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PROC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre


NUMÉRO 054 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 21 février 2023

[Enregistrement électronique]

(1505)

[Traduction]

    Bienvenue à la 54e séance du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
    Le Comité se réunit aujourd'hui, conformément à l'article 106(4) du Règlement et à la demande de six membres du Comité, afin de discuter de la façon d'élargir la portée de l'étude actuelle sur l'ingérence étrangère dans les élections.
    La greffière et moi tiendrons à jour une liste globale des membres du Comité qui souhaitent intervenir pour s'entretenir avec le Comité.
    Monsieur Cooper, la parole est à vous.
    Madame la présidente, j'aimerais présenter une motion. Je vais donc, pour le moment, distribuer la motion dans les deux langues officielles.
    C'est formidable. Nous ferons également parvenir la motion par voix électronique aux députés qui participent à la réunion virtuellement. Je vais suspendre la séance pendant deux ou trois minutes jusqu'à ce que la motion ait été distribuée. Dès que je recevrai des signaux indiquant qu'elle a été reçue, je vous redonnerai la parole, monsieur Cooper.
(1500)

(1510)
    Je crois comprendre que nous allons poursuivre notre réunion, étant donné que tous les députés ont reçu par voie électronique la motion que M. Cooper présente. Puis-je obtenir un signal de la part de nos collègues en ligne?
    C'est parfait. Merci beaucoup.
    Monsieur Cooper, la parole est de nouveau à vous.
     Madame la présidente, je vais tout d'abord lire la motion afin qu'elle figure dans le compte rendu:
Que, compte tenu des récents rapports du Globe and Mail rédigés par Steven Chase et Robert Fife, qui ont fait des révélations choquantes sur la stratégie de Beijing visant à interférer et à influencer les institutions démocratiques du Canada, le Comité, dans le but d'aborder cette menace importante contre notre démocratie,
a) prolonge son étude de l'ingérence électorale étrangère d'autant de réunions que nécessaire pour enquêter sur ces rapports et, à cette fin, prévoir au moins une réunion le 23 février 2023 et au moins deux réunions pendant la semaine du 27 février 2023;
b) invite des hauts fonctionnaires du Service canadien du renseignement de sécurité, du Centre de la sécurité des télécommunications, de la Gendarmerie royale du Canada, d'Élections Canada (y compris le commissaire aux élections fédérales), du Groupe de travail sur les menaces contre les élections liées à la sécurité et au renseignement (MSRE), du Comité du Protocole public en cas d’incident électoral majeur et du Bureau du Conseil privé à témoigner sur ces rapports;
c) invite Katie Telford, cheffe de Cabinet du premier ministre, à se présenter seule pour une réunion de deux heures;
d) invite l'honorable Mélanie Joly, ministre des Affaires étrangères, à revenir pour témoigner sur ces rapports;
e) invite l'honorable Marco Mendicino, ministre de la Sécurité publique;
f) invite l'honorable Dominic LeBlanc, ministre des Affaires intergouvernementales, de l'Infrastructure et des Collectivités, à revenir témoigner sur ces rapports;
g) invite Jody Thomas, conseillère du premier ministre en matière de sécurité nationale et de renseignement;
h) invite l'honorable Marc Garneau, ancien ministre des Affaires étrangères;
i) invite l'honorable Bill Blair, ancien ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile;
j) invite Vincent Rigby, ancien conseiller du premier ministre en matière de sécurité nationale et de renseignement;
k) invite David Morrison, ancien conseiller en politique étrangère et en défense auprès du premier ministre;
l) entende chacun des témoins mentionnés ci-haut lors de réunions publiques;
m) ordonne la production de tous les mémorandums, notes de synthèse, courriels, comptes rendus de conversations et tout autre document pertinent, y compris les ébauches, appartenant à tout ministère ou organisme gouvernemental, incluant le groupe de travail MSRE et le Comité du Protocole public en cas d'incident électoral majeur, tout cabinet ministériel, incluant celui du premier ministre, contenant des informations concernant les efforts déployés par des, ou au nom de, gouvernements étrangers ou d'autres acteurs étatiques étrangers pour s'ingérer dans les élections générales de 2019 et 2021, y compris les documents qui ont été cités dans les rapports du Globe and Mail, à condition que
(i) ces documents soient déposés sans caviardage au Bureau du légiste et conseiller parlementaire, dans les deux langues officielles et dans les trois semaines suivant l'adoption de la présente ordonnance,
(ii) le Bureau du légiste et conseiller parlementaire fasse savoir, sans délai, au Comité si le Bureau est convaincu que les documents ont été produits conformément à l'ordonnance, et si ce n’est pas le cas, le président est chargé de présenter immédiatement, au nom du Comité, un rapport à la Chambre exposant les faits importants de la situation,
(iii) le Bureau du légiste et conseiller parlementaire n’expurge les documents qu’aux fins de la protection de l’identité des employés ou des sources des services de renseignements canadiens ou alliés et, dès que possible, fournir les documents expurgés au greffier du Comité pour qu’il les distribue à tous les membres du Comité.
    Voilà la motion, madame la présidente.
    Je propose d'élargir la portée de l'étude que le Comité mène en ce qui concerne l'ingérence étrangère dans les élections, à la lumière de l'article choquant que les journalistes du Globe and Mail, Steven Chase et Robert Fife, ont publié la semaine dernière et qui serait fondé sur leur examen de documents du SCRS révélant que le PCC, ou Parti communiste chinois, a adopté une stratégie sophistiquée en vue de s'ingérer dans les élections de 2021.
(1515)
    Le Globe and Mail a qualifié la campagne d'ingérence du Parti communiste chinois dans les élections de 2021 d' « instrument orchestré ». L'article du Globe and Mail indique que cette stratégie perfectionnée, cet « instrument orchestré », adoptée par Pékin pour s'ingérer dans les élections de 2021, avait deux objectifs primordiaux. Le premier était de faire en sorte que le Parti libéral soit réélu minoritaire, et le second était de faire en sorte que certains candidats conservateurs jugés inamicaux à l'égard de Pékin soient défaits.
    Selon l'article du Globe and Mail, un rapport du SCRS cite un responsable anonyme du consulat du Parti communiste chinois qui aurait déclaré: « Le Parti libéral... est en train de devenir le seul parti que la RPC peut soutenir ».
    Cette campagne d'ingérence aurait fait appel à la participation active et à la coordination de diplomates du Parti communiste chinois affectés au Canada, dont la consule générale de la RPC à Vancouver de l'époque, Mme Tong, ainsi qu'un autre ancien consul général à Vancouver, Wang Jin.
    Selon le Globe and Mail, le SCRS a caractérisé les activités de Mme Tong et de M. Wang comme étant liées à des efforts visant à mobiliser les appuis en faveur des libéraux, à cibler et discréditer des candidats conservateurs et à s'employer à ce qu'ils soient défaits. Il a également été rapporté que Mme Tong et M. Wang ont utilisé, entre autres, des « mandataires » du PCC pour atteindre ces objectifs. Mme Tong se serait même vantée, en 2021, d'avoir contribué à la défaite de deux députés conservateurs, dont un député qu'elle décrivait comme un « détracteur bruyant » du Parti communiste chinois.
    La portée et le perfectionnement de cette campagne d'ingérence sont troublants en raison de l'approche multidimensionnelle adoptée par Pékin, qui a eu recours à des tactiques telles que l'acheminement d'argent aux candidats par le biais de « dons en espèces non déclarés » illégaux; « l'embauche par des propriétaires d'entreprises d'étudiants internationaux... » sous prétexte de travailler pour ces entreprises alors qu'en réalité, ils étaient illégalement payés pour travailler « à temps plein » pour les campagnes électorales de certains candidats libéraux; des « campagnes de désinformation » actives visant précisément les candidats conservateurs; et la collusion entre des campagnes politiques et ce réseau d'« ingérence étrangère » du Parti communiste chinois.
(1520)
    Permettez-moi de répéter ce qui est rapporté et ce qui s'est passé: des dons illégaux en espèces, de la désinformation ciblée contre des candidats conservateurs, de la collusion avec des candidats libéraux, l'utilisation généralisée de mandataires pour faire avancer l'objectif du Parti communiste chinois visant à aider le Parti libéral et à travailler à défaire certains candidats conservateurs, le tout dirigé et coordonné par des diplomates communistes chinois en sol canadien.
    Si ces rapports sont vrais — et il n'y a aucune raison de douter de l'exactitude de ces rapports du Globe and Mail, qui ont été rédigés par deux journalistes bien connus et très respectés, c'est-à-dire Robert Fife et Steven Chase —, cette campagne d'ingérence n'est pas anodine. Ce n'est pas le fait d'un ou deux mauvais acteurs — non pas qu'il faille fermer les yeux sur les agissements d'un ou deux mauvais acteurs. Si cette campagne est prouvée, cela équivaut à une attaque en règle contre la démocratie canadienne menée par le régime communiste chinois, une attaque qui soulève des questions sur l'intégrité des élections de 2021 dans certaines circonscriptions ciblées par Pékin.
    Cela devrait alarmer tous les Canadiens, et très certainement ceux qui ont la charge et la responsabilité de protéger les institutions démocratiques du Canada, y compris le premier ministre et ses ministres. Ces rapports auraient dû faire plus qu'alarmer ces personnes. Ils auraient dû entraîner la prise immédiate de mesures de la part du gouvernement, mais cela ne s'est pas produit. Plus de 18 mois après les élections de 2021, rien ne prouve que le gouvernement libéral ait pris des mesures. Aucune accusation n'a été portée, et aucun diplomate n'a été expulsé.
    Le Parti conservateur et les candidats conservateurs qui ont été ciblés par le Parti communiste chinois n'ont pas été informés de cette campagne d'ingérence et du fait qu'ils étaient ciblés. Au lieu de cela, ils ont été tenus dans l'ignorance, y compris par le comité des élections du gouvernement, le comité même que ce gouvernement se félicite d'avoir mis en place. Ils ont été tenus dans l'ignorance.
    Le comité des élections du gouvernement a tenu le public canadien dans l'ignorance de cette ingérence. En effet, nous n'aurions pas été informés de l'ingérence dans les élections de 2021 si la presse canadienne n'avait pas obtenu, grâce à des demandes d'accès à l'information, des rapports montrant que le mécanisme d'intervention rapide d'Affaires mondiales avait détecté des activités d'ingérence et une campagne de désinformation ciblant des candidats conservateurs, y compris Kenny Chiu, le député de l'époque qui a été défait, par l'intermédiaire de mandataires et par l'utilisation de plateformes de médias sociaux.
    En ce qui concerne le premier ministre, je dois dire que c'est pire que de l'inaction. Depuis que Global News a fait état, pour la première fois en novembre, d'une vaste campagne d'ingérence de Pékin dans les élections de 2019, visant au moins 11 candidats, le premier ministre n'a jamais tenu compte des conseils que le SCRS lui a fournis pour contrer cette ingérence, des conseils que le premier ministre a reçus, par exemple, dans une note de service du SCRS datée du 21 janvier 2021, qui, selon la CBC, prodiguait au premier ministre le conseil suivant: « Le Canada peut avoir recours à une politique fondée sur la pleine transparence pour souligner le fait que l'ingérence étrangère doit être rendue publique et que les pratiques clandestines diffèrent de la diplomatie publique ».
(1525)
    Le premier ministre a été tout sauf transparent et a refusé de répondre aux questions les plus simples sur ce qu'il connaît de l'ingérence de Pékin dans les élections de 2019 et de 2021. Il refuse de dire quand il a été mis au courant, esquive les questions et s'emploie à façonner son image politique en pesant soigneusement ses mots. Par exemple, il dit qu'il n'a pas été informé à propos de candidats qui « auraient reçu de l'argent de la Chine », alors que selon un reportage diffusé en novembre dernier par Global News, les documents d'information obtenus ne font état d'aucune allégation indiquant qu'un candidat aurait effectivement reçu de l'argent de la Chine. Ce n'est pas comme si Pékin envoyait bêtement de gros chèques directement à chacun des candidats. L'enjeu en question à ce moment‑là — et encore aujourd'hui — est plutôt l'ingérence considérable dans les campagnes électorales de 2019 et de 2021.
    Pesant soigneusement ses mots encore une fois, le premier ministre a dit que les deux dernières élections « n'avaient pas été compromises », comme si quelqu'un affirmait qu'elles l'avaient été. C'est une question tout autre que l'ingérence qui semble avoir eu lieu et qui aurait ciblé des circonscriptions et des candidats en particulier. Le fait que le résultat général de l'élection n'ait pas été compromis n'empêche pas que de graves préoccupations ont été soulevées relativement à l'ingérence étrangère et au résultat du scrutin dans certaines circonscriptions.
    Les Canadiens méritent de savoir pourquoi, après la diffusion de ces reportages sur la vaste campagne d'ingérence menée par Pékin, le premier ministre et les ministres de son gouvernement continuent de brouiller les pistes et de minimiser la gravité de l'ingérence, sans parvenir à prendre des mesures sérieuses pour protéger notre démocratie contre cette grave menace. Il semble que le premier ministre préfère fermer les yeux, parce que cette ingérence lui a profité et a profité au Parti libéral.
    En raison de cette obstruction, de l'absence de réponse du premier ministre, de son manque de transparence et des révélations troublantes des médias, il faut élargir cette étude et faire toute la lumière sur l'ingérence qui aurait eu cours durant la campagne électorale de 2021. Il importe de faire comparaître les ministres concernés pour obtenir des réponses aux questions, demander des comptes au gouvernement et révéler aux Canadiens ce qu'ils méritent de savoir sur la portée et l'étendue de l'ingérence de Pékin dans la campagne électorale de 2021. Nous devons nous assurer qu'une telle ingérence — et que tout type d'ingérence en fait — ne puisse se répéter dans les prochaines campagnes électorales.
(1530)
    J'espère que le Comité adoptera la motion visant à élargir la portée de l'étude et à tenir des audiences au plus vite.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je vous remercie, monsieur Cooper.
    Je rappelle simplement l'ordre des interventions. M. Berthold sera suivi de Mme O'Connell et de M. Fergus. Les députés voulant intervenir n'ont qu'à me faire signe.
    Monsieur Berthold, vous avez la parole.

[Français]

     Merci beaucoup, madame la présidente.
     Chers collègues, je vous remercie de votre présence, même s'il s'agit d'une semaine pendant laquelle nous sommes normalement dans nos bureaux de circonscription respectifs. Je suis persuadé que, comme moi, vous aviez déjà beaucoup de choses à faire, mais vous avez quand même accepté que le Comité tienne une réunion d'urgence pour discuter de la façon d'élargir la portée de notre étude actuelle, qui porte sur l'ingérence étrangère dans les élections, et plus particulièrement l'élection générale de 2021.
    Au cours des derniers mois, des rapports alarmants ont été publiés dans les médias. En novembre 2022, Global News a rapporté que le premier ministre Justin Trudeau avait été avisé par les services nationaux de sécurité que le régime communiste chinois avait mené une grande campagne d'influence sur l'élection générale de 2019.
    Selon cet article, le premier ministre et le Cabinet du premier ministre auraient été informés que les campagnes électorales de 11 candidats auraient été ciblées par le régime de Pékin. Lorsqu'on a interrogé le premier ministre à ce sujet, il a d'abord, comme à son habitude, tenté de détourner l'attention sur tous les régimes dictatoriaux qui font de la désinformation au Canada. Par la suite, il a cité des sources soulignant que l'intégrité des élections n'avait été compromise ni en 2019 ni en 2021. Puis, il a accusé les conservateurs, avant de nier avoir été informé, pour enfin rejeter la responsabilité de son ignorance sur le comité non partisan formé de hauts fonctionnaires qui est chargé de décider quand l'information concernant l'ingérence étrangère doit être rendue publique.
    C'est le modèle que le premier ministre suit depuis novembre 2022, c'est-à-dire depuis les premières révélations de Global News sur l'ingérence étrangère et sur les premiers signaux d'alarme. En fait, ce n'était pas les premiers signaux d'alarme, mais c'était les premiers qui démontraient clairement que le premier ministre avait été avisé de la situation.
    Malgré l'accumulation de tous ces éléments de preuve, comme les rapports et les documents du Service canadien du renseignement de sécurité qui confirmaient les tentatives du régime communiste chinois de s'ingérer dans le processus démocratique canadien, le premier ministre du Canada disait n'être au courant de rien, à l'exception de banalités non classifiées.
    Il faut rappeler que le premier ministre est le grand responsable devant l'électorat d'assurer la sécurité nationale et, surtout, d'assurer la sécurité de notre système démocratique. Comme il l'a dit, il participe régulièrement à des breffages de sécurité. Pourtant, il n'a pas été question d'aller plus loin et d'avoir plus de détails. Ce qui nous inquiète, c'est que le premier ministre n'a pas semblé souhaiter poser davantage de questions. C'est comme si le premier ministre n'avait pas accès aux informations sensibles ou, pire encore, c'est comme s'il avait volontairement fermé les yeux.
    Le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a fait son travail. Nous avons demandé des documents et nous avons reçu des centaines de pages, largement caviardées, comme celles sur le bureau de mes employés et du personnel qui assistent à la réunion. Malgré le caviardage, ces documents démontraient de manière non équivoque que les allégations d'ingérence étaient non seulement fondées, mais que seule la transparence pouvait venir à bout de ces attaques répétées envers notre démocratie. Mon collègue M. Cooper a cité un extrait de ces documents, qui démontrait que seules la lumière, l'ouverture et la transparence permettraient de venir à bout de l'ingérence étrangère.
    Des ministres qui ont témoigné devant le Comité nous ont répété la même cassette: l'intégrité des élections n'a pas été compromise. Cependant, quand nous avons posé des questions pour savoir comment on déterminait si une élection avait été compromise ou non, nous avons eu plus de difficulté à obtenir une réponse.
    Si un régime étranger comme le régime communiste chinois parvient à faire changer le vote d'un seul Canadien, est-ce suffisant? Dans combien de circonscriptions faut-il que l'ingérence change l'issue du vote: une, deux, trois, dix, vingt ou trente? Nous n'avons pas eu de réponse à cette question très importante.
     Les services de sécurité nous ont tous dit avoir enquêté et soumis leurs rapports à qui de droit, c'est-à-dire au comité de hauts fonctionnaires chargé de décider si l'information concernant l'ingérence étrangère doit ou non être rendue publique.
    Nous avons entendu plusieurs témoignages et parlé à plusieurs candidats, mais il semble que ni le public ni les candidats concernés n'ont été avertis du fait qu'ils aient été la cible d'une importante campagne d'ingérence de la part du régime communiste chinois.
    Malgré tous ces signaux d'alarme, tous ces indices, rien n'a été fait pour signifier clairement au régime de Pékin que le Canada ne tolérerait aucune ingérence dans son processus démocratique. On n'a pas convoqué l'ambassadeur, on n'a expulsé aucun diplomate, on n'a arrêté personne et on n'a présenté aucun projet de loi visant à identifier les agents étrangers. Absolument rien n'a été fait, malgré tous ces rapports et tous ces signaux d'alarme.
(1535)
     C'est comme si le Canada avait envoyé le message suivant aux puissances étrangères qui veulent s'ingérer dans notre démocratie: venez, vous n'avez rien à craindre, puisque nous avons les yeux bien fermés. C'est du moins le message clair envoyé par les politiciens libéraux, et il semble avoir été bien reçu par le régime communiste chinois, qui a repris la formule de plus belle lors de l'élection générale de 2021.
    C'est ce qui m'amène à la réunion d'aujourd'hui. Des révélations troublantes, choquantes, et même inquiétantes publiées par le Globe and Mail nous indiquent non seulement que le régime communiste chinois aurait persisté dans ses tentatives d'ingérence, mais qu'il aurait peaufiné ses méthodes.
    Selon cet article, publié le 17 février 2023, la Chine a employé une stratégie sophistiquée pour perturber la démocratie canadienne lors de la campagne électorale fédérale de 2021, alors que les diplomates chinois et leurs mandataires ont soutenu la réélection des libéraux de Justin Trudeau, mais seulement pour un autre gouvernement minoritaire, et ont travaillé à la défaite des politiciens conservateurs considérés comme peu amicaux à l'égard de Pékin.
    Toute l'ampleur de l'opération d'ingérence chinoise est exposée dans des documents cotés « secret » et « très secret » du Service canadien de renseignement de sécurité, le SCRS, consultés par le Globe and Mail et couvrant la période précédant et suivant l'élection générale de septembre 2021, laquelle a reconduit les libéraux au pouvoir. Les rapports du SCRS ont été communiqués aux hauts fonctionnaires du gouvernement et aux alliés du Canada dans le domaine du renseignement, les quatre autres pays membres du Groupe des cinq, soient les États‑Unis, la Grande‑Bretagne, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Certains de ces renseignements ont également été communiqués aux services d'espionnage français et allemands.
    L'information relative à cette opération d'ingérence étrangère aurait donc été communiquée aux hauts fonctionnaires du gouvernement, aux alliés du Groupe des cinq et à d'autres pays amis, mais elle n'aurait pas été transmise au premier ministre et au Cabinet? Il ne faut surtout pas prendre les Canadiens pour des valises. Les allégations sont très graves.
    L'article du Globe and Mail nous apprend que les documents illustrent comment une machine orchestrée fonctionnait au Canada avec deux objectifs principaux: s'assurer du retour d'un gouvernement libéral minoritaire en 2021 et de la défaite de certains candidats conservateurs identifiés par la Chine. Selon ces documents, la direction du Parti communiste chinois à Pékin faisait pression sur ses consulats pour qu'ils élaborent des stratégies visant à tirer parti des membres de la communauté chinoise et des associations politiquement actives au sein de la société canadienne. Ainsi, Pékin utilise les organisations canadiennes pour défendre ses intérêts, tout en dissimulant leurs liens avec la République populaire de Chine. Les rapports classifiés consultés par le Globe and Mail révèlent que l'ancienne consule générale de Chine à Vancouver, Tong Xiaoling, s'est vantée en 2021 d'avoir contribué personnellement à la défaite de deux députés conservateurs. Le mot « personnellement » ne se trouve pas dans l'article, c'est moi qui l'ai ajouté.
    Je vais m'attarder à deux ou trois éléments très importants de l'article. Selon ce dernier, le SCRS a également expliqué comment les diplomates chinois mènent des opérations d'ingérence à l'étranger pour soutenir des candidats et des élus politiques. Parmi les tactiques utilisées, citons les dons en espèce non déclarés à des campagnes politiques ou le fait que des propriétaires d'entreprise engagent des étudiants chinois internationaux et les chargent de participer bénévolement à des campagnes électorales à plein temps. Les donateurs sympathisants sont également encouragés à contribuer aux campagnes des candidats favorisés par la Chine, dons pour lesquels ils reçoivent un crédit d'impôt. Une partie importante de cette opération d'ingérence consiste à influencer les immigrants chinois vulnérables au Canada. Les rapports des services de renseignement citent un fonctionnaire anonyme du consulat chinois qui affirme qu'il est facile d'influencer les immigrants chinois pour qu'ils approuvent la position de la République populaire de Chine.
    Non seulement on parle d'ingérence dans nos élections, mais on parle d'intimidation chez des résidants, chez des citoyens canadiens par un régime communiste étranger. Il y a tellement d'informations dans ces révélations que le Comité ne peut rester les bras croisés. Nous devons étendre notre étude à l'élection générale de 2021 et, surtout, reprendre avec plusieurs témoins l'opération depuis le début pour nous permettre de comprendre pourquoi les leçons apprises en 2019 n'auront servi en rien à protéger l'élection de 2021.
(1540)
     Encore une fois, ce gouvernement est resté de marbre et a laissé un régime étranger tenter d'influencer les résultats électoraux dans des circonscriptions ciblées parce qu'il n'aimait pas certains candidats et leurs positions.
    La motion de mon collègue contient des éléments très importants. Dans le but d'aborder cette menace importante pour notre démocratie, ce que nous demandons, et que le Comité devrait demander, c'est de prolonger notre étude sur l'ingérence électorale étrangère d'autant de réunions que nécessaire pour enquêter sur ces rapports, et de prévoir à tout le moins une réunion cette semaine et deux autres la semaine prochaine pour commencer.
    Nous voulons également inviter les hauts fonctionnaires du Service canadien du renseignement de sécurité, du Centre de la sécurité des télécommunications, de la Gendarmerie royale du Canada, d'Élections Canada, y compris le commissaire aux élections fédérales, du Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignements visant les élections, du comité du Protocole public en cas d'incident électoral majeur et, bien sûr, du Bureau du Conseil privé.
    Le comité du Protocole public en cas d'incident électoral majeur, c'est le comité dont je parlais tout à l'heure. C'est le comité auquel les experts du Service canadien du renseignement de sécurité et de la Gendarmerie royale du Canada font rapport quand ils découvrent qu'il y a eu de l'ingérence étrangère. On l'a vu ici à ce comité. Ces experts font donc rapport au comité du Protocole public en cas d'incident électoral majeur qui, lui, doit décider s'il est d'intérêt public d'aviser les candidats visés ou le public d'une tentative importante d'ingérence étrangère en cours dans une élection.
    Il semble qu'aucune de ces informations pourtant troublantes révélées dans plusieurs articles de journaux depuis novembre dernier n'ait été communiquée aux candidats. Or, il est important que ces gens viennent nous dire à quelle hauteur est la barre, à quel moment on doit aviser un candidat ou un parti politique qu'un pays étranger intervient dans une élection pour le faire perdre ou pour le faire gagner. Dans un sens ou dans l'autre, ce n'est pas acceptable.
    Nous demandons aussi que la cheffe de cabinet de M. Justin Trudeau, Mme Katie Telford, vienne témoigner pendant deux heures, parce que la défense du premier ministre, depuis le début, est de dire qu'il n'a pas été avisé, qu'il n'a pas été mis au courant. Or, nous avons appris que plusieurs rapports ont été transmis au Cabinet du premier ministre. Nous devons donc savoir qui a intercepté les rapports, qui n'a pas voulu que le premier ministre soit mis au courant. Nous devons savoir si c'est vrai ou pas. Nous devons savoir ce que le premier ministre savait et ce qu'il ne savait pas.
    En fin de compte, comme je le mentionnais tout à l'heure, le grand responsable de notre démocratie au Canada, c'est notre premier ministre, qui a été élu par tous les Canadiens. Nous devons pouvoir nous attendre à ce que le premier ministre soit responsable d'assurer la sécurité de notre processus démocratique. Nous devons donc savoir ce qu'il savait et ce qu'il ne savait pas. S'il ne le savait pas, nous devons savoir pourquoi. S'il le savait, nous devons savoir pourquoi il a volontairement fermé les yeux sur la situation.
    Nous voulons également que Mélanie Joly, la ministre des Affaires étrangères, revienne témoigner devant le Comité. Nous voulons entendre le ministre de la Sécurité publique, M. Marco Mendicino, pour des raisons évidentes. Nous voulons aussi que le ministre des Affaires intergouvernementales, de l’Infrastructure et des Collectivités revienne témoigner au sujet des rapports. Pour des raisons évidentes, nous voulons également que comparaisse la conseillère du premier ministre en matière de sécurité nationale et de renseignement, Mme Jody Thomas.
    Nous voulons que l'honorable Marc Garneau, ancien ministre des Affaires étrangères, vienne nous dire ce qui s'est passé à l'époque où il était en poste. Il doit nous dire s'il a été avisé, s'il savait des choses, s'il a avisé quelqu'un, s'il avait l'intention de faire quelque chose ou s'il avait l'intention de simplement fermer les yeux. Nous voulons entendre l'honorable Bill Blair, ancien ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Vincent Rigby, ancien conseiller du premier ministre en matière de sécurité nationale et de renseignement, et David Morrison, ancien conseiller en matière de politique étrangère et de défense auprès du premier ministre. Nous voulons pouvoir entendre chacune de ces personnes lors de réunions publiques.
    Je ne ferai pas la lecture de cette partie de la motion, mais nous voulons que le Comité ordonne la production de tous les documents dont a fait mention mon collègue en réaction aux révélations qui ont été faites vendredi dernier. Nous voulons aussi que, cette fois-ci, ces documents ne soient pas caviardés par le gouvernement, par les instances mêmes qui ont écrit les documents. Nous voulons qu'ils soient remis intégralement au légiste de la Chambre pour que ce dernier décide des informations qui peuvent être transmises au public ou pas.
    Je pense que c'est important. Quand on demande à quelqu'un de faire parvenir des documents, mais qu'on lui dit qu'il est libre de caviarder ce qu'il veut afin de s'assurer de ne pas s'incriminer, cela n'a pas de sens.
(1545)
     Pour l'avenir de notre démocratie, nous méritons de la transparence. Il n'y a pas que les conservateurs qui le disent. Nous l'avons entendu de la bouche d'à peu près tous les témoins et de toutes les agences de sécurité qui ont témoigné ici. Ils étaient tous du même avis quand est venu le temps de dire ce que nous devons faire: avant tout, il faut de la transparence. Nous devons être au courant et nous devons savoir ce qui s'est passé. Nous devons aussi faire savoir que nous ne tolérerons pas d'ingérence.
    C'est pour ces raisons que ces documents sont si importants. L'avenir de notre système démocratique est en jeu. Si le Canada n’est pas capable d'envoyer un message clair au régime de Pékin pour lui dire que de telles ingérences sont inacceptables, elles vont se reproduire.
    L'absence de transparence de la part du premier ministre et son apparente insouciance devant ce scandale contribuent à miner la confiance des Canadiens envers la démocratie. Par ses cachotteries ou par son aveuglement volontaire, le premier ministre prête foi aux allégations voulant qu'il ait fermé les yeux parce que les libéraux étaient la saveur du jour du régime de Pékin. C'est réellement déplorable.
    Quel que soit le parti politique ou le candidat visé, il faut non seulement dénoncer publiquement toute ingérence étrangère dès qu'elle est connue, mais aussi en poursuivre les responsables, et même les expulser du pays.
    On doit comprendre ce qui s'est passé si on veut être en mesure de trouver des solutions. C'est pour cela que nous sommes ici aujourd'hui, pour essayer de déterminer comment faire la lumière sur cette affaire et comment prévenir ce genre de situation à l'avenir.
    Pour ces raisons, il est important d'entendre les témoins, tous les témoins qui sont sur la liste que nous avons présentée. J'espère que tous les partis vont appuyer cette motion afin que nous puissions faire la lumière sur cette affaire et, surtout, comme je l'ai dit, afin d'éviter la répétition de ces gestes au Canada.
     Il est particulièrement important de le faire dès maintenant, parce que je rappelle que le gouvernement actuel est minoritaire et qu'il est maintenu en place par une coalition. Comme tout gouvernement minoritaire, il a une date de péremption qui n'est pas celle prévue par la Loi électorale du Canada. En effet, une élection générale peut être déclenchée à tout moment. Il est donc important que nous le fassions, et ce, le plus rapidement possible.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Je vous remercie, monsieur Berthold.
    Les prochaines interventions viendront de Mme O'Connell, de M. Fergus, de Mme Gaudreau et de M. Julian.
    Je vous fais simplement remarquer le volume sonore dans la salle en soulignant à quel point il est agréable de pouvoir bien entendre ces importants commentaires. En espérant que le volume n'augmentera pas, je cède la parole à Mme O'Connell.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je vous remercie de m'offrir l'occasion de me prononcer sur cet enjeu.
    Je veux parler de quelques éléments mentionnés dans les interventions précédentes. Je tiens d'abord à lire un texte aux fins du compte rendu:
Le système de gouvernement du Canada permet à tous les Canadiens d'élire leurs représentants et d'engager un débat libre et ouvert sur I'administration du pays. Toutefois, ce système et la souveraineté du processus décisionnel du Canada sont menacés directement par les activités d'ingérence étrangère des pays étrangers et de leurs représentants.
La menace qui pèse sur les institutions gouvernementales et décisionnaires ne s'arrête pas au niveau fédéral. Des représentants élus et publics de tous les paliers gouvernementaux sont ciblés... Les opérations d'ingérence étrangère ciblent toutes les étapes du processus électoral... Une fois qu'ils entrent en poste, les représentants élus et nommés, leur personnel et les employés des assemblées législatives peuvent aussi être la cible des états étrangers. À l'échelle fédérale, les trois principaux partis politiques sont également visés.
Les états étrangers tenteront d'influencer les délibérations et la prise de décisions et de juguler les projets qu'ils jugent contraires à leurs intérêts... D'autres fois, les états étrangers cherchent à faire obstacle à des mesures stratégiques en essayant de discréditer de hauts dirigeants gouvernementaux ou en s'en prenant à eux.
    Sachez, madame la présidente, que je cite le rapport annuel de 2019 que le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement a déposé à la Chambre des communes en mars 2020.
    Je pourrais continuer et lire d'autres extraits sur l'ingérence étrangère ciblant les élections, les fonctionnaires et le personnel, sur la gravité de la situation et la façon dont les acteurs étrangers utilisent l'ingérence pour discréditer les institutions démocratiques.
    Si je parle de la situation et que je trouve si intéressant que ce rapport ait été déposé en mars 2020, c'est parce que les conservateurs disent ici aujourd'hui qu'ils viennent à peine de réaliser que l'ingérence étrangère constitue bel et bien un enjeu. Ce rapport a été déposé il y a près de trois ans; néanmoins, les conservateurs disent que c'est seulement grâce à des reportages récents que nous avons été mis au fait de tels agissements.
    L'ingérence étrangère constitue un enjeu persistant et grave. Elle n'a pas commencé en 2015 ou après les élections de 2021, contrairement à ce que laissent entendre les conservateurs. Concernant le rapport du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement que je lisais... Il est intéressant de savoir que M. Chiu a été élu en 2019, lorsque l'ingérence du Parti communiste chinois était également bien réelle, en plus d'avoir aussi perdu aux élections de 2015. Les conservateurs semblent avoir une mémoire très sélective en matière d'ingérence étrangère et ne se rappeler que des élections qu'ils croient avoir perdues en raison de cette ingérence.
    Les conservateurs parlent de transparence, mais les faits relatifs à l'ingérence étrangère sont connus de tous. Les reportages dans les médias portent sur un enjeu extrêmement sérieux, mais rien de tout cela n'a été caché, comme en témoigne le fait que ces rapports ont été déposés à la Chambre des communes.
    Nous n'apprenons malheureusement rien de nouveau, sauf que les conservateurs sont mécontents en ce qui a trait aux autres travaux du Comité et qu'ils ne veulent parler que de cet enjeu, et ce, parce qu'un de leurs candidats aurait été touché. Mais l'ingérence étrangère ne concerne pas qu'un candidat ou seulement 11 candidats. Il est en effet question des institutions canadiennes, mais on revoit ici les tactiques auxquelles se prêtait Trump pour mettre en doute les résultats électoraux.
(1550)
    J'aimerais bien savoir où étaient les conservateurs après 2019. Où étaient-ils en 2020 et en 2021?
    Des informations à ce sujet ont été déposées à maintes reprises. La nécessité de voir à ce que nos institutions demeurent solides devrait rallier tous les Canadiens, sans égard à leurs allégeances partisanes. Il semblerait toutefois que ce sujet devienne pertinent pour les conservateurs seulement quand ils ont l'impression de pouvoir en tirer un avantage politique.
    Je n'arrive pas à me rappeler quel conservateur a demandé pour quelle raison le premier ministre n'a pas fait état de la situation lors de la campagne électorale. C'est précisément à cette fin que le groupe de travail responsable des incidents électoraux majeurs a été mis en place. Voulez-vous vraiment que ce soit un député partisan qui tranche dans une affaire d'ingérence étrangère? Lorsque j'ai été candidate à l'élection de 2015, je ne m'attendais pas à ce que M. Harper fasse une sortie pour parler de l'ingérence étrangère. Et nous savons tous qu'il ne l'a pas fait, et ce, même si le phénomène existait déjà.
    C'est d'ailleurs un phénomène que l'on peut observer dans plusieurs pays. Ainsi, plus loin dans le rapport annuel du CPSNR de 2019, on parle de l'ingérence étrangère en Nouvelle-Zélande. Pendant que les conservateurs cherchent à blâmer Justin Trudeau pour tout et pour rien, nous avons l'occasion de nous porter à la défense de notre démocratie et de nos institutions démocratiques, mais les conservateurs ne s'y prennent pas de la bonne manière. Ils exigent de pouvoir consulter des documents en faisant fi de toutes les précautions de sécurité, ce qui, il faut bien l'avouer, est absolument irresponsable de leur part. Si les conservateurs pouvaient avoir accès à ces documents comme ils le réclament, je suis persuadée que l'on se réjouirait vivement en République populaire de Chine de pouvoir mettre la main sur les documents secrets ou ultrasecrets du SCRS. Cela n'empêche toutefois pas les conservateurs de persévérer dans cette campagne qui ne sert à rien, et qui ne contribue surtout pas à renforcer nos institutions.
    J'ai déjà parlé de plusieurs des mesures prises par notre gouvernement pour consolider nos institutions démocratiques. Nous avons notamment renforcé la sécurité électorale; mis en place le Protocole public en cas d'incident électoral majeur; éliminer certaines échappatoires dans le financement électoral; sévi contre la publicité qui était vraiment hors contrôle; et veiller à l'intégrité des listes électorales en nous assurant que ceux qui s'y inscrivent sont bel et bien canadiens.
    Il est intéressant de noter que les conservateurs ont voté contre toutes ces mesures. Malgré toutes les interventions de notre part que je viens d'énumérer, les conservateurs ne cessent de demander pourquoi personne ne fait rien, pourquoi les libéraux ne font rien, pour contrer l'ingérence étrangère si le problème est aussi criant qu'on le dit.
    En outre, le premier ministre a demandé expressément ce qui suit au ministre des Affaires intergouvernementales, de l'Infrastructure et des Collectivités, le ministre responsable des institutions démocratiques, dans sa lettre de mandat de décembre 2021:

continuer à diriger une réponse gouvernementale intégrée pour protéger les institutions démocratiques du Canada, dont le processus électoral fédéral, de l’ingérence étrangère et de la désinformation, en travaillant avec des partenaires nationaux et internationaux. Vous dirigerez également les efforts visant à examiner l'interaction entre la technologie et la démocratie.
    Encore une fois, les conservateurs sont les derniers à prendre conscience de ce problème.
    On peut par ailleurs se demander s'il y a des moyens à notre disposition pour améliorer les choses. Comme on l'indique clairement dans la lettre de mandat du ministre, nous avons encore du pain sur la planche dans ce dossier. C'est là une mission importante aussi bien pour notre comité que pour l'ensemble des parlementaires. Je vais donc prêter une oreille attentive aux recommandations pouvant être formulées, et je suis convaincue que le ministre en fera tout autant. Nous avons abordé avec certains témoins la possibilité de tenir un registre des agents étrangers. Est‑ce qu'il y a d'autres suggestions? Il est tout à fait ridicule de laisser entendre que rien n'a été fait, que nous n'avons jamais parlé d'ingérence étrangère et que nous allons même jusqu'à nier l'existence d'un tel phénomène, simplement pour en tirer un avantage politique quelconque.
    Je ne vous demande même pas de me croire sur parole. Vous n'avez qu'à tenir compte des faits. Allez voir ce qui a été déposé à la Chambre avant les élections de 2021. Prenez connaissance de la lettre de mandat du ministre. Ce n'est pas d'hier que nous parlons de l'ingérence étrangère et de la menace concrète qu'elle fait peser sur nous, et, comme je vous l'ai indiqué, nous avons pris des mesures pour la contrer.
(1555)
    Certains peuvent affirmer que cela n'est pas suffisant, ou encore que la menace a changé ou est plus envahissante d'une manière ou d'une autre. J'estime que tous les acteurs concernés doivent reconnaître de façon réaliste que la menace posée par l'ingérence étrangère — et même par les campagnes de désinformation — va sans cesse évoluer de telle sorte qu'il est impossible qu'un gouvernement en vienne un jour à affirmer qu'il a fait tout ce qui était nécessaire, qu'il n'y a plus lieu de s'inquiéter et que l'on n'aura jamais plus jamais à se préoccuper de ce problème. Je pense que l'on serait bien naïf de croire à une telle éventualité.
    Je suis présente depuis le début de cette étude, et je considère que de nombreux membres du Comité ont véritablement tenté d'obtenir de nos témoins des indications quant aux améliorations que nous pourrions apporter pour renforcer nos institutions électorales et nous assurer que nos élections demeurent libres et équitables. Cependant, la motion dont nous sommes maintenant saisis ne va pas du tout dans le même sens. On voit encore nos collègues conservateurs qui s'en vont à la pêche. Ils sont revenus bredouilles la première fois et, comble d'ironie, ils voudraient que les mêmes témoins comparaissent de nouveau.
    Vous avez déjà pu parler au ministre LeBlanc et à la ministre Joly. Vous avez aussi posé vos questions aux représentants du SCRS et du Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignements visant les élections. Vous avez même pu interroger M. Judd, qui a été chargé de l'examen du processus relatif aux incidents électoraux majeurs pour savoir si cela fonctionne ou pas.
    Encore une fois, certains pourraient faire valoir que des améliorations s'imposent. Comme les mécanismes et les politiques visant à surveiller l'ingérence étrangère et à déterminer les meilleures façons de la contrer de manière non partisane ont été mis en place depuis relativement peu de temps, je comprends que l'on puisse vouloir suggérer des améliorations à y apporter. On nous a indiqué qu'il fallait attribuer aux différents partis la cote de sécurité nécessaire pour qu'ils aient accès à cette information auprès du comité responsable du protocole sur les incidents électoraux majeurs ou du Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignements visant les élections. Nous pouvons peut-être apporter des améliorations à ce chapitre, mais ce n'était pas le but des conservateurs lorsqu'ils interrogeaient nos témoins.
    En convoquant de nouveau ces témoins, nous pourrions… Si c'est ce que le Comité décide de faire, il faut absolument que l'exercice aboutisse à un rapport indiquant les principaux domaines ciblés pour poursuivre le renforcement de nos institutions démocratiques et précisant les mesures que le gouvernement devrait envisager sérieusement à cette fin. Ce n'est toutefois pas ce que l'on semble vouloir faire.
    Ce sont plutôt les attaques partisanes qui se succèdent pour faire croire aux gens que le premier ministre a fermé les yeux sur l'ingérence étrangère. Ce n'est pas ce qu'il a fait. S'il avait fermé les yeux, il n'en parlerait pas dans ses lettres de mandat. Il n'en aurait pas non plus traité en Chambre. Si l'on avait voulu camoufler le tout, on ne verrait pas tous ces rapports qui sont déposés à la Chambre.
    C'est simplement que les conservateurs n'ont commencé à vraiment porter attention à la question qu'à partir du moment où ils ont cru pouvoir en tirer un bénéfice quelconque. J'estime qu'une telle stratégie comporte des risques pour les Canadiens, comme nous avons pu le constater chez nos voisins du Sud. On a pu voir ce qui arrive lorsqu'on commence à diaboliser nos institutions démocratiques et à remettre en question leur légitimité.
    J'aimerais par ailleurs vous parler moi aussi du récent article de M. Fife. Je vais vous en lire un extrait que M. Cooper s'est bien sûr abstenu de citer:
David Vigneault, le directeur du SCRS, a fait savoir à M. Trudeau que rien n'indiquait que l'ingérence de la Chine avait contribué à l'élection des candidats en question, et ce, malgré les efforts déployés par le consulat pour en faire la promotion dans les médias sociaux et les médias de langue chinoise.
    Il y a une question que je me pose vraiment à ce sujet. Les conservateurs prêtent-ils davantage foi aux allégations d'un représentant de la République populaire de Chine qu'aux informations communiquées par le directeur du SCRS? Je sais pour ma part qui je vais croire. Je ne pense pas que les représentants de la République populaire de Chine ont les intérêts des Canadiens à cœur. Je ne crois pas qu'ils s'intéressent aux résultats de nos élections parce qu'ils tiennent à préserver les institutions démocratiques canadiennes. Ils voudraient plutôt réduire à néant ces institutions.
(1600)
     Je fais d'abord et avant tout confiance aux intervenants non partisans du milieu du renseignement et de la sécurité nationale, qui ont comparu devant le Comité à maintes reprises pour affirmer que ce sont les électeurs canadiens qui ont déterminé les résultats des élections de 2019 et de 2021. Cela ne signifie pas que nous ne sommes pas confrontés à des menaces constantes; cela signifie que nous devons nous mettre au travail et nous pencher sur la manière de renforcer notre démocratie.
    S'il faut organiser de nouvelles séances pour discuter de ces enjeux, je suis tout ouïe. Par contre, si ces réunions ne sont que l'occasion pour certains de décocher des flèches partisanes au premier ministre, je pense que nous ne ferons qu'affaiblir nos institutions démocratiques. Nous faisons le jeu de la Chine en répétant que nous croyons les fanfaronnades de leurs représentants. Nous devrions plutôt écouter le directeur du SCRS et le milieu de la sécurité nationale qui ont dit que, même si l'ingérence étrangère est une réalité persistante, ce sont les électeurs canadiens qui ont décidé du résultat des dernières élections.
    Je pourrais continuer ainsi longtemps, mais je sais qu'il y a d'autres intervenants et je ne veux pas monopoliser tout le temps. Il n'en demeure pas moins que j'espère que nous parviendrons à poursuivre cette étude. Toutefois, nous devons garder à l'esprit que l'ingérence étrangère, bien qu'elle soit une réalité permanente, n'est pas nouvelle pour le gouvernement ni pour le Canada, et qu'elle se produit partout ailleurs dans le monde. Les Canadiens s'attendent à ce que nous nous réunissions pour formuler des recommandations sur la meilleure manière de renforcer nos institutions démocratiques. Comment pouvons-nous améliorer certaines mesures déjà mises en place? Comment mettre en place de nouvelles mesures?
    Ce qui me frappe à propos de la motion déposée par les conservateurs, c'est qu'elle ne contient aucune demande pour vérifier de quelle manière les gouvernements ailleurs dans le monde gèrent cet enjeu. Leur motion ne propose pas de faire intervenir des experts en institutions démocratiques qui pourraient nous suggérer des façons de renforcer nos institutions. La motion ne propose pas de tirer des leçons de la France, qui a connu de graves problèmes d'ingérence au niveau de leurs élections. Par ailleurs, tous se souviennent de l'ingérence étrangère de la Russie aux États-Unis. Pourquoi ne faisons-nous pas appel à des experts pour nous dire comment les institutions américaines se sont renforcées, et quelles ont été les recommandations faites à cet égard?
    Pourquoi? En réalité, c'est parce que les conservateurs ne se soucient pas du renforcement des institutions démocratiques, et considèrent cela comme un enjeu partisan. Ils se montrent imprudents par rapport à la sécurité nationale. La motion qu'ils ont déposée demande au gouvernement de présenter des documents classés très secrets sur la place publique, et ce, de manière non caviardée; cela prouve noir sur blanc qu'ils ne prennent pas au sérieux la sécurité nationale.
    Je suis parfaitement d'accord pour faire appel à certains témoins et analyser la façon dont d'autres pays s'y prennent pour gérer ce genre d'enjeux. Je pense également qu'il faut se demander comment faire en sorte que les Canadiens aient davantage confiance en nos institutions démocratiques. Cependant, si nous nous lançons dans des joutes partisanes et des attaques partisanes au lieu de nous mettre au travail, je crois que la population ne sera pas dupe.
    Je suis d'accord avec les conservateurs sur un point. Les Canadiens ne sont pas idiots, et ils vont chercher à savoir qui travaille à faire respecter nos institutions démocratiques, versus qui tente de faire de la politique à l'américaine, c'est‑à‑dire susciter la méfiance envers nos institutions à des fins purement partisanes.
    Je vais en rester là, madame la présidente. J'ai hâte de trouver l'occasion de poursuivre cette étude, mais d'une manière qui permet d'en arriver à des recommandations concrètes sur la façon de renforcer nos institutions démocratiques.
(1605)
    Je vous remercie.
    Allez‑y, monsieur Fergus.

[Français]

     Merci beaucoup, madame la présidente.
    Puisque je vois que tous mes collègues de toutes les formations politiques aimeraient dire un mot à ce sujet, je vais pour l'instant céder ma place à Mme Gaudreau.
     Cependant, madame la présidente, je vous demande d'ajouter mon nom à la fin de la liste des intervenants.

[Traduction]

    Allez‑y, madame Gaudreau.

[Français]

    Nous devons rendre des comptes à la population, entre autres. D'ailleurs, c'est une des raisons pour lesquelles je suis ici. J'ai annulé plusieurs rendez-vous, parce qu'on m'a dit qu'il était important que je sois ici.
    Nous sommes inquiets. Nous avons besoin de transparence. Nous sommes convaincus que nous ferons ici la lumière sur cette situation — du moins, c'est ce que nous souhaitons —, afin que, dans l'avenir, nous ayons les moyens nécessaires de nous assurer qu'on ne porte pas atteinte à notre démocratie.
    Depuis des années, la confiance s'effrite. J'ai fait mes premiers pas en politique en 2019 et nous sommes maintenant en 2023.
    Jusqu'à preuve du contraire, nous pouvons compter sur plusieurs experts et professionnels. Il y a aussi d'autres pays qui ont emboîté le pas, dont l'Australie. Mes collègues vont comprendre pourquoi j'ai nommé ce pays.
    On nous a mentionné qu'il y avait plusieurs solutions. Je ne reviendrai pas sur tous les propos et sur ce nous avons tous lu, mais, aujourd'hui, il est important que nous parvenions à nous entendre. Nous ne pouvons pas nous arrêter maintenant. Nous avons entendu les réponses des hauts fonctionnaires et des différents ministres qui ont comparu devant le Comité. Les médias nous ont aussi transmis des informations que nous n'avons même pas été capables de comprendre. Il faut aller plus loin et trouver des solutions.
    Aujourd'hui, nous discutons d'une motion importante qui propose beaucoup à faire, notamment la quête d'éléments qui pourraient nous aider. Le but, ce n'est pas nécessairement de déterminer à qui revient la faute.
    S'il y a quelqu'un ici qui agit de manière non partisane, sauf pour défendre les intérêts des Québécois, c'est moi; c'est ma marque de commerce.
    Le gouvernement et l'opposition officielle ne font que renchérir sur les propos de l'autre. Ce n'est pas un choix.
    Nous ne cherchons pas le pouvoir, nous cherchons des solutions. En fin de compte, le pouvoir, c'est d'être autonome. Présentement, on peut bien parler de souveraineté, mais moi, j'extrapole ça à la souveraineté démocratique.
    Sommes-nous capables de dire aux citoyennes et aux citoyens qu'on peut garantir l'étanchéité de notre démocratie? Je ne suis pas en mesure de répondre à cette question présentement. J'ai beaucoup de doutes. Je me dois évidemment d'accepter qu'on s'y penche et qu'on aille un peu plus loin.
     Je considère que cette motion peut constituer une stratégie pour trouver un coupable. Évidemment, lorsque j'ai la parole pour poser des questions, celles-ci s'orientent surtout sur les pistes de solutions. Nous avons entendu des experts qui ont effleuré celles-ci, mais nous avons manqué de temps. Peut-être qu'ils sont déjà en train de préparer des documents pour nous présenter ce qui existe et leurs recommandations. Je pense même que certains pays vont nous appeler pour nous dire ce qu'il faut faire ou ne pas faire.
    Je le vois dans un avenir rapproché. Effectivement, puisque le gouvernement est minoritaire, nous ne pouvons pas prendre tout le temps que nous voulons, parce que ça peut arriver à grands pas. Voilà la raison pour laquelle il y avait urgence.
(1610)
    Je suis tombée sur une motion qui est intéressante. Elle me vient à l'esprit parce que j'entends certains dire que les conservateurs ne veillent pas assez aux questions d'ingérence, et d'autres dire qu'ils sont transparents et qu'ils veulent vraiment aller de l'avant.
    Je vais lire la motion et je vais ensuite m'arrêter afin que vous puissiez la juger par vous-mêmes. Cette motion a été adoptée, il n'y a pas si longtemps, le 18 novembre 2020, il y a deux ans et demi.
Que, étant donné (i) que la République populaire de Chine, qui est dirigée par le Parti communiste chinois, menace les intérêts nationaux du Canada et les valeurs de la population canadienne, y compris les Canadiens d'origine chinoise en territoire canadien, (ii) qu'il est essentiel que le Canada se dote d'une politique étrangère rigoureuse et fondée sur des principes appuyée par des actions de concert avec ses alliés, la Chambre demande au gouvernement: a) de prendre une décision au sujet de l'implication de Huawei dans le réseau 5G du Canada dans les 30 jours suivant l'adoption de la présente motion; b) d'élaborer un plan robuste, comme l'a fait l'Australie, pour lutter contre l'ingérence de plus en plus forte de la Chine au Canada et l'intimidation sans cesse croissante des Canadiens vivant au Canada, et de le présenter dans les 30 jours suivant l'adoption de la présente motion.
    Cette motion a été adoptée par 178 voix contre 146. J'ai vérifié, j'ai fait mes devoirs.
    C'est pour ça que je pense qu'on va peut-être réussir à s'entendre aujourd'hui dans la volonté de mieux faire les choses, parce que même notre collègue Mme O'Connell avait voté en faveur de cette motion.
    J'ai hâte d'entendre ce que dira mon collègue d'en face sur l'espoir de ne pas avoir plusieurs sous-amendements, parce que je pense qu'on est tous prêts à rester ici tard ce soir. L'objectif, ne l'oubliez jamais, outre la quête du pouvoir — parce que c'est agréable d'avoir le pouvoir —, c'est de penser à notre démocratie. Pensons aux gens que nous représentons, pensons à nos concitoyens et à nos concitoyennes.
(1615)
    Merci, madame Gaudreau.

[Traduction]

    Allez‑y, je vous prie, monsieur Julian.

[Français]

    Merci beaucoup, madame la présidente.
    J'ai plaisir à être avec vous aujourd'hui.
    Mme Blaney est parmi ses concitoyens. Comme vous le savez, elle a une circonscription qui couvre la moitié de l'île de Vancouver. Lorsqu'elle travaille auprès de certains ses concitoyens, il arrive souvent qu'elle n'ait pas accès à Internet et aux réseaux sans fil.
     Je vais commencer en disant que tous les partis partagent la volonté d'empêcher l'ingérence étrangère dans nos élections. Outre les révélations du Globe and Mail, on n'a qu'à penser à l'ingérence de Moscou dans les élections américaines de 2016 avec l'implication de l'Internet Research Agency, ou bien à l'ingérence étrangère lors du référendum sur le Brexit. Il n'y a aucun doute que le Comité doit se pencher sur ce sujet.
    La motion soumise aujourd'hui est très détaillée et n'a pas été déposée à l'avance, contrairement à notre procédure habituelle qui nous donne généralement quelques jours de réflexion et d'observation pour proposer des amendements. La motion présentée est très vaste et touche de nombreux aspects. À mon avis, elle n'aide pas le Comité à concevoir ce qu'il doit faire.
    Même si j'aime beaucoup écouter MM. Berthold et Cooper, ils ont pris presque la moitié du temps de cette réunion juste pour présenter cette motion. Selon moi, ce geste ne vise pas à trouver une solution ni à mettre en place des éléments permettant d'élargir l'étude. À ce sujet, je dois dire d'emblée que je suis d'accord pour que l'étude soit élargie.
     L'approche me laisse sur mon appétit. Pour moi, il est extrêmement important de proposer une motion qui vise à trouver des pistes de solution, et non à déclencher un débat.

[Traduction]

    Je crois très fermement, comme Rachel Blaney, qui se trouve actuellement avec les habitants de sa circonscription dans le nord de l'île de Vancouver, sans accès Internet, que nous devons sévir contre le genre d'ingérence étrangère impliquée dans l'élection de Trump en 2016, ou dans le Brexit, qui a été moussé par les conservateurs. Ce sont tous des cas qui, à mon avis, illustrent l'importance de cet enjeu. Étant donné que cette motion, qui est très détaillée, a été déposée devant le Comité plutôt que quelques jours plus tôt, ce qui est notre façon normale de procéder, et que près de la moitié du temps de parole a été occupé par M. Berthold et M. Cooper, il est évident que leur intention était davantage de s'exprimer que de trouver une solution au problème.
    J'aurai quelques propositions à mettre sur la table dans un instant. Il s'agit d'un enjeu que le Comité a abordé avec le sérieux que la situation actuelle exige. J'ai été déçu par M. Cooper, car, malgré le fait qu'il se soit exprimé avec beaucoup d'éloquence, il a négligé de souligner un élément qui me semble d'une importance fondamentale. Il s'agit de l'article du Globe and Mail qui révèle que certains candidats libéraux et conservateurs ont été favorisés par Pékin, selon une source de sécurité nationale.
    Ce problème ne se limite pas à un seul parti. En effet, il concerne plusieurs partis, car tant les libéraux que les conservateurs ont été apparemment ciblés par une ingérence étrangère. M. Cooper n'a pas commenté la manière dont le Parti conservateur a réagi à cette situation. Les candidats conservateurs qui auraient été soutenus, selon cet article de presse, ont-ils été élus? Nous l'ignorons. Nous ne savons rien de la mesure avec laquelle le Parti conservateur a effectué un suivi pour déterminer qui étaient ces candidats.
(1620)
    C'est quelque chose qui est d'une importance équivalente. Lorsque deux partis dont les candidats ont été soutenus par un autre pays, c'est quelque chose que nous devons tous prendre au sérieux. Il ne faut pas faire de la politique partisane, car en fin de compte, nous avons tous la responsabilité de veiller à ce que notre système électoral fonctionne en l'absence d'ingérence étrangère. J'approuve plusieurs éléments qui figurent dans cette très longue motion qui a été déposée au début de la séance.
    Le premier élément de cette motion est de prolonger la durée de l'étude, un élément sur lequel je pense que nous pouvons tous être d'accord.
    Pour ce qui est des séances supplémentaires, je pense que cela ne pose pas problème. La taille et la portée de l'article publié dans le Globe and Mail exigent que le Comité, dont je suis conscient qu'il travaille très fort, organise des séances supplémentaires. Que ce soit la semaine prochaine ou les semaines suivantes, je pense que nous aurons amplement matière à discuter.
    Je soutiens également le fait de faire revenir témoigner des ministres ayant déjà témoigné pour qu'ils se prononcent sur les nouvelles révélations. Je suis favorable à l'idée de recevoir des ministres des Affaires étrangères.
    Maintenant, pour ce qui est du vaste enjeu touchant au personnel et aux documents... Je n'ai pas l'impression que la motion aborde l'enjeu des documents de la façon sérieuse dont elle devrait être traitée, et je trouve cela regrettable. En raison de la durée des deux premières interventions, je ne sais pas si nous aurons le temps de travailler sur ce dossier aujourd'hui.
     J'ai des réserves concernant l'invitation du personnel. Madame la présidente, si vous me le permettez, je voulais citer un certain nombre de personnes pour le compte rendu. En ce qui concerne le personnel politique, plutôt que de demander aux ministres de venir témoigner, je suis favorable à ce que les ministres viennent expliquer les gestes qu'ils ont posés, ce qu'ils savent, et les mesures qu'ils ont prises pour qu'une telle situation ne se reproduise plus.
    Tout d'abord, je tiens à citer un ancien leader de la Chambre, qui a dit, et je cite:
Nous sommes donc très fondés à dire que ce sont les ministres qui devraient rendre compte des actions du personnel politique. Les ministres se sont présentés à des élections et ont accepté d'endosser la responsabilité que représente la fonction de ministre. Ce n'est pas le cas du personnel politique.
     J'ai cité Jay Hill, un ancien leader parlementaire du gouvernement conservateur.
    En second lieu, un autre député a affirmé ce qui suit:
Monsieur le Président, nous croyons que les ministres doivent rendre compte au Parlement de ce qui est fait en leur nom. C'est ce qu'on appelle la responsabilité ministérielle. C'est l'une des plus anciennes traditions au Canada.
Le chef libéral veut abolir cette tradition. À la place, il souhaite importer le système américain des comités, qui est utilisé comme une arme politique destinée à intimider et à humilier l'adversaire. Nous ne permettrons pas une telle chose.
La responsabilité ministérielle est la raison pour laquelle les ministres répondent aux questions pendant la période des questions. C'est aussi pour cette raison qu'ils se présentent devant les comités pour répondre au nom de leur ministère.
Nous espérons que tous les présidents de comité qui font partie de l'opposition vont respecter les règles et la procédure [...]
     Je rappelle que c'est le député de Grande Prairie—Mackenzie et l'actuel whip en chef adjoint du Parti conservateur qui parlent de l'importance de ne pas impliquer le personnel, mais plutôt de garantir la responsabilité ministérielle.
    Je pense que la troisième citation est très pertinente dans le cadre de cette conversation. Elle est la suivante: « L'honorable député sait très bien que depuis des centaines d'années, le principe de la responsabilité ministérielle est primordial ici, à la Chambre et dans ses comités. » Ce député parlait, encore une fois, de l'idée d'inviter le personnel politique, plutôt que les ministres.
     La dernière citation est celle du député de Carleton, qui est actuellement chef de l'opposition à la Chambre des communes. Les conservateurs ont donc dit très éloquemment dans le passé que nous ne devrions pas avoir de personnel politique mis en avant, et que la question de la responsabilité ministérielle est fondamentale... Je suis d'accord avec eux. Je suis d'accord avec eux sur ce point.
     Par conséquent, compte tenu de cette motion très détaillée qui a été soumise à ce comité sans préavis, je dirais que je soutiens les quatre premiers éléments. En ce qui concerne le traitement des documents, je trouve qu'il n'est pas à la hauteur de ce que nous devons faire pour les documents de nature très délicate qui sont liés à la sécurité nationale. En ce qui concerne le personnel, j'irai dans le sens de nombreux députés conservateurs qui ont dit avec beaucoup d'éloquence dans le passé que c'est à l'importance de tenir les ministres responsables, et non le personnel, que les parlementaires devraient s'adresser.
(1625)
    J'espère que les conservateurs seront disposés à travailler avec d'autres membres autour de la table pour trouver une solution viable.
    Je trouve regrettable que la réunion soit terminée et que, pendant la première moitié de la réunion, les deux auteurs conservateurs se sont exprimés sur la motion plutôt que de travailler à trouver un terrain d'entente. Cependant, de ce côté‑ci de la salle du Comité, nous prenons très au sérieux la question de l'ingérence étrangère, et nous sommes tout à fait en faveur de l'idée que ces ministres rendent des comptes, à la lumière de ces nouvelles informations, afin que le Comité prolonge l'étude pour s'assurer que, en fin de compte, toutes les recommandations mènent à une résolution selon laquelle il n'y aura aucune ingérence soupçonnée, alléguée ou réelle dans les futures élections canadiennes.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie.
    Le prochain intervenant est M. Calkins, suivi de M. Fergus, puis de M. Cooper.
    Monsieur Calkins, allez‑y, je vous prie.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    J'ai écouté attentivement les déclarations formulées par mes collègues à la table. Je rappelle bien aimablement à mon ami néo-démocrate, M. Julian, qui était ici lorsque certaines des déclarations qu'il vient de lire aux fins du compte rendu ont été formulées, que son ancien collègue M. Siksay a présenté de nombreuses motions visant à inviter des membres du personnel à comparaître devant divers comités parlementaires. Certains de ces membres du personnel sont sur la Colline aujourd'hui.
    Je ne parlerai pas de l'hypocrisie de la notion qui nous est présentée, mais il y a un membre du personnel dans cette motion, Katie Telford, qui est la cheffe du Cabinet du premier ministre. Elle n'a de comptes à rendre à aucun ministre, si ce n'est qu'au premier ministre, à qui nous n'avons pas demandé de comparaître devant ce comité concernant la reddition de comptes des ministères.
    Nous n'avons invité aucun membre du personnel des autres ministres. Nous avons invité les ministres directement, madame la présidente.
    En comparant une invitation à un membre du personnel comme Dimitri Soudas et d'autres, qui n'étaient pas chef de Cabinet pour le premier ministre Stephen Harper sous le gouvernement précédent, à une invitation à Katie Telford, on compare des pommes et des oranges. Ce n'est tout simplement pas pertinent. Ce n'est pas une comparaison pertinente à faire.
    En fait, les députés néo-démocrates ont tellement insisté pour convoquer certains membres du personnel à l'époque où le gouvernement Harper était au pouvoir qu'ils ont demandé au Président Milliken de rendre une décision à la Chambre des communes. Ils ont fait valoir que le fait de ne pas pouvoir convoquer le personnel devant un comité constituait une atteinte aux privilèges des parlementaires.
    Comme c'est pratique pour le NPD, maintenant qu'il a présenté une motion de confiance qui appuie littéralement le gouvernement du jour, alors que le gouvernement est remis en question et fait l'objet d'un examen minutieux de la part des médias, alors que des fuites de documents remettent en question la crédibilité du gouvernement et aujourd'hui, lorsqu'il s'agit de gérer l'ingérence étrangère.
    Le travail de ce comité cependant est de déterminer l'ampleur de la participation des acteurs étatiques étrangers, et de tous les acteurs étrangers d'ailleurs, dans le processus électoral. C'est évidemment un phénomène relativement nouveau. Nous n'en avons pas beaucoup entendu parler sous le gouvernement précédent. Je ne dis pas qu'il n'y en avait pas. Nous n'en avons certainement pas entendu parler autant que nous en entendons parler maintenant.
    L'intérêt des médias pour cette affaire, le fait qu'il y ait eu des fuites de documents et le fait qu'il y ait un premier ministre qui semble se soucier davantage du fait que ces documents soient divulgués que de ce qu'ils contiennent réellement... Je pense qu'un premier ministre qui a les intérêts du Canada à cœur plutôt que ses propres intérêts prendrait ces documents divulgués au sérieux.
    Nous, les conservateurs, voulons seulement savoir là où les choses ont mal tourné. Oui, nous savons que certains de nos collègues ont été touchés. Nous savons que des fonds du Parti communiste en Chine ont été versés à divers acteurs politiques par l'entremise d'agents ici au Canada. Ce sont des choses troublantes.
    Ce sont des enjeux dont tous les Canadiens devraient se préoccuper, car le fait de changer la donne, ne serait‑ce que dans quelques circonscriptions — comme l'ont mentionné des témoins qui ont déjà comparu devant ce comité — mine l'intégrité et la validité des institutions qui supervisent notre processus électoral.
    Je ne remets pas en question les résultats généraux des deux dernières élections. Je ne pense pas que quiconque ici fasse cette supposition. Cependant, il est certainement évident que quelques circonscriptions ont été touchées. Il est tout à fait raisonnable que les membres de ce comité cherchent à savoir dans quelle mesure un acteur étatique étranger peut changer la donne, en particulier dans les circonscriptions qui comptent d'importantes diasporas, car peu importe la provenance de ces acteurs étatiques étrangers, ces diasporas peuvent influencer le résultat des élections dans une circonscription donnée.
    Je rappelle à mes collègues autour de cette table que les élections sont parfois très serrées. Parfois, la différence entre un gouvernement majoritaire et un gouvernement minoritaire est de moins de 10 circonscriptions. Il y en a déjà 11 qui ont été remises en question dans la région de Toronto lors de l'une des deux dernières élections.
(1630)
    L'article de Fife et Chase et la note divulguée par Sam Cooper il y a quelque temps montrent clairement qu'à un moment ou à un autre, même si le premier ministre et les ministres qui ont témoigné devant ce comité ont dit qu'ils n'étaient au courant d'aucun de ces détails... L'article qui a fait l'objet d'une fuite semble s'être rendu entre les mains de Michael Wernick, et il n'y serait parvenu qu'en passant par... En fait, l'article lui-même fait état que Katie Telford a personnellement demandé ces documents, demandé ces examens, ce qui signifie qu'il est tout à fait raisonnable que nous l'entendions poser des questions très pointues, et qu'elle puisse faire part à ce comité de ce qui pourrait ne pas aller avec l'état des lois dans ce pays.
    Les professionnels de nos organismes chargés de la sécurité qui ont témoigné ici ont déclaré qu'il y a des lacunes dans le cadre législatif actuel. Pourquoi ne tenons-nous pas cette conversation? Pourquoi ne posons-nous pas les questions des gens et des acteurs qui sont directement impliqués? Quels conseils pourraient-ils nous donner pour que nous puissions faire notre travail en tant que députés et formuler des recommandations importantes à ce comité afin de protéger nos institutions? Si on ne fait pas les choses correctement, un problème qui semble croître et s'aggraver au fur et à mesure ne fera qu'empirer et enhardira les acteurs étatiques étrangers à continuer d'interférer dans notre processus démocratique. C'est très alarmant, madame la présidente.
    Je vais seulement citer les dernières phrases de l'article de Global News:
Un fonctionnaire qui n'a pas été autorisé à s'exprimer publiquement a qualifié d'« inexcusable » le fait que le bureau de M. Trudeau n'ait pas encore adopté de nouvelles lois malgré des années de dialogue « interactif » avec les hauts responsables des services du renseignement concernant les incursions de la Chine dans les élections canadiennes.
« Les vannes ont été ouvertes au cours des cinq dernières années. De nombreuses preuves ont été présentées au Parti libéral du Canada, qui n'a pratiquement rien fait. »
    Si le gouvernement ne fait rien, alors pourquoi ce comité ne fait‑il pas son travail? Pourquoi ce comité ne tient‑il pas des débats approfondis et ouverts dans la mesure où il le peut et ne fait‑il pas des recommandations au gouvernement au pouvoir? S'il continue de faire fi de cet enjeu, comme le prétendent non pas les conservateurs, mais Global News, Fife et Chase et Sam Cooper... Ce sont les personnes qui font ces observations. Ce n'est pas parce que les conservateurs les soumettent au Comité et prennent ces questions au sérieux qu'il faut les fustiger, les blâmer ou supposer qu'elles ont une motivation politique. Je présume que tous ceux qui sont assis autour de cette table sont des Canadiens patriotes et veulent que les meilleures choses soient faites pour notre pays, alors allons au fond des choses et invitons les gens.
    Notre motion, que mon collègue M. Cooper a présentée, est raisonnable. Elle ramène à la table des personnes que nous n'avons pas entendues ou des personnes que nous avons entendues précédemment, mais que nous n'avons pas entendues depuis que de nouvelles révélations ont été rendues publiques, ce qui est une raison justifiable d'inviter à nouveau des ministres qui sont déjà venus ici. C'est également une raison justifiable d'inviter des personnes qui sont d'anciens ministres ayant la même responsabilité, d'inviter des conseillers en matière de sécurité nationale, anciens et actuels, et d'inviter la cheffe de Cabinet du premier ministre, qui appuie et conseille le premier ministre depuis son arrivée en poste.
    Les Canadiens méritent de savoir ce que leur gouvernement a fait ou n'a pas fait ou ce qu'il ne fait pas. Les députés devraient certainement avoir le droit de savoir si le gouvernement respecte ses engagements et s'il joint le geste à la parole car, de mon point de vue, madame la présidente, il n'y a que deux raisonnements possibles. Le gouvernement sait — même s'il ne veut pas admettre expressément ce qu'il sait — la gravité de l'ingérence dans nos systèmes démocratiques, et il a choisi de ne rien faire ou, pire encore, madame la présidente, le gouvernement sait et a pris la décision calculée qu'il est dans son intérêt de faire fi du problème pour se faire du capital politique.
(1635)
    L'enjeu est fort grave, madame la présidente, et les Canadiens doivent savoir de quoi il en retourne. Ce ne sera possible que si nous n'amendons pas cette motion et si nous citons à comparaître les intervenants clés. Nous pourrons ainsi aller jusqu'au fond de cette affaire et savoir pourquoi, pendant les deux dernières élections, l'ingérence étrangère s'est intensifiée.
    Si nous ne faisons pas ce qui s'impose, si nous ne formulons pas nos recommandations au gouvernement avant les prochaines élections fédérales, on peut s'attendre à ce que ces acteurs étatiques étrangers soient encore plus enhardis à étendre leur réseau d'influence et à miner nos institutions démocratiques.
    Merci, madame la présidente.
    Merci.
    Allez‑y, monsieur Fergus.

[Français]

    Merci beaucoup, madame la présidente.
    J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt tous les commentaires des différentes formations politiques. Mon épouse, qui est théologienne, me disait toujours pendant ses études qu'un texte sans contexte est un prétexte. C'est ce qui m'est venu à l'esprit quand j'ai écouté les commentaires de mes collègues, surtout ceux de M. Julian et de Mme Gaudreau.
    Je pense qu'il est très important d'établir un contexte plus large pour évaluer tous les documents et toutes les allégations faites dans les journaux à propos d'ingérence étrangère, afin de s'assurer que les Canadiens seront bien servis par notre étude. J'espère qu'il s'agira d'une étude sérieuse et non partisane, pour toutes les raisons qui ont été soulevées par mes collègues. Je pense que la légitimité de nos élections préoccupe tous les députés, à l'exception peut-être de certains députés de l'opposition officielle, selon ce que nous avons entendu.
(1640)

[Traduction]

    Madame la présidente, si la question n'en tenait qu'à moi, je dirais que le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement est le forum idéal pour obtenir un accès complet à des documents non caviardés. Or, je sens un consensus se former parmi mes collègues, alors je vais tenter d'être constructif.
    J'ai envoyé à la greffière cet amendement à la motion de M. Cooper afin de le distribuer aux membres:
    Que la motion soit modifiée par suppression des alinéas c), h) et i), par adjonction à l'alinéa l), après le mot "public", des mots "et tous autres témoins que les membres du Comité souhaitent entendre", et par remplacement...

[Français]

    Monsieur Fergus, je suis désolée de vous interrompre.

[Traduction]

    L'amendement a été envoyé à la greffière et vient d'être distribué aux collègues. Vous l'avez dans les deux langues officielles afin de le consulter dans la langue de votre choix. Mme Nickel a appuyé sur « envoyer », alors vous devriez l'avoir dans vos boîtes de réception.
    Je vois des pouces levés et des hochements de tête. C'est excellent.

[Français]

    Je m'excuse de vous avoir interrompu, monsieur Fergus. Vous pouvez maintenant continuer.
    Il n'y a pas de problème, madame la présidente. Merci beaucoup.
    Je vais poursuivre la lecture de l'amendement:

[Traduction]

... de l'alinéa m) par ce qui suit: ordonne la production de tous les mémorandums ou notes d'information et de tout autre document pertinent qui sont en la possession des ministères ou des organismes gouvernementaux et qui contiennent des informations concernant les efforts déployés par des gouvernements étrangers ou d'autres acteurs étatiques étrangers, ou au nom de ceux-ci, pour s'ingérer dans les élections générales de 2011, 2015, 2019 et 2021, à condition que (i) les ministères et organismes chargés de recueillir ces documents appliquent des caviardages conformément à la Loi sur l'accès à l'information et la Loi sur la protection des renseignements personnels, (ii) ces documents caviardés soient déposés dès que possible auprès de la greffière du Comité pour être distribués à tous les membres du Comité dans les deux langues officielles.

[Français]

    Je vais...
    Attendez un instant, monsieur Fergus.
    Est-ce que quelque chose ne fonctionne pas?
    Nous n'avons pas la traduction.
    D'accord. Nous allons vous la transmettre dans un instant.

[Traduction]

    Mme Nickel vient de dire que l'amendement a été distribué.

[Français]

    Avez-vous reçu le courriel?

[Traduction]

    Bon nombre de membres l'ont reçu; je vois des pouces levés.
    M. Cooper ne l'a pas reçu.

[Français]

    Voulez-vous que je lise l'amendement en français, madame la présidente?
    Je pense que nos collègues demandaient seulement d'avoir la version française du texte sous les yeux, et non qu'on lise l'amendement en français.

[Traduction]

    Il se trouve dans ma boîte de réception. Si je l'ai reçu, tout le monde l'a reçu. C'est parfait.

[Français]

    Nous pouvons poursuivre.
    Je vais lire l'amendement en français, pour que tout soit limpide. En tant que député du Québec, j'accorde une grande importance à la question du bilinguisme. Cela doit être respecté ici, au Parlement.
    Tout d'abord, je propose que la motion soit modifiée par suppression des points c), h) et i).
    Ensuite, au point l), après le mot « publiques », je propose d'ajouter « et tout autre témoin que les membres du Comité souhaitent entendre ».
    Enfin, je propose de remplacer le point m) par ce qui suit:
m) ordonne la production de tous les mémorandums ou notes d'information et de tout autre document pertinent qui sont en la possession des ministères ou des organismes gouvernementaux et qui contiennent des informations concernant les efforts déployés par des gouvernements étrangers ou d'autres acteurs étatiques étrangers, ou au nom de ceux-ci, pour s'ingérer dans les élections générales de 2011, 2015, 2019 et 2021, à condition que

(i) les ministères et organismes chargés de recueillir ces documents appliquent des caviardages conformément à la Loi sur l'accès à l'information et la Loi sur la protection des renseignements personnels,

(ii) ces documents caviardés soient déposés dès que possible auprès de la greffière du Comité pour être distribués à tous les membres du Comité dans les deux langues officielles.
    Je suis ouvert à tout amendement favorable que Mme Gaudreau aimerait suggérer.
(1645)

[Traduction]

    Nous sommes saisis d'un amendement.
    Je vais continuer à suivre la même liste, si cela vous convient.
    Allez‑y, monsieur Cooper.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Permettez-moi de dire que l'amendement de M. Fergus représente une tentative d'éviscérer la motion que j'ai proposée. L'amendement déchargerait le premier ministre, le Bureau du premier ministre et les ministres du gouvernement qui s'occupaient des portefeuilles pertinents lors de l'élection de 2021 de leurs responsabilités et de comparutions devant ce comité pour lui dire — et, par l'entremise de ce comité, dire aux Canadiens — ce qu'ils savent au sujet de l'ingérence de Pékin dans la campagne électorale de 2021.
    L'amendement éviscère l'exigence liée à la production de documents. Je fais confiance au légiste pour caviarder des documents afin de protéger la sécurité nationale. Le légiste parlementaire détient une attestation de sécurité complète. Il est indépendant. Cette réalité pose problème à M. Fergus puisqu'un processus de production de documents dans lequel le légiste a la responsabilité d'évaluer indépendamment des enjeux de sécurité nationale nuit aux intentions que j'attribue à M. Fergus: il souhaite dissimuler l'inaction des libéraux face à la grave ingérence de Pékin.
    Ils aimeraient étouffer l'affaire et cacher de ce comité des preuves tangibles pour plutôt permettre une production de documents qui mène à du caviardage comme ceci, ou encore cela. Regardez un peu ici, et ici. Voilà la transparence libérale à son meilleur. Voici encore une page. C'est la transparence libérale tout craché: une autre page vide. Et une autre encore. Et regardez celle‑ci, qu'on a aussi complètement passée au caviar.
(1650)
    J'invoque le Règlement, madame la présidente.
    Allez‑y, monsieur Turnbull.
    J'aimerais un éclaircissement. M. Cooper tient des pages dans ses mains. Je crois qu'il s'agit d'un accessoire, mais je n'en suis pas certain.
    Vous pourriez peut-être clarifier, pour la gouverne des membres, si nous pouvons tenir des accessoires pendant les délibérations de comités.
    Monsieur Turnbull, c'est intéressant que vous posiez la question. J'entends des commentaires — peut-être de la part de collègues qui aimeraient assurer la présidence à l'avenir —, mais les règles régissant la Chambre aident également à diriger les comités. Nous ne pouvons utiliser d'accessoires ici.
    Monsieur Cooper, je dirais que notre réunion a été plutôt fructueuse. Je crois que nous nous entendons dans une certaine mesure quant à la démarche du Comité pour cette étude, que vous qualifiez d'importante. Si nous désirons réellement arriver à une entente, nous devrions tenter d'y parvenir avec sérieux.
    Je vais vous redonner la parole, mais j'aimerais vraiment éviter les rappels au Règlement. Les membres du Comité aident à gouverner le pays. Les enjeux sont extrêmement sérieux.
    Je vous redonne la parole. Je sais que vous connaissez les règles mieux que la plupart d'entre nous.
    Sur ce, nous vous écoutons, monsieur Cooper.
    Merci, madame la présidente.
    Un pavé de pages vides, voilà le type de production de documents que M. Fergus imagine dans son amendement. C'est tout à fait inacceptable. Cette démarche ne permettra pas d'aller au fin fond de l'affaire.
    C'est toujours du pareil au même avec les libéraux. Nous recevons des ministres à notre comité qui prétendent ne rien savoir, qu'il n'y a pas anguille sous roche, que tout était plus ou moins conforme aux règles. Oh, oui, il y a peut-être bien eu un peu d'ingérence. Lorsqu'on l'a questionné sur les plus récentes allégations s'appuyant sur l'examen du Globe and Mail des documents du SCRS, le premier ministre a répondu qu'on devrait traquer des employés du SCRS. Ce fut sa réaction. Il s'inquiétait davantage de la révélation de cette affaire que de l'importance d'exprimer son inquiétude quant aux événements.
    Une campagne bien ficelée s'est tramée et impliquait des dons en argent illégaux, de la désinformation, de la collusion dans les campagnes politiques, des représentants et des diplomates au Canada...
    Oui, monsieur Julian.
    J'invoque le Règlement, madame la présidente. M. Cooper fait de l'obstruction alors que nous devrions passer au vote. Nous sommes saisis d'une motion. Nous sommes saisis d'un amendement. Il nous reste sept minutes. Je demande la mise aux voix.
    Si les conservateurs s'inquiètent véritablement, comme nous, de l'ingérence étrangère, ils ne devraient pas faire d'obstruction pendant la réunion. Ils devraient nous permettre de voter afin que nous puissions élargir l'étude et inviter les témoins.
    Je pense que nous pouvons tous remplir notre rôle, chers collègues. Nous sommes tous ici, en tant qu'élus, un mardi pendant une semaine de relâche. Puisque les députés de l'opposition ont choisi de nous faire venir ici, faisons le nécessaire.
    Monsieur Cooper, je vous rends la parole.
    Avec tout le respect que je dois à M. Julian, je parle d'un amendement qui vide ma motion de sa substance. J'explique les problèmes que cela pose. Je pense que c'est tout à fait nécessaire.
    Étant donné qu'il sera bientôt 17 heures, je demanderais simplement que nous suspendions la séance pendant deux ou trois minutes. Nous voulons simplement revoir quelques points relatifs à l'amendement.
     J'ai quelqu'un d'autre sur la liste des intervenants.
    Je vous remercie de votre suggestion. Il s'agit d'une question. Je vais donc voir où en est le Comité.
    Sur ce, je cède la parole à Mme Gaudreau.

[Français]

    Merci, madame la présidente. Cela va aider ma réflexion sur l'amendement.
    J'ai une question à propos de la modification suggérée.
    Dans la motion initiale, au point (i) de la partie m), on demande que les documents soient déposés au Bureau du légiste et conseiller parlementaire. Dans l'amendement qui est devant nous, on demande plutôt qu'ils soient déposés auprès de la greffière du Comité.
    Quelle est la différence entre un greffier et un légiste? Sur le plan juridique, lequel des deux est officiellement non partisan et peut nous donner l'heure juste?
(1655)

[Traduction]

    J'en ai discuté brièvement avec la greffière, qui m'a confirmé que si elle devait consulter le légiste, elle le ferait. Ce n'est pas nécessairement l'un ou l'autre. C'est en quelque sorte la même entité, lorsqu'il s'agit d'obtenir l'information.
     Est‑ce exact? Merci.

[Français]

    J'espère que cela répond à votre question.

[Traduction]

    Je ne sens pas qu'on souhaite ardemment suspendre la séance. Puisqu'il n'y a plus personne sur ma liste d'intervenants, je vais mettre la question aux voix. Je vais mettre l'amendement aux voix, puis nous nous prononcerons sur la motion principale.
    Non, vous ne l'avez pas demandé.
    Je viens de mettre la question aux voix, et la greffière va maintenant procéder à l'appel nominal. Merci.
    M. Cooper n'a jamais cédé son temps d'intervention.
    Il a demandé à ce que l'on suspende la séance. Vous avez dit non, et vous lui avez ensuite retiré son temps. C'est inacceptable.
    J'invoque le Règlement, madame la présidente.
    Vous ne pouvez pas mettre la question aux voix lorsqu'un député demande la parole.
    Il n'y a plus personne sur ma liste.
    Non. Vous nous avez demandé de bonne foi si vous pouviez répondre à une question avant que l'on puisse suspendre la séance. M. Cooper n'avait pas cédé la parole, mais lorsque vous nous avez exhortés à nous comporter en adultes et à en finir, M. Cooper souhaitait que la séance soit suspendue pour consulter d'autres partis afin de trouver une solution.
     Si nous devons jouer de sales tours... Vous devez suivre les règles, madame la présidente, et vous ne le faites pas.
    Monsieur Barrett, tout d'abord, on ne me parlera pas ainsi. Ensuite, en regardant différentes réunions publiques de ce comité, vous constaterez que lorsqu'un député figure sur la liste d'intervenants, je lui donne toujours la parole. Lorsqu'on souhaite suspendre la séance, je détermine s'il y a consentement pour le faire. Ce n'est pas le cas aujourd'hui...
     Vous n'avez pas sondé la salle.
     M. Luc Berthold: Vous n'avez pas posé la question.
     J'ai dit que je verrais s'il y a consentement.
     Je vais vous rendre ce service, monsieur Barrett, car vous pensez pouvoir le faire aujourd'hui.
    Madame Sahota, souhaitez-vous que nous suspendions la séance?
    Il n'y a pas de mise aux voix. Il demande la parole.
     Je ne fais pas cela. Si la présidente vous cause des soucis, vous pouvez régler le problème.
     Je sais que je n'ai pas le consentement pour suspendre la séance. Il n'y a plus d'intervenants sur ma liste et j'ai donc mis la question aux voix.
     J'ai discuté de ce que vous vouliez faire pendant assez longtemps. Je mets la question aux voix.
    J'invoque le Règlement. Ce n'est pas comme cela que les choses fonctionnent.
    Je suspends la séance pour une minute. Voilà.
(1655)

(1715)
    Nous reprenons.
    Bienvenue de nouveau.
    Je cède la parole à M. Fergus.
    Merci, madame la présidente.
    Je veux dire à nos collègues qui participent à la réunion à distance que nous avons eu une discussion ici, à cette table. Grâce à la bonne foi des membres du Comité, nous sommes parvenus à nous entendre pour supprimer l'alinéa m) de mon amendement et de la motion principale.
    Sur le plan de la procédure, il s'agirait que je présente un amendement favorable à ce que j'avais proposé. Je vais proposer que tout le contenu de mon amendement soit conservé, à l'exception du passage sur l'alinéa m), dont je propose maintenant la suppression.
    Comme il s'agit d'un amendement à votre propre amendement, je vais mettre aux voix l'amendement incluant l'amendement favorable.
    Le vote porte sur l'amendement de M. Fergus incluant son amendement favorable.
     (L'amendement est adopté par 6 voix contre 5. [Voir le Procès-verbal])
    La présidente: Nous allons maintenant nous prononcer sur la motion principale modifiée de M. Cooper.
    (La motion modifiée est adoptée par 11 voix contre 0. [Voir le Procès-verbal])
(1720)
    Excellent. Merci à vous tous d'avoir trouvé une solution. Je vous en sais gré.
    Je tiens à signaler que selon la motion, qui a été adoptée avec l'appui de tous, le Comité doit prévoir des réunions le 23 février et pendant la semaine du 27 février. Tant que des témoins peuvent venir comparaître et que nous pouvons organiser le tout, nous ferons de notre mieux. La greffière a bon espoir que cela fonctionnera et nous allons essayer, mais nous resterons en contact avec tous les membres du Comité quant à ce qui est possible ou non. Je pense que nous faisons toujours preuve d'indulgence et de latitude. Nous nous assurerons qu'un avis sera donné suffisamment à l'avance.
     Sur ce, portez-vous bien et soyez prudents. Merci beaucoup.
    La séance est levée.
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