tenu à défendre M. Dong, qu’ils estiment avoir été très blessé par les reportages. Ils n’ont pas cru les reportages lorsqu’ils ont été publiés...
Mme Kwan est l'invitée du Comité aujourd'hui et nous sommes ravis de l'accueillir. Si nous pouvions simplement porter attention les uns aux autres, vous constateriez alors... Je pense qu'elle essaie seulement de dialoguer avec vous. Nous apprécions ces citations de votre rapport, mais elle vous a déjà dit qu'elle l'avait lu. Elle veut donc simplement que vous lui répondiez de votre mieux...
J'ai lu le rapport à plusieurs reprises, je n'ai donc pas besoin que M. Johnston m'en cite des extraits. Je veux vraiment qu'il réponde à ma question, ce qu'il n'a pas fait.
Ma prochaine question est la suivante. A‑t‑il demandé au premier ministre s'il était au courant de ces irrégularités?
Monsieur Johnston, ce sont les irrégularités dont vous parlez dans votre rapport. Je vous cite: « Des irrégularités ont été observées dans la nomination de M. Dong en 2019, et il y a des soupçons bien fondés que les irrégularités étaient liées au consulat de la RPC de Toronto, avec lequel M. Dong entretient des liens. »
Les irrégularités concernaient les assemblées d'investiture et le transport par autobus de personnes et d'étudiants; il y avait aussi des questions pour savoir si M. Dong avait remplacé un autre candidat dans le processus de nomination. C'est ce genre d'irrégularités, je pense.
Nous avons demandé au premier ministre s'il était au courant de la nomination de M. Dong et des allégations selon lesquelles un candidat précédent avait été écarté. Il a répondu qu’il était au courant de cela et qu’il y avait des raisons pour expliquer le désistement de ce candidat et la nomination de M. Dong.
Dans votre rapport, monsieur Johnston, vous en arrivez à la conclusion qu'il était raisonnable que le premier ministre ne prenne aucune mesure, même si vous affirmez qu'il y a eu des irrégularités et que les soupçons étaient fondés.
Je me demande bien comment vous pouvez concilier tout cela et en arriver à cette conclusion, alors que, malgré des soupçons bien fondés, aucune mesure n’a été prise. Le thème récurrent de votre rapport semble être que puisqu’aucune recommandation n'a été faite, aucune n'a été retenue et aucune n’a été ignorée. D’une façon ou d’une autre, c'est comme si vous disiez: « Je ne vois pas de mal, je ne connais pas de mal, il n’y a donc pas de mal », mais en réalité, il y a beaucoup plus que ça et le problème est plus profond que ce qui se passe.
Ma question est donc la suivante. M. Johnston peut‑il expliquer si le SCRS a examiné les processus de nomination?
Madame la présidente, il est très difficile de gérer les processus de nomination, parce qu’ils sont régis par les règles du parti. Il est donc très difficile de les réguler et de les surveiller, et je pense que l'on s'attend à ce que chaque parti se dote de règles appropriées.
Je pense que le SCRS savait que les activités de mise en candidature respectaient des règles qui ne sont pas parmi les plus attractives, mais à ce jour, je ne pense pas que le SCRS ait accordé beaucoup d’attention à cette question.
Cela explique pourquoi le SCRS ne fait aucune recommandation au premier ministre à ce sujet, parce qu'il n'examine pas la question en profondeur, mais cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de problème. Même dans votre propre rapport, monsieur Johnston, vous soulignez qu'il y avait des irrégularités et des soupçons bien fondés. Comment pouvez-vous en venir à la conclusion que le premier ministre n'a aucune mesure à prendre, que tout va bien? J'ai vraiment beaucoup de mal à comprendre cela.
J'aimerais poser la question suivante à M. Johnston: pouvez-vous dire au Comité ce que vous entendez par apparence de conflit d'intérêts? Qu'est‑ce que cela signifie pour vous?
Il y a apparence de conflit d'intérêts lorsqu'une personne raisonnable en possession de tous les faits avérés conclut qu'une autre personne n'est pas en mesure de porter un jugement impartial sur une question particulière. Il y a deux éléments clés à considérer: premièrement, la personne est raisonnable et, deuxièmement, elle a en main tous les faits avérés.
Avez-vous vérifié si Mme Block a fait un don au Parti libéral ou si elle a assisté à une activité de financement du Parti libéral avec le premier ministre avant de lui demander de se joindre à votre équipe pour faire cet important travail?
Madame la présidente, j'ai travaillé avec Mme Block à une occasion auparavant et je lui fais entièrement confiance, ainsi qu'à ses collègues, pour porter de bons jugements sur les conflits d'intérêts. En ce qui concerne ses contributions au Parti libéral, elle en a fait à d'autres partis aussi et elle a servi le pays avec grande distinction.
Non, je ne crois pas que Mme Block soit en conflit d'intérêts.
Monsieur Johnston, je vous renvoie à la page 31 de votre rapport, où vous écrivez que « le SCRS a transmis [...] une note de gestion d'enjeux », au ministre de la Sécurité publique de l'époque, Bill Blair, et à son chef de cabinet, en mai 2021. Cette note avertissait que Pékin avait le député Michael Chong dans sa mire.
Jeudi dernier, le ministre Blair a dit quelque chose de très différent de ce que vous écrivez dans votre rapport. Il a dit que le SCRS ne lui a pas transmis ce renseignement. Comment peut-on concilier ce que vous dites dans votre rapport et ce que le ministre Blair a dit devant le Comité jeudi dernier?
D'accord. Il est écrit que « le SCRS a transmis une note de gestion d'enjeux ». C'est bien la question?
M. Michael Cooper: Oui.
Le très hon. David Johnston: Il est écrit aussi: « Le SCRS a bien donné le breffage en question, mais nous comprenons, d'après ce que M. Chong a indiqué aux médias et au [Comité de la procédure et des affaires de la Chambre], que ce breffage ne comprenait pas de détail concernant sa famille. »
Madame la présidente, j'essaie de comprendre le contexte afin de pouvoir répondre correctement.
Il est clair pour nous qu'il y a eu rupture dans la communication des avertissements du SCRS à M. Blair, pour des raisons qui, à mon avis, doivent être corrigées, en précisant notamment qui reçoit l'information et avec quel type d'équipement, etc. Je pense que cela a été clairement indiqué.
Dans ce cas‑ci, le premier ministre est intervenu...
M. Michael Cooper: Vous...
Le très hon. David Johnston: ... pour mettre en place un bien meilleur protocole...
Sur cette belle feuille que j'ai devant moi, il y a exactement le temps alloué à chacun et le temps auquel chacun a eu droit. Vous remarquerez que lorsque l'échange se déroule bien, qu'une seule personne parle à la fois et qu'on entend le signal sonore, je laisse la conversation se poursuivre.
Vous en êtes la preuve, monsieur Cooper. Au dernier tour, vous aviez six minutes, et je vous ai laissé aller pendant sept minutes et douze secondes. Savez-vous pourquoi? L'échange se déroulait bien et nous obtenions de bons renseignements.
Encore une fois, allons‑y à tour de rôle. Vous pouvez être assurés, comme tous les membres du Comité, que le temps qui vous est alloué vous sera accordé.
Monsieur Johnston, à la page 31 de votre rapport, vous dites très précisément qu'une « note de gestion d'enjeux » a été envoyée au ministre en mai 2021 concernant Michael Chong, mais que « ni le ministre ni son chef de cabinet n'a reçu la note », parce qu'ils n'avaient pas accès aux courriels de ce que vous appelez la « messagerie du réseau Très secret ». Jeudi dernier, au Comité, le ministre Blair a dit que ce n'était pas une question d'accès. En fait, il a dit: « Premièrement, il n'y a pas de compte courriel [...] »
M. Blair n'a‑t‑il pas été franc dans son témoignage, ou est‑ce qu'il y un fait important ou des faits que vous auriez pu mal rapporter? J'ai du mal à concilier ce que M. Blair a dit, d'une part, et ce que vous dites, d'autre part.
Madame la présidente, la question portait sur ce que M. Blair a reçu. D'après ce que nous avons compris de son témoignage devant nous, il n'a pas reçu la note de service qui portait cet avertissement.
Madame la présidente, il m'apparaît très clairement qu'il n'a pas reçu le message, par courriel ou quoi que ce soit. C'est le témoignage qu'il nous a livré. Pour nous, cela semblait être une faille très importante dans la façon de cristalliser l'information et de l'acheminer aux destinataires qui sont habilités à la traiter.
Il est impossible de comprendre comment M. Blair a pu dire qu'il n'y avait pas un tel compte courriel, mais vous, vous dites qu'il y en a un.
Passons maintenant au député de Don Valley-Nord. À la page 27 de votre rapport, vous dites que vous n'avez « pas trouvé de preuve selon laquelle M. Dong était au courant des irrégularités ou de l'implication possible du consulat de la RPC dans sa nomination ». Avez-vous trouvé des preuves ou des renseignements indiquant que M. Dong n'était pas au courant de l'implication du consulat de Pékin dans les irrégularités qui ont marqué sa campagne d'investiture, lors de l'assemblée de mise en candidature?
Encore une fois, j'essaie de distinguer entre ce qui est de l'information ouverte et ce qui est de l'information classifiée.
En ce qui concerne l'assemblée de mise en candidature, il y a eu manifestement des pratiques curieuses, inhabituelles. Nous ne sommes pas arrivés à la conclusion d'une implication directe de la République populaire de Chine. Il est vrai qu'il y a eu discussion entre M. Dong et le consulat de Toronto, mais sans plus, à ma connaissance.
Nous avons interviewé les gens qui avaient de l'information sur ce sujet précis. À l'époque, je pense, M. Dong intentait sa propre poursuite. Nous avons pensé qu'il devait aller de l'avant.
En répondant à une question posée précédemment, à la fin, monsieur Johnston, vous avez dit avoir travaillé avec Mme Block auparavant. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce travail antérieur?
Vers 2007‑2008, le premier ministre Harper m'a invité à examiner les allégations d'accointance entre M. Karlheinz Schreiber et l'ancien premier ministre Mulroney, qui avait démissionné, et à fixer les paramètres d'une enquête sur cette affaire. Mme Block a communiqué avec nous pour offrir ses services d'avocate principale. Avec son équipe du cabinet d'avocats Torys, elle s'est montrée extrêmement utile et compétente.
Lorsque je lui ai demandé de m'aider à cet égard, on m'a dit qu'elle était l'avocate tout indiquée au pays pour faire ce genre de travail, et cela s'est avéré.
Au cours de vos travaux, monsieur Johnston, on vous a remis des milliers de documents. Vous avez dit que vous ne disposiez que de quelques semaines et qu'on vous avait fourni amplement de preuves, y compris des renseignements. Vous avez interviewé des fonctionnaires, des ministres, le premier ministre et des gens de la sécurité et du renseignement. Vous avez ensuite examiné des allégations non vérifiées qui ont circulé dans les médias ou qui ont été lancées par des politiciens. Enfin, vous avez examiné le fond de l'affaire, le matériel qui vous a été fourni, pour tirer des conclusions.
J'aimerais passer en revue certaines de ces conclusions et vous demander de nous en dire un peu plus, d'expliquer pourquoi vous êtes arrivé à ces conclusions.
Au sujet de l'allégation selon laquelle la République populaire de Chine aurait versé 250 000 $ à 11 candidats politiques lors de l'élection de 2019 — c'est ce que disait le reportage de Global News du 7 novembre 2022 —, vous dites dans votre rapport:
Aucune recommandation n'a été formulée à un ministre ou au premier ministre concernant cette allégation et donc, aucune recommandation n'a été ignorée.
Pouvez-vous nous expliquer comment vous êtes arrivé à cette conclusion?
C'est énoncé à la page 25. Nous terminons en disant:
La CSNR Thomas et la chef de cabinet du premier ministre ont toutes les deux témoigné devant le [Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre] et déclaré que rien ne prouvait que de l'argent avait été envoyé à des candidats fédéraux.
J'ai demandé au premier ministre et à d'autres ministres si des membres de leur personnel ou eux-mêmes savaient quelque chose à propos d'un transfert d'argent à des candidats fédéraux durant l'élection de 2019. Ils ont répondu qu'ils n'en avaient jamais entendu parler avant que cela ne sorte dans les médias. Le premier ministre a fait remarquer qu'on ne le mettait pas au courant des affaires qui ne sont pas étayées par des renseignements fiables. Aucune recommandation n'a été formulée à un ministre ou au premier ministre concernant cette allégation et donc, aucune recommandation n'a été ignorée.
Ensuite, en ce qui concerne les allégations selon lesquelles il y avait un réseau de 11 candidats et agents électoraux fédéraux, dont au moins quelques-uns étaient « des affiliés du parti communiste chinois » — c'est ce que rapportait Global News le 7 novembre 2022 —, vous dites dans votre rapport:
Je conclus qu'aucune preuve n'a été présentée aux ministres ou au premier ministre établissant que certains de ces 11 candidats ou qu'un groupe de candidats travaillaient ensemble dans le cadre d'un réseau. Aucune recommandation n'a été formulée à propos d'un réseau de candidats, car il n'y a aucune preuve de l'existence d'un tel réseau. Par conséquent, aucune recommandation n'a été ignorée.
Pouvez-vous nous dire comment vous en êtes venu à cette conclusion?
Cela s'appuyait sur de l'information ouverte et de l'information classifiée, pour commencer. Voici ce qu'on lit un peu plus haut, page 25:
La RPC a utilisé des mandataires et a tenté d'influencer de nombreux candidats libéraux et conservateurs de différentes manières subtiles. Rien ne permet de conclure que les 11 candidats travaillaient ou travaillent de concert (c.‑à‑d. comme un « réseau ») ou qu'ils comprenaient les intentions des mandataires. Certains des candidats sont bien intégrés dans des organisations communautaires canado-chinoises. Il n'y a rien d'intrinsèquement douteux à ce propos, car il est courant pour des candidats politiques de se fonder sur le soutien de leur communauté.
Bref, d'après ce que nous avions en main, nous n'avons pas pu établir la preuve qu'un réseau intégré fonctionnait comme on le prétendait.
On en a parlé un peu lors de questions précédentes, mais je tiens à tirer au clair l'allégation selon laquelle Han Dong aurait conseillé au consulat de la RPC de prolonger la détention des deux Michael. Global News semblait très sûre de son coup à ce sujet. Vous avez découvert que c'était faux. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi?
Global News s'appuyait, je pense, sur une première ébauche d'une interprétation de ce qui avait transpiré d'une conversation entre un membre du consulat de la RPC et M. Dong. Cela a fait place ensuite à une autre entrevue, où l'interprétation initiale, selon laquelle M. Dong aurait proposé que les deux Michael restent détenus, était tout simplement erronée. C'était une fausse interprétation.
Monsieur Johnston, vous avez mentionné que vous aviez rencontré des témoins qui avaient des informations pertinentes pour que vous puissiez rédiger le rapport que vous avez déposé il y a deux semaines. J'ai quelques questions là-dessus.
D'abord, avez-vous rencontré le directeur général des élections actuel, M. Stéphane Perrault?
Madame la présidente, nous n'avons pas rencontré le directeur, M. Perrault, parce que ni lui ni la commissaire aux élections fédérales n'avaient reçu de plaintes à propos de l'ingérence. Nous prévoyons le rencontrer, lui et ses collègues, puisque nous cherchons à améliorer nos systèmes et que nous sommes ouverts à toute suggestion qui pourrait aider la commissaire à travailler plus efficacement.
À moins que je ne me trompe, l'ingérence chinoise attaque d'une certaine façon le système électoral du Canada, et peut-être celui du Québec.
Vous ne trouviez pas pertinent de rencontrer le directeur général des élections actuel. Il me semble que, dès le départ, M. Perrault aurait dû être rencontré parce qu'il est au cœur de tout ce qui se passe au sein du processus électoral du Canada. Je suis un peu stupéfait d'entendre que vous ne l'avez pas rencontré, même si je comprends votre réponse.
Avez-vous rencontré la commissaire aux élections, Mme Caroline Simard?
Madame la présidente, aucune plainte n'avait été déposée auprès de la commissaire aux élections fédérales, Mme Simard, et du directeur général des élections, de sorte que nous n'avions pas matière à faire un suivi des élections de 2019 et de 2021. Pour cette raison, nous ne les avons pas rencontrés, mais nous nous attendons à le faire pour nos travaux à venir.
Il n'y a pas eu de plainte, mais 11 candidats auraient été victimes d'une certaine forme d'ingérence au cours des élections. Vous le confirmez dans votre rapport. Ce sont des candidats à des élections. Comme il n'y a pas eu de plainte visant ces deux organisations, vous vous êtes dit que vous n'aviez pas à rencontrer la commissaire aux élections ou le directeur général des élections.
Madame la présidente, nous nous attendons à rencontrer ces deux fonctionnaires dans le cadre d'un examen ultérieur. Ce que je disais, c'est qu'à notre connaissance, aucune plainte ne leur avait été adressée qui aurait justifié de les rencontrer au sujet des élections de 2019 et de 2021.
J'aimerais remercier M. Johnston de sa présence ici aujourd'hui.
Je veux revenir à la question que Mme Kwan vous a posée au sujet de l'approbation de Sheila Block. Je ne sais trop si vous comptiez sur son sens de l'honneur pour qu'elle aborde elle-même les préoccupations au sujet de ses antécédents de donatrice, ou si vous étiez au courant de tous ces dons et qu'à vos yeux, cela ne posait aucun problème, étant donné l'importance du travail que vous alliez lui confier.
Madame la présidente, en ce qui concerne Mme Block, j'ai communiqué avec elle parce qu'elle est une avocate éminente et hautement qualifiée. J'avais travaillé avec elle dans un autre dossier difficile...
La réponse, c'est que je n'étais pas au courant, et il ne me serait pas venu à l'idée de me renseigner à ce sujet, parce que sa réputation et son intégrité sont irréprochables et continuent de l'être, à mon avis.
Monsieur Johnston, nous avons entendu beaucoup de choses aujourd'hui. Des conservateurs citent des libéraux qui font l'éloge de vos décennies de service public. Des libéraux citent des conservateurs qui en font autant. Il ne fait aucun doute que vous avez une longue feuille de route dans le service public.
Il en a été question à la Chambre également, à savoir qu'une motion a été adoptée par une majorité de parlementaires dans un parlement minoritaire. Les parlementaires ont lu votre rapport et en ont tenu compte avant de voter.
Comme vous l'avez dit au début, vous avez un profond respect pour le Parlement, alors je suis perplexe. Comment pouvez-vous avoir un profond respect pour le Parlement si vous faites fi d'un vote qui vous demande clairement de vous retirer pour qu'on puisse tenir une enquête publique, comme le veulent évidemment la plupart des Canadiens?
Madame la présidente, j'ai un profond respect pour le Parlement et j'espère l'avoir bien prouvé au cours de ma vie et de mon mandat de gouverneur général.
La raison pour laquelle je maintiens ma position face à cette motion du Parlement, c'est que le vote reposait sur des allégations qui étaient fausses, à mon avis. J'aurais tort de simplement me retirer en disant: « Laissons libre cours à ces allégations. C'est un fait; c'est la vérité, ainsi soit‑il. » Ce ne serait pas la bonne chose à faire.
Monsieur Johnston, sauf votre respect, il ne vous appartient pas de déterminer comment les parlementaires votent ou pourquoi ils votent de cette façon. Comme vous l'avez dit, vous avez un profond respect pour le Parlement, alors vous devez tenir compte d'un vote parlementaire. Ayant moi-même voté dans ce sens, j'étais bien au courant de vos antécédents de service public, mais je n'approuvais tout simplement pas vos conclusions.
Madame la présidente, le gouvernement m'a confié une tâche importante, celle d'examiner l'ingérence étrangère dans nos élections. J'ai entrepris cette tâche et j'ai l'intention de la poursuivre jusqu'à ce que mes services ne soient plus utiles ou nécessaires.
C'est la raison pour laquelle, avec tout le respect que j'ai pour le Parlement...
Merci d'être ici, monsieur Johnston. Nous vous sommes reconnaissants de participer à cet important processus démocratique qui vise à obliger le gouvernement libéral à rendre des comptes, comme c'est le devoir de l'opposition officielle de Sa Majesté. Je vous remercie donc encore une fois d'être ici aujourd'hui.
J'aurais une brève question au sujet de votre rapport. Vous savez sans doute que Pékin a établi de nombreux postes de police en différents endroits au Canada dans le but d'intimider les Canadiens d'origine chinoise et les étudiants venus de Chine, de museler leur droit démocratique de débattre et de critiquer librement des gouvernements étrangers.
Cependant, j'ai été déçue de constater que vous n'en parliez pas dans votre rapport. Pouvez-vous expliquer pourquoi?
Madame la présidente, ces postes de police se livrent à des activités abjectes en de nombreux endroits au Canada et dans d'autres pays. Ils font l'objet d'une enquête de la GRC, ce qui est plutôt inhabituel comme situation. En raison des activités d'enquête et de surveillance en cours, nous avons jugé qu'il valait mieux laisser mener cette enquête à terme.
J'estime toutefois que c'est justifié, et cela s'inscrit certainement dans la sphère de l'ingérence étrangère dont on a tant parlé. Je vois que vous hochez la tête pour signifier votre accord.
J'ai l'impression que le mutisme sur cette question alimente en quelque sorte une perception de parti pris, une chose qu'on reproche à ce rapport et au fait que vous l'avez dirigé, d'autant que le gouvernement libéral s'est traîné les pieds pour présenter une loi sur le registre des agents étrangers. Ce serait pourtant l'outil essentiel pour tenir responsables ceux qui exploitent ces postes de police illégaux de Pékin, qui constituent une violation flagrante de notre souveraineté. C'est une gifle à tous les Canadiens. Nous avons besoin de cette loi pour obliger les responsables à rendre des comptes, or le gouvernement libéral se traîne les pieds depuis des années. J'estime, monsieur, que cette critique aurait été justifiée dans un rapport qui en exprime très peu, voire aucune, à l'endroit du gouvernement libéral actuel.
Je trouve préoccupant aussi que vous ayez omis de dire que la Fondation Trudeau, d'après le rapport du SCRS qui a fait l'objet d'une fuite, avait reçu 140 000 $ par divers canaux de la part du Parti communiste chinois. Dans ce rapport, le SCRS dit avoir découvert, grâce à une écoute électronique, que cet argent avait été versé expressément dans le but d'influencer Justin Trudeau, qui allait devenir premier ministre. Cette omission a elle aussi de quoi nourrir une perception de parti pris, monsieur. Que ce soit justifié ou non, c'est certainement une perception valable que beaucoup de gens ont signalée, en dehors du Parti conservateur.
Je comprends que vous ne voyiez pas de conflit d'intérêts avec Justin Trudeau ou avec la famille Trudeau. Je dois reconnaître qu'il n'est pas courant, au Canada, que des gens soient amis avec des fils de premier ministre, qu'ils partagent des repas et qu'ils fassent du ski avec eux.
Je suis diplômée de McGill, monsieur, et je sais que vous êtes passé par là aussi. Vous avez dit à plusieurs reprises être tombé par hasard sur Justin Trudeau à McGill et l'avoir vu là‑bas. Je peux dire pour ma part que, lorsque j'étais à McGill, je ne savais pas qui était le président, et encore moins que je suis tombée sur lui à maintes reprises.
J'ai l'impression qu'à cause de votre longue carrière et des services que vous avez rendus au Canada, vous avez des liens évidents avec un cercle très restreint de ce que certains appellent les « proches du Parti libéral », ce dont vous ne vous rendez peut-être pas compte. Votre nomination a clairement donné l'impression que vous aviez un parti pris. À tort ou à raison, ceux qui ont cette perception ont une bonne raison de l'avoir.
En fin de compte, monsieur, bien que le rapport soit exhaustif, il minimise bon nombre des préoccupations et des fuites dont nous ont fait part des journalistes réputés dans le Globe and Mail. Il en réfute quelques-unes. Il dit que d'autres sont fausses et que les conclusions sont fausses. Vous êtes très critique, et je comprends que vous ne voyiez pas les choses de cette façon, mais ce rapport, monsieur, est très critique à l'égard des médias et de leur traitement de ces fuites pour informer le public.
Il critique aussi vivement le Parti conservateur pour avoir tenu le gouvernement responsable lorsqu'il a été mis au courant de ces fuites. Encore une fois, il épargne beaucoup le Parti libéral, qui s'est pourtant bien gardé d'imputer à qui que ce soit la responsabilité des postes de police chinois, de l'intimidation des députés Chong, O'Toole, Kwan et Chiu, sans parler du ciblage du Parti conservateur du Canada. En fait, le seul diplomate expulsé n'aurait pas été expulsé si ces fuites n'avaient pas eu lieu. Pourtant, il n'y a rien dans ce rapport qui critique l'inaction et l'échec à tenir quiconque responsable de ces agissements.
Monsieur, avec tout le respect que je vous dois, j'estime que l'apparence de parti pris est justifiée, tant dans le rapport qu'en raison de vos antécédents avec la famille Trudeau.
Je vais conclure, madame la présidente.
Je vous exhorte à respecter la volonté du Parlement, monsieur Johnston, qui a tenu trois votes pour exiger une enquête publique. Respectez la volonté du Parlement et présentez honorablement votre démission.
Madame la présidente, tout d'abord, pour ce qui est de ne pas critiquer le gouvernement, le rapport donne beaucoup de détails sur le fait que notre système de lutte contre l'ingérence étrangère ne fonctionne pas. Il souligne un certain nombre de défauts. J'ai bien accueilli les initiatives qui ont été prises, comme la création d'un registre d'agents étrangers, qui permettrait de rendre cela public. C'est une question qu'il faut étudier, parce qu'il y a des avantages et des inconvénients, mais je pense que des mesures sont prises à cet égard. C'est très encourageant.
En ce qui concerne l'amitié, les connaissances, etc., vous avez laissé entendre que, d'une certaine façon, mon groupe d'amis se compose de hauts dirigeants du Parti libéral. J'ai eu la chance, dans ma vie, de présider deux universités importantes au Canada. J'ai participé à deux ou trois douzaines d'enquêtes, des conseils consultatifs, etc. Quand on fait ce genre de travail, on a l'occasion de rencontrer de hauts fonctionnaires, qu'ils soient conservateurs ou de n'importe quel autre parti. Pour moi, cela fait tout simplement partie de ma vie, alors il est tout simplement faux de prétendre que je fais partie d'une clique libérale.
Monsieur Johnston, j'ai été réconforté, en un sens, par le fait que vous ayez invité tous les partis représentés au Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, ou CPSNR, et les experts en sécurité et renseignement par l'entremise de l'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement, ou OSSNR, à examiner vos constats. Vous avez également dit à maintes reprises aujourd'hui, et je sais que cela figure également dans votre rapport, que les chefs de l'opposition ont été invités à examiner les faits qui figurent à l'annexe de votre rapport et que vous les avez encouragés à le faire.
Je crois comprendre, d'après les commentaires de Mme Dancho, que le fait que vous qualifiiez quelque chose de « faux » est une critique. Je pense que c'est simplement un engagement envers la vérité.
Il semble que vous devez être convaincu — dans vos constatations et les conclusions que vous avez tirées des faits, selon le contexte — que les autres parties et personnes que vous avez invitées à examiner vos constats tireraient les mêmes conclusions. Dans quelle mesure en êtes-vous convaincu?
Ce que je dirais, madame la présidente, c'est que nous avons fait de notre mieux pendant les deux mois dont nous disposions pour suivre les faits le plus loin possible et appliquer la loi.
Nous nous réjouissons de l'examen, de l'aperçu des deux comités dont vous avez parlé, auquel se joignent les chefs des principaux partis de l'opposition. Je pense que c'est approprié et que c'est ainsi que les choses devraient fonctionner. Notre travail devrait consister à rendre des comptes, comme c'est le cas ici. C'est ce que feront des comités qui ont une expertise dans ce domaine et qui le font depuis très longtemps.
En ce qui concerne les médias, nous disons dans notre rapport que nous ne les dénigrons pas. La liberté de presse est très importante dans notre pays et ce serait le chaos si nous ne l'avions pas, surtout en ce qui concerne la primauté du droit.
Je sais que vous avez dû avoir une habilitation de sécurité au plus haut niveau pour pouvoir examiner les documents de renseignement dans le contexte où vous avez formulé vos conclusions dans votre rapport. Vous a‑t‑on empêché de dire publiquement ce que vous pensez de l'action ou de l'inaction du gouvernement à la suite de l'obtention de cette habilitation de sécurité?
La réponse à cette question, madame la présidente, est non. On ne nous a pas empêchés de dire quoi que ce soit. En fait, nous avons travaillé très fort pour essayer de rédiger un rapport qui jetterait le plus de lumière possible sur cette question, tout en respectant les renseignements classifiés. Il n'y avait aucun obstacle. Nous étions très heureux de pouvoir repousser ces limites un peu plus qu'elles ne le seraient normalement dans un rapport public.
J'ai passé beaucoup de temps à examiner tout ce que le gouvernement a fait au sujet de l'ingérence étrangère depuis 2015. J'ai entendu à maintes reprises des gens dire des choses fausses, que le gouvernement n'a rien fait.
Dans votre rapport, vous y consacrez un nombre considérable de pages — je crois que c'est aux pages 35 à 57, donc une vingtaine de pages du rapport — et vous concluez ainsi:
Bien qu'il est possible et essentiel d'en faire plus pour renforcer notre capacité à détecter et dissuader l'ingérence étrangère, l'étendue des initiatives stratégiques du gouvernement et les communications régulières sur le sujet contredisent les suggestions selon lesquelles le gouvernement avait l'intention de cacher l'existence de l'ingérence étrangère, qu'il a omis par négligence d'aborder le problème ou qu'il a accepté de tolérer l'ingérence étrangère.
Pouvez-vous confirmer encore une fois qu'il est faux de dire que notre gouvernement n'a rien fait au sujet de l'ingérence étrangère?
Madame la présidente, nous avons présenté une série d'initiatives qui ont été prises, principalement à partir de 2017 environ. L'influence russe était la principale préoccupation à ce moment‑là; l'influence chinoise l'est devenue. Il y avait clairement une activité importante. Ce qui est préoccupant, c'est que les mesures n'ont pas été prises assez rapidement pour rattraper l'ingérence étrangère croissante, qui se poursuit.
Ce que nous avons fait dans ce contexte, c'est d'essayer de créer une liste d'autres initiatives qui devraient être mises en place, dont certaines devraient selon nous être examinées dans le cadre de nos audiences publiques, de continuer d'être beaucoup plus agressifs en reconnaissant la nature du renversement de la situation, puis de prendre des mesures rapides pour la contrer, la décourager et la régler de façon adéquate.
Si vous me permettez de poursuivre dans la même veine, je sais qu'à un moment donné — et je ne me souviens pas exactement où c'était —, vous avez admis que vous avez émis l'hypothèse, avant de commencer votre travail de rapporteur spécial, que vous alliez probablement mener une enquête publique, mais ce n'est pas ce qui est arrivé. Vous avez participé à des audiences publiques.
Madame la présidente, une enquête publique ferait double emploi avec le travail que nous avons tenté de faire, surtout en ce qui concerne les renseignements classifiés. N'importe quelle enquête publique va se heurter au même problème: comment traiter les renseignements classifiés de façon ouverte et en faire rapport?
Nous sommes d'avis que vous pourriez le faire, particulièrement dans le domaine de la réforme de nos systèmes, en les examinant attentivement et de façon réfléchie, en tirant parti de la meilleure expertise possible, en renforçant les comités de surveillance, en misant sur un meilleur système de gestion de l'ingérence étrangère et en tirant des leçons d'autres administrations, en particulier du Groupe des cinq, qui a acquis une expérience considérable en composant précisément avec ces défis.
Madame la présidente, j'ai reçu des conseils informels de plusieurs personnes, y compris des professionnels, mais personne n'a été payé pour ses services à part Navigator.
Au moins trois fois, monsieur Johnston, vous avez mal cité des sections de votre rapport en réponse à diverses questions de députés de tous les partis. Cela nous amène à nous demander, monsieur, qui a rédigé ce rapport.
Madame la présidente, nous avons eu des discussions continues avec des représentants du CPM au moment où nous cherchions des renseignements et que nous tentions d'obtenir différents...
Monsieur Johnston, je vous remercie d'avoir pris le temps de comparaître devant nous au cours des trois dernières heures.
Votre mandat consiste essentiellement à examiner l'ingérence étrangère dans notre processus électoral. C'est au cœur de votre mandat.
Au Canada, il n'y a qu'un seul processus électoral fédéral, et c'est le processus par lequel les Canadiens obtiennent un vote pour leur député local. Tous les autres membres de notre système sont nommés. Les sénateurs sont nommés. Le premier ministre est nommé — comme vous le savez, à titre d'ancien gouverneur général. Les membres du Cabinet sont nommés. Tous les autres sont nommés. Le seul processus électoral fédéral dans notre système concerne la Chambre des communes. C'est la seule partie de notre système qui comporte un processus électoral. C'est la seule partie de notre système qui est démocratique. C'est la seule partie de notre système où les Canadiens ont le droit de vote, et c'est pour la Chambre des communes.
La majorité des 338 représentants élus par la population ont voté à trois reprises au cours des trois derniers mois en faveur d'une enquête publique indépendante, et pourtant vous et vous seul — avec tout le respect que je vous dois — avez recommandé le rejet d'une telle enquête. Comment vous et le gouvernement, dans le cadre de ce processus auquel vous participez en qualité de rapporteur indépendant, pouvez-vous rétablir la confiance dans notre démocratie si le gouvernement continue de défier la volonté démocratique de notre seule institution démocratique nationale, la Chambre des communes?
Madame la présidente, le gouvernement au pouvoir m'a demandé d'entreprendre un examen de l'ingérence étrangère, et cela comprenait la question de savoir si une enquête publique serait la meilleure façon de procéder. Après y avoir longuement réfléchi, nous avons conclu que ce n'était pas le cas, mais que la tenue d'audiences publiques sur des questions qui n'étaient pas des renseignements classifiés serait une façon très appropriée de renforcer la confiance dans nos institutions.
Ce travail continue d'être très important, et je pense que nous devons susciter un sentiment d'urgence de nous atteler à cette tâche.
J'ai une tout autre question, madame la présidente, très courte.
M. O'Toole a indiqué que le rapport avait été envoyé à la traduction le week-end précédant sa rencontre avec vous. À quelle date le rapport a‑t‑il été envoyé à la traduction?
Si ma mémoire est bonne, madame la présidente, [difficultés techniques] pour la traduction. Il était compris que la traduction pourrait commencer et qu'il y aurait des changements au rapport. Dans les deux jours qui ont suivi notre rencontre avec M. O'Toole, rencontre extrêmement importante et utile, je le répète, nous avons apporté des changements au rapport et veillé à les faire intégrer dans la traduction.
J'espérais bien. Depuis ma dernière intervention, nous avons reçu des questions des conservateurs sur l'ingérence étrangère, mais il semble que nous ayons bouclé la boucle avec une nouvelle théorie du complot qui demande si vous avez vraiment rédigé le rapport que vous avez signé. Après trois heures de désespoir, c'est ce que nous apprenons.
Mais je reviens à notre propos. Monsieur Johnston, vous avez insisté pendant votre témoignage d'aujourd'hui sur le grand soin que vous avez pris à écrire et à partager de l'information facile à lire et à comprendre par les Canadiens ordinaires. En tant qu'ancien membre du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, le CPSNR, je peux affirmer que, s'il y a une chose que ce comité surveille très attentivement également, c'est justement la façon de rédiger un rapport public qui soit à la portée des personnes qui ne sont pas des experts en sécurité nationale.
J'ai bien aimé l'explication que vous avez donnée dans votre rapport sur la façon dont vous présenteriez toute l'information sur laquelle vous avez fondé vos recommandations ou vos conclusions. Vous les regrouperiez dans une annexe, que vous mettriez à disposition pour examen. J'ai noté que vous accueillez favorablement l'examen fondé sur l'information sur laquelle vous avez formulé vos recommandations.
Est‑il raisonnable que certains expriment des doutes sur votre intégrité et aillent jusqu'à se demander si vous êtes bien l'auteur du rapport et quels renseignements vous aviez ou n'aviez pas, alors que ces mêmes personnes ont eu la possibilité de lire toute l'information confidentielle sur la sécurité nationale, mais qu'elles ont préféré ne pas le faire? Selon vous, est‑il raisonnable que quelqu'un qui refuse de lire l'information porte ensuite un jugement sur l'information que vous aviez ou n'aviez pas?
Madame la présidente, permettez-moi de répondre à cette question de manière générale. Je pense qu'en traitant de quelque chose d'aussi important et explosif que l'ingérence étrangère dans nos élections qui fait naître la méfiance à l'égard de nos institutions — et, soit dit en passant, ces ennemis se frottent les mains de satisfaction en observant les paroxysmes que nous connaissons — il faudrait travailler très fort pour expliquer l'ingérence étrangère aux parlementaires, mais que le public n'y comprend pas grand-chose. Dans ce pays béni qu'est le Canada, nous préférons nous sentir bien protégés, sans avoir à nous soucier de cela.
Mais nous devons nous en soucier. Cela nous pose des problèmes très difficiles, qui vont continuer et empirer.
Une autre critique qui revient souvent sur la raison pour laquelle certains chefs de parti refusent d'assister à toute séance d'information sur la sécurité nationale et de prendre connaissance de la même information que vous, c'est qu'ils disent qu'ils seront réduits au silence. Vous êtes ici depuis environ trois heures à discuter de la nature même de ce rapport, de l'information. Vous avez les autorisations de sécurité. Vous avez rédigé un rapport complet fondé sur de l'information protégée concernant la sécurité nationale. Avez-vous l'impression qu'on vous empêche de parler de ces choses‑là, alors que vous avez rédigé un rapport complet à ce sujet et que vous venez de passer trois heures à répondre aux questions de tous les partis sur cette même question, qui rejoint certains aspects de confidentialité en matière de sécurité nationale?
Madame la présidente, je dirai tout d'abord que c'est de la reddition de comptes, et que c'est ce que le Parlement fait et doit faire.
Deuxièmement, je dirais qu'il est tout à fait possible pour les parlementaires d'obtenir la cote de sécurité la plus élevée, comme certains d'entre vous l'ont fait, sans d'aucune façon restreindre leur responsabilité de parler publiquement et ouvertement de ce qu'ils savent dans leur tête. Certes, ils doivent éviter de dévoiler de l'information classifiée. C'est le problème que nous avons avec les enquêtes publiques qui sont censées faire la lumière sur des choses lorsque surgit un problème d'information classifiée qu'il ne saurait être question de dévoiler pour les raisons que nous avons évoquées.
Absolument. Je vous remercie de le rappeler, car j'ai moi aussi soulevé la question à la Chambre.
J'ai déjà siégé au CPSNR, et la capacité de distinguer... Ce que vous avez déjà dit dans votre témoignage m'a rappelé le dossier rouge et le dossier vert. Il est parfois difficile de se rappeler ce qui est confidentiel et ce qui ne l'est pas. D'où l'importance des conversations ouvertes. Ce n'est pas un secret que vous essayez de cacher aux Canadiens; c'est une question de protéger le caractère sensible de cette information d'une manière raisonnable et respectueuse qui, au bout du compte, est dans l'intérêt de tous les Canadiens.
Comment pouvons-nous avoir des conversations plus ouvertes avec les Canadiens pour leur donner une meilleure idée de ce qu'est notre sécurité nationale?
Je suis enseignant et je crois fermement qu'il faut voir le monde avec les yeux de mes enfants, et désormais de mes petits-enfants. Je pense que nous devons travailler plus fort pour enseigner à nos jeunes nos institutions civiques, la qualité de nos institutions et la façon dont nous les protégeons.
La démocratie est un vernis très mince. Elle est comme le jardin cultivé à l'orée de la jungle, a écrit Hugh MacLennan dans Voices in Time. Ce jardin est à cultiver. Il doit être cultivé avec beaucoup de soin, parce que si on ne s'en occupe pas constamment, les mauvaises herbes et la jungle auront tôt fait de l'envahir. Nous avons besoin de jardiniers constants. Vous, les parlementaires, êtes les jardiniers constants.
Je pense que nous devons inculquer à nos jeunes enfants l'importance de notre pays, leur faire comprendre que nous avons beaucoup à protéger et que nous devons nous engager dans cette voie pour faire en sorte que le pays soit un meilleur endroit pour ceux qui nous suivront.
La démocratie est menacée. Il faut s'assurer que la population a confiance en cette démocratie. La population demande, à 72 %, une commission d'enquête publique et indépendante. La majorité de la Chambre demande une commission d'enquête publique et indépendante. Plusieurs experts la demandent aussi. Certains ne la demandaient pas au début, mais le rapport de M. Johnston les a convaincus de sa nécessité; ils se sont ajoutés aux experts qui demandaient déjà cette commission d'enquête publique et indépendante. C'est la seule façon d'avoir les documents nécessaires pour parvenir à comprendre cette ingérence et à la limiter. C'est la seule façon de rencontrer les victimes d'ingérence en assurant le huis clos. Ce que M. Johnston propose, ce sont des audiences publiques sans obligation, où l'on ne fait qu'inviter les gens. Des victimes ont déjà dit qu'elles ne s'y présenteraient pas.
L'avantage de la démarche de M. Johnston, c'est qu'elle est moins coûteuse. Combien vaut une démocratie saine? On parle de démocratie.
Selon M. Johnston, sa démarche est plus rapide. Malheureusement, c'est un travail bâclé. C'est plus rapide, mais la lumière ne sera pas faite sur le sujet. C'est tellement rapide qu'il n'a pas rencontré M. Stéphane Perrault, le directeur général des élections du Canada, ni Mme Caroline Simard, la commissaire aux élections fédérales. Dans ce cas, quand on parle de rapidité, on parle de travail bâclé.
La seule chose à faire, c'est une commission d'enquête publique et indépendante. La démocratie la demande. La Chambre la demande. La population la demande. M. Johnston parle de protéger la démocratie, mais il ne la respecte pas.
Je pense que, malheureusement, sa nomination était une erreur de distribution. Il doit se retirer pour le bien de tous.
Monsieur Johnston, tout à l'heure, vous avez indiqué ne pas avoir rencontré la commissaire aux élections fédérales, car il n'y avait pas de plaintes. Or Mme Simard a témoigné devant notre comité et nous savons que plusieurs plaintes sur la question de l'ingérence étrangère sont en train d'être étudiées.
Êtes-vous au courant que la commissaire est activement en train d'étudier ces plaintes d'ingérence étrangère dans nos élections?
Madame la présidente, nous étions au courant d'enquêtes, mais pas de conclusion d'ingérence. Nous nous attendons à continuer de suivre le déroulement des enquêtes et à rencontrer la commissaire aux élections fédérales pour avoir une bonne discussion sur ces enquêtes.
Madame la présidente, il est très important de tenir cette réunion avant de décider si on doit procéder à une enquête publique.
Monsieur Johnston, j'ai écouté attentivement votre témoignage d'aujourd'hui. Vous avez dit que cela coûterait un peu plus cher et que ce serait peut-être un peu plus long, mais vous avez aussi admis les faiblesses de l'approche que vous avez adoptée. Au début de votre témoignage, vous avez dit clairement que l'ingérence étrangère était réelle et qu'elle constituait une menace pour notre démocratie.
À mon avis, les contradictions dans votre témoignage sont évidentes pour les Canadiens. N'êtes-vous pas inquiet que cela réduise la crédibilité de votre approche, d'autant plus que des parlementaires ne sont pas d'accord et ont voté autrement?
Madame la présidente, la question est de savoir si j'ai bon espoir que le public répondra d'une façon ou d'une autre. C'est au public de décider. Nous avons entrepris cette tâche et nous avons fait de notre mieux pour bâtir la confiance dans la démocratie. Notre travail sera examiné par les comités compétents, dont nous accueillons favorablement les suggestions et les conclusions.
Madame la présidente, je propose de prolonger la réunion de 16 minutes. M. Johnston a été très généreux, mais je sais que certains députés ont encore des questions à lui poser. J'aimerais donc que vous accordiez un tour de parole de quatre minutes à chaque parti, pour un total de 16 minutes.
Nous aurons terminé ce tour dans 10 minutes. Étant donné que notre comité est convenu de procéder par vote, selon mon calcul, nous aurons eu presque trois heures avec le très honorable David Johnston. Et c'est un calcul très généreux.
Nous avons des ressources. Je trouve cela absolument aberrant. Est‑ce la volonté des membres?
Madame la présidente, au cours des deux dernières séries de questions, certains députés n'ont pas posé une seule question. Ils ont seulement utilisé leur temps de parole pour faire leurs commentaires. Si c'est ainsi que le Comité veut fonctionner, comme nous en avons amplement la preuve depuis trois heures, je dirais que nous devrions libérer le témoin et lever la séance pour aujourd'hui.
Pour ma part, je savais qui était le président à mon université. Nous n'avons pas fait de ski ensemble, mais j'apprécie le service que vous avez offert.
En tant que présidente, je dois connaître la volonté des membres du Comité. Je trouve cela très pénible, parce que j'ai travaillé avec tout le monde pour arriver à nous entendre sur une façon de procéder. En fait, je croyais que nous étions très crédibles dans notre façon de procéder, alors je suis préoccupée par cette conversation. Cela sera noté.
Monsieur Johnston, connaissant votre calibre, je sais que vous n'allez pas dire non — sauf si vous le voulez; vous pouvez partir tout de suite. Autrement, je vais devoir demander un autre tour rapide.
Je suis désolée, du moins en mon nom et au nom de certains députés. Ce n'était pas mon intention.
Merci, monsieur Johnston, d'avoir accepté de rester encore un peu.
Vous avez mentionné dans votre exposé qu'il y a trois conseillers pour la deuxième partie de votre mandat. Pourriez-vous nous dire qui sont ces trois conseillers?
Je veux me concentrer sur la deuxième partie de votre mandat, que vous avez décrite dans votre rapport. À la page 19 de votre rapport, vous dites: « Il ne fait aucun doute que ces communautés ne font pas confiance aux organismes de sécurité. » Ce n'est pas tout à fait exact. De nombreuses communautés de la diaspora et en particulier la collectivité sino-canadienne implorent les organismes de sécurité de faire davantage pour mettre fin à l'ingérence étrangère dont elles sont victimes.
Les Canadiens d'origine chinoise sont ciblés par Pékin, et ils ont rejeté vos propositions d'audiences publiques. Ils sont frustrés parce qu'ils ont déjà pris la parole et témoigné à maintes reprises au cours des quatre dernières années devant les quatre comités parlementaires que j'ai mentionnés. Le gouvernement a essentiellement fait la sourde oreille à leurs appels à l'aide et ils ont souffert en silence. Ils sont épuisés. Ils veulent plus d'action, pas les audiences que vous proposez.
Encore hier soir, j'ai consulté une liste partielle des membres de la diaspora chinoise qui ne veulent pas de cette deuxième phase d'audiences, qui veulent une enquête publique indépendante: Mabel Tung, de la Vancouver Society in Support of Democratic Movement; Mehmet Tohti, du Projet de défense des droits des Ouïghours, ou ; Chemi Lhamo, du Réseau international pour le Tibet; Gloria Fung, du Canada-Hong Kong Link; Victor Ho, l'ancien rédacteur en chef du Sing Tao Daily, l'un des plus grands journaux de langue chinoise au pays; Cherie Wong, de l'Alliance Canada Hong Kong; et la liste est longue.
Tous ces leaders civiques de la collectivité chinoise et bien d'autres ont exprimé leur manque de confiance dans votre premier rapport et dans ce processus. Comment pouvez-vous donc vous acquitter de la deuxième partie de votre mandat compte tenu de ce manque de confiance de la part de nombreux éléments de la collectivité chinoise au Canada?
Madame la présidente, nous espérons pouvoir encourager les membres de ces collectivités à continuer d'attirer l'attention du Parlement et du public en général sur les dangers auxquels nous sommes confrontés.
Nous espérons que le travail que nous avons accompli et l'examen effectué par le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement et par l'Office de surveillance des activités de renseignement, auquel se sont joints les chefs de l'opposition, sauront imprimer un grand élan pour assurer beaucoup plus activement la protection appropriée de ces collectivités.
Ces collectivités, qui ont été les plus vulnérables à l'ingérence de la République populaire de Chine, réclament une enquête publique indépendante. Au cours des quatre dernières années, ils ont exprimé l'espoir que le Parlement prendrait des mesures concrètes, mais malheureusement, parce que le Parlement a été incapable de faire son travail en raison d'un manque d'information de la part du gouvernement, d'un manque de documents, d'un manque d'ouverture et de franchise de la part des témoins du gouvernement qui ont comparu devant le comité, nous avons maintenant tous, au Parlement comme dans la diaspora, mis notre espoir dans une enquête publique indépendante dotée des pleins pouvoirs d'assigner des témoins à comparaître et d'exiger la production de documents afin de tenir le gouvernement responsable de ce qui s'est passé et de régler ces problèmes de longue date.
Que diriez-vous à ceux qui disent qu'il est possible de tenir une enquête publique indépendante tout en protégeant la sécurité nationale? Quelqu'un a dit tout à l'heure que nous avons déjà eu des enquêtes comme celle concernant Maher Arar, qui portait sur des renseignements hautement classifiés. En fait, une partie de cette information provenait du renseignement du Groupe des cinq. C'est le renseignement le plus sensible parce qu'il provient de nos partenaires du Groupe des cinq et non des services nationaux.
Nous avons également entendu l'ancien dirigeant du SCRS, Dick Fadden, nous dire qu'une enquête publique est possible dans cette affaire. Dan Stanton, un ancien gestionnaire du SCRS, a également dit qu'une enquête publique est possible. L'ancien directeur général des élections du Canada a dit qu'une enquête publique est nécessaire.
À la lumière de toutes ces demandes d'enquête publique, comment la deuxième partie de votre mandat peut-elle rétablir la confiance?
Madame la présidente, je dirais que d'autres experts, dont Ward Elcock, par exemple, se sont dits d'avis que les enquêtes publiques ne sont pas le bon remède, et que le juge O'Connor, après le comité Arar, s'est rangé à cet avis. Il y a des divergences d'opinions à ce sujet, et elles sont raisonnables.
Je crois que le travail du groupe du rapporteur spécial exercera en fait beaucoup de pression et incitera le gouvernement à agir plus rapidement pour améliorer notre système de résistance à l'ingérence étrangère et que le travail que nous ferons au cours des cinq prochains mois y ajoutera des efforts considérables. J'ai donc bon espoir de voir d'importantes mesures pour relever ce très grand défi au cours des prochains mois.
Je remercie M. Johnston d'avoir accepté de rester avec nous pour un autre tour de questions.
Pour poursuivre dans la même veine, au sujet de la différence entre une enquête publique et le processus en cours, je pense que beaucoup de gens oublient qu'une enquête publique est instituée par décret, c'est‑à‑dire par le Cabinet. Par conséquent, on pourrait invoquer le même argument, pour dénoncer l'absence d'indépendance dans le cas d'une enquête publique, parce qu'au bout du compte, c'est le Cabinet qui déciderait du mandat et ainsi de suite.
Nous savons, monsieur Johnston, que vous avez interrogé diverses personnes au sujet de l'ingérence étrangère. Vous avez étudié la documentation. Vous avez rédigé un rapport. Vous allez mener des entrevues et des audiences publiques, parfois, bien sûr, à huis clos pour ceux qui, par peur, préféreraient ne pas témoigner. Ce serait la même chose dans une enquête publique. Si l'on a peur de témoigner devant vous en audience publique, ce pourrait être la même chose dans une enquête publique. La différence n'a pas de sens. Vous avez dit que certaines séances pourraient être à huis clos pour les témoins qui pourraient avoir des craintes particulières.
Étant donné que les prochaines élections sont prévues pour le 20 octobre 2025, l'objectif, bien sûr, devrait être de s'assurer que nos systèmes en place sont aussi solides que possible pour détecter, décourager et contrer toute ingérence étrangère lors de nos prochaines élections, si nous voulons être « tournés vers l'avenir ». Vous avez déjà abordé certains des problèmes de communication que nous avons constatés. Que nous recommanderiez-vous, en outre, de faire pour nous assurer que, dans le cadre d'un objectif axé sur l'avenir, nous protégeons notre démocratie? Y a‑t‑il quelque chose que le Comité pourrait faire pour aider, pour s'assurer que nous sommes prêts pour les prochaines élections?
Madame la présidente, je vous remercie de cette question.
J'encouragerais le Comité à être très précis, discipliné et rigoureux dans sa reddition de comptes afin d'améliorer nos systèmes de résistance à l'ingérence étrangère. Oui, nous avons constaté des progrès et des changements. Nous avons une idée claire des changements en cours.
En fait, dans notre prochain rapport, nous aimerions cerner les initiatives actuellement à l'étude — comme le registre des étrangers, par exemple, et bien d'autres choses du genre — et voir s'il pourrait être opportun de fixer des échéanciers pour traiter de ces réformes, avec des modifications à la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité et ainsi de suite, pour mettre en place une procédure très rigoureuse, disons, bien avant les prochaines élections de 2025. Nous pouvons nous tourner vers nos collègues du Groupe des cinq et vers les Canadiens et dire que nous travaillons très fort pour lutter contre l'ingérence étrangère et que nous faisons de réels progrès pour convaincre les Canadiens qu'ils peuvent compter sur notre gouvernement pour les protéger.
À cet égard, proposeriez-vous que le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement et l'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et du renseignement dressent également une liste des délais de réalisation des produits livrables pour s'assurer que nous sommes prêts et êtes-vous d'avis que nous devrions vérifier, peut-être dans six mois ou un an, où les uns et les autres en sont dans la suite donnée à ces recommandations?
Madame la présidente, je pense que c'est une excellente suggestion qui devrait être concrétisée.
L'important à cet égard, à mon avis, est que nous ayons ces comités de surveillance qui ont de l'expertise, qui ont la possibilité d'examiner des renseignements hautement protégés, et que nous fassions en sorte qu'ils soient aussi solides que possible dans leur existence actuelle en apportant des modifications à leur structure, et ainsi de suite, et en veillant à leur donner pour tâche de travailler avec vous et avec les autres comités de la Chambre pour s'assurer que nous faisons vraiment des progrès dans ce dossier.
Enfin, vous avez parlé un peu du civisme nécessaire. Nous en avons parlé un peu plus tôt lorsque j'ai posé la question. La preuve et le renseignement, ce n'est pas la même chose. Comment pouvons-nous nous assurer que les Canadiens, les parlementaires et tous ceux qui veulent protéger notre démocratie le reconnaissent? À quoi cela ressemble‑t‑il? Quelles sont les tactiques qu'utilisent les agents qui ne nous aiment pas pour s'ingérer? Comment peuvent-ils faire partie de la solution pour ce qui est de les repérer et de les dénoncer? Il pourrait s'agir d'un effort d'équipe Canada pour contrer l'ingérence étrangère. Je pense que ce serait un effort conjoint de tous les Canadiens.
L'une de nos recommandations, en ce qui concerne les audiences publiques au cours des cinq prochains mois, portait précisément sur cet enjeu. Faites appel à la meilleure expertise qui soit. Apprenez d'autres personnes qui ont été en mesure de fournir plus de lumière. Ensuite, aidez-nous à faire connaître cette distinction au public et à lui expliquer comment nous pouvons la gérer et faire la lumière sur le sujet.
Le rapport de M. Johnston mentionne des problèmes de communication de l'information émanant du SCRS pour se rendre au premier ministre et aux ministres.
Dans son rapport, M. Johnston dit que ce que nous avons entendu dans les médias était à peu près vrai. Toujours dans le rapport, il dit que les ministres et le premier ministre n'ont pas reçu l'information. Quand ces derniers disaient être dans l'ignorance, ils avaient raison. Ils étaient vraiment dans une situation où ils n'avaient pas l'information.
Je ne critique pas cela, je n'en suis pas là. Cependant, M. Johnston mentionne que, dans le parcours des informations, le SCRS et la fonction publique ont chacun leur part de responsabilité. Cependant, les propos de M. Stanton, de M. Wilczynski, de Mme Thomas et de M. Wark révèlent l'existence d'un problème en ce qui touche les cabinets politiques.
Madame la présidente, je suis tout à fait d'accord avec le député qui vient de soulever la question, à savoir que nous avons beaucoup à faire pour améliorer notre façon de cristalliser l'information, de la transférer entre des mains responsables, et de veiller à prendre les mesures qui s'imposent en rendant des comptes à cet égard. Nous avons beaucoup de travail à faire, et c'est la tâche à laquelle nous devrions nous attaquer de toute urgence.
Je vais poser une question délicate, madame la présidente, et je ne voudrais pas qu'elle soit mal interprétée.
Il y a des moments où on aimerait peut-être mieux ne pas savoir certaines choses.
Se pourrait-il que les cabinets politiques réagissent à la possibilité que des ministres ou le premier ministre ne veuillent pas vraiment recevoir cette information?
Madame la présidente, je ne pense pas avoir beaucoup de commentaires à faire sur le genre de messages qui ont été envoyés à ce moment‑là. Cependant, nous nous attendons à ce que les fonctionnaires du pays soient non partisans, qu'ils soient professionnels et qu'ils fournissent des renseignements clairs et des recommandations précises à leurs ministres et à nos systèmes de responsabilité ministérielle. Nous devrions nous attendre à ce qu'ils agissent comme il se doit. S'ils ne le font pas, nous devrions leur imputer la responsabilité.
Merci, monsieur Johnston, de nous avoir généreusement accordé du temps pour poser quelques questions supplémentaires.
Je veux revenir sur la question des contributions de Sheila Block. En réponse à nos questions, vous avez dit que Mme Block avait fait des contributions financières à d'autres partis. À quels partis, à votre connaissance?
Je crois comprendre que ses contributions ont été très dispersées. Je pense qu'elle a appuyé des gens qui occupent des fonctions politiques et qui ont d'autres qualités que celles des libéraux, mais je n'ai pas d'information précise à vous donner.
Oui, je crois qu'elle a appuyé et était disposée à aider d'autres anciens étudiants et des personnes qui ont été affiliées à des partis autres que le Parti libéral.
En réponse à une question de Mme Kwan, vous avez dit que l'apparence de conflit d'intérêts doit reposer sur des faits. Ces faits, ses fréquentes contributions au Parti libéral, font partie du domaine public. Ne comprenez-vous pas pourquoi certaines personnes soulèvent l'apparence d'un conflit d'intérêts lorsque ces faits — on ne parle pas seulement de soupçons — sont là?
Vous avez dit qu'une apparence de conflit d'intérêts doit reposer sur des faits. Elle a versé des milliers de dollars au Parti libéral, alors comprenez-vous pourquoi les gens y voient une apparence de conflit d'intérêts?
Madame la présidente, comme je l'ai déjà dit, je ne considère pas que les contributions de Mme Block à des partis politiques constituent un conflit d'intérêts. Je pense que sur une quinzaine d'années, cela représente quelque chose comme 300 $ ou 400 $ pour le Parti libéral, mais je crois comprendre qu'elle a fait des contributions un peu partout, notamment à d'anciens étudiants.
Voici ma dernière question. Dans votre rapport, vous avez dit qu'il n'existe pas de preuve de dons illégaux, mais nous savons que la seule façon d'obtenir ces renseignements est par l'entremise du processus de plainte auprès d'Élections Canada ou du commissaire aux élections. C'était certainement le cas dans l'affaire Dean Del Mastro.
Cela a‑t‑il été fait? Y avait‑il des preuves concernant les campagnes d'audit? Comme vous n'avez pas rencontré le commissaire ni Élections Canada, comment en êtes-vous arrivé à cette conclusion?
D'après ce que nous ont dit ces fonctionnaires, on n'a pas constaté de faute ni, certainement, d'activité ayant mené à des accusations relativement aux élections de 2019 et de 2021.
Sur ce, le très honorable David Johnston a été très généreux de son temps aujourd'hui.
Au nom des membres du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, je tiens à vous remercier de nous avoir fait savoir quand vous alliez pouvoir comparaître et d'avoir répondu sans délai à nos communications. Nous vous souhaitons bonne chance, à vous et à vos proches. Merci de votre service.
Le très hon. David Johnston: Merci beaucoup, madame la présidente. Merci à tous les membres du Comité.
La présidente: Merci.
Sur ce, chers collègues, nous nous reverrons jeudi. Portez-vous bien et soyez prudents.