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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 140 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 2 avril 2019

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

    Conformément à l'ordre de renvoi du mercredi 27 février 2019 et à la motion adoptée par le Comité le jeudi 28 février 2019, le Comité entreprend son étude sur la précarité de l'emploi au Canada.
     Je suis très heureux d'accueillir notre premier groupe de témoins dans le cadre de cette étude. Comparaissent à titre personnel devant notre comité Katherine Lippel, professeure, Faculté de droit, Section de droit civil de l'Université d'Ottawa; et Allyson Schmidt, mentor en autonomisation financière, Credit Counselling Service of Sault Ste. Marie and District. De la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, nous accueillons Monique Moreau, vice-présidente, Affaires nationales. De Comptables professionnels agréés du Canada, nous accueillons Francis Fong, économiste en chef. Nous accueillons enfin Andrew Cardozo, président du Centre Pearson pour des politiques progressistes. Bienvenue à tous.
    Nous allons commencer par vos exposés. Vous aurez chacun sept minutes. Je vais vous faire signe poliment lorsqu'il vous restera une minute. Ne paniquez pas, une minute, c'est long, et si vous dépassez de quelques secondes, ce n'est pas la fin du monde.
    Pour commencer, nous allons entendre Katherine Lippel.
    Les sept prochaines minutes sont à vous.

[Français]

     Je parlerai en anglais. Je m'en excuse.
    Je répondrai aux questions en français.

[Traduction]

    Je suis titulaire de la Chaire de recherche du Canada en droit de la santé et de la sécurité du travail à l'Université d'Ottawa. Je vais m'en tenir aux questions de santé et de sécurité au travail et d'indemnisation des accidentés du travail en ce qui a trait à la précarité de l'emploi, mais je serai heureuse de répondre à des questions plus générales pendant la période des questions.
    J'ai déposé un mémoire avec des références. Dans les six minutes et demie qu'il me reste, je vais me concentrer sur les questions clés.
    Tout d'abord, en ce qui concerne les définitions, le message à retenir est que la précarité de l'emploi n'a pas de définition absolue, et que la définition dépend du contexte dans lequel vous vous posez la question. Les catégories de base de la précarité de l'emploi comprennent toujours les emplois atypiques, qui sont non conventionnels par rapport aux emplois conventionnels à temps plein, d'une durée indéterminée. Un emploi peut être précaire en raison de la durée, par exemple pour les travailleurs temporaires, à temps partiel ou sur appel. Il pourrait l'être en raison du lieu; vous pourriez être un travailleur à domicile. Ces emplois font partie des emplois précaires. Il peut également s'agir de la relation d'emploi, par exemple, les relations d'emploi triangulaires, comme celles d'un travailleur qui travaille pour une agence de placement temporaire ou un sous-traitant, ou encore un travailleur autonome. Les travailleurs autonomes sont très souvent oubliés dans les cadres réglementaires. La santé et la sécurité au travail sont un problème pour toutes ces catégories de travailleurs, mais il ne faut pas oublier les travailleurs autonomes, car nous avons tendance à les oublier.
    Je vais aller droit au but parce que je suis sûre que je vais manquer de temps, puis je vais revenir en arrière et vous expliquer pourquoi j'en suis arrivée à ces conclusions.
    Vous, représentants du gouvernement fédéral, avez deux rôles. Vous avez un rôle à jouer en tant qu'organe de réglementation et un en tant qu'employeur. Encore une fois, je me limite à la santé et à la sécurité et à l'indemnisation des accidentés du travail. Comme organe de réglementation, je vous suggère d'examiner les questions suivantes: premièrement, veiller à ce que les travailleurs autonomes soient inclus dans la partie II du Code canadien du travail pour ce qui est de la prévention. S'il y a de la concurrence entre les employeurs qui ont des salariés et les gens qui ne sont pas obligés de respecter les règles, vous allez avoir de la difficulté à vous en tenir au plus petit dénominateur commun pour les conditions de travail.
    Ensuite, vous devriez porter attention à la sous-traitance et aux contrats précaires, surtout dans certains secteurs qui relèvent de la compétence du gouvernement fédéral. Je vous suggérerais de vous pencher non seulement sur le camionnage, mais le camionnage interprovincial. En ce qui concerne le transport des marchandises, il y a des problèmes concernant les travailleurs temporaires qui ne bénéficient pas des mêmes protections que d'autres dans le secteur. Il y a, bien sûr, de nombreuses autres industries.
    En votre qualité d'organe de réglementation, encore une fois, s'il y a un programme d'indemnisation des accidentés du travail pour les employés fédéraux, vous seriez en mesure d'uniformiser les règles du jeu. Une personne qui travaille à Gatineau et qui occupe un emploi précaire au gouvernement fédéral a plus de droits qu'une autre qui travaille de l'autre côté de la rivière à Ottawa. À mon avis, cela ne devrait pas être le cas.
    Enfin, comme employeur, vous pouvez donner l'exemple. Réduisez au minimum votre dépendance à l'égard des travailleurs temporaires. Il y a eu des cas par le passé où plusieurs millions de dollars de fonds fédéraux ont été versés à des employés venant d'agences de placement temporaire. Essayez d'éviter l'impartition aux travailleurs autonomes. Autrefois, les interprètes relevant de la compétence fédérale étaient des travailleurs salariés. Ils sont maintenant des travailleurs autonomes. C'est une forme d'impartition. Cette pratique a des conséquences sur les protections réglementaires. Dans la mesure du possible, assurez-vous que vos employés sont embauchés pour une durée indéterminée. Enfin, assurez-vous que si un employé souhaite travailler à temps plein, il ne soit pas obligé de travailler à temps partiel, parce que le temps partiel peut être une bénédiction ou une malédiction. Si ce n'est pas volontaire, c'est une malédiction.
    Je vais maintenant aborder les fondements de la question pour le temps qu'il me reste.
    Nous avons parlé des définitions, des liens entre la santé et la sécurité au travail et la précarité de l'emploi. Brièvement, les études menées dans le monde entier et en particulier par l'OIT regroupent la littérature qui montre que les diverses catégories de travailleurs occupant un emploi précaire sont plus susceptibles de subir des accidents du travail. Ils sont plus susceptibles d'avoir des problèmes de santé et de sécurité. Selon l'étude québécoise à laquelle j'ai participé, EQCOTESST, ils sont plus susceptibles d'avoir un accident de travail au Québec. Nous avons des données à ce sujet. Nous avons aussi des données sur le harcèlement sexuel et les contrats de travail temporaires. Vous êtes plus susceptible d'être victime de harcèlement sexuel si vous occupez un emploi précaire, surtout si vous occupez un emploi temporaire.
(1105)
    La deuxième question clé en ce qui concerne les lois sur la santé et la sécurité et l'efficacité de la réglementation, c'est ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. En bref, partout au Canada et au fédéral, le système de responsabilité interne est à la base de nos lois sur la santé et la sécurité au travail. Nous comptons sur le fait que les travailleurs le signaleront s'ils sont exposés à des conditions de travail dangereuses ou s'ils sont obligés de faire quelque chose de dangereux. Cette méthode ne fonctionne pas avec les travailleurs précaires, les travailleurs autonomes qui acceptent des contrats qu'ils ne devraient pas accepter parce qu'ils craignent de ne pas pouvoir gagner leur vie, mais aussi les travailleurs temporaires qui ne parlent pas. Il y a beaucoup de données à ce sujet. C'est quelque chose qu'il faut examiner, ce que nous appelons la voix des travailleurs.
    Il y a un autre point qu'il est important de souligner. J'ai participé à une étude en Ontario sur les travailleurs des agences de placement temporaire. Nous avons constaté, en parlant surtout à des inspecteurs du travail, en Ontario, que de nombreux employeurs clients avaient retenu les services d'un employé d'une agence de placement temporaire pour une tâche dangereuse qu'ils ne voulaient pas donner à un employé régulier. Dans un cas dont l'inspecteur nous a parlé, il y a eu un décès prévisible.
    Nous savons aussi que ce qui motive ce genre de comportement, ce n'est pas que les employeurs sont des gens méchants qui veulent tuer des travailleurs des agences de placement temporaire; c'est plutôt parce qu'il y a des incitatifs économiques dans le système d'indemnisation des accidentés du travail qui encourage les employeurs à éviter que leurs employés soient blessés. C'est un déterminant de la précarité de l'emploi. L'Ontario, c'est tout à son honneur, a modifié sa loi à la suite de cette étude. C'est une chose à laquelle il faudrait réfléchir également.
    L'autre problème est celui de la désorganisation, et c'est une question étayée par l'OIT. Dans le cas de la précarité de l'emploi, particulièrement dans le contexte des relations de travail triangulaires où il y a une agence de placement temporaire, un employeur client, un travailleur et parfois un travailleur en sous-traitance, personne ne sait qui est responsable de quoi. La désorganisation est une conséquence négative de la précarité de l'emploi et entraîne l'échec de la réglementation au Canada, dans les provinces et, en fait, dans de nombreux autres pays.
     Je terminerai en parlant de l'indemnisation des accidentés du travail. Normalement, cette question ne relève pas de votre compétence, mais nous savons, c'est une question que nous étudions actuellement, que, dans chaque province du Canada, les personnes qui occupent un emploi précaire reçoivent une indemnisation inférieure, car l'indemnisation est établie en fonction de leur salaire actuel. La situation au Québec est mieux, parce qu'au moins il y a un plancher, de sorte qu'un travailleur ne reçoit jamais une indemnisation inférieure au salaire minimum à temps plein s'il est blessé et devient paraplégique pendant qu'il travaille chez McDonald's. Cette question cause beaucoup de problèmes aux travailleurs partout au Canada, particulièrement à l'extérieur du Québec, et nous devrions y réfléchir pour que tous soient considérés comme s'ils travaillent à temps plein. Ce sont souvent les nouveaux arrivants et d'autres populations qui sont coincés dans ces agences de placement temporaire. Je pourrais en parler plus tard.
    Merci.
(1110)
    Merci beaucoup.
     Nous accueillons maintenant Allyson Schmidt, mentor en autonomisation financière, Credit Counselling Service of Sault Ste. Marie and District.
    Bienvenue.
    Bonjour. Je m'appelle Allyson Schmidt. Je suis mentor en autonomisation financière au Credit Counselling Service of Sault Ste. Marie and District.
     Je tiens à remercier Terry Sheehan de m'avoir invitée à témoigner devant le Comité. Je suis honorée et je me présente en toute humilité devant le Comité considérant mon expérience personnelle de la précarité de l'emploi comme travailleuse ici au Canada.
    Il s'agit d'une question très importante, et je suis heureuse qu'elle ait été portée à l'attention du gouvernement et que l'on tente d'élaborer une définition de « précarité de l'emploi » et d'en déterminer l'incidence sur la vie des Canadiens partout au pays. D'après mon expérience personnelle, je peux dire au Comité que cette précarité impose un fardeau injuste aux travailleurs. Elle est une cause de stress et crée de nombreux obstacles à la santé, aux réalisations et au succès personnels, financiers et professionnels.
    Imaginez la situation: vous vous présentez au travail jour après jour en sachant que vous ne pouvez pas vous y installer puisque vous devez continuer à chercher un autre emploi, vous devez planifier vos journées en jonglant avec de multiples contrats, vous ne pouvez pas accepter de travail dans votre domaine parce qu'il s'agit seulement de contrats à court terme et que vous n'accumulez pas d'expérience dans votre domaine qui pourrait vous être profitable plus tard. Et, le comble, vous devez vous occuper de la garde d'enfants, la vie familiale et du paiement des factures. Voilà la réalité quotidienne d'un travailleur qui sait que son contrat va prendre fin bientôt, même s'il travaille à temps plein.
    J'ai dû travailler sur cinq contrats simultanément tout en étant monoparentale et en m'occupant d'un enfant handicapé. Cette année-là, j'ai gagné moins de 25 000 $.
     J'ai enseigné et fait de la recherche au niveau universitaire, j'ai travaillé dans les services sociaux et comme travailleuse de la santé autorisée. J'ai travaillé dans des emplois précaires pendant toute ma carrière au Canada. Je suis une femme instruite, expérimentée et compétente qui a beaucoup à offrir aux employeurs et à ma collectivité. Le sous-emploi que j'ai subi m'a fait vivre de l'anxiété et de la dépression et a affecté mon estime de soi.
     J'ai parlé avec d'autres femmes que je connais et qui sont dans une situation d'emploi précaire. Je peux dire que l'image de soi et l'estime de soi en souffrent beaucoup. Le fait de devoir sans cesse postuler des contrats, de ne jamais se sentir assez bien ou assez qualifiée cause du stress. Des femmes qui ont des années d'expérience, un niveau élevé de scolarité et diverses certifications professionnelles vivent également la même chose.
    En raison de la nature des emplois précaires, il est presque impossible d'épargner depuis les 10 dernières années. Si je ne peux pas mettre des sous de côté, je ne peux pas par exemple m'acheter une maison. Comme je ne peux pas acheter de maison, si je veux avoir un logement convenable pour moi et mes enfants, je dois consacrer plus que le 30 % de mon revenu recommandé à mes frais de logement. Pour de nombreux Canadiens, le fait d'avoir une maison accroît la sécurité financière et la stabilité, et j'ai l'impression que l'achat d'une maison ne peut que demeurer un rêve pour moi.
    Comme je suis mère célibataire, je dois aller aux rendez-vous de mes enfants, être là lorsqu'ils sont malades et assister à d'autres activités si je veux être un bon parent. Trouver un emploi qui me permette de m'adapter à mes enfants a été la clé de mon succès, mais je connais de nombreuses mères monoparentales qui travaillent et qui n'ont pas cette chance. Le fait de prendre des jours de congé peut vraiment mettre leur emploi en péril, ce qui ajoute au stress et à la difficulté de devoir vivre d'un chèque de paie à l'autre.
    La réalité de la précarité de l'emploi rend la planification financière très difficile. Il m'est arrivé de ne pas travailler entre deux contrats et de devoir avoir recours au crédit. Dans le cadre de mon travail actuel, je peux voir ce qui se passe lorsque les gens arrivent à se maintenir la tête hors de l'eau avec le crédit. Le crédit coûte très cher et a des conséquences désastreuses sur le présent et l'avenir d'une personne.
     Je vois beaucoup de gens qui se maintiennent à flot avec le crédit et les services financiers non bancaires et qui s'exposent à de grands risques. Le cycle de la précarité de l'emploi place les gens dans une situation financière précaire et les travailleurs canadiens dans une situation encore plus précaire.
    Comme je suis de la génération X, j'ai vécu la réalité de la précarité de l'emploi pendant toute ma carrière. Je suis la fille d'un métallurgiste qui a vu l'effondrement du secteur de l'acier au début des années 1980 et 1990, mais qui a vu ses parents acheter une maison, prendre des vacances et des congés de maladie et bénéficier de prestations médicales.
     Le fardeau qui m'incombe maintenant, comme à bien d'autres dans la même situation, c'est que je dois payer de ma poche les médicaments et les soins dentaires, ainsi que d'autres éléments essentiels qui me permettent de travailler et d'apporter de l'argent à la maison. Je ne contribue à aucun régime de retraite, à part les modestes sommes que je peux mettre de côté dans mon budget familial.
(1115)
    Il y a beaucoup de choses dont profitent les travailleurs pour lesquelles d'autres et moi-même donnerions n'importe quoi.
    Le fait d'occuper un emploi précaire n'a pas seulement des conséquences sur le plan financier. Il y a une incidence sur ma santé, ma santé mentale, mon estime de soi et mes relations avec mes enfants et ma collectivité. Ces conséquences se font sentir maintenant et compromettent mon avenir. J'espère que le Comité pourra élaborer une définition pratique qui pourra être intégrée à des politiques qui amélioreront sensiblement la nature du travail au Canada et qui soutiendront les travailleurs et les femmes comme moi.
    Merci beaucoup d'avoir pris le temps de m'écouter et de m'avoir invitée à vous faire part de mon expérience.
    Merci beaucoup.
     Nous accueillons maintenant Mme Monique Moreau, vice-présidente, Affaires nationales, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante.
    Vous avez sept minutes.
    Vous devriez avoir devant vous le document que je souhaite vous présenter dans les prochaines minutes.
    Comme beaucoup de membres du Comité le savent, la FCEI est un organisme sans but lucratif et non partisan qui représente plus de 110 000 petites et moyennes entreprises au Canada. Nos membres emploient collectivement plus de 1,25 million de Canadiens et génèrent des revenus de près de 75 milliards de dollars, soit près de la moitié du PIB du Canada. Ils représentent tous les secteurs de l'économie et se trouvent dans toutes les régions du pays.
     Comme vous le savez peut-être, la FCEI établit ses orientations uniquement en consultant ses membres au moyen de divers sondages, ce qui nous distingue des autres organismes. Les données dont je vous parlerai aujourd'hui proviennent de Statistique Canada, de sondages d'opinion publique et de notre propre sondage sur l'évolution du marché du travail, auquel près de 7 000 répondants ont participé en 2017.
     J'aimerais mettre les choses en contexte avant d'entrer dans les détails.
    Comme vous pouvez le voir à la diapositive 2, le taux de postes vacants atteint actuellement un niveau presque record, avec environ 409 000 postes vacants. Le nombre de postes vacants est plus élevé dans l'industrie de la construction et les services personnels — plombiers, mécaniciens, électriciens, coiffeurs, et j'en passe. On pourrait prétendre que cette situation crée des conditions favorables pour les travailleurs à la recherche d'un emploi.
    Nous savons que le Comité est ici pour étudier la précarité de l'emploi. Cette notion peut être définie de plusieurs façons, comme vous l'avez sûrement entendu et l'entendrez, mais je tiens d'abord à déboulonner le mythe selon lequel les emplois permanents sont en déclin.
    Si vous prenez la diapositive 3, vous verrez que la permanence des emplois au cours des 18 dernières années est demeurée pratiquement inchangée. Ces données de Statistique Canada montrent que 86 % des emplois dans l'économie étaient permanents en 2018, une légère baisse par rapport à 87,5 % en 2000. La baisse a surtout été enregistrée pendant la récession de 2008-2009 et le pourcentage est demeuré stable depuis.
    Il y a eu une augmentation du travail contractuel à durée déterminée, qui est passé de 5,8 % à 7,1 % de la main-d'oeuvre, mais une partie de cette augmentation a été contrebalancée par une réduction du nombre d'emplois saisonniers et occasionnels. La tendance générale observée entre les emplois permanents et les emplois temporaires au cours des 18 dernières années correspond à une augmentation de seulement 0,8 % de la main-d'oeuvre, laquelle équivaut à environ 125 000 emplois sur les 15,8 millions d'emplois disponibles dans l'économie.
     Parlons d'un autre mythe, celui selon lequel les emplois précaires se trouvent pour la plupart dans le secteur privé. Les données de Statistique Canada à la diapositive 4 nous montrent le contraire. En fait, la plupart des emplois à court terme ou sous contrat se trouvent dans le secteur public, comme vous pouvez le voir.
    Si l'on prend, encore une fois, les données de Statistique Canada, vous voyez à la diapositive 5 que la grande majorité des personnes qui travaillent à temps partiel le font par préférence personnelle ou parce qu'elles étudient et non parce qu'elles y sont forcées. Premièrement, j'ai été particulièrement étonnée de constater que, même si nous savons que des travailleurs préféreraient un emploi à temps plein, mais ne peuvent pas en trouver un dans la profession qu'ils ont choisie et doivent s'en créer un en cumulant les emplois à temps partiel ou les contrats, cette tendance est à la baisse comme le montrent les données de 1997 par rapport à celles d'aujourd'hui. Deuxièmement, dans ses recommandations, le Comité devrait cibler cette proportion relativement faible de travailleurs et non toucher au statut d'emploi des étudiants et des personnes qui le font par choix personnel.
     Dans le cadre de notre recherche sur cette question, nous avons mené un sondage d'opinion publique qui a montré que les travailleurs sont généralement satisfaits de leur régime de travail. Il est important de noter que, comme nous le voyons à la diapositive 6, 83 % des entrepreneurs indépendants sont satisfaits de leurs modalités de travail.
    Quelle est l'expérience des propriétaires de petites entreprises? Comme vous pouvez le voir à la diapositive 7, la grande majorité, soit 94 % de nos membres, embauche des employés permanents. Ces données sont tirées d'un sondage que nous avons mené en 2017 auquel près de 7 000 répondants ont participé. Certains de nos membres ont également recours à des employés temporaires et un peu plus du quart ont recours à des entrepreneurs indépendants.
    Comme vous pouvez le voir à la diapositive 8, dans une petite entreprise, le travail à temps partiel mène souvent à un travail à temps plein dans près de la moitié, ou 43 %, des cas.
    Lorsque nous avons demandé aux propriétaires de petites entreprises pourquoi ils embauchaient des entrepreneurs indépendants, comme vous pouvez le voir à la diapositive 9, ils ont mentionné certains problèmes, comme la possibilité de s'adapter plus facilement à l'évolution de la demande. Cette pratique leur donne accès à une plus grande expertise et compétence et augmente la souplesse de leur organisation. Ce sont des mesures très importantes à une époque où l'économie évolue et est dynamique. Quarante-cinq pour cent des propriétaires de petites entreprises ont indiqué que le travail autonome est un choix pour les travailleurs et que les formalités administratives sont un obstacle à l'embauche d'employés.
(1120)
    En outre, quand nous avons demandé aux propriétaires de petites entreprises de nous dire pourquoi ils embauchent des employés temporaires, plus des deux tiers d'entre eux ont répondu que c'est pour mieux s’adapter à l’évolution de la demande et parce qu'ils avaient connu une pénurie de main-d’oeuvre qualifiée. Dans certains cas, ils ne trouvent tout simplement personne pour combler les postes à temps plein. Le quart des propriétaires de petites entreprises ont fait remarquer que, dans certains cas, c'est l’employé qui décide d’être travailleur temporaire. Cela peut être particulièrement vrai dans les situations où le travailleur est un artiste ou a un autre projet passionnant sur lequel il travaille, et qu’il se prévaut alors d'emplois temporaires ou à temps partiel pour se maintenir financièrement à flot entre les projets.
    La dernière chose importante que je souhaite dire au Comité est que de nombreuses petites entreprises commencent par offrir des emplois temporaires pour les transformer ensuite en emplois permanents. Comme vous pouvez le voir à la diapositive 11, 43 % des petites entreprises sont susceptibles de convertir un employé temporaire en employé permanent.
    En conclusion, voici les recommandations que nous adressons au Comité:
    Premièrement, appuyer les règlements qui donnent de la souplesse aux employeurs et aux employés.
    Deuxièmement, réduire les formalités administratives associées à l’embauche et à la formation des employés.
    Troisièmement, reconnaître que les contrats de travail à temps partiel ou intérimaire sont une première étape vers un emploi à temps plein.
    Quatrièmement, reconnaître l’intention des entrepreneurs et des employeurs. C’est souvent un sujet sur lequel nous recevons beaucoup d’appels à la FCEI. L’ARC est en train d'évaluer si l’intention des parties est d'instaurer une relation employeur-sous-traitant ou employeur-employé. Cela crée des tensions et, dans certains cas, cela coûte des dizaines de milliers de dollars à nos membres qui luttent contre ce projet devant les tribunaux.
    Cinquièmement, s’adapter à l’évolution du monde du travail. Les gouvernements ne peuvent pas encadrer la nouvelle économie de la même façon que l’ancienne.
    Enfin, comme nous l’avons entendu aujourd’hui, il faut aider les travailleurs autonomes. L’assurance-emploi, la fiscalité et plusieurs autres règles doivent être modifiées.
    Merci de m'avoir donné l’occasion d’être ici aujourd’hui. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

[Français]

    Je souligne que je peux également répondre à vos questions en français, au besoin.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant entendre Francis Fong, économiste en chef des Comptables professionnels agréés du Canada.
    Vous avez sept minutes, monsieur.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie. Je m'appelle Francis Fong et je suis économiste en chef à Comptables professionnels agrées du Canada, ou CPA Canada.
    Nous sommes une des plus grosses organisations comptables nationales au monde, avec plus de 210 000 comptables professionnels agréés au Canada. Ensemble, CPA Canada et les membres de la profession sont résolus à agir dans l'intérêt public et à promouvoir le développement économique et sociétal du Canada. À la faveur de nos travaux de recherche sur des questions d'intérêt public, nous avons constaté que le travail précaire constitue un enjeu de taille pour les citoyens canadiens. Or, comme il n'existe pas de définition claire du travail précaire, il est difficile d'apprécier l'étendue du problème et d'élaborer des politiques qui permettraient de régler ce problème. Nous avons donc été très heureux d'apprendre que le Comité a entrepris d'étudier cette importante question.
    L'année dernière, CPA Canada a publié un rapport sur les conséquences du travail précaire qui fait ressortir la nécessité d'avoir une définition largement acceptée, contenant une définition susceptible de servir de point de départ. Notre rapport fait état des obstacles à l'adoption d'une définition pour le travail précaire, ce dont je vais vous parler. Commençons par une mise en contexte.
    Au Canada, le marché du travail évolue à un rythme effréné. Les nouvelles technologies, la structure de notre économie, et même la façon dont les consommateurs s'attendent aujourd'hui à recevoir des produits et services, ont profondément transformé les entreprises, les modèles d'affaires et la relation employeur-employé traditionnelle.
    Nos concitoyens qui, autrefois, travaillaient majoritairement à temps plein toute l'année, se retrouvent aujourd'hui dans des situations précaires, occupant des emplois instables, incertains et vulnérables aux écarts de conduite des employeurs.
    Pour les chercheurs et les décideurs, le problème tient au fait que nous ignorons le nombre précis de travailleurs touchés parce qu’il n’existe pas de définition officielle. Cela me rappelle le sempiternel débat sur la pauvreté au Canada dû au fait que nous attendons toujours une définition. En l’absence de définition officielle, on ne recueille aucune donnée sur le marché du travail ni aucune donnée économique sur les citoyens exerçant un travail précaire, d'où la difficulté de dénombrer les travailleurs précarisés.
    Nous sommes actuellement placés devant une alternative: utiliser les données indirectes existantes en tant qu’indicateurs de la situation — et je vous renverrai à l’excellent exemple donné par ma collègue, Mme Lippel, qui a parlé de la définition actuelle du concept de travail précaire — ou laisser les organisations élaborer elles-mêmes la définition du travail précaire et recueillir leurs propres données.
    Dans le premier cas, le mieux serait de miser sur les données relatives au travail atypique, comme le travail à temps partiel, temporaire ou occasionnel, et d'affirmer que les travailleurs concernés sont plus susceptibles d'occuper des emplois précaires. Cependant, nous pensons que le travail atypique n’est pas forcément synonyme de travail précaire.
    Dans le second cas, un problème de comparabilité se pose, puisque les définitions varient d'une organisation à l'autre. De plus, comme ces données ne sont pas recueillies par Statistique Canada, on peut difficilement les comparer à la masse de données économiques et sociales à notre disposition pour établir des liens et cerner les difficultés auxquelles les travailleurs précarisés se heurtent.
    Et ces difficultés peuvent être énormes. Nous savons que le travail précaire — et je renverrai ici aux travaux de Mme Schmidt, qui nous en a donné un bon exemple — se caractérise généralement par une instabilité du revenu, un accès limité aux avantages sociaux et même, dans certains cas, une exclusion de notre filet de sécurité sociale.
    Parlons des travailleurs à la pige. Je prends l'économie de la pige comme un simple exemple, et non parce qu'elle est synonyme de travail précaire. Ces travailleurs peuvent gagner un revenu faible qui varie considérablement d'un mois à l'autre en fonction des petits boulots qu'ils décrochent. Il en résulte une incapacité d'épargner pour l'avenir dans le meilleur des cas et, au pire, des périodes de pauvreté. Comme ces travailleurs ne sont pas considérés comme des employés par la plupart des entreprises — quelqu'un a donné l'exemple des chauffeurs Uber comme étant des travailleurs autonomes — ils ne reçoivent pas de feuillet T4 et n'ont pas droit aux cotisations de l'employeur aux régimes de retraite publics ni à l’assurance-emploi, autant d’éléments fondamentaux de notre filet de sécurité sociale sur lequel les Canadiens comptent depuis longtemps.
    La difficulté dans ce débat ne concerne pas uniquement les travailleurs à la pige occupant des emplois précaires. Ils ne sont qu’un exemple. Le défi réside dans la nécessité de nuancer la définition. La diversité des situations dans lesquelles les travailleurs précaires peuvent se retrouver est vaste, et je pourrai vous donner des exemples plus précis lors de nos échanges durant la période des questions. Une définition trop étroite pourrait se solder par l'exclusion de personnes qui ont vraiment besoin d'aide. À l'inverse, si la définition devait être trop générale ou trop vague, le soutien risquerait d'être trop dispersé et de ne pas avoir d'effets réels, ou les règlements adoptés pourraient être fondés sur des faux positifs.
(1125)
    Voilà pourquoi nous proposons une définition qui couvre tous les types d'emplois et qui combine les facteurs que sont la faiblesse et l'instabilité élevée du revenu, en lien avec les questions d'emploi futur et d'acte d'inconduite des employeurs.
    J'espère que cette définition constituera un point de départ utile pour vos délibérations. Nous avons remis au Comité des exemplaires de ce rapport, dans les deux langues.
    Permettez-moi de remercier encore une fois le Comité de se pencher sur cette importante question. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
(1130)
    Merci beaucoup, monsieur.
    Nous accueillons maintenant M. Andrew Cardozo, du Centre Pearson pour des politiques progressistes.
    Vous avez sept minutes, monsieur.
     Monsieur le président, je vous remercie ainsi que les membres du Comité de vous intéresser à cette question importante.
    En guise d’introduction, je mentionnerai que le Centre Pearson est un groupe de réflexion progressiste qui s’attaque à un éventail de questions économiques et sociales, l’avenir du travail étant l’une de nos trois grandes priorités cette année.
    Notre approche à l’égard de la précarité de l’emploi consiste à examiner ce que je considère comme l’avenir du travail, même s’il est juste de dire que la précarité de l’emploi est liée à la plupart des sous-problèmes que nous avons cernés. Qu’il s’agisse de l’évolution rapide de la technologie, des mises à pied chez GM et chez Fiat Chrysler ou du ralentissement de l'activité dans le secteur des ressources naturelles en Alberta et en Saskatchewan, l’évolution rapide de l’économie et la nature changeante du travail sont des défis importants pour les Canadiens, des défis auxquels font d'ailleurs face la plupart des pays de nos jours.
    La précarité s’accroît. Elle est une réalité pour la plupart des jeunes. Certes, le stress est ressenti par les particuliers, mais je vous rappelle que l’économie aussi est sous stress. Plus ils sont nombreux à occuper des emplois précaires, moins de travailleurs sont en mesure d’acheter des biens et des services et de participer à l’économie, ce qui a un effet considérable au-delà des individus.
    La précarité est au coeur de bien des problèmes. Je vais simplement en décrire quelques-uns. Je dirais que les solutions résident dans un travail de collaboration entre de nombreux partenaires, soit le secteur privé, les syndicats, les gouvernements, le système d’éducation et de formation, les familles et les particuliers. Voici les enjeux que nous avons inscrits au programme de notre projet sur le travail de l'avenir, lequel s’échelonne sur un an:
    Le premier est la formation pour le progrès technologique. Il s’agit d’examiner les compétences de demain.
    Deuxièmement, il y a les effets de l’intelligence artificielle sur le milieu de travail et les emplois.
    Troisièmement, il faut trouver des secteurs et des emplois nouveaux et futurs.
    Quatrièmement, il faut renforcer le secteur manufacturier et d’autres secteurs existants.
    Cinquièmement, il faut lutter contre l’incertitude en matière d’emploi et la réduction constante du nombre d’emplois à temps plein.
    Sixièmement, l’économie de la pige est en pleine croissance.
    Septièmement, il y a le rôle des entreprises en démarrage et du travail autonome.
    Huitièmement, nous avons besoin de formation en entrepreneuriat pour tous.
    Neuvièmement, il y a l’impartition, la délocalisation et la production mondiale.
    Le numéro 10 concerne le rôle du système formel d’éducation et de formation, et l’apprentissage tout au long de la vie.
    Le numéro 11 consiste à éliminer les obstacles, à faire progresser l’égalité et l’inclusion de la main-d’oeuvre.
    Le numéro 12 vise à créer des possibilités pour les groupes sous-représentés.
    Le numéro 13 concerne le progrès à réaliser pour les peuples autochtones.
    Le numéro 14 est la reconnaissance des titres de compétence étrangers.
    Le numéro 15 est l’éducation mondiale.
     Notre projet consiste à organiser des débats dans des régions clés du pays avec des partenaires clés et à élaborer une série de rapports sur chacun de ces sujets. Plutôt que de faire plus de recherche, nous voulons vraiment nous concentrer sur un petit nombre de recommandations réalistes et audacieuses pour l’avenir.
    En ce qui concerne la précarité de l’emploi, j’aimerais vous signaler quelques problèmes que vous devez prendre en considération dans ce que j’appellerais le continuum de la précarité. Il y a trois choses que je veux mentionner ici. Premièrement, certains secteurs ont été et seront toujours plus précaires que d’autres. Deuxièmement, certains secteurs deviennent de plus en plus précaires à mesure que les compétences changent et que le travail effectué est automatisé ou sous-traité. Troisièmement, n'oubliez pas que les travailleurs ayant un niveau d’éducation et de formation moins élevé seront plus précarisés que les autres. On estime que, pour l’économie de demain, 60 à 70 % de la main-d’oeuvre devra avoir fait des études postsecondaires. Il reste donc de 30 à 40 % de la main-d’oeuvre qui n’aura pas fait de telles études ou n'aura pas reçu une formation à ce niveau et qui sera encore plus précarisée que les autres.
    Je vais vous soumettre deux recommandations. Premièrement, il faut tenir compte de cette notion de continuum de la précarité et de son évolution au fil du temps. Deuxièmement, il faut appuyer l’idée d’offrir de la formation en entrepreneuriat à tous les étudiants du secondaire et du postsecondaire, et pas seulement aux gens d’affaires, puisque presque tous les travailleurs d’aujourd’hui et de demain seront des travailleurs autonomes pendant de courtes ou de longues périodes au cours de leur carrière.
(1135)
     Merci, monsieur le président.
    Merci à vous tous d’avoir respecté le temps alloué, ce qui m’a facilité la tâche. J'apprécie beaucoup cela.
    Nous allons commencer par les questions du député Diotte, s’il vous plaît.
    Bonjour, et merci à tous d’être venus.
    Comme je suis moi-même de Sault Ste. Marie, j'adresse un salut particulier à Allyson.
    Je retiens essentiellement de ce que vous nous avez dit qu'il faut trouver une définition à « emploi précaire ». Permettez-moi de commencer par un exemple. Un jour que j’avais pris un Uber, j'ai demandé au chauffeur pourquoi il faisait cela, et il m’a dit: « Eh bien, vous savez, je vis juste en face d’un Home Depot, et j'aurais pu y gagner 12 $ de l’heure et avoir des avantages, mais l'ennui c'est qu’on exigeait de moi d'être présent le lundi de 15 à 21 heures, ce qui m'aurait empêché de passer du temps avec mes enfants. J'aurais donc pu gagner 12 $ de l’heure avec une certaine sécurité d'emploi, tandis que là, j'ai la possibilité de toucher 17 $ de l’heure et d'être complètement indépendant. » C'était un compromis à faire; il était plus heureux d’accepter un emploi que l'on pourrait sans doute définir comme précaire.
    J’aimerais que nous fassions un tour de table pour connaître votre définition d’emploi précaire.
    Commençons par M. Cardozo.
    Je dirais que vous avez mentionné deux choses. Premièrement, que la précarité n’est pas nécessairement une mauvaise chose. Pour beaucoup de gens, c’est ce qu’ils aiment. Comme on l’a dit, c’est aussi un bon moyen d’entrer sur le marché du travail ou d'embrasser une carrière. Je dirais, avec tout le respect que je dois à toutes et tous autour de la table, qu’un grand nombre d’emplois sont précaires, dont les vôtres...
    Des députés: Oh, oh!
    M. Andrew Cardozo: ... d'après nos principaux exemples à ce sujet. Je ne qualifie pas le type de précarité mais, par définition, vous acceptez des contrats de quatre ans et vous essayez de les prolonger par la suite.
    Je vais me risquer à affirmer une chose: plutôt que d’essayer de définir la précarité, je dirais que nous devons nous intéresser à tout un éventail de précarités. Le gouvernement tient-il compte de la précarité en général ou se concentre-t-il sur certains types de précarité? La précarité existe à des niveaux de revenus élevés, comme dans votre cas, mais elle existe aussi à des niveaux de revenus inférieurs. Il est certain qu'il faut s'intéresser aux effets à long terme de la précarité sur les personnes et les familles ainsi que sur l’économie.
    C’est une bonne réponse. C’est aussi ce que j’aimerais savoir: quel est le vrai problème auquel nous devons nous attaquer? Votre exemple est bon. Nous occupons nous-mêmes des emplois précaires, mais quel problème devons-nous régler?
    Monsieur Fong.
     Vous m'avez volé la réponse. Je dirais que ça commence par là. Quand je parle de travail précaire, cela commence par un phénomène que nous pensons nécessaire de régler. Personnellement, je pense à quelqu’un comme Allyson, dont l’expérience personnelle illustre le problème à régler. Il s’agit d’une personne qui se trouve dans une situation où elle risque de retomber dans la pauvreté, de ne pas gagner assez pour joindre les deux bouts et de subir toutes sortes de conséquences économiques, sociales et sanitaires. Pour moi, il est là le véritable défi.
    Pour répondre à votre question, ou à votre anecdote, j'ai formulé le défi dans mes remarques liminaires. C’est une question de nuance. Comment parvenir à recenser précisément ces personnes? Selon moi, Katherine voulait dire qu’en ce moment, nous partons de l'idée de travail atypique et du fait que tous les travailleurs contractuels ou à temps partiel sont des travailleurs précaires, tandis que ce n'est probablement pas le cas en réalité.
     Je vais vous donner des exemples. Allez donc à Toronto pour parler avec un des consultants en TI. Ces gens-là sont sous contrat. Ils peuvent gagner plus de 200 000 $ par année. S’ils gagnent autant, allons-nous vraiment déployer des efforts pour éviter qu'ils se retrouvent sans emploi dans un an? Non. Ils ont les moyens d’épargner pour l’avenir, de gérer leurs propres affaires et de payer leurs propres avantages sociaux. Mais si quelqu’un a des contrats à court terme, renouvelés tous les six mois, et gagne 25 000 $ par année, alors oui, je vais m’inquiéter pour cette personne.
    C'est la même chose pour le travail à temps partiel. Je vais bien sûr m'inquiéter du sort de la jeune femme qui travaille à temps partiel pour financer ses études et qui ne parvient pas à faire plus d'heures — soit parce qu'on ne le lui permet pas, soit parce qu'elle doit suivre des cours du soir — et que, du fait, son revenu fluctue d’un mois à l’autre. Toutefois, dans le cas d'un fonctionnaire à la retraite qui a une bonne pension et qui travaille à temps partiel pour s'occuper... Certes, leur situation est peut-être identique sur le plan du revenu. Leurs gains salariaux sont peut-être identiques, mais leur situation est fondamentalement différente.
    Quant à moi, c'est là qu'une définition s'impose. Quel problème voulons-nous résoudre? J'estime qu’il faut éviter que les gens fassent des plongées occasionnelles dans la pauvreté. Nous disposons maintenant d'une bonne définition de la pauvreté, mais notre filet de sécurité sociale ne parvient pas vraiment à prendre en compte les gens qui s'en sortent bien un mois, mais pas le suivant. Voilà le véritable défi. Il faut commencer par établir une sorte de seuil pour les gains annuels, les gains mensuels, etc., puis de tenir compte de ces différentes nuances du sens à donner au phénomène de précarité.
     Un de ces éléments, selon moi, doit être l'instabilité des revenus, vous ne pensez pas? CPA Canada vient de produire un rapport dans lequel on estime que plus d’un tiers des Canadiens font maintenant face à des revenus instables. Peu importe le niveau de revenu dont on parle, la volatilité du revenu en soi est un véritable défi pour beaucoup.
    On parle donc d'une sorte de seuil de revenu en lien avec la notion d'instabilité du revenu. Il sera aussi très important de parler de préférence. Il faudra aussi tenir compte de la dangerosité possible des emplois et des éventuels actes d'inconduite de la part des employeurs. Je pense qu’il faut subdiviser la notion de travail précaire en différents éléments afin que nous puissions commencer à recueillir des données sur tous ces éléments et ainsi recenser les personnes véritablement touchées par ce phénomène.
(1140)
    Excellent.
    Je sais que nous ne pourrons pas entendre tout le monde.
    Madame Moreau.
    En fait, nous n'avons malheureusement plus de temps. Je suis désolé. Nous y reviendrons.
    Monsieur Sheehan.
    Merci beaucoup à tous d'être parmi nous aujourd'hui. C'est une excellente façon de lancer cette étude.
    On m'avait donné la possibilité de présenter un exposé, mais il s'est passé des choses, et nous avons fini par annuler la réunion du Comité. Je ne vais pas revenir sur beaucoup de mes commentaires. Je vais garder cela pour une autre fois. Je voudrais poser des questions à ceux qui ont présenté d'excellents témoignages.
    Katherine a parlé notamment des gens qui ont peur et de la voix des travailleurs dans bien des contextes. Évidemment, quand ils signent un contrat, ils espèrent avoir un emploi à temps plein à un moment donné, mais en réalité, comme mes recherches le montrent, ce contrat mène à un autre contrat, et puis six, sept ou huit ans plus tard... Allyson, de Sault Ste. Marie, en est un parfait exemple. Cinq emplois plus tard, elle gagne 25 000 $, sans avantages sociaux.
    J'aimerais avoir votre avis sur quelque chose. Il en a été question au sujet de l'équité salariale. J'ai siégé à ce comité. On parlait de mesures proactives. Nous avons procédé à un examen de la fonction publique fédérale et des entreprises dont nous sommes responsables du point de vue de la mise en place d'un système proactif dans le cadre duquel les gestionnaires, les administrateurs, etc., auraient à identifier ceux qui travaillent dans des conditions précaires et à expliquer pourquoi.
     Je vous le dis également parce que j'ai moi-même travaillé dans des conditions précaires au gouvernement et j'avais aussi ma propre entreprise. Une bonne partie de ma recherche a révélé que, quand les gestionnaires ont commencé... Mais il ne s'agit que de moi. Il y a des milliers de situations dont on peut parler, mais je vais parler de celle-ci. Quand on a introduit la rémunération au rendement pour les gestionnaires, il s'agissait entre autres de gérer un budget, n'est-ce pas? Comment réduire les coûts? En maintenant les gens dans des emplois précaires: pas d'avantages sociaux, rien, pas de coûts.
    J'aimerais savoir ce que Katherine pense notamment de cette situation, et peut-être qu'Allyson pourrait nous parler un peu plus de son expérience.
     Je vais commencer par Katherine.
     Je vous remercie de cette question.
    Cela recoupe ce que j'aurais dit en réponse à la question précédente, à savoir que, si on cherche une définition, il faut avoir une raison de la chercher. La recherche d'une définition à des fins statistiques est un exercice très différent de la recherche d'une définition à des fins réglementaires. Et si on le fait à des fins administratives, c'est encore très différent. Ce que j'ai dit dans mes notes, par exemple, dans la définition, c'est que j'ai commencé par l'emploi atypique. On distingue aussi précarité de l'emploi et insécurité de l'emploi. Ce sont deux catégories. Si quelqu'un a peur de perdre son emploi, on parle de précarité de l'emploi. Dans le cas d'Allyson, il s'agit d'insécurité de l'emploi. On est constamment à la recherche d'un autre emploi parce qu'on n'arrive pas à joindre les deux bouts.
    C'est de clarté qu'on a besoin, du point de vue réglementaire comme du point de vue statistique. Il faut pouvoir se dire: « Voilà les paramètres qui nous intéressent. » On sait, par Statistique Canada, que 17 % des travailleurs temporaires n'ont pas de prestations d'assurance-maladie. Cela fait beaucoup de monde. Si nous incitons les gestionnaires à augmenter ce nombre comme vous venez de le suggérer, ce n'est pas un bon moyen de garantir la santé des Canadiens. Il est important de savoir précisément ce dont nous faisons au juste la promotion quand nous imposons des objectifs de rendement aux gestionnaires et il faut être conscients des conséquences de cette promotion. Est-ce que nous encourageons les agences de placement temporaire à offrir des services au gouvernement fédéral? Quelles sont les conditions de travail des travailleurs envoyés par ces agences de placement temporaire? Est-ce que nous leur offrons des contrats temporaires qui seront renouvelés à répétition ou est-ce que nous disons que, désormais, tous les interprètes seront des travailleurs autonomes? S'ils tombent malades, peut-être qu'ils pourront intenter des poursuites parce qu'ils n'auront plus droit à des indemnités d'accident du travail.
    Ce sont autant de questions qu'il faut définir de façon proactive. Toute la documentation est là. Il n'est pas nécessaire de faire beaucoup d'études pour dire « Voilà les conséquences en matière de santé. Voilà les conséquences en matière d'efficacité de la réglementation. » Chaque règlement est différent. Les conséquences sur les normes d'emploi seraient différentes selon les catégories de personnes envisagées. Le salaire minimum à temps plein représente un emploi précaire également si l'on tient compte des types de soutien dont les gens ont besoin pour pouvoir nourrir leur famille, avoir accès à des services de garde, etc.
    La seule mise en garde est de définir précisément ce que vous voulez faire, puis de vous assurer que vous n'utilisez pas une définition générale et imprécise.
(1145)
    Allyson, vous avez rendu un témoignage très succinct. Je pense que, dans ce que vous avez fait, vous vous êtes montrée très courageuse de parler au nom des travailleurs, ce que beaucoup de gens au Canada ont peur de faire. Merci beaucoup pour cela, mais aussi d'être parmi nous et de nous donner un exemple concret.
    Peut-être pourriez-vous nous parler un peu plus de la précarité. Certains éléments de ma recherche indiquent que la précarité entraîne non seulement des problèmes économiques et de santé, mais aussi un désengagement social, puisque les gens sont tellement occupés à élever leurs enfants, à passer d'un emploi à l'autre, à chercher la sécurité, que leur capacité à se joindre à des groupes de bénévoles et leur engagement démocratique sont moindres.
    Est-ce que vous avez l'impression que, parfois, vous êtes tellement fatiguée qu'il ne vous est pas possible de participer à la vie sociale?
    Soyez brève, s'il vous plaît.
    Il est très difficile de s'engager dans la collectivité. Je tiens beaucoup à être une citoyenne productive de Sault Ste. Marie et à améliorer la situation, parce que je vois bien où j'en suis. Pendant que je me débats avec mes difficultés, je vois des gens qui sont dans une situation bien pire que la mienne. Bien sûr que le fait de travailler toute la journée et peut-être de devoir occuper d'autres emplois... Souvent, au moment où je couche mes enfants, je commence mon deuxième travail où je fais autre chose. Et cela en plus d'essayer de m'occuper de la maison et de tout le reste. Ensuite, il est très difficile de vivre des choses aussi simples que des amitiés ou des relations ou quoi que ce soit d'autre. Il est difficile d'avoir une qualité de vie. C'est difficile quand on se débat pour mettre de la nourriture sur la table, se loger et acheter des médicaments pour rester en bonne santé, que le revenu soit de 500 $ par mois ou de 5 000 $ par mois. Cela a beaucoup de conséquences sur la vie sociale.
    Merci.
    C'est au tour de Mme Sansoucy. Vous avez six minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je remercie l'ensemble des témoins de leur contribution aux travaux de notre comité.
    Ma première question s'adresse à Mme Lippel.
    Quand on parle de travail précaire, on parle souvent aussi de travail temporaire. Dans vos recherches, vous dites que le travail est un facteur déterminant de la santé. Un travail précaire a indéniablement des incidences sur la santé des travailleuses et des travailleurs.
    Dans votre témoignage, vous avez parlé des agences de placement temporaire. Vous mentionnez que les travailleurs temporaires sous-traitants sont susceptibles de se blesser davantage.
    Au NPD, nous croyons qu'il faut améliorer les conditions de travail des emplois précaires liés aux agences de placement temporaire. J'aimerais que vous nous parliez davantage des travaux que vous avez faits à cet égard. Comment pouvons-nous améliorer cette situation concernant les agences de placement temporaire et l'incidence sur la santé des travailleurs? Vous avez d'ailleurs mentionné que le gouvernement du Canada faisait aussi appel à ces agences.
(1150)
    Merci de votre question, madame Sansoucy.
    Premièrement, le travail temporaire est un concept beaucoup plus large que celui de travail fourni par une agence de placement temporaire. Jusqu'en 2005, Statistique Canada tenait des statistiques séparées. En 2010, on a perdu la distinction entre le travail temporaire et le travail fourni par l'entremise d'une agence. C'est une distinction primordiale qu'il faut garder, car, si l'on veut comprendre ce qui se passe, il faut pouvoir surveiller ce qui se passe.
    À la fois au Québec et en Ontario, on a mené des études sur la santé au travail en ce qui a trait à l'exposition des travailleurs. Au Québec, une étude a été menée par le Dr Massé, qui était alors directeur de santé publique de Montréal. Cette étude a permis de constater, d'une part, que la vaste majorité des travailleurs d'agence étaient issus de l'immigration, ce qu'avait également relevé la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail. D'autre part, sur le plan des risques et du travail indemnisé, c'est-à-dire des lésions pouvant donner lieu à une indemnisation, ces travailleurs sont disproportionnellement exposés, selon les statistiques.
    Parmi les solutions, le gouvernement du Québec a modifié la loi en 2018 pour exiger que les agences de travail temporaire aient un permis. La plupart des autorités n'exigent même pas de permis. Certaines provinces le font, mais je ne sais pas ce qu'il en est au fédéral. Je pense que c'est réglementé du côté provincial. Il faut quand même exiger des critères minimaux de protection si le gouvernement fédéral fait appel à un salarié d'agence. Cela sert à garantir que l'on ne s'adresse pas à une agence sans scrupule, ce qu'on appelle en mauvais français une entreprise fly-by-night — ce qui pose problème —, ou à des compagnies à numéro qui disparaissent et qui renaissent deux jours plus tard. Il faut réglementer en particulier le secteur des agences de placement temporaire.
    Quant à la question de savoir si l'on devrait interdire des contrats temporaires, je suis d'accord avec la dame qui a mentionné qu'on ne pouvait pas demander de mettre fin au travail temporaire. On l'a fait en France et cela n'est pas efficace.
    En ce qui concerne les agences de placement temporaire, c'est une autre paire de manches. Il faut vraiment réglementer ce secteur pour assurer la responsabilisation des clients, y compris le gouvernement fédéral, et des agences de travail temporaire.
    Ce serait un premier élément de réponse.
    Merci beaucoup, madame Lippel.
    Au bénéfice du Comité, pourriez-vous transmettre à la greffière les enquêtes et les rapports supplémentaires dont vous venez de nous parler, lesquels sont pertinents dans le cadre de notre étude, ainsi que l'information relative à la loi du Québec portant sur les agences de travail temporaire?
    D'accord.
    Le reste est dans le rapport, mais il est vrai que je n'y mentionne pas la loi.
    D'accord. Merci beaucoup.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Fong.
    Dans votre document sur le travail précaire au Canada, qui fait état des personnes réellement à risque, vous faites un lien fort pertinent entre le travail précaire et la lutte contre la pauvreté. Vous dites qu'il est impératif d'approfondir notre compréhension de cet enjeu. Vous parlez de la nouvelle stratégie de réduction de la pauvreté et des moyens à adopter à l'égard de la précarisation du travail.
    Malheureusement, la stratégie de réduction de la pauvreté du gouvernement libéral ne fait pas mention de la précarisation du travail. Pouvez-vous dire au Comité pourquoi il serait essentiel, dans cette stratégie, de traiter précisément de la précarisation du travail?

[Traduction]

     Je pense que c'est une très bonne question. À mon avis, cela ne date pas d'aujourd'hui, mais ce n'est que maintenant que nous estimons que c'est un problème.
    Si nous revenons au travail saisonnier et aux nombreuses caractéristiques de travail propres aux gens qui travaillent dans le secteur de la pêche, par exemple, on peut penser que c'est du travail précaire, mais ce secteur d'activité existe depuis des générations. Les gens de ce secteur se débrouillent plutôt bien au fil des ans, sauf, évidemment, depuis les nombreuses années de déclin que nous avons connues dernièrement.
    Alors, pourquoi maintenant? Pourquoi nous inquiéter maintenant? Je pense que c'est parce que cela commence à toucher beaucoup plus de gens qui ne sont pas nécessairement préparés à ce genre de volatilité, qui vivent dans certains milieux ou qui veulent un certain mode de vie, ou simplement qui ne gagnent pas assez pour s'en sortir.
    Je voudrais attirer votre attention sur certaines des statistiques dont Monique a parlé au sujet du fait que le travail atypique n'augmentera peut-être pas au Canada en proportion du travail total. C'est ce que les statistiques donnent à penser. Le travail à temps partiel, par exemple, n'a pas changé en proportion de l'emploi total depuis 1993.
    Mais les résultats de notre recherche montrent que la proportion des emplois à temps partiel a augmenté de façon assez importante dans certains secteurs. Il s'agit de domaines comme l'hébergement et les services de restauration, le commerce de détail, et surtout le secteur de l'éducation — Allyson l'a déjà dit. On trouve, dans deux de ces trois secteurs, les salaires parmi les plus bas au pays. Dans le secteur de l'éducation, même si les salaires sont assez bons en moyenne, le nombre moyen d'heures travaillées est de loin le plus bas. C'est à peu près la moitié de la moyenne nationale et, par conséquent, même si le salaire est correct, on ne fait pas suffisamment d'heures.
    On commence à voir le genre de précarité qui a touché les générations précédentes dans certains secteurs d'activité, comme la pêche par exemple, se répandre dans la société en général. Certains groupes sont maintenant frappés par cette volatilité qu'ils sont mal préparés à affronter à cause de faibles revenus ou d'autres raisons.
    Pourquoi s'en soucier? Je m'en soucie au même titre que je me soucie des gens qui vivent dans la pauvreté. C'est un phénomène qui se produit dans notre économie pour toutes sortes de raisons: les pressions exercées sur la compétitivité des entreprises, le ralentissement de la croissance, la faible croissance de la productivité. On peut ainsi pointer du doigt toutes sortes de grandes tendances économiques.
    La réalité, c'est que, parallèlement, nous observons un résultat sociétal dont nous ne sommes pas satisfaits. C'est pourquoi je pense que la précarité a autant d'importance que la pauvreté.
(1155)
    Merci beaucoup.
    C'est au tour de M. Long.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins de ce matin.
     Je vais partager mon temps avec le secrétaire parlementaire Vaughan, mais, d'abord, j'ai une question pour vous, monsieur Fong.
    Selon vous, en quoi la précarité de l'emploi affecte-t-elle une profession hautement réglementée et normalisée comme la vôtre, une profession dont les membres doivent être agréés?
    Excellente question.
     Permettez-moi de modifier la question comme ceci: est-ce que le travail précaire est de plus en plus répandu chez les comptables, par exemple, ou dans la profession comptable ou ailleurs, ou dans n'importe quelle profession réglementée? Je crois que la réponse, du moins dans notre cas, est que nous ne le savons pas.
    Andrew a souligné de nombreux aspects intéressants au sujet de la tournure que les choses pourraient prendre. Nous enquêtons actuellement sur les répercussions de l'évolution technologique sur notre profession. De nos jours, beaucoup des différentes tâches dont s'acquitte notre profession, comme les rapports financiers, risquent d'être automatisées grâce, par exemple, à l'IA et aux chaînes de blocs. Il n'est pas irréaliste de s'y attendre d'ici 10 ans.
    Que deviendra notre profession à ce moment-là? Que deviendront les gens qui occupent ces emplois à l'heure actuelle? Que feront-ils? Sauront-ils s'adapter pour suivre la courbe d'apprentissage? C'est ce que nous essayons de savoir. Nous avons un projet intitulé « Voir demain », et nous lançons des consultations partout au pays pour obtenir une réponse précise.
    Du point de vue stratégique, il y a des questions encore plus vastes dont nous devons nous préoccuper ici. Par exemple, si les comptables professionnels dépendent de choses comme la production de rapports financiers pour acquérir des compétences essentielles au début de leur emploi, où donc la nouvelle génération de comptables va-t-elle les acquérir si ces fonctions ont été automatisées?
     Entrons-nous dans une période de précarité? C'est très possible, mais je pense que la réponse est que nous ne le savons pas.
     Merci.
     Monsieur Vaughan.
    J'ai quelques questions à poser à M. Fong.
    À la page 7 du rapport, je vois que, dans la ventilation de l'emploi à temps partiel par secteur, les trois domaines où ils sont de plus en plus nombreux sont l'éducation; l'information, la culture et les loisirs; et les services d'hébergement et de restauration. Ces domaines définissent ma circonscription du centre-ville de Toronto à bien des égards, qu'il s'agisse du secteur des médias numériques, du secteur de la culture ou du secteur de l'hébergement. À la page suivante, qui concerne la part de l'emploi temporaire par secteur, les secteurs où le taux d'emploi augmente le plus rapidement sont également ceux où la dynamique de l'emploi temporaire connaît la croissance la plus rapide. Cela signifie que la nouvelle croissance du marché de l'emploi est dans le travail précaire. C'est la raison pour laquelle il s'agit d'un problème émergent plutôt que d'un problème que l'on peut mesurer très efficacement en examinant les 10 dernières années.
    Cela dit, vous avez fait remarquer qu'une personne qui gagne 200 000 $ comme spécialiste des TI et qui passe d'un contrat à l'autre n'est pas nécessairement en situation de précarité. Quand j'en discute avec les intéressés, j'entends souvent dire qu'un simple accident de vélo pourrait les faire basculer dans la précarité. Autrement dit, il suffit d'un brusque changement de situation pour que, tout à coup, ces 200 000 $ ne soient plus disponibles. Par ailleurs, s'ils ne s'occupent pas constamment de renouveler leurs contrats, ils s'excluent du convoyeur de contrats et se retrouvent tout à coup dans une situation où ils ne peuvent pas trouver d'autre travail. Ensuite, leurs compétences commencent à ne plus être à jour. Donc, comme ce n'est pas le salaire qui est le problème, mais plutôt la précarité des contrats quoi qu'il en soit du salaire, je me demande ce que le gouvernement pourrait faire, au lieu de lutter contre la précarité, pour comprendre comment en tenir compte et protéger les gens qui se trouvent dans cette situation. Certains disent qu'il faut l'éliminer plutôt que d'en tenir compte. Peut-être vaudrait-il mieux en tenir compte plus largement.
(1200)
    C'est, à mon avis, une excellente question.
    Je vais d'abord rappeler certaines des observations de ma collègue Monique au sujet de l'équilibre que nous tâchons de garder entre la définition du travail précaire et, pour tout dire, les politiques que nous décidons d'adopter pour y remédier et les coûts que cela impose aux entreprises. Compte tenu des ressources très limitées dont dispose le Canada pour régler tous les problèmes auxquels nous sommes confrontés, le travail précaire étant de première importance, je voudrais m'assurer que ces ressources vont à ceux qui en ont le plus besoin. En fait, ce serait ma principale préoccupation. Est-ce que telle personne en est à un accident de vélo de la précarité? Je pense que c'est tout à fait ce qui se passe. Je pense qu'on pourrait probablement appliquer cette perspective à beaucoup de travailleurs à temps plein qui travaillent toute l'année, à des gens qui ont des emplois permanents.
    Nous sommes tous confrontés à une certaine précarité dans notre travail. Ce ne sera peut-être pas un accident de vélo. Mon entreprise pourrait décider n'importe quand qu'elle n'a plus besoin d'un économiste en chef, et je pourrais perdre mon emploi, ou quelque chose du genre. Je pense que la précarité est devenue une nouvelle réalité pour nous tous. C'est pourquoi c'est une très bonne chose, à mon avis, que vous ayez relancé la question de savoir ce que nous faisons pour en tenir compte, car ce sera notre nouvelle réalité. Peut-être que nous mettons la charrue avant les boeufs ici, mais je pense que nous devons d'abord définir le problème et faire le compte de tous ceux que cela concerne.
    Si les employeurs procèdent ainsi en partie pour constituer une main-d'oeuvre en fonction des projets qu'ils ont devant eux... D'autres études antérieures nous ont appris que, si nous touchions un peu plus aux cotisations d'assurance-emploi, cela modifierait la structure des taux. Il faudrait établir une nouvelle table actuarielle et probablement de nouveaux taux pour assouplir les choses et donner plus rapidement accès aux fonds.
    Si les employeurs sont à l'origine de la précarité sur le marché du travail, est-ce qu'ils n'ont pas l'obligation de créer également la stabilité qui complète ce contrat social?
    C'est à mon avis une question très difficile. Très philosophique. Ce que je veux dire, c'est que j'aurais tendance à dire oui à cet égard; vous avez tout à fait raison. Mais, au bout du compte, il sera difficile de convaincre que la force économique qui pousse le milieu du travail à se diriger vers ce genre de régime va entraîner la nécessité d'augmenter les cotisations d'assurance-emploi, par exemple. Mais, au final, oui, je pense que vous avez raison.
    Merci.
    C'est à vous, monsieur Morrissey, je vous en prie.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais poursuivre dans la même veine que mon collègue, le député Vaughan. Selon les statistiques, la main-d'oeuvre stable à temps plein est assez constante sur 18 ans. J'en conclus que les emplois précaires restent constants également. Cela s'explique par un certain nombre de facteurs. Dans le dernier budget du gouvernement, nous avons pris des mesures pour inciter les aînés à retourner sur le marché du travail. Ils feraient alors partie des statistiques sur le travail précaire, n'est-ce pas? Mais ils n'auraient pas besoin du soutien dont Mme Schmidt a parlé, parce qu'ils ont des soutiens et des demandes différentes de leur point de vue socioéconomique.
     Permettez que j'intervienne ici. Nous sommes d'accord, et je pense que cela revient à ce que disait M. Fong tout à l'heure. On voit bien, dans la diapositive 5, que les personnes qui subissent des contraintes économiques sont celles que nous devrions aider. Nous devrions nous efforcer de ne pas perturber les versions souhaitées du travail à temps partiel, du travail contractuel ou du travail temporaire. Encore une fois, la définition sera difficile à formuler, mais je pense qu'il faut garder cela à l'esprit. Cela nous ramène un peu à la discussion engagée par le député Vaughan, à savoir que toutes les structures de soutien que nous avons actuellement sur le plan social grâce à l'assurance-emploi et aux révisions du Code canadien du travail ont été créées à une époque où l'économie était principalement composée d'employeurs et de travailleurs à temps plein.
    Nous devons maintenant nous adapter — nous n'avons pas le choix — et, que vous appeliez cela l'économie de la pige ou l'innovation technologique, cela s'en vient. À notre avis, l'économie du partage et l'économie de la pige découlent d'une surréglementation. Les Airbnb, Uber et Lyft de ce monde sont franchement libres et sans attaches et s'en tirent impunément, et c'est ce qui perturbe ceux pour qui nous avons de la sympathie. Ils ont du mal à s'en sortir.
(1205)
    Je suis d'accord avec cela. Je veux revenir à la dernière recommandation qui a été faite, soit d'aider les travailleurs autonomes et d'adapter l'assurance-emploi et les règles fiscales.
    Brièvement, si vous deviez recommander des changements, quelle recommandation feriez-vous dans ces deux cas?
    Il est maintenant possible de choisir de cotiser ou non à l'assurance-emploi en tant que travailleur autonome, ce qui est important à notre avis, mais cela devrait être étendu à certaines des autres prestations qui sont offertes en vertu de l'assurance-emploi, de même qu'aux avantages fiscaux, et il faut plus de clarté, tant pour les employés que pour les entrepreneurs indépendants.
    Je ne me souviens plus qui parmi les témoins a mentionné cela, mais il existe actuellement un flou entre le ministère des Finances et l'Agence du revenu du Canada lorsqu'il s'agit de déterminer si une personne doit être considérée comme un employé ou comme un entrepreneur indépendant, et cela va parfois à l'encontre des intentions des deux parties. L'employeur et l'employé finissent par se retrouver avec des arriérés d'impôt à payer par suite d'une décision de l'ARC.
    Nous inciterions le gouvernement à envisager... et cela touche tout un éventail de secteurs de l'économie.
    Je suis d'accord.
    J'ai une question pour M. Cardozo.
     La proportion d'emplois précaires semble avoir été stable au cours des dernières années par rapport à la population active. Comment les programmes de formation du gouvernement peuvent-ils réduire la précarité de l'emploi? Si nous examinons la situation, nous constatons qu'il n'y a pas eu de fluctuations. Comment les programmes de formation du gouvernement pourraient-ils être mieux ciblés pour réduire la précarité de l'emploi? À votre avis, est-ce possible?
    L'une des choses dont nous avons parlé ressemble un peu à ce que M. Vaughan a mentionné, c'est-à-dire qu'il ne s'agit pas tant de s'accommoder de la situation, mais plutôt de préparer les gens à la précarité de l'emploi, c'est-à-dire de leur offrir de la formation en entrepreneuriat.
    Une des mesures que j'ai remarquées dans le budget, et qui est vraiment importante et positive, c'est la formation continue pour les travailleurs adultes qui peuvent choisir de s'absenter du travail et de suivre un certain nombre de semaines de formation. Cela est extrêmement important à long terme. Qu'il soit permanent ou précaire, il est important que les gens puissent conserver leur emploi, qui les prépare à la formation pour d'autres types d'emplois, mais je reviens à la question de l'entrepreneuriat.
    À l'une des tables rondes que nous avons tenues, à Corner Brook, Terre-Neuve, quelqu'un a parlé d'une chose que je connaissais plus ou moins, mais en l'expliquant très clairement, à savoir que nous devrions offrir une formation en entrepreneuriat à tous les étudiants, et pas seulement aux étudiants en affaires. Si vous prenez le genre de travailleurs dont M. Vaughan a parlé dans sa circonscription, les artistes par exemple, ils n'ont pas vraiment d'intérêt pour la formation en entrepreneuriat, mais ce sont des entrepreneurs, et nous nous attendons à ce qu'ils réussissent et ils s'attendent eux-mêmes à réussir. Mais étant donné que nous nous dirigeons de plus en plus vers une économie de la pige et du travail autonome...
    Vous voyez donc un rôle axé sur la formation.
    Ce que je trouve difficile, c'est que l'on a mentionné — un certain nombre de personnes l'ont fait — que de plus en plus d'emplois sont précaires, mais si vous regardez la courbe, elle est plutôt stable. Alors, comment peut-on expliquer les deux?
    Il y a aussi les différents aspects de la précarité. Il peut s'agir d'emplois temporaires. Il y a aussi les emplois à faible revenu. Comme on l'a mentionné plus tôt...
    Ensuite, comment fait-on pour... Il y a des emplois temporaires qui perdurent, et cela nous ramène à toute la définition de la précarité. Il y a toute une série de problèmes qu'il faut essayer de régler, et M. Fong a fait mention de l'industrie saisonnière de la transformation du poisson. Son existence remonte à loin. On parle de travailleurs hautement qualifiés, qui ne se considèrent pas comme étant en situation de précarité parce qu'ils retournent chez le même employeur, et que leurs prestations sont ajustées en conséquence. Ils ne se reconnaissent pas dans la définition de la précarité.
    Je comprends la position de Mme Schmidt. À mon avis, c'est là-dessus que nous devrions nous concentrer, c'est-à-dire vraiment définir ce qu'est la précarité et ensuite examiner les mesures de soutien qui sont nécessaires pour aider les gens à se sortir de ces situations ou, s'ils ne le peuvent pas et qu'ils doivent y demeurer en raison des circonstances de la vie, les mesures de soutien qui sont nécessaires pour les empêcher de sombrer dans la pauvreté le cas échéant.
(1210)
     Merci. Désolé, mais j'ai bien peur que votre temps de parole soit écoulé.
    Madame Falk, s'il vous plaît. Vous avez six minutes.
    Ma première question s'adresse à M. Cardozo. Elle fait un peu suite à celle de M. Morrissey.
    Donc, est-ce que la formation en entrepreneuriat est quelque chose que vous suggéreriez à l'école?
    Oui, je suggère certainement que cela soit enseigné dans les écoles secondaires, ainsi que dans les collèges et les universités. Cela devrait se faire dans toutes les écoles secondaires, et une fois qu'on est au collège ou à l'université et qu'on suit un programme en arts, il devrait y avoir un volet d'entrepreneuriat. Il s'agit essentiellement de préparer les gens à entrer sur le marché du travail.
    C'est une idée intéressante.
    Récemment, lorsque nous nous sommes rendus dans les circonscriptions, j'ai eu l'occasion d'animer une rencontre qui s'adressait essentiellement aux femmes entrepreneures. C'était fou de voir combien de femmes ne se considéraient pas comme des entrepreneures jusqu'à ce que quelqu'un leur dise: « Oh, vous avez une entreprise. Vous avez réussi à transformer ce que vous faites, même si c'est un passe-temps, en entreprise. » Il s'agit de pouvoir compter sur un groupe et d'avoir l'occasion de pouvoir profiter d'un mentorat, d'une expérience dans laquelle puiser, pour ensuite employer des gens, par exemple. Je trouve aussi intéressant de voir combien de gens ne se rendent pas compte que leurs activités font d'eux des entrepreneurs.
    Exactement.
    Monique, j'ai quelques questions concernant la position de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante sur les recommandations.
    Pour ce qui est de la première recommandation, c'est-à-dire appuyer la réglementation qui donne de la souplesse aux employés et aux employeurs, à quel type de souplesse pensez-vous?
    Encore une fois, cela nous ramène à l'intention des parties concernées, à savoir que si l'employeur cherche un entrepreneur indépendant et si l'entrepreneur indépendant veut être un entrepreneur indépendant — et non pas un employé permanent à temps partiel ou à temps plein —, nous respectons cela et il est alors plus facile de l'aider dans ce rôle.
    Pour l'entrepreneur indépendant, en tant que travailleur autonome, il faudrait réduire les tracasseries administratives associées au fait d'être un travailleur autonome et éliminer pour l'employeur toute complication découlant des autres obligations qui lui incombent en tant que propriétaire d'entreprise.
    Cela serait-il simplement précisé lors d'une conversation au moment de l'embauche?
    C'est généralement ainsi que les choses se passent. Il est certain que nous recommandons que les gens signent un contrat formel qui précise une durée, les paiements à verser, la rémunération et ainsi de suite, tous ces détails, et qui signifie que les parties s'engagent de leur plein gré et que personne n'est obligé de devenir entrepreneur s'il ne le souhaite pas.
    Je ne sais pas si vous pouvez répondre à cette question, mais avez-vous une idée du nombre d'entrepreneurs ou d'employés temporaires qui signeraient ce genre de contrats, non pas parce que cela représente la situation idéale pour eux, mais parce qu'ils ont besoin de travailler?
    Je pourrais probablement vous fournir plus de détails à ce sujet en faisant un peu de recherches, mais si vous revenez à mon graphique de la diapositive 5, vous aurez une idée du pourcentage de l'emploi total, du nombre de personnes qui travaillent à temps partiel en raison de ce que nous appelons la « contrainte des possibilités ». En 2016, le travail à temps partiel semble avoir représenté environ 5 % de l'emploi total au Canada, ce qui est relativement peu.
    Vous pourriez même, si vous le voulez, inclure les contraintes personnelles. Il s'agit de personnes qui sont peut-être contraintes de prendre soin de membres de leur famille ou d'enfants ou qui ne peuvent pas envisager un emploi à temps plein. Vous pouvez aussi les inclure, ou même une partie, comme Francis l'a dit plus tôt. Prenons le cas d'un étudiant qui étudie à temps partiel et qui veut plus d'heures, mais qui est contraint à demeurer dans la même situation. On peut même aller jusqu'à inclure un peu de ces cas. Toutefois, en pourcentage de l'emploi total, même si l'on tient compte de tous ces éléments, on parle de 8 à 9 % au Canada.
    D'accord.
    Je ne me rappelle pas qui a posé cette question plus tôt ni ce qui a lancé ce débat, mais comment pouvons-nous, en tant que législateurs fédéraux, nous concentrer sur cette partie de la population aux prises avec des contraintes économiques? Comment pouvons-nous y parvenir sans empiéter sur les compétences provinciales?
    Cette question s'adresse à tous.
    Vous avez compétence en ce qui concerne les conditions de travail des personnes assujetties à la réglementation fédérale, et si vous prêchez par l'exemple, cela aide. C'est la première réponse.
    Le deuxième élément, qui se rapporte à ce qui vient d'être dit, c'est que la raison pour laquelle nous n'avons pas de lois qui permettent à des parties de sous-traiter et de se dire entrepreneurs indépendants, c'est que les protections réglementaires sont des questions d'ordre public. Par exemple, on ne peut pas dire: « Je vais dire que je suis un travailleur autonome aujourd'hui et que je ne gagne pas le salaire minimum », parce que ce serait illégal et c'est ainsi depuis 100 ans.
    Il faut faire attention, en ce qui concerne la liberté contractuelle, de ne pas ouvrir la porte à des situations où des gens, comme je l'ai vu dans mes recherches, travaillent pour des agences de placement temporaire et se font dire qu'ils sont des travailleurs autonomes les lundis, mercredis et vendredis, alors qu'ils font le même travail les mardis et jeudis. C'est une façon de contourner les lois liées à l'ordre public, comme le Code canadien du travail, qui relève de votre compétence.
    Bien sûr, si vous légiférez sur les pratiques exemplaires, cela aide en ce qui concerne les modèles que vous donnez aux provinces.
(1215)
     J'ajouterais en passant que nous sommes d'accord avec cette approche. Vous savez, nous ne sommes certainement pas intéressés à prévoir dans la loi des conditions de travail épouvantables pour les gens.
    Bien sûr. Je ne pense pas qu'aucun d'entre nous le soit.
    Il s'agit plutôt de respecter l'intention du contrat et celle des parties. Il pourrait y avoir tout un autre comité au sujet du conflit qui survient lorsque le législateur, ou le gouvernement, affirme: « Peu importe que vous ayez tous les deux décidé d'une relation employeur-entrepreneur indépendant. Pour nous, cela ressemble à une relation employeur-employé. Vous avez donc des arriérés d'impôt à payer et toutes ces autres choses. » Depuis un certain nombre d'années, nous éprouvons des difficultés à cet égard, parce que le monde du travail est en train de changer en ce qui concerne la définition d'un contrat à long terme, comme l'exemple de la technologie de l'information l'a démontré. Autrefois, le fait de fournir vos propres outils faisait de vous un entrepreneur. Les contrats à court terme étaient monnaie courante. Maintenant, vos outils sont dans votre cerveau. Vous pouvez travailler comme informaticien pendant quatre ou cinq ans, puis votre contrat prend fin. Quel que soit le logiciel que vous avez monté pour un système, on n'a plus besoin de vous. Vous devez passer alors à un autre contrat.
    C'est là que des adaptations sont nécessaires.
    Merci.
    Monsieur Ruimy, s'il vous plaît.
    Merci à tous de vos exposés.
    C'est une question dont on entend parler depuis longtemps. Lorsque je repense à ma longue carrière, je me rappelle de l'époque où je livrais de la pizza pour deux entreprises distinctes. Dans un cas, j'étais sur la liste de paie. Dans l'autre, je ne l'étais pas; j'étais considéré comme un sous-traitant.
    Je pense que ce que nous essayons de faire ici, c'est de commencer à définir ce que signifie un travail précaire. Dans le cas d'un chauffeur, l'entreprise a-t-elle décidé qu'il était dans son intérêt de le payer non pas comme employé régulier, mais simplement comme chauffeur? Ainsi, elle n'a pas à s'inquiéter de la masse salariale. Elle n'a pas à s'inquiéter des impôts. Elle n'a pas à s'inquiéter de plein d'autres choses. Quand je pense au travail précaire, c'est ce qui me vient à l'esprit. Combien de cas se sont produits, au point de faire évoluer la situation vers ce qu'elle est aujourd'hui, c'est-à-dire que si vous avez un ensemble d'outils, vous pouvez être considéré comme un entrepreneur? Faisons-nous cela pour échapper à nos responsabilités? Je comprends que les entreprises ont un rôle à jouer, mais nous devons aussi nous assurer, en tant que gouvernements, que nos politiques et nos lois viennent en aide à la population. Les deux aspects sont nécessaires. Si les gens ne paient pas d'impôt ou qu'ils ne sont pas couverts par l'assurance-emploi, par exemple, c'est un mauvais service à rendre à tous les Canadiens.
    Cela dit, j'ai quelques questions à poser. La première s'adresse à la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante.
    Je comprends pourquoi les gens veulent embaucher des entrepreneurs de l'extérieur, mais pourquoi ne pas assurer la formation à l'interne? À Toronto, à l'heure actuelle, nous avons un énorme problème parce que nous n'avons pas d'entrepreneurs en construction. Pourquoi ne pas créer un programme de formation interne plutôt que de toujours embaucher à l'extérieur?
    Je suis ravie que vous ayez posé cette question. Je peux vous dire que nous savons que les propriétaires de petites entreprises au Canada — il s'agit de données de 2014, alors c'est probablement encore plus maintenant — dépensent 9 milliards de dollars par année en formation informelle dans leur entreprise. Il ne s'agit donc pas nécessairement d'un manque de formation, mais plutôt du fait que la formation n'est pas reconnue par les gouvernements. Les entreprises ne reçoivent aucune compensation pour cela. Elles le font uniquement pour perfectionner leurs travailleurs ou attirer de nouveaux employés.
    Je pense que nous devons remettre en question ce mythe selon lequel le travail précaire est en hausse et que des personnes sont forcées de devenir des entrepreneurs indépendants. Ce n'est pas ce que nos données montrent. Ce n'est pas ce que les données de Statistique Canada montrent. Ce n'est pas ce que les sondages d'opinion ont démontré. Encore une fois, il n'est pas question des personnes qui veulent du travail et qui n'en trouvent pas et qui ont besoin de travailler. Ce n'est pas la même chose que les personnes qui choisissent ce genre de travail et qui veulent être là, cela satisfaisant toutes les parties.
(1220)
    Permettez-moi d'insister un peu sur cette question. Encore une fois, comme ce n'est pas encore tout à fait clair, nous ne savons pas exactement quels sont les chiffres. Nous ne comprenons pas très bien la situation. Il ne s'agit que d'un secteur. Le secteur d'Allyson en est un autre. Beaucoup de gens travaillent dans les chaînes de restaurants. Certains travaillent à temps partiel, d'autres non. Tant que nous n'aurons pas de définition claire, comment pouvons-nous réellement mesurer et prouver ce que vous dites? Je vais dire que même si vous dépensez 9 milliards de dollars, je me demande toujours pourquoi nous avons une telle pénurie de personnel.
    Monsieur Fong, dans vos études, voyez-vous une diminution de la sécurité d'emploi?
     J'aimerais mentionner les données que Monique a fournies et ajouter que les données agrégées ne le montrent pas nécessairement. Ce que je veux souligner, c'est que cela pourrait masquer certaines tendances sous-jacentes. J'ai déjà parlé des données sur le travail à temps partiel. La proportion de l'emploi à temps partiel n'a pas changé depuis 1993, soit presque 25 ans de stabilité. Mais dans ce contexte, nous pourrions assister à une transition vers un plus grand nombre de types de précarité dans les industries où les salaires sont plus bas ou celles où les gens ne sont pas nécessairement au courant de leurs heures de travail futures ou de quoi que ce soit d'autre.
    C'est là le véritable défi. Nous avons toutes ces petites informations. Il est certain que le Comité a déjà examiné un certain nombre de situations, tout comme les témoins. Nous en entendons parler et nous le voyons, alors comment pouvons-nous faire la part des choses? La première chose à faire, c'est de définir la notion et de commencer à recueillir des données pour que nous sachions vraiment ce qu'il en est.
    D'accord.
    Voyez-vous un lien quelconque entre la précarité de l'emploi et l'inconduite des employeurs?
    Il doit certainement y avoir de cela. Dans le cadre de la définition que nous proposons, nous voulons aussi commencer à recueillir des données à ce sujet. Une définition du travail précaire, quelle qu'elle soit, ne peut pas se limiter à une question d'argent. Il ne s'agit pas seulement d'un certain niveau de revenu, et de revenus instables, et puis c'est tout. Non, cela concerne aussi ce dont Katherine parlait au sujet de la sécurité. Cela a trait à la crainte de perdre son emploi ou de se retrouver dans la marge, et d'autres choses du genre. L'inconduite des employeurs doit absolument faire partie de la définition.
    D'accord.
    Monsieur Cardozo, une fois qu'une personne se trouve dans une situation précaire, pour quelque raison que ce soit, comme Allyson, comment peut-elle se sortir de cette situation?
    Soyez très bref, s'il vous plaît.
    Je suis désolé. Je n'ai pas toutes les réponses à cela.
    L'une des choses à faire, c'est certainement de former et de recycler les gens pour qu'ils puissent aller dans d'autres domaines. Cela dépend des autres facteurs en présence. Certains des facteurs mentionnés par Allyson Schmidt sont vraiment essentiels et ils sont très réels dans la mesure où si vous avez certaines obligations familiales qui ne vous permettent pas de vous inscrire à une nouvelle série de cours, vous ne pourrez pas le vérifier. Votre question est une question à un million de dollars, et la situation est très complexe. C'est une très bonne question que j'espère que vous allez poursuivre en ce sens parce que c'est la clé de ce problème.
    Monsieur le président, puis-je ajouter quelque chose?
    Il vous reste 10 secondes.
    Ce que je veux dire à ce sujet, c'est que nous ne pourrons peut-être jamais nous débarrasser de ce genre d'emplois. Nous aurons toujours besoin de gens pour travailler chez McDonald's ou Tim Hortons, alors il nous incombe, en tant que décideurs, de veiller à ce que les gens qui occupent ces emplois ne soient pas laissés à eux-mêmes.
    Monsieur Barlow, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins de leurs excellentes réponses et de leurs commentaires. Vous pouvez voir que le problème auquel nous sommes confrontés comporte beaucoup de nuances différentes, comme l'a dit M. Fong.
    Madame Moreau, j'aimerais vous poser quelques questions au sujet de l'une des diapositives que vous avez présentées concernant la transition. Vous avez parlé de la transition d'un emploi à temps partiel ou précaire à un emploi à temps plein. Les chiffres que vous mentionnez comprennent-ils les programmes d'apprentissage, les stages et ce genre de choses, que l'on pourrait généralement qualifier de situations précaires? Ces cas sont-ils inclus dans ces chiffres?
    Ils pourraient l'être, mais ils ne sont pas responsables de la majorité des chiffres. Compte tenu de la façon dont nos membres se répartissent dans l'économie, nous n'englobons pas autant de secteurs qui nécessitent des partenariats que d'autres, alors je pense que les chiffres seraient encore plus élevés.
(1225)
    C'est certain. En ce qui concerne les chiffres de l'assurance-emploi, on entend souvent dire que les soudeurs, les électriciens et les plombiers ne sont pas inclus dans ces chiffres parce qu'ils sont des entrepreneurs et des propriétaires d'entreprise. Cela semble bien fonctionner.
    Je serais vraiment curieux — et je sais que mon collègue M. Diotte a posé cette question d'entrée de jeu — de connaître la définition que donne la FCEI à l'emploi précaire, ou la direction que vous aimeriez nous voir prendre dans ce domaine.
     Encore une fois, je pense que nous avons eu de bonnes suggestions.
     Cela ne peut pas être seulement une question de revenu, de statut à temps partiel ou à temps plein ou de permanence. Je pense que l'intention des parties est un bon point de départ — ou un autre ingrédient à ajouter, si vous voulez. Qui sont les personnes à la recherche d'une relation de travail employeur-employé? Comme je l'ai dit, pour revenir à la diapositive 5, si vous voulez parler des travailleurs âgés qui sont à la retraite et qui profitent... J'ai eu la chance un jour d'avoir un chauffeur Uber dans une très belle voiture. C'est un amoureux des voitures qui est à la retraite et qui fait cela trois mois par année, et qui passe quatre autres mois en Floride. Il est ravi de sortir quelques heures par jour et de rencontrer des gens. Cela le fait sortir de chez lui tous les jours. Franchement, est-ce cette personne qui a une pension décente de l'État et un cadre de vie agréable que nous devons protéger, ou est-ce que ce sont les travailleurs à temps plein au salaire minimum qui ont besoin de protections différentes? Essayons-nous de protéger l'adolescent qui travaille à temps partiel et qui vit chez ses parents, et qui intègre la population active pour la première fois, ou l'étudiant qui essaie d'avoir deux emplois à temps partiel pour payer ses frais de scolarité?
    Voilà les contraintes auxquelles le Comité doit être sensible, à mon avis, et c'est encore une fois la raison pour laquelle nous essayons de détruire un mythe fondé sur des données probantes, si vous voulez, pour montrer qu'il n'y a pas de crise. Il n'y a pas eu d'augmentation de la précarité de l'emploi. Les données des 20 dernières années sont demeurées relativement stables. En ciblant un peu plus la solution, pouvons-nous dépenser les ressources limitées dont nous disposons pour aider les personnes qui en ont besoin?
    D'accord.
    Vous en avez parlé au début. Si je regarde votre graphique de la page 5, je suis d'accord pour dire qu'il n'y a pas de tendance lourde. Il se peut, comme l'a dit M. Fong, que nous ne comprenions pas encore les aspects sous-jacents.
    Je ne pense pas que lorsqu'Uber, Airbnb et ce genre d'entreprises ont vu le jour, elles étaient vraiment destinées à offrir des carrières ou des emplois à temps plein. Elles étaient censées fournir un revenu d'appoint, mais nous les avons vues commencer à évoluer vers des carrières à temps plein.
    Madame Morneau, vous avez parlé de certains règlements à cet égard. Pouvez-vous me dire rapidement quelques-unes des choses que vous aimeriez voir pour régler ce problème?
    Certainement.
    À notre avis, l'économie du partage et l'économie de la pige ont vu le jour à cause d'une trop grande réglementation. De nouveaux acteurs sont arrivés en disant: « Nous allons essayer cette façon de faire. » Ils évoluent dans un environnement qui échappe à la réglementation, et les gouvernements essaient de faire face à la situation. Nous pensons que la réponse se situe quelque part au milieu, pas du côté de la réglementation à outrance et, de toute évidence, pas en laissant ces acteurs perturber le marché de façon irresponsable.
    Encore une fois, il faut envisager une solution intermédiaire, une façon de s'assurer... À notre avis, le gouvernement devra faire face à la situation. Nous devons maintenant composer avec cette nouvelle économie. Au lieu d'essayer de tout réglementer, pouvons-nous nous assurer de ne pas nuire aux entreprises qui travaillent légitimement, de protéger leurs travailleurs et de bien les payer, et veiller à nous contenter de ce que nous considérons comme une plus petite part du gâteau?
    Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que nous sommes en mode rattrapage dans l'économie du partage. La croissance a été beaucoup plus rapide qu'on ne l'aurait cru. Tout commentaire que vous pourriez avoir à ce sujet, et peut-être une étude future, serait certainement les bienvenus.
    Allyson, vous n'avez pas eu l'occasion de répondre non plus. Très rapidement, quelle serait votre définition d'un emploi précaire?
    Je ne suis pas vraiment certaine, parce qu'en écoutant tout le monde et en voyant simplement... Prenons ma situation, par exemple. J'ai fait des études. J'ai travaillé. J'ai de l'expérience. Pourtant, pour une raison ou une autre, je ne peux pas accéder à un emploi permanent à temps plein. Les conséquences que cela a pour moi sont partagées par beaucoup d'autres personnes.
    J'ai une petite anecdote. J'ai entrepris des études de maîtrise. Mon superviseur de l'époque m'a dit qu'il ne servait à rien d'étudier parce que, statistiquement, en tant que mère célibataire, j'avais plus de chances de sortir de la pauvreté en me mariant qu'en poursuivant des études.
    C'est la réalité que je vis. Donc, quand tout le monde parle de statistiques... Je vis à Sault Ste. Marie. Je n'ai pas la possibilité de déménager à Toronto, à Ottawa ou dans un plus grand centre. Je vis dans une petite ville du nord de l'Ontario, et c'est là que je dois rester en raison de la nature de ma famille.
    Bien que le Canada ait beaucoup de possibilités, il y a des endroits au Canada où il n'y en a pas, et nous en souffrons. Nous voyons des gens perdre leur emploi et se trouver coincés; leur contrat arrive à échéance et ils n'en obtiennent pas d'autres, que ce soit dans le domaine des services sociaux, des contrats de courte durée ou des activités à base de financement.
    Je ne suis pas certaine, parce qu'il y a toutes ces choses qui se passent, mais cet environnement peut être très hostile.
(1230)
     Je vous remercie.
    Madame Sansoucy, vous avez trois minutes.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Ma question s'adresse à Mme Lippel et à M. Fong.
    Madame Lippel, vous avez expliqué comment la définition doit tenir compte du contexte.
    Monsieur Fong, dans votre document, vous parlez des conditions nécessaires à l'élaboration d'une bonne définition. Nous savons que l'Organisation internationale du travail, ou OIT, une agence tripartite qui réunit des représentants des gouvernements, des employeurs et des travailleurs, a une définition du travail précaire.
    La définition nationale normalisée de l'emploi précaire devrait-elle s'arrimer à celle de l'OIT? Si celle de l'OIT est perfectible, devrions-nous faire des démarches à partir de notre propre définition? Étant donné que de plus en plus d'entreprises sont transnationales, avons-nous avantage à fonctionner avec la même définition et à tirer profit des recherches qui se font ailleurs? Puisque le Canada est membre de l'OIT, devrions-nous repartir de sa définition, d'abord? Je voudrais connaître votre opinion à cet égard.
    Merci de la question.
    Le rapport auquel j'ai fait référence porte précisément sur la santé au travail. À mon avis, les conséquences néfastes du travail précaire ne devraient pas devenir la définition du travail précaire. Je trouve un peu préoccupant le fait de dire que, lorsqu’un employeur est abusif, c'est du travail précaire. Un emploi dans une multinationale syndiquée où il y a des abus ne devient pas pour autant du travail précaire.
    Alors, il faut éviter de définir le travail en tenant pour acquis qu'il s'agit de travail précaire si les choses vont mal et qu'il ne s'agit pas de travail précaire si les choses vont bien ou si les gens ne s'y opposent pas. Il faut vraiment être très précis dans ce que nous sommes en train de regarder.
    L'OIT parle des secteurs d'activité et des enjeux sur lesquels il faut se pencher. L'insécurité d'emploi est une chose qui se mesure. Il faut mesurer l'insécurité d'emploi, non pas mesurer la précarité. La précarité signifie la présence de 10, 15 ou 20 variables cumulées qui, en raison du contexte dans lequel on travaille, donnent une vie hypothéquée. Certaines études disent que la situation est aussi mauvaise à Toronto qu'à Sault Ste. Marie. Ce contexte doit être mis en valeur pour qu'on légifère. Alors, n'essayez pas de trouver une définition qui convient à toutes les situations. Il faut être précis dans vos objectifs.
    Je vous remercie.
    J'aimerais entendre votre réponse, monsieur Fong, si M. le président le permet.

[Traduction]

    C'est une excellente question. En tant qu'économiste, j'aimerais beaucoup avoir une définition comparable à l'échelle internationale, parce que cela me permettrait de voir comment le Canada se classe parmi les autres pays. Ce serait une très bonne chose.
    Je pense que le défi que pose l'harmonisation avec l'Organisation internationale du Travail, si je me souviens bien, c'est que la définition de l'OIT est délibérément assez large pour être gérable, je pense, mais si nous essayons d'avoir notre propre définition, en tenant compte de la santé et de la sécurité, des agences de placement temporaire et de toutes ces circonstances différentes auxquelles les Canadiens pourraient être confrontés, nous risquons que ces mêmes conditions ne soient pas présentes en Allemagne, ou qu'elles puissent être interprétées différemment, peut-être pas de façon aussi négative ou positive, peu importe.
    Bien que cela puisse être très important, je crains que la définition que nous adoptions pour les Canadiens ne se transpose pas aussi bien peut-être dans la culture d'autres pays, alors je pense que ce serait un défi. Je voudrais mentionner que même l'élaboration d'une définition harmonisée du chômage n'est pas nécessairement si facile à l'échelle internationale. J'aimerais que cela se fasse, mais je pense que ce serait très difficile.
(1235)

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Cela nous amène à la fin des deux séries de questions.
    Le député Morrissey m'a demandé s'il pouvait poser une autre question.
    Madame Sansoucy, voulez-vous vous aussi poser une autre question?
    D'accord. Peut-être cinq minutes, si vous voulez intervenir.
    Je vais commencer par Bobby.
    Ma question s'adresse à la fois à Mme Lippel et à M. Cardozo.
     Voyez-vous une différence entre un emploi précaire et un emploi secondaire?
    Répondez brièvement.
    Vous parlez de l'économie de la pige, où toute votre vie est faite d'emplois secondaires.
    Non. D'accord. Ce n'est pas cela que je voulais dire. Je parle d'un à-côté.
    D'accord. La précarité de l'emploi signifie que les gens n'ont pas d'autre choix que d'accumuler des contrats précaires, et c'est à ce niveau-là qu'il faut agir. Mais un emploi secondaire comme à-côté n'est pas plus sûr. C'est toujours un emploi précaire.
     Je suppose que je mettrais l'accent sur le mot « à-côté », parce que quelqu'un pourrait faire partie de l'économie de la pige en cumulant plusieurs petits emplois pour survivre. Si c'est un à-côté... Je crois que Monique Moreau a utilisé le terme « passion ». S'il s'agit d'une activité passionnante, de quelque chose qui vous allume et qui vous permet de faire de l'argent comme à-côté et non pas pour survivre, alors oui, il y a une différence.
    Vous ne voyez pas nécessairement les deux comme un tout. D'accord.
    Je crains de devoir vous interrompre.
     La sonnerie se fait entendre, et d'après ce que je comprends, elle ne durera que 15 minutes.
    Nous allons devoir nous arrêter ici.
    Je tiens à vous remercier tous de votre présence ici. Merci de nous avoir permis de partir du bon pied dans cette étude.
    Je dois malheureusement lever la séance.
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