:
Merci beaucoup, madame la présidente.
J'aimerais présenter une motion concernant l'ordre de renvoi de la Chambre faisant suite à la question de privilège concernant la campagne d'intimidation orchestrée par un agent du consulat de Pékin à Toronto contre le député de Wellington-Halton Hills, .
La motion sera distribuée. Je vais maintenant lire la motion pour le compte rendu:
Que, relativement à son ordre de renvoi du mercredi 10 mai 2023 concernant la campagne d'intimidation orchestrée par Wei Zhao contre le député de Wellington-Halton Hills et d'autres députés, le Comité
(a) utilise, aux fins de la présente étude, les éléments de preuve reçus dans le cadre de son étude sur l'ingérence électorale étrangère, sans limiter les témoins qui peuvent être appelés à comparaître;
(b) utilise, aux fins de la présente étude, les témoignages reçus par le Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique dans le cadre de son étude sur l'ingérence étrangère, sans limiter le nombre de témoins qui peuvent être appelés à comparaître;
(c) invite chacun des témoins suivants à se présenter seul:
(i) l'honorable Michael Chong, pour une durée d'une heure,
(ii) Eric Janse, greffier intérimaire de la Chambre des communes, pour une durée d'une heure,
(iii) l'honorable Mélanie Joly, ministre des Affaires étrangères, pour une durée d'une heure,
(iv) l'honorable Marco Mendicino, ministre de la Sécurité publique, pour une durée d'une heure,
(v) l'honorable Bill Blair, président du Conseil privé du Roi pour le Canada et ministre de la Protection civile, pour une durée d'une heure,
(vi) Jody Thomas, conseillère à la sécurité nationale et au renseignement auprès du premier ministre, pour une durée de deux heures,
(vii) David Vigneault, directeur du Service canadien du renseignement de sécurité, pour une durée de deux heures,
(viii) David Morrison, vice-ministre des Affaires étrangères et ancien conseiller par intérim du premier ministre en matière de sécurité nationale et de renseignement, pour une durée de deux heures,
(ix) Mike MacDonald, ancien conseiller par intérim du premier ministre en matière de sécurité nationale et de renseignement, pour une durée d'une heure,
(x) Vincent Rigby, ancien conseiller en matière de sécurité nationale et de renseignement auprès du premier ministre, pour une durée d'une heure,
(xi) Michael Duheme, commissaire de la Gendarmerie royale du Canada, pour une durée d'une heure, et
(xii) Cong Peiwu, ambassadeur de la République populaire de Chine au Canada, pour une durée de deux heures;
(d) ordonne aux parties de fournir leurs listes préliminaires d'autres témoins au greffier du Comité dans un délai d'une semaine;
(e) ordonne la production,
(i) dans un délai d'une semaine, du rapport du SCRS de juillet 2021 intitulé « People's Republic of China Foreign Interference in Canada: A Critical National Security Threat », ainsi que tous les documents concernant la transmission au Cabinet du premier ministre, au Bureau du Conseil privé, au ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement et au ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile, la distribution au sein de ces organismes, l'analyse et le traitement de ce rapport, et
(ii) dans un délai de trois semaines, tous les autres mémorandums, notes d'information, courriers électroniques, comptes rendus de conversations et tous les autres documents pertinents, y compris les projets, qui sont en la possession d'un ministère ou d'un organisme gouvernemental, y compris le groupe de travail sur les menaces pour les élections en matière de sécurité et de renseignement, le groupe du protocole sur les incidents électoraux critiques, tout cabinet ministériel et le cabinet du premier ministre, et qui contiennent des informations sur la planification ou les efforts déployés par des gouvernements étrangers ou d'autres acteurs d'États étrangers, ou en leur nom, pour intimider un membre de la Chambre des communes, à condition
(iii) que ces documents soient déposés sans être expurgés au bureau du légiste et conseiller parlementaire, dans les deux langues officielles,
(iv) qu'une copie des documents soit également déposée au Bureau du légiste et conseiller parlementaire, dans les deux langues officielles, avec toute proposition de caviardage d'informations qui, de l'avis du gouvernement, risqueraient vraisemblablement de compromettre l'identité d'employés ou de sources ou les méthodes de collecte de renseignements d'organismes de renseignement canadiens ou alliés,
(v) que le Bureau du légiste et conseiller parlementaire doit rapidement faire savoir au Comité s'il est convaincu que les documents ont été produits conformément à l'ordre donné et, dans la négative, le Président doit être chargé de présenter immédiatement, au nom du Comité, un rapport à la Chambre décrivant les faits matériels de la situation,
(vi) le Bureau du légiste et conseiller parlementaire évalue les expurgations proposées par le gouvernement, conformément au sous-paragraphe (iv), afin de déterminer si le Bureau convient que les expurgations proposées sont conformes aux critères énoncés au sous-paragraphe (iv) et
(A) s'il est d'accord, il fournit les documents, tels qu'ils ont été expurgés par le gouvernement conformément au sous-paragraphe (iv), au greffier du Comité, ou
(B) s'il n'est pas d'accord avec tout ou partie des expurgations proposées, il fournit au greffier du Comité une copie des documents expurgés de la manière que le Bureau juge conforme aux critères énoncés au paragraphe (iv), ainsi qu'un rapport indiquant le nombre, l'étendue et la nature des expurgations proposées par le gouvernement qui ont fait l'objet d'un désaccord, et
(vii) le greffier du Comité fait distribuer aux membres du Comité les documents fournis par le Bureau du légiste et conseiller parlementaire conformément au sous-paragraphe (vi) et les fait publier sur le site Web du Comité dès leur réception; et
(f) met à disposition les éléments de preuve reçus dans le cadre de cette étude pour son étude sur l'ingérence électorale étrangère.
Madame la présidente, cette motion découle d'une question de privilège sur un sujet on ne peut plus grave. Il y a deux ans, un diplomate accrédité du consulat de Pékin à Toronto a organisé l'intimidation d'un député fédéral en menaçant de sanctionner et de punir sa famille à Hong Kong parce que ce député avait présenté une motion visant à dénoncer le régime de Pékin pour avoir perpétré un génocide contre les musulmans ouïghours.
Cela constitue une attaque contre cette assemblée et contre chacun des députés. C'est une attaque contre notre démocratie. C'est une tentative d'empêcher un député de cette chambre de faire son travail et de défendre les intérêts de ses électeurs et des Canadiens, ce que chaque député ici devrait pouvoir faire sans interférence.
Le SCRS a établi que cet agent de Pékin, ce diplomate de Pékin, avait participé à l'orchestration de cette campagne d'intimidation il y a deux ans. Cela a été révélé et documenté dans un mémo. Pourtant, pendant deux ans, le député de Wellington-Halton Hills, , a été tenu dans l'ignorance. Le , chose incroyable, prétend qu'il l'a appris pour la première fois dans le Globe and Mail et non pas il y a deux ans, alors que la conseillère à la sécurité nationale du premier ministre, Jody Thomas, a dit à M. Chong que le mémo avait été distribué aux ministères concernés ainsi qu'à la conseillère à la sécurité nationale au Bureau du Conseil privé.
Deux scénarios sont possibles, dont aucun n'est favorable au premier ministre. Le premier scénario est que le ne dit pas la vérité, qu'il a été informé et qu'il a tenu le député de dans l'ignorance. Il a étouffé l'affaire et fermé les yeux sur le fait qu'un diplomate de Pékin intimidait un député et menaçait la sécurité de sa famille. L'autre scénario est que le premier ministre est incompétent et a mis en place une structure dans laquelle il a été tenu dans l'ignorance et n'a pas été mis au courant de ce qui, comme je l'ai dit au début, est une affaire on ne peut plus sérieuse: un diplomate de Pékin essayant d'intimider un député dans l'exercice de ses fonctions en menaçant sa famille.
Dans un cas comme dans l'autre, il est clair que le est tout simplement inapte à exercer ses fonctions lorsqu'il s'agit de protéger l'intérêt national du Canada et la sécurité des Canadiens. C'est une preuve supplémentaire que ce premier ministre ne prend pas au sérieux l'ingérence de Pékin.
Je dois dire qu'il est très décevant que, face à l'inaction du , à son incompétence, à sa négligence et, sans doute, à la possibilité qu'il mente ou qu'il ne soit pas franc — je retire mensonge — ou qu'il ne dise pas toute la vérité, le premier ministre se lance dans une campagne pour tenter d'attaquer et de salir le caractère du député de en répandant des renseignements erronés selon lesquels le député avait été informé il y a deux ans, alors qu'il n'en est rien. Il a également chargé deux députés, dont le député de Kingston et les Îles, de répandre ces renseignements erronés à la Chambre. On ne peut tomber plus bas.
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Merci, madame la présidente.
En fin de compte, nous devons mettre au grand jour ce qui s'est passé, savoir qui a reçu ce mémo, comment il a été transmis, quand il a été distribué et à qui, et c'est ce que prévoit cette motion.
Il ne s'agit pas seulement de convoquer des témoins; il s'agit de produire des preuves. Il ne s'agit pas seulement de documents, mais de suivre la chronologie ainsi que la manière exacte dont ce mémo a été distribué afin de savoir exactement qui était au courant et quand.
J'espère que, dans l'esprit du vote unanime sur la question de privilège, cette motion sera également adoptée à l'unanimité.
Je vous remercie, madame la présidente.
Tout d'abord, c'est un plaisir d'être ici avec vous tous aujourd'hui. Il s'agit en quelque sorte de la suite de certains de nos travaux au comité de l'éthique.
Ceux d'entre vous qui ont eu le privilège de travailler avec nous savent que les néo-démocrates approuvent généralement la production de documents importants. Vous savez également qu'à l'unanimité, nous avons convenu qu'il s'agissait d'une question sérieuse. Nous avons des experts en la matière qui vont nous parler aujourd'hui.
Je dirais que nous sommes d'accord sur le principe de la production de documents. Nous pensons qu'il faut mettre en place un système permettant à une tierce partie d'évaluer ce qui relève ou non de la confidentialité du Cabinet et de la sécurité nationale, et d'évaluer toutes les autres choses que nous entendons généralement en comité et qui nous empêchent d'avoir accès aux renseignements.
Cela dit, je dirais que nous appuyons cette idée, mais nous encourageons vivement les députés autour de la table à nous permettre de revenir au sujet qui nous occupe aujourd'hui, à savoir les dépositions des témoins clés pour le reste de la réunion.
Je vous remercie de votre attention.
:
Merci, madame la présidente.
Je vous remercie tous de vos observations. Il est évident que nous prenons tous cette question très au sérieux. Une question de privilège est quelque chose qui nous préoccupe tous en tant que députés. Et dans le cas présent en particulier, je crois qu'il nous faut aller au fond des choses.
J'aurais aimé voir la motion un peu plus tôt afin de pouvoir y réfléchir, car elle ferait probablement l'objet d'un large consensus sur la majeure partie de son contenu. J'ai cru comprendre, d'après une conversation antérieure, que nous avions jusqu'à mardi pour décider si nous allions entendre d'autres témoins. Cette motion énumère des témoins précis choisis par les conservateurs, et je pense bien que notre équipe aimerait avoir un peu de temps pour réfléchir aux témoins que nous aimerions ajouter à la liste. Je crois que tous les partis devraient avoir la possibilité d'y réfléchir.
Je voudrais également souligner que nous devons entendre aujourd'hui trois groupes de témoins. Je crois que le témoignage de ces personnes a déjà été reporté et je ne voudrais pas leur manquer de respect. Il est important, à mon avis, que nous poursuivions les travaux du comité prévus pour la journée.
À ce comité, nous avons travaillé la plupart du temps en toute bonne foi et nous sommes parvenus à des accords sur... On pourrait même dire que nous avons convenu d'étudier l'ingérence étrangère avant que certaines de ces allégations ne commencent à circuler dans les médias; nous avons donc toujours manifesté un intérêt pour ce sujet. N'oubliez pas que les témoins qui sont ici aujourd'hui parlent de l'ingérence étrangère dans les élections et qu'ils ont des choses importantes à apporter.
C'est une question importante. Nous sommes prêts à collaborer. Tel est mon sentiment général, mais nous avons besoin d'un peu de temps pour examiner la motion. Je pense que si nous prenons ce temps, nous trouverons une solution, comme nous l'avons toujours fait dans le passé.
Sur ce, je propose que le débat soit maintenant ajourné.
:
Cette motion ne pouvant faire l'objet d'un débat, nous allons la mettre aux voix.
(La motion est adoptée 7 voix contre 4.)
La présidente: Je vous remercie.
Je tiens simplement à préciser — et je vais continuer à essayer de respecter le temps imparti — que je connais certains des paramètres.
M. Chong serait naturellement le premier à comparaître, et nous tenterons de le faire venir avant la semaine de relâche. Ensuite, nous déterminerons au fur et à mesure l'ordre de comparution des autres témoins.
Après la semaine de relâche, nous nous pencherons sérieusement sur la question de privilège, comme les députés en ont exprimé le souhait. Il reste que c'est le mardi qu'il faut faire parvenir le nom des témoins à la greffière. Si un avis n'a pas encore été envoyé, il le sera sous peu.
Sur ce, le comité se réunit aujourd'hui pour poursuivre son étude sur l'ingérence électorale étrangère.
Nous accueillons aujourd'hui Mark Bourrie, avocat, Michel Juneau-Katsuya, ancien chef de l'unité Asie-Pacifique du Service canadien du renseignement de sécurité, et Peter German, avocat, du Vancouver Anti-Corruption Institute.
Vous disposerez chacun d'un maximum de quatre minutes pour une déclaration liminaire, après quoi nous passerons aux questions des membres du comité.
[Français]
Monsieur Bourrie, vous avez la parole. Vous pouvez vous exprimer dans la langue officielle de votre choix.
:
Je ferai mes remarques en anglais. Je les ai remises aux traducteurs et je les ai envoyées à la greffière.
Je commencerai par dire que mes remarques vous seront probablement beaucoup plus utiles si vous avez une copie de l'article du Ottawa Magazine que j'ai envoyé à la greffière plus tôt cette semaine. L'histoire y est vraiment complète. Quatre minutes ne peuvent certainement pas lui rendre justice.
Le temps presse; j'aimerais donc vous remercier de m'avoir invité.
Comme vous pouvez le voir dans le courriel de 2012 que j'ai remis à la greffière, j'espérais avoir cette occasion il y a quelque temps déjà. Je pense que mon expérience au sein de l'agence de presse Xinhua pourrait fournir au Comité des renseignements et un contexte utiles dans son examen de la tentative de la Chine d'étendre son influence au système politique du Canada.
Je suis avocat depuis cinq ans, mais j'ai commencé à fournir des écrits à des journaux à la fin des années 1970. J'étais assez jeune. J'ai contribué à plusieurs quotidiens lorsque j'étais étudiant. J'ai passé 13 ans en tant que pigiste dans la région de la baie Georgienne, en Ontario, pour le Globe and Mail et le Toronto Star.
Je suis arrivé à Ottawa en 1994 et j'ai rejoint la tribune de la presse en tant que pigiste. Entre 1994 et 2007, j'ai écrit pour le Toronto Star, le National Post, l'Ottawa Citizen, le Hill Times, le Law Times, le Canadian Lawyer et un grand nombre d'autres publications énumérées dans mon CV. En 2004, j'ai commencé à travailler à mon doctorat, qui portait sur le système de censure de la presse pendant la Seconde Guerre mondiale, et en 2007, j'ai accepté un poste d'enseignant de durée limitée à l'Université Concordia, à Montréal. En 2009, j'ai terminé mon doctorat, mon contrat d'enseignement était terminé et je suis revenu dans la tribune de la presse.
La majeure partie du travail que je faisais à la pige avait été répartie entre mes collègues, ou les publications avaient réduit leurs achats, de sorte qu'un certain ajustement s'imposait. Parallèlement, il se passait des choses intéressantes dans les médias. Des expériences comme BuzzFeed, VICE, Canadaland, iPolitics, Blacklock's Reporter et d'autres médias non traditionnels tentaient de prendre la place de médias moribonds. En dehors de la scène médiatique, il semblait y avoir un véritable dégel dans les relations sino-occidentales.
Voici quelques éléments de contexte à retenir lorsque vous écouterez ce que je vais vous dire.
En 2009, Hu Jintao était encore président et dirigeant de la Chine, et son mandat était encore limité dans le temps. La Chine sortait tout juste de Jeux olympiques d'été couronnés de succès. Les relations entre la Chine et Taïwan semblaient s'améliorer. Le Canada avait envoyé des missions commerciales en Chine pendant des années, et tous les gouvernements récents essayaient de conclure un accord. Le gouvernement Harper y est parvenu en 2014.
En 2009, des représentants de l'agence de presse chinoise Xinhua m'ont demandé d'écrire quelques articles en tant que pigiste. J'avais des inquiétudes et j'ai essayé d'obtenir des conseils du SCRS. Mes collègues et les membres de la Colline en général se méfiaient beaucoup des activités de Xinhua au Canada, et j'ai demandé conseil au SCRS, qui ne m'a jamais répondu. La plupart de mes interactions avec Xinhua sont documentées dans l'article du Ottawa Magazine que j'ai envoyé à la greffière du Comité et dans les courriels que je vous ai également transmis.
Xinhua essayait d'accomplir deux choses qui semblaient s'exclure mutuellement, mais qui, en fait, ne s'excluaient pas. Elle voulait gagner de l'argent et se développer pour devenir une agence de presse alimentant en contenu des organismes d'information crédibles dans le monde entier. Elle a conclu des accords avec de grands médias comme l'Associated Press et avec des médias chinois au Canada et dans d'autres pays. Elle voulait également donner de la crédibilité aux institutions chinoises et au régime.
Xinhua était apolitique. Je n'ai vu aucune tentative de promouvoir les intérêts d'un parti politique canadien plutôt qu'un autre, mais mon expérience est limitée. Xinhua ne voulait pas offenser les acteurs politiques ici, et les articles de l'époque sont, je crois, toujours en ligne. Xinhua a couvert des événements sociaux somptueux à l'ambassade de Chine, qui ont attiré des députés et des sénateurs libéraux et conservateurs. Elle a refusé de publier toute critique à l'égard du gouvernement conservateur.
Cependant, il s'est avéré que le chef du bureau de Xinhua recueillait des renseignements pour la Chine et il m'a demandé d'espionner pour lui. Il voulait des renseignements sur la rencontre privée entre le premier ministre Harper et le dalaï-lama en avril 2012, alors j'ai démissionné et je lui ai dit pourquoi.
:
Pour être le plus concis possible, j'ai supprimé quelques paragraphes de la présentation que j'ai donnée au service d'interprétation. Alors, j'espère que ce dernier pourra me suivre.
Madame la présidente, membres du Comité, je vous remercie de m'offrir l'occasion de vous faire part de mes réflexions et de mes analyses basées sur 30 ans de travail, de recherches, d'enquêtes et d’analyses sur les activités des services de renseignement chinois au Canada. Ce travail, je l'ai effectué comme agent du contre-espionnage, conseiller en matière de sécurité pour le secteur privé et chercheur universitaire.
D'entrée de jeu, je peux vous confirmer que le Service canadien du renseignement de sécurité, le SCRS, connaît le problème de l'ingérence chinoise dans les élections canadiennes depuis le milieu des années 1990. À cette époque, mon unité avait produit le rapport Sidewinder en collaboration avec la GRC. Pour la première fois, nous avions appris dans les archives d'Élections Canada que l'ambassade de Chine avait donné de l'argent en 1995 aux caisses électorales du Parti libéral du Canada et du Parti conservateur du Canada. Les services chinois étaient alors maladroits. Trente ans plus tard, ils ont bonifié leurs techniques et leurs opérations, et ce, avec beaucoup d'aplomb et de témérité.
[Traduction]
Le problème, cependant, ne vient pas seulement des opérateurs chinois. Il est également causé par nos propres candidats, nos élus et notre personnel politique, qui sont naïfs ou calculent intentionnellement pour gagner du pouvoir avec l'aide du gouvernement chinois. Si les services de renseignement chinois sont si doués, c'est parce qu'ils connaissent le système électoral et les faiblesses de l'être humain, et que leur travail est un jeu de longue haleine.
Aujourd'hui, je veux être très clair. Nous pouvons prouver que tous les gouvernements fédéraux, de M. Mulroney à , ont été compromis par des agents de la Chine communiste. Tous les gouvernements ont été renseignés à un moment ou à un autre. Chaque gouvernement a choisi d'ignorer les avertissements du SCRS par négligence, par intérêt personnel ou par partisanerie. Tous les gouvernements ont été infiltrés par des agents d'influence agissant pour le compte du gouvernement chinois, et nous savions qui ils étaient. Chaque gouvernement a pris des décisions concernant la Chine qui sont discutables et ne peuvent s'expliquer que par une ingérence exercée de l'intérieur ou motivée par l'intérêt personnel.
Non seulement les gouvernements en place ont été compromis, mais tous les partis politiques fédéraux l'ont été à un moment ou à un autre. L'inaction du gouvernement fédéral — de tous les gouvernements fédéraux — a conduit à des attaques contre de nombreux gouvernements municipaux et provinciaux. En fin de compte, tous les gouvernements ont fait partie du problème, et non de la solution, et il ne faut pas oublier que la Chine n'est pas la seule à pratiquer l'ingérence.
Compte tenu de ces faits, je voudrais proposer respectueusement quelques mesures à prendre.
Premièrement, établir un processus obligatoire pour tous les futurs élus, le personnel politique et les bénévoles, dans lequel ils prêtent serment et signent une déclaration indiquant qu'ils ne sont pas sous l'influence ou qu'ils n'agissent pas pour le compte d'un gouvernement ou d'une entité étrangère. Ce document ferait état explicitement des procédures pénales en cas de tromperie intentionnelle.
Deuxièmement, supprimer la possibilité pour des étrangers de voter pour la sélection des candidats et des personnes nommées. C'est un non-sens évident.
Troisièmement, donner un briefing de sécurité explicite et clair à tous les députés nouvellement élus et leur demander de prouver par leur signature qu'ils ont assisté à ce briefing et qu'ils l'ont compris, en les avertissant à nouveau des répercussions en cas de tromperie. La prévention est notre meilleure défense.
Quatrièmement, interdire à tous les ministres et hauts fonctionnaires sortants de travailler ou de participer à toute activité ou tout emploi lié à leurs fonctions antérieures pendant une période de trois à cinq ans, tant pour les entités étrangères que nationales.
[Français]
Cinquièmement, je propose que le Canada se dote d'une loi pénale sur l'ingérence étrangère, définissant les activités considérées comme illicites et les peines pouvant être encourues.
Sixièmement, je recommande la création d'un bureau indépendant, distinct du SCRS et de la GRC, qui se rapportera directement à la Chambre des communes, et dont le directeur ou la directrice sera nommé par cette dernière. La proposition de créer un poste de coordonnateur national sous la tutelle du ministre est un non-sens.
Septièmement, ce bureau doit avoir des pouvoirs encadrés par une loi lui donnant le droit, à titre d'agent de la paix, d'enquêter, de perquisitionner, de procéder à des arrestations et d'entamer des poursuites pénales sans avoir à en demander la permission à qui que ce soit.
Huitièmement, je propose la création d'un mécanisme de transparence contrôlée, afin de dévoiler les cas d'ingérence détectés, ayant fait l'objet d'une enquête et confirmés. Comme je l'ai mentionné, l'éducation et la sensibilisation sont nos meilleures défenses.
[Traduction]
Neuf...
:
Merci, madame la présidente.
[Traduction]
Bonjour, mesdames et messieurs les membres du Comité. Je vous remercie de votre invitation.
En guise de brève introduction, je dirai que l'Institut de lutte contre la corruption de Vancouver a été créé en 2021. Il fait partie intégrante de l'International Centre for Criminal Law Reform de l'Université de la Colombie-Britannique. Nous sommes une organisation à but non lucratif et nous réalisons des projets à l'échelle internationale. Nous faisons de la recherche et de la rédaction, et nous organisons des conférences et des ateliers.
Sur le plan personnel, je suis un ancien sous-commissaire de la GRC et du Service correctionnel du Canada. J'ai également rédigé deux rapports pour le procureur général de la Colombie-Britannique, aujourd'hui premier ministre, intitulés Dirty Money et Dirty Money—Part 2.
Mon intention, dans les prochaines minutes, est de parler des résultats, ce qui fait très bien suite, en fait, aux propos de mon ami, M. Juneau-Katsuya.
Inévitablement, ce comité recommandera des changements législatifs qui pourraient inclure la création d'un registre ou d'une agence pour traiter des questions qui vous réunissent. D'après notre expérience internationale, de nombreux pays, peut-être même la plupart, ont mis en place des lois pour traiter toutes les formes de criminalité. Ils se conforment ainsi aux normes internationales. Malheureusement, peu nombreux sont les pays qui appliquent les lois régissant les questions essentielles comme la corruption et le blanchiment d'argent.
Le blanchiment d'argent est l'arrière-plan du crime organisé transnational et va de pair avec lui. L'argent joue également un rôle important dans l'ingérence électorale. Combien, d'où et pourquoi sont des questions cruciales.
Pratiquement tous les pays disposent de lois contre le blanchiment d'argent, mais peu d'entre eux les appliquent activement. Au Canada, notre performance est mitigée, même si le budget de 2023 et les initiatives prises en Colombie-Britannique sont porteurs d'espoir, tout comme la confiscation de biens civils dans les provinces. Autrement dit, il y a un monde entre la parole et l'acte. Le Canada doit agir. Nous respectons la primauté du droit et devons projeter dans le monde le fait que nous croyons à l'intégrité et à la bonne gouvernance.
Qu'en est‑il alors? Lors de la création d'une loi, d'un registre ou d'une agence, quelques points sont d'une importance vitale.
La première est la vérification. Les renseignements ne sont que du bruit s'ils ne sont pas vérifiés. L'expression « à données inexactes, résultats erronés » résume bien cet aspect.
Deuxièmement, l'accès du public. La transparence est essentielle. Grâce à elle, les médias et les parties intéressées peuvent exercer une forme de contrôle essentielle dans une démocratie.
Troisièmement, l'indépendance. Les personnes mandatées pour traiter ces questions doivent savoir qu'elles sont protégées contre toute attaque, rétrogradation, censure ou remise en cause de leur carrière.
La quatrième question est celle des conséquences. Il doit y avoir des conséquences si des personnes ou des entités ne respectent pas les règles.
La cinquième question est celle de l'application. Il est essentiel de désigner et de financer des entités expressément chargées de l'application de la loi. La GRC à l'échelle fédérale et l'unité d'enquête et d'exécution d'Élections Canada sont déjà en place, mais elles ont besoin d'une loi forte, d'un financement sûr et d'un accès rapide aux services de poursuite. Par exemple, bien qu'elle enquête sur des activités criminelles, l'unité d'enquête d'Élections Canada n'a pas accès à la précieuse mine de renseignements qu'héberge le CANAFE.
Enfin, en ce qui concerne l'argent, les fonds utilisés pour influencer le système politique entrent généralement dans l'arène politique par l'intermédiaire de mandataires nationaux ou étrangers. Nous parlons de trois étapes dans le cycle du blanchiment d'argent: le placement, la superposition et l'intégration. L'objectif est de brouiller les pistes. Il n'est pas surprenant que l'argent fourni par des influenceurs étrangers s'apparente davantage au financement du terrorisme, car il est utilisé pour commettre un crime et n'est pas le produit de la criminalité, comme c'est le cas pour le blanchiment d'argent traditionnel. Encore une fois, les organismes chargés de l'application de la loi ont besoin des outils législatifs, de financement et de ressources spécialisées pour suivre la piste de l'argent.
Mesdames et messieurs, votre rôle en tant que membres du Comité est particulièrement important à un moment crucial de l'existence de notre pays. Je vous remercie de votre travail et je me tiens à votre disposition pour répondre à vos questions.
Je vous remercie, madame la présidente.
:
Je vous remercie de cette question.
Nous ne sommes pas certains si la source provient du SCRS ou d'une autre organisation de la grande famille des services de sécurité et du renseignement du Canada.
Cela dit, la personne qui a été le déclencheur de toute cette information a créé un événement historique. Nous ne nous parlerions pas aujourd'hui si ce n'était de ce geste et de ce dont j'ai été témoin au cours des 30 dernières années. Malheureusement, puisque j'étais tenu au secret, je n'ai pas pu en parler avant.
Les Chinois ont gagné énormément de terrain. Toutefois, comme je le disais, il n'y a pas que les Chinois. Cependant, les Chinois ont été très agressifs, ils ont été très téméraires, et ils ont réussi à gagner énormément de terrain.
Alors oui, je crois qu'il y a une différence entre la responsabilité éthique et la responsabilité morale. Je suis d'avis que le lanceur d'alerte a agi de façon morale, ce qui, à mon sens, prime sur les considérations éthiques et les responsabilités contractuelles.
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La comparaison est vraiment importante. L'Amérique est notre plus grand partenaire économique, et ils ont environ 80 diplomates ici, au Canada, donc il y a deux fois plus de Chinois et nous avons un déficit commercial avec la Chine.
D'où vient l'erreur? Mon hypothèse en tant qu'enquêteur est que malheureusement, aux Affaires étrangères — ou aux Affaires mondiales aujourd'hui — certaines personnes travaillent naïvement et non intentionnellement — ou peut-être intentionnellement — pour le compte de la Chine. Une certaine forme de remaniement doit se produire de ce côté‑là également.
Regardez le temps qu'il a fallu pour prendre une décision sur l'expulsion d'une personne qui était si évidente. Je vais répéter ce que j'ai dit dans mon exposé: nous le savons depuis 30 ans. Nous avons averti les premiers ministres et les cabinets de toutes ces choses, et les gens, par intérêt personnel, par esprit partisan ou par négligence, ont négligé de prendre des mesures.
Je peux comprendre les ramifications politiques, économiques et autres qui existent, mais en même temps, parce que nous avons agi si faiblement, cette ingérence étrangère a eu lieu et se trouve bien enracinée dans notre système en ce moment.
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J'ai dit au représentant de Xinhua: « Écoutez, ce n'est pas ce que font les journalistes canadiens. » J'ai envoyé cela à la tribune de la presse. C'était en avril 2012. Ils n'ont rien fait. Il s'agissait du personnel et des journalistes qui faisaient partie du comité directeur de la tribune de la presse.
J'ai fait le tour et j'ai essayé d'obtenir une certaine couverture médiatique. J'ai écrit un article qui a été publié en août 2012 dans l' Ottawa Magazine, et les gens ont enfin pris conscience de ce qui se passait.
Personne au gouvernement ne m'a contacté. Personne au SCRS ne m'a contacté. C'est le premier agent du SCRS que je vois de ma vie — à ma connaissance.
Des voix: Oh, oh!
M. Mark Bourrie: La tribune a essayé de faire croire qu'il s'agissait d'un différend entre Xinhua et moi. J'ai dit: « Non, c'est un problème chez vous et dans votre gouvernance. » Lorsque Xinhua a dit qu'elle allait me poursuivre en justice, j'ai dit que c'était très bien; ce n'est pas mon différend, ce n'est pas mon problème, et j'en suis resté là.
En fait, le rapport n'a pas été tabletté. On nous a ordonné de le déchiqueter, ainsi que toutes les notes de travail que nous avions accumulées. À ma connaissance, il n'existe qu'un seul exemplaire aujourd'hui, et c'est celui qui est en possession de la GRC.
Des exemples de décisions discutables prises au fil du temps, il y en a plusieurs. L'une d'elles a été mentionnée par M. Fergus: on connaît maintenant ouvertement l'existence d'une relation inappropriée entre une journaliste, reconnue par tous les services de renseignement comme étant une espionne, et un secrétaire d'État. Or, la réaction du gouvernement a été de dire qu'il s'agissait d'une histoire personnelle et qu'on ne devait pas s'en occuper. De plus, l'homme en question est demeuré en poste.
Tout à l'heure, j'ai mentionné une autre décision: on a vendu une entreprise du domaine de l'énergie en Alberta pour 15 milliards de dollars, mais nous ne sommes pas capables d'acheter quoi que ce soit. Lorsqu'on fait l'acquisition d'une compagnie pour 15 milliards de dollars, on se retrouve avec une importante puissance d'influence. En tant que simples citoyens canadiens, si nous voulions parler à la première ministre de l'Alberta aujourd'hui, nous serions probablement mis en attente et nous attendrions longtemps. Par contre, une compagnie qui a 15 milliards de dollars d'investis, et peut-être quelques milliers d'employés, va probablement se voir accorder une audience dans la semaine qui suit. C'est le genre de situation que nous avons pu observer.
Nous avons aussi observé des cas d'individus qui, de toute évidence, rencontraient régulièrement des agents du Département du travail sur le front uni, la principale agence chinoise s'occupant des activités d'ingérence étrangère dans le monde. Des gens les rencontraient dans la communauté et en Chine, et certains se sont fait payer des voyages en Chine. Ces gens faisaient partie des cercles rapprochés du pouvoir et du système décisionnel.
Des maires, dont ceux de Vancouver et d'Ottawa, étaient opposés à certaines activités chinoises, mais se sont fait payer un voyage en Chine par le gouvernement chinois. En revenant, ils ont notamment adopté des règlements municipaux pour contrecarrer les manifestations qui se tenaient régulièrement en face des ambassades.
Ce ne sont là que certains exemples. À l'heure actuelle, il y a énormément d'ingérence étrangère au niveau provincial, et les provinces sont totalement dans le noir. Rien n'est fait, aucune sensibilisation n'est faite.
Lorsque le Service canadien du renseignement de sécurité, le SCRS, a tenté de sensibiliser les industries à la question du vol de propriété intellectuelle, le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité a réprimandé le SCRS en lui disant que ce n'était pas sa responsabilité et qu'il ne devait donner l'information qu'au gouvernement, c'est-à-dire au premier ministre. On en voit le résultat aujourd'hui: les premiers ministres sont restés les bras croisés et n'ont rien fait.
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Il envoie un très mauvais message.
À l'heure actuelle, le Groupe des cinq se pose de sérieuses questions, après une litanie de mauvaises décisions ou de décisions qui n'ont pas été prises assez rapidement, et ce, même si les preuves étaient flagrantes: la décision concernant Huawei, la décision d'expulser un diplomate, la décision de s'attaquer à la question de l'ingérence étrangère. Il a malheureusement fallu attendre la manoeuvre d'un lanceur d'alerte pour que le Canada se mette en mode action. Pour les États‑Unis et le Groupe des cinq, c'est très préoccupant.
Par l'intermédiaire de l'opération Dragonlord, les États‑Unis ont cherché à surveiller le gouvernement canadien et à établir sa relation avec la Chine. Depuis les années 1990, nos alliés ont des doutes sur la volonté du Canada d'agir et de protéger les secrets qu'on lui transmet.
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Je vous remercie. Bonjour à tous.
Je vais vous poser une série de questions en rafale. Comme je ne dispose que de six minutes, au cas où je devrais intervenir et reprendre la parole, je vous demande de ne pas vous en formaliser. Ce n'est certainement pas personnel.
J'aimerais commencer par vous, monsieur Juneau-Katsuya. J'ai eu le privilège de siéger à un comité en votre compagnie. Vous y aviez présenté un témoignage convaincant tout à fait en ligne avec vos propos d'aujourd'hui.
En particulier, vous avez mentionné que tous les premiers ministres depuis Mulroney ont été avertis de l'ingérence étrangère et qu'aucun d'entre eux n'a fait quoi que ce soit à ce sujet. Je pense que nous convenons tous que l'ingérence étrangère est un enjeu non partisan.
Pour que les choses soient claires, la loi exige que le SCRS ne signale les cas d'ingérence étrangère qu'au gouvernement. Est‑ce exact?
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L'une des stratégies d'ingérence étrangère de la Chine consiste à infiltrer une communauté et à l'influencer, voire à l'intimider, pour qu'elle agisse ou travaille dans une certaine perspective. Grâce aux médias sociaux, une grande exploitation a été amorcée simplement en vue de lancer des campagnes négatives contre certaines personnes, ce qui en viendra à influencer la communauté.
La communauté chinoise du Canada est bien informée depuis des dizaines d'années de l'influence que le gouvernement chinois exerce sur elle. Elle sait qu'elle est observée. Ses membres n'ont pas été en mesure de le signaler aux autorités, et lorsqu'ils l'ont fait, les autorités n'ont pas été en mesure d'enquêter convenablement, de sorte qu'ils se sont sentis totalement laissés pour compte.
Ils se sont adaptés à la situation et, malheureusement, nous avons une communauté dont les membres lisent très souvent des journaux chinois, lesquels sont influencés ou manipulés par l'État et qui livrent leur propre message. En fin de compte, ils savent qu'au sein de la communauté, des agents d'influence, c'est‑à‑dire des Canadiens agissant au nom du gouvernement chinois, dénoncent des individus. Comme si cela ne suffisait pas, nous avons récemment découvert l'existence de postes de police chinois secrets dans la communauté.
Cette forme de surveillance, et d'intimidation a fondamentalement contrôlé de nombreux membres de la communauté chinoise qui, en grand nombre, ont de la famille dans leur pays d'origine.
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Merci, madame la présidente.
Je remercie les témoins pour leur témoignage.
Monsieur Juneau-Katsuya, je vais commencer par vous.
Vous avez explicitement affirmé que nous pouvons prouver que tous les gouvernements ont été compromis, de Mulroney à Trudeau, ce qui n'est pas peu dire. Si je ne me trompe pas, vous avez déjà dit la même chose au comité de l'éthique.
M. Bourrie nous a dit aussi qu'on lui avait demandé d'espionner le dalaï-lama et le premier ministre Harper à l'époque, qu'il avait tiré la sonnette d'alarme et que M. Harper n'avait rien fait. Je fais le lien avec ce que nous avons vu quelques années plus tard, car je crois que c'était en 2012, si je ne me trompe pas. En 2014, le premier ministre Harper a conclu un accord commercial de 30 ans avec la Chine. À l'époque, de nombreux experts ont exprimé de sérieuses inquiétudes à propos des répercussions de cet accord sur notre sécurité nationale.
Monsieur Juneau-Katsuya, diriez-vous que le premier ministre Harper était mou envers la Chine?
C'est l'un de ces groupes pour lesquels nous aimerions avoir beaucoup plus de temps et c'est pourquoi je dirai aux témoins, tout d'abord, au nom des membres du comité de la procédure, merci beaucoup pour le temps que vous nous avez accordé. Je vous remercie de votre patience au début de la réunion. Si vous aimeriez nous faire parvenir d'autres renseignements dont nous devrions prendre connaissance, veuillez les soumettre à la greffière. Nous les ferons traduire dans les deux langues officielles et nous les distribuerons.
Nous vous remercions beaucoup de nous avoir fait part de vos réflexions et nous vous souhaitons une bonne fin de journée. Merci pour votre travail. Nous espérons rester en contact avec vous. Portez-vous bien et soyez prudents.
La séance est suspendue jusqu'à l'arrivée du prochain groupe. Merci beaucoup.
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Nous reprenons nos travaux.
Nous accueillons maintenant Nancy Bangsboll, chercheuse indépendante, par vidéoconférence; Thomas Juneau, professeur agrégé à l'École supérieure d'affaires publiques et internationales de l'Université d'Ottawa; et enfin, Christian Leuprecht, professeur au Collège militaire royal du Canada, par vidéoconférence.
Vous disposerez chacun d'au plus quatre minutes pour une déclaration liminaire, après quoi nous passerons aux questions des membres du Comité.
Madame Bangsboll, la parole est à vous. Bienvenue au comité de la procédure.
Bonjour à tous. Je m'appelle Nancy Bangsboll, et je suis chercheuse indépendante dans le Sud-Ouest de l'Ontario.
Des recherches ont prouvé que la Tides Foundation U.S. a fourni une quantité substantielle de fonds étrangers à des organisations au Canada, y compris Dogwood, Leadnow, le Conseil des Canadiens et bien d'autres. Ces organisations se sont inscrites en tant que tiers et ont ensuite travaillé ensemble pour infléchir les résultats de l'élection de 2015.
Mes recherches se sont concentrées sur les circonscriptions, sur les influenceurs actifs dans des villes et sur la façon dont ces organisations et campagnes financées par des fonds étrangers ont influé non seulement sur les résultats de nos élections, mais plus important encore, sur les politiques gouvernementales depuis 2015.
Les bénéficiaires de ces fonds étrangers au Canada comprenaient des organisations qui ont ouvertement déclaré leur engagement à défaire des candidats conservateurs, et leur engagement à travailler ensemble et à voter ensemble afin de réaliser leurs différents objectifs. Ils l'ont fait à plusieurs reprises dans des documents imprimés, des vidéos et des appels téléphoniques avant et pendant les élections de 2015. D'importantes preuves de l'avantage conféré aux candidats ont été décrites en détail dans le rapport Defeating Harper de Leadnow et dans les notes des réunions de synthèse de Leadnow.
Au cours de l'été 2016, j'ai déposé une plainte volumineuse auprès d'Élections Canada, en demandant au commissaire de mener une enquête approfondie et d'engager des poursuites pour les violations de la Loi électorale du Canada et pour toute autre infraction que son enquête révélerait. Au cours de l'hiver 2016, deux enquêteurs d'Élections Canada sont venus chez moi et ont passé deux heures et demie à examiner les preuves fournies dans la plainte. L'enquêteur Tim Charbonneau et moi avons continué à correspondre par courriel et par téléphone jusqu'en octobre 2017, date à laquelle j'ai reçu le dernier courriel de sa part. Il m'a informé qu'il poursuivait son enquête et qu'il avait fait des progrès considérables. Il m'a rappelé que dans toute affaire comportant des allégations de collusion, il est très important de parler à toutes les parties concernées et que, compte tenu de l'ampleur de cette enquête, lui et ses collègues devaient parler à beaucoup de gens. Il m'a remercié pour ma patience.
En mai 2018, je l'ai contacté à nouveau pour lui fournir plus d'information, mais il n'a pas répondu. Des semaines plus tard, j'ai lu une déclaration de Marc Chénier, l'avocat du directeur général des élections qui témoignait le 6 juin devant le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. J'ai été stupéfaite de l'entendre dire que l'enquête sur l'ingérence électorale était close. Voici comment elle s'est terminée, selon M. Chénier:
Nous avons dû interrompre certaines enquêtes menées par le commissaire parce qu'il était impossible d'obtenir la preuve que nous voulions. Dans le monde politique, il y a souvent des allégeances. Les gens se soutiennent mutuellement, et c'est normal.
Apparemment, toutes les preuves fournies n'avaient absolument aucune importance si les auteurs des infractions ne passaient pas aux aveux.
Je me suis concentrée sur Tides, mais beaucoup d'autres groupes d'influence font la même chose. Le nombre de ces organisations et militants abondamment financés qui interviennent dans nos élections et dans l'élaboration de la politique gouvernementale est si élevé qu'il est impossible de les dénombrer. Malheureusement, le Canadien moyen ne sait même pas qu'ils existent.
Je vous remercie. J'ai écourté ma déclaration en essayant de ne pas dépasser les quatre minutes.
Mes remarques porteront essentiellement sur la réponse à la question de savoir ce que le Canada peut faire pour mieux contrer l'ingérence étrangère, en mettant l'accent sur la transparence. Ce n'est pas le seul élément de notre réponse que nous pouvons améliorer, mais c'est un élément central que nous sous-exploitons. Pour l'essentiel, j'expliquerai sur une base pragmatique, ou instrumentale, pourquoi le manque de transparence a été contre-productif.
Le point de départ de toute discussion sur l'ingérence étrangère doit être la réalité que les cibles sont souvent des communautés de la diaspora. Au sein de ces communautés, la méfiance envers le gouvernement et les agences de sécurité nationale est souvent élevée. Cela peut aussi être vrai pour l'ensemble des Canadiens.
C'est souvent l'un des principaux obstacles à une lutte plus efficace contre l'ingérence étrangère. Elle rend la coopération et la communication de l'information plus difficiles. L'incompréhension de cet élément et le défaut de s'en occuper limitent l'efficacité de nos efforts. La résilience collective doit être l'une de nos premières lignes de défense contre l'ingérence étrangère et les autres menaces qui pèsent sur nous aujourd'hui, comme l'espionnage économique, la désinformation et autres. Cependant, lorsqu'elle est aggravée par le manque de transparence, la méfiance abaisse inutilement le plafond des réponses fructueuses.
Deuxièmement, la communauté de la sécurité nationale se fait beaucoup d'idées fausses sur la transparence. Trop souvent, la transparence est considérée comme une proposition du type « tout ou rien »: c'est la transparence ou la sécurité nationale. La transparence alourdit la tâche. Elle est coûteuse. C'est une case bureaucratique irritante à cocher. Ce sont là toutes des idées fausses.
La transparence permet d'améliorer la sécurité nationale, ou du moins elle devrait le faire. Moins de transparence revient à combattre l'ingérence étrangère et d'autres menaces avec une main attachée derrière le dos. En fait, la transparence devrait être l'une de nos principales forces ou l'un de nos principaux atouts dans la lutte contre les non-démocraties. Trop souvent, c'est mal compris et c'est une occasion ratée.
Très rapidement, et nous pourrons approfondir la question, que pouvons-nous faire? Nous avons besoin de séances d'information plus nombreuses et de meilleure qualité pour les parlementaires et les partis politiques ainsi que d'une formation sur la manière dont les destinataires de ces séances peuvent utiliser l'information, car elle est souvent mal comprise. Nous pouvons échanger davantage avec les communautés minoritaires, notamment en formant des unités de mobilisation spécialisées; mieux échanger avec les médias, ce que la communauté du renseignement ne fait pas assez bien, y compris avec les médias locaux et ethniques; et améliorer la liaison avec les universités et le secteur privé. La communication est bien meilleure qu'il y a quelques années, mais il y a toujours beaucoup d'obstacles à une coopération efficace. Il faudrait que la communauté du renseignement comprenne mieux les intérêts des parties prenantes, leur culture, leurs besoins et la manière dont elles pourraient utiliser ces renseignements, et qu'elle communique mieux avec le public en général, par des discours, la vulgarisation, les médias sociaux, les témoignages parlementaires, les rapports publics et annuels, avec un contenu concret plutôt que du jargon.
En passant, l'un des principaux obstacles à toutes ces mesures est l'épidémie de surclassification au sein de la communauté du renseignement. La transparence, telle que je la conçois ici, comme un échange durable, est également liée à cet enjeu. Cela nécessite une meilleure communication de l'information et une meilleure coordination entre la communauté du renseignement et les services de sécurité non nationaux à Ottawa ainsi qu'avec les gouvernements provinciaux et municipaux, qui ont un rôle clé à jouer. Nous le constatons aujourd'hui dans le contexte de l'ingérence étrangère. Nous avons relevé des faiblesses à ce niveau dans le contexte du convoi de l'an dernier. Il y a eu beaucoup d'améliorations, mais il reste encore beaucoup à faire.
Pour conclure, plus de transparence et plus d'échanges, c'est beaucoup de travail pour une communauté du renseignement déjà surchargée. Cela nécessite des compétences particulières qui ne sont pas suffisamment favorisées au sein de la communauté du renseignement. Il faut plus de personnel, tout simplement. Cela signifie qu'il faut définir les paramètres du mandat des unités de mobilisation concernant ce qu'elles peuvent dire ou ne pas dire, à qui et dans quel contexte elles peuvent le dire. Cela signifie que vous avez besoin d'une couverture politique, parce que le dialogue, en particulier dans des contextes avec des communautés minoritaires, peut être délicat.
Je conclurai sur ce point. Il s'agit d'un investissement nécessaire si nous voulons être sérieux dans la lutte contre l'ingérence étrangère et les autres menaces qui pèsent sur nous. Je vous remercie de votre attention.
:
Madame la présidente, je vous remercie de l'invitation d'aujourd'hui.
[Traduction]
L'objectif ultime du Parti communiste chinois est de limiter la capacité du Canada à prendre des décisions souveraines. L'ingérence étrangère est fondamentalement une question de souveraineté canadienne. Trop de Canadiens et de députés tiennent la démocratie pour acquise. Un gouvernement qui prétend mener une politique étrangère fondée sur des valeurs devrait au contraire défendre et protéger la démocratie et les libertés canadiennes ainsi que notre mode de vie.
Les menées subversives de Pékin sont la plus grande menace qui pèse aujourd'hui sur la souveraineté et le mode de vie démocratique du Canada. Le Canada a besoin d'une stratégie de dissuasion cohérente qui impose des coûts cumulatifs aux acteurs étatiques hostiles.
Premièrement, abaisser le seuil des enquêtes en suivant l'exemple de nos alliés et en établissant, dans la loi, des seuils clairs pour l'ingérence étrangère ainsi que des conséquences punitives.
Deuxièmement, définir l'ingérence étrangère, la subversion et le subterfuge. Lorsqu'un acteur hostile étranger viole intentionnellement, délibérément et à répétition le droit canadien et a recours à des comportements à première vue illégaux et criminels, il s'agit de subversion et de subterfuge.
Troisièmement, l'ingérence étrangère au Canada semble se concentrer dans les grandes régions métropolitaines. Il convient donc de charger les équipes intégrées de la sécurité nationale, qui ont déjà fait la preuve de leur efficacité contre le terrorisme, d'enquêter sur l'ingérence étrangère et de les doter des ressources nécessaires. Au minimum, les activités dirigées contre le , sa famille et, apparemment, d'autres députés relèvent du complot et du harcèlement, des infractions au Code criminel qui atteignent donc facilement le seuil exceptionnellement élevé d'expulsion de diplomates fixé par le .
Quatrièmement, le Département du travail du Front uni du PCC se comporte en fait comme un syndicat du crime organisé transnational parrainé par l'État, alors traitons‑le comme tel et mettons fin aux activités de ces voyous et de leur club composé de postes de police secrets.
Cinquièmement, le Département du travail du Front uni est rendu possible par le fait que la Chine possède le deuxième service diplomatique étranger en importance au Canada. Pourquoi le Canada accrédite‑t‑il tellement plus de diplomates chinois que le nombre de diplomates canadiens accrédités en Chine?
Sixièmement, rétablir explicitement le mandat du SCRS, en matière de subversion, qui a été abandonné après la Guerre froide.
Septièmement, alors qu'il vient de confier au Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, le CPSNR, une nouvelle étude, le pourrait choisir de le transformer, pour les besoins de cette seule étude, d'un comité de parlementaires en une commission parlementaire tout en donnant aux Canadiens l'assurance publique qu'il n'y aura pas d'ingérence de l'exécutif dans l'étude. Cela donnerait au CPSNR, plutôt qu'à l'exécutif politique du moment, la latitude de décider du contenu et de l'échéancier des questions dont il estime qu'il est dans l'intérêt national de rendre compte au Parlement.
Huitièmement, conclure un accord multipartite sur une stratégie de sécurité nationale intégrée, comme le font depuis longtemps certains des principaux alliés du Canada.
Neuvièmement, maintenant qu'il semble que le ait pu induire le Parlement en erreur, ce qui est très grave dans une démocratie constitutionnelle de Westminster, il y a une raison de plus pour qu'une enquête publique indépendante soit menée.
Le Canada doit tracer des lignes rouges et s'opposer aux mauvais acteurs en envoyant un message cordial, mais clair: enfreindre la loi canadienne pour limiter la prise de décision souveraine du Canada est inacceptable et aura des conséquences réelles.
[Français]
Je vous remercie.
La première chose qu'il faut reconnaître, c'est que l'argent qui arrive par l'entremise de Tides U.S. ou de toute autre fondation étrangère est remis à Tides Canada ou à de nombreuses autres fondations ici qui financent l'action militante, de sorte qu'il n'est pas toujours possible, en définitive, de savoir qui soutient qui ou quel groupe de militants reçoit de l'argent et d'où cet argent provient.
Je peux vous dire que dans l'étude d'une circonscription, lorsque nous avons examiné les coûts qui procuraient un avantage à certains candidats, nous avons pris en compte les voyages en avion parce que nous savions que dans certains cas, des gens venaient en avion pour faire partie d'une équipe. Nous avons pris en compte les déplacements, que ce soit en voiture ou autrement, de Toronto à London. Nous avons aussi pris en compte les affiches, les bannières, les dépliants, le matériel publicitaire, le temps de diffusion radiophonique qu'ils n'ont pas eu à payer, la nourriture, les T‑shirts, les locaux loués et les banques téléphoniques.
Le bureau de Leadnow était situé dans les locaux du Centre for Social Innovation de Toronto. Je ne sais pas comment ils ont payé pour cela, mais c'est là que se trouvait leur bureau principal. Les sondages coûtent cher. Tout candidat doit payer pour toutes ces choses, mais dans ce cas‑là, c'était gratuit. Il y a eu des publicités sur Facebook et en ligne. David Suzuki a participé à plusieurs de ces campagnes et a voyagé avec l'équipe dans de nombreux endroits différents. On parle de locations de chambres d'hôtel et ainsi de suite.
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Je vous en remercie beaucoup.
Je vais maintenant poser une question à M. Leuprecht.
Vous avez parlé du Département du travail du Front uni. Au comité de l'éthique, à propos d'un soi-disant don de 140 000 $ à la fondation Trudeau, le frère du a déclaré qu'il n'y avait aucune possibilité d'ingérence étrangère et que le don provenait d'une société canadienne, une société-écran basée à Montréal à partir d'une résidence, contrôlée par une société appelée China Cultural Industry Association qui fait partie du Département du travail du Front uni.
Convenez-vous que dans ce contexte, il n'y a pas de possibilité d'ingérence étrangère, ou diriez-vous qu'il y en a eu?
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Merci beaucoup, madame la présidente.
J'aimerais remercier les témoins d'être venus nous voir.
Ma première question s'adresse à M. Leuprecht.
Les témoins du groupe précédents ont présenté des témoignages très convaincants sur l'ingérence étrangère et sur le fait qu'elle dure depuis des dizaines d'années. Je ne sais pas si vous étiez à l'écoute, mais l'un de ces témoins nous a exposé le cas d'un organisme dirigé par l'État chinois, Xinhua, qui a demandé à un journaliste d'espionner l'ancien premier ministre. Un journaliste de cette même agence de presse a été impliqué dans un scandale avec Bob Dechert, le secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères John Baird, dans une apparente opération-piège de nature sexuelle.
Est‑il inquiétant que tout cela se soit passé si près d'un ministère si important que celui des Affaires étrangères?
:
En ce qui concerne la surclassification, je l'ai mentionnée très brièvement en passant, simplement parce que, dans le cadre des efforts plus larges déployés par la communauté du renseignement et de la sécurité nationale pour être plus transparente sur la question de l'ingérence étrangère et lorsqu'elle traite d'autres menaces, qu'il s'agisse d'espionnage économique, de désinformation et d'autres activités, la surclassification est un obstacle à la mise en commun de l'information.
J'estime et je pense que c'est un point de vue partagé par un nombre assez grand d'observateurs, y compris d'anciens observateurs, que de nombreux renseignements au sein du gouvernement et de la communauté du renseignement sont classifiés alors qu'ils pourraient facilement ne pas l'être, ou qu'ils devraient l'être, mais qu'ils le sont à un niveau trop élevé. Cela complique énormément les efforts de communication d'information aux Canadiens en général, aux parlementaires dans de nombreux cas, y compris comme nous l'avons vu dans l'actualité de ces derniers jours, et à la société civile.
Dans le cadre de ce que j'essayais de suggérer, soit de consentir un effort plus large et beaucoup plus important pour être plus transparents afin de nous aider à mieux contrer l'ingérence étrangère, cela va constituer un obstacle majeur. C'est le résultat d'une culture au sein de la communauté de la sécurité nationale qui reste très insulaire, très protectrice, où la structure d'incitation favorise grandement la surclassification. Vous pouvez être pénalisé pour ne pas avoir classifié des renseignements, mais vous ne pouvez pas être pénalisé pour les avoir surclassifiés. Il est très facile pour moi de venir vous dire que c'est un problème. Dans la pratique, je reconnais parfaitement que les solutions ne sont pas faciles, mais elles sont essentielles.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je remercie l'ensemble des témoins.
Professeur Leuprecht, je commencerai par vous, mais j'invite M. Juneau à intervenir s'il le souhaite.
Vous avez parlé du rôle du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement. J'aimerais revenir un peu là-dessus, parce que ce comité nous a beaucoup été présenté comme une panacée qui pourrait remplacer la tenue d'une enquête publique indépendante. Vous avez également rappelé que ce comité ne se rapporte pas au Parlement et qu'il a d'autres problèmes. Il lui est notamment particulièrement difficile d'obtenir de l'information du Bureau du Conseil privé, ce qui met des bâtons dans les roues à ses enquêtes.
J'aimerais savoir ce que vous pensez de la transmission d'informations à ce comité de parlementaires pour qu'il puisse bien travailler.
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Madame Normandin, c'est une question très importante que vous venez de poser.
J'ai rédigé tout un livre là-dessus, qui s'intitule Intelligence as Democratic Statecraft. Il comprend un chapitre sur la façon exacte dont fonctionne le Canada et sur les atouts et les points négatifs du système en place.
Au Canada, le partage de l'information est certainement un problème. Comme je le fais remarquer dans mon livre, je crois qu'il faut faire plus confiance aux parlementaires. Ces derniers savent très bien comment utiliser les renseignements et l'information à leur disposition. Ils sont très bien placés collectivement pour décider de ce qui doit être fait avec l'information et sur la manière de communiquer leurs conclusions au grand public.
Je comprends les réticences face, d'une part, à la structure de ce comité et, d'autre part, au partage de renseignements. Toutefois, les preuves obtenues d'autres partenaires parlementaires, comme le Royaume‑Uni et l'Australie, n'arrivent pas à la conclusion que tire le gouvernement actuel, à savoir qu'on ne peut effectivement pas faire confiance aux parlementaires. C'est tout le contraire.
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Merci beaucoup, professeur Leuprecht.
Professeur Juneau, j'aimerais pousser plus loin la question de la déclassification de l'information et du rôle des médias. Une des choses qu'on nous a mentionnées, c'est que les médias étaient déjà au courant par le passé de la question de l'ingérence étrangère, mais que cela ne les avait pas intéressés.
Avec plus d'informations et une plus grande déclassification et transmission de données, les médias pourraient-ils, d'une part, davantage s'intéresser à ce qui se passe et, d'autre part, mieux communiquer cette information à la population pour que cette dernière comprenne aussi? A-t-on mal jaugé le rôle des médias dans la transmission de l'information?
Je vais revenir sur votre question précédente à propos du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, le CPSNR. Je suis complètement d'accord avec la suggestion de mon collègue, le professeur Leuprecht, de le transformer en comité parlementaire au lieu d'un comité de parlementaires.
Cela étant dit, il est important de préciser que, selon l'information découlant de mes recherches pour certains projets, il n'existe aucune preuve d'ingérence inappropriée du politique dans le caviardage des rapports classifiés du CPSNR avant de les rendre publics. Je pense qu'il faut le dire. Ce caviardage s'est fait au niveau bureaucratique de la haute gestion. Selon l'information qu'on a — j'ai fait quelques recherches pour certains projets —, il n'y a pas de preuve d'ingérence inappropriée.
Les rapports du CPSNR sont très bons jusqu'à maintenant. Je les ai tous lus et il s'y trouve de la très bonne substance. Le problème n'est pas le comité lui-même, mais le fait que plusieurs de ses rapports ont été ignorés ou négligés par le gouvernement. Une solution partielle serait une procédure obligeant le gouvernement à répondre aux rapports du comité, ce qui n'est pas le cas maintenant. Cette obligation permettrait d'attirer l'attention sur les rapports et de mettre un peu de pression sur la société civile, les partis d'opposition et les médias pour en parler davantage.
En ce qui concerne les médias, je pense que vous avez raison de souligner la question. Comme je l'ai dit dans ma présentation tantôt, la communauté de la sécurité nationale ne fait pas montre d'assez de transparence avec les médias, que ce soit dans les breffages techniques fournis qui, très souvent, en disent assez peu, ou dans les réponses aux médias. Quand des journalistes contactent quelqu'un d'un bureau de ministre ou de la fonction publique, le temps de réponse est beaucoup trop long et la qualité des réponses est beaucoup trop limitée; on donne de la langue de bois, mais assez peu d'information.
Or, les médias jouent un rôle absolument essentiel en transmettant aux Canadiens de l'information, que ce soit en matière de sécurité nationale ou dans d'autres domaines. On n'en fait vraiment pas assez à ce sujet. Si on veut être plus transparent pour mieux informer, par exemple, les communautés de la diaspora sino-canadienne, irano-canadienne ou indo-canadienne d'une menace et sur ce qui peut être fait pour la contrer, il faut donner beaucoup plus d'informations aux médias, et on ne le fait vraiment pas assez à ce stade-ci.
Je vais poursuivre sur le même sujet parce que je pense qu'il est de la responsabilité du Comité de formuler des recommandations en matière de bonne gouvernance et de proposer des changements législatifs fondés sur vos témoignages d'experts en la matière.
Monsieur Juneau, vous êtes l'auteur d'un livre intitulé Intelligence Analysis and Policy Making: The Canadian Experience. Vous y recommandez quelques mesures pour soutenir notre appareil de sécurité.
J'ai coprésidé le comité d'examen parlementaire créé conformément à la Loi sur les mesures d'urgence. Dans ce processus, nous avons vu pendant l'occupation insurrectionniste d'Ottawa des dizaines de millions de dollars atterrir dans les mains de personnes qui entendaient perturber notre démocratie. Il semblait évident que notre appareil de sécurité et nos forces de l'ordre de première ligne étaient débordés. La Commission Rouleau a permis une analyse très approfondie non seulement du recours à la Loi sur les mesures d'urgence, mais aussi des conditions préalables et des échecs.
Êtes-vous d'avis que, pour cette allégation particulière d'ingérence étrangère chinoise, une commission d'enquête publique indépendante serait le meilleur cadre non partisan pour établir des faits qui pourraient se révéler utiles pour déterminer l'ampleur et la portée du problème? Pour l'instant, nous n'avons entendu parler que de , mais je crois comprendre que 10 autres députés pourraient être concernés. Seriez-vous favorable à une commission d'enquête publique indépendante?
:
Je vous dirai, très franchement, que ma crainte dans cette période hyperpartisane est que, souvent, les résultats sont perdus. Ce qui est présent dans ces débats partisans — et dans les propos de témoins parfois —, c'est l'exploitation de la crise du moment, sans qu'on propose de changements législatifs clairs et réfléchis. Il semble parfois qu'il n'y ait pas nécessairement, entre le gouvernement et l'opposition, de volonté d'améliorer et de renforcer les lois.
Vous avez parlé de plus grande transparence. Nous avons un gouvernement qui utilise le secret professionnel, le secret du Cabinet et des mesures décrétées en secret, ainsi que l'obstruction dans la production de documents à toutes les étapes parlementaires. Or, je crois que nous pouvons tous convenir que la démocratie est fragile dans le monde. Nous traversons une crise en ce moment, étant donné la teneur des allégations, le cynisme croissant et la désaffection électorale.
Sans vouloir trop vous demander, auriez-vous trois recommandations importantes qui, selon vous, aideraient dans un premier temps à combattre le cynisme qui ressort de cette étude particulière et à apporter un remède législatif?
:
C'est parfait. Il ne nous reste qu'une minute et 28 secondes.
Cela dit, au nom des membres du comité PROC, je vous remercie tous de votre présence aujourd'hui. Merci du travail que vous faites.
S'il y a autre chose que vous souhaitez porter à l'attention des membres du Comité, envoyez‑le à la greffière. Nous le ferons traduire dans les deux langues officielles avant de le communiquer aux membres du Comité.
Je terminerai en vous souhaitant une bonne fin de journée.
La séance est suspendue jusqu'à ce que nous passions au troisième groupe.
:
C'est parfait. Je vous remercie.
Je vous remercie de m'avoir invitée aujourd'hui. Le Comité et le travail que vous faites sont essentiels pour protéger la démocratie canadienne, et nous n'avons pas le choix. Les faits qui ont été révélés sont très inquiétants. C'est la plus élémentaire des responsabilités du gouvernement que de protéger les Canadiens et notre démocratie de l'ingérence étrangère, et il est de plus en plus manifeste que le gouvernement a totalement manqué à cette responsabilité, laissant le pays à la merci d'acteurs étrangers hostiles. Nous savons maintenant, grâce à des Canadiens patriotiques prêts à sonner l'alarme en public, que le gouvernement a systématiquement fermé les yeux sur l'ingérence étrangère illégale à laquelle se livre Pékin.
Chaque semaine, sinon chaque jour, semble apporter son lot de nouvelles preuves de la désinvolture et de l'aveuglement délibéré du Canada face à l'ingérence de Pékin dans le système électoral canadien. Le gouvernement sait depuis au moins deux ans qu'un diplomate de la République populaire de Chine s'en prend à la famille du député conservateur Michael Chong à Hong Kong pour essayer de le réduire au silence.
C'est une révélation vraiment choquante et qui amène à très sérieusement s'interroger sur le gouvernement. Toute intimidation de Canadiens par un gouvernement étranger, que ce soit directement ou en s'en prenant à des membres de leur famille, est anormale et, dans ce cas, Pékin visait spécialement un député en raison de la position courageuse fondée sur des principes qu'il a adoptée en condamnant les violations des droits de la personne commises par Pékin.
Ce genre d'ingérence directe dans notre système électoral ne saurait être toléré, mais que fait le gouvernement pour protéger les Canadiens ou M. Chong? Rien. Il a fallu les questions incessantes du Parti conservateur pour qu'il finisse par expulser le diplomate ou protester auprès du gouvernement chinois. Il n'a même pas dit à M. Chong tout ce qu'il savait qui arrivait à sa famille jusqu'à ce qu'on en parle dans les médias.
Malheureusement, face à ce très grave problème, le gouvernement a choisi de fermer les yeux. À cause de son silence, les Canadiens et les membres de leur famille à l'étranger sont plus exposés que jamais aux activités d'ingérence étrangère, et son indifférence nuit à notre démocratie.
Au lieu de faire leur travail et de protéger les Canadiens, notamment les membres de la communauté chinoise du Canada qui sont les principales victimes et les principales cibles des manœuvres d'ingérence de Pékin, les libéraux ont consacré un temps et des efforts considérables à essayer d'empêcher totalement une enquête indépendante sur l'ingérence étrangère. Ils n'ont fini par céder et autoriser ces audiences que lorsque le NPD, leur partenaire de coalition, les y a enfin contraints. Depuis, nous avons entendu des allégations inquiétantes au sujet de la fondation Trudeau.
Mme Pascale Fournier, l'ancienne présidente et cheffe de la direction de la fondation Trudeau, a sonné l'alarme au sujet d'un don que la fondation Trudeau a reçu de Pékin à peu près au moment où est devenu premier ministre, avant que Xi Jinping devienne président. Étonnamment, Trudeau a même désigné le président et chef de la direction de la fondation Trudeau au moment de ce don pour qu'il produise un rapport sur l'ingérence étrangère dans les dernières élections. Il est évident que ce don d'un milliardaire lié à Pékin visait à essayer d'influence le premier ministre.
Mme Fournier a déclaré qu'il y avait des preuves que des membres du conseil d'administration de la Fondation ont collaboré avec le donateur pour cacher la véritable source des fonds. Elle a également déclaré avoir pensé qu'une enquête indépendante était nécessaire, mais que les membres du conseil qui avaient des liens étroits avec la famille Trudeau ont refusé. Elle a démissionné, mais certains de ces membres du conseil sont toujours là. Il a depuis été rapporté que les dons étrangers à la fondation Trudeau se sont multipliés par 10 à peu près au moment où Justin Trudeau est devenu , et cela tandis que son frère était un membre actif de la fondation Trudeau.
Toutes ces tentatives d'ingérence étrangères sont préoccupantes.
Ce qui est plus préoccupant encore, c'est la volonté évidente du gouvernement de la dissimuler. Le n'a même pas pu se résoudre à demander une enquête indépendante. Au lieu de cela, il a demandé à un vieil ami de la famille, qui se trouve aussi être membre de la fondation Trudeau, d'étudier l'idée pour lui. Il est devenu évident que le gouvernement ne prend pas au sérieux la menace d'ingérence étrangère dans notre système politique. S'il la prenait au sérieux, il ferait quelque chose. Il essaierait de faire toute la lumière sur ces allégations.
Au lieu de cela, il fait tout son possible pour arrêter les audiences et retarder les enquêtes. On dirait souvent que ce gouvernement et ses amis en veulent plus aux lanceurs d'alerte et aux journalistes qui dénoncent l'ingérence étrangère qu'ils ne sont en colère à cause de la menace sérieuse que cette ingérence fait peser sur notre démocratie.
Voilà plus de 20 ans que je participe à la vie politique canadienne et je crois fermement qu'il faut protéger nos droits et libertés démocratiques. Je suis donc heureuse que les libéraux soient enfin obligés d'examiner sérieusement la situation, même s'il a fallu leur forcer la main.
Je répondrai volontiers à vos questions.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Je vous remercie, madame Byrne, de votre présence aujourd'hui.
Je pense que les Canadiens sont stupéfaits de l'ampleur de l'ingérence chinoise que l'on découvre, ingérence qui se concrétise par des attaques et de l'intimidation contre un député et peut-être d'autres députés encore, l'ouverture de postes de police illégaux et des attaques contre notre démocratie au cours, non pas d'une, mais de deux élections fédérales. Il est maintenant bien établi, d'après les reportages du Globe and Mail et de Global News, qui reposent sur leur examen de documents du SCRS, que Pékin a mené une vaste campagne d'ingérence dans la campagne électorale de 2019, notamment en finançant clandestinement et en soutenant au moins 11 candidats. Nous savons que Pékin s'est ingéré dans les élections de 2021 afin que le Parti libéral soit réélu. Le a eu droit à plusieurs séances d'information, dès février 2021, sur l'ingérence de Pékin dans les élections de 2019, c'est‑à‑dire bien avant les élections de 2021 dans lesquelles Pékin s'est de nouveau ingéré.
Malgré ces séances d'information, le n'a rien fait, n'a pris aucune véritable mesure et a laissé les Canadiens dans l'ignorance, alors que le SCRS l'a informé que la meilleure façon de lutter contre l'ingérence étrangère, c'est d'en parler au grand jour et de se montrer transparent.
D'après tout ce que nous avons vu ces derniers mois — qui est vraiment sidérant —, que pensez-vous, en tant qu'ancienne cheffe de cabinet adjointe du premier ministre Harper, de la façon dont le gouvernement gère cette affaire et, pour avoir travaillé avec lui, comment pensez-vous que le premier ministre Harper aurait géré ce type d'ingérence?
Des voix: Oh, oh!
M. Matthew Green: Vous avez mentionné des acteurs non étatiques, ce qui est, à mon sens, un point important. Le point qui n'a pas été soulevé, évidemment, c'est celui des dizaines de millions de dollars qui ont afflué dans le pays pendant le convoi.
Nous savons que vous étiez conseillère principale de pendant cette période, et nous constatons la relation de M. Poilievre avec le convoi. Vous avez mentionné . Nous savons que Mme Lantsman a été la première députée à lancer une pétition demandant la fin de l'obligation vaccinale dans la période précédant les élections.
Avez-vous conseillé à de veiller à séparer nettement les actions insurrectionnelles du convoi et la campagne à la chefferie à ce moment‑là?
Si nous voulons avancer, ce serait de nous limiter à des recours pertinents au Règlement.
Ma question portait sur le fait que les conseils… Quand 10 millions de dollars ont été versés à Tamara Lich, du Maverick Party… Il y a des liens étroits entre des députés de premier plan du Parti conservateur et le mouvement, et vous étiez à ce moment une conseillère principale de , qui briguait la tête du parti.
Nous savons que 1 million de dollars a été versé. Quel type de conseil avez-vous donné à , considérant le lien étroit entre le Parti conservateur et le convoi, pour éviter toute ingérence étrangère?
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Merci, madame la présidente.
Ma première question portera sur les déclarations de la témoin dans un balado intitulé Curse of Politics.
Durant une discussion sur les élections de 2021, vous avez fait remarquer qu'on peut être d'accord avec la stratégie, mais qu'on ne peut pas prétendre qu'elle a fonctionné. La stratégie du Parti conservateur n'a pas fonctionné. C'est ce que vous avez laissé entendre.
En Colombie-Britannique, nous avons perdu quatre sièges dans le Lower Mainland. Nous avons perdu des appuis dans quatre des cinq circonscriptions de Surrey. Vous ne pouvez pas me dire que notre stratégie a fonctionné dans le Lower Mainland. Elle n'a pas fonctionné.
Beaucoup d'enjeux préoccupaient les électeurs de cette région durant la campagne. Je suis certaine que vous avez fait une analyse postérieure des raisons.
J'ai discuté avec plusieurs candidats et des députés élus dans la région, et la légalisation des armes d'assaut faisait partie des principaux enjeux soulevés durant le porte-à-porte. Des Sino-Canadiens pointaient la légalisation des armes d'assaut comme d'un enjeu important des élections.
Bien entendu, il n'y a jamais un seul enjeu dans une campagne électorale. Je crois que vous l'avez également mentionné durant ce balado. Parfois, le résultat dépend d'une accumulation des enjeux. Est‑ce que vous maintenez ce que vous avez dit concernant l'échec de la stratégie électorale du Parti conservateur dans ces circonscriptions?
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Tout à fait, et je conviens même avec vous que l'ingérence étrangère n'a sans doute pas eu de véritable effet sur les résultats dans ces circonscriptions. Cela dit, il faut quand même agir, et c'est pourquoi nous sommes ici aujourd'hui. C'est pourquoi nous examinons, même s'il y a consentement unanime, la motion de privilège concernant . C'est pourquoi un registre des agents étrangers sera instauré au cours des prochains mois. Des consultations ont eu lieu. C'est pourquoi nous avons constitué le CPSNR et mis en place différentes procédures.
Je crois que nous sommes tous d'accord, et que beaucoup de témoins sont d'accord, sur le fait que le gouvernement a pris des mesures et qu'il faut continuer de renforcer notre démocratie pour faire échec à l'ingérence étrangère.
Ce que je trouve étrange, c'est que parmi les experts que nous avons entendus, ceux qui ont occupé des fonctions de conseil auprès de nos agences partenaires comme le SCRS s'entendent pour la plupart sur le fait que l'ingérence étrangère a pris une ampleur inquiétante depuis un moment déjà. Le problème continue de s'aggraver, comme vous l'avez dit, et c'est pourquoi nous prenons ces mesures. Toutefois, quand je vous entends affirmer que personne n'était au courant, sauf pour ce qui concerne les interventions de Leadnow et d'autres durant les dernières élections, je dois avouer que cela me semble, comme M. Cooper l'a dit, plutôt suspect. La seule explication serait que quand vous étiez conseillère de M. Harper, vous avez mis en place une de structure qui vous permettait de fermer les yeux sur ce qui se passait.
Est‑ce que vous avez déjà conseillé à l'ancien ministre de la Réforme démocratique et actuel chef de l'opposition officielle, M. Poilievre, de mettre en place des politiques pour nous protéger? Vous avez parlé de l'Iran dans votre témoignage, pas seulement la Chine. Vous pouvez aussi nous parler d'autres pays si vous le jugez nécessaire.
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Merci, madame la présidente.
En juillet 2021, le SCRS faisait état dans un rapport de la manière dont une diplomate du consulat de Toronto, Zhao Wei, avait orchestré une campagne d'intimidation contre un député en exercice, . Nous savons que ce rapport a été remis au conseiller à la sécurité nationale au Bureau du Conseil privé et aux ministères concernés. Nous avons aussi appris de la part de la cheffe de cabinet du et de sa conseillère à la sécurité nationale qu'il est systématiquement informé de toutes les questions touchant la sécurité nationale. D'après sa cheffe de cabinet, Mme Telford, il lit tout et rien n'est ignoré. Or, en l'occurrence, le premier ministre essaie de faire croire aux Canadiens qu'il a pris connaissance de cette campagne dans le Globe and Mail, alors que c'est extrêmement grave. On parle quand même d'un État étranger hostile et d'une diplomate accréditée qui ciblent un député en exercice en vue de compromettre sa capacité de s'acquitter de son travail de représentant de ses électeurs et de l'ensemble des Canadiens.
Considérant cela, c'est très difficile de croire ce que le premier ministre prétend, et même de croire qu'il dit la vérité. J'ai de sérieux doutes à ce sujet. Cela en dit long sur le peu de sérieux qu'il accorde à la question de l'ingérence étrangère. Il se trahit lui-même. Il faut aller au fond des choses, et je présente une motion au Comité en ce sens.
Selon ce que j'en comprends, un système rigoureux de suivi des documents de nature délicate est en place au Cabinet du premier ministre. Comme vous y avez vous-même occupé des postes de direction, pouvez-vous nous expliquer comment se fait le suivi des documents au sein du Cabinet du premier ministre?
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Excusez-moi, mais je vais arrêter le chronomètre. Nous nous en sortons très bien jusqu'ici.
Comme nous l'avons souvent répété, des questions sont posées et des réponses sont données. J'ai déjà été dans ce fauteuil, et je me suis fait dire par le président d'un comité que nous savons que ce temps appartient aux députés. Je crois qu'il faut aussi donner du temps aux témoins.
Je suis consciente qu'il est généralement admis ici, si vous avez fréquenté ces couloirs, que c'est un endroit où le temps appartient aux députés, mais, monsieur Turnbull, je vous saurais gré de laisser notre témoin donner sa réponse.